diff options
| author | nfenwick <nfenwick@pglaf.org> | 2025-01-27 18:52:35 -0800 |
|---|---|---|
| committer | nfenwick <nfenwick@pglaf.org> | 2025-01-27 18:52:35 -0800 |
| commit | b209065ad8d6b4931087ba80c6a110b897e462e1 (patch) | |
| tree | 132af588a6f82681f1cfc45a4458d4ae6d165165 | |
| parent | 989cb281e2a2008ff816aead16895ca99694bbeb (diff) | |
| -rw-r--r-- | .gitattributes | 4 | ||||
| -rw-r--r-- | LICENSE.txt | 11 | ||||
| -rw-r--r-- | README.md | 2 | ||||
| -rw-r--r-- | old/60986-8.txt | 2295 | ||||
| -rw-r--r-- | old/60986-8.zip | bin | 42384 -> 0 bytes | |||
| -rw-r--r-- | old/60986-h.zip | bin | 97305 -> 0 bytes | |||
| -rw-r--r-- | old/60986-h/60986-h.htm | 2827 | ||||
| -rw-r--r-- | old/60986-h/images/cover.jpg | bin | 48531 -> 0 bytes |
8 files changed, 17 insertions, 5122 deletions
diff --git a/.gitattributes b/.gitattributes new file mode 100644 index 0000000..d7b82bc --- /dev/null +++ b/.gitattributes @@ -0,0 +1,4 @@ +*.txt text eol=lf +*.htm text eol=lf +*.html text eol=lf +*.md text eol=lf diff --git a/LICENSE.txt b/LICENSE.txt new file mode 100644 index 0000000..6312041 --- /dev/null +++ b/LICENSE.txt @@ -0,0 +1,11 @@ +This eBook, including all associated images, markup, improvements, +metadata, and any other content or labor, has been confirmed to be +in the PUBLIC DOMAIN IN THE UNITED STATES. + +Procedures for determining public domain status are described in +the "Copyright How-To" at https://www.gutenberg.org. + +No investigation has been made concerning possible copyrights in +jurisdictions other than the United States. Anyone seeking to utilize +this eBook outside of the United States should confirm copyright +status under the laws that apply to them. diff --git a/README.md b/README.md new file mode 100644 index 0000000..156957b --- /dev/null +++ b/README.md @@ -0,0 +1,2 @@ +Project Gutenberg (https://www.gutenberg.org) public repository for +eBook #60986 (https://www.gutenberg.org/ebooks/60986) diff --git a/old/60986-8.txt b/old/60986-8.txt deleted file mode 100644 index 7348deb..0000000 --- a/old/60986-8.txt +++ /dev/null @@ -1,2295 +0,0 @@ -The Project Gutenberg EBook of L'idée médicale dans les romans de Paul -Bourget, by Joseph Grasset - -This eBook is for the use of anyone anywhere in the United States and most -other parts of the world at no cost and with almost no restrictions -whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of -the Project Gutenberg License included with this eBook or online at -www.gutenberg.org. If you are not located in the United States, you'll have -to check the laws of the country where you are located before using this ebook. - -Title: L'idée médicale dans les romans de Paul Bourget - -Author: Joseph Grasset - -Release Date: December 21, 2019 [EBook #60986] - -Language: French - -Character set encoding: ISO-8859-1 - -*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK L'IDÉE MÉDICALE DANS LES *** - - - - -Produced by Clarity and the Online Distributed Proofreading -Team at http://www.pgdp.net (This file was produced from -images generously made available by The Internet -Archive/Canadian Libraries) - - - - - - - - - - Dr J. GRASSET - Professeur de clinique médicale - à l'Université de Montpellier - - _L'Idée Médicale_ - DANS LES - _Romans de Paul Bourget_ - - MONTPELLIER - COULET & FILS, ÉDITEURS - GRAND'RUE, 5 - - 1904 - - - - -A - -MONSIEUR PAUL BOURGET - -DE L'ACADÉMIE FRANÇAISE - - -_Je dédie cette Conférence, en témoignage de profond et reconnaissant -dévouement, comme Diomède offrit ses grossières armes d'airain en -échange des armes d'or finement ciselées de Glaucos._ - -J. G. - -Montpellier, janvier 1904. - - - - -L'IDÉE MÉDICALE - -DANS LES - -ROMANS DE PAUL BOURGET - - -MESDAMES, - -MESSIEURS, - -1. Etrange, à première vue, doit vous paraître le choix de Paul Bourget -pour étudier l'_idée médicale_ dans une grande oeuvre littéraire. - -Et, en effet, vous ne trouverez, dans cette oeuvre, ni des Romans -médicaux comme ceux d'André Couvreur, ni des critiques de médecins comme -celles de Léon Daudet, ni des thèses médicales comme chez Brieux ou chez -de Curel, ni des descriptions de maladie comme celles de Zola... - -Il faut la chercher, pour trouver l'idée médicale, dans les Romans de -Paul Bourget. Mais, en la cherchant, on la trouve (c'est du moins ce que -je voudrais vous prouver) et on la trouve _partout_ dans ses oeuvres, -comme ces solides assises de fer qu'on découvre dans une belle maison en -écartant les tentures et en grattant un peu les murailles. - -Vous comprendrez qu'un marchand de fer trouve quelque plaisir à chercher -et à montrer son métal professionnel à travers et derrière mille autres -choses agréables qui le masquent gentiment, tandis qu'il n'en trouverait -plus aucun à disserter sur l'ossature trop évidente et trop nue de la -tour Eiffel. - - * * * * * - -2. Pour retrouver ainsi l'idée médicale dans l'oeuvre de Paul Bourget, -il faut donner à ce mot _médical_ et au mot _médecin_, d'où il dérive, -son sens le plus large et d'ailleurs le seul vrai. - -Le médecin n'est pas, en effet (comme un vain peuple pense), un monsieur -qui échange des ordonnances contre des honoraires. Le médecin est un -homme qui étudie et doit connaître la _vie humaine_ dans tous les -détails de son évolution, à l'état de santé et à l'état de maladie. Car -nul ne peut réparer l'horloge détraquée, s'il n'en connaît à fond le -mécanisme intact dans son fonctionnement normal. - -Et le médecin doit connaître l'homme vivant dans son _unité totale_, -formée de l'union, souvent inextricable, du moral et du physique. Car, -même pour le spiritualiste le plus orthodoxe[1], le corps étant encore -l'outil indispensable de l'âme, tout se tient dans la vie de l'homme. - - [1] Ceci pour prévenir les accusations que pourraient faire naître - contre Paul Bourget, chez des superficiels, des passages comme - celui-ci: «L'évêque d'Orléans avait signalé à la défiance des pères - de famille le philosophe (Taine) coupable d'avoir écrit cette phrase - hardie: «... le vice et la vertu sont des produits comme le vitriol - et comme le sucre...», phrase plus paradoxale dans la forme que dans - le fond; car éclairez-la d'un petit mot; mettez des produits - _psychologiques_... et vous lui restituez son vrai sens». _Essais de - Psychologie contemporaine; M. Taine_ (1882), p. 152. - -Aveugle et impuissant serait le médecin qui méconnaîtrait ces -élémentaires principes. - -Le médecin est donc le _biologiste humain_ et, quand je parle d'étudier -l'_idée médicale_ dans l'oeuvre de Paul Bourget, c'est l'_idée -biologique_ que je voulais dire. - - * * * * * - -3. Ces principes posés, j'aborde la dissection biologique des Romans de -Paul Bourget en vous rappelant quelques-uns des _types de médecin_ qu'on -y rencontre. - -Ils ne sont pas très nombreux. Un critique[2] n'en a trouvé que trois -sur trois cent quatre-vingt-onze personnages mis en scène. On en -trouvera davantage si on tient compte des simples esquisses. En tous -cas, ils sont finement observés et joliment crayonnés. - - [2] JULES SAGERET.--Les grands convertis. Paul Bourget. _La Revue_, - 1er et 15 novembre 1903, p. 297. - -Voici d'abord un «praticien de quartier», le Dr Graux: «à côté des -professeurs justement illustres auxquels le temps manque et des -charlatans sans conscience que l'on doit supplier pour en obtenir des -consultations de cent francs», il est un de ces «modestes docteurs qui -tiennent le rôle, autrefois si fréquent, aujourd'hui si rare, du médecin -de famille, toujours à portée et cependant discret, et qui, connaissant -ses clients depuis des années, devenait naturellement leur ami et leur -conseiller»[3]. - - [3] _L'Etape_ (oct. 1901-mai 1902), p. 421.--Toutes les citations des - oeuvres de Paul Bourget sont faites sur l'édition in-8º pour les - Romans parus dans les sept premiers volumes des OEuvres complètes, - dans l'édition in-18 pour les suivants. - -Tout autre est le Dr Louvet[4], le médecin mondain avec son salon -d'attente, meublé «comme un musée, avec la prodigalité de bibelots -particulière aux installations modernes». Il appartient à «cette -génération de savants, hommes du monde, qui vont à l'hôpital le matin, -reçoivent leurs clients l'après-midi et trouvent le moyen d'avoir de -l'esprit, comme des oisifs, dans un salon, à dix heures du soir». Aussi, -«ont-ils l'intelligence de préparer aux longues attentes de leurs belles -malades un décor où elles retrouvent un peu de ce qu'elles ont laissé au -logis, une face des choses semblable à celle qui leur est coutumière», -tandis que, dans le cabinet du docteur, il n'y a que des livres, -«contraste habilement cherché par Louvet, metteur en scène aussi habile -qu'il était bon diagnosticien»; Louvet, «ce mince avec un air de mignon -de Henri III. Je l'appelle toujours Louvetsky, parce qu'il ne soigne que -des Russes»[5]. - - [4] _Un Crime d'amour_ (oct. 1885-janvier 1886), p. 208. - - [5] _Mensonges_ (février-octobre 1887), p. 38. - -Tout à côté, on peut placer le Dr Noirot, qui a été interne à Bicêtre, -«infiniment cynique et intelligent, méthodique et doucement implacable, -avec un air d'employé plutôt que de médecin... Matérialiste outrageux, -expliquant la sensibilité humaine par les plus dégradantes hypothèses, -Noirot donne l'exemple des vertus les plus délicates, cousues à l'âme la -plus gangrenée de négations. Avec cela, observateur très habile, mais -qui ne croit guère à la médecine, il s'est fait, depuis des années, une -spécialité du massage... et gagne soixante mille francs par an»[6]. - - [6] _Physiologie de l'Amour moderne_ (mai 1888-septembre 1889), p. 550 - et suivantes. - -Chaque matin, il masse soigneusement le baron Desforges, surveille son -hygiène quotidienne et ne lui permet que trois cigares par jour. «On -digère avec ses jambes», répète-t-il au baron; «le massage, c'est du -Liebig d'exercice»[7]. Ce Noirot assiste[8] «au souper triste» dans -lequel, chez Marguerite Percy, on devait manger du boudin blanc et rire -avec les camarades, et dans lequel il y a tant de «silences glacés» et -de «rires faux». A la sortie, il émet des théories bizarres sur la -nécessité de la grande vie pour la viveuse, comme la morphine et -l'alcool sont nécessaires à ceux qui s'y sont habitués, et raconte la -sauvage vengeance de Corsègues, qui brûle sa femme, en plein Paris, -comme au Malabar. C'est un grand «original», ce Noirot, «un médecin qui -n'a jamais voulu être décoré et qui n'essaie les remèdes nouveaux que -lorsqu'il en est sûr»[9]. - - [7] _La Duchesse bleue_ (déc. 1893-juin 1898), p. 445. - - [8] _Mensonges_, pp. 116, 251, 257. - - [9] _Physiologie de l'Amour moderne_, p. 487 à 504. - - * * * * * - -Je n'insiste pas sur quelques types secondaires, comme: le médecin qui, -ayant le génie de la statistique, s'applique, dans un hôpital de femmes, -à dresser la liste des déflorateurs[10];--le docteur Ch., qui dénonce si -justement le danger des vices de l'enfance[11];--Auguste Dupuy, ce -timide médecin de province, qui, abandonné par sa femme, la reprend -quand son amant l'a quittée, et élève avec tendresse l'enfant de -l'adultère[12];--le médecin de quartier qui entretient Madame Malvina -Raulet[13];--le médecin sans clients, qui est député et enlève à Poyanne -son siège de conseiller général[14];--le professeur Teresi et l'autre -médecin sicilien «recommandé par l'hôtelier»[15];--le médecin américain, -qui prescrit à son neurasthénique un voyage «aux îles du Pacifique: -quarante jours sans télégraphe et sans téléphone»[16];--le docteur Léon -Pacotte, qui enseigne et pratique si bien l'hygiène, a soixante-dix ans -et a enterré Dupuytren, Broussais et Orfila qui l'avaient condamné comme -phtisique, et dirige si intelligemment l'éducation et le redressement -moral des enfants[17];--le docteur berrichon, qui est le médecin de -George Sand, et son camarade, le docteur Le Prieux, qui, «dans le canton -de Chevagnes..., comptait autant de prétendus cousins, c'est-à-dire de -clients presque gratuits, que cette Sologne bourbonnaise compte de -hameaux»[18];--le pauvre médicastre de Noyelles, «si comiquement inquiet -sur l'avenir de sa plus fructueuse visite»[19]... - - [10] _Ibidem_, p. 337. - - [11] _Ibidem_, p. 362. - - [12] _Physiologie de l'Amour moderne_, p. 590. - - [13] _Mensonges_, p. 190. - - [14] _Un Coeur de femme_ (décembre 1889-juillet 1890), p. 378. - - [15] _La Terre promise_ (septembre 1891-avril 1892), p. 178 et 184. - - [16] _Voyageuses_ (juillet 1897); _Deux Ménages_, p. 87. - - [17] _Le Talisman_ (avril 1898), p. 283. - - [18] _Le Luxe des autres_ (décembre 1899-février 1900), p. 91 et 93. - - [19] _Un Cas de conscience_. The New-York Herald, édition européenne, - numéro de Noël, 20 décembre 1903, p. 19. - -Je signale le «profil perdu» de l'étudiante russe, Sofia, dont le -«projet était de retourner en Russie, de pratiquer sa science dans son -village et de contribuer à la propagande des idées occidentales parmi -les paysans..., inexplicable fille, qui parlait de l'amour, de la -maternité, de la mort, dans des termes d'un matérialisme scientifique et -à qui nulle bouche d'homme n'avait seulement baisé la main»[20]..., -«nihiliste, athée et vierge», comme l'étudiant d'Oxford[21]. - - [20] _Profils perdus_ (1880-1881); _Ancien Portrait_, p. 253 et 256. - - [21] _Ibidem_; _Autre Anglaise_, p. 274. - - * * * * * - -Eugène Corbières mérite aussi une mention spéciale par sa manière de -comprendre la médecine. - -Ce qui l'a décidé «à prendre cette voie, c'est le besoin de certitude». -Son esprit «a comme faim et soif de quelque chose de positif, -d'indiscutable. Les sciences naturelles donnent cela». Il lui a semblé -que «la médecine, comprise d'une façon un peu haute», est «parmi les -sciences naturelles la branche qui se prête à une application pratique -telle que cette application soit acceptable dans toutes les hypothèses» -philosophiques. Le médecin «est l'altruiste par excellence. Il est dans -le vrai quel que soit le postulat métaphysique auquel nous nous -rangions». Comme tout grand médecin, il a «une exceptionnelle capacité -d'affirmation personnelle, de décision immédiate, de parti pris -effectif». Ce métier comporte, «si l'on peut dire, un empoignement -direct de la réalité». Corbières permet de constater «cette vertu -presque militaire de la discipline médicale» et, un jour, «ses collègues -l'ont vu, avec une stupeur que les années n'ont pas dissipée, -brusquement, peu de temps après les trois morts survenues coup sur coup, -quitter sa place enviée de médecin des hôpitaux, sa magnifique clientèle -parisienne, la certitude de tous les honneurs, pour entrer dans la -congrégation des frères de Saint-Jean-de-Dieu, vouée, comme on sait, au -service des malades...»[22]. - - [22] _L'Echéance_ (décembre 1898), p. 9 à 11, 59 et 78. - -Tout récent[23] est le croquis de cet interne de Trousseau, le héros de -cette tragédie de scrupule, qui formule et applique si bien ce grand -principe de déontologie: «pour un médecin, le grand devoir, et qui prime -tous les autres, c'est le service du malade. Le médecin ne doit -connaître que cela, ne voir que cela». Il ne doit jamais céder «à la -tentation d'interposer son rôle au chevet du patient». Il doit n'avoir -jamais d'autre mesure de ses actes «que la lutte avec la maladie, quel -que fût le malade et sans aucun souci des conséquences». - - [23] _Un Cas de conscience_, p. 19. - - * * * * * - -Je termine par le spécialiste du système nerveux que Paul Bourget -symbolise dans le professeur Salvan et l'étudiant Bobetière. - -«Conservé par une existence continûment active et ascétique..., mince et -robuste, avec une tête petite, dont le masque saisissant et glabre -rappelait la face napoléonienne de son maître Charcot...», Salvan -associe, «comme jadis Trousseau, un beau talent d'écrire aux plus -solides qualités de clinicien et d'anatomiste. Plus fameux que connu, -ses immenses travaux l'ont toujours éloigné des salons... Ce manieur de -misères humaines» est un «sensible, malgré des allures volontiers -brusques qu'explique son métier de neurologue...»[24]. - - [24] _L'Eau profonde_ (décembre 1902), p. 74, 138, 141. - -A propos de Bobetière qui veut aussi se spécialiser dans l'étude des -maladies nerveuses, Paul Bourget dit: «s'il est un ordre de -connaissances qui doive ramener un esprit à la vérité sociale, il semble -bien que ce soit celui-là, qui nous fait toucher du doigt la fragilité -de la pensée, l'équilibre instable de la volonté, l'irrésistible et -constante pesée sur nous des influences héréditaires. Le problème de la -politique consistant à faire vivre ensemble des hommes, il se ramène ou -devrait se ramener, pour un neurologue, à l'art de diriger vers le bien -commun et de neutraliser pour le moindre mal une majorité d'impulsifs, -de dégénérés et de candidats à la manie»[25]. - - [25] _L'Etape_, p. 148. - -Vous voyez que Paul Bourget comprend le médecin et son rôle par le grand -côté[26]; il proclame les relations de l'idée médicale avec les -problèmes qu'il discute dans ses Romans. - - [26] «Il en est du vrai prêtre comme du vrai médecin. L'un et l'autre, - devant un malade ou de corps ou d'âme, abolissent en eux d'instinct - tout ce qui n'est pas leur fonction». (_Une Confession_, janvier - 1897, p. 227). - - * * * * * - -4. Aussi aime-t-il les médecins et les biologistes; et il ne s'en cache -pas. Il les cite, emploie leur langage, leur emprunte des comparaisons. - -Il intitule _Physiologie_ sa belle étude de l'Amour moderne et c'est de -la définition du Dictionnaire de médecine de Nysten que part Claude -Larcher pour déduire ses axiomes si curieux[27]. - - [27] _Physiologie de l'Amour moderne_, p. 327. - -Il cite volontiers Claude Bernard, Pasteur, Jules Soury, Magendie, -Flourens, Beaunis, Dieulafoy, Legrand du Saulle, Brière de Boismont..., -dédie _Un coeur de femme_ à Albert Robin... - -C'est à un confrère[28] qu'il emprunte cette fière devise: «où -descendrions-nous sans la noble douleur?». - - [28] _L'Etape_, p. 422. - -Exposant la théorie du Roman d'analyse[29], il «assimile le moraliste au -clinicien» et montre que, dans la littérature supérieure, comme en -médecine, il faut d'abord faire de l'anatomie et de la physiologie -(analyse) avant le diagnostic (synthèse) et avant la thérapeutique -(applications). - - [29] _OEuvres complètes; Romans_, t. I (septembre 1900), p. VIII. - -René Vincy se sait «atteint» de «romantisme analytique» et développe son -mal «comme un médecin qui cultiverait sa maladie par amour d'un beau -_cas_». «Ce que Claude Bernard faisait avec ses chiens, ce que Pasteur -fait avec ses lapins», il le fait avec son coeur et lui injecte «tous -les virus de l'âme humaine»[30]. - - [30] _Mensonges_, p. 75, 300. - -Dans un grand nombre de passages, Paul Bourget compare les maladies de -l'âme à celles du corps, décrit «leurs heures de convalescence[31], -leurs crises, leur thérapeutique...»[32]. - - [31] _Une Idylle tragique_ (avril 1895-février 1896), p. 311. - - [32] _Physiologie de l'Amour moderne_, p. 548. Titre du chapitre: - _Thérapeutique de l'amour_.--«La psychologie est à l'éthique ce que - l'anatomie est à la thérapeutique». (_Essais de Psychologie - contemporaine_, Préface de 1899, p. X). - -Il décrit souvent, et fort exactement, des types pathologiques[33] et -conclut: «notre être moral subit les mêmes lois que notre être -physique»[34]. - - [33] Voir notamment des passages: sur les névroses (_Un Crime - d'amour_, p. 247 et suiv.; _Physiologie de l'Amour moderne_, p. 332, - 442 et 443; _L'Etape_, p. 336; _Une Idylle tragique_, p. 298); sur - la neurasthénie (_nervous exhaustion_) d'un Américain: «la rançon - d'une existence de _hard work_ à tuer un Européen en quelques mois» - (_Voyageuses_; _Deux ménages_, p. 63); sur une tuberculeuse (_La - Terre promise_, p. 102); sur un cardiaque (_Un Homme d'affaires_, - octobre 1900, p. 29); sur l'hygiène du viveur Casal (_Un Coeur de - femme_, p. 359); sur l'artériosclérose (_Mensonges_, p. 21); sur un - cas d'aphasie avec hémiplégie droite et les traits tirés à gauche - (_André Cornelis_, avril-novembre 1886, p. 352); sur la télépathie - (_Nouveaux Pastels_. _Dix portraits d'homme_, 1890; _Autre joueur_, - p. 344); sur le spiritisme (_Mensonges_, p. 37); sur le rêve (_La - Duchesse bleue_, p. 542; _Un Coeur de femme_, p. 315); sur les - avariés scrofuleux (_La Duchesse bleue_, p. 372; _Physiologie de - l'Amour moderne_, p. 366 et 531: le «mal dont Voltaire accuse si - plaisamment Christophe Colomb»); sur les fous (_Ibidem_, p. 522, - LXXVI); sur les rapports de l'estomac et du système nerveux - (_Ibidem_, p. 554)... Dans l'_Echéance_ (p. 43), il y a une - excellente description de l'alcoolique, de sa «loquacité... si - douloureuse à suivre, tant on la sent morbide, qui tour à tour - précipite ou cherche les mots», qui est «la première forme de ce qui - sera, dans trois mois, dans huit jours, demain, le délire expansif - avec le dérèglement de sa gloriole et de ses vantardises»... et de - ces «hésitations dans l'attaque des mots qui révèlent l'aphasie - latente»,--dans _Un Cas de conscience_ (p. 20), la description du - mal de Bright, de l'urémie convulsive et de leur traitement..... - - [34] _Deuxième Amour_ (octobre-novembre 1883), p. 139. - -Les analogies de la physiologie et de la psychologie sont indiscutables; -comme dit Taine, «la littérature est une Psychologie vivante»[35]. Donc, -rien de plus intimement lié que le Roman et la Biologie. - - [35] _Essais de Psychologie contemporaine_, p. X. - - * * * * * - -Voilà l'opinion de Paul Bourget sur la _personne_, la _langue_ et la -_méthode_ des médecins et des biologistes. Cela nous fait prévoir son -opinion sur leurs _doctrines_. - - * * * * * - -5. Au fond, pour le biologiste, la vie d'un homme, à un moment donné de -son existence, est résultante de quatre facteurs: l'_hérédité_, le -_milieu_, le _passé individuel_ et l'_élément personnel_ (ce dernier -facteur étant difficile à analyser scientifiquement, mais indiscutable -dans son existence). - -Je crois qu'il va être facile de vous montrer le compte que tient Paul -Bourget de ces quatre facteurs dans la composition de ses personnages. - - * * * * * - -6. Les Romans de Paul Bourget sont d'abord dominés, d'un bout à l'autre, -par l'idée de l'_hérédité_, morale et physique; les deux parties de -l'hérédité pouvant s'associer (le plus souvent) ou se dissocier suivant -les cas; «cette dure loi de l'hérédité qui veut que nos tares physiques -se retrouvent chez nos enfants et non moins sûrement nos tares -sentimentales»[36]. - - [36] _Sauvetage_ (octobre 1897), p. 336. - - * * * * * - -Si Francis Nayrac ne peut pas atteindre _la Terre promise_, c'est à -cause de cette hérédité _physique_ qui lui fait reconnaître sa fille. -Les anciens romanciers auraient parlé de la voix du sang. Ici la base de -la reconnaissance est toute biologique et Francis «voit son sang», -tandis que sa fille est attirée, non vers ce père qu'elle ne reconnaît -pas, mais vers la fiancée de son père, la rivale de sa mère[37]. Toute -la complication psychologique est ainsi à base biologique. - - [37] _La Terre promise_, p. 90, 131. - -C'est encore la ressemblance physique qui fait connaître le père de -Noémie Hurtrel[38]. Une grande partie des tortures que subit Bassigny -vient de la ressemblance physique entre sa fille naturelle qui ne le -connaît pas et sa fille légitime qu'il a perdue[39]. Pierre Fauchery -retrouve dans «une enfant de vingt ans, le portrait, l'hallucinant -portrait de celle qu'il a voulu épouser trente ans auparavant»[40]. - - [38] _L'Irréparable_ (mai-juin 1883). - - [39] _Sauvetage_. - - [40] _L'Age de l'Amour_ (novembre 1896), p. 108. - -Les Le Prieux, chez lesquels se passe un de ces _Drames de famille_ qui -sont si puissamment fouillés, sont tous dominés par l'hérédité physique. -Le _père_, «avec sa tête plus large que longue, sa face presque plate et -que termine un menton rond, avec ses cheveux lisses et qui restent -châtains dans leur grisonnement, ses yeux bruns, son cou puissant, ses -épaules horizontales, son torse épais, sa taille courte, toute sa -personne ramassée et trapue, présente un type accompli de ce paysan -celte, qui occupait cette partie de la France à l'époque où César y -parut».--La _mère_ «gardait cet admirable type méridional, qui prend, -lorsqu'il est très pur, des finesses et des élégances de médaille -grecque...; son front, petit et rond, se rattachait à son nez par -cette ligne presque droite qui a tant de noblesse, et sa petite tête -laissait deviner, sous d'épais cheveux noirs, cette construction d'un -ovale allongé, où se perpétue la race de cet _homo mediterraneus_, -de ce souple et fin dolichocéphale brun, louangé par les -anthropologistes...».--«Jamais le mélange de deux sangs ne fut plus -visible» que chez la fille...[41]. - - [41] _Le Luxe des autres_, p. 89, 99, 118. - - * * * * * - -Et cette hérédité physique se prolonge et s'accumule comme chez cette -«vieille lady en bonnet», qui a «des joues où il tient quatre -générations de buveurs de porto»[42]. - - [42] _La Terre promise_, p. 130. - -C'est encore l'hérédité physique qui donne ses «pieds larges» et ses -«mains velues» à ce «butor riche» d'Albert Duvernay qui a été trop -évidemment fabriqué «avec de l'épaisse étoffe humaine»[43]. - - [43] _Le Fantôme_ (mars 1900-janvier 1901), p. 23 et 24. - -C'est «avec notre sang et nos nerfs que nous avons un certain courage, -autant dire avec notre hérédité»[44]. - - [44] _Un Homme d'affaires_, p. 50. - -Chez Firmin Nortier, l'hérédité rurale se révèle par «la carrure des -épaules hautes, la charpente lourde des gros os, la forte pesée du pied -sur le sol»[45].--Alfred Chazel était «un fils du peuple, et, malgré -l'affinement intellectuel de deux générations, l'origine paysanne -reparaissait en lui à des gaucheries de gestes et d'attitude»[46].--Chez -la baronne Ely, «cette hérédité avait pu seule pétrir le masque, -magnifique à la fois et si fin, auquel une blancheur mate et chaude -achevait de donner un vague reflet oriental»[47]. - - [45] _Un Homme d'affaires_, p. 7. - - [46] _Un Crime d'Amour_, p. 172. - - [47] _Une Idylle tragique_, p. 32. - -Odile[48] est l'histoire dramatique du suicide héréditaire avec -l'admirable description de la tentation de la mort et de l'effroi -qu'elle cause à ces malheureux névrosés. - - [48] _Voyageuses_; _Odile_, p. 203 à 248. - - * * * * * - -L'âge modifie les signes de cette hérédité physique. C'est ce que l'on -voit chez Madame Castel à qui sa fille ressemble au point d'infliger une -sorte de mélancolie à leurs amis. «D'une génération à l'autre, il y a eu -comme une marche en avant du tempérament commun. La qualité dominante de -la physionomie est devenue plus dominante, symbole visible d'un -développement du caractère produit par l'hérédité. Trop fin déjà, le -visage s'est affiné davantage; sensuel, il s'est matérialisé; -volontaire, il s'est durci et séché. A l'époque où la vie a fait toute -son oeuvre, lorsque la mère a passé la soixantième année, la fille la -quarantième, cette gradation dans les ressemblances devient comme -palpable au contemplateur... l'aperception des fatalités du sang devient -si lucide alors, que parfois elle tourne à l'angoisse»[49]. - - [49] _Cruelle énigme_ (juillet-septembre 1884), p. 5. Voir aussi p. - 20, 21, 22 et 83. - -N'était la perfection du style, qui ne s'observe guère chez nous, ne -diriez-vous pas ces lignes écrites par un biologiste? - - * * * * * - -L'hérédité purement _morale_ éclate cruellement chez ce fils d'un -aigrefin et d'une sainte, qui reproduit tous les vices du père et dont -Claude Larcher raconte la douloureuse histoire[50]. - - [50] _Physiologie de l'Amour moderne_, p. 541. - -«L'hérédité apparaît aussi comme un puissant modificateur de cet -instinct (sexuel). Entre la fille d'un père chaste et celle d'un père -qui a vécu, entre le fils d'une honnête femme et le fils d'une femme -galante, il y a la même différence qu'entre les enfants d'un goutteux et -ceux d'un phtisique»[51]. - - [51] _Physiologie de l'Amour moderne_, p. 359. - -Et le philosophe Victor Ferrand le proclame: «qu'il y ait un atavisme -moral, comme il y a un atavisme physique, une hérédité en retour des -idées et des sentiments de nos aïeux, c'est un fait indiscutable»[52], à -l'appui duquel je pourrais encore citer ce fils de voleur qui révèle son -vrai père en allant, la nuit, dérober des bonbons à l'arbre de Noël du -lendemain[53]. - - [52] _L'Etape_, p. 25. - - [53] _Le vrai Père_ (décembre 1894). - - * * * * * - -Le plus souvent l'hérédité n'est pas aussi dissociée et porte à la fois -sur le physique et sur le moral. L'exemple le plus fouillé est -certainement celui des Monneron. - -Joseph Monneron, l'universitaire, «déclassé par en haut, grâce aux -concours», est fils d'un cultivateur de Quintenas; sa femme a une mère -indolente et un père équivoque, «rentier interlope de Nice, mi-courtier, -mi-contrebandier». De là dérivent: l'hypocrisie et la vulgarité -d'Antoine, l'ignoble tenue et la flétrissure précoce de Gaspard, -l'incertitude et la morbidité de Jean, la sensibilité déréglée de -Julie[54]. - - [54] _L'Etape_, p. 9, 63, 117, 215, 303. - - * * * * * - -Ainsi les hérédités se superposent et, formant un tout complexe, -aboutissent à des produits divers, d'apparence contradictoire. Dans _le -Fantôme_, l'hérédité paysanne tourne en rudesse chez Albert Duvernay et -en bonhomie chez sa soeur. - -De même, «l'atavisme de la servitude a ces deux effets qui ne sont -contradictoires qu'en apparence: il produit des capacités insondables de -sacrifice ou de perfidie. L'une et l'autre de ces dispositions morales -se trouvaient incarnées dans le frère et dans la soeur. Ils s'étaient, -comme il arrive quelquefois, distribué le double caractère de leur race: -l'un en avait hérité toute la vertu d'immolation, l'autre toute la -puissance d'hypocrisie»[55]. - - [55] _Cosmopolis_ (mai-octobre 1892), p. 418. - - * * * * * - -Et, dans cette hérédité, pèsent naturellement les erreurs et les vices -des ancêtres. Comme dit la Bible, «les fils seront punis pour les péchés -des pères»[56]. - - [56] _Cosmopolis_, p. 572. - -On comprend maintenant que le _Disciple_ commence sa confession à son -Maître, après son crime, par une longue analyse de ses hérédités[57], et -que Paul Bourget conclue de toutes ses études: «On n'échappe pas à ses -hérédités. On les subit, quoiqu'on en ait, par toutes les fibres dont on -est tissé»[58]. - - [57] _Le Disciple_ (septembre 1888-mai 1889), p. 65. - - [58] _L'Etape_, p. 297. - - * * * * * - -Mais le biologiste ne doit pas uniquement constater les résultats bruts -de l'hérédité; il doit étudier cette hérédité, dans son évolution, dans -sa vie, dans la suite de ses transformations. Car, en passant d'une -génération à l'autre, l'hérédité rencontre des agents modificateurs, -comme le croisement et le milieu. Le biologiste doit analyser les _lois_ -de ces modifications que le temps apporte dans l'hérédité. - - * * * * * - -Une de ces lois qui a le plus frappé Paul Bourget est certainement -celle-ci: pour favoriser l'amélioration et le perfectionnement de -l'espèce, les transformations par l'hérédité doivent se faire lentement -et progressivement; si on veut brûler les étapes, on n'a plus de -progrès: l'individu régresse au contraire, soit au physique, soit au -moral. - -C'est ainsi que chez Joseph Monneron «le paysan est trop près», et Jean -peut dire à son père: «on ne change pas de milieu et de classe sans que -des troubles profonds se manifestent dans tout l'être, et nous avons -changé de milieu et de classe, c'est un fait, puisque le grand-père -Monneron est mort un paysan et que tu en as été un jusqu'à ta dixième -année». - -La grande culture a été donnée trop vite à son père. La durée lui -«manque, et cette maturation antérieure de la race, sans laquelle le -transfert de classe est trop dangereux». C'est pour cela qu'il paie la -rançon de ce que Paul Bourget «appelle l'Erreur française, et qui n'est -au fond, tout au fond, que cela: une méconnaissance des lois -essentielles de la famille».