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If you are not located in the United States, you'll have -to check the laws of the country where you are located before using this ebook. - - - -Title: Mémoires touchant la vie et les écrits de Marie de Rabutin-Chantal, Volume 5 of 6 - -Author: Charles Athanase Walckenaer - -Release Date: June 28, 2016 [EBook #52428] - -Language: French - -Character set encoding: UTF-8 - -*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK MARIE DE RABUTIN-CHANTAL *** - - - - -Produced by Clarity, Hélène de Mink, and the Online -Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This -file was produced from images generously made available -by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at -http://gallica.bnf.fr) - - - - - - - -Note sur la transcription: Les erreurs clairement introduites par le -typographe ont été corrigées. L'orthographe d'origine a été conservée et -n'a pas été harmonisée. - - - - - MÉMOIRES - - SUR MADAME - - DE SÉVIGNÉ. - - - CINQUIÈME PARTIE. - - - - -TYPOGRAPHIE DE H. FIRMIN DIDOT.--MESNIL (EURE). - - - - - MÉMOIRES - - TOUCHANT - - LA VIE ET LES ÉCRITS - - DE MARIE DE RABUTIN-CHANTAL - - DAME DE BOURBILLY - - MARQUISE DE SÉVIGNÉ, - - DURANT LA SECONDE CONQUÊTE DE LA FRANCHE-COMTÉ PAR LOUIS XIV - ET LA PREMIÈRE COALITION DES PUISSANCES CONTRE LA FRANCE, - - SUIVIS - - De Notes et d'Éclaircissements, - - PAR - - M. LE BARON WALCKENAER. - - QUATRIÈME ÉDITION, - - REVUE ET CORRIGÉE. - - - PARIS, - - LIBRAIRIE DE FIRMIN DIDOT FRÈRES, FILS ET Cie, - - IMPRIMEURS DE L'INSTITUT DE FRANCE, - - RUE JACOB, 56. - - - 1875 - - - - - MÉMOIRES - TOUCHANT LA VIE ET LES ÉCRITS - DE - MARIE DE RABUTIN-CHANTAL, - DAME DE BOURBILLY - MARQUISE DE SÉVIGNÉ. - - - - -CHAPITRE PREMIER. - -1673 - - Madame de Sévigné quitte la Provence et retourne à Paris.--Mauvais - état des routes.--Craintes de madame de Sévigné pour sa - fille.--Avantage qu'elle retire de son voyage en Provence pour son - commerce épistolaire.--Elle écrit de Montélimar.--Elle voit à - Valence l'évêque, M. de Cosnac, et Montreuil.--Détails sur - ceux-ci.--Marie-Adhémar.--Les filles de Sainte-Marie.--Madame de - Sévigné arrive à Lyon.--Loge chez Châteauneuf.--Voit - l'archevêque.--Elle part avec M. et madame de Rochebonne.--Madame - de Sévigné écrit de Châlon-sur-Saône.--Recommande à sa fille deux - ouvrages de Marigny.--Arrive à Bourbilly.--Ses souvenirs dans ce - lieu.--Du voyage qu'elle fit en 1664.--Conduite de Bussy.--Il est à - Paris.--Le comte et la comtesse de Guitaud sont à Époisses.--Madame - de Sévigné ne peut réconcilier Guitaud avec Bussy.--Elle est venue - à Bourbilly pour le règlement de ses affaires.--Le comte et la - comtesse de Guitaud et la comtesse de Fiesque viennent voir madame - de Sévigné.--Détails sur la comtesse de Fiesque--Deux petites cours - auprès de celle du roi.--Cour de Monsieur; cour de - Condé.--Nouvelles sur ces deux cours données à madame de - Sévigné.--L'Espagne déclare la guerre à la France.--Détails sur la - comtesse de Marci et mademoiselle de Grancey.--Leur - influence.--Madame de Sévigné va passer un jour à Époisses.--Elle - écrit de Moret.--Arrive à Paris. - - -Le séjour de madame de Sévigné en Provence avait duré quatorze mois. Ce -temps fut pour elle marqué par des jouissances de tous les jours et de -tous les moments. Objet des constantes sollicitudes de madame de -Grignan, elle avait promptement contracté l'habitude de la voir, de lui -parler, de l'écouter, d'être sans cesse occupée d'elle. Ce n'était donc -pas sans des déchirements de cÅ“ur qu'elle s'arrachait forcément aux -douceurs de ce genre de vie. Diverses causes contribuaient à rendre -cette nécessité plus cruelle. En même temps que, parcourant la route de -Montélimar, elle s'éloignait de sa fille, sa fille s'éloignait d'elle, -et prenait le chemin de Salons pour se rendre chez l'archevêque d'Arles. -Quoique ce court trajet accrût imperceptiblement la distance qui devait -toutes deux les séparer, néanmoins il ajoutait encore au trouble violent -que cette séparation avait produit dans l'âme de madame de Sévigné. Elle -avait espéré ramener sa fille avec elle; mais de puissants motifs s'y -opposaient. L'assemblée des communautés de Provence devait avoir lieu en -décembre, et ne pouvait se terminer qu'au milieu de janvier. Madame de -Grignan se trouvait par là forcée de différer de trois mois le voyage -qu'elle avait promis de faire à Paris[1]. Obligée de se rendre à de si -bonnes raisons, madame de Sévigné trouvait dans la promesse même que sa -fille lui avait faite un sujet de peine et d'inquiétude. La route de -Montélimar à Lyon, qu'elle parcourait, était horriblement abîmée et -dans plusieurs endroits entièrement défoncée. Ce n'était pas sans effroi -qu'elle songeait que dans trois mois sa fille, au milieu de l'hiver, -aurait, pour venir la rejoindre, à parcourir cette même route, devenue -plus dangereuse encore par des dégradations successives. Ses lettres -nous montrent avec quelle scrupuleuse attention elle observait l'état -des chemins et quel soin elle mettait à indiquer à madame de Grignan les -parties détériorées où, selon elle, on devait descendre de voiture et se -faire porter en litière, «sous peine de la vie[2].» - - [1] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 octobre 1673), t. III, p. 176, édit. de - Gault de Saint-Germain; t. III, p. 101, édition de Monmerqué. - - [2] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 et 10 octobre 1673), t. III, p. 181, - édit. G.;--_Ibid._, t. III, p. 103 et 105, édit. M. - -Entre deux personnes qui s'aiment il y a dans les entretiens familiers -et confidentiels un échange sympathique de sentiments et d'idées qui ne -peut être suppléé par la correspondance la plus assidue. La voix, le -geste, les yeux, les traits du visage manifestent nos sensations, nos -désirs, nos inclinations, notre trouble, nos espérances, les subites -inspirations de notre esprit, les éclairs capricieux de notre -imagination mieux que ne peuvent le faire les mots les mieux arrangés, -les plus expressifs, tracés sur un froid papier. C'est ce que madame de -Sévigné ressentait amèrement lorsque de Montélimar elle écrivait: -«Hélas! nous revoilà dans les lettres.» Et cependant le temps qu'elle -avait passé en Provence, au milieu de la famille des Grignan, lui -donnait, pour sa correspondance, plus de moyens de remédier aux -inconvénients de l'absence. Elle pouvait désormais apprécier les -changements que le temps, une nouvelle situation avaient opérés dans -l'esprit, les opinions, les goûts et les habitudes de madame de -Grignan. Elle connaissait le monde avec lequel vivait sa fille, ses -occupations de chaque jour, la distribution de ses heures, les qualités -et les défauts de ceux qui étaient placés sous sa dépendance, les causes -de ses tracas domestiques, toutes les misères, toutes les nuances si -variables de l'existence, tous ces riens qu'on méprise et que pourtant -on ressent si vivement, qu'on redoute ou qu'on dédaigne d'écrire, mais -qu'à tout moment on voudrait confier à ceux qui s'intéressent à notre -bonheur. Madame de Sévigné savait et prévoyait toutes les tribulations -auxquelles sa fille était exposée; elle pouvait donc se faire comprendre -d'elle à demi-mot, deviner ses désirs et pénétrer plus avant dans les -replis de son cÅ“ur. Il lui devenait plus facile de lui être agréable -par ses lettres, écrites avec plus de confiance, de facilité et -d'abandon. Aussi lui dit-elle peu de jours après l'avoir quittée: «Je -suis toute pétrie des Grignan, je tiens partout... Hélas! ma fille, j'ai -apporté toute la Provence et toutes vos affaires avec moi[3]. Je vous -vois, je vous suis pas à pas; je vois entrer, je vois sortir; je vois -quelques-unes de vos pensées[4].» Et le temps ne faisait qu'ajouter -encore à l'effet des souvenirs de son séjour à Grignan; mais après elle -y revient. «Il est vrai, dit-elle, que le voyage de Provence m'a plus -attachée à vous que je n'étais encore. Je ne vous avais jamais tant vue, -et je n'avais jamais tant joui de votre esprit et de votre cÅ“ur[5].» - - [3] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 octobre 1673), t. III, p. 178, édit. - G.; t. III, p. 101, édit. M. - - [4] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 octobre et 10 novembre 1673), t. III, - p. 186, 213, édit. G.; t. III, p. 109, 131, édit. M. - - [5] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 décembre 1673), t. III, p. 268, édit. - G.; t. III, p. 177, édit. M. - - -La mélancolie qui dominait madame de Sévigné en s'éloignant de sa fille -ne fut pas allégée par les livres qu'elle avait emportés pour se -distraire en voyage. C'étaient le _Socrate chrétien_ de Balzac et les -_Déclamations_ de Quintilien. On est étonné de voir au nombre de ses -lectures ce dernier ouvrage, d'une authenticité douteuse et d'un mérite -très-secondaire; il est probable que c'était par suite des études -d'auteurs anciens qu'elle avait faites avec Corbinelli pendant son -séjour à Grignan qu'elle s'était imposé la tâche de lire ces -_Déclamations_. Elle écrit à sa fille après les avoir lues: «Il y en a -qui m'ont amusée et d'autres qui m'ont ennuyée[6].» - - [6] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 octobre 1673), t. III, p. 188, édit. - G.; t. III, p. 111, édit. M. - -Partie de Montélimar, elle arriva le même jour à Valence. L'évêque de -Valence, M. de Cosnac, était une de ses plus anciennes connaissances; il -avait envoyé au-devant d'elle son carrosse avec Montreuil[7] et son -secrétaire pour l'accompagner. Nos lecteurs se rappellent ce joyeux abbé -qui, dans la jeunesse de madame de Sévigné, lui écrivait des lettres -folles et composait pour elle des madrigaux qu'il fit imprimer et même -réimprimer[8]. Ce fut chez lui qu'elle soupa et logea. L'évêque et ses -deux nièces vinrent lui rendre visite; mais, en entrant dans la ville, -elle s'était dirigée directement chez ce prélat. «Il a bien de l'esprit, -dit-elle à madame de Grignan. Ses malheurs et votre mérite ont été les -deux principaux points de sa conversation[9].» - - [7] _Mémoires touchant la vie et les écrits de Marie_ DE - RABUTIN-CHANTAL _pendant la Régence et la Fronde_, 2e édit., p. - 49 et 50, chap. V. - - [8] MONTREUIL, _Å’uvres_, 1666, p. 5, 107, 472, 500; 1671, p. 4, - 72, 321, 339.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 octobre 1673), t. III, p. - 179. - - [9] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 octobre 1679), t. III, p. 178, édit. - G.; t. III, p. 103, édit. M. - -Les malheurs de Daniel de Cosnac se réduisaient à ce qu'il était forcé -de résider dans son diocèse, sous le plus beau climat et dans le plus -riant pays de France. Mais, homme de cour plutôt qu'évêque, il -considérait comme un exil l'obligation où il se trouvait de ne pouvoir -être à Versailles ou à Saint-Germain. Par son esprit et son adresse il -s'était introduit fort jeune chez le prince de Conti, et contribua à son -mariage avec la nièce de Mazarin[10]. Cosnac n'avait que vingt-deux ans -lorsqu'il négocia avec une rare habilité ce qu'on appelait la paix de -Bordeaux. Mazarin, pour ses signalés services, le fit nommer évêque de -Valence; mais, au lieu de remplir les devoirs de son épiscopat, Cosnac -s'attacha à MONSIEUR, qui le nomma son premier aumônier. Les conseils -qu'il donna à ce prince et que celui-ci ne suivit pas occasionnèrent son -exil[11]. Dévoué de cÅ“ur à MADAME (l'aimable Henriette), il vint -_incognito_ à Paris; et, pour cet acte de désobéissance aux ordres du -roi, il fut mis en prison, puis envoyé à l'Ile-en-Jourdain. Après -quatorze ans d'exil, il avait enfin obtenu la permission de retourner à -Valence, où madame de Sévigné fut charmée de le trouver en compagnie -avec Montreuil[12]. Elle vit encore à Valence la sÅ“ur de M. de Grignan, -Marie-Adhémar de Monteil, religieuse à Aubenas, et les sÅ“urs du -couvent de Sainte-Marie. C'était pour elle, en quelque sorte, un devoir -de famille, même dans les lieux où elle ne faisait que passer, de rendre -visite aux religieuses de cet ordre, fondé par sa grand'mère[13]. Elle -resta un jour entier avec celles de Valence, et se dirigea sur Lyon, où -elle arriva le 10 octobre. Elle fut reçue dans cette ville, comme -précédemment, par le beau-frère de M. de Grignan, l'aimable M. de -Châteauneuf. Elle eut la visite et reçut des civilités gracieuses de -l'archevêque de Lyon, Henri de Villars, qui lui fit voir d'admirables -tableaux. - - [10] GOURVILLE, _Mémoires_, vol. LII, p. 286. - - [11] CHOISY, _Mémoires_, vol. LXIII, p. 369 à 387.--MONTPENSIER, - _Mémoires_, vol. XLIII, p. 135 (année 1663). - - [12] CHOISY, _Mémoires_, vol. LXIII, p. 391, 397, 408, 410, 417, - 418.--SAINT-SIMON, _Mémoires authentiques_, t. III, p. 141, ch. - XI. - - [13] _Abrégé de la vie de la bienheureuse mère Jeanne-Françoise - Fremyot de Chantal_, 1752, p. 39. - -Le jour suivant elle partit accompagnée de M. et de madame de -Rochebonne[14], qui allaient à leur terre. Rochebonne voulait mettre -ordre à ses affaires et se préparer à rejoindre l'armée, prévoyant une -guerre avec l'Espagne, qui en effet était imminente. Madame de Sévigné -fut obligée de s'arrêter à six lieues de Lyon. Elle date sa lettre «d'un -petit _chien de village_» qu'elle ne nomme pas. Ce village, d'après la -distance qu'elle indique, doit être la petite ville d'Anse, fort -ancienne et assez célèbre par les conciles qui s'y sont tenus[15]. - - [14] Voyez la 4e partie de ces _Mémoires_, p. 199. - - [15] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6, 10 et 11 octobre 1673), t. III, p. - 184-187, édit. G.; t. III, p. 103, 108, 110, édit. M. - -Deux jours après, à vingt-cinq lieues plus loin, elle écrit à madame de -Grignan, et date sa lettre de Châlon-sur-Saône. Elle annonce qu'elle a -rencontré en chemin un M. de Sainte-Marthe, qui lui fera parvenir deux -petits poëmes de Marigny, l'un intitulé _l'Enterrement_; l'autre, _le -Pain bénit_. Ce dernier était une satire virulente contre les -marguilliers de la paroisse de Saint-Paul et contre les exactions et les -abus qui avaient lieu de la part des fabriques pour les frais de -mariage, d'enterrement et pour rendre le pain bénit. Ces abus existent -encore; la forme seulement en est changée. On se rappelle que dans sa -jeunesse madame de Sévigné était liée avec Marigny, ce grand chansonnier -de la Fronde[16]. Elle remarque avec raison que le jugement qu'on porte -de ces futiles opuscules dépend de la disposition d'esprit où l'on se -trouve en les lisant[17]. Madame de Grignan n'avait pas le même motif -que madame de Sévigné pour se complaire à l'odieux et au ridicule versé -sur les obscurs administrateurs de la paroisse Saint-Paul, dont sa mère, -comme paroissienne, était légèrement victime. - - [16] Conférez la 1re partie de ces _Mémoires_, t. I, p. 479, - chap. XXXV. - - [17] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 octobre 1673), t. III, p. 187, 189, - édit. G.; t. III, p. 111, édit. M. Ces deux pièces de vers ne se - trouvent pas dans les _Å’uvres_ de Marigny, 1674, in-12. - Auparavant avait paru _le Pain bénit_, par M. l'abbé de Marigny, - 1673, in-12 (23 pages); on a réimprimé cet opuscule en 1795, avec - une sotte préface. - -Après un trajet de trente lieues fait en trois jours, madame de Sévigné -arriva enfin, le 21 octobre, dans son château de Bourbilly, qu'elle -n'avait pas vu depuis neuf ans. - -«Enfin, ma chère fille, dit-elle, j'arrive présentement dans le vieux -château de mes pères. Voici où ils ont triomphé, suivant la mode de ce -temps-là . Je trouve mes belles prairies, ma petite rivière, mes -magnifiques bois et mon beau moulin à la même place où je les avais -laissés. Il y a eu ici de plus honnêtes gens que moi; et cependant au -sortir de Grignan, après vous avoir quittée, je m'y meurs de tristesse. -Je pleurerais présentement de tout mon cÅ“ur si je m'en voulais croire; -mais je m'en détourne, suivant vos conseils. Je vous ai vue ici; Bussy y -était, qui nous empêchait fort de nous ennuyer. Voilà où vous -m'appelâtes _marâtre_ d'un si bon ton[18].» - - [18] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (16 octobre 1673), t. III, p. 190, édit. - G.; t. III, p. 112, édit. M.--_Lettres de madame_ DE - RABUTIN-CHANTAL, _marquise_ DE SÉVIGNÉ; la Haye, 1726, t. I, p. - 317. - -On conçoit le douloureux plaisir qu'éprouvait cette mère passionnée à se -rappeler, en arrivant dans son vieux château, le dernier voyage qu'elle -y avait fait avec sa fille. Nous l'avons seulement mentionné à sa -date[19]; rappelons-le ici, et ajoutons quelques mots de plus, -nécessaires pour compléter le récit de celui dont nous nous occupons. Le -présent se compose-t-il d'autre chose que des souvenirs du passé et des -rêves sur l'avenir? - - [19] Deuxième partie de ces _Mémoires_, p. 331, chap. XXII (2e - édit.). - -Ce fut le 15 août 1664 que madame de Sévigné alla à Tancourt (commune de -Vaurezis, près de Soissons), où l'attendait Ménage[20]. De là elle se -rendit à Commercy, chez le cardinal de Retz, puis ensuite à Bourbilly. -Bussy, qui était alors à sa terre de Forléans, vint la voir: il n'avait -que quarante-cinq ans. Madame de Sévigné en avait trente-huit; sa fille -était dans sa seizième année. Comme la fleur qui vient de s'épanouir, -elle brillait de tout l'éclat de sa fraîcheur et de sa beauté; elle -était la joie, les délices, l'orgueil de sa mère; elle n'appartenait -qu'à elle seule: aucun lien, aucun devoir ne la forçait de s'en séparer. -Ces deux charmantes femmes, dans leur gothique domaine, firent à cette -époque sur Bussy une impression si vive et si durable que, plus de deux -ans après (le 11 novembre 1666), appelé par des affaires à se -transporter avec toute sa famille à Forléans, il en profita pour revoir -encore Bourbilly. Il écrivit alors à sa cousine pour lui exprimer -combien lui et ses enfants avaient été flattés de contempler les -portraits des Christophe et des Gui, leurs ancêtres, tapissant les murs -des Rabutin. «Ces Rabutin vivants, dit-il, voyant tant d'écussons, -s'estimèrent encore davantage, connaissant par là le cas que les Rabutin -morts faisaient de leur maison[21].» - - [20] _Lettres de_ MÉNAGE, dans les _Lettres et pièces rares et - inédites_ publiées par M. Matter, 1846, in-8º, p. 235.--BUSSY, - _Lettres_, 173, in-12, t. I, p. 1. - - [21] BUSSY, _Lettres_ (11 novembre 1666), Paris, Delaulne, 1637, - in-12, t. II, p. 2.--Dans SÉVIGNÉ, _Lettres_, t. I, p. 154, édit. - G.; t. I, p. 109, édit. M., et p. 1, 3, chap. I de la 1re partie - de ces _Mémoires_. - -Madame de Sévigné avait, plus anciennement encore, fait un voyage à -Bourbilly, accompagnée de son mari; et Bussy, qui à cette époque se -trouvait à sa terre de Forléans, fit une visite aux nouveaux mariés. -Longtemps après, il rappelle avec orgueil à sa cousine combien, à la vue -de tous ces portraits, le marquis de Sévigné fut frappé de la grandeur -de la maison des Rabutin[22]. - - [22] BUSSY, _Lettres_ (29 octobre 1675), t. I, p. 170, édit. - 1737.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 octobre 1675), t. IV, p. 31, édit. - M.; t. IV, p. 146, édit. G. - -A ce dernier voyage que madame de Sévigné fit à Bourbilly (en 1673), -Bussy ne se trouva point au rendez-vous qu'elle lui avait assigné dans -sa lettre écrite de Grignan[23]. La manière railleuse avec laquelle elle -mande à sa fille que son cousin avait pris soin de se faire habiller à -Semur, lui et toute sa famille[24], pour se rendre à Paris, prouve -qu'elle aimait mieux le voir là qu'à Bourbilly. Bussy s'était brouillé -avec le comte de Guitaud, qui alors habitait Époisses. Lui et sa femme -comptaient au nombre des meilleurs amis de madame de Sévigné: -possesseurs de la terre seigneuriale du fief de ses ancêtres[25], ils -lui étaient très-utiles pour la gestion de ses intérêts en Bourgogne et -jouissaient dans toute la province d'une grande considération. Madame de -Sévigné aurait voulu faire cesser l'ancienne inimitié de Bussy et de -Guitaud; mais Bussy, dévoré d'ambition et d'envie, s'y refusa -toujours[26]. Il reprochait à Guitaud de l'avoir autrefois desservi dans -l'esprit de Condé et de n'avoir pas voulu exécuter l'accord -qu'ils avaient conclu ensemble pour la vente de la charge de -capitaine-lieutenant des chevau-légers du prince, lorsque celui-ci fut -arrêté[27]. - - [23] _Suite des Mémoires du comte_ DE BUSSY, ms., p. 37, vo (15 - juillet 1673).--BUSSY (lettre du 29 octobre 1675), dans SÉVIGNÉ, - t. IV, p. 146, édit. G., et t. IV, p. 34, édit. M.--Voyez la 4e - partie de ces _Mémoires_, p. 313.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (15 juillet - 1673), t. III, p. 164, édit. G. - - [24] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (21 octobre et 6 novembre 1673), t. III, - p. 195 et 210, édit. G.; t. III, p. 117 et 130, édit. M. - - [25] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 février et 23 août 1678), t. V, p. - 481; t. VI, p. 24, édit. G.; t. V, p. 308 et 354, édit. M. - - [26] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (juillet 1679), t. VI, p. 101 à 104. - - [27] Voyez la 1re partie de ces _Mémoires_, t. I, p. - 203.--BUSSY-RABUTIN, _Mémoires_, édit. 1721, t. I, p. 151, 152, - 165, 172 et suiv., 185, 191, 192, 202, 337. - -Orgueilleux de l'antiquité de sa race, Bussy voyait avec déplaisir que -Guitaud, qui avait servi sous lui comme cornette et ne s'était jamais -distingué dans aucun combat, fût devenu, par son premier mariage avec -Françoise de la Grange, possesseur du marquisat d'Epoisses et qu'en -cette qualité madame de Sévigné, le dernier rejeton de la branche aînée -des Rabutin, l'appelât, même en plaisantant, son seigneur[28]. - - [28] EXPILLY, _Dictionnaire des Gaules et de la France_, 1764, - in-fol., t. II, p. 753, au mot _Époisses.--Voyage pittoresque de - Bourgogne_, Dijon, 1833, t. I, feuille 9, no 3. - -Ce n'était point, au reste, un voyage sentimental que madame de Sévigné -avait voulu faire à Bourbilly. Elle ne s'était pas dérangée de sa route -seulement pour le plaisir de revoir ce séjour, encore moins pour s'y -rencontrer avec Bussy, ni même pour jouir de la société du comte et de -la comtesse de Guitaud; le soin de ses intérêts l'avait forcée d'y -venir. Elle avait du blé à vendre, des baux à renouveler, des mesures à -prendre pour être payée plus exactement de ses revenus. Elle s'occupa si -activement de ces affaires qu'elle trouva pour les terminer des -expédients auxquels le _bon abbé_, si expert en ces matières, n'avait -pas pensé[29]. - - [29] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (25 octobre 1673), t. III, p. 196, édit. - G.; t. III, p. 118, édit. M.--_Ibid._ (juillet 1679), t. VI, p. - 101, 104, édit. G. - -Dès le lendemain de son arrivée, le comte de Guitaud, dans l'espoir de -l'attirer à Époisses, était accouru à cheval de grand matin à Bourbilly -par une pluie battante. Madame de Sévigné le retint à dîner. Guitaud lui -apprit les nouvelles qu'il venait de recevoir. Le comte de Monterès -avait publié à Bruxelles, le 15 octobre, la rupture de la paix entre la -France et l'Espagne; la guerre paraissait imminente[30], et on présumait -que M. de Grignan serait obligé de venir pour expliquer sa conduite. -Quant à Guitaud, il n'espérait pas être employé; il raconta à madame de -Sévigné les intrigues qui l'avaient fait déchoir dans les bonnes grâces -du prince de Condé, et comment il s'en consolait en faisant de grands -embellissements à son magnifique château, où il se proposait de passer -l'hiver[31]. Après le dîner, madame de Sévigné, que le comte de Guitaud -n'avait pas prévenue, vit arriver dans un carrosse à six chevaux la -comtesse de Guitaud, accompagnée de cette comtesse de Fiesque qui, selon -madame de Sévigné[32], donnait de la joie à tout un pays et le paraît. -Cette femme, insouciante et frivole, conservait sa beauté, que les -années semblaient épargner: «c'est disait madame de Cornuel, parce -qu'elle est salée dans sa folie[33].» Madame de Sévigné eut par elle des -nouvelles de cour qui étaient de nature à amuser sa fille dans les -prochaines lettres qu'elle devait lui écrire. - - [30] LOUIS XIV, _Å’uvres_, t. III, p. 403.--MIGNET, - _Négociations_, t. IV, p. 215. - - [31] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (21 octobre 1673), t. III, p. 191, édit. - G., t. III, p. 114, 118, édit. M. - - [32] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (21 octobre 1673), t. III, p. 196, édit. - G.; t. III, p. 118, édit. M. - - [33] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 avril 1676), t. IV, p. 202, édit. M.; - t. IV, p. 262, édit G.--SAINT-SIMON, _Mémoires_, t. II, p. 354. - -Comme deux satellites qui se meuvent autour d'un astre principal, la -cour de France entraînait à sa suite deux petites cours, où s'agitaient -dans leurs orbites particulières les ambitions et les intrigues des -courtisans. Ces cours étaient celle de MONSIEUR, frère du roi, et celle -de Condé, premier prince du sang. Toutes deux donnaient l'exemple d'une -licence de mÅ“urs trop autorisée par celle du monarque, mais d'une -nature plus désastreuse pour la morale publique. Deux femmes, deux -sÅ“urs, qu'à cause de leur beauté et par une allusion dérisoire à leur -conduite impudente on nommait _les anges_, se partageaient dans ces -cours la principale influence. Elles étaient les filles du maréchal de -Grancey, mais de deux lits différents[34]. L'aînée ne se maria pas, et -passait (afin de masquer de plus honteux penchants) pour être la -maîtresse de MONSIEUR. Elle était réellement celle de son favori, le -chevalier de Lorraine. Par lui, elle dominait MONSIEUR. Charlotte de -Bavière, la _nouvelle Madame_, celle qui fut la mère du régent, n'eut -jamais aucune influence sur son mari ou sur le roi. D'une laideur -repoussante, qui n'était contre-balancée par aucune qualité de l'esprit, -elle déplaisait à tout le monde par sa hauteur et sa fierté maussade; -étrangère à tous les personnages de cette cour brillante où elle était -forcée de vivre, elle fut toujours Allemande en France. Pour son mari, -qu'elle méprisait, elle était complaisante et douce, afin d'en être bien -traitée et de rester en repos. Elle soulageait son ennui en écrivant -sans cesse à ses nobles parents d'Allemagne tout ce que la médisance et -la calomnie inspiraient de plus odieux sur sa nouvelle famille, sur -cette cour où pourtant elle occupait le premier rang après la reine. - - [34] SAINT-SIMON, _Mémoires complets et authentiques_, 1829, in - 8º, t. X, p. 111, chap. II.--MADAME, duchesse d'Orléans, - _Mémoires, fragments historiques et correspondances_, 1832, - in-8º, p. 99, 103 et 242. - -La sÅ“ur cadette de la belle Grancey, la comtesse de Marci, était aimée -de Henri-Jules de Bourbon, duc d'Enghien, qu'on appelait alors monsieur -le Duc. Ce fils du grand Condé ne manquait pas de valeur; mais il -n'avait ni goût ni talent pour la guerre. Dur et égoïste dans son -intérieur, il était dans le monde aimable et spirituel. Petit et maigre, -par le feu de ses yeux et l'audace de son regard, il faisait, malgré sa -mine chétive, une forte et vive impression sur les femmes. Il les aimait -et savait s'en faire aimer. Il recherchait leur société, même quand -elles ne pouvaient lui offrir d'autre plaisir que celui de la -conversation[35]. Lorsqu'il était véritablement amoureux, nul ne le -surpassait dans les moyens de séduction; nul n'égalait son activité pour -vaincre les obstacles, l'habileté et la fécondité de ses inventions pour -les travestissements et les ruses. La grâce, la noblesse des manières, -les flatteries les plus délicates, l'éloquence de la passion, les -galanteries les plus ingénieuses, la magnificence des fêtes, les dons -les plus dispendieux, rien n'était omis, rien n'était épargné pour -assurer son triomphe. Homme de goût et de jugement, il avait un savoir -très-varié. C'est lui qui ordonnait tous les embellissements de -Chantilly et les grandes fêtes que l'on y donnait au roi ou aux -princes[36]. - - [35] Voyez la 4e partie de ces _Mémoires_, p. 274 et 275. - - [36] SAINT-SIMON, _Mémoires_, t. VII, p. 117, 139, et notre note - sur les _Caractères_ de la Bruyère, p. 658, 660, 662. Conférez la - 4e partie de ces _Mémoires_, p. 271. - -Louis XIV avait permis qu'en l'absence de son père M. le Duc exerçât les -fonctions de gouverneur en Bourgogne; il lui avait donné la survivance -de cette charge ainsi que celle de grand maître de la maison du roi. Le -grand Condé n'était un homme supérieur qu'à la guerre; il se déchargeait -sur son fils de l'ennui des affaires à Paris comme à Chantilly, comme à -Dijon. M. le Duc savait s'appliquer à l'administration des vastes -domaines de Condé; et il est probable que Guitaud ne fut écarté de cette -petite cour que parce que la société habituelle des princes dont il -dépendait ne convenait pas à sa femme, jeune, belle et pieuse[37]. -Madame de Sévigné, dans sa lettre à sa fille, rapportant tout ce que lui -a raconté sur les _anges_ la comtesse de Fiesque, dit: «Madame de Marci -quitta Paris par pure sagesse, quand on commença toutes ces collations -de cet été[38], et s'en vint en Bourgogne; on la reçut à Dijon au bruit -du canon. Vous pouvez penser comment cela faisait dire de belles choses -et comme ce voyage paraissait en public. La vérité, c'est qu'elle avait -un procès qu'elle voulait faire juger; mais cette rencontre est toujours -plaisante[39].» - - [37] Voyez 4e partie de ces _Mémoires_, p. 133, chap. V. - - [38] Sur ces soupers donnés à Saint-Maur, par le duc d'Enghien, - _aux anges_, voyez SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 avril 1672), t. II, p. - 449, édit. G.; t. II, p. 377, édit. M.--_La France devenue - italienne dans la France galante_, Cologne, 1695, in-12, p. 359 - et 360. - - [39] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (21 octobre 1673), t. III, p. 193, édit. - G.; t. III, p. 115, édit. M. - -Sur l'autre sÅ“ur madame de Sévigné dit: «MONSIEUR veut faire -mademoiselle[40] de Grancey dame d'atour de MADAME, à la place de la -Gordon, à qui il faut donner cinquante mille écus: voilà qui est un peu -difficile. Madame de Monaco mène cette affaire.» Cette affaire ne put -réussir, probablement à cause de l'opposition qu'y mit MADAME; mais -MONSIEUR fit mademoiselle de Grancey dame d'atour de la fille de sa -première femme, qui devint reine d'Espagne[41]. - - [40] On donnait aussi à mademoiselle de Grancey le titre de - madame, comme étant chanoinesse. - - [41] Marie-Louise, fille d'Henriette d'Angleterre, née à Paris le - 27 mars 1662, mariée à Charles II, roi d'Espagne, le 30 août - 1679. Sur madame de Grancey, conférez SÉVIGNÉ, _Lettres_, édit. - de la Haye, 1726, t. I, p. 165 (dans cette édition le nom de - Grancey est en toutes lettres); _ibid._ (21 octobre 1673, 2 - octobre 1676, 6 décembre 1679), t. II, p. 189; t. III, p. 193; t. - VI, p. 147; t. V, p. 237, édit. G.--_Ibid._ (15 juillet 1672), t. - II, p. 223, édit. M.--_Ibid._ (23 décembre 1671), t. II, p. 269; - t. III, p. 115; t. VI, p. 53.--_Ibid._ (29 janvier 1685), t. VII, - p. 229, édit. M. - - -Madame de Sévigné céda enfin aux instances du comte et de la comtesse de -Guitaud. Elle alla passer un jour à Époisses. Elle y trouva, outre la -comtesse de Fiesque, la comtesse de Toulongeon, son aimable cousine, -puis madame de Chatelus et le marquis de Bonneval. Elle fut charmée de -toutes les personnes qu'elle vit dans ce château, dont elle admira la -magnificence. Longtemps après, elle déclara à Bussy[42] qu'elle -conservait un souvenir tendre et précieux de la réception qui lui avait -été faite alors par le comte et la comtesse de Guitaud. - - [42] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 avril 1678), t. V, p. 501. - -Le lendemain (27 octobre), madame de Sévigné arriva à Auxerre, trajet de -soixante-dix kilomètres ou dix-sept lieues et demie. Elle paraît s'être -arrêtée ensuite à Sens (distance de cinquante kilomètres ou quatorze -lieues et demie). Elle regretta de n'y pas trouver l'archevêque, -Louis-Henri de Gondrin[43], oncle de madame de Montespan, janséniste -renforcé, qui avait beaucoup d'amitié pour madame de Grignan. - - [43] Sur Gondrin, conférez GOURVILLE, _Mémoires_, t. LII, p. 309. - -De la petite ville de Moret, où elle coucha, madame de Sévigné écrivit à -sa fille le 30 octobre, et le surlendemain, jour de la Toussaint, elle -entra dans Paris après quatre semaines de voyages[44]. - - [44] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (27, 30 octobre et 2 novembre 1673), t. - III, p. 198-203, édit. G.; t. III, p. 120-124, édit. M. - - - - -CHAPITRE II. - -1673-1674. - - Madame de Sévigné arrive à Paris, et descend chez son voisin de - Coulanges.--Visites qu'elle y reçoit.--Empressement de tous ses - amis, de Pomponne, du cardinal de Retz, de la Rochefoucauld, de - madame Scarron.--Sévigné quitte l'armée deux fois pour venir voir - sa mère.--Mort du marquis de Maillane.--Nouvelle lutte qu'elle - occasionne entre l'évêque de Marseille et madame de - Grignan.--Madame de Sévigné invite madame de Grignan à venir avec - son mari solliciter à la cour.--Madame de Grignan s'y - refuse.--Madame de Sévigné se trouve chargée de combattre seule - l'influence de l'évêque de Marseille auprès des ministres et du - roi.--Louis XIV, alors en guerre avec presque toute l'Europe, se - prépare à conquérir la Franche-Comté.--Il suffisait à - tout.--S'interposait dans les affaires de sa famille et dans celles - des grands de sa cour.--Il charge l'évêque de Marseille d'une - négociation secrète pour la duchesse de Toscane.--Il s'inquiète de - la rivalité de ce prélat avec le comte de Grignan.--Louis XIV - allait nommer le candidat qui lui était présenté par ce prélat.--La - nouvelle de la prise de la citadelle d'Orange le fait changer de - résolution. - - -En attendant que ses appartements fussent disposés pour la recevoir, -madame de Sévigné descendit chez son cousin de Coulanges, rue du -Parc-Royal[45]. Cette rue était voisine de celle de Saint-Anastase, où -elle et le comte de Guitaud demeuraient. Elle espérait ainsi pouvoir -être seule dans les premiers moments de son arrivée et cacher la -faiblesse qu'elle avait de pleurer sans cesse en lisant les lettres -qu'elle recevait de sa fille. Ces lettres lui ôtaient l'espoir de la -revoir prochainement. Cette combinaison, heureusement pour elle, ne -réussit point; il fallut, pour ne pas paraître ingrate, qu'elle se -détournât de ses tristes pensées ou qu'elle dît que le vent lui avait -rougi les yeux[46]. Depuis plusieurs jours on épiait son arrivée, et -jamais flot plus nombreux de visiteurs et de visiteuses n'assaillit le -logis de l'aimable chansonnier. Il dut à cette faveur que lui fit sa -cousine le plaisir de voir sa femme, qui vint une des premières; puis -ensuite, ensemble ou successivement, l'excellente sÅ“ur du marquis de la -Trousse, mademoiselle de Meri[47], madame de Rarai[48], la comtesse de -Sanzei[49], madame de Bagnols, l'archevêque de Reims (le Tellier), -madame de la Fayette, M. de la Rochefoucauld, madame Scarron, -d'Hacqueville, la Garde[50], l'abbé de Grignan, l'abbé Têtu, Pierre -Camus, le gros abbé de Pontcarré[51], ami de d'Hacqueville, Brancas, de -Bezons, la marquise d'Uxelles, madame de Villars et enfin M. de -Pomponne, qui revint encore les jours suivants. L'amitié si vive et si -constante que ce ministre avait témoignée pour M. et madame de Sévigné -devenait d'autant plus précieuse à celle-ci qu'elle pouvait l'aider à -soutenir la lutte où sa fille allait l'engager; aussi mettait-elle tous -ses soins à lui plaire[52]. Pomponne trouvait dans son commerce avec -cette femme spirituelle un délassement aux peines et aux soucis des -affaires; il aimait à se rappeler surtout les heures de gaieté folâtre -qu'il avait autrefois passées dans sa société[53]. - - [45] DE COULANGES, _Chansons_, ms. autographe, p. 68. Le - manuscrit des chansons de Coulanges, qui est à la Bibliothèque - impériale, a 133 feuillets ou 266 pages. - - [46] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (2 novembre 1673), t. III, p. 204, édit. - G.; t. III, p. 125, édit. M. - - [47] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (22 avril 1671 et 12 juillet 1673), t. - III, p. 204, 214, 452; t. IV, p. 465, édit. G.--_Ibid._ (15, 18 - septembre et 10 novembre, 13 décembre 1679, 1er et 26 mai, 10 - juin 1680, 7 juillet 1682), t. IV, p. 94; t. V, p. 465; t. VII, - p. 94, édit. G.; et t. II, p. 359; t. III, p. 149, 328; t. IV, p. - 82, 251; t. V, p. 425 et 431; t. VI, p. 6, 21, 30, 66, 209, 238, - 242, 249, 364, 368; t. VII, p. 38, édit. M. - - [48] Sur la famille Rarai ou Raray, voyez la 3e partie de ces - _Mémoires_, p. 134.--MONTPENSIER, _Mém._, t. XLII, p. - 150.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 juillet 1639), t. VII, p. 142, édit. - G.; t. VI, p. 401, édit. M. - - [49] Marie de Coulanges; voyez la 4e partie de ces _Mémoires_, p. - 349. - - [50] Voyez la 3e partie de ces _Mémoires_, p. 129. - - [51] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 juin et 20 juillet 1671), t. II, p. - 102-161, édit. G.--_Ibid._ (15 décembre et 25 octobre 1675), t. - IV, p. 181 et 249.--_Ibid._ (19 juillet 1675), t. III, édit. G., - et t. IX, édit. M. - - [52] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 et 13 novembre 1673), t. III, p. 209, - 220. - - [53] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (15 janvier 1674), t. III, p. 307, édit. - G.; t. III, p. 210, édit. M.--Voyez la 2e partie de ces - _Mémoires_, chap. VIII, p. 101, 2e édit. - -Peu de temps après son arrivée à Paris, madame de Sévigné vit aussi un -grand nombre de personnages, les uns ses amis, les autres qu'elle était -habituée à rencontrer dans le monde où elle était répandue. Plusieurs -venaient des armées et devaient y retourner promptement; ils étaient -attirés, par le retour du roi, à Paris et à Saint-Germain en Laye. -C'étaient le prince de Condé, M. le Duc, son fils, la duchesse de -Bouillon, le cardinal de Bouillon, la duchesse de Chaulnes, madame de -Richelieu, Vivonne, madame de Crussol, la comtesse de Guiche[54], madame -de Thianges, madame de Monaco, les Noailles, les d'Effiat, les -Beuvron-Louvigny, le marquis de Villeroi, Charost et le chevalier de -Buous, ce brave marin, cousin germain de M. de Grignan[55]; puis son -excellent ami Corbinelli, et Barillon, et Caumartin, et Guilleragues, -dont l'esprit était en possession d'électriser le sien; enfin madame de -Marans, dont la sincère conversion et «l'_absorbée_ retraite» lui -avaient été annoncées par une lettre de la marquise de Villars, qu'elle -reçut à Grignan[56]. - - [54] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 novembre 1673), t. III, p. 225, édit. - G.--(22 janvier 1674), t. III, p. 323 et 324, édit. G.--(5 - février 1674), t. III, p. 335. - - [55] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (27 novembre 1672), t. III, p. - 243.--_Ibid._ (20 septembre 1671), t. II, p. 232, édit. G.--(4 - mai 1676), t. IV, p. 430, édit. G. - - [56] _Lettres inédites de madame de Sévigné, de sa famille et de - ses amis, avec son portrait, vue et fac-simile_; Paris, Blaise, - 1827, in-8º, p. 66, 67.--_Lettres de la marquise_ DE VILLARS, - Paris, 25 août 1673; et _Lettres_ DE SÉVIGNÉ (15 janvier 1674), - t. III, p. 289, édit. G. - -Cependant la guerre continuait et devait durer encore; mais les rigueurs -de l'hiver mettaient quelque relâchement dans les opérations militaires -et permettaient qu'on vînt prendre part, pendant de cours intervalles, -aux plaisirs de la capitale et à ceux de la cour. Le baron de Sévigné -lui-même quitta deux fois l'armée, et vint voir sa mère; mais il fut -obligé de s'en séparer au bout de quelques jours et de repartir pour -rejoindre son régiment. Madame de Sévigné se montra peu alarmée sur les -périls auxquels son fils allait être exposé; elle disait plaisamment: -«M. de Turenne est dans l'armée de mon fils, et les Allemands la -redoutent.» Elle paraît aussi peu inquiète d'apprendre qu'une amourette -arrête le jeune guidon des gendarmes à Sézanne et retarde son arrivée, -«attendu, dit-elle, qu'elle sait qu'il ne peut être question de -mariage[57].» - - [57] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (26 janvier 1674), t. III, p. 327, édit. - G.--_Ibid._, t. III, p. 227, édit. M. - - -Aux anciennes et nombreuses connaissances de madame de Sévigné s'en -réunirent d'autres d'une date plus récente, qu'elle était obligée -d'accueillir avec empressement par intérêt pour sa fille: telle était -madame d'Herbigny, sÅ“ur de Rouillé, comte de Melai, intendant de -Provence[58]; et Marin, qui venait d'être nommé premier président du -parlement d'Aix, homme d'une physionomie agréable, aimable dans le -monde, mais despote dans son intérieur, dur envers sa femme et auquel -madame de Sévigné nous apprend qu'on avait donné le surnom de _cheval -Marin_[59]. - - [58] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 décembre 1673), t. III, p. 281, éd. - G. - - [59] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (10 novembre 1673, 16 octobre 1675, 25 - septembre 1687), t. III, p. 217; t. IV, p. 159; t. X, p. 8, éd. - G. - -De tous les amis que madame de Sévigné eut alors le plus de bonheur à -revoir, ce fut le cardinal de Retz; car il aimait et admirait -sincèrement dans madame de Grignan, qu'il avait vue naître et grandir, -l'union des qualités essentielles que l'on apprécie dans les deux sexes: -la beauté, le jugement et le savoir, l'énergie du caractère, l'orgueil -du rang, une noble ambition, un esprit capable d'application dans les -affaires et un penchant prononcé pour l'étude des plus hautes questions -de la philosophie cartésienne, que Retz se plaisait à débattre. -Non-seulement il conservait les lettres que madame de Grignan lui -écrivait, mais il gardait des copies de celles qu'elle avait écrites à -d'autres[60]. Aussi n'était-ce qu'à lui que madame de Sévigné osait -révéler les secrets de toutes ses faiblesses pour sa fille, parce que -lui seul savait la plaindre et compatir à ses maternelles douleurs. - - [60] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (10 juillet et 26 août 1675), t. III, p. - 381 et 429, édit. M.--_Ibid._, t. III, p. 456, et t. IV, p. 56, - édit. G.--Sur Pontcarré, auquel madame de Grignan écrivait, - conférez encore SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 juin 1671), t. II, p. 204, - édit. G.--_Ibid._ (15 décembre 1675), t. IV, p. 249, édit. - G.--_Ibid._ (25 octobre 1675), t. IV, p. 181, édit. G.--(31 août - 1689), t. IX, p. 94, édit. M. - -Bussy et Forbin-Janson se trouvaient aussi présents à Paris lors du -retour de madame de Sévigné; mais ni l'un ni l'autre ne vint la voir. Le -premier s'en abstint forcément par des motifs de prudence que nous -ferons connaître[61]; le second ne pouvait, malgré le désir qu'il en -avait, se livrer au plaisir qu'il aurait eu d'entretenir un commerce -amical avec l'aimable belle-mère du comte de Grignan, puisqu'il était en -hostilité ouverte avec ce dernier[62]. Ceci nous conduit à exposer les -faits qui, cette année, marquèrent la lutte que Forbin-Janson eut à -soutenir contre le lieutenant général gouverneur de Provence. - - [61] Conférez BUSSY-RABUTIN, _Suite de ses Mémoires_ (ms. de - l'Institut), p. 42 à 57. (Lettres DE BUSSY, datées de Paris 16, - 20, 22, 25 octobre, et 2, 26 décembre 1673.--Le 23 janvier 1674, - Bussy écrit de Chaseu.) - - [62] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (2 novembre 1673), t. III, p. 206, édit. - G.; t. III, p. 26, édit. M. - -Cette lutte, qui se renouvelait tous les ans, fut cette fois plus vive -et plus animée[63], parce qu'un nouveau sujet de litige avait surgi -entre le prélat et M. de Grignan, d'où dépendait l'influence de l'un ou -de l'autre sur la Provence. Le marquis de Maillane de la Rousselle, -procureur-joint de la noblesse, était mort[64]; il s'agissait de lui -nommer un successeur. L'assemblée des communautés avait de droit la -nomination à cette place; mais dans le fait l'assemblée choisissait -toujours celui que désignait le gouverneur parmi les hauts dignitaires -qui dirigeaient le mieux les délibérations et qu'on supposait le plus -accrédité auprès du roi et de ses ministres. M. de Grignan voulait faire -nommer son cousin, le marquis Pontever de Buous, frère de cette marquise -de Montfuron dont madame de Sévigné était ravie, parce qu'elle était -aimable, «et qu'on l'aimait sans balancer[65].» L'évêque de Marseille -demandait qu'on lui préférât M. de la Barben, qui, l'année précédente, -avait, comme courrier et à ses frais, porté au roi les délibérations des -états et qui, d'ailleurs, avait été principal consul d'Aix et procureur -du pays[66]. - - [63] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 novembre 1673), t. III, p. 136, édit. - M.; t. III, p. 218, 221, édit. G. - - [64] _Abrégé des délibérations prises en l'assemblée générale du - pays de Provence_ tenue à Lambesc les mois de décembre 1673 et - janvier 1674; Aix, in-4º (1680), p. 20 et 21.--EXPILLY, _Dict._, - t. IV, p. 486. - - [65] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (21 déc. 1672), t. III, p. 124, édit. G.; - t. III, p. 54, édit. M. - - [66] _Abrégé des délibérations_, etc., p. 21. - -Cette affaire, qui paraissait si peu importante au milieu des grands -événements de la guerre et de la politique, embarrassait cependant Louis -XIV et ses ministres. C'est qu'alors on était non-seulement -très-préoccupé des dangers qui à l'extérieur menaçaient la France, mais -encore attentif aux périls qui surgissaient à l'intérieur par l'effet du -mécontentement des populations, accablées d'impôts, et d'une noblesse -fière et brave, toujours prête à s'agiter sous le frein qui l'avait -domptée. Les provinces maritimes, la Normandie, la Bretagne, la -Gascogne[67], la Provence, plus exposées aux insultes des flottes -ennemies, plus en proie aux intrigues et aux corruptions de l'étranger, -étaient surtout assujetties à une active surveillance. C'est pour -protéger les côtes de la Provence contre l'Espagne que Louis XIV, dès -qu'il eut déclaré la guerre à cette puissance, nomma gouverneur des îles -Sainte-Marguerite le comte de Guitaud. Le court séjour que madame de -Sévigné fit à Bourbilly et à Époisses avait eu pour résultat un -redoublement d'amitié et de confiance entre elle et le comte et la -comtesse de Guitaud, dont on s'aperçoit facilement par les lettres qui -nous restent de leur correspondance à partir de cette époque. Louis XIV -suivait avec attention tout ce qui se passait en Provence, et ne -dédaignait pas de chercher à concilier les prétentions rivales de -Forbin-Janson et de Grignan. Lorsque Marin, récemment nommé premier -président du parlement d'Aix, vint, avant de partir pour prendre -possession de sa nouvelle charge, saluer le roi, Louis XIV lui dit: -«Vous aurez d'étranges esprits à gouverner en Provence[68]!» Mais le -choix de Marin n'était pas bon pour manier habilement l'esprit turbulent -des Provençaux; il se fit détester de sa compagnie par sa servilité -maladroite et par ses susceptibilités en fait de préséances[69]. - - [67] Lettres de Sève à Colbert (22 août 1075).--DEPPING, - _Correspondance administrative sous le règne de Louis XIV_, 1851, - t. II, in-4º, p. 201. - - [68] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (10 novembre 1673), t. III, p. 215, édit. - G.; t. III, p. 133, édit. M. - - [69] Lettres du chancelier le Tellier à Marin, premier président - (7 juillet 1682). Dans DEPPING, _Correspondance administrative - sous Louis XIV_, t. II, p. 240. - -L'empereur, l'Espagne, le Danemark, la Hollande, toute l'Allemagne, hors -les ducs de Bavière et de Hanovre, étaient alors ligués contre Louis -XIV. Malgré le traité secret conclu avec Charles II en 1670[70], -celui-ci avait été forcé par son parlement de se réunir aux Hollandais -et de diriger toutes les forces navales de l'Angleterre contre la -France[71]. A l'insuffisance de ses ressources en hommes et en argent -contre une aussi formidable coalition Louis XIV opposa le génie de ses -généraux et de ses ministres et son infatigable activité. Il aurait -désiré faire consentir l'Espagne à déclarer la neutralité de la -Franche-Comté demandée par les Suisses; mais l'Espagne ne le voulut pas. -A l'exception de Maestricht et de Grave, Louis XIV avait sagement -abandonné ses conquêtes en Hollande; et, en concentrant ses forces, il -était parvenu, avec des armées inférieures en nombre, à repousser -partout ses ennemis; au nord comme au midi, il avait accru la gloire de -ses armes[72]. Ce qui lui restait de troupes devait être employé à la -conquête de la Franche-Comté, à laquelle il voulait marcher en -personne[73]. - - [70] LINGARD, _History of England_, 4e édit., t. XII, p. 369.--Ce - traité fut conclu le 22 mars 1670. - - [71] TEMPLE, _Mémoires_, vol. LXIV, p. 37, 40, 46. - - [72] LOUIS XIV, _Å’uvres_ (_Mém. militaires_, 1673, 1674, 1675), - t. III, p. 303, 532.--RAMSAY, _Histoire du vicomte de Turenne_, - édit. 1773, in-12.--_Mémoires du vicomte de Turenne_, t. III, p. - 309 à 443.--_Histoire_, t. II, liv. VI, p. 241 à 360.--L'abbé - RAGUENET, _Histoire du vicomte de Turenne_ (1738, in-12, liv. V - et VI), t. II, p. 49, 220.--DESORMEAUX, _Histoire de Louis II, - prince de Condé_, 1769, in-12, t. IV, liv. IX, p. 337 à 427. - - [73] LOUIS XIV, _Å’uvres_ (fragment sur la campagne de 1674; - Siége de Besançon; Précis de la conquête de Franche-Comté), t. - III, p. 453, 459, 473. - -Les provinces maritimes, que ne pouvaient protéger suffisamment des -escadres trop faibles, étaient livrées aux dangers des incursions -désastreuses. Les gouverneurs qui y commandaient, par leur bravoure, -leurs talents militaires et leur influence personnelle, pouvaient seuls -les défendre contre l'invasion, en faisant un appel au zèle et au -patriotisme des nobles pour la défense du pays. Louis XIV le savait, et -il mit à profit ce moyen en Guyenne[74], en Bretagne et en Normandie. -Alors il se vit forcé par la nécessité de donner plus de puissance aux -gouverneurs des provinces menacées; mais ce ne pouvait être au point de -nuire à sa propre autorité et de détruire l'Å“uvre de Richelieu, qui -avait institué les intendants pour amoindrir le pouvoir des gouverneurs, -devenu redoutable pour la couronne. Rouillé, intendant de la Provence, -dont madame de Grignan disait «que la justice était sa passion -dominante[75],» s'accordait assez bien avec le gouverneur et ménageait -cette puissante maison de Grignan. Néanmoins, quand le comte de Grignan -réclamait des gardes et des accroissements d'attribution ou -d'appointements, Rouillé devenait tout naturellement son antagoniste, -et, dans l'intérêt de sa charge et de ses propres prérogatives, il -s'opposait aux prétentions du lieutenant général gouverneur. C'est -pourquoi madame de Sévigné n'avait pu faire consentir cet intendant à -favoriser les demandes de son gendre pour ce qui concernait le payement -des gardes et des courriers: Rouillé s'était rangé, pour ces questions, -du côté de l'évêque de Marseille. Mais il ne se trouvait pas dans les -mêmes conditions pour le remplacement du procureur du pays-joint pour la -noblesse dans l'assemblée des communautés. Rouillé, homme de robe, -quoique ayant le titre de comte de Melay, était de cette caste -intermédiaire entre la roture et la haute noblesse, et il avait intérêt -à ménager celle-ci dans tout ce qui ne pouvait pas entraver les devoirs -dont sa charge l'obligeait de s'acquitter. Lorsqu'il s'agissait de faire -donner la préférence à un roturier sur un noble pour une place -auparavant occupée par un noble, on espérait que Rouillé se mettrait du -parti de M. de Grignan, et non de celui de l'évêque de Marseille. C'est -par ce motif que madame de Sévigné s'était empressée de cultiver la -société de madame d'Herbigny[76], sÅ“ur de la femme de l'intendant, -alors à Paris. Elle l'avait charmée par son esprit, et était parvenue à -la mettre dans le parti de M. de Grignan. Caumartin, ami de madame de -Sévigné et de sa fille, avait été gagné sans peine. Il en fut de même du -premier président nouvellement nommé, de Marin, «cet homme qui met le -bon sens et la raison partout,» dit madame de Sévigné, toujours disposée -à louer ceux qui agissent selon ses désirs. Quoique circonvenu et -entouré par tant d'influences, Louis XIV n'aurait pas hésité à préférer -au protégé de M. de Grignan celui de l'évêque de Marseille. -Forbin-Janson avait donné au roi des preuves de son habileté, de sa -prudence, de sa discrétion dans des affaires secrètes et intimes qu'il -avait l'habitude de traiter avec lui, par lui-même et sans -intermédiaire. - - [74] GRAMMONT, _Mémoires_, vol. LVII, p. 96, 99 (1674).--SÉVIGNÉ, - _Lettres_ (avril 1674, au comte de Guitaud), t. III, p. 339, - édit. G. - - [75] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 décembre 1673), t. III, p. 280, édit. - G.; t. III, p. 188, édit. M. - - [76] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 décembre 1673), t. III, p. 281, édit. - G.; t. II, p. 188, édit. M. - -Ce roi qu'on a si souvent représenté comme uniquement occupé de sa seule -personne et subissant l'influence de ses ministres, de ses maîtresses et -de ses serviteurs se mêlait de tout, intervenait dans tout, réglait -tout, entrait dans les détails des susceptibilités d'amour-propre et de -rang de ses maréchaux et de ses généraux, se livrait à toutes les -enquêtes nécessaires pour distribuer de la manière la plus avantageuse -les commandements de ses armées et les plus hautes fonctions de -l'État[77]. Dans ses palais, dans sa famille rien ne se faisait sans son -ordre direct. Le fier Montausier, voulant transporter le jeune Dauphin -confié à ses soins dans une habitation plus salubre et lui donner un -confesseur, ne l'osa pas sans avoir été approuvé par le jeune roi, qui -lui désigna un prêtre de son choix[78]. La belle duchesse de Mazarin -espérait que, pour la protéger contre son mari, Louis XIV suspendrait -l'autorité des lois, et afin de l'y engager elle fit intervenir en vain -le roi d'Angleterre, la reine de Portugal et toutes les femmes qui -pouvaient exercer quelque influence sur le tout-puissant monarque[79]. - - [77] Le duc DE NAVAILLES et DE LA VALETTE, _Mémoires_, Paris, - 1701, in-12, p. 278 (année 1673). - - [78] LOUIS XIV, _Å’uvres_ (lettres au duc de Montausier, 13 août, - 2 octobre 1673, 23 mai 1675, 11 mars 1677, 2 et 23 mai 1698), t. - V, p. 310, 515, 532, 559, 575. - - [79] LOUIS XIV, _Å’uvres_ (lettre au roi d'Angleterre, 17 février - 1668), t. V, p. 547. - -C'est encore à Louis XIV que sa cousine la duchesse de Toscane -s'adressait pour que le grand-duc, qu'elle n'aimait pas et qu'elle -voulait quitter, eût plus d'indulgence pour elle et de meilleurs -procédés[80]. Louis XIV avait envoyé à Florence l'évêque de Marseille -pour cette négociation confidentielle, et l'évêque n'en rendit compte -qu'à lui seul. Louis XIV ne voulait pas mécontenter le prélat -relativement aux affaires de Marseille ni être injuste. Avant de se -prononcer, il témoigna le désir que l'évêque et M. de Grignan se missent -d'accord sur le choix à faire du procureur-joint de la noblesse. -Forbin-Janson, plutôt pour complaire au monarque et à ses ministres que -par inclination, fit quelques concessions; il promit d'être favorable -dans l'assemblée des états à la demande ordinaire de Grignan pour la -somme de cinq mille livres de la solde des gardes, et de celle de trois -mille livres pour frais de courrier. Madame de Sévigné et bon nombre de -ses amis, et même, parmi les Grignan, l'imposant suffrage de -l'archevêque d'Arles, étaient pour la conclusion de la paix à ce prix. -M. de Grignan se serait volontiers rangé aussi à cette opinion; mais -madame de Grignan s'y opposa. Elle abhorrait l'évêque de Marseille, et -elle comprenait très-bien que la considération de son mari et -l'ascendant du gouverneur sur les nobles de province dépendaient du -succès de la lutte engagée contre le prélat. En cela elle voyait juste. -Si Forbin-Janson parvenait à faire nommer un homme de son choix, un -roturier, c'en était fait de l'autorité dont jouissait le gouverneur, de -l'affection que la noblesse avait pour lui et du respect qu'elle lui -portait. Madame de Grignan ameuta donc tous ses amis de Provence et tous -ceux de Paris et de la cour contre l'évêque de Marseille. Elle le -représenta sous les plus noires couleurs; selon elle, c'était un prélat -ambitieux, brouillon, hypocrite, ennemi de la noblesse et cherchant à -nuire sous les apparences de l'aménité, de la charité et de la justice. - - [80] Conférez _Histoire de la vie et des ouvrages de Jean de la - Fontaine_, 3e édit., 1824, in-8º, p. 151 à 154.--LOUIS XIV, - _Å’uvres_ (lettres à la princesse de Toscane, 3 octobre 1662, 28 - mars 1664, 23 novembre 1665, 29 octobre 1669), t. V, p. 98, 172, - 333, 458. (22 août et 6 décembre 1673), t. V, p. 511 et - 518.--MONTPENSIER, _Mémoires_, 1674, t. XLIII, p. 373. - -Elle écrivit à ce sujet à sa mère, à d'Hacqueville, à Caumartin, aux -Grignan présents à la cour. Elle les persuada tous d'autant plus -facilement que l'évêque de Marseille, soit parce que c'était sa -conviction, soit parce qu'il était révolté qu'on prêtât à ses actions et -à ses paroles des motifs indignes de lui, cherchait à faire croire que -Grignan, par paresse et par incapacité, ne s'acquittait qu'avec -négligence des fonctions de sa charge. Madame de Grignan poussait le -désir d'assurer son triomphe dans l'assemblée des communautés jusqu'à -vouloir que le comte de Grignan ne demandât aucune allocation d'argent -pour les gardes et le courrier, afin d'ôter à l'évêque de Marseille -l'occasion de se populariser en s'y opposant. C'était aussi l'avis de -Guitaud, qui s'était rangé du parti de madame de Grignan; et en effet -cette manière de procéder se présentait sous une apparence noble et -digne. Mais ce n'était pas là le compte de M. de Grignan, qui avec -raison pensait que, par l'effet de cette renonciation, il reconnaîtrait -en même temps qu'en qualité de lieutenant général gouverneur il n'avait -pas le droit d'avoir des gardes. Fier et généreux jusqu'à la -prodigalité, il songeait à se laisser allouer encore la somme de cinq -mille francs et à en faire ensuite la remise à l'assemblée, comme étant -insuffisante pour la dépense des gardes qu'il demandait[81]. Ces -résolutions de son gendre et de sa fille effrayaient madame de Sévigné, -qui ne pouvait penser[82] sans une mortelle inquiétude au grand train de -maison du gouverneur de Provence, à ses fêtes, à ses festins, à son jeu, -dépenses jugées indispensables pour soutenir la splendeur du rang qu'il -occupait. Madame de Grignan se montrait à cet égard sourde aux -remontrances d'une mère sage et prévoyante. - - [81] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (14 octobre 1674), t. III, p. 357, édit. - G. (Lettre du comte de Grignan au comte de Guitaud. A la page - 359, au lieu de: les cent mille francs, lisez: les cinq mille - francs.) - - [82] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 août 1673), t. IX, p. 93 et 94, édit. - M. - -Madame de Sévigné désirait surtout que sa fille vînt elle-même à la cour -plaider sa cause. Sans doute le désir de la posséder entrait pour -beaucoup dans l'insistance qu'elle mettait à la persuader; mais elle -croyait sincèrement que la vue d'une femme si belle, si considérée, qui -parlait admirablement le langage des affaires était de nature, dans -cette cour galante, à affaiblir l'influence de l'évêque de Marseille et -à dissiper tous les nuages qu'il avait répandus sur la réputation du -lieutenant général gouverneur. Elle voulait d'ailleurs que M. de Grignan -accompagnât sa femme pour mieux contre-balancer par sa présence à la -cour celle de Forbin-Janson. Elle pensait que le lieutenant général -gouverneur pourrait retourner ensuite en Provence pour la tenue des -états, en lui laissant sa fille comme soutien de ses intérêts pendant -cet intervalle de temps. Afin de forcer madame de Grignan à suivre ses -conseils, madame de Sévigné disait que l'abbé avait décidé qu'il était -pressant pour elle de rendre son compte de tutelle à ses enfants, et -que, par cette raison, la réunion de son fils et de sa fille à Paris -était d'une indispensable nécessité. A ce plan madame de Grignan -opposait, avec juste raison, l'énorme accroissement de dépenses -qu'occasionnerait au gouverneur de la Provence un voyage à Paris, pour -paraître convenablement à la cour. Elle disait que, dans les -circonstances critiques où se trouvait le royaume et durant une guerre -aussi acharnée, M. de Grignan pourrait difficilement obtenir un -congé[83]; et que, s'il l'obtenait, il serait blâmé d'abandonner les -intérêts du roi et du pays pour jouer le rôle de solliciteur à Paris et -celui de courtisan à Versailles et à Saint-Germain. En outre, à mesure -que l'on approchait le plus de l'époque où devait se réunir l'assemblée -des communautés, il était essentiel pour madame de Grignan qu'elle -restât en Provence, afin de concilier par elle-même et par ses -adhérents, en faveur du parti des Grignan, les suffrages des membres de -cette assemblée. Ces raisons étaient excellentes; et madame de Sévigné -devait d'autant plus se rendre à leur évidence, que sa fille lui -promettait d'aller la rejoindre après la tenue de l'assemblée et lorsque -seraient terminées des affaires qui en étaient la suite. Madame de -Sévigné aurait ressenti moins de répugnance et de douloureux regrets à -reconnaître la vérité des motifs allégués par sa fille, si celle-ci -avait montré plus de sympathie pour ses maternelles faiblesses, et si -elle n'avait pas blessé son cÅ“ur par le pédantisme de ses remontrances -et par les bouffées de sa philosophie raisonneuse[84]. - - [83] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (10 novembre 1673), t. III, p. 214-15, - édit. G.; t. III, p. 132, édit. M. - - [84] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 décembre 1673), t. III, p. 279, édit. - G.; t. III, p. 131, édit M. - - -Par ses lettres madame de Grignan était parvenue à faire partager à sa -mère une partie de son aversion[85] contre l'évêque de Marseille; et, -pour le combattre, madame de Sévigné se mit à l'Å“uvre avec toute -l'activité dont elle était redevable à sa nature vive et passionnée. Sa -fille, dont elle admirait, tout en la blâmant, la fierté et la fermeté, -la portait à ne négliger aucun moyen pour la réussite d'une affaire où -la dignité de son gendre était si fortement engagée; et, plus que -jamais, elle mérita le titre que lui donnait le comte de Grignan, qui -l'appelait _son petit ministre_[86]. Elle agit sur l'esprit du monarque -par madame de Montespan[87], par Marsillac, la Rochefoucauld[88]; et sur -Colbert par Marin, premier président d'Aix, dont la famille était alliée -à celle de ce ministre. Par madame de Coulanges elle aurait pu s'assurer -de Louvois; mais madame de Coulanges n'était pas bien alors avec son -cousin. Madame de Sévigné dut employer l'archevêque de Reims et le père -de Marin[89], ainsi que d'autres personnages qui entouraient ce -ministre; mais Louvois poussait toujours Louis XIV aux mesures -despotiques, et il ne cessait de l'occuper des moyens propres à anéantir -ce qui restait encore de franchises aux villes et aux pays d'états. -D'ailleurs il suffisait que Pomponne se fût fortement déclaré en faveur -de M. de Grignan contre l'évêque de Marseille[90] pour que Louvois ne -lui fût pas favorable: ce fut beaucoup que d'obtenir qu'il ne lui serait -pas contraire[91]. Malgré le grand nombre de personnes qui -s'intéressaient à madame de Sévigné et à sa fille, tant à la cour qu'en -Provence, il paraît certain que Louis XIV aurait refusé de s'opposer à -ce que l'évêque de Marseille eût la liberté d'user comme il le voulait -de sa légitime influence sur l'assemblée des communautés si un événement -militaire n'avait pas donné occasion au comte de Grignan de prouver -combien la noblesse de Provence lui était attachée, et n'avait pas -engagé le roi à adopter l'avis de ses ministres en favorisant la -nomination du parent du comte de Grignan. Comme cet événement, trop -négligé par nos historiens et honorable pour M. de Grignan, a un intérêt -historique, nous allons le faire connaître à nos lecteurs. - - [85] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (22 janvier 1674), t. III, p. 323, édit. - G.--_Ibid._ t. III, p. 224, édit. M.--_Ibid._ (4 déc. 1673), t. - III, p. 249, édit. G. - - [86] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 février 1672), t. II, p. 392, édit. - G.; t. II, p. 333, édit. M. - - [87] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 décembre 1673), t. III, p. 258-262, - édit. G. - - [88] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 novembre 1673), t. III, p. 222, édit. - G. - - [89] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (10, 12 et 27 novembre 1673), t. III, p. - 217, 220 et 243, édit. G.--_Ibid._ (4 décembre 1673), t. III, p. - 246 et 247, édit. G.--PELLISSON, _Lettres historiques_, in-12, t. - II, p. 73. - - [90] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (4 décembre 1673), t. III, p. 247, édit. - G. - - [91] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 et 20 novembre 1673), t. III, p. 227, - 228, édit. G.--_Ibid._ (24 décembre 1673), t. III, p. 277. - - - - -CHAPITRE III. - -1673-1674. - - Détails sur la principauté d'Orange.--De ceux qui la - possédèrent.--Le comte d'Hona, dernier gouverneur.--Mazarin la fait - saisir.--Il fait démolir les fortifications de la ville - d'Orange.--Cette principauté est donnée à la comtesse d'Auvergne - par Louis XIV, qui ordonne au comte de Grignan de s'en emparer et - d'assiéger la citadelle d'Orange.--Bercoffer, gouverneur de cette - citadelle, veut se défendre.--Diverses allégations faites à madame - de Sévigné, qui craint les résultats de ce siége.--Grignan est - suivi de toute la noblesse.--Il attaque la citadelle d'Orange, qui - se rend le 12 novembre.--Grignan la fait démolir.--Joie de madame - de Sévigné en apprenant la prise de cette citadelle.--Ouverture de - l'assemblée des communautés de Provence.--Discours de - l'intendant.--Réponse de l'évêque de Marseille.--Don gratuit - accordé.--Lutte entre le comte de Grignan et l'évêque de - Marseille.--Une lettre de Colbert à l'évêque de Marseille l'oblige - de céder.--Le marquis de Buous est nommé procureur du - pays-joint.--Les 5,000 livres sont accordées par l'assemblée au - comte de Grignan.--Opposition de l'évêque de Marseille et de - l'évêque de Toulon à ce vote.--Colbert écrit encore à l'évêque de - Marseille, et l'opposition est levée.--Félicitations et réflexions - de madame de Sévigné sur ce double triomphe.--Ouverture des états - de Bretagne.--Deux membres arrêtés pour avoir fait de l'opposition; - ils sont rendus.--On abolit les édits oppresseurs, mais on double - les impositions.--Le marquis de Coëtquen reproche à d'Harouis ses - richesses et la ruine de la Provence.--La duchesse de Rohan, aïeule - de Coëtquen, le rappelle à Paris, et l'entrée des états lui est - interdite.--Madame de Sévigné approuve cet acte.--Le duc de - Chaulnes repousse les ennemis des côtes de Bretagne. - - -A quinze lieues de la mer et des côtes de Provence, dans le département -qui a reçu le nom poétique de Vaucluse, s'étend, borné par le Rhône à -l'ouest, le petit pays dont Orange est la capitale. Il n'a que cinq -lieues de long sur quatre de large. Le nombre de ses habitants, au temps -de Louis XIV, n'a jamais dû excéder douze mille[92], et la ville -d'Orange, célèbre par plusieurs conciles, en renfermait plus de la -moitié. Placé entre le Languedoc et le comtat Venaissin, la Provence et -le Dauphiné, par le grand nombre de monuments et de constructions -antiques que le temps a respectés, ce riant canton de la France est -comme un fragment de la classique Italie transporté dans la Gaule. Riche -par l'industrie de ses habitants, par ses vignes, sa garance, son -safran, qui revêt ses plaines d'une teinte violette, il a, depuis les -temps les plus reculés, formé un État indépendant. Néanmoins les rois de -France le considéraient[93] comme un fief de la Provence ou du Dauphiné, -et, à titre de dauphins ou de comtes de Provence, ils prétendaient en -être les premiers souverains; mais les princes d'Orange ne -reconnaissaient pas cette prétention[94], et leurs droits étaient depuis -longtemps établis par des traités. - - [92] EXPILLY, _Dictionnaire des Gaules et de la France_, t. V, p. - 304 à 314.--J. CONVENENT, ci-devant pasteur de la maison de Sa - Majesté Britannique Guillaume III, _Histoire abrégée des - dernières révolutions arrivées dans la principauté d'Orange_; - Londres, chez Robert Roger, 1704, in-12, chap. I, p. 5, 6. - - [93] Conférez l'abbé D'EXPILLY, _Dictionnaire des Gaules et de la - France_, t. V, p. 315. Il cite du Tillet en son Recueil des - barons et pairs de France, Bodin, de la République, livre I, ch. - 9, et Nostradamus, Histoire de Provence, partie 4, sur l'année - 1330. - - [94] P. DUVAL, géographe de Sa Majesté, _la France depuis son - agrandissement par conquêtes du roy_; 1680, in-12, p. 258.--J. - CONVENENT, _Histoire des diverses révolutions arrivées dans la - principauté d'Orange_; Londres, 1704, in-8º.--Madame DUNOYER, - _Mémoires_, dans les _Lettres histor. et galantes_, t. VIII, p. 9 - et 10.--_L'Art de vérifier les dates_, 3e édit., 1784, in-folio, - p. 453. - - -On comptait, depuis sept siècles, quatre dynasties des princes d'Orange. -La dernière était celle des princes de Nassau, qui possédait cette -principauté depuis cent cinquante ans. A ce titre elle fut, en 1650, -transmise par héritage à Guillaume III[95], qui, à l'époque dont nous -traitons, était le grand ennemi de Louis XIV, et commandait les troupes -de la majeure partie des puissances coalisées contre lui. Peu après -l'époque de la naissance de Guillaume, sa mère, la princesse royale, -fille de Charles Ier, qui espérait l'appui de la cour de France, où ses -deux frères Charles et Jacques II (le duc d'York) s'étaient réfugiés, -conclut un traité qui permettait à Louis XIV de se mettre en possession -de la principauté d'Orange et qui stipulait que, dans le cas où le roi -pour cette prise de possession serait obligé d'employer la force, et -qu'il consentît ensuite à la rendre, il pourrait préalablement faire -raser les fortifications de la capitale. Mazarin, en vertu de ce traité, -fit résoudre dans le conseil que l'on se saisirait de la ville d'Orange -et de la citadelle. Le maréchal Duplessis-Praslin fut chargé de cette -expédition. Il préleva sur les plus riches protestants de Nîmes un impôt -qui fut destiné à payer le comte d'Hona, gouverneur d'Orange[96]. - - [95] Guillaume-Henri de Nassau. - - [96] J. CONVENENT, _Abrégé des diverses révolutions_, p. - 8.--_Relation de ce qui se passa dans le rasement du château - d'Orange et de ses fortifications, par ordre du roi de France - surnommé le Grand_ (manuscrit du cabinet de M. Aubenas), p. 24 à - 240. - -D'Hona, après une faible résistance, rendit la ville et la citadelle au -maréchal Duplessis-Praslin, qui, après avoir fait transporter tous les -canons et les munitions de guerre dans la citadelle, y mit une garnison -de cinq cents hommes. Duplessis alla ensuite rejoindre le cardinal -Mazarin à Saint-Jean-de-Luz. Un ingénieur fut envoyé à Orange pour -diriger le travail de la démolition des fortifications. Cette -destruction de leurs remparts et ce changement de domination désolèrent -les habitants et en firent fuir un grand nombre[97]. «Ce fut là , dit le -pasteur de la maison de Guillaume III, le premier échec que reçut la -ville d'Orange; il fit perdre à cette ville tout le lustre qu'elle avait -sous le gouvernement du comte d'Hona, seigneur libéral, civil et -magnifique, qui, tenant une cour aussi leste que celle des princes -d'Orange eux-mêmes, y attirait une foule d'étrangers de toutes les -nations, et la rendait un des plus agréables séjours de la France[98].» - - [97] _Lettre écrite d'Orange, le 25 juillet 1712, à M. le baron - de Roays_, par l'abbé ***, chanoine de la cathédrale (manuscrit - de M. Aubenas). - - [98] J. CONVENENT, _Histoire abrégée des dernières révolutions - d'Orange_; 1704, in-8º, chap. II, p. 8. La démolition eut lieu en - janvier et en février. - -Après le décès de la princesse royale, la princesse douairière, veuve de -Frédéric-Henri de Nassau et grand'mère de Guillaume III, eut la libre -jouissance de l'administration des biens de son petit-fils. La -principauté d'Orange rentra ainsi, en 1665, sous la domination -hollandaise[99]. On fit alors de grandes réjouissances dans toute la -principauté; les festins, les fêtes durèrent huit jours. Les temples -protestants furent rouverts, et la foule vint entendre les prédications -des ministres. Dans la ville d'Orange les fenêtres furent toutes -illuminées, et des lampions de couleur y figuraient partout le chiffre -du prince. - - [99] J. CONVENENT, _Hist. abrégée des dernières révolutions - d'Orange_; 1704, in-8º.--_Relation_, etc. (manuscrit d'Aubenas), - p. 261. - -Dans le mois de janvier 1673, Guillaume ayant fait confisquer le -marquisat de Berg-op-Zoom et d'autres lieux qui appartenaient au comte -d'Auvergne du chef de sa femme, Louis XIV fit don de la principauté -d'Orange au comte d'Auvergne, et ordonna au comte de Grignan de s'en -emparer de vive force si celui qui y commandait voulait résister[100]. - - [100] _Manuscrit d'Aubenas_, p. 269.--J. CONVENENT, _Hist. - abrégée des dernières révolutions_, chap. II, p. 10.--_Recueil - des Gazettes de l'année 1673_, in-4º, janvier et décembre 1673, - p. 48. - -Dire au comte de Grignan de se rendre maître de ce pays d'Orange, -c'était l'envoyer à la conquête du berceau de son illustre maison et le -ramener dans la patrie de ses ancêtres; car il était historiquement -prouvé que le premier comte propriétaire d'Orange fut Giraud-Adhémar IV, -auquel l'empereur Frédéric Ier, comme suzerain de l'ancien royaume -d'Arles, accorda l'investiture des seigneuries de Monteil et de Grignan. -C'est du nom de Monteil-Adhémar que, par corruption, est venu celui de -la ville de Montélimar[101]. - - [101] Dom CLÉMENT, _Art de vérifier les dates_; 1784, édit. - in-folio, t. II, p. 448.--AUBENAS, _Notice historique sur la - maison de Grignan_, dans l'_Histoire de madame de Sévigné_; 1842, - in-8º, p. 523. - -Le comte de Grignan se porta avec un grand zèle à l'exécution de l'ordre -qu'il avait reçu. - -Un Hollandais, nommé Berkoffer, était depuis sept ans, pour Guillaume, -gouverneur de la principauté d'Orange; il refusa de se soumettre aux -injonctions du comte de Grignan, et, avec le petit nombre de soldats -qu'il avait à sa disposition, il se retira dans la citadelle, et parut -déterminé à se défendre à outrance. Le bruit courait que Berkoffer -avait deux cents hommes avec lui, et l'on savait qu'il ne manquait ni de -canons ni de munitions[102]. Grignan se vit donc dans la nécessité -d'entreprendre un siége; et cependant Louvois s'était refusé à lui -envoyer les troupes et l'artillerie nécessaires pour une telle -entreprise. Ce fut pour madame de Sévigné une cause d'inquiétude et -d'angoisses. Elle redoutait les dangers, et s'affligeait de la dépense; -et si son gendre ne réussissait pas, elle voyait le triomphe de l'évêque -de Marseille assuré: toutes les négociations conduites avec tant de -labeur et d'adresse pour faire nommer le marquis de Buous devaient -échouer alors infailliblement. Les uns épouvantaient madame de Sévigné -en exagérant les difficultés du siége; les autres la rassuraient et même -la raillaient sur le peu de fondement de ses craintes. De Guilleragues, - - Esprit né pour la cour et maître en l'art de plaire[103], - -ne tarissait pas sur ce sujet. Selon lui[104], il ne fallait que des -pommes cuites pour venir à bout de ce siége. C'était un duel entre -Berkoffer et Grignan; donc il fallait couper le cou à Grignan, parce -qu'il enfreignait les ordonnances contre les duels; et lui, -Guilleragues, déjà demandait sa charge. Mais le marquis de Gorze, grand -sénéchal de Provence, et de Vivonne prétendaient au contraire que le -siége d'Orange serait long; qu'il était plus difficile qu'on ne -croyait; que la citadelle était entourée de bons fossés, bien pourvue de -canons, et avait des forces suffisantes pour faire une vive défense; -qu'enfin M. de Grignan, avec sa petite troupe, avait tort d'entreprendre -de forcer le gouverneur. Le duc d'Enghien et la Rochefoucauld assuraient -qu'il ne réussirait pas[105]; que l'attaque d'une place de guerre -exigeait des connaissances militaires spéciales, dont Grignan était -dépourvu. - - [102] J. CONVENENT, _Histoire abrégée_, p. 10, chap. - II.--_Manuscrit d'Aubenas_, p. 261 et 267. - - [103] Boileau, épître V, t. I, p. 320 à 321, édit. de Saint-Marc, - 1747. - - [104] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 et 24 novembre 1673), t. III, p. 233 - et 234, 236 et 237, édit. G.; t. III, p. 148 et 149, édit. M. - - [105] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 novembre 1673), t. III, p. 237, - édit. G.; t. III, p. 148 et 149, édit. M.--Conférez encore, - _ibid._ (2, 6, 17, 19, 27 novembre et 1er décembre 1673), t. III, - p. 207, 211, 224, 227, 241, édit. G., et t. III, p. 126, 127, - 131, 140, 143, 145, 151, 155, édit. M. - -Tandis qu'on tenait ces discours, le comte de Grignan, quoiqu'il fût -saisi de la fièvre[106], ne se laissa pas décourager. Le ministre ne lui -donnait ni argent ni soldats. Il fit prier cinq cents gentilshommes de -la province de venir le joindre. Pas un ne refusa de répondre à son -appel. Plusieurs nobles du comtat d'Avignon vinrent à sa rencontre sans -avoir été convoqués: marque de sympathie qui le toucha vivement. Ainsi, -à la tête d'environ sept cents cavaliers et de deux mille soldats des -galères, qu'il avait commandés, Grignan se mit en marche le 31 octobre, -et arriva le 2 novembre devant Orange avec sa petite armée, munie de -quelques canons. - - [106] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (2 novembre 1673), t. III, p. 205, édit. - G.; t. III, p. 126, édit. M. - -Il commença aussitôt le siége de la citadelle. On remplit les fossés -avec des fagots et des mannequins fournis par la ville d'Orange, d'après -les réquisitions faites aux magistrats[107]. Berkoffer voulut en vain -s'opposer aux travaux des assiégeants par quelques volées de canon. Deux -gentilshommes, le marquis de Briancour et M. de Roays, se distinguèrent -par leur bravoure. - - [107] _Relation de tout ce qui se passa dans le rasement du - château d'Orange_, ms. d'Aubenas, p. 272-276. - -Le 12 novembre la tranchée fut ouverte, et le comte de Grignan ordonna -l'assaut. Le marquis de Barbantane[108], d'une valeur romanesque, selon -madame de Sévigné, et M. de Ramatuelle commandaient l'escadron des -nobles destinés à soutenir les soldats qui étaient sur la tranchée. -Après que le comte de Grignan eut fait tirer deux décharges de canon, -Berkoffer fit battre la chamade[109], et M. de Beaufin fut admis dans la -place. Le gouverneur promit de se rendre le 17, et l'on donna des otages -de part et d'autre. Berkoffer avait assez d'artillerie pour faire -acheter cher le triomphe aux assiégeants; mais il eût fallu abîmer la -ville, ruiner ses amis: il aima mieux se rendre. - - [108] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 janvier 1674), t. III, p. 300, édit. - G. - - [109] _Relation_, etc., ms. d'Aubenas, p. 277.