[59] - - [59] _L'Etape_, p. 44, 51, 458. - -Vous voyez comme notre romancier tire des lois biologiques les lois -sociales auxquelles il tient le plus. Nous comprendrons mieux cela quand -nous aurons parlé des autres facteurs de la vie humaine et spécialement -du milieu, sur lequel nous avons déjà empiété. - - * * * * * - -7. Le _milieu_, en Biologie humaine, est extrêmement complexe et il se -complique d'autant plus que l'individu est plus cultivé et plus élevé. - -Dans ce milieu, il faut nommer d'abord et surtout la _famille_, qui est -la première éducatrice[60], le _pays_ qui comprend la patrie et le petit -pays (la province, la ville que l'on habite), les _maîtres_ (maîtres de -l'instruction et maîtres de l'éducation), la _classe_ de la société dans -laquelle on vit, et aussi d'une manière plus générale les -_contemporains_ (artistes, littérateurs, hommes politiques, collègues de -la profession)...[61]. - - [60] «Quand une femme se donne à un homme, ce dernier, s'il était - poli, enverrait ses cartes au père et à la mère de sa nouvelle - maîtresse, en écrivant au-dessous de son nom, comme il sied: avec - mille remerciements. Quatre-vingt-dix fois sur cent il la leur - doit». (_Physiologie de l'Amour moderne_, p. 382). - - [61] Chez Poyanne, l'influence du milieu professionnel, du métier, - reprend ses droits dans les heures de crise. (_Un Coeur de femme_, - p. 382). - -Les noms seuls que je viens de prononcer vous rappellent immédiatement -une série de passages dans lesquels Paul Bourget proclame l'influence du -milieu sur la vie humaine. - - * * * * * - -«Notre destinée n'est, du petit au grand, que notre caractère projeté au -dehors, et ce caractère lui-même n'est, en dernière analyse, qu'une -résultante des vastes faits généraux qui ont gouverné le développement -de notre individualité: notre patrie, le moment de son histoire, ses -moeurs, les idées qui flottent dans son air»[62]; et, immédiatement -après ses hérédités, le _Disciple_ analyse son _milieu d'idées_[63]. - - [62] _L'Etape_, p. 67. - - [63] _Le Disciple_, p. 83. - -Dans la magnifique Etude qu'il a consacrée à son maître Taine[64], Paul -Bourget analyse avec le plus grand soin son milieu. «Tout système se -rattache en effet par le plus étroit lien aux autres productions de -l'époque dans laquelle il a paru». On ne peut même pas s'empêcher de -penser que, quoiqu'ils ne soient pas contemporains, Paul Bourget a un -peu décrit, dans cette Etude, le milieu dans lequel il s'est formé -lui-même (à condition d'ajouter Taine aux maîtres éducateurs), milieu -que caractérisent surtout l'influence des progrès des sciences, -l'envahissement des méthodes scientifiques et l'amour des _faits_. - - [64] _Essais de Psychologie contemporaine_; _M. Taine_, p. 164, 169. - -Dans cette même Etude, Paul Bourget écrit sur «l'illustre et infortuné -Spinoza»: «si le pauvre petit juif, poitrinaire et ombrageux, n'avait -pas été maudit par ses frères en religion, persécuté par sa famille, -dédaigné par la jeune fille qu'il devait épouser, s'il n'avait senti, -dès son adolescence, la table de fer de la réalité peser sur sa personne -et la meurtrir, certes il n'aurait pas écrit avec une soif si évidente -d'abdication, avec une telle horreur des vains désirs, les terribles -phrases où se complaît son stoïcisme intellectuel: «ni dans sa façon -d'exister, ni dans sa façon d'agir, la nature n'a de principe d'où elle -parte ou de but auquel elle tende»; et cette autre qui, rapprochée du -consolant _Pater noster qui es in cælis_ de l'Evangile, prend toute sa -force de cruel fatalisme: «celui qui aime Dieu ne peut pas faire -d'effort afin que Dieu l'aime en retour»[65]. - - [65] _Essais de Psychologie contemporaine_; _M. Taine_, p. 166. - -Ce milieu a lui-même une hérédité, il est fait des influences -antérieures. A travers les deux volumes d'_Etudes psychologiques_ -«circule» cette thèse «que les états de l'âme particuliers à une -génération nouvelle étaient enveloppés en germe dans les théories et les -rêves de la génération précédente». - - * * * * * - -Comme pour l'hérédité, le biologiste étudie et détermine les conditions -dans lesquelles cette influence du milieu est bonne et salutaire pour le -développement et l'expansion de la vie humaine. Une de ces conditions a -particulièrement frappé Paul Bourget, c'est la _continuité_ et l'_unité_ -d'action de ce milieu. Il faut donc, pour favoriser le progrès -biologique, que l'être vivant ne change pas trop souvent ni trop -brusquement de milieu: dans ce dernier cas, il se développe des -désharmonies et des contradictions qui sont des éléments de diminution -dans la vie. - -En transportant cette loi biologique dans la sociologie, on en déduit -que la grande condition du progrès pour une société d'hommes est de -constituer fortement une _nation_ et une _race_, tandis que le -_déracinement_ et le _cosmopolitisme_ facilitent la régression et la -décadence. - -«Les races perdent beaucoup plus qu'elles ne gagnent à quitter le coin -de terre où elles ont grandi. Ce que nous pouvons appeler proprement une -famille, au vieux et beau sens du mot, a toujours été constitué, au -moins dans notre Occident, par une longue vie héréditaire sur un même -point du sol. Pour que la plante humaine croisse solide, et capable de -porter des rejetons plus solides encore, il est nécessaire qu'elle -absorbe en elle, par un travail puissant, quotidien et obscur, la sève -physique et morale d'un endroit unique[66]». Et Paul Bourget évoque le -souvenir (rappelé par Maurice Barrès dans les _Déracinés_) de Taine -aimant à se diriger vers un arbre adolescent et vigoureux du square des -Invalides, en disant: «allons voir cet être bien portant»[67]. - - [66] _Essais de Psychologie contemporaine_; _Stendhal_ (1882), p. 241. - - [67] _Ibidem_; _M. Taine_. Appendice G, p. 202. - -L'_Etape_ montre l'importance sociale qu'a «l'âge de la race»[68]; le -_Disciple_ montre les terribles effets d'un brusque changement de -milieu[69]; l'idée de _Cosmopolis_ est la permanence de la race -ballottée dans les milieux les plus variés et les plus hétérogènes[70]; -dans _Fausse manoeuvre_, c'est la désharmonie et les contradictions du -terrien déraciné de sa province et vivant à Paris[71]; dans le _Portrait -du doge_, c'est le choc de deux races dans cette belle scène où se -heurtent et pensent si différemment le noble Français et l'Américain -riche...[72]. - - [68] _L'Etape_, p. 105. - - [69] _Le Disciple_, p. 108. - - [70] Le baron Hafner est le type du cosmopolite qui traverse une série - de milieux. - - [71] _Fausse manoeuvre_ (mai 1903), p. 343. - - [72] _Le Portrait du doge_ (décembre 1897), p. 265. - -Toute cette doctrine de l'utilité de la permanence et de la durée du -milieu est symbolisée dans ce passage du _Timée_ que Jean Monneron -évoque dans ses pénibles méditations[73]: «Alors, dans ce temple de -Saïs, entouré par le Nil, un des plus avancés en âge parmi les prêtres -dit au voyageur: O Solon, vous autres Grecs, vous serez toujours des -enfants et il n'y a pas un Grec digne du beau nom de vieillard.--Et -Solon demanda: Que veux-tu dire?--Que vous êtes très jeunes quant à vos -âmes, répondit le prêtre. Vous n'y possédez aucune vieille doctrine, -transmise par les aïeux, aucun enseignement donné de siècle en siècle -par des têtes blanchies...». - - [73] _L'Etape_, p. 306. - -Pour faire une forte race, une grande nation, il faut ne pas mériter le -reproche de Platon; il faut avoir l'unité, la durée, la permanence du -milieu. - -Il faut beaucoup d'hommes _encadrés_ et _racinés_. Le milieu n'est pas -un décor inerte; c'est un cadre qui vit et qui intervient dans la -facture du tableau. - -Voilà une autre des grandes lois sociologiques de Paul Bourget qui a, -elle aussi, une base absolument biologique. - - * * * * * - -8. L'hérédité et le milieu ne sont pas les seuls facteurs de -l'individualité humaine. A chaque moment de son existence, cette -individualité dépend encore des _antécédents_ du sujet, des moments -antérieurs de sa vie personnelle. - -Le mot de Goethe «le présent a tous les droits» n'est pas absolu. Le -passé intervient constamment dans notre vie actuelle. Et Paul Bourget -symbolise cette loi biologique dans cette jolie légende de l'âme du -purgatoire qui ne pourra «entrer au ciel qu'après être revenue sur la -terre à tous les endroits où, vivante, ses pas s'étaient posés, afin -d'effacer toutes les traces de ses démarches coupables, afin de -recueillir tous les vestiges de ses actions vertueuses». - -Nous sommes ainsi forcés «de remettre sans cesse nos pas dans nos pas, -et il nous faut retrouver, aux détours désappris de nos anciens chemins, -le fantôme de l'homme que nous fûmes un jour!»[74]. - - [74] _Les Pas dans les pas_ (décembre 1902), p. 203. - - * * * * * - -A l'appui de cette loi de Biologie physicomorale nous n'avons pas -seulement les six tragédies morales qui forment le Recueil «les Pas dans -les pas» pour établir que «tout se paie» dans le corps et dans l'esprit. -Nous retrouvons l'application et la démonstration de ce principe dans -une série d'autres romans. - -Les dix histoires de _Recommencements_ sont «toutes un commentaire -d'après nature d'une même vérité, formulée par le philosophe: _la vie -est une grande recommenceuse_»[75]. - - [75] _Recommencements_. Dédicace à Charles de Pomairols (14 janvier - 1897), p. 1. - -L'_Echéance_, toute entière, n'est que l'illustration de cet «étrange -dicton où les Italiens... ont résumé, avec leur vive imagination, le -retour de la faute sur celui qui l'a commise: _la saetta gira, gira_, -disent-ils, la flèche tourne, _torna adosso a chi la tira_ et elle -retombe sur qui la tire». Et ainsi on voit «combien est exact le _Tout -se paie_ de Napoléon à Sainte-Hélène, par quels détours le châtiment -poursuit et rejoint la faute et que le hasard n'est le plus souvent -qu'une forme inattendue de l'expiation»[76]. - - [76] _L'Echéance_, p. 25 et 6. - -L'idée mère d'_André Cornelis_ repose sur le crime commis par le -mystérieux Crawford (est-ce là ou dans _Neptunevale_[77] que madame -Humbert a pris le nom de son mystérieux millionnaire?) et l'influence -que ce crime exerce sur l'assassin et sur le fils de la victime: c'est -l'analyse psychologique de la logique implacable des choses. - - [77] _Voyageuses_; _Neptunevale_, p. 87 à 160. - -Une des bases d'_Une Idylle tragique_ est certainement ce passé de la -baronne Ely, qui se dresse à tout instant et lui fait dire: -«Hautefeuille et moi nous nous aimons avec un fantôme entre nous, qu'il -ne voit pas, mais que je vois si bien»[78]. Et plus tard, quand Olivier -du Prat a été tué, «un mort est entre ces deux vivants, qui, jamais, -jamais, ne s'en ira», comme entre les héros du _Roman comique_ d'Anatole -France. - - [78] _Une Idylle tragique_, p. 137. - -Dans le Roman qui porte ce nom même, _le Fantôme_ de la mère -antérieurement aimée se dresse constamment devant Etienne Malclerc et, -quand il a épousé la fille, lui donne la sensation de l'inceste. - -Francis Nayrac, de _la Terre promise_, est écrasé par «son impuissance à -s'échapper de ce passé qui refluait sur lui toujours, comme la marée -reflue sur le malheureux qu'elle a une fois surpris, le renversant d'un -coup de lame lorsqu'il se relève, l'enveloppant de houle quand il court, -l'aveuglant d'écume quand il cherche un rocher où s'appuyer, -l'assourdissant de clameurs quand il appelle». Et, vaincu, il s'écrie: -«c'est donc vrai que l'on ne refait pas sa vie? c'est donc vrai que -notre passé nous poursuit sans cesse dans notre avenir?»[79]. - - [79] _La Terre promise_, p. 197, 252. - -C'est ce même passé, mais plus aimable, que René Vincy évoque et -objective dans cette chanson en deux strophes «que la bonne Madame -Ethorel avait qualifiée de sonnet»: - - Le spectre d'une ancienne année - M'est apparu, tenant aux doigts - Une blanche rose fanée, - Et murmurant à demi-voix: - Où donc est ton coeur d'autrefois?[80] - - [80] _Mensonges_, p. 121. - -Et ce n'est pas seulement le passé _moral_ qui saisit ainsi constamment -notre présent et notre lendemain. C'est aussi le passé _physique_. Les -maladies de l'enfance, de l'adolescence, des années précédentes -gouvernent, je pourrais dire tyrannisent, notre santé ultérieure. Il y a -des maladies qui créent en nous ce que nous appelons en médecine des -_tempéraments morbides_, c'est-à-dire qu'on vit toute sa vie ultérieure -en arthritique ou en avarié. - -Et, à cause de l'intrication si souvent signalée du physique et du -moral, nos antécédents physiques pèsent sur notre vie morale. C'est -ainsi que vous comprendrez Paul Bourget parlant de l'influence du lard, -du fromage et des pommes de terre sur un sentiment, qui est certainement -des plus élevés mais des plus complexes, l'amour. Et, en effet, sur la -manière de comprendre l'amour influent les éléments physiques qui -paraissent le plus distants: «la nourriture», «la boisson», «les -occupations», «l'air respiré»... - -«Un laboureur, nourri de lard, de fromage et de pommes de terre, qui -peine tout le jour, qui n'ouvre jamais un livre, quand il est assailli -par la puberté, comme une bête, vers ses dix-huit ans, peut-il être -comparé à ce que nous étions, vous ou moi» (c'est Claude Larcher qui -parle), «à cet âge où notre innocence valait à peu près celle d'un -capitaine de hussards?»[81]. - - [81] _Physiologie de l'Amour moderne_, p. 358. - -Tous ces passages (et j'aurais pu en rapprocher beaucoup d'autres) -suffisent à vous montrer de quelle admirable manière Paul Bourget -développe cette idée biologique et montre, dans chaque cas, l'importance -de ce que nous appelons, dans une observation médicale, les _antécédents -personnels_ du sujet. - - * * * * * - -9. Le dernier facteur de l'individualité humaine comprend pour le -biologiste tous les autres éléments, inconnus ou mal connus, qui ne sont -ni l'hérédité, ni le milieu, ni les antécédents, et qu'on appelle, faute -de meilleur mot, l'_élément personnel_. - -La preuve de cet élément est donnée par ce fait que les facteurs déjà -étudiés n'ont pas un résultat fatal et nécessaire; il y a dans les faits -vitaux une contingence indiscutable, en rapport avec la plus grande -complexité de la structure et qui distingue les êtres vivants des corps -bruts. - -Quand on étudie un phénomène physique ou chimique, on peut, en -connaissant bien les corps mis en présence, les conditions de chaleur, -de lumière, de milieu ambiant, déterminer exactement et prévoir ce qui -se produira. Pour l'être vivant, il n'en est pas de même. - -Cet imprévu, cet aléa dans le résultat augmentent d'autant plus que -l'être vivant a un organisme plus compliqué, est plus élevé dans -l'échelle. Chez l'homme, cette complexité est au maximum et l'élément -personnel, la cote individuelle prend une importance d'autant plus -grande qu'il faut, de plus, tenir compte ici de l'élément psychique et -de l'élément moral, facteurs capitaux qui varient tellement d'un -individu à un autre. - -Voilà donc la loi de Biologie humaine à laquelle les faits conduisent -naturellement: deux individus ayant les mêmes hérédités, le même milieu -et les mêmes antécédents ne sont pas nécessairement les mêmes à un -moment donné de leur existence. - -Paul Bourget a nettement appliqué, démontré et illustré cette loi. - - * * * * * - -Le meilleur exemple est certainement encore cette famille Monneron, dans -laquelle dans les mêmes conditions de famille et d'éducation, on voit se -développer: Gaspard, un dépravé précoce et un grossier; Antoine, viveur -et faussaire; Julie, criminelle aussi, mais avec plus de distinction et -d'élévation dans l'esprit; Jean, un vaillant et un fort;--les uns étant -ainsi bien inférieurs, le dernier étant supérieur à leurs hérédités et à -leur milieu. - -Nous pourrions prendre dans d'autres Romans des exemples des corrections -que cet élément individuel peut apporter aux autres facteurs. - -Perron Dumenil, fils d'un avocat d'affaires et d'origine plébéienne, -manoeuvre «de manière qu'il a vécu et qu'il est mort membre du Jockey! -Il est vrai qu'il datait d'une des élections du siège» et «avait -traversé les lignes prussiennes pour venir poser sa candidature dans le -seul ballottage où il eût quelque chance d'être élu»[82]. - - [82] Le _Cob rouan_ (mars 1903), p. 206. - -C'est l'élément individuel qui fait d'Hubert Liauran un jeune homme -«comme les autres», malgré l'éducation exceptionnelle que lui ont donnée -sa mère et sa grand'mère, deux saintes[83]. - - [83] _Cruelle Enigme_, p. 127. - -C'est la lutte de l'élément individuel contre les autres facteurs qui -produit les nombreuses contradictions présentées par Rumesnil, à la fois -«gentilhomme, chatouilleux sur le point d'honneur comme un raffiné de -l'ancien régime», «idéaliste humanitaire» qui préside l'Union Tolstoï, -fondation socialiste, pense, comme un duc anticlérical ou un marquis -voltairien, «contre son milieu» et, en même temps, séduit Julie et -organise tout pour la rendre criminelle. C'est encore la lutte de cet -élément individuel qui donne à Joseph Monneron «cette infaillible -logique dans le faux» qui, avec l'instruction complète d'un éducateur -national, lui fait si mal réussir l'éducation de sa propre famille[84]. - - [84] L'_Etape_, p. 129, 167 et 269. - - * * * * * - -En affirmant ainsi l'élément individuel, c'est-à-dire l'existence -personnelle du moi chez chacun, Paul Bourget se sépare complètement de -Taine, pour qui, au contraire, les «génératrices» ont une influence -absolue, nécessaire et fatale. Quand il étudie «la personnalité d'un -écrivain ou d'un général», celui-ci ne procède «pas autrement qu'un -chimiste placé devant un gaz ou qu'un physiologiste en train d'examiner -un organisme»[85]. Pour Paul Bourget, tout cela n'est pas identique: -dans l'organisme vivant il y a quelque chose de plus que dans le gaz: il -y a une unité, un individu qui s'affirme encore bien mieux dans sa -personnalité complète quand il s'agit de l'homme[86]. - - [85] _Essais de Psychologie contemporaine_; _M. Taine_, p. 171. - - [86] Paul Bourget n'admet pas, avec Stendhal, que «le tempérament et - le milieu font tout l'homme». _Essais de Psychologie contemporaine_: - _Stendhal_, p. 215. - -Vous voyez comme l'idée biologique se développe dans l'oeuvre de Paul -Bourget et comme elle se précise dans le sens de la doctrine vitaliste -que Barthez et Bichat ont exposée au commencement du XIXe siècle et que -Laënnec, Claude Bernard et Pasteur ont si magnifiquement complétée et -couronnée, de cette doctrine qui ne veut pas confondre les phénomènes -vitaux avec les phénomènes physicochimiques, ni l'individu vivant avec -le cristal, et qui fait de la Biologie une science spéciale et bien -distincte de la science des corps bruts. - - * * * * * - -10. Voilà l'homme biologiquement constitué dans ses quatre facteurs, -l'hérédité, le milieu, les antécédents, l'élément personnel. L'homme est -ainsi constitué comme une unité avec son psychisme personnel, sa liberté -et sa responsabilité, responsabilité personnelle, familiale et sociale. -Cette personnalité est si caractérisée, si particulière, que dans la -même famille et dans le même milieu on rencontre souvent des génies et -des névrosés, aboutissants bien différents de facteurs constitutifs -identiques. - -Ceci nous conduit à l'étude d'une autre loi biologique dont Paul Bourget -a fait sa loi sociale: c'est l'_inégalité_ native et originelle des -hommes. - - * * * * * - -Pour le biologiste, les hommes naissent et vivent inégaux; ils sont -inégaux en force héréditaire et personnelle, inégaux dans leurs organes, -dans leurs fonctions, dans leur psychisme, dans leur sensibilité... en -tout; pour le biologiste il n'y a pas deux hommes égaux. - -_Ce sont les philosophies spiritualistes et les religions qui enseignent -l'idée d'égalité en introduisant l'idée de morale et de devoirs._ Les -grands devoirs sont les mêmes pour tous, tous doivent avoir les mêmes -droits et la même liberté pour remplir ces devoirs. Donc _toutes les -âmes sont égales_. Si, au point de vue biologique, les hommes sont -inégaux, ils sont égaux au point de vue moral. - -Une société doit avoir pour objectif idéal l'égalisation _par en haut_ -dans _l'égalité des devoirs_ et non l'égalisation _par en bas_ dans -_l'égalité des droits_. - -Se plaçant au seul point de vue biologique, le traducteur et -commentateur du grand matérialiste Haeckel, Vacher de Lapouge l'a dit -très nettement et très logiquement: «à la formule célèbre qui résume le -christianisme laïcisé de la Révolution: Liberté, Egalité, Fraternité, -nous répondrons: Déterminisme, Inégalité, Sélection»[87]. C'est ce -qu'exprime Jean Weber quand il écrit: «la raison du plus fort est -toujours la meilleure; cette proposition voudrait être une audace; ce -n'est qu'une naïveté»[88]. - - [87] ERNEST HAECKEL. _Le monisme, lien entre la religion et la - science. Profession de foi d'un naturaliste._ Préface et traduction - de VACHER DE LAPOUGE, 1897. - - [88] JEAN WEBER. Citation d'ALFRED FOUILLÉE. _Le Mouvement idéaliste - et la réaction contre la science positive_, 1896, p. 267. - -Voilà la loi biologique, si elle n'est pas corrigée, _humanisée_ par la -loi morale. C'est ce qui m'a fait toujours énergiquement soutenir[89] -que la Morale complète la Biologie, mais ne doit pas être ramenée et -identifiée à la Biologie. La morale biologique, défendue aujourd'hui par -tant de philosophes depuis Herbert Spencer, ne peut donner pour objectif -à l'homme que le plaisir, le bonheur, l'accroissement et l'expansion de -la vie de l'individu et de l'espèce. Or, cet objectif ne peut pas -comporter l'obligation et s'imposer à la liberté. Et le plaisir de la -vie accrue ne peut pas être donné comme sanction de l'acte bon; car trop -souvent la peine et la douleur sont la seule récompense actuelle du -devoir accompli. - - [89] Voir: _Les Limites de la Biologie_. Bibliothèque de Philosophie - contemporaine, 2e édit. 1903, p. 23. - -Une seconde loi biologique s'impose en effet au physiologiste humain à -côté de la loi de l'inégalité, c'est la _loi de la douleur_, la douleur -pouvant accompagner normalement l'acte physiologique le plus régulier, -le plus désirable au point de vue de la Biologie et pouvant être -épargnée à l'acte le plus antiphysiologique, pouvant être remplacée même -par le plaisir après un acte qui diminue la vie de l'individu et encore -plus la vie de l'espèce. - - * * * * * - -Ces deux grandes lois biologiques de l'inégalité et de la douleur sont -chères à Paul Bourget: nous en retrouvons partout la démonstration ou la -discussion. - -Il cite et rapproche: d'un côté, Taine, qui «comme tous les philosophes -qui voient dans l'état un organisme, doit considérer et considère -l'inégalité comme une loi essentielle de la société»[90]; de l'autre, -Stendhal qui dit, par la bouche de Julien: «il n'y a pas de droit -naturel... avant la loi, il n'y a de naturel que la force du lion ou le -besoin de l'être qui a faim, qui a froid; le _besoin_ en un mot...»[91]. -Et Bourget ajoute: «apercevez-vous, à l'extrémité de cette oeuvre, la -plus complète que l'auteur ait laissée, poindre l'aube tragique du -pessimisme?» - - [90] _Essais de Psychologie contemporaine_; _M. Taine_, p. 188. - - [91] _Ibidem_; _Stendhal_, p. 248. - -Est-il besoin d'insister pour démontrer tous les combats livrés par Paul -Bourget contre ce _pessimisme_ et sa forme légère et plus dangereuse -encore, le _dilettantisme_. - -Relisez tout le premier chapitre de _Cosmopolis_ et la dernière phrase -du marquis à Dorsenne: «je ne sais pas pourquoi je vous aime tant, car -au fond vous incarnez, vous aussi, un des vices d'esprit qui me fait le -plus d'horreur, ce dilettantisme, mis à la mode par les disciples de M. -Renan et qui est le fond du fond de la décadence. Mais vous en guérirez, -j'en ai bon espoir. Vous êtes si jeune!»[92]. - - [92] _Cosmopolis_, p. 303. - -C'est surtout dans _le Disciple_ qu'est exposée cette doctrine de la -morale biologique que je vous indiquais tout à l'heure. Robert Greslou -l'applique jusqu'à l'absurde dans ses expérimentations -psychologiques[93] qui le conduisent, non seulement au crime, mais à la -lâcheté et au déshonneur. Et son maître Adrien Sixte, qui aurait mérité -«aussi justement que le vénérable Emile Littré» d'être appelé un «Saint -Laïque», est terrifié en voyant à quoi aboutissent, poussées à l'extrême -dans la pratique, les doctrines qu'il a exposées dans ses livres -«l'Anatomie de la volonté», la «Psychologie de Dieu»... C'est la morale -évolutionniste de nos contemporains: «l'univers moral reproduit -exactement l'univers physique»[94]. C'est la morale dont l'exposé -souleva, on s'en souvient, un différend avec Anatole France[95]. - - [93] «La résolution de séduire cette enfant sans l'aimer, par pure - curiosité de psychologue». _Le Disciple_, p. 120. - - [94] _Le Disciple_, p. 22, 23, 41. - - [95] ANATOLE FRANCE. La morale et la science. _La Vie littéraire_, 3e - série, 1899, p. 59. - - * * * * * - -Il faut donc chercher ailleurs que dans la Biologie même le complément -moral des lois de la vie humaine. Mais il ne faut pas, d'autre part, -nier ces lois biologiques (que les lois morales complètent sans les -détruire): la loi de l'inégalité et la loi de la douleur. - -Dans la Préface manifeste qu'il a écrite pour la réédition de ses -Romans, Paul Bourget écrit: «tout dans l'ordre moral comme dans l'ordre -physique est soumis à des lois» et, en tête de ces lois «inéluctables, -auxquelles notre libre arbitre peut bien tenter de se soustraire, mais -que nos révoltes ne changent pas, non plus que nos désirs», il place, à -côté de «l'hérédité invincible de la race», «l'inégalité incorrigible -des individus»[96]. - - [96] _OEuvres complètes_; _Romans_, t. I. Préface, 1900, p. VII. - -De même, Ferrand proclame la nécessité de se soumettre à ces deux lois -«vérifiées depuis l'origine des âges»: «l'inégalité et la douleur». On -ne doit pas plus chanter: - - Du passé faisons table rase - -que: - - Le monde va changer de base. - -Car les lois biologiques de l'inégalité et de la douleur restent -toujours pour former cette base et il est impossible même au «Demos -Moloch» d'en faire table rase. L'arbre tout entier ne peut pas devenir -fleur; les racines, le tronc et les branches ne peuvent pas cesser leurs -fonctions respectives. «La science démontre que les deux lois de la vie, -d'un bout à l'autre de l'univers, sont la continuité et la -sélection...»[97]. - - [97] _L'Etape_, passim. - -J'arrête ces citations et je vous demande pardon de l'austérité de ces -derniers développements. Mais il m'a paru impossible de ne pas montrer -combien biologique est la base des grandes lois de l'inégalité et de la -douleur qui se retrouvent partout dans les Romans de Paul Bourget et -combien évidente apparaît, dans ces Romans, la nécessité de compléter, -chez l'homme, les lois de la Biologie par les lois d'une morale -distincte et séparée. - - * * * * * - -11. Pour passer à un sujet moins austère, au moins en apparence, je vais -étudier la part de l'idée biologique dans la manière dont Paul Bourget -envisage et étudie l'_amour_, ce sentiment qu'il excelle à analyser de -mille manières charmantes. - -Ne vous effarouchez pas, Mesdames, de me voir aborder ce chapitre. - -Peut-on étudier Paul Bourget sans parler de l'amour? La plupart de ses -héros ne pourraient-ils pas dire comme Thérèse de Sauve: «Vivre sans -aimer, est-ce vivre?»[98]. - - [98] _Nouveaux Pastels_; _Jacques Molan_, p. 393. - -Croyez d'ailleurs que je ne vais pas vous parler, sur un sujet aussi -délicat, la langue brutale du physiologiste ou du médecin. Je ne vous -parlerai sur l'amour que la langue même de Paul Bourget, que vous -appréciez toutes si bien. - -Même dans cette langue, je ne vous développerai pas toutes les idées de -Claude Larcher et les déductions qu'il tire de cette définition de -Nysten dans laquelle est signalée l'association de l'instinct de -destruction comme une aberration fréquente de l'amour[99], idées que -développe aussi Adrien Sixte quand il soutient «que l'instinct de la -destruction et celui de l'amour s'éveillent ensemble chez le mâle»[100]. - - [99] _Physiologie de l'Amour moderne_, p. 327. - - [100] _Le Disciple_, p. 50. - -Certes ce serait bien là une étude biologique qui appartient à notre -sujet. Mais ce côté trop physiologique nous entraînerait très loin et -j'aime mieux consacrer les quelques moments que vous voulez bien me -donner encore, à étudier le fondement biologique de ce que Paul Bourget -aime tant à étudier et étudie si bien sous le nom de _Complications -sentimentales_[101]: le _dualisme_ ou la multiplicité dans l'amour. - - [101] _Complications sentimentales_ (1897). - - * * * * * - -L'amour, ce sentiment si envahissant, si exclusif, si jaloux, qui -s'empare si complètement de l'être tout entier, peut-il avoir plusieurs -objets simultanés? - -Je ne parle pas bien entendu des amours divers, paternel, filial, -patriotique..., qui font si bon ménage ensemble; je parle de l'amour -tout court, le «grand amour» comme dit Elie Laurence[102]. - - [102] _Deuxième Amour_, p. 229. - -Cet amour là, on le comprend s'appliquant à plusieurs objets -_successivement_. Ce n'est pas encore là la question. - -Mais comment l'âme, une et indivisible, peut-elle se donner toute -entière à deux personnes à la fois? _Cruelle énigme!_ Problème -psychologique, grave entre tous, qui me paraît insoluble en dehors de -l'explication biologique. - - * * * * * - -D'abord le _fait_ est matériellement établi dans une série de Romans de -Paul Bourget. - -Les exemples masculins sont peu gracieux et moins démonstratifs, à cause -de «l'irréductible différence qui sépare le point de vue masculin et -celui de la femme, pour ce qui touche aux choses de l'amour»[103]. - - [103] _Sauvetage_, p. 289. - -Je vous citerai cependant Bertrand d'Aydie qui superpose à son amour -pour Madame de Sarliève un autre amour pour l'_Amie écran_ Madame de -Lautrec[104]. - - [104] _L'Ecran_ (août 1897). - -«Ce que je garde depuis deux ans au fond de mon coeur et qui doit en -sortir, dit Boleslas à sa femme, c'est qu'à travers ces funestes -entraînements, je n'ai jamais cessé de vous aimer»[105].--Henriette «ne -savait pas qu'un homme peut mentir à une femme qu'il aime et l'aimer -autant, l'aimer davantage, avec une ardeur avivée par le remords»[106]. - - [105] _Cosmopolis_, p. 505. - - [106] _La Terre promise_, p. 174. - -Je vous citerai enfin cet affreux Jacques Molan qui aime à la fois la -_Duchesse bleue_ et Madame de Bonnivet, autorise chez Madame de Bonnivet -cette soirée dans laquelle la pauvre duchesse bleue dit des vers devant -sa rivale et, renouvelant la scène d'Adrienne Lecouvreur devant la -duchesse de Bouillon et Maurice de Saxe, récite du Racine et stigmatise - - ......... ces femmes hardies - Qui, goûtant dans le crime une honteuse paix, - Ont su se faire un front qui ne rougit jamais. - -Le dilettante se contente de sourire et plus tard il finit par faire -avec cette scène une pièce qu'il fait jouer par la même duchesse bleue, -devenue courtisane. - - * * * * * - -J'aime mieux insister sur les exemples féminins, bien plus intéressants -et impossibles à expliquer par une simple sécheresse de coeur. - -Dualiste: cette charmante Thérèse de Sauve qui aime si complètement -Hubert Liauran et va retrouver le comte de La Croix-Firmin à Trouville. -«Quelle monstrueuse énigme! Comment, avec cet amour divin dans son -coeur, avait-elle pu faire ce qu'elle avait fait?»