--_Mémoires - historiques et galants de madame_ DUNOYER, t. VIII, p. 12 à 17. - -Le 18 novembre (1673), la garnison sortit de la citadelle sans aucune -marque d'honneur; elle se composait de trente et un hommes; tous eurent -la liberté d'emporter ce qui leur appartenait. Berkoffer se retira en -Hollande avec sa famille[110]. - - [110] _Relation_, etc., p. 279. - -Le comte de Grignan fit démanteler la citadelle deux jours après son -entrée; il y trouva douze canons de trente-six de balles de bronze, -quarante petites pièces de campagne, deux coulevrines et onze autres -pièces de moyen calibre, sept cents mousquets, deux cents fusils, des -piques, des mousquetons, des obus, douze mille livres de poudre: il y -avait de quoi armer une garnison de quatre mille hommes. - -Huit jours après la reddition de la citadelle d'Orange, le comte de -Grignan, conformément aux ordres qu'il avait reçus du roi, fit -travailler à la démolition entière de la citadelle; mais ce travail ne -put être terminé que dans le mois de mai suivant (1674). Le puits, qui -avait 83 toises de profondeur et 30 de circonférence, fut comblé. - -Le comte de Grignan s'était retiré aussitôt après avoir vu commencer la -démolition de la place, et avait laissé la direction des travaux à -Lausier[111], son capitaine des gardes, qui commandait aux quatre -compagnies des soldats de galères. Le comte de Grignan fut escorté à son -retour par toute la noblesse de Provence et du comtat d'Avignon, qui -l'avait volontairement suivi dans cette petite campagne[112]. La joie de -madame de Sévigné fut grande quand elle en connut le glorieux -résultat[113]. «J'embrasse le vainqueur d'Orange» (dit-elle dans sa -lettre à sa fille)... «L'affaire d'Orange fait ici un bruit -très-agréable pour M. de Grignan. Cette grande quantité de noblesse qui -l'a suivi par le seul attachement pour lui, cette grande dépense, cet -heureux succès, car voilà tout; tout cela fait honneur et donne de la -joie à ses amis, qui ne sont pas ici en petit nombre. Le roi dit à -souper: «Orange est pris; Grignan avait sept cents gentilshommes avec -lui. On a tiraillé du dedans, et enfin on s'est rendu le troisième jour. -Je suis fort content de Grignan[114].» - - [111] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er janvier 1690), t. X, p. 162, édit. - G.; t. IX, p. 275, édit. M. - - [112] _Relation de ce qui passa dans le rasement du château - d'Orange_, ms. d'Aubenas, p. 283 et 284. - - [113] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (4 décembre 1673), t. III, p. 246 et - 247, édit. G.; t. III, p. 157, 158, édit. M. - - [114] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 et 11 décembre 1673), t. III, p. - 254-259, édit. G.; t. III, p. 154 et 169, édit. M. - -Mais, comme l'observe madame de Sévigné, après avoir gagné cette -bataille d'Orange il fallait en commencer une autre contre l'évêque de -Marseille[115]; et, le lendemain du jour où elle écrivait ces lignes (le -5 décembre 1673), l'assemblée des communautés de Provence, siégeant à -Lambesc, s'ouvrait «par authorité et permission de monseigneur le comte -de Grignan, lieutenant général, commandant pour le roy au païs, et par -mandement de messieurs les procureurs dudit pays, et par M. de Gerard, -comte palatin, conseiller du roy en ses conseils, commissaire député, -par mondit seigneur le comte de Grignan, pendant la maladie ou absence -du seigneur de Rouillé, comte de Melay[116].» - - [115] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (4 décembre 1673), t. III, p. 247, édit. - G.; t. III, p. 164, édit. M. - - [116] _Abrégé des délibérations prises en l'assemblée générale - des communautés du pays de Provence_; Aix, Charles David, - imprimeur du roi, du clergé et de la ville, 1674, in-4º, p. 3. - -Mais de Rouillé, qui n'était ni malade ni absent, ouvrit le lendemain -les délibérations par un assez long discours. Il demanda au nom du roi à -l'assemblée de voter le don gratuit de 500,000 francs, la même somme qui -avait été accordée l'année précédente. De Rouillé prétendait seulement -exciter des sujets fidèles à remplir leur devoir envers leur souverain. -«Si vous faites comparaison, disait-il[117], de ce temps-ci avec celui -des troubles et des désordres passés de cette province, vous -reconnaîtrez encore mieux que votre bonheur est un pur effet de sa -bonté et de sa clémence, que votre obéissance et vos soumissions vous -ont acquis et vous peuvent conserver.» - - [117] _Abrégé des délibérations_, etc.; Aix, 1674, in-4º, p. 4. - -Cependant de Rouillé, quittant le ton d'un servile courtisan, fait -valoir, pour déterminer le vote de l'assemblée, des considérations plus -justes et des motifs plus réels. La déclaration de guerre de l'Espagne a -forcé le roi d'augmenter le nombre de ses armées de terre et de mer, et -il est nécessaire pour le bien du royaume «qu'il fasse trembler toute la -maison d'Autriche, et qu'il abaisse à ses pieds l'orgueil de cette -république, autant ingrate qu'elle est insolente et ambitieuse, qui doit -à la couronne de France toute son élévation et sa grandeur.» - -«Vous n'ignorez pas, ajouta-t-il[118], messieurs, que Sa Majesté emploie -tous les ans dans cette province des sommes de deniers beaucoup plus -grandes qu'elle n'en retire; et que les dépenses qu'elle fait à Toulon -et à Marseille pour la construction, l'armement et l'entretien des -vaisseaux et des galères, ou pour réparer ou fortifier ces places et les -autres ports et lieux maritimes de ce pays, y apportent l'abondance par -l'augmentation du commerce, par le débit et la consommation de vos -denrées et par l'emploi de toutes sortes d'artisans et d'ouvriers, qui y -trouvent leur subsistance et le soutien de leurs familles.» - - [118] _Abrégé des délibérations_, etc.; Aix, 1674, in-4º, p. 5 et - 6. - -L'évêque de Marseille répondit à l'intendant avec plus de dignité et de -convenance. «Comme vous connaissez, monsieur, lui dit-il, notre zèle, -vous connaissez aussi notre faiblesse; et il faut, s'il vous plaît, que, -comme vous êtes l'homme du roi par votre caractère, vous soyez l'homme -du peuple par votre générosité. Le roi aura sujet dans cette occasion -d'être satisfait de la province, parce qu'elle ira pour son service -aussi loin que ses forces le lui permettront; et il le sera en effet si -vous employez, pour lui représenter les misères et les besoins du -peuple, cette vivacité et cette lumière d'esprit que vous venez de -montrer pour représenter à l'assemblée les besoins et les intentions de -Sa Majesté.» - -L'assesseur Decorio réitéra les condoléances sur la misère générale: -«Les riches même n'ont point d'argent pour secourir les pauvres et les -faire travailler. Les sources du commerce se trouvent taries par les -nouveaux édits créant de nouveaux impôts, soit pour les contrôles des -exploits, pour l'enregistrement des oppositions, pour conserver les -hypothèques, les greffes des arbitrages, et le papier timbré.» Cependant -il conclut à l'adoption de la proposition sur le don gratuit. Les -500,000 francs furent accordés, et l'assemblée décida en outre qu'il -serait, comme précédemment, envoyé un courrier à la cour[119], dont la -dépense fut réglée, selon le taux habituel, à la somme de mille livres. - - [119] _Abrégé des délibérations_, p. 11, 12 et 18. - -Après ce vote, qui, quoique le plus important, préoccupait peu, vu qu'il -était considéré comme un vote obligatoire et de pure forme, vint -l'affaire qui tenait tous les esprits suspendus, parce que tous les -membres de l'assemblée avaient pris parti soit pour l'évêque de -Marseille, soit pour le comte de Grignan, dont les intérêts étaient en -présence. Il était impossible que le vote qui allait intervenir pût -donner satisfaction à l'un des deux rivaux sans offenser l'autre. - -L'assesseur déclara à l'assemblée que M. le marquis de Maillanne de la -Rousselle, procureur du pays-joint pour la noblesse, étant décédé, il -fallait pourvoir à son remplacement[120]; et l'intendant dit que M. de -Pomponne lui avait écrit que le roi trouvait bon que l'assemblée fît -cette nomination avec une pleine et entière liberté. - - [120] _Abrégé des délibérations_, etc., p. 30. - -Nonobstant cette déclaration, le plus grand nombre des membres de -l'assemblée ne doutaient pas que le roi n'eût fait un choix, et ils -désiraient le connaître pour s'y conformer. Le succès du siége d'Orange -avait déterminé le roi à donner toute satisfaction au comte de Grignan; -et ce fut l'évêque de Marseille, dont l'influence sur l'assemblée était -connue, qu'il chargea d'empêcher toute division et de réunir tous les -votes sur le marquis de Buous. On ignorait cela, et l'attention fut -grande lorsque l'évêque de Marseille, procureur-joint du clergé, prit la -parole. - -Il exposa que, se trouvant à la cour pour d'autres affaires lorsque -cette place de procureur-joint pour la noblesse était venue à vaquer, il -avait représenté que l'assemblée des communautés était de droit en -possession de faire cette élection, au défaut des états; et que, pour ne -pas perdre une occasion de servir la province, il avait prié instamment -Sa Majesté de la maintenir dans ce droit et dans cet usage: ce qu'il a -plu à Sa Majesté de lui accorder. Mais le roi avait appris depuis qu'il -se présentait plusieurs concurrents et qu'il y avait contestation à cet -égard. L'évêque déclara qu'il avait reçu à ce sujet une lettre de -monseigneur Colbert, datée de Saint-Germain le 1er janvier, et il -demanda qu'il en fût donné lecture. Cette lettre contenait ce qui suit: - - «Monsieur, - -«Le roi vous écrit, et à M. le comte de Grignan, sur le sujet de la -mésintelligence qui est à présent entre vos maisons; et comme -l'intention de Sa Majesté est que M. de Rouillé vous accommode ensemble, -je crois vous devoir dire que vous ne pouvez rien faire qui soit plus -conforme à son inclination pour son service que d'y apporter toutes les -facilités qui dépendent de vous, étant bien difficile qu'il puisse avoir -le succès qu'il est nécessaire pour sa satisfaction quand deux maisons -aussi considérables que la vôtre et celle dudit sieur comte de Grignan -seront dans une si grande division que celle où elles sont de présent; -et je puis vous assurer que ceux qui apporteront plus de facilité à cet -accommodement s'attireront plus de considération et de mérite dans -l'esprit de Sa Majesté[121].» - - [121] _Abrégé des délibérations_, etc., p. 21. - -L'évêque de Marseille, après la lecture de cette lettre, déclara que M. -de la Barben, qu'il avait proposé pour occuper cette charge de -procureur-joint, avait le plus de droits pour l'obtenir; mais de la -Barben avait un emploi qui l'appelait près de S. M., et il suppliait -l'assemblée de ne pas penser à lui. «Et comme, par la lettre de -monseigneur Colbert, dont on vient de donner lecture, il lui est donné -avis, à lui évêque de Marseille, que le roi désire qu'il vive en bonne -intelligence avec M. le comte de Grignan, et que ceux qui feront le plus -d'avances en cette affaire seront ceux qui s'attireront plus de mérite -dans l'esprit de S. M., n'ayant point de plus forte passion que celle de -lui obéir et de donner à la province une marque de sa soumission aux -ordres du roi, quoiqu'il y ait dans les pays beaucoup de sujets capables -de remplir cet emploi, néanmoins il nomme M. le marquis de Buous[122] en -ladite charge de procureur du pays-joint pour la noblesse, et prie tous -ses amis (c'est-à -dire qu'il prie tous les assistants sans en excepter -aucun, car il les croit tous ses amis) de donner leur suffrage à M. le -marquis de Buous, d'autant plus que c'est une personne de beaucoup de -qualité et de mérite. - - [122] _Abrégé des délibérations_; Aix, etc., 1674, in-4º, p. 22. - -«Et tout de suite, continuant d'appeler les voix, l'assemblée a -unanimement élu et nommé, _sous le bon plaisir des prochains états et -jusqu'à la tenue d'iceux_, le sieur marquis de Buous (Pontevès) en -ladite charge de procureur du pays-joint pour la noblesse, au lieu et -place dudit sieur le marquis de Maillanne et de la Rousselle.» - -Ainsi se termina cette grande affaire, grande seulement pour M. de -Grignan et pour madame de Sévigné. L'on voit que l'évêque de Marseille, -en cédant à M. de Grignan le champ de bataille, eut encore l'habileté de -paraître en triomphateur; car tout se fit par lui, tout parut combiné -pour lui procurer l'occasion de donner une nouvelle preuve de son -dévouement au roi et de son influence singulière sur le pays de -Provence. - -Dans le cours des autres délibérations qui suivirent, l'évêque de -Marseille eut bien soin de montrer qu'il avait voulu par ce vote aider -aux désirs du roi, mais non complaire au gouverneur. Il s'empressa de -combattre la proposition qui fut faite d'accorder au comte de Grignan -les cinq mille francs de gratification pour l'entretènement de ses -gardes qui lui avait été concédée dans les années précédentes. L'évêque -de Marseille, en son nom et en celui de l'évêque de Toulon, dit que -c'était par la pensée qu'ils avaient eue jusqu'ici que cette proposition -n'aurait pas de suite pour l'avenir que, dans les dernières assemblées, -ils ne s'étaient point opposés tous deux à ce qui avait été arrêté et -délibéré sur ce sujet; mais comme ils s'apercevaient que cette -gratification devenait insensiblement une charge et un tribut ordinaire -de la province, il ne leur était pas permis de balancer entre des -considérations particulières et l'intérêt public; et non-seulement ils -s'opposaient à l'adoption de la proposition, mais ils espéraient que le -seigneur intendant userait de son autorité pour qu'elle ne fût pas même -mise en délibération[123]. - - [123] _Abrégé des délibérations_, etc., p. 31-32. - -L'évêque de Marseille motiva cette opinion sur des raisons déjà -alléguées dans les années précédentes. Il savait bien qu'elle ne -pourrait prévaloir, et il n'était pas même dans ses intentions de faire -changer l'avis de l'assemblée sur ce point. On ne l'ignorait pas; mais -néanmoins, après que les cinq mille francs eurent été accordés par une -délibération spéciale, l'évêque de Marseille et celui de Toulon -protestèrent, et déclarèrent qu'ils étaient dans l'intention de se -pourvoir vers S. M., «requérant messieurs les procureurs du pays de ne -faire aucun mandement avant que ladite opposition soit décidée.» - -Cette opposition elle-même était de pure forme, car l'évêque de -Marseille ne doutait pas que cette délibération de l'assemblée serait -approuvée par le roi comme elle l'avait été dans les années précédentes, -et que l'assemblée allait en anéantir l'effet à l'instant même. On -arrêta donc que, nonobstant ladite opposition, lesdits procureurs -généraux du pays expédieraient leurs mandements[124]. L'intention des -évêques était de conserver le droit et de maintenir le principe. - - [124] _Abrégé des délibérations prises en l'assemblée générale - des communautés de Provence_; Aix, 1674, in-4º, p. 35 et 36. - -Cependant l'évêque de Marseille ne voulut pas que son opposition fût une -vaine menace, ni rester entièrement étranger à la concession faite au -comte de Grignan; il écrivit en cour, et dans la dernière séance de -l'assemblée (le 12 janvier 1674) il dit «qu'il venait de recevoir une -lettre du _petit cachet_ du roi, datée du 1er de ce mois, par laquelle -S. M., pour cette fois seulement et sans conséquence pour l'avenir, -désire que l'assemblée accorde à monseigneur le comte de Grignan la -somme de cinq mille livres pour la compagnie des gardes, en -considération des dépenses qu'il vient de faire à Orange; et S. M. -invite l'évêque de Marseille à concourir à cette décision avec ses -amis.»--«Et par ainsi l'évêque de Marseille et le seigneur évêque de -Toulon ont dit que, pour obéir à la volonté du roi, ils se départent de -l'opposition qu'ils ont formée sur la délibération prise pour lesdits -cinq mille livres aux termes de ladite lettre de Sa Majesté, pour cette -fois seulement et sans conséquence pour l'avenir[125].» - - [125] _Abrégé des délibérations_, etc.; Aix, 1674, in-4º, p. 63 - et 64. - -Telle fut la fin de cette lutte, et le dernier acte d'autorité de -Forbin-Janson en Provence. Il ne tarda pas à être appelé à de plus -hautes destinées[126]. Trois mois après la fin des délibérations de -cette assemblée, Louis XIV écrivait à Sobieski, grand maréchal de -Pologne, qu'il envoyait pour ambassadeur à la diète polonaise l'évêque -de Marseille, dont la capacité lui était connue et dans lequel il -désirait qu'il eût autant de confiance qu'en lui-même[127]. - - [126] Conférez la 4e partie de ces _Mémoires_, p. 237, 239, 259. - - [127] LOUIS XIV, _Å’uvres_, t. V, p. 122 (Lettre de Louis XIV à - Sobieski, en date du 31 mars 1674).--MONTPENSIER, _Mémoires_, t. - XLIII, p. 372. - -Forbin-Janson fut encore pendant cinq ou six ans évêque de Marseille; -mais, engagé dans des négociations diplomatiques, il n'eut pas plus de -part à l'administration de son diocèse qu'à celle de la Provence. Aucun -des évêques qui furent successivement nommés procureurs-joints par -l'assemblée[128] des communautés de la Provence n'eut ses talents, -l'énergie de son caractère, son crédit à la cour et sa popularité. Le -comte de Grignan fut donc pour toujours débarrassé d'un rival -dangereux[129]. Janson plaisait beaucoup à madame de Sévigné; elle -s'était flattée, par l'amitié qu'il lui témoignait, de le réconcilier -avec sa fille. Elle écrivait à celle-ci que, si elle venait à Paris, on -la verrait avec l'évêque dans le même carrosse[130], sollicitant -ensemble pour le comte de Grignan. Mais cet espoir ne se réalisa -jamais, et madame de Grignan ne put pardonner à Janson sa longue -opposition, quoique depuis il eût cessé de se montrer hostile envers -elle ou aucun des siens[131]. - - [128] _Abrégé des délibérations de l'assemblée générale des - communautés de Provence, tenue à Lambesc les mois d'octobre et de - novembre 1674_; Aix, 1675, in-4º, p. 12.--_Idem_, pour octobre et - novembre 1675; Aix, 1675, in-4º, p. 16. - - [129] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 décembre 1674), t. III, p 274, édit. - G.; t. III, p. 182, édit. M. - - [130] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 novembre 1673), t. III, p. 232, - édit. G.; t. III, p. 147, édit. M. - - [131] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (22 janvier 1674), t. III, p. 323, édit. - G.; t. III, p. 224, édit. M.--(18 juin 1676), t. II, p. 373. - -Madame de Sévigné avait eu lieu de craindre qu'il ne parvînt à faire -échouer toutes ses démarches en faveur de la nomination du marquis de -Buous, et elle avait cherché à persuader à sa fille que la réussite -était de peu d'importance pour le lieutenant général gouverneur de -Provence; mais quand elle se vit assurée du succès, elle changea de ton. -En répondant à madame de Grignan, elle dit[132]: «Présentement que par -votre lettre, qui me donne la vie, nous voyons votre triomphe quasi -assuré, je vous avoue franchement que par tout pays c'est la plus jolie -chose du monde que d'avoir emporté cette affaire malgré toutes les -précautions, les prévenances, les prières, les menaces, les -sollicitations, les vanteries de vos ennemis: en vérité cela est -délicieux, et fait voir, autant que le siége d'Orange, la considération -de M. de Grignan dans toute la Provence.» - - [132] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (15 décembre 1673), t. III, p. 261, - édit. G.; t. III, p. 170, édit. M. - -On apprend par les lettres de l'archevêque d'Arles à madame de Sévigné -que madame de Grignan avait tous les honneurs de la réussite, parce que, -contre les conseils de sa mère, contre ceux de l'archevêque, elle avait -toujours insisté pour qu'on ne fît aucune concession à l'évêque de -Marseille. «L'archevêque, dit madame de Sévigné, est contraint d'avouer -que, par l'événement, votre vigueur a mieux valu que sa prudence, et -qu'enfin, à votre exemple, il s'est tout à fait jeté dans la bravoure. -Cela m'a réjouie[133].» - - [133] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (22 décembre 1673), t. III, p. 271, - édit. G.; t. III, p. 179, édit. M. - -Tout cela s'écrivait avant la nomination du marquis de Buous et -lorsqu'on la considérait comme très-probable; mais lorsque madame de -Sévigné apprend que cette nomination est faite et a été l'objet d'un -vote unanime, sa joie éclate dans toute sa force; et nous sommes -instruits depuis combien de temps elle était, ainsi que les Grignan, -préoccupée de cette affaire. «Ah! quel succès! quel succès! -L'eussions-nous cru à Grignan? Hélas! nous faisions nos délices d'une -suspension. Le moyen de croire qu'on renverse en un mois des mesures -prises depuis un an? Et quelles mesures, puisqu'on offrait de l'argent!» -Et très-judicieusement elle ajoute cette réflexion, faite par elle et -par ses nombreux amis, qui, dès huit heures du matin, étaient venus la -complimenter sur cette nouvelle: «Nous trouvons l'évêque toujours habile -et toujours prenant les bons partis; il voit que vous êtes les plus -forts et que vous nommez M. de Buous, et il nomme M. de Buous. Nous -voulons tous que présentement vous changiez de style et que vous soyez -aussi modestes dans la victoire que fiers dans le combat[134].» Ce -conseil dut être suivi forcément, car des ordres du roi parvinrent à M. -de Grignan de s'abstenir de tout sentiment hostile envers l'évêque. -«Voilà donc votre paix toute faite, dit madame de Sévigné. Je vous -conseille de vous comporter selon le temps; et puisque le roi veut que -vous soyez bien avec l'évêque, il faut lui obéir[135].» - - [134] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 décembre 1673), t. III, p. 273 et - 274, édit. G.; t. III, p. 181, édit. M. - - [135] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (12 janvier 1674), t. III, p. 302, édit. - G.; t. III, p. 205, édit. M.--De Buous, qui fut l'objet de cette - lutte, était le frère ou le proche parent du capitaine de - vaisseau, sur lequel on peut consulter, ainsi que sur le marquis - de Martel, la note du savant archiviste de la marine, M. Jal, - dans les _Mémoires de Villette_, 1841, in-8º, p. 14. - -Les états de Bretagne se tinrent cette année à Vitré et en même temps -que l'assemblée de Provence. Madame de Sévigné n'y alla point; mais elle -fut parfaitement instruite de ce qui s'y passa. Ils s'ouvrirent le 24 -novembre 1673, sous la présidence de la Trémouille, prince de Tarente, -baron de Vitré, et ils ne furent terminés que le 10 janvier 1674. Ils ne -présentèrent pas un spectacle aussi animé ni aussi brillant que ceux où, -deux ans avant, madame de Sévigné s'était trouvée; mais ils ont un -intérêt historique plus puissant. On y vit les derniers efforts des -Bretons pour conserver contre les envahisseurs du despotisme les restes -de leurs libertés, en vain garanties par les traités du double mariage -d'Anne de Bretagne. Les demandes de subsides ayant donné lieu à des -objections de la part de deux députés, Saint-Aubin Treslon et Des Clos -de Sauvage (les noms de ces hommes courageux méritent d'être rappelés), -le duc de Chaulnes, gouverneur, les fit arrêter. Six députés de chaque -ordre furent envoyés au gouverneur pour réclamer contre cette mesure. Le -duc de Chaulnes répondit qu'il n'avait fait qu'exécuter les ordres du -roi. Mais la princesse de Tarente intervint auprès de M. de Chaulnes, et -les deux députés furent relâchés. Douze députés furent délégués par les -états pour aller rendre grâces à la princesse[136]. C'est cette affaire -qui fait dire à madame de Sévigné: «il y a eu bien du bruit à nos états -de Bretagne; vous êtes plus sages que nous[137].» Ce qui se passa à ces -états de plus important fut la révocation de plusieurs édits -oppresseurs, depuis longtemps demandée, et en même temps le vote obligé -d'une somme égale au don gratuit, pour suppléer au déficit que -l'abolition des impôts perçus en vertu des édits occasionnait dans le -trésor de l'État. Ainsi plaisir et chagrin en même temps; c'était une -grâce vendue, et non accordée. La chose est très-exactement racontée -dans une lettre de madame de Sévigné à sa fille. - - [136] _Recueil de la tenue des états de Bretagne dans diverses - villes de cette province, de 1619 à 1703_, ms. de la Bibl. - nation. (Bl.-Mant.), no 75, p. 357 et 363. - - [137] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (18 décembre 1673), t. III, p. 265, - édit. G.; t. III, p. 173, édit. M. - -«A propos, on a révoqué tous les édits qui nous étranglaient dans notre -province. Le jour que M. de Chaulnes l'annonça, ce fut un cri de _vive -le roi!_ qui fit pleurer tous les états; chacun s'embrassait, on était -hors de soi; on ordonna un _Te Deum_, des feux de joie et des -remercîments publics à M. de Chaulnes. Mais savez-vous ce que nous -donnons au roi? 2,600,000 livres, et autant de don gratuit. C'est -justement 5,200,000 livres. Que dites-vous de cette petite somme? Vous -pouvez juger par là la grâce qu'on nous a faite de nous ôter les -édits[138].» Madame de Sévigné ne fait pas mention des gratifications, -parce qu'elles étaient les mêmes tous les ans: 100,000 fr. au duc de -Chaulnes, 20,000 fr. pour ses gardes, 20,000 fr. au marquis de Lavardin, -et ainsi de suite aux ministres de Pomponne, à Louvois, à Colbert, à -Seignelay, son fils, et à leurs commis. Le marquis de Lavardin, comme -lieutenant général, eut 50,000 livres; mais il refusa de toucher la -somme de 10,000 fr. qui lui était accordée pour l'ouverture des états, -donnant en cela l'exemple d'un noble désintéressement qui ne fut pas -imité par le prince de Tarente, lequel reçut 32,000 fr. pour sa -présidence, et 15,000 fr. pour sa femme. Cette province était accablée; -un jeune membre de l'assemblée des états, qui sans doute n'était que -l'organe de beaucoup d'autres, le marquis de Coëtquen, en fit aigrement -la remarque à d'Haroüis, le trésorier de la province. Pour ce fait, -Coëtquen fut rappelé à Paris par sa grand'mère la duchesse de Rohan, et -le duc de Chaulnes lui défendit de paraître aux états. Madame de Sévigné -applaudit à cette mesure despotique, parce que d'Haroüis était son ami -et son allié[139]. Cependant il est facile de s'apercevoir, par -plusieurs passages de ses lettres pleines d'une ironie amère, qu'on a -prise pour de l'indifférence et de l'insensibilité, qu'elle ressentait -vivement la dureté du gouverneur son ami, envers la Bretagne. Le duc de -Chaulnes pouvait tout se permettre; il s'était concilié la faveur du -monarque par sa capacité, sa fermeté, sa vigilance. Peu après la tenue -des états, il repoussa, avec les seules forces de la province, les -ennemis qui avaient voulu faire une descente sur les côtes, et les -força à s'éloigner de Belle-Isle, qu'ils voulaient assiéger[140]. - - [138] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er janvier 1674), t. III, p. 287 et - 295, éd. G.; t. III, p. 193 et 200, édit. M.--_Recueil de la - tenue des états de Bretagne_, ms. de la Bibl. nation. - (Bl.-Mant.), no 75, p. 365. - - [139] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 décembre 1673), t. III, p. 255, 256, - édit. G.; t. III, p. 165, 356, édit. M.--Voyez la 3e partie de - ces _Mémoires_, p. 29; 4e partie, p. 29, 33. - - [140] _Recueil des lettres pour servir d'éclaircissement à - l'histoire militaire du règne de Louis XIV_; Paris, 1760, in-12, - t. II, p. 329, 335. Lettre du duc de Chaulnes à Louvois, datée - d'Auray le 30 mai 1674. - - - - -CHAPITRE IV. - -1673-1674. - - Madame de Sévigné retrouve son cousin Bussy à Paris.--Lettre de - Bussy à madame de Sévigné.--Leur amitié s'était refroidie.--Bussy - veut se réconcilier avec madame de la Baume.--Il avait un procès au - conseil, qu'il gagna.--Il va voir madame de la Morésan.--Exemple de - Martel, mis à la Bastille pour défaut de soumission.--Détails sur - l'origine de la liaison de madame de Sévigné avec la marquise de - Martel.--Effrayé par l'exemple de Martel, Bussy demande une - nouvelle prolongation de séjour.--Il écrit au duc de Montausier, à - madame de Thianges, pour qu'elle le réconcilie avec la - Rochefoucauld.--Elle échoue dans cette négociation.--La duchesse de - Longueville intercède pour Bussy auprès de Condé.--La colère de - Condé contre Bussy subsiste.--Bussy écrit à madame de Sévigné une - lettre pour être montrée à madame Scarron.--Madame de Sévigné va à - Saint-Germain en Laye, et couche chez M. de la - Rochefoucauld.--Billet de madame de Sévigné à Bussy, qui lui - transmet la réponse faite par madame Scarron.--Bussy fait demander - au roi une nouvelle prolongation de séjour.--Le refus en était - connu de madame de Sévigné avant d'avoir été notifié à - Bussy.--Bussy fait ses adieux à tout le monde, et reste à Paris - caché.--Il va voir secrètement madame de Sévigné et madame de - Grignan.--Il est visité par le duc de Saint-Aignan.--Deux - entretiens du roi et du duc de Saint-Aignan.--Le roi permet à Bussy - de rester encore trois semaines.--Il part, et retourne en - Bourgogne.--Le roi en Franche-Comté fait venir la reine à - Dijon.--Bussy écrit à MADEMOISELLE pour offrir son château à la - reine et à elle.--A chaque victoire, Bussy adresse une lettre au - roi.--La guerre de Franche-Comté s'achève, et Bussy n'obtient rien. - - -Lorsque, à la fin du mois d'août 1673, madame de Sévigné, alors au -château de Grignan, écrivait à Bussy: «Je me console de ne point vous -voir à Bourbilly, puisque je vous verrai à Paris[141],» elle croyait -déjà son cousin dans la capitale. Il n'y arriva que le 16 septembre, et -ce ne fut que lorsqu'il se trouvait menacé de ne pouvoir plus y rester -qu'il répondit à cette lettre. - - [141] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (23 août 1673), t. III, p. 171 et 172, - édit. G.; t. III, p. 97, édit. M.--_Suite des Mémoires du comte_ - DE BUSSY-RABUTIN, p. 41, ms. de l'Institut. (Dans ce ms., la - lettre est datée du 27 août.) - -Voici cette réponse, un peu énigmatique: - - «Paris, ce 10 octobre 1673. - -«Je viens de demander au roi plus de temps qu'il ne m'avait accordé pour -faire ici mes affaires. Je crois qu'il m'en accordera. Je suis d'accord -avec vous, madame, que la fortune est bien folle; et j'ai pris mon parti -sur ce que sa persécution durera toute ma vie. Les grands chagrins même -ne sont pas sus; et, comme je vous ai déjà mandé, ma raison m'a rendu -fort tranquille. Faites comme moi, madame. Il vous est bien plus aisé, -car le secret de vos peines est fort au-dessous du mien[142].» - - [142] _Suite des Mémoires du comte_ DE BUSSY-RABUTIN, ms. de - l'Institut, p. 42 verso. - -On s'aperçoit facilement, d'après le ton et le ralentissement de leur -correspondance, que l'amitié qui existait autrefois entre Bussy et sa -cousine n'était plus la même. La susceptibilité orgueilleuse, le -caractère vindicatif et l'immoralité de Bussy avaient considérablement -refroidi cette chaleur de cÅ“ur que madame de Sévigné avait éprouvée -pour son cousin. Les années seules l'auraient guérie d'une inclination -qui, dans son jeune âge, n'avait pas été sans péril. Intimement liée -avec tous ceux auxquels Bussy avait déplu et qui, ainsi qu'elle, -brillaient à la cour et dans les hautes sphères de la société, madame de -Sévigné devait souvent entendre des railleries sur ce courtisan émérite -et disgracié, vivant solitairement en province, et qui dans ses -manières, ses discours, ses écrits voulait toujours paraître le type -parfait du gentilhomme, du guerrier, du bel esprit et de l'honnête -homme, c'est-à -dire de l'homme à bonnes fortunes. Madame de Sévigné -avait trop d'usage et de discernement pour ne pas s'apercevoir des -ridicules de Bussy; et dans plusieurs passages des lettres à sa fille -elle y fait allusion, mais avec finesse et avec ménagement. Elle n'avait -plus autant d'admiration pour le talent épistolaire si vanté de Bussy; -il en montrait moins qu'autrefois dans les lettres qu'elle recevait de -lui, et par cette raison peut-être, sans le vouloir, elle en mettait -moins aussi dans les réponses qu'elle lui adressait. Elle lui avait dit -jadis: «Vous êtes le fagot de mon esprit.» Le fagot manquait, et le feu -qu'il devait allumer ne pouvait se produire. Cependant l'étroite parenté -qui les unissait, les souvenirs de jeunesse qui leur étaient communs, -l'habitude d'une longue liaison, surtout l'intérêt du nom que tous deux -portaient, dont tous deux étaient fiers et dont ni l'un ni l'autre -certainement ne ternissait l'éclat, formaient entre eux un attachement -indissoluble et entretenaient une intimité d'autant plus égale qu'ils ne -s'aimaient plus assez pour se quereller. - -La seule lettre que madame de Sévigné reçut de Bussy pendant son voyage -fut celle que nous venons de transcrire; mais elle eut de ses nouvelles -par d'autres personnes, car de Bourbilly elle écrit à sa fille: «Bussy -est toujours à Paris, faisant tous les jours des réconciliations; il a -commencé par madame de la Baume. Ce brouillon de temps, qui change tout, -changera peut-être sa fortune[143].» - - [143] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (21 octobre 1673), t. III, p. 195; t. - III, p. 117. - -Madame de Sévigné était mal informée; cette réconciliation qu'elle -redoutait n'eut pas lieu. On en avait parlé dans le monde. Bussy voulait -se faire la réputation d'un homme à qui on devait pardonner toutes ses -fautes, parce que lui, disait-il, n'éprouvait aucun ressentiment contre -ceux qui avaient eu des torts envers lui; et il entrait dans ses -desseins de ne point accréditer ni démentir le bruit de sa -réconciliation avec madame de la Baume. Dès son arrivée à Paris, il -s'empressa d'aller rendre visite à madame de Thianges, «sa parente et sa -bonne amie.»--«Elle me demanda, dit-il, s'il était vrai que je fusse -raccommodé avec madame de la Baume. Je lui dis qu'elle m'avait fait -faire des honnêtetés, auxquelles j'avais répondu de même, et que j'étais -résolu non-seulement de recevoir les amitiés que me pourraient faire -ceux qui m'avaient fait du mal, mais encore de leur faire des -avances[144].» - - [144] _Suite des Mémoires du comte_ DE BUSSY-RABUTIN, ms. de - l'Inst., p. 44 verso. - -Le principal motif du séjour de Bussy à Paris était une contestation -qu'il avait au conseil pour une somme de 60,000 fr. qu'on lui disputait. -Il gagna son procès[145]. - - [145] Lettre de Bussy-Rabutin à Louis XIV (26 avril 1674) et à - Châteauneuf, secrétaire d'État, dans la _Suite des Mémoires du - comte_ DE BUSSY-RABUTIN, ms. de l'Inst., p. 65 et 66. - -Il est bien vrai qu'il fit des tentatives de réconciliation; mais il ne -réussit dans aucune, comme le sut bientôt madame de Sévigné, dont les -secours ne lui faillirent point en cette circonstance. Quand Bussy -écrivait à sa cousine, l'époque de la permission qu'il avait obtenue -pour rester dans la capitale était expirée depuis deux jours, et il -avait demandé à M. de Pomponne une prolongation de séjour, qui lui fut -accordée[146]. - - [146] Lettre de Bussy-Rabutin à M. de Pomponne, datée de Paris le - 8 octobre 1673, et de M. de Pomponne à Bussy, datée de Nancy le - 15 oct., dans la _Suite des Mém. de_ BUSSY-RABUTIN, ms. de - l'Inst., in-4º, p. 42 et 44.--ROGER DE RABUTIN, comte DE BUSSY, - édit. 1737, t. V, p. 85. Mais la lettre est à tort datée du 15 - septembre; c'est le 15 octobre qu'il faut lire. (Voy. la 4e - partie de ces _Mémoires_, p. 156 et 344.) - -Depuis un mois qu'il était à Paris, il avait employé son temps aux -projets de son ambition plus encore qu'au profit de ses affaires. Il -n'ignorait pas que le roi, bien disposé pour lui par le duc de -Saint-Aignan, consentirait volontiers à faire cesser son exil s'il -pouvait se réconcilier avec Condé et empêcher Louvois de lui être -contraire. Ce fut de ce côté qu'il dirigea d'abord ses efforts. Lorsque -la marquise de la Baume eut la perfidie de laisser publier le manuscrit -des _Amours des Gaules_ qu'il lui avait confié, il rompit entièrement -avec elle, et il ne parlait de ses attraits et de sa personne qu'avec ce -dédain et ce dénigrement qu'aucune femme ne peut pardonner[147]. Depuis -il ne chercha point à renouer une liaison avec une femme qu'il n'aimait -pas et qu'il ne pouvait estimer; mais, comme toujours, il s'efforça de -profiter de ses amitiés de femmes pour se réconcilier avec ceux qui lui -étaient contraires. Il raconte dans ses Mémoires qu'il était depuis -trois ans assez bien vu de madame de la Morésan, qui, par ses attraits, -son esprit caustique et son caractère décidé et tranchant, par son -alliance avec son beau-frère Dufresnoy, le principal commis de Louvois, -était recherchée et redoutée[148]. Le jour où Bussy l'alla voir[149], il -y trouva Dufresnoy. «La conversation, dit-il, avec madame de la Morésan -et moi se passa à nous renouveler des assurances d'amitié. Comme j'y fus -jusqu'à l'entrée de la nuit, il y vint beaucoup de gens, et entre autres -mesdames de la Baume et Louvois; j'en sortis bientôt après, ne pouvant -soutenir la présence de gens que j'aimais si peu[150].» Lorsque Bussy -écrivait à Paris ce fragment de ses _Mémoires_, madame de Sévigné s'y -trouvait aussi; elle dut donc être dissuadée par lui de l'opinion -qu'elle avait eue de sa réconciliation avec madame de la Baume. - - [147] Voyez la lettre du comte de Bussy insérée dans les - _Mémoires de_ COLIGNY-SALIGNY, 1841, p. 127, en date du 18 mai - 1667. - - [148] MONTPENSIER, _Mémoires_, t. XLIII, p. 379.--_Supplément aux - Mémoires de_ BUSSY, 2e partie, p. 14 et 17.--BUSSY-RABUTIN, - _Lettres_ (20 juin et 28 novembre 1671), t. V, p. 190 et 315. - - [149] BUSSY-RABUTIN, _Lettres_ (28 novembre 1673, de madame de la - Morésan au comte de Bussy), t. V, p. 319. - - [150] _Supplément aux Mémoires de M. le comte_ DE BUSSY, t. II, - p. 17.--Au lieu de madame Damorisan, il faut lire la Morésan, - comme le prouvent le _Recueil des lettres de_ BUSSY, t. V, p. 319 - et 190, et les _Mémoires de_ MONTPENSIER, t. XLIII, p. 379 (année - 1674). - -Bussy s'était empressé de demander une nouvelle permission pour -continuer son séjour à Paris. Il avait alors un exemple récent du danger -que l'on courait, sous un roi tel que Louis XIV, de ne pas se soumettre -aux ordres de ses supérieurs. Le marquis de Martel, vieil officier de -marine, avait passé par tous les grades avant de devenir lieutenant -général à la mer; il trouva dur d'être obligé d'obéir au comte -d'Estrées, vice-amiral d'une plus grande noblesse, mais moins ancien -que lui comme officier, et qui avait gagné son grade de lieutenant -général dans le service de terre. D'Estrées transmit à Martel, par -écrit, un ordre sous une forme qui ne convenait pas à ce dernier[151]; -il ne refusait pas d'obéir à l'ordre, mais il voulait que la rédaction -en fût changée. Pour ce léger tort, il fut arrêté par ordre du roi le 31 -octobre, et mis à la Bastille. Cette rigueur dut faire de la peine à -madame de Sévigné, qui était liée avec la femme du marquis de Martel -depuis que celui-ci avait donné, sur le beau et célèbre _Royal-Louis_, -vaisseau qu'il commandait[152], une fête à madame de Grignan lorsqu'elle -alla voir le fort de Toulon vers le milieu du mois de mai 1672. La femme -du lieutenant général gouverneur de Provence parut si belle alors, dansa -si bien, que tous les jeunes officiers invités à cette fête en -conservèrent un long souvenir, et que, plusieurs années après, un d'eux -citait madame de Grignan comme le modèle le plus parfait de grâce et de -légèreté dans la danse, en présence de madame de Sévigné, qu'il ne -connaissait pas et dont la satisfaction et l'émotion furent -grandes[153]. La prolongation de séjour accordée à Bussy, par -l'entremise de M. de Pomponne[154], était de deux mois; elle lui fit -concevoir l'espérance de pouvoir obtenir durant ce temps, par ses -démarches, la fin de son exil et la permission de paraître à la cour; -puis enfin d'avoir un commandement, et de prendre sa part de succès et -de gloire dans les guerres qui agrandissaient la France. C'était un -noble orgueil, un rêve chéri auquel Bussy ne put jamais renoncer et qui, -ne s'étant point réalisé, fit le malheur de sa vie. - - [151] LOUIS XIV, _Å’uvres_ (Lettre du roi au duc de Beaufort, en - date du 8 décembre 1665), t. V, p. 338 et 342. - - [152] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 mai 1672), t. III, p. 31, éd. G.; t. - II, p. 442, édit. M.--_Mémoires du marquis_ DE VILLETTE, 1844, - in-8º, p. 14. Martel, capitaine en 1635, lieutenant général en - 1656-1679, n'est plus porté sur les états de la marine en 1682. - - [153] _Suite des Mémoires du comte_ DE BUSSY-RABUTIN, ms. de - l'Institut, p. 46 et 47.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13, 16 et 20 mai - 1672; 23 août 1675, 6 août 1680), t. III, p. 15, 27, 31; t. IV, - p. 48 et 49; t. VII, p. 156 et 157, édit. G.; t. II, p. 428, 439, - 442; t. III, p. 422 et 423; t. VI, p. 413, édit. M. - - [154] _Suite des Mémoires du comte_ DE BUSSY-RABUTIN, ms. de - l'Institut, in-4º, p. 42 et 44.--Lettre de Bussy à M. de - Pomponne, des 8 et 10 octobre 1673, et de M. de Pomponne à Bussy, - datée de Nancy le 15 octobre 1673. - -Il écrivit d'abord au duc de Montausier pour demander d'être présenté au -Dauphin et de le voir: «curiosité, dit-il, que j'aurais, quand je serais -du Japon.» Il reçut une réponse polie et presque affectueuse[155]. -Pendant le temps de son séjour à Paris, Bussy vit encore madame de -Thianges; elle lui apprit qu'on avait rapporté de lui de mauvais propos -qui entachaient la valeur du prince de Marsillac lors du fameux passage -du Rhin à Tholus. Il protesta à madame de Thianges que c'était sans -doute une fausseté et une perfidie de mademoiselle de Montalais, «parce -que, disait-il, il n'y a qu'elle au monde assez méchante et assez folle -pour inventer une chose dont la fausseté est aussi facile à découvrir -que celle-là .» Bussy avait été très-bien avec cette spirituelle et -intrigante sÅ“ur de madame de Marans; mais depuis peu (Montalais -n'était plus jeune) il s'était brouillé avec elle[156]. Après cet -entretien, Bussy écrivit une longue lettre à madame de Thianges pour se -disculper des torts qu'on lui imputait envers la Rochefoucauld et son -fils Marsillac. Il n'y a personne en France, selon Bussy, qui puisse -rendre de plus assurés témoignages que lui «de la valeur du père et de -celle du fils. Ils ont été blessés eu deux occasions où j'avais -l'honneur de commander; l'une à Mardick et l'autre à Valenciennes[157].» -Il paraît que le duc de la Rochefoucauld fut peu touché de lire un -certificat de service militaire, pour lui et pour son fils, tracé de la -main du comte de Bussy-Rabutin; car après que madame de Thianges lui eut -communiqué cette lettre, il ne répondit à cette avance de Bussy par -aucune parole polie[158]. - - [155] Lettre de Bussy au duc de Montpensier (Paris, le 11 octobre - 1673).--Réponse du duc de Montpensier à Bussy (Versailles, 20 - octobre 1673). Dans la _Suite des Mém. de_ BUSSY-RABUTIN, ms. de - l'Inst., in-4º, p. 43 et 44. - - [156] _Suite des Mém. de_ BUSSY-RABUTIN, ms. de l'Inst, p. - 45.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 juillet 1672 et 5 juin 1675), t. III, - p. 97 et 108, édit. G.; t. III, p. 31, 237, édit. M.--CHOISY, - _Mém._, t. III, p. 264.--MOTTEVILLE, _Mém._, t. XLIII, p. - 22.--LOUIS XIV, _Å’uvres_, t. V, p. 90, 103, 340. (Voy. 4e partie - de ces _Mémoires_, p. 212.) - - [157] _Suite des Mém._, ms., p. 45. (Lettre de Bussy à madame de - Thianges, Paris, 25 octobre 1673.) - - [158] _Suite des Mém._, etc., ms. de l'Inst., p. 50. - -Bussy, qui connaissait l'influence que la Rochefoucauld et Marsillac -avaient auprès du roi, de Condé et du duc d'Enghien, fit taire son -orgueil, et s'adressa à madame de Sévigné; il la pria de faire en sorte, -par madame de la Fayette, que le duc de la Rochefoucauld consentît à le -voir, afin qu'ils pussent être ensemble sur de meilleurs termes. - -«Madame de Sévigné, dit Bussy dans ses _Mémoires_, s'en chargea; et, -quatre ou cinq jours après, elle me dit que le duc de la Rochefoucauld -avait répondu à son amie que, puisque avant que nous fussions brouillés -nous ne nous voyions pas les uns les autres et que nous nous contentions -de vivre honnêtement ensemble quand nous nous rencontrions, une plus -grande liaison n'était pas nécessaire; que, pour lui, il serait -très-aise de me rencontrer souvent, et qu'il se _clouerait où je -serais_: ce furent ses propres termes.»--«Cette réponse, ajoute Bussy, -me fit juger que j'aurais toujours à craindre de ce côté-là , et que je -ne devais espérer de soutien que de la bonté du roi[159].» - - [159] _Suite des Mémoires_, etc., ms. de l'Inst., p. 50. - -Si Bussy faisait cette réflexion, c'est qu'en même temps qu'il avait -fait des démarches pour se réconcilier avec la Rochefoucauld il en avait -tenté auprès du prince de Condé qui avaient encore moins réussi. Comme -c'était la princesse de Longueville qu'il avait blessée par ses écrits -et ses discours, et qu'il connaissait les sentiments chrétiens qui -l'avaient déjà portée à le protéger contre la colère du prince lorsque -l'outrage était récent[160], il jugea avec raison qu'elle interviendrait -en sa faveur avec toute la chaleur qu'inspire la céleste charité aux -âmes pénétrées de repentir. Il ne se trompait pas: la duchesse de -Longueville fit de grands efforts pour calmer le ressentiment de Condé; -elle ne put y parvenir. Elle fut obligée de lui annoncer par -mademoiselle Desportes[161], dont Bussy, pour cette négociation, avait -réclamé le secours, que monsieur son frère ne voulait point pardonner, -et que même il lui avait dit «qu'il ne souffrirait pas que Bussy fût sur -le pavé de Paris.»--«Ce discours, dit Bussy, me surprit; et je répondis -à mademoiselle Desportes qu'il n'appartenait qu'au roi de parler ainsi: -elle en convint.» - - [160] VILLEFORT, _Vie de madame de Longueville_, Amsterdam, 1739, - in-12, t. II, p. 161, ou Paris, 1738, in-8º, p. 169; et 4e partie - de ces _Mémoires_, p. 351 et 352. - - [161] Bussy dit: «Mademoiselle Desportes, ma bonne amie, fille - d'une rare vertu et d'un mérite extraordinaire.» - -Bussy n'en fut que plus ardent à chercher des appuis contre une si -puissante inimitié. Il savait que madame Scarron, dont l'influence -auprès de madame de Montespan était connue, avait contre lui des -préventions qui n'étaient que trop motivées; il écrivit à sa cousine -pour la faire consentir à être son intermédiaire entre lui et cette -gouvernante des enfants naturels du roi, avec laquelle il n'avait jamais -eu de liaison ni de correspondance[162]. - - [162] Voyez ci-après, chap. VIII. - -Madame de Sévigné reçut la lettre que Bussy lui écrivit à ce sujet au -retour d'un voyage à Saint-Germain. Elle y était allée pour voir ces -mêmes personnes si contraires à Bussy et pour elle si amicales. Voici ce -qu'elle dit de ce voyage en écrivant à sa fille: «Je viens de -Saint-Germain, où j'ai été deux jours avec madame de Coulanges et M. de -la Rochefoucauld; nous logions chez lui. Nous fîmes, le soir, notre cour -à la reine, qui me dit bien des choses obligeantes pour vous... Mais -s'il fallait vous dire tous les bonjours, tous les compliments d'hommes -et de femmes, vieux et jeunes, qui me parlèrent de vous, ce serait -nommer quasi toute la cour. J'ai dîné avec madame de Louvois; il y avait -presse à qui nous en donnerait. Je voulais revenir hier; on nous arrêta -d'autorité pour souper chez M. de Marsillac, dans un appartement -enchanté, avec madame de Thianges et madame Scarron, M. le Duc et M. de -la Rochefoucauld, M. de Vivonne, et une musique céleste. Ce matin, nous -sommes revenues[163].» - - [163] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 décembre 1673), t. III, p. 257, 258, - édit. G.; t. III, p. 167, édit. M.--Sur les anciens plans gravés - de Saint-Germain en Laye comme sur ceux de Fontainebleau, on - trouve l'emplacement de tous ces hôtels des grands de la cour, et - entre autres de ceux de Condé, de la Rochefoucauld et de - Vivonne.--Conférez 1re partie, p. 365, 483; IVe, p. 273. - -Ce fut deux jours après qu'elle reçut de Bussy la lettre suivante[164]: - -LETTRE DE BUSSY A MADAME DE SÉVIGNÉ. - - «Paris, le 13 décembre 1673. - -«Vous pouvez vous souvenir, madame, de la conversation que nous eûmes -l'autre jour. Elle fut presque toute sur les gens qui pouvaient -traverser mon retour; et quoique je pense que nous les ayons tous -nommés, je ne crois pas que nous ayons parlé des voies dont ils se -servent pour me nuire. Cependant j'en ai découvert quelques-unes depuis -que je vous ai vue; et l'on m'a assuré, entre autres, que madame Scarron -en était une. Je ne l'ai pas cru au point de n'en pas douter un peu; -car, bien que je sache qu'elle est aimée des personnes qui ne m'aiment -pas, je sais qu'elle est encore plus amie de la raison, et il n'en -paraît pas à persécuter, par complaisance seulement, un homme de -qualité, qui n'est pas sans mérite, accablé de disgrâces. Je sais bien -que les gens d'honneur entrent et doivent entrer dans les ressentiments -de leurs amis; mais quand ces ressentiments sont ou trop aigres ou -poussés trop loin, il est (ce me semble) de la prudence de ceux qui -agissent de sang-froid de modérer les passions de leurs amis et de leur -faire entendre raison. La politique conseille ce que je vous dis, -madame, et l'expérience apprend à ne pas croire que les choses sont -toujours en même état. On l'a vu en moi; car enfin, quand je sortis de -la Bastille, ma liberté surprit tout le monde. Le roi a commencé de me -faire de petites grâces sur mon retour, dans un temps où personne ne les -attendait; et sa bonté et ma patience me feront tôt ou tard recevoir de -plus grandes faveurs. Il n'en faut pas douter, madame: les disgrâces ont -leurs bornes comme les prospérités. Ne trouvez-vous donc pas qu'il est -de la politique de ne pas outrer les haines et de ne pas désespérer les -gens? Mais quand on se flatterait assez pour croire que le roi ne -radoucira jamais pour moi, où est l'humanité? où est le christianisme? -Je connais assez les courtisans, madame, pour savoir que ces -sentiments-là sont très-faibles en eux; et moi-même, avant mes malheurs, -je ne les avais guère. Mais je sais la générosité de madame Scarron, son -honnêteté et sa vertu; et je suis persuadé que la corruption de la cour -ne les gâtera jamais. Si je ne croyais ceci, je ne vous le dirais pas, -car je ne suis point flatteur; et même je ne vous supplierais pas comme -je fais, madame, de lui parler sur ce sujet; c'est l'estime que j'ai -pour elle qui me fait souhaiter de lui être obligé, et croire qu'elle -n'y aura pas de répugnance. Si elle craint l'amitié des malheureux, elle -ne fera rien pour avoir la mienne; mais si l'amitié de l'homme du monde -le plus reconnaissant (et à qui il ne manquait que la mauvaise fortune -pour avoir assez de vertu) lui est considérable, elle voudra bien me -faire plaisir.» - - [164] _Suite des Mémoires de_ BUSSY-RABUTIN, ms. de l'Inst., - in-4º, p. 51. - -A cette lettre verbeuse, mais assez adroite, madame Scarron fit une -prudente et courte réponse, contenue dans le billet suivant de madame de -Sévigné à Bussy[165]. - - [165] _Suite des Mémoires de_ BUSSY-RABUTIN (ms. de l'Inst.), p. - 52 verso. Ce billet de madame de Sévigné est inédit et a échappé - à ses soigneux éditeurs. - - -BILLET DE MADAME DE SÉVIGNÉ A BUSSY. - - «A Paris, ce 15 décembre 1673. - -«Je fis voir hier soir à madame Scarron la lettre que vous m'avez -écrite. Elle m'a dit n'avoir jamais entendu nommer votre nom en mauvaise -part. Du reste, elle a très-bien reçu votre civilité. Elle ne trouvera -jamais occasion de vous servir qu'elle ne le fasse. Elle connaît votre -mérite et plaint vos malheurs.» - -Dans une longue lettre à sa fille[166], écrite le même jour -que le billet qu'on vient de lire, madame de Sévigné annonce -très-laconiquement, en ces termes, que Bussy va quitter Paris: «Bussy a -ordre de retourner en Bourgogne. Il n'a pas fait la paix avec ses -principaux ennemis.» - - [166] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (15 décembre 1673), t. III, p. 265, - édit. G.; t. III, p. 173, édit. M. - -La permission accordée à Bussy de prolonger son séjour à Paris finissait -le jour même où madame de Sévigné écrivait le billet que nous avons -transcrit[167]. Mais Bussy avait, dès le 2 décembre, écrit au roi et à -M. de Pomponne pour obtenir une nouvelle prolongation de séjour, et ces -lettres furent envoyées à Saint-Germain en Laye, où était la cour. Ce ne -fut que par une lettre de M. de Pomponne, datée de Saint-Germain le 17 -décembre, que Bussy fut informé du refus du roi[168]. Madame de Sévigné, -par son intimité avec de Pomponne, savait donc avant Bussy que la -permission ne lui serait pas accordée; et on voit, d'après la suite des -_Mémoires_ de celui-ci, qu'elle ne lui en a rien dit. On n'est jamais -pressé d'annoncer une mauvaise nouvelle à un ami. Ce refus affligea -beaucoup Bussy, et le mit dans une grande perplexité. Ses affaires -n'étaient point terminées, ses espérances de rentrer en grâce -s'évanouissaient, et il craignait de déplaire au roi et de s'attirer sa -colère s'il prolongeait son séjour à Paris. Il prit cependant ce dernier -parti, et fit ses adieux aux secrétaires d'État, à tous ses amis et à -toutes les femmes de sa connaissance; de sorte qu'on le crut en -Bourgogne, tandis qu'il était caché dans Paris. Il confia son secret au -seul duc de Saint-Aignan; et, de la retraite où il se tenait renfermé, -il faisait parvenir des lettres qu'il datait de son château de Bussy. Il -écrivit au roi, au secrétaire d'État Châteauneuf, au comte de Vivonne, à -madame de Thianges et à divers puissants personnages[169]. - - [167] _Suite des Mémoires_ (ms. de l'Inst.), p. 48, 49, 50 et 52 - verso. - - [168] _Suite des Mémoires du comte_ DE BUSSY-RABUTIN, p. 48 et - 50.--Lettres de Bussy au roi et à M. de Pomponne, Paris, ce 2 - décembre 1673, p. 54 et 55.--Lettre de Pomponne à Bussy, - Saint-Germain en Laye, le 17 décembre 1673. - - [169] _Suite des Mémoires_, p. 58 (ms. de l'Inst.).--Lettre de - Bussy au roi, datée de Bussy, le 31 décembre 1673--Bussy-Rabutin, - _lettres_, t. V, p. 322, 323, 327, à la marquise de Villeroy, le - 15 décembre, au duc de Montpensier, à madame de Thianges; 2e - édit., p. 58, 59.--Lettre de Bussy au comte de Vivonne à Bussy, - Paris, 13 janvier 1674; à madame de Pisieux, le 19 décembre; à - mademoiselle Armantières, le 28 décembre 1673. - - -Néanmoins, malgré toutes ces précautions, le secret transpira; Bussy -n'avait pu se résoudre à le cacher à sa cousine[170]. Madame de Sévigné -avait depuis un mois le bonheur de posséder sa fille avec elle -lorsqu'elle apprit que Bussy était resté à Paris, et elle s'empressa -d'aller rendre visite au captif volontaire; le billet qu'il lui adressa -le lendemain de cette visite, en lui envoyant du vieux vin de Cotignac -qui lui avait été donné autrefois par madame de Monglas, prouve -évidemment que Bussy avait reçu des reproches de la mère et de la fille. -Il s'ensuivit des explications et des épanchements réciproques, dont le -cÅ“ur de Bussy dut être satisfait; il écrit alors à sa cousine: «Je ne -vous aime pas plus que je ne vous aimais hier matin; mais la -conversation d'hier soir me fait plus sentir ma tendresse; elle était -cachée au fond de mon cÅ“ur, et le commerce l'a ranimée. Je vois bien -par là que les longues absences nuisent à la chaleur de l'amitié aussi -bien qu'à celle de l'amour[171].» - - [170] BUSSY-RABUTIN, _Mémoires_. Manuscrit cité par M. Monmerqué, - _Lettres de_ SÉVIGNÉ, t. III, p. 236, no 1, édit. M. - - [171] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (Paris, 20 mars 1674), t. III, p. 338, - édit. G.; t. III, p. 236, édit. M. - -Le duc de Saint-Aignan, ce fidèle ami de Bussy, vint souvent le visiter -secrètement. Il se chargea de remettre ses lettres au roi et de plaider -sa cause. Bussy demandait qu'il lui fût permis d'aller combattre en -Flandre comme volontaire, sous les ordres de Condé; et Saint-Aignan -suppliait le roi de lui accorder au moins cette faveur[172]. Les -entretiens qui eurent lieu à ce sujet entre Louis XIV et son complaisant -courtisan sont des scènes d'intérieur des plus curieuses, qui confirment -tout ce que nous avons dit sur les sentiments du monarque à l'égard de -Bussy. - - [172] _Suite des Mémoires de_ BUSSY-RABUTIN, p. 61 verso.--Le duc - de Saint-Aignan rapporte sa conversation avec le roi au 7 avril - 1674. - -Le roi dit: «Saint-Aignan, on accuse Bussy d'être l'auteur des chansons -qui courent contre les ministres et contre quelques personnes de ma -cour. Je ne crois pas cela, mais on le dit.» - -Saint-Aignan répond: «Bussy trouve bien étrange, sire, d'être toujours -accusé et jamais convaincu; et, pour déconcerter la malice de ses -ennemis, il demande à Votre Majesté de trouver bon qu'il se remette à la -Bastille et que les accusations soient de nouveau jugées.» - -«Bussy perd l'esprit,» dit le roi. - -«Nullement, sire; et pour être convaincu que Bussy n'est pas fou, il -prie Votre Majesté de lire la lettre qu'il a écrite au roi, et de -prendre un recueil de pièces qu'il m'a chargé de lui remettre, et qui, -j'en suis certain, divertiront le roi, s'il veut se donner la peine d'y -jeter les yeux.» - -Louis XIV répondit qu'il recevrait tout cela quand il serait habillé; et -en effet il fit appeler Saint-Aignan au sortir de son prie-Dieu, reçut -les manuscrits et les lettres, et rentra dans son cabinet[173]. - - [173] _Suite des Mémoires_ (ms. de l'Inst.), p. 62 - verso.--_Supplément aux Mémoires et Lettres de M. le comte_ DE - BUSSY-RABUTIN, 2e partie, p. 23.--Conférez LOUIS XIV, _Å’uvres_, - t. V, p. 445 (mémoires militaires). - - -Ainsi se termina ce premier entretien. Le duc de Saint-Aignan promit de -faire plus, et il tint parole. - -Le jeudi 19 avril (le jour même où Louis XIV partit de Versailles pour -aller conquérir la Franche-Comté), Bussy reçut une longue lettre du duc -de Saint-Aignan, dans laquelle celui-ci lui rendait compte de deux -autres entretiens qu'il avait eus avec le roi à son sujet. «Je -m'approchai, dit le duc, du lit du roi, mardi 17, à neuf heures du -matin, et, m'étant mis à genoux, je pris la liberté de lui dire: -Oserai-je, sire, demander à Votre Majesté si elle a lu le livre que je -lui ai donné de la part du comte de Bussy; et, au cas qu'elle ne l'ait -pas encore lu, si elle l'emportera avec elle?» - -«Le roi me répondit: - -«A propos, Saint-Aignan, j'ai un reproche à vous faire! Bussy est à -Paris, et vous ne m'en avez rien dit.» - -«Je lui répondis: - -«Mon Dieu! sire, y va-t-il du service de Votre Majesté de lui donner ces -sortes d'avis? Un pauvre homme de qualité, malheureux, est accablé -d'affaires; pour y mettre quelque ordre, il se cache le plus qu'il peut, -et cependant il se trouve des gens assez lâches pour lui rendre en cet -état de méchants offices.» - -«Mais enfin (me répliqua le roi), après que le temps que je lui avais -donné est expiré, il faut qu'il s'en aille. Cela a trop paru, et si vous -ne voulez vous charger de lui dire de ma part (à cause que vous êtes son -ami), je serai contraint de le lui faire dire par quelque autre moins -doucement.» - -Saint-Aignan osa répliquer, et le roi s'adoucit et dit: «Je n'ai pas -encore lu son recueil; il est dans ce petit cabinet, sur ma table.» - -Saint-Aignan répondit: - -«Sire, il faut l'emporter; et je voudrais que Votre Majesté y voulût -joindre le premier tome de ses _Mémoires_. Outre qu'il est bien écrit, -le roi y verrait de petites histoires galantes qui le divertiraient.» - -Le roi termina en disant: - -«Songez seulement à lui dire ce que je vous ai dit, et à mon retour -toutes choses nouvelles.» - -Saint-Aignan ne se rebuta pas; fidèle ami et habile courtisan, il -connaissait tout le pouvoir de l'importunité sur une volonté flottante. -Il retourna à Versailles le surlendemain, jour fixé pour le départ du -roi, et pénétra de très-grand matin et lorsque le roi était encore -couché. Après avoir pris congé de lui et baisé un bout de ses draps, il -lui déclara, les yeux humides, qu'il n'avait pu encore se résoudre à -parler au pauvre comte de Bussy de ce qu'il lui avait commandé de lui -dire, parce que Bussy serait parti à l'instant même, au préjudice d'une -affaire importante toute prête à être jugée; et que, d'ailleurs, lui -Saint-Aignan espérait encore de la bouche du roi un ordre moins -rigoureux. - -«Eh bien! dit le roi, qu'il demeure encore quinze jours ou trois -semaines, et qu'il s'en aille chez lui après. Entendez-vous, -Saint-Aignan? Dites-lui cela au moins, n'y manquez pas.» - -«Je le ferai, sire,» répliqua Saint-Aignan. - -En effet, quatre jours après ce dernier entretien, Bussy gagna son -procès. Il écrivit au roi, qui alors était au camp devant Besançon, pour -lui témoigner la reconnaissance de cette nouvelle permission. Il adressa -sa lettre au secrétaire d'État Châteauneuf, dont la réponse, quoique -très-polie et même affectueuse, ne lui parut pas, par la souscription, -assez respectueuse pour être adressée par un ministre à un ancien -lieutenant général mestre de camp de la cavalerie légère, tel que lui. -Le 12 mai, les trois semaines qui lui avaient été accordées par le roi -étant expirées, Bussy partit avec sa fille Françoise, et retourna en -Bourgogne[174]. - - [174] _Suite des Mémoires du comte_ DE BUSSY-RABUTIN (ms. de - l'Inst.), no 221, p. 67 verso. - -Dans les circonstances qui avaient accompagné le refus fait à -Saint-Aignan, Bussy trouvait des motifs d'espérance. La guerre faite en -Franche-Comté avait déterminé le roi à faire venir la reine à Dijon, et -l'on croyait généralement que Louis XIV en prendrait occasion de -rappeler près de lui un personnage aussi utile en Bourgogne que l'était -Bussy. C'est ce que nous apprend MADEMOISELLE dans une réponse qu'elle -fit à une lettre que Bussy lui avait écrite. Elle-même souffrait -cruellement du refus du roi de consentir à son mariage avec Lauzun, et -plaignait Bussy; elle lui écrivait en parlant du roi: «Il est comme -Dieu; il faut attendre sa volonté avec soumission et tout espérer de sa -justice et de sa bonté sans impatience, afin d'en avoir plus de mérite.» -Bussy écrivit aussi à MADEMOISELLE pour la prier d'offrir à la reine de -venir s'installer dans son château. «Le bruit est en ce pays-ci, dit-il -dans sa lettre, que la reine viendra faire ses dévotions à Sainte-Reine. -Si Sa Majesté prend cette pensée, je voudrais lui pouvoir offrir ma -maison; et j'en sortirais, pour ne pas me présenter devant elle en -l'état où je suis à la cour. Elle serait mieux logée que dans le village -de Sainte-Reine, et n'en serait qu'à une demi-lieue. En tout cas, -MADEMOISELLE, si la reine ne me faisait pas cet honneur, je l'espérerais -de V. A. R.; je l'en supplie très-humblement[175].» - - [175] _Suite des Mémoires de_ BUSSY-RABUTIN, p. 67-68. Lettre de - Bussy à MADEMOISELLE, en date de Bussy, du 28 mai 1674, p. - 74.--Lettre de MADEMOISELLE à Bussy, Dijon, le 2 juin 1674. La - lettre est signée ANNE-MARIE-LOUISE D'ORLÉANS.--Conférez sur - cette signature l'_État de la France_, 1677, p. 468 et - 469.--BUSSY, _Lettres_, t. V, p. 334. - -La reine ne vint pas à Sainte-Reine. Bussy, à chaque nouvelle victoire, -écrivait une lettre au roi; mais la conquête de la Franche-Comté -s'acheva, et Louis XIV était de retour à Versailles sans que Bussy eût -rien obtenu de lui[176]. - - [176] LOUIS XIV, _Å’uvres_, t. III, p. 512 (lettre datée de - Versailles, le 1er juillet 1674, au maréchal de Turenne).--_Suite - des Mémoires de_ BUSSY-RABUTIN, p. 75 et 75 _bis_. (Lettre de - madame Scudéry à Bussy, à Paris, 23 juin 1674.--Réponse de Bussy, - datée de Bussy, le 26 juin 1674.) - - - - -CHAPITRE V. - -1674. - - Madame de Sévigné sollicite un congé pour M. de Grignan, afin qu'il - puisse venir en cour avec sa femme.--Gloire et puissance de Louis - XIV.--Par son influence le grand Sobieski est roi de Pologne.--Le - duc d'York épouse la princesse de Modène.--Portrait de Louis - XIV.--Son ascendant sur sa cour.--Les filles d'honneur sont - remplacées près de la reine par les dames du palais.--Louis XIV - avait tous les goûts, toutes les passions.--Les femmes étaient - nécessaires à son existence.--Détails sur la reine; comment Louis - XIV se conduisait envers elle.--Madame de Montespan cherche à - inspirer au roi les affections de la paternité.--Elle donne des - bals d'enfants.--Description de ces bals par madame de - Sévigné.--Amours de Louis XIV avec la Vallière.--Lettres patentes - qui lui confèrent le titre de duchesse.--Sa fille, madame de Blois - (princesse de Conti), brille à la cour dès son plus jeune - âge.--Montespan triomphe de la Vallière, et celle-ci se décide à se - retirer de la cour.--Elle y reste encore par esprit de - religion.--Le maréchal de Bellefonds, Bossuet, Bourdaloue la - soutiennent dans le projet qu'elle a formé de se retirer aux - Carmélites.--Méprise de madame de Sévigné à son sujet.--La Vallière - entre aux Carmélites.--Sa prise d'habit.--Ses vÅ“ux.--Jugement de - madame de Sévigné sur le discours de Bossuet.--Ce que dit la - Vallière à la duchesse d'Orléans après la cérémonie.--Visite que - lui fait madame de Sévigné, cinq ans après, aux Carmélites.--Grâce - que le roi accorde à la Vallière.--Visite que lui fait madame de - Montespan, et questions indiscrètes qu'elle lui adresse.--Influence - qu'eut la retraite de la Vallière sur Louis XIV.--Pourquoi il - s'abstint de l'aller voir.--La conduite du roi en cette occasion a - été mal interprétée.--Réflexion à ce sujet, confirmée par un mot de - Louis XIV à la veuve de Scarron. - - -Pendant les quatre mois d'hiver que madame de Sévigné passa avant -l'arrivée de sa fille à Paris, elle fut sans cesse occupée à faire -valoir à la cour les services de son gendre en Provence, à demander -qu'il fût appelé à Paris et qu'il vînt avec sa femme saluer le roi et se -concerter avec ses ministres sur les affaires de son gouvernement. La -bonne gestion et l'affermissement de l'autorité du comte de Grignan -dépendaient, selon elle, de cette faveur et de l'accueil qui lui serait -fait par Sa Majesté. - -Comme ce voyage était arrêté ou prévu, madame de Sévigné, dans les -lettres qu'elle écrivait à sa fille, n'oubliait rien de ce qui pouvait -la tenir au courant des intrigues de la cour. Objet d'imitation et -d'envie, la splendeur de cette cour rayonnait sur l'Europe entière. Son -monarque était à la fois servi par son génie, par sa fortune et par le -hasard. L'habileté de ses ennemis ne servait qu'à faire éclater la -supériorité de ses généraux et de ses hommes d'État. Son nom était -respecté et sa puissance redoutée jusqu'aux extrémités du monde. La -gloire des héros de l'étranger semblait n'être qu'un apanage de la -sienne. Autour de lui la poésie, l'éloquence, les sublimes conceptions -de la science, les prodiges de l'industrie agrandissaient, -ennoblissaient les destinées de l'humanité. - -Le mari d'une des filles d'honneur de la reine, le grand Sobiesky, -simple mousquetaire de Louis XIV, fut, par l'influence de ce monarque, -élu roi de Pologne, et sauva deux fois l'Europe chrétienne en la -préservant, par sa double victoire, de l'invasion des Turcs, alors si -redoutables[177]. - - [177] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (22 décembre 1673, 1er janvier 1674, 4 - juin et 11 août, 18 décembre 1676, 23 octobre 1683), t. III, p. - 270, 288; t. IV, p. 470, et t. V, p. 41 et 71; t. VII, p. 396, - édit. G.--LOUIS XIV, _Lettres_, t. V, p. 426.--CHOISY, _Mém._, t. - LXIII, p. 429, 423, 491, 514.--BARRIÈRE, _la Cour et la Ville_, - p. 39.--SALVANDY, _Histoire de Pologne_, liv. VII, t. II, p. 346 - et 349. - - -Marié pour la seconde fois par les soins de Louis XIV[178], le duc -d'York, qui eût paru digne du trône s'il n'y fût jamais monté, vint -cette année (1673) présenter au roi de France la princesse de Modène, sa -nouvelle épouse[179], et par la suite la ramena en France, comme son -dernier asile, quand, dépouillé de sa couronne, il eut accompli sa -destinée[180]. - - [178] MONTPENSIER, _Mémoires_, t. XLIII, p. 368 et 369. - - [179] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (2 et 6 novembre 1673), t. III, p. 208 - et 210, édit. G.; t. III, p. 128 et 130, édit. M. - - [180] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 décembre 1688, 17 janvier et 2 mars - 1689), t. IX, p. 102, 103, 109, 119, édit. G. - -Rien d'important n'avait lieu en Europe sans que Louis XIV n'apparût -comme un moteur puissant ou comme un obstacle invincible; mais c'est -surtout sur sa propre cour que son ascendant était le plus fortement -senti. Là était son existence propre et individuelle, tous ses moyens de -bonheur, tous les appuis de son trône, tous les exécuteurs de ses -volontés. La nature lui avait donné la vigueur de tempérament et -l'activité d'esprit nécessaires pour acquérir toutes les gloires et -s'approprier toutes les jouissances du pouvoir suprême. L'orgueil de son -rang et de ses succès lui faisait tout rapporter à sa personne. L'État, -c'était lui; et, par une conséquence nécessaire de ce sentiment égoïste, -le gouvernement de sa cour, de sa famille, de son gynécée était pour lui -des affaires d'État. Pour celles-là il n'avait point d'autre ministre -que lui-même, il ne se fiait qu'à lui seul. A une foi sincère, à un vif -désir du salut il unissait tous les goûts, toutes les passions qui -s'opposent à l'accomplissement des devoirs et des sacrifices qu'il -exige. Il aimait le beau, le magnifique en toutes choses. Les arts, la -musique, la danse le charmaient. Il se complaisait dans l'admiration des -grandes batailles, des actes d'héroïsme et de courage, dans les -appareils guerriers, dans les opérations de siéges savamment combinées, -dans les terribles mêlées des batailles et, au milieu des forêts, dans -le bruyant tumulte des grandes chasses. Il se délectait, il s'admirait -lui-même dans le faste et le bruit des fêtes pompeuses qu'il avait -ordonnées. Il avait encore des penchants plus impérieux, plus -personnels, plus dangereux: il aimait le jeu; il aimait les femmes, mais -non avec cet amour qui les avilit. Il mettait autant de prix à s'en -faire aimer qu'à les posséder. Pour lui, nul commerce avec elles ne -pouvait avoir de durée sans celui de l'âme et de la pensée. Chez lui le -cÅ“ur désirait toujours avoir quelque part dans les caprices passagers -des sens. D'un tempérament robuste, l'habitude ne lui permettait pas de -se contraindre dans les intervalles de repos que les grossesses ou les -infirmités imposaient à la maîtresse dont il était épris; mais alors il -fallait encore que celles qui le rendaient infidèle, en affrontant les -lois de la pudeur, parussent entraînées par la passion qu'il leur -inspirait; et comme il était un des plus beaux hommes de son royaume, il -suffisait aux beautés dont il était assiégé d'assortir leurs regards aux -illusions de son amour-propre. De là cette politesse attentive envers -les femmes de tous rangs, dont il fut le plus parfait modèle; cette -élégance des manières, si fort en honneur à la cour d'Anne d'Autriche et -à l'hôtel de Rambouillet, qui, par l'empire que Louis XIV avait acquis -sur sa cour, a régi la société française pendant tout le cours de son -règne et qui, malgré les mÅ“urs crapuleuses du règne suivant, malgré nos -hideuses révolutions, n'ont pu, après un siècle et demi, disparaître -entièrement du caractère national. - -Cependant tant d'entraînements opposés et d'inclinations contraires -créaient à Louis XIV des obstacles pour le gouvernement de sa cour. Sa -renommée remplissait le monde, et le monde s'occupait de lui. On -cherchait à pénétrer dans les secrets de l'existence intérieure de celui -dont l'influence était si forte sur la fortune des États et des -individus. Voilà pourquoi ce qui concerne ses maîtresses et les -anecdotes de sa vie privée sont des faits qui ont une grande importance -historique; mais ils ont besoin qu'on leur applique ce même esprit -critique sans lequel l'histoire ne peut nous retracer qu'une image -incomplète et fantastique du passé. - -Le 1er janvier 1674, Louis XIV opéra un changement considérable dans la -maison de la reine. Il supprima les filles d'honneur, qui, pour la -plupart, avaient une réputation équivoque, à laquelle le roi avait -beaucoup contribué[181]. Elles furent remplacées par des femmes mariées -à de hauts personnages et portant de grands noms. Ce furent d'abord cinq -dames d'honneur ou dames du palais, ajoutées aux sept qui existaient -déjà . Elles furent toutes assujetties auprès de la reine au même service -que les filles d'honneur, sans qu'aucune d'elles pût s'en exempter, même -lorsqu'elles étaient enceintes[182]. Madame de Sévigné nous apprend que -les uns attribuaient cette mesure à l'inquiète jalousie de Montespan, -et d'autres à ce que, pour écarter une seule de ces filles d'honneur, on -les renvoya toutes. Ces conjectures sont démenties, selon nous, par les -faits que madame de Sévigné elle-même nous apprend. «Le roi, dit-elle, -veut de la soumission. Il est très-sûr qu'en certain lieu on ne veut -séparer aucune femme de son mari ou de ses devoirs; on n'aime pas le -bruit, à moins qu'on ne le fasse[183].» - - [181] _Requeste des filles d'honneur persécutées à madame D. L. - V._ (de la Vallière). _Recueil des histoires galantes_; à - Cologne, chez Jean le Blanc, p. 346.--_Amours des dames illustres - de notre siècle_; à Cologne, chez Jean le Blanc, p. 381. - - [182] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (27 novembre 1673), t. III, p. 242, - édit. G.; t. III, p. 153, édit. M.--_Ibid._ (1er et 5 janvier - 1674), t. III, p. 288, 292, 297.--_État de la France_, 1669, p. - 361.--_Ibid._, 1677, p. 346, et 1678, p. 376. - - [183] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er décembre 1673), t. III, p. 245, - édit. G.; t. III, p. 156, édit. M.--_Ibid._ (8 janvier 1674), t. - III, p. 299, édit. G.; t. III, p. 205, édit. M.--Madame la - duchesse D'ORLÉANS, _Mémoires et fragments historiques_, p. 47, - édit. 1832.--_Ibid._, éd. 1833, p. 46. - -Louis XIV se dégageait peu à peu, par les années, de la tyrannie de sa -constitution chaleureuse, et il cédait de plus en plus au sentiment de -dignité morale qui ne l'abandonna jamais entièrement. Il voulait -racheter par son respect pour la religion et par les services qu'il -croyait lui rendre les graves infractions faites à ses saintes lois. Il -ne lui suffisait pas que les dames du palais eussent un bon renom de -fidélité conjugale, il aurait désiré auprès de sa pieuse épouse des -femmes qui lui ressemblassent. Alors prévalut, parmi celles qui -voulaient parvenir aux dignités et aux honneurs (le nombre en était -grand), une pruderie et une affectation de piété dont madame de Sévigné, -dans l'intime secret de sa correspondance avec sa fille, se moque en -toute occasion. «La princesse d'Harcourt, dit-elle, danse au bal, et -même toutes les petites danses; vous pouvez penser combien on trouve -qu'elle a jeté le froc aux orties et qu'elle a fait la dévote pour être -dame du palais! Elle disait il y a deux jours: Je suis une païenne -auprès de _ma sÅ“ur_ d'Aumont. On trouve qu'elle dit bien présentement: -_La sÅ“ur_ d'Aumont n'a pris goût à rien; elle est toujours de méchante -humeur, et ne cherche qu'à ensevelir les morts. La princesse d'Harcourt -n'a point encore mis de rouge; elle dit à tout moment: J'en mettrai si -la reine ou M. le prince d'Harcourt me le commandent. La reine ne lui -commande pas, ni le prince d'Harcourt; de sorte qu'elle se pince les -joues, et l'on croit que M. de Sainte-Beuve (savant casuiste et -théologien de la Sorbonne) entre dans ce tempérament[184].» - - [184] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 janvier 1674), t. III, p. 316, édit. - G.; t. III, p. 218, édit. M.--Conférez la 4e partie de ces - _Mémoires_, p. 277, et t. III, p. 374. - -Lorsque Mazarin, d'après les considérations de la politique, décida que -le roi de France s'unirait à l'infante d'Espagne, le jeune monarque, -alors dans toute la fougue de l'âge, était épris de Marie Mancini. -L'infante espagnole, timide, froide et gauche, avec ses grands yeux d'un -bleu pâle, sa figure d'un blond argenté, son teint d'un blanc blafard, -le vermillon de ses lèvres épaisses qui faisait ressortir le peu de -blancheur de ses dents, contrastait désagréablement avec les attraits de -cette belle et gracieuse Italienne au teint coloré, à la taille élancée, -à la parole chaleureuse, aux regards enflammés[185]. Le jeune roi fut -obligé de résister à ses plus ardents désirs et de refouler dans son -cÅ“ur ses plus tendres sentiments en recevant dans ses bras -Marie-Thérèse. Celle-ci ne put jamais inspirer de l'amour à son époux; -mais elle était bonne, douce, pieuse; et de toutes les femmes qui se -passionnèrent pour Louis jusqu'à l'idolâtrie aucune ne l'aima plus -fortement, plus constamment. Il le savait, et, malgré toutes les -séductions qui l'entraînaient, il eut toujours pour elle les procédés -d'un honnête homme qui connaît tout le prix d'une épouse fidèle et d'un -roi qui n'ignore pas qu'un des plus grands intérêts de sa politique est -celui de perpétuer sa race. Il en eut six enfants; tous moururent -jeunes, excepté le premier, qui fut dauphin; et comme cet aîné fut un -homme d'un esprit médiocre et d'un caractère peu aimable, malgré les -soins de Montausier et de Bossuet, ou peut-être en partie à cause de ces -soins, Louis XIV préférait à tous ses enfants ceux qu'il eut de ses -maîtresses. Mais il environna toujours de respect et d'hommages sa -compagne couronnée, la mère du Dauphin et de toute la progéniture -légitime et royale. Soumise à toutes ses volontés, elle les devinait -dans ses yeux; elle ne pensait, elle n'agissait que par lui; la peur de -lui déplaire la glaçait d'effroi, et son amour augmentait sa crainte. -Pour qu'aucune femme n'aigrît en elle les sentiments de jalousie qui la -tourmentaient, Louis XIV ne se contenta pas de remplacer les filles -d'honneur par des dames du palais, il renvoya dans leur pays toutes les -femmes de chambre espagnoles que la reine[186] avait amenées avec elle, -et mit à leur place des femmes de chambre françaises. Ce changement -parut dur à Marie-Thérèse; mais elle n'osa pas s'en plaindre, et ce fut -par madame de Montespan qu'elle obtint de pouvoir garder la plus jeune -et la plus chérie de ses femmes espagnoles[187]. - - [185] Voyez la 2e partie de ces _Mémoires_, 2e édit, p. - 151-155.--Madame la duchesse D'ORLÉANS, princesse palatine, - _Mémoires_, édit. de Busoni, 1832, p. 90.--MOTTEVILLE, - _Mémoires_, t. XL, p. 52, 53. - - [186] Madame la duchesse D'ORLÉANS, _Mémoires_, 1833, in-8º, p. - 90, 91. _Lettres originales de madame_ CHARLOTTE-ÉLISABETH DE - BAVIÈRE, _veuve de_ MONSIEUR; 1788, in-12, t. I, p. 84 et 85. - - [187] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er et 5 janvier 1674), t. III, p. 286 - et 292, édit. G.; t. III, p. 288 et 292, édit. M. - -Marie-Thérèse, élevée pour un trône, avait cependant de la grandeur et -de la dignité; ce fut elle qui répondit naïvement qu'elle n'avait pu -devenir amoureuse d'aucun homme à la cour de son père, parce qu'il n'y -avait d'autre roi que lui. Elle savait tenir une cour; mais, élevée dans -l'ignorance et sans goût pour la lecture, elle aimait les jeux de -cartes; ce qui plaisait d'autant plus aux dames d'honneur et aux femmes -admises à l'honneur de faire habituellement sa partie qu'elle ne savait -pas bien jouer, et qu'elle perdait presque toujours. Celles qui, par -leurs charges, étaient obligées de l'accompagner partout ne -sympathisaient pas avec sa dévotion, et trouvaient pénible d'aller tous -les jours à vêpres, au sermon, au salut: «Ainsi, disait à ce propos -madame de Sévigné, rien n'est pur en ce monde[188].» - - [188] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (10 novembre 1673), t. III, p. 216, - édit. G.; t. III, p. 133 et 134, édit. M.--L'_État de la France_, - édit. 1669, p. 361, 362, 363.--Édit. 1677, p. 341, 347.--Édit. - 1678, p. 377. - -Lorsqu'il allait faire la guerre en personne, Louis XIV transportait la -reine et sa cour dans les lieux les moins éloignés des opérations -militaires. Quand ses plans de campagne devaient se porter hors du -royaume et auraient exposé la reine à quelques dangers, il la laissait -à Versailles et la décorait du titre de régente. Si donc Marie-Thérèse -ne suffisait pas au bonheur de Louis XIV, elle y contribuait, et ne le -troublait en rien. Il n'en était pas de même des maîtresses: leur -rivalité, celle de leurs enfants, qui tous issus du même père se -croyaient les mêmes droits aux bienfaits et à la faveur, y fomentaient -des divisions et des haines[189]. Le passage suivant d'une des lettres -de madame de Sévigné nous dessine trop exactement l'état de la cour sous -ce rapport, à l'époque dont nous nous occupons, pour que nous ne le -transcrivions pas: - -«...Parlons de Saint-Germain: j'y fus il y a trois jours... J'allai -d'abord chez M. de Pomponne... Nous allâmes chez la reine avec madame de -Chaulnes. Il n'y eut que pour moi à parler. La reine dit sans hésiter -qu'il y avait trois ans que vous étiez partie et qu'il fallait revenir. -Nous fûmes ensuite chez madame Colbert, qui est extrêmement civile et -sait très-bien vivre. Mademoiselle de Blois dansait; c'est un prodige -d'agrément et de bonne grâce. Desairs dit qu'il n'y a qu'elle qui le -fasse souvenir de vous; il me prenait pour juge de sa danse, et c'était -proprement mon admiration que l'on voulait: elle l'eut, en vérité, tout -entière. La duchesse de la Vallière y était; elle appelle sa fille -_mademoiselle_, et la princesse l'appelle _belle maman_. M. de -Vermandois y était aussi. On ne voit point encore d'autres enfants. Nous -allâmes voir MONSIEUR et MADAME; vous n'êtes point oubliée de MONSIEUR, -et je lui fais toujours mes très-humbles remercîments. Je trouvai -Vivonne, qui me dit: _Maman mignonne_, embrassez, je vous prie, le -gouverneur de Champagne.--Et qui est-ce? lui dis-je.--C'est moi, -reprit-il.--Et qui vous l'a dit?--C'est le roi, qui vient de me -l'apprendre tout à l'heure. Je lui en fis mes compliments tout chauds. -Madame la comtesse (de Soissons) l'espérait pour son fils[190].» - - [189] MONTPENSIER, _Mémoires_ (1681 et 1668), t. XLIII, p. 20 et - 121.--MOTTEVILLE, _Mémoires_ (1661), t. XL, p. 154.--CAYLUS, - _Souvenirs_, t. LXVI, p. 434-35, édit. de Voltaire; Ferney, 1770, - p. 93. - - [190] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (12 janvier 1674), t. III, p. 303, édit. - G.; t. III, p. 206-207, édit. M. - -Presque tous les grands intérêts de cour, au moment où ces lignes furent -écrites, y sont touchés. - -Le gouvernement de Champagne était devenu vacant par la mort -d'Eugène-Maurice de Savoie, comte de Soissons, arrivée le 7 juin 1673. -Il était naturel que ce gouvernement fût donné à son fils aîné, -Louis-Thomas. Sa mère était Olympe Mancini, surintendante et chef du -conseil de la maison de la reine[191], qui avait conservé un grand -crédit à la cour; mais madame de Montespan l'emporta sur elle, et fit -donner ce gouvernement à son frère, le duc de Vivonne. Alors dans toute -la force et l'éclat de sa puissance, madame de Montespan triomphait par -la certitude d'être aimée sans redouter sa rivale. Lorsque, par un -retour de tendresse, Louis XIV avait impérieusement redemandé la -Vallière aux saintes filles du couvent de Chaillot[192], celle-ci, -pressentant son malheur, dit: «Hélas! mes sÅ“urs, vous me reverrez -bientôt.» Bientôt, en effet, l'abandon et la froideur toujours -croissants de celui qui l'avait accoutumée à tant d'adoration et -d'hommages rouvrirent plus saignantes et plus déchirantes les blessures -faites à son cÅ“ur. Elle vit enfin arriver ces jours de douleur et de -larmes, où la mélancolique expression de ses beaux yeux, qui tant de -fois avaient fait repentir Louis XIV de ses infidélités et rallumé -l'ardeur d'une flamme languissante, ne trouvait plus en lui aucune -sympathie. Une nouvelle séparation était devenue indispensable; elle dut -enfin s'y résigner; mais, incertaine, timide et tremblante au moindre -signe de la volonté d'un maître qui avait cessé d'être amant, elle -n'osait pas lui résister; elle ne savait ni comment rester avec lui ni -comment le quitter. Il fuyait la présence, il évitait les regards de -celle qui aurait voulu lui sacrifier sa vie. Sa vie! elle ne lui -appartenait plus; elle était au père de ses enfants, enfants du sang -royal, reconnus légitimes. Dans les commencements, le jeune monarque -avait consenti à ce que la Vallière couvrît ses faiblesses des ombres du -mystère. Deux enfants nés de ce commerce amoureux furent mis au monde et -baptisés comme nés de père et de mère supposés; ces enfants moururent -peu après leur naissance[193], et le secret de ces passagères existences -ne fut pas alors révélé. Louis XIV se lassa de ces feintes, qui le -gênaient et qui lui paraissaient peu d'accord avec la dignité royale; il -voulut se montrer généreux jusque dans le désordre de ses mÅ“urs, il -voulut imposer à l'opinion et se mettre au-dessus d'elle. Il rendit ses -sujets confidents de ses plaisirs, et les admit à contempler la beauté -de celle qui l'avait subjugué. Toute sa cour devait participer à -l'enivrement de sa joie et de son bonheur. Il donna des fêtes splendides -dont la Vallière fut l'objet. Au lieu de désavouer les enfants qu'il en -obtint, il les reconnut et les légitima. La sincérité de ses sentiments -et de son admiration pour sa belle maîtresse éclate dans les lettres -patentes données après la naissance de mademoiselle de Blois, lorsqu'il -érigea, pour elle et pour sa mère, la terre de Vaujour et la baronnie de -Saint-Christophe en duché-pairie, sous le nom de _la Vallière_. - - [191] _État de la France_, 1678, in-12, p. 375. - - [192] Voyez la 3e partie de ces _Mémoires_, ch. XII et XIII, p. - 212 et 240. - - [193] TASCHEREAU, _Revue rétrospective_, numéro XI, août 1834, p. - 251 à 255. - -«Nous avons cru, dit-il, par cet acte[194], ne pouvoir mieux exprimer -dans le public l'estime toute particulière que nous faisons de notre -très-chère, bien-aimée et très-féale Louise-Françoise de la Vallière -qu'en lui conférant les plus hauts titres d'honneur... Quoique sa -modestie se soit souvent opposée au désir que nous avions de l'élever -plus tôt dans un rang proportionné à notre estime et à ses bonnes -qualités, néanmoins l'affection que nous avons pour elle et la justice, -ne nous permettant plus de différer les témoignages de notre -reconnaissance pour un mérite qui nous est connu, ni de refuser plus -longtemps à la nature les effets de notre tendresse pour Marie-Anne, -notre fille naturelle, en la personne de sa mère...» - - [194] _Lettres patentes_ données à Saint-Germain en Laye au mois - de mai 1667, et registrées au parlement le 13.--Ces lettres - patentes sont rapportées dans l'ouvrage de Dreux du Radier - intitulé _Mémoires et anecdotes des reines et régentes de - France_, t. VI, p. 415 du même ouvrage, édit. 1782. - -C'est le 2 octobre 1666 que la Vallière accoucha de cette fille, dite -_mademoiselle de Blois_; et son frère, le comte de Vermandois, qui fut -aussi légitimé, naquit, jour pour jour, un an après elle. Les trois -enfants de Louis XIV et de madame de Montespan, le duc du Maine[195], -le comte de Vexin[196] et mademoiselle de Nantes[197], furent aussi -légitimés. Ils s'élevaient sous l'admirable tutelle de Françoise -d'Aubigné, veuve de Scarron. Les enfants de madame de la Vallière furent -confiés aux soins de la femme du ministre Colbert. Les enfants de -Montespan étaient trop jeunes à l'époque dont nous traitons pour être -montrés à la cour. Il n'en était pas de même de ceux de la Vallière; ils -étaient charmants, et Louis XIV se plaisait à les voir développer leurs -grâces enfantines. - - [195] Né le 31 mars 1670, mort à Sceaux le 14 mai 1736. - - [196] Né le 20 juin 1672, mort le 10 janvier 1683. - - [197] Née en juin 1673 à Tournay (MONTPENSIER, _Mémoires_, t. - XLIII, p. 381), morte le 16 juin 1743. - -Montespan avait intérêt à nourrir dans le cÅ“ur de Louis XIV cette -prédilection pour son illégitime postérité; et à peine relevée de sa -dernière couche, ne pouvant danser, elle imagina de faire danser des -enfants dans les bals de la cour. Ainsi on vit MONSIEUR, frère du roi, -danser avec mademoiselle de Blois, ayant à peine huit ans, et le Dauphin -avec MADEMOISELLE, sa cousine, âgée de douze à treize ans[198]. Ces bals -ressemblaient peu à ceux qui se donnaient dans la jeunesse de Louis XIV, -au temps du règne de la Vallière; mais le roi s'y amusait et y dansait. -Plusieurs des belles femmes de la cour, craignant l'ennui, sous divers -prétextes s'abstenaient d'y paraître; ce qui ne déplaisait nullement à -madame de Montespan, qui n'avait aucun désir de les faire briller. - - [198] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (lundi, 8 janvier 1674), t. III, p. 299, - édit. G; t. III, p. 203, édit. M. - -Dans les lettres de madame de Sévigné à sa fille pendant le mois de -janvier 1674 et avant le départ du roi pour le siége de Besançon, nous -lisons: «Il y a des comédies à la cour et un bal toutes les semaines. On -manque de danseuses...» - -Et huit jours après: - -«Le bal fut fort triste, et finit à onze heures et demie. Le roi menait -la reine; le Dauphin, MADAME; le comte de la Roche-sur-Yon, mademoiselle -de Blois, habillée de velours noir avec des diamants, et un tablier et -une bavette de point de France[199].» - - [199] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (12 janvier 1674), t. III, p. 306, édit. - G.; t. III, p. 209, édit. M.--Sur mademoiselle de Rouvroi, voyez - SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 juin 1675), t. III, p. 414; et Lettre de LE - CAMUS, évêque de Grenoble (5 juin 1675), dans les _Å’uvres_ de - Louis XIV, t. V, p. 534. - -Huit jours après elle écrit encore: - -«Ces bals sont pleins de petits enfants; madame de Montespan y est -négligée, mais placée en perfection; elle dit que mademoiselle de -Rouvroi est déjà trop vieille pour danser au bal: MADEMOISELLE, -mademoiselle de Blois, les petites de Piennes, mademoiselle de -Roquelaure (un peu trop vieille, elle a quinze ans); mademoiselle de -Blois est un chef-d'Å“uvre: le roi et tout le monde en est ravi; elle -vint dire au milieu du bal à madame de Richelieu: Madame, ne -sauriez-vous me dire si le roi est content de moi? Elle passe près de -madame de Montespan, et lui dit: Madame, vous ne regardez pas -aujourd'hui vos amies. Enfin, avec de certaines _chosettes_ sorties de -sa belle bouche, elle enchante par son esprit, sans qu'on croie qu'on -puisse en avoir davantage[200].» - - [200] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 janvier 1674), t. III, p. 317-318, - édit. G.; t. III, p. 218-219. - -On sait que cette délicieuse enfant fut depuis cette princesse de Conti -célèbre par la majesté de son port et la beauté de ses traits, celle-là -même qui, par la grâce et la légèreté de sa danse, troublait le sommeil -du poëte: - - L'herbe l'aurait portée, une fleur n'aurait pas - Reçu l'empreinte de ses pas[201]. - - [201] LA FONTAINE, _le Songe_, dans ses _Å’uvres_, 1827, t. VI, - p. 189. - -Ainsi les enfants de la Vallière servaient de divertissement à sa -rivale; et Louis, sans en être ému, trouvait bon qu'une autre que celle -qui les avait mis au monde s'en emparât pour lui procurer de la -distraction et le rendre sensible aux sentiments de la paternité. -Montespan, par ses couches fréquentes, fut conduite à ce calcul; mais -elle eut la douleur de voir qu'une autre en recueillît les fruits. Le -duc du Maine, prince si faible et si médiocre, mais enfant précoce, fut -le préféré de Louis: loin que sa mère en profitât, il prépara le règne -de l'habile institutrice que Montespan avait appelée près d'elle pour -élever sa royale famille. - -Quant à la Vallière, son cÅ“ur était encore trop opprimé par sa passion -pour trouver des consolations dans les joies maternelles. La vue de ses -enfants lui rappelait au contraire tout ce qu'avaient de cruel -l'indifférence et l'abandon de celui qui les honorait de ses paternelles -tendresses. Elle eut la pensée de se retirer près de son amie, -mademoiselle de la Mothe d'Argencourt[202], dans le couvent de Chaillot, -qui eût ainsi réuni deux victimes d'un même amour. Sa mère l'engageait à -prendre ce parti. Celle-ci calculait que sa fille avait à peine trente -ans, et que sa beauté, ses grandes richesses, son titre de duchesse -qu'elle tenait du roi détermineraient quelque grand et puissant -personnage à demander sa main. Le bruit courait que le duc de -Longueville et Lauzun en étaient amoureux et désiraient l'épouser. Elle -pourrait donc reparaître dans le monde avec un double avantage, briller -encore à la cour, et éclipser Montespan, qui, quoique supérieure à elle -par la naissance, lui était inférieure par le rang. Nul doute qu'un -mariage honorable n'eût été pour la Vallière le meilleur parti et le -seul qui pût lui assurer une existence calme et heureuse; mais pour que -ce mariage pût avoir lieu il fallait qu'elle le voulût et que le roi y -donnât son adhésion. La Vallière fut toujours incapable d'aucun calcul -d'intérêt personnel. Sa passion avait triomphé de sa pudeur; mais son -âme était restée chaste et pure, toujours ouverte aux aspirations de la -piété et du repentir, et elle eût considéré comme une honte de s'unir à -un autre homme que l'unique auquel son honneur avait été sacrifié. Louis -XIV était incapable de faire souffrir à celle qu'il avait tant aimée le -moindre des outrages dont on l'a accusé; mais, sans désirer que la -Vallière restât à sa cour, il craignait, en la laissant s'éloigner, de -lui accorder trop de liberté. Il l'empêchait de voir sa mère, qu'il -n'estimait pas et dont il se défiait; et il favorisait indirectement ses -longs entretiens avec le maréchal de Bellefonds, bien connu pour sa -pieuse ferveur et par son étroite liaison avec Bossuet. Bellefonds -soutint la Vallière dans la résolution qu'elle voulait prendre de -s'éloigner de Louis XIV, de ne plus le revoir, de diriger vers Dieu -toutes ses pensées, toutes ses affections. Il fallait, pour exécuter -cette courageuse résolution, le consentement de Louis XIV, auquel elle -n'était pas libre de désobéir, auquel elle n'aurait pas voulu refuser de -se soumettre lors même qu'elle en eût eu le pouvoir. Elle pensa d'abord -à se retirer au couvent des Capucines. Mais le maréchal de Bellefonds -avait une sÅ“ur qui était prieure des Carmélites de Paris. La Vallière -la rendit confidente de ses peines, et celle-ci parvint à lui persuader -que plus grande serait son expiation, plus grandes seraient la grâce de -Dieu et ses espérances de salut. Fortement préoccupée de cette pensée, -la Vallière eut l'idée de se faire carmélite. C'était là une rude et -difficile détermination à prendre. L'austérité des règles prescrites par -sainte Thérèse faisait pâlir d'effroi la piété la plus fervente; et pour -celle dont la vie s'était écoulée dans les délices du luxe et de la -mollesse, au milieu des pompes et des orgueilleuses jouissances de la -grandeur, se faire carmélite, c'était s'immoler vivante dans un tombeau, -comme une vestale criminelle des temps antiques, sans espérance de -trouver comme elle, par la mort, une prompte fin à son supplice. - - [202] Sur mademoiselle la Mothe d'Argencourt, voyez les - _Mémoires_ sur SÉVIGNÉ, 2e partie, chap. IX, p. 109, 114. - -Aussi la Vallière hésitait-elle beaucoup. A mesure que la religion -s'emparait de sa pensée, le repentir même de ses fautes ravivait dans -son cÅ“ur ses souvenirs d'amour, et sa tendresse pour ses enfants -renaissait avec plus de force. Elle regrettait surtout de se séparer de -sa charmante fille, mademoiselle de Blois[203]. Cependant de nombreuses -conférences avec Bossuet, avec le P. Bourdaloue, le P. Cazan et avec de -Rancé, abbé de la Trappe[204], achevèrent de l'affermir dans sa -résolution. Mais elle voulait que cette résolution fût inébranlable, et -la peur qu'elle avait d'en être détournée par le roi lui faisait -craindre de lui en parler. - - [203] Lettre de madame DE LA VALLIÈRE au maréchal de Bellefonds - (3 février 1674), citée dans BAUSSET, _Hist. de Bossuet_, livre - V, t. II, p. 35, édit. in-12.--MONTPENSIER, _Mémoires_, t. XLIII, - p. 382.--_Madame_ DE LA VALLIÈRE, _Lettres_, 1747, in-12, p. 27. - - [204] L'abbé LEQUEUX, _Histoire de madame de la Vallière_, p. 27, - dans les Lettres de madame la duchesse de la Vallière, 1767, - in-12.--Madame la duchesse D'ORLÉANS, _Fragments de lettres_, - 1788, in-12, t. I, p. 112.--Idem, _Mémoires_, Paris, 1832, in-8º, - p. 58. - -Elle pria Bossuet de traiter d'abord de cette affaire avec madame de -Montespan; celle-ci, effrayée d'un si étrange projet, le combattit, et -tâcha même de le rendre impossible en le tournant en ridicule. Montespan -voyait sa rivale, par cette immolation, devenir un objet d'admiration et -de pitié; et, ce qui la touchait plus fortement, elle pressentait que le -blâme d'avoir permis un si cruel sacrifice rejaillirait sur elle, et -ferait ressortir plus fortement le scandale qu'elle donnait au monde. -L'austère prélat insista; et tel était alors l'empire de la religion, -même sur les rois les plus absolus, que Louis XIV, quoiqu'il en eût le -désir, n'osa pas s'opposer à Bossuet et l'empêcher de continuer son -Å“uvre[205]. Madame de la Vallière, pour transporter à Dieu cette -sensibilité qui débordait, évita tout ce qui pouvait rappeler en elle le -désir de plaire au roi; elle eut soin de se vêtir avec plus de -simplicité et de modestie; elle rechercha les occasions d'humiliation -que faisait naître le triomphe de sa rivale. Celle-ci, aigrie par la -jalousie, les saisissait avec un empressement qu'elle croyait cruel; -mais elle se trompait, la Vallière lui savait gré de ses rigueurs. Elle -s'exerçait à souffrir. Elle répondait à Montespan avec douceur; elle la -parait de ses propres mains. Quand la Vallière reconnut que Montespan ne -lui inspirait plus aucun mouvement de jalousie, quand elle sentit -qu'elle lui faisait éprouver un sentiment de bienveillance et de -compassion, elle cessa de désespérer de sa force. Elle se sentit -suffisamment transformée pour exécuter son effrayante résolution. Elle -aimait encore Louis plus qu'elle-même; mais cet amour était bien faible -en comparaison de celui dont elle se sentait embrasée pour Jésus-Christ. -Ce fut alors que, pour effacer les vains fantômes de sa vie passée et -pour s'affermir dans cet état de volupté divine dont elle était -redevable à la grâce, elle écrivit ces _Réflexions sur la miséricorde de -Dieu_ dont on lui a dérobé longtemps après le manuscrit pour le -publier[206]. Cet ouvrage n'est qu'une continuelle prière pour demander -à Dieu le don de la prière. Elle trouva dans ses aspirations religieuses -un calme si grand, un tel désir d'une autre existence qu'il devint -évident pour ceux qui la voyaient que Louis XIV lui-même n'aurait pu, -par les plus tendres protestations, la ramener à lui. Sa tranquille joie -augmentait à mesure que le temps approchait où elle devait se renfermer. -Bossuet, accoutumé à ces retours de l'âme, dont il était un si grand et -si heureux artisan, en fut cependant étonné; et il écrivit au maréchal -de Bellefonds: «C'est la force et l'humilité qui accompagnent toutes ses -pensées. Elle ne respire plus que la pénitence; et, sans être effrayée -de l'austérité de la vie qu'elle est prête à embrasser, elle en regarde -la fin avec une consolation qui ne lui permet pas d'en craindre la -peine. Cela me ravit et me confond: je parle, et elle fait; j'ai les -discours, elle a les Å“uvres. Quand je considère ces choses, j'entre -dans le désir de me taire et de me cacher; et je ne prononce pas un seul -mot où je ne croie prononcer ma condamnation[207].» Dans la chambre même -de la duchesse de la Vallière, Bossuet écrit encore: «C'est s'abîmer -dans la mort que de se chercher soi-même. Sortir de soi-même pour aller -à Dieu, c'est la vie.» Cette seule phrase peut nous faire juger avec -quelle énergique éloquence le prélat encourageait la Vallière à -persister dans sa pieuse résolution. - - [205] BOSSUET, _Å’uvres_, édit. 1818, in-8º, t. XXXVII, p. 55-66 - (lettres au maréchal de Bellefonds, datées de Saint-Germain, le - 25 décembre 1673, 27 janvier 1674; de Versailles, le 8 février et - 6 avril 1674). - - [206] LA VALLIÈRE, _Réflexions sur la miséricorde de Dieu, par - une dame pénitente_; Paris, Antoine Dezallier, 1680, in-12. C'est - la première édition; elle fut achevée d'imprimer le 20 juin 1680. - Une nouvelle édition parut, augmentée de prières tirées de - l'Écriture sainte et du récit abrégé de la vie pénitente et de la - sainte mort de madame la duchesse de la Vallière; Paris, - Christophe David, 1726, in-12.--Conférez l'abbé LEQUEUX, - _Histoire de la Vallière_, dans les _Lettres_, 1768, in-12, p. - 25.--Une nouvelle édition des _Réflexions_ et des _Lettres_ a été - donnée par Maradan en 1807; elle est précédée d'une _Vie - pénitente de madame de la Vallière_, par madame DE GENLIS. - - [207] BOSSUET, _Å’uvres_, édit. 1818, in-8º, t. XXXVII, p. 66 - (lettre au maréchal de Bellefonds, Versailles, ce 6 avril - 1674).--_Ibid._ (lettres du 27 janvier 1674), t. XXXVII, p. 58. - -«J'étais curieuse de savoir (écrivait madame la duchesse d'Orléans) -pourquoi elle était restée si longtemps comme une suivante chez la -Montespan. Elle me dit que Dieu avait touché son cÅ“ur; qu'il lui avait -fait connaître son péché, et qu'elle avait pensé qu'il fallait en faire -pénitence et souffrir, par conséquent, ce qui lui serait le plus -douloureux... Et puisque son péché avait été public, il fallait que sa -pénitence le fût aussi... Elle avait offert à Dieu toutes ses douleurs, -et Dieu lui avait inspiré la résolution de ne servir que lui; mais -qu'elle se regardait comme indigne de vivre auprès d'âmes aussi pures -que l'étaient les autres carmélites. On voyait que cela partait du -cÅ“ur[208].» - - [208] Madame la duchesse D'ORLÉANS, princesse palatine, - _Mémoires_, édit. 1832, in-8º, p. 58.--Id., _Fragments_, 1788, - in-12 (lettres du 1er mars 1719), t. I, p. 113.--Id., _Mémoires - de la cour de Louis XIV et de la Régence_, Paris, 1805, in-8º, p. - 56. - -On ne la jugea pas d'abord ainsi à la cour et dans le monde; ce monde -croit difficilement aux sublimes efforts de la vertu religieuse. -Mademoiselle de la Vallière était moins aimée que madame de Montespan, -parce que, nulle pour tout autre que pour son amant, préoccupée de la -pensée qu'elle avait perdu ses droits à la considération, elle était mal -à l'aise avec les autres femmes. Étrangère aux intrigues, à l'ambition, -elle n'avait et ne voulait exercer aucun empire sur Louis XIV[209]; elle -ne se rendait utile à personne; bonne, modeste, douce et tendre, sans -aucun défaut, mais sans éminentes qualités. Aimer et être aimée, c'était -sa vie. Une influence assez grande sur son amant pour verser des -bienfaits, pour conférer la puissance ou les richesses pouvait seule -relever cette femme de l'abaissement où elle s'était placée par ses -faiblesses, même avec un roi. - - [209] MONTPENSIER, _Mémoires_ (1674), t. XLIII, p. 382. - -La religion, en précipitant la Vallière au pied des autels, la releva de -cet abaissement. Mais on ajouta d'abord peu de foi, sinon à la -sincérité, du moins à la durée de son repentir. Son prompt retour après -sa retraite de Chaillot devait faire croire que cette retraite avait été -un stratagème de l'amour; et on eut la même opinion quand le bruit se -répandit qu'elle songeait à se retirer de la cour. Ce bruit fut ensuite -démenti, et la duchesse de la Vallière fut l'objet des railleries de -toutes les femmes, même de madame de Sévigné, qui (le 15 décembre 1673) -écrivait à madame de Grignan: «Madame de la Vallière ne parle plus -d'aucune retraite; c'est assez de l'avoir dit. Sa femme de chambre s'est -jetée à ses pieds pour l'en empêcher. Peut-on résister à cela[210]?» - - [210] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (15 décembre 1673), t. III, p. 263 et - 264, édit. G.; t. III, p. 172, édit. M. - -Madame de Sévigné jugeait en femme vulgaire une femme qui ne l'était -plus. La religion l'avait régénérée; elle lui avait donné une élévation, -une énergie de caractère, une prévoyance pour l'avenir, une vigueur de -pensée étrangère jusqu'alors à cette âme indolente et faible. La -Vallière ne restait à la cour que pour régler, par l'entremise de -Colbert, ce qui concernait la fortune de ses enfants. Par le canal de -madame de Montespan, elle obtint encore du roi, auquel elle ne voulait -rien demander, que la marquise de la Vallière, sa belle-sÅ“ur[211], fût -mise dans le nombre des nouvelles dames d'honneur de la reine qu'on -avait ajoutées aux anciennes[212]. - - [211] Sur le frère de la Vallière, conférez SÉVIGNÉ, _Lettres_ - (16 octobre 1676), t. V, p. 176, édit. G.; t. V, p. 10, édit. - M.--_État de la France_, 1678, in-12, p. 376. - - [212] LOUIS XIV, _Å’uvres_, t. V, p. 524 (lettre à la reine de - Portugal, en date du 23 mai 1674).--_État de la France_, 1677, p. - 376. La marquise de la Vallière est dans cet _État_ la dernière - inscrite de celles de la création du 1er janvier 1674. - -La veille de son départ de la cour, la Vallière soupa chez madame de -Montespan, où mademoiselle de Montpensier alla lui faire ses adieux; et -le lendemain, vendredi 20 avril (1674), elle entendit la messe du roi. -Louis XIV partit aussitôt après pour se rendre en Franche-Comté assiéger -Besançon, et madame de la Vallière monta en carrosse, et alla, -vis-à -vis le Val-de-Grâce, se renfermer au couvent des grandes -Carmélites du faubourg Saint-Jacques[213]. - - [213] MONTPENSIER, _Mémoires_, t. XLIII, p. 383 (année 1674). - -De quelle admiration durent être saisies toutes ces austères -religieuses, tout habituées qu'elles étaient aux prodiges de la grâce -divine et aux miracles du repentir, lorsqu'elles virent entrer dans leur -cloître cette belle femme, disant à la mère Claire du Saint-Sacrement, -leur prieure: «Ma mère, j'ai fait toute ma vie un si mauvais usage de ma -volonté que je viens la remettre entre vos mains, pour ne la plus -reprendre!» Jusqu'à sa mort et pendant trente-six ans elle n'eut pas un -seul instant la pensée de cesser d'être fidèle à cet engagement[214]. - - [214] L'abbé LEQUEUX, _Lettres de madame de la Vallière, morte - religieuse carmélite, avec un abrégé de sa vie pénitente_, p. 47. - -Cet acte solennel ne persuada pas encore madame de Sévigné; elle eut de -la peine à croire à l'entière conversion de celle qui cependant, au -milieu de sa plus grande fortune et de sa plus haute élévation, avait -voulu que Mignard la peignît au milieu de ses deux enfants, tenant un -chalumeau à la main, où pendait une bulle de savon autour de laquelle on -lisait écrit: _Sic transit gloria mundi_: «Ainsi passe la gloire du -monde[215].» - - [215] _La Vie de Pierre Mignard_, Paris, 1730, in-12, p. 100; et - dans l'édition d'Amsterdam, 1731, in-12, p. 84. - -Madame de Sévigné, huit jours après l'entrée de madame de la Vallière -aux Carmélites, écrit au comte de Guitaud, alors gouverneur des îles -Sainte-Marguerite: - -«Je veux parler de madame la duchesse de la Vallière. La pauvre personne -a tiré la lie de tout; elle n'a pas voulu perdre un adieu ni une larme. -Elle est aux Carmélites, où, huit jours durant, elle a vu ses enfants et -toute la cour (c'est-à -dire ce qui en reste[216]). Elle a fait couper -ses cheveux, mais elle a gardé deux belles boucles sur le front. Elle -caquète et dit merveilles. Elle assure qu'elle est ravie d'être dans une -solitude; elle croit être dans un désert, pendue à cette grille. Elle -nous fait souvenir de ce que nous disait, il y a bien longtemps madame -de la Fayette après avoir été deux jours à Ruel, que, pour elle, elle -s'accommoderait bien de la campagne[217].» - - [216] Le roi était devant Besançon et la reine à Dijon. - - [217] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 avril 1674), t. III, p. 340, édit. - G.--_Lettres inédites de madame_ DE SÉVIGNÉ, Paris, Klostermann, - 1814, in-8º, p. 6.--_Id._, édit. Bossange, 1819, in-12, p. 5. - -Six semaines après, le troisième dimanche de la Pentecôte (le 3 juin), -la Vallière revêtit l'habit des carmélites, et quitta, ayant à peine -trente ans, son nom et ses titres pour prendre celui de _sÅ“ur Louise de -la Miséricorde_. Cette cérémonie de la vêture attira un auditoire -nombreux au discours que prononça dans cette occasion l'évêque -d'Aire[218]. Nous ignorons si madame de Sévigné revint de Livry, où elle -était au commencement de juin, pour assister à cette cérémonie; mais -nous savons qu'elle n'assista pas à la cérémonie plus auguste qui eut -lieu l'année suivante, le mardi (4 juin 1675) de la Pentecôte, lorsque -la Vallière, ayant terminé son noviciat, prononça ses vÅ“ux, reçut le -voile noir des mains de la reine, et dit au monde un éternel adieu. -Madame de Sévigné exprima ainsi à sa fille les regrets qu'elle éprouvait -de ne s'être point trouvée ce jour-là aux Carmélites avec la reine, -MADEMOISELLE, mademoiselle d'Orléans, la duchesse de Longueville, la -duchesse de Guise et beaucoup d'autres princesses et dames, dit _la -Gazette_[219]: - -«La duchesse de la Vallière fit hier profession. Madame de Villars -m'avait promis de m'y mener, et, par un malentendu, nous crûmes n'avoir -point de places. Il n'y avait qu'à se présenter, quoique la reine eût -dit qu'elle ne voulait pas que la permission fût étendue. Tant y a que -Dieu ne le voulut pas. Madame de Villars en a été affligée. Elle fit -donc cette action, cette belle et courageuse personne, comme toutes les -autres de sa vie, d'une manière noble et charmante. Elle était d'une -beauté qui surprit tout le monde; mais ce qui vous étonnera, c'est que -le sermon de M. de Condom (Bossuet) ne fut pas aussi divin qu'on -l'espérait[220].» - - [218] BOSSUET, _Lettres au maréchal de Bellefonds_ (6 avril - 1674), t. XXXVII, p. 65, édit. 1818, in-8º.--_Sermon sur la - vêture de madame la duchesse de la Vallière_, par M. l'abbé DE - FROMENTIÈRES, dans les _Lettres de madame la duchesse_ DE LA - VALLIÈRE, 1767, in-12, p. 39, 145, 191. L'abbé Jean-Louis de - Fromentières fut évêque d'Aire le 14 janvier 1673, et mourut en - décembre 1684. - - [219] _Recueil des Gazettes nouvelles pour_ 1675, Paris, 1676, - in-4º, no 57, p. 409.--L'abbé LEQUEUX, _Histoire de madame de la - Vallière_, p. 59, et dans le _Recueil des Oraisons funèbres_ de - BOSSUET, 1762, in-12, p. CLI. - - [220] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 juin 1675), t. III, p. 403, édit. G.; - t. III, p. 283, édit. M. - -Le jugement que porte madame de Sévigné de ce discours paraîtra exact à -ceux qui ne le liront pas avec les favorables préventions de l'historien -du grand prélat[221], qui en a jugé différemment. Cette action de la -Vallière était plus sublime que la plus sublime éloquence. «Au moment -où on la mit sous le drap mortuaire (dit la duchesse d'Orléans), je -versai tant de larmes que je ne pus me laisser voir davantage. Après la -cérémonie elle vint me trouver pour me consoler, et elle me dit qu'il -fallait plutôt la féliciter que la plaindre, puisque son bonheur -commençait dès ce moment[222].» - - [221] DE BAUSSET, _Hist. de Bossuet_, 4e édit., 1824, in-12, t. - II, p. 40 à 42. Il est dit, dans le recueil des _Oraisons - funèbres_ de Bossuet, 1762, in-12, p. 424, que Bossuet n'a jamais - publié lui-même ce sermon sur la Vallière ni communiqué son - manuscrit. Et cependant on ajoute: «Il fut imprimé plusieurs fois - depuis 1691, année où il fut inséré dans un recueil de pièces - d'éloquence.» - - [222] Madame la duchesse D'ORLÉANS, _Mémoires et Fragments_, - in-8º, 1832, p. 58.--Id., _Mémoires de la cour de Louis XIV_, - 1827, in-8º, p. 56. - -Cinq ans après, madame de Sévigné revit encore madame de la Vallière; et -sa correspondance nous prouve que toujours elle conserva pour elle les -généreux sentiments qu'elle a manifestés dans les dernières lettres que -nous avons citées. - -Le 5 janvier 1680 elle écrit à sa fille[223]: - -«Je fus hier aux grandes Carmélites avec MADEMOISELLE (mademoiselle de -Montpensier), qui eut la bonne pensée de mander à madame de Lesdiguières -de me mener. Nous entrâmes dans ce saint lieu. Je fus ravie de l'esprit -de la mère Agnès (Gigault de Bellefonds, sÅ“ur du maréchal); elle me -parla de vous comme vous connaissant par sa sÅ“ur (la marquise de -Villars). Je vis madame Stuart, belle et contente. Je vis mademoiselle -d'Épernon (elle s'était faite carmélite par la douleur que lui causa la -mort du chevalier de Fiesque en 1648), qui ne me trouva pas défigurée; -il y avait plus de trente ans que nous ne nous étions vues..... Mais -quel ange m'apparut à la fin! car M. le prince de Conti (le gendre de -la Vallière) la tenait au parloir. Ce fut, à mes yeux, tous les charmes -que nous avons vus autrefois; je ne la trouvai ni bouffie ni jaune; elle -est moins maigre et plus contente; elle a ses mêmes yeux et ses mêmes -regards; l'austérité, la mauvaise nourriture et le peu de sommeil ne les -lui ont ni creusés ni battus; cet habit si étrange n'ôte rien à la bonne -grâce ni au bon air. Pour sa modestie, elle n'est pas plus grande que -quand elle donnait au monde une princesse de Conti; mais c'est assez -pour une carmélite. Elle me dit mille honnêtetés, me parla de vous si -bien, si à propos; tout ce qu'elle dit était si assorti à sa personne -que je ne crois pas qu'il y ait rien de mieux. M. de Conti l'aime et -l'honore tendrement; elle est son directeur; ce prince est dévot et le -sera comme son père. En vérité, cet habit et cette retraite sont une -grande dignité pour elle.» - - [223] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (4 janvier 1680), t. VI, p. 286, édit. - G.; t. VI, p. 92, édit. M. - -Et plus tard madame de Sévigné oppose à l'orgueil des autres maîtresses -de Louis XIV le souvenir de cette «petite violette qui se cachait sous -l'herbe, honteuse d'être maîtresse, d'être mère, d'être duchesse[224].» -C'est encore madame de Sévigné qui, en annonçant à sa fille la mort du -frère de madame de la Vallière (gouverneur et grand sénéchal de la -province du Bourbonnais), nous fait connaître l'admiration et les -regrets peut-être (les passions sont si capricieuses et produisent sur -les volontés humaines des effets si bizarres!) que fit éprouver à Louis -XIV ce grand triomphe, dans la Vallière, de la religion sur l'amour. - - [224] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er septembre 1680), t. VII, p. 190, - édit. G.; t. VI, p. 443, édit. M.--Conférez les vers de la - _Couronne de Julie_ (la duchesse de Montausier). - - -«M. de la Vallière est mort... SÅ“ur Louise de la Miséricorde fit -supplier le roi de conserver le gouvernement pour acquitter les dettes, -sans faire mention de ses neveux. Le roi lui a donc donné ce -gouvernement, et lui a mandé que, s'il était assez homme de bien pour -voir une carmélite aussi sainte qu'elle, il irait lui dire lui-même la -part qu'il prend de la perte qu'elle a faite[225].» - - [225] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (16 octobre 1676), t. V, p. 170, édit. - G.; t. V, p. 30, édit. M. - -Louis XIV était sincère: la pensée du salut, qui devait bientôt le -préoccuper assez fortement pour mettre un terme à la licence de ses -mÅ“urs, lui faisait mieux comprendre qu'à tous ceux qui l'entouraient ce -que pouvait sur le cÅ“ur de la Vallière la passion pour Dieu. Il savait, -lui, le grand coupable, que, pour avoir la plus forte part aux prières -de cette vraie religieuse, il devait respecter l'enceinte où elle -s'était retirée. Madame de Montespan était aussi tourmentée; mais alors, -dans l'enivrement de la faveur, elle ne pouvait avoir cette même -délicatesse de sentiment, et elle crut se montrer généreuse en -accompagnant plusieurs fois la reine, dont elle était une dame -d'honneur, dans ses visites aux grandes Carmélites. Madame de Montespan, -par des questions indiscrètes et par l'offre plus indiscrète encore de -ses services, s'attira une réponse courte, froide et digne de madame de -la Vallière; réponse faite, dit madame de Sévigné, d'un air tout aimable -et avec toute la grâce, l'esprit et la modestie imaginables[226]. - - [226] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (29 avril 1676), t. IV, p. 412, édit. - G.; t. IV, p. 272, édit. M.--Conférez MAGDELEINE DU SAINT-ESPRIT, - _Lettres_, 1710. - - -Peu d'années après, Montespan, retirée de la cour, mais non du monde, -et, dans le monde, tourmentée du désir de faire son salut, apprécia -mieux Louise de la Miséricorde; elle en fit son amie, sa consolatrice et -enfin le directeur de sa conscience[227]. - - [227] Conférez MAGDELEINE DU SAINT-ESPRIT, par une dame - pénitente, 1710, et l'Annuaire de l'Aube pour 1849, 2e partie, p. - 25.--_Réflexions sur la miséricorde de Dieu, par une dame - pénitente_, 1685 et 1686, in-12, p. 170. - -La Vallière occupe plus de place dans la vie de Louis XIV par son -repentir que par son amour. Cette belle victime, offerte à Dieu en -expiation des désordres de ce roi, fit sur lui une impression profonde, -que ni les autres maîtresses ni les distractions de la guerre ou de la -politique ne purent effacer. La Vallière ne fut jamais plus présente à -la pensée de Louis XIV que depuis qu'elle eut abandonné sa cour; jamais -elle ne lui apparut sous des traits plus divins que lorsqu'il se fut -interdit sa vue. Il saisissait avec joie les occasions de lui continuer -ses bienfaits dans ses parents, dans ses enfants. Aux occasions -solennelles de mort ou de mariage il était satisfait d'apprendre que la -reine et toute la cour donnaient à la Vallière des témoignages d'intérêt -et de vénération[228]. C'est dans son cloître, au pied des autels, que -la Vallière a préparé, à son insu, la chute de Montespan et le long -règne de Maintenon. - - [228] CAYLUS, _Souvenirs_, édit. de Renouard, 1806, in-12, p. - 89.--_Ibid._, t. LXVI, p. 384 de la Collect. de Petitot, 1828, - in-8º. - -Si Louis XIV, par sa conduite réservée envers Louise de la Miséricorde, -a été taxé d'ingratitude et d'oubli, c'est que le monde ne connaît -d'autre passion que celle qu'inspirent les enchantements de la volupté, -de l'esprit ou des talents, et qu'il ignore la force d'un attachement -où l'âme et le cÅ“ur ont la principale part. Louis XIV y était sensible. -On sait qu'en voyant la veuve de Scarron amaigrie par la douleur d'avoir -perdu l'aîné des enfants de Montespan, confié à ses soins et âgé de -trois ans, il avait dit: «Elle sait bien aimer; il y aurait du plaisir à -être aimé d'elle[229].» Et cependant, à cette époque, cette femme lui -déplaisait souverainement, parce qu'elle plaisait trop à sa maîtresse. - - [229] _Les souvenirs de madame_ DE CAYLUS _sur les intrigues - amoureuses de la cour, avec des notes de_ M. DE VOLTAIRE; - _seconde édition, augmentée de la défense de Louis XIV, pour - servir de suite à son Siècle_; au château de Ferney, 1770, in-12 - (186 pages), p. 31. C'est la meilleure édition; elle a été faite - sur le manuscrit donné à Voltaire par M. de Caylus (_Souvenirs_, - 1806, in-12, p. 89, édit. de Renouard).--_Idem._, Collection - Petitot, t. LXVI, p. 384, in-8º, 1828, édit. M. Voyez ces - _Mémoires sur la Vallière, sur Sévigné_, t. II, p. 191, 247, 297, - 505, 506; III, 45, 237, 240, 319, 325; IV, 89. - - - - -CHAPITRE VI. - -1674-1675. - - Le parti religieux et le parti mondain se disputent l'influence sur - Louis XIV.--Réforme dans la maison de la reine.--Les filles - d'honneur sont remplacées par les dames du palais.--Effets de cette - mesure.--Scrupules religieux de madame de Sévigné.--Sa visite à - Port-Royal des Champs.--Son admiration pour le P. Bourdaloue.--Mort - du grand Condé.--Bourdaloue console le duc de Gramont après la mort - du comte de Guiche.--Madame de Sévigné détrompe sa fille, qui croit - que l'on peut être à la cour longtemps triste.--Changement dans les - spectacles de la cour.--Pour quelle raison _le Malade imaginaire_ - ne fut pas joué à la cour.--Molière et Lulli étaient rivaux.--Après - la mort de Molière, Louis XIV charge Colbert de réorganiser les - spectacles de Paris.--L'Opéra devient le spectacle - dominant.--Alliance de Quinault et de Lulli.--On répète chez madame - de Montespan l'opéra d'_Alceste_.--La Rochefoucauld est appelé à - ces représentations.--Éloge que fait de cet ouvrage madame de - Sévigné.--Le chÅ“ur des suivants de Pluton cité.--L'impulsion - donnée à l'Opéra ne profite qu'à la musique - instrumentale.--L'Italie reste supérieure à la France pour tout le - reste.--Madame de Sévigné va à un opéra.--Des musiciens.--Molière - chez Pelissari.--Des sociétés de Paris à cette époque.--Madame - Pelissari réunit chez elle les littérateurs médiocres.--Composition - de l'Académie française.--Madame de Sévigné annonce à sa fille la - mort prochaine de Chapelain.--Cause de son peu de sympathie pour - cet ancien maître de son enfance.--Elle devient l'admiratrice de - Boileau.--Elle entend la lecture de son _Art poétique_ chez - Gourville et chez M. de Pomponne.--Ce poëme est livré à - l'impression.--L'auteur y intercale, au moment de la publication, - quatre vers pour célébrer la seconde conquête de la - Franche-Comté.--Ces quatre vers nuisent à ceux qui les suivent, - auparavant composés. - - -Il y avait à la cour deux partis qui se disputaient l'influence sur le -roi. L'un, composé de tous les courtisans dévoués qui avaient part à -ses largesses, de ceux qui désiraient obtenir à tout prix des grades, -des commandements militaires, des gouvernements, de grandes charges, des -intendances, des ambassades, des emplois lucratifs, des distinctions -honorifiques: ceux-là pensaient que Louis XIV devait continuer le cours -de ses conquêtes; que ses maîtresses, le faste de ses palais, de ses -fêtes, de sa maison étaient des démonstrations obligées de sa grandeur -et des manifestations nécessaires de sa puissance. Louvois et Montespan -étaient les appuis naturels de ce parti. Le parti contraire aurait voulu -que Louis XIV renonçât à ses maîtresses; qu'il épargnât à ses sujets le -scandale de ses amours avec une femme mariée; qu'il restreignît ses -dépenses et mît un terme à son ambition et qu'il n'excitât pas la haine -des souverains et de toute l'Europe contre lui et contre la France. Dans -ce parti étaient tous ceux qui voyaient le bien public dans le règne de -la religion et des mÅ“urs. Colbert, homme réglé dans sa conduite, -pensait ainsi; mais il ne pouvait avoir sur son parti la même influence -que Louvois sur le sien[230]. Chargé de l'administration des finances, -il était obligé de mettre sans cesse de nouveaux impôts pour suffire à -des dépenses qui s'accroissaient sans cesse; il ne le pouvait qu'en -appesantissant de plus en plus le joug du despotisme sur les parlements, -les assemblées des états, les magistrats municipaux, les membres de -toutes les corporations qui jouissaient de quelque liberté, tous -partisans de la paix et d'une sage réforme. La confiance que Louis XIV -avait en Colbert comme habile administrateur était encore un obstacle -qui lui faisait perdre tout crédit sur les hommes les plus honorables. -Louis XIV ne lui imposait pas seulement le devoir de régler les finances -de l'État, d'organiser la marine, le commerce; il ne se fiait qu'à lui -pour ses dépenses privées, et il le chargeait du détail de celles qui -concernaient ses maîtresses. Il n'oublia jamais que Colbert avait été -sous Mazarin un excellent intendant; il s'en servait toujours comme tel, -et rendait ce grand ministre complice des désordres que celui-ci aurait -voulu empêcher. Plus que Louvois, et avec juste raison, Colbert excitait -l'envie. Il est vrai qu'en travaillant sans cesse au bien de l'État il -travaillait aussi à l'accroissement de sa fortune et à l'élévation de sa -famille. Dans le clergé, dans la diplomatie et dans la marine les -Colbert occupaient les principaux emplois, étaient revêtus des plus -hautes dignités. Ne pouvant restreindre le roi dans son penchant à la -profusion, Colbert en profitait pour son compte. Il laissa à sa mort -douze millions, qui font vingt-quatre millions de notre monnaie -actuelle. Cette fortune n'était pas, comme celle de Fouquet, le fruit de -coupables manÅ“uvres; mais, en définitive, c'était le trésor et les -impôts sur les peuples, ruinés par la guerre, qui subvenaient aux -générosités du monarque et à celles des provinces et des villes en -faveur des ministres, de leurs parents et de leurs amis. Cependant ce -parti, qui était véritablement celui des bonnes mÅ“urs et le plus -favorable aux intérêts du roi et du pays, ne manquait pas de soutiens à -la cour: la religion lui en créait, pleins d'activité et de zèle. Parmi -eux on comptait le duc de Beauvilliers et le maréchal de Bellefonds, -Pomponne et beaucoup d'autres; enfin, il avait dans Bossuet et dans -Bourdaloue deux apôtres sublimes. - - [230] DEPPING, _Correspondance administrative de Louis XIV_. - Lettres du roi à Colbert (18 mai et 19 juin 1674), dans les - _Documents historiques tirés des collections manuscrites de la - Bibliothèque royale_, 1843, in-4º, t. II, p. 524, 525 et 526. - -Tous fondaient leur espoir sur l'auguste empire de la religion, qui -parvient toujours à faire entendre sa voix puissante quand les passions -sont apaisées. La foi était vivante dans l'âme de madame de Montespan -comme dans celle de Louis XIV, et elle se manifestait dans tous les deux -par leur exactitude à s'assujettir aux pratiques religieuses que -l'Église prescrit. - -Ce parti considéra avec raison comme un premier succès la religieuse -retraite de la Vallière, et comme un second le renvoi des filles -d'honneur. Quel qu'ait été le motif qui fit agir Montespan, il est -certain que ce fut elle qui eut la principale part à cette réforme, -qu'elle la désira et la voulut avec toutes ses conséquences. Madame de -Sévigné, en donnant à madame de Grignan des détails sur l'intérieur de -_Quantova_ (c'est le nom chiffré par lequel elle désigne madame de -Montespan), dit: «Il est très-sûr qu'en certain lieu on ne veut séparer -aucune femme de son mari ni de ses devoirs; on n'aime pas le bruit, à -moins qu'on ne le fasse[231].» - - [231] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 janvier 1674), t. III, p. 299, édit. - G.; t. III, p. 203, édit. M. - -On avait pensé à madame de Grignan pour être dame du palais; mais sans -doute que madame de Montespan la trouva trop jeune et trop belle[232]. - - [232] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (18 décembre 1673), édit. G., t. III, p. - 268. - -Madame de Grignan dut peu regretter de n'avoir pas été nommée. Avec les -filles d'honneur disparurent les joies et la gaieté de cette cour -brillante: toute liberté en fut bannie; le service pénible et -l'étiquette sévère auxquels les dames du palais furent assujetties -firent souffrir celles qui avaient brigué avec ardeur ces charges -lucratives et honorifiques. La contrainte et l'ennui s'appesantirent -jusque sur les bals et les divertissements que le roi donnait -fréquemment[233]. - - [233] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (22 et 29 janvier 1674), t. III, p. 324 - et 331, édit. G.; t. III, p. 225 et 231, éd. M.--_Lettres des_ - FEUQUIÈRES (25 janvier 1674), t. II, p. 248. - -Cependant cette réforme eut un très-heureux effet sur les mÅ“urs; madame -de Sévigné elle-même, qui plaisante sur les femmes devenues subitement -dévotes, fut alors plus fortement tourmentée par les scrupules que lui -causait souvent son amour excessif pour sa fille; elle trouva très-bien -que l'animosité que celle-ci lui avait inspirée contre l'évêque de -Marseille lui eût attiré un refus d'absolution. Elle dit à madame de -Grignan: «Ce confesseur est un fort habile homme; et si les vôtres ne -vous traitent pas de même, ce sont des ignorants, qui ne savent pas leur -métier[234].» - - [234] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (4 décembre 1673), t. III, p. 249, édit. - G.; t. III, p. 160, édit. M. Voyez ci-après chap. X, p. 198. - -On voit par là que madame de Sévigné avait lu le traité du grand Arnauld -sur la _fréquente communion_. Dans la lettre où elle dit à sa fille que -d'Hacqueville ne voudrait pas des douceurs d'un attachement tel que -celui qu'elle a pour elle, parce qu'il est mêlé de trop d'inquiétude et -de tourments, elle ajoute: «D'Hacqueville a raison de ne vouloir rien de -pareil; pour moi, je m'en trouve fort bien, pourvu que Dieu me fasse la -grâce de l'aimer encore plus que vous: voilà ce dont il est question. -Cette petite circonstance d'un cÅ“ur que l'on ôte au Créateur pour le -donner à la créature me donne quelquefois de grandes agitations. La -_Pluie_ (M. de Pomponne) et moi nous en parlions l'autre jour -très-sérieusement. Mon Dieu, qu'elle est à mon goût cette _pluie_! Je -crois que je suis au sien; nous retrouvons avec plaisir nos anciennes -liaisons[235].» On ne peut douter que madame de Sévigné, lorsqu'elle -écrivait cette lettre, n'eût alors la mémoire toute fraîche de -l'admirable petit traité de saint Eucher sur le _mépris du monde_, dont -son ami Arnauld d'Andilly venait de publier une traduction[236], -puisqu'elle reproduit une pensée d'Eucher en se servant des mêmes -expressions. - - [235] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (18 décembre 1673), t. III, p. 268; t. - III, p. 177, édit. M. (1820). - - [236] SAINT-EUCHER, _Du mépris du monde_, traduit par ARNAULD - D'ANDILLY dans Pierre le Petit, 1687, in-12 (81 pages), p. 54. - Après le privilége il est dit: «Achevé d'imprimer pour la - première fois le 3 décembre 1671.» Ainsi il y a eu une édition - antérieure, et nous apprenons par l'avertissement que cette - édition contenait aussi le latin. Il manque dans la nôtre. - -Quand ses scrupules la préoccupent, elle se rapproche de ses anciens -amis les jansénistes, surtout d'Arnauld d'Andilly; et alors les rigueurs -de l'hiver ne peuvent l'arrêter. Ce fut un 23 janvier (1674) qu'elle -alla voir pour la première fois Port-Royal des Champs; et elle écrit à -sa fille: «Je revins hier du Mesnil (de chez madame Habert de Montmor), -où j'étais allée pour voir le lendemain M. d'Andilly. Je fus six heures -avec lui; j'eus toute la joie que peut donner la conversation d'un homme -admirable; je vis aussi mon oncle Sévigné, mais un moment. Ce Port-Royal -est une Thébaïde; c'est un paradis; c'est un désert où toute la dévotion -du christianisme s'est rangée; c'est une sainteté répandue dans tout le -pays, à une lieue à la ronde. Il y a cinq ou six solitaires qu'on ne -connaît point, qui vivent comme les pénitents de saint Jean-Climaque. -Les religieuses sont des anges sur terre. Mademoiselle de Vertus y -achève sa vie. Je vous avoue que j'ai été ravie de voir cette divine -solitude, dont j'ai tant ouï parler: c'est un vallon affreux, tout -propre à inspirer le goût de faire son salut. Je revins coucher au -Mesnil, et hier ici (Paris), après avoir embrassé M. d'Andilly en -passant. Je crois que je dînerai demain chez M. de Pomponne; ce ne sera -pas sans parler de son père (Arnauld d'Andilly) et de ma fille. Voilà -deux chapitres qui nous tiennent au cÅ“ur[237].» - - [237] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (26 janvier 1674), t. III, p. 326 et - 327, édit. G.; t. III, p. 227, édit. M. - -Le penchant de madame de Sévigné pour ses amis les jansénistes ne -diminuait en rien son admiration pour le jésuite Bourdaloue. Elle dit: -«Le P. Bourdaloue fit un sermon le jour de Notre-Dame[238] qui -transporta tout le monde; il était d'une force à faire trembler les -courtisans, et jamais prédicateur évangélique n'a prêché si hautement ni -si généreusement les vérités chrétiennes[239].» - - [238] Le jour de la Purification, le 2 février, ou peut-être le - dimanche 28 janvier; car cette fête commençait le dimanche qui - précédait ce jour et se continuait jusqu'au jour même. Voyez - BOSSUET, _Catéchisme des festes_, 1687, p. 86. - - [239] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 février 1674), t. III, p. 336, édit. - G.; t. III, p. 234, édit. M. - -On connaît ce mot du grand Condé, qui, à l'église, lorsque le P. -Bourdaloue montait en chaire, appuyant une main sur l'épaule de la -duchesse de Longueville assoupie et de l'autre lui montrant la chaire, -lui disait: «Ma sÅ“ur, réveillez-vous; voilà l'ennemi!» - -Mais c'est lorsque madame de Sévigné peint le père Bourdaloue consolant -le vieux maréchal de Gramont de la perte de son fils aîné, l'espoir de -sa race, qu'elle nous montre toute l'influence de ce prédicateur sur les -grands de cette époque. Elle trace de cette scène un admirable tableau. -Guiche, qui fut exilé pour ses amours avec l'aimable Henriette et pour -son intrigue avec Vardes contre la Vallière, n'était point généralement -aimé. Madame de Sévigné, qui lui plaisait beaucoup par son esprit, -trouvait le sien guindé, ceinturé comme sa personne. Cependant sa mort -fit une sensation profonde. On comprit qu'en lui disparaissait l'homme -de la cour le plus beau, le plus brillant, le plus chevaleresque, le -plus instruit; le comte de Guiche aurait eu toutes les qualités qui font -le héros s'il n'avait eu les défauts qui empêchent de le devenir: la -vanité et la présomption. Ce fut lui qui, en s'élançant le premier dans -le courant rapide du Rhin, assura le passage de ce fleuve. Louis XIV, -témoin de son courage impétueux, lui eût accordé toute sa faveur s'il -avait pu abattre en lui cet orgueil hautain qui le mettait mal à l'aise -avec toute supériorité. Un léger revers à la guerre lui fut si sensible -qu'il en mourut de chagrin[240]. - - [240] Voyez PROSPER MARCHAND, _Dictionnaire historique_, 1758, - in-folio, p. 296-300.--_Mémoires du comte_ DE GUICHE, Utrecht, - 1744, in-12, deux volumes.--Conférez ces _Mémoires_ sur madame de - Sévigné, I, 302; II, 139, 191, 312; IV, 134, 212.--HAMILTON, - _Å’uvres_, t. I, p. 25. - -«Il faut commencer, ma chère enfant, par la mort du comte de Guiche. Le -P. Bourdaloue l'a annoncée au maréchal de Gramont, qui s'en douta, -sachant l'extrémité de son fils. Il fit sortir tout le monde de sa -chambre. Il était dans un petit appartement qu'il a au dehors des -Capucines. Quand il fut seul avec ce père, il se jeta à son cou, disant -qu'il devinait bien ce qu'il avait à lui dire; que c'était le coup de sa -mort; qu'il la recevait de la main de Dieu; qu'il perdait le seul et -véritable objet de toute sa tendresse et de toute son inclination -naturelle; que jamais il n'avait eu de sensible joie et de violente -douleur que par ce fils, qui avait des choses admirables. Il se jeta sur -un lit, n'en pouvant plus, mais sans pleurer, car on ne pleure plus dans -cet état. Le père pleurait, et n'avait encore rien dit. Enfin il lui -parla de Dieu comme vous savez qu'il en parle. Ils furent six heures -ensemble; et puis le père, pour lui faire faire son sacrifice entier, le -mena à l'église de ces bonnes Capucines, où l'on disait vigiles pour ce -cher fils. Le maréchal y entra en tremblant, plutôt traîné et poussé que -sur ses jambes; son visage n'était plus connaissable. Monsieur le Duc le -vit en cet état, et, en nous le contant chez madame de la Fayette, il -pleurait. Le maréchal revint enfin dans sa petite chambre; il est comme -un homme condamné. Le roi lui a écrit; personne ne le voit[241].» - - [241] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 décembre 1673), t. III, p. 251, édit. - G.; t. III, p. 161, édit. M.--Le comte de Guiche mourut le 29 - novembre 1674 à Creutznach dans le palatinat du Rhin, entre les - bras de son frère le comte de Louvigny.--Conférez SÉVIGNÉ, - _Lettres_ (27 septembre et 4 octobre 1671), t. II, p. 243, 254, - 350, édit. G.; et _Mémoires et fragments historiques de_ MADAME, - _duchesse_ D'ORLÉANS, _princesse Palatine_, édit. 1832, p. - 207.--_Lettres des_ FEUQUIÈRES, t. VI, p. 321. - -Ce touchant récit fit croire à madame de Grignan que sa mère, ses amis -étaient inconsolables de la mort du comte de Guiche. Mais dans cette -cour, tout occupée de plaisirs et d'ambition, et de gloire et d'amour, -personne ne pouvait paraître triste, surtout lorsque le roi avait -daigné vous consoler. Aussi madame de Sévigné écrit à sa fille: «Hors -le maréchal de Gramont, on ne songe déjà plus au comte de Guiche: voilà -qui est fait[242].» Mais elle fut obligée de s'y reprendre à plusieurs -fois pour ramener madame de Grignan à son unisson. «Ha! fort bien; nous -voici dans les lamentations du comte de Guiche. Hélas! ma pauvre enfant, -nous n'y pensons plus ici, pas même le maréchal, qui a repris le soin de -faire sa cour.» Quelques jours après, nouvelle réprimande: «Vous vous -moquez avec vos longues douleurs! Nous n'aurions jamais fait ici si nous -voulions appuyer autant sur chaque nouvelle: il faut expédier; expédiez, -à notre exemple[243].» - - [242] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (18 décembre 1673), t. III, p. 266, - édit. G.; t. III, p. 175, édit. M. - - [243] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (25 décembre 1673), t. III, p. 276, - édit. G.; t. III, p. 183, édit. M.--_Ibid._ (28 décembre 1673), - t. III, p. 283, éd. G.; t. III, p. 189, édit. M. - -Elle expédie en effet; et il est impossible de trouver dans aucune -correspondance autant de faits intéressants sur les événements publics, -les personnages du temps, les spectacles, la littérature et la vie de -toute une époque, touchés avec tant de concision, d'esprit, de finesse -et de gaieté. - -Un grand changement eut lieu dans les spectacles à la cour et à la -ville, car alors Paris se conformait à la cour; c'était le roi qui -réglait l'un et l'autre. - -Louis XIV a dit, dans ses Instructions au Dauphin, qu'il est du devoir -d'un monarque de donner des amusements à sa cour, à son peuple, à -lui-même[244]. Les spectacles publics furent donc par lui mis au nombre -des affaires d'État. La mort de Molière les avait désorganisés. -Cependant la comédie n'était pas le genre de spectacle que préférait -Louis XIV: il aimait par-dessus tout la danse, la musique, les belles -décorations; il n'oubliait pas qu'il avait autrefois brillé dans les -ballets composés pour lui. Il avait été, dans sa jeunesse, un très-bon -joueur de guitare[245]; ce qui n'étonne pas quand on sait qu'on lui -donna un maître de cet instrument lorsqu'il était à peine âgé de huit -ans[246]. C'est cette préférence du roi pour la musique qui avait fait -le succès de l'opéra, introduit en France par Mazarin. Mais Molière, -aussi habile directeur de spectacles qu'auteur illustre et bon acteur, -pour donner au roi le goût de la comédie, imagina de joindre à ses -pièces des danses, des chants, des ballets-mascarades, bien ou mal -motivés[247]. Il chargeait Lulli d'en faire la musique; et même, dans la -composition de la tragi-comédie-ballet de _Psyché_, il fit concorder -heureusement, pour aller plus vite, Lulli, Quinault et Corneille. Le -grand tragique fut lui-même étonné qu'en remplissant le cadre qui lui -était donné sa muse, affaiblie par l'âge, eût retrouvé, pour une -déclaration d'amour, tout le feu de la jeunesse. C'est ainsi que -Molière soutint son théâtre florissant contre les dangereuses rivalités -du théâtre de la rue Guénégaud, où se jouait l'opéra; du théâtre de -l'hôtel de Bourgogne et de celui du Marais, où l'on représentait les -pièces de Racine et celles de Corneille[248]. - - [244] DUC DE NOAILLES, notes sur les _Mémoires de Louis XIV_; - appendice à la Vie de Maintenon, 1848, in-8º, t. I, p. 558. - - [245] _Mémoires de Noailles_, dans Petitot, t. LXIV, p. 104. - Lettre de la princesse des Ursins (11 juillet 1698). - - [246] _État général des officiers, domestiques et commensaux du - Roi_, mis en ordre par le sieur DE LA MARTINIÈRE, p. 116. Ce - maître de guitare se nommait Bernard Jourdan, sieur de la Salle, - et c'est le 29 avril 1651 que de la Salle fut placé près du jeune - roi, afin de lui enseigner à jouer de la guitare. Le maître de - luth n'avait que le quart des appointements du maître de guitare. - - [247] Conférez _Mémoires sur Sévigné_, t. I, p. 513, 525; t. II, - ch. XXIII, p. 332, 340; t. III, ch. V, p. 98. - - [248] Vie de PHILIPPE QUINAULT, dans l'édition de ses _Å’uvres_, - 1715, in-12, t. I, p. 33-35.--CHAPUZEAU, _le Théâtre français_, - divisé en trois livres, 1674, in-12, p. 198-211. - -La musique est un art qui ne parle au cÅ“ur et à l'imagination que par -les sons. Par cela même elle convient mieux que les compositions -dramatiques à ceux que l'âge ou la multiplicité des affaires ont rendus, -dans leurs moments de distraction, peu capables d'une attention -soutenue. Tel commençait à être Louis XIV. Lulli s'aperçut du déclin de -son goût pour la comédie. Il s'associa avec Quinault, dont il espérait -avec raison obtenir des opéras meilleurs que ceux de l'abbé Perrin[249]; -et, pour empêcher que Molière ne pût réunir dans ses compositions la -comédie et l'opéra, il obtint une ordonnance (22 avril 1672) qui portait -défense aux comédiens d'avoir, pour leurs représentations, plus de deux -voix et plus de six violons. Dès lors Molière, brouillé avec Lulli ne -put se servir de lui pour les ballets du _Malade imaginaire_, et il en -fit composer la musique par Charpentier, musicien aussi habile, mais non -aussi goûté que Lulli, qui le persécuta par jalousie[250]. _Le Malade -imaginaire_ fut cependant représenté sur le théâtre du Palais-Royal, le -10 février 1673, avec toute sa musique, et imprimé la même année[251]; -mais il ne fut joué à la cour que l'année suivante[252]. Débarrassé d'un -redoutable rival par la mort de Molière, Lulli resta le directeur -favorisé des divertissements du roi. Quatre des principaux acteurs de la -troupe de Molière s'en étant séparés pour entrer dans la troupe de -l'hôtel de Bourgogne, Colbert fut chargé par Louis XIV de former, des -débris de la troupe du grand comique et de celle du Marais, une nouvelle -troupe qui fut transportée rue Mazarine; et le théâtre du Palais-Royal -fut donné à Lulli pour y établir l'Opéra, décoré du nom d'_Académie -royale de musique_. L'ancien Opéra du marquis de Sourdac disparut, et le -nouvel Opéra fut fondé par l'association de Lulli, de Quinault, de -Vigaroni; le musicien, le poëte et le décorateur formèrent un spectacle -tout nouveau, d'une grandeur et d'une magnificence fort au-dessus de -tout ce qu'on avait vu jusqu'alors. Il devint célèbre dans toute -l'Europe, et n'a cessé de contribuer aux progrès de la chorégraphie, de -la musique vocale et instrumentale. Quoique toujours onéreux pour -l'État, il a survécu à tous les désastres de nos révolutions. Malgré la -réunion des talents qui contribuaient à sa réussite, il causa, dans la -nouveauté, plus d'admiration que de plaisir[253], et il ne se soutint -que par la volonté et la munificence de Louis XIV, qui le mit à la mode. -Jamais, depuis, l'empressement du public ne suffit pour entretenir ce -spectacle dans la splendeur et le luxe qui est de son essence; pour -qu'il pût subsister il a fallu que tous les gouvernements qui se sont -succédé en France fussent pour lui plus prodigues encore que n'avait été -Louis XIV. - - [249] Les frères PARFAICT, _Histoire du Théâtre français_, t. XI, - p. 293. - - [250] TITON DU TILLET, _Parnasse françois_, Paris, 1732, - in-folio, p. 490.--ROQUEFORT, dans la _Biographie universelle_, - t. VIII, p. 244, article _Charpentier_ (Marc-Antoine). Ce savant - maître de musique de la Sainte-Chapelle naquit à Paris en 1634, - et y mourut en 1702, âgé de soixante-huit ans. - - [251] Avec le Prologue, 36 pages in-4º, Paris, 1663, chez - Christophe Ballard. - - [252] FÉLIBIEN, _les Divertissements de Versailles_, p. 28. - - [253] Conférez LA FONTAINE, _Épître à M. Nyert sur l'Opéra_, et - nos notes dans les _Å’uvres_, édit. 1827, t. VI, p. 108 à - 119.--RAGUENET, _Parallèle des Italiens et des Français en ce qui - regarde la musique et l'Opéra_, in-12, Paris, 1702, p. 124.--LA - BRUYÈRE, _Caractères_, ch. XLVII, t. I, p. 164, édit. W., 1835, - in-8º et in-12. - -Ce fut madame de Montespan qui eut la principale part à cette rénovation -de l'Opéra. Pour faire cette révolution théâtrale, elle s'appuya sur -l'opinion de la Rochefoucauld, alors, à la cour, le grand arbitre du -goût. «M. de la Rochefoucauld, dit madame de Sévigné à sa fille, ne -bouge de Versailles; le roi le fait entrer chez madame de Montespan pour -entendre les répétitions d'un opéra qui passera tous les autres: il faut -que vous le voyiez[254].» Cet opéra était celui d'_Alceste ou le -Triomphe d'Alcide_, qui fut le premier que composa Quinault depuis qu'il -avait fait alliance avec Lulli et que la salle du Palais-Royal avait été -accordée à ce dernier pour son spectacle[255]. Le succès de ce nouvel -ouvrage fut grand, et fit oublier à ce public ému et flatté que Molière, -dans cette même salle, en le bafouant le faisait rire. Madame de Sévigné -écrit le 8 janvier 1674: «On joue jeudi l'opéra qui est un prodige de -beauté; il y a des endroits de la musique qui m'ont fait pleurer; je ne -suis pas seule à ne le pouvoir soutenir; l'âme de madame de la Fayette -en est tout alarmée[256].» Je le crois sans peine: celle qui n'avait -jusqu'alors entendu que les opéras de François Perrin, les maigres -instruments de Gabriel Gilbert et les accompagnements monotones de -Cambert[257] devait être agréablement surprise de cette variété -d'instruments, de ces timbales, de ces trompettes qui produisaient, par -leur éclatante harmonie, des effets inconnus à la musique française. Les -récitatifs du musicien florentin, admirés encore de nos artistes -modernes par la vérité de la déclamation et la justesse de la prosodie, -ne devaient pas médiocrement toucher des femmes d'un goût aussi exercé -que madame de la Fayette et madame de Sévigné. Le beau chÅ“ur des -suivants de Pluton, qui se réjouissent de la venue d'Alceste dans les -enfers, rehaussé par la musique de Lulli, était surtout propre à alarmer -la constitution maladive et vaporeuse de madame de la Fayette: - - Tout mortel doit ici paraître: - On ne peut naître - Que pour mourir. - De cent maux le trépas délivre: - Qui cherche à vivre - Cherche à souffrir. - Chacun vient ici-bas prendre place; - Sans cesse on y passe, - Jamais on n'en sort. - Est-on sage - De fuir ce passage? - C'est un orage - Qui mène au port. - . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . - Plaintes, cris, larmes, - Tout est sans armes - Contre la mort. - Chacun vient ici-bas prendre place; - Sans cesse on y passe, - Jamais on n'en sort[258]. - - [254] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 novembre 1673), t. III, p. 231, - édit. G.; t. III, p. 146, édit. M.--Vie de QUINAULT, dans les - _Å’uvres de_ QUINAULT, édit. 1715, p. 34. - - [255] Le premier opéra de ces deux auteurs, joué dans cette - salle, fut _Cadmus et Hermione_, représenté le 17 avril 1673; - mais cette pièce avait déjà été jouée au jeu de paume du Bel-Air. - Conférez _Vie de Quinault_, dans les _Å’uvres de_ QUINAULT, édit. - 1715, in-12. - - [256] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 janvier 1674), t. III, p. 299, édit. - G.; t. III, p. 283, édit. M (Corrigez la note dans les deux - édit.). - - [257] DE BEAUCHAMPS, _Recherches sur les théâtres de France_, t. - III, p. 202-207. - - [258] QUINAULT, _Alceste_, tragédie, acte III, scène 3, t. IV, p. - 182 du _Théâtre de_ M. QUINAULT, 1715, in-12. - -Cependant l'impulsion donnée par la faveur de Louis XIV au théâtre de -l'Opéra, décoré du nom d'Académie, ne profita bien qu'à la musique et à -la danse. La France resta toujours inférieure à l'Italie sous le rapport -des machines et des décorations comme sous celui du chant et de la -poésie. Les plus belles pièces de Quinault ne sont pas comparables aux -plus médiocres de Métastase; et néanmoins aucun de nos poëtes, depuis -Louis XIV, n'a réussi mieux que Quinault dans ce genre de composition. -Mais l'Opéra français devint, dès son début au Palais-Royal, supérieur -dans la musique instrumentale. Le poëme, les danses, les ballets -n'excitaient qu'un plaisir secondaire en comparaison des belles -symphonies que Lulli composait; ses opéras ressemblaient à des concerts. -C'est ce dont se plaint amèrement la Bruyère, ce grand peintre de la -société française dans le grand siècle[259]. Les imitateurs du Florentin -profitèrent du goût régnant pour composer des opéras courts, presque -sans récitatifs, tout en symphonies et qui pouvaient se passer des -prestiges du théâtre. Un musicien nommé Molière (qui n'avait rien de -commun que le nom avec le grand comique) paraît avoir particulièrement -réussi dans ces opéras-concerts, dont l'abbé Tallemant composait les -paroles et qu'il faisait chanter chez lui et dans des fêtes -particulières[260]. Le 5 février (jour anniversaire de sa naissance), -madame de Sévigné écrit à sa fille: «Je m'en vais à un petit opéra de -Molière, beau-père d'Itier[261], qui se chante chez Pelissari; c'est une -musique très-parfaite. M. le Prince, M. le Duc et madame la Duchesse y -seront.» - - [259] LA BRUYÈRE, _Caractères_, ch. I, no XLVII, p. 165. - - [260] B. DE BEAUCHAMPS, _Recherches sur les théâtres de France_, - t. III, p. 178.--PAVILLON (lettre à mademoiselle Itier), - _Å’uvres_, édit. 1750, in-12, p. 96. - - [261] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 février 1674), t. III, p. 335, édit. - M.; t. III, p. 233, édit. M. - -Pelissari était un riche financier, ami de Gourville et de -d'Hervart[262]. Madame de Sévigné l'avait connu chez Fouquet au temps de -la Fronde, et avec lui, comme avec Jeannin de Castille, elle était -restée liée. Déjà les plus grands personnages de ce temps aimaient à se -réunir chez ces riches roturiers, qui acquirent dans le siècle suivant -une influence toujours croissante. Le jeu, la bonne chère faisaient -éprouver à tous ces hommes de la cour des plaisirs plus vifs que ceux -qu'ils devaient à la magnificence du monarque, parce que les plus élevés -parvenaient, par la familiarité même de leur excessive politesse, à -faire régner dans ces cercles, honorés par leur présence, tout le charme -d'une parfaite égalité sans rien perdre des avantages que leur donnait -la supériorité de leur rang et de leur naissance; et depuis lors ce fut -là le triomphe du savoir-vivre et du suprême bon ton. Ainsi nous voyons -madame de Sévigné, vivement pressée de se rendre à une invitation de la -duchesse de Chaulnes avec les cardinaux de Retz et de Bouillon, préférer -un souper chez Gourville[263], où elle devait se réunir avec toute sa -société, M. de la Rochefoucauld, madame de la Fayette, M. le Duc, le -comte de Briord[264], son aide de camp, madame de Thianges, madame de -Coulanges, Corbinelli. Madame de Sévigné ne pouvait être attirée chez -Pelissari que les jours de concerts et de grandes réunions. La société -de madame Pelissari était toute différente de la sienne. Celle-ci -recevait beaucoup d'hommes de lettres, mais c'étaient précisément ceux -qui régnaient alors à l'Académie et qui n'avaient aucun succès à l'hôtel -de la Rochefoucauld. Pavillon était le Voiture de ce _pastiche_ de -l'hôtel de Rambouillet[265]. Le jour que madame de Sévigné se rendit -chez madame Pelissari pour entendre l'opéra de Molière, elle dut y -trouver Cotin, qui récita peu après, en séance publique, des vers à la -louange du roi; Gilles Boileau[266], l'ami de Cotin et l'ennemi de -Despréaux, son frère; puis Furetière, Charpentier, l'abbé Tallemant, -Perrault, le vieux Bois-Robert, Quinault, Regnier, Desmarais, Benserade -et d'autres moins connus. C'étaient alors les coryphées de l'Académie -française, peuplée en majeure partie de grands seigneurs, loués par -leurs confrères en vers et en prose. Ceux-ci formaient une ligue en -faveur des médiocrités intrigantes; ils exaltaient le siècle présent, et -dépréciaient tous les siècles qui l'avaient précédé. Leur règne allait -cesser. A la vérité Despréaux et la Fontaine devaient attendre dix ans -encore leur admission à l'Académie; mais déjà depuis deux ou trois ans -l'ennemi avait commencé à pénétrer dans la place. Bossuet avait été reçu -de l'Académie en 1671, Racine et Fléchier en 1673, le savant Huet, qui -écrivait des poëmes charmants dans la langue de Virgile, en 1674. -Benserade, sans beaucoup d'avantages pour l'illustre compagnie, allait y -remplacer Chapelain. Madame de Sévigné ne manque pas de donner à madame -de Grignan des nouvelles de ce dernier, si connu d'elle et de toute sa -famille: «M. Chapelain se meurt; il a une manière d'apoplexie qui -l'empêche de parler; il se confesse en serrant la main; il est dans sa -chaise comme une statue: ainsi Dieu confond l'orgueil des philosophes. -Adieu, ma bonne[267].» - - [262] DE GOURVILLE, _Mémoires_ (1657), collect. de Petitot, t. - LII, p. 317-341. - - [263] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 février 1674), t. III, p. 335, édit. - G.; t. III, p. 233, édit. M.--PAVILLON, _Å’uvres_, édit. 1750, t. - I, p. LXXVIII, Remarques sur Briord. - - [264] Voyez _Lettres de_ LOUIS XIV au comte de Briord, la Haye, - 1726, pet. in-12, 209 pag.; pièces justificatives, 50 pag. - - [265] PAVILLON, _Å’uvres_, édit. 1750, t. I, p. 154. Conférez t. - I, p. 146, 148, 152, 157, 165, et t. II, p. 202, 205, 284. - - [266] D'OLIVET, _Histoire de l'Académie françoise_, édit. in-4º, - 1729, t. II, p. 158. - -On est étonné du peu d'affection que manifeste en cette circonstance -madame de Sévigné pour l'ancien précepteur des MM. de la Trousse, ses -parents; pour celui qui, avec Ménage, lui avait donné à elle-même des -leçons dont elle avait si bien profité. Mais Chapelain, qui avait été -une des grandes notabilités littéraires chez la marquise de Sablé[268], -dans les réunions hebdomadaires de mademoiselle de Scudéry et à l'hôtel -de Rambouillet, où Arnauld d'Andilly l'avait introduit[269], où ses -liaisons avec les solitaires de Port-Royal lui donnaient de -l'importance; cet auteur tant prôné, si magnifiquement récompensé par -les ducs de Longueville et de Montausier; ce juge souverain en matière -de goût, selon Balzac[270], était devenu ridicule par la publication de -son grand poëme et par son avarice[271]. On convenait que Boileau -Despréaux, pour répondre aux reproches que lui adressait le spirituel de -Coupeauville[272] d'avoir si maltraité le chantre malencontreux de la -célèbre Pucelle, avait eu raison de dire: «Mais je n'ai été que le -secrétaire du public; je ne suis coupable que d'avoir dit en vers ce que -tout le monde dit en prose[273].» Madame de Sévigné fut tout étonnée de -voir le satirique «s'attendrir pour le pauvre Chapelain,» et elle lui -pardonnait de s'être montré si cruel en vers, puisqu'il était si tendre -en prose[274]. Elle admirait plus que personne le talent de Despréaux, -et recherchait les réunions ou il faisait des lectures de son _Art -poétique_, qui devait bientôt paraître et faire époque dans la -littérature française. - - [267] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 novembre 1673), t. III, p. 223, - édit. G.; t. III, p. 139, édit. M.--Chapelain ne mourut que - plusieurs mois après cette lettre, le 22 février 1674. - - [268] TALLEMANT DES RÉAUX, _Historiettes_, t. II, p. 399, 416, - édit. in-8º; t. IV, p. 152, 170, édit. in-12.--D'OLIVET, - _Histoire de l'Académie françoise_, édit. 1729, in-4º, t. II, p. - 124. - - [269] SAINTE-BEUVE, _Port-Royal_, t. III, p. 470. - - [270] _Vie de Costar_, t. VI, p. 263 des _Historiettes_ de TALLEMANT - DES RÉAUX, et _ibid._, p. 264 et 265. Lettres autographes d'Arnauld - d'Andilly et de Chapelain. - - [271] D'OLIVET, _Histoire de l'Académie françoise_, édit. in-4º, - t. II, p. 128. - - [272] CLAUDE DUVAL DE COUPEAUVILLE, abbé de la Victoire, mort en - 1676. Conférez sur ce personnage SÉVIGNÉ, _Lettres_ (27 février - 1671), éd. G.; t. I, p. 265, édit. M. (M. M. a corrigé sa note - ailleurs.)--TALLEMANT DES RÉAUX, _Historiettes_, t. II, p. 303-332 - (et la note 726 à la page 330), édit. in-8º; t. IV, p. 87, 88, et la - note 1.--_Ménagiana_, t. II, p. 1; t. III, p. 79. - - [273] _Å’uvres de_ BOILEAU DESPRÉAUX, édit. de Saint-Marc, 1747, - t. I, p. 154. Note sur le vers 203 de la satire IX. - - [274] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (15 décembre 1673), t. III, p. 264, - édit. G.; t. III, p. 173, édit. M. - -Le 15 décembre (1673), elle écrit: «Je dînai hier avec M. le Duc, M. de -la Rochefoucauld, madame de Thianges, madame de la Fayette, madame de -Coulanges, l'abbé Têtu, M. de Marsillac et Guilleragues, chez Gourville. -Vous y fûtes célébrée et souhaitée; et puis on écouta la _Poétique_ de -Despréaux, qui est un chef-d'Å“uvre[275].» - - [275] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (15 décembre 1673), t. III, p. 262, - édit. G.; t. III, p. 171, édit. M. - -Elle n'entendit cette fois qu'une portion du poëme; car, un mois après, -elle écrit encore: «De Pomponne m'a priée de dîner demain avec lui et -Despréaux, qui doit lire sa _Poétique_.» Le surlendemain, elle commence -ainsi une autre lettre: «J'allai donc dîner samedi chez M. de Pomponne, -comme je vous avais dit; et puis (on dînait alors à midi), jusqu'à cinq -heures, il fut enchanté, enlevé, transporté de la perfection des vers de -la _Poétique_ de Despréaux. D'Hacqueville y était. Nous parlâmes deux ou -trois fois du plaisir que j'aurais de vous la voir entendre[276].» - - [276] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 et 15 janvier 1674), t. III, p. 307, - édit. G.; t. III, p. 209, édit. M. - -J'ai dit que madame de Sévigné entendit la lecture de l'_Art poétique_ -en entier. En effet, ce poëme était achevé, puisque Boileau l'inséra -dans la première édition de ses Å“uvres, dont il devait bientôt faire -commencer l'impression et qui parut six mois après la date de la lettre -de madame de Sévigné. Il y a cependant des vers, dans ce poëme, que -l'auteur ne composa qu'après la lecture qu'il en avait faite chez M. de -Pomponne: ce sont ceux où la conquête de la Franche-Comté est célébrée. -Cette conquête ne fut commencée que six semaines après cette lecture et -terminée seulement cinq jours après l'impression des _Å’uvres diverses -du sieur D***_. [Despréaux]. - -Condé, qui, lorsqu'il s'était révolté, avait servi et commandé chez les -Espagnols, connaissait leurs hommes d'État et leurs guerriers; il lui -fut donc facile de préparer la seconde conquête de la _comté de -Bourgogne_[277]. Rentrée, par le traité d'Aix-la-Chapelle, sous la -domination espagnole, cette province était mécontente des dons gratuits -et des subsides que l'Espagne avait exigés d'elle pour le rétablissement -des fortifications détruites par la France et pour l'entretien des -garnisons que la guerre forçait d'y placer. Mais cette fois aussi, mieux -fortifiée, plus garnie de troupes et préparée depuis longtemps pour -l'état de guerre, on ne pouvait plus la surprendre; et la conquérir -était devenu plus difficile. Louis XIV empêcha très-habilement les -Suisses, qui craignaient de devenir les voisins de la France, de se -joindre aux Espagnols, en offrant au roi d'Espagne de déclarer la -neutralité de la Franche-Comté. Il s'y refusa, quoique sollicité par les -Suisses, qui s'étaient joints à Louis pour cette négociation. Dès lors -l'état de guerre qui existait entre l'Espagne et la France légitima -l'attaque de la Franche-Comté, et les Suisses n'eurent aucune raison -valable pour s'y opposer. Gourville, l'homme de Condé, Bouchu, -l'intendant de la Bourgogne, le marquis de Vaubrun préparèrent les -succès de cette attaque par leurs secrètes négociations avec le prince -d'Aremberg, le marquis de Listenay et don Guignones[278]. Le maréchal -de Navailles commença l'invasion; il prit Gray en trois jours, le 1er -mars; Vesoul, le 10[279]. Le siége de Besançon, fait par le roi en -personne, fut pénible: cette place ne se rendit qu'après huit jours de -tranchée, le 15 mai; et la citadelle, le 22. Dôle ouvrit ses portes le 6 -juin, après sept jours de tranchée; et la Feuillade entra dans Salins le -22 juin, après un siége de sept jours. Mais la conquête de la -Franche-Comté ne fut complétée que le 5 juillet, lorsque le marquis de -Renel (ami et allié de Bussy) eut pris Lure et Fauconier[280]. - - [277] Voyez la 3e partie de ces _Mémoires_, p. 82, ch. V. - - [278] GRIFFET, _Recueil de lettres pour servir d'éclaircissements - à l'histoire militaire de Louis XIV_, 1760, in-12, t. II, p. 262 - et 270. Depuis le 7 janvier 1674 jusqu'au 11 mars, toutes ces - lettres sont à tort datées de 1673; c'est 1674 qu'il faut lire. - Ces fautes ne sont pas corrigées dans la table. - - [279] _Mémoires du duc_ DE NAVAILLES _et_ DE LA VALETTE, 1702, - in-12, p. 285.--DU LONDEL, _Fastes des rois_, 1697, in-8º, p. - 213, 214. - - [280] GRIFFET, _Recueil de lettres pour servir à - l'éclaircissement de l'histoire militaire de Louis XIV_, t. II, - p. 320. - -Comme le volume des Å“uvres diverses de Despréaux ne fut achevé -d'imprimer que le 10 juillet, et qu'après les vers où il célèbre la -conquête de la Franche-Comté près des deux tiers de son volume étaient à -imprimer, et que le privilége du roi est daté du 12 juin, il en résulte -que ce fut après avoir livré son manuscrit à l'imprimeur, c'est-à -dire -après le 22 juin, et sur les épreuves mêmes de son ouvrage, que Boileau, -sans craindre qu'on lui révoquât son privilége, ajouta les vers -suivants, adressés, comme ceux qui les précèdent, aux auteurs qui -voudront célébrer les victoires de Louis XIV: - - Mais tandis que je parle une gloire nouvelle - Vers ce vainqueur rapide aux Alpes vous appelle. - Déjà Dôle et Salins sous le joug ont ployé; - Besançon fume encor sur son roc foudroyé. - -Remarquons que ce fut au détriment du poëme que ces quatre vers furent -intercalés. Les vers qui les suivent étaient, avant cette intercalation, -à la suite de ceux sur le passage du Rhin et de la conquête de la -Hollande, et s'appliquaient mieux à ce passage et à cette conquête qu'au -siége de Besançon et de Salins. Quel auteur, dit le poëte, - - Chantera le Batave, éperdu dans l'orage, - Soi-même se noyant pour sortir du naufrage; - Dira les bataillons sous Mastricht enterrés, - Dans ces affreux assauts du soleil éclairés? - . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . - Où sont ces grands guerriers dont les fatales ligues - Devaient à ce torrent apporter tant de digues? - Est-ce encore en fuyant qu'ils pensent l'arrêter - Fiers du honteux honneur d'avoir su l'éviter[281]. - - [281] _Å’uvres diverses_ du sieur D***, avec le _Traité du - sublime_ de Longin; Paris, chez Denis Thierry, 1674, in-4º, p. - 140 et 141. (Au dernier feuillet: «Achevé d'imprimer pour la - première fois le 10 juillet 1674).» - -Quand Despréaux écrivit ces vers, on était à la fin de l'année 1673. Le -Rhin avait été passé le 12 juin 1672, et Maestricht s'était rendu au roi -le 29 juin 1673. Ces exploits, quoique récents, étaient déjà anciens; -ils avaient fatigué les muses adulatrices, et ces vers, au moment de -leur publication, formaient un anachronisme. Louis XIV, dès la fin -d'octobre de l'année précédente, pour mieux attaquer l'Espagne, avait -commencé à retirer ses troupes de la Hollande: le _Batave éperdu_, au -lieu de fuir, rentrait dans ses foyers. Les forces qui avaient envahi la -république étaient postées sur le haut Rhin; et Bonne, mal fortifiée, -avait capitulé le 12 novembre 1673, après huit jours de siége. La -conquête de la Franche-Comté, célébrée par le poëte avant même d'être -achevée, avait pour les lecteurs le mérite si grand de la nouveauté; -mais les vers qui suivaient, depuis l'évacuation des places conquises -sur la Hollande, n'étaient plus d'accord avec l'histoire. Le _Batave_, -ligué avec toute l'Europe, après avoir fait rebrousser le torrent -dévastateur, espérait l'anéantir ou lui imposer des digues qu'il ne -pourrait franchir: il ne parvint alors qu'à en détourner le cours. -Condé, à la tête d'une poignée de troupes, soutint, dans les plaines des -Pays-Bas, le choc des puissances armées; Luxembourg, son disciple, leur -ferma les passages de la Suisse; Turenne, ceux de l'Alsace, et il les -rejeta au delà du Rhin[282]. Louis XIV, couvert par l'habileté de ses -grands capitaines, put, en achevant la conquête de la Franche-Comté, -compléter ainsi le sol de la France, depuis maintenu par la Providence -dans son intégrité, malgré soixante ans de délire révolutionnaire et -d'usurpations insensées[283]. - - [282] DESORMEAUX, _Histoire de Louis, prince de Condé_, 1769, - in-12, p. 380.