[107].--Thérèse de -Sauve «avait trompé ce garçon qu'elle adorait, entraînée par un caprice -de sexualité qu'elle ne comprenait plus elle-même»[108]. - - [107] _Cruelle énigme_, p. 87. - - [108] _Nouveaux Pastels_; _Jacques Molan_, p. 367. - -Dualiste: Madame de Tillières qui aime à la fois Poyanne et Casal, au -point d'étonner celui-ci qui dit «non, c'est impossible; on n'a pas de -place en soi pour deux amours» et au point de trembler également pour -ses deux amis quand elle apprend qu'ils vont se battre[109]. - - [109] _Un Coeur de femme_, p. 500 et 450 («Vous deux!») et tout le - chapitre «Dualisme», p. 392. - -Dualistes: la baronne Ely[110] et Claire de Welde[111] dont le second -amant est le «seul», l'«unique» amour, du vivant du premier. - - [110] _Une Idylle tragique_. - - [111] _Deuxième Amour_. - -Dualiste: cette grande dame anglaise qui s'est fait recevoir au -_Flirting club_ et s'y rend d'autant plus joyeuse et en train qu'elle -est plus rassurée sur la santé de son mari. «Quand il est souffrant, -comme ces derniers jours, je n'ai plus le coeur à flirter»[112]. - - [112] _Profils perdus_ (1880-1881); _Flirting Club_, p. 264. - -Dualiste et même plus: Clémentine de Ravigny qui aime d'abord le comte -de Miossens, puis le député Michel Favanne, épouse le premier, aime -Videville, Edmond de Bonnivet...; cela fait quatre, dont deux au moins -occupent son coeur en même temps. Ce qui fait dire d'elle au peintre -Miraut: c'est «très alliance russe, cet attelage à trois; cela s'appelle -une troïka, n'est-il pas vrai?», tandis que Favanne s'écriait: «est-ce -qu'on cesse jamais d'aimer, quand on aime véritablement»[113] comme -Pierre Fauchery disait: «l'homme ne cesse jamais d'aimer le même -être»[114]. - - [113] _L'Inutile science_ (janvier 1897), p. 256 et 187. - - [114] _L'Age de l'amour_, p. 96. - - * * * * * - -De tous ces faits, Paul Bourget formule lui-même la conclusion: «il faut -croire que la dualité sentimentale, si coupable dans ses conséquences et -qui représente un tel abus de l'âme d'autrui, correspond, dans certaines -natures complexes, à de profonds besoins et que cette anomalie est leur -vraie manière de sentir»[115]. - - [115] _L'Ecran_, p. 23. - -Voilà le fait brutal, plus facile à établir et à analyser qu'à -expliquer, au moins en psychologie pure. - -On essaie des explications en opposant les mots _coeur_, _tête_, _sens_: -on aime l'un avec le coeur, un autre avec la tête, ou bien un troisième -avec les sens. - -Ainsi, d'après Claude Larcher, les modernes aiment avec leur cerveau, -sont des cérébraux[116]. Chez Thérèse de Sauve, c'est «le duel de la -chair et de l'esprit». «Thérèse avait des sens en même temps qu'un coeur -et... le divorce s'établissait à de certaines heures entre les besoins -de ce coeur et la tyrannie de ces sens»[117]. - - [116] _Physiologie de l'Amour moderne_, p. 367 et 398. - - [117] _Cruelle énigme_, p. 128 et 109. - -Mais on ne peut employer ces mots que par métaphore. Si on leur donne -leur signification scientifique, cela ne veut plus rien dire. On n'aime -jamais avec son organe-coeur, on ne peut pas aimer sans ses -sens-organes. Un biologiste est obligé d'avoir un langage plus précis et -il énonce alors la théorie suivante. - - * * * * * - -L'âme ou, si l'on préfère, la personne humaine vraie, élevée, libre et -responsable reste une et indivisible toujours et partout, quelles que -soient les contradictions de ses actes et de ses sentiments. La -multiplicité des actes vient de l'outil qui, lui, est complexe et -divisible, et spécialement des centres nerveux, qui sont l'agent -indispensable et inévitable de l'amour, même le plus élevé et le plus -complet. - -Même dans l'amour platonique, dont Philippe d'Audiguier est un si bel -exemple, dans cet amour, «à qui le scepticisme a donné un brevet de -chimère en le baptisant du nom d'un philosophe»[118], même dans l'amour -platonique les centres nerveux jouent un rôle considérable. - - [118] _Le Fantôme_, p. 37. - -Ce principe posé, je vous rappelle que les centres nerveux sont un tout -complexe et divisible, formé d'une série de centres secondaires -distincts, depuis la partie la plus inférieure de la moelle jusqu'aux -parties les plus élevées du cerveau. Les centres cérébraux qui président -aux fonctions de la pensée, aux fonctions psychiques, se subdivisent -eux-mêmes et nous distinguons les centres du psychisme supérieur, du moi -conscient, libre et responsable (ce que j'appelle le centre O) et les -centres du psychisme inférieur, des actes inconscients et automatiques -(ce que j'appelle le polygone[119]). - - [119] Le Dr L. LAURENT, après avoir appliqué le schéma du polygone à - l'étude très fine de la psychologie des sourciers, vient, dans un - travail encore inédit (_Essais sur le mécanisme de l'inconscient. - Peut-on reconnaître aux sciences dites divinatoires une base - réellement scientifique?_) de l'appliquer à l'étude de certaines - divinations et à l'intuition de la physiognomonie, qui fait - rapidement porter à O des jugements sur les personnes, sympathiques - ou antipathiques, portant veine ou malchance, jugements dont le - polygone a préparé les «Considérant», à l'insu de O.--Cela peut - s'appliquer aux intuitions et aux pressentiments, si bien décrits - dans l'_Adversaire_ (mai 1895). - -Normalement, pour chaque fonction, ces deux ordres de centres -collaborent, entrent en activité synergiquement. Mais dans bien des cas -leur action peut se dissocier: les centres psychiques inférieurs et les -centres psychiques supérieurs fonctionnent séparément et distinctement, -quand on est distrait ou quand on dort, par exemple, Archimède sortant -tout nu de son bain marche avec ses centres psychiques inférieurs, -tandis qu'il trouve son problème et crie _Eurêka_ avec son centre O. -Quand vous dormez, votre centre psychique supérieur se repose et votre -polygone rêve. - -Cette dissociation des deux ordres de centres psychiques est plus -accentuée dans des états extraphysiologiques, qui ne sont pas encore la -maladie, comme le sommeil provoqué de l'hypnotisme et l'état de transe -des médiums. Enfin cette même dissociation peut devenir un véritable -état morbide et constitue le fond de certaines névroses comme le -somnambulisme et l'hystérie. - -Dans tous ces états de dissociation, il y a ce que l'on appelle -_dédoublement de la personnalité_. - -Vous rappelez-vous la _Nuit de Décembre_: - - Du temps que j'étais écolier, - Je restais un soir à veiller - Dans notre salle solitaire. - Devant ma table vint s'asseoir - Un pauvre enfant vêtu de noir, - Qui me ressemblait comme un frère. - -Comme Musset, Goethe, Guy de Maupassant, ont vu leur _double_ venir -au-devant d'eux, leur parler, leur dicter[120]... - - [120] Voir PAUL SOLLIER. _Les Phénomènes d'autoscopie_. Bibliothèque - de philosophie contemporaine, 1903.--Chez François Vernantes, - l'«incapacité d'agir provenait de l'hypertrophie d'une puissance - très spéciale: l'imagination de la vie intérieure. Il se voyait - vivre et sentir avec une telle acuité que cela lui suffisait. Son - action était au-dessus de lui et l'excès de l'analyse personnelle - absorbait toute sa sève». (_Pastels_; _Madame Bressuire_, juin 1884, - p. 64). - -Au fond, il est inexact d'appeler cela des _dédoublements_ de la -personnalité. La vraie personnalité est une et indivisible; elle reste -avec les centres supérieurs, pendant que les centres polygonaux, -dissociés, forment des personnalités fausses, artificielles, -_surajoutées_, plus ou moins anormales ou même morbides. - - * * * * * - -Tout ce que je viens de dire s'applique à l'amour qui est une fonction -cérébrale psychique. L'amour vrai, complet et normal a pour organe -l'ensemble des centres psychiques, supérieurs et inférieurs, unis et -synergiques. Mais chez certaines personnes il y a dissociation entre les -deux ordres de centres et alors il y a comme un dédoublement de la -personne aimante: l'amour vrai restant celui des centres supérieurs, un -ou plusieurs autres amours adventices, accidentels, incomplets, mais -souvent très impérieux et trop obéis, se développent dans le polygone. - -Les actes passionnels sont souvent automatiques et polygonaux; on -comprend donc un amour polygonal à côté de l'amour vrai et complet du -psychisme supérieur. - -C'est l'unité du mot amour qui fait la confusion. Quand Thérèse de Sauve -va à Trouville, elle continue à n'aimer vraiment qu'Hubert Liauran. -L'acte polygonal par lequel elle se livre à La Croix-Firmin ne devrait -pas être appelé amour; de même que l'hypnotisée à qui vous imposez dans -le sommeil une personnalité de _général_ reste _couturière_ tout en -commandant à des troupes imaginaires; sa personnalité vraie et -antérieure n'a pas changé malgré ce déguisement polygonal. - - * * * * * - -De tout cela résultent trois principes: - -1º Le moi est un et la personnalité est une; le dédoublement apparent du -moi et de la personnalité correspond à la dissociation des centres -psychiques et à l'apparition de fausses personnalités polygonales; - -2º De même, dans tous les cas de dualisme sentimental, il n'y a jamais -égalité de deux amours simultanés; un des amours reste toujours le vrai, -le supérieur, l'autre étant l'inférieur, l'incomplet, le transitoire; - -3º Quand ce dualisme sentimental se développe et atteint un certain -degré, c'est un signe, chez le sujet, d'un état au moins -extraphysiologique, pas entièrement normal, souvent même d'un état -pathologique. - -Cette doctrine me paraît s'adapter merveilleusement à l'oeuvre entière -de Paul Bourget qui en est comme imprégnée. - -En tête de l'_Irréparable_, il proclame que c'est le «commentaire -mondain et mélancolique de la doctrine de son maître en psychologie sur -la multiplicité du moi»[121]. - - [121] _L'Irréparable_, p. 5. - -Et en effet Taine se donne comme un bel exemple de dédoublement de -personnalité: «j'ai fait deux parts de moi-même, dit-il: l'homme -ordinaire qui boit, qui mange, qui fait ses affaires; qu'il ait des -opinions, une conduite, des chapeaux et des gants comme le public, cela -regarde le public. L'autre homme, à qui je permets l'accès de la -philosophie, ne sait pas que ce public existe»[122]. - - [122] _Essais de Psychologie contemporaine_; _M. Taine_, p. 162. - -Dans Joseph Monneron il y avait deux êtres: «l'un, le vrai, le _moi_ -raisonnable et raisonnant, constitué par les idées pures, l'homme en soi -de la Déclaration des Droits; l'autre, l'animal inférieur, _Médor_, fait -pour obéir au premier, comme le chien à son maître»[123]. - - [123] _L'Etape_, p. 236. - -Médor est la Bête de Xavier de Maistre qui le conduit chez madame de -Hautcastel quand _l'autre_ veut aller à la Cour. Médor est notre -polygone. - -Chez Henry Bobetière, «comme chez Crémieu Dax, la poussée de -l'inconscient était la plus forte aussitôt qu'il s'agissait de la chose -publique»[124]. - - [124] _Ibidem_, p. 149. - -De même, dans Robert Greslou, il y a toujours eu «deux personnes -distinctes: une qui allait, venait, agissait, sentait, et une autre qui -regardait la première aller, venir, agir, sentir, avec une impassible -curiosité»[125]. - - [125] _Le Disciple_, p. 65. - -François Vernantes semble, comme don Juan, «posséder plusieurs âmes» et -plaisante sur ce qu'il appelle son «polypsychisme»[126]. - - [126] _Pastels_; _Madame Bressuire_, p. 386. - -«Quelle singulière machine qu'une femme pourtant! on dirait qu'une -cloison étanche sépare l'amoureuse et l'autre»[127]. - - [127] _La Duchesse bleue_, p. 376. - -Vincy prend «une de ces décisions subites, qui révèlent un long travail -de ce que les philosophes appellent barbarement l'_inconscient_, le -_subconscient_, le _subliminal_. Le pédantisme de ces formules n'empêche -pas qu'elles étiquettent le plus exact des faits»[128]. - - [128] _Dernière Poésie_ (novembre 1900), p. 295. - -Voilà bien toute la doctrine biologique de la dissociation des deux -ordres de psychisme[129] et du dédoublement de la personnalité et -l'application de cette doctrine à la _pluralité des amours simultanés_. - - [129] Dans l'_Ecran_ (p. 24), Paul Bourget discute même la théorie du - fonctionnement séparé des deux hémisphères cérébraux pour expliquer - ce dualisme. - - * * * * * - -D'autre part, Paul Bourget reconnaît le caractère extraphysiologique, -souvent morbide, de ces dissociations et de ces dédoublements. - -Ce n'est pas l'amour en lui-même qu'il considère comme une maladie, -quoiqu'il en décrive la thérapeutique et malgré l'axiome de Claude -Larcher: «l'amour est une maladie et le malade le plus sage, pour cette -maladie là comme pour les autres, est celui qui, n'ayant jamais lu un -livre de médecine, ne sait pas ce qu'il a et qui souffre sans penser, -comme une bête»[130]; axiome qu'on peut comparer à la définition de -Boissier de Sauvages: l'amour est une «maladie qui s'insinue entre les -jeunes filles et les jeunes gens...», maladie dont il étudie les -symptômes, le diagnostic, le pronostic et le traitement[131]. - - [130] _Physiologie de l'Amour moderne_, p. 526. - - [131] Voir: _Le Médecin de l'amour au temps de Marivaux. Etude sur - Boissier de Sauvages_, 1896.--La thèse de Sauvages (1724) portait ce - titre: _Dissertatio medica atque ludicra de Amore... utrum sit Amor - medicabilis herbis?_ - -Non, Paul Bourget ne regarde pas l'amour comme une maladie. Ce qu'il -considère comme une maladie, c'est la dissociation sentimentale, -aboutissant au dualisme ou à la multiplicité des amours simultanés. - -Ici c'est une «anomalie d'âme si criminellement pathologique»[132]. -Ailleurs ce sont des «difformités» dans la «façon de sentir» qui -entraînent cette «singulière» et «détestable» «complication d'âme»[133]. -Dans la Dédicace de la _Duchesse bleue_ à Madame Mathilde Sérao il dit -nettement: «poussé à ce degré, ce phénomène de dédoublement devient une -déformation morale presque monstrueuse, à laquelle il faut maintenir son -caractère d'exception»[134]. - - [132] _Le Fantôme_, p. 8. - - [133] _L'Inutile science_, p. 193-194. - - [134] _La Duchesse bleue_, p. 331. - -Donc, vous le voyez, sur tous ces points encore, l'oeuvre de Paul -Bourget est conforme à la doctrine biologique: il admet la dissociation -des psychismes, le caractère anormal des dissociés, et il s'appuie sur -ces idées pour expliquer les «complications sentimentales» de ses héros. - - * * * * * - -12. On peut donc conclure, ce me semble, que l'idée médicale ou -biologique, loin de rester étrangère aux Romans de Paul Bourget, les -pénètre et les imprègne intimement: une dissection, même rapide, permet -de la bien mettre en lumière. - -Mais il faut se garder de dépasser cette conclusion et de dire que ces -Romans sont des oeuvres biologiques ou médicales. - -Paul Bourget est certainement un des auteurs qui ont le mieux compris et -limité les rapports de la science et de la littérature[135]. - - [135] Voir, sur les rapports de la Biologie avec la Littérature et les - Arts, le chapitre V des _Limites de la Biologie_, p. 74. - -Il avait déjà étudié cette question, pour la poésie, à propos de Leconte -de Lisle[136]. Il parle des poèmes scientifiques de Sully Prudhomme, -montre que le littérateur doit se documenter, le vrai étant la source du -beau; mais pour écrire un poème, il faut «des yeux de poète ouverts sur -des hypothèses de science»[137]. Les formules du savant «expliquent» les -phénomènes, elles ne les «représentent» pas. Or, «cette représentation -colorée et vivante des choses est précisément le caractère propre de -l'esprit poétique»[138]. - - [136] _Essais de Psychologie contemporaine_; _Leconte de Lisle_, 1884, - p. 339 et 361. - - [137] _Ibidem_, p. 341. - - [138] «Un poète, c'est-à-dire le contraire d'un médecin et d'un - philosophe». _Mensonges_, p. 53. - -Cela s'applique admirablement au Roman. - -Comme dit très bien Lanson[139], si un Roman peut être vrai à la façon -d'un tableau de Léonard ou de Rembrandt, il ne saurait l'être à la façon -d'une démonstration de Laplace ou d'une expérience de Pasteur. Et on -peut appliquer au Roman cette phrase de Brunetière: «l'imitation de la -nature ne saurait être le terme de l'art de peindre et, pour admirer, -selon le mot de Pascal, les imitations des choses dont nous n'admirons -pas les originaux, il faut que la pensée de l'artiste ait démêlé en -elles quelque chose de caché, d'intime et d'ultérieur, que n'y -discernait pas le regard du vulgaire»[140]. - - [139] LANSON. _La Littérature et la Science_, in _Hommes et Livres_. - _Etudes morales et littéraires_, 1895. - - [140] BRUNETIÈRE. _La Renaissance de l'idéalisme_, 1896, p. 63-66. - -Le Roman est une oeuvre d'art et non une oeuvre de science. Il y a «des -qualités indispensables, malgré tout, à cet art du Roman qui ne saurait -se réduire à la dissertation pure»[141]. - - [141] _Nouveaux Pastels_; _Monsieur Legrimaudet_, p. 149. - -Le Roman ne doit pas donner seulement la _sensation du Vrai_ comme un -exposé scientifique; il doit donner l'_émotion du Beau_ et l'_émotion du -Bien_. - -C'est là ce que produisent les Romans de Paul Bourget: il nous présente -des cas biologiques; soit. Mais il les peint, au lieu de les décrire; il -fait vivre[142] ses personnages et nous avons toujours, à la lecture, -l'impression du vrai et du faux, la nette distinction de ce qui est beau -et de ce qui ne l'est pas, de ce qui est moral et de ce qui ne l'est -pas, dans le tableau que nous venons de lire. - - [142] Paul Bourget se calomnie quand, parlant de la limitation du - Roman d'analyse, il dit qu'il lui manque le coloris de la vie en - mouvement. _La Duchesse bleue_. Préface à Madame Mathilde Sérao, p. - 329. - -Telle est bien l'idée que se fait Paul Bourget de son Roman qu'il -appelle le _Roman d'analyse_ au lieu de lui donner «le nom équivoque de -psychologique»[143]. - - [143] _La Terre promise_. Préface à Ferdinand Brunetière (octobre - 1892), p. 6. - -Il combat la doctrine de Taine, d'après laquelle le roman est -«maintenant une grande enquête sur l'homme, sur toutes les variétés, -toutes les situations, toutes les floraisons, toutes les dégénérescences -de la nature humaine»[144]; doctrine d'où découle toute «l'esthétique -des écrivains et des naturalistes». - - [144] Préface du tome I des _Romans_ in _OEuvres complètes_, p. V. - -«Le pessimisme le plus découragé est le dernier mot de cette littérature -d'enquête». Bourget veut échapper à ce «fanatisme de la science»[145] -qu'il constate chez Taine. Il veut, comme Pascal, opposer «l'ordre de -l'esprit et l'ordre du coeur à cet univers aveugle et impassible, qui -peut nous broyer, mais qui ne peut que cela»[146]. - - [145] «Pour le physiologiste, le drame moral où avaient failli sombrer - la raison et la foi d'Henriette n'était que cela: un accident de - névrose en train de passer ainsi qu'il était venu, par un phénomène - d'hypnotisme subjectif... La faiblesse de telles hypothèses est - qu'elles n'expliquent rien de ce qui constitue le fond même de la - vie de l'âme». (_La Terre promise_, p. 244). - - [146] _Essais de Psychologie contemporaine_; _M. Taine_, p. 181-182. - -Certainement la «science moderne fournit aux curieux de l'anatomie -mentale des documents et des méthodes d'une incomparable -supériorité»[147]; mais une «oeuvre de littérature, M. Taine lui-même le -remarque excellemment, _se rapproche_ de la science; elle _n'est pas_ de -la science»[148]. - - [147] _La Terre promise_, p. 7. - - [148] Préface du tome I des _Romans_, p. VIII.--Ceci enlève sa valeur - à la critique de JULES SAGERET qui a relevé une erreur zoologique - dans _Outre-mer_ (t. II, p. 210): Paul Bourget donne quatre crocs au - serpent à sonnettes ou crotale, alors qu'il n'en a que deux.--Cela - confirme que les livres de Paul Bourget ne sont pas des ouvrages - d'histoire naturelle. Adrien Sixte avait répondu déjà à Marius - Dumoulin lui démontrant une grave erreur dans son «Anatomie de la - volonté» que «ce point de détail n'intéressait pas l'ensemble de la - thèse». (_Le Disciple_, p. 48). - -Le Roman d'analyse n'est pas un Roman de dissection scientifique. «Tout -ce que l'on dissèque est mort», tandis qu'il étudie «des crises de la -vie vivante». - -«Les lois imposées au romancier par les diverses esthétiques se ramènent -en définitive à une seule: donner une impression personnelle de la -vie»[149]. - - [149] _Cruelle Enigme_. _Dédicace à M. Henry James_, p. 3. - -Le Roman est une «psychologie vivante», ne décrivant jamais le fait brut -objectif, mais le peignant toujours à travers l'âme du romancier; «même -la description du paysage le plus résolument plastique n'est-elle pas -une transcription d'un état de l'âme?»[150]. «Toute narration d'un fait -extérieur n'est jamais que la copie de l'impression que nous produit ce -fait et toujours une part d'interprétation individuelle s'insinue dans -le tableau le plus systématiquement objectif»[151]. - - [150] _La Terre promise_, p. 8, 9 et 6. - - [151] _Ibidem_, p. 9. - -Donc, et ceci résume admirablement les rapports du Roman et de la -Biologie, le romancier doit avoir uniquement le «souci de doubler la -soie brillante de l'imagination avec l'étoffe solide de la -science»[152]. - - [152] _Essais de Psychologie contemporaine_; _M. Taine_, p. 181. - -Nous revenons ainsi à l'idée annoncée au début de cette Conférence: la -Biologie dans les Romans de Paul Bourget est la charpente de fer qui -soutient l'édifice; mais ce qui fait la beauté de l'édifice, ce sont les -tentures et les oeuvres d'art qui, à profusion, revêtent et masquent -cette ossature, c'est surtout la vie dont on a animé ces appartements. - - * * * * * - -Il ne nous reste plus donc, en finissant, qu'à présenter publiquement -nos excuses à Paul Bourget pour cette dissection maladroite de son -oeuvre si bien agencée et si impressionnante. - -Oubliez, Mesdames, cette oeuvre de cuistre. - -Remettez tous ses atours à ce squelette si misérablement dévêtu. -Remettez en place les magnifiques tapisseries et les charmants -bibelots... - -Oubliez ma Conférence et relisez Bourget; non plus au radioscope et avec -les rayons Roentgen, mais en suçant ses livres comme des fleurs, suivant -le précepte de Byron[153]... Vous y trouverez plaisir extrême et grand -profit. - - [153] _Essais de Psychologie contemporaine_; _Stendhal_, p. 237. - - - - -TABLE - -DES OEUVRES CITÉES DE PAUL BOURGET - - - Adversaire (L') 65 - Age de l'Amour (L') 24, 62 - Ancien Portrait 15 - André Cornelis 21, 40 - Autre anglaise 15 - Autre joueur 21 - - Bressuire (Madame) 66, 70 - - Cas de Conscience (Un) 15, 17, 21 - Cob rouan (Le) 46 - Coeur de Femme (Un) 14, 19, 21, 32, 61 - Complications sentimentales 57 - Confession (Une) 19 - Cosmopolis 29, 30, 37, 52, 53, 59 - Crime d'amour (Un) 11, 21, 26 - Cruelle Enigme 27, 46, 58, 60, 63, 78 - - Dernière Poésie 71 - Deuxième Amour 21, 58, 61 - Deux Ménages 14, 21 - Disciple (Le) 30, 33, 37, 53, 57, 70, 77 - Drames de Famille 24 - Duchesse bleue (La) 12, 21, 59, 70, 72, 73, 75 - - Eau profonde (L') 18 - Echéance (L') 17, 21, 40 - Ecran (L') 59, 62, 71 - Essais de Psychologie contemporaine 35 - Voir: Préface, Leconte de Lisle, Stendhal, Taine - Etape (L') 10, 18, 19, 21, 28, 29, 30, 31, 33, 36, 37, 47, 55, 70 - - Fantôme (Le) 25, 29, 41, 64, 72 - Fausse Manoeuvre 37 - Flirting Club 61 - - Homme d'Affaires (Un) 21, 25, 26 - - Idylle tragique (Une) 20, 21, 26, 41, 61 - Inutile Science (L') 62, 72 - Irréparable (L') 23, 69 - - Jacques Molan 56, 60 - - Leconte de Lisle (Essais de Psychologie contemporaine) 74 - Legrimaudet (Monsieur) 75 - Luxe des autres (Le) 15, 25 - - Mensonges 11, 12, 14, 20, 21, 42, 74 - - Neptunevale 40 - Nouveaux Pastels 21, 56, 60, 75 - - Odile 26 - Outre-Mer 77 - - Pas dans les Pas (Les) 39 - Pastels 66, 70 - Physiologie de l'Amour moderne 12, 13, 14, 19, 20, 21, 27, 28, 32 - 43, 57, 63, 72 - Portrait du Doge (Le) 37 - Préface de la réédition des Essais de Psychologie - contemporaine 20, 22 - Préface de la réédition des Romans 20, 54, 76 - Profils perdus 15, 61 - - Recommencements 39, 40 - - Sauvetage 23, 24, 58 - Stendhal (Essais de Psychologie contemporaine) 36, 48, 52, 79 - - Taine (Essais de Psychologie contemporaine) 9, 33, 34, 36, 47, 52 - 69, 77, 78 - Talisman (Le) 14 - Terre promise (La) 14, 21, 23, 25, 41, 42, 59, 76, 77, 78 - - Voyageuses 14, 21, 26, 40 - Vrai Père (Le) 28 - - - - - - -End of the Project Gutenberg EBook of L'idée médicale dans les romans de -Paul Bourget, by Joseph Grasset - -*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK L'IDÉE MÉDICALE DANS LES *** - -***** This file should be named 60986-8.txt or 60986-8.zip ***** -This and all associated files of various formats will be found in: - http://www.gutenberg.org/6/0/9/8/60986/ - -Produced by Clarity and the Online Distributed Proofreading -Team at http://www.pgdp.net (This file was produced from -images generously made available by The Internet -Archive/Canadian Libraries) - -Updated editions will replace the previous one--the old editions will -be renamed. - -Creating the works from print editions not protected by U.S. copyright -law means that no one owns a United States copyright in these works, -so the Foundation (and you!) can copy and distribute it in the United -States without permission and without paying copyright -royalties. Special rules, set forth in the General Terms of Use part -of this license, apply to copying and distributing Project -Gutenberg-tm electronic works to protect the PROJECT GUTENBERG-tm -concept and trademark. Project Gutenberg is a registered trademark, -and may not be used if you charge for the eBooks, unless you receive -specific permission. If you do not charge anything for copies of this -eBook, complying with the rules is very easy. You may use this eBook -for nearly any purpose such as creation of derivative works, reports, -performances and research. They may be modified and printed and given -away--you may do practically ANYTHING in the United States with eBooks -not protected by U.S. copyright law. Redistribution is subject to the -trademark license, especially commercial redistribution. - -START: FULL LICENSE - -THE FULL PROJECT GUTENBERG LICENSE -PLEASE READ THIS BEFORE YOU DISTRIBUTE OR USE THIS WORK - -To protect the Project Gutenberg-tm mission of promoting the free -distribution of electronic works, by using or distributing this work -(or any other work associated in any way with the phrase "Project -Gutenberg"), you agree to comply with all the terms of the Full -Project Gutenberg-tm License available with this file or online at -www.gutenberg.org/license. - -Section 1. General Terms of Use and Redistributing Project -Gutenberg-tm electronic works - -1.A. By reading or using any part of this Project Gutenberg-tm -electronic work, you indicate that you have read, understand, agree to -and accept all the terms of this license and intellectual property -(trademark/copyright) agreement. If you do not agree to abide by all -the terms of this agreement, you must cease using and return or -destroy all copies of Project Gutenberg-tm electronic works in your -possession. If you paid a fee for obtaining a copy of or access to a -Project Gutenberg-tm electronic work and you do not agree to be bound -by the terms of this agreement, you may obtain a refund from the -person or entity to whom you paid the fee as set forth in paragraph -1.E.8. - -1.B. "Project Gutenberg" is a registered trademark. It may only be -used on or associated in any way with an electronic work by people who -agree to be bound by the terms of this agreement. There are a few -things that you can do with most Project Gutenberg-tm electronic works -even without complying with the full terms of this agreement. See -paragraph 1.C below. There are a lot of things you can do with Project -Gutenberg-tm electronic works if you follow the terms of this -agreement and help preserve free future access to Project Gutenberg-tm -electronic works. See paragraph 1.E below. - -1.C. The Project Gutenberg Literary Archive Foundation ("the -Foundation" or PGLAF), owns a compilation copyright in the collection -of Project Gutenberg-tm electronic works. Nearly all the individual -works in the collection are in the public domain in the United -States. If an individual work is unprotected by copyright law in the -United States and you are located in the United States, we do not -claim a right to prevent you from copying, distributing, performing, -displaying or creating derivative works based on the work as long as -all references to Project Gutenberg are removed. Of course, we hope -that you will support the Project Gutenberg-tm mission of promoting -free access to electronic works by freely sharing Project Gutenberg-tm -works in compliance with the terms of this agreement for keeping the -Project Gutenberg-tm name associated with the work. You can easily -comply with the terms of this agreement by keeping this work in the -same format with its attached full Project Gutenberg-tm License when -you share it without charge with others. - -1.D. The copyright laws of the place where you are located also govern -what you can do with this work. Copyright laws in most countries are -in a constant state of change. If you are outside the United States, -check the laws of your country in addition to the terms of this -agreement before downloading, copying, displaying, performing, -distributing or creating derivative works based on this work or any -other Project Gutenberg-tm work. The Foundation makes no -representations concerning the copyright status of any work in any -country outside the United States. - -1.E. Unless you have removed all references to Project Gutenberg: - -1.E.1. The following sentence, with active links to, or other -immediate access to, the full Project Gutenberg-tm License must appear -prominently whenever any copy of a Project Gutenberg-tm work (any work -on which the phrase "Project Gutenberg" appears, or with which the -phrase "Project Gutenberg" is associated) is accessed, displayed, -performed, viewed, copied or distributed: - - This eBook is for the use of anyone anywhere in the United States and - most other parts of the world at no cost and with almost no - restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it - under the terms of the Project Gutenberg License included with this - eBook or online at www.gutenberg.org. If you are not located in the - United States, you'll have to check the laws of the country where you - are located before using this ebook. - -1.E.2. If an individual Project Gutenberg-tm electronic work is -derived from texts not protected by U.S. copyright law (does not -contain a notice indicating that it is posted with permission of the -copyright holder), the work can be copied and distributed to anyone in -the United States without paying any fees or charges. If you are -redistributing or providing access to a work with the phrase "Project -Gutenberg" associated with or appearing on the work, you must comply -either with the requirements of paragraphs 1.E.1 through 1.E.7 or -obtain permission for the use of the work and the Project Gutenberg-tm -trademark as set forth