--RAMSAY, _Histoire du vicomte de Turenne_, 1773, - in-12, t. II, p. 240 à 304.--DESCHAMPS, _Dernières campagnes de - M. de Turenne_, dans l'_Histoire du vicomte de Turenne_, t. III, - p. 306-406--PELLISSON, _Histoire de Louis XIV_, Paris, 1749, - in-12, t. III, p. 227-228. - - [283] LOUIS XIV, _Å’uvres_, _fragment sur la conquête de la - Franche-Comté_.--Et le général GRIMOARD, _Précis sur la conquête - de la Franche-Comté_, dans les _Å’uvres de_ LOUIS XIV, t. III, p. - 453 et 473.--_Recueil de lettres pour servir d'éclaircissement à - l'histoire militaire de Louis XIV_, 1760, in-12, t. II, p. 273, - 286. - - - - -CHAPITRE VII. - -1674-1675. - - M. et madame de Grignan viennent à Paris.--M. de Grignan retourne - en Provence.--Madame de Grignan reste avec madame de Sévigné - pendant quinze mois.--Correspondance de madame de Sévigné avec - Guitaud et avec Bussy.--Bussy obtient la permission de venir à - Paris, et vit pendant six mois dans la société de madame de Sévigné - et de madame de Grignan.--Ouverture de l'assemblée des communautés - de la Provence le 3 novembre.--L'évêque de Toulouse forme - opposition à M. de Grignan.--Grignan est soutenu par Guitaud, - gouverneur des îles Sainte-Marguerite.--Correspondance de Bussy et - de madame de Sévigné.--Détails sur la femme et les enfants de - Bussy.--Sur l'aîné de ses fils, Nicolas, marquis de Bussy.--Sur - Marie-Thérèse de Bussy, marquise de Montalaire.--Sur - Michel-Celse-Roger de Bussy, évêque de Luçon.--Sur Louise de - Rouville de Clinchamps, seconde femme du comte de - Bussy-Rabutin.--Sur Diane de Rabutin, chanoinesse.--Sur - Louise-Françoise de Bussy.--Sur le mariage de celle-ci avec Gilbert - de Langheac, marquis de Coligny.--Coligny est tué.--Sa veuve se - remarie.--Elle ne prend pas le nom de son nouveau mari, et se fait - nommer comtesse de Dalet.--Son fils, le comte de Langheac, meurt - sans postérité mâle. - - -Ce fut dans cette belliqueuse année, et lorsque la France était assiégée -par cette multitude d'ennemis que lui avaient faits l'ambition et la -despotique arrogance de son monarque, que madame de Sévigné put goûter, -plus complétement qu'elle ne l'avait fait depuis longtemps, les douceurs -de l'amour maternel et celles de l'amitié. Elle en éprouvait le besoin -pour se consoler de l'ennui et de la fatigue qu'entraînent avec eux les -plaisirs du monde, les liaisons passagères de la société et les -intrigues de la cour. - -Elle était enfin parvenue à obtenir un congé pour M. de Grignan[284]; il -arriva à Lyon avec sa femme au commencement de février[285] et à Paris -vers le 15 du même mois (1674). - - [284] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 janvier 1674), t. III, p. 315, édit. - G.; t. III, p. 217, édit. M. - - [285] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 février 1674), t. III, p. 336, édit. - G.; t. III, p. 235, édit. M. - -Le comte de Grignan retourna au mois de mai suivant en Provence[286], -mais madame de Grignan ne se sépara de sa mère qu'un an après: leur -commerce de lettres fut donc interrompu pendant quinze mois entiers. -Dans cet intervalle de temps, madame de Sévigné entretint une -correspondance active avec son cousin Bussy, le comte de Guitaud et M. -de Grignan. Elle n'eut pas non plus, durant toute cette année et les six -premiers mois de l'année suivante, besoin d'écrire à celui qu'elle -nommait son _bon cardinal_. Retz résida pendant tout ce temps à Paris, -passant de longues heures avec madame de Sévigné et avec sa fille[287], -dont il préférait la société à toutes les autres. De son côté, madame de -Sévigné trouvait qu'il était l'homme de France dont la conversation -était la plus agréable, l'homme le plus charmant qu'on pût voir; et ce -qui contribuait surtout à le lui faire trouver tel, c'est qu'il semblait -partager son admiration pour madame de Grignan et sympathiser à ses -faiblesses maternelles[288]. Sévigné était à l'armée, mais il venait par -intervalle se réunir à sa mère et à sa sÅ“ur et jouir avec elles des -plaisirs de la cour[289]. Le petit-cousin de Coulanges et Corbinelli _le -fidèle Achate_, l'officieux d'Hacqueville étaient aussi alors à Paris; -et Gourville et Guilleragues, et les hommes de lettres qui fréquentaient -les hôtels des la Rochefoucauld et des Condé, et toute la brillante -jeunesse de ces sociétés montraient d'autant plus d'empressement encore -à se rapprocher de madame de Sévigné qu'ils étaient certains de -rencontrer toujours près d'elle la belle comtesse de Grignan, la reine -de la Provence, si longtemps regrettée, si ardemment attendue. - - [286] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (22 mai 1674), t. III, p. 341, édit. G.; - t. III, p. 237, édit. M.; t. III, p. 19 et 20 de l'édit. de 1754. - - [287] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (27 mai et 15 juin 1674.), t. III, p. - 393-409, édit. G.; t. III, p. 237, édit. M.--_Ibid._ (25 mai et - 19 juin 1675), t. III, p. 386, 391 et 422, édit. G.; t. III, p. - 267, 272, 299, édit. M.--_Suite des Mémoires de_ BUSSY, ms. - (lettre à madame de Grignan, datée du 12 mai). C'est la même que - celle qui est datée du 10 mai dans les édit., t. III, p. 386. - - [288] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (15 octobre 1674), t. III, p. 361, édit. - G.; t. III, p. 248 (27 mai 1675), p. 304, édit. M. - - [289] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (2 février 1674), t. III, p. 333, édit. - G.; t. III, p. 212, édit. M.--_Ibid._ (22 mai 1674), t. III, p. - 238, édit. M.; t. III, p. 343, édit. G.; t. III, p. 275, édit. - M.--_Ibid._ (5 février 1674), t. III, p. 337, édit. G.; t. III, - p. 235, édit. M. - -Il semble que rien ne manquait au bonheur de madame de Sévigné; mais -elle était arrivée à un âge ou les joies les plus vives sont amorties -par tout ce que l'existence humaine a de triste et de sérieux. Elle -n'avait que quarante-huit ans; et aux souhaits que, selon l'usage, sa -fille lui exprimait au premier jour de l'an (1674) elle répondit[290]: - -«Vous me dites mille douceurs sur le commencement de l'année: rien ne -peut me flatter davantage; vous m'êtes toutes choses, et je ne suis -appliquée qu'à faire que tout le monde ne voie pas toujours à quel point -cela est vrai. J'ai passé le commencement de l'année assez brutalement; -je ne vous ai dit qu'un pauvre petit mot; mais comptez, mon enfant, que -cette année et toutes celles de ma vie sont à vous: c'est un tissu, -c'est une vie tout entière qui vous est dévouée jusqu'au dernier soupir. -Vos moralités sont admirables; il est vrai que le temps passe partout, -et passe vite. Vous criez après lui, parce qu'il vous emporte quelque -chose de votre belle jeunesse; mais il vous en reste beaucoup. Pour moi, -je le vois courir avec horreur, et m'apporter en passant l'affreuse -vieillesse, les incommodités et enfin la mort. Voilà de quelle couleur -sont les réflexions d'une personne de mon âge; priez Dieu, ma fille, -qu'il m'en fasse tirer la conclusion que le christianisme nous -enseigne.» - - [290] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 janvier 1674), t. III, p. 297, édit. - G.; t. III, p. 201, édit. M. - -Quoique madame de Grignan, pour sa propre tranquillité, blessât souvent -le cÅ“ur de madame de Sévigné en tâchant de renfermer dans de justes -bornes les soins et les inquiétudes maternelles, pour elle gênantes et -importunes, cependant il est probable qu'elle ne fît jamais de bien -ferventes prières pour la guérir entièrement de cette tendance -passionnée et pour la lui faire reporter vers Dieu, comme le -christianisme le lui ordonnait; ou si elle fit de telles prières, elles -eurent bien peu d'efficacité: nous en avons la preuve dans la seule -lettre qui soit restée de madame de Sévigné à sa fille pendant le séjour -que celle-ci fit auprès d'elle[291]. Voici quelle fut l'occasion de -cette lettre: - -Madame de Grignan, aussitôt son arrivée à Paris, devint grosse, fit une -fausse couche, et mit au monde au bout de sept mois un enfant qui ne -naquit pas viable[292]. Dans les deux derniers mois qui précédèrent cet -accouchement, madame de Grignan fut souvent souffrante et langoureuse, -et madame de Sévigné, moins que jamais, ne pouvait être disposée à la -quitter d'un seul instant. Cependant le _Bien bon_, qui suivait partout -madame de Sévigné, s'en était séparé pour se transporter à Livry, où il -se trouvait à la fin de mai avec sa société, composée de plusieurs de -ses parents et de ses amis. Madame de Grignan, que le monde et les -affaires retenaient à Paris, sachant bien que sa mère ne restait en -ville qu'à cause d'elle, la pressait toujours d'aller à Livry, comme -elle avait coutume de faire dans la belle saison. Madame de Sévigné s'y -détermina, et c'est alors qu'elle écrivit à sa fille[293]: - - «De Livry, le 1er juin 1674.» - -«Il faut, ma bonne, que je sois persuadée de votre fonds pour moi, -puisque je vis encore. C'est une chose bien étrange que la tendresse que -j'ai pour vous! Je ne sais si, contre mon dessein, j'en témoigne -beaucoup; mais je sais bien que j'en cache encore davantage. Je ne veux -pas vous dire l'émotion et la joie que m'ont données votre laquais et -votre lettre. J'ai eu même le plaisir de ne point croire que vous -fussiez malade; j'ai été assez heureuse pour croire ce que c'était. Il y -a longtemps que je l'ai dit: quand vous voulez, vous êtes adorable; rien -ne manque à ce que vous faites. J'écris dans le milieu du jardin, comme -vous l'avez imaginé; et les rossignols et les petits oiseaux ont reçu -avec un grand plaisir, mais sans beaucoup de respect, ce que je leur ai -dit de votre part; ils sont situés d'une manière qui leur ôte toute -sorte d'humilité. Je fus hier deux heures toute seule avec les -hamadryades; je leur parlai de vous; elles me contentèrent beaucoup par -leur réponse. Je ne sais si ce pays tout entier est bien content de moi, -car enfin, après avoir joui de toutes ses beautés, je n'ai pu m'empêcher -de dire: - - Mais, quoi que vous ayez, vous n'avez point Caliste; - Et moi je ne vois rien quand je ne la vois pas. - -Cela est si vrai que je repars après dîner avec joie. La bienséance n'a -nulle part à tout ce que je fais; c'est ce qui est cause que les excès -de liberté que vous me donnez me blessent le cÅ“ur. Il y a deux -ressources dans le mien que vous ne sauriez comprendre. Je vous loue -d'avoir gagné vingt pistoles; cette perte a paru légère, étant suivie -d'un grand honneur et d'une bonne collation. J'ai fait vos compliments à -nos oncles et cousins. Ils vous adorent, et sont ravis de la -relation...» - - [291] Conférez la 3e partie de ces _Mémoires_, ch. XVIII, p. 348 - et 349. - - [292] Conférez _Suite des Mémoires du comte_ DE BUSSY-RABUTIN, ms. - autographe de l'Institut, p. 79 verso (lettre du 16 août 1674 à - madame de Sévigné).--BUSSY-RABUTIN, _Lettres_ (16 août 1674), t. I, - p. 127, édit. de 1737, in-12.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (16 août 1673), t. - III, p. 242, édit. M.; t. III, p. 351, édit. G. Dans ces deux - dernières éditions cette lettre est tronquée.--_Lettres inédites de - madame_ DE SÉVIGNÉ, Paris, Klostermann, 1814, in-8º, t. III et IV, - p. 8 et 10.--_Ibid._, Paris, in-12, édit. Bossange et Masson (Paris, - juin et juillet 1674), fausse date, p. 8 et 9.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ - (18 juin et 10 juillet, vraie date), t. III, p. 347 et 348, édit. G. - - [293] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er juin 1674), t. III, p. 343, édit - G.; t. III, p. 239, édit M.--_Lettres de madame_ DE - RABUTIN-CHANTAL (samedi, juin 1674), la Haye, Gosse, 1726, in-12, - t. II, p. 7.--_Ibid._ (à Livry, ce 1er juin 1674), édit. 1726, - sans nom de lieu, dite de Rouen, t. II, p. 23. La date du samedi - de l'édition de la Haye, si on la complétait par l'édition de - Rouen, reporterait cette lettre à l'année 1675, ce qui n'est pas; - il faut mettre: Vendredi 1er juin 1674. - -Il est probable que les oncles et les cousins dont parle ici madame de -Sévigné sont l'abbé de Coulanges, son frère de Chezière, de Coulanges, -sa femme, le comte et la comtesse de Sanzei et madame d'Harouis. - -Le principal motif du voyage de M. et de madame de Grignan à Paris avait -été d'obtenir, du roi et des ministres, des gardes comme lieutenant -général gouverneur et une allocation de fonds pour cette dépense. Mais -tout le crédit de madame de Sévigné, de tous les Grignan et du comte de -Guitaud échoua contre l'opposition de Forbin d'Oppède, évêque de Toulon, -opposition qui fut aussi forte et aussi efficace qu'avait été celle de -Forbin-Janson, évêque de Marseille, alors absent[294]. - - [294] SÉVIGNÉ, _Lettres_, t. III, p. 357, 359, 361 et 362. - -Le comte de Guitaud était plus fortement dévoué aux intérêts de madame -de Sévigné depuis le voyage qu'elle avait fait à Bourbilly[295]. Il est -dans la vie des époques où l'amitié fait plus de progrès en quelques -heures que durant le grand nombre d'années d'une liaison que la -communauté des intérêts, les liens de parenté ou les convenances ont -prolongée sans la renforcer, sans l'affaiblir et sans la rompre. C'est -lorsqu'après des joies inespérées ou des malheurs accablants, une -circonstance fortuite ou les loisirs de la solitude forcent des -personnes ainsi unies selon le monde à se rapprocher, et déterminent -entre elles des explications franches, des confidences intimes, de -longs et sympathiques entretiens où le cÅ“ur se dénude, où l'âme -s'exhale, où rien de nos craintes, de nos projets, de nos espérances, de -nos aversions, de nos préférences, de nos qualités, de nos défauts n'y -est dissimulé. Alors l'estime se fonde sur le respect qu'inspire la -loyauté du caractère; la confiance s'établit, et l'amitié se fortifie -par une tendresse mutuelle que l'on sait être capable de dévouement. Tel -était l'effet qu'avait produit sur le comte et la comtesse de Guitaud le -court séjour de madame de Sévigné. Leur correspondance le prouve[296]. - - [295] Voyez ci-dessus, ch. I, p. 8-17, et dans les précédentes - parties, t. I, p. 195, 198, 203, 365, 429; t. II, p. 35, 295; t. - III, p. 94, 410; t. IV, p. 68, 127, 132. - - [296] SÉVIGNÉ, _Lettres inédites_, 1814, in-8º (lettres de M. le - comte de Guitaud, p. 1 à 110, à la comtesse de Guitaud), p. 111, - 196; éd. 1819, p. 1-110, et p. 111 à 194. - -Le comte de Guitaud avait été nommé gouverneur des îles -Sainte-Marguerite; il avait donc, comme tel, de l'influence en Provence, -et il s'en servait pour soutenir le parti du lieutenant général -gouverneur. Non-seulement son amitié pour madame de Sévigné et pour M. -de Grignan l'y portaient, mais il y était encore excité par un intérêt -personnel. Il était en procès avec un Forbin: il n'en fallait pas tant -pour réveiller dans le cÅ“ur de madame de Sévigné son antipathie contre -les Forbin. Elle les appela toujours _les Fourbins_[297], et le procès -que Forbin avait avec Guitaud et les oppositions de l'évêque de Toulon -étaient pour elle de la _Fourbinerie_[298]. - - [297] _Lettres inédites de madame_ DE SÉVIGNÉ, édit. 1819, in-12, - p. 7.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 avril 1674), t. III, p. 341. - - [298] _Lettres inédites_, édit. 1819, p. 11.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ - (30 juin? 1675), t. III, p. 349, édit. G. Cette lettre est à tort - datée de 1674 dans l'édition des lettres inédites et dans - l'édition de G. de S.-G. - -Le comte de Guitaud avait vu les choses plus froidement: il pensait que -M. de Grignan devait se borner à demander aux états les cinq mille -francs de gratification, et qu'il avait tort d'insister sur l'allocation -des gardes d'honneur. Guitaud croyait, par l'abandon de cette somme, -prévenir l'opposition de l'évêque de Toulon[299]. Cet évêque avait -besoin du comte de Grignan pour une affaire où les Forbin étaient -intéressés et qui ressortissait de l'autorité du lieutenant général -gouverneur. Mais celui-ci résista; et, dans une lettre du 14 octobre -1674, datée de Grignan, il dit à Guitaud: «L'affaire de mes gardes est -une affaire d'honneur; si je la perds, ces messieurs doivent compter que -je ne saurai jamais revenir pour eux. Ce n'est pas les cinq mille -francs[300] qui me tiennent au cÅ“ur, comme vous pouvez croire; car je -les rendrai à la province dans le moment, pourvu qu'il paraisse que j'en -ai été absolument le maître. Je serai encore ici jusqu'à la Toussaint.» - - [299] Confér. la 3e partie de ces _Mémoires_, ch. XVI, p. 307, et - la 4e partie, ch. IX, p. 245. - - [300] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (14 octobre 1674), t. III, p. 357, édit. - de Gault de Saint-Germain. On lit _cent mille francs_, mais c'est - une faute de copiste ou d'imprimeur: il faut lire _cinq mille_. - -L'assemblée des communautés de Provence s'ouvrit le 23 novembre (1674) -par un discours de l'intendant de Rouillé, comte de Meslay, contenant -les éloges ordinaires du roi et de ses victoires. Garidel, l'assesseur, -parla ensuite au nom de M. de Grignan; il demanda le don de cinq cent -mille francs pour le roi, et qu'il fût pourvu au payement des gardes -d'honneur et à une somme de cinq mille francs comme supplément au -traitement de dix-huit mille francs fixé, par les délibérations des -années précédentes, pour le payement des gardes d'honneur[301]. - - [301] _Abrégé des délibérations prises en l'assemblée générale - des communautés_, tenue à Lambesc dans les mois de novembre et - décembre 1674; Aix, Charles David, 1675, in-4º, p. 4 et 13. - -L'évêque de Toulon (Louis Forbin d'Oppède), procureur-joint pour le -clergé, s'opposa au payement des gardes d'honneur et au supplément de -cinq mille francs. Il déclara qu'il protestait d'avance contre toute -délibération qui interviendrait pour accorder une de ces deux sommes. -L'assemblée refusa les gardes d'honneur; elle accorda la somme de cinq -mille francs, non comme supplément de traitement, mais à titre de -gratification et sans tirer à conséquence pour l'avenir[302]. - - [302] _Abrégé des délibérations_, etc., p. 4.--Conférez la 4e - partie de ces _Mémoires_, ch. IX, p. 230. - -Quoique le résultat des délibérations de cette assemblée fût loin de -satisfaire les prétentions que le comte de Grignan avait manifestées -dans sa lettre au comte de Guitaud, cependant il paraît que celui-ci -contribua à faciliter la décision de l'autorité en faveur de M. de -Grignan, dont l'intendant fit l'éloge dans son discours. Nous apprenons -cela par une lettre de madame de Sévigné, écrite pendant la tenue de -l'assemblée des communautés et adressée au comte de Guitaud, alors dans -le château des îles Sainte-Marguerite: «Parlons des merveilles que vous -avez faites en Provence; vous n'avez pensé qu'aux véritables intérêts de -M. et de madame de Grignan. J'ai trouvé fort dure et fort opiniâtre la -vision de M. de Toulon pour les cinq mille francs à l'assemblée. Je -crois que la permission que donne le roi d'opiner sur cette -gratification ôtera l'envie de s'y opposer. M. de Pomponne a fait -régler aussi le _monseigneur_ qu'on doit dire à M. de Grignan[303] en -présence de l'intendant, quand on vient lui rendre compte de -l'assemblée; et comme ce règlement donnera sans doute quelque chagrin à -M. de Rouillé[304], je crois que M. de Pomponne ne l'enverra qu'à la -fin.» - - [303] Conférez la 4e partie de ces _Mémoires_, ch. X, p. 278-280. - - [304] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (novembre 1674), t. III, p. 362, édit. - G. de S.-G. Il y a dans l'édition _M. de Bouilli_. Gault de - Saint-Germ., qui a donné le premier cette lettre d'après - l'autographe, n'a pas bien su la lire. - -Pendant tout le temps du séjour de madame de Grignan à Paris, la -correspondance de Bussy avec madame de Sévigné devint plus active. Bussy -reprit ce ton de galanterie aimable et familière qu'avec elle, dans sa -jeunesse, il ne quittait jamais, et qu'autorisaient l'étroite parenté -qui les unissait et le goût qu'ils avaient l'un pour l'autre. Le séjour -que Bussy faisait à Paris lui avait permis de jouir, pendant l'espace de -six semaines, de la société de madame de Sévigné et de madame de -Grignan. Le souvenir du plaisir que lui avait causé la conversation de -la mère et de la fille se manifeste dans ses lettres, malgré les -retranchements faits, par les éditeurs, de tous les passages inspirés -par une jovialité un peu crue. Scrupule étrange, puisqu'ils ont imprimé -sans aucun changement la réponse de madame de Sévigné, qui, bien loin de -se fâcher de ces gravelures, répond sur le même ton. Bussy avait entendu -dire que sa cousine était tourmentée de vapeurs: il lui écrit que, -d'après un habile médecin qu'il a consulté, son mal ne vient que d'un -excès de sagesse et de vertu; et il lui conseille, afin de vivre -longtemps, de prendre un amant: «Cela vaudra mieux, dit-il, que du vin -émétique.» Il ajoute: «Mon conseil, ma chère cousine, ne saurait vous -paraître intéressé; car si vous aviez besoin de vous mettre dans les -remèdes, étant, comme je suis, à cent lieues de vous, ce ne serait pas -moi qui vous en servirait.» Elle lui répond: «Le conseil que vous me -donnez n'est pas si estimable qu'il l'aurait été du temps de notre belle -jeunesse; peut-être qu'en ce temps-là auriez-vous eu plus de -mérite[305].» - - [305] _Lettres de messire_ ROGER DE RABUTIN, Paris, Delaulne, - 1726, in-12, t. I, p. 117 (Chaseu, ce 16 août 1674), date - conforme dans cette édition au ms. (no 231, in-4º) de la _Suite - des Mémoires_, p. 78 verso. BUSSY prétend, dans ses _Mémoires_, - qu'il avait entendu dire que madame de Sévigné avait failli - mourir d'apoplexie. Celle-ci dément cette nouvelle.--SÉVIGNÉ, - _Lettres_ (16 août et 5 septembre 1674), t. III, p. 350 et 352, - édit G.; t. III, p. 241 et 242, édit. M. - -L'intérêt se joignait au plaisir que Bussy avait à correspondre avec -madame de Sévigné; presque toute sa famille, à Paris, était en quelque -sorte sous la direction ou la protection de sa cousine. Bussy jugeait le -moment favorable pour la faire agir. De tout temps madame de Sévigné -avait été bien avec le prince de Condé: il était au pouvoir de ce prince -de faire cesser l'exil de Bussy, et madame de Sévigné avait, pour la -seconder dans ses sollicitations, le cardinal de Retz et la belle -comtesse de Grignan. - -Le 15 octobre 1674, madame de Sévigné avait écrit à Bussy: «J'ai donné à -dîner à mon cousin votre fils et à la petite chanoinesse de Rabutin, sa -sÅ“ur, que j'aime fort. Leur nom touche mon cÅ“ur, et leur jeune mérite -me réjouit. Je voudrais que le garçon eût une bonne éducation: c'est -trop présumer que d'espérer tout du bon naturel[306]. Ce fils -(Amé-Nicolas de Bussy-Rabutin) était l'aîné des fils de Bussy, mais du -second lit. C'est lui que madame de Sévigné allait voir quand il était -écolier au collége de Clermont[307]. Il eut, à son entrée dans le monde, -le titre de marquis de Bussy. Le roi lui donna la compagnie de cavalerie -dans le régiment de Cibours[308]; ce fut en considération du père que -cette faveur fut accordée au fils. Le comte de Bussy avait raison de -dire que les offres réitérées de service qu'il faisait au roi à l'entrée -de chaque campagne et les lettres qu'il lui écrivait, tant admirées de -madame de Sévigné, ne déplaisaient point et lui seraient un jour -comptées. Il parut à la cour lorsque les causes qui forçaient le roi à -le tenir éloigné eurent disparu. Louis XIV accorda au comte de Bussy une -pension de quatre mille francs, une de deux mille francs pour son fils -aîné[309], et des bénéfices au cadet. Madame de Sévigné n'avait pas en -vain pressenti les défauts d'éducation du jeune Bussy. Quelques années -après elle avertit son père que le jeune homme passait dans le monde -«pour être trop violent et trop avantageux en paroles.» C'étaient -précisément les défauts de son père, qui prit assez mal cet -avertissement. Quoique Bussy désirât qu'avec la raison et l'esprit qui -le distinguaient son fils améliorât son caractère, il ne lui en voulut -pas trop d'avoir mis, comme il le dit, «sur la chaleur des Rabutin une -dose de la férocité des Rouville[310].» Malgré ses défauts, le marquis -de Bussy fut un brave militaire, qui se concilia la faveur du Dauphin -et de ses supérieurs et parcourut sa carrière d'une manière plus -brillante que son cousin le baron de Sévigné. Malgré l'excellente -éducation que celui-ci avait reçue, malgré son esprit, son savoir, sa -bravoure et les puissants amis de sa mère, il fut obligé d'acheter son -grade; du vivant de madame de Sévigné, il renonça à l'état militaire -sans avoir obtenu aucun avancement; puis, marié et veuf, il termina ses -jours dans l'obscurité d'une pieuse solitude[311]. Quand madame de -Sévigné, le comte et la comtesse de Bussy eurent disparu du monde, -Amable de Bussy, s'abandonnant à tous les défauts de son caractère, -força le roi à lui faire subir la même peine qui avait été infligée à -son père: il fut exilé dans ses terres, où il mourut[312]. - - [306] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (15 octobre 1674), t. III, p. 359, édit - G.; t. III, p. 247, édit. M. - - [307] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 avril 1672), t. II, p. 475, édit. - G.; t. II, p. 400, édit. M. - - [308] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 décembre 1677), t. V, p. 464, édit. - G.; t. V, p. 288, édit. M. - - [309] BUSSY, _Lettres_, édit. 1737, in-12 (3 mars 1680), t. IV, - p. 425.--(13 novembre 1688), t. VI, p. 317.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ - (25 février et 3 novembre 1688), t. VIII, p. 156 et 414, édit. G. - - [310] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (4 octobre 1680), t. VII, p. 231, édit. - G.--_Ibid._ (25 février 1686), t. VIII, p. 231, édit. G.; t. VII, - p. 365, édit. M. - - [311] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 février 1690), t. X, p. 232, et tome - I, p. CIX, édit. G.--(5 novembre 1691), t. IX, p. 486, édit. M.; - t. X, p. 423, édit. G.--(10 mai et 7 juillet 1703), t. XI, p. 345 - et 394, édit. M. - - [312] LA BEAUHELLE, _Mélanges_, mss. cités par Monmerqué dans - SÉVIGNÉ, _Lettres_, t. VII, p. 366. - -Sa sÅ“ur, Marie-Thérèse de Bussy-Rabutin, était filleule de madame de -Sévigné; Bussy l'avait fait recevoir chanoinesse au chapitre de -Remiremont; elle était pour lui un correspondant très-habile. Six -semaines avant le dîner dont parle madame de Sévigné dans sa lettre du -14 octobre, Marie-Thérèse avait écrit de Paris à son père pour lui -rendre compte de la sanglante victoire remportée par le prince de Condé -à Senef; elle le fit avec une exactitude de détails qu'auraient enviée -le plus soigneux gazetier et l'écrivain le plus exercé aux narrations -des batailles. Ce fut elle qui annonça à Bussy que Sévigné avait été, -dans ce combat, blessé à la tête, et qu'à cause du grand nombre -d'officiers et de soldats tués on devait convoquer l'arrière-ban[313]. -Marie-Thérèse, en 1677, fut mariée à Louis de Madaillan de Lesparre, -seigneur de Montataire, marquis de Lassay. Bussy eut à se louer de son -gendre, quoique son caractère parût s'accorder peu avec le sien[314]. -Par sa capacité pour les affaires madame de Montataire fut, avant et -depuis son mariage, très-utile à sa mère, particulièrement dans -l'important procès que celle-ci eut à soutenir contre Gabrielle -d'Estrées de Longueval, veuve du maréchal d'Estrées, et Françoise de -Longueval, chanoinesse de Remiremont, pour partager des biens de son -aïeul maternel[315]. - - [313] BUSSY, _Lettres_ (14 août 1674), t. IV, p. 136--_Suite des - Mémoires de_ BUSSY, ms., p. 80. Avant de transcrire dans ses - _Mémoires_ cette lettre tout à fait historique et - très-instructive, Bussy dit: «Deux jours après que j'eus écrit - cette lettre (la lettre à madame de Sévigné du 16 août 1674, - qu'on a mutilée), je reçus celle-ci de ma fille de Rabutin, dame - de Remiremont.» - - [314] BUSSY, _Discours à ses enfants_; 1694, in-12, p. - 441.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (2 juillet 1690), t. IX, p. 389, édit. - M. - - [315] Voyez MONMERQUÉ dans les notes sur Sévigné, t. VI, p. 355; - t. VII, p. 108; et t. VIII, p. 71 et 417, édit. G.; p. 138, édit. - M. (26 juin et 14 novembre 1688).--SAINT-SIMON, _Å’uvres - complètes_, t. X, p. 77.--SAINT-SIMON, _Mém. authentiques_, 1829, - in-8º, t. V, p. 305.--SÉVIGNÉ, _Lettres_, édit. G., t. V, p. 5; - VI, 335; VII, 84; X, 291. L'arrêt du 30 mai et du 31 janvier 1689 - donna gain de cause à la comtesse de Bussy. - -Le jeune frère de madame de Montataire et du marquis de Bussy (Michel -Celse-Roger de Rabutin), qui n'était au temps dont nous parlons âgé que -de six à sept ans, appartient plutôt au dix-huitième siècle qu'au siècle -de Louis XIV. C'est cet homme aimable et spirituel, ami de Voltaire et -de Gresset, renommé comme le _Dieu de la bonne compagnie_ (de cette -époque!), qui fut académicien sans Å“uvre et évêque sans piété. Élevé au -séminaire, il fut peu connu de madame de Sévigné. Bussy apprend à sa -cousine que le roi a donné à ce fils un prieuré de deux mille livres; -qu'il a soutenu sa thèse en Sorbonne avec l'approbation générale et -qu'il a surtout obtenu le suffrage du P. la Chaise[316]. Ce fut ce fils -de Bussy qui, devenu évêque de Luçon, contribua le plus à la publicité -des lettres de madame de Sévigné à sa fille[317]: il devait trouver -place dans ces Mémoires. - - [316] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (3 mars 1690), t. X, p. 237, édit. G.; - t. IX, p. 339, édit. M. - - [317] MONMERQUÉ, _Notice bibliographique des différentes éditions - des Lettres de madame de Sévigné_, dans l'édition de Sévigné, - 1820, in 8º, t. I, p. 23. - -Ces trois enfants de Bussy étaient nés de Louise de Rouville de -Clinchamp, sa seconde femme, qu'il avait épousée en 1650. Louise de -Rouville était peu goûtée de madame de Sévigné, probablement parce -qu'elle montrait peu d'esprit et qu'elle s'occupait uniquement de ses -enfants et des intérêts de sa famille[318]. Madame de Sévigné négligeait -même de répondre aux lettres qu'elle en recevait, ou n'y répondait -qu'indirectement dans les lettres qu'elle adressait à Bussy. Quand une -seule fois elle en agit autrement, c'est pour lui témoigner sa surprise -d'avoir reçu d'elle, en si bons termes, une invitation de s'arrêter -dans son château lorsqu'elle traversait la Bourgogne pour aller en -Provence, et c'est avec ce ton d'assurance et de supériorité d'une femme -de la cour s'adressant à une provinciale: «Est-ce ainsi que vous -écrivez, madame la comtesse? Il y a du Rouville et du Rabutin dans votre -style.» La comtesse de Rabutin ménageait beaucoup madame de Sévigné, à -cause des bontés qu'elle avait pour son fils aîné et du bien qu'elle en -disait alors[319]. Madame de Sévigné a eu le tort de méconnaître le -mérite de la comtesse de Bussy: c'était une épouse dévouée, une -excellente mère et une femme d'une rare capacité pour les affaires; -sollicitant sans cesse pour désarmer les ennemis de son mari, et -attentive à exécuter toutes ses volontés[320]; suivant avec persévérance -de longs et difficiles procès, et sachant les gagner. Bussy lui rendait -justice, et il sait la lui faire rendre par sa cousine. Celle-ci lui -avait écrit qu'elle craignait que la comtesse de Bussy ne se tirât mal -d'une vente considérable de biens qu'elle avait à faire. Bussy répond: - -«La peine que vous avez, ma chère cousine, à croire que madame de Bussy -puisse faire vendre le bien de la maréchale d'Estrées, vient de ce que -vous croyez que celle-ci a plus d'esprit que l'autre; et, en effet, il -en pourrait être quelque chose: elle sait mieux vivre et parler; mais -cela ne paye pas les dettes d'une maison, et madame de Bussy sait mieux -les affaires, parce qu'elle s'y est plus appliquée[321].» - - [318] BUSSY, _Discours à ses enfants_, 1694, Paris, in-12, p. - 240.--Conférez _Mémoires sur Sévigné_, 2e édit., I, 204-205; II, - 351. - - [319] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 juillet 1672), t. III, p. 93 et 94, - édit. G.; t. III, p. 27 et 28, édit. M. - - [320] _Suite des Mémoires de_ BUSSY (ms. de l'Institut), p. 110. - Lettre de Bussy à Pellisson (25 mai 1675). - - [321] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (4 octobre 1680), t. VII, p. 231, édit. - G.; t. VI, p. 478, édit. M. - -Nos lecteurs se rappellent qu'outre les trois enfants de Louise de -Rouville Bussy avait eu trois filles de sa cousine Gabrielle de -Toulongeon[322], qu'il avait épousée le 8 avril 1643 et qu'il perdit -quatre ans après[323]. Cette femme jolie, aimable et spirituelle, -enlevée au monde à la fleur de l'âge, fut vivement regrettée de son mari -et de madame de Sévigné, qui, par cette raison, eut pour ces aînées des -enfants de Bussy une préférence que justifièrent leurs aimables -qualités. Une de ces trois filles, Charlotte, était morte probablement -en bas âge. Il en restait deux, qui, sous tous les rapports, faisaient -honneur à la famille des Rabutin. Nous ne dirons rien de la plus âgée, -Diane de Rabutin: celle-là , de tous les siens, avait «certes choisi la -meilleure part.» Faite pour plaire par son esprit, par l'élégance et la -gentillesse de ses manières, elle s'était consacrée à Dieu; elle était -cette pieuse religieuse de Sainte-Marie de la Visitation[324] dont -madame de Sévigné disait: «Je me hâte de l'aimer beaucoup, afin de -n'être pas obligée de trop la respecter[325].» La plus jeune des filles -de Bussy issues de Gabrielle de Toulongeon était Louise-Françoise, que -nous avons fait connaître à nos lecteurs dans la quatrième partie de ces -Mémoires[326]. Par les qualités de son esprit, par l'amabilité de son -caractère, c'était, de toutes les filles de Bussy, la plus brillante, -celle qui, par les charmes de sa conversation et de son style -épistolaire, ressemblait le plus à madame de Sévigné. Elle a une large -part dans la correspondance de Bussy avec sa cousine; et c'est afin que -tout ce que nous dirons d'elle par la suite soit bien compris des -lecteurs que nous nous sommes livré à ces détails sur tous les -personnages qui composaient la famille de Bussy. On se rappelle comment -Louise-Françoise (qu'on nommait exclusivement mademoiselle de Bussy -parce qu'elle était l'aînée de toutes les filles de Bussy, pouvant être -mariée) faisait tout l'agrément de la maison paternelle. Une passion -funeste, dont nous aurons à considérer les phases sous leur véritable -point de vue, lui acquit, à une certaine époque, une courte, mais -malheureuse célébrité. Le séducteur qui en fit sa victime, dans un -libelle écrit avec l'intention avouée de la diffamer[327] et de la -rendre odieuse, a cependant tracé de Louise-Françoise, alors veuve du -marquis de Coligny, le portrait suivant: «Madame de Coligny est de la -plus belle taille du monde; son air est modeste, doux et majestueux. -Rien ne déplaît de ce qu'elle montre, et tout ce qu'elle cache coûte à -sa beauté. On la respecte quand on la voit, on l'aime dès qu'on la -connaît; et les gens qui ne lui ont pas trouvé l'art de plaire n'avaient -pas de quoi sentir qu'elle plaît sans art.» - - [322] 1re partie des _Mémoires sur madame de Sévigné_, p. 101, - ch. VII; 2e partie, p. 407, et 4e partie, p. 195 et 452. - - [323] BUSSY, _Discours à ses enfants_, p 207.--_Ibid._, - _Mémoires_, édit. d'Amsterdam, 1721, t. I, p. 93 et 125. - - [324] _Nouvelles Lettres du comte_ DE BUSSY, t. V, p. 163. - - [325] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 mai 1671), t. II, p. 73, édit. G. - (24 mai 1672), t. II, p. 75, édit. G., et t. II, p. 61 et 62, - édit. M.--_Ibid._ (24 et 28 janvier 1672), t. II, p. 351 et 359; - t. II, p. 303 et 304.--_Ibid._ (6 août 1675), t. III, p. 488, - édit. G.; t. II. p 352, édit. M. - - [326] Conférez la 4e partie des _Mémoires sur madame_ DE SÉVIGNÉ, - p. 309, ch. IX. Nous avons dit dans cet endroit _la fille aînée - de Bussy_, en parlant de Louise-Françoise, parce qu'elle était - l'aînée de ses autres filles à marier; mais Diane de Rabutin, la - religieuse, était de dix-huit mois plus âgée qu'elle. - - [327] DE LA RIVIÈRE, réponse à Bussy, dans le _Recueil de pièces - fugitives sur des sujets intéressants_, Rotterdam, Bradshaw, - 1743, in-12, page 21. Nous aurons à réformer l'opinion commune - sur la Rivière. - -Nos lecteurs n'ont pas oublié comment le marquis de Coligny, qui s'était -présenté pour épouser Louise-Françoise, fut écarté pour faire place aux -prétentions du comte de Limoges, qui plut encore moins que Coligny à -mademoiselle de Rabutin[328]. Après la mort du jeune comte de Limoges, -Coligny, malgré le refus qu'il avait éprouvé, se remit sur les rangs; et -Bussy, jugeant qu'il ne fallait pas laisser passer le temps opportun -pour marier sa fille (elle avait vingt-huit ans et demi), agréa les -propositions du jeune marquis. Madame de Sévigné eut indirectement -connaissance de cette intention de Bussy, et elle interrogea son cousin -pour savoir ce qui en était; il lui répondit[329]: «L'époux donc, ma -cousine, est presque aussi grand que moi; il a plus de trente ans, l'air -bon, le visage long, le nez aquilin et le plus grand du monde; le teint -un peu plombé, assez de la couleur de celui de Saucourt (chose -considérable[330] en un futur). Il a dix mille livres de rentes sur la -frontière du comté de la Bresse, dans les terres de Cressia, de Coligny, -d'Andelot, de Valfin et de Loysia, desquelles il jouit présentement par -la succession de Joachim de Coligny, frère de sa mère. Le comte de -Dalet, son père, remarié, comme vous savez, avec mademoiselle d'Estaing, -jouit de la terre de Dalet et de celle de Malintras, et après sa mort -elles viennent au futur par une donation que son père et sa mère firent, -dans leur contrat de mariage, de ces deux terres à leur fils aîné: elles -valent encore dix mille livres de rente et plus. Une de ses tantes vient -de lui faire donation d'une terre de trois mille livres de rente après -sa mort. Son intention est de prendre emploi aussitôt qu'il sera marié. -Sa maison de Cressia, qui sera sa demeure, est à deux journées de Chaseu -et à trois de Bussy. J'ai donné à ma fille tout le bien de sa mère dès à -présent, et je ne la fais pas renoncer à ses droits paternels.» - - [328] Conférez la 4e partie de ces _Mémoires_, p. 310.--SÉVIGNÉ, - _Lettres_ (3 avril 1675), t. III, p. 377, édit. G.; t. III, p. - 260, édit. M.--BUSSY-RABUTIN, _Suite de ses Mémoires_, ms. de - l'Institut, p. 114. Cette lettre est datée du 8 avril 1675, et - dans ces Mémoires tout le commencement est supprimé. - - [329] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (lettre de Bussy, 7 avril 1675), t. III, p. - 381, édit. G.; t. III, p. 262, édit. M.--_Suite des Mémoires du - comte_ BUSSY DE RABUTIN, ms. de l'Institut, p. 114. Mais la lettre - est datée de Chaseu, du 12 avril 1675; le commencement manque dans - le ms. comme pour la lettre précédente. Les éditeurs ont peut-être - réuni deux lettres en une seule; cela expliquerait la différence des - dates. - - [330] Le vrai nom est Soyecourt; pour le sens de cette phrase de - Bussy, voyez ces _Mémoires_, I, 244 et 288; II, p. 416. - -Ainsi Bussy avait tout arrangé et tout prévu pour le bonheur de sa fille -chérie: aussi madame de Sévigné, à qui on demanda, par préférence, son -consentement à ce mariage, le donna-t-elle de grand cÅ“ur[331]; et à -Chaseu, le 5 novembre 1675, fut célébré le mariage du marquis de Coligny -de Gilbert de Langheac, comte de Dalet, avec Louise-Françoise de -Rabutin, qui devint ainsi la marquise de Coligny[332]. - - [331] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (9 octobre 1675), t. V, p. 136.--_Ibid._ - (9 octobre 1675), p. 142, édit. G.; t. IV, p. 29, édit. - M.--_Ibid._ (3 août 1679), t. VI, p. 105, édit. G. - - [332] _Lettres choisies de_ M. DE LA RIVIÈRE, 1751; in-12, t. I, - p. 25, note 14. - - -Elle eut un fils dès la première année de son mariage, et les vaniteuses -espérances de Bussy, partagées par madame de Sévigné, parurent ainsi se -réaliser. Ils étaient tous deux flattés de voir le beau nom des Coligny -greffé sur celui des Rabutin. Le petit-fils de Bussy (Marie-Roger) fut -d'abord nommé d'Andelot[333]. Joli de figure, aimable et spirituel, il -fut un objet de tendresse et d'orgueil pour son grand-père, qui, -toujours frivole jusque dans sa vieillesse, dit des vers pour favoriser -les premières amours de cet adolescent avec une jeune et jolie fille de -la maison de Damas[334]. Avant même que Françoise de Rabutin fût -accouchée de d'Andelot[335], Coligny était mort, peu regretté de sa -femme, qu'il avait quittée aussitôt après son mariage, pour se rendre à -l'armée du maréchal de Schomberg, où il fut tué[336]. Sa veuve hérita de -l'usufruit de tous ses biens. Elle aliéna bientôt le beau nom de -Coligny, sans vouloir porter celui que lui imposait un second mariage, -dont nous aurons à raconter les romanesques circonstances. Elle prit par -la suite le nom de son beau-père, avec lequel elle eut un procès, -qu'elle gagna, et se fit appeler comtesse de Dalet[337]. Ce fut sous ce -nom qu'elle publia les Mémoires de son père, décédé. Son fils, qui avait -pris le nom de Coligny-Saligny, le changea pour celui de Langheac, qui -était le nom de famille de son grand-père[338]; et comme il n'eut que -des filles par son mariage avec Jeanne-Palatine de Dio de Montpeyroux, -le nom même de Langheac, qui, quoique moins illustre que celui de -Coligny, rappelait une très-ancienne noblesse, disparut de la postérité -mâle des Bussy. Ainsi le temps se joue de la présomption de ceux qui -s'efforcent d'échapper à son pouvoir[339]! - - [333] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 février 1687), t. VIII, p. 320, - édit. G.; t. VIII, p. 425, édit. M. - - [334] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 janvier 1692), t. X, p 429, édit. - G.--_Ibid._, (2 juillet 1690), t. X, p. 311, édit. G. - - [335] Madame de Grignan à Bussy, dans SÉVIGNÉ, _Lettres_ (15 mars - 1676), t. IV, p. 368, et dans la _Suite des Mémoires de_ BUSSY, - p. 164 verso, ms. de l'Institut. - - [336] Il fut tué devant Condé et enterré dans le chÅ“ur de la - grande église de cette ville. Voyez la lettre de Bussy fils à son - père, en date du 7 juillet 1676, p. 177 verso de la _Suite des - Mém. de_ BUSSY, ms. de l'Institut.--BUSSY, _Lettres_ (8 juillet - 1676, lettre de Schomberg), t. IV, p. 268.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 - juillet 1676), t. V, p. 4, édit. G.; t. IV, p. 367, édit. M. - - [337] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (2 août 1679), t. VI, p. 105, édit. G.; - t. V, p. 417, édit. M.--(31 mai 1690), t. IX, p. 379, édit. M.; - t. X, p. 291, édit. G.--(31 janvier 1692), t. IX, p. 491, édit. - M.; t. X, p. 429, édit. G. - - [338] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 mars et 2 juillet 1690), t. X, p. 236 - et 311, édit. G.--MONMERQUÉ, _Notice sur le comte de - Coligny-Saligny_, dans les Mémoires du comte DE COLIGNY-SALIGNY, - 1841, in-8º, p. XI. - - [339] Marie-Roger, comte de Langheac, petit-fils de Bussy de - Rabutin par madame de Coligny, sa fille, mourut à Avignon en - 1746. Voyez MONMERQUÉ, dans SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 août 1676), t. - IV, p. 414, édit. M., note _b_. - - - - -CHAPITRE VIII. - -1675. - - Tristesse de madame de Sévigné.--Mort de son oncle - Chésières.--Départ de madame de Grignan pour la Provence, et de - Retz pour la Lorraine.--Retz fait faire son portrait pour madame de - Grignan.--Il donne sa démission du cardinalat.--Elle n'est pas - acceptée.--Portrait de Retz par la Rochefoucauld.--Amitié de madame - de Sévigné pour Retz.--Elle se rend chez M. de Caumartin pour - recevoir ses adieux.--Retz veut donner une cassolette d'argent à - madame de Grignan.--Madame de Grignan la refuse.--Douleur - qu'éprouve madame de Sévigné de se séparer de Retz.--Différence du - caractère de madame de Grignan et de celui de madame de - Sévigné.--Madame de Sévigné se décide à quitter Paris pour se - rendre en Bretagne. - - -A la gaieté qu'avaient introduite dans la correspondance de madame de -Sévigné les lettres de Bussy et de Guitaud et au plaisir qu'elle -éprouvait de se trouver réunie avec ceux qui lui étaient chers succéda -l'expression de la tristesse la plus accablante. - -Madame de Sévigné perdit son oncle Chésières[340]; sa fille retourna en -Provence; Retz, son bon cardinal, la quitta pour aller en Lorraine, et -son fils alla rejoindre son régiment. «Je n'ai pas vécu depuis six -semaines, écrivait-elle au comte de Guitaud. L'adieu de ma fille m'a -désolée et celui du cardinal de Retz m'a achevée. Il y a des -circonstances, dans ces deux séparations, qui m'ont assommée[341].» - - [340] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (30 avril et 10 mai 1675), t. III, p. - 383 et 385, édit. G.--_Ibid._ (28 mai 1675), t. III, p. 391 et - 422, édit. G. - - [341] SÉVIGNÉ, _Lettres_, t. III, p. 346, no 370, édit. G. Cette - lettre est déplacée, elle est à tort datée _juin_ 1674; elle doit - être transposée à la page 393, après la lettre no 388, et datée - du 18 juin 1675.--Conférez _Lettres inédites de madame_ DE - SÉVIGNÉ, 1814, p. 8 et 9, où cette lettre ne porte aucune date. - La date fausse commence avec l'édition stéréotype, 1819, in-12, - p. 7. - - -Louis de la Tour-Coulanges, seigneur de Chésières, troisième fils de -l'aïeul maternel[342] de madame de Sévigné, son premier tuteur, mourut -en avril, après une courte maladie de dix jours, lorsqu'il était encore -plein de vie[343]: il fut regretté de Bussy, de madame de Sévigné et des -nombreux amis qu'il s'était faits. - - [342] Ceci rectifie une erreur que nous avons commise, t. I, p. 9 - de ces _Mémoires_. - - [343] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (12 mai 1675), ms. de l'Institut, p. - 118.--(10 mai 1675), t. III, p. 385, édit. G.--(30 avril 1675), - t. III, p. 383, édit. G.; t. III, p. 264 et 266, édit. M. - -Peu après, madame de Grignan partit de Paris; sa mère la conduisit -jusqu'à Fontainebleau. En cette ville, à l'auberge du _Lion d'or_, -qu'elle prit en aversion[344], madame de Sévigné s'en sépara le 24 -mai[345], jour à jamais néfaste pour elle et qu'elle rappelle bien -souvent avec douleur[346]. Elle écrivit alors à Bussy: «Les sentiments -que j'ai pour la _Provençale_, il faut les cacher à la plupart du monde, -parce qu'ils ne sont pas vraisemblables[347];» puis, après sa -séparation, elle se réfugie seule à Livry, et sa correspondance avec -madame de Grignan recommence par ces mots: «Quel jour, ma fille, que -celui qui ouvre l'absence[348]!» et elle soulage, comme de coutume, sa -peine par l'expression de sa vive tendresse. Elle entretient madame de -Grignan du cardinal de Retz, qui alors faisait faire son portrait par un -religieux de Saint-Victor, dans le dessein d'en faire cadeau à la -_Provençale_. - - [344] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (26 juin 1676), t. IV, p. 504, édit. G.; - t. IV, p. 355, édit. M. - - [345] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (16 mai 1675), _suite des Mémoires de_ - BUSSY, ms. de l'Institut, p. 120, t. III, p. 389, édit. G., mal - datée du 14 mai. - - [346] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 mai 1676), ms. de l'Institut; t. IV, - p. 462, édit. G.--(26 août 1675), t. I, p. 5, édit. G.--(7 août - 1675), t. III, p. 506, édit. G. - - [347] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (12 mars 1675), _Suite des Mémoires de_ - BUSSY, ms. de l'Institut, p. 104, t. III, p. 369, édit. G.; t. - III, p. 254, édit. M., datée, dans les deux éditions, du 24 - janvier 1675. Cette date est fausse.--_Ibid._, _Lettres_ (25 mai - 1675), t. III, p. 273, édit. M.; t. III, p. 391, édit. G. - - [348] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (27 mai 1675), t. III, p. 27, édit. M.; - t. III, p. 393, édit. G. (7 août 1675), t. III, p. 506, édit. G.; - t. III, p. 366-7, édit. M. - -Madame de Sévigné, ainsi que je l'ai déjà dit[349], ignorait qu'alors -Retz se préparât à donner un grand exemple au monde. Quand elle connut -sa résolution, son attachement pour lui s'accrut en même raison que son -admiration et ses regrets. Par nature et par habitude, Retz ne pouvait -se passer d'exercer l'activité de son esprit. Les loisirs forcés de sa -retraite de Commercy avaient pesé lourdement sur son existence. Il avait -cherché une distraction à son ennui en écrivant le récit des événements -de la Fronde. C'était retracer l'histoire de sa jeunesse si brillante et -si scandaleuse, alors que le bouillonnement des passions et -l'effervescence de l'imagination marquaient tous ses jours par une -variété de plaisirs, d'agitation et d'intrigues. Le souvenir s'en était -gravé dans sa mémoire en traces ineffaçables; les déposer sur le papier -et les laisser après sa mort était pour lui un besoin; il y trouvait du -charme[350]. Mais il semble que cette tâche fut la dernière -satisfaction qu'il voulut accorder à son orgueil; car lorsqu'il l'eut -terminée il parut comme subitement touché de la grâce et décidé à mener -une vie de religieux et de pénitent. C'est au même temps qu'il -s'apprêtait à quitter Paris pour aller se renfermer dans le monastère de -Saint-Mihiel qu'on apprit qu'il avait écrit au roi pour se démettre de -son cardinalat[351]. Quoi qu'il en puisse être (car à Dieu seul -appartient de sonder jusque dans les plus profonds replis de la -conscience humaine), madame de Sévigné crut à la conversion de Retz; -elle s'alarma des suites qu'elle pourrait avoir. Le 7 juin, elle écrit à -sa fille: «Je vis hier les Villars, dont vous êtes révérée. Nous étions -en solitude aux Tuileries; j'avais dîné chez M. le cardinal, où je -trouvai bien mauvais de ne vous voir pas. J'y causai avec l'abbé de -Saint-Mihiel (dom Hennezon), à qui nous donnons, ce me semble, comme en -dépôt, la personne de Son Éminence. Il me parut un fort honnête homme, -un esprit droit et tout plein de raison, qui a de la passion pour lui, -qui le gouverne même sur sa santé, et l'empêchera de prendre le feu trop -chaud sur la pénitence. Ils partiront mardi, et ce sera encore un jour -douloureux pour moi, quoiqu'il ne puisse être comparé à celui de -Fontainebleau[352].» Personne, parmi les amis des Sévigné, ne craignit -comme elle que Retz ne prit «le feu trop chaud sur la pénitence;» on ne -voulut pas croire à la sincérité de conversion de celui qui, cependant, -avait été élevé par le pieux Vincent de Paul. La Rochefoucauld fit, à -cette occasion, un portrait de Retz qui est un des morceaux les plus -ingénieux, les mieux peints et les mieux écrits qui soient sortis de sa -plume. Sévigné en transmit une copie à madame de Grignan; ce portrait se -termine ainsi: «La retraite que Retz vient de faire est la plus fausse -action de sa vie: c'est un sacrifice qu'il fait à son orgueil sous -prétexte de dévotion; il quitte la cour, où il ne peut s'attacher, et il -s'éloigne du monde, qui s'éloigne de lui[353].» - - [349] _Mémoires touchant la vie et les écrits de madame_ DE - SÉVIGNÉ durant les premières conquêtes de Louis XIV, 3e partie, - p. 112 et 114. - - [350] DUMONT, _Histoire de la ville et des seigneurs de - Commercy_, t. II, p. 166 et 168. - - [351] Lettres de Louis XIV au duc de Pomponne et au cardinal - d'Estrées en date des 3, 19 et 27 juin, 12 juillet, 20 et 23 - septembre et 11 octobre 1675, au duc et au cardinal d'Estrées, à - l'abbé Servien, _Mémoires du cardinal_ DE RETZ, Paris. 1836, - in-8º, p. 612 à 614, tome 1er de la _Collection des Mémoires sur - l'histoire de France_, édit. Michaud et Poujoulat. - - [352] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 juin 1675), t. III, p 410, édit. G.; - t. IV, p. 299, éd. M. - - [353] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 juin 1675), t. III, p. 428, édit. - G.; t. III, p. 304, édit. M. - -Mais s'éloigner du monde quand le monde s'éloigne de nous est déjà un -acte de sagesse auquel bien des sages ne peuvent se résoudre. Et ce qui -montre dans Retz un esprit supérieur, dompté par la religion et élevé -par elle au-dessus des rivalités et des rancunes de parti qui l'avaient -dominé si longtemps, c'est que madame de Sévigné, qui le connaissait et -savait l'apprécier, ne craignit pas de lui communiquer le portrait que -la Rochefoucauld avait tracé de lui, et qu'il en fut satisfait. Dans -cette peinture, qu'il ne devait pas être censé connaître, il ne fit -attention qu'aux traits conformes à la vérité qui lui étaient -favorables, et bien saisis, bien touchés par son satirique -adversaire[354]. - - [354] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (3 juillet 1675), t. III, p. 316, édit. - M.; t. III, p. 443, édit. G. - -Madame de Sévigné ne doutait donc pas que son ami, son parent Retz ne -fût mû par les motifs les plus respectables. Elle écrivait à Bussy, en -lui parlant de ce cher cardinal: «Le monde, par rage de ne pouvoir -mordre sur un aussi beau dessein, dit qu'il en sortira. Hé bien, -envieux, attendez donc qu'il en sorte! et, en attendant, taisez-vous. -Car, de quelque côté qu'on puisse regarder cette action, elle est belle; -et si l'on savait comme moi qu'elle vient purement du désir de faire son -salut et de l'horreur de sa vie passée, on ne cesserait de -l'admirer[355].» - - [355] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (9 octobre 1675), t. IV, p. 142, édit. - G.; t. IV, p. 31, édit. M. - -Lorsque madame de Sévigné écrivait des Rochers ces lignes, Pomponne -avait mandé au cardinal d'Estrées que «le roi ne voulait pas que cet -ambassadeur fît aucune instance auprès du pape pour l'engager à -rétracter le refus qu'il avait fait d'accepter la démission de Retz; et -il lui donnait ordre, au contraire, d'assurer à Sa Sainteté que Sa -Majesté ne pourrait voir qu'avec satisfaction qu'un sujet de ce mérite -fût conservé dans le sacré collége[356].» - - [356] _Lettres de_ POMPONNE au cardinal _d'Estrées_ (en date des - 23 septembre et 11 octobre 1675). Dans les _Mémoires_ DE RAIS, - _Nouvelle Collection des Mémoires pour servir à l'histoire de - France_, 1836, in-8º, p. 614. - -Ainsi Retz resta cardinal, et même le pape lui donna l'ordre de sortir -de sa retraite de Saint-Mihiel. Il alla de nouveau résider à Commercy; -il reprit ses insignes et le train de vie d'un prince de l'Église, mais -non avec le même luxe[357]. Madame de Sévigné en avertit sa fille, et -lui mande qu'elle peut lui écrire avec la liberté permise à un grand -dignitaire ecclésiastique; et même de ne pas s'interdire avec lui -quelques _chamarrures_ qu'elle eût été forcée de supprimer s'il avait -continué à vivre en cénobite[358]. - - [357] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (23 octobre 1675), t. IV, p. 54, édit. - M.; t. IV, p. 165, édit. G. - - [358] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 et 23 octobre; 6 et 13 novembre - 1675), t. IV, p. 35, 54, 74, 75, 86, édit. M.--_Ibid._, t. IV, p. - 146, 169, 192, 205, édit. M. - -Cependant Retz ne donna aucun lieu de croire que la résolution qu'il -avait prise ne fût pas sincère. Il édifia par sa piété, se fit aimer des -pauvres par sa bienfaisance et des riches par sa bonté; sa modération, -sa douceur, l'égalité de son humeur et les charmes de sa conversation -lui firent des amis de tous ceux qui l'approchaient. A Saint-Mihiel et à -Commercy il avait inspiré une telle vénération au peuple que tout le -monde, hommes, femmes et enfants, se mettait à genoux sur son -passage[359]. - - [359] DUMONT, _Histoire de la ville et des seigneurs de - Commercy_, t. II, p. 172. - -Madame de Sévigné se rendit à la maison de campagne de M. de Caumartin -pour faire ses adieux à Retz le 18 juin[360]; et alors elle écrit à sa -fille: - -«Je vous assure, ma très-chère, qu'après l'adieu que je vous fis à -Fontainebleau, et qui ne peut être comparé à nul autre, je n'en pouvais -faire un plus douloureux que celui que je fis hier au cardinal de Retz -chez M. de Caumartin, à quatre lieues d'ici... Madame de Caumartin -(c'est à elle que Retz avait adressé ses Mémoires) arriva de Paris, et, -avec tous les hommes qui étaient restés au logis, elle vint nous trouver -dans le bois. Je voulus m'en retourner à Paris; ils m'arrêtèrent à -coucher sans beaucoup de peine. J'ai mal dormi; le matin, j'ai embrassé -notre cher cardinal avec beaucoup de larmes et sans pouvoir dire un mot -aux autres. Je suis revenue ici, où je ne puis me remettre encore de -cette séparation: elle a trouvé la fontaine assez en train; mais, en -vérité, elle l'aurait rouverte quand elle aurait été fermée.» - - [360] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (mercredi 19 juin 1675), t. III, p. 422, - édit. G.; t. III, p. 299, édit. M.--_Ibid._ (10 juillet 1675), t. - III, p. 325, édit. M. - -Retz voulait faire présent d'une cassolette d'argent à madame de -Grignan, qui, malgré les instances de sa mère, la refusa obstinément, et -mécontenta ainsi par sa hauteur le cardinal et madame de Sévigné[361]. -Et cependant, sans sa fin prématurée, Retz, qui comme cardinal devait -encore être utile à Louis XIV, aurait été le protecteur du jeune marquis -de Grignan, ainsi que, dans le temps de sa grande puissance de factieux, -il l'avait été du jeune marquis de Sévigné, son parent, quand il épousa -Marie de Rabutin-Chantal[362]. Aussi madame de Sévigné écrit-elle à sa -fille précisément à ce sujet: «Vous ne trouverez personne de votre -sentiment, et vous devez vous défier de vous quand vous êtes seule de -votre avis.» - - [361] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (26 juin, 22 août 1675), t. III, p. 431; - t. IV, p. 47, édit. G.; t. III, p. 307 et 421, édit. M.--_Ibid._ - (9 septembre 1675), t. IV, p. 90, édit. G.; t. III, p. 460, édit. - M. - - [362] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 et 13 mai 1680), t. VI, p. 269, - édit. M., et la note.--_Ibid._ (25 août 1680), t. VI, p. 433, - édit. M.; t. VI, p. 489, édit. G., et t. VII, p. 179, édit. G. - -Retz avait bien annoncé à madame de Sévigné son projet de retraite à -Saint-Mihiel et sa démission du cardinalat; mais il lui avait caché les -efforts que le cardinal d'Estrées, ambassadeur de France à Rome, faisait -pour que le pape et le sacré collége ne refusassent point cette -démission. Elle apprit tout cela par d'Hacqueville, et ses inquiétudes -furent d'autant plus vives qu'on lui dit aussi que le roi avait le -dessein de donner ce chapeau si délaissé par Retz à Forbin-Janson[363], -l'évêque de Marseille, qu'elle considérait comme l'ennemi de M. de -Grignan. Aussi sa joie fut grande lorsqu'elle apprit que Retz était, -comme elle dit, _recardinalisé_[364]. - - [363] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 juin 1675), t. III, p. 402, édit. G.; - t. IV, p. 26. - - [364] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (23 octobre 1675), t. IV, p. 54, édit. - M.; t. IV, p. 169, édit. G. - -«D'Hacqueville (écrit-elle à sa fille) m'a fait grand plaisir, cette -dernière fois, de m'ôter la colère que j'avais contre le cardinal -d'Estrées. Il m'apprend que le nôtre (le cardinal de Retz) a été refusé -en plein consistoire, sur sa propre lettre, et qu'après cette dernière -cérémonie il n'a plus rien à craindre; de sorte que le voilà trois fois -cardinal malgré lui, du moins les deux dernières; car pour la première, -s'il m'en souvient, il ne fut pas trop fâché[365]. Écrivez-lui pour vous -moquer de son chagrin. D'Hacqueville en est ravi: je l'en aime. Je -reçois souvent de petits billets de ce cher cardinal; je lui en écris -aussi. Je tiens ce léger commerce mystérieux et très-secret: il m'en est -plus cher.» - - [365] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 octobre 1675), t. IV, p. 150, édit. - G.; t. IV, p. 37 et 38, édit. M. - -Ce qui attache le plus à madame de Sévigné quand on lit ses lettres, ce -qui devait la rendre adorable, c'est moins le brillant de son esprit que -les qualités de son cÅ“ur. On lui pardonne volontiers son amour -extravagant pour sa fille en faveur de sa vivacité, de sa franchise, de -sa constance en amitié. Elle était aussi expansive, aussi affectueuse -que sa fille était froide et réservée. Dans une lettre où madame de -Sévigné se montre toujours plus charmée de sa correspondance avec -madame de Grignan, elle manifeste bien clairement la différence qui -existait entre elles deux et comment l'excès de sa tendresse mettait -obstacle aux jouissances de leur réunion, comment elles ne pouvaient -s'accorder sur la nature des sentiments que l'une et l'autre -ressentaient pour Dieu et pour leurs amis. - -«Vous ne sentez pas, dit-elle, l'agrément de vos lettres; il n'y a rien -qui n'ait un tour surprenant. Nous avons bien compris votre réponse au -capucin: _Mon père, qu'il fait chaud!_ et nous ne trouvons pas que, de -l'humeur dont vous êtes, vous puissiez jamais aller à confesse: comment -parler à cÅ“ur ouvert à des gens inconnus? C'est bien tout ce que vous -pouvez faire à vos meilleurs amis... Je vous remercie, ma fille, de la -peine que vous prenez de vous défendre si bien d'avoir jamais été -oppressée de mon amitié; il n'était pas besoin d'une explication si -obligeante; je crois de votre tendresse pour moi tout ce que vous pouvez -souhaiter que j'en pense: cette persuasion fait le bonheur de ma vie. -Vous expliquez très-bien aussi cette volonté que je ne pouvais deviner, -parce que vous ne vouliez rien; je devais vous connaître; et sur cet -article je ferai encore mieux que je n'ai fait, parce qu'il n'y a qu'à -s'entendre. Quand mon bonheur vous redonnera à moi, croyez, ma bonne, -que vous serez encore plus contente de moi mille fois que vous ne -l'êtes. Plût à Dieu que nous fussions déjà à portée de voir le jour où -nous pourrons nous embrasser[366]!» - - [366] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (26 juin 1675), t. III, p. 433, édit. - G.; t. III, p. 309, édit. M. - -Madame de Grignan, qui n'avait pas, comme sa mère la conscience timorée -d'une janséniste, ne comprenait pas comment madame de Sévigné, à cause -de la tendresse qu'elle lui portait, n'osait s'approcher de la sainte -table, et elle l'avait raillée sur ses scrupules. Madame de Sévigné lui -répond: - -«Vous riez, mon enfant, de la pauvre amitié; vous trouverez qu'on lui -fait trop d'honneur de la prendre pour un empêchement de la dévotion; il -ne lui appartient pas d'être un obstacle au salut. On ne la considère -jamais que par comparaison; mais je crois qu'il suffit qu'elle remplisse -tout le cÅ“ur pour être condamnable; et quoi que ce puisse être qui nous -occupe de cette sorte, c'est plus qu'il n'en faut pour n'être pas en -état de communier. Vous voyez que l'affaire du syndic (la nomination du -marquis de Maillane[367]) m'avait mise hors de combat; enfin, c'est une -pitié que d'être si vive: il faut tâcher de calmer et de posséder un peu -son âme; je n'en serai pas moins à vous, et j'en serai un peu plus à -moi-même. Corbinelli me priait fort d'entrer dans ce sentiment; il est -vrai que son absence me donne une augmentation de chagrin: il m'aime -fort, je l'aime aussi; il m'est bon à tout ce que je veux. Mais il faut -que je sois dénuée de tout pendant mon voyage en Bretagne; j'ai tant de -raisons pour y aller que je ne puis pas y mettre la moindre -incertitude[368].» - - [367] Voyez ci-dessus, ch. II et III de cette 5e partie de ces - _Mémoires_, p. 18 et 36; et DEPPING, _Correspondance - administrative sous le règne de Louis XIV_, in-4º, 1850, p. - 407.--_Lettre_ de l'évêque de Marseille à Colbert, en date du 17 - décembre 1672. - - [368] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (26 juin 1675), t. III, p. 436. - -Pauvre mère! combien ce voyage de Bretagne, qui l'éloignera de sa fille, -lui pèse! Ni ses judicieuses réflexions ni les conseils de Corbinelli -ne lui servent de rien; et elle est encore obligée de demander pardon à -la _philosophie_ de sa fille de lui faire voir tant de faiblesse. «Mais -(ajoute-t-elle), une fois entre mille, ne soyez point fâchée que je me -donne le soulagement de vous dire ce que je souffre si souvent sans en -rien dire à personne. Il est vrai que la Bretagne nous va encore -éloigner; c'est une rage: il semble que nous voulions nous aller jeter -chacune dans la mer, et laisser toute la France entre nous deux. Dieu -nous bénisse[369]!» - - [369] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (3 juillet 1675), t. III, p. 440, édit. - G.; t. III, p. 315, édit. M. - -Elle ne put se résoudre à partir pour la Bretagne sans avoir terminé les -affaires de sa fille[370]. Elle fut aussi fort occupée de son fils. -Sévigné s'ennuyait de ne point obtenir d'avancement; il voulait résigner -son grade de guidon des gendarmes et devenir colonel d'un régiment; il -espérait avoir celui du comte de Sanzei, son parent, tué à l'affaire de -Consabrick[371]. Madame de Sévigné sollicitait cette place pour son -fils. La veuve du comte de Sanzei était Anne-Marie de Coulanges, sÅ“ur -d'Emmanuel de Coulanges et par conséquent la cousine de madame de -Sévigné: il semble donc que ce régiment appartenait à la famille des -Coulanges et des Sévigné. Malgré les sollicitations du vicomte de -Marsilly, que madame de Sévigné nommait son résident auprès de Louvois, -on ne donna point ce régiment à Sévigné, qui fut très-mécontent de ce -refus[372]. Sa mère désirait le marier et l'arracher à ses intrigues -d'amour, qui nuisaient à sa santé et l'empêchaient de s'occuper de son -avancement[373]. - - [370] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (26 juin 1675), t. III, p. 436, édit. - G.; t. III, p. 311, édit. M. - - [371] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19, 28 et 30 août 1675), t. IV, p. 32, - 34, 69, 75, édit. G.--_Ibid._ (4 septembre), p. 77 et 78, édit. - G.--_Ibid._, t. III, p. 396, 402, 408, 426, 447, 449, édit. M. - - [372] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7, 21, 26 août 1675), t. III, p. 494 et - 499; t. IV, p. 24, édit. G.; t. III, p. 360, 419, 426, édit. M. - - [373] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 août 1675), t. III, p. 504, édit. G.; - t. III, p. 125, édit. M. - -Tandis que la cour abandonnait Fontainebleau, où elle avait passé tout -l'été, madame de Sévigné se décidait à quitter la capitale pour se -rendre en Bretagne[374]. Elle n'ignorait pas que cette province était en -révolte ouverte; mais elle était entraînée par la nécessité de ses -affaires[375]. - - [374] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (3 juillet 1675), t. III, p. 442, édit. - G.; t. III, p. 317, édit. M. - - [375] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 juillet et 2, 6, 7, 9, 16, 19, 27 et - 28 août), t. III, p. 475, 480, 487, 492; t. IV, p. 9, 25, 27, 57, - 64 à 73, édit. G. - - - - -CHAPITRE IX. - -1674-1675. - - Madame de Grignan s'alarme du projet de madame de Sévigné d'aller - en Bretagne.--Succès de Louis XIV; conquête de la Franche-Comté, du - Roussillon.--Bataille de Senef.--Accroissement des impôts.--Misère - du peuple, qui se révolte en Bretagne et en Guienne.--Le duc de - Chaulnes quitte Cologne et se rend en Bretagne.--On annonce qu'on - va y envoyer des troupes.--Le duc de Chaulnes s'y oppose.--Une - émeute à Rennes.--Madame de Sévigné diffère son voyage.--Elle se - décide à aller à Nantes.--Forbin conduit six mille hommes en - Bretagne.--Le duc de Chaulnes, détesté des Bretons, sévit contre - eux.--Madame de Sévigné veut qu'on agisse avec énergie contre les - révoltés, mais désapprouve le despotisme de Louis XIV.--Refus fait - à madame de Froulay.--Tragique histoire d'un passementier à - Paris.--Les états de Bretagne s'assemblent à Dinan.--Sommes - accordées.--Madame de Sévigné s'indigne du servilisme des - députés.--Elle blâme l'évêque de Saint-Malo.--Libertés de la - province violées par l'envoi des troupes.--Remontrances au roi à ce - sujet.--Madame de Sévigné manifeste ses sentiments - désapprobateurs.--Elle approuve son fils, qui les - partage.--D'Harouis, trésorier des états.--Mauvaise situation de - ses affaires.--Inquiétudes de madame de Sévigné à ce sujet.--Elles - se réalisent par la suite.--Les comptes de d'Harouis sont - examinés.--Vers de la Fontaine à ce sujet.--D'Harouis est condamné - à une prison perpétuelle.--Il est plaint et secouru. - - -Aussitôt que madame de Grignan eut appris que sa mère se disposait à se -rendre en Bretagne, elle s'alarma, et lui écrivit pour la détourner de -faire ce voyage. Madame de Sévigné lui répondit: - -«Vous êtes bonne sur vos lamentations de Bretagne; je voudrais avoir -Corbinelli; vous l'aurez à Grignan. Je vous le recommande; et moi j'irai -voir ces coquins qui jettent des pierres dans le jardin du patron (du -duc de Chaulnes, gouverneur de Bretagne). On dit qu'il y a cinq ou six -cents bonnets bleus en Bretagne qui auraient bon besoin d'être pendus, -pour leur apprendre à parler. La haute Bretagne est sage, et c'est mon -pays[376].» - - [376] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (30 août 1675), t. IV, p. 73. - -Elle se trompait. Il est bien vrai que partout Louis XIV triomphait. La -conquête de la Franche-Comté était achevée. Le comte de Schomberg avait -défait les Espagnols et les avait chassés du Roussillon[377]. La flotte -des Hollandais, commandée par Ruyter, avait été repoussée de -Belle-Ile[378] et de la Martinique[379]. Le prince d'Orange, après le -sanglant combat de Senef[380], avait été forcé de lever le siége -d'Oudenarde. Turenne avait battu les Allemands à Ensisheim[381], à -Mulhausen[382], à Turkheim[383]. Vaubrun avait pris Dachstein[384]. -Vivonne, après avoir dispersé l'armée navale d'Espagne, était entré dans -Messine[385] et d'Estrades avait mis une garnison dans la citadelle de -Liége[386]. Dinan s'était rendu au maréchal de Créquy[387], Huy au -marquis de Rochefort[388], Limbourg au duc d'Enghien[389]. La Suède fait -une diversion en faveur de la France[390]. Les colonies nouvellement -fondées prospèrent, et le roi nomme le premier évêque de Québec[391]. -Sobieski s'assied sur le trône de Pologne par l'influence de Louis XIV, -et la femme de la cour du grand monarque qu'il avait épousée devient -reine de la Pologne[392]. Enfin madame de Sévigné écrivait: «Rien -n'égale le bonheur des Français.» Et cependant c'est alors qu'il y eut -des révoltes alarmantes en Guienne et en Bretagne, et qu'on craignit -pour la Normandie, où les ennemis de la France entretenaient des -intelligences. L'accroissement des impôts et la nécessité d'appesantir -le joug du despotisme, qui en était la conséquence, furent la cause de -ces troubles. Les dépenses de la guerre, les constructions de -Versailles, le luxe de la cour, les largesses faites aux courtisans, aux -maîtresses, aux ministres forcèrent Colbert, qui avait aussi part à ces -largesses, de recourir à des taxes inaccoutumées, nuisibles à -l'agriculture et au commerce. On afferma ces nouveaux impôts à des -traitants, qui les rendaient, par leurs exactions, plus odieux au -peuple. Les taxes sur le papier timbré et sur la vaisselle d'étain -offensèrent surtout la Guienne; celles sur le tabac parurent -intolérables aux paysans bretons[393]. Ces mécontentements étaient -sourdement excités par les parlements, que Louis XIV avait contraints -(février 1673) à enregistrer sans délibération ses édits avant de -s'occuper d'aucune autre affaire; ce qui les réduisait à n'être plus que -des cours de justice, et leur ôtait toute importance politique. Le feu -de la rébellion était aussi attisé par les membres du tiers état, qui -étaient punis par l'exil ou par la prison s'ils se permettaient de -parler avec liberté dans les assemblées provinciales ou lorsqu'ils se -montraient opposés aux demandes du gouvernement. Le duc de Chaulnes, -qu'on avait tiré du congrès de Cologne pour l'envoyer dans son -gouvernement de Bretagne, avait averti Colbert du danger que courait -l'ordre public si on ne renonçait pas à l'exécution stricte et -rigoureuse des impôts, si on ne remédiait pas aux vexations des -traitants. Mais Colbert, qui voulait partout une comptabilité uniforme, -répondit que les édits étaient exécutés en Languedoc et en Bourgogne; et -il enjoignit au duc de Chaulnes de faire en sorte qu'il en fût de même -en Bretagne[394]. Comme il y avait eu une légère émeute à Rennes, on -donna ordre aux archers de Normandie de se rendre dans cette ville. De -Chaulnes écrivit que l'exécution d'une telle mesure était le moyen de -faire soulever Rennes et toute la province. Il espérait, si on révoquait -cet ordre, pouvoir assurer la tranquillité. Il était parvenu à la -rétablir sans rigueur et sans violence. «Il n'y a, écrivait-il, qu'en -l'évêché de Quimper où les paysans s'attroupent tous les jours; et toute -leur rage est présentement contre les gentilshommes, dont ils ont reçu -de mauvais traitements[395]. Il est certain que la noblesse a traité -fort rudement les paysans; ils s'en vengent présentement, et ont exercé -déjà , vers cinq ou six, de très-grandes barbaries, les ayant blessés et -pillé leurs maisons, et même brûlé quelques-unes[396].» Le duc de -Chaulnes ne se maintint pas longtemps dans ces dispositions -bienveillantes; il y eut, le 18 juillet[397], une nouvelle émeute à -Rennes, et madame de Sévigné la raconte ainsi à sa fille: - - [377] _Relation de ce qui s'est passé en Catalogne_, 1678, in-12, - Paris, Quinet, 194 pages. Il prit Bellegarde le 27 juillet 1675. - - [378] Le 28 juin 1674. - - [379] Le 21 juillet 1674. Ruyter avait quarante-six vaisseaux. - - [380] Le 11 août 1674. - - [381] Le 4 octobre 1674. - - [382] Le 29 décembre 1674. - - [383] Le 5 janvier 1675. - - [384] Le 29 janvier 1675. - - [385] Le 11 février 1675. - - [386] Le 27 mars 1675. - - [387] Le 29 mai 1675. - - [388] Le 6 juin 1675. - - [389] Le 21 juin 1675. - - [390] Vers le milieu de janvier 1675. - - [391] Le 23 avril 1675. - - [392] Le 21 mai 1674. - - [393] _Nouvelles ou Mémoires historiques_, in-12 (par mad. - Daulnois), t. I, p. 185 et 186. - - [394] FORBONNAIS, _Recherches sur les finances de la France_, - édit. de 1758, in-12, t. II, p. 105, 123, 131.--CLÉMENT, _Hist. - de Colbert_, p. 344, 348, 365. - - [395] Le duc DE CHAULNES, _Lettres à Colbert_ (30 juin 1675), - dans DEPPING, _Correspondance administr. sous le règne de Louis - XIV_, in-4º, 1850, p. 54, 348, 545, 546, 561.--CLÉMENT, _Histoire - de la vie et de l'administration de Colbert_, in-8º, p. 370. - - [396] Le duc DE CHAULNES, dans DEPPING, _Correspondance - administrative de Louis XIV_, 1850, in-4º, t. I, p. 547. - - [397] CLÉMENT, _Vie de Colbert_, p. 371. - -«On a recommencé, dit-elle, à piller un bureau à Rennes; madame de -Chaulnes est à demi morte des menaces qu'on lui fait tous les jours. On -me dit hier qu'elle était arrêtée, et que même les plus sages l'ont -retenue, et ont mandé à M. de Chaulnes, qui est au Fort-Louis, que, si -les troupes qu'il a demandées font un pas dans la province, madame de -Chaulnes court risque d'être mise en pièces. Il n'est cependant que trop -vrai qu'on doit envoyer des troupes; et on a raison de le faire, car, -dans l'état où sont les choses, il ne faut pas de remèdes anodins[398].» - - [398] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 juillet 1675), t. III, p. 459, édit. - G.; t. III, p. 334, édit. M.--FEUQUIÈRES, _Lettres inédites_, - 1845, in-8º, t. II, p. 169. - -La légèreté avec laquelle madame de Sévigné parle des souffrances du -peuple blesse avec raison les sentiments des lecteurs modernes et lui a -été souvent reprochée. Il est bien vrai que, redoutant pour ses amis et -pour elle-même les suites de la révolte, elle désirait qu'elle fût -réprimée avec énergie; mais elle blâmait, elle détestait la tyrannie qui -rendait cette répression nécessaire et les cruelles rancunes du -gouverneur, son ami. Cette insensibilité qui nous surprend n'est -qu'apparente, et le ton léger avec lequel elle s'exprime est une amère -ironie. Nombre de fois, dans sa correspondance, elle manifeste toute -l'indépendance d'une janséniste, d'une ancienne frondeuse, du parti sous -les drapeaux duquel avaient lutté, avaient combattu les Condé, les la -Rochefoucauld, les Retz, qui étaient restés ses amis. Elle se moque et -elle bafoue la servilité des courtisans, l'immoralité des gens d'Église, -l'avidité des ministres et des gens en place, la facilité des états de -Bretagne à prodiguer l'argent des contribuables; et, malgré son -admiration sincère pour Louis XIV, elle déteste en lui son arrogante -domination et sa dureté despotique. - -«La royauté (écrit-elle à madame de Grignan) est établie au delà de ce -que vous pouvez vous imaginer; on ne se lève plus, on ne regarde plus -personne. L'autre jour, une pauvre mère tout en pleurs, qui a perdu le -plus joli garçon du monde, demandait cette charge à Sa Majesté, elle -passa. Ensuite, et tout à genoux, cette pauvre madame de Froulay (elle -réclamait le prix de la charge de maréchal des logis qu'elle avait -achetée pour son fils, tué à la guerre) se traîna à ses pieds, lui -demandant avec des cris et des sanglots qu'elle eût pitié d'elle: Sa -Majesté passa sans s'arrêter[399].» - - [399] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (22 août 1675), t. IV, p. 46, édit. G.; - t. III, p. 21, édit. M.; t. II, p. 58, édit. de la Haye, 1726, - in-4º. - -Madame de Sévigné annonce ainsi le prochain départ du roi: «Je vous ai -mandé, ma très-chère, comme nos folies de Bretagne m'arrêtaient pour -quelques jours. M. de Forbin (le bailli de Forbin, capitaine-lieutenant -de la première compagnie des mousquetaires et lieutenant général) doit -partir avec six mille hommes pour punir notre Bretagne, c'est-a-dire la -ruiner. Ils s'en vont par Nantes; c'est ce qui fait que je prendrai la -route du Mans avec madame de Lavardin.» Cependant elle se décida à -passer par Nantes, et put se convaincre qu'on faisait plus que ruiner la -province[400]. - - [400] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 juillet 1675), t. III, p. 472, édit. - G.; t. III, p. 345, édit. M. - -«Nos pauvres Bas-Bretons (mande-t-elle à sa fille quand elle fut arrivée -au terme de son voyage) s'attroupent quarante, cinquante par les champs; -et dès qu'ils voient les soldats ils se jettent à genoux, et disent _Mea -culpa_; c'est le seul mot de _français_ qu'ils sachent, comme nos -Français disaient qu'en Allemagne le seul mot de _latin_ qu'on disait à -la messe, c'était _Kyrie, eleison_. On ne laisse pas de pendre ces -pauvres Bas-Bretons; ils demandent à boire et du tabac, et qu'on les -dépêche[401].» - - [401] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 septembre 1675), t. IV, p. 113, édit. - G; t. IV, p. 6, édit. M. - -C'est alors même que madame de Sévigné annonce qu'on a fait filer les -troupes en Bretagne et que M. de Pomponne a donné à M. de Forbin les -noms des terres de son fils pour qu'elles fussent ménagées qu'elle fait -connaître à sa fille les affreuses conséquences de l'énormité des taxes -dans les provinces, dans la capitale, dans les villes, aussi bien que -dans les campagnes. «Voici, dit-elle, une petite histoire qui se passa -il y a trois jours. Un pauvre passementier, dans le faubourg -Saint-Marceau, était taxé à dix écus pour un impôt sur les maîtrises; il -ne les avait pas. On le presse et represse; il demande du temps, on le -lui refuse; on prend son pauvre lit et sa pauvre écuelle. Quand il se -vit en cet état, la rage s'empara de son cÅ“ur; il coupa la gorge à -trois de ses enfants qui étaient dans sa chambre; sa femme sauva le -quatrième et s'enfuit. Le pauvre homme est au Châtelet; il sera pendu -dans un jour ou deux. Il dit que tout son déplaisir c'est de n'avoir pas -tué sa femme et l'enfant qu'elle a sauvé. Songez, ma fille, que cela est -vrai comme si vous l'aviez vu, et que depuis le siége de Jérusalem il ne -s'est pas vu une telle fureur[402].» - - [402] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 juillet 1675), t. III, p. 472-73, - édit. G.; t. III, p. 345, édit. M. - -L'assise des états de Bretagne s'ouvrit, cette année, le 9 novembre -(1675), dans la salle des Jacobins de Dinan; elle fut close le 12 -décembre. Les trois millions demandés au nom du roi et les -gratifications au duc de Chaulnes, au marquis de Lavardin et à l'évêque -de Saint-Malo (président de l'Église), etc., furent accordés sans -difficulté. Cependant, malgré la terreur qui pesait sur les états, ils -osèrent envoyer des commissaires au roi, pour s'opposer à ce qu'on mît -en Bretagne des troupes en quartier d'hiver: ils représentèrent que -c'était une mesure illégale et contraire aux droits et aux franchises de -la province. Je transcrirai ici ce qui est dit à ce sujet dans le -procès-verbal de l'assise sur la réponse faite au nom du roi: - -«_Du 10 décembre 1675._ Monseigneur le duc de Chaulnes est entré en -l'assemblée, et a dit qu'ayant écrit à Sa Majesté que la province était -alarmée de ce que Sa Majesté, au préjudice des contrats faits entre Sa -Majesté et elle, y avait envoyé des troupes en quartier d'hiver, il -avait reçu une lettre de Sa Majesté par laquelle elle l'assurait que ce -qu'elle en avait fait était par nécessité, se trouvant chargée d'une -infinité de troupes qu'elle avait été obligée de distribuer dans les -provinces; que cela ne tirerait à conséquence, et que Sa Majesté -conserverait toujours les priviléges de la province[403].» - - [403] _Recueil ms. de la Bibl. nat. de la tenue des états de - Bretagne_, p. 379. - -Madame de Sévigné cette fois, animée d'un vrai patriotisme breton, fait -bien ressortir tout ce que cette réponse à la protestation avait de -dérisoire, et montre en même temps combien elle ressentait vivement le -malheur des populations; mais quoiqu'elle blâme ses amis, ce n'est pas -sur eux qu'elle dirige les traits les plus acérés de sa critique. -Ceux-ci, le duc de Chaulnes et le marquis de Lavardin étaient cependant -les premiers exécuteurs des ordres du roi et de ses ministres; mais, -dans les intervalles de ces orages passagers de la politique, les deux -premiers couvraient madame de Sévigné de leur protection et la -garantissaient de toutes vexations: dans les temps calmes, ils la -comblaient de soins, de louanges, de politesse, et ils ajoutaient -infiniment aux agréments de son séjour aux Rochers. Elle n'accusait pas -non plus d'Harouis, qui, en qualité de trésorier des états, était le -surintendant des finances, le Fouquet de la Bretagne; de même que -Fouquet, fastueux, grand, généreux, prodigue des richesses, peu -scrupuleux sur les moyens d'en acquérir, et, comme lui, se précipitant -aussi par la ruine dans la prison. Madame de Sévigné ne voyait en -d'Harouis qu'un parent qui lui était dévoué, qu'un ami désintéressé, -toujours prêt à venir à son secours dans tous ses embarras d'affaires; -et elle avait autant d'amitié pour lui qu'elle en avait eu pour -Fouquet, avec plus d'admiration encore[404]. - - [404] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 septembre 1675), t. IV, p. 112, - édit. G.; t. IV, p. 7, édit. M.--Sur d'Harouis, voy. 4e partie, - 29, 33. - -C'est sur un autre parent des Sévigné, sur Sébastien de Guémadeuc, -évêque de Saint-Malo, qu'elle se plaît à épancher tout le fiel de sa -censure. Cependant il n'avait eu que la plus petite part aux maux dont -elle se plaignait; il avait été envoyé en qualité de commissaire près du -roi pour faire des représentations contre la mise des troupes en -quartier d'hiver, et avait eu le malheur de rapporter cette réponse dont -elle se plaint avec juste raison. Quoique cette fois les états se -tinssent loin d'elle, elle était parfaitement bien informée de tout ce -qui s'y passait, et elle en instruit madame de Grignan. - -«Voici, dit-elle, des nouvelles de notre province; j'en ai reçu un fagot -de lettres: les Lavardin, les Boucherat et les d'Harouis me rendent -compte de tout. M. de Harlay demanda trois millions[405], chose qui ne -s'est jamais donnée que quand le roi vint à Nantes; pour moi, j'aurais -cru que c'eût été pour rire. Ils promirent d'abord, comme des insensés, -de les donner; et en même temps M. de Chaulnes proposa de faire une -députation au roi pour l'assurer de la fidélité de la province et de -l'obligation qu'elle lui a d'avoir bien voulu envoyer des troupes pour -la remettre en paix, et que sa noblesse n'a eu aucune part aux désordres -qui sont arrivés. M. de Saint-Malo se botte aussitôt pour le clergé; -Tonquedec voulait aller pour la noblesse; mais M. de Rohan (président -des états) a voulu aller, et un autre pour le tiers[406]. Ils passèrent -tous trois avant-hier à Vitré; il est inouï qu'un président de la -noblesse ait jamais fait une pareille course... On ne voit point l'effet -de cette députation; pour moi, je crois que tout est réglé et joué, et -qu'ils nous rapporteront quelque grâce. Je vous le manderai; mais -jusqu'ici nous n'en voyons pas davantage[407].» - - [405] Dans le procès-verbal de l'assise de ces états, il est dit - simplement, sous la date du 11 novembre 1675: «MM. les - commissaires sont rentrés... M. de Harlay a demandé trois millions - pour le roy, et les états les ont accordés.» _Recueil_, etc., ms. - de la Bibl. nat., p. 377. - - [406] Cet autre, que madame de Sévigné ne daigne pas nommer, - était M. de la Gascherie-Charette, maire de Nantes. (_Rec. ms._, - p. 377.) - - [407] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 novembre 1675), t. IV, p. 210, édit. - G.; t. IV, p. 90, édit. M. - -Puis elle continue trois semaines après, et dit: - -«M. de Lavardin est mon résident aux états; il m'instruit de tout; et -comme nous mêlons quelquefois de l'italien dans nos lettres, je lui -avais mandé, pour lui expliquer mon repos et ma paresse ici: - - .... D'ogni oltraggio e scorno - La mia famiglia e la mia greggia illese - Sempre qui fur, ne strepito di Marte - Ancor turbò questa remota parte[408]. - - [408] TASSO, _Ger. liber._, canto VII, st. 8. Mad. de Sévigné - venait alors de relire le Tasse avec Charles de Sévigné, comte de - Montmoron, doyen du parlement de Bretagne, parent des Sévigné, - homme d'esprit, grand amateur de devises et qui faisait des vers. - Voyez les lettres du 17 novembre 1675, du 20 octobre 1675 et du - 15 septembre 1680. Le comte de Montmoron mourut le 30 septembre - 1684 (voyez la lettre du 4 octobre 1684). - -«A peine ma lettre a-t-elle été partie qu'il est arrivé à Vitré huit -cents cavaliers, dont la princesse (de Tarente) est bien mal contente: -il est vrai qu'ils ne font que passer; mais ils vivent, ma foi, comme -dans un pays de conquête, nonobstant notre bon mariage avec Charles -VIII et Louis XII. Les députés sont revenus de Paris; M. de Saint-Malo, -qui est Guémadeuc, votre parent, et sur le tout une _linote mitrée_, -comme disait madame de Choisy, a paru aux états, transporté et plein des -bontés du roi et surtout des honnêtetés particulières qu'il a eues pour -lui, sans faire attention à la ruine de la province, qu'il a apportée -agréablement avec lui; ce style est d'un bon goût à des gens pleins, de -leur côté, du mauvais état de leurs affaires. Il dit que Sa Majesté est -contente de la Bretagne et de son présent; qu'elle a oublié le passé, et -que c'est par confiance qu'on envoie ici huit mille hommes, comme on -envoie un équipage chez soi quand on n'en a que faire[409].» - - [409] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 décembre 1675), t. IV, p. 236, édit. - G.; t. IV, p. 113, édit. M. - -Et précédemment elle avait dit: - -«Nos députés, qui étaient courus si extravagamment porter la nouvelle du -don, ont eu la satisfaction que notre présent a été reçu sans chagrin; -et, contre l'espérance de toute la province, ils reviennent sans -rapporter aucune grâce. Je suis accablée des lettres des états; chacun -se presse de m'instruire: ce commerce de traverse me fatigue un peu. On -tâche d'y réformer les libéralités et les pensions, et l'on reprend de -vieux règlements qui couperaient tout par la moitié; mais je parie qu'il -n'en sera rien; et comme cela tombe sur nos amis les gouverneurs, -lieutenants généraux, commissaires du roi, premiers présidents et -autres, on n'aura ni la hardiesse ni la générosité de rien -retrancher[410].» - - [410] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (27 novembre 1675), t. IV, p. 222, édit. - G.; t. IV, p. 101, édit. M. - - -Elle se trompait encore, et elle se trouva bientôt dans l'heureuse -nécessité d'annoncer à sa fille qu'elle a trop mal jugé ses -compatriotes. - -«Nos états sont finis[411]; il nous manque neuf cent mille francs de -fonds; cela me trouble à cause de M. d'Harouis. On a retranché toutes -les pensions et qualifications à moitié. M. de Rohan n'osait, dans la -tristesse où est cette province, donner le moindre plaisir; mais M. de -Saint-Malo, _linote mitrée_, âgé de soixante ans, a commencé, vous -croyez que c'est les prières de quarante heures; c'est le bal à toutes -les dames et un grand souper: ç'a été un scandale public. M. de Rohan, -honteux, a continué. C'est ainsi que nous chantons en mourant, -semblables au cygne; car mon fils le dit, et il cite l'endroit où il l'a -lu: c'est sur la fin de Lucrèce[412].» - - [411] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (15 décembre 1675), p. 252, édit. G.; t. - IV, p. 128. - - [412] Il y a dans toutes les éditions de Sévigné Quinte-Curce; - mais il est certain qu'il faut lire Lucrèce (Lucretius Carus), - qui en effet, au vers 547 du IVe chant de son poëme, parle du - chant du cygne. Quinte-Curce n'en fait pas mention, et les autres - auteurs qui en ont parlé sont Callimaque, Eschyle, Théocrite, - Euripide, Ovide, Properce. - -Ce n'était pas seulement à sa fille qu'elle manifestait ces sentiments, -c'était encore dans les visites qu'elle faisait à Vitré et dans les -cercles de hauts personnages des états, dans ses entretiens avec la -femme du gouverneur, la duchesse de Chaulnes; et elle applaudissait aux -discours de son fils, qui soutenait les mêmes opinions[413]. Pour ce -dernier, ce n'était pas le moyen d'avancer ni d'être bien en cour; mais, -indépendamment des motifs de bien public et d'intérêt particulier qui -faisaient désapprouver à madame de Sévigné la facilité des députés de -Bretagne à voter d'aussi fortes contributions sur le pays où elle avait -sa plus grande propriété, une autre cause agissait fortement sur elle: -c'était l'amitié qu'elle avait pour d'Harouis, son cousin germain, qui -avait contracté mariage avec Madeleine de Coulanges, morte en 1662. La -mauvaise situation pécuniaire de ce financier était un secret qui -commençait à se divulguer, et l'on doutait qu'il pût réaliser la somme -de trois millions qui avait été votée. - - [413] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (25 décembre 1675), t. IV, p 114, édit. - M.; t. IV, p. 271, édit. G.--_Ibid._ (22 décembre 1675), t. IV, - p. 270, édit. G.; t. IV, p. 143, édit. M. - -Le 11 décembre, madame de Sévigné avait écrit à sa fille: - -«Je crois que nous ne laisserons pas de trouver ou du moins de promettre -toujours les trois millions, sans que notre ami (M. d'Harouis) soit -abîmé; car il s'est coulé une affection pour lui dans les états qui fait -qu'on ne songe qu'à l'empêcher de périr[414].» Cela était impossible. -D'Harouis était un homme sans ordre, qui se faisait beaucoup de -partisans en donnant l'argent sans compter avec lui-même ni avec l'État. -De l'aveu même de madame de Sévigné (qui changea d'opinion sur son -compte), «cette passion d'obliger tout le monde sans mesure et sans -raison, offusquant toutes les autres, le rendait injuste[415].» -L'affection qu'on avait pour lui, dont parle madame de Sévigné, était -grande, et l'empêcha de faire faillite à cette époque où sa perte -paraissait certaine[416]. Mais en fermant les yeux sur son désordre on -rendit son malheur plus infaillible, et on fit perdre beaucoup d'argent -à la province. Il put cependant vivre ainsi durant douze ans encore, et -était devenu le créancier de madame de Sévigné[417]; mais en 1687 il fut -fait un nouveau règlement général par les états de Bretagne réunis à -Saint-Brieuc, afin de remédier aux abus qui s'étaient introduits pendant -les années de négligence; et le chapitre XIV de ce règlement, concernant -uniquement le trésorier général et ses commis, soumit ces comptables à -un contrôle rigoureux[418]. D'Harouis se trouva dans l'impossibilité de -rendre ses comptes. C'est alors que l'on nomma la Briffe, conseiller -d'État[419], pour examiner la gestion du trésorier des états de -Bretagne, qui fut arrêté et interrogé; et c'est peu de temps après que -la Fontaine, écrivant au prince de Conti, lui disait[420]: - - La Briffe est chargé des affaires - Du public et du souverain. - Au gré de tous il sut enfin - Débrouiller ce chaos de dettes - Qu'un maudit compteur avait faites. - - [414] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 décembre 1675), t. IV, p. 242, édit. - G.; t. IV, p. 119, édit. M. - - [415] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 février 1690), t. X, p. 267, édit. - G. Conférez cette lettre avec celle du 24 septembre 1675, t. IV, - p. 7, édit. M.; t. IV, p. 114, édit. M.--_Ibid._ (29 janvier - 1692), t. IX, p. 326, édit. M.--_Ibid._ (19 février 1690), t. IX, - p. 364, édit. M. - - [416] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 novembre 1675), t. IV, p. 90, édit. - M. - - [417] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er mars 1684), t. IV, p. 139, édit. M. - - [418] _Registre ms. de la tenue des états de Bretagne de_ 1629 à - 1703. (Bl.-Mant., 75, p. 472, ch. XIV du règlement intitulé _du - Trésorier des états et de ses commis_, ms. de l'Institut.) - - [419] _Lettres inédites de madame de_ GRIGNAN _à son mari_; - Paris, décembre 1830, p. 11 (12 p. publiées par M. Monmerqué). - - [420] LA FONTAINE, _Å’uvres_, Paris, Lefèvre, 1827, t. VI, p. - 180. (Lettre au prince de Conti, novembre 1689.) - -D'Harouis, _ce maudit compteur_, fut complétement ruiné et mis à la -Bastille, où il mourut le 10 novembre 1699[421]. Il justifia, dans sa -disgrâce, la tendresse que madame de Sévigné avait pour lui. D'Harouis a -joui du bonheur bien rare de conserver dans l'infortune les amis qu'il -s'était acquis dans sa prospérité; et Saint-Simon, dans ses -Mémoires[422], fait à ce sujet cette remarque: «C'est, je crois, -l'unique exemple d'un comptable de deniers publics avec qui ses maîtres -et tout le public perdent sans que sa probité en ait reçu le plus léger -soupçon. Les perdants même le plaignirent; tout le monde s'affligea de -son malheur; ce qui fit que le roi se contenta d'une prison perpétuelle. -Il la souffrit sans se plaindre, et la passa dans une grande piété, fort -visité de beaucoup d'amis et secouru de plusieurs.» Presque toujours la -religion recevait dans ses bras les hommes de ce siècle, les consolait -dans leur infortune et, par l'attente du bonheur éternel, les rattachait -à la vie! - - [421] Voyez extrait du _Journal de France_ dans la note de M. - Monmerqué sur SÉVIGNÉ, t. X, p. 227, édit. 1820, in-8º. - - [422] SAINT-SIMON, _Mémoires authentiques_, t. II, p. 372. - - - - -CHAPITRE X. - -1675-1676. - - L'opinion du peuple se tourne contre Louis XIV, et attribue les - malheurs publics à ses amours avec madame de Montespan.--Le parti - religieux cherche à se séparer d'elle.--Un prêtre refuse - l'absolution à madame de Montespan.--Le curé et Bossuet sont - consultés, et déclarent tous deux que le prêtre a fait son - devoir.--Bossuet et Bourdaloue profitent de cette circonstance pour - persuader au roi et à madame de Montespan de se séparer.--Ils le - promettent.--Le roi et madame de Montespan communient tous deux le - jour de la Pentecôte.--Le roi écrit à Colbert pour qu'il pourvoie - aux dépenses de madame de Montespan, et fasse en sorte de la - distraire.--Elle construit Clagny.--Le roi revient de l'armée, et - ordonne que madame de Montespan soit réintégrée à Versailles, mais - avec l'intention de ne pas renouer son commerce avec elle.--Madame - de Montespan cherche à le faire changer de résolution.--Elle y - parvient.--Son triomphe est complet.--La cour reprend sa splendeur - et ses plaisirs.--Racine fait jouer _Iphigénie_.--Boileau compose - l'épître à Seignelay contre les flatteurs.--On rejoue l'opéra de - _Thésée_.--Le ministre de Pomponne mène madame de Sévigné à ce - spectacle.--Vers du Prologue: ils sont tout entiers à la louange du - roi. - - -Madame de Sévigné, en donnant à sa fille de désastreuses nouvelles, -ajoute: «Le peuple dit que c'est à cause de _Quantova_ (madame de -Montespan[423].» - - [423] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 juillet 1675), t. III, p. 473, édit. - G.; t. III, p. 338, édit. M. - -Ce peu de mots nous apprend que l'opinion publique, qui s'était montrée -si favorable à la jeunesse de Louis XIV, se tournait contre lui. Ses -amours avec la Vallière, sur lesquelles se reflétaient les premiers -rayons de sa gloire, avaient trouvé plus de sympathie que de blâme. La -mémoire de Henri IV, plus récente et plus populaire que celle de saint -Louis, avait habitué la nation à considérer le libre commerce avec la -beauté comme un des priviléges et presque une des qualités d'un roi -français. Mais la prolongation des guerres engagea de plus en plus le -gouvernement dans la voie du despotisme. Par les impôts excessifs les -fortunes privées furent anéanties, et les populations appauvries par le -sang versé sur les champs de bataille. Les provinces étaient -mécontentes, et ne pouvaient pardonner à Louis XIV son luxe, ses -prodigalités et le scandale de sa liaison avec une femme mariée. Il se -forma à la cour un parti composé d'hommes sincèrement attachés au -monarque et à la monarchie, dans l'espoir d'opérer une réforme -salutaire. Ce parti, qu'on pouvait appeler le parti pieux, parce que ses -principaux chefs se faisaient remarquer par leur zèle pour la religion, -était peu considérable; mais il était puissamment soutenu par les -dignitaires ecclésiastiques et par le contraste que présentaient alors -les mÅ“urs sévères des magistrats, des bourgeois industrieux, économes -et rangés et la classe licencieuse, besoigneuse, des nobles grands -seigneurs, des courtisans et des militaires. Dès que ce parti s'aperçut -que la pensée du salut acquérait tous les jours plus de force dans -l'esprit du roi, il espéra le rendre tout entier à sa _bonne petite -Espagnole_, à la reine, que, par intérêt pour sa dynastie, par -attachement, par conscience d'honnête homme, le roi n'avait jamais -entièrement négligée[424]. Bourdaloue et Bossuet, qui donnaient les -appuis de la raison à la foi, et à la piété la chaleur du sentiment, -considéraient tous deux comme l'acte le plus méritoire envers Dieu et le -plus utile à l'humanité, de soumettre aux préceptes de la religion et -aux lois de l'Église le plus puissant souverain du monde. Ils -employaient pour y parvenir tous les moyens qui n'étaient pas -incompatibles avec leurs scrupules religieux. La victoire qu'ils avaient -remportée sur la Vallière leur permettait d'en espérer une plus décisive -encore; mais ce second triomphe était plus difficile à obtenir. Ils -n'avaient pas, il est vrai, à combattre dans Montespan ce sentiment -profond, inaltérable, sincère, désintéressé qui faisait de la Vallière -une victime disposée à quitter la vie plutôt qu'à renoncer à son amour; -mais cet amour de la Vallière était sans joie, sans consolation, sans -espérance, et torturait le cÅ“ur de celle qu'il subjuguait, par le -supplice incessant de la jalousie. On put donc persuader à cette -infortunée qu'elle échapperait au désespoir en se jetant au pied de la -croix, et que là le calme de ses sens, les extases de l'amour divin lui -feraient anticiper, dès cette vie même, les pures délices que Dieu, dans -la vie éternelle, réserve à ses élus. - - [424] MADAME, duchesse d'Orléans, _Fragments de lettres_, 1788, - in-12, t. I, p. 175, 176.--_Mémoires_, édit. 1732, in-8º, p. 45 - et 90--_Mémoires sur Sévigné_, 3e partie, ch. V, p. 166. - -Bien différente était Montespan, qui, en devenant la maîtresse de Louis -XIV, avait moins cédé à l'amour qu'à la séduction. Si, en public, elle -se conformait à tout ce qu'exigeaient d'elle l'étiquette de la cour et -son titre de dame d'honneur; quand Louis était chez elle, le roi -disparaissait, elle ne voyait plus que l'amant. Voluptueuse et tendre, -capricieuse et fière, par sa conversation pleine d'à -propos, de verve et -de gaieté, par ses saillies, qu'on n'oublie pas et qu'on répète, elle ne -permettait pas à l'ennui de se glisser dans ces longs tête-à -tête. Elle -satisfaisait son amour-propre et la haute opinion que Louis XIV avait de -lui-même en faisant ressortir par des mots piquants les ridicules et les -faiblesses de ceux qui l'approchaient. Elle avait avec lui des rapports -de ressemblance dans ses qualités et dans ses défauts, qui devaient -contribuer à la force et à la durée de leur mutuel attachement. Comme -lui elle aimait le faste, le luxe et la grandeur; plus que lui elle -avait le goût et le sentiment des arts et de la poésie; elle prenait -intérêt à tout ce qui pouvait augmenter la gloire de la France, et ses -idées sur la politique et les affaires d'État étaient justes et élevées. -De toutes les femmes que Louis XIV a aimées, elle fut certainement la -seule qui obtint sur lui un véritable empire, la seule qui força les -ministres à compter avec elle, la seule qui ait osé combattre les -préventions justes ou injustes du monarque tout-puissant et qui, en -toute circonstance, ait lutté courageusement en faveur de ses amis ou de -ceux qu'elle avait pris sous sa protection. Aussi fut-elle, de toutes -les maîtresses de Louis XIV, la seule que les courtisans aient -regrettée. - -Montespan était encore trop enivrée de l'orgueilleux plaisir de l'avoir -emporté sur sa rivale pour qu'on pût espérer que ses scrupules lui -donnassent la force de rompre ses liens. Ceux qui entreprenaient de -faire d'elle une maîtresse répudiée et de lui ôter le seul dédommagement -du sacrifice de son honneur, sacrifice que la noble fierté de sa -naissance et les vertueux penchants de sa jeunesse lui avaient rendu -pénible[425], ceux-là devenaient nécessairement ses ennemis déclarés. En -travaillant à la conversion de la Vallière lorsque Louis XIV était épris -de Montespan, on n'avait pas la crainte de déplaire et de s'attirer une -disgrâce à laquelle personne alors n'était insensible; mais la pieuse -ligue qui entreprenait d'enlever au roi celle qui le charmait par son -esprit autant que par ses grâces et sa beauté pouvait craindre les -terribles effets de son ressentiment. - - [425] SAINT-SIMON, _Mémoires authentiques_, 1829, in-8º, t. V, p. - 403. - -Les hommes religieux qui formaient cette ligue ne pouvaient être retenus -par de telles considérations; ils savaient que Louis et Montespan, en -cédant à la force de leur passion, ne renonçaient pas pour cela à -l'héritage de Jésus-Christ, mais qu'ils considéraient comme un privilége -de leur rang de pouvoir s'écarter de quelques-uns de ses divins -commandements, pourvu qu'ils se soumissent à ceux plus impérieusement -exigés par l'Église. Cette aberration, qui leur était commune avec un -grand nombre de catholiques peu fervents, moins élevés qu'eux en -dignités, ne les aveuglait pas au point qu'à l'approche des grandes -fêtes leur conscience ne fût troublée et leur repos intérieur détruit -par de puissants scrupules. - -Le jeudi saint 11 avril (1675), madame de Montespan se présenta au -tribunal de la pénitence devant un prêtre de sa paroisse, se croyant -assurée d'obtenir l'approbation nécessaire pour communier le jour de -Pâques (14 avril). Le prêtre[426] lui refusa l'absolution. L'orgueil de -Montespan fut révolté d'une telle audace. Elle s'en plaignit au roi, -qui fit venir le curé[427]. Celui-ci déclara que le prêtre avait fait -son devoir. Le roi appela près de lui Bossuet; et Bossuet non-seulement -approuva la conduite du prêtre, mais il dit au roi que l'Église avait -toujours décidé[428] «que, dans des circonstances semblables, une -séparation entière et absolue était une disposition indispensable pour -être admis à la participation des sacrements.» Le roi fut singulièrement -troublé en apprenant, de la bouche du prélat qui avait toute sa -confiance, qu'alors qu'il se disposait à affronter à la guerre de -nouveaux périls il ne pouvait faire ses pâques, à moins de se soumettre -aux décisions de L'Église. Bossuet saisit cette occasion pour agir -fortement sur l'esprit du monarque: Louis XIV consentit à tout. Le -prélat fut chargé d'aller annoncer à madame de Montespan la résolution -du roi, de faire ses efforts pour la persuader à en prendre -volontairement une semblable et à s'éloigner de la cour. «Mes paroles, -écrivait Bossuet au roi, ont fait verser à madame de Montespan beaucoup -de larmes; et certainement, sire, il n'y a point de plus juste sujet de -pleurer que de sentir qu'on a engagé à la créature un cÅ“ur que Dieu -veut avoir. Qu'il est malaisé de se retirer d'un funeste engagement! -Mais cependant, sire, il le faut; ou il n'y a point de salut à -espérer[429].» - - [426] Il se nommait Lecuyer. - - [427] Thibault. - - [428] BOSSUET, _Lettres_, t. XXXVII, p. 86, 92, 98.--DE BAUSSET, - _Histoire de Bossuet_, 4e édit. in-12, t. II, p. 45 et 55. - - [429] BOSSUET, _Å’uvres_, t. XXXVII, p. 82 et suiv. - -Madame de Montespan parut décidée à se conformer aux intentions du roi -et comme lui se soumettre aux injonctions de Bossuet. Elle se retira à -Clagny, et Louis XIV s'empressa de donner des ordres à Colbert[430] pour -qu'il pourvût à toutes les dépenses qu'elle voudrait y faire. Le roi -enjoignit au ministre de prévenir les désirs de celle qu'il lui était si -pénible d'affliger et de lui procurer toutes sortes de distractions. -Madame de Montespan usa largement des dons du roi. A l'aide de Mansart -et de Le Nôtre et des habiles artistes qu'ils appelèrent à leur aide, -elle fit de Clagny un magnifique séjour, une miniature de Versailles; et -les sommes auxquelles Colbert dut pourvoir pour cette résidence -excédèrent de beaucoup celles que le roi avait, l'année précédente, paru -honteux d'exiger du sage administrateur de ses finances. Par une lettre -écrite de son camp près de Dôle[431], Louis XIV donnait ordre à Colbert -de commander pour madame de Montespan un collier de belles perles, des -boucles d'oreilles, des bracelets, des boutons et des boîtes ornées en -diamants, d'autres en pierres de toutes couleurs. Avant de faire cette -commande, qui est minutieusement détaillée dans sa lettre, Louis XIV -commence par dire au ministre: «Madame de Montespan ne veut pas -absolument que je lui donne des pierreries; cela paraît extraordinaire, -mais elle ne veut pas entendre raison sur les présents. Je veux avoir de -quoi lui prêter à point nommé ce qu'elle désirera.» - - [430] LOUIS XIV, _Lettres_ (28 mai et 8 juin 1675), t. V, p. 533, - 536, 537 des _Å’uvres_, 1806, in-8º.--CHAMPOLLION-FIGEAC, - _Documents hist. sur l'hist. de France_, 1843, in-4º. - - [431] Lettre de LOUIS XIV à Colbert (9 juin 1674), dans les - _Documents historiques inédits_ publiés par Champollion-Figeac, - 1843, in-4º, p. 526 et 527. - -Dans sa nouvelle et élégante retraite, madame de Montespan reçut de -fréquentes visites de la reine; toute la cour s'empressa autour d'elle, -et jamais elle ne fut comblée de plus d'honneurs, ne parut jouir de plus -de crédit et de puissance[432] que depuis qu'elle sembla vouloir -renoncer à toutes les grandeurs du monde et à tout attachement -illégitime. - - [432] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (12 et 14 juin 1675), t. III, p. 416, - 418 et 419, édit. G.; t. III, p. 295, 296 et 297, édit. M. - -Le roi était parti de Saint-Germain le samedi 11 mai, pour rejoindre son -armée de Flandre. Il n'avait pas manqué à la promesse faite à Bossuet, -et il autorisa le prélat à lui écrire pour l'entretenir dans les pieuses -dispositions qu'il lui avait inspirées. Ce fut alors que l'illustre -précepteur de l'héritier du trône transmit au roi lui-même, pour son -usage personnel, des instructions qui sont d'admirables monuments de son -zèle apostolique[433]. Pénétré de l'importance de sa mission, Bossuet -écrivait en même temps au maréchal de Bellefonds: «Priez Dieu pour moi, -je vous en conjure; et priez-le pour qu'il me délivre du plus grand -poids dont un homme puisse être chargé, et qu'il fasse mourir tout -l'homme en moi, pour n'agir que pour lui seul[434].» - - [433] DE BAUSSET, _Histoire de Bossuet_, 4e édit. in-12, t. II, - p. 52, 54 et 55, liv. V, VIII, IX et X.--BOSSUET, _Å’uvres_, t. - XXXVII, p. 52. - - [434] DE BAUSSET, _Histoire de Bossuet_, 4e édit. in-12, p. 49 - (lettre du 20 juin 1675). - -Bossuet, qui comprenait que le succès de cette grande Å“uvre dépendait -principalement de madame de Montespan, ne la négligeait pas. Il écrivait -au roi, à son sujet: «Je vois autant que je puis madame de Montespan, -comme Votre Majesté me l'a commandé. Je la trouve assez tranquille; elle -s'occupe beaucoup de bonnes Å“uvres, et je la vois fort touchée des -vérités que je lui propose, qui sont les mêmes que je dis à Votre -Majesté. Dieu veuille les mettre à tous deux dans le fond du cÅ“ur et -achever son ouvrage, afin que tant de larmes, tant de violence, tant -d'efforts que vous avez faits sur vous-même ne soient pas -inutiles[435]!» - - [435] BOSSUET, _Å’uvres_, t. XXXVII, p. 92 et 98 (lettre au roi, - 1675). - -Par sa docilité à suivre les conseils de Bossuet, madame de Montespan -put communier le 2 juin, jour de la Pentecôte[436], deux jours avant la -profession de foi de madame de la Vallière[437]. Le roi communia le même -jour, dans son camp de Latines[438], «avec beaucoup de marques de -piété,» dit Pellisson. Il avait près de lui son nouveau confesseur. -C'était le P. la Chaise, jésuite. La Chaise était un gentilhomme, âgé de -cinquante-un ans, auteur d'un excellent abrégé de philosophie. On le -disait sévère, et Bossuet avait fondé de grandes espérances sur son -concours: il se trompait. Il eût été mieux servi par le confesseur -janséniste de madame de Sévigné, qui lui refusa de la laisser communier, -comme firent le roi et madame de Montespan, le jour de la Pentecôte, -parce que la préoccupation de sa fille l'empêchait d'être suffisamment à -Dieu; rigueur que madame de Sévigné approuva, en bonne janséniste. «Je -me suis trouvée si uniquement occupée et remplie de vous, dit-elle, -que, mon cÅ“ur n'étant capable de nulle autre pensée, on m'a -défendu de faire mes dévotions à la Pentecôte; et c'est savoir le -christianisme[439].» - - [436] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 juin 1675), t. III, p. 411, édit. G.; - t. III, p. 290, édit. M. - - [437] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 juin 1675), t. III, p. 403, édit. G.; - t. III, p. 283, édit. M. - - [438] PELLISSON, _Lettres historiques_, 1729, in-12 (3 juin - 1675), t. II, p. 276.--SÉVIGNÉ, loc. cit. - - [439] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 juin 1675), t. III, p. 405, édit. G.; - t. III, p. 285, édit. M. - -Le roi revint, non pas tel qu'il était à son départ: les pieuses -exhortations de Bossuet ne s'étaient pas entièrement effacées de son -esprit. Le prélat avait fait promettre une séparation absolue comme -condition essentielle du salut, et par conséquent demandé, exigé[440] -que madame de Montespan fût expulsée de la cour. A cet égard l'auteur du -_Traité de Philosophie_, le P. la Chaise, se montra moins rigoureux que -Bossuet. Les courtisans amis de madame de Montespan qui étaient à -l'armée avec le roi tournèrent en ridicule l'exigence de l'évêque. -Était-il possible de bannir entièrement de la cour une dame d'honneur de -la reine, que l'exercice de sa charge y attachait nécessairement? Et qui -ne voyait qu'en croyant éviter un scandale le prélat en causait un plus -grand, dont tout le monde se préoccuperait? Le roi, persuadé par ces -discours, se décida à ne pas tenir sa promesse. Bossuet, informé de son -changement de résolution, voulut encore tenter un dernier effort. Il -alla résolument de lui-même au-devant de Sa Majesté, et la joignit à -huit lieues de Versailles. Sans être appelé, Bossuet parut inopinément -devant Louis XIV. Son visage était triste et sévère: «Ne me dites rien! -lui cria le roi dès qu'il l'aperçut de loin. J'ai donné des ordres pour -qu'on préparât au château le logement de madame de Montespan.» - - [440] DE BAUSSET, _Histoire de Bossuet_, 1824, in-12, t. II, p. - 60. - -«Le roi (écrit à sa fille madame de Sévigné, qui ignorait tout ce qui -s'était passé entre Bossuet et Louis XIV) arriva dimanche matin à -Versailles (21 juillet 1675); la reine, madame de Montespan et toutes -les dames étaient allées, dès le samedi, reprendre tous leurs -appartements ordinaires. Un moment après être arrivé, le roi alla faire -ses visites. La seule différence, c'est qu'on joue dans les grands -appartements que vous connaissez[441].» Cette différence était grande: -elle indiquait que, bien que la séparation absolue exigée par Bossuet au -nom de l'Église n'eût pas eu lieu, cependant Louis XIV hésitait encore, -et qu'il se contentait de jouir de la présence et de la société d'une -femme dont les grâces, l'enjouement, l'esprit, l'élévation des -sentiments, les sympathies pour sa gloire étaient devenus pour lui un -dédommagement indispensable aux peines et aux soucis de la royauté. Tout -n'était donc pas perdu pour madame de Montespan; et ce qui le prouve -c'est ce qu'écrit madame de Sévigné à sa fille quatre jours après: «La -cour s'en va à Fontainebleau; c'est MADAME qui le veut. Il est certain -que l'_ami de Quantova_ (Louis XIV) a dit à sa femme et à son curé par -deux fois: «Soyez persuadés que je n'ai pas changé les résolutions que -j'avais en partant; fiez-vous à ma parole, et instruisez les curieux de -mes sentiments[442].» - - [441] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (mercredi 24 juillet 1675), t. III, p. - 456, édit. G.; t. III, p. 331, édit. M.--BUSSY, _Suite des - Mémoires_, ms. de l'Institut, p. 129 et 130 (lettre à madame de - Scudéry, du 20 juillet 1675).--_Supplément aux Mémoires et - Lettres de M. le comte_ DE BUSSY-RABUTIN, t. I, p. 189. - - [442] SÉVIGNÉ, _Lettres_, t. III, p. 470, édit. G.; t. III, p. - 343, édit. M. - -Dominé par l'influence des habitudes de sa jeunesse, Louis XIV, on le -savait, ne pouvait se contraindre: il s'abandonnait sans résistance et -sans scrupule aux séductions des belles femmes de sa cour, par -lesquelles il était sans cesse assiégé; mais aucune de celles qui -avaient profité des intervalles laissés à ses désirs par les grossesses -ou les courtes absences de madame de Montespan n'avait pu parvenir à -toucher son cÅ“ur, à intéresser son esprit. Toutes n'avaient obtenu que -le facile et honteux triomphe d'être pendant quelques mois, ou même -quelques heures, l'objet préféré du caprice des sens; toutes n'avaient -fait que fortifier, par la comparaison, le vif attachement qu'il avait -pour sa maîtresse. Si, par tous les moyens qu'elle possédait d'agir sur -son esprit, elle était restée à la cour dans l'unique but de seconder le -parti religieux et de rendre à la reine son époux, madame de Montespan, -majestueuse et belle, serait devenue l'objet de l'admiration générale; -elle eût exercé sur les affaires d'État une salutaire influence, que, du -vivant de Louis XIV, aucune femme à la cour n'a su obtenir; elle eût -paru incorporée à la gloire du grand siècle comme une divinité -bienfaisante: elle eût régné! - -Telle avait été, après les communions de la Pentecôte, l'espérance du -parti moral et religieux, de Montausier, du maréchal de Bellefonds, des -Colbert, des duchesses d'Albret, de Richelieu. On apprend, par les -lettres de madame de Sévigné, quelle brillante et honorable existence -pour madame de Montespan cet espoir seul avait fait naître. Madame de -Sévigné écrit à sa fille, tandis que le roi était encore à l'armée au -camp de Nerhespen[443]: «Vous jugez très-bien de _Quantova_. Si elle ne -peut point reprendre ses vieilles brisées, elle poussera son autorité et -sa grandeur au-dessus des nues; mais il faudrait qu'elle se mît en état -d'être aimée toute l'année sans scrupule. En attendant, sa maison est -pleine de toute la cour; les visites se font alternativement, et sa -considération est sans bornes.» - - [443] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 juin 1675), t. III, p. 439, édit. - G.; t. III, p. 314, édit. M.--PELLISSON, _Lettres historiques_ - (28 juin 1675), t. II, p. 334. - -Cependant dès lors même on doutait de la constance du roi et de madame -de Montespan à garder la résolution qu'ils avaient prise. A propos de la -grande-duchesse de Toscane (Marguerite-Louise d'Orléans), qui, après -quinze ans de séjour, avait quitté son mari et venait en France[444] -dans l'espoir de plaire à Louis XIV, le même jour où la vue du saint -sacrement qu'on portait à deux soldats suisses qui allaient être -fusillés comme déserteurs donna au roi l'idée de leur faire grâce[445], -madame de Sévigné écrit à sa fille: «Je suis persuadée qu'elle aimerait -fort cette _maison_ (c'est-à -dire le cÅ“ur du roi), qui n'est point à -louer. Ah! qu'elle n'est point à louer! et que l'autorité et la -considération seront poussés loin si la conduite du retour est habile! -Cela est plaisant, que tous les intérêts de _Quanto_ et toute sa -politique s'accordent avec le christianisme, et que le conseil de ses -amis ne soit que la même chose avec celui de M. de Condom. Vous ne -sauriez vous représenter le triomphe où elle est au milieu de ses -ouvriers (à Clagny), qui sont au nombre de douze cents; le palais -d'Appollidon[446] et les jardins d'Armide en sont une légère -description. La femme de son ami solide (_la reine_) lui fait des -visites, et toute la famille tour à tour; elle passe nettement devant -toutes les duchesses; et celle qu'elle a placée (_madame de Richelieu_) -témoigne tous les jours sa reconnaissance par les pas qu'elle fait -faire[447].» Et, dans une lettre du mois précédent, elle avait écrit: -«La reine alla hier faire collation à Trianon; elle descendit à -l'église, puis à Clagny, où elle prit madame de Montespan dans son -carrosse, et la mena avec elle à Trianon[448].» - - [444] SAINT-SIMON, _Mémoires complets et authentiques_, 1829, in - 8º, t. XVIII, chap. XXVI, p. 400. - - [445] Conférez PELLISSON, _Lettres historiques_ (3 juillet 1675), - t. II, p. 344. - - [446] Conférez MICHEL-HARDOUIN MANSART, _Livre de tous les plans, - coupes, profils et élévations du château de Clagny_, 1680, - in-folio.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 août 1675), t. III, p. 499 et - 500. - - [447] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (3 juillet 1675), t. III, p. 316, édit. - M.; t. III, p. 442, édit. G. - - [448] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (12 juin 1675), t. III, p. 418, édit. - G.; t. III, p. 296. - -La séparation du roi et de madame de Montespan ne pouvait être connue à -la cour sans l'être aussi à Paris et dans la province. Madame de Scudéry -en écrivit en ces termes à Bussy-Rabutin: «Le roi et madame de Montespan -se sont quittés, dit-on, s'aimant plus que leur vie, purement par -principe de religion; on dit qu'elle retournera à la cour sans être -logée au château et sans voir jamais le roi que chez la reine... La -douce et tranquille amitié suffit pour bien remplir un cÅ“ur. Pour moi, -je trouve que madame de Montespan aura deux paradis au lieu d'un: elle -sera toujours aimée, et elle saura qu'il n'y aura que Dieu au-dessus -d'elle dans son cÅ“ur[449].» - - [449] _Supplément aux Mémoires et Lettres de M. le comte_ DE - BUSSY-RABUTIN, t. I, p. 184-187. - -Mais on apprend, par la réponse de Bussy, que lui ne se laissait point -abuser par ces belles apparences; il en était de même de madame de -Sévigné: elle prévit quel serait le dénoûment de cette amoureuse -épopée. Deux jours après, écrivant encore à sa fille, elle revient sur -cette remarquable visite de la reine à madame de Montespan, et dit: «La -reine fut voir madame de Montespan à Clagny le jour que je vous avais -dit qu'elle l'avait prise en passant; elle monta dans sa chambre, où -elle fut une demi-heure; elle alla dans celle de M. du Vexin[450], qui -était un peu malade, et puis emmena madame de Montespan à Trianon, comme -je vous l'avais mandé. Il y a des dames qui ont été à Clagny: elles -trouvèrent la belle si occupée des ouvrages et des enchantements que -l'on fait pour elle que, pour moi, je me représente Didon qui fait bâtir -Carthage. La suite de cette histoire ne se ressemblera pas[451].» - - [450] Louis-César de Bourbon, comte du Vexin, second fils de - Louis XIV et de madame de Montespan, né le 20 juin 1672; il - n'avait alors que trois ans. Il avait été légitimé en novembre - 1673, et mourut en 1683. - - [451] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (14 juin 1675), t. III, p. 419, édit. - G.; t. III, p. 297, édit. M. - -Madame de Montespan parut quelque temps vouloir participer à la bonne -résolution du roi et se montrer satisfaite «d'être aimée toute l'année -sans scrupule.» Bossuet lui-même crut à cet effort de sa raison, et -c'est peut-être ce qui le fit relâcher de la décision rigoureuse qu'il -avait donnée, au nom de l'Église, de la nécessité d'une séparation -absolue. Il prononça, dit-on, que rien n'empêchait madame de Montespan -de rester à la cour, d'y remplir sa charge de dame d'honneur de la reine -et d'y vivre aussi chrétiennement qu'ailleurs[452]. - - [452] CAYLUS, _Souvenirs_, collect. des Mémoires relatifs à - l'histoire de France, édit. de Petitot et Monmerqué, 1828, in-8º, - t. LXVI, p. 89.--Et la note de Monmerqué, t. III, p. 269 des - _Lettres de_ SÉVIGNÉ (14 mai 1675). - - -On peut suivre dans les lettres de madame de Sévigné, qui mit toujours -beaucoup d'empressement à se faire initier, autant qu'elle le pouvait, -dans le secret des petits appartements du roi et à en instruire sa -fille, cette phase curieuse de la liaison des amours de Louis XIV et de -madame de Montespan. - -«Toutes les dames de la reine sont précisément celles qui font compagnie -à madame de Montespan: on y joue tour à tour, on y mange; il y a des -concerts tous les soirs; rien n'est caché, rien n'est secret; les -promenades en triomphe. Cet air déplairait encore plus à une femme qui -serait un peu jalouse (allusion à la reine); tout le monde est content. -Nous fûmes à Clagny: que vous dirai-je? c'est le palais d'Armide; le -bâtiment s'élève à vue d'Å“il; les jardins sont faits. Vous connaissez -la manière de Le Nôtre: il a laissé un petit bois sombre qui fait fort -bien; il y a un bois d'orangers dans de grandes caisses; on s'y promène; -ce sont des allées où l'on est à l'ombre; et, pour cacher les caisses, -il y a des deux cotés de petites palissades à hauteur d'appui, toutes -fleuries de tubéreuses, de roses, de jasmins et d'Å“illets. C'est -assurément la plus belle, la plus surprenante, la plus enchantée -nouveauté qui se puisse imaginer: on aime fort ce bois[453].» - - [453] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 août 1675), t. III, p. 490 et 500, - édit. G.; t. III, p. 361. Conférez MICHEL-HARDOUIN MANSART, _Les - plans, profits et élévations du château de Clagny_, 1680. Voyez - le plan général, qui est le meilleur commentaire de cette lettre. - -Madame de Sévigné avait déjà dit, en parlant de _Quantova_: -«L'attachement est toujours extrême; on en fait assez pour fâcher le -curé et tout le monde, et peut-être pas assez pour elle; car dans son -triomphe extérieur il y a un fonds de tristesse[454].» - - [454] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 juillet 1675), t. III, p. 473, édit. - G.; t. III, p. 346. - -C'est que ce triomphe n'était pas complet. Il ne suffisait pas à madame -de Montespan d'avoir été, contre le vÅ“u de Bossuet et du parti pieux, -réintégrée au château, d'y faire sa charge, d'être estimée et considérée -de la reine et de toute la cour: tous ces honneurs, toute cette pompe ne -pouvaient la distraire de ses désirs. Louis XIV avait trente-sept ans, -madame de Montespan n'en avait que trente, et, comme lui, elle était -encore dans toute la force, dans tout l'éclat de la beauté. La vive -impression du passé pesait trop fortement sur elle et sur le roi pour -que le présent ne leur devînt pas insupportable. Bussy, qui était -instruit de tout par madame de Scudéry, prédisait avec certitude que -madame de Montespan ne pourrait demeurer à la cour que comme maîtresse. -«On ne remporte, disait-il, la victoire sur l'amour qu'en fuyant. Si, -ayant quitté le roi, elle avait encore du plaisir à s'en croire aimée, -elle ne serait pas selon le cÅ“ur de Dieu.»--«Il est vrai (ajoutait-il -avec ce solide jugement que donne l'expérience) que le bon sens voudrait -qu'on ne se chargeât point d'une grande passion, puisqu'on sait bien -qu'elle finira avant la mort; mais chacun se flatte; on ne veut pas -trouver des raisons qui empêchent de faire une chose agréable. Il est -certain que l'amitié est bien plus solide; mais il n'y a que des gens -qui ne sont plus propres à l'amour qui en soient capables[455].» - - [455] _Supplément aux Mémoires et Lettres du comte_ DE - BUSSY-RABUTIN, t. I, p. 185. - - -Habitués depuis longtemps à se comprendre sans proférer une seule -parole, Louis et Montespan connurent par leurs regards, dès les premiers -moments de leur entrevue, que leur amour mutuel s'était accru par -l'absence et par la contrainte. Alors Montespan, par son attitude, ses -paroles, ses manières, annonça qu'elle avait renoncé au rôle froid qu'on -avait voulu lui imposer, et montra la ferme volonté d'être rétablie dans -tous ses droits et dans la double puissance d'amante et de favorite. - -Le roi subissait l'influence de tout le parti pieux. Retenu par la -promesse faite à Bossuet, il résistait encore; mais les charmes -séducteurs de celle dont le son de voix seul suffisait pour l'émouvoir, -les amusants sarcasmes de son brillant esprit, sa folle gaieté, sa -tristesse et ses larmes domptèrent un courage qu'avaient seuls pu -soutenir les dangers et les distractions de la guerre. Le triomphe de -Montespan fut complet; et sa faveur, sa puissance parurent plus grandes -et plus affermies que jamais. Tout prit alors à la cour un aspect plus -gai et plus conforme aux mÅ“urs et aux habitudes qui y régnaient. -L'année put se terminer comme elle avait commencé, lorsque, pendant le -carnaval, au retour de la seconde conquête de la Franche-Comté, on -représenta le dernier ballet où Louis XIV avait dansé et l'opéra de -_Thésée_, par Quinault et Lulli. Malgré les traits satiriques dirigés -contre Lulli et Quinault par Despréaux[456], dans son épître à -Seignelay, récemment publiée (et cette épître avait pour but de -stigmatiser les flatteurs), on reprit les représentations de cet opéra; -et pour cette reprise on négligea _Iphigénie_[457], nouveau et admirable -chef-d'Å“uvre de Racine. A ce brillant spectacle Pomponne conduisit -l'abbé Arnauld, son frère, revenu de Rome, madame de Sévigné, madame de -Vins, M. de la Troche et d'Hacqueville[458]. Le prologue tout entier -était consacré aux louanges du roi, et la décoration représentait les -jardins et la façade du palais de Versailles. Louis XIV entendit encore -chanter les vers suivants: - - VÉNUS. - - Vénus répand sur lui tout ce qui peut charmer. - - MARS. - - Malheur, malheur à qui voudra contraindre - Un si grand héros à s'armer! - - VÉNUS. - - Tout doit l'aimer. - - MARS. - - Tout doit le craindre. - - VÉNUS ET MARS. - - Tout doit le craindre, - Tout doit l'aimer. - - MARS ET VÉNUS. - - Qu'il passe, au gré de ses désirs - De la gloire aux plaisirs, - Des plaisirs à la gloire! - Venez, aimables dieux, venez tous dans sa cour. - Mêlez aux chants de la victoire - Les douces chansons de l'amour. - - LE CHÅ’UR. - - Mêlons aux chants de la victoire - Les douces chansons de l'amour[459]. - - [456] BOILEAU, épître à Seignelay, vers 1, 91, 93, 134, 140, 146, - 170, 174.--_Å’uvres_ DE BOILEAU DESPRÉAUX, épître IX, 1747, - in-8º, édit. de Saint-Marc, p. 330-393; édit. 1830, in-8º, de - Berriat Saint-Prix, t. II, p. 105 à 119. - - [457] RACINE, _Iphigénie_, Paris, Barbin, 1675, in-12 (72 pages). - - [458] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (26 juillet 1675), t. III, p. 468, édit. - G.; t. III, p. 341, édit. M.--L'abbé ARNAULD, _Mémoires_, coll. - Petitot, t. XXXIV, p. 358. - - [459] FÉLIBIEN, _Relation des divertissements de Versailles_ - donnés par le roi à toute la cour, au retour de la conquête de la - Franche-Comté, l'année 1674, in-4º (5 pages).--Cinquième journée - du samedi 18 août, p. 426 à 428.--Les frères PARFAICT, _Histoire - du Théâtre françois_, t. XI, p. 318.--DE BEAUCHAMP, _Recherches - sur les théâtres_, t. III, p. 172 et 207.--QUINAULT, _Théâtre_, - édit. 1715, Paris, in-12, t. IV, p. 200 et 201.--Opéra de - _Thésée_, représenté devant Sa Majesté à Saint-Germain en Laye - (le dixième jour de janvier 1675; Paris, Ballard, in-4º, p. 5). - -Ce n'étaient pas là les exhortations de Bossuet, ce n'était pas avec de -tels vers, - - De morale lubrique, - Que Lulli réchauffait des sons de sa musique, - -que Despréaux, accusé à tort d'être un flatteur, louait le grand -monarque. C'est depuis même que l'auteur de _Thésée_ était le plus -comblé des dons de la faveur royale que le courageux législateur du -Parnasse français n'a cessé de flétrir ses fades adulations[460] et de -condamner l'opéra comme un spectacle immoral[461]. - - [460] BOILEAU, satire II, 20; III, 195; IX, 98; IX, 288.--Lutrin, - II, 92-8. - - [461] BOILEAU, satire X, 131, 141-2. - - - - -CHAPITRE XI. - -1675-1676. - - Le parti pieux espère dans l'influence de madame de - Maintenon.--Explication des causes qui font qu'à partir de cette - époque madame de Sévigné ne parle plus de madame de Maintenon - qu'avec un esprit de dénigrement.--Nécessité de jeter une vue - rétrograde sur la vie de madame de Maintenon.--Pourquoi les - historiens se sont égarés à son sujet.--Sa pauvreté, son mariage, - sa figure.--Ce qui la défendait contre la séduction.--Sa - naissance.--Son éducation.--Son désir de s'attirer la considération - et des éloges.--Son impuissance à s'en corriger.--Éducation des - filles pauvres.--Fondation des couvents d'Ursulines.--Françoise - d'Aubigné d'abord mise aux Ursulines à Niort, à Paris, ensuite aux - Ursulines de la rue Saint-Jacques.--Elle abjure la religion - protestante.--Elle se forme dans cette maison aux vertus et aux - talents qu'elle a déployés par la suite.--Sa tante Neuillant - obtient la permission de la faire mener dans le monde.--Elle va - chez Scarron.--Elle devient sa femme.--Bonheur dont elle a joui - pendant les huit années de son union.--A la mort de Scarron, la - reine donne et augmente pour sa veuve la pension qu'elle faisait à - celui-ci.--Madame Scarron se retire au couvent des - Hospitalières.--On veut la marier à un vieux duc.--Elle - refuse.--Elle est désapprouvée.--Ninon et madame de - Villarceaux.--Étroite liaison de madame Scarron avec ces deux - femmes.--Villarceaux veut la séduire, et n'y peut parvenir.--Elle - perd sa pension par la mort de la reine.--Refuse de nouveau de se - marier.--S'apprête à suivre la reine de Portugal.--Madame de - Montespan s'y oppose.--Sa pension est rétablie par le crédit de - Montespan.--Le roi confie à madame Scarron l'éducation de ses - enfants issus de madame de Montespan.--Influence de madame Scarron - sur Montespan.--Madame Scarron achète un marquisat, et le roi la - nomme marquise de Maintenon.--Contrariée par Montespan, elle est - prête à se retirer.--Se brouille avec Montespan.--Obtient de - correspondre directement avec le roi.--Revient de Baréges, et est - rétablie à la cour sur le même pied qu'autrefois.--Durée du règne - de madame de Montespan.--Les sentiments que madame de Maintenon - inspirait au roi différaient de ceux qu'il avait pour les autres - femmes. - - -Par le triomphe de madame de Montespan, le parti pieux ne fut découragé -ni vaincu; il ne pouvait pas l'être. Sans doute le petit nombre de -personnes qui le composaient n'étaient point indifférentes à la fortune -et aux honneurs; mais il n'était pas non plus formé d'ambitieux sans -principes et de courtisans sans conscience, se faisant de la religion un -honorable moyen d'acquérir du crédit, du pouvoir et des richesses. Les -chefs de ce parti étaient parfaitement convaincus des vérités de la foi; -ils savaient que le roi et sa maîtresse, malgré l'indulgence qu'ils -accordaient à leurs passions, avaient, ainsi qu'eux, de sincères -convictions; et la piété bien connue de la gouvernante des enfants de -madame de Montespan, l'amitié que celle-ci avait pour elle avaient fait -concevoir des espérances par l'ascendant qu'on lui connaissait sur -l'esprit de la favorite: ces espérances avaient été détruites par la -faiblesse du monarque et la mollesse du P. la Chaise; mais d'autres plus -fortes avaient succédé. Les enfants du roi que madame de Montespan avait -confiés à madame de Maintenon étaient ceux que Louis XIV chérissait de -préférence. Par les soins que leur prodiguait cette gouvernante, par -l'éducation qu'elle leur donnait, ils n'avaient pour celle qui les avait -mis au jour qu'une soumission et une tendresse de commande; leurs -sentiments les plus affectueux, les plus tendres se reportaient sur -celle qui leur avait servi de mère. Les dons du roi furent la juste -récompense d'une sollicitude si paternelle et si éclairée. Alors la -gouvernante, devenue plus indépendante, contrariée dans son système -d'éducation, se prévalut de la condition qu'elle avait faite de n'être -obligée de se soumettre qu'aux ordres et aux volontés du roi dans ce qui -concernait les enfants qui lui étaient confiés. L'orgueil de Montespan -fut blessé; la défiance et la jalousie firent disparaître l'attachement -que des sympathies communes avaient formé entre elles. Il n'y eut pas -rivalité, mais désunion. Ce désaccord procura à madame de Maintenon -toute la confiance du parti pieux. Elle en avait été jusqu'alors le -principal appui; elle en devint l'âme, elle en fut le chef. - -J'ai souvent eu occasion de parler dans ces Mémoires[462] de Françoise -d'Aubigné, qui, dès qu'elle fut unie à Scarron, fut aimée et recherchée -par madame de Sévigné. Mais dans les lettres de celle-ci, à partir de -l'époque où nous sommes parvenus, on voit succéder aux louanges qu'elle -lui accordait un esprit de dénigrement qui étonne. En cela madame de -Sévigné n'exprimait pas ses sentiments personnels, elle n'était que -l'écho de madame de Coulanges, des anciennes amies et protectrices de -madame de Maintenon et de toute la cour, à l'exception de ce petit -nombre de personnes unies entre elles pour arracher le roi au scandale -donné à ses sujets par ses adultères amours. Il est nécessaire, pour -l'intelligence des lettres de madame de Sévigné et encore plus pour la -parfaite connaissance de l'histoire du siècle de Louis le Grand, -d'éclaircir les causes d'un tel changement envers une femme justement -célèbre, que la considération et la faveur générales entourèrent, dès -son entrée dans le monde et pendant toute sa jeunesse, d'une auréole -lumineuse qui disparut aussitôt qu'elle eut obtenu toute la confiance de -Louis le Grand. Les nuages qui, depuis cette époque, la voilèrent aux -regards des contemporains ne se sont pas encore dissipés et ont causé -cette divergence dans l'opinion, ces jugements contradictoires qui ont -égaré les historiens quand ils ont voulu scruter les causes des -événements qu'ils avaient à raconter. Les personnes qu'on croit être -parvenues à un rang élevé par l'exercice d'un pouvoir occulte sont -rarement jugées avec impartialité; on les apprécie moins par ce qu'elles -ont dû et pu être que par ce qu'on eût désiré qu'elles fussent. Leurs -vertus et leurs qualités tournent contre elles dans notre esprit, parce -qu'elles sont autres que celles dont nous eussions voulu les décorer ou -incompatibles avec elles. Les historiens, pour de telles personnes, -aiment mieux s'efforcer de les imaginer que les peindre, de les deviner -que les définir; ils en tracent des portraits fantastiques, sans -ressemblance comme sans vérité. - - [462] _Mémoires sur Sévigné_, I, 74, 463, 466, 467, 469; II, 127, - 172, 448, 450, 451, 452; III, 62, 95, 96, 212, 219, 279; IV, 88, - 89, 91, 93, 94, 96, 144, 270, 314. - -Cependant nulle complication dans la vie de Françoise d'Aubigné; nulle -contradiction entre ses discours, ses actions et ses écrits; nulle -aberration dans sa conduite. Rien de plus uniforme, de plus certain que -les motifs qui la firent agir. Son caractère ne se démentit jamais; le -monde changea souvent autour d'elle et pour elle, mais elle, ne changea -point; dans la pauvreté et dans la richesse, dans l'abaissement et dans -les grandeurs, durant les années glorieuses du règne de Louis XIV et -durant ses désastres, elle fut toujours la même. Madame de Maintenon -est le personnage historique sur lequel on possède le plus de documents -émanés de sa bouche ou tracés par sa plume: il est donc à regretter que -les historiens, même les plus judicieux, aient préféré des satires -contemporaines, quelques _pastiches_ maladroits des lettres de Coulanges -et de Sévigné, des mémoires rédigés d'après des bruits de cour et des -traditions mensongères aux témoignages certains et authentiques fournis -par elle-même, et qu'ils aient converti une simple et intéressante -histoire en un vulgaire et incompréhensible roman. - -Je n'ai pas sans doute le projet de recommencer l'histoire si souvent -écrite de madame de Maintenon; elle n'appartient qu'en partie au sujet -qui m'occupe; mais je dois éclaircir les particularités qui la -concernent, intéressantes à connaître pour les lecteurs de ces Mémoires. - -Quoique la vie de madame de Sévigné se soit en partie écoulée dans les -mêmes lieux et au milieu des mêmes sociétés que celle de madame de -Maintenon, ces deux vies, si on les écrivait avec les mêmes intentions -que j'ai eues en composant ces Mémoires, sont des sujets qui n'ont -presque aucune connexité. La vie de madame de Sévigné se termine avec la -gloire du grand siècle; celle de madame de Maintenon s'est prolongée au -delà même des jours de Louis XIV, qui a malheureusement survécu à son -siècle. C'est durant les vingt années qui s'écoulèrent entre la mort de -madame de Sévigné et celle du roi que madame de Maintenon apparaît comme -une des figures principales que l'historien doit retracer entières au -milieu d'événements que madame de Sévigné n'a point connus, de personnes -qu'elles n'a pas vues ou qui de son temps ne figuraient point encore sur -la grande scène du monde. Il me suffira donc de jeter un regard -rétrospectif sur les premières années de la vie de madame de Maintenon -et de bien apprécier la nature de son intimité avec Louis XIV et de ses -rapports avec madame de Montespan lorsque celle-ci était plus que jamais -heureuse et fière de l'amour qu'elle inspirait au roi. - -Cette belle _pauvresse_[463], qu'à l'âge de seize ans l'avarice d'une -parente livrait à la merci d'une jeunesse ardente, de grands seigneurs, -d'hommes de lettres et d'éminents artistes qui se rassemblaient chez -Scarron, avait les cheveux châtain clair; ses beaux yeux noirs -brillaient d'un doux éclat, mais s'assombrissaient soudainement lorsque -quelque émotion pénible traversait son âme[464]. La grâce, l'esprit, la -raison s'unissaient en elle dans une juste mesure pour plaire à -l'enfance, à l'âge viril, à la vieillesse. Naturellement impatiente, -vive, enjouée[465], formée à la rude école de l'adversité, elle devint -calme, réfléchie et d'une grande égalité d'humeur. Fière et -orgueilleuse, le besoin de se faire des protecteurs la rendit insinuante -et complaisante. La religion, à laquelle (selon les expressions mêmes -d'un de ses plus grands détracteurs[466]) elle savait faire parler un -langage doux, juste, éloquent et court, inspirait à son cÅ“ur de -généreuses résolutions. L'infortune lui ravit l'âge des illusions, et la -fit avancer toute jeune dans celui de la réflexion et de l'expérience -que donne le monde. Ce qu'on appelle le monde, le beau monde, est un -_diorama_. Vu de loin, vous y contemplez un ciel brillant, des paysages -délicieux, des palais enchantés et dorés: approchez, voyez et touchez; -tout cela n'est plus qu'une toile salie par des couleurs. Françoise -d'Aubigné put se convaincre de cette triste vérité presque au sortir de -l'enfance. C'était l'époque du règne des précieuses, de l'amour -platonique et d'une licencieuse galanterie; le culte de la beauté -occupait encore plus les esprits que la politique; on se déclarait sans -ridicule amant d'une femme; elle vous accueillait comme tel sans se -compromettre. Les poëtes surtout, amoureux par état et auxquels toute -liberté en vers était permise, célébrèrent donc sans façon la belle -gorge[467] de la jeune _Indienne_, ses belles mains, sa taille élancée, -le parfait ovale de sa figure, sa physionomie fine et spirituelle, son -beau teint[468]; et comme on savait que l'infirme vieillard dont elle -était devenue la compagne avait bien pu l'épouser, mais non en faire -réellement sa femme, les plus brillants, les plus renommés, les plus -dangereux séducteurs d'alors s'empressèrent autour d'elle, et la -regardèrent[469] comme une proie facile à saisir. Une triple force la -défendait contre leurs attaques: la religion, l'orgueil de son nom et -de ses vertus et le besoin de s'attirer des éloges. Pour lutter avec -succès contre l'adversité, la nature lui avait donné tous les moyens de -séduire, et pour résister à la séduction ce que je ne puis exprimer -autrement que par l'aptitude négative de son tempérament[470]. Elle -était du nombre de celles qui, très-sensibles aux caresses que les -femmes aiment à se prodiguer entre elles en témoignage de leur mutuelle -tendresse et qu'avec plus de réserve elles échangent avec l'autre sexe, -ont une répugnance instinctive à se soumettre à ce qu'exige d'elles -l'amour conjugal pour devenir mères, moins par la persistance d'une -primitive pudeur que par l'effet d'une nature qui leur a refusé ce -qu'elle a accordé à tant d'autres avec trop de libéralité[471]. -Françoise d'Aubigné eut souvent besoin d'être rassurée par son -confesseur sur les scrupules que lui firent naître ses complaisances aux -contrariantes importunités de son royal époux à un âge où elle ne -pouvait plus espérer d'engendrer de postérité[472]. L'ancienneté non -contestée de sa noblesse et l'illustration qu'elle avait reçue de son -grand-père lui valurent d'être tenue sur les fonts de baptême par la -femme du gouverneur de la ville où elle naquit et par le gouverneur de -la province. Sa mère, femme instruite, de courage et de vertu, devenue -veuve et réduite à la misère, fut obligée de gagner sa subsistance par -le travail de ses doigts, et commença pour sa fille cette éducation qui -devait développer splendidement tous les germes d'une heureuse nature. -Aussitôt qu'elle put tenir une aiguille, Françoise d'Aubigné apprit à -travailler, et acquit, pour tous les ouvrages de femme, une adresse de -fée et une application infatigable. Enfant, elle charmait les yeux -maternels par sa prévoyante et courageuse activité à remplir les tâches -les plus difficiles, comme les plus humbles, d'un ménage pauvre. Par la -suite, lorsqu'elle eut équipage et gens à ses ordres, pour qu'un secret -important fût bien gardé, elle arrangea de ses propres mains, comme -aurait pu le faire un tapissier exercé, la chambre où elle élevait la -royale postérité qui lui était confiée. Elle devint, très-jeune, savante -dans les détails les plus minutieux de l'économie domestique, et put -parfaitement, lorsqu'elle fut grande dame, former des servantes et bien -choisir les intendants et les serviteurs de la grande maison de -Saint-Cyr. Dès qu'elle sut lire, elle apprit dans les Vies de -Plutarque, dans les écrits de Théodore-Agrippa d'Aubigné, son -grand-père, le rang qu'elle aurait pu tenir dans le monde sans les -honteux désordres de son père, et elle pressentit ce qu'elle pourrait -devenir un jour. De là cette soif orgueilleuse de considération et de -bonne renommée, qui fut le mobile de toute sa vie[473] et la principale -cause de son élévation. Ce sentiment, auquel se joignit ensuite le désir -ardent du salut, ne l'abandonna jamais. Ces deux penchants se -fortifièrent en elle avec l'âge et devinrent ses uniques passions; -passions inconciliables, et qui ne tendaient pas au même but: elle le -savait, et ses résolutions furent livrées à deux impulsions contraires. -Jamais elle ne put assurer le triomphe complet de celle qui l'élevait -vers le ciel sur celle qui l'entraînait vers l'abîme. L'humilité de ses -aveux, si souvent répétés, de ne pouvoir parvenir «à l'_écrasement de -l'amour-propre_» constate l'impuissance de ses efforts. C'est que la -religion, qui lui commandait ce sacrifice, était elle-même la cause qui -l'empêchait de l'accomplir[474]. En lui assignant une place éminente -dans l'estime de ceux qui alors formaient l'opinion du monde, la -religion entretenait en elle une ambition de s'élever sans cesse, et -madame de Maintenon ne pouvait se repentir des succès dus aux vertus -qu'elle pratiquait avec amour. Lorsqu'elle fut assise près du trône, -quand elle fut devenue la compagne du grand monarque, Fénelon, dans un -avis sur ses défauts, qu'elle avait transcrit de sa main, lui reprochait -«d'être trop sensible au plaisir de soutenir sa prospérité avec -modération et à celui de paraître par le cÅ“ur au-dessus de la place -qu'elle occupait[475].» Mais n'est-ce pas rendre le christianisme -impossible que d'exiger ce genre de perfection de l'humanité? Doit-on -expulser du monde la vertu, en lui refusant d'être sensible à la seule -récompense que le monde peut lui accorder? - - [463] MAINTENON, _Lettres à la princesse des Ursins_ (29 avril - 1713), t. II, p. 380, édit de 1765.--LA BEAUMELLE, t. VIII, p. - 289-293. - - [464] _Mémoires sur Sévigné_, 1re partie, 2e édit., p. 464. - - [465] SAINT-SIMON, _Mémoires authentiques_, t. XIII, p. 109, ch. - VIII. - - [466] MADAME DU PÉROU, _Mémoires sur madame_ de Maintenon, - recueillis par les dames de Saint-Cyr; Paris, Olivier Fulgence, - éditeur, 1846, in-12, p. 1-12.--Le P. LAGUILLE, _Fragments de - Mémoires sur la vie de madame_ DE MAINTENON, dans les _Archives - littéraires de_ VANDERBOURG, vol. XII, trimestre d'octobre 1806, - p. 363 à 370. Lisez _Navailles_ au lieu de Noailles, et - _Neuillant_ au lieu de Neuillans.--_Mémoires sur Sévigné_, 1re - partie, p. 404. - - [467] Poésies de LA MESNARDIÈRE, in-folio, pièce intitulée - _Galanterie_, et dans LA BEAUMELLE, _Mémoires_, t. VI, p. 54 et - 55. - - [468] Conférez la 1re partie de ces _Mémoires sur Sévigné_, p. - 464-69, et la 2e partie, p. 448, 449, 450, 451 à 453. - - [469] DU PÉROU, _Mémoires sur madame de Maintenon_, 1846, in-12, - p. 273. - - [470] _Lettres de messire_ GODETZ DES MARAIS _à madame de - Maintenon_, Bruxelles, 1755, in-8º, p. 108 et _passim_. C'est le - t. IX de la collection des lettres données par la Beaumelle, et - t. XV de toute sa collection sur Maintenon; conférez encore t. - VI, p. 79 des _Mémoires_. - - [471] MAINTENON, _Lettres_ (8 janvier 1680, lettre de l'abbé - Gobelin), t. II, p. 69 de l'édit. gr. in-12; Amsterdam, 1656, - Dresde, 1753, petit in-12, p. 142; Nancy, 1752, t. I, p. 158; - Paris, 1806, p. 81.--DU PÉROU, _Mémoires sur madame de Maintenon_, - 1846, in-12, p. 273. - - [472] MAINTENON, _Conversations_, 3e édit., 1828, in-18, p. - 239.--Mademoiselle D'AUMALE, _Mémoires_, ms. cité par la - Beaumelle, t. I; p. 150 et 151 des _Mém. p. s. à l'hist. de M. et - dus. de Louis XIV_.--Conférez ci-après les notes et - éclaircissements. - - [473] Mesdames DU PÉROU et GLAPION, _Mémoires sur madame de - Maintenon_, 1846, in-12, p. 5. - - [474] MAINTENON, _Entretien III_, dans LA BEAUMELLE, _Mémoires_, - etc., édit. 1756, t. VI, p. 174-176. - - [475] Avis de M. DE FÉNELON à madame de Maintenon, dans les - _Lettres de madame_ DE MAINTENON, t. III, p. 212, édit. de LA - BEAUMELLE, Amsterdam, 1756. - -Tout concourut dans Françoise d'Aubigné à soumettre sa raison aux -vérités de la religion et à imprégner son âme de la foi de ses -promesses. Les misères de son enfance, l'adversité si longtemps -combattue reportaient sans cesse ses pensées et ses espérances de -bonheur vers le ciel. Elle avait une mère catholique; mais une tante -riche la prit avec elle, et profita de son esprit précoce pour lui -donner une forte instruction religieuse. Née dans la religion -protestante, cette tante (madame de Villette) voulut lui donner une -éducation protestante, et elle s'attacha surtout à lui faire connaître -les vérités fondamentales du christianisme; elle grava dans sa jeune -âme, elle insinua dans son esprit naturellement réfléchi tout ce qui -pouvait raffermir la croyance de la révélation contre les attaques des -incrédules. Mais le zèle du catholicisme de sa mère et d'une parente -dure et avare l'arracha à la tendresse et aux soins de cette tante, -qu'elle chérissait: on la mit au couvent pour la forcer à abjurer la -religion qu'on lui avait enseignée. - -Dans les premières années du dix-septième siècle, deux femmes -instruites[476] et pieuses, dont les noms mériteraient d'être plus -connus, avaient, dans l'intention de s'opposer aux invasions du -protestantisme, fondé à Paris, dans la rue Saint-Jacques, une maison -d'instruction qui devint bientôt célèbre par l'excellence de l'éducation -que les jeunes filles pauvres y recevaient. Des religieuses ursulines -séculières et ensuite des ursulines cloîtrées dirigèrent cette maison, -qui fut la pépinière et le modèle des nombreux couvents du même ordre -répandus dans toute la France. Les ursulines de Niort, où Françoise -d'Aubigné fut mise, émanaient de celles de Paris; mais elles n'étaient -ni aussi éclairées ni aussi habiles. Françoise d'Aubigné s'attacha la -maîtresse des pensionnaires; et, quoique âgée seulement de onze ans, -elle la suppléait dans ses fonctions, faisait lire, écrire, travailler -ses compagnes et avait soin de les tenir propres. Cette instruction et -ces soins ennuyaient sa maîtresse, qui aimait à se livrer à des -occupations moins fastidieuses[477]. La vanité de la jeune d'Aubigné fut -singulièrement enflée par la confiance qui lui était accordée; et quand -les religieuses voulurent lui faire abjurer les dogmes de sa croyance, -elle résista. Alors on voulut l'intimider; on lui fit un crime de ses -raisonnements et de ses pratiques protestantes, ou la soumit aux plus -serviles fonctions, et, ne pouvant vaincre sa résistance, on la rendit à -sa mère, qui était dans l'impossibilité de payer pour elle une pension. -Un sentiment profond de sympathie pour ses condisciples pauvres comme -elle, et l'orgueil blessé d'avoir été méconnue, laissa dans l'âme de la -jeune d'Aubigné une empreinte ineffaçable. Sa mère la plaça à Paris dans -la maison principale des ursulines de la rue Saint-Jacques. Ce fut là -que Françoise d'Aubigné trouva des supérieures qui surent apprécier -toutes les ressources que présentait, pour une facile conversion, la -précoce intelligence de cette jeune fille. Sans se scandaliser, comme -les religieuses de Niort, de ses manières d'adorer Dieu, sans gêner sa -liberté, les ursulines de Paris firent comprendre à leur jeune élève, -par le bel ordre qui régnait dans leur maison, celui qui était -nécessaire au maintien de la bonne harmonie de la société chrétienne. On -lui enseigna comment Jésus-Christ avait lui-même institué l'ordre de son -Église en donnant à ses apôtres la mission de répandre et d'interpréter -sa doctrine et d'instituer leurs successeurs; que par conséquent le -premier devoir de tout croyant qui voulait être un parfait chrétien -était de se soumettre, en matière de foi et d'actes religieux, à ses -supérieurs ecclésiastiques, à ceux auxquels avait été déléguée, par -transmission successive, la puissance apostolique. Françoise d'Aubigné, -convaincue, abjura, et fit avec toute la ferveur d'une néophyte sa -première communion. Elle fut reconnaissante envers celles qui lui -avaient enseigné cette belle et féconde doctrine de l'Église catholique. -En elle était déjà le germe de la femme qui traça, d'après le modèle de -cette maison des Ursulines, les _Constitutions_ de Saint-Cyr[478]; qui -écrivit l'_Avis à madame la duchesse de Bourgogne_, tant admiré de Louis -XIV[479], les admirables lettres à l'_abbesse de Gomer-Fontaine et aux -dames de Saint-Louis_[480], l'_Esprit de l'institut des Filles de -Saint-Louis_[481], les _Conversations_, les _Proverbes_ composés pour -ses élèves chéries[482]. - - [476] Demoiselle Avrillot, femme d'Acaric, maître des requêtes, - et dame Madeleine L'Huillier, veuve de M. le Roux de - Sainte-Beuve.--Voyez JAILLOT, _Recherches sur Paris, quartier - Saint-Benoît_, p. 141 et 157, t. V. On a un portrait, gravé en - 1673, de Madeleine L'Huillier, décédée le 29 août 1640. - - [477] DU PÉROU et GLAPION, _Mémoires sur madame de Maintenon_, - recueillis par les dames de Saint-Cyr, 1846, in-12, p. 7 et 8. - - [478] _Les Souvenirs de madame_ DE CAYLUS _sur les intrigues - amoureuses de la cour_, avec les notes de M. DE VOLTAIRE, au - château de Ferney, 1770, in-12, p. 112.--_Ibid._, Paris, 1806, - Renouard, in-12, p. 193.--_Ibid._, collection des _Mémoires_ de - Petitot et Monmerqué, t. LXVI, p. 448. Dans ces trois éditions il - y a une faute grave: c'est d'avoir mis Noisy-le-Sec an lieu de - Noisy (le berceau de Saint-Cyr). Cette faute est copiée de la - Beaumelle. - - [479] _Avis de madame_ DE MAINTENON _à madame la duchesse de - Bourgogne_. LA BEAUMELLE, _Lettres de madame de Maintenon_, - Amsterdam, 1756, t. III, p. 201-10.--LÉOPOLD COLLIN, _Lettres de - madame de Maintenon_, t. VI, p. 114, édit. 1806. - - [480] _Ibid._, t. III, p. 1-10. - - [481] MAINTENON, _l'Esprit_, etc., 1699, in-12; 1711, 1808, in-12 - et in-18. - - [482] _Conversations de madame la marquise_ DE MAINTENON, - publiées par M. de Monmerqué, 1 vol. in-18, 1818, 3e - édit.--_Conversations inédites de madame_ DE MAINTENON, précédées - d'une notice par M. de Monmerqué, 1828, in-18.--_Mémoires de - madame_ DE MAINTENON; Paris, édit. Fulgence, 1846, in-12, p. 402, - ch. XXII. - -C'est en recueillant les bienfaits d'une instruction supérieure à celle -qu'elle avait reçue et en mangeant le pain de la charité que, jeune -fille pauvre, Françoise d'Aubigné éprouva par la suite le besoin de -partager son nécessaire avec de jeunes filles pauvres, de leur procurer -le bonheur par l'instruction morale et religieuse. Ainsi la grande dame -qui fonda et dirigea à Saint-Cyr un si haut et si complet enseignement -se plaisait encore, lors des voyages de Fontainebleau, à faire le -catéchisme aux _pauvresses_ dans l'église d'Avon. Ce goût pour les -fonctions d'institutrice de la jeunesse, Françoise d'Aubigné le conserva -toute sa vie. Agée de plus de soixante ans, elle écrivait à l'évêque -d'Autun avec le style de Montaigne: «Quand vous auriez envie de me -plaire, vous ne me parleriez pas mieux sur mes inclinations, qui sont -toutes portées à l'instruction et au potage[483].» - - [483] _Lettres de madame_ DE MAINTENON à M. de Caylus, évêque - d'Autun (26 juin 1709).--Dans les _Mélanges_ publiés par la - Société des bibliophiles français, 1827, in-8º, p. 3.--MAINTENON, - _Lettres à madame de Glapion_, t. III, p. 181. - -Les religieuses de la rue Saint-Jacques, en élevant avec tant de soin la -jeune orpheline, espéraient faire pour leur ordre une acquisition -précieuse. Sa pauvreté ne lui laissait (elles le croyaient) d'autre -ressource que le cloître. Son avare parente, qui ne voulait pas l'avoir -à sa charge, lui déclara qu'elle ne devait pas hésiter à prendre ce -parti. Mais l'influence qu'elle avait acquise sur ses compagnes, qui -toutes la prenaient pour amie et pour conseil, lui avait donné le -sentiment de sa supériorité. Elle aurait bien consenti à rester dans un -couvent, pourvu qu'elle en fût l'abbesse. Active d'esprit et de corps, -persévérante et réfléchie, d'un caractère énergique, plus la fortune -faisait peser sur elle sa main de plomb, plus elle se refusait à ployer -sous le joug de la dure nécessité, plus elle répugnait à aliéner son -indépendance. Si l'éducation et le malheur lui avaient donné de -l'aptitude pour se renfermer dans les asiles de la prière, elles -l'avaient encore mieux préparée aux agitations et aux intrigues du -monde. C'est dans le château de Mursay qu'élevée avec sa cousine de -Villette elle avait commencé son instruction profane. A Niort, et -peut-être aussi à Paris, un gentilhomme de sa province, vaniteux, mais -spirituel, écrivain disert et châtié[484], ami des plus célèbres -précieuses[485], des littérateurs et des savants, savant lui-même[486], -se plut de bonne heure à lui donner des leçons; et lorsqu'elle fut -sortie de l'adolescence, il les lui continua avec ce zèle intéressé que -donne l'amour dont ne peut se défendre un homme qui, dans la force de -l'âge, reçoit fréquemment des témoignages de reconnaissance d'une -innocente et gracieuse beauté à laquelle il prodigue ses soins. - - [484] Conférez MÉRÉ, _Å’uvres_, 1692, in-12, t. I, p. 107, 126, - 135, 162, 326, 333, 370. Lettres à Mitton, le plus grand puriste, - en fait de langage, de cette époque.--Conférez ces _Mémoires sur - Sévigné_, t. II, p. 255, 419. - - [485] Conférez MÉRÉ, _Å’uvres_, t. I, p. 96, 97, 115, 116, 149, - 150, etc. Lettres à mesdames de Sablé, de Lesdiguières, à Mlle de - Scudéry, etc. - - [486] Conférez MÉRÉ, _Å’uvres_, t. I, p. 6, 84, 145, 150, 159, - 215. Lettres à Balzac, Ménage, Simon, Saint-Pavin, etc.--_Ibid._, - t. I, p. 60, 159. Lettres à Pascal et à Bourdelot. - -Pendant que Françoise d'Aubigné était aux Ursulines de la rue -Saint-Jacques, sa tante Neuillant, glorieuse d'avoir contribué à la -conversion de sa nièce, avait obtenu la permission de la mener avec elle -dans la société, et elle la conduisait fréquemment chez Scarron. On sait -le reste[487]. Le plus hideux, le plus célèbre, le plus populaire des -auteurs de ce temps fut charmé de son esprit en lisant une de ses -lettres, ravi de sa figure en la voyant; et Françoise d'Aubigné, pour -échapper au cloître, épousa ce poëte, ce philosophe cynique, mais -pourtant vraiment philosophe, et même philosophe stoïcien, par cet -indomptable courage avec lequel il luttait gaiement contre les -souffrances et la mort. Il se faisait de sa plume un moyen d'existence, -écrivant, selon l'occasion et le besoin, facilement, agréablement, des -pièces de théâtre, des contes, des romans, des épîtres, des satires, des -stances, des rondeaux, des lettres en vers et en prose, de grands poëmes -en style burlesque; style qu'il mit à la mode, style détestable, mais -original, que lui seul a su bien manier, en se jouant toujours -heureusement de sa muse, des lecteurs et de lui-même; encore plus -empressé de plaire au public en général qu'aux grands et aux délicats de -la haute société, qu'il amusait néanmoins par son enjouement et les jeux -de son esprit[488]. - - [487] Voyez ci-dessus, _Mémoires sur Sévigné_, t. I, p. 228-31, - ch. XVI, et p. 466-469, ch. XXXIV. - - [488] SCARRON, _les dernières Å’uvres_, 1700, in-12, t. I, p. - 229. Héro et Léandre, ode burlesque.--_Ibid._, _Å’uvres de_ M. - SCARRON, Amsterdam, 1737, in-12, t. VIII, p. 339.