in paragraphs 1.E.8 or 1.E.9. - -1.E.3. If an individual Project Gutenberg-tm electronic work is posted -with the permission of the copyright holder, your use and distribution -must comply with both paragraphs 1.E.1 through 1.E.7 and any -additional terms imposed by the copyright holder. Additional terms -will be linked to the Project Gutenberg-tm License for all works -posted with the permission of the copyright holder found at the -beginning of this work. - -1.E.4. Do not unlink or detach or remove the full Project Gutenberg-tm -License terms from this work, or any files containing a part of this -work or any other work associated with Project Gutenberg-tm. - -1.E.5. Do not copy, display, perform, distribute or redistribute this -electronic work, or any part of this electronic work, without -prominently displaying the sentence set forth in paragraph 1.E.1 with -active links or immediate access to the full terms of the Project -Gutenberg-tm License. - -1.E.6. You may convert to and distribute this work in any binary, -compressed, marked up, nonproprietary or proprietary form, including -any word processing or hypertext form. However, if you provide access -to or distribute copies of a Project Gutenberg-tm work in a format -other than "Plain Vanilla ASCII" or other format used in the official -version posted on the official Project Gutenberg-tm web site -(www.gutenberg.org), you must, at no additional cost, fee or expense -to the user, provide a copy, a means of exporting a copy, or a means -of obtaining a copy upon request, of the work in its original "Plain -Vanilla ASCII" or other form. Any alternate format must include the -full Project Gutenberg-tm License as specified in paragraph 1.E.1. - -1.E.7. Do not charge a fee for access to, viewing, displaying, -performing, copying or distributing any Project Gutenberg-tm works -unless you comply with paragraph 1.E.8 or 1.E.9. - -1.E.8. You may charge a reasonable fee for copies of or providing -access to or distributing Project Gutenberg-tm electronic works -provided that - -* You pay a royalty fee of 20% of the gross profits you derive from - the use of Project Gutenberg-tm works calculated using the method - you already use to calculate your applicable taxes. The fee is owed - to the owner of the Project Gutenberg-tm trademark, but he has - agreed to donate royalties under this paragraph to the Project - Gutenberg Literary Archive Foundation. Royalty payments must be paid - within 60 days following each date on which you prepare (or are - legally required to prepare) your periodic tax returns. Royalty - payments should be clearly marked as such and sent to the Project - Gutenberg Literary Archive Foundation at the address specified in - Section 4, "Information about donations to the Project Gutenberg - Literary Archive Foundation." - -* You provide a full refund of any money paid by a user who notifies - you in writing (or by e-mail) within 30 days of receipt that s/he - does not agree to the terms of the full Project Gutenberg-tm - License. You must require such a user to return or destroy all - copies of the works possessed in a physical medium and discontinue - all use of and all access to other copies of Project Gutenberg-tm - works. - -* You provide, in accordance with paragraph 1.F.3, a full refund of - any money paid for a work or a replacement copy, if a defect in the - electronic work is discovered and reported to you within 90 days of - receipt of the work. - -* You comply with all other terms of this agreement for free - distribution of Project Gutenberg-tm works. - -1.E.9. If you wish to charge a fee or distribute a Project -Gutenberg-tm electronic work or group of works on different terms than -are set forth in this agreement, you must obtain permission in writing -from both the Project Gutenberg Literary Archive Foundation and The -Project Gutenberg Trademark LLC, the owner of the Project Gutenberg-tm -trademark. Contact the Foundation as set forth in Section 3 below. - -1.F. - -1.F.1. Project Gutenberg volunteers and employees expend considerable -effort to identify, do copyright research on, transcribe and proofread -works not protected by U.S. copyright law in creating the Project -Gutenberg-tm collection. Despite these efforts, Project Gutenberg-tm -electronic works, and the medium on which they may be stored, may -contain "Defects," such as, but not limited to, incomplete, inaccurate -or corrupt data, transcription errors, a copyright or other -intellectual property infringement, a defective or damaged disk or -other medium, a computer virus, or computer codes that damage or -cannot be read by your equipment. - -1.F.2. LIMITED WARRANTY, DISCLAIMER OF DAMAGES - Except for the "Right -of Replacement or Refund" described in paragraph 1.F.3, the Project -Gutenberg Literary Archive Foundation, the owner of the Project -Gutenberg-tm trademark, and any other party distributing a Project -Gutenberg-tm electronic work under this agreement, disclaim all -liability to you for damages, costs and expenses, including legal -fees. YOU AGREE THAT YOU HAVE NO REMEDIES FOR NEGLIGENCE, STRICT -LIABILITY, BREACH OF WARRANTY OR BREACH OF CONTRACT EXCEPT THOSE -PROVIDED IN PARAGRAPH 1.F.3. YOU AGREE THAT THE FOUNDATION, THE -TRADEMARK OWNER, AND ANY DISTRIBUTOR UNDER THIS AGREEMENT WILL NOT BE -LIABLE TO YOU FOR ACTUAL, DIRECT, INDIRECT, CONSEQUENTIAL, PUNITIVE OR -INCIDENTAL DAMAGES EVEN IF YOU GIVE NOTICE OF THE POSSIBILITY OF SUCH -DAMAGE. - -1.F.3. LIMITED RIGHT OF REPLACEMENT OR REFUND - If you discover a -defect in this electronic work within 90 days of receiving it, you can -receive a refund of the money (if any) you paid for it by sending a -written explanation to the person you received the work from. If you -received the work on a physical medium, you must return the medium -with your written explanation. The person or entity that provided you -with the defective work may elect to provide a replacement copy in -lieu of a refund. If you received the work electronically, the person -or entity providing it to you may choose to give you a second -opportunity to receive the work electronically in lieu of a refund. If -the second copy is also defective, you may demand a refund in writing -without further opportunities to fix the problem. - -1.F.4. Except for the limited right of replacement or refund set forth -in paragraph 1.F.3, this work is provided to you 'AS-IS', WITH NO -OTHER WARRANTIES OF ANY KIND, EXPRESS OR IMPLIED, INCLUDING BUT NOT -LIMITED TO WARRANTIES OF MERCHANTABILITY OR FITNESS FOR ANY PURPOSE. - -1.F.5. Some states do not allow disclaimers of certain implied -warranties or the exclusion or limitation of certain types of -damages. If any disclaimer or limitation set forth in this agreement -violates the law of the state applicable to this agreement, the -agreement shall be interpreted to make the maximum disclaimer or -limitation permitted by the applicable state law. The invalidity or -unenforceability of any provision of this agreement shall not void the -remaining provisions. - -1.F.6. INDEMNITY - You agree to indemnify and hold the Foundation, the -trademark owner, any agent or employee of the Foundation, anyone -providing copies of Project Gutenberg-tm electronic works in -accordance with this agreement, and any volunteers associated with the -production, promotion and distribution of Project Gutenberg-tm -electronic works, harmless from all liability, costs and expenses, -including legal fees, that arise directly or indirectly from any of -the following which you do or cause to occur: (a) distribution of this -or any Project Gutenberg-tm work, (b) alteration, modification, or -additions or deletions to any Project Gutenberg-tm work, and (c) any -Defect you cause. - -Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm - -Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of -electronic works in formats readable by the widest variety of -computers including obsolete, old, middle-aged and new computers. It -exists because of the efforts of hundreds of volunteers and donations -from people in all walks of life. - -Volunteers and financial support to provide volunteers with the -assistance they need are critical to reaching Project Gutenberg-tm's -goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will -remain freely available for generations to come. In 2001, the Project -Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure -and permanent future for Project Gutenberg-tm and future -generations. To learn more about the Project Gutenberg Literary -Archive Foundation and how your efforts and donations can help, see -Sections 3 and 4 and the Foundation information page at -www.gutenberg.org - - - -Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation - -The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit -501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the -state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal -Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification -number is 64-6221541. Contributions to the Project Gutenberg Literary -Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by -U.S. federal laws and your state's laws. - -The Foundation's principal office is in Fairbanks, Alaska, with the -mailing address: PO Box 750175, Fairbanks, AK 99775, but its -volunteers and employees are scattered throughout numerous -locations. Its business office is located at 809 North 1500 West, Salt -Lake City, UT 84116, (801) 596-1887. Email contact links and up to -date contact information can be found at the Foundation's web site and -official page at www.gutenberg.org/contact - -For additional contact information: - - Dr. Gregory B. Newby - Chief Executive and Director - gbnewby@pglaf.org - -Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg -Literary Archive Foundation - -Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide -spread public support and donations to carry out its mission of -increasing the number of public domain and licensed works that can be -freely distributed in machine readable form accessible by the widest -array of equipment including outdated equipment. Many small donations -($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt -status with the IRS. - -The Foundation is committed to complying with the laws regulating -charities and charitable donations in all 50 states of the United -States. Compliance requirements are not uniform and it takes a -considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up -with these requirements. We do not solicit donations in locations -where we have not received written confirmation of compliance. To SEND -DONATIONS or determine the status of compliance for any particular -state visit www.gutenberg.org/donate - -While we cannot and do not solicit contributions from states where we -have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition -against accepting unsolicited donations from donors in such states who -approach us with offers to donate. - -International donations are gratefully accepted, but we cannot make -any statements concerning tax treatment of donations received from -outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff. - -Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation -methods and addresses. Donations are accepted in a number of other -ways including checks, online payments and credit card donations. To -donate, please visit: www.gutenberg.org/donate - -Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic works. - -Professor Michael S. Hart was the originator of the Project -Gutenberg-tm concept of a library of electronic works that could be -freely shared with anyone. For forty years, he produced and -distributed Project Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of -volunteer support. - -Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed -editions, all of which are confirmed as not protected by copyright in -the U.S. unless a copyright notice is included. Thus, we do not -necessarily keep eBooks in compliance with any particular paper -edition. - -Most people start at our Web site which has the main PG search -facility: www.gutenberg.org - -This Web site includes information about Project Gutenberg-tm, -including how to make donations to the Project Gutenberg Literary -Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to -subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks. - diff --git a/old/60986-8.zip b/old/60986-8.zip Binary files differdeleted file mode 100644 index 5a834ef..0000000 --- a/old/60986-8.zip +++ /dev/null diff --git a/old/60986-h.zip b/old/60986-h.zip Binary files differdeleted file mode 100644 index a937142..0000000 --- a/old/60986-h.zip +++ /dev/null diff --git a/old/60986-h/60986-h.htm b/old/60986-h/60986-h.htm deleted file mode 100644 index b4491fe..0000000 --- a/old/60986-h/60986-h.htm +++ /dev/null @@ -1,2827 +0,0 @@ -<!DOCTYPE html PUBLIC "-//W3C//DTD XHTML 1.0 Strict//EN" - "http://www.w3.org/TR/xhtml1/DTD/xhtml1-strict.dtd"> - -<html xmlns="http://www.w3.org/1999/xhtml" lang="fr" xml:lang="fr"> -<head> -<meta http-equiv="Content-Type" content="text/html;charset=iso-8859-1" /> -<title> - The Project Gutenberg eBook of L'Idée Médicale dans les Romans de Paul Bourget, by J. Grasset. -</title> -<link rel="coverpage" href="images/cover.jpg" /> -<style type="text/css"> - -p { text-align: justify; margin: .3em 0; text-indent: 1.5em; } -p.noindent { text-indent: 0; } - - -hr { margin: 1.5em 40%; width: 20%; } - -h1 { text-align: center; font-weight: normal; margin: 1em 0 1em 0; } -h2 { text-align: center; font-weight: normal; margin: 2em 0 1em 0; } -h3 { text-align: center; font-weight: normal; margin: 2em 0 1em 0; } - -.titre { text-align: center; font-size: 150%; text-indent: 0; - line-height: 1.5em} - -.blk { display: inline-block; } -.r { text-align: right; } - -sup, .fnanchor { font-size: .7em; vertical-align: top; font-style: normal; - font-weight: normal; font-variant: normal; } -i sup { padding-left: .25em; } - -.sc { font-variant: small-caps; } -.small { font-size: 85%; } -.xsmall { font-size: 75%; } -.large { font-size: 120%; } -.xlarge { font-size: 140%; } -.huge { font-size: 170%; } -.bold { font-weight: bold; } - -p.c, div.c { text-align: center; text-indent: 0; margin: 1em 0; line-height: 1.5em; } - -.ind { margin: 2.5em 0 1em 15%; text-indent: 0; } - -.sign { text-align: right; margin: 1em 10%; } -.date { margin: 1em 5%; font-size: 90%; } -.narrow { margin: 0 15%; } - -.poetry { margin: 1em 10%; } -.verse { text-indent: -3em; padding-left: 3em; } - - -a { text-decoration: none; } -.footnote { margin: .7em 0 .7em 20%; font-size: 90%; } -.footnote > p { text-indent: 0; } -.label { } - -ul { list-style-type: none; } -ul { padding: 1em 0; margin: 0; } -li { padding: 0 0 0 1.5em; margin: .1em 0; text-indent: -1.5em; } -li.top1em { margin-top: 1em; } - -.break, .chapter { margin-top: 5em; } -.gap { margin-top: 2.5em; } - -@media screen { - body { margin: 0 auto; width: 80%; max-width: 40em; } -} - -@media handheld { - body { margin: 0 0; width: 100%; } - .break, .chapter { page-break-before: always; } - .nobreak { page-break-before: avoid; } -} - - -</style> -</head> -<body> - - -<pre> - -The Project Gutenberg EBook of L'idée médicale dans les romans de Paul -Bourget, by Joseph Grasset - -This eBook is for the use of anyone anywhere in the United States and most -other parts of the world at no cost and with almost no restrictions -whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of -the Project Gutenberg License included with this eBook or online at -www.gutenberg.org. If you are not located in the United States, you'll have -to check the laws of the country where you are located before using this ebook. - -Title: L'idée médicale dans les romans de Paul Bourget - -Author: Joseph Grasset - -Release Date: December 21, 2019 [EBook #60986] - -Language: French - -Character set encoding: ISO-8859-1 - -*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK L'IDÉE MÉDICALE DANS LES *** - - - - -Produced by Clarity and the Online Distributed Proofreading -Team at http://www.pgdp.net (This file was produced from -images generously made available by The Internet -Archive/Canadian Libraries) - - - - - - -</pre> - -<div class="r"><div class="blk"> -<div class="c"><b class="large">D<sup>r</sup> J. GRASSET</b><br /> -<span class="small">Professeur de clinique médicale<br /> -à l'Université de Montpellier</span></div></div></div> -<h1 title="L'Idée Médicale dans les Romans de Paul Bourget"><i class="huge bold">L'Idée Médicale</i><br /> -<span class="xsmall">DANS LES</span><br /> -<i class="large bold">Romans de Paul Bourget</i></h1> - -<p class="c gap"><span class="large">MONTPELLIER</span><br /> -COULET & FILS, <span class="sc">Éditeurs</span><br /> -<span class="small">GRAND'RUE, 5</span></p> - -<p class="c">1904</p> - -<div class="break"></div> - -<h2 class="nobreak"><span class="small">A</span><br /> -MONSIEUR PAUL BOURGET<br /> -<span class="small">DE L'ACADÉMIE FRANÇAISE</span></h2> - -<div class="narrow"> -<p><i>Je dédie cette Conférence, en témoignage de profond et -reconnaissant dévouement, comme Diomède offrit ses grossières -armes d'airain en échange des armes d'or finement -ciselées de Glaucos.</i></p> - -<div class="sign">J. G.</div> -<div class="date">Montpellier, janvier 1904. -</div></div> -<div class="chapter"></div> - -<h2 class="nobreak"><span class="xlarge" id="page_7">L'IDÉE MÉDICALE</span><br /> -<span class="xsmall">DANS LES</span><br /> -<span class="large">ROMANS DE PAUL BOURGET</span></h2> - - -<p class="ind"><span class="sc">Mesdames</span>,<br /> -<span class="sc">Messieurs</span>,</p> - -<p>1. Etrange, à première vue, doit vous paraître -le choix de Paul Bourget pour étudier l'<i>idée médicale</i> -dans une grande œuvre littéraire.</p> - -<p>Et, en effet, vous ne trouverez, dans cette œuvre, -ni des Romans médicaux comme ceux d'André -Couvreur, ni des critiques de médecins comme -celles de Léon Daudet, ni des thèses médicales -comme chez Brieux ou chez de Curel, ni des descriptions -de maladie comme celles de Zola…</p> - -<p id="page_8">Il faut la chercher, pour trouver l'idée médicale, -dans les Romans de Paul Bourget. Mais, en -la cherchant, on la trouve (c'est du moins ce que -je voudrais vous prouver) et on la trouve <i>partout</i> -dans ses œuvres, comme ces solides assises de -fer qu'on découvre dans une belle maison en -écartant les tentures et en grattant un peu les -murailles.</p> - -<p>Vous comprendrez qu'un marchand de fer -trouve quelque plaisir à chercher et à montrer -son métal professionnel à travers et derrière -mille autres choses agréables qui le masquent -gentiment, tandis qu'il n'en trouverait plus aucun -à disserter sur l'ossature trop évidente et trop -nue de la tour Eiffel.</p> - -<hr /> - - -<p>2. Pour retrouver ainsi l'idée médicale dans -l'œuvre de Paul Bourget, il faut donner à ce mot -<i>médical</i> et au mot <i>médecin</i>, d'où il dérive, son -sens le plus large et d'ailleurs le seul vrai.</p> - -<p>Le médecin n'est pas, en effet (comme un vain -peuple pense), un monsieur qui échange des ordonnances -contre des honoraires. Le médecin est -un homme qui étudie et doit connaître la <i>vie -humaine</i> dans tous les détails de son évolution, -<a id="page_9"></a>à l'état de santé et à l'état de maladie. Car nul ne -peut réparer l'horloge détraquée, s'il n'en connaît -à fond le mécanisme intact dans son fonctionnement -normal.</p> - -<p>Et le médecin doit connaître l'homme vivant -dans son <i>unité totale</i>, formée de l'union, souvent -inextricable, du moral et du physique. Car, même -pour le spiritualiste le plus orthodoxe<a id="FNanchor_1" href="#Footnote_1" class="fnanchor">[1]</a>, le -corps étant encore l'outil indispensable de l'âme, -tout se tient dans la vie de l'homme.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_1" href="#FNanchor_1"><span class="label">[1]</span></a> Ceci pour prévenir les accusations que pourraient faire -naître contre Paul Bourget, chez des superficiels, des passages -comme celui-ci: «L'évêque d'Orléans avait signalé à la défiance -des pères de famille le philosophe (Taine) coupable d'avoir écrit -cette phrase hardie: «… le vice et la vertu sont des produits -comme le vitriol et comme le sucre…», phrase plus paradoxale -dans la forme que dans le fond; car éclairez-la d'un petit mot; -mettez des produits <i>psychologiques</i>… et vous lui restituez son -vrai sens». <i>Essais de Psychologie contemporaine; M. Taine</i> (1882), -p. 152.</p> -</div> -<p>Aveugle et impuissant serait le médecin qui -méconnaîtrait ces élémentaires principes.</p> - -<p>Le médecin est donc le <i>biologiste humain</i> et, -quand je parle d'étudier l'<i>idée médicale</i> dans -l'œuvre de Paul Bourget, c'est l'<i>idée biologique</i> -que je voulais dire.</p> - -<hr /> - - -<p id="page_10">3. Ces principes posés, j'aborde la dissection -biologique des Romans de Paul Bourget en vous -rappelant quelques-uns des <i>types de médecin</i> qu'on -y rencontre.</p> - -<p>Ils ne sont pas très nombreux. Un critique<a id="FNanchor_2" href="#Footnote_2" class="fnanchor">[2]</a> -n'en a trouvé que trois sur trois cent quatre-vingt-onze -personnages mis en scène. On en -trouvera davantage si on tient compte des simples -esquisses. En tous cas, ils sont finement observés -et joliment crayonnés.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_2" href="#FNanchor_2"><span class="label">[2]</span></a> <span class="sc">Jules Sageret.</span>—Les grands convertis. Paul Bourget. <i>La -Revue</i>, 1<sup>er</sup> et 15 novembre 1903, p. 297.</p> -</div> -<p>Voici d'abord un «praticien de quartier», le -D<sup>r</sup> Graux: «à côté des professeurs justement -illustres auxquels le temps manque et des charlatans -sans conscience que l'on doit supplier pour -en obtenir des consultations de cent francs», il est -un de ces «modestes docteurs qui tiennent le rôle, -autrefois si fréquent, aujourd'hui si rare, du médecin -de famille, toujours à portée et cependant -discret, et qui, connaissant ses clients depuis des -années, devenait naturellement leur ami et leur -conseiller»<a id="FNanchor_3" href="#Footnote_3" class="fnanchor">[3]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_3" href="#FNanchor_3"><span class="label">[3]</span></a> <i>L'Etape</i> (oct. 1901-mai 1902), p. 421.—Toutes les citations -des œuvres de Paul Bourget sont faites sur l'édition in-8<sup>o</sup> pour les -Romans parus dans les sept premiers volumes des Œuvres complètes, -dans l'édition in-18 pour les suivants.</p> -</div> -<p id="page_11">Tout autre est le D<sup>r</sup> Louvet<a id="FNanchor_4" href="#Footnote_4" class="fnanchor">[4]</a>, le médecin -mondain avec son salon d'attente, meublé «comme -un musée, avec la prodigalité de bibelots particulière -aux installations modernes». Il appartient à -«cette génération de savants, hommes du monde, -qui vont à l'hôpital le matin, reçoivent leurs -clients l'après-midi et trouvent le moyen d'avoir -de l'esprit, comme des oisifs, dans un salon, à -dix heures du soir». Aussi, «ont-ils l'intelligence -de préparer aux longues attentes de leurs belles -malades un décor où elles retrouvent un peu de -ce qu'elles ont laissé au logis, une face des choses -semblable à celle qui leur est coutumière», -tandis que, dans le cabinet du docteur, il n'y a -que des livres, «contraste habilement cherché par -Louvet, metteur en scène aussi habile qu'il était -bon diagnosticien»; Louvet, «ce mince avec un -air de mignon de Henri III. Je l'appelle toujours -Louvetsky, parce qu'il ne soigne que des -Russes»<a id="FNanchor_5" href="#Footnote_5" class="fnanchor">[5]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_4" href="#FNanchor_4"><span class="label">[4]</span></a> <i>Un Crime d'amour</i> (oct. 1885-janvier 1886), p. 208.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_5" href="#FNanchor_5"><span class="label">[5]</span></a> <i>Mensonges</i> (février-octobre 1887), p. 38.</p> -</div> -<p id="page_12">Tout à côté, on peut placer le D<sup>r</sup> Noirot, qui a -été interne à Bicêtre, «infiniment cynique et intelligent, -méthodique et doucement implacable, avec -un air d'employé plutôt que de médecin… Matérialiste -outrageux, expliquant la sensibilité humaine -par les plus dégradantes hypothèses, Noirot -donne l'exemple des vertus les plus délicates, -cousues à l'âme la plus gangrenée de négations. -Avec cela, observateur très habile, mais qui ne -croit guère à la médecine, il s'est fait, depuis des -années, une spécialité du massage… et gagne -soixante mille francs par an»<a id="FNanchor_6" href="#Footnote_6" class="fnanchor">[6]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_6" href="#FNanchor_6"><span class="label">[6]</span></a> <i>Physiologie de l'Amour moderne</i> (mai 1888-septembre 1889), -p. 550 et suivantes.</p> -</div> -<p>Chaque matin, il masse soigneusement le -baron Desforges, surveille son hygiène quotidienne -et ne lui permet que trois cigares par -jour. «On digère avec ses jambes», répète-t-il au -baron; «le massage, c'est du Liebig d'exercice»<a id="FNanchor_7" href="#Footnote_7" class="fnanchor">[7]</a>. -Ce Noirot assiste<a id="FNanchor_8" href="#Footnote_8" class="fnanchor">[8]</a> «au souper -triste» dans lequel, chez Marguerite Percy, on -devait manger du boudin blanc et rire avec les -<a id="page_13"></a>camarades, et dans lequel il y a tant de «silences -glacés» et de «rires faux». A la sortie, il émet -des théories bizarres sur la nécessité de la grande -vie pour la viveuse, comme la morphine et l'alcool -sont nécessaires à ceux qui s'y sont habitués, et -raconte la sauvage vengeance de Corsègues, qui -brûle sa femme, en plein Paris, comme au Malabar. -C'est un grand «original», ce Noirot, «un -médecin qui n'a jamais voulu être décoré et qui -n'essaie les remèdes nouveaux que lorsqu'il en -est sûr»<a id="FNanchor_9" href="#Footnote_9" class="fnanchor">[9]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_7" href="#FNanchor_7"><span class="label">[7]</span></a> <i>La Duchesse bleue</i> (déc. 1893-juin 1898), p. 445.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_8" href="#FNanchor_8"><span class="label">[8]</span></a> <i>Mensonges</i>, pp. 116, 251, 257.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_9" href="#FNanchor_9"><span class="label">[9]</span></a> <i>Physiologie de l'Amour moderne</i>, p. 487 à 504.</p> -</div> -<hr /> - - -<p>Je n'insiste pas sur quelques types secondaires, -comme: le médecin qui, ayant le génie de la -statistique, s'applique, dans un hôpital de femmes, -à dresser la liste des déflorateurs<a id="FNanchor_10" href="#Footnote_10" class="fnanchor">[10]</a>;—le -docteur Ch., qui dénonce si justement le danger -des vices de l'enfance<a id="FNanchor_11" href="#Footnote_11" class="fnanchor">[11]</a>;—Auguste Dupuy, -ce timide médecin de province, qui, abandonné -par sa femme, la reprend quand son amant -l'a quittée, et élève avec tendresse l'enfant de -<a id="page_14"></a>l'adultère<a id="FNanchor_12" href="#Footnote_12" class="fnanchor">[12]</a>;—le médecin de quartier qui entretient -Madame Malvina Raulet<a id="FNanchor_13" href="#Footnote_13" class="fnanchor">[13]</a>;—le médecin -sans clients, qui est député et enlève à -Poyanne son siège de conseiller général<a id="FNanchor_14" href="#Footnote_14" class="fnanchor">[14]</a>;—le -professeur Teresi et l'autre médecin sicilien -«recommandé par l'hôtelier»<a id="FNanchor_15" href="#Footnote_15" class="fnanchor">[15]</a>;—le médecin -américain, qui prescrit à son neurasthénique un -voyage «aux îles du Pacifique: quarante jours -sans télégraphe et sans téléphone»<a id="FNanchor_16" href="#Footnote_16" class="fnanchor">[16]</a>;—le -docteur Léon Pacotte, qui enseigne et pratique si -bien l'hygiène, a soixante-dix ans et a enterré Dupuytren, -Broussais et Orfila qui l'avaient condamné -comme phtisique, et dirige si intelligemment l'éducation -et le redressement moral des enfants<a id="FNanchor_17" href="#Footnote_17" class="fnanchor">[17]</a>;—le -docteur berrichon, qui est le médecin de -George Sand, et son camarade, le docteur Le -Prieux, qui, «dans le canton de Chevagnes…, -comptait autant de prétendus cousins, c'est-à-dire -de clients presque gratuits, que cette Sologne -<a id="page_15"></a>bourbonnaise compte de hameaux»<a id="FNanchor_18" href="#Footnote_18" class="fnanchor">[18]</a>;—le -pauvre médicastre de Noyelles, «si comiquement -inquiet sur l'avenir de sa plus fructueuse visite»<a id="FNanchor_19" href="#Footnote_19" class="fnanchor">[19]</a>…</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_10" href="#FNanchor_10"><span class="label">[10]</span></a> <i>Ibidem</i>, p. 337.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_11" href="#FNanchor_11"><span class="label">[11]</span></a> <i>Ibidem</i>, p. 362.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_12" href="#FNanchor_12"><span class="label">[12]</span></a> <i>Physiologie de l'Amour moderne</i>, p. 590.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_13" href="#FNanchor_13"><span class="label">[13]</span></a> <i>Mensonges</i>, p. 190.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_14" href="#FNanchor_14"><span class="label">[14]</span></a> <i>Un Cœur de femme</i> (décembre 1889-juillet 1890), p. 378.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_15" href="#FNanchor_15"><span class="label">[15]</span></a> <i>La Terre promise</i> (septembre 1891-avril 1892), p. 178 et 184.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_16" href="#FNanchor_16"><span class="label">[16]</span></a> <i>Voyageuses</i> (juillet 1897); <i>Deux Ménages</i>, p. 87.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_17" href="#FNanchor_17"><span class="label">[17]</span></a> <i>Le Talisman</i> (avril 1898), p. 283.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_18" href="#FNanchor_18"><span class="label">[18]</span></a> <i>Le Luxe des autres</i> (décembre 1899-février 1900), p. 91 et 93.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_19" href="#FNanchor_19"><span class="label">[19]</span></a> <i>Un Cas de conscience</i>. <span lang="en" xml:lang="en">The New-York Herald</span>, édition européenne, -numéro de Noël, 20 décembre 1903, p. 19.</p> -</div> -<p>Je signale le «profil perdu» de l'étudiante -russe, Sofia, dont le «projet était de retourner en -Russie, de pratiquer sa science dans son village -et de contribuer à la propagande des idées occidentales -parmi les paysans…, inexplicable fille, -qui parlait de l'amour, de la maternité, de la -mort, dans des termes d'un matérialisme scientifique -et à qui nulle bouche d'homme n'avait seulement -baisé la main»<a id="FNanchor_20" href="#Footnote_20" class="fnanchor">[20]</a>…, «nihiliste, athée -et vierge», comme l'étudiant d'Oxford<a id="FNanchor_21" href="#Footnote_21" class="fnanchor">[21]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_20" href="#FNanchor_20"><span class="label">[20]</span></a> <i>Profils perdus</i> (1880-1881); <i>Ancien Portrait</i>, p. 253 et 256.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_21" href="#FNanchor_21"><span class="label">[21]</span></a> <i>Ibidem</i>; <i>Autre Anglaise</i>, p. 274.</p> -</div> -<hr /> - - -<p>Eugène Corbières mérite aussi une mention -spéciale par sa manière de comprendre la médecine.</p> - -<p>Ce qui l'a décidé «à prendre cette voie, c'est le -besoin de certitude». Son esprit «a comme faim -<a id="page_16"></a>et soif de quelque chose de positif, d'indiscutable. -Les sciences naturelles donnent cela». Il -lui a semblé que «la médecine, comprise d'une -façon un peu haute», est «parmi les sciences naturelles -la branche qui se prête à une application -pratique telle que cette application soit acceptable -dans toutes les hypothèses» philosophiques. -Le médecin «est l'altruiste par excellence. Il est -dans le vrai quel que soit le postulat métaphysique -auquel nous nous rangions». Comme tout -grand médecin, il a «une exceptionnelle capacité -d'affirmation personnelle, de décision immédiate, -de parti pris effectif». Ce métier comporte, «si -l'on peut dire, un empoignement direct de la -réalité». Corbières permet de constater «cette -vertu presque militaire de la discipline médicale» -et, un jour, «ses collègues l'ont vu, avec une stupeur -que les années n'ont pas dissipée, brusquement, -peu de temps après les trois morts survenues -coup sur coup, quitter sa place enviée de -médecin des hôpitaux, sa magnifique clientèle -parisienne, la certitude de tous les honneurs, pour -entrer dans la congrégation des frères de Saint-Jean-de-Dieu, -<a id="page_17"></a>vouée, comme on sait, au service -des malades…»<a id="FNanchor_22" href="#Footnote_22" class="fnanchor">[22]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_22" href="#FNanchor_22"><span class="label">[22]</span></a> <i>L'Echéance</i> (décembre 1898), p. 9 à 11, 59 et 78.</p> -</div> -<p>Tout récent<a id="FNanchor_23" href="#Footnote_23" class="fnanchor">[23]</a> est le croquis de cet interne de -Trousseau, le héros de cette tragédie de scrupule, -qui formule et applique si bien ce grand principe -de déontologie: «pour un médecin, le grand -devoir, et qui prime tous les autres, c'est le service -du malade. Le médecin ne doit connaître -que cela, ne voir que cela». Il ne doit jamais -céder «à la tentation d'interposer son rôle au -chevet du patient». Il doit n'avoir jamais d'autre -mesure de ses actes «que la lutte avec la maladie, -quel que fût le malade et sans aucun souci -des conséquences».</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_23" href="#FNanchor_23"><span class="label">[23]</span></a> <i>Un Cas de conscience</i>, p. 19.</p> -</div> -<hr /> - - -<p>Je termine par le spécialiste du système nerveux -que Paul Bourget symbolise dans le professeur -Salvan et l'étudiant Bobetière.</p> - -<p>«Conservé par une existence continûment active -et ascétique…, mince et robuste, avec une -tête petite, dont le masque saisissant et glabre -rappelait la face napoléonienne de son maître -<a id="page_18"></a>Charcot…», Salvan associe, «comme jadis Trousseau, -un beau talent d'écrire aux plus solides qualités -de clinicien et d'anatomiste. Plus fameux -que connu, ses immenses travaux l'ont toujours -éloigné des salons… Ce manieur de misères humaines» -est un «sensible, malgré des allures -volontiers brusques qu'explique son métier de -neurologue…»<a id="FNanchor_24" href="#Footnote_24" class="fnanchor">[24]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_24" href="#FNanchor_24"><span class="label">[24]</span></a> <i>L'Eau profonde</i> (décembre 1902), p. 74, 138, 141.</p> -</div> -<p>A propos de Bobetière qui veut aussi se spécialiser -dans l'étude des maladies nerveuses, Paul -Bourget dit: «s'il est un ordre de connaissances -qui doive ramener un esprit à la vérité sociale, il -semble bien que ce soit celui-là, qui nous fait toucher -du doigt la fragilité de la pensée, l'équilibre -instable de la volonté, l'irrésistible et constante -pesée sur nous des influences héréditaires. Le -problème de la politique consistant à faire vivre -ensemble des hommes, il se ramène ou devrait se -ramener, pour un neurologue, à l'art de diriger -vers le bien commun et de neutraliser pour le -moindre mal une majorité d'impulsifs, de dégénérés -et de candidats à la manie»<a id="FNanchor_25" href="#Footnote_25" class="fnanchor">[25]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_25" href="#FNanchor_25"><span class="label">[25]</span></a> <i>L'Etape</i>, p. 148.</p> -</div> -<p id="page_19">Vous voyez que Paul Bourget comprend le médecin -et son rôle par le grand côté<a id="FNanchor_26" href="#Footnote_26" class="fnanchor">[26]</a>; il proclame -les relations de l'idée médicale avec les -problèmes qu'il discute dans ses Romans.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_26" href="#FNanchor_26"><span class="label">[26]</span></a> «Il en est du vrai prêtre comme du vrai médecin. L'un et -l'autre, devant un malade ou de corps ou d'âme, abolissent en -eux d'instinct tout ce qui n'est pas leur fonction». (<i>Une Confession</i>, -janvier 1897, p. 227).</p> -</div> -<hr /> - - -<p>4. Aussi aime-t-il les médecins et les biologistes; -et il ne s'en cache pas. Il les cite, emploie leur -langage, leur emprunte des comparaisons.</p> - -<p>Il intitule <i>Physiologie</i> sa belle étude de l'Amour -moderne et c'est de la définition du Dictionnaire -de médecine de Nysten que part Claude Larcher -pour déduire ses axiomes si curieux<a id="FNanchor_27" href="#Footnote_27" class="fnanchor">[27]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_27" href="#FNanchor_27"><span class="label">[27]</span></a> <i>Physiologie de l'Amour moderne</i>, p. 327.</p> -</div> -<p>Il cite volontiers Claude Bernard, Pasteur, -Jules Soury, Magendie, Flourens, Beaunis, Dieulafoy, -Legrand du Saulle, Brière de Boismont…, -dédie <i>Un cœur de femme</i> à Albert Robin…</p> - -<p>C'est à un confrère<a id="FNanchor_28" href="#Footnote_28" class="fnanchor">[28]</a> qu'il emprunte cette fière -devise: «où descendrions-nous sans la noble -douleur?».</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_28" href="#FNanchor_28"><span class="label">[28]</span></a> <i>L'Etape</i>, p. 422.</p> -</div> -<p id="page_20">Exposant la théorie du Roman d'analyse<a id="FNanchor_29" href="#Footnote_29" class="fnanchor">[29]</a>, il -«assimile le moraliste au clinicien» et montre -que, dans la littérature supérieure, comme en -médecine, il faut d'abord faire de l'anatomie et -de la physiologie (analyse) avant le diagnostic -(synthèse) et avant la thérapeutique (applications).</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_29" href="#FNanchor_29"><span class="label">[29]</span></a> <i>Œuvres complètes; Romans</i>, t. I (septembre 1900), -p. <small>VIII</small>.</p> -</div> -<p>René Vincy se sait «atteint» de «romantisme -analytique» et développe son mal «comme un -médecin qui cultiverait sa maladie par amour -d'un beau <i>cas</i>». «Ce que Claude Bernard faisait -avec ses chiens, ce que Pasteur fait avec ses -lapins», il le fait avec son cœur et lui injecte «tous -les virus de l'âme humaine»<a id="FNanchor_30" href="#Footnote_30" class="fnanchor">[30]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_30" href="#FNanchor_30"><span class="label">[30]</span></a> <i>Mensonges</i>, p. 75, 300.</p> -</div> -<p>Dans un grand nombre de passages, Paul -Bourget compare les maladies de l'âme à celles -du corps, décrit «leurs heures de convalescence<a id="FNanchor_31" href="#Footnote_31" class="fnanchor">[31]</a>, -leurs crises, leur thérapeutique…»<a id="FNanchor_32" href="#Footnote_32" class="fnanchor">[32]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_31" href="#FNanchor_31"><span class="label">[31]</span></a> <i>Une Idylle tragique</i> (avril 1895-février 1896), p. 311.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_32" href="#FNanchor_32"><span class="label">[32]</span></a> <i>Physiologie de l'Amour moderne</i>, p. 548. Titre du chapitre: -<i>Thérapeutique de l'amour</i>.—«La psychologie est à l'éthique ce -que l'anatomie est à la thérapeutique». (<i>Essais de Psychologie -contemporaine</i>, Préface de 1899, p. <small>X</small>).</p> -</div> -<p id="page_21">Il décrit souvent, et fort exactement, des types -pathologiques<a id="FNanchor_33" href="#Footnote_33" class="fnanchor">[33]</a> et conclut: «notre être moral -subit les mêmes lois que notre être physique»<a id="FNanchor_34" href="#Footnote_34" class="fnanchor">[34]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_33" href="#FNanchor_33"><span class="label">[33]</span></a> Voir notamment des passages: sur les névroses (<i>Un Crime -d'amour</i>, p. 247 et suiv.; <i>Physiologie de l'Amour moderne</i>, p. 332, -442 et 443; <i>L'Etape</i>, p. 336; <i>Une Idylle tragique</i>, p. 298); sur la -neurasthénie (<i lang="en" xml:lang="en">nervous exhaustion</i>) d'un Américain: «la rançon -d'une existence de <i lang="en" xml:lang="en">hard work</i> à tuer un Européen en quelques -mois» (<i>Voyageuses</i>; <i>Deux ménages</i>, p. 63); sur une tuberculeuse -(<i>La Terre promise</i>, p. 102); sur un cardiaque (<i>Un Homme d'affaires</i>, -octobre 1900, p. 29); sur l'hygiène du viveur Casal (<i>Un Cœur de -femme</i>, p. 359); sur l'artériosclérose (<i>Mensonges</i>, p. 21); sur un -cas d'aphasie avec hémiplégie droite et les traits tirés à gauche -(<i>André Cornelis</i>, avril-novembre 1886, p. 352); sur la télépathie -(<i>Nouveaux Pastels</i>. <i>Dix portraits d'homme</i>, 1890; <i>Autre joueur</i>, -p. 344); sur le spiritisme (<i>Mensonges</i>, p. 37); sur le rêve (<i>La -Duchesse bleue</i>, p. 542; <i>Un Cœur de femme</i>, p. 315); sur les avariés -scrofuleux (<i>La Duchesse bleue</i>, p. 372; <i>Physiologie de l'Amour -moderne</i>, p. 366 et 531: le «mal dont Voltaire accuse si plaisamment -Christophe Colomb»); sur les fous (<i>Ibidem</i>, p. 522, <small>LXXVI</small>); -sur les rapports de l'estomac et du système nerveux (<i>Ibidem</i>, -p. 554)… Dans l'<i>Echéance</i> (p. 43), il y a une excellente description -de l'alcoolique, de sa «loquacité… si douloureuse à suivre, tant -on la sent morbide, qui tour à tour précipite ou cherche les -mots», qui est «la première forme de ce qui sera, dans trois -mois, dans huit jours, demain, le délire expansif avec le dérèglement -de sa gloriole et de ses vantardises»… et de ces «hésitations -dans l'attaque des mots qui révèlent l'aphasie latente»,—dans -<i>Un Cas de conscience</i> (p. 20), la description du mal de -Bright, de l'urémie convulsive et de leur traitement…</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_34" href="#FNanchor_34"><span class="label">[34]</span></a> <i>Deuxième Amour</i> (octobre-novembre 1883), p. 139.</p> -</div> -<p id="page_22">Les analogies de la physiologie et de la psychologie -sont indiscutables; comme dit Taine, -«la littérature est une Psychologie vivante»<a id="FNanchor_35" href="#Footnote_35" class="fnanchor">[35]</a>. -Donc, rien de plus intimement lié que le Roman -et la Biologie.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_35" href="#FNanchor_35"><span class="label">[35]</span></a> <i>Essais de Psychologie contemporaine</i>, p. <small>X</small>.</p> -</div> -<hr /> - - -<p>Voilà l'opinion de Paul Bourget sur la <i>personne</i>, -la <i>langue</i> et la <i>méthode</i> des médecins et des biologistes. -Cela nous fait prévoir son opinion sur -leurs <i>doctrines</i>.</p> - -<hr /> - - -<p>5. Au fond, pour le biologiste, la vie d'un -homme, à un moment donné de son existence, -est résultante de quatre facteurs: l'<i>hérédité</i>, le -<i>milieu</i>, le <i>passé individuel</i> et l'<i>élément personnel</i> -(ce dernier facteur étant difficile à analyser scientifiquement, -mais indiscutable dans son existence).</p> - -<p>Je crois qu'il va être facile de vous montrer le -compte que tient Paul Bourget de ces quatre -facteurs dans la composition de ses personnages.</p> - -<hr /> - - -<p>6. Les Romans de Paul Bourget sont d'abord -dominés, d'un bout à l'autre, par l'idée de l'<i>hérédité</i>, -<a id="page_23"></a>morale et physique; les deux parties de -l'hérédité pouvant s'associer (le plus souvent) ou -se dissocier suivant les cas; «cette dure loi de -l'hérédité qui veut que nos tares physiques se -retrouvent chez nos enfants et non moins sûrement -nos tares sentimentales»<a id="FNanchor_36" href="#Footnote_36" class="fnanchor">[36]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_36" href="#FNanchor_36"><span class="label">[36]</span></a> <i>Sauvetage</i> (octobre 1897), p. 336.</p> -</div> -<hr /> - - -<p>Si Francis Nayrac ne peut pas atteindre <i>la Terre -promise</i>, c'est à cause de cette hérédité <i>physique</i> -qui lui fait reconnaître sa fille. Les anciens romanciers -auraient parlé de la voix du sang. Ici la base -de la reconnaissance est toute biologique et Francis -«voit son sang», tandis que sa fille est attirée, -non vers ce père qu'elle ne reconnaît pas, mais -vers la fiancée de son père, la rivale de sa -mère<a id="FNanchor_37" href="#Footnote_37" class="fnanchor">[37]</a>. Toute la complication psychologique -est ainsi à base biologique.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_37" href="#FNanchor_37"><span class="label">[37]</span></a> <i>La Terre promise</i>, p. 90, 131.</p> -</div> -<p>C'est encore la ressemblance physique qui fait -connaître le père de Noémie Hurtrel<a id="FNanchor_38" href="#Footnote_38" class="fnanchor">[38]</a>. Une -grande partie des tortures que subit Bassigny -vient de la ressemblance physique entre sa fille -naturelle qui ne le connaît pas et sa fille légitime -<a id="page_24"></a>qu'il a perdue<a id="FNanchor_39" href="#Footnote_39" class="fnanchor">[39]</a>. Pierre Fauchery retrouve -dans «une enfant de vingt ans, le portrait, l'hallucinant -portrait de celle qu'il a voulu épouser -trente ans auparavant»<a id="FNanchor_40" href="#Footnote_40" class="fnanchor">[40]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_38" href="#FNanchor_38"><span class="label">[38]</span></a> <i>L'Irréparable</i> (mai-juin 1883).</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_39" href="#FNanchor_39"><span class="label">[39]</span></a> <i>Sauvetage</i>.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_40" href="#FNanchor_40"><span class="label">[40]</span></a> <i>L'Age de l'Amour</i> (novembre 1896), p. 108.</p> -</div> -<p>Les Le Prieux, chez lesquels se passe un de -ces <i>Drames de famille</i> qui sont si puissamment -fouillés, sont tous dominés par l'hérédité physique. -Le <i>père</i>, «avec sa tête plus large que longue, -sa face presque plate et que termine un menton -rond, avec ses cheveux lisses et qui restent châtains -dans leur grisonnement, ses yeux bruns, -son cou puissant, ses épaules horizontales, son -torse épais, sa taille courte, toute sa personne -ramassée et trapue, présente un type accompli -de ce paysan celte, qui occupait cette partie de la -France à l'époque où César y parut».—La <i>mère</i> -«gardait cet admirable type méridional, qui prend, -lorsqu'il est très pur, des finesses et des élégances -de médaille grecque…; son front, petit et rond, se -rattachait à son nez par cette ligne presque droite -qui a tant de noblesse, et sa petite tête laissait -deviner, sous d'épais cheveux noirs, cette construction -<a id="page_25"></a>d'un ovale allongé, où se perpétue la race -de cet <i lang="la" xml:lang="la">homo mediterraneus</i>, de ce souple et fin -dolichocéphale brun, louangé par les anthropologistes…».—«Jamais -le mélange de deux sangs ne -fut plus visible» que chez la fille…<a id="FNanchor_41" href="#Footnote_41" class="fnanchor">[41]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_41" href="#FNanchor_41"><span class="label">[41]</span></a> <i>Le Luxe des autres</i>, p. 89, 99, 118.</p> -</div> -<hr /> - - -<div class="section"></div> -<p>Et cette hérédité physique se prolonge et s'accumule -comme chez cette «vieille lady en bonnet», -qui a «des joues où il tient quatre générations de -buveurs de porto»<a id="FNanchor_42" href="#Footnote_42" class="fnanchor">[42]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_42" href="#FNanchor_42"><span class="label">[42]</span></a> <i>La Terre promise</i>, p. 130.</p> -</div> -<p>C'est encore l'hérédité physique qui donne ses -«pieds larges» et ses «mains velues» à ce «butor -riche» d'Albert Duvernay qui a été trop évidemment -fabriqué «avec de l'épaisse étoffe humaine»<a id="FNanchor_43" href="#Footnote_43" class="fnanchor">[43]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_43" href="#FNanchor_43"><span class="label">[43]</span></a> <i>Le Fantôme</i> (mars 1900-janvier 1901), p. 23 et 24.</p> -</div> -<p>C'est «avec notre sang et nos nerfs que nous -avons un certain courage, autant dire avec notre -hérédité»<a id="FNanchor_44" href="#Footnote_44" class="fnanchor">[44]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_44" href="#FNanchor_44"><span class="label">[44]</span></a> <i>Un Homme d'affaires</i>, p. 50.</p> -</div> -<p>Chez Firmin Nortier, l'hérédité rurale se révèle -par «la carrure des épaules hautes, la charpente -lourde des gros os, la forte pesée du pied sur le -<a id="page_26"></a>sol»<a id="FNanchor_45" href="#Footnote_45" class="fnanchor">[45]</a>.—Alfred Chazel était «un fils du peuple, -et, malgré l'affinement intellectuel de deux générations, -l'origine paysanne reparaissait en lui à -des gaucheries de gestes et d'attitude»<a id="FNanchor_46" href="#Footnote_46" class="fnanchor">[46]</a>.—Chez -la baronne Ely, «cette hérédité avait pu -seule pétrir le masque, magnifique à la fois et si fin, -auquel une blancheur mate et chaude achevait de -donner un vague reflet oriental»<a id="FNanchor_47" href="#Footnote_47" class="fnanchor">[47]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_45" href="#FNanchor_45"><span class="label">[45]</span></a> <i>Un Homme d'affaires</i>, p. 7.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_46" href="#FNanchor_46"><span class="label">[46]</span></a> <i>Un Crime d'Amour</i>, p. 172.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_47" href="#FNanchor_47"><span class="label">[47]</span></a> <i>Une Idylle tragique</i>, p. 32.</p> -</div> -<p>Odile<a id="FNanchor_48" href="#Footnote_48" class="fnanchor">[48]</a> est l'histoire dramatique du suicide -héréditaire avec l'admirable description de la -tentation de la mort et de l'effroi qu'elle cause à -ces malheureux névrosés.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_48" href="#FNanchor_48"><span class="label">[48]</span></a> <i>Voyageuses</i>; <i>Odile</i>, p. 203 à 248.</p> -</div> -<hr /> - - -<p>L'âge modifie les signes de cette hérédité physique. -C'est ce que l'on voit chez Madame Castel à -qui sa fille ressemble au point d'infliger une sorte -de mélancolie à leurs amis. «D'une génération à -l'autre, il y a eu comme une marche en avant du -tempérament commun. La qualité dominante de -la physionomie est devenue plus dominante, symbole -visible d'un développement du caractère produit -<a id="page_27"></a>par l'hérédité. Trop fin déjà, le visage s'est -affiné davantage; sensuel, il s'est matérialisé; -volontaire, il s'est durci et séché. A l'époque où la -vie a fait toute son œuvre, lorsque la mère a passé -la soixantième année, la fille la quarantième, -cette gradation dans les ressemblances devient -comme palpable au contemplateur… l'aperception -des fatalités du sang devient si lucide alors, que -parfois elle tourne à l'angoisse»<a id="FNanchor_49" href="#Footnote_49" class="fnanchor">[49]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_49" href="#FNanchor_49"><span class="label">[49]</span></a> <i>Cruelle énigme</i> (juillet-septembre 1884), p. 5. Voir aussi p. -20, 21, 22 et 83.</p> -</div> -<p>N'était la perfection du style, qui ne s'observe -guère chez nous, ne diriez-vous pas ces lignes -écrites par un biologiste?</p> - -<hr /> - - -<p>L'hérédité purement <i>morale</i> éclate cruellement -chez ce fils d'un aigrefin et d'une sainte, qui -reproduit tous les vices du père et dont Claude -Larcher raconte la douloureuse histoire<a id="FNanchor_50" href="#Footnote_50" class="fnanchor">[50]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_50" href="#FNanchor_50"><span class="label">[50]</span></a> <i>Physiologie de l'Amour moderne</i>, p. 541.</p> -</div> -<p>«L'hérédité apparaît aussi comme un puissant -modificateur de cet instinct (sexuel). Entre la -fille d'un père chaste et celle d'un père qui a vécu, -entre le fils d'une honnête femme et le fils d'une -<a id="page_28"></a>femme galante, il y a la même différence qu'entre -les enfants d'un goutteux et ceux d'un phtisique»<a id="FNanchor_51" href="#Footnote_51" class="fnanchor">[51]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_51" href="#FNanchor_51"><span class="label">[51]</span></a> <i>Physiologie de l'Amour moderne</i>, p. 359.</p> -</div> -<p>Et le philosophe Victor Ferrand le proclame: -«qu'il y ait un atavisme moral, comme il y a un -atavisme physique, une hérédité en retour des -idées et des sentiments de nos aïeux, c'est un -fait indiscutable»<a id="FNanchor_52" href="#Footnote_52" class="fnanchor">[52]</a>, à l'appui duquel je pourrais -encore citer ce fils de voleur qui révèle son vrai -père en allant, la nuit, dérober des bonbons à -l'arbre de Noël du lendemain<a id="FNanchor_53" href="#Footnote_53" class="fnanchor">[53]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_52" href="#FNanchor_52"><span class="label">[52]</span></a> <i>L'Etape</i>, p. 25.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_53" href="#FNanchor_53"><span class="label">[53]</span></a> <i>Le vrai Père</i> (décembre 1894).</p> -</div> -<hr /> - - -<p>Le plus souvent l'hérédité n'est pas aussi dissociée -et porte à la fois sur le physique et sur -le moral. L'exemple le plus fouillé est certainement -celui des Monneron.</p> - -<p>Joseph Monneron, l'universitaire, «déclassé par -en haut, grâce aux concours», est fils d'un cultivateur -de Quintenas; sa femme a une mère indolente -et un père équivoque, «rentier interlope de -Nice, mi-courtier, mi-contrebandier». De là dérivent: -l'hypocrisie et la vulgarité d'Antoine, -<a id="page_29"></a>l'ignoble tenue et la flétrissure précoce de Gaspard, -l'incertitude et la morbidité de Jean, la -sensibilité déréglée de Julie<a id="FNanchor_54" href="#Footnote_54" class="fnanchor">[54]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_54" href="#FNanchor_54"><span class="label">[54]</span></a> <i>L'Etape</i>, p. 9, 63, 117, 215, 303.</p> -</div> -<hr /> - - -<p>Ainsi les hérédités se superposent et, formant -un tout complexe, aboutissent à des produits -divers, d'apparence contradictoire. Dans <i>le Fantôme</i>, -l'hérédité paysanne tourne en rudesse chez -Albert Duvernay et en bonhomie chez sa sœur.</p> - -<p>De même, «l'atavisme de la servitude a ces -deux effets qui ne sont contradictoires qu'en -apparence: il produit des capacités insondables -de sacrifice ou de perfidie. L'une et l'autre de -ces dispositions morales se trouvaient incarnées -dans le frère et dans la sœur. Ils s'étaient, comme -il arrive quelquefois, distribué le double caractère -de leur race: l'un en avait hérité toute la -vertu d'immolation, l'autre toute la puissance -d'hypocrisie»<a id="FNanchor_55" href="#Footnote_55" class="fnanchor">[55]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_55" href="#FNanchor_55"><span class="label">[55]</span></a> <i>Cosmopolis</i> (mai-octobre 1892), p. 418.</p> -</div> -<hr /> - - -<p>Et, dans cette hérédité, pèsent naturellement -les erreurs et les vices des ancêtres. Comme dit -<a id="page_30"></a>la Bible, «les fils seront punis pour les péchés -des pères»<a id="FNanchor_56" href="#Footnote_56" class="fnanchor">[56]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_56" href="#FNanchor_56"><span class="label">[56]</span></a> <i>Cosmopolis</i>, p. 572.</p> -</div> -<p>On comprend maintenant que le <i>Disciple</i> commence -sa confession à son Maître, après son -crime, par une longue analyse de ses hérédités<a id="FNanchor_57" href="#Footnote_57" class="fnanchor">[57]</a>, -et que Paul Bourget conclue de toutes -ses études: «On n'échappe pas à ses hérédités. -On les subit, quoiqu'on en ait, par toutes les -fibres dont on est tissé»<a id="FNanchor_58" href="#Footnote_58" class="fnanchor">[58]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_57" href="#FNanchor_57"><span class="label">[57]</span></a> <i>Le Disciple</i> (septembre 1888-mai 1889), p. 65.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_58" href="#FNanchor_58"><span class="label">[58]</span></a> <i>L'Etape</i>, p. 297.</p> -</div> -<hr /> - - -<p>Mais le biologiste ne doit pas uniquement -constater les résultats bruts de l'hérédité; il doit -étudier cette hérédité, dans son évolution, dans -sa vie, dans la suite de ses transformations. Car, -en passant d'une génération à l'autre, l'hérédité -rencontre des agents modificateurs, comme le -croisement et le milieu. Le biologiste doit analyser -les <i>lois</i> de ces modifications que le temps -apporte dans l'hérédité.</p> - -<hr /> - - -<p>Une de ces lois qui a le plus frappé Paul -<a id="page_31"></a>Bourget est certainement celle-ci: pour favoriser -l'amélioration et le perfectionnement de l'espèce, -les transformations par l'hérédité doivent se faire -lentement et progressivement; si on veut brûler -les étapes, on n'a plus de progrès: l'individu -régresse au contraire, soit au physique, soit au -moral.</p> - -<p>C'est ainsi que chez Joseph Monneron «le -paysan est trop près», et Jean peut dire à son -père: «on ne change pas de milieu et de classe -sans que des troubles profonds se manifestent -dans tout l'être, et nous avons changé de milieu -et de classe, c'est un fait, puisque le grand-père -Monneron est mort un paysan et que tu en as été -un jusqu'à ta dixième année».</p> - -<p>La grande culture a été donnée trop vite à son -père. La durée lui «manque, et cette maturation -antérieure de la race, sans laquelle le transfert de -classe est trop dangereux». C'est pour cela qu'il -paie la rançon de ce que Paul Bourget «appelle -l'Erreur française, et qui n'est au fond, tout au -fond, que cela: une méconnaissance des lois -essentielles de la famille».<a id="FNanchor_59" href="#Footnote_59" class="fnanchor">[59]</a></p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_59" href="#FNanchor_59"><span class="label">[59]</span></a> <i>L'Etape</i>, p. 44, 51, 458.</p> -</div> -<p id="page_32">Vous voyez comme notre romancier tire des -lois biologiques les lois sociales auxquelles il -tient le plus. Nous comprendrons mieux cela -quand nous aurons parlé des autres facteurs de -la vie humaine et spécialement du milieu, sur -lequel nous avons déjà empiété.</p> - -<hr /> - - -<p>7. Le <i>milieu</i>, en Biologie humaine, est extrêmement -complexe et il se complique d'autant -plus que l'individu est plus cultivé et plus élevé.</p> - -<p>Dans ce milieu, il faut nommer d'abord et surtout -la <i>famille</i>, qui est la première éducatrice<a id="FNanchor_60" href="#Footnote_60" class="fnanchor">[60]</a>, -le <i>pays</i> qui comprend la patrie et le petit pays -(la province, la ville que l'on habite), les <i>maîtres</i> -(maîtres de l'instruction et maîtres de l'éducation), -la <i>classe</i> de la société dans laquelle on vit, -et aussi d'une manière plus générale les <i>contemporains</i> -(artistes, littérateurs, hommes politiques, -collègues de la profession)…<a id="FNanchor_61" href="#Footnote_61" class="fnanchor">[61]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_60" href="#FNanchor_60"><span class="label">[60]</span></a> «Quand une femme se donne à un homme, ce dernier, s'il -était poli, enverrait ses cartes au père et à la mère de sa nouvelle -maîtresse, en écrivant au-dessous de son nom, comme il -sied: avec mille remerciements. Quatre-vingt-dix fois sur cent -il la leur doit». (<i>Physiologie de l'Amour moderne</i>, p. 382).</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_61" href="#FNanchor_61"><span class="label">[61]</span></a> Chez Poyanne, l'influence du milieu professionnel, du -métier, reprend ses droits dans les heures de crise. (<i>Un Cœur de -femme</i>, p. 382).</p> -</div> -<p id="page_33">Les noms seuls que je viens de prononcer vous -rappellent immédiatement une série de passages -dans lesquels Paul Bourget proclame l'influence -du milieu sur la vie humaine.</p> - -<hr /> - - -<p>«Notre destinée n'est, du petit au grand, que -notre caractère projeté au dehors, et ce caractère -lui-même n'est, en dernière analyse, qu'une résultante -des vastes faits généraux qui ont gouverné -le développement de notre individualité: notre -patrie, le moment de son histoire, ses mœurs, les -idées qui flottent dans son air»<a id="FNanchor_62" href="#Footnote_62" class="fnanchor">[62]</a>; et, immédiatement -après ses hérédités, le <i>Disciple</i> analyse son -<i>milieu d'idées</i><a id="FNanchor_63" href="#Footnote_63" class="fnanchor">[63]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_62" href="#FNanchor_62"><span class="label">[62]</span></a> <i>L'Etape</i>, p. 67.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_63" href="#FNanchor_63"><span class="label">[63]</span></a> <i>Le Disciple</i>, p. 83.</p> -</div> -<p>Dans la magnifique Etude qu'il a consacrée à son -maître Taine<a id="FNanchor_64" href="#Footnote_64" class="fnanchor">[64]</a>, Paul Bourget analyse avec le plus -grand soin son milieu. «Tout système se rattache -en effet par le plus étroit lien aux autres productions -de l'époque dans laquelle il a paru». On -ne peut même pas s'empêcher de penser que, -quoiqu'ils ne soient pas contemporains, Paul -<a id="page_34"></a>Bourget a un peu décrit, dans cette Etude, le -milieu dans lequel il s'est formé lui-même (à condition -d'ajouter Taine aux maîtres éducateurs), -milieu que caractérisent surtout l'influence des -progrès des sciences, l'envahissement des méthodes -scientifiques et l'amour des <i>faits</i>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_64" href="#FNanchor_64"><span class="label">[64]</span></a> <i>Essais de Psychologie contemporaine</i>; <i>M. Taine</i>, p. 164, 169.</p> -</div> -<p>Dans cette même Etude, Paul Bourget écrit -sur «l'illustre et infortuné Spinoza»: «si le pauvre -petit juif, poitrinaire et ombrageux, n'avait pas -été maudit par ses frères en religion, persécuté -par sa famille, dédaigné par la jeune fille qu'il -devait épouser, s'il n'avait senti, dès son adolescence, -la table de fer de la réalité peser sur sa -personne et la meurtrir, certes il n'aurait pas -écrit avec une soif si évidente d'abdication, avec -une telle horreur des vains désirs, les terribles -phrases où se complaît son stoïcisme intellectuel: -«ni dans sa façon d'exister, ni dans sa façon -d'agir, la nature n'a de principe d'où elle parte -ou de but auquel elle tende»; et cette autre qui, -rapprochée du consolant <i lang="la" xml:lang="la">Pater noster qui es in -cælis</i> de l'Evangile, prend toute sa force de cruel -fatalisme: «celui qui aime Dieu ne peut pas faire -d'effort afin que Dieu l'aime en retour»<a id="FNanchor_65" href="#Footnote_65" class="fnanchor">[65]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_65" href="#FNanchor_65"><span class="label">[65]</span></a> <i>Essais de Psychologie contemporaine</i>; <i>M. Taine</i>, p. 166.</p> -</div> -<p id="page_35">Ce milieu a lui-même une hérédité, il est fait -des influences antérieures. A travers les deux -volumes d'<i>Etudes psychologiques</i> «circule» cette -thèse «que les états de l'âme particuliers à une -génération nouvelle étaient enveloppés en germe -dans les théories et les rêves de la génération -précédente».