--Conférez la - _Prison_ de M. D'ASSOUCY, Paris, 1674, p. 10. - - -Dans tout le cours d'une vie qui pour Françoise d'Aubigné se prolongea -jusqu'à l'âge de quatre-vingt-quatre ans, la période la plus heureuse -fut celle des neuf années que cette gracieuse beauté passa dans son -union avec Scarron, qui, en l'épousant, fut obligé de renoncer à un -canonicat, portion notable de son modique revenu; mais elle jeta un -rayon doré sur les dernières et douloureuses années de cet infirme et -généreux vieillard. Il l'avait adoptée moins comme son épouse que comme -sa secourable fille. C'est dans ces neuf années que se développèrent les -éminentes qualités qu'on admire en elle. Madame de Maintenon se retrouve -tout entière dans madame Scarron; c'est la même femme qui se continue -bienfaisante et chérie jusqu'au dernier souffle de sa longue existence. -Elle savait être à la fois à Dieu et au monde. Toutes les personnes que -Scarron aimait ou qui avaient de l'affection pour lui, tous ceux qui se -plaisaient dans sa société et s'étaient déclarés ses amis ou ses -protecteurs restèrent en tout temps les amis de Françoise d'Aubigné. -Ceux qu'elle fréquenta dans sa jeunesse furent ceux qu'elle protégea -dans son âge mûr[489]. Elle avait bien raison de se comparer à la cane -qui regrette sa bourbe quand lui revenait en souvenance l'appartement -qu'elle occupait chez Scarron. Cette salutaire contrainte qu'elle -recommande tant aux élèves de Saint-Cyr[490] ne l'empêchait pas de -s'abandonner à la gaieté de son âge et aux joyeux entretiens de -l'aimable et spirituelle société qu'elle recevait chez elle. Elle -jouissait alors de l'amitié de tous, sans rien perdre de l'estime, de la -considération et du respect qui lui étaient dus. Quand elle quittait son -modeste logis et qu'elle cédait aux invitations, elle se retrouvait à -l'aise dans le salon de Ninon, dans les jardins de Vaux, «où l'on pense, -disait-elle, avec tant de raison, où l'on badine avec tant de -grâce[491].» Elle se dédommageait ainsi de l'ennui qu'elle s'imposait -pour plaire à ses puissantes protectrices dans les hôtels d'Albret et de -Richelieu. - - [489] Conférez SCARRON, _Å’uvres_, Amsterdam, 1637, in-18, t. I, - p. 32, 35, 43, 45, 47, 62, 64, 78, 90-9, 101-29, 124, 163, 167. - Lettres de Scarron à la comtesse de Fiesque, à mademoiselle de - Neuillant, à la marquise de Sévigné, à madame Renaud de Sévigné, - au marquis et à la marquise de Villarceaux, au comte de Vivonne, - au maréchal d'Albret. - - [490] MAINTENON, _Conversations_, 3e édit., 1828, in-18, p. 184 à - 192. - - [491] MAINTENON, _Lettres_ (25 mai 1648, à madame Fouquet), t. I, - p. 25, édit. L. B. 1756. Conférez 1re partie de ces _Mémoires sur - Sévigné_, ch. XXXIV, p. 464. - -Lorsque Scarron mourut, Françoise d'Aubigné se trouva de nouveau dénuée -de toute fortune; mais la reine mère lui continua la pension qu'elle -faisait à son mari, et même l'augmenta d'un quart. Elle donna ce quart -aux pauvres[492]. Elle n'avait plus d'époux à soutenir, plus d'autres -besoins que les siens. A toutes les époques de sa vie, l'économie fit sa -richesse. Elle s'isola des grandes dames ses protectrices. En ayant -auprès d'elles la même assiduité qu'avant son veuvage, elle se serait -exposée à refuser leurs largesses; nulle ne sut mieux qu'elle conserver -avec dignité son indépendance en vivant de peu. Elle se retira chez les -ursulines de la rue Saint-Jacques, et ensuite elle alla demeurer chez -les religieuses de la Charité-Notre-Dame. Ce couvent, fondé par Anne -d'Autriche[493] pour soigner les pauvres femmes malades, était près de -la Place-Royale et de la rue des Tournelles, où elle avait demeuré[494]. -Elle se trouvait ainsi dans le voisinage de ses plus intimes -connaissances. Dans cet asile, âgée alors de vingt-cinq ans et dans tout -l'éclat de sa beauté, elle parut oublier le monde; le monde vint la -chercher[495]. Lorsqu'elle était la femme de Scarron, elle payait par -d'utiles services les bienfaits qu'elle recevait; elle avait su, en se -rendant agréable à tous, devenir nécessaire à plusieurs. Quand les -libéralités ne purent plus profiter qu'à elle seule, elle les refusa, -alléguant que son modique revenu lui suffisait avec luxe[496], et elle -parut vouloir se consacrer uniquement à la piété et aux Å“uvres de -charité. Cela ne pouvait convenir aux sociétés qui perdaient de leur -agrément par son absence. On voulut la reprendre et l'arracher à sa -retraite. On s'ingéra pour lui donner un rang et une existence. A -l'instigation de ses protectrices et de ses amies, un vieux duc se -proposa pour l'épouser[497]. Il était riche, mais débauché, sans esprit: -elle le refusa. On se choqua; on ne put comprendre que la femme qui -s'était déterminée à épouser Scarron pût dédaigner un tel parti; il fut -décidé qu'elle était orgueilleuse et ingrate, et le monde se retira -d'elle. Mais Ninon l'approuva. Ninon avait été la meilleure amie de -Scarron[498], qui demeurait dans son voisinage et se faisait souvent -transporter chez elle pour y dîner[499]. La marquise de Villarceaux, qui -s'était montrée «toute bonne, toute généreuse» pour le pauvre Scarron, -sut gré à sa veuve d'avoir refusé le vieux duc, et la vit plus -souvent[500]. Le marquis de Villarceaux, l'admirateur, l'ami et le -bienfaiteur de Scarron, était l'amant de Ninon, et fut le seul qu'elle -ait aimé de cÅ“ur. La veuve de Scarron ne demandait rien à personne, -mais elle était jalouse de la considération qu'on lui avait toujours et -partout témoignée; et elle ne se vit pas sans peine désapprouvée et -délaissée de tous ceux qui avaient été ses protecteurs et ses amis. Les -témoignages d'affection qu'elle reçut alors de Ninon et de madame de -Villarceaux la touchèrent vivement. Elle répondit par un redoublement -d'attentions et de complaisances. Elle accepta les invitations de Ninon -comme celles de madame de Villarceaux. Ninon et madame Scarron -partagèrent occasionnellement le même lit[501]. Comme les Soyecourt, les -Vardes, les Bussy, les du Lude, les Villeroi, le mari de madame de -Villarceaux passait pour un des hommes de la cour qui réussissait le -plus facilement à se faire aimer des dames; il désira vivement pouvoir -mettre dans la galerie de celles dont il avait triomphé la belle -Françoise d'Aubigné. Chez sa femme, chez Ninon, chez Scarron, -Villarceaux eut tout le loisir de mettre à profit ses moyens de -séduction, et Françoise d'Aubigné, dans une intimité journalière, devint -constamment l'objet des soins empressés, des discours flatteurs et -passionnés de l'amant de Ninon[502]. Ainsi que Ninon, et selon les -mÅ“urs et les habitudes de ce temps, Françoise d'Aubigné acceptait comme -amis ceux qui se déclaraient ses amants. Parmi eux Villarceaux était un -des plus aimables, un de ceux qui lui plaisaient le plus. Personne -alors, même parmi ceux qui s'adonnaient le plus à répandre de -scandaleuses médisances, ne fut tenté d'entacher l'honneur de la femme -de Scarron. La réputation de sa vertu, la constante amitié de Ninon et -de madame de Villarceaux[503] eussent ôté toute vraisemblance à de -telles imputations. Ce ne fut qu'après que l'étonnante élévation de -Françoise d'Aubigné l'eut exposée aux traits acérés de l'envie et de la -haine[504] que la calomnie put jeter des doutes injurieux sur cette -femme[505] si aimée et si respectée de tous durant tout le temps de son -humble fortune. - - [492] MAINTENON, _Lettres_ (1660), t. I, p. 34, édit. - 1756.--_Ibid._, t. I, p. 32, Nancy, 1752, in-12.--_Ibid._, - Dresde, 1753, p. 28, in-12. - - [493] JAILLOT, _Recherches sur Paris_, quartier Saint-Antoine, p. - 88, et HURTAUT, _Dictionnaire de la ville de Paris_, t. III, p. - 230. - - [494] DU PÉROU, _Mémoires de madame de Maintenon_, p. 49 et 50. - - [495] TALLEMANT DES RÉAUX, _les Historiettes_, t. V, p. 263, - édit. in-8º, et t. IX, p. 129, édit. in-12. Historiette du petit - Scarron. - - [496] MADAME DU PÉROU, _Mémoires sur madame de Maintenon_, p. - 19.--,LA BEAUMELLE, _Mémoires pour servir à l'hist. de madame de - Maintenon_, t. II, p. 110. - - [497] _Mémoires sur Sévigné_, 1re partie, p. 230, ch. XVI. - - [498] MAINTENON, _Lettres_, t. I, p. 37 et 38, édit. 1756; - _ibid._, t. I, p. 37, édit. 1752; _ibid._, p. 30 et 31, édit. - 1753. - - [499] SCARRON, _Å’uvres_, 1737, t. I, p. 48.--_Les dernières - Å’uvres de Monsieur_ SCARRON (_sic_), t. I, p. 34, Paris, 1669, - in-12 (lettre au marquis de Villarceaux). - - [500] SCARRON, _Å’uvres_, t. I, p. 46 (lettre à la marquise de - Villarceaux, p. 48, lettre au marquis de Villarceaux).--_Ibid._, - _les dernières Å’uvres de M._ SCARRON, 1669, in-12, p. 25 et 31. - - [501] MAINTENON, _Lettres_ (8 mars 1666), _ibid._, édit. - d'Amsterdam, chez Sweares, t. I, p. 32; édit. 1756, t. I, p. 37 - et 38, Amsterdam, aux dépens de l'éditeur.--_Ibid._, édit. de - Nancy, 1752, in-12, p. 37; édit. de Dresde, in-12, p. 31; édit. - de Léopold Collin, Paris, 1806, t. I, p. 33.--DRET, _Mémoires de - madame de Lenclos_, 1751, in-18, p. 74, à tort contredit par LA - BEAUMELLE, _Mémoires sur Maintenon_, t. I, p. 217.--DOUXMESNIL, - _Mémoires et Lettres de Lenclos_, 1751, p. 22.--TALLEMANT, t. I, - p. 130. - - [502] Conférez _Mémoires sur Sévigné_, 2e partie, p. 468-9, ch. - XXXIV.--TALLEMANT DES RÉAUX, _Historiettes_, t. V, p. 262, édit. - 1834; t. IX, p. 128, édit. in-12.--VOLTAIRE, _Å’uvres_, t. XXXIX, p. - 404. - - [503] MAINTENON, _Lettres_, t. I, p. 28, édit. 1756 (27 août - 1607, à madame de Villarceaux). - - [504] TALLEMANT DES RÉAUX, _Historiettes_, édit. in-12. - Historiette de Scarron, t. IV, p. 128; t. V, p. 262 de l'édition - in-8º. - - [505] CAYLUS, _Mém._, collect. Petitot, t. LXVI, p. - 420.--_Ibid._, édit. de Voltaire, au château de Ferney, 1770, p. - 76 et 77, et la note de Voltaire.--_Ibid._, édit. Renouard, 1806, - in-12, p. 148. - -Singulier mélange de contrastes et de ressemblances que les destinées de -Françoise d'Aubigné et de Ninon de Lenclos! Toutes deux parvinrent à un -grand âge, toutes deux restèrent longtemps unies, et durent cesser de se -voir sans cesser de ressentir l'amitié qui les avait rapprochées. Leurs -attraits, leur art de plaire, leur rare esprit de conduite, la sûreté de -leur commerce, firent le charme des sociétés de leur temps. Toutes deux -devinrent célèbres et se concilièrent, à des degrés divers et par des -moyens différents, la considération du monde. L'une ne s'est jamais -départie de la philosophie épicurienne, qui permettait tout aux -passions; l'autre fut constamment fidèle à la religion, qui ne leur -permettait rien. L'une fut le modèle de son sexe; malheur à toute femme -qui, séduite par le succès de l'autre, oserait la prendre pour -modèle[506]! - - [506] Conférez ces _Mémoires sur Sévigné_, 4e partie, p. 111; - _ibid._, 1re partie, p. 236-243, 254-263. - -La mort de la reine mère, au mois de janvier 1666, enleva à madame -Scarron la pension qu'elle recevait, et la misère retomba sur elle de -tout son poids. Elle se vit forcée d'avoir recours à ses anciennes -protectrices. Toutes s'employèrent pour obtenir le rétablissement de sa -pension. Louis XIV fut fatigué des sollicitations des femmes de sa cour -en faveur de la veuve de Scarron. Colbert était là , et le jeune roi -ferme encore dans la résolution que le ministre lui avait inspirée de ne -pas charger le trésor de dépenses inutiles et improfitables. Le nom de -l'auteur de la _Mazarinade_[507] faisait d'ailleurs sur le monarque une -désagréable impression: il refusa. Le grand personnage qui avait voulu -épouser Françoise d'Aubigné crut l'occasion favorable pour s'offrir de -nouveau[508], et elle se trouva encore, comme avant son mariage avec -Scarron, forcée de choisir entre le couvent ou un époux. Elle rejeta -l'un et l'autre. Pour ne recevoir de dons de personne, elle se détermina -à prendre un parti violent qui lui coûtait beaucoup, puisqu'il lui -enlevait son indépendance, rompait toutes ses habitudes et des liens -d'amitié qui lui étaient chers: elle résolut de s'exiler. La princesse -de Nemours allait épouser Alphonse VI, roi de Portugal: Françoise -d'Aubigné consentit à la suivre à Lisbonne, en se plaçant sous les -ordres de sa _donna cameira_[509] ou dame d'honneur. La nouvelle de ce -départ émut ses nombreux amis «de la Place-Royale et de Saint-Germain,» -c'est-à -dire de la ville et de la cour. - - [507] SCARRON, _Å’uvres_, édit. 1737, t. IX, p. VI, VII. - - [508] LA BEAUMELLE, _Mémoires pour servir à l'hist. de madame de - Maintenon_, liv. VI, c. IV, t. II, p. 109. - - [509] MAINTENON, _Lettres_, t. I, p. 41, édit. 1656; _ibid._, p. - 38, édit. 1758; _ibid._, t. I, p. 35, Nancy, 1752; _ibid._, p. - 41, Dresde, 1753; _ibid._, t. I, p. 39, édit. de 1806. Dans les - éditions seules de 1752 et 1753 la lettre est complétement datée - (30 juin 1666), et il y a _dona almera_. - -Madame de Montespan, que sa sÅ“ur madame de Thianges, le maréchal -d'Albret et Villeroi avaient informée de ce départ, s'y opposa. Elle -obtint pour madame Scarron le rétablissement de sa pension et un -gracieux accueil du roi[510], qui doublait le prix de cette faveur. La -reconnaissance de Françoise d'Aubigné pour madame de Montespan fut -proportionnée au service qu'elle lui avait rendu. Madame Scarron n'avait -pas sans terreur prévu les privations qu'elle s'imposait en quittant la -France, en s'éloignant de tout ce qui lui faisait aimer la vie. Quoique -sa piété se fût accrue par la douleur d'avoir perdu sa protectrice et -avec elle ses moyens d'existence, elle ne pouvait, même avec le secours -du sévère confesseur[511] qu'elle s'était choisi, dompter cette -coquetterie naturelle aux femmes que leur beauté ou les charmes de leur -esprit ont habituées aux douceurs d'une société aimable et polie, dont -elles accroissent la joie par leur seule présence. Françoise d'Aubigné -pratiquait très-bien, par des moyens dont la pureté d'intention lui -déguisait le danger, cet art que l'exemple de Ninon, plus âgée et plus -avancée qu'elle dans la science du monde, lui avait enseigné, de -désintéresser ceux qu'elle désirait s'attacher, en les forçant de -préférer à l'enivrement produit par ses grâces et ses attraits la douce -séduction de l'estime et de la confiance que leur inspiraient son -esprit, son abandon aimable et sa solide raison. - - [510] _Mémoires sur Sévigné_, 3e partie, p. 95 à 97. - - [511] MAINTENON, _Lettres_, édit. 1756, t. II, p. 1 à 96 (à - l'abbé Gobelin).--Madame DU PÉROU, _Mém. de madame de Maintenon_, - p. 54 à 58. - -Madame de Montespan avait travaillé pour elle-même en obligeant madame -Scarron; celle-ci lui plut par ses entretiens enjoués, par sa -discrétion, son tact délicat des convenances, son aversion pour les -grandes affaires de la politique, son éloignement pour les intrigues de -cour, qui étaient pour madame de Montespan une occupation -principale[512]. Ce qui surtout, dans Françoise d'Aubigné, charmait -madame de Montespan, c'était cette morale toute chrétienne, stricte, -mais non austère, qu'elle se plaisait à considérer comme un refuge -assuré dans un avenir lointain. Françoise d'Aubigné avait moins de -brillant, moins de soudaineté et d'originalité dans l'esprit que -Montespan, mais plus de justesse, de discernement et de finesse. Dégagée -qu'elle était du joug des passions, elle avait dans les idées et dans -les sentiments une netteté, une sûreté de jugement, une constance et une -rectitude d'action que ne possédait pas madame de Montespan, sans cesse -en proie aux agitations et aux inquiétudes de l'amour, de la jalousie, -de l'ambition. Montespan d'ailleurs était moins instruite que Françoise -d'Aubigné, qui écrivait avec cette facilité et cette grâce particulières -à plusieurs femmes de ce temps et avec l'exactitude grammaticale d'un -académicien. Par ce talent, par ses connaissances pratiques de la -science domestique, par ses qualités essentielles comme par celles qui -sont frivoles, madame Scarron se rendit indispensable à madame de -Montespan, qui ne s'en séparait qu'avec peine. Tant que dura l'éducation -du duc du Maine et avant qu'à l'âge de dix ans il fût remis entre les -mains des hommes, madame Scarron demeura à la cour, dans les -appartements de madame de Montespan[513], et fut initiée à tous les -secrets de sa vie intérieure, à toutes les particularités de sa liaison -avec le roi, et souvent consultée avec fruit. Elle sut profiter de la -confiance qu'elle avait obtenue pour favoriser l'élévation des grands -personnages qui l'avaient aidée au temps de sa détresse. Les d'Albret, -les Richelieu, les Montchevreuil et autres[514] usèrent avantageusement -de la facilité qu'elle avait de se faire écouter. On peut même affirmer -que jamais son influence sur Louis XIV ne fut plus grande que -lorsqu'elle s'exerçait par le crédit d'une autre. On ne l'ignorait pas; -et jamais on ne fut plus empressé auprès d'elle, jamais elle ne se fit -plus d'amis et ne rendit plus de services que lorsqu'elle ne pouvait -rien par elle-même et ne voulait rien pour elle-même. Le roi, -qu'importunait sa présence lorsqu'il aurait désiré être seul avec sa -maîtresse, ne s'habitua que difficilement, et non sans une sorte de -jalousie, à voir madame de Montespan prendre tant de plaisir dans le -commerce intime d'une femme si bien connue pour la sévérité de ses -principes[515]. Les premiers dons de Louis XIV à Françoise d'Aubigné, -après le rétablissement de sa pension, ne furent dus qu'à l'importunité -de Montespan; ce fut elle qui insista fortement, et sans y être excitée -par personne, pour que son amie, sa protégée reçût, par l'achat et la -possession d'une terre, un titre et un nom plus convenable que celui de -veuve Scarron[516]. - - [512] CAYLUS, _Souvenirs_, p. 66, édit. Raynouard, 1806; collect. - Petitot, t. LXVI, p. 270; _ibid._, p. 13 de l'édition de - Voltaire, du château de Ferney, 1770, in-12.--Madame DU PÉROU, - _Mémoires de madame de Maintenon_, 1846, p. 44, 47 et - 48.--MAINTENON, _Lettres à la princesse des Ursins_, 30 septembre - 1713, t. II, p. 440. - - [513] DU PÉROU, _Mém. sur madame de Maintenon_, p. 44-8, - 235.--MAINTENON, _Lettres à la princesse des Ursins_, Paris, - 1806, in-8º (10-11 septembre 1805), t. III, p. 218. - - [514] Madame DU PÉROU, _Mémoires de madame de Maintenon_, 1846, - in-12, p. 21 et 22. - - [515] Conférez _Mémoires sur Sévigné_, 3e partie, p. - 62-95-97-279. - - [516] SAINT-SIMON, _Mémoires complets et authentiques_, édit. - 1829, t. XIII, p. 102 et 103. - -Mais alors tout était changé pour Françoise d'Aubigné; elle s'était -chargée d'élever les enfants du roi et de Montespan. Sa destinée fut -fixée[517] selon ses désirs, selon ses goûts, selon sa vocation. Elle -était par là appelée à faire le meilleur emploi de ses éminentes -facultés, à donner tous les soins d'une tendre mère aux enfants de son -roi[518], à leur inculquer les vérités de la foi, à diriger leurs -premiers penchants, à guider leurs premiers pas dans ce monde splendide -et corrompu où ils devaient apparaître, à recueillir enfin pour -récompense, pour prix des soins qu'elle leur donnait l'affection et le -respect de leur âge mûr. Elle se promettait, par leur moyen, d'obtenir -un salutaire ascendant sur l'esprit de leur mère, de cette belle -Mortemart, qu'elle avait connue autrefois si jeune, si vertueuse, si -fortement imbue des principes de religion qu'elle conservait encore. -Françoise d'Aubigné espérait payer ainsi les bienfaits qu'elle pourrait -recevoir de Louis XIV par des bienfaits plus grands, et devenir un des -humbles instruments que Dieu avait choisis pour ramener dans la voie du -salut le plus grand des souverains. - - [517] Conférez _Mémoires sur Sévigné_, 3e partie, p. 213-215. - - [518] Conférez _Mémoires sur Sévigné_, 4e partie, p. 144. - -Tels étaient les projets de la veuve Scarron; on sait le courage et -l'habileté qu'elle mit à les exécuter. Les commencements répondirent à -ses ambitieuses espérances: l'éducation du jeune duc du Maine fut, de la -part du roi, récompensée par des dons qui mirent pour toujours Françoise -d'Aubigné à l'abri du besoin dont elle avait si longtemps souffert. Elle -put acheter (le 27 décembre 1674) la terre de Maintenon[519], qui était -un marquisat; le roi lui donna lui-même le titre de marquise de -Maintenon. Sous l'éclat de ce dernier nom disparut alors celui de -Scarron: il ne servit plus qu'à marquer dans l'histoire la distance -prodigieuse qu'a franchie Françoise d'Aubigné pour parvenir à la -miraculeuse élévation où elle s'est trouvée portée. - - [519] MAINTENON, _Lettres_ (Saint-Germain, le 10 novembre 1674), - t. I, p. 106, édit. 1756.--_Ibid._ (16 juillet 1674), t. II, p. - 6. Lettre à l'abbé Gobelin.--Duc DE NOAILLES, _Histoire de madame - de Maintenon_, 1848, in-8º, t. I, p. 485. - -Elle avait réussi du côté du roi dans le plan qu'elle s'était tracé; -mais c'est à l'époque même de ses premiers succès qu'elle fut sur le -point d'échouer et qu'elle parut résolue à quitter la cour, à se -renfermer dans son château ou dans une maison religieuse, à faire une -retraite qui ne lui fit rien perdre des éloges et de la considération du -monde, dont elle était de plus en plus jalouse[520]. - - [520] MAINTENON, _Lettres_ (Saint-Germain, 31 octobre 1674), t. - II, p. 21 et 22 de l'édit. 1806; _ibid._, t. II, p. 11 et 12, - édit. 1756. - -Madame de Montespan, comme toutes les femmes que leurs passions, leurs -plaisirs ou leur ambition entraînent dans le mouvement rapide du monde, -prenait peu de souci de ses enfants, et trouvait très-bon qu'ils -préférassent à leur mère celle qui s'occupait d'eux sans cesse et qui -les élevait avec un zèle éclairé. Françoise d'Aubigné, d'ailleurs, avait -soin d'assujettir ses élèves aux démonstrations d'une tendresse -respectueuse envers leurs augustes parents; mais l'accomplissement de ce -devoir ressemblait peu à l'amoureuse soumission qu'ils témoignaient pour -leur gouvernante. Elle se montra très-habile à inspirer à l'aîné de ces -enfants les saillies charmantes d'un esprit enfantin; et on peut juger -avec quelle mesure, quelle délicatesse elle savait se servir de -l'intelligence précoce de cet enfant pour flatter sa mère quand on a lu -les quelques pages intitulées: _Å’uvres diverses d'un auteur de sept -ans_, qu'elle fit imprimer à un petit nombre d'exemplaires, et dont elle -composa l'épître dédicatoire adressée à madame de Montespan[521]. - - [521] _Å’uvres diverses d'un auteur de sept ans, ou recueil des - ouvrages de M. le duc_ DU MAINE, _qu'il a faits pendant l'année - 1677 et dans le commencement de l'année 1678_, Paris, - in-4º.--Conférez _Nouvelles de la république des lettres_, - février 1685, t. IV, 2e édit., 1686, p. 203 à 209. L'épître - dédicatoire se trouve dans les _Lettres_ DE MAINTENON, édit. - 1806, t. I, p. 54. - - -L'accord de madame de Montespan et de Françoise d'Aubigné fut parfait -tant que les enfants restèrent en bas âge et lorsqu'ils ne réclamaient -que des soins matériels; mais il n'en fut pas de même lorsque le secret -de leur naissance eut été dévoilé et quand le duc du Maine, ayant paru à -la cour, eut attiré l'attention du roi; quand la gouvernante lui eut -donné le Ragois, neveu de son confesseur, pour précepteur, et eut -annoncé l'intention de diriger entièrement son éducation. Madame de -Montespan voulut s'en mêler; elle éprouva de la résistance. Françoise -d'Aubigné soutenait qu'elle ne devait compte qu'au roi de ses enfants, -parce qu'elle n'avait consenti à se charger de leur éducation qu'à cette -condition. Madame de Montespan, qui jusqu'ici avait traité en amie la -gouvernante, voulut avec hauteur exercer son autorité. Françoise -d'Aubigné faisait en quelque sorte partie du ménage du roi et de madame -de Montespan. Le roi, qui avait l'habitude de les voir ensemble toujours -unies, fut surpris et ennuyé de leurs fréquentes altercations[522]; et -quoiqu'il eût plus qu'aucun homme au monde un tact sûr pour discerner -promptement tous les genres de mérite et qu'il eût conçu de celui de la -gouvernante une idée supérieure encore aux éloges qu'on lui en avait -faits, cependant, comme il était dans le paroxysme de son amour pour -Montespan, il préféra donner à celle-ci la permission de la renvoyer. -Mais il n'était pas facile à madame de Montespan d'user de cette -faculté: désormais elle avait plus besoin de madame de Maintenon que -madame de Maintenon n'avait besoin d'elle. - - [522] MAINTENON, _Lettres_, édit. de Dresde, 1753, in-12, p. 48 - et 50 (à l'abbé Gobelin, 6 mai et 16 juin 1671, lisez 1673); - _ibid._, édit. de Nancy, 1752, petit in-12, t. I, p. 54 et 57; - _ibid._, édit. in-12, 1756, grand vol., p. 9-12-14 (31 octobre et - novembre 1674); édit. 1806, t. I, p. 18-23. Les dates de l'année - sont inexactes. - -Madame de Montespan comprenait très-bien qu'elle causerait un chagrin -profond à ses enfants si elle les privait d'une gouvernante aussi -tendrement aimée et qu'il eût été impossible de remplacer. Mais c'était -surtout pour elle-même qu'elle désirait garder celle qu'elle avait été -habituée à considérer comme son amie, celle qui l'aidait toujours à -détruire dans l'esprit du roi le mauvais effet de ses caprices et de ses -humeurs, à rompre la monotonie des tête-à -tête et à dissiper les ennuis -et les tristesses de son intérieur. - -D'ailleurs, quoique le parti religieux fût contraire à madame de -Montespan, il la ménageait précisément à cause de l'étroite liaison qui -existait entre elle et madame de Maintenon; et celle-ci, par cette -intimité même, avait acquis à la cour une importance au-dessus du rang -qu'elle y occupait: en la disgraciant, madame de Montespan eût -mécontenté le parti qu'elle désirait ménager dans l'intérêt de sa -conscience et de celle du roi. Ainsi madame de Montespan renonça à -l'idée de renvoyer la gouvernante; mais elle résolut de l'éloigner de la -cour en lui procurant un établissement. Elle détermina le vieux duc de -Villars-Brancas à demander sa main[523]. Françoise d'Aubigné refusa ce -parti. Madame de Montespan dissimula, et continua, en présence du roi, à -traiter madame de Maintenon en amie; elle chercha à la réduire à plus -d'obéissance et de soumission par le moyen du roi lui-même. Elle avait -observé que, malgré son humilité chrétienne, Françoise d'Aubigné -ambitionnait surtout l'approbation et l'estime du roi, et que les éloges -qu'il lui donnait ou qu'il faisait de son élève le duc du Maine -«chatouillaient de son cÅ“ur l'orgueilleuse faiblesse.» - - [523] SAINT-SIMON, _Å’uvres complètes_, t. XIII, p. 104. - -Ce ne fut plus qu'en l'absence du roi que Montespan se permit envers -elle ces hauteurs insultantes et ces exigences humiliantes qui la -blessaient au cÅ“ur; de sorte qu'il fut facile à la favorite, quand elle -était mécontente de la gouvernante, de lui donner tous les torts dans -l'esprit du monarque. C'est ainsi que, selon que Montespan était -satisfaite ou mécontente, la gouvernante recevait de Louis XIV un -accueil plus ou moins gracieux, plus ou moins froid, ou tout à fait -glacial. Ainsi agitée par des alternatives de crainte et d'espérance, et -dans l'incertitude de savoir si elle plaisait ou si elle -déplaisait[524], Françoise d'Aubigné, dont la fierté se révoltait de -voir ses services méconnus, résolut de saisir la première occasion pour -avoir une explication franche et hardie avec Louis XIV[525], de demander -à se retirer de la cour et à cesser de diriger l'éducation des princes -si elle restait sous la dépendance de madame de Montespan, ou à -continuer de faire sa charge si elle avait permission de n'obéir qu'au -roi et de correspondre directement avec lui. Cette occasion se trouva, -cette explication eut lieu[526] à la grande satisfaction du roi: -Françoise d'Aubigné, devenue madame de Maintenon, redoubla d'égards -envers madame de Montespan, et leur amitié ne parut en rien altérée. La -passion du roi pour cette dernière continuait toujours aussi vive, et la -division qui existait entre elle et madame de Maintenon se déroba -longtemps aux regards jaloux et envieux des courtisans. - - [524] MADAME DU PÉROU, _Mém. de madame de Maintenon_, p. 19.--$1, - _Mém. p. s. à l'hist. de madame de Maintenon_, t. II, p. - 110.--Monmerqué, SÉVIGNÉ, t. VI, p. 240 et 379, note sur la - lettre du 19 avril 1680.--TALLEMANT DES RÉAUX, _Historiettes_, - II, 139, édit. in-8º; _ibid._, III, édit. in-12, p. 135.--MADAME - DU PÉROU, _Mém. sur madame de Maintenon_, p. 19.--LA BEAUMELLE, - _Mémoires pour servir à l'histoire de madame de Maintenon_, t. - II, p. 110. - - [525] MAINTENON, _Lettres_ (14 juillet, 31 octobre 1674), t. II, - p. 21 et 22 de l'édit. 1806; _ibid._, t. II, p. 11 et 12 de - l'édit. d'Amsterd., 1756. - - [526] Mesdames DU PÉROU et GLAPION, _Mémoires sur madame_ DE - MAINTENON, recueillis par les dames de Saint-Cyr, 1846, in-12, p. 22. - -Ce secret ne commença à percer que lors du voyage de madame de Maintenon -et du duc du Maine à Baréges. - -Le duc du Maine avait eu pendant sa dentition des convulsions qui lui -avaient raccourci une jambe. Il fut décidé qu'on conduirait le jeune -prince à Anvers pour consulter un médecin renommé de cette ville. -Françoise d'Aubigné prit le nom de marquise de Surgères, et partit -incognito avec son élève. Elle arriva à Anvers au milieu d'avril 1674. -De là elle écrivit à madame de Montespan et au roi, et revint -s'installer à Versailles[527]. Le jeune prince revint d'Anvers plus -boiteux qu'il n'était avant de partir, ce qui nécessita deux voyages à -Baréges qui eurent le plus heureux succès. Dans ces deux voyages, -madame de Maintenon rendait compte de la santé du prince au roi et à sa -mère. C'est par cette correspondance que Louis XIV put apprécier tout -l'esprit et le talent d'écrire de madame de Maintenon. Ce roi, si habile -à discerner dans ceux qui l'approchaient tous les genres de mérite, -reconnut que cette gouvernante était capable de développer dans celui de -ses fils qu'il chérissait le plus, non-seulement les grâces de l'enfant, -mais aussi les qualités de l'homme, et de le rendre par là digne du rang -qu'il devait occuper. Louis XIV sut comprendre que la nécessité, cette -mère des grands succès, et la religion, cette consolatrice de l'âme, ne -formèrent jamais de femme plus judicieuse, plus instruite, plus -énergique, plus involontairement gracieuse, plus naturellement vertueuse -que celle qu'avait choisie Montespan pour élever les enfants qu'il avait -eus d'elle. - - [527] MAINTENON, _Lettres_ (18 avril 1674), édit. 1756, t. I, p. - 52 et 53.--_Mémoires de madame_ DE MAINTENON, recueillis par les - dames de Saint-Cyr, 1846, in-12, p. 17.--MONTPENSIER, _Mémoires_, - collection Petitot, t. XLIII, p. 403.--CAYLUS, _Souvenirs_, t. - LXVI, p. 391.--Les Mémoires manuscrits de mademoiselle D'AUMALE, - cités à cet endroit par M. Monmerqué, _ibid._, p. 40 de l'édit. - de Voltaire, au château de Ferney, 1770, édit. in-12. - -En l'année 1675, le mercredi des Cendres, ou l'ouverture du carême, -était le 27 février, et Pâques le 14 avril; c'est dans cet intervalle -qu'a eu lieu le refus d'absolution dont nous avons raconté les -circonstances. - -Madame de Maintenon était aux eaux de Baréges lorsqu'elle apprit ce qui -se passait à la cour et dans le camp du roi, le projet de séparation des -deux amants et leurs pieuses résolutions; il n'est pas douteux qu'elle -dut alors en féliciter madame de Montespan et le roi lui-même, auquel -elle rendait compte, dans des lettres qui quelquefois avaient huit ou -dix pages, de tout ce qui concernait les voyages entrepris pour la santé -du duc du Maine[528]. Elle écrivit à plusieurs personnes, on n'en peut -douter, sur ce sujet important pour elle-même et pour l'intérêt de ses -élèves, qu'elle chérissait comme une mère[529]; on la désabusa, et on -lui apprit que Montespan cherchait de nouveau à passionner le roi. Ce -fut alors que commença à percer un secret jusqu'ici caché soigneusement -à toute la cour: ce secret était le désaccord de madame de Montespan et -de madame de Maintenon et la révélation de la cause qui avait produit -cette mésintelligence. Madame de Sévigné se hâta, aussitôt qu'elle le -connut, d'en instruire sa fille. - - [528] PELLISSON, _Lettres historiques_ (3 juin 1675, du camp de - Latines), t. II, p. 277. - - [529] MAINTENON, _Lettres à l'abbé Gobelin_ (8 mai 1675), in-12, - t. II, p. 32. - -«Je veux vous faire voir un petit dessous de cartes qui vous surprendra: -c'est que cette belle amitié de _Quantova_ (madame de Montespan) et de -son amie (madame de Maintenon) qui voyage est une véritable aversion -depuis près de deux ans; c'est une aigreur, une antipathie; c'est du -blanc, c'est du noir. Vous demandez d'où vient cela? C'est que l'amie -est d'un orgueil qui la rend révoltée contre les ordres de _Quanto_; -elle n'aime pas à obéir; elle veut bien être au père, mais non pas à la -mère; elle fait le voyage à cause de lui, et point du tout pour l'amour -d'elle; elle rend compte à l'un, et point à l'autre: on gronde l'ami (le -roi) d'avoir trop d'amitié pour cette glorieuse; mais on ne croit pas -que cela dure, à moins que l'aversion ne se change ou que le bon succès -d'un voyage ne fît changer ces cÅ“urs. Ce secret roule sous terre -depuis plus de six mois; il se répand un peu, et je crois que vous en -serez surprise. Les amis de l'amie en sont assez affligés[530].» - - [530] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 août 1675), t. III, p. 501, édit. G.; - t. III, p. 362, édit. M. - -Les amis de madame de Montespan, comme ceux de madame de Maintenon, -étaient également intéressés à déguiser cette désunion et à la nier. Le -crédit des uns et des autres s'affaiblissait par celui que madame de -Maintenon cessait d'avoir auprès de madame de Montespan, et par -l'atteinte que portait au pouvoir de celle-ci, sur l'esprit du roi, la -désapprobation de madame de Maintenon, estimée de toute la cour. - -Quinze jours après cette lettre, madame de Sévigné apprend à sa fille -que les amis de madame de Maintenon nient qu'il y ait aucune altercation -sérieuse entre elle et Montespan; et ceci indique les progrès que -faisait cette dernière pour enflammer de nouveau le roi lorsqu'il allait -lui rendre visite. - -«Les amis de la _voyageuse_, voyant que le dessous des cartes se répand, -affectent fort d'en rire et de tourner cela en ridicule, ou bien -conviennent qu'il y a eu quelque chose, mais que tout est accommodé. Je -ne réponds ni du présent ni de l'avenir dans un tel pays; mais du passé, -je vous en assure... Pour la souveraineté, elle est établie comme depuis -Pharamond. Madame de Montespan joue en robe de chambre avec les dames du -château (les dames du palais, dont elle faisait partie), qui se trouvent -trop heureuses d'être reçues et qui souvent sont chassées par un clin -d'Å“il qu'on fait à la femme de chambre[531].» - - [531] _Lettres de madame_ DE RABUTIN-CHANTAL, _marquise_ DE - SÉVIGNÉ, _à madame la comtesse de Grignan, sa fille_; la Haye, - 1726, in-12, t. II, p. 55, mercredi 19 août (_corrigez_ 21 août) - 1675. Dans toutes les autres éditions, sans exception, le texte - de cet important passage. est faux ou défiguré. Les notes de ces - éditions doivent disparaître. - -Les dernières nouvelles que madame de Sévigné transmet à sa fille -prouvent qu'au commencement de septembre madame de Montespan n'était pas -encore parvenue à faire changer le roi de résolution et qu'elle -craignait, en pressant trop vivement la conclusion de son rappel à la -cour, de perdre la confiance et l'estime du monarque. - -«Il est certain, dit madame de Sévigné, que l'ami et _Quanto_ sont -véritablement séparés; mais la douleur de la demoiselle est fréquente, -et même jusqu'aux larmes, de voir à quel point l'ami s'en passe bien; il -ne pleurait que sa liberté, et ce lieu de sûreté contre la dame du -château (la reine): le reste, pour quelque raison que ce puisse être, ne -lui tenait plus au cÅ“ur. Il a retrouvé cette société qui lui plaît; il -est gai et content de n'être plus dans le trouble, et l'on tremble que -cela ne veuille dire une diminution, et l'on pleure; et si le contraire -était, on pleurerait et on tremblerait encore: ainsi le repos est banni -de cette place. Voilà sur quoi vous pouvez faire vos réflexions, comme -sur une vérité; je crois que vous m'entendez[532].» - - [532] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 septembre 1675), t. IV, p, 94, édit. - G.; t. III, p. 464, édit. M. - -Cette situation ne pouvait durer. Les charmes séducteurs de Montespan, -le son de sa voix, le feu de ses regards, les amusants sarcasmes de son -brillant esprit, sa folle gaieté, sa tristesse et ses larmes domptèrent -bientôt le courage de Louis XIV. Les divertissements du théâtre, auquel -il ne voulut jamais renoncer; la musique de Lulli, les vers de Quinault, -les danses voluptueuses de leurs drames magiques, l'indulgence -intéressée du P. la Chaise facilitèrent le triomphe de Montespan, qui -fut enfin complet. La date et la durée de ce triomphe furent révélées au -monde le 9 mai 1677 par la naissance de la seconde mademoiselle de -Blois, depuis femme du régent, qui fut si laide, et, le 6 juin 1678, par -celle du comte de Toulouse, qui fut si beau. La naissance de -mademoiselle de Tours, morte jeune, venue à terme au mois de janvier -1676, prouva aussi que l'intimité de madame de Montespan avec Louis XIV -était aussi forte après son retour de l'armée qu'avant le départ. - -Tout était donc ramené sur l'ancien pied lorsque la _voyageuse_ revint -avec son élève le duc du Maine. Comme elle n'avait jamais varié dans sa -conduite et dans son langage, elle se retrouva aussi bien établie à la -cour que lorsqu'elle l'avait quittée, et même mieux. Son absence lui -avait profité en nécessitant une correspondance directe avec le roi. -L'espoir que le parti religieux avait fondé sur son influence s'accrut -encore par la part qu'elle avait eue dans le succès momentané de ce -parti. On connaissait Louis XIV, dont rien n'ébranlait l'opinion pour -ceux qui avaient su mériter son estime. On savait que la nature de -sentiments exempts de toute faiblesse que lui inspirait madame de -Maintenon était entièrement étrangère à celle qui, par une force -irrésistible, l'entraînait vers madame de Montespan ou vers toute autre -femme. - - - - -CHAPITRE XII. - -1675-1676. - - Turenne est tué.--Effet que produit cette nouvelle.--Lettres - écrites par madame de Sévigné à ce sujet.--La guerre se - rallume.--On crée de nouveaux maréchaux.--Le marquis de Rochefort - est nommé, par l'influence de sa femme, maréchal de France, avec - sept autres lieutenants généraux.--Il meurt.--Détails sur la - maréchale de Rochefort.--Elle devient la maîtresse de Louvois.--Son - crédit à la cour.--La révolte continue à Rennes.--Madame de Sévigné - se décide à partir.--Motifs des regrets qu'elle a de quitter - Paris.--Dérangement de sa santé.--Elle consulte Bourdelot.--Elle va - revoir Livry.--Elle recommence ses lamentations sur la mort de - Turenne.--Elle se rend à Orléans.--S'embarque sur la - Loire.--Entrevue au château de l'abbé d'Effiat.--Elle arrive à - Nantes.--Souvenirs que ce voyage lui rappelle.--Elle avait mis sa - fille au couvent à Nantes.--Souvenirs devant Blois.--Elle arrive à - la Seilleraye.--Récit rétrospectif.--Faits importants relatifs à la - jeunesse de madame de Sévigné rectifiés à propos de ces - souvenirs.--Date de la naissance et de la mort de Sévigné le - fils.--Date de la naissance de madame de Grignan.--Celle-ci est née - avant son frère.--Date du premier voyage de madame de Sévigné à - Nantes.--Age qu'avait mademoiselle de Sévigné quand elle parut dans - le ballet des Arts et quand elle épousa le comte de Grignan.--Duel - de Sévigné avec du Chastellet.--Célébration du mariage de Sévigné - avec Marie de Rabutin-Chantal.--Liaison de la famille d'Ormesson et - de celle de madame de Sévigné.--Madame de Sévigné va aux Rochers et - revient à Paris.--S'occupe d'un procès,--de ses plaisirs,--de - l'Opéra,--et est lancée dans les intrigues de la Fronde.--Détails - fournis par les Mémoires d'Ormesson sur cette époque de la vie de - madame de Sévigné et sur les événements.--Récit sur un des - domestiques de madame de Sévigné qui devint fou furieux, et sur - lequel on opéra la transfusion du sang. - - -Le vif intérêt qu'excitait dans le grand monde la nouvelle de la -dissension des deux femmes qui approchaient le plus souvent le roi fut -tout à coup absorbé par une autre nouvelle, désastreuse, terrible, qui -frappa de stupeur la France entière et retentit aussitôt dans toute -l'Europe[533]. Ce fut celle de ce boulet qui, tiré au hasard près du -village de Sasbach, dans l'État de Bade, le 27 juillet 1675, frappa -Turenne et le tua[534]. - - [533] L'annonce dans la _Gazette_ est du 9 août 1675, no 78, p. - 582. Il est dit que le roi en avait reçu la nouvelle le 29 - juillet, à Versailles. - - [534] S.-H*** (SAINT-HILAIRE), _Mémoires_, 1756, in-12, t. I, p. - 104.--_Recueil de lettres pour servir d'éclaircissements à - l'histoire militaire du règne de Louis XIV_, 1761, in-12, t. III, - p. 216.--RAMSAY, _Histoire du vicomte de Turenne_, 1773, in-12, - liv. VI, t. II, p. 342; _id._, 1735, in-4º, t. I, p. - 581.--RAGUENET, _Histoire de Turenne_, 1732, in-12, t. II, p. - 105. - -Ce ne fut pas à sa fille, ce ne fut pas à une femme, mais à des hommes, -à des militaires, à Bussy, au comte de Grignan que madame de Sévigné -adressa ces admirables lettres où elle peint sa douleur, celle du roi, -les larmes de toute la cour, la tristesse de Bossuet, l'abasourdissement -des habitants de Paris, s'attroupant à l'entour de l'hôtel du -héros[535]; la consternation et la fureur de sa brave armée; la terreur -des campagnes des bords du Rhin, tranquilles et rassurées par Turenne -contre les invasions de l'ennemi, désormais exposées à ses féroces -représailles; l'effroi de la France entière, et cette vive, cette -universelle émotion causée par la perte d'un seul homme. «Mais cet -homme, disait madame de Sévigné, était le plus grand capitaine et le -plus honnête homme du monde[536].» - - [535] Cet hôtel, construit sur le plan de Gomboust et indiqué - comme appartenant en 1652 à un M. de Levassier, était rue - Saint-Louis, au Marais, au coin de la rue Saint-Claude. (Voy. - Jaillot, _Recherches sur Paris_, quartier du Temple, p. 18.) - - [536] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 juillet 1675), t. III, p. 477 et - 478, édit. G.; _idem_, t. III, p. 348 et 349, édit. M.--LOUIS - XIV, _Å’uvres_, t. V, p. 451. - -«Dès le lendemain de cette nouvelle, dit encore madame de Sévigné, M. de -Louvois proposa au roi de réparer cette perte en faisant huit généraux -au lieu d'un: c'est y gagner. En même temps on fit huit maréchaux de -France, savoir: M. de Rochefort, _à qui les autres doivent un -remercîment_; MM. de Luxembourg, Duras, la Feuillade, d'Estrades, -Navailles, Schomberg et Vivonne: en voilà huit bien comptés. Je vous -laisse à méditer sur cet endroit[537].» Ainsi madame de Sévigné insinue -à sa fille que ces huit maréchaux, que madame de Cornuel appelait -spirituellement la monnaie de M. de Turenne, n'avaient été nommés que -parce que la marquise de Rochefort (Madeleine de Laval, devenue de -Bois-Dauphin), qui était aimée de Louvois, exigea que son mari fût fait -maréchal de France, ce qui ne se pouvait qu'en proposant sept autres -lieutenants généraux plus anciens que lui. Irrité de cette promotion, le -comte de Gramont, son ennemi, lui envoya ce laconique et insolent billet -que madame de Sévigné a rapporté. Rochefort ne jouit pas longtemps du -grade éminent qu'il avait obtenu. Quoique homme d'esprit et de courage, -il s'en montra peu digne en ne secourant[538] pas à temps le brave du -Fay, assiégé dans Philisbourg. Rochefort mourut moins d'un an après sa -nomination, le 22 mai 1676[539], âgé seulement de quarante ans: sa haute -dignité ne profita qu'à sa veuve, qui acquit ainsi à la cour un rang -favorable à l'influence qu'elle ambitionnait d'exercer. C'était une -beauté piquante, née pour le grand monde, l'intrigue et la galanterie. -Elle était liée avec madame de Grignan, dont l'âge se rapprochait du -sien et qui avait alors trente ans. Elle se donna à Louvois, et remplaça -dans l'existence de ce ministre, jusqu'à sa mort, madame Dufrénoy. La -Fare s'en était cru amoureux avant de se persuader qu'il l'était de -madame de la Sablière[540]; mais l'adroite coquette ne parut vouloir -écouter la Fare que pour mieux captiver Louvois, ce qui empêcha la Fare -d'obtenir aucun avancement, et l'obligea de quitter le service[541]. - - [537] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 juillet 1675), t. III, p. 350, édit. - M.; t. III, p. 478, édit. G. - - [538] PELLISSON, _Lettres historiques_ (24 septembre 1676), t. - III, p. 154.--LA FARE, _Mémoires_, collect. Petitot, t. LXV, p. - 223-225.--_Å’uvres diverses du marquis_ DE LA FARE, 1750, p. 145. - - [539] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er juin 1676), t. IV, p. 466, 467, - édit. G.; t. III, p. 321, édit. M. - - [540] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 février 1672), t. II, p. - 396.--Conférez la 4e partie de ces _Mémoires_, chap. X, p. 287, - et la note p. 366. - - [541] _Å’uvres diverses du marquis_ DE LA FARE; Amsterdam, 1650, - in-12.--LA FARE, _Mémoires_ (1675), collect. Petitot, t. LXV, p. - 223. - -La maréchale de Rochefort, par l'art facile à certaines natures de se -rendre utiles aux grands et aux puissants, sut, sans beaucoup d'esprit -ni d'efforts, se maintenir toujours bien en cour. Elle fut l'amie, la -confidente de toutes les femmes que Louis XIV s'attacha, de mademoiselle -de la Vallière comme de madame de Montespan; et ce fut elle qui, -d'accord avec Bontemps, servit admirablement les mystérieuses amours de -Louis XIV et de la duchesse de Soubise, et en déroba longtemps la -connaissance au duc son époux, et même, ce qui était plus difficile, à -madame de Montespan. La maréchale de Rochefort se maintint dans une -convenable intimité avec madame de Maintenon; elle fut goûtée de son -élève, la duchesse de Bourgogne, comme elle l'avait été de la seconde -Dauphine[542]. Par une conduite habile, elle contribua pendant longtemps -à donner de la force au parti de Louvois, qui, dans les conseils et à la -cour, disputait au parti de Colbert l'influence sur l'esprit et les -résolutions du monarque; et elle parvint à conserver tout son crédit -lorsque la mort lui eut enlevé l'appui du grand ministre. - - [542] SAINT-SIMON, _Mémoires complets et authentiques_, t. I, 29 - et 389; II, 171.--LA FARE, _Mémoires_, collect. Petitot, p. 223 - (année 1676).--_Ibid._, _Å’uvres diverses_, Amsterdam, 1750, p. - 141 et 142.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 mai 1673), t. II, p. 196; t. - III, p. 153, édit. G.--_Ibid._ (1er janvier 1674), t. III, p. - 188, édit. G.--_Ibid._ (11 septembre 1674), t. IV, p. 467; t. V, - p. 117, édit. G.--_Ibid._ (25 décembre 1679), t. VI, p. 265, - édit. G.; t. III, p. 81, 194, édit. M.; t. IV, 341, 449 et 460, - édit. G.; t. IV, 73, édit. M. - -Quand, le lundi, la nouvelle de la mort de Turenne arriva à Versailles, -«on allait, dit madame de Sévigné, à Fontainebleau s'abîmer dans la -joie[543];» mais cet événement changea les dispositions de tout le -monde, et fit hésiter madame de Sévigné elle-même sur son voyage de -Bretagne, qui devenait plus dangereux. Ainsi la mort d'un seul homme -ébranlait l'État, et dérangeait tous les projets de plaisirs ou -d'occupations sérieuses. La guerre, qu'on croyait devoir être bientôt -terminée, se ralluma avec une nouvelle ardeur; il n'y avait plus -d'espoir pour madame de Sévigné d'avoir de longtemps son fils avec elle, -et sa fille l'invitait fortement à profiter de l'intervalle de la -suspension forcée de toutes choses pour faire le voyage de Provence. -Elle en fut très-tentée; mais ses propres affaires l'appelaient en -Bretagne[544] et elles étaient d'une telle gravité qu'elle se vit forcée -de céder aux conseils de son tuteur, l'abbé de Coulanges. Après deux -mois d'hésitation, elle partit. Ce n'est qu'alors qu'elle cessa de -s'entretenir, dans ses lettres, de M. de Turenne, de revenir sans cesse -sur ses admirables qualités, de varier l'expression de ses regrets, de -prévoir les tristes conséquences de sa mort. Le dîner qu'elle fit chez -le cardinal de Bouillon avec madame d'Elbeuf[545] et madame de la -Fayette, pour pleurer ensemble le héros, fut pour elle cependant une -nouvelle occasion de recommencer ses lamentations sur ce triste sujet; -et elle ne cessa d'en parler que quand elle eut fait connaître la -douleur de tous les amis du héros, la profonde affliction de Pertuis, -son capitaine des gardes, qui voulut se démettre de sa place de -gouverneur de Courtray; et enfin quand elle eut décrit la cérémonie des -funérailles à Saint-Denis, où elle assista[546]. - - [543] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (30 et 31 juillet, 2, 6, 7, 9, 11, 12, - 16, 19, 21, 22, 26, 27 et 28 août, 1er et 9 septembre), t. III, - p. 471, 475, 480, 483, 489, 499, 504; t. IV, p. 3, 5, 7, 10, 13, - 16, 19, 20, 21, 27, 41, 47, 54, 59, 65, 73, 76, 79, 87, 92, 135, - 186, du ms. de l'Institut.--Dans la _Suite des Mémoires_ DE - BUSSY, et dans l'édit. Monmerqué, 1820, in-8º, t. III, p. 346, - 347, 353, 369, 372, 375, 377, 387, 388, 390, 397, 404, 416, 427, - 430, 437 (1er septembre), 438, 448, 453, 457. - - [544] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 et 25 août 1675), t. III, p. 504; t. - IV, p. 55; édit. G.--_Ibid._ (26 janvier 1689), t. IX, p. - 122.--Conférez la 4e partie de ces _Mémoires_, p. 333. - - [545] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 août et 4 septembre 1675), t. IV, p. - 65, 76 et 92, édit. G. - - [546] Lettres de Louis XIV aux abbés et religieux de Saint-Denis, - RAMSAY, _Vie de Turenne_, t. IV, p. 372, in-12. - -Effrayée par les nouvelles qu'elle recevait, madame de Sévigné différa -donc son départ; elle aurait bien voulu le différer plus longtemps, et -profiter de cet empêchement pour faire le voyage de Provence; mais -quand on sut qu'on s'était décidé à envoyer des troupes contre les -révoltés et que la lettre de Louis XIV pour la tenue des états de -Bretagne allait être transmise au duc de Chaulnes[547], on crut la -tranquillité publique assurée. L'abbé de Coulanges, qui ne s'épouvantait -de rien lorsque la nécessité des affaires réclamait sa présence, -détermina enfin madame de Sévigné à partir: cependant elle n'y consentit -que quand le _bon abbé_ lui eut promis de ne pas vouloir passer l'hiver -aux Rochers. «Au reste, ma fille, l'abbé croit mon voyage si nécessaire -que je ne puis m'y opposer. Je ne l'aurai pas toujours ainsi; je dois -profiter de sa bonne volonté. C'est une course de deux mois; car le bon -abbé ne se porte pas assez bien pour aimer à passer là l'hiver. Il m'en -parle d'un air sincère, dont je fais vÅ“u d'être toujours la dupe: tant -pis pour ceux qui me trompent[548]!» - - [547] _Correspondance administrative sous le règne de Louis XIV_, - 1850, in-4º, _Lettres_, t. I, p. 551. Lettre de l'évêque de - Saint-Malo à Colbert, en date du 28 août 1575. - - [548] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 août 1675), t. IV, p. 70, édit. G. - -Elle-même avoue qu'elle avait tant de raisons pour aller en Bretagne -qu'elle ne pouvait y mettre la moindre incertitude, «et qu'elle y avait -mille affaires[549].» Cependant, cette fois, ce voyage ressemblait peu à -ceux qu'elle faisait depuis longtemps, presque chaque année, pour aller -se délasser des fatigues du grand monde dans sa terre des Rochers, y -faire des embellissements, et jouir de ses livres et d'elle-même, en la -société de son fils, de sa fille et du petit nombre d'amis qui venaient -la voir. Elle ne pouvait non plus se promettre aucun plaisir de la -réunion des états, qui, lorsqu'elle avait lieu à Vitré, lui attirait les -hommages de toutes les personnes les plus aimables et les plus -considérables de la Bretagne, que lui conciliait la réputation qu'elle -s'était acquise à la cour par son esprit, ses attraits personnels, les -agréments de son commerce, et surtout par les égards, l'amitié, les -déférences que lui témoignaient les la Trémouille, les Rohan, les -Chaulnes, les Lavardin. Les chefs de ces deux dernières familles étaient -investis de toute l'autorité du gouvernement; les la Trémouille et les -Rohan étaient en possession de présider presque alternativement les -assises des états de Bretagne, Rohan à titre de baron de Léon, la -Trémouille comme baron de Vitré. Cette fois les états ne tenaient pas -leurs assises à Vitré, mais à Dinan, ce qui éloignait de madame de -Sévigné tous les membres de cette assemblée, et donnait de l'importance -à l'évêque de Saint-Malo, qu'elle n'aimait pas. Accoutumée dès sa -jeunesse à scruter les actes du pouvoir, elle n'avait jamais vu qu'avec -déplaisir et avec les sentiments d'une ancienne frondeuse l'obséquiosité -des états en Bourgogne et en Bretagne et leur déplorable facilité à -voter l'argent des contribuables. Ce secret penchant au blâme et à la -résistance s'était encore accru par les derniers événements. La manière -dont madame de Sévigné mande à sa fille qu'à Rennes on a jeté des -pierres au duc de Chaulnes, lorsqu'il voulut haranguer le peuple pour -apaiser l'émeute, prouve qu'elle n'était nullement contristée de -l'avanie qu'avait éprouvée le gouverneur: «Il y a eu même à Rennes une -_colique pierreuse_. M. de Chaulnes voulut, par sa présence, dissiper le -peuple; il fut repoussé chez lui à coups de pierres. Il faut avouer que -cela est bien insolent[550].» - - [549] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 et 26 août 1675), t. III, p. 504; t. - IV, p. 55.--_Ibid._ (26 janvier 1689), t. IX, p. 122.--Conférez - la 4e partie de ces _Mémoires_, p. 333. Les lettres de - convocation pour la tenue des états de Bretagne sont datées du 16 - septembre 1675. (_Recueil ms._, etc., de la Bibl. nat., p. 371.) - Madame de Sévigné partit le 9 du même mois.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ - (26 juin 1675), t. III, p. 434, édit. G; t. III, p. 309, édit. - M.--_Ibid._ (6 août 1675), t. III, p. 487, édit. G. - - [550] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 juin 1675), t. III, p. 424, édit. - G.; t. III, p. 300, édit. M. - -Cette fois ce n'était pas même sur la route facile de Rennes, de Vitré -et des Rochers qu'elle devait voyager; c'était vers Nantes et au delà de -la Loire que l'urgence de ses affaires l'appelait. Enfin sa vigueur -commençait à s'altérer par l'annonce des infirmités qui assiégent -souvent les femmes de son âge; elle avait quarante-neuf ans[551]. Elle -déguise autant qu'elle peut à sa fille ces perturbations de son -tempérament; mais à Bussy elle dit: «J'ai bien eu des vapeurs, et cette -belle santé, que vous avez vue si triomphante, a reçu quelques attaques, -dont j'ai été humiliée comme si j'avais reçu un affront[552].» Elle fut -obligée d'avoir recours à la science du docteur Bourdelot (Pierre -Michon), ce célèbre médecin des Condé et de la reine Christine. Madame -de Sévigné aimait les soins qu'il prenait d'elle; mais il l'ennuyait par -les vers détestables qu'il composait à sa louange et à celle de madame -de Grignan[553]. - - [551] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 juillet 1675?), t. III, p. 448, 467, - édit G.; t. III, p. 339, édit. M.--_Ibid._ (10 juillet 1675), t. - III, p. 448, édit. G.; t. III, p. 323 et 324, édit. M.--_Ibid._ - (19 août 1675), t. IV, p. 35, édit. G.; t. III, p. 411, édit. M. - - [552] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 août 1675), t. III, p. 487, édit. G.; - t. III, p. 371, édit. M.--_Ibid._ (5, 10 et 24 juillet 1675), t. - III, p. 435, 448 et 467, édit. G.; t. III, p. 439, édit. M. - - [553] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (4 et 22 décembre 1675), t. IV, p. 233 - et 267, édit. G.; t. IV, p. 111 et 141, édit. M. - -Depuis la mort de Turenne, madame de Sévigné avait des craintes qu'elle -tâchait sagement de réprimer, mais qui lui faisaient redouter -l'isolement et la solitude des Rochers: «J'emporte, dit-elle à madame de -Grignan, du chagrin de mon fils; on ne quitte qu'avec peine, les -nouvelles de l'armée. Je lui mandais comme à vous, l'autre jour, qu'il -me semblait que j'allais mettre ma tête dans un sac, où je ne verrais ni -n'entendrais rien de tout ce qui va se passer sur la terre[554].» - - [554] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 et 14 septembre 1675), t. IV, p. 93 - et 101, édit. G.; t. III, p. 463 et 469, édit. M. - -Ce qui ajouterait encore à toutes les contrariétés qu'éprouvait madame -de Sévigné en faisant ce voyage de Bretagne, c'est qu'elle l'avait tant -différé que sa femme de chambre Hélène, qui était enceinte, avait -atteint son neuvième mois et ne pouvait la suivre; elle prit le parti, -pour la désennuyer pendant son absence, de lui laisser le soin de -_Marphise_, sa chienne favorite, et se contenta, pour son service, d'une -jeune fille nommée Marie, qui jetait sa gourme, et fit cependant aussi -bien qu'Hélène[555]. Tous ces contre-temps la rendaient si triste -qu'elle refusa, trois jours avant son départ, une invitation qui lui fut -faite par les Condé d'aller passer quelques jours à Chantilly: elle -préféra au palais, aux jardins enchanteurs, à la princière société de -cette splendide résidence la solitude sauvage de Livry, remplie des -souvenirs de sa fille et du bonheur dont elle avait joui en la -possédant. «Je fus avant-hier, toute seule (dit-elle), à Livry, me -promener délicieusement avec la lune; il n'y avait aucun serein; j'y fus -depuis six heures du soir jusqu'à minuit, et je me suis fort bien -trouvée de cette petite équipée. Je devais bien cette honnêteté à la -belle Diane et à l'aimable abbaye. Il n'a tenu qu'à moi d'aller à -Chantilly en très-bonne compagnie; mais je ne me suis pas trouvée assez -libre pour faire un si délicieux voyage: ce sera pour le printemps qui -vient[556].» - - [555] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 et 29 septembre 1675), t. IV, p. - 97-117, édit. G.; t. IV, p. 10, édit. M. - - [556] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 septembre 1675), t. IV, p. 85, édit. - G.; t. III, p. 455, édit M. - -Après avoir vu, dans la matinée, du Lude, grand maître de l'artillerie, -depuis peu fait duc, et madame de la Fayette; après s'être laissé -conduire à la messe par la bonne madame de la Troche, madame de Sévigné -partit le lundi 9 septembre, sans autre compagnie que l'abbé de -Coulanges et cette fille Marie dont nous venons de parler[557]. La -Mousse était à Autry, chez madame de Sanzei, et Coulanges s'en alla à -Lyon. Madame de Sévigné se dirigea d'abord sur Orléans; son carrosse -était attelé de quatre chevaux. Elle n'oublia pas d'emporter avec elle -son _petit ami_, c'est-à -dire le portrait de sa fille[558]. Avant de -monter en voiture, elle écrit à celle-ci une longue lettre pleine de -nouvelles et de faits intéressants. Elle parodie plaisamment trois vers -de l'opéra de _Cadmus_: - - «Je vais partir, belle Hermione; - Je vais exécuter ce que l'_abbé_ m'ordonne, - Malgré le péril qui m'attend. - -C'est pour dire une folie, car notre province est plus calme que la -Saône[559].» Cela n'était pas exact; elle le savait, mais elle voulait -rassurer sa fille. - - [557] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 septembre 1675), t. IV, p. 117, - édit. G.; t. IV, p. 7, édit. M. - - [558] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (9 et 11 septembre 1675), t. IV, p. 87, - 94, édit. G.; t. III, p. 463, édit. M.--_Ibid._ (20 septembre - 1675), t. IV, p. 107 et 109, édit. G.; t. IV, p. 475, édit. M. - - [559] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (9 septembre 1675), t. IV, p. 92, édit. - G.; t. III, p. 461, édit. M.--_Cadmus et Hermione_, tragédie, - acte II, scène IV.--Le _Théâtre de_ M. QUINAULT (1735), t. IV, p. - 95.--Madame de Sévigné a pu assister à la représentation de cet - opéra, dont la musique était de Lulli. Il fut joué sur le théâtre - du Bel-Air en 1672, et le 17 avril 1673 sur le théâtre du - Palais-Royal, après la mort de Molière. Voyez la _Vie de - Quinault_, t. I, p. 35 des _Å’uvres_. - -Puis elle revient aussitôt aux pensées sérieuses que lui inspire le -service de Turenne, que l'on exécutait en grande pompe dans le moment où -elle écrivait: «Le cardinal de Bouillon et madame d'Elbeuf vinrent hier -me le proposer; mais je me contente de celui de Saint-Denis: je n'en ai -jamais vu de si bon. N'admirez-vous pas ce que fait la mort de ce héros -et la face que prennent les affaires depuis que nous ne l'avons plus? -Ah! ma chère enfant, qu'il y a longtemps que je suis de votre avis! rien -n'est bon que d'avoir une belle âme: on la voit en toute chose, comme au -travers d'un cÅ“ur de cristal. On ne se cache point: vous n'avez point -vu de dupes là -dessus. On n'a jamais pris l'ombre pour le corps. Il faut -être si l'on veut paraître. Le monde n'a point de longues injustices. -Vous devez être de cet avis pour vos propres intérêts.» - -Elle se délassait dans sa voiture, pendant tout le cours de son voyage, -de la société un peu ennuyeuse du _bon abbé_ en lisant la _Vie du -cardinal Commendon_, que Fléchier avait récemment traduite du -latin[560], et aussi les lettres qu'elle recevait de sa fille sur -l'_Histoire des croisades_, «qui est très-belle pour ceux qui ont lu le -Tasse,» et la _Vie d'Origène_, par un auteur janséniste (Pierre-Thomas -des Fossés), et qu'elle trouvait divine[561]. Mais, par des motifs moins -exempts de blâme, le ridicule que madame de Grignan versait sur madame -de la Charce et sur Philis, sa fille aînée, la faisait rire aux -larmes[562]. - - [560] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 septembre 1675), t. IV, p. 96, édit. - G. - - [561] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 septembre 1675), l. IV, p. 105, - édit. G. - - [562] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (9 et 11 sept. 1675), t. IV, p. 91, 93, - édit. G. - -Madame de Sévigné coucha à Orléans; et le lendemain (10 septembre) elle -s'embarqua sur la Loire, munie d'une lettre de sa fille, qu'elle reçut -au moment de se mettre en bateau, et remplie d'admiration en voyant les -rives de ce fleuve, «si belles, si agréables, si magnifiques.» - -Cette navigation était pour elle toute volontaire. «Le temps et les -chemins, dit-elle, sont admirables: ce sont de ces jours de cristal où -l'on ne sent ni chaud ni froid. Notre équipage nous amènerait fort bien -par terre; c'est pour nous divertir que nous allons sur l'eau[563].» - - [563] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 et 14 septembre 1675), t. IV, p. 97, - 98 et 100, éd. G. - -Le détail de son embarquement, qu'elle donne à son cousin de Coulanges, -nous prouve que cette manière de se rendre d'Orléans à Nantes était plus -commune dans ce siècle qu'elle ne l'a été dans le nôtre, où la voie de -transport de terre est préférée. - -«A peine sommes-nous descendus ici (Orléans) que voilà vingt bateliers -autour de nous, chacun faisant valoir la qualité des personnes qu'il a -menées et la bonté de son bateau. Jamais les couteaux de Nogent ni les -chapelets de Chartres n'ont fait plus de bruit. Nous avons été longtemps -à choisir: l'un nous paraissait trop jeune, l'autre trop vieux; l'un -avait trop d'envie de nous avoir, cela nous paraissait d'un gueux dont -le bateau était pourri; l'autre était glorieux d'avoir mené M. de -Chaulnes. Enfin la prédestination a paru visible sur un grand garçon -fort bien fait, dont la moustache et le procédé nous ont décidés[564].» - - [564] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 septembre 1675), t. IV, p. 98, 99, - édit. G. - -Elle débarqua à deux lieues de Tours, à Mont-Louis; et de là , traversant -par terre l'espace de quatre kilomètres qui sépare la Loire et le Cher, -elle alla coucher (le 13 septembre) à Veretz[565], dans le château -originairement bâti par Jean de la Barre, comte d'Étampes, et qui -appartenait alors à l'abbé d'Effiat[566], connu de nos lecteurs par -l'impôt qu'il préleva sur la marquise de Courcelles[567]. - - [565] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (14 septembre 1675), t. IV, p. 100, - édit. G.; t. III, p. 467, édit. M. - - [566] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (14 et 17 septembre), t. IV, p. 100-103, - édit. G.; t. III, p. 469, édit. M. - - [567] _Mémoires sur madame de Sévigné_, 4e partie, p. 160. - -«J'ai couché cette nuit à Veretz. M. d'Effiat savait ma marche; il me -vint prendre sur le bord de l'eau, avec l'abbé (de Coulanges). Sa maison -passe tout ce que vous avez jamais vu de beau, d'agréable, de -magnifique, et le pays est le plus charmant qu'_aucun autre qui soit sur -la terre habitable_: je ne finirais pas. M. et madame de Dangeau y sont -venus dîner avec moi, et s'en vont à Valence. M. d'Effiat vient de nous -ramener ici (c'est à Tours, d'où la lettre est datée); il n'y a qu'une -lieue et demie d'un chemin semé de fleurs... Nous reprenons demain -notre bateau, et nous allons à Saumur[568].... . . . . . . . . . . . . . -. . . . . . . . . . . . . . . . . . . - - [568] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (14 septembre 1675), t. IV, p. 100 et - 101, édit. G.; t. III, p. 469, édit. M. - -«Je vous ai mandé comme j'avais vu l'abbé d'Effiat dans sa belle maison; -je vous écrivis de Tours. Je vins à Saumur, où nous vîmes Vineuil; nous -repleurâmes M. de Turenne..... Il y a trente lieues de Saumur à -Nantes[569]. Dans ce dessein, nous allâmes hier deux heures de nuit; -nous nous engravâmes, et nous demeurâmes à deux cents pas de notre -hôtellerie, sans pouvoir aborder. Nous revînmes au bruit d'un chien, et -nous arrivâmes à minuit dans un _tugurio_ (une cabane) plus pauvre, plus -misérable qu'on ne peut vous le représenter; nous n'y avons trouvé que -deux ou trois vieilles femmes qui filaient, et de la paille fraîche sur -quoi nous avons tous couché sans nous déshabiller; j'aurais bien ri sans -l'abbé, que je meurs de honte d'exposer ainsi à la fatigue d'un voyage. -Nous nous sommes rembarqués à la pointe du jour, et nous étions si -parfaitement bien établis dans notre gravier que nous avons été près -d'une heure avant de prendre le fil de notre discours. Nous voulons, -contre vent et marée, arriver à Nantes; nous ramons tous.» - - [569] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 septembre 1675), t. IV, p. 103 et - 104, édit. G.; t. III, p. 472, édit. M. - -En passant, à la poste d'Ingrande, madame de Sévigné met la lettre -qu'elle vient d'écrire, et deux jours après elle est à Nantes. Là elle -se hâte d'annoncer son arrivée à sa fille[570]: «Je vous ai écrit sur la -route et même du bateau, autant que je l'ai pu. J'arrivai ici à neuf -heures du soir, au pied de ce grand château que vous connaissez, au -même endroit où se sauva notre cardinal (de Retz). On entend une petite -barque; on demande: _Qui va là ?_ J'avais ma réponse toute prête; et en -même temps je vois sortir par la petite porte M. de Lavardin, avec cinq -ou six flambeaux de poing devant lui, accompagné de plusieurs nobles, -qui vient me donner la main et me reçoit parfaitement bien. Je suis -assurée que, du milieu de la rivière, cette scène était admirable; elle -donna une grande idée de moi à mes bateliers. Je soupai fort bien; je -n'avais ni dormi ni mangé depuis vingt-quatre heures. J'allai coucher -chez M. d'Harouis. Ce ne sont que festins au château et ici. M. de -Lavardin ne me quitte pas; il est ravi de causer avec moi[571].» - - [570] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 septembre 1675), t. IV, p. 106, - édit. G.; t. III, p. 473, édit. M. - - [571] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er octobre 1654), t. I, p. 34, édit. - G.; t. I, p. 27, édit. M.; et 2e partie de ces _Mémoires_, 2e - édit., p. 9 et 10. - -«... Nous allons à la Seilleraye[572], M. de Lavardin m'y vient -conduire; et de là aux Rochers, où je serai mardi.» - -Elle resta sept jours à Nantes, et d'Harouis la conduisit lui-même après -dîner à son beau château de la Seilleraye, à quatorze kilomètres à l'est -de Nantes[573], où elle resta deux jours; elle partit le 15 septembre. -M. de Lavardin la mit en carrosse, et M. d'Harouis l'accabla de -provisions. Elle arriva le jour suivant aux Rochers[574]. De la -Seilleraye à Vitré, par la route directe de Châteaubriant et la Guerche, -on mesure dix myriamètres, ou vingt-cinq lieues de poste; et madame de -Sévigné, pour franchir cet espace en un jour, a dû d'avance envoyer des -chevaux de relais sur la route, ce qui lui était facile, puisqu'elle -avait amené avec elle six chevaux et deux hommes; et au besoin, si ses -équipages n'eussent pas suffi, elle eût eu recours à ceux du lieutenant -général et du trésorier de Bretagne. - - [572] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 et 24 septembre 1675), t. IV, p. 109 - et 114, édit. G.; t. III, p. 475, édit. M. - - [573] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 septembre 1675), t. IV, p. 111 et - 112, édit. G.; t. IV, p. 1. édit. M. - - [574] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (29 septembre 1675), t. IV, p. 115 et - 117, édit. G.; t. IV, p. 10, édit. M. - -Voilà les seuls détails que nous avons pu recueillir sur ce voyage de -madame de Sévigné, qui, avec juste raison, inquiéta si fort ses amis. -«Ils ont fait, écrit-elle, l'honneur à la Loire de croire qu'elle -m'avait abîmée: hélas! la pauvre créature! je serais la première à qui -elle eût fait ce mauvais tour. Je n'ai eu d'incommodité que parce qu'il -n'y avait pas assez d'eau dans cette rivière.» Et, en effet, bien loin -de s'en trouver plus mal, le violent exercice qu'elle se donna lui -rendit la santé, que les remèdes des médecins de Lorme et Bourdelot[575] -avaient peut-être contribué à détruire. «Ma santé, dit-elle, est comme -il y a six ans; je ne sais d'où me revient cette fontaine de -Jouvence[576].» Ces paroles prouvent que ce n'était pas par raison de -santé que madame de Sévigné préféra les tracas, les fatigues, les -dangers d'une aventureuse navigation aux douceurs d'une pérégrination -faite en calèche richement attelée, roulant sur une belle route par un -temps chaud, pur et serein et avec l'escorte de deux serviteurs à -cheval. - - [575] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 août 1675), t. III, p. 503, édit. G.; - t. III, p. 363, édit. M. - - [576] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (29 septembre 1675), t. IV, p. 117, - édit. G.; t. IV, p. 10, édit. M. - -Ses lettres nous révèlent les véritables motifs de cette équipée et ce -qui se passait dans son âme. Elle était contrariée de la nécessité -d'être obligée de quitter Paris, de la pauvreté provinciale[577] où -allait être réduite sa correspondance avec sa fille, de l'inquiétude que -lui causaient pour son fils les nouvelles de l'armée[578]. Elle était -triste, vaporeuse[579]. De tous les maux qui assiégent la vie, l'ennui -est celui auquel les femmes du grand monde sont le plus exposées, -qu'elles redoutent le plus et qu'elles savent le moins supporter; pour y -échapper elles ne reculent devant aucune extravagance. Madame de Sévigné -craignait surtout l'atteinte de ce mal durant un trajet lent et long, -seule avec le bon et vieil abbé, sans son fils, sans la Mousse, sans -Corbinelli, sans même son Hélène, enfin sans aucun des êtres qui avaient -coutume de causer avec elle, de l'intéresser, de la distraire. Elle -avait autrefois navigué sur la Loire; elle avait conduit sa fille au -couvent des Filles-Sainte-Marie, à Nantes. Dès cette époque, elle -adorait cette enfant belle et gracieuse, âgée de dix ans, et elle -l'avait mise en pension chez les pieuses filles de l'ordre fondé par son -aïeule, afin qu'elle y reçût les instructions chrétiennes pour sa -première communion. C'était le beau temps de la jeunesse de madame de -Sévigné, et elle eut un désir extrême de contempler de nouveau les rives -qui devaient lui retracer avec vivacité de si agréables et de si -touchants souvenirs. Aussi, sans se déguiser ce que sa résolution -présentait de difficultés et d'inconvénients et ce qu'elle avait de -téméraire, au moment de quitter le rivage elle fut saisie d'une sorte -d'ivresse joyeuse, bientôt suivie d'un léger repentir; ce qui ne -l'empêcha pas d'exécuter son projet avec courage et gaieté. - - [577] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 septembre 1675), t. IV, p. 107, - édit. G.; t. III, p. 470, édit. M. - - [578] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 et 14 sept. 1675), t. IV, p. 93, 100 - et 102. - - [579] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 août 1675), t. III, p. 487, édit. G.; - t. III, p. 371, édit. M. - -«C'est une folie, dit-elle, de s'embarquer quand on est à Orléans, -peut-être même à Paris; il est vrai cependant qu'on se croit obligé de -prendre des bateliers à Orléans, comme à Chartres d'acheter des -chapelets...» - -«_Je suis dans un bateau, dans le courant de l'eau, fort loin de mon -château_; je pense que je puis achever, _Ah! quelle folie!_ car les eaux -sont si basses et je suis si souvent engravée que je regrette mon -équipage, qui ne s'arrête pas et qui va toujours. On s'ennuie sur l'eau -quand on y est seule; il faut un petit comte des Chapelles et une -mademoiselle de Sévigné.» Et à son cousin de Coulanges elle dit: «Nous -allons voguer sur la belle Loire; elle est un peu sujette à déborder, -mais elle en est plus douce[580].» - - [580] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 septembre 1675), t. IV, p. 103 (11 - septembre), t. IV, p. 99, édit. G. - -Immédiatement avant d'entrer en bateau elle avait écrit à madame de -Grignan: «Enfin, ma fille, me voilà prête à m'embarquer sur notre Loire! -Vous souvient-il du joli voyage que nous y fîmes[581]?» - - [581] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 septembre 1675), t. IV, p. 99, édit. - G. - -Pour elle, ce souvenir ne la quitte pas; et toujours il lui faut parler -de ce voyage quand elle passe devant le lieu qui lui en rappelle -quelques circonstances: - -«Je me ressouvins, dit-elle, l'autre jour, à Blois, d'un endroit si -beau, où nous nous promenions avec le petit comte des Chapelles, qui -voulait retourner le sonnet d'Uranie: - - Je veux finir mes jours dans l'amour de MARIE.» - -Et de Nantes elle écrit à sa fille: «J'ai vu nos sÅ“urs de Sainte-Marie, -qui vous adorent encore, et se souviennent de toutes les paroles que -vous prononçâtes chez elles[582].» - - [582] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 et 24 septembre 1675), t. IV, p. 107 - et 114, édit G.; t. III, p. 474, et t. IV, p. 7, édit. M.--Les - sÅ“urs de Sainte-Marie logeaient à Nantes, près de la cour de - Saint-Pierre. - -«Des sept jours que j'ai été à Nantes, j'ai passé trois jours -après-dîner chez nos sÅ“urs de Sainte-Marie. Elles ont de l'esprit, -elles vous adorent et sont charmées du _petit ami_[583], que je porte -toujours avec moi.» - - [583] Le portrait de madame de Grignan. Voyez ci-dessus, p. 256. - -Et quand elle est à la Seilleraye, elle écrit: «Me voici, ma fille, dans -ce lieu où vous avez été un jour avec moi; mais il n'est pas -reconnaissable: il n'y a pas pierre sur pierre de ce qu'il était en ce -temps-là [584].» - - [584] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 septembre 1675), t. IV, p. 111, - édit. G.; t. IV, p. 1, édit. M. - -Les émotions produites par la vue des lieux où madame de Grignan avait -passé son enfance s'accrurent dans le cÅ“ur de sa mère à la vue des -Rochers. «J'ai trouvé ces bois, dit-elle, d'une beauté et d'une -tristesse extraordinaires: tous les arbres que vous avez vus petits sont -devenus grands et droits, et beaux en perfection. Ils sont élagués, et -font une ombre agréable; ils ont quarante ou cinquante pieds de hauteur. -Il y a un petit air d'amour maternel dans ce détail: songez que je les -ai tous plantés, et que je les ai vus, comme disait M. de Montbazon, -_pas plus grands que cela_. (M. de Montbazon avait l'habitude de dire -cela de ses propres enfants.) C'est ici une solitude faite exprès pour y -bien rêver: j'y pense à vous à tout moment; je vous regrette, je vous -souhaite. Votre santé, vos affaires, votre éloignement, que pensez-vous -que tout cela fasse entre chien et loup? J'ai ces vers dans la tête: - - Sous quel astre cruel l'avez-vous mis au jour - L'objet infortuné d'une si tendre amour? - -«Il faut regarder la volonté de Dieu bien fixement pour envisager sans -désespoir tout ce que je vois, dont assurément je ne vous entretiendrai -pas..... Je trouvai l'autre jour une lettre de vous où vous m'appelez -_ma bonne maman_; vous aviez dix ans, vous étiez à Sainte Marie, et vous -me contiez la culbute de madame Amelot, qui de la salle se trouva dans -une cave. Il y a déjà du bon style à cette lettre. J'en ai trouvé mille -autres, qu'on écrivait autrefois à mademoiselle de Sévigné. Toutes ces -circonstances sont bien heureuses pour me faire souvenir de vous; car -sans cela où pourrais-je prendre cette idée[585]?» - - [585] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (29 septembre 1675), t. IV, p. 116-118, - édit. G.; t. IV, p. 9-10, édit. M.--_Ibid._ (2 octobre 1675), t. - IV, p. 124, édit. G.; t. IV, p. 14, édit. M. - -Ce singulier voyage de madame de Sévigné à Nantes, ses souvenirs, ses -regrets donnent le désir de connaître à quelle époque elle fit celui qui -n'a point été raconté dans ces Mémoires, et dans quelles circonstances -elle mit sa fille au couvent. Puisque des documents nouveaux jettent un -jour inattendu sur les premières années de cette tendre mère, -imitons-la, complétons ses souvenirs, et rétrogradons jusqu'au temps où -elle devint enceinte de cette fille bien-aimée. - -Une lettre de madame de Sévigné annonçant à Bussy la naissance de -Sévigné fils et la réponse de Bussy, mal datées, placées par le P. -Bouhours et par la comtesse Dalet (ou par Bussy lui-même, car la partie -inédite de ses Mémoires, écrite de sa main, offre un exemple d'une aussi -forte distraction et d'une si étrange erreur), ont produit la confusion -qui a existé pendant longtemps sur les dates de la naissance du frère et -de la sÅ“ur[586]. - - [586] Voyez la 1re partie de ces _Mémoires_, 2e édit., p. 120 et - 121, et la note 2.--Les deux lettres doivent être datées du 15 - mars et du 12 avril 1648, et non 1647. - -Le fils de madame de Sévigné est mort le 26 mars 1713, et les témoins -les plus capables d'être bien informés (Simiane de Mauron, d'Harouis, -l'abbé de la Fayette[587]) attestent qu'il avait alors soixante-cinq -ans; il était donc né en mars 1648, époque que l'on croyait être celle -de la naissance de sa sÅ“ur. Des fragments des Mémoires autographes -d'Ormesson, récemment publiés, constatent que madame de Sévigné -accoucha, à Paris, de sa fille le 10 octobre 1646[588]. Ainsi il est -certain que madame de Grignan était l'aînée et âgée d'un an et demi de -plus que son frère. Il résulte de ce fait qu'en l'année 1675, dont nous -nous occupons, madame de Grignan avait près de vingt-neuf ans, et -Sévigné au plus vingt-sept; et aussi que lorsque l'abbé Arnauld vit -madame de Sévigné avec ses deux enfants, et qu'il fut frappé de la -beauté de la mère, de la fille et du fils, mademoiselle de Sévigné avait -onze ans et demi, et Sévigné seulement neuf ans[589]. Ces dates ne -peuvent être regardées comme indifférentes lorsque l'on considère que -l'esprit et le cÅ“ur échappent bien plus vite aux langes de l'enfance -chez le sexe le plus faible et le plus délicatement organisé; et ainsi -s'explique comment, dès son plus jeune âge, Sévigné s'habitua à -reconnaître la supériorité de sa sÅ“ur en toutes choses, et eut pour -elle en toute occasion cette déférence, je dirai presque cette -vénération, qu'il manifeste admirablement dans la lettre où il lui -exprime ses dernières volontés[590]. Les premières opinions, les -premiers jugements formés par la raison ont sur certaines natures une -influence indélébile. - - [587] _Lettre inédite de_ SÉVIGNÉ, publiée par M. Monmerqué, p. - 23. - - [588] _Journal_ D'ORMESSON, dans CHERUEL, p. 215. - - [589] Deuxième partie de ces _Mémoires_, 2e édit., p. 101. - - [590] _Lettre inédite du marquis_ DE SÉVIGNÉ _à la comtesse de - Grignan sa sÅ“ur_, publiée par M. Monmerqué; Paris, 1847, in-8º. - -Nous venons d'apprendre par madame de Sévigné qu'elle avait conservé les -lettres de sa fille depuis son enfance, et que celle-ci avait dix ans -quand elle écrivit la lettre où elle racontait à sa mère l'accident -arrivé à madame Amelot. Ceci nous reporte à l'année 1656. C'est donc -lorsque, à la fin de septembre de l'année 1654, madame de Sévigné se -rendit à sa terre des Rochers, qu'elle fit une première fois cette -navigation d'Orléans à Nantes, où elle mit alors sa fille au couvent des -sÅ“urs Sainte-Marie, de cette dernière ville. Ce fut dans les années -1654 à 1657 que madame de Sévigné fut le plus préoccupée de son cousin -Bussy[591]. Cependant, avant la fin de 1656, elle avait retiré sa fille -du couvent; et, dans le mois d'octobre de cette même année, elle -l'emmena avec elle à Bourbilly et à Monjeu, où elle vit Bussy et Jeannin -de Castille[592]. Après un séjour de quelques semaines, elle retourna à -Paris; et au commencement de l'année 1657, accompagnée de ses deux -enfants, elle vit pour la première fois, chez leur oncle, l'abbé -Arnauld, qui dans ses Mémoires a exprimé l'admiration que lui fit -éprouver la beauté de la mère, de la fille et du fils[593]. - - [591] Conférez 1re part. de ces _Mémoires_, 2e édit., chap. - XXXVIII, XXXIX, p. 513, 520, et la 2e partie, chap. I, II, III, - IV et V, pag. 1 à 48.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (datée des Rochers, le - 1er octobre 1654), t. I, p. 34, édit. G.; t. I, p. 27, édit. M. - - [592] Conférez 2e partie de ces _Mémoires_, ch. VII et VIII, p. - 73.--4e partie, ch. VII, p. 194.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (22 juillet - 1672), t. III, p. 108, édit. G.--BUSSY, _Mémoires_, édit. Amst., - 1721, t. II, p. 84. - - [593] Conférez 2e partie de ces _Mémoires_, 2e édit., ch. VIII, - p. 101. - -Les attraits de mademoiselle de Sévigné se développèrent rapidement et -excitèrent la verve des poëtes. Elle avait à peine treize ans -lorsqu'elle commença à inspirer heureusement la muse badine de -Saint-Pavin[594]; elle en avait dix-sept quand Ménage lui adressa un -madrigal en italien, qui fut imprimé dans la cinquième édition de ses -poésies[595]; elle était âgée d'environ dix-neuf ans lorsque la Fontaine -lui dédia en vers gracieux sa fable du _Lyon amoureux_[596], publiée -deux ans après dans le recueil du fabuliste: cet hommage dut donner à sa -beauté une renommée populaire. Mais ce qui acquit très-vite à -mademoiselle de Sévigné une célébrité qui faillit ternir pour toujours -sa réputation, fut son apparition dans les ballets du roi. On crut alors -qu'elle était devenue l'objet des préférences de Louis XIV. C'est dans -sa seizième année qu'elle fut produite, en 1663, aux dangereux regards -du monarque[597]. On l'admira dans le ballet où le roi était déguisé en -berger, et toutes les beautés de la cour y figuraient, ainsi qu'elle, en -bergères. Elle reparut, l'année suivante, en Amour déguisé en nymphe -maritime; et elle avait dix-huit ans quand elle joua le rôle -d'_Omphale_, dans le ballet de la _Naissance de Vénus_[598]. La lettre -qu'elle écrivit à l'abbé le Tellier, que nous avons fait connaître, -prouve qu'à vingt et un ans elle liait librement des correspondances -avec les beaux esprits du temps[599]. - - [594] Voyez _Poésies de_ SAINT-PAVIN _et_ CHARLEVAL, 1759, in-12, - p. 68 à 110.--_Recueil des plus belles pièces de poésie - française_, 1692, t. IV, p. 325. - - [595] MENAGII, _Poemata_, septima editio, 1680, p. 305.--Octava - editio, 1687, p. 337. - - [596] _Fables choisies mises en vers par M._ DE LA FONTAINE; - Paris, Claude Barbin, 1668, p. 143, liv. IV, fable 1re; t. I, p. - 177 de l'édit. in-8º, 1827. - - [597] BENSERADE, _Å’uvres_, 1697, in-12, t. II, p. 288. - - [598] _Ibid._, t. II, p. 316; et dans la 2e partie de ces - _Mémoires_, chapitres XXII et XXIII, p. 325 à 333. - - [599] Voyez 3e partie de ces _Mémoires_, p. 80, ch. IV.--Sévigné - n'avait que vingt et un ans lorsqu'il revint de son expédition de - Candie (6 mars 1669), et vingt-trois lors de sa liaison avec - Ninon.--_Ibid._, p. 124. - -Enfin, lorsque Françoise-Marguerite de Sévigné épousa François-Adhémar, -comte de Grignan, le 29 janvier 1668, elle avait vingt-deux ans et -quatre mois, ce qui réduit à moins de quinze années la différence d'âge -qui existait entre elle et le comte de Grignan. Le mariage se fit à -l'église de Saint-Nicolas des Champs, paroisse où habitait madame de -Sévigné; et, le jour même, les deux époux allèrent coucher à Livry[600]. - - [600] Troisième partie de ces _Mémoires_, 2e édit., p. 127, et - l'extrait des _Mémoires d_'OLIVIER D'ORMESSON, dans CHERUEL, _De - l'administration de Louis XIV_, p. 322. - -Après ces rectifications essentielles sur la fille, revenons à la mère, -à Marie de Rabutin-Chantal. A l'âge de dix-huit ans elle quitta les -ombrages de l'abbaye de Livry, où s'était terminée son éducation; et -elle entra dans le monde pour se marier, et elle se maria[601]. Le -séduisant et jovial marquis de Sévigné, gentilhomme breton, présenté par -le cardinal de Retz, son parent, est préféré par la jeune héritière de -Bourgogne. Le 27 mai 1644, les articles du contrat furent arrêtés par -André d'Ormesson et le président Barillon[602], tous deux pères de ceux -qui, sous ces mêmes noms, furent par la suite les constants amis de -madame de Sévigné. Deux jours après que le contrat eut été rédigé et -qu'on parlait de prendre jour pour le signer, Sévigné eut une querelle -avec du Chastellet, son compatriote. Sévigné l'arrêta sur le Pont-Neuf, -et lui donna des coups de plat d'épée pour quelques propos que celui-ci -avait tenus. Un duel s'ensuivit, qui eut lieu au Pré-aux-Clercs[603]. -Sévigné reçut une blessure à la cuisse, qui mit sa vie en danger. Du -Chastellet était de l'ancienne famille de Hay de Bretagne, qui se -vantait d'être sortie, il y a six cents ans, des comtes de Castille. Le -père de du Chastellet avait été avocat au parlement de Rennes, et -ensuite conseiller d'État[604]: ainsi son fils était de robe, tandis que -Sévigné était d'épée. Cela explique l'arrogance de ce dernier; il en fut -sévèrement puni. Le père de du Chastellet s'illustra dans les lettres, -et son fils, dans toutes les occasions importantes, montra autant de -talent et d'esprit que de courage; il devint par la suite un publiciste -distingué[605], et nous retrouvons son nom ou celui de son fils, trente -et quarante ans après ce duel, sur les listes de ceux qui siégèrent aux -états de Bretagne, avec le nom du fils de madame de Sévigné[606]. Près -de deux mois et demi se passèrent avant que Henri de Sévigné fût guéri -de sa blessure, et son contrat de mariage ne put être signé que le 1er -juillet. Il le fut sans témoins. Le lundi soir 1er août, les fiançailles -se firent en présence du P. de Gondy, de l'Oratoire; du coadjuteur -(Retz), et des évêques d'Alby et de Châlons; de la duchesse de Retz et -de plusieurs autres dames. Le mariage fut célébré le jeudi 4 août, à -deux heures du matin. Cette heure tardive explique pourquoi l'acte de -mariage, qu'on a retrouvé dans le registre de l'ancienne paroisse de -Saint-Gervais, n'est signé ni du curé ni du vicaire qui le dressèrent. -Ils remirent au lendemain[607] pour compléter leur ouvrage, et, comme -il arrive souvent, ce qui avait dû être fait la veille fut oublié le -jour d'ensuite. - - [601] Première partie de ces _Mémoires_, ch. II, p. 9 et 10. Mais - il y a une erreur à l'égard de Philippe de la Tour de Coulanges, - le premier tuteur de madame de Sévigné. Il était son aïeul, et - non pas son oncle maternel, et il était le père et non le frère - de Christophe de Coulanges, abbé de Livry, le second tuteur de - madame de Sévigné. - - [602] _Mémoires d_'OLIVIER D'ORMESSON, dans CHERUEL, _De - l'administration de Louis XIV_, p. 213. - - [603] _Ibid._, p. 214. - - [604] PELLISSON, _Histoire de l'Académie française_, édit. 1729, - in-4º, p. 193-198, et aussi 28, 80, 86. - - [605] _Traité de la politique de France_, par monsieur P. H. - (Paul HAY), marquis de C. (Chastellet); Cologne (Elzeviers), chez - Pierre Marteau, 1669 (264 pages); 2e édit., 1670; 3e édit., 1677; - 4e édit., 1680.--Barbier, dans son _Dictionnaire des Anonymes_, - donne les titres des autres ouvrages de du Chastellet. - - [606] _Recueil manuscrit des états de Bretagne dans diverses - villes de cette province_, Bl.-Mant., 75, p. 419, 481 verso, 507, - 523, 535, 549.--A toutes ces pages, dans les états tenus à - Nantes, à Dinan, à Rennes, à Vannes, à Vitré, depuis 1681 - jusqu'en 1699, on trouve le nom du marquis de Sévigné et celui de - M. Paul Hay, marquis du Chastellet. - - [607] Partie 1re de ces _Mémoires_, ch. II, 2e édit., p. - 18.--_Mémoires d_'OLIVIER D'ORMESSON, dans CHERUEL, _Administration - de Louis XIV_, p. 214.--Acte du mariage de Henri de Sévigné et de - Marie de Rabutin-Chantal, dans MONMERQUÉ, _Billet italien de madame - de Sévigné_; Paris, 1844, in-8º, p. 8 et 9, _notes_. - -Les deux conjoints partirent huit à dix jours après pour la Bretagne, se -rendirent à leur terre des Rochers, et ne revinrent à Paris qu'en -décembre de l'année suivante. Ainsi les souvenirs du séjour de madame de -Sévigné aux Rochers se trouvaient liés à l'acte le plus important de sa -vie et à cette année qu'elle passa seule avec celui qu'elle aimait, -corrigé, pendant quelque temps du moins, de sa brutale insolence et de -ses fougueux emportements par la dure leçon qui lui avait été donnée par -du Chastellet. - -Dès cette époque, on aperçoit dans madame de Sévigné le désir qu'elle -manifeste, à l'égard de son cousin Bussy, de son fils et de sa fille, de -voir ceux des deux familles auxquelles elle appartenait parvenir à de -hautes fonctions et à un rang élevé dans le monde; et comme cette -ambition ne put réussir que par sa fille, son amour maternel pour le -premier fruit d'une union enfanté dans les délices d'une passion -qu'aucune autre ne remplaça fut encore accru par le contentement de -l'amour-propre satisfait[608]. Avant de partir pour les Rochers, elle -avait prié son ami Olivier d'Ormesson de s'informer si M. de Rogmont -voulait vendre sa charge de cornette des chevau-légers; car il ne paraît -pas, ainsi qu'on l'a dit, qu'au moment de son mariage Sévigné eût encore -été revêtu du grade de maréchal de camp. Des négociations, qui durèrent -deux ans, furent entamées pour lui procurer une charge; elles -échouèrent, parce que madame de Sévigné ne put obtenir de son tuteur -l'abbé de Coulanges et de ses frères de servir de caution à M. de -Sévigné. Ces hommes judicieux avaient aperçu les graves défauts de ce -jeune éventé, et regrettaient que leur nièce lui eût donné la préférence -sur ses rivaux. L'abbé de Coulanges se plaignait hautement de ce que, -par tendresse pour la mariée, lui et madame de la Trousse s'étaient -engagés, contre leur intention, plus qu'ils n'auraient dû le faire[609]. - - [608] Conférer la 1re partie de ces _Mémoires_, 2e édit., ch. - III, p. 22. - - [609] OLIVIER D'ORMESSON, _Mémoires_, dans CHERUEL, - _Administration de Louis XIV_, p. 215. - -Madame de Sévigné, privée de sa mère et n'ayant jamais eu de sÅ“ur, -n'eut auprès d'elle, pour l'assister dans son premier accouchement, que -la mère et la femme d'Olivier d'Ormesson, son ami intime, son conseil. -L'enfant qui devait bientôt remplir d'amour et de tourments toute -l'existence de madame de Sévigné l'occupa faiblement: ce n'était qu'une -fille. Mais, seize mois après la naissance de cette fille, une lettre -qu'elle écrit à Bussy[610] nous montre l'orgueilleuse mère triomphante -d'avoir donné un fils à son mari. Elle était trop entièrement dominée -par sa tendresse conjugale pour qu'elle pût encore en reporter une -grande part sur ses enfants. Le cÅ“ur est exclusif, et sent qu'il -affaiblit ses forces en les partageant. Toujours l'amour d'une femme -pour son mari faiblit quand le sentiment maternel se développe en elle -avec énergie. La raison resserre, il est vrai, les nÅ“uds qui l'unissent -au père de ses enfants; mais quand la raison domine il n'y a plus de -passion, il n'y a plus d'amour. - - [610] Première partie de ces _Mémoires_, 2e édit., t. I, p. 120. - Mais il faut rectifier la date de la lettre de Bussy, et mettre: - 15 _mars_ 1648. - -D'ailleurs, dans l'intervalle de ses deux accouchements, pendant l'hiver -de 1646 à 1647 et dans le cours de cette dernière année, madame de -Sévigné fut occupée d'un procès qui la concernait personnellement, ce -qui la rapprocha encore plus d'Olivier d'Ormesson et de sa famille. Elle -résida donc à Paris avec son mari, et le procès ne les empêcha pas de -goûter les plaisirs de la capitale; ils invitaient fréquemment à dîner -M. Olivier d'Ormesson, avec leur oncle Renaud de Sévigné, qui arrivait -d'Italie. - -Dans le journal d'Olivier d'Ormesson, du 27 février 1647, on lit[611]: -«Je fus dîner chez M. de Sévigné. Je fus, avec M. et madame de Sévigné, -chez M. du Verger pour leur affaire; ils soupèrent ce soir-là au logis, -et (nous) fûmes voir après souper, chez M. Novion (le président), _le -Ballet des Rues de Paris_, qui n'est pas grand'chose[612].» - - [611] OLIVIER D'ORMESSON, _Mémoires_, dans CHERUEL, p. 216. - - [612] Sur le président de Novion, conférez MOTTEVILLE, - _Mémoires_, t. XXXVIII, p. 129, et RETZ, _Mémoires_, t. XLVI, p. - 13. - -La journée du samedi 2 mars 1647 dut se graver aussi dans la mémoire de -madame de Sévigné; car, après avoir été avec d'Ormesson chez ses hommes -d'affaires, elle se rendit ensuite avec lui au Palais-Royal pour voir la -représentation de la _Grande Comédie_[613]. Cette grande comédie, dont -parle Olivier d'Ormesson, lui parut ennuyeuse, parce qu'il ne -connaissait pas l'italien. Elle dut, par une raison contraire, -intéresser la jeune élève de Ménage et de Chapelain. C'est le premier -opéra italien qui ait été joué en France. Il fait époque dans -l'histoire de notre théâtre. Ceux qui le connaissent savent qu'il s'agit -ici du _Mariage d'Orphée et d'Eurydice_[614], pièce pour laquelle -Mazarin fit de si grandes dépenses. Transcrivons le récit que fait -madame de Motteville de la première représentation de cette pièce. Il -peint si bien la cour et les courtisans et l'époque heureuse de la -régence d'Anne d'Autriche, il nous initie si parfaitement au temps de la -jeunesse de madame de Sévigné, que l'on ne peut, sans l'avoir lu, se -faire une idée des souvenirs dont la dame des Rochers aimait à -entretenir sa vive imagination durant les journées passées dans sa -champêtre solitude[615]. - - [613] Ballet en dix-neuf entrées. Conférez de BEAUCHAMPS, - _Recherches sur les théâtres de France_, t. III, p. 121. - - [614] D'ORMESSON, _Mémoires_, dans CHERUEL, p. 216.--DE - BEAUCHAMPS, _Recherches sur les théâtres de France_, t. III, p. - 127 (il cite la _Gazette_ de 1647, no 27, p. 201). - - [615] MOTTEVILLE, _Mémoires_, collection Petitot, t. XXXVII, p. - 216. - -«Sur la fin des jours gras (le 2 mars 1747), le cardinal Mazarin donna -un grand régal à la cour, qui fut beau et fortement loué par les -adulateurs qui se rencontrent en tout temps. C'était une comédie à -machines et en musique à la mode d'Italie, qui fut belle et qui nous -parut extraordinaire et royale. Il avait fait venir les musiciens de -Rome avec de grands soins, et le machiniste aussi, qui était un homme de -grande réputation pour ces sortes de spectacles. Les habits en furent -magnifiques, et l'appareil tout de même sorte. Les mondains s'en -divertirent, les dévots en murmurèrent; et ceux qui, par un esprit -déréglé, blâment tout ce qui se fait ne manquèrent pas, à leur -ordinaire, d'empoisonner ces plaisirs, parce qu'ils ne respirent pas -l'air sans chagrin et sans rage. Cette comédie ne put être prête que les -derniers jours de carnaval; ce qui fut cause que le cardinal Mazarin et -le duc d'Orléans pressèrent la reine pour qu'elle se jouât dans le -carême; mais elle, qui conservait une volonté pour tout ce qui regardait -sa conscience, n'y voulut pas consentir. Elle témoigna même quelque -dépit de ce que la comédie, qui se représenta le samedi pour la première -fois, ne pût commencer que tard, parce qu'elle voulait faire ses -dévotions le dimanche gras, et que, la veille des jours qu'elle voulait -communier, elle s'était accoutumée à se retirer de meilleure heure, pour -se lever le lendemain plus matin. Elle ne voulut pas perdre ce plaisir, -pour obliger celui qui le donnait; mais, ne voulant pas aussi manquer à -ce qu'elle croyait être son devoir, elle quitta la comédie à moitié, et -se retira pour prier Dieu, pour se coucher et souper à l'heure qu'il -convenait, pour ne rien troubler à l'ordre de sa vie. Le cardinal -Mazarin en témoigna quelque déplaisir; et quoique ce ne fût qu'une -bagatelle qui avait en soi un fondement assez sérieux et assez grand -pour obliger la reine à faire plus qu'elle ne fit, c'est-à -dire à ne la -point voir du tout, elle fut néanmoins estimée d'avoir agi contre les -sentiments de son ministre; et comme il témoigna d'en être fâché, cette -petite amertume fut une très-grande douceur pour un grand nombre -d'hommes. Les langues et les oreilles inutiles en furent occupées -quelques jours, et les plus graves en sentirent des moments de joie qui -leur furent délectables.» - -Nul doute que madame de Sévigné, lorsqu'elle voyait ce spectacle magique -de l'Opéra tel que Louis XIV et les grands artistes d'alors l'avaient -créé, ne se ressouvînt souvent de la _Grande Comédie_ et des événements -qu'elle précéda presque immédiatement. - -Madame de Sévigné, après avoir passé tranquillement les premiers mois de -1648 chez son oncle l'évêque de Châlons, dans sa belle campagne de -Ferrières, revint à Paris; et le 11 décembre suivant elle était dans la -lanterne «avec d'Ormesson pour entendre plaider un procès, lorsque les -députés des enquêtes envahirent la grand'chambre, et demandèrent -l'assemblée générale[616].» Puis, le lendemain du repas de famille, le 6 -janvier 1649, elle apprit que le roi était parti dans la nuit, que la -porte Saint-Honoré était gardée, que le peuple avait forcé le bagage du -roi. La guerre civile commença: tous les Sévigné y prirent part, et -suivirent le parti de Retz. Le marquis de Sévigné se sépara de sa femme, -et suivit le duc de Longueville en Normandie. Renaud de Sévigné se fit -battre à Longjumeau; et madame de Sévigné, malgré cet échec, se -réjouissait des progrès de la Fronde, en haine du ministre, qui était -l'ennemi de Gondi. Son naturel, enclin à la gaieté, la portait à se -laisser distraire des inquiétudes et des tourments que lui causait -l'absence de son mari par la société et les lettres de Bussy, et surtout -par le jovial et spirituel chansonnier que d'Ormesson rencontrait -toujours chez elle lorsqu'il y allait. C'était Marigny, fougueux -frondeur, qui, non content de rimer des épigrammes et des chansons, -joignait l'action aux paroles, et souffletait un membre du parlement -(Boislesve) qui l'avait insulté par ses propos[617]. Ce fut alors aussi -qu'elle s'occupa le plus de musique, de vers italiens et de -littérature, et qu'elle mit à profit, pour son instruction, -l'inclination qu'avait pour elle Ménage, jeune encore, quoique déjà -célèbre[618]. L'amitié qu'Olivier d'Ormesson avait pour madame de -Sévigné et l'influence qu'elle exerçait sur ce magistrat étaient si bien -connues qu'à la cour et dans sa propre famille on le soupçonnait, dans -le célèbre procès de Fouquet, dont il était rapporteur, de ne se -conduire que par les conseils de madame de Sévigné[619]. - - [616] Voyez la première partie de ces _Mémoires_, 2e édit., p. - 450, chap. XI. - - [617] _Mémoires d_'OLIVIER D'ORMESSON, dans CHERUEL, p. 217.--Sur - Boislesve et sa fille, voy. MOREAU, _Bibliographie des - Mazarinades_, t. III, p. 199, et t. II, p. 241. - - [618] SÉVIGNÉ, _Lettre à Ménage_ (aux Rochers, 12 septembre - 1656), publiée par M. Cousin dans le _Journal des Savants_, année - 1852, p. 52. - - [619] _Mémoires d_'OLIVIER D'ORMESSON, dans CHERUEL, p. 220. - -L'intimité des deux familles de Rabutin, de Coulanges et des d'Ormesson -fut entretenue par Olivier après la mort de son père. «Le jour de Pâques -(5 avril 1665), dit celui-ci dans ses Mémoires, nous donnâmes, le soir, -à souper, suivant l'usage de mon père, à toute la famille; et s'y -trouvèrent MM. de Colanges, Sanzé et d'Harouis, mesdames de Sévigné mère -et fille.» Le 12 octobre suivant, nous apprenons de ces mêmes Mémoires -que «d'Ormesson se rendit à Livry pour voir madame de Sévigné, qui -s'était blessée à l'Å“il[620].» D'Ormesson a bien soin de noter sur son -journal que, le mercredi 3 février 1666, madame de Sévigné lui amena -Pellisson et mademoiselle de Scudéry, qui lui témoignèrent toute -l'estime et l'amitié possibles sur l'histoire du procès de Fouquet; -qu'au mois d'août de la même année madame de Sévigné partit pour la -Bretagne; et qu'enfin, le 25 août de l'année suivante (1667), «il alla à -Livry voir l'abbé de Colanges et madame de Sévigné, où arrivèrent M. -d'Andilly et madame Duplessis-Guénégaud[621].» - - [620] D'ORMESSON, _Mémoires_, dans CHERUEL, p. 221. - - [621] _Mémoires d_'OLIVIER D'ORMESSON, dans CHERUEL, p. 221.--3e - part. de ces _Mémoires_, 2e édit., p. 49, chap. III. - -A la fin de cette même année (1667), le nom de madame de Sévigné fut -bien souvent répété dans le monde et dans les journaux scientifiques, -non pas à cause d'elle ou de sa famille, mais parce qu'un de ses -domestiques, nommé Saint-Amand, était devenu fou furieux; on pratiqua -sur lui une opération de thérapeutique alors très-vantée: c'était celle -de la transfusion du sang. Ce fut M. de Montmort[622], ami de madame de -Sévigné comme de d'Ormesson, qui apprit à ce dernier que, «le 2 décembre -(1667), Saint-Amand était retombé dans sa folie pour la troisième fois; -qu'on avait tiré tout son sang, et introduit dans ses veines le sang -d'un veau; qu'il avait dormi la nuit, ce qu'il n'avait pas fait depuis -six semaines, et qu'on espérait un bon succès.» Cette opération de la -_transfusion du sang_ était nouvelle en France lorsqu'on la pratiqua sur -le domestique de madame de Sévigné. Suivant Mackensie, on l'avait -essayée en Angleterre dès l'an 1648[623]. Robert Lower s'en prétendit -l'inventeur, et en 1665 il en fit l'expérience publique à Oxford[624]. -Ce moyen curatif fut fort préconisé en Allemagne, et enfin pratiqué en -France, pour la première fois, par Denis et Emmerets, en 1666; mais -Lamartinière et Perrault attaquèrent Denis et Emmerets pour ces essais -trop hardis de l'art médical; et une sentence du Châtelet, rendue le 17 -avril 1668, c'est-à -dire moins de quatre mois après l'expérience tentée -sur le domestique de madame de Sévigné, défendit de pratiquer la -transfusion du sang tant qu'elle n'aurait pas reçu l'approbation de la -faculté de médecine de Paris; et cette approbation ne fut jamais -donnée[625]. On vient de la tenter de nouveau, au moment où j'écris -ceci, en transfusant du sang humain dans les veines d'une femme -expirante, et on lui a rendu la vie et la santé[626]. - - [622] _De l'administration de Louis XIV_, par CHERUEL; Rouen, - 1849, in-8º, p. 222, dans l'appendice. - - [623] MACKENSIE, _Histoire de la santé_, cité par Rochoux dans - l'article du Dictionnaire de médecine de PANCKOUCKE. - - [624] FURETIÈRE, _Le grand Dictionnaire des arts et des sciences - de l'Académie française_, Paris, 1696, t. IV, p. 300, au mot - _Transfusion_. - - [625] ROCHOUX, dans le Dictionnaire de médecine de PANCKOUCKE, - article _Transfusion_. - - [626] _De la transfusion du sang à propos d'un nouveau cas suivi - de guérison, par MM._ DESRAY _et_ DESGRANGES, _dans les comptes - rendus hebbomadaires de l'Académie des sciences_, t. XXXIII, p. - 657 (séance du 8 décembre 1851). - -L'année suivante (1668) devait occuper encore plus de place que toutes -celles qui l'avaient précédée dans la mémoire de madame de Sévigné. -C'était le temps de la première conquête de la Franche-Comté, le temps -où elle parut conduisant sa fille, éclatante de jeunesse et de beauté, -aux splendides fêtes de Versailles. Madame de Sévigné se rappelait -encore les jours heureux passés à Livry, pendant l'été et l'automne de -cette même année, dans la société des Coulanges, de tous ses amis, de -d'Ormesson et de ses fils. Ce fut à Livry que la vocation de l'un d'eux -se décida pour la vie religieuse, et que mademoiselle de Sévigné et sa -mère durent être étonnées de voir ce jeune homme, près d'elles, -persister dans le désir de se faire génovéfain[627]. - - [627] _Journal de_ D'ORMESSON, du dimanche 14 octobre 1668, dans - CHERUEL, p. 222. - - -Il était nécessaire de rappeler tout ce qui, dans les Mémoires de -d'Ormesson, nous révélait des faits ignorés jusqu'ici sur madame de -Sévigné et les objets des réminiscences dont elle était principalement -préoccupée pendant son séjour aux Rochers durant l'année 1675. Le petit -nombre de lettres qui nous restent de sa correspondance pendant la -première moitié de sa vie, qui seraient les plus intéressantes à bien -connaître, laissent dans sa biographie des lacunes qu'il n'est pas -possible de combler, et des incertitudes qu'on ne peut faire disparaître -entièrement; mais les Mémoires de d'Ormesson, en nous donnant les moyens -de retracer les souvenirs dont elle était préoccupée à l'époque où nous -sommes parvenus, nous ont permis d'en diminuer le nombre. Après l'avoir -accompagnée dans cette course rétrograde, allons la retrouver en -Bretagne, où elle jouit de la société de la princesse de Tarente. - - - - -CHAPITRE XIII. - -1676. - - Liaisons de madame de Sévigné avec la princesse de Tarente.--Elles - aimaient à s'entretenir ensemble de leurs filles et des souvenirs - de leur jeunesse.--Nouvelles du Danemark et de la cour de France, - données par cette princesse à madame de Sévigné pendant son séjour - aux Rochers.--Griffenfeld devient amoureux de la princesse de la - Trémouille, qui le rejette.--Il se fait des - ennemis;--conspire;--est condamné à mort;--reçoit sa grâce;--se - marie et meurt.--Madame de la Trémouille épouse le comte - d'Oldenbourg.--Colère de la princesse de Tarente sur ce - mariage.--Madame de Sévigné l'apaise.--Motifs de l'attachement que - la princesse avait pour elle.--Liaison de la princesse de Tarente - avec MADAME, femme de MONSIEUR, sa nièce.--Caractère de - MADAME.--Rang et naissance de la princesse de Tarente et de - Henri-Charles de la Trémouille, son mari.--Pourquoi celui-ci était - appelé prince de Tarente.--Caractère du prince de Tarente.--Il fuit - en Hollande.--Il épouse la fille du landgrave de Hesse-Cassel.--Il - s'attache à Condé, et lui reste fidèle.--Rentre en - France.--Influence de la maison de la Trémouille en Poitou et en - Bretagne.--La baronnie de Vitré la plus ancienne de Bretagne.--Le - prince de Tarente préside les états de Bretagne, notamment ceux de - 1669.--Mort du prince de Tarente.--Son fils est élevé dans la - religion catholique.--La princesse de Tarente devient héritière et - maîtresse de tous les biens de sa maison.--Pourquoi elle avait tant - d'amitié pour madame de Sévigné.--Elle lui donne un petit - chien.--Confidences de la princesse.--Madame de Sévigné se décide à - passer l'hiver aux Rochers.--Ses distractions.--Ses - lectures.--L'opéra d'_Atys_ est donné.--L'_Art poétique_ de Boileau - est publié.--Souvenirs du passé retrouvés dans les papiers de la - princesse de Tarente.--Portrait de madame de Sévigné.--Vue - rétrospective du temps de sa jeunesse.--Détails sur la duchesse de - la Trémouille, belle-mère de la princesse de Tarente. - - -C'est avec la princesse de Tarente que madame de Sévigné aimait à -s'entretenir du beau temps de sa jeunesse. Cette bonne princesse avait -des recettes curatives pour tous les souffrants et des consolations pour -tous les soupirants, badinant elle-même de son _cÅ“ur de cire_[628]. -Elle avait pour madame de Sévigné une véritable amitié: elle lui faisait -aux Rochers de fréquentes visites, et y passait des journées -entières[629]. - - [628] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 décembre 1678), t. IV, p. 243, édit - G.; t. IV, p. 120, édit. M. - - [629] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (16 octobre 1675), t. IV, p. 155, édit. - G.; t. IV, p. 44, édit. M. - -Le pays, la langue, la religion, la naissance, le rang, le caractère, -les habitudes, les manières, les mÅ“urs, tout était différent entre la -princesse de Tarente et madame de Sévigné; et cependant une singulière -analogie dans leur destinée les rapprochait et établissait entre elles -une grande intimité. Toutes deux étaient veuves et à peu près du même -âge; toutes deux avaient une fille qu'elles aimaient avec une tendresse -excessive et qu'elles préféraient à l'héritier de leur nom; leurs filles -se trouvaient séparées d'elles par de grandes distances, de sorte -qu'elles seules sympathisaient parfaitement quand elles se confiaient -leurs inquiétudes, quand elles s'entretenaient de leurs communes -douleurs[630]. Celles qui tourmentaient alors la princesse de Tarente -étaient grandes, et les lettres de madame de Sévigné, en nous -instruisant de leur cause, nous donnent sur l'histoire de Danemark des -documents précieux et certains. Voici ce qu'elle écrit à sa fille sur ce -sujet[631]: - -«J'ai été voir la bonne princesse; elle me reçut avec transport. Le goût -qu'elle a pour vous n'est pas d'une Allemande; elle est touchée de votre -personne et de ce qu'elle croit de votre esprit. Elle n'en manque pas, à -sa manière; elle aime sa fille et en est occupée; elle me conta ce -qu'elle souffre de son absence, et m'en parla comme à la seule personne -qui puisse comprendre sa peine. - - [630] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (2 octobre 1675), t. IV, p. 124 et 128, - édit. G.; t. IV, p. 14 et 18, édit. M.--(11 décembre 1675), t. - IV, p. 243, édit. G.; t. IV, p. 120, édit. M.--(25 février 1685), - t. VIII, p. 20, édit. G.; t. VII, p. 244, édit. M.--Conférez - _Portrait de la princesse de Tarente_, fait par elle-même à la - Haye en 1656, dans Petitot, collection des _Mémoires sur - l'histoire de France_, t. XLIII, p. 507-512, à la suite des - _Mémoires de_ MONTPENSIER.--Il est parlé de ce portrait dans les - _Mémoires de_ MONTPENSIER (année 1677), t. XLII, p. 360.--Le - portrait de mademoiselle de la Trémouille est celui de la - belle-sÅ“ur de la princesse de Tarente, 1657. - - [631] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (2 octobre 1675), t. IV, p. 124 et 125, - édit. G.; t. IV, p. 14 et 15, édit. M. - -«Voici donc, ma chère enfant, des nouvelles de la cour de Danemark: je -n'en sais plus de la cour de France; mais pour celles de Copenhague, -elles ne vous manqueront pas. Vous saurez donc que cette princesse de la -Trémouille est favorite du roi et de la reine, qui est sa cousine -germaine. Il y a un prince, frère du roi, fort joli, fort galant, que -nous avons vu en France, qui est passionné de la princesse, et la -princesse pourrait peut-être sentir quelques dispositions à ne le haïr -pas; mais il se trouve un rival qui s'appelle M. le comte de -_Kingstoghmfelt_ (madame de Sévigné s'amusait, ainsi qu'elle le dit -elle-même, à défigurer ridiculement tous les noms allemands, pour faire -rire sa fille[632]). Vous entendez bien: ce comte est amoureux de la -princesse, mais la princesse le hait. Ce n'est pas qu'il ne soit brave, -bien fait et qu'il n'ait de l'esprit, de la politesse; mais il n'est pas -gentilhomme, et cette seule pensée fait évanouir. Le roi est son -confident, et voudrait bien faire ce mariage; la reine soutient sa -cousine, et voudrait bien le prince; mais le roi s'y oppose, et le -favori fait sentir à son rival tout le poids de sa jalousie et de sa -faveur. La princesse pleure, et écrit à sa mère deux lettres de quarante -pages: elle a demandé son congé; le roi ni la reine n'y veulent point -consentir, chacun pour différents intérêts. On éloigne le prince sous -divers prétextes; mais il revient toujours. Présentement ils sont tous à -la guerre contre les Suédois, se piquant de faire des actions -romanesques pour plaire à la princesse. Le favori lui dit en partant: -«Madame, je vois de quelle manière vous me traitez; mais je suis assuré -que vous ne sauriez me refuser votre estime.» Voilà le premier tome; je -vous en manderai la suite, et je ne veux pas qu'il y ait dorénavant en -France une personne mieux instruite que vous des intrigues de Danemark.» - - [632] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (3 et 31 mai et 2 juin 1680), t. VI, p. - 459, édit. M.; t. VII, p. 13, édit. G.--_Ibid._, t. VI, p. 299, - édit. M. - -Et quatre mois après elle ne donne pas encore le second volume du roman; -mais elle continue le premier, et ajoute[633]: «Disons deux mots du -Danemark. La princesse est au siége de Wismar, avec le roi et la reine; -les deux amants font des choses romanesques. Le favori a traité un -mariage pour le prince, et a laissé le soin à la renommée d'apprendre -cette nouvelle à la jolie princesse: il fut même deux jours sans la -voir. Cela n'est pas le procédé d'un sot. Pour moi, je crois qu'il se -trouvera à la fin qu'il est le fils de quelque roi des Wisigoths.» - - [633] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (22 décembre 1675), t. IV, p. 268, édit. - G.; t. IV, p. 141, édit. M. - -Non, ce fut toujours _Schuhmacher_ (Cordonnier), Allemand d'origine, -fils d'un marchand de vin à Copenhague, créé comte de Griffenfeld et -grand chancelier. La reine elle-même, cédant à son influence, voulut le -marier avec la fille du duc de Holstein-Augustenbourg, de la branche -cadette de la maison royale, et la princesse s'était déjà mise en route -pour Copenhague; mais Griffenfeld mit lui-même obstacle à ce mariage. Ce -grand homme d'État, ce Richelieu du Nord, ce législateur du Danemark, -qu'il gouverna longtemps admirablement, se laissa détourner des larges -voies de sa noble ambition par l'espoir d'épouser cette fille de la -princesse de Tarente, la charmante Charlotte-Amélie de la Trémouille. -L'esprit, les grâces, la beauté de cette princesse l'avaient séduit. -Rebuté par elle, il abusa de son autorité pour écarter le prince son -rival, et chercha à se ménager l'appui tout-puissant de Louis XIV; il -lia avec ce monarque une correspondance coupable, en reçut de l'argent, -négligea les affaires du royaume pour suivre celles qui intéressaient sa -funeste passion, fut dénoncé, arrêté, mis en jugement et condamné à -perdre ses biens, ses emplois et à avoir la tête tranchée. Le jour fixé -pour l'exécution, il monta avec une contenance assurée sur l'échafaud; -mais au moment où l'exécuteur levait le glaive, un aide de camp du roi -accourt, et crie: «Grâce, de la part de Sa Majesté, pour Schuhmacher!» -Et l'aide de camp remet un papier à Schuhmacher, qui le reçut sans -émotion. Il apprit, en le lisant, que sa peine était commuée en une -prison perpétuelle. Schuhmacher dit froidement: «Cette grâce est plus -douloureuse que la mort même.» Il redescendit lentement, et comme à -regret, les degrés de l'échafaud. Il fit solliciter le roi de lui -permettre de le servir comme soldat: cette faveur lui fut refusée. -Détenu étroitement à Copenhague pendant quatre ans, il fut ensuite -transféré au château fort de Muncholm, près de Drontheim, en Norwége; il -y resta vingt-trois ans, regretté de son souverain, qui désirait et -n'osait pas l'employer. En 1698, sa captivité cessa; mais il ne jouit -pas longtemps de sa liberté, puisqu'il mourut le 11 mai 1699, âgé de -soixante-quatre ans. Il avait été marié à une Catherine Nansen de -Copenhague, et en eut une fille[634]. - - [634] CATTEAU-CALLEVILLE, _Biographie universelle_, t. XVIII, p. - 477, article GRIFFENFELD. - -Tel est le second tome du _roman vrai_ et trop malheureusement -historique que madame de Sévigné avait promis à sa fille, mais qu'elle -n'aurait pu lui donner complet; car elle mourut deux ans avant ce -_favori tout-puissant_, qu'elle appelle _M. le comte de -Kinghstoghmfelt_[635]. - - [635] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (2 octobre 1675), t. IV, p. 125, édit. - G. - -Le troisième et dernier tome doit nécessairement nous apprendre quel fut -le sort de celle qui inspira une passion si funeste au principal -personnage, et madame de Sévigné, qui nous a donné le premier, nous -fournira encore celui-là . Elle nous apprend que, la princesse de la -Trémouille n'ayant pu épouser le prince de Danemark, sa mère la -princesse de Tarente ne trouvait personne d'assez noble. Elle était -parente de la Dauphine et de deux électeurs palatins de Hesse, et elle -ne voulait point déroger. Plusieurs partis se présentèrent, et furent -refusés; mais sa fille, qui ne pensait pas comme sa mère, fit un choix -sans sa participation, qui mit en courroux la princesse de Tarente[636]. -C'est dans sa lettre à madame de Grignan du 3 mai 1680, écrite dans -l'agitation d'un départ, que madame de Sévigné nous instruit de ce -mariage: «Encore, si j'avais à vous apprendre des nouvelles de Danemark, -comme je faisais il y a quatre ou cinq ans, ce serait quelque chose; -mais je suis dénuée de tout. A propos, la princesse de la Trémouille -épouse un comte d'_Ochtensilbourg_[637] (lisez comte d'Oldenbourg), qui -est très-riche et le plus honnête homme du monde: vous connaissez ce -nom-là . Sa naissance est un peu équivoque: toute l'Allemagne soupire de -l'outrage fait à l'écusson de la bonne Tarente; mais le roi lui parla -l'autre jour si agréablement sur cette affaire, et son neveu le roi de -Danemark et même l'amour lui font de si pressantes sollicitations -qu'elle s'est rendue. Elle vint me conter cela l'autre jour. Voilà une -belle occasion de lui écrire, et de réparer vos fautes passées. -N'êtes-vous pas bien aise de savoir ce détail[638]?» - - [636] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (25 mai 1680), t. VI, p. 511, édit. G. - - [637] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 mai, 2 juin), t. VI, p. 299, édit. - M. - - [638] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (3 mai 1680), t. VI, p. 469, édit. G.; - t. VI, p. 251, édit. M.--_Ibid._ (11 juin 1680), t. VI, p. 333, - édit. M. - -Et dans sa lettre du 16 juillet, écrite des Rochers, madame de Sévigné -continue de donner à sa fille des nouvelles de ce nouveau mariage: «J'ai -vu ma voisine (la princesse de Tarente, qui était à Vitré). Elle me fit -beaucoup d'amitié, et me montra d'abord votre lettre... Elle dit qu'elle -est venue ici pour faire réponse. Sa fille est transportée de joie; -elle est en Allemagne, ravie d'avoir quitté le Danemark, charmée de son -mari et de ses richesses. Elle s'est un peu précipitée de se marier -avant les signatures de sa famille: la mère en est en colère; mais je me -moque d'elle[639].» - - [639] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 juillet 1680), t. VI, p. 362, édit. - M.; t. VII, p. 91 et 92, édit. G. - -Quinze jours après cette lettre, elle continue dans une autre[640]: - -«La bonne princesse me vient voir sans m'en avertir, pour supprimer la -sottise des fricassées: elle me surprit vendredi; nous nous promenâmes -fort, et au bout du mail il se trouva une petite collation légère et -propre, qui réussit fort bien. Elle me conta les torts de sa fille de -n'avoir pas rempli son écusson d'une souveraineté; je me moquai fort -d'elle; je la renvoyai en Allemagne pour tenir ce discours; et, dans le -bois des Rochers, je lui fis avouer que sa fille avait très-bien fait. -Elle est si étonnée de trouver quelqu'un qui ose lui contester quelque -chose que cette nouveauté la réjouit. Le roi et la reine de Danemark -vont voir ce comte d'Oldenbourg dans sa comté: il défraye toute cette -cour, et sa magnificence surpasse toute principauté. Je vois les lettres -de cette comtesse, que je trouve toutes pleines de passion pour son -mari, de raison, de générosité, de dévotion et de justice.--«Eh! madame, -que pouvez-vous leur souhaiter de plus, puisqu'avec cela elle est riche -et contente?»--Il semble que j'aie une pension pour soutenir l'intérêt -de cette fille.» - - [640] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (21 juillet 1680), t. VI, p. 384, édit. - M.; t. VII, p. 123, édit. G. - -Cette fille rentra en grâce, et madame de Sévigné fait honneur à ses -exhortations et aux lettres écrites par madame de Grignan de cette -réconciliation: il est bien plus probable qu'elle fut due aux lettres de -la comtesse d'Oldenbourg, si tendrement aimée de sa mère[641]. Madame de -Sévigné, habituée à traiter d'égale à égale avec sa fille, à prévenir -ses désirs, à lui pardonner tout et à ne se rien pardonner de ce qui -avait pu lui déplaire, mesurait la force du sentiment par l'élégante -énergie de l'expression, et elle ne trouvait pas que les lettres de la -comtesse d'Oldenbourg fussent de nature à produire beaucoup d'effet. «Ce -sont, dit-elle à madame de Grignan, des lettres d'un style qui n'est -point fait; ce sont des _chères mamans_ et des tendresses d'enfant, -quoiqu'elle ait vingt ans[642].» L'éducation et les mÅ“urs allemandes, -l'étiquette sévère, l'obéissance passive des enfants envers leurs -parents, exigées en Allemagne, donnaient, auprès d'une femme du rang et -du caractère de la princesse de Tarente, une grande puissance à la naïve -et sincère expression du sentiment filial. Dans les lettres d'Amélie de -la Trémouille à sa mère, le ton familier, leste et dégagé de madame de -Grignan, ses saillies plaisantes et ses spirituelles tendresses -n'eussent certainement pas produit le même effet. Ce qui plaisait à la -princesse de Tarente dans madame de Sévigné, dans madame de Grignan, lui -eût déplu dans sa fille. On change difficilement les mÅ“urs et les -habitudes, les opinions et les croyances que l'on a reçues du pays qui -nous a vu naître, où notre intelligence s'est développée, où nos -premières passions ont rivé nos penchants à notre caractère; mais on -prend facilement les manières des personnes avec qui l'on vit, et on -renonce aisément à celles qu'on nous avait données. Toute l'Europe, à -cette époque, était enivrée de la richesse, de l'élégance, de la -politesse de la cour de Louis XIV; cette cour était pour toutes les -autres un objet constant d'émulation, et les Françaises avaient acquis -une renommée d'amabilité, de savoir-vivre qui les faisait rechercher et -prendre pour modèle en tous lieux par les femmes des classes élevées. -Madame de Sévigné était une des plus éminentes sous ce rapport. La -princesse de Tarente fut séduite par son esprit: elle se livra sans -réserve au charme d'un commerce intime, elle n'eut plus de secrets pour -madame de Sévigné; elle lui fit sur elle-même d'étranges confidences, -moins étonnantes encore que la hardiesse des observations et des -réprimandes de madame de Sévigné, qui, loin de déplaire, affermissait -ainsi la confiance qu'avait en elle la bonne princesse[643]. Bien des -causes mettaient obstacle à ce que madame de Sévigné eût pour elle la -même chaleur de sentiment, la même franchise, le même abandon. Cependant -les épanchements réciproques des tendresses maternelles n'étaient pas -les seuls motifs qui portaient madame de Sévigné à rechercher avec -empressement la société de cette princesse. Amélie de Hesse, qui avait -épousé en 1647 le duc de la Trémouille, prince de Tarente, qu'elle -perdit le 14 septembre 1672[644], était fille de Guillaume V, landgrave -de Hesse-Cassel, et tante (tante très-chérie) de la seconde MADAME -(Charlotte-Élisabeth de Bavière), que Louis XIV avait, dans l'intérêt de -sa politique, imposée à son frère. La nouvelle duchesse d'Orléans se -distinguait à la cour par son originalité, que personne n'était tenté -d'imiter; elle y vivait dans un isolement complet, en véritable -Allemande, conservant ses goûts et sa rude fierté; elle ne plaisait à -personne, et personne ne lui plaisait. Il faut cependant en excepter le -roi, qu'elle admirait, qu'elle aimait plus qu'il ne fallait pour son -repos; elle n'avait de complaisance que pour lui et pour son mari, -qu'elle parvint à s'attacher par sa soumission et sa résignation. Louis -XIV lui en savait gré, et respectait dans cette princesse les droits -éventuels qu'elle avait sur la Bavière et le Palatinat, dont il sut -tirer bon parti dans ses négociations. Quoique laide, elle ne parut pas -désagréable au roi le premier jour qu'il la vit. Son gros visage, sa -taille courte, ses bras massifs, ses mains fortes et mal faites étaient -relevés par sa jeunesse, son air de vigueur et de santé, l'ampleur de -ses formes et l'éclatante fraîcheur des femmes de son pays. Louis XIV -estimait sa vertu, la loyauté de sa brusque franchise; ses goûts virils, -sa passion pour les chiens, les chevaux avaient son approbation et ses -sympathies[645]. Il lui savait même gré de son isolement, de sa -sauvagerie, dont elle ne se départait que pour lui. Elle aimait à le -voir et à lui tenir compagnie. Tout le temps qu'elle ne passait pas près -de lui, à la chasse et aux spectacles[646], elle l'employait à écrire à -ses nobles parents d'Allemagne de longues lettres dont les fragments ont -servi à former ces singuliers Mémoires où la cour de France, à -l'exception du roi, est déchirée, injuriée impitoyablement; où les -anecdotes les plus scandaleuses, souvent même les plus fausses sont -racontées avec un cynisme révoltant[647]; où elle exhale sa jalouse -haine contre madame de Montespan, surtout contre madame de Maintenon, à -laquelle elle prodigue les épithètes de _vieille sorcière_, de _vieille -truie_ et autres semblables. Trois Allemandes composaient sa société -habituelle; la princesse de Tarente était de ces petites réunions, où -l'on ne parlait qu'allemand. MADAME lui écrivait en langue allemande de -longues lettres, que la princesse, lorsqu'elle était à Vitré, -s'empressait de communiquer à madame de Sévigné en les traduisant. Par -ce canal, encore plus que par celui de madame de Coulanges, madame de -Sévigné parvenait à entretenir dans sa correspondance avec madame de -Grignan cette variété piquante de faits curieux, d'anecdotes bouffonnes, -de traits de médisance dont sa plume rapide savait déguiser le venin par -un tour plaisant ou gracieux, et faire disparaître la crudité par de -discrètes réticences. - - [641] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (18 août 1680), t. VI, p. 424, édit. - M.--_Ibid._ (2 octobre 1680), t. VII, p. 10 et 11, édit. M.; t. - VII, p. 168 et 239, édit. G. - - [642] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (23 octobre 1675), t. IV, p. 53, édit. - M.; t. IV, p. 167, édit. G. - - [643] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 décembre 1675), t. IV, p. 243, édit. - G.; t. IV, p. 120, édit. M. - - [644] _Mémoires de Henri-Charles_ DE LA TRÉMOUILLE, _prince_ DE - TARENTE; Liége, 1767, in-12, p. 56 et 312.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 - mars 1676), t. IV, p. 241, édit. M. - - [645] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 juillet 1680), t. VII, p. 133, 134, - édit. G.; t. VI, p. 394, édit. M.--ÉLISABETH DE BAVIÈRE, - _duchesse_ D'ORLÉANS, _Mémoires_, _Fragments_, édit. de 1822, p. - 32. - - [646] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (16 août 1671), t. II, p. 56, édit. M.; - t. II, p. 189, édit. G.--MONTPENSIER, _Mémoires_ (1671), t. XLIII - (coll. Petitot), p. 334.--SAINT-SIMON, _Mémoires authentiques_, - in-8º, t. X, p. 478; XII, 220; XX, 344. - - [647] Conférez _Fragments et lettres originales de Madame_ - CHARLOTTE-ÉLISABETH DE BAVIÈRE, 1788, t. I, p. 67, in-12.--_Mémoires - et Fragments d_'ÉLISABETH DE BAVIÈRE, etc., 1822, in-8º, _passim_. - -Si la princesse de Tarente avait voulu consentir à abjurer la religion -protestante, ainsi qu'avait fait Élisabeth-Charlotte de Bavière -lorsqu'elle épousa le duc d'Orléans, elle eût infailliblement tenu à la -cour un rang distingué; elle eût rempli près de la reine la place qu'y -occupait la princesse de Monaco[648], celle de première dame ou de -présidente de sa maison[649]. Mais quoique l'attachement de la princesse -de Tarente pour sa religion l'empêchât d'être de la cour, elle n'en -était pas moins une très-grande dame par sa naissance, par celle de son -mari et par les richesses dont elle pouvait disposer. Fille d'un prince -souverain et parente de la Dauphine, alliée par son mariage à la famille -royale de France, elle exigea et obtint, depuis son veuvage, que dans -l'occasion on la traitât d'_Altesse_. L'époux que s'était donné la fille -du landgrave de Hesse-Cassel justifiait par sa naissance, et plus encore -par le renom qu'il avait laissé, ces hautes prétentions. Henri-Charles -de la Trémouille était fils de Henri, duc de la Trémouille, qui avait -épousé en 1619 Marie de la Tour-d'Auvergne, sa cousine germaine, fille -du maréchal de Bouillon, prince souverain de Sedan, et d'Élisabeth de -Nassau, sa seconde femme[650]. Son père, ayant recueilli les biens de la -maison de Laval, réclama en 1743[651] les droits qu'il prétendait avoir -sur la couronne de Naples comme représentant Charlotte d'Aragon, sa -trisaïeule; et il fit prendre, dans la suite, à son fils aîné le nom de -prince de Tarente, que les fils aînés des ducs de la Trémouille ont -toujours porté depuis sans conteste: les chefs de cette maison n'ont -cessé, avec l'agrément du roi, de renouveler, pour la forme, leur -réclamation[652]. Si l'on excepte Louis II, cinquième aïeul, le -conquérant de la Lombardie et l'époux de Gabrielle de Montpensier, -princesse du sang, aucun des la Trémouille, ni avant ni depuis, ne s'est -acquis une aussi grande illustration que le fils de celui qui porta le -premier ce nom de prince de Tarente et qui épousa la princesse si fort -affectionnée à madame de Sévigné. Nul homme de son temps, jeté au milieu -d'événements où le monde était divisé en partis par la religion et la -politique, n'a su mieux concilier ce qu'il devait au drapeau sous lequel -il se plaçait avec ce que l'honneur, l'amitié, la conscience lui -prescrivaient. Il embrassa la religion protestante, qui était celle de -sa mère; et dès qu'il eut terminé ses études et ses exercices, il passa -en Hollande. Il fit ses premières armes sous son grand-oncle le prince -d'Orange: mis à la tête d'un régiment de cavalerie, il s'acquit chez les -Hollandais la réputation d'un excellent officier. Ne pouvant épouser la -princesse d'Orange, qui l'aimait et dont il était amoureux[653], il céda -aux conseils de sa mère, et reçut à Cassel la main de la fille du -landgrave Guillaume V, «avec plus de cérémonies, dit-il dans ses -Mémoires, que je n'aurais voulu[654].» - - [648] _État de la France_, 1677, in-12, p. 452.--SÉVIGNÉ, - _Lettres_ (8 avril 1676), t. IV, p. 308, édit. G.--_Ibid._ (8 mai - 1676), t. IV, p. 249, édit. M.--_Ibid._, t. IV, p. 388, édit. G. - - [649] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 mars 1676), t. IV, p. 379, édit. G.; - t. IV, p. 241, édit. M. - - [650] GRIFFET, _Préface historique_, p. 7 des _Mémoires du - prince_ DE TARENTE; Liége, 1767, in-12. - - [651] _Ibid._, p. XX. - - [652] Les réclamations de la famille la Trémouille furent faites - à tous les congrès: au congrès de Nimègue, en 1678; de Ryswick, - en 1697; d'Utrecht, en 1713; de Rastadt, en 1714. On sait que le - vrai nom est la Trémoïlle; mais, par un usage ancien, on prononce - et on écrit la Trémouille. Cette famille subsiste encore, et - l'héritier direct, Louis-Charles, né le 26 octobre 1838, réside à - Paris, et porte, dans l'almanach de Gotha (1848, p. 141, et 1851, - p. 130), les titres de prince de la Trémoïlle et de Thouars, de - Tarente et de Talmont. - - [653] _Mémoires du prince_ DE TARENTE, 1767, in-12, p. 56 et 306. - - [654] _Ibid._, p. 129, 172, 259.--GRIFFET, p. viij de la préface - des _Mémoires du prince_ DE TARENTE.--LA ROCHEFOUCAULD, - _Mémoires_. - -Après son mariage, Henri-Charles de la Trémouille revint en France, -comblé de faveurs par les Hollandais, qu'il avait servis pendant cinq -ans avec zèle. Ils le regrettaient, et auraient voulu le conserver; mais -il ne pouvait renoncer à sa patrie, et il y rentra pourvu de titres, -d'honneurs et de forts émoluments. La Fronde survint; son père avait -fait abjuration du calvinisme entre les mains du cardinal de Richelieu -et contribué à la prise de la Rochelle en 1628[655]. Le prince de -Tarente se trouva ainsi engagé dans le parti de la cour; mais, fatigué -des promesses sans effet que lui faisait Mazarin, il suivit encore les -conseils de sa mère, et s'attacha au prince de Condé, dont il était -parent par le mariage de Charlotte de la Trémouille avec un Condé. -Tarente combattit pour la cause de ce prince dans le Midi et en -Saintonge, et, comme lui, faillit périr au combat du faubourg -Saint-Antoine, où il eut un cheval tué sous lui, et reçut, dit-il dans -ses Mémoires, _deux coups très-favorables_[656]. Il suivit Condé en exil -au commencement de l'année 1653[657], et retourna en Hollande, où il -fut accueilli avec empressement: favorisé par les états généraux et le -prince d'Orange, il en rapporta des sommes considérables, qui suffirent -au payement des dettes qu'il avait contractées au service des -princes[658]. - - [655] _Mémoires du prince_ DE TARENTE, p. 72 et 104. - - [656] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (29 décembre 1675), t. IV, p. 276, édit. - G; t. IV, p. 152, édit. M. - - [657] _Mémoires du prince_ DE TARENTE, 1767, p. 110, 112, - 113.--_Mémoires du duc_ DE MONTAUSIER, 1731, p. 110.--LA - ROCHEFOUCAULD, _Mémoires_, p. 56 et 172. - - [658] _Mémoires du prince_ DE TARENTE, p. 129, 172, 259. - -En décembre 1654, Cromwell voulut profiter des troubles de la France -pour l'affaiblir en y fomentant la guerre civile: il envoya un nommé -Stouppe à Henri de la Trémouille, pour lui proposer de se mettre à la -tête d'une ligue protestante. La Trémouille refusa. Il lui eût été plus -difficile qu'à tout autre d'accepter une pareille offre sans manquer aux -devoirs les plus sacrés. Son enfance avait été confiée aux jésuites par -son père, qui depuis longtemps avait abjuré le protestantisme. Ainsi les -soins paternels avaient donné à sa primitive éducation une direction -toute catholique; mais sa mère, qui était protestante, le convertit -durant son adolescence à la religion qu'elle professait. S'il avait pris -les armes en faveur de ses coreligionnaires, il aurait nui à sa propre -fortune, il aurait agi en fils ingrat et troublé le bonheur de sa -famille[659]. - - [659] _Ibid._, p. 172. - -Tel était à l'étranger le crédit de Henri-Charles de la Trémouille que -lorsque la princesse sa femme accoucha à la Haye, le 5 mai, du second -prince de Tarente[660], cet enfant eut pour parrains le roi de Suède, -les états généraux des Provinces-Unies et les états particuliers de la -province de Hollande, et reçut de ce roi et des représentants de ces -états les noms de Charles-Belgique-Hollande[661]. - - [660] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (29 décembre 1675), t. IV, p. 279, édit. - G. - - [661] _Mémoires du prince_ DE TARENTE, p. 175. - -Le prince de Tarente fut bien accueilli à son retour en France par la -reine et par Mazarin[662]; l'une et l'autre firent de vains efforts pour -l'attacher au parti de la cour. Mazarin, irrité de sa résistance, le fit -arrêter et enfermer dans la citadelle d'Amiens[663]. Toute la province -du Poitou, le landgrave de Hesse-Cassel, Turenne, son parent, -sollicitèrent en vain son élargissement. Sa mère négocia avec le -cardinal, et l'obtint[664]. Il ne retourna pas dans l'armée de Condé, -mais il demeura attaché au parti de ce prince, alors exilé à -Bruxelles[665]. Il envoya sa femme pour conférer avec lui[666] et avec -l'archiduc, et se fit, par cette conduite douteuse, exiler à -Auxerre[667], d'où il continua de correspondre avec Condé[668]. Il ne -voulut rentrer en grâce qu'après que le prince eut fait sa paix. Depuis -cette époque, il se dévoua entièrement aux intérêts du roi, et le servit -d'une manière utile par ses talents et son influence dans le Poitou et -dans la Bretagne, deux grandes provinces où il tenait le premier rang. -Son père, Henri de la Trémouille, pair de France, duc de Thouars, prince -de Talmont, comte de Montfort, baron de Vitré, etc., tenait à Thouars un -grand état; et mademoiselle de Montpensier, habituée à une magnificence -royale, fut, en 1657, émerveillée de la réception que lui fit le duc de -la Trémouille, de l'imposant aspect de son château, du grand nombre de -gentilshommes à cheval et de dames parées et de l'air noble et -grandiose de son escorte[669]. - - [662] _Ibid._, p. 184. - - [663] _Ibid._, p. 188. - - [664] _Ibid._, p. 196. - - [665] _Ibid._, p. 201. - - [666] _Ibid._, p. 202. - - [667] _Ibid._, p. 215. - - [668] _Ibid._, p. 225. - - [669] MONTPENSIER, _Mémoires_ (collection Petitot), t. XLII, p. - 255 et 256. - -Par acte du 9 avril 1661, le duc de la Trémouille avait cédé et -transporté au prince de Tarente la baronnie de Vitré et le titre de -premier baron de Bretagne[670]. Ce titre donnait au prince de Tarente le -droit de disputer la présidence de la noblesse aux états de Bretagne au -grand Condé lui-même, que Fouquet avait voulu nommer, mais qui ne -consentait à accepter qu'autant que la gratification des états serait -accordée au prince de Tarente[671]. «Je fis entendre, dit Tarente dans -ses Mémoires, à monsieur le Prince que le rang ne se réglait en Bretagne -que par l'ancienneté des baronnies; que celle de Vitré, qui était dans -ma maison, précédait incontestablement celle de Châteaubrilliant.» Il -avait soutenu avec succès les droits de sa maison à la présidence de la -noblesse dans un procès qu'il avait eu avec le duc de Rohan-Chabot. - - [670] _Mémoires du prince_ DE TARENTE, p. 255. - - [671] _Ibid._, p. 257. - -Alors que se préparait l'arrestation de Fouquet, le 18 août 1661, -s'ouvrirent à Nantes les assises des états généraux de Bretagne[672], -qui furent terminées le 21 septembre: le prince de Tarente les présida. -Il présida également, mais pour la dernière fois, les états de 1669, qui -s'assemblèrent à Dinan le 26 septembre[673], et se séparèrent le 28 -octobre. En 1670, il obtint du roi la permission d'aller encore faire un -voyage en Hollande, et il put alors observer le misérable état de la -Flandre espagnole, qui présentait une conquête facile aux armes de la -France[674]. Les deux assemblées des états de Bretagne, de 1671 et de -1673, se tinrent à Vitré: pour celle de 1671, selon ce qui avait été -réglé par le parlement de Rennes en 1652, entre les maisons de Rohan et -de la Trémouille, c'était au duc de Rohan-Chabot à présider[675]; mais -le prince de Tarente mourut à Thouars le 14 septembre 1672, à l'âge de -cinquante-deux ans, et fut remplacé par son père dans la présidence des -états qui eurent lieu l'année suivante[676]; le jeune prince de Tarente, -second héritier de son nom et de ses titres, d'après la volonté de son -aïeul et de son père, avait été élevé dans la religion catholique. Le -duc Henri-Charles de la Trémouille, deux ans avant sa mort, était rentré -dans le sein de l'Église romaine; sa femme et sa fille aînée, plutôt -affligées que touchées de cet exemple, restèrent invariablement fidèles -à la religion protestante[677]. Ce père, le duc Henri de la Trémouille, -mourut deux ans après son fils le prince de Tarente; de sorte que la -princesse se trouva, comme tutrice, avoir l'administration des biens -immenses de toute la maison de la Trémouille; et, comme mère, elle -devint régente d'un prince âgé de dix-huit ans[678]. Elle était ainsi, -depuis près d'un an, la personnification de la grandeur et de la -puissance des la Trémouille lorsqu'elle se prit d'une amitié si vive -pour madame de Sévigné. «Elle m'aime beaucoup, disait à sa fille madame -de Sévigné. On en médirait à Paris; mais ici c'est une faveur qui me -fait honorer de mes paysans.» - - [672] _Recueil des tenues des états de Bretagne_, mss. Bl.-Mant., - no 75, p. 273 verso, et 285. - - [673] _Ibid._, p. 323 et 327. - - [674] Prince DE TARENTE, _Mémoires_, p. 255. - - [675] Prince DE TARENTE, _Mémoires_, p. 280.--_Recueil ms. des - tenues des états de Bretagne_, p. 339. (Ils s'ouvrirent le 4 août - et se terminèrent le 22.) - - [676] Prince DE TARENTE, _Mémoires_, p. 312, et _Recueil ms._, p. - 357. (Ces états s'ouvrirent le 10 novembre 1673, et se - terminèrent le 10 janvier 1674.) - - [677] _Mémoires de_ CHARLES-HENRI, _prince_ DE TARENTE; Liége, - 1767, p. 170, 306, 311. - - [678] _Mémoires du_ PRINCE DE TARENTE, p. 312. - -Ce n'était pas seulement par ses visites, par ses confidences, par les -nouvelles qu'elle apportait que la princesse de Tarente se rendait -agréable à madame de Sévigné; elle avait, pour la distraire et la -réjouir dans sa solitude, les prévoyances et les attentions les plus -aimables. Elle s'était aperçue que la dame des Rochers n'avait pas avec -elle _Marphise_, sa chienne favorite, laissée à Paris avec Hélène, sa -femme de chambre. Aussitôt la princesse de Tarente conçut l'idée de lui -donner un petit chien pour la désennuyer[679]. - - [679] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 novembre 1675), t. IV, p. 201, édit. - G.; t. IV, p. 83, édit. M. Ce chien fut donné en - octobre.--_Ibid._ (23 octobre 1675), t. IV, p. 171, édit. G. - -«Vous êtes étonnée, dit madame de Sévigné, que j'aie un petit chien; -voici l'aventure. J'appelais, par contenance, une chienne courante d'une -madame qui demeure au bout du parc. Madame de Tarente me dit: Quoi! vous -savez appeler un chien? Je veux vous en envoyer un, le plus joli du -monde. Je la remerciai, et lui dis la résolution que j'avais prise de ne -plus m'engager dans cette sottise. Cela se passe, on n'y pense plus. -Deux jours après, je vois entrer un valet de chambre avec une petite -maison de chien toute pleine de rubans, et sortir de cette jolie maison -un petit chien tout parfumé, d'une beauté extraordinaire: des oreilles, -des soies, une haleine douce, petit comme une sylphide, blondin comme un -blondin. Jamais je ne fus plus étonnée ni plus embarrassée; je voulus le -renvoyer, on ne voulut jamais le reporter. La femme de chambre qui -l'avait élevé en a pensé mourir de douleur. C'est Marie[680] qu'aime le -petit chien; il couche dans sa maison et dans la chambre de Beaulieu, il -ne mange que du pain; je ne m'y attache point, mais il commence à -m'aimer; je crains de succomber. Voilà l'histoire que je vous prie de ne -pas mander à _Marphise_, car je crains ses reproches. Au reste, une -propreté extraordinaire; il s'appelle _Fidèle_, c'est un nom que les -amants de la princesse n'ont jamais mérité de porter; ils ont été -pourtant d'un assez bel air. Je vous conterai quelques jours ses -aventures.» - - [680] Conférez ci-dessus, p. 255, chap. XII; et SÉVIGNÉ, - _Lettres_ (6 et 9 septembre, 23 octobre et 16 novembre), t. IV, - p. 84, 87, 171 et 201, édit. G.; t. IV, p. 84 et 87, édit. M. - -D'après ces derniers mots, il y a tout lieu de croire qu'il est heureux -pour la bonne princesse[681] au _cÅ“ur de cire_ que les conversations -orales de madame de Sévigné avec sa fille n'aient pas reçu la même -publicité que ses conversations écrites. Le passage de la lettre du 11 -décembre que nous avons transcrit le prouve encore; c'est dans cette -lettre que l'idée de la princesse ramène madame de Sévigné à celle du -chien qui lui a été donné, et qu'elle continue ce badinage. - - [681] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 décembre 1675), t. IV, p. 243, édit. - G.; et ci-dessus, p. 284. - -«Ce que vous dites de _Fidèle_, écrit-elle à madame de Grignan[682], est -fort joli; c'est la vraie conduite d'une coquette que celle que j'ai -eue. Il est vrai que j'en ai la honte, et que je m'en justifie comme -vous avez vu; car il est certain que j'aspirerais au chef-d'Å“uvre de -n'avoir aimé qu'un chien, malgré les _Maximes_ de la Rochefoucauld, et -je suis embarrassée de _Marphise_. Je ne comprends pas ce qu'on me fait. -Quelle raison lui donnerai-je? Cela jette insensiblement dans les -menteries; tout au moins je lui conterai bien toutes les circonstances -de mon nouvel engagement. Enfin, c'est un embarras où j'avais résolu de -ne jamais me trouver, car c'est un grand exemple de la misère humaine: -ce malheur m'est arrivé par le voisinage de Vitré.» - - [682] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 décembre 1675), t. IV, p. 243-244, - édit. G. - -Plus le séjour de madame de Sévigné aux Rochers se prolongeait, plus -forte devenait l'amitié qu'avait pour elle la princesse de Tarente, et -plus les confidences que madame de Sévigné faisait à son sujet à sa -fille étaient explicites: «La bonne princesse et _son bon cÅ“ur_ -m'aiment toujours... Elle dit toujours des merveilles de vous; elle vous -connaît et vous estime. Pour moi, je crois que, par métempsycose, vous -vous êtes trouvée autrefois en Allemagne. Votre âme aurait-elle été dans -le corps d'un Allemand? Non, vous étiez sans doute le roi de Suède, un -de ses amants; car la plupart _des amants sont des Allemands_[683].» Ces -derniers mots sont d'une jolie chanson de Sarrazin, fort en vogue dans -la jeunesse de madame de Sévigné[684]. - - [683] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 janvier 1676), t. IV, p. 298, édit. - G.--_Ibid._ (1er mai 1671), t. II, p. 52, édit. G.; t. IV, p. - 170, et t. II, p. 43, édit. M. - - [684] SARRAZIN, _Å’uvres_; Paris, Cramoisy, 1694, in-12, p. 414. - -La maxime de la Rochefoucauld à laquelle madame de Sévigné fait allusion -dans sa plaisanterie sur _Marphise_ est celle-ci: «On peut trouver des -femmes qui n'ont jamais eu de galanterie; mais il est rare d'en trouver -qui n'en aient jamais eu qu'une.» Une quatrième édition de ces Maximes -avait paru au commencement de l'année (1675)[685], revue, corrigée et -augmentée par l'auteur, qui fit de ce petit livre l'Å“uvre de toute sa -vie; et nul doute qu'aussitôt après en avoir reçu un exemplaire madame -de Sévigné ne se soit empressée de le lire. C'est aux Rochers que madame -de Sévigné faisait surtout ses grandes lectures. A Paris, elle était -trop distraite par le plaisir et par les affaires. - - [685] _Réflexions ou sentiments et maximes morales_, 4e édition, - revue, corrigée et augmentée depuis la troisième; Paris, Claude - Barbin, 1675, in-12 (157 pages), sans l'avis du libraire ni la - table; achevé d'imprimer le 17 décembre 1674. La maxime est page - 27, no 73. Dans la 3e édition (1665) elle est p. 41, no 83. Dans - la 6e comme dans la 4e. - -Ramenée par les événements et les malheurs de la Bretagne aux lectures -sérieuses, surtout à l'histoire, son ardeur pour ce genre de distraction -s'accrut encore en la trouvant partagée par son fils, revenu de l'armée -pour passer avec elle l'hiver aux Rochers; elle la communiqua à sa -fille, de sorte que toutes deux trouvèrent, par leur correspondance, des -sujets d'entretien bien préférables à ceux que l'éloignement de Paris et -de la cour leur enlevait. «C'est une belle conversation, dit madame de -Sévigné, que celle que l'on fait de deux cents lieues. Nous faisons de -cela ce qu'on en peut faire[686].» - - [686] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er janvier 1676), t. IV, p. 286. - -Madame de Sévigné se montre surtout ravie que sa fille ait entrepris de -lire la grande histoire des Juifs de Flavius Josèphe, dont la traduction -était l'Å“uvre la plus considérable de son vénérable ami Arnauld -d'Andilly, qu'elle avait perdu depuis peu de temps (le 7 septembre -1674). Elle ne tarit pas sur les éloges qu'elle donne au grand historien -du peuple juif[687]. Elle envoya à sa fille, par Rippert, la troisième -partie des _Essais de morale de Nicole_, parmi lesquels elle a distingué -trois traités: _de l'Éducation d'un prince_, _de la Connaissance de -soi-même_, _de l'Usage qu'on peut faire des mauvais sermons_[688]. La -mère et la fille étaient du même avis sur ces excellents Essais de -Nicole; il n'en était pas de même de Sévigné, auquel le premier tome -déplaisait, qui trouvait ces traités obscurs, et se plaignait que la -Marans et l'abbé Têtu avaient accoutumé sa sÅ“ur aux choses fines et -distillées[689]; mais, au contraire, il défendait à juste titre le -nouvel opéra de Quinault contre le dédain de madame de Grignan, et sur -ce sujet il était de l'avis de sa mère[690]. Heureuses les familles où, -comme dans celle de madame de Sévigné, il n'y a pas d'autre sujet de -division! - - [687] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 et 13 novembre 1675), t. IV, p. 189, - 193, édit. G.--_Ibid._ (1er décembre 1675), t. IV, p. 227, édit. - G.--_Ibid._ (11 décembre 1675), t. IV, p. 245, édit. G.--_Ibid._ - (27 novembre 1675), t. IV, p. 221, édit. G. - - [688] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (10 novembre, 11 et 18 décembre 1675, 12 - janvier 1676), t. IV, p. 204, 245, 260, 307-8, édit. G.; t. IV, - p. 182, édit. M. - - [689] _Ibid._ t. IV, p. 204, édit. G.; t. IV, p. 76 et 85, édit. - M.--_Ibid_, _Ibid._ (8 mars 1676), t. IV, p. 362, édit. G. - - [690] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (2 février 1676), t. IV, p. 331-2, édit. - G.; t. IV, p. 199, édit. M.--_Ibid._ (19 janvier 1676), t. IV, p. - 318, édit. G.; t. IV, p. 188, édit. M.--_Ibid._ (12 janvier - 1676), t. IV, p. 182, éd. M.; t. IV, p. 307 et 309, édit. - G.--_Ibid._ (5 janvier 1676), t. IV, p. 293. - -Ce nouvel opéra de Quinault était _Atys_, que ni madame de Grignan, qui -était en Provence, ni Sévigné ni sa mère, qui étaient aux Rochers, -n'avaient pu voir alors représenter à Saint-Germain en Laye le 10 -janvier (1676), jour où, en présence de Louis XIV, il fut joué pour la -première fois[691]. Mais tous les trois ils l'avaient lu, et un -exemplaire de l'imprimé parvint aux Rochers neuf jours après la première -représentation. Cet opéra fit grand bruit, parce qu'il parut à une -époque de forte cabale contre Quinault. Parmi les gens de lettres et -certaines personnes du beau monde, il était devenu de mode de déprécier -les Å“uvres de ce poëte, trop applaudi par la cour. C'était là le -premier symptôme d'une altération dans l'opinion publique, jusqu'alors -si enthousiaste de la gloire de Louis XIV[692]. On était las des succès -guerriers chèrement achetés par la continuation d'une lutte sanglante -sur terre et sur mer; et alors que des conférences étaient ouvertes à -Nimègue et donnaient des espérances de paix, on écoutait avec déplaisir -les paroles par lesquelles se terminait le prologue d'_Atys_: - - Préparons de nouvelles fêtes, - Profitons des loisirs du plus grand des héros: - Le temps des jeux et du repos - Lui sert à méditer de nouvelles conquêtes[693]. - - [691] _Le Théâtre de M. Quinault_; Paris, 1715, in-12, t. IV, p. - 265, 328.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (2 février 1676), t. IV, p. 332, - édit. G.--_Ibid._ (19 janvier 1676), p. 318 et 319, édit. G. - - [692] GERMAIN BOFFRAND, _Vie de Quinault_, t. Ier, p. 41 et 42 du - _Théâtre de M._ QUINAULT. - - [693] QUINAULT, _Théâtre_, 1715, in-12, t. IV, p. 270. - -Boileau, qui possédait à un degré suprême l'art de cadencer des vers qui -se gravent dans la mémoire, ne contribuait pas peu à faire méconnaître -le mérite de Quinault. La renommée du satirique était populaire, et son -influence croissait à chaque nouvelle publication de ses ouvrages. Il -avait donné, deux années de suite, de nouvelles éditions de ses poésies. -Elles contenaient neuf de ses Satires, cinq Épîtres, son _Art poétique_ -et les quatre premiers livres du _Lutrin_. On voit par les citations -qu'en fait madame de Sévigné qu'elle savait par cÅ“ur les beaux passages -de ce dernier poëme[694]. Boileau n'avait rien retranché, dans cette -nouvelle édition, des vers qu'il avait faits contre Quinault; mais, afin -de montrer quelque déférence pour l'approbation que le roi donnait à -l'opéra d'_Atys_, il crut devoir, dans cette dernière édition, laisser -en blanc le nom de Quinault dans un vers de sa satire IX, et déguiser ce -nom sous celui de _Kainaut_ dans les autres satires: dans l'édition -publiée l'année précédente il n'y avait, pour ce nom, ni déguisement ni -suppression[695]. Mais de pareils ménagements servaient plutôt qu'ils ne -contrariaient la malice du poëte. - - [694] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 novembre 1675), t. IV, p. 191, édit. - G.; t. IV, p. 73, édit M.--_Å’uvres diverses du sieur_ D*** - (DESPRÉAUX); Paris, Louis Billaine, 1675, p. 211, 213. _Le - Lutrin_, chant second. - - [695] _Å’uvres diverses du sieur_ D***; Paris, Denys Thierry, - 1674, in-4º, p. 66.--_Ibid._, Paris, Louis Billaine, 1675, in-12, - p. 26, 38, 92. M. Berriat Saint-Prix prétend qu'il y a un carton - pour le feuillet où un blanc remplace le nom de Quinault: je n'ai - pas trouvé de trace de ce carton dans l'exemplaire que je - possède. - -Quoique madame de Sévigné mande à sa fille qu'elle se livrait avec -avidité à toutes sortes de lectures, histoire, morale, fictions, -poésies, etc., c'est principalement par des lectures instructives -qu'elle cherchait un soulagement à l'affliction que lui causaient, -pendant ce calamiteux hiver, les maux qui fondaient sur sa province, et -les souffrances dont elle fut affligée. Après ces _Essais de morale_ de -Nicole, qui la consolaient et dont elle parle sans cesse, aucune lecture -ne lui plaisait plus que celle sur l'histoire de France du temps des -croisades. Malgré sa répugnance pour le style du P. Maimbourg, elle y -lisait avec délices les hauts faits des Castellane et des Adhémar, -ancêtres de la maison de son gendre; elle ajoutait à cette lecture celle -de l'histoire de son temps, si remplie du souvenir de sa jeunesse. «Le -matin, dit-elle à madame de Grignan, je lis l'_Histoire de France_; -l'après-dînée (c'est-à -dire après midi, on était alors en décembre), un -petit livre dans les bois, comme ces _Essais_ (de Nicole, dont elle -vient de parler), la _Vie de saint Thomas de Cantorbéry_, que je trouve -admirable, ou _les Iconoclastes_; et le soir tout ce qu'il y a de plus -gros en impression: je n'ai point d'autre règle[696].» Pour ses lectures -du soir, c'était surtout l'_Histoire de la prison et de la liberté de M. -le Prince_ qui obtenait la préférence. «On y parle, dit-elle, sans cesse -de notre cardinal; il me semble que je n'ai que dix-huit ans; je me -souviens de tout; cela divertit fort. Je suis plus charmée de la -grosseur des caractères que de la bonté du style.» Cette histoire lui -retraçait les temps les plus heureux et les plus agités de sa -jeunesse[697]: elle était l'Å“uvre d'un frondeur, de Claude Joly; mais -les faits y sont racontés, sinon avec talent, du moins avec -impartialité[698]. - - [696] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (27 novembre et 1er décembre 1675), t. - IV, p. 221, 227, édit G. - - [697] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (27 novembre 1675), t. IV, p. 224, édit. - G. - - [698] _Histoire de la prison et de la liberté de M. le Prince_; - Paris, A. Courbé, 227 pages.--MOREAU, _Histoire des Mazarinades_, - t. II, p. 52, 144, 227; t. III, p. 23, 261. - -Ce n'était pas seulement dans les livres imprimés qu'elle cherchait à -raviver les souvenirs de la Fronde[699], mais encore par des documents -manuscrits: «La princesse (de Tarente) et moi, dit-elle, nous ravaudions -l'autre jour dans des paperasses de feu madame de la Trémouille; il y a -mille vers; nous trouvâmes une infinité de portraits, entre autres celui -que madame de la Fayette fit de moi sous le nom d'un inconnu. Il vaut -cent fois mieux que moi; mais ceux qui m'eussent aimée, il y a seize -ans, l'eussent pu trouver ressemblant.» - - [699] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er décembre 1675), t. IV, p. 228. - -Ainsi c'est à la fin de l'année 1659 ou dans les premiers mois de 1660 -que madame de la Fayette[700] commença sa réputation de bel esprit et -d'habile écrivain en traçant le portrait de son amie. C'est alors que -mademoiselle de Scudéry plaçait sous le nom de _Clarinte_, entre les -mains des nombreux lecteurs du célèbre roman de _Clélie_[701], un autre -portrait de madame de Sévigné: elle était depuis longtemps vantée comme -une des précieuses les plus célèbres dans la Gazette de Loret, dans le -Dictionnaire de Somaize, et louée dans les madrigaux et les poëmes de -Ménage, de Montreuil, de Marigny, et enfin inscrite, avec la superlative -épithète de SUBLIME, comme l'ANGE SUR LA TERRE, la GLOIRE DU MONDE, dans -le singulier livre du _Mérite des Dames_, de Jean Gabriel[702]. Ainsi -l'époque où madame de Sévigné se trouvait ramenée par ce portrait trouvé -dans les papiers de la duchesse de la Trémouille était celle où, âgée de -trente-trois ans, sans avoir rien perdu de ses attraits et de sa -fraîcheur, elle avait acquis plus de connaissance du monde, plus -d'instruction, d'amabilité; où elle possédait, dans toute sa puissance, -ses moyens de plaire; où elle jouissait de sa célébrité; c'était enfin -dans un temps où le calme, les plaisirs et les fêtes avaient succédé aux -troubles de la Fronde, c'était l'époque de la paix des Pyrénées, du -mariage du roi et des réjouissances qui en furent la suite[703]. - - [700] _Mémoires touchant la vie et les écrits de Marie de - Rabutin-Chantal_, 1re partie, ch. VI, p. 60, et 2e partie, p. - 166. - - [701] _Ibid._, 2e partie, p. 162. - - [702] _Mémoires sur Sévigné_, 4e partie, p. 381 et 382. - - [703] _Mémoires sur la vie et les écrits de Marie de - Rabutin-Chantal_, 2e partie, p. 176-187, ch. XIV. - -La duchesse de la Trémouille, mère du prince de Tarente, qui avait le -goût des vers et qui avait réuni les portraits et les écrits des beaux -esprits de son temps, était Marie de la Tour-d'Auvergne, cousine -germaine du duc son mari et fille cadette du maréchal de Bouillon, -prince souverain de Sedan, et d'Élisabeth de Nassau, sa seconde -femme[704]. Marie était une femme forte et de grande capacité, qui -réussissait, dit son fils, dans tout ce qu'elle entreprenait. Pendant la -guerre dont nous avons parlé, elle sut déterminer son mari à lui -abandonner la conduite de toutes les affaires de la maison de la -Trémouille[705]; elle l'aidait de ses conseils, que cependant il ne -suivait pas toujours, et elle parvint, dit madame de Motteville[706], à -faire révolter toutes les provinces. Habile et ambitieuse, elle voulait -que son mari fût prince, comme étant issu, par les femmes, de Charlotte -d'Aragon, héritière du royaume de Naples. Marie de la Trémouille crut -que, pour parvenir à ses desseins, il fallait faire quelque mal ou -quelque peur aux ministres, et comme les la Trémouille étaient de -puissants et riches seigneurs, il leur fut facile d'émouvoir des -troubles dans les provinces où ils résidaient. Ces nouvelles donnèrent -de l'irritation aux ministres, et M. le Prince en eut du chagrin. Il -avait répondu de la famille de la Trémouille, qui avait l'honneur de lui -appartenir; et afin de ne pas passer pour dupe en cette affaire, il -montra dans le conseil une lettre du prince de Tarente, fils aîné du -duc, qui le suppliait d'assurer le roi et la reine de sa fidélité[707]. -A la même époque, la duchesse de Montausier, pendant que son mari était -au lit, malade, repoussait les révoltés de la Saintonge, que la duchesse -de la Trémouille avait soulevés[708]. - - [704] GRIFFET, dans les _Mémoires de_ TARENTE, p. VII de la - Préface. - - [705] MOTTEVILLE, _Mémoires_, t. XXXVIII, p. 239.--Prince DE - TARENTE, _Mémoires_, p. 111. - - [706] MOTTEVILLE, _Mémoires_, t. LXVIII, pag. 239.--_Mémoires du - prince_ DE TARENTE, p. 74 et 104, et ci-dessus, p. 295 de ces - _Mémoires sur Sévigné_. - - [707] _Mémoires du prince_ DE TARENTE, p. 86, 92, 94; et - _Mémoires sur Sévigné_, 1848, 4e partie, p. 85, chap. III. - - [708] SISMONDI, _Histoire des Français_, 1840, in-8º, t. XXIV, p. - 260, 261, 316, 319, 341, 348; et _Vie du duc de Montausier_. - -On s'étonne du nombre de femmes remarquables par le courage, la vigueur -d'esprit, la force du caractère que ce siècle a produit. Presque toutes -aimaient la poésie, la littérature, les sciences; et toutes celles qui -par leur rang ou leurs richesses se trouvaient en mesure de protéger -les gens de lettres en adoptaient quelques-uns: ainsi la duchesse de -Bouillon, Montespan, madame de Thianges, la Sablière et plus tard madame -d'Hervart, prirent en quelque sorte successivement la tutelle du bon et -indolent la Fontaine. Madame de la Sablière donna aussi asile à -l'orientaliste d'Herbelot; elle recueillit Bernier, le voyageur -philosophe, Roberval et Sauveur, mathématiciens. L'abbesse de -Fontevrault et après elle madame de Maintenon eurent le bonheur de -ranimer la plume de Racine. Madame de Sévigné avait Ménage, Montreuil, -Marigny. La duchesse Marie de la Trémouille, dont le mari avait -combattu, contre Mazarin et le roi, avec Turenne et Condé, appartenait à -cette noblesse rancuneuse qui se tenait fièrement dans ses vastes -domaines et n'allait point à la cour. Cependant elle était au courant de -ce qui s'y passait, et savait quelles étaient les femmes qui y -brillaient et les vers qu'on y composait. - - - - -CHAPITRE XIV. - -1675-1676. - - Malheurs de la Bretagne.--Le duc de Chaulnes veut s'opposer à un - envoi de troupes.--Forbin marche sur cette province avec six mille - hommes.--Madame de Sévigné s'indigne de la lâcheté de l'assemblée - des états.--Le parlement est exilé.--Journal de ce qui s'est passé - en Bretagne.--Extrait des lettres de madame de - Sévigné.--Révolte.--M. de Chaulnes est insulté.--Se venge par des - cruautés.--Madame de Sévigné le désapprouve.--Belle conduite du - parlement de Rennes.--Date de son institution.--Tenue des états de - Provence.--Contraste entre ceux-ci et ceux de Bretagne.--M. de - Chaulnes est détesté.--M. de Grignan est aimé.--On envoie M. de - Pommereuil comme intendant en Bretagne.--Suite des affaires de ce - pays.--M. de Chaulnes vient à Vitré.--Détails sur les affaires de - Bretagne et sur celles des provinces.--Madame de Sévigné va à Vitré - pour recevoir le gouverneur.--Inimitiés entre M. de Chaulnes et M. - de Coëtquen.--Madame de Sévigné conserve son courage et sa - sérénité.--Sa liaison avec la famille Duplessis.--Ridicules de - mademoiselle Duplessis.--Correspondance de madame de Sévigné avec - ses amis de Paris; avec madame de Vins.--Sévigné est dégoûté de sa - charge de guidon; n'obtient pas d'avancement; a peu de goût pour le - métier des armes.--Bien différent en cela du jeune Villars et du - chevalier de Grignan.--Détails sur ceux-ci.--Madame de Grignan - approuve la sévérité de M. de Chaulnes.--Elle est blâmée par sa - mère.--Sa correspondance avec madame de Vins.--Madame de Sévigné se - crée des occupations et des distractions par les travaux qu'elle - entreprend, par ses liaisons avec ses voisins.--D'Hacqueville est - l'informateur et l'agent d'affaires de madame de Sévigné et de - madame de Grignan.--Liaison de madame de Sévigné avec madame de - Pomponne et madame de Vins, sa sÅ“ur.--Liaison de madame de Sévigné - avec madame de Villars.--Détails sur cette dame et sur le marquis - de Villars.--Liaison de madame de Sévigné avec madame de - Saint-Céran.