</p> - -<hr /> - - -<p>Comme pour l'hérédité, le biologiste étudie et -détermine les conditions dans lesquelles cette -influence du milieu est bonne et salutaire pour -le développement et l'expansion de la vie humaine. -Une de ces conditions a particulièrement -frappé Paul Bourget, c'est la <i>continuité</i> et l'<i>unité</i> -d'action de ce milieu. Il faut donc, pour favoriser -le progrès biologique, que l'être vivant ne -change pas trop souvent ni trop brusquement de -milieu: dans ce dernier cas, il se développe des -désharmonies et des contradictions qui sont des -éléments de diminution dans la vie.</p> - -<p>En transportant cette loi biologique dans la -sociologie, on en déduit que la grande condition -du progrès pour une société d'hommes est de -constituer fortement une <i>nation</i> et une <i>race</i>, tandis -<a id="page_36"></a>que le <i>déracinement</i> et le <i>cosmopolitisme</i> facilitent -la régression et la décadence.</p> - -<p>«Les races perdent beaucoup plus qu'elles ne -gagnent à quitter le coin de terre où elles ont -grandi. Ce que nous pouvons appeler proprement -une famille, au vieux et beau sens du mot, a -toujours été constitué, au moins dans notre Occident, -par une longue vie héréditaire sur un même -point du sol. Pour que la plante humaine croisse -solide, et capable de porter des rejetons plus solides -encore, il est nécessaire qu'elle absorbe en -elle, par un travail puissant, quotidien et obscur, -la sève physique et morale d'un endroit unique<a id="FNanchor_66" href="#Footnote_66" class="fnanchor">[66]</a>». -Et Paul Bourget évoque le souvenir (rappelé -par Maurice Barrès dans les <i>Déracinés</i>) de -Taine aimant à se diriger vers un arbre adolescent -et vigoureux du square des Invalides, en -disant: «allons voir cet être bien portant»<a id="FNanchor_67" href="#Footnote_67" class="fnanchor">[67]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_66" href="#FNanchor_66"><span class="label">[66]</span></a> <i>Essais de Psychologie contemporaine</i>; <i>Stendhal</i> (1882), -p. 241.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_67" href="#FNanchor_67"><span class="label">[67]</span></a> <i>Ibidem</i>; <i>M. Taine</i>. Appendice G, p. 202.</p> -</div> -<p>L'<i>Etape</i> montre l'importance sociale qu'a «l'âge -de la race»<a id="FNanchor_68" href="#Footnote_68" class="fnanchor">[68]</a>; le <i>Disciple</i> montre les terribles -<a id="page_37"></a>effets d'un brusque changement de milieu<a id="FNanchor_69" href="#Footnote_69" class="fnanchor">[69]</a>; -l'idée de <i>Cosmopolis</i> est la permanence de la race -ballottée dans les milieux les plus variés et les plus -hétérogènes<a id="FNanchor_70" href="#Footnote_70" class="fnanchor">[70]</a>; dans <i>Fausse manœuvre</i>, c'est la -désharmonie et les contradictions du terrien déraciné -de sa province et vivant à Paris<a id="FNanchor_71" href="#Footnote_71" class="fnanchor">[71]</a>; dans le -<i>Portrait du doge</i>, c'est le choc de deux races -dans cette belle scène où se heurtent et pensent si -différemment le noble Français et l'Américain -riche…<a id="FNanchor_72" href="#Footnote_72" class="fnanchor">[72]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_68" href="#FNanchor_68"><span class="label">[68]</span></a> <i>L'Etape</i>, p. 105.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_69" href="#FNanchor_69"><span class="label">[69]</span></a> <i>Le Disciple</i>, p. 108.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_70" href="#FNanchor_70"><span class="label">[70]</span></a> Le baron Hafner est le type du cosmopolite qui traverse -une série de milieux.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_71" href="#FNanchor_71"><span class="label">[71]</span></a> <i>Fausse manœuvre</i> (mai 1903), p. 343.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_72" href="#FNanchor_72"><span class="label">[72]</span></a> <i>Le Portrait du doge</i> (décembre 1897), p. 265.</p> -</div> -<p>Toute cette doctrine de l'utilité de la permanence -et de la durée du milieu est symbolisée -dans ce passage du <i>Timée</i> que Jean Monneron -évoque dans ses pénibles méditations<a id="FNanchor_73" href="#Footnote_73" class="fnanchor">[73]</a>: «Alors, -dans ce temple de Saïs, entouré par le Nil, un des -plus avancés en âge parmi les prêtres dit au -voyageur: O Solon, vous autres Grecs, vous -serez toujours des enfants et il n'y a pas un Grec -digne du beau nom de vieillard.—Et Solon demanda: -<a id="page_38"></a>Que veux-tu dire?—Que vous êtes très -jeunes quant à vos âmes, répondit le prêtre. Vous -n'y possédez aucune vieille doctrine, transmise -par les aïeux, aucun enseignement donné de siècle -en siècle par des têtes blanchies…».</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_73" href="#FNanchor_73"><span class="label">[73]</span></a> <i>L'Etape</i>, p. 306.</p> -</div> -<p>Pour faire une forte race, une grande nation, -il faut ne pas mériter le reproche de Platon; il -faut avoir l'unité, la durée, la permanence du -milieu.</p> - -<p>Il faut beaucoup d'hommes <i>encadrés</i> et <i>racinés</i>. -Le milieu n'est pas un décor inerte; c'est un -cadre qui vit et qui intervient dans la facture du -tableau.</p> - -<p>Voilà une autre des grandes lois sociologiques -de Paul Bourget qui a, elle aussi, une base absolument -biologique.</p> - -<hr /> - - -<p>8. L'hérédité et le milieu ne sont pas les seuls -facteurs de l'individualité humaine. A chaque -moment de son existence, cette individualité dépend -encore des <i>antécédents</i> du sujet, des moments -antérieurs de sa vie personnelle.</p> - -<p>Le mot de Gœthe «le présent a tous les droits» -n'est pas absolu. Le passé intervient constamment -dans notre vie actuelle. Et Paul Bourget symbolise -<a id="page_39"></a>cette loi biologique dans cette jolie légende -de l'âme du purgatoire qui ne pourra «entrer au -ciel qu'après être revenue sur la terre à tous les -endroits où, vivante, ses pas s'étaient posés, afin -d'effacer toutes les traces de ses démarches coupables, -afin de recueillir tous les vestiges de ses -actions vertueuses».</p> - -<p>Nous sommes ainsi forcés «de remettre sans -cesse nos pas dans nos pas, et il nous faut retrouver, -aux détours désappris de nos anciens -chemins, le fantôme de l'homme que nous fûmes -un jour!»<a id="FNanchor_74" href="#Footnote_74" class="fnanchor">[74]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_74" href="#FNanchor_74"><span class="label">[74]</span></a> <i>Les Pas dans les pas</i> (décembre 1902), p. 203.</p> -</div> -<hr /> - - -<p>A l'appui de cette loi de Biologie physicomorale -nous n'avons pas seulement les six tragédies morales -qui forment le Recueil «les Pas dans les pas» -pour établir que «tout se paie» dans le corps et -dans l'esprit. Nous retrouvons l'application et la -démonstration de ce principe dans une série -d'autres romans.</p> - -<p>Les dix histoires de <i>Recommencements</i> sont -«toutes un commentaire d'après nature d'une -<a id="page_40"></a>même vérité, formulée par le philosophe: <i>la vie -est une grande recommenceuse</i>»<a id="FNanchor_75" href="#Footnote_75" class="fnanchor">[75]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_75" href="#FNanchor_75"><span class="label">[75]</span></a> <i>Recommencements</i>. Dédicace à Charles de Pomairols (14 -janvier 1897), p. 1.</p> -</div> -<p>L'<i>Echéance</i>, toute entière, n'est que l'illustration -de cet «étrange dicton où les Italiens… ont -résumé, avec leur vive imagination, le retour de -la faute sur celui qui l'a commise: <i lang="it" xml:lang="it">la saetta gira, -gira</i>, disent-ils, la flèche tourne, <i lang="it" xml:lang="it">torna adosso a chi -la tira</i> et elle retombe sur qui la tire». Et ainsi on -voit «combien est exact le <i>Tout se paie</i> de Napoléon -à Sainte-Hélène, par quels détours le châtiment -poursuit et rejoint la faute et que le hasard n'est -le plus souvent qu'une forme inattendue de l'expiation»<a id="FNanchor_76" href="#Footnote_76" class="fnanchor">[76]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_76" href="#FNanchor_76"><span class="label">[76]</span></a> <i>L'Echéance</i>, p. 25 et 6.</p> -</div> -<p>L'idée mère d'<i>André Cornelis</i> repose sur le -crime commis par le mystérieux Crawford (est-ce -là ou dans <i>Neptunevale</i><a id="FNanchor_77" href="#Footnote_77" class="fnanchor">[77]</a> que madame Humbert -a pris le nom de son mystérieux millionnaire?) -et l'influence que ce crime exerce sur l'assassin -et sur le fils de la victime: c'est l'analyse psychologique -de la logique implacable des choses.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_77" href="#FNanchor_77"><span class="label">[77]</span></a> <i>Voyageuses</i>; <i>Neptunevale</i>, p. 87 à 160.</p> -</div> -<p id="page_41">Une des bases d'<i>Une Idylle tragique</i> est certainement -ce passé de la baronne Ely, qui se -dresse à tout instant et lui fait dire: «Hautefeuille -et moi nous nous aimons avec un fantôme -entre nous, qu'il ne voit pas, mais que je vois -si bien»<a id="FNanchor_78" href="#Footnote_78" class="fnanchor">[78]</a>. Et plus tard, quand Olivier du Prat -a été tué, «un mort est entre ces deux vivants, -qui, jamais, jamais, ne s'en ira», comme entre -les héros du <i>Roman comique</i> d'Anatole France.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_78" href="#FNanchor_78"><span class="label">[78]</span></a> <i>Une Idylle tragique</i>, p. 137.</p> -</div> -<p>Dans le Roman qui porte ce nom même, <i>le -Fantôme</i> de la mère antérieurement aimée se -dresse constamment devant Etienne Malclerc et, -quand il a épousé la fille, lui donne la sensation -de l'inceste.</p> - -<p>Francis Nayrac, de <i>la Terre promise</i>, est écrasé -par «son impuissance à s'échapper de ce passé -qui refluait sur lui toujours, comme la marée -reflue sur le malheureux qu'elle a une fois surpris, -le renversant d'un coup de lame lorsqu'il se relève, -l'enveloppant de houle quand il court, l'aveuglant -d'écume quand il cherche un rocher où s'appuyer, -l'assourdissant de clameurs quand il appelle». -<a id="page_42"></a>Et, vaincu, il s'écrie: «c'est donc vrai que l'on -ne refait pas sa vie? c'est donc vrai que notre -passé nous poursuit sans cesse dans notre avenir?»<a id="FNanchor_79" href="#Footnote_79" class="fnanchor">[79]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_79" href="#FNanchor_79"><span class="label">[79]</span></a> <i>La Terre promise</i>, p. 197, 252.</p> -</div> -<p>C'est ce même passé, mais plus aimable, que -René Vincy évoque et objective dans cette chanson -en deux strophes «que la bonne Madame -Ethorel avait qualifiée de sonnet»:</p> - -<div class="poetry"> -<div class="verse">Le spectre d'une ancienne année</div> -<div class="verse">M'est apparu, tenant aux doigts</div> -<div class="verse">Une blanche rose fanée,</div> -<div class="verse">Et murmurant à demi-voix:</div> -<div class="verse">Où donc est ton cœur d'autrefois?<a id="FNanchor_80" href="#Footnote_80" class="fnanchor">[80]</a></div> -</div> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_80" href="#FNanchor_80"><span class="label">[80]</span></a> <i>Mensonges</i>, p. 121.</p> -</div> -<p>Et ce n'est pas seulement le passé <i>moral</i> qui -saisit ainsi constamment notre présent et notre -lendemain. C'est aussi le passé <i>physique</i>. Les maladies -de l'enfance, de l'adolescence, des années -précédentes gouvernent, je pourrais dire tyrannisent, -notre santé ultérieure. Il y a des maladies -qui créent en nous ce que nous appelons en médecine -des <i>tempéraments morbides</i>, c'est-à-dire qu'on -vit toute sa vie ultérieure en arthritique ou en -avarié.</p> - -<p id="page_43">Et, à cause de l'intrication si souvent signalée -du physique et du moral, nos antécédents physiques -pèsent sur notre vie morale. C'est ainsi que -vous comprendrez Paul Bourget parlant de l'influence -du lard, du fromage et des pommes de -terre sur un sentiment, qui est certainement des -plus élevés mais des plus complexes, l'amour. -Et, en effet, sur la manière de comprendre l'amour -influent les éléments physiques qui paraissent le -plus distants: «la nourriture», «la boisson», «les -occupations», «l'air respiré»…</p> - -<p>«Un laboureur, nourri de lard, de fromage et -de pommes de terre, qui peine tout le jour, qui -n'ouvre jamais un livre, quand il est assailli par -la puberté, comme une bête, vers ses dix-huit ans, -peut-il être comparé à ce que nous étions, vous ou -moi» (c'est Claude Larcher qui parle), «à cet âge -où notre innocence valait à peu près celle d'un -capitaine de hussards?»<a id="FNanchor_81" href="#Footnote_81" class="fnanchor">[81]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_81" href="#FNanchor_81"><span class="label">[81]</span></a> <i>Physiologie de l'Amour moderne</i>, p. 358.</p> -</div> -<p>Tous ces passages (et j'aurais pu en rapprocher -beaucoup d'autres) suffisent à vous montrer de -quelle admirable manière Paul Bourget développe -<a id="page_44"></a>cette idée biologique et montre, dans chaque -cas, l'importance de ce que nous appelons, -dans une observation médicale, les <i>antécédents -personnels</i> du sujet.</p> - -<hr /> - - -<p>9. Le dernier facteur de l'individualité humaine -comprend pour le biologiste tous les autres éléments, -inconnus ou mal connus, qui ne sont ni -l'hérédité, ni le milieu, ni les antécédents, et qu'on -appelle, faute de meilleur mot, l'<i>élément personnel</i>.</p> - -<p>La preuve de cet élément est donnée par ce fait -que les facteurs déjà étudiés n'ont pas un résultat -fatal et nécessaire; il y a dans les faits vitaux une -contingence indiscutable, en rapport avec la plus -grande complexité de la structure et qui distingue -les êtres vivants des corps bruts.</p> - -<p>Quand on étudie un phénomène physique ou -chimique, on peut, en connaissant bien les corps -mis en présence, les conditions de chaleur, de -lumière, de milieu ambiant, déterminer exactement -et prévoir ce qui se produira. Pour l'être -vivant, il n'en est pas de même.</p> - -<p>Cet imprévu, cet aléa dans le résultat augmentent -d'autant plus que l'être vivant a un organisme -<a id="page_45"></a>plus compliqué, est plus élevé dans l'échelle. Chez -l'homme, cette complexité est au maximum et -l'élément personnel, la cote individuelle prend -une importance d'autant plus grande qu'il faut, -de plus, tenir compte ici de l'élément psychique -et de l'élément moral, facteurs capitaux qui varient -tellement d'un individu à un autre.</p> - -<p>Voilà donc la loi de Biologie humaine à laquelle -les faits conduisent naturellement: deux individus -ayant les mêmes hérédités, le même milieu -et les mêmes antécédents ne sont pas nécessairement -les mêmes à un moment donné de leur existence.</p> - -<p>Paul Bourget a nettement appliqué, démontré -et illustré cette loi.</p> - -<hr /> - - -<p>Le meilleur exemple est certainement encore -cette famille Monneron, dans laquelle dans les -mêmes conditions de famille et d'éducation, on voit -se développer: Gaspard, un dépravé précoce et un -grossier; Antoine, viveur et faussaire; Julie, criminelle -aussi, mais avec plus de distinction et -d'élévation dans l'esprit; Jean, un vaillant et un -fort;—les uns étant ainsi bien inférieurs, le -<a id="page_46"></a>dernier étant supérieur à leurs hérédités et à leur -milieu.</p> - -<p>Nous pourrions prendre dans d'autres Romans -des exemples des corrections que cet élément individuel -peut apporter aux autres facteurs.</p> - -<p>Perron Dumenil, fils d'un avocat d'affaires et -d'origine plébéienne, manœuvre «de manière qu'il -a vécu et qu'il est mort membre du Jockey! Il est -vrai qu'il datait d'une des élections du siège» et -«avait traversé les lignes prussiennes pour venir -poser sa candidature dans le seul ballottage où il -eût quelque chance d'être élu»<a id="FNanchor_82" href="#Footnote_82" class="fnanchor">[82]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_82" href="#FNanchor_82"><span class="label">[82]</span></a> Le <i>Cob rouan</i> (mars 1903), p. 206.</p> -</div> -<p>C'est l'élément individuel qui fait d'Hubert -Liauran un jeune homme «comme les autres», -malgré l'éducation exceptionnelle que lui ont -donnée sa mère et sa grand'mère, deux saintes<a id="FNanchor_83" href="#Footnote_83" class="fnanchor">[83]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_83" href="#FNanchor_83"><span class="label">[83]</span></a> <i>Cruelle Enigme</i>, p. 127.</p> -</div> -<p>C'est la lutte de l'élément individuel contre les -autres facteurs qui produit les nombreuses contradictions -présentées par Rumesnil, à la fois -«gentilhomme, chatouilleux sur le point d'honneur -comme un raffiné de l'ancien régime», «idéaliste -<a id="page_47"></a>humanitaire» qui préside l'Union Tolstoï, -fondation socialiste, pense, comme un duc anticlérical -ou un marquis voltairien, «contre son -milieu» et, en même temps, séduit Julie et organise -tout pour la rendre criminelle. C'est encore -la lutte de cet élément individuel qui donne à -Joseph Monneron «cette infaillible logique dans -le faux» qui, avec l'instruction complète d'un éducateur -national, lui fait si mal réussir l'éducation -de sa propre famille<a id="FNanchor_84" href="#Footnote_84" class="fnanchor">[84]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_84" href="#FNanchor_84"><span class="label">[84]</span></a> L'<i>Etape</i>, p. 129, 167 et 269.</p> -</div> -<hr /> - - -<div class="section"></div> -<p>En affirmant ainsi l'élément individuel, c'est-à-dire -l'existence personnelle du moi chez chacun, -Paul Bourget se sépare complètement de Taine, -pour qui, au contraire, les «génératrices» ont une -influence absolue, nécessaire et fatale. Quand il -étudie «la personnalité d'un écrivain ou d'un -général», celui-ci ne procède «pas autrement qu'un -chimiste placé devant un gaz ou qu'un physiologiste -en train d'examiner un organisme»<a id="FNanchor_85" href="#Footnote_85" class="fnanchor">[85]</a>. Pour -Paul Bourget, tout cela n'est pas identique: dans -l'organisme vivant il y a quelque chose de plus -<a id="page_48"></a>que dans le gaz: il y a une unité, un individu -qui s'affirme encore bien mieux dans sa personnalité -complète quand il s'agit de l'homme<a id="FNanchor_86" href="#Footnote_86" class="fnanchor">[86]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_85" href="#FNanchor_85"><span class="label">[85]</span></a> <i>Essais de Psychologie contemporaine</i>; <i>M. Taine</i>, p. 171.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_86" href="#FNanchor_86"><span class="label">[86]</span></a> Paul Bourget n'admet pas, avec Stendhal, que «le tempérament -et le milieu font tout l'homme». <i>Essais de Psychologie contemporaine</i>: -<i>Stendhal</i>, p. 215.</p> -</div> -<p>Vous voyez comme l'idée biologique se développe -dans l'œuvre de Paul Bourget et comme -elle se précise dans le sens de la doctrine vitaliste -que Barthez et Bichat ont exposée au commencement -du XIX<sup>e</sup> siècle et que Laënnec, Claude Bernard -et Pasteur ont si magnifiquement complétée -et couronnée, de cette doctrine qui ne veut pas -confondre les phénomènes vitaux avec les phénomènes -physicochimiques, ni l'individu vivant avec -le cristal, et qui fait de la Biologie une science -spéciale et bien distincte de la science des corps -bruts.</p> - -<hr /> - - -<p>10. Voilà l'homme biologiquement constitué -dans ses quatre facteurs, l'hérédité, le milieu, les -antécédents, l'élément personnel. L'homme est -ainsi constitué comme une unité avec son psychisme -personnel, sa liberté et sa responsabilité, responsabilité -<a id="page_49"></a>personnelle, familiale et sociale. Cette personnalité -est si caractérisée, si particulière, que -dans la même famille et dans le même milieu on -rencontre souvent des génies et des névrosés, -aboutissants bien différents de facteurs constitutifs -identiques.</p> - -<p>Ceci nous conduit à l'étude d'une autre loi biologique -dont Paul Bourget a fait sa loi sociale: -c'est l'<i>inégalité</i> native et originelle des hommes.</p> - -<hr /> - - -<p>Pour le biologiste, les hommes naissent et vivent -inégaux; ils sont inégaux en force héréditaire -et personnelle, inégaux dans leurs organes, -dans leurs fonctions, dans leur psychisme, dans -leur sensibilité… en tout; pour le biologiste il -n'y a pas deux hommes égaux.</p> - -<p><i>Ce sont les philosophies spiritualistes et les religions -qui enseignent l'idée d'égalité en introduisant -l'idée de morale et de devoirs.</i> Les grands devoirs -sont les mêmes pour tous, tous doivent avoir les -mêmes droits et la même liberté pour remplir ces -devoirs. Donc <i>toutes les âmes sont égales</i>. Si, au -point de vue biologique, les hommes sont inégaux, -ils sont égaux au point de vue moral.</p> - -<p>Une société doit avoir pour objectif idéal l'égalisation -<a id="page_50"></a><i>par en haut</i> dans <i>l'égalité des devoirs</i> et -non l'égalisation <i>par en bas</i> dans <i>l'égalité des -droits</i>.</p> - -<p>Se plaçant au seul point de vue biologique, le -traducteur et commentateur du grand matérialiste -Haeckel, Vacher de Lapouge l'a dit très -nettement et très logiquement: «à la formule -célèbre qui résume le christianisme laïcisé de la -Révolution: Liberté, Egalité, Fraternité, nous -répondrons: Déterminisme, Inégalité, Sélection»<a id="FNanchor_87" href="#Footnote_87" class="fnanchor">[87]</a>. -C'est ce qu'exprime Jean Weber quand -il écrit: «la raison du plus fort est toujours la -meilleure; cette proposition voudrait être une -audace; ce n'est qu'une naïveté»<a id="FNanchor_88" href="#Footnote_88" class="fnanchor">[88]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_87" href="#FNanchor_87"><span class="label">[87]</span></a> <span class="sc">Ernest Haeckel.</span> <i>Le monisme, lien entre la religion et la -science. Profession de foi d'un naturaliste.</i> Préface et traduction -de <span class="sc">Vacher de Lapouge</span>, 1897.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_88" href="#FNanchor_88"><span class="label">[88]</span></a> <span class="sc">Jean Weber.</span> Citation d'<span class="sc">Alfred Fouillée</span>. <i>Le Mouvement -idéaliste et la réaction contre la science positive</i>, 1896, p. 267.</p> -</div> -<p>Voilà la loi biologique, si elle n'est pas corrigée, -<i>humanisée</i> par la loi morale. C'est ce qui m'a fait -toujours énergiquement soutenir<a id="FNanchor_89" href="#Footnote_89" class="fnanchor">[89]</a> que la Morale -complète la Biologie, mais ne doit pas être -<a id="page_51"></a>ramenée et identifiée à la Biologie. La morale biologique, -défendue aujourd'hui par tant de philosophes -depuis Herbert Spencer, ne peut donner -pour objectif à l'homme que le plaisir, le bonheur, -l'accroissement et l'expansion de la vie de -l'individu et de l'espèce. Or, cet objectif ne peut -pas comporter l'obligation et s'imposer à la liberté. -Et le plaisir de la vie accrue ne peut pas -être donné comme sanction de l'acte bon; car -trop souvent la peine et la douleur sont la seule -récompense actuelle du devoir accompli.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_89" href="#FNanchor_89"><span class="label">[89]</span></a> Voir: <i>Les Limites de la Biologie</i>. Bibliothèque de Philosophie -contemporaine, 2<sup>e</sup> édit. 1903, p. 23.</p> -</div> -<p>Une seconde loi biologique s'impose en effet -au physiologiste humain à côté de la loi de l'inégalité, -c'est la <i>loi de la douleur</i>, la douleur pouvant -accompagner normalement l'acte physiologique -le plus régulier, le plus désirable au point -de vue de la Biologie et pouvant être épargnée à -l'acte le plus antiphysiologique, pouvant être -remplacée même par le plaisir après un acte qui -diminue la vie de l'individu et encore plus la vie -de l'espèce.</p> - -<hr /> - - -<p>Ces deux grandes lois biologiques de l'inégalité -et de la douleur sont chères à Paul Bourget: -<a id="page_52"></a>nous en retrouvons partout la démonstration ou -la discussion.</p> - -<p>Il cite et rapproche: d'un côté, Taine, qui «comme -tous les philosophes qui voient dans l'état un -organisme, doit considérer et considère l'inégalité -comme une loi essentielle de la société»<a id="FNanchor_90" href="#Footnote_90" class="fnanchor">[90]</a>; de -l'autre, Stendhal qui dit, par la bouche de Julien: -«il n'y a pas de droit naturel… avant la loi, il -n'y a de naturel que la force du lion ou le besoin -de l'être qui a faim, qui a froid; le <i>besoin</i> -en un mot…»<a id="FNanchor_91" href="#Footnote_91" class="fnanchor">[91]</a>. Et Bourget ajoute: «apercevez-vous, -à l'extrémité de cette œuvre, la plus complète -que l'auteur ait laissée, poindre l'aube tragique -du pessimisme?»</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_90" href="#FNanchor_90"><span class="label">[90]</span></a> <i>Essais de Psychologie contemporaine</i>; <i>M. Taine</i>, p. 188.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_91" href="#FNanchor_91"><span class="label">[91]</span></a> <i>Ibidem</i>; <i>Stendhal</i>, p. 248.</p> -</div> -<p>Est-il besoin d'insister pour démontrer tous -les combats livrés par Paul Bourget contre ce -<i>pessimisme</i> et sa forme légère et plus dangereuse -encore, le <i>dilettantisme</i>.</p> - -<p>Relisez tout le premier chapitre de <i>Cosmopolis</i> -et la dernière phrase du marquis à Dorsenne: -«je ne sais pas pourquoi je vous aime tant, car -au fond vous incarnez, vous aussi, un des vices -<a id="page_53"></a>d'esprit qui me fait le plus d'horreur, ce dilettantisme, -mis à la mode par les disciples de M. Renan -et qui est le fond du fond de la décadence. -Mais vous en guérirez, j'en ai bon espoir. Vous -êtes si jeune!»<a id="FNanchor_92" href="#Footnote_92" class="fnanchor">[92]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_92" href="#FNanchor_92"><span class="label">[92]</span></a> <i>Cosmopolis</i>, p. 303.</p> -</div> -<p>C'est surtout dans <i>le Disciple</i> qu'est exposée -cette doctrine de la morale biologique que je vous -indiquais tout à l'heure. Robert Greslou l'applique -jusqu'à l'absurde dans ses expérimentations -psychologiques<a id="FNanchor_93" href="#Footnote_93" class="fnanchor">[93]</a> qui le conduisent, non seulement -au crime, mais à la lâcheté et au déshonneur. -Et son maître Adrien Sixte, qui aurait mérité -«aussi justement que le vénérable Emile -Littré» d'être appelé un «Saint Laïque», est terrifié -en voyant à quoi aboutissent, poussées à -l'extrême dans la pratique, les doctrines qu'il a -exposées dans ses livres «l'Anatomie de la volonté», -la «Psychologie de Dieu»… C'est la morale -évolutionniste de nos contemporains: «l'univers -moral reproduit exactement l'univers physique»<a id="FNanchor_94" href="#Footnote_94" class="fnanchor">[94]</a>. -C'est la morale dont l'exposé souleva, -<a id="page_54"></a>on s'en souvient, un différend avec Anatole -France<a id="FNanchor_95" href="#Footnote_95" class="fnanchor">[95]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_93" href="#FNanchor_93"><span class="label">[93]</span></a> «La résolution de séduire cette enfant sans l'aimer, par -pure curiosité de psychologue». <i>Le Disciple</i>, p. 120.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_94" href="#FNanchor_94"><span class="label">[94]</span></a> <i>Le Disciple</i>, p. 22, 23, 41.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_95" href="#FNanchor_95"><span class="label">[95]</span></a> <span class="sc">Anatole France.</span> La morale et la science. <i>La Vie littéraire</i>, -3<sup>e</sup> série, 1899, p. 59.</p> -</div> -<hr /> - - -<p>Il faut donc chercher ailleurs que dans la Biologie -même le complément moral des lois de la -vie humaine. Mais il ne faut pas, d'autre part, nier -ces lois biologiques (que les lois morales complètent -sans les détruire): la loi de l'inégalité et -la loi de la douleur.</p> - -<p>Dans la Préface manifeste qu'il a écrite pour -la réédition de ses Romans, Paul Bourget écrit: -«tout dans l'ordre moral comme dans l'ordre -physique est soumis à des lois» et, en tête de ces -lois «inéluctables, auxquelles notre libre arbitre -peut bien tenter de se soustraire, mais que nos -révoltes ne changent pas, non plus que nos désirs», -il place, à côté de «l'hérédité invincible -de la race», «l'inégalité incorrigible des individus»<a id="FNanchor_96" href="#Footnote_96" class="fnanchor">[96]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_96" href="#FNanchor_96"><span class="label">[96]</span></a> <i>Œuvres complètes</i>; <i>Romans</i>, t. I. Préface, -1900, p. <small>VII</small>.</p> -</div> -<p>De même, Ferrand proclame la nécessité de se -soumettre à ces deux lois «vérifiées depuis l'origine -<a id="page_55"></a>des âges»: «l'inégalité et la douleur». On -ne doit pas plus chanter:</p> - -<div class="poetry"> -<div class="verse">Du passé faisons table rase</div> -</div> - -<p class="noindent">que:</p> - -<div class="poetry"> -<div class="verse">Le monde va changer de base.</div> -</div> - -<p class="noindent">Car les lois biologiques de l'inégalité et de la douleur -restent toujours pour former cette base et il -est impossible même au «Demos Moloch» d'en -faire table rase. L'arbre tout entier ne peut pas devenir -fleur; les racines, le tronc et les branches ne -peuvent pas cesser leurs fonctions respectives. -«La science démontre que les deux lois de la vie, -d'un bout à l'autre de l'univers, sont la continuité -et la sélection…»<a id="FNanchor_97" href="#Footnote_97" class="fnanchor">[97]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_97" href="#FNanchor_97"><span class="label">[97]</span></a> <i>L'Etape</i>, passim.</p> -</div> -<p>J'arrête ces citations et je vous demande pardon -de l'austérité de ces derniers développements. -Mais il m'a paru impossible de ne pas montrer -combien biologique est la base des grandes lois -de l'inégalité et de la douleur qui se retrouvent -partout dans les Romans de Paul Bourget et combien -évidente apparaît, dans ces Romans, la nécessité -de compléter, chez l'homme, les lois de la -<a id="page_56"></a>Biologie par les lois d'une morale distincte et -séparée.</p> - -<hr /> - - -<p>11. Pour passer à un sujet moins austère, au -moins en apparence, je vais étudier la part de -l'idée biologique dans la manière dont Paul Bourget -envisage et étudie l'<i>amour</i>, ce sentiment qu'il -excelle à analyser de mille manières charmantes.</p> - -<p>Ne vous effarouchez pas, Mesdames, de me voir -aborder ce chapitre.</p> - -<p>Peut-on étudier Paul Bourget sans parler de -l'amour? La plupart de ses héros ne pourraient-ils -pas dire comme Thérèse de Sauve: «Vivre sans -aimer, est-ce vivre?»<a id="FNanchor_98" href="#Footnote_98" class="fnanchor">[98]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_98" href="#FNanchor_98"><span class="label">[98]</span></a> <i>Nouveaux Pastels</i>; <i>Jacques Molan</i>, p. 393.</p> -</div> -<p>Croyez d'ailleurs que je ne vais pas vous parler, -sur un sujet aussi délicat, la langue brutale du -physiologiste ou du médecin. Je ne vous parlerai -sur l'amour que la langue même de Paul Bourget, -que vous appréciez toutes si bien.</p> - -<p>Même dans cette langue, je ne vous développerai -pas toutes les idées de Claude Larcher et les -déductions qu'il tire de cette définition de Nysten -<a id="page_57"></a>dans laquelle est signalée l'association de l'instinct -de destruction comme une aberration fréquente -de l'amour<a id="FNanchor_99" href="#Footnote_99" class="fnanchor">[99]</a>, idées que développe aussi Adrien -Sixte quand il soutient «que l'instinct de la destruction -et celui de l'amour s'éveillent ensemble -chez le mâle»<a id="FNanchor_100" href="#Footnote_100" class="fnanchor">[100]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_99" href="#FNanchor_99"><span class="label">[99]</span></a> <i>Physiologie de l'Amour moderne</i>, p. 327.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_100" href="#FNanchor_100"><span class="label">[100]</span></a> <i>Le Disciple</i>, p. 50.</p> -</div> -<p>Certes ce serait bien là une étude biologique -qui appartient à notre sujet. Mais ce côté trop -physiologique nous entraînerait très loin et j'aime -mieux consacrer les quelques moments que vous -voulez bien me donner encore, à étudier le fondement -biologique de ce que Paul Bourget aime -tant à étudier et étudie si bien sous le nom de -<i>Complications sentimentales</i><a id="FNanchor_101" href="#Footnote_101" class="fnanchor">[101]</a>: le <i>dualisme</i> ou la -multiplicité dans l'amour.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_101" href="#FNanchor_101"><span class="label">[101]</span></a> <i>Complications sentimentales</i> (1897).</p> -</div> -<hr /> - - -<p>L'amour, ce sentiment si envahissant, si exclusif, -si jaloux, qui s'empare si complètement de -l'être tout entier, peut-il avoir plusieurs objets simultanés?</p> - -<p>Je ne parle pas bien entendu des amours divers, -<a id="page_58"></a>paternel, filial, patriotique…, qui font si bon -ménage ensemble; je parle de l'amour tout court, -le «grand amour» comme dit Elie Laurence<a id="FNanchor_102" href="#Footnote_102" class="fnanchor">[102]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_102" href="#FNanchor_102"><span class="label">[102]</span></a> <i>Deuxième Amour</i>, p. 229.</p> -</div> -<p>Cet amour là, on le comprend s'appliquant à -plusieurs objets <i>successivement</i>. Ce n'est pas encore -là la question.</p> - -<p>Mais comment l'âme, une et indivisible, peut-elle -se donner toute entière à deux personnes à la -fois? <i>Cruelle énigme!</i> Problème psychologique, -grave entre tous, qui me paraît insoluble en dehors -de l'explication biologique.</p> - -<hr /> - - -<p>D'abord le <i>fait</i> est matériellement établi dans -une série de Romans de Paul Bourget.</p> - -<p>Les exemples masculins sont peu gracieux et -moins démonstratifs, à cause de «l'irréductible -différence qui sépare le point de vue masculin et -celui de la femme, pour ce qui touche aux choses -de l'amour»<a id="FNanchor_103" href="#Footnote_103" class="fnanchor">[103]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_103" href="#FNanchor_103"><span class="label">[103]</span></a> <i>Sauvetage</i>, p. 289.</p> -</div> -<p>Je vous citerai cependant Bertrand d'Aydie qui -superpose à son amour pour Madame de Sarliève -<a id="page_59"></a>un autre amour pour l'<i>Amie écran</i> Madame de -Lautrec<a id="FNanchor_104" href="#Footnote_104" class="fnanchor">[104]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_104" href="#FNanchor_104"><span class="label">[104]</span></a> <i>L'Ecran</i> (août 1897).</p> -</div> -<p>«Ce que je garde depuis deux ans au fond de -mon cœur et qui doit en sortir, dit Boleslas à sa -femme, c'est qu'à travers ces funestes entraînements, -je n'ai jamais cessé de vous aimer»<a id="FNanchor_105" href="#Footnote_105" class="fnanchor">[105]</a>.—Henriette -«ne savait pas qu'un homme peut -mentir à une femme qu'il aime et l'aimer autant, -l'aimer davantage, avec une ardeur avivée par le -remords»<a id="FNanchor_106" href="#Footnote_106" class="fnanchor">[106]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_105" href="#FNanchor_105"><span class="label">[105]</span></a> <i>Cosmopolis</i>, p. 505.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_106" href="#FNanchor_106"><span class="label">[106]</span></a> <i>La Terre promise</i>, p. 174.</p> -</div> -<p>Je vous citerai enfin cet affreux Jacques Molan -qui aime à la fois la <i>Duchesse bleue</i> et Madame de -Bonnivet, autorise chez Madame de Bonnivet cette -soirée dans laquelle la pauvre duchesse bleue dit -des vers devant sa rivale et, renouvelant la scène -d'Adrienne Lecouvreur devant la duchesse de -Bouillon et Maurice de Saxe, récite du Racine et -stigmatise</p> - -<div class="poetry"> -<div class="verse">……… ces femmes hardies</div> -<div class="verse">Qui, goûtant dans le crime une honteuse paix,</div> -<div class="verse">Ont su se faire un front qui ne rougit jamais.</div> -</div> - -<p id="page_60">Le dilettante se contente de sourire et plus tard -il finit par faire avec cette scène une pièce qu'il -fait jouer par la même duchesse bleue, devenue -courtisane.</p> - -<hr /> - - -<p>J'aime mieux insister sur les exemples féminins, -bien plus intéressants et impossibles à expliquer -par une simple sécheresse de cœur.</p> - -<p>Dualiste: cette charmante Thérèse de Sauve -qui aime si complètement Hubert Liauran et va -retrouver le comte de La Croix-Firmin à Trouville. -«Quelle monstrueuse énigme! Comment, -avec cet amour divin dans son cœur, avait-elle -pu faire ce qu'elle avait fait?»<a id="FNanchor_107" href="#Footnote_107" class="fnanchor">[107]</a>.—Thérèse de -Sauve «avait trompé ce garçon qu'elle adorait, -entraînée par un caprice de sexualité qu'elle ne -comprenait plus elle-même»<a id="FNanchor_108" href="#Footnote_108" class="fnanchor">[108]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_107" href="#FNanchor_107"><span class="label">[107]</span></a> <i>Cruelle énigme</i>, p. 87.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_108" href="#FNanchor_108"><span class="label">[108]</span></a> <i>Nouveaux Pastels</i>; <i>Jacques Molan</i>, p. 367.</p> -</div> -<p>Dualiste: Madame de Tillières qui aime à la fois -Poyanne et Casal, au point d'étonner celui-ci qui -dit «non, c'est impossible; on n'a pas de place en -soi pour deux amours» et au point de trembler -<a id="page_61"></a>également pour ses deux amis quand elle apprend -qu'ils vont se battre<a id="FNanchor_109" href="#Footnote_109" class="fnanchor">[109]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_109" href="#FNanchor_109"><span class="label">[109]</span></a> <i>Un Cœur de femme</i>, p. 500 et 450 («Vous deux!») et tout le -chapitre «Dualisme», p. 392.</p> -</div> -<p>Dualistes: la baronne Ely<a id="FNanchor_110" href="#Footnote_110" class="fnanchor">[110]</a> et Claire de -Welde<a id="FNanchor_111" href="#Footnote_111" class="fnanchor">[111]</a> dont le second amant est le «seul», -l'«unique» amour, du vivant du premier.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_110" href="#FNanchor_110"><span class="label">[110]</span></a> <i>Une Idylle tragique</i>.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_111" href="#FNanchor_111"><span class="label">[111]</span></a> <i>Deuxième Amour</i>.</p> -</div> -<p>Dualiste: cette grande dame anglaise qui s'est -fait recevoir au <i lang="en" xml:lang="en">Flirting club</i> et s'y rend d'autant -plus joyeuse et en train qu'elle est plus rassurée -sur la santé de son mari. «Quand il est souffrant, -comme ces derniers jours, je n'ai plus le cœur à -flirter»<a id="FNanchor_112" href="#Footnote_112" class="fnanchor">[112]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_112" href="#FNanchor_112"><span class="label">[112]</span></a> <i>Profils perdus</i> (1880-1881); -<i lang="en" xml:lang="en">Flirting Club</i>, p. 264.</p> -</div> -<p>Dualiste et même plus: Clémentine de Ravigny -qui aime d'abord le comte de Miossens, puis -le député Michel Favanne, épouse le premier, -aime Videville, Edmond de Bonnivet…; cela fait -quatre, dont deux au moins occupent son cœur -en même temps. Ce qui fait dire d'elle au peintre -Miraut: c'est «très alliance russe, cet attelage à -trois; cela s'appelle une troïka, n'est-il pas -<a id="page_62"></a>vrai?», tandis que Favanne s'écriait: «est-ce -qu'on cesse jamais d'aimer, quand on aime véritablement»<a id="FNanchor_113" href="#Footnote_113" class="fnanchor">[113]</a> -comme Pierre Fauchery disait: -«l'homme ne cesse jamais d'aimer le même -être»<a id="FNanchor_114" href="#Footnote_114" class="fnanchor">[114]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_113" href="#FNanchor_113"><span class="label">[113]</span></a> <i>L'Inutile science</i> (janvier 1897), p. 256 et 187.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_114" href="#FNanchor_114"><span class="label">[114]</span></a> <i>L'Age de l'amour</i>, p. 96.</p> -</div> -<hr /> - - -<p>De tous ces faits, Paul Bourget formule lui-même -la conclusion: «il faut croire que la dualité -sentimentale, si coupable dans ses conséquences -et qui représente un tel abus de l'âme d'autrui, -correspond, dans certaines natures complexes, à -de profonds besoins et que cette anomalie est leur -vraie manière de sentir»<a id="FNanchor_115" href="#Footnote_115" class="fnanchor">[115]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_115" href="#FNanchor_115"><span class="label">[115]</span></a> <i>L'Ecran</i>, p. 23.</p> -</div> -<p>Voilà le fait brutal, plus facile à établir et à -analyser qu'à expliquer, au moins en psychologie -pure.</p> - -<p>On essaie des explications en opposant les mots -<i>cœur</i>, <i>tête</i>, <i>sens</i>: on aime l'un avec le cœur, un -autre avec la tête, ou bien un troisième avec les -sens.</p> - -<p>Ainsi, d'après Claude Larcher, les modernes -<a id="page_63"></a>aiment avec leur cerveau, sont des cérébraux<a id="FNanchor_116" href="#Footnote_116" class="fnanchor">[116]</a>. -Chez Thérèse de Sauve, c'est «le duel de la chair -et de l'esprit». «Thérèse avait des sens en même -temps qu'un cœur et… le divorce s'établissait à de -certaines heures entre les besoins de ce cœur et -la tyrannie de ces sens»<a id="FNanchor_117" href="#Footnote_117" class="fnanchor">[117]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_116" href="#FNanchor_116"><span class="label">[116]</span></a> <i>Physiologie de l'Amour moderne</i>, p. 367 et 398.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_117" href="#FNanchor_117"><span class="label">[117]</span></a> <i>Cruelle énigme</i>, p. 128 et 109.</p> -</div> -<p>Mais on ne peut employer ces mots que par -métaphore. Si on leur donne leur signification -scientifique, cela ne veut plus rien dire. On n'aime -jamais avec son organe-cœur, on ne peut pas -aimer sans ses sens-organes. Un biologiste est -obligé d'avoir un langage plus précis et il énonce -alors la théorie suivante.</p> - -<hr /> - - -<p>L'âme ou, si l'on préfère, la personne humaine -vraie, élevée, libre et responsable reste une et indivisible -toujours et partout, quelles que soient les -contradictions de ses actes et de ses sentiments. -La multiplicité des actes vient de l'outil qui, lui, -est complexe et divisible, et spécialement des -centres nerveux, qui sont l'agent indispensable et -<a id="page_64"></a>inévitable de l'amour, même le plus élevé et le -plus complet.</p> - -<p>Même dans l'amour platonique, dont Philippe -d'Audiguier est un si bel exemple, dans cet amour, -«à qui le scepticisme a donné un brevet de chimère -en le baptisant du nom d'un philosophe»<a id="FNanchor_118" href="#Footnote_118" class="fnanchor">[118]</a>, -même dans l'amour platonique les centres nerveux -jouent un rôle considérable.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_118" href="#FNanchor_118"><span class="label">[118]</span></a> <i>Le Fantôme</i>, p. 37.</p> -</div> -<p>Ce principe posé, je vous rappelle que les centres -nerveux sont un tout complexe et divisible, -formé d'une série de centres secondaires distincts, -depuis la partie la plus inférieure de la moelle -jusqu'aux parties les plus élevées du cerveau. Les -centres cérébraux qui président aux fonctions de -la pensée, aux fonctions psychiques, se subdivisent -eux-mêmes et nous distinguons les centres du -psychisme supérieur, du moi conscient, libre et -responsable (ce que j'appelle le centre O) et les -centres du psychisme inférieur, des actes inconscients -et automatiques (ce que j'appelle le polygone<a id="FNanchor_119" href="#Footnote_119" class="fnanchor">[119]</a>).</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_119" href="#FNanchor_119"><span class="label">[119]</span></a> Le D<sup>r</sup> <span class="sc">L. Laurent</span>, après avoir appliqué le schéma du polygone -à l'étude très fine de la psychologie des sourciers, vient, -dans un travail encore inédit (<i>Essais sur le mécanisme de l'inconscient. -Peut-on reconnaître aux sciences dites divinatoires -une base réellement scientifique?</i>) de l'appliquer à l'étude de certaines -divinations et à l'intuition de la physiognomonie, qui fait -rapidement porter à O des jugements sur les personnes, sympathiques -ou antipathiques, portant veine ou malchance, jugements -dont le polygone a préparé les «Considérant», à l'insu de O.—Cela -peut s'appliquer aux intuitions et aux pressentiments, si -bien décrits dans l'<i>Adversaire</i> (mai 1895).</p> -</div> -<p id="page_65">Normalement, pour chaque fonction, ces deux -ordres de centres collaborent, entrent en activité -synergiquement. Mais dans bien des cas leur -action peut se dissocier: les centres psychiques -inférieurs et les centres psychiques supérieurs -fonctionnent séparément et distinctement, quand -on est distrait ou quand on dort, par exemple, Archimède -sortant tout nu de son bain marche avec -ses centres psychiques inférieurs, tandis qu'il -trouve son problème et crie <i>Eurêka</i> avec son centre -O. Quand vous dormez, votre centre psychique -supérieur se repose et votre polygone rêve.</p> - -<p>Cette dissociation des deux ordres de centres -psychiques est plus accentuée dans des états -extraphysiologiques, qui ne sont pas encore la -maladie, comme le sommeil provoqué de l'hypnotisme -et l'état de transe des médiums. Enfin cette -<a id="page_66"></a>même dissociation peut devenir un véritable état -morbide et constitue le fond de certaines névroses -comme le somnambulisme et l'hystérie.</p> - -<p>Dans tous ces états de dissociation, il y a ce que -l'on appelle <i>dédoublement de la personnalité</i>.</p> - -<p>Vous rappelez-vous la <i>Nuit de Décembre</i>:</p> - -<div class="poetry"> -<div class="verse">Du temps que j'étais écolier,</div> -<div class="verse">Je restais un soir à veiller</div> -<div class="verse">Dans notre salle solitaire.</div> -<div class="verse">Devant ma table vint s'asseoir</div> -<div class="verse">Un pauvre enfant vêtu de noir,</div> -<div class="verse">Qui me ressemblait comme un frère.</div> -</div> - -<p>Comme Musset, Gœthe, Guy de Maupassant, -ont vu leur <i>double</i> venir au-devant d'eux, leur -parler, leur dicter<a id="FNanchor_120" href="#Footnote_120" class="fnanchor">[120]</a>…</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_120" href="#FNanchor_120"><span class="label">[120]</span></a> Voir <span class="sc">Paul Sollier</span>. <i>Les Phénomènes d'autoscopie</i>. Bibliothèque -de philosophie contemporaine, 1903.—Chez François Vernantes, -l'«incapacité d'agir provenait de l'hypertrophie d'une -puissance très spéciale: l'imagination de la vie intérieure. Il se -voyait vivre et sentir avec une telle acuité que cela lui suffisait. -Son action était au-dessus de lui et l'excès de l'analyse personnelle -absorbait toute sa sève». (<i>Pastels</i>; <i>Madame Bressuire</i>, -juin 1884, p. 64).</p> -</div> -<p>Au fond, il est inexact d'appeler cela des <i>dédoublements</i> -de la personnalité. La vraie personnalité -<a id="page_67"></a>est une et indivisible; elle reste avec les -centres supérieurs, pendant que les centres polygonaux, -dissociés, forment des personnalités -fausses, artificielles, <i>surajoutées</i>, plus ou moins -anormales ou même morbides.</p> - -<hr /> - - -<p>Tout ce que je viens de dire s'applique à l'amour -qui est une fonction cérébrale psychique. -L'amour vrai, complet et normal a pour organe -l'ensemble des centres psychiques, supérieurs et -inférieurs, unis et synergiques. Mais chez certaines -personnes il y a dissociation entre les deux -ordres de centres et alors il y a comme un dédoublement -de la personne aimante: l'amour vrai -restant celui des centres supérieurs, un ou plusieurs -autres amours adventices, accidentels, incomplets, -mais souvent très impérieux et trop -obéis, se développent dans le polygone.</p> - -<p>Les actes passionnels sont souvent automatiques -et polygonaux; on comprend donc un amour -polygonal à côté de l'amour vrai et complet du -psychisme supérieur.</p> - -<p>C'est l'unité du mot amour qui fait la confusion. -Quand Thérèse de Sauve va à Trouville, -elle continue à n'aimer vraiment qu'Hubert Liauran. -<a id="page_68"></a>L'acte polygonal par lequel elle se livre à -La Croix-Firmin ne devrait pas être appelé amour; -de même que l'hypnotisée à qui vous imposez -dans le sommeil une personnalité de <i>général</i> -reste <i>couturière</i> tout en commandant à des troupes -imaginaires; sa personnalité vraie et antérieure -n'a pas changé malgré ce déguisement -polygonal.</p> - -<hr /> - - -<div class="section"></div> -<p>De tout cela résultent trois principes:</p> - -<p>1<sup>o</sup> Le moi est un et la personnalité est une; le -dédoublement apparent du moi et de la personnalité -correspond à la dissociation des centres -psychiques et à l'apparition de fausses personnalités -polygonales;</p> - -<p>2<sup>o</sup> De même, dans tous les cas de dualisme -sentimental, il n'y a jamais égalité de deux amours -simultanés; un des amours reste toujours le vrai, -le supérieur, l'autre étant l'inférieur, l'incomplet, -le transitoire;</p> - -<p>3<sup>o</sup> Quand ce dualisme sentimental se développe -et atteint un certain degré, c'est un signe, chez le -sujet, d'un état au moins extraphysiologique, pas -entièrement normal, souvent même d'un état pathologique.</p> - -<p id="page_69">Cette doctrine me paraît s'adapter merveilleusement -à l'œuvre entière de Paul Bourget qui en -est comme imprégnée.</p> - -<p>En tête de l'<i>Irréparable</i>, il proclame que c'est le -«commentaire mondain et mélancolique de la doctrine -de son maître en psychologie sur la multiplicité -du moi»<a id="FNanchor_121" href="#Footnote_121" class="fnanchor">[121]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_121" href="#FNanchor_121"><span class="label">[121]</span></a> <i>L'Irréparable</i>, p. 5.</p> -</div> -<p>Et en effet Taine se donne comme un bel exemple -de dédoublement de personnalité: «j'ai fait -deux parts de moi-même, dit-il: l'homme ordinaire -qui boit, qui mange, qui fait ses affaires; -qu'il ait des opinions, une conduite, des chapeaux -et des gants comme le public, cela regarde le public. -L'autre homme, à qui je permets l'accès de -la philosophie, ne sait pas que ce public existe»<a id="FNanchor_122" href="#Footnote_122" class="fnanchor">[122]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_122" href="#FNanchor_122"><span class="label">[122]</span></a> <i>Essais de Psychologie contemporaine</i>; <i>M. Taine</i>, p. 162.</p> -</div> -<p>Dans Joseph Monneron il y avait deux êtres: -«l'un, le vrai, le <i>moi</i> raisonnable et raisonnant, -constitué par les idées pures, l'homme en soi de la -Déclaration des Droits; l'autre, l'animal inférieur, -<a id="page_70"></a><i>Médor</i>, fait pour obéir au premier, comme le chien -à son maître»<a id="FNanchor_123" href="#Footnote_123" class="fnanchor">[123]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_123" href="#FNanchor_123"><span class="label">[123]</span></a> <i>L'Etape</i>, p. 236.</p> -</div> -<p>Médor est la Bête de Xavier de Maistre qui le -conduit chez madame de Hautcastel quand <i>l'autre</i> -veut aller à la Cour. Médor est notre polygone.</p> - -<p>Chez Henry Bobetière, «comme chez Crémieu -Dax, la poussée de l'inconscient était la plus forte -aussitôt qu'il s'agissait de la chose publique»<a id="FNanchor_124" href="#Footnote_124" class="fnanchor">[124]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_124" href="#FNanchor_124"><span class="label">[124]</span></a> <i>Ibidem</i>, p. 149.</p> -</div> -<p>De même, dans Robert Greslou, il y a toujours -eu «deux personnes distinctes: une qui allait, venait, -agissait, sentait, et une autre qui regardait -la première aller, venir, agir, sentir, avec une -impassible curiosité»<a id="FNanchor_125" href="#Footnote_125" class="fnanchor">[125]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_125" href="#FNanchor_125"><span class="label">[125]</span></a> <i>Le Disciple</i>, p. 65.</p> -</div> -<p>François Vernantes semble, comme don Juan, -«posséder plusieurs âmes» et plaisante sur ce -qu'il appelle son «polypsychisme»<a id="FNanchor_126" href="#Footnote_126" class="fnanchor">[126]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_126" href="#FNanchor_126"><span class="label">[126]</span></a> <i>Pastels</i>; <i>Madame Bressuire</i>, p. 386.</p> -</div> -<p>«Quelle singulière machine qu'une femme -pourtant! on dirait qu'une cloison étanche sépare -l'amoureuse et l'autre»<a id="FNanchor_127" href="#Footnote_127" class="fnanchor">[127]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_127" href="#FNanchor_127"><span class="label">[127]</span></a> <i>La Duchesse bleue</i>, p. 376.</p> -</div> -<p>Vincy prend «une de ces décisions subites, qui -<a id="page_71"></a>révèlent un long travail de ce que les philosophes -appellent barbarement l'<i>inconscient</i>, le <i>subconscient</i>, -le <i>subliminal</i>. Le pédantisme de ces formules -n'empêche pas qu'elles étiquettent le plus exact -des faits»<a id="FNanchor_128" href="#Footnote_128" class="fnanchor">[128]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_128" href="#FNanchor_128"><span class="label">[128]</span></a> <i>Dernière Poésie</i> (novembre 1900), p. 295.</p> -</div> -<p>Voilà bien toute la doctrine biologique de la -dissociation des deux ordres de psychisme<a id="FNanchor_129" href="#Footnote_129" class="fnanchor">[129]</a> et -du dédoublement de la personnalité et l'application -de cette doctrine à la <i>pluralité des amours -simultanés</i>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_129" href="#FNanchor_129"><span class="label">[129]</span></a> Dans l'<i>Ecran</i> (p. 24), Paul Bourget discute même la théorie -du fonctionnement séparé des deux hémisphères cérébraux pour -expliquer ce dualisme.</p> -</div> -<hr /> - - -<p>D'autre part, Paul Bourget reconnaît le caractère -extraphysiologique, souvent morbide, de ces -dissociations et de ces dédoublements.</p> - -<p>Ce n'est pas l'amour en lui-même qu'il considère -comme une maladie, quoiqu'il en décrive la -thérapeutique et malgré l'axiome de Claude Larcher: -«l'amour est une maladie et le malade le -plus sage, pour cette maladie là comme pour les -autres, est celui qui, n'ayant jamais lu un livre de -<a id="page_72"></a>médecine, ne sait pas ce qu'il a et qui souffre sans -penser, comme une bête»<a id="FNanchor_130" href="#Footnote_130" class="fnanchor">[130]</a>; axiome qu'on peut -comparer à la définition de Boissier de Sauvages: -l'amour est une «maladie qui s'insinue entre les -jeunes filles et les jeunes gens…», maladie dont il -étudie les symptômes, le diagnostic, le pronostic -et le traitement<a id="FNanchor_131" href="#Footnote_131" class="fnanchor">[131]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_130" href="#FNanchor_130"><span class="label">[130]</span></a> <i>Physiologie de l'Amour moderne</i>, p. 526.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_131" href="#FNanchor_131"><span class="label">[131]</span></a> Voir: <i>Le Médecin de l'amour au temps de Marivaux. Etude -sur Boissier de Sauvages</i>, 1896.—La thèse de Sauvages (1724) -portait ce titre: <i lang="la" xml:lang="la">Dissertatio medica atque ludicra de Amore… -utrum sit Amor medicabilis herbis?</i></p> -</div> -<p>Non, Paul Bourget ne regarde pas l'amour -comme une maladie. Ce qu'il considère comme -une maladie, c'est la dissociation sentimentale, -aboutissant au dualisme ou à la multiplicité des -amours simultanés.</p> - -<p>Ici c'est une «anomalie d'âme si criminellement -pathologique»<a id="FNanchor_132" href="#Footnote_132" class="fnanchor">[132]</a>. Ailleurs ce sont des «difformités» -dans la «façon de sentir» qui entraînent -cette «singulière» et «détestable» «complication -d'âme»<a id="FNanchor_133" href="#Footnote_133" class="fnanchor">[133]</a>. Dans la Dédicace de la <i>Duchesse -bleue</i> à Madame Mathilde Sérao il dit nettement: -<a id="page_73"></a>«poussé à ce degré, ce phénomène de dédoublement -devient une déformation morale presque -monstrueuse, à laquelle il faut maintenir son -caractère d'exception»<a id="FNanchor_134" href="#Footnote_134" class="fnanchor">[134]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_132" href="#FNanchor_132"><span class="label">[132]</span></a> <i>Le Fantôme</i>, p. 8.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_133" href="#FNanchor_133"><span class="label">[133]</span></a> <i>L'Inutile science</i>, p. 193-194.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_134" href="#FNanchor_134"><span class="label">[134]</span></a> <i>La Duchesse bleue</i>, p. 331.</p> -</div> -<p>Donc, vous le voyez, sur tous ces points encore, -l'œuvre de Paul Bourget est conforme à la doctrine -biologique: il admet la dissociation des psychismes, -le caractère anormal des dissociés, et il -s'appuie sur ces idées pour expliquer les «complications -sentimentales» de ses héros.</p> - -<hr /> - - -<p>12. On peut donc conclure, ce me semble, que -l'idée médicale ou biologique, loin de rester étrangère -aux Romans de Paul Bourget, les pénètre et -les imprègne intimement: une dissection, même -rapide, permet de la bien mettre en lumière.</p> - -<p>Mais il faut se garder de dépasser cette conclusion -et de dire que ces Romans sont des œuvres -biologiques ou médicales.</p> - -<p>Paul Bourget est certainement un des auteurs -qui ont le mieux compris et limité les rapports de -la science et de la littérature<a id="FNanchor_135" href="#Footnote_135" class="fnanchor">[135]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_135" href="#FNanchor_135"><span class="label">[135]</span></a> Voir, sur les rapports de la Biologie avec la Littérature et -les Arts, le chapitre V des <i>Limites de la Biologie</i>, p. 74.</p> -</div> -<p id="page_74">Il avait déjà étudié cette question, pour la poésie, -à propos de Leconte de Lisle<a id="FNanchor_136" href="#Footnote_136" class="fnanchor">[136]</a>. Il parle des -poèmes scientifiques de Sully Prudhomme, montre -que le littérateur doit se documenter, le vrai -étant la source du beau; mais pour écrire un -poème, il faut «des yeux de poète ouverts sur des -hypothèses de science»<a id="FNanchor_137" href="#Footnote_137" class="fnanchor">[137]</a>. Les formules du savant -«expliquent» les phénomènes, elles ne les -«représentent» pas. Or, «cette représentation colorée -et vivante des choses est précisément le caractère -propre de l'esprit poétique»<a id="FNanchor_138" href="#Footnote_138" class="fnanchor">[138]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_136" href="#FNanchor_136"><span class="label">[136]</span></a> <i>Essais de Psychologie contemporaine</i>; <i>Leconte de Lisle</i>, -1884, p. 339 et 361.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_137" href="#FNanchor_137"><span class="label">[137]</span></a> <i>Ibidem</i>, p. 341.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_138" href="#FNanchor_138"><span class="label">[138]</span></a> «Un poète, c'est-à-dire le contraire d'un médecin et d'un -philosophe». <i>Mensonges</i>, p. 53.</p> -</div> -<p>Cela s'applique admirablement au Roman.</p> - -<p>Comme dit très bien Lanson<a id="FNanchor_139" href="#Footnote_139" class="fnanchor">[139]</a>, si un Roman -peut être vrai à la façon d'un tableau de Léonard -ou de Rembrandt, il ne saurait l'être à la façon -d'une démonstration de Laplace ou d'une expérience -de Pasteur. Et on peut appliquer au Roman -cette phrase de Brunetière: «l'imitation de la nature -<a id="page_75"></a>ne saurait être le terme de l'art de peindre -et, pour admirer, selon le mot de Pascal, les imitations -des choses dont nous n'admirons pas les -originaux, il faut que la pensée de l'artiste ait -démêlé en elles quelque chose de caché, d'intime -et d'ultérieur, que n'y discernait pas le regard du -vulgaire»<a id="FNanchor_140" href="#Footnote_140" class="fnanchor">[140]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_139" href="#FNanchor_139"><span class="label">[139]</span></a> <span class="sc">Lanson.</span> <i>La Littérature et la Science</i>, in -<i>Hommes et Livres</i>. <i>Etudes morales et littéraires</i>, 1895.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_140" href="#FNanchor_140"><span class="label">[140]</span></a> <span class="sc">Brunetière.</span> <i>La Renaissance de l'idéalisme</i>, 1896, p. 63-66.</p> -</div> -<p>Le Roman est une œuvre d'art et non une œuvre -de science. Il y a «des qualités indispensables, -malgré tout, à cet art du Roman qui ne saurait -se réduire à la dissertation pure»<a id="FNanchor_141" href="#Footnote_141" class="fnanchor">[141]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_141" href="#FNanchor_141"><span class="label">[141]</span></a> <i>Nouveaux Pastels</i>; <i>Monsieur Legrimaudet</i>, p. 149.</p> -</div> -<p>Le Roman ne doit pas donner seulement la <i>sensation -du Vrai</i> comme un exposé scientifique; il -doit donner l'<i>émotion du Beau</i> et l'<i>émotion du -Bien</i>.</p> - -<p>C'est là ce que produisent les Romans de Paul -Bourget: il nous présente des cas biologiques; -soit. Mais il les peint, au lieu de les décrire; il -fait vivre<a id="FNanchor_142" href="#Footnote_142" class="fnanchor">[142]</a> ses personnages et nous avons toujours, -<a id="page_76"></a>à la lecture, l'impression du vrai et du faux, -la nette distinction de ce qui est beau et de ce qui -ne l'est pas, de ce qui est moral et de ce qui ne -l'est pas, dans le tableau que nous venons de -lire.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_142" href="#FNanchor_142"><span class="label">[142]</span></a> Paul Bourget se calomnie quand, parlant de la limitation -du Roman d'analyse, il dit qu'il lui manque le coloris de la vie -en mouvement. <i>La Duchesse bleue</i>. Préface à Madame Mathilde -Sérao, p. 329.</p> -</div> -<p>Telle est bien l'idée que se fait Paul Bourget de -son Roman qu'il appelle le <i>Roman d'analyse</i> au -lieu de lui donner «le nom équivoque de psychologique»<a id="FNanchor_143" href="#Footnote_143" class="fnanchor">[143]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_143" href="#FNanchor_143"><span class="label">[143]</span></a> <i>La Terre promise</i>. Préface à Ferdinand Brunetière (octobre -1892), p. 6.</p> -</div> -<p>Il combat la doctrine de Taine, d'après laquelle -le roman est «maintenant une grande enquête sur -l'homme, sur toutes les variétés, toutes les situations, -toutes les floraisons, toutes les dégénérescences -de la nature humaine»<a id="FNanchor_144" href="#Footnote_144" class="fnanchor">[144]</a>; doctrine -d'où découle toute «l'esthétique des écrivains et -des naturalistes».</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_144" href="#FNanchor_144"><span class="label">[144]</span></a> Préface du tome I des <i>Romans</i> in <i>Œuvres complètes</i>, -p. <small>V</small>.</p> -</div> -<p>«Le pessimisme le plus découragé est le dernier -mot de cette littérature d'enquête». Bourget veut -échapper à ce «fanatisme de la science»<a id="FNanchor_145" href="#Footnote_145" class="fnanchor">[145]</a> qu'il -<a id="page_77"></a>constate chez Taine. Il veut, comme Pascal, -opposer «l'ordre de l'esprit et l'ordre du cœur à -cet univers aveugle et impassible, qui peut nous -broyer, mais qui ne peut que cela»<a id="FNanchor_146" href="#Footnote_146" class="fnanchor">[146]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_145" href="#FNanchor_145"><span class="label">[145]</span></a> «Pour le physiologiste, le drame moral où avaient failli -sombrer la raison et la foi d'Henriette n'était que cela: un accident -de névrose en train de passer ainsi qu'il était venu, par un -phénomène d'hypnotisme subjectif… La faiblesse de telles hypothèses -est qu'elles n'expliquent rien de ce qui constitue le fond -même de la vie de l'âme». (<i>La Terre promise</i>, p. 244).</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_146" href="#FNanchor_146"><span class="label">[146]</span></a> <i>Essais de Psychologie contemporaine</i>; <i>M. Taine</i>, p. 181-182.</p> -</div> -<p>Certainement la «science moderne fournit aux -curieux de l'anatomie mentale des documents et -des méthodes d'une incomparable supériorité»<a id="FNanchor_147" href="#Footnote_147" class="fnanchor">[147]</a>; -mais une «œuvre de littérature, M. Taine lui-même -le remarque excellemment, <i>se rapproche</i> de -la science; elle <i>n'est pas</i> de la science»<a id="FNanchor_148" href="#Footnote_148" class="fnanchor">[148]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_147" href="#FNanchor_147"><span class="label">[147]</span></a> <i>La Terre promise</i>, p. 7.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_148" href="#FNanchor_148"><span class="label">[148]</span></a> Préface du tome I des <i>Romans</i>, -p. <small>VIII</small>.—Ceci enlève sa -valeur à la critique de <span class="sc">Jules Sageret</span> qui a relevé une erreur -zoologique dans <i>Outre-mer</i> (t. II, p. 210): Paul Bourget donne -quatre crocs au serpent à sonnettes ou crotale, alors qu'il n'en a -que deux.—Cela confirme que les livres de Paul Bourget ne -sont pas des ouvrages d'histoire naturelle. Adrien Sixte avait -répondu déjà à Marius Dumoulin lui démontrant une grave erreur -dans son «Anatomie de la volonté» que «ce point de détail n'intéressait -pas l'ensemble de la thèse». (<i>Le Disciple</i>, p. 48).</p> -</div> -<p>Le Roman d'analyse n'est pas un Roman de dissection -scientifique. «Tout ce que l'on dissèque -est mort», tandis qu'il étudie «des crises de la vie -vivante».</p> - -<p id="page_78">«Les lois imposées au romancier par les diverses -esthétiques se ramènent en définitive à une -seule: donner une impression personnelle de la -vie»<a id="FNanchor_149" href="#Footnote_149" class="fnanchor">[149]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_149" href="#FNanchor_149"><span class="label">[149]</span></a> <i>Cruelle Enigme</i>. <i>Dédicace à M. Henry James</i>, p. 3.</p> -</div> -<p>Le Roman est une «psychologie vivante», ne -décrivant jamais le fait brut objectif, mais le peignant -toujours à travers l'âme du romancier; -«même la description du paysage le plus résolument -plastique n'est-elle pas une transcription d'un -état de l'âme?»<a id="FNanchor_150" href="#Footnote_150" class="fnanchor">[150]</a>. «Toute narration d'un fait extérieur -n'est jamais que la copie de l'impression que -nous produit ce fait et toujours une part d'interprétation -individuelle s'insinue dans le tableau le -plus systématiquement objectif»<a id="FNanchor_151" href="#Footnote_151" class="fnanchor">[151]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_150" href="#FNanchor_150"><span class="label">[150]</span></a> <i>La Terre promise</i>, p. 8, 9 et 6.</p> -</div> -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_151" href="#FNanchor_151"><span class="label">[151]</span></a> <i>Ibidem</i>, p. 9.</p> -</div> -<p>Donc, et ceci résume admirablement les rapports -du Roman et de la Biologie, le romancier doit -avoir uniquement le «souci de doubler la soie brillante -de l'imagination avec l'étoffe solide de la -science»<a id="FNanchor_152" href="#Footnote_152" class="fnanchor">[152]</a>.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_152" href="#FNanchor_152"><span class="label">[152]</span></a> <i>Essais de Psychologie contemporaine</i>; <i>M. Taine</i>, p. 181.</p> -</div> -<p>Nous revenons ainsi à l'idée annoncée au début -<a id="page_79"></a>de cette Conférence: la Biologie dans les Romans -de Paul Bourget est la charpente de fer qui soutient -l'édifice; mais ce qui fait la beauté de l'édifice, -ce sont les tentures et les œuvres d'art qui, à profusion, -revêtent et masquent cette ossature, c'est -surtout la vie dont on a animé ces appartements.</p> - -<hr /> - - -<p>Il ne nous reste plus donc, en finissant, qu'à -présenter publiquement nos excuses à Paul Bourget -pour cette dissection maladroite de son œuvre -si bien agencée et si impressionnante.</p> - -<p>Oubliez, Mesdames, cette œuvre de cuistre.</p> - -<p>Remettez tous ses atours à ce squelette si misérablement -dévêtu. Remettez en place les magnifiques -tapisseries et les charmants bibelots…</p> - -<p>Oubliez ma Conférence et relisez Bourget; non -plus au radioscope et avec les rayons Rœntgen, -mais en suçant ses livres comme des fleurs, suivant -le précepte de Byron<a id="FNanchor_153" href="#Footnote_153" class="fnanchor">[153]</a>… Vous y trouverez -plaisir extrême et grand profit.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_153" href="#FNanchor_153"><span class="label">[153]</span></a> <i>Essais de Psychologie contemporaine</i>; <i>Stendhal</i>, p. 237.</p> -</div> -<div class="chapter"></div> - -<h2 class="nobreak" id="page_81">TABLE<br /> -DES ŒUVRES CITÉES DE PAUL BOURGET</h2> - - -<ul> -<li>Adversaire (L'), <a href="#page_65">65</a></li> -<li>Age de l'Amour (L'), <a href="#page_24">24</a>, <a href="#page_62">62</a></li> -<li>Ancien Portrait, <a href="#page_15">15</a></li> -<li>André Cornelis, <a href="#page_21">21</a>, <a href="#page_40">40</a></li> -<li>Autre anglaise, <a href="#page_15">15</a></li> -<li>Autre joueur, <a href="#page_21">21</a></li> -<li class="top1em">Bressuire (Madame), <a href="#page_66">66</a>, <a href="#page_70">70</a></li> -<li class="top1em">Cas de Conscience (Un), <a href="#page_15">15</a>, <a href="#page_17">17</a>, <a href="#page_21">21</a></li> -<li>Cob rouan (Le), <a href="#page_46">46</a></li> -<li>Cœur de Femme (Un), <a href="#page_14">14</a>, <a href="#page_19">19</a>, <a href="#page_21">21</a>, <a href="#page_32">32</a>, <a href="#page_61">61</a></li> -<li>Complications sentimentales, <a href="#page_57">57</a></li> -<li>Confession (Une), <a href="#page_19">19</a></li> -<li>Cosmopolis, <a href="#page_29">29</a>, <a href="#page_30">30</a>, <a href="#page_37">37</a>, <a href="#page_52">52</a>, <a href="#page_53">53</a>, <a href="#page_59">59</a></li> -<li>Crime d'amour (Un), <a href="#page_11">11</a>, <a href="#page_21">21</a>, <a href="#page_26">26</a></li> -<li>Cruelle Enigme, <a href="#page_27">27</a>, <a href="#page_46">46</a>, <a href="#page_58">58</a>, <a href="#page_60">60</a>, <a href="#page_63">63</a>, <a href="#page_78">78</a></li> -<li class="top1em">Dernière Poésie, <a href="#page_71">71</a></li> -<li>Deuxième Amour, <a href="#page_21">21</a>, <a href="#page_58">58</a>, <a href="#page_61">61</a></li> -<li>Deux Ménages, <a href="#page_14">14</a>, <a href="#page_21">21</a></li> -<li>Disciple (Le), <a href="#page_30">30</a>, <a href="#page_33">33</a>, <a href="#page_37">37</a>, <a href="#page_53">53</a>, <a href="#page_57">57</a>, <a href="#page_70">70</a>, <a href="#page_77">77</a></li> -<li>Drames de Famille, <a href="#page_24">24</a></li> -<li>Duchesse bleue (La), <a href="#page_12">12</a>, <a href="#page_21">21</a>, <a href="#page_59">59</a>, <a href="#page_70">70</a>, <a href="#page_72">72</a>, <a href="#page_73">73</a>, <a href="#page_75">75</a></li> -<li class="top1em">Eau profonde (L'), <a href="#page_18">18</a></li> -<li>Echéance (L'), <a href="#page_17">17</a>, <a href="#page_21">21</a>, <a href="#page_40">40</a></li> -<li>Ecran (L'), <a href="#page_59">59</a>, <a href="#page_62">62</a>, <a href="#page_71">71</a></li> -<li>Essais de Psychologie contemporaine, <a href="#page_35">35</a><br /> -Voir: Préface, Leconte de Lisle, Stendhal, Taine.</li> -<li>Etape (L'), <a href="#page_10">10</a>, <a href="#page_18">18</a>, <a href="#page_19">19</a>, <a href="#page_21">21</a>, <a href="#page_28">28</a>, <a href="#page_29">29</a>, <a href="#page_30">30</a>, <a href="#page_31">31</a>, <a href="#page_33">33</a>, <a href="#page_36">36</a>, <a href="#page_37">37</a>, <a href="#page_47">47</a>, <a href="#page_55">55</a>, <a href="#page_70">70</a></li> -<li class="top1em">Fantôme (Le), <a href="#page_25">25</a>, <a href="#page_29">29</a>, <a href="#page_41">41</a>, <a href="#page_64">64</a>, <a href="#page_72">72</a></li> -<li>Fausse Manœuvre, <a href="#page_37">37</a></li> -<li>Flirting Club, <a href="#page_61">61</a></li> -<li class="top1em">Homme d'Affaires (Un), <a href="#page_21">21</a>, <a href="#page_25">25</a>, <a href="#page_26">26</a></li> -<li class="top1em">Idylle tragique (Une), <a href="#page_20">20</a>, <a href="#page_21">21</a>, <a href="#page_26">26</a>, <a href="#page_41">41</a>, <a href="#page_61">61</a></li> -<li>Inutile Science (L'), <a href="#page_62">62</a>, <a href="#page_72">72</a></li> -<li>Irréparable (L'), <a href="#page_23">23</a>, <a href="#page_69">69</a></li> -<li class="top1em">Jacques Molan, <a href="#page_56">56</a>, <a href="#page_60">60</a></li> -<li class="top1em">Leconte de Lisle (Essais de Psychologie contemporaine), <a href="#page_74">74</a></li> -<li>Legrimaudet (Monsieur), <a href="#page_75">75</a></li> -<li>Luxe des autres (Le), <a href="#page_15">15</a>, <a href="#page_25">25</a></li> -<li class="top1em">Mensonges, <a href="#page_11">11</a>, <a href="#page_12">12</a>, <a href="#page_14">14</a>, <a href="#page_20">20</a>, <a href="#page_21">21</a>, <a href="#page_42">42</a>, <a href="#page_74">74</a></li> -<li class="top1em">Neptunevale, <a href="#page_40">40</a></li> -<li>Nouveaux Pastels, <a href="#page_21">21</a>, <a href="#page_56">56</a>, <a href="#page_60">60</a>, <a href="#page_75">75</a></li> -<li class="top1em">Odile, <a href="#page_26">26</a></li> -<li>Outre-Mer, <a href="#page_77">77</a></li> -<li class="top1em">Pas dans les Pas (Les), <a href="#page_39">39</a></li> -<li>Pastels, <a href="#page_66">66</a>, <a href="#page_70">70</a></li> -<li>Physiologie de l'Amour moderne, <a href="#page_12">12</a>, <a href="#page_13">13</a>, <a href="#page_14">14</a>, <a href="#page_19">19</a>, <a href="#page_20">20</a>, <a href="#page_21">21</a>, <a href="#page_27">27</a>, <a href="#page_28">28</a>, <a href="#page_32">32</a>, <a href="#page_43">43</a>, <a href="#page_57">57</a>, <a href="#page_63">63</a>, <a href="#page_72">72</a></li> -<li>Portrait du Doge (Le), <a href="#page_37">37</a></li> -<li>Préface de la réédition des Essais de Psychologie contemporaine, <a href="#page_20">20</a>, <a href="#page_22">22</a></li> -<li>Préface de la réédition des Romans, <a href="#page_20">20</a>, <a href="#page_54">54</a>, <a href="#page_76">76</a></li> -<li>Profils perdus, <a href="#page_15">15</a>, <a href="#page_61">61</a></li> -<li class="top1em">Recommencements, <a href="#page_39">39</a>, <a href="#page_40">40</a></li> -<li class="top1em">Sauvetage, <a href="#page_23">23</a>, <a href="#page_24">24</a>, <a href="#page_58">58</a></li> -<li>Stendhal (Essais de Psychologie contemporaine), <a href="#page_36">36</a>, <a href="#page_48">48</a>, <a href="#page_52">52</a>, <a href="#page_79">79</a></li> -<li class="top1em">Taine (Essais de Psychologie contemporaine), <a href="#page_9">9</a>, <a href="#page_33">33</a>, <a href="#page_34">34</a>, <a href="#page_36">36</a>, <a href="#page_47">47</a>, <a href="#page_52">52</a>, <a href="#page_69">69</a>, <a href="#page_77">77</a>, <a href="#page_78">78</a></li> -<li>Talisman (Le), <a href="#page_14">14</a></li> -<li>Terre promise (La), <a href="#page_14">14</a>, <a href="#page_21">21</a>, <a href="#page_23">23</a>, <a href="#page_25">25</a>, <a href="#page_41">41</a>, <a href="#page_42">42</a>, <a href="#page_59">59</a>, <a href="#page_76">76</a>, <a href="#page_77">77</a>, <a href="#page_78">78</a></li> -<li class="top1em">Voyageuses, <a href="#page_14">14</a>, <a href="#page_21">21</a>, <a href="#page_26">26</a>, <a href="#page_40">40</a></li> -<li>Vrai Père (Le), <a href="#page_28">28</a></li> -</ul> - - - - - - - - -<pre> - - - - - -End of the Project Gutenberg EBook of L'idée médicale dans les romans de -Paul Bourget, by Joseph Grasset - -*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK L'IDÉE MÉDICALE DANS LES *** - -***** This file should be named 60986-h.htm or 60986-h.zip ***** -This and all associated files of various formats will be found in: - http://www.gutenberg.org/6/0/9/8/60986/ - -Produced by Clarity and the Online Distributed Proofreading -Team at http://www.pgdp.net (This file was produced from -images generously made available by The Internet -Archive/Canadian Libraries) - -Updated editions will replace the previous one--the old editions will -be renamed. - -Creating the works from print editions not protected by U.S. copyright -law means that no one owns a United States copyright in these works, -so the Foundation (and you!) can copy and distribute it in the United -States without permission and without paying copyright -royalties. Special rules, set forth in the General Terms of Use part -of this license, apply to copying and distributing Project -Gutenberg-tm electronic works to protect the PROJECT GUTENBERG-tm -concept and trademark. Project Gutenberg is a registered trademark, -and may not be used if you charge for the eBooks, unless you receive -specific permission. If you do not charge anything for copies of this -eBook, complying with the rules is very easy. You may use this eBook -for nearly any purpose such as creation of derivative works, reports, -performances and research. They may be modified and printed and given -away--you may do practically ANYTHING in the United States with eBooks -not protected by U.S. copyright law. Redistribution is subject to the -trademark license, especially commercial redistribution. - -START: FULL LICENSE - -THE FULL PROJECT GUTENBERG LICENSE -PLEASE READ THIS BEFORE YOU DISTRIBUTE OR USE THIS WORK - -To protect the Project Gutenberg-tm mission of promoting the free -distribution of electronic works, by using or distributing this work -(or any other work associated in any way with the phrase "Project -Gutenberg"), you agree to comply with all the terms of the Full -Project Gutenberg-tm License available with this file or online at -www.gutenberg.org/license. - -Section 1. General Terms of Use and Redistributing Project -Gutenberg-tm electronic works - -1.A. By reading or using any part of this Project Gutenberg-tm -electronic work, you indicate that you have read, understand, agree to -and accept all the terms of this license and intellectual property -(trademark/copyright) agreement. If you do not agree to abide by all -the terms of this agreement, you must cease using and return or -destroy all copies of Project Gutenberg-tm electronic works in your -possession. If you paid a fee for obtaining a copy of or access to a -Project Gutenberg-tm electronic work and you do not agree to be bound -by the terms of this agreement, you may obtain a refund from the -person or entity to whom you paid the fee as set forth in paragraph -1.E.8. - -1.B. "Project Gutenberg" is a registered trademark. It may only be -used on or associated in any way with an electronic work by people who -agree to be bound by the terms of this agreement. There are a few -things that you can do with most Project Gutenberg-tm electronic works -even without complying with the full terms of this agreement. See -paragraph 1.C below. There are a lot of things you can do with Project -Gutenberg-tm electronic works if you follow the terms of this -agreement and help preserve free future access to Project Gutenberg-tm -electronic works. See paragraph 1.E below. - -1.C. The Project Gutenberg Literary Archive Foundation ("the -Foundation" or PGLAF), owns a compilation copyright in the collection -of Project Gutenberg-tm electronic works. Nearly all the individual -works in the collection are in the public domain in the United -States. If an individual work is unprotected by copyright law in the -United States and you are located in the United States, we do not -claim a right to prevent you from copying, distributing, performing, -displaying or creating derivative works based on the work as long as -all references to Project Gutenberg are removed. Of course, we hope -that you will support the Project Gutenberg-tm mission of promoting -free access to electronic works by freely sharing Project Gutenberg-tm -works in compliance with the terms of this agreement for keeping the -Project Gutenberg-tm name associated with the work. You can easily -comply with the terms of this agreement by keeping this work in the -same format with its attached full Project Gutenberg-tm License when -you share it without charge with others. - -1.D. The copyright laws of the place where you are located also govern -what you can do with this work. Copyright laws in most countries are -in a constant state of change. If you are outside the United States, -check the laws of your country in addition to the terms of this -agreement before downloading, copying, displaying, performing, -distributing or creating derivative works based on this work or any -other Project Gutenberg-tm work. The Foundation makes no -representations concerning the copyright status of any work in any -country outside the United States. - -1.E. Unless you have removed all references to Project Gutenberg: - -1.E.1. The following sentence, with active links to, or other -immediate access to, the full Project Gutenberg-tm License must appear -prominently whenever any copy of a Project Gutenberg-tm work (any work -on which the phrase "Project Gutenberg" appears, or with which the -phrase "Project Gutenberg" is associated) is accessed, displayed, -performed, viewed, copied or distributed: - - This eBook is for the use of anyone anywhere in the United States and - most other parts of the world at no cost and with almost no - restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it - under the terms of the Project Gutenberg License included with this - eBook or online at www.gutenberg.org. If you are not located in the - United States, you'll have to check the laws of the country where you - are located before using this ebook. - -1.E.2. If an individual Project Gutenberg-tm electronic work is -derived from texts not protected by U.S. copyright law (does not -contain a notice indicating that it is posted with permission of the -copyright holder), the work can be copied and distributed to anyone in -the United States without paying any fees or charges. If you are -redistributing or providing access to a work with the phrase "Project -Gutenberg" associated with or appearing on the work, you must comply -either with the requirements of paragraphs 1.E.1 through 1.E.7 or -obtain permission for the use of the work and the Project Gutenberg-tm -trademark as set forth in paragraphs 1.E.8 or 1.E.9. - -1.E.3. If an individual Project Gutenberg-tm electronic work is posted -with the permission of the copyright holder, your use and distribution -must comply with both paragraphs 1.E.1 through 1.E.7 and any -additional terms imposed by the copyright holder. Additional terms -will be linked to the Project Gutenberg-tm License for all works -posted with the permission of the copyright holder found at the -beginning of this work. - -1.E.4. Do not unlink or detach or remove the full Project Gutenberg-tm -License terms from this work, or any files containing a part of this -work or any other work associated with Project Gutenberg-tm. - -1.E.5. Do not copy, display, perform, distribute or redistribute this -electronic work, or any part of this electronic work, without -prominently displaying the sentence set forth in paragraph 1.E.1 with -active links or immediate access to the full terms of the Project -Gutenberg-tm License. - -1.E.6. You may convert to and distribute this work in any binary, -compressed, marked up, nonproprietary or proprietary form, including -any word processing or hypertext form. However, if you provide access -to or distribute copies of a Project Gutenberg-tm work in a format -other than "Plain Vanilla ASCII" or other format used in the official -version posted on the official Project Gutenberg-tm web site -(www.gutenberg.org), you must, at no additional cost, fee or expense -to the user, provide a copy, a means of exporting a copy, or a means -of obtaining a copy upon request, of the work in its original "Plain -Vanilla ASCII" or other form. Any alternate format must include the -full Project Gutenberg-tm License as specified in paragraph 1.E.1. - -1.E.7. Do not charge a fee for access to, viewing, displaying, -performing, copying or distributing any Project Gutenberg-tm works -unless you comply with paragraph 1.E.8 or 1.E.9. - -1.E.8. You may charge a reasonable fee for copies of or providing -access to or distributing Project Gutenberg-tm electronic works -provided that - -* You pay a royalty fee of 20% of the gross profits you derive from - the use of Project Gutenberg-tm works calculated using the method - you already use to calculate your applicable taxes. The fee is owed - to the owner of the Project Gutenberg-tm trademark, but he has - agreed to donate royalties under this paragraph to the Project - Gutenberg Literary Archive Foundation. Royalty payments must be paid - within 60 days following each date on which you prepare (or are - legally required to prepare) your periodic tax returns. Royalty - payments should be clearly marked as such and sent to the Project - Gutenberg Literary Archive Foundation at the address specified in - Section 4, "Information about donations to the Project Gutenberg - Literary Archive Foundation." - -* You provide a full refund of any money paid by a user who notifies - you in writing (or by e-mail) within 30 days of receipt that s/he - does not agree to the terms of the full Project Gutenberg-tm - License. You must require such a user to return or destroy all - copies of the works possessed in a physical medium and discontinue - all use of and all access to other copies of Project Gutenberg-tm - works. - -* You provide, in accordance with paragraph 1.F.3, a full refund of - any money paid for a work or a replacement copy, if a defect in the - electronic work is discovered and reported to you within 90 days of - receipt of the work. - -* You comply with all other terms of this agreement for free - distribution of Project Gutenberg-tm works. - -1.E.9. If you wish to charge a fee or distribute a Project -Gutenberg-tm electronic work or group of works on different terms than -are set forth in this agreement, you must obtain permission in writing -from both the Project Gutenberg Literary Archive Foundation and The -Project Gutenberg Trademark LLC, the owner of the Project Gutenberg-tm -trademark. Contact the Foundation as set forth in Section 3 below. - -1.F. - -1.F.1. Project Gutenberg volunteers and employees expend considerable -effort to identify, do copyright research on, transcribe and proofread -works not protected by U.S. copyright law in creating the Project -Gutenberg-tm collection. Despite these efforts, Project Gutenberg-tm -electronic works, and the medium on which they may be stored, may -contain "Defects," such as, but not limited to, incomplete, inaccurate -or corrupt data, transcription errors, a copyright or other -intellectual property infringement, a defective or damaged disk or -other medium, a computer virus, or computer codes that damage or -cannot be read by your equipment. - -1.F.2. LIMITED WARRANTY, DISCLAIMER OF DAMAGES - Except for the "Right -of Replacement or Refund" described in paragraph 1.F.3, the Project -Gutenberg Literary Archive Foundation, the owner of the Project -Gutenberg-tm trademark, and any other party distributing a Project -Gutenberg-tm electronic work under this agreement, disclaim all -liability to you for damages, costs and expenses, including legal -fees. YOU AGREE THAT YOU HAVE NO REMEDIES FOR NEGLIGENCE, STRICT -LIABILITY, BREACH OF WARRANTY OR BREACH OF CONTRACT EXCEPT THOSE -PROVIDED IN PARAGRAPH 1.F.3. YOU AGREE THAT THE FOUNDATION, THE -TRADEMARK OWNER, AND ANY DISTRIBUTOR UNDER THIS AGREEMENT WILL NOT BE -LIABLE TO YOU FOR ACTUAL, DIRECT, INDIRECT, CONSEQUENTIAL, PUNITIVE OR -INCIDENTAL DAMAGES EVEN IF YOU GIVE NOTICE OF THE POSSIBILITY OF SUCH -DAMAGE. - -1.F.3. LIMITED RIGHT OF REPLACEMENT OR REFUND - If you discover a -defect in this electronic work within 90 days of receiving it, you can -receive a refund of the money (if any) you paid for it by sending a -written explanation to the person you received the work from. If you -received the work on a physical medium, you must return the medium -with your written explanation. The person or entity that provided you -with the defective work may elect to provide a replacement copy in -lieu of a refund. If you received the work electronically, the person -or entity providing it to you may choose to give you a second -opportunity to receive the work electronically in lieu of a refund. If -the second copy is also defective, you may demand a refund in writing -without further opportunities to fix the problem. - -1.F.4. Except for the limited right of replacement or refund set forth -in paragraph 1.F.3, this work is provided to you 'AS-IS', WITH NO -OTHER WARRANTIES OF ANY KIND, EXPRESS OR IMPLIED, INCLUDING BUT NOT -LIMITED TO WARRANTIES OF MERCHANTABILITY OR FITNESS FOR ANY PURPOSE. - -1.F.5. Some states do not allow disclaimers of certain implied -warranties or the exclusion or limitation of certain types of -damages. If any disclaimer or limitation set forth in this agreement -violates the law of the state applicable to this agreement, the -agreement shall be interpreted to make the maximum disclaimer or -limitation permitted by the applicable state law. The invalidity or -unenforceability of any provision of this agreement shall not void the -remaining provisions. - -1.F.6. INDEMNITY - You agree to indemnify and hold the Foundation, the -trademark owner, any agent or employee of the Foundation, anyone -providing copies of Project Gutenberg-tm electronic works in -accordance with this agreement, and any volunteers associated with the -production, promotion and distribution of Project Gutenberg-tm -electronic works, harmless from all liability, costs and expenses, -including legal fees, that arise directly or indirectly from any of -the following which you do or cause to occur: (a) distribution of this -or any Project Gutenberg-tm work, (b) alteration, modification, or -additions or deletions to any Project Gutenberg-tm work, and (c) any -Defect you cause. - -Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm - -Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of -electronic works in formats readable by the widest variety of -computers including obsolete, old, middle-aged and new computers. It -exists because of the efforts of hundreds of volunteers and donations -from people in all walks of life. - -Volunteers and financial support to provide volunteers with the -assistance they need are critical to reaching Project Gutenberg-tm's -goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will -remain freely available for generations to come. In 2001, the Project -Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure -and permanent future for Project Gutenberg-tm and future -generations. To learn more about the Project Gutenberg Literary -Archive Foundation and how your efforts and donations can help, see -Sections 3 and 4 and the Foundation information page at -www.gutenberg.org - - - -Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation - -The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit -501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the -state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal -Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification -number is 64-6221541. Contributions to the Project Gutenberg Literary -Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by -U.S. federal laws and your state's laws. - -The Foundation's principal office is in Fairbanks, Alaska, with the -mailing address: PO Box 750175, Fairbanks, AK 99775, but its -volunteers and employees are scattered throughout numerous -locations. Its business office is located at 809 North 1500 West, Salt -Lake City, UT 84116, (801) 596-1887. Email contact links and up to -date contact information can be found at the Foundation's web site and -official page at www.gutenberg.org/contact - -For additional contact information: - - Dr. Gregory B. Newby - Chief Executive and Director - gbnewby@pglaf.org - -Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg -Literary Archive Foundation - -Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide -spread public support and donations to carry out its mission of -increasing the number of public domain and licensed works that can be -freely distributed in machine readable form accessible by the widest -array of equipment including outdated equipment. Many small donations -($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt -status with the IRS. - -The Foundation is committed to complying with the laws regulating -charities and charitable donations in all 50 states of the United -States. Compliance requirements are not uniform and it takes a -considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up -with these requirements. We do not solicit donations in locations -where we have not received written confirmation of compliance. To SEND -DONATIONS or determine the status of compliance for any particular -state visit www.gutenberg.org/donate - -While we cannot and do not solicit contributions from states where we -have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition -against accepting unsolicited donations from donors in such states who -approach us with offers to donate. - -International donations are gratefully accepted, but we cannot make -any statements concerning tax treatment of donations received from -outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff. - -Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation -methods and addresses. Donations are accepted in a number of other -ways including checks, online payments and credit card donations. To -donate, please visit: www.gutenberg.org/donate - -Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic works. - -Professor Michael S. Hart was the originator of the Project -Gutenberg-tm concept of a library of electronic works that could be -freely shared with anyone. For forty years, he produced and -distributed Project Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of -volunteer support. - -Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed -editions, all of which are confirmed as not protected by copyright in -the U.S. unless a copyright notice is included. Thus, we do not -necessarily keep eBooks in compliance with any particular paper -edition. - -Most people start at our Web site which has the main PG search -facility: www.gutenberg.org - -This Web site includes information about Project Gutenberg-tm, -including how to make donations to the Project Gutenberg Literary -Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to -subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks. - - - -</pre> - -</body> -</html> diff --git a/old/60986-h/images/cover.jpg b/old/60986-h/images/cover.jpg Binary files differdeleted file mode 100644 index 379277b..0000000 --- a/old/60986-h/images/cover.jpg +++ /dev/null |