--Détails sur cette dame. - - -Mais toutes les distractions que se donnait madame de Sévigné par ses -lectures, par ses entretiens avec la princesse de Tarente ne pouvaient -écarter d'elle les inquiétudes et la tristesse que lui causait la -Bretagne accablée, ruinée, dévastée par les troupes du roi et devenue un -objet d'horreur et de compassion par la révolte, la misère et les -supplices. - -Quoique madame de Sévigné vît toujours à regret l'établissement de -nouveaux impôts en Bretagne, cependant elle trouvait mauvais que les -Bretons se fussent révoltés pour ne pas payer. Elle sut grand gré à son -ami le duc de Chaulnes de se refuser d'abord à l'introduction des -troupes du roi en Bretagne; mais quand elle sut qu'il ne pouvait apaiser -la sédition par les troupes municipales et par ses harangues, et qu'on -l'avait grossièrement insulté, elle trouve bon que le comte de Forbin -eût été envoyé avec six mille hommes à Nantes: elle espérait qu'il -suffirait de montrer des uniformes pour apaiser la rébellion et assurer -la tranquillité publique. - -Quant à Vitré, madame de Sévigné croyait cette ville garantie de toute -vexation par la présence de la princesse de Tarente, à laquelle la -duchesse de Chaulnes devait venir rendre visite[709]. Mais lorsque -madame de Sévigné vit que l'on s'en prenait aux hautes classes de la -population, aux membres du parlement irrités par l'oppression, alors -elle redevint bonne Bretonne, et elle s'expliqua ouvertement sur la -lâcheté de la noblesse des états, qui votaient si facilement d'énormes -dons gratuits; elle loua le courage du parlement, qui aima mieux être -exilé à Vannes que de laisser bâtir une citadelle dans la ville où il -résidait; elle fut offensée que, malgré les réclamations de la princesse -de Tarente, appuyée par MADAME, sa nièce, on envoyât des troupes à -Vitré, où l'on n'avait nulle envie de se révolter; elle s'indigna que le -gouverneur songeât plus à se venger qu'à faire bonne justice; enfin elle -considéra la Bretagne comme perdue à jamais, et fit entendre à sa fille -qu'à l'exemple de quelques personnes qui ont exécuté leurs projets elle -songe à abandonner cette province et à n'y plus conserver de séjour. La -puissante ironie qui se révèle dons les récits de madame de Sévigné, par -le contraste de son ton froidement léger et plaisant avec la gravité des -faits qu'elle raconte, nous prouve sa profonde indignation à la vue de -telles cruautés. - - [709] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 octobre 1675), t. IV, p. 149, édit. - G.; t. IV, p. 37, édit. M. - -La gazette a gardé le silence sur ces tristes événements, et ceux qui -ont eu recours aux dépêches administratives ont remarqué qu'il existait -une lacune à cette époque des affaires de Bretagne[710]; de sorte que le -journal tenu par madame de Sévigné dans ses lettres à sa fille est le -seul document qui nous en reste. Donnons ce document, et joignons-y au -besoin un commentaire qui l'éclaircisse. L'histoire ne perd rien de son -importance et de son utilité, parce que dans ces _Mémoires_ nous avons -espéré y répandre quelque lueur en la rattachant aux manchettes d'une -femme dont la mémoire raconte tout, dont l'esprit apprécie tout, dont -l'imagination sait tout colorer. - - [710] Conférez PIERRE CLÉMENT, _Histoire de la vie et de - l'administration de Colbert_, 1846, in-8º, p. 371.--DEPPING, - _Correspondance administrative sous le règne de Louis XIV_, 1850, - in-4º. Lettres du duc de Chaulnes à Colbert, 30 juin 1675, p. - 546; de l'évêque de Saint-Malo à Colbert, 28 août 1675, p. 550. - - - «9 octobre 1675. - -«Le duc de Chaulnes amène quatre mille hommes à Rennes, pour en punir -les habitants; l'émotion est grande dans la ville et la haine incroyable -dans toute la province contre le gouverneur.» - -Et, dans la même lettre, madame de Sévigné montre combien était grand -son mécontentement contre le roi en mandant à sa fille les nouvelles les -plus désavantageuses sur le gouvernement, qu'elle avait reçues de Paris -et d'ailleurs. «On joue des sommes immenses à Versailles; le _hoca_ est -défendu à Paris, sur peine de la vie, et on le joue chez le roi; cinq -mille pistoles en un matin, ce n'est rien. C'est un coupe-gorge; chassez -bien ce jeu de chez vous.» «J'ai mandé à M. de Lavardin l'affaire de M. -d'Ambres (celle du _monseigneur_, auquel les gouverneurs de province, -comme le comte de Grignan, les lieutenants généraux étaient astreints, -par décision du roi, envers les maréchaux de France[711]). Vous voilà un -peu mortifiés, MM. les grands seigneurs! Vous jugez bien que ceux qui -décident ont intérêt à soutenir les dignités: il faut suivre les -siècles, celui-ci n'est pas pour vous[712].» «Nos pauvres exilés de la -Loire ne savent point encore leur crime; ils s'ennuient fort.» Ces -exilés étaient Louis de la Trémouille, comte d'Olonne, le marquis de -Vassé et Vineuil[713]. Le premier est célèbre par les désordres de sa -femme. Madame de Sévigné, qui l'avait vu en passant à Orléans, écrit à -sa fille que le comte d'Olonne mariait son frère à mademoiselle de -Noirmoutiers, et ajoute malignement: «Je n'eusse jamais cru que d'Olonne -eût été propre à se soucier de son nom et de sa famille.» Et en -annonçant que mademoiselle de Noirmoutiers s'appellera madame de Royan, -elle répète, d'après madame de Grignan: «Vous dites vrai, le nom -d'Olonne est trop difficile à purifier[714].» Vassé et Vineuil, déjà -plusieurs fois mentionnés dans ces Mémoires, étaient deux hommes -aimables, depuis longtemps amis de madame de Sévigné, tous deux connus -dans leur jeunesse par leurs succès auprès des femmes. Le marquis de -Vassé, compromis par son audace et son impertinence, avait depuis -quelques mois rompu son ban, et était venu à Paris pour voir madame de -Sévigné[715]: probablement son exil avait une toute autre cause que la -politique. La continuation de l'exil de Vineuil, que madame de Sévigné -avait vu en passant à Saumur[716], l'affligeait plus que l'exil de Vassé -et de d'Olonne. Confident de Condé, Vineuil avait été l'ami de Turenne -et écrivait la vie de ce héros; son ardeur pour les plaisirs l'avait -condamné à une vieillesse précoce, et il était devenu dévot; mais il -n'en était pas moins resté un homme aimable et spirituel. Sa -conversation plaisait à madame de Sévigné[717]. Avec lui, plus encore -qu'avec la princesse de Tarente, elle aimait à remonter vers son passé. - - [711] Conférez _Mémoires sur Sévigné_, 4e partie, in-12, p. - 278-280, chap. X. - - [712] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (9 et 20 octobre 1675), p. 137, 138 et - 165, édit. G.; t. IV, p. 20 et 51, édit. M.--_Ibid._ (5 janvier - 1676), t. IV, p. 297, édit G.; t. IV, p. 169, édit. - M.--FEUQUIÈRES, _Lettres_ (17 juillet 1676), t. IV, p. - 44.--BUSSY, _Histoire amoureuse des Gaules, dans le Recueil des - histoires galantes_; Cologne, chez Pierre Marteau, p. 82, 86, et - aux p. 494 à 522. - - [713] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 janvier 1676), t. IV, p. 297, édit. - G.--BUSSY, _Lettres_ (19 octobre), dans SÉVIGNÉ, t. IV, p. 145, - édit. G.; t. IV, p. 30, édit. M.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 novembre - 1675), t. IV, p. 206, édit. G. - - [714] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 novembre 1675), t. IV, p. 206, édit. - G. - - [715] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (12 juin 1675), t. III, p. 415, édit. - G.; t. III, p. 293, édit. M.--Sur _Vassé_, conférez ces - _Mémoires_, 2e édition, t. I, p. 263, 267, 275; et, dans - TALLEMANT, les _Historiettes de la présidente_ LESCALOPPIER, et - l'_Historiette de_ VASSÉ, t. IV, p. 19, 25, 28 de l'édit. in-8º; - t. VI, p. 175, 176, 181-188 de l'édition in-12. - - [716] Voyez ci-dessus, p. 260. - - [717] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 septembre, 9 octobre 1675), t. III, - p. 471, édit. M.; t. IV, p. 30, édit. G.--_Ibid._ (30 novembre - 1670), t. V, p. 68; et dans ces _Mémoires_, 2e édit., t. I, p. - 337. - -Mais continuons le journal des désastres de la Bretagne. - - «13 octobre 1675. - -«M. de Chaulnes est à Rennes avec beaucoup de troupes; il a mandé que, -si on en sortait, si l'on faisait le moindre bruit, il ôterait pour dix -ans le parlement de cette ville. Cette crainte fait tout souffrir[718].» - - [718] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 octobre 1675), t. IV, p. 149, édit. - G.; t. IV, p. 36, édit. M. - -L'institution du parlement de Bretagne n'était pas très-ancienne; elle -fut précédée en 1492 par le tribunal des _grands jours_, espèce de -juridiction présidiale dont on pouvait appeler au parlement de Paris. Le -tribunal des grands jours fut transformé en parlement par l'édit de -Henri II, au mois de mars 1553. Selon cet édit, ce parlement devait être -composé de quatre présidents et de trente-deux conseillers, tous choisis -par le roi; mais seize des conseillers devaient être originaires de -Bretagne; les autres conseillers et présidents pouvaient être choisis -dans les autres pays de l'obéissance du roi. Le parlement, d'après cette -institution, devait se tenir en deux sessions de trois mois chacune, la -première à Rennes, la seconde à Nantes. Cette cour fut fixée à Rennes -par un édit de Charles IX, en 1560. - -La famille des Sévigné avait des parents dans le parlement et dans -l'administration. Dans la marine on comptait deux Sévigné, qui tous deux -commandèrent des vaisseaux et dont l'un était le filleul bien-aimé de -madame de Sévigné: ce fut par elle et par l'appui de M. de Grignan qu'il -obtint un commandement. Enfin la terre de Sévigné était près de Rennes: -ainsi les intérêts de madame de Sévigné, ses liaisons de parenté, ses -affections particulières, tout la portait à prendre parti pour le -parlement et la ville contre son ami le gouverneur, qui poussait alors -le ministre à des mesures de rigueur. Dès le 15 juin (1675) et aussitôt -après la seconde émeute qui eut lieu à Rennes, de Chaulnes avait écrit à -Colbert. A tort ou à raison, il accusait le parlement d'avoir conduit la -révolte. Il disait que, malgré le calme apparent, les procureurs, les -conseillers et jusqu'aux présidents à mortier conseillaient au peuple de -ne pas quitter les armes, et de venir demander au parlement la -révocation des édits et particulièrement de celui sur le papier -timbré[719]. Ce fut ainsi qu'il obtint d'avance la tenue des états et -de leurs assemblées dans la ville qu'il lui plairait de choisir. Il -exila le parlement à Vannes, et il traita la malheureuse Bretagne avec -une barbarie que les lettres de madame de Sévigné et la correspondance -administrative nous font douloureusement connaître[720]. - - [719] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 novembre 1675), t. IV, p. 93, édit. - M.--_Ibid._ (5 août 1675), t. IV, p. 421, édit. M.--_Ibid._ (3 - septembre 1677), t. V, p. 217, édit. M.--Voy. _Mémoires de_ - DANGEAU, _abrégé de madame_ DE GENLIS, t. I, p. 343, état sous la - date du 6 juillet 1690: Cet état n'est pas dans l'édit. de Paul - Lacroix de 1830, t. I, p. 318. - - [720] DEPPING, _Correspondance administrative sous le règne de - Louis XIV_, in-4º, 1850, p. 546-551. (Lettre du duc de Chaulnes à - Colbert, datée de Rennes, le 30 juin 1675, et l'extrait de celle - du 12 juin; puis la lettre de l'évêque de Saint-Malo à Colbert, - en date du 28 août 1675).--P. CLÉMENT, _Vie de Colbert_, in-8º, - 1846, p. 370 (extrait d'une lettre du duc de Chaulnes à Colbert, - du 12 juin 1675). - - «16 octobre 1675. - -«M. de Chaulnes est à Rennes avec les Forbin et les Vins et quatre mille -hommes; on croit qu'il y aura bien de la _penderie_. M. de Chaulnes a -été reçu comme le roi; mais comme c'est la crainte qui a fait changer -leur langage, M. de Chaulnes n'oublie pas toutes les injures qu'on lui a -dites, dont la plus douce et la plus familière était _gros cochon_, sans -compter les pierres dans sa maison et dans son jardin et des menaces -dont Dieu seul a empêché l'exécution. C'est cela qu'on va punir[721].» - - «20 octobre 1675. - -«M. de Chaulnes est à Rennes avec quatre mille hommes; il a transféré le -parlement à Vannes; c'est une désolation terrible. La ruine de Rennes -emporte celle de la province[722].» - - [721] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (16 octobre 1675), t. IV, p. 158, édit. - G.; t. IV, p. 44, édit. M. - - [722] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 octobre 1675), t. IV, p. 164-166, - édit. G.; t. IV, p. 48 et 52, édit. M. - - «27 octobre 1675. - -«Cette province a grand tort, mais elle est rudement punie, et au point -de ne s'en remettre jamais. Il y a cinq mille hommes à Rennes, dont plus -de la moitié y passeront l'hiver. On a pris à l'aventure vingt-cinq ou -trente hommes, que l'on va pendre. On a transféré le parlement: c'est le -dernier coup, car Rennes sans cela ne vaut pas Vitré[723].» - - [723] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (27 octobre 1675), t. IV, p. 174, édit. - G.; t. IV, p. 50, édit. M. - - «30 octobre 1675. - -«Voulez-vous savoir des nouvelles de Rennes? Il y a présentement cinq -mille hommes, car il en est venu encore de Nantes. On a fait une taxe de -cent mille écus sur le bourgeois; et si on ne trouve point cette somme -dans les vingt-quatre heures, elle sera doublée et exigible par les -soldats. On a chassé et banni toute une grande rue, et défendu de les -recueillir sur peine de la vie; de sorte qu'on voyait tous ces -misérables, femmes accouchées, vieillards, enfants, errer en pleurs au -sortir de cette ville, sans savoir où aller, sans avoir de nourriture ni -de quoi se coucher. Avant-hier on roua un violon qui avait commencé la -danse et la pillerie du papier timbré. Il a été écartelé après sa mort, -et ses quatre quartiers exposés aux quatre coins de la ville, comme -ceux de _Josserau_(gentilhomme de Provence, de la maison de Pontiver, -qui avait assassiné son maître à Aix). Il (le violon) dit en mourant que -c'étaient les fermiers du papier timbré qui lui avaient donné vingt-cinq -écus pour commencer la sédition; et jamais on n'a pu en tirer autre -chose. On a pris soixante bourgeois; on commence demain à pendre. Cette -province est un bel exemple pour les autres, et surtout de respecter les -gouverneurs et les gouvernants, de ne leur point dire d'injures et de ne -point jeter de pierres dans leur jardin. - -«Tous les villages contribuent pour nourrir les troupes, et l'on sauve -son pain en sauvant ses denrées. Autrefois on les vendait, et l'on avait -de l'argent; mais ce n'est plus la mode, tout cela est changé. M. de -Molac est retourné à Nantes; M. de Lavardin vient à Rennes[724].» - - «3 novembre 1675. - -«M. et madame de Chaulnes ne sont plus à Rennes; les rigueurs -s'adoucissent; à force d'avoir pendu, on ne pendra plus; il ne reste que -deux mille hommes à Rennes[725]. Je crois que Forbin et Vins s'en vont -par Nantes; Molac y est retourné. C'est M. de Pomponne qui a protégé le -malheureux dont je vous ai parlé; si vous m'envoyez le roman de votre -premier président, je vous enverrai en récompense l'histoire lamentable -du violon qui fut roué à Rennes.» - - [724] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (30 octobre 1675), t. IV, p. 178-180, - édit. G.; t. IV, p. 63-64, édit. M. - - [725] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (3 novembre 1675), t. IV, p. 184, édit. - G.; t. IV, p. 67, édit. M. - - «13 novembre 1675. - -«Ce que vous dites de M. de Chaulnes est admirable. Il s'est hier roué -vif un homme à Rennes (c'est le dixième), qui confessa d'avoir eu -dessein de tuer ce gouverneur: pour celui-là , il méritait bien la mort. -On voulait, en exilant le parlement, le faire consentir, pour se -racheter, qu'on bâtit une citadelle à Rennes; mais cette noble compagnie -voulut obéir fièrement, et partit plus vite qu'on ne voulait, car tout -se tournerait en négociation; mais on aime mieux les maux que les -remèdes[726].» - - [726] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 novembre 1675), t. IV, p. 204, édit. - G.; t. IV, p. 85, édit. M. - -L'opinion que manifeste madame de Sévigné sur le généreux dévouement du -parlement, qui aime mieux souffrir que de trahir par un lâche compromis -les intérêts de la province[727], prouve bien que c'est pour faire -ressortir plus fortement la cruauté de M. de Chaulnes qu'elle vient de -rapporter si froidement le supplice de ces deux roués, en insinuant -qu'il y en avait peut-être neuf qui ne méritaient pas la mort; et ce -qu'elle ajoute après, en écrivant à sa fille avec une amère ironie, nous -fait pénétrer plus avant dans le secret de ses véritables sentiments. - - [727] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 novembre 1675), t. IV, p. 205, édit. - G. - -«Vous me parlez bien plaisamment de nos misères. Nous ne sommes plus si -roués; un en huit jours seulement, pour entretenir la justice. Il est -vrai que la _penderie_ me paraît maintenant un rafraîchissement; j'ai -une tout autre idée de la justice depuis que je suis dans ce pays: vos -galériens me paraissent une société d'honnêtes gens qui se sont retirés -du monde pour mener une vie douce. Nous vous en avons bien envoyé par -centaines. Ceux qui sont demeurés sont plus malheureux que -ceux-là [728].» - - [728] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 novembre 1675), t. IV, p. 219, édit. - G.; t. IV, p. 99, édit. M. - -Quand madame de Sévigné exprimait de tels sentiments, ce n'est pas -qu'elle fût brouillée avec le duc de Chaulnes; au contraire, la duchesse -n'avait pas manqué de venir lui rendre visite ainsi qu'à la princesse de -Tarente. Elle avait cherché à excuser auprès d'elles les cruautés de son -mari par la nécessité de réprimer l'insurrection par la terreur. Les -terres des Rochers, de Bodegat et de Sévigné et la ville de Vitré, où -était la princesse, avaient été exemptes de payer les contributions -imposées sur toute la province. Nonobstant cette faveur, madame de -Sévigné ressentait si vivement les blessures faites aux droits et aux -libertés de la Bretagne, qu'à l'exemple de quelques-uns de ses amis, -elle semble persister dans le projet qu'elle avait conçu d'abandonner -pour toujours cette province, et de transporter ailleurs son principal -domicile[729]. - - [729] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 décembre 1675), t. IV, p. 240, édit. - G.; t. IV, p. 117, édit. M. - -L'arbitraire et la cruauté ne faisaient qu'accroître le mal. Les prisons -s'emplissaient, les supplices se multipliaient; et, sous la mauvaise -administration financière du trésorier général et du parlement, les -impôts, qui avaient enfanté la révolte, ne s'établissaient pas -régulièrement. Plus d'agriculture, plus de commerce; l'argent avait -disparu, et l'on ne trafiquait plus que par échanges. D'Harouis ne -pouvait par son crédit trouver les trois millions que les états avaient -votés pour le roi, avec les gratifications ordinaires au gouverneur, au -lieutenant général et aux présidents des états, puisqu'il ne pouvait -même faire face aux engagements contractés pour satisfaire aux besoins -les plus urgents de la province. Alors Colbert appliqua à la Bretagne la -mesure que Richelieu avait prise pour les autres provinces de France. On -sait que, pour restreindre le pouvoir des gouverneurs et l'influence des -parlements, Richelieu avait créé des intendants chargés de la -répartition, de la levée des impôts et de statuer sur tout ce qui était -du ressort de l'administration civile. Nulle institution n'avait plus -contribué à consolider le pouvoir royal en centralisant le gouvernement -et en donnant la faculté d'établir une législation uniforme, assujettie -à des règles constantes. - -Mais Richelieu, malgré l'énergie de son despotisme, n'avait pas osé -appliquer cette mesure à la Bretagne, dont les droits, lors de la -réunion de ce duché à la couronne de France, avaient été si -solennellement reconnus au mariage d'Anne, duchesse de Bretagne, en -décembre 1491, avec Charles VIII, et, en janvier 1499, avec Louis XII. -Cette puissante considération n'arrêta point Colbert; il se décida à -donner un intendant à la Bretagne, mais se garda bien de supprimer le -gouverneur et d'ôter à de Chaulnes cette belle charge: c'eût été -affaiblir dans la province l'autorité du roi, donner plus d'espoir aux -mécontents et rendre impossible l'administration de l'intendant. Il -prescrivit au gouverneur d'abandonner, jusqu'au parfait établissement -des impôts, l'exercice de tous ses pouvoirs. Afin que l'intendant pût -exercer les siens avec une sorte de légalité, Colbert ne donna pas à -cet administrateur le titre d'intendant, mais celui de commissaire du -roi, et pour cette grande innovation il choisit un homme capable: il -prit Pommereuil[730]. «Pommereuil, dit Saint-Simon, est le premier -intendant qu'on ait hasardé d'envoyer en Bretagne et qui trouva moyen -d'y apprivoiser la province... C'était celui des conseillers d'État qui -avait le plus d'esprit et de capacité; d'ailleurs grand travailleur, bon -homme et honnête homme, ferme, transcendant, qui avait et méritait des -amis[731].» Madame de Sévigné était de ce nombre, et fut très-satisfaite -du choix qu'on avait fait de lui; elle eut connaissance du grand pouvoir -qu'on lui avait confié et des instructions qui avaient été données à M. -de Chaulnes. - - [730] Auguste-Robert de Pommereuil fut en 1676 prévôt des - marchands et en 1689 envoyé intendant en Bretagne. Il mourut en - 1702. - - [731] SAINT-SIMON, _Mémoires complets et authentiques_, 1829, - in-8º, t. Ier, p. 451, ch. XXXIX; t. II, p. 331, ch. XXI. Le vrai - nom est Pommereuil, mais on prononçait Pommereu, et c'est ainsi - que Saint-Simon écrit ce nom. - -Elle continue son journal: - - «11 décembre 1675. - -«Venons aux malheurs de cette province: tout y est plein de gens de -guerre; il y en aura à Vitré, malgré la princesse. MONSIEUR l'appelle sa -bonne, sa chère tante; je ne trouve pas qu'elle en soit mieux traitée. -Il en passe beaucoup par la Guerche, qui est au marquis de Villeroy, et -il s'en écarte qui vont chez les paysans, les volent et les dépouillent. -C'est une étrange douleur en Bretagne que d'éprouver cette sorte -d'affliction, à quoi ils ne sont pas accoutumés. Notre gouverneur a une -amnistie générale; il la donne d'une main, et de l'autre huit mille -hommes qu'il commande comme vous: ils ont leurs ordres. M. de Pommereuil -vient; nous l'attendons tous les jours: il a l'inspection de cette -petite armée, et il pourra bientôt se vanter d'y joindre un assez beau -gouvernement. C'est le plus honnête homme et le plus bel esprit de la -robe; il est fort de mes amis; mais je doute qu'il soit aussi bon à -l'user que votre intendant (de Rouillé), que vous avez si bien -apprivoisé[732].» - - [732] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 décembre 1675), t. IV, p. 241, édit. - G.; t. IV, p. 118, édit. M. - -Et onze jours après, madame de Sévigné écrit encore[733]: - - «A Vitré, samedi pour dimanche 22 décembre 1675. - -«Je suis venue ici, ma fille, pour voir madame de Chaulnes et la petite -personne, et M. de Rohan, qui s'en vont à Paris. Madame de Chaulnes m'a -écrit pour me prier de lui venir dire adieu ici. Elle devait venir dès -hier; et l'excuse qu'elle donne, c'est qu'elle craignait d'être volée -par les troupes qui sont sur les chemins: c'est aussi que M. de Rohan -l'avait priée d'attendre à aujourd'hui; et cependant chair et poisson se -perdent, car dès jeudi on l'attendait. Je trouve cela un peu familier, -après avoir mandé positivement qu'elle viendrait. Madame la princesse de -Tarente ne trouve pas ce procédé de bon goût, elle a raison; mais il -faut excuser les gens qui ont perdu la tramontane: c'est dommage que -vous n'éprouviez la centième partie de ce qu'ils ont souffert ici depuis -un mois. Il est arrivé dix mille hommes dans la province, dont ils ont -été aussi peu avertis, et sur lesquels ils ont autant de pouvoir que -vous; ils ne sont en état de faire ni bien ni mal à personne. M. de -Pommereuil est à Rennes avec eux tous; il est regardé comme un dieu: non -pas que tous les logements ne soient réglés dès Paris, mais il punit et -empêche le désordre: c'est beaucoup. Madame de Rohan et madame de -Coëtquen ont été fort soulagées. Madame la princesse de Tarente espère -que MONSIEUR et MADAME la feront soulager aussi: c'est une grande -justice, puisqu'elle n'a au monde que cette terre, et qu'il est fâcheux, -en sa présence, de voir ruiner ses habitants. Nous nous sauverons si la -princesse se sauve.» - - [733] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (22 décembre 1675) t. IV, p. 263, édit. - G.; t. IV, p. 127, édit. M. - -Le refroidissement qu'éprouvait madame de Sévigné pour madame la -duchesse de Chaulnes était bien naturel après les actes de tyrannie et -de cruauté du duc son mari; mais ce sentiment était injuste à l'égard de -la duchesse, qui n'exerçait aucune influence sur les résolutions du -gouverneur, et qui était pour madame de Sévigné «une bonne, solide et -vigilante amie[734].» - - [734] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 septembre 1689), t. IX, p. 448, édit. - G; t. IX, p. 103, édit. M. - -Quoique l'assemblée des états eût voté, sous l'influence de la terreur -exercée par le duc de Chaulnes, toutes les sommes que ce gouverneur -avait exigées d'eux au nom du roi[735], cependant elle avait osé -représenter que l'introduction des troupes en Bretagne était contraire -aux contrats faits entre le roi et la province; et elle réclama aussi le -rétablissement du parlement à Rennes. Il ne fut fait droit à aucune de -ces légitimes réclamations. Ce ne fut que douze ans après, en septembre -1689 et lorsque le duc de Chaulnes quitta la Bretagne pour se rendre à -Rome comme ambassadeur du roi, que Rennes redevint de fait la capitale -de la province. Le parlement fut rétabli dans cette ville, et on y tint, -la même année, l'assemblée des états. - - [735] _Registres mss. de la tenue des états de Bretagne_ (Bl.-M., - 75), p. 379 recto. - -Presque en même temps que se terminait à Dinan la tenue des états de -Bretagne en 1675, finissait aussi, à Lambesc, celle de l'assemblée -générale des communautés de Provence. Cette assemblée avait offert un -spectacle bien différent de l'autre[736]; et, sous la sage -administration du comte de Grignan et de l'intendant Rouillé, le pays -prospérait, les populations étaient calmes. Les villes, et surtout celle -de Marseille, florissaient par les progrès toujours croissants du -commerce et de l'industrie; les campagnes se plaignaient vivement de -l'énormité des impôts, du passage et du séjour des gens de guerre; mais -elles n'avaient nulle envie de se révolter, et manifestaient avec -soumission leurs sujets de mécontentement. L'assemblée réclamait, comme -tous les ans, l'exécution franche de l'édit du mois d'août 1661, qui, en -augmentant la taxe sur le sel, avait promis de décharger la province des -dons gratuits[737]; et elle n'en votait pas moins sans difficulté la -totalité de la somme (500,000 livres) qui lui était demandée par le -gouverneur pour le don gratuit. Toujours arguant la teneur de l'édit de -1630, elle refusait d'imposer à la province une nouvelle surcharge pour -l'entretènement des troupes du gouverneur[738]; mais elle accordait la -gratification de cinq mille livres au comte de Grignan, en considération -«de tant de bons offices qu'il a rendus et qu'il rend encore à la -province[739].» Le comte de Grignan n'éprouvait plus d'opposition dans -l'assemblée ni dans le pays: Forbin-Janson, ambassadeur auprès de -Sobiesky, n'avait plus à s'occuper des affaires de la Provence; Louis de -Forbin d'Oppède, évêque de Toulon, était mort le 29 avril 1675; ainsi le -puissant parti des Forbin ne formait plus d'obstacles aux ambitions de -la maison de Grignan. Le clergé avait nommé pour procureur-joint aux -états messire Jean de Gaillard, évêque d'Apt[740], qui n'avait aucune -influence en cour, aucun intérêt à se déclarer l'antagoniste du -gouverneur pour se rendre populaire dans son petit et antique évêché, -auquel on ne disputait rien et qui n'avait tien à disputer à personne. -D'un autre côté, le comte de Grignan vivait en parfaite intelligence -avec l'intendant M. de Rouillé, dont la _justice_ selon l'aveu même de -madame de Grignan, était la passion dominante[741]. De Rouillé, qui -présida l'assemblée des états, dans le discours d'ouverture qu'il -prononça, fit l'éloge du comte de Grignan, «qui, dit-il, outre la bonté -de son naturel, jointe aux grands engagements qu'il a depuis longtemps -dans cette province, n'épargne ni ses soins ni son crédit pour procurer -des avantages aux habitants et pour conserver leurs intérêts.» La -réponse à ce discours, par le vicaire général du cardinal Grimaldi, au -nom de l'archevêque d'Aix, premier procureur-né du pays, renchérit -encore sur les louanges que M. de Rouillé avait faites du comte de -Grignan[742]. - - [736] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (14 septembre 1689), t. IX, p. 458 et - 459, édit. G.; t. IX, p. 112, édit. M.--_Mémoires de_ COULANGES, - 1820, in-8º, p. 2. - - [737] _Abrégé des délibérations de l'assemblée générale des - communautés de Provence_; à Aix, chez Charles David, 1675, in-4º, - 61 pages. - - [738] _Abrégé des délibérations_, etc.; Aix, 1675, in-4º, p. 18 - et 20. - - [739] _Ibid._, p. 25. - - [740] _Ibid._, p. 16. - - [741] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 décembre 1673), t. III, p. 281, 282, - édit. G.; t. III, p. 188, édit. M. - - [742] _Abrégé des délibérations_, etc., p. 10 et 14. - -Madame de Sévigné savait que les mêmes rigueurs qu'on exerçait sur la -Bretagne avaient lieu, par les mêmes motifs, en Gascogne, en Guienne et -en Languedoc[743], et c'était pour elle un grand sujet de consolation -qu'il en fût tout autrement pour la Provence. Elle jouissait du -contraste qui existait entre la réputation de son gendre et celle de M. -le duc de Chaulnes. - - [743] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er et 11 décembre 1675), t. IV, p. 226 - et 241, édit. G.; t. IV, p. 103 et 245, édit. M. - -Mais ce que M. et madame de Grignan ignoraient, c'est que la faveur -accordée au lieutenant général gouverneur de Provence et le rejet des -propositions et des dénonciations de la faction des Forbin dans le -conseil du roi étaient dus à l'appui de M. de Pomponne, vivement -sollicité par sa belle-sÅ“ur madame de Vins et par d'Hacqueville, en -l'absence de madame de Sévigné. De Pomponne et madame de Vins ne -voulaient pas se faire des ennemis des Colbert et des autres puissants -amis des Forbin, surtout de l'évêque de Marseille, ambassadeur auprès de -Sobiesky, également bien accrédité en France et en Pologne. Ils -désiraient que les services qu'ils avaient rendus aux Grignan fussent -ignorés d'eux. Mais d'Hacqueville, l'empressé d'Hacqueville ne pouvait -taire une si bonne nouvelle à madame de Sévigné; et madame de Sévigné -pouvait-elle avoir un secret sans le confier à sa fille? Elle lui -envoya donc la lettre de d'Hacqueville: «Voilà , écrit-elle, une lettre -de d'Hacqueville qui vous apprendra l'agréable succès de nos affaires de -Provence: il surpasse de beaucoup mes espérances... Voilà donc cette -grande épine hors du pied; voilà cette caverne de larrons détruite; -voilà l'ombre de M. de Marseille conjurée; voilà le crédit de la cabale -évanoui; voilà l'insolence terrassée: j'en dirais jusqu'à demain. Mais, -au nom de Dieu, soyez modestes dans vos victoires; voyez ce que dit le -bon d'Hacqueville: la politique et la générosité vous y obligent. Vous -verrez aussi comme je trahis son secret pour vous par le plaisir de vous -faire voir le dessous de cartes qu'il a dessein de vous cacher à -vous-mêmes[744].» - - [744] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er janvier 1676), t. IV, p. 283. - -«Je comprends avec plaisir, dit-elle à sa fille, la considération de M. -de Grignan dans la Provence après ce que j'ai vu. C'est un agrément que -vous ne sentez plus; vous êtes trop accoutumés d'être honorés et aimés -dans une province où l'on commande. Si vous voyiez l'horreur, la -détestation, la haine qu'on a ici pour le gouverneur, vous sentiriez -bien plus que vous ne faites la douceur d'être aimés et honorés partout. -Quels affronts! quelles injures! quelles menaces! quels reproches! avec -de bonnes pierres qui volaient autour d'eux. Je ne crois pas que M. de -Grignan voulût de cette place à de telles conditions; son étoile est -bien contraire à celle-là [745].» - - [745] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 novembre 1675), t. IV, p. 187, éd. - G.; t. IV, p. 70, édit. M. - -Mais madame de Grignan, dont les sympathies n'étaient nullement -populaires, jugeait différemment de sa mère; et, comme femme d'un -gouverneur à qui elle aurait voulu voir surmonter les résistances par la -force, elle approuvait assez la sévérité du duc de Chaulnes. Madame de -Sévigné réprime ce sentiment avec un ton d'autorité qui ne lui est pas -ordinaire quand elle écrit à sa fille: «Vous jugez superficiellement, -lui dit-elle, de celui qui gouverne cette province; non, vous ne feriez -point comme il a fait, et le service du roi ne le voudrait pas[746].» - - [746] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 décembre 1675), t. IV, p. 245, édit. - G.; t. IV, p. 121, édit. M. - -Cependant _celui qui gouverne cette province_, le duc de Chaulnes, l'ami -de madame de Sévigné, était loin d'être alors en disgrâce; au contraire, -sa cruelle énergie envers les Bretons récalcitrants avait encore accru -la faveur dont il jouissait avant la révolte. C'est ce que prouve le -récit que fait madame de Sévigné de la suite qu'eut la dénonciation -faite contre le duc de Chaulnes par le marquis de Coëtquen, gouverneur -de Saint-Malo. Madame de Sévigné n'aimait ni Coëtquen ni sa femme, parce -que celle-ci, coquette dépravée, avait trahi l'amour et la confiance de -Turenne et livré ses secrets au chevalier de Lorraine[747], et que le -mari avait dénoncé le premier les désordres d'Harouis à l'époque où ce -financier jouissait encore de l'estime générale et de la confiance des -états[748]. - - [747] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 août 1671), t. II, p. 196 et 406, - édit. G.; t. II, p. 161-393 et 421, édit. M.--_Ibid._ (4 - septembre 1675), t. IV, p. 82, édit. G.; t. III, p. 453, édit. M. - - [748] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 décembre 1673), t. III, p. 255, 256, - édit. G.; t. III, p. 165, édit. M. - -«Voici l'histoire de notre province[749]. On vous a mandé comme était -Coëtquen avec M. de Chaulnes; il était avec lui ouvertement aux épées -et aux couteaux; il avait présenté au roi des mémoires contre la -conduite de M. de Chaulnes depuis qu'il est gouverneur de cette -province. M. de Coëtquen revient de la cour pour se rendre à son -gouvernement (de Saint-Malo) par ordre du roi. Il arrive à Rennes, va -voir M. de Pommereuil, et passe depuis huit heures du matin jusqu'à neuf -heures du soir sans aller chez M. de Chaulnes; il n'avait pas même -dessein d'y aller, comme il le dit à M. de Coëtlogon, et se faisait un -honneur de braver M. de Chaulnes dans sa ville capitale. A neuf heures -du soir, comme il était à son hôtellerie et n'avait qu'à se coucher, il -entend arriver un carrosse, et voit monter dans sa chambre un homme avec -un bâton d'exempt: c'était le capitaine des gardes de M. de Chaulnes, -qui le pria de la part de son maître de venir jusqu'à l'évêché: c'est où -demeure M. de Chaulnes. M. de Coëtquen descend, et voit vingt-quatre -gardes autour du carrosse, qui le mènent sans bruit et en fort bon ordre -à l'évêché. Il entre dans l'antichambre de M. de Chaulnes, et y demeure -un demi-quart d'heure avec des gens qui avaient l'ordre de l'y arrêter. -M. de Chaulnes paraît enfin, et lui dit: «Monsieur, je vous ai envoyé -quérir pour vous ordonner de faire payer les francs fiefs dans votre -gouvernement. Je sais, ajouta-t-il, ce que vous avez dit au roi; mais il -le fallait prouver.» Et tout de suite il lui tourna le dos et rentra -dans son cabinet. Le Coëtquen demeura fort déconcerté, et, tout enragé, -regagna son hôtellerie.» - - [749] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 janvier 1676), t. IV, p. 314, édit. - G.; t. IV, p. 185, édit. M. - -Madame de Sévigné trouva dans l'énergie de son caractère des moyens de -ne pas se laisser abattre par la tristesse durant les malheurs qui -affligeaient sa province et qui rejaillissaient sur tous les habitants, -même sur ceux qui, comme elle, étaient entourés de plus de protections -et d'appuis: «Il faut regarder, disait-elle à madame de Grignan, la -volonté de Dieu bien fixement pour envisager sans désespoir tout ce que -je vois[750].» Elle sut se créer des distractions; mais ses principaux -soulagements furent dus sans doute à sa fille et à son fils, dont l'une -par ses lettres et l'autre par ses assiduités, ses soins, sa tendresse, -ses lectures, ses confidences, ses promesses de réforme étaient pour -elle un sujet de joie et de bonheur. Madame de Sévigné trouva encore de -douces consolations dans ses entretiens avec la duchesse de Tarente, si -bien d'accord avec elle pour critiquer et blâmer tout ce qui se faisait -alors, et qui, comme elle, cherchait à combattre la pénible impression -du présent par le souvenir du passé. Les soins donnés par madame de -Sévigné aux travaux de sa terre des Rochers et sa nombreuse -correspondance remplissaient sans aucun vide toutes les heures de sa -journée: assujetties à une distribution uniforme, ses occupations -étaient réglées de manière à suffire à toutes. Dans le commencement de -son séjour aux Rochers, sa santé était excellente; mais vers la fin elle -s'altéra, et c'est alors qu'elle montra le plus de courage et de -véritable philosophie. Le 27 octobre, elle écrit à madame de Grignan: - -«Les malheurs de cette province retardent toutes les affaires et -achèvent de nous ruiner. Je fus coucher à ma _tour_ (à sa maison de -Vitré). Dès huit heures du matin, ces deux bonnes princesse et duchesse -(la princesse de Tarente et la duchesse de Chaulnes) étaient à mon -lever... Je fus ravie de revenir ici: je fais une allée nouvelle qui -m'occupe; je paye mes ouvriers en blé, et ne trouve rien de solide que -de s'amuser et de se détourner de la triste méditation de nos misères. -Ces soirées dont vous êtes en peine, ma fille, je les passe sans ennui; -j'ai quasi toujours à écrire, ou bien je lis, et insensiblement je -trouve minuit. L'abbé (de Coulanges, son tuteur) me quitte à dix, et les -deux heures que je suis seule ne me font point mourir non plus que les -autres. Pour le jour, je suis en affaires avec l'abbé, ou je suis avec -mes chers ouvriers, ou je travaille à mon très-commode ouvrage. Enfin, -mon enfant, la vie passe si vite, et par conséquent nous approchons -sitôt de notre fin que je ne sais comme on peut si profondément se -désespérer des affaires de ce monde. On a le temps ici de faire des -réflexions; c'est ma faute si mes bois ne m'en inspirent pas l'envie. Je -me porte toujours très-bien; tous mes gens vous obéissent admirablement; -ils ont des soins ridicules de moi; ils viennent me trouver le soir, -armés de toutes pièces, et c'est contre un écureuil qu'ils veulent tirer -l'épée[751].» - - [750] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (29 septembre 1675), t. IV, p. 117, éd. - G.; t. IV, p. 9, édit. M. - - [751] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (27 octobre 1675), t. IV, p. 175, éd. - G.; t. IV, p. 60, édit. M. - -Ce n'était pas seulement la princesse et la duchesse qui faisaient -diversion à la solitude des Rochers; madame de Sévigné avait encore, -dans un château voisin du sien, une famille d'une noblesse obscure, mais -très-ancienne, qu'elle honorait de son amitié et qui se trouvait -heureuse de lui plaire. Cette liaison datait du commencement du séjour -de madame de Sévigné aux Rochers[752]; elle était devenue très-intime, -puisque, malgré sa répugnance à sortir de chez elle, madame de Sévigné -allait quelquefois dîner au château d'Argentré[753], et que du Plessis, -le maître de ce château, se rendait quelquefois aux Rochers avec toute -sa famille, et y était invité dans toutes les occasions solennelles. -C'est ainsi qu'il s'y trouvait le 15 décembre, le jour où l'on dit la -première messe à la chapelle construite par madame de Sévigné[754]. Du -Plessis, qui allait aussi fréquemment aux Rochers pour y faire sa partie -de reversi[755], paraît avoir été un bon gentilhomme, vivant indépendant -dans sa province, sans avoir envie d'en sortir. Sa femme, comme lui fort -modeste, sans ambition, menait une vie très-retirée. Elle lui avait -donné un fils et une fille. Le fils était marié à une jolie et -spirituelle Gasconne, qui plaisait beaucoup à madame de Sévigné. -Malheureusement elle ne la voyait pas souvent, parce que, établie avec -son mari en Provence, elle n'était que passagèrement chez son -beau-père[756]. La seule personne de la famille qui se montrât -empressée[757] auprès de madame de Sévigné était cette demoiselle du -Plessis, que madame de Grignan, dès son plus jeune âge[758], avait -appris à molester. On a dit que madame de Sévigné n'avait pas pour -mademoiselle du Plessis toute l'aversion qu'elle manifeste dans ses -lettres, et que c'était pour amuser sa fille qu'elle traçait de cette -personne d'aussi grotesques peintures. Il est certain que, s'il ne nous -était resté des lettres de madame de Sévigné que celles de l'époque dont -nous nous occupons, on serait autorisé à penser ainsi; et madame de -Sévigné mériterait le reproche d'ingratitude en ne sachant pas pardonner -à une jeune fille, si constante dans son attachement pour elle, les -imperfections qui déparaient ses bonnes qualités. Il est dans notre -nature d'être plus indulgents pour les vices que pour les défauts. Les -vices se dissimulent, et nous les ignorons quand ils nous nuisent; il ne -se montrent que pour nous plaire ou nous être utiles: les défauts se -produisent à chaque instant, nous blessent, nous irritent quelquefois et -nous importunent toujours. Madame de Sévigné, par sa mansuétude et sa -prédilection envers l'aimable et brillant Pomenars, par son dédain, sa -sévérité envers mademoiselle du Plessis, peut donc être accusée -justement de s'être abandonnée sans réserve à ce penchant égoïste auquel -la raison et l'équité nous ordonnent de résister. Mais en rapprochant -tout ce que madame de Sévigné nous apprend sur mademoiselle du Plessis -il paraît qu'elle avait peu de droits à l'indulgence; qu'elle était -envieuse, intéressée, hypocrite; qu'elle avait dans les sentiments une -certaine bassesse que madame de Sévigné ne pouvait supporter chez une -personne de noble naissance. Mademoiselle du Plessis faisait preuve, il -est vrai, d'une admiration exaltée et d'un dévouement sans bornes pour -la dame des Rochers; mais il était facile de s'apercevoir que cela avait -pour cause la faiblesse commune alors à presque tous les nobles de -province, qui cherchaient à tirer vanité de leurs liaisons avec la -noblesse de cour. - - [752] Conférez ces _Mémoires sur Sévigné_, 4e partie, p. 259, ch. - IX, et p. 362 et 363. - - [753] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 janvier 1676), t. IV, p. 298, édit. - G. - - [754] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (15 décembre 1675), t. IV, p. 253, édit. - G.; t. IV, p. 127, édit. M. - - [755] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (23 février 1676), t. IV, p. 348, édit. - G. - - [756] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 juin 1671), t. II, p. 95 et 96, - édit. M.; t. II, p. 115, édit. G. - - [757] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (26 juillet 1671), t. II, p. 157, édit. - G.; t. II, p. 130, édit. M. - - [758] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 mai et 10 juin 1671), t. II, p. 86, - 91 et 95, édit. G.; t. II, p. 72, 76, 77, 80.--_Ibid._ (29 - septembre 1675), t, IV, p. 116, édit. G. - -Mademoiselle du Plessis croyait s'être rendue nécessaire à madame de -Sévigné par son empressement à exécuter ses volontés ou à prévenir ses -désirs: elle lui tenait lieu de demoiselle de compagnie, ainsi qu'une -très-jolie et très-innocente jeune fille qui demeurait au bout du parc -des Rochers. Toutes deux étaient dociles, complaisantes et prêtes à -tout; leur présence n'imposait pas plus de gêne à la dame des Rochers -que celle de _Marphise_ ou de _Fidèle_[759]. - -Mademoiselle du Plessis, dont les services étaient acceptés sans façon, -sans remerciements, se croyait chérie de madame de Sévigné, et avait -assez raison de penser ainsi. Cependant madame de Sévigné n'eut jamais -pour elle que de l'antipathie. Mademoiselle du Plessis louchait -horriblement[760], était d'une laideur affreuse, fausse et gauche dans -toutes ses actions, maladroite dans ses flatteries, choquante par ses -indiscrètes familiarités, étourdissante par ses ricanements, sotte et -ridicule par son intarissable babil et ses exagérations[761]; tellement -dépourvue de sens qu'elle prenait pour contre-vérités dictées par des -accès de tendresse les dures paroles que lui adressait quelquefois -madame de Sévigné. Plus les louanges de celle-ci étaient ironiques, plus -sa raillerie était mordante, plus les épithètes dont elle l'affublait -étaient injurieuses, plus mademoiselle du Plessis montrait de -satisfaction et semblait reconnaissante[762]. Madame de Sévigné se -permettait de renouveler assez souvent ces insultantes mystifications en -présence de ses amis les moins respectables, tels que Pomenars; et alors -la Plessis, comme dit madame de Sévigné, ne manquait jamais d'accroître, -par ses gros rires, les retentissements de la bruyante gaieté qu'elle -excitait, et complétait ainsi une scène digne du haut comique: celle de -la sottise satisfaite, qui, se croyant louée, s'outrage et s'injurie -elle-même. - - [759] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 et 25 décembre 1675), t. IV, p. 237, - 238 et 271, édit. G.--_Ibid._ (1er janvier 1676), p. 287, édit. - G. - - [760] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (21 juin 1671), t. II, p. 104, édit. G.; - t. II, p. 86, édit. M. - - [761] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 juillet 1671), t. II, p. 142, édit. - G.--_Ibid._ (19 juillet 1671), t. II, p. 147, édit. G.; t. II, p. - 122, édit. M.--_Ibid._ (15 décembre 1675) t. IV, p. 256.--_Ibid._ - (12 juillet 1671), t. II, p. 142, édit. G. - - [762] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (16 octobre 1680), t. VI, p. 148, édit. - G.; t. VII, p. 25, édit. M. - -Cela n'était ni charitable ni chrétien de la part de madame de Sévigné. -Aussi est-elle quelquefois touchée de repentir, et elle s'écrie: «La -Plessis a les meilleurs sentiments du monde; j'admets que cela puisse -être gâté par l'impertinence de son esprit et la _ridiculité_ de ses -manières[763].» - - [763] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 octobre 1675), t. IV, p. 148, édit. - G.; t. IV, p. 36, édit. M.--_Ibid._ (8 décembre 1675), t. IV, p. - 115, édit. M.; t. IV, p. 338, édit. G. - -Mais bientôt elle reconnaît que la Plessis est jalouse, envieuse, -hypocrite, intéressée; elle s'étonne que dans les filles nobles il -puisse s'en trouver une avec des sentiments aussi bas; et elle dit: - -«Mademoiselle du Plessis est à son couvent. Si vous saviez comme elle a -joué l'affligée[764] et comme elle volait la cassette pendant que sa -mère expirait, vous ririez de voir comme tous les vices et toutes les -vertus sont jetés pêle-mêle dans le fond de ces provinces; car je trouve -des âmes de paysans plus droites que des lignes, aimant la vertu comme -naturellement les chevaux trottent. La main qui jette tout cela dans son -univers sait fort bien ce qu'elle fait, et tire sa gloire de tout; et -tout est bien[765].» - - [764] Conférez SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 mai 1680), t. VI, p. 295, - édit. M.; t. VII, p. 8, édit. G.--_Ibid._ (5 juin 1680), t. VI, - p. 301, édit. M.; t. VII, p. 20, édit. G. - - [765] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (21 juin 1680), t. VII, p. 66, édit. G.; - t. VI, p. 340, édit. M. - -De tous les correspondants de madame de Sévigné, le plus exact, le plus -actif, le plus fécond des _informateurs_ était sans contredit -d'Hacqueville. Il se plaisait à être l'homme d'affaires et le -nouvelliste de tous ses amis et de toutes ses connaissances; et quand il -était éloigné d'eux il ne pouvait se dispenser de leur écrire souvent, -de leur donner des nouvelles de tout le monde et sur toutes choses; et -comme il exigeait qu'on lui répondît, sa correspondance ressemblait à un -véritable journal manuscrit. Les nouvelles qu'il transmettait étaient de -deux sortes: celles qu'il avait recueillies personnellement et qui -composaient les matières des lettres écrites en entier de sa main, et -celles qu'il faisait extraire et transcrire de sa nombreuse -correspondance; celles-ci étaient sur des feuilles volantes, les mêmes -pour tous les correspondants, et formant une sorte de supplément à ses -lettres. Madame de Sévigné nous peint d'une manière intéressante -l'embarras où la mettait, ainsi que beaucoup d'autres, l'intempérance -épistolaire de d'Hacqueville et en même temps le fruit qu'elle en -recueillait[766]. Cet embarras n'était pas moins grand que celui de -concilier les règles de conduite contenues dans les devises qu'elle -avait inscrites sur les arbres de son parc: - -«J'ai écrit, dit-elle, à d'Hacqueville. Au reste, qu'il ne me vienne -plus parler de ses accablements, c'est lui qui les aime; il vous écrit -trois fois la semaine; vous vous contenteriez d'une, et le gros abbé (de -Pontcarré) le soulagerait d'une autre; voilà comme il s'accommoderait. -Je lui ai proposé la même chose, et je ne lui écris qu'une fois en huit -jours pour lui donner l'exemple; il n'entend point cette sorte de -tendresse, et veut écrire comme le juge voulait juger. J'en suis dans -une véritable peine, car je suis persuadée que cet accablement nous le -fera mourir. Si vous aviez vu sa table les mercredis, les vendredis, les -samedis, vous croiriez être au bureau de la grande poste. Pour moi, je -ne me tue point à écrire; je lis, je travaille, je me promène, je ne -fais rien: _Bella cosa far niente_, dit un de mes arbres; l'autre lui -répond: _Amor odit inertes_: on ne sait auquel entendre; mais ce que je -sens de vrai, c'est que je n'aime point à m'enivrer d'écriture. J'aime à -vous écrire, je parle à vous, je cause avec vous: il me serait -impossible de m'en passer; mais je ne multiplie point ce goût; le reste -va parce qu'il le faut.» - - [766] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (9 octobre 1675), t. IV, p. 135, édit. - G.; t. IV, p. 25, édit. M. - -Et quinze jours après, elle écrit encore[767]: - -«D'Hacqueville me dit qu'une fois la semaine c'est assez écrire pour des -affaires; mais que ce n'est pas assez pour son amitié, et qu'il -augmenterait plutôt d'une lettre que d'en retrancher une. Vous jugez -bien que, puisque le régime que je lui avais ordonné ne lui plaît pas, -je lâche la bride à toutes ses bontés, et lui laisse la liberté de son -écriture; songez qu'il écrit de cette furie à tout ce qui est hors de -Paris, et voit tous les jours tout ce qui y reste: ce sont _les -d'Hacqueville_. Adressez-vous à eux, ma fille, en toute confiance: leurs -bons cÅ“urs suffisent à tout. Je me veux donc ôter de l'esprit de les -ménager; j'en veux abuser; aussi bien si ce n'est moi qui le tue, ce -sera un autre. Il n'aime que ceux dont il est accablé; accablons-le donc -sans ménagement.» - - [767] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (16 octobre 1675), t. IV, p. 156, éd. - G.; t. IV, p. 43, édit. M. - -Mais dans un grand nombre de nouvelles diverses que d'Hacqueville -adressait à tant de personnes différentes[768], il lui arrivait -quelquefois de se tromper, et de mander par distraction à madame de -Sévigné, quand elle était aux Rochers, des nouvelles de Rennes: alors -par malice elle lui adressait, des Rochers à Paris, des nouvelles de -Paris qu'elle avait reçues d'une autre main et dont bien certainement il -était plus tôt informé qu'elle. Dans une de ses lettres à madame de -Grignan, égalant souvent en longueur les dépêches diplomatiques, elle -dit: «D'Hacqueville, de sa _propre main_, car ce n'est point dans son -billet de nouvelles, me mande que M. de Chaulnes, suivi de ses troupes, -est arrivé à Rennes le samedi 12 octobre. Je l'ai remercié de ce soin, -et je lui apprends que M. de Pomponne se fait peindre par Mignard.» -Mais elle se trouvait bien heureuse de ce travers de d'Hacqueville -quand, le courrier de Provence ayant manqué, les lettres qu'il lui -écrivait contenaient des nouvelles récentes de madame de Grignan[769]. - - [768] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (16 et 23 octobre), t. IV, p. 158 et - 169-171, édit. G.; t. IV, p. 43 et 54-57, édit. M. - - [769] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er mars 1676), t. IV, p. 353, édit. - G.; t. IV, p. 219, 220. - -Un motif plus puissant encore rendait la correspondance de d'Hacqueville -importante pour madame de Grignan pendant le séjour de sa mère en -Bretagne. Quoique le parti des Forbin-Janson n'eût plus de chef dans -l'assemblée des états, cependant il existait toujours; et les Forbin qui -se trouvaient en cour avaient continué à être leur organe, et -dénigraient l'administration du gouverneur. M. de Grignan, qui n'avait -jamais eu beaucoup d'ordre dans ses affaires, avait des procès à faire -juger à Paris pour d'anciennes dettes contractées envers la famille de -Mirepoix[770] en raison de son double mariage, d'abord avec mademoiselle -de Rambouillet et ensuite avec mademoiselle du Puy du Fou. Ce débat -aurait enfanté de nouveaux procès si l'on n'avait pas pris des -arrangements avec les créanciers[771]. Pour toutes ces choses la -protection de M. de Pomponne était utile et quelquefois décisive; il -fallait donc la solliciter sans cesse et mettre à profit la bonne -volonté de ce ministre. Madame de Sévigné, aidée de l'abbé de Coulanges -et de ses nombreux amis, s'acquittait merveilleusement de cette tâche -lorsqu'elle était à Paris; et les intérêts du gouverneur de la Provence -et de madame de Grignan eussent beaucoup souffert si en leur absence -d'Hacqueville, de concert avec madame de Vins, n'y eût suppléé avec le -zèle de l'amitié la plus dévouée. Madame de Vins était la belle-sÅ“ur de -M. de Pomponne, jolie et charmante personne dont madame de Sévigné se -servait pour agir sur l'esprit de ce ministre. Elle avait épousé Jean de -la Garde d'Agoult, bon gentilhomme de Provence, d'abord chevalier, puis -marquis de Vins, brigadier et ensuite lieutenant général des armées du -roi et proche parent des Grignan[772]. Il fut chargé, comme lieutenant -des mousquetaires, de conduire des troupes en Bretagne[773]. Madame de -Sévigné eut peu de rapports avec lui, et il s'abstint même d'aller lui -rendre visite lorsqu'il passa à Laval et à trois lieues des Rochers. -Comme beaucoup de militaires de son âge, le marquis de Vins menait une -vie peu régulière, et, dans la bonne société, il avait avec les dames -cette gaucherie et cette timidité que contractent ceux qui ne se -plaisent que dans le sans-gêne des femmes qui ont abdiqué toute -pudeur[774]. Il n'en était pas de même de madame de Vins, qui résidait à -Paris tandis que son mari était en Bretagne: elle faisait les délices -des élégantes sommités du monde et de la cour. L'influence qu'elle avait -auprès de son beau-frère n'avait rien perdu de sa force depuis -qu'indépendante par sa fortune ses attraits, son esprit, ses grâces lui -attiraient un plus grand nombre d'hommages et planaient sur un plus -vaste horizon. Aussi madame de Sévigné, qui savait que d'Hacqueville -avait souvent recours à elle pour le succès de ses démarches, répondait -avec empressement aux lettres qu'elle en recevait[775]. Madame de Vins -était heureuse d'avoir une amie de l'âge et du mérite de madame de -Sévigné[776] et fière d'entretenir avec elle une correspondance si bien -assortie à toutes les sympathies de son cÅ“ur et de son esprit. De cette -correspondance il ne nous reste pas le moindre débris, et les lettres de -madame de Sévigné à sa fille nous prouvent que cette perte est -très-regrettable. L'étroite liaison qui existait entre la marquise de -Vins et madame de Sévigné jamais ne se relâcha et ne fut troublée par -aucun nuage. La correspondance de madame de Vins avec madame de Grignan -nous eût appris beaucoup de particularités qui auraient éclairé les -lettres que nous possédons de madame de Sévigné, et elle eût aussi jeté -du jour sur l'existence intérieure du ministre Pomponne, qui a eu une -part si grande aux affaires publiques de ce temps. On s'étonne que -madame de Sévigné, qui a vécu si longtemps dans l'intimité de ce -ministre et celle de toute sa famille, dans les nombreuses lettres qui -nous restent d'elle ne parle qu'une seule fois de madame de Pomponne, -tandis qu'elle s'entretient fort souvent de sa sÅ“ur, mademoiselle de -Ladvocat, qui fut depuis la marquise de Vins. La publication récente que -l'on a faite des lettres de la famille de Feuquières nous explique cette -apparente anomalie. Ces lettres nous font connaître que madame de -Pomponne n'était nullement, comme sa sÅ“ur, comme madame de Sévigné, de -ces femmes favorisées du ciel, toujours inspirées par le désir de -plaire, qui appellent au secours de leurs attraits naturels les charmes -de leur esprit et de leur doux langage. Madame de Pomponne était une -excellente femme, qui donnait tout son temps à ses affaires de ménage; -comme le bon abbé de Coulanges, elle aimait beaucoup à calculer, à -équilibrer avec précision ses recettes et ses dépenses; elle prenait -même aussi volontiers sur elle le soin de bien régler les intérêts de -ses jeunes parents, qu'elle morigénait lorsqu'ils violaient les -principes d'une sage économie[777]. Une pareille femme ne pouvait -suffire à un homme tel que Pomponne, qui s'était habitué à se délasser -de ses travaux diplomatiques par les agréments d'une société choisie et -par le commerce des lettres. Voilà pourquoi mademoiselle de Ladvocat -était devenue pour lui, dans son intérieur, comme le complément de sa -femme. Dès lors on comprend facilement pourquoi madame de Sévigné, ne -pouvant entretenir M. de Pomponne aussi promptement et aussi fréquemment -que le réclamait l'urgence de ses affaires, employait pour suppléer à -ces entretiens mademoiselle de Ladvocat, qui, avant son mariage, -demeurait avec sa sÅ“ur dans la maison de ce ministre et qui depuis -conserva toujours près de lui, comme belle-sÅ“ur, des privautés que -nulle autre ne pouvait avoir. C'est ainsi que madame de Vins fut initiée -aux choses du gouvernement et aux intrigues auxquelles elles donnaient -lieu, tandis que madame de Pomponne n'avait ni le temps ni la volonté -de s'en mêler, et y resta constamment étrangère. Ainsi doit -s'interpréter le silence de madame de Sévigné et de tous ses -contemporains sur madame de Pomponne, respectable matrone qu'un sage -chez les Romains eût louée pour les qualités qu'elle avait et encore -plus pour celles qu'elle n'avait pas et que son mari, bel esprit, aurait -souhaité de trouver en elle; ce qui n'empêchait pas qu'elle ne possédât -toute sa confiance et sa plus constante affection. Elle la méritait sous -tous les rapports. Madame de Pomponne joignait aux vertus solides et aux -talents d'une habile maîtresse de maison beaucoup d'instruction; madame -de Sévigné nous apprend que ce fut elle qui dirigea l'éducation de sa -belle-sÅ“ur madame de Vins et aussi celle de sa fille, femme du ministre -d'Etat Colbert de Torcy[778]. - - [770] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (21 août 1675), t. IV, p. - 42-43.--_Ibid._ (8 mars 1676), t. IV, p. 358, édit. G. - - [771] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (25 décembre 1675), t. IV, p. 274, édit. - G.--_Alliance des arts, Catalogue des archives de la maison de - Grignan_, 1844, in-8º, p. 33 (1677, mars 3). - - [772] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 juillet 1673), t. III, p. 256, édit. - G. - - [773] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (31 juillet 1675), t. III, p. 479, édit. - G. - - [774] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 novembre 1675), t. IV, p. 207 et - 208, édit. G. - - [775] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 décembre et 5 janvier 1676), t. IV, - p. 287, 296, 297, édit. G.--_Ibid._ (24 juillet 1680), t. VII, p. - 128, édit. G. - - [776] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 novembre et 25 décembre 1675), t. - II, p. 214 et 273, édit. G. - - [777] _Mémoires et lettres de_ FEUQUIÈRES, t. II, p. 429. - - [778] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (5 mai 1689), t. X, p. 298, édit. G. - -A cette époque, madame de Sévigné avait à Paris une amie avec laquelle -elle entretenait un commerce de lettres assez actif pour que madame de -Vins voulût bien s'en montrer jalouse[779]. Cette amie était madame de -Villars, sÅ“ur du maréchal de Bellefonds: elle avait épousé le marquis -de Villars, qui suppléait au défaut d'une naissance ancienne et d'un -riche patrimoine par un air noble et digne, une taille élevée, une belle -figure; avantages qui lui avaient fait donner le nom romanesque -d'_Orondate_[780]. «La marquise de Villars, dit Saint-Simon, était une -bonne petite femme maigre et sèche, active, méchante comme un serpent, -de l'esprit comme un démon, d'excellente compagnie et qui recommandait à -son fils de se vanter au roi tant qu'il pourrait, mais de ne jamais -parler de soi à personne[781]. Les trente-sept lettres qui nous restent -de madame de Villars à madame de Coulanges et ce que nous apprend madame -de Coulanges, ne se rapportent pas entièrement à cette peinture du -caustique Saint-Simon[782]. «Elle est charmante par ses mines (dit -madame de Coulanges) et par les petits discours qu'elle commence et qui -ne sont entendus que par les personnes qui la connaissent.» Madame de -Coulanges atteste encore que, bien loin d'être méchante comme un -serpent, «madame de Villars était tendre, qu'elle savait bien aimer; ce -qui donnait de l'amitié pour elle.» Sa mémoire doit être sous la -protection de tous ceux qui portent un cÅ“ur français, puisqu'elle eut -le bonheur de donner le jour au dernier des grands généraux de Louis -XIV, au maréchal de Villars, qui sauva la France à Denain. La -correspondance de madame de Sévigné avec la marquise de Villars nous -manque entièrement; mais nous savons le motif qui donnait plus de -chaleur à l'amitié qui les unissait[783] et leur faisait éprouver le -besoin de se communiquer leurs pensées. Toutes deux avaient un fils à -l'armée de Condé, et ces fils causaient à leurs mères de mortelles -inquiétudes: ces deux fils furent blessés au sanglant combat de -Senef[784]; mais les destinées de l'un et de l'autre furent bien -différentes. Madame de Sévigné avait acheté malgré elle, pour son fils, -la charge de guidon des gendarmes, parce qu'on lui avait persuadé que, -lorsqu'elle mariait sa fille, il était convenable qu'elle fît aussi un -établissement à son fils. Celui de guidon était trop subordonné à sa -naissance et à sa fortune; Sévigné n'avait pris cette charge que pour -pouvoir servir autrement que comme simple volontaire et dans l'espoir -d'obtenir un prompt avancement. Cet espoir avait été déçu; et, à -l'époque dont nous traitons, sa mère faisait des démarches pour vendre -cette charge[785] et en acheter une autre: elle ne put y parvenir. Fils -et frère de deux femmes des plus lettrées et des plus aimables de son -temps, comme elles Sévigné aimait les lettres, les arts et les -jouissances sociales. Un homme de son nom et de sa naissance devait -n'être rien ou être militaire, et par cette raison il avait embrassé la -carrière des armes. Il avait la bravoure (aucun gentilhomme n'en -manquait), mais non le talent d'un guerrier. Sa mère, après qu'il eut -été blessé au combat de Senef, avait écrit au maréchal de Luxembourg et -à son parent le marquis de la Trousse pour lui faire avoir un congé, -afin qu'il pût venir se rétablir aux Rochers, où elle serait aussi -heureuse de le posséder que lui de s'y trouver[786]. C'était la seconde -fois que Sévigné quittait l'armée alors que les opérations de la guerre -étaient en pleine activité[787]. - - [779] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 novembre 1675), t. IV, p. 207, édit. - G. - - [780] SAINT-SIMON, _Mémoires authentiques_, 1829, in-8º, t. II, - p. 114.--GOURVILLE, _Mémoires_, t. XLII, p. 294; t. XLI, p. 190, - 280-288.--_Mémoires sur Sévigné_, part. I, p. 256, ch. XVII, et - part. IV, p. 132, ch. VII. - - [781] _Supplément aux Mémoires de_ DANGEAU, cité par Monmerqué, - _Biographie universelle_, article _Villars_, t. XLVIII, p. 423. - - [782] Madame DE VILLARS, _Lettres_, 1800, in-12, t. I, p. 9-196. - - [783] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 juillet 1671; 6, 9 et 13 octobre - 1675), t. II, p. 140 et 438, et t. IV, p. 132 et 142, édit. G. - - [784] Duc DE VILLARS, _Mémoires_, p. 34-36.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ - (5 septembre 1674), t. IV, p. 353, édit. G. - - [785] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er décembre 1675), t. IV, p. 525 et - 526.--_Ibid._ (3 juillet 1680), p. 85 et 86. - - [786] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (9 octobre et 8 décembre 1675), t. IV, - p. 137 et 257, édit. G. - - [787] _Mémoires sur Sévigné_, part. IV, p. 286, ch. X. - -Il n'en était pas ainsi du jeune Villars, qui ne voulait point de congé; -ni Condé ni Luxembourg n'auraient accordé ce congé aux prières de sa -mère, si elle avait pensé à le demander. Son père, le brillant -_Orondate_, s'était distingué comme militaire par de beaux faits -d'armes; mais Louvois, qui haïssait en lui l'époux de la fille du -maréchal de Bellefonds, le traversait sans cesse dans tous ses projets -d'avancement. Alors il quitta l'état militaire et se jeta dans la -diplomatie, où il réussit comme à la guerre. Après s'être acquitté avec -succès d'une ambassade en Espagne[788], il fut rappelé, et venait d'être -nommé ambassadeur à la cour de Savoie[789], ce qui était, comme le -remarque plaisamment madame de Sévigné, une application du proverbe: -_Devenir d'évêque meunier_; mais ce n'était point une disgrâce, et il -devait par la suite retourner ambassadeur en Espagne. D'ailleurs il -fallait se retirer de la cour et du monde si l'on n'était pas résolu à -servir le roi dans le poste, quelque médiocre qu'il fût, qu'il plaisait -à Sa Majesté de vous assigner. Cependant Villars était mécontent, et ne -se trouvait pas récompensé en raison des services qu'il avait rendus; et -lui et sa femme se plaignant un jour devant leur jeune fils de leur -mauvaise fortune: «Pour moi, dit résolûment cet enfant, j'en ferai une -grande, ou je périrai[790].» Il tint parole. - - [788] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (30 mars 1672), t. II, p. 438, édit. G. - - [789] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 octobre 1675), t. IV, p. 132, édit. - G. - - [790] DE VILLARS, _Mémoires_, édit. 1734, in-12, p. 7. - -Louis XIV venait de créer à cette époque, sous le nom de _Pages de la -grande écurie_, un établissement pour l'éducation de la haute -noblesse[791] du royaume. Ces jeunes gens, l'espérance des premières -familles du royaume, accompagnaient comme volontaires le roi dans ses -campagnes lorsque leur éducation était terminée. Ces volontaires -montraient une telle ardeur pour courir au combat quand Louis XIV était -présent qu'il leur était défendu d'aller au feu sans sa permission. Le -jeune Villars, dès la première affaire où il se trouva, désobéit à cet -ordre du roi, qui le gronda sévèrement. Mais sous ses yeux, sous les -regards de Condé, de Turenne et de Luxembourg il déploya une valeur si -brillante, montra un tel enthousiasme pour la guerre, une intelligence -si élevée de la tactique, tant pour l'infanterie que pour la cavalerie; -il étonna tellement ses chefs par son coup d'Å“il rapide et sûr, eut un -bonheur si constant que, de désobéissance en désobéissance et de gronde -en gronde, il s'éleva rapidement jusqu'au rang de colonel malgré -l'inflexible Louvois et quoique son oncle le maréchal de Bellefonds, -dont il était l'élève, fût en pleine disgrâce pour avoir refusé de -servir sous Turenne. Le jeune Villars en était là [792] alors que son ami -Sévigné, aux Rochers, assistait sa mère dans sa correspondance avec -l'ambassadrice de Savoie, ou s'occupait à faire sa cour aux dames de -Vitré ou de Rennes[793], et tandis que le chevalier de Grignan, à la -tête de son régiment, se distinguait aussi dans cette guerre. Madame de -Sévigné convient avec joie que ce chevalier de Grignan, qu'elle avait -surnommé _le petit Glorieux_, acquérait une gloire solide[794]: Sévigné -au contraire n'exerçait sa charge qu'avec négligence, et se laissait -entraîner à la dissipation et à l'oisiveté par l'exemple des jeunes gens -de son âge. «Le roi, dit madame de Sévigné à sa fille, a parlé encore -comme étant persuadé que Sévigné a pris le mauvais air des officiers -subalternes de son régiment[795].» - - [791] DUC DE VILLARS, _Mémoires_; la Haye, chez Pierre Gosse, - 1734, in-12, p. 1, 16, 38 (années 1670-1672), et p. 23, 38, 52 - (années 1673-1675), t. LXVIII de la collection Petitot. - - [792] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 janvier 1676), t. IV, p. 303, édit. - G. - - [793] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (3 juillet 1680), t. VII. p. 85 et 86, - édit. G. - - [794] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 novembre 1675), t. IV, p. 207, édit. - G.--_Mémoires sur Sévigné_, 4e part., p. 133. - - [795] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (3 juillet 1677), t. V, p. 268, édit. G. - -Un autre genre de correspondance qui occupait alors comme malgré elle la -plume de madame de Sévigné aux Rochers, c'est celle qu'elle entretenait -avec cette parente et amie de madame de Villars[796] qui avait été -élevée avant celle-ci chez la maréchale de Bellefonds. Nous avons déjà -fait connaître à nos lecteurs, dans la quatrième partie de ces Mémoires, -la comtesse de Saint-Géran[797], cette petite femme si jolie, si -spirituelle, dame du palais de la reine, toujours en cour, faite pour la -cour, dont elle suivait tous les mouvements, à laquelle elle -assortissait sa vie, ses goûts, ses plaisirs, ses croyances, ses -occupations, successivement et suivant les temps galante, dévote, -prodigue et rangée; toujours aimable, toujours recherchée, toujours -ménagée, même durant les rigueurs qu'elle s'attira par ses imprudences. -Elle ne cessa jamais d'entretenir les liaisons qu'elle avait formées -avec madame de Sévigné et avec madame de Maintenon, auxquelles elle -plaisait sans inspirer à l'une et à l'autre ni estime ni confiance[798]. -Il en est de même de madame de Frontenac[799], l'une des _divines_; et -on a droit de s'étonner que les historiens de Maintenon et de Louis XIV -se soient laissé égarer à l'égard de ces deux femmes par des fragments -de lettres apocryphes, dont le plus faible examen aurait dû leur -démontrer la fausseté[800]. Le gros Saint-Géran était cousin des -Villars, et se trouvait à l'armée en même temps que Sévigné et Villars; -ce qui contribuait à donner plus d'intérêt aux lettres adressées aux -Rochers par la Saint-Géran, comme l'appelle madame de Sévigné[801]. -Aucun obstacle de famille n'avait empêché madame de Saint-Géran de -prendre sa part aux plaisirs de cette cour si brillante et si agitée, où -elle consuma son existence sans aucun profit pour sa fortune. Elle n'eut -qu'une fille, dont elle accoucha après vingt et un ans de mariage[802]. - - [796] SAINT-SIMON, _Mémoires_ (1694), t. I, p. 350, 440 et 441; - t. II, p. 287. «Elle était, dit Saint-Simon, fille du cadet de - Blainville.» - - [797] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 octobre 1675), t. IV, p. 132, édit. - G.--_Mémoires sur madame de Sévigné_, 4e partie, p. 133. - - [798] MAINTENON, _Lettres au cardinal de Noailles_ (mars - 1700).--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 février 1680), t. III, p. 396, - édit. G.--_Ibid._ (17 juillet 1671), t. II, p. 141, édit. - G.--_Ibid._ (6 avril 1696, de madame DE COULANGES), t. X, p. 296, - édit G.--_Ibid._ (16 octobre 1675), t. IV, p. 160, édit. - G.--_Ibid._ (12 janvier 1676), t. IV, p. 311, édit. G.--_Ibid._ - (26 août 1676), t. V, p. 90, édit. G.--_Ibid._ (24 février 1680), - t. VI, p. 396, édit G.--_Ibid._ (22 mai 1674), t. III, p. 238, - édit. G. - - [799] Sur Frontenac, conférez ces _Mémoires sur Sévigné_, 1re - partie, p. 339, 359, 409; 2e, p. 29, 441, 454; 4e, p. 132. - - [800] Conférez les _Notes et éclaircissements_, à la fin de ce - volume. - - [801] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 mars 1696), t. XI, p. 290, édit. G. - - [802] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (22 décembre 1688), t. IX, p. 46 et 47, - édit. G. - - - - -CHAPITRE XV. - -1675-1680. - - Madame de Sévigné se plaint du grand nombre de lettres qu'elle est - obligée d'écrire.--Les correspondances particulières suppléaient - autrefois aux gazettes.--Le nombre des correspondants de madame de - Sévigné s'accroissait chaque jour avec sa célébrité.--Sa liaison - avec madame de Marbeuf.--Elle espère par elle marier son - fils.--Soins et attentions de Sévigné pour sa mère.--Contraste de - sa manière de vivre avec son fils et de celle qu'avait la princesse - de Tarente avec le sien.--Opinion de madame de Sévigné sur le jeune - prince de Tarente.--Celui-ci fait mieux son chemin dans le monde - que Sévigné.--Volages amours de ce dernier.--Son intimité avec - madame du Gué-Bagnols.--Détails sur cette intrigue.--Madame de - Sévigné cherche à marier son fils avec la fille du comte de - Rouillé, intendant de Provence, et ne réussit point.--Craintes de - madame de Sévigné en apprenant que madame de Grignan est - enceinte.--Suite des détails sur la liaison amoureuse de Sévigné et - de madame du Gué-Bagnols.--Autres attachements de Sévigné avec la - duchesse de V..., avec mademoiselle de la Coste et mademoiselle de - Tonquedec.--Nouveaux travaux entrepris par madame de Sévigné aux - Rochers.--Elle est retenue à la campagne par le plaisir qu'elle - trouve à y séjourner.--Affaire du président Méneuf.--Niaiserie du - fils de ce président.--Les affaires de madame de Sévigné - l'obligeaient à retourner à Paris, mais elle tombe malade - dangereusement.--Guérie de sa fièvre, elle ne peut plus écrire - qu'en dictant à son fils et ensuite à la jeune fille de sa - voisine.--Sévigné part pour Paris, afin de traiter de sa charge de - guidon avec de Viriville.--Madame de la Baume y met un empêchement - indirect en faisant enlever madame de la Tivolière pour la marier - avec son fils.--Madame de Sévigné part des Rochers le 24 mars pour - retourner à Paris.--Désespoir de la jeune fille qui lui servait de - secrétaire.--Madame de Sévigné s'arrête à Malicorne.--Elle y entend - l'oraison funèbre de Turenne par Fléchier.--Elle arrive à Paris. - - -Madame de Sévigné se plaint fréquemment à sa fille du nombre de lettres -qu'elle recevait et auxquelles elle était obligée de répondre. C'est -qu'à une époque où le commerce épistolaire était mieux apprécié, plus -recherché qu'il ne peut l'être depuis la publication de ces milliers de -journaux partout imprimés, partout répandus, les intrigues des cours, -les mouvements des armées, les promotions aux places, aux honneurs, aux -titres, aux rangs; les succès et les revers de fortune, les anecdotes du -jour, les grands accidents, les procès célèbres, le théâtre, la -littérature et les arts, toutes les nouveautés, tous les faits, tous les -événements publics ou privés, grands ou petits, étaient alors du domaine -des correspondances individuelles et particulières. Il était naturel -alors que madame de Sévigné, qui se montrait la plus diligente à jaser -spirituellement, agréablement de toutes ces choses; qui, par sa position -et ses relations multipliées, était la mieux et la plus promptement -instruite, fût, à chaque nouvelle liaison qu'elle formait, obligée -d'ajouter un nom de plus à la liste déjà si nombreuse des personnes dont -elle recevait régulièrement des lettres pleines d'informations, et -encore plus de questions, auxquelles il fallait répondre. Parmi ces -nouvelles connaissances était la marquise de Marbeuf, avec laquelle elle -se lia assez intimement durant le long séjour qu'elle fit cette fois en -Bretagne. La marquise de Marbeuf était la femme de Claude de Marbeuf, -président à mortier du parlement de Bretagne. Indignée de la tyrannie du -duc de Chaulnes, elle résolut, à l'exemple de plusieurs Bretons, d'aller -se fixer à Paris; projet qu'elle effectua[803] du vivant de son mari, -peu de temps après le commencement de son intimité avec madame de -Sévigné. Elle eut du succès dans le monde, elle y acquit de l'influence; -et madame de Sévigné, à laquelle elle plaisait, espérait qu'elle -l'aiderait à marier son fils et à vendre sa charge de guidon. - - [803] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 novembre et 11 décembre 1675), t. - IV, p. 200 et 240, édit. G. - -Le baron de Sévigné était depuis longtemps l'objet des vives -sollicitudes de sa mère; il était fréquemment obligé de quitter les -Rochers pour aller à Vitré ou à Rennes, mais il prolongeait son séjour -dans ces deux villes plus qu'il n'était besoin, et s'y occupait -d'intrigues amoureuses. Il continua ce genre de vie lorsqu'il fut de -retour à Paris, ce qui contrariait la tendresse maternelle de madame de -Sévigné, qui aurait voulu lui voir former des liens sérieux et -utiles[804]. Pour parvenir à lui faire changer de conduite, elle ne lui -montrait jamais un visage sévère, et continuait toujours, afin de capter -sa confiance, de traiter avec lui ces matières sans nulle aigreur. -Madame de Grignan approuvait à cet égard la conduite de sa mère, qui ne -lui cachait rien, mais dissimulait quelquefois avec son fils. Sévigné -avait plus de sensibilité, mais une tête et un caractère plus faibles -que sa sÅ“ur. Il se repentait souvent de ne pas suivre les conseils de -sa mère, et revenait toujours à elle avec des résolutions meilleures et -plus de soumission. - - [804] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 août 1675), t. IV, p. 16.--_Ibid._ - (1er janvier 1676), t, IV, p. 184, édit. G. - -«Nous suivons vos avis pour mon fils, écrit madame de Sévigné à madame -de Grignan; nous consentons à quelques fausses mines; et si l'on nous -refuse, chacun en rendra de son côté. En attendant, il me fait ici fort -bonne compagnie, et il trouve que j'en suis une aussi: il n'y a nul air -de maternité à notre affaire[805].» - - [805] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (29 décembre 1675), t. IV, p. 279, édit. - G. - -Dans une autre lettre, elle avait dit: «Comme je venais, je trouvai au -bout du Mail le _frater_, qui se mit à deux genoux aussitôt qu'il -m'aperçut, se sentant si coupable d'avoir été trois semaines sous terre -à _chanter matines_ qu'il ne croyait pas me pouvoir aborder d'une autre -façon. J'avais bien résolu de le gronder, et je ne sus jamais où trouver -de la colère. Je fus fort aise de le voir. Vous savez comme il est -divertissant: il m'embrassa mille fois; il me donna les plus mauvaises -raisons du monde, que je pris pour bonnes. Nous causons fort, nous -lisons, nous nous promenons, et nous achèverons ainsi l'année, -c'est-à -dire le reste[806].» - - [806] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (4 décembre 1675), t. IV, p. 229, édit. - G. - -Mais Sévigné va encore à Rennes, et en revient trois semaines après; et -sa mère écrit: - -«Le _frater_ est revenu de Rennes; il m'a rapporté une chanson qui m'a -fait rire: elle vous fera voir en vers une partie de ce que je vous ai -dit l'autre jour en prose[807].» - - [807] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er janvier 1676), t. IV, p. 284, édit. - G. - -La princesse de Tarente avait envers son fils, non encore majeur, la -morgue allemande, et elle le maintenait dans le respect qui lui était -dû. Elle ne pouvait comprendre la conduite de madame de Sévigné, et -était toujours de plus en plus choquée des familiarités du fils envers -sa mère. «Cela n'est pas étonnant, disait madame de Sévigné: elle qui -n'a qu'un grand benêt de fils, qui n'a point d'âme dans le corps[808]!» -Ce jeune prince de Tarente, cet unique héritier des la Trémouille, qui -déplaisait tant à madame de Sévigné parce qu'il était encore plus laid -que M. de Grignan[809], élevé en province, n'avait ni les grâces ni les -manières d'un homme de cour. Sans avoir le génie et les grandes qualités -de son père, il mena cependant une existence brillante et honorée; il -s'acquit l'estime et la confiance de la noblesse de Bretagne, qu'il -présida au moins sept fois dans l'assemblée des états, au détriment du -duc de Rohan[810]; et il obtint pour prix de ses services, sans -courtisanerie et sans sollicitations, d'être nommé chevalier des ordres -du roi. Le marquis de Sévigné au contraire gouverna mal sa fortune, son -ambition et ses amours; il passa le temps de sa jeunesse dans la société -des poëtes, des artistes et des jeunes fous de son temps, moitié homme -du monde, moitié militaire. La jolie figure, les grâces, l'élégance, -l'esprit de cet officier blondin inspiraient à beaucoup de beautés -galantes le désir de s'en faire aimer; mais elles le quittaient aussitôt -qu'elles s'apercevaient que le reste ne répondait pas à ces brillants -dehors. C'est cette disposition à former des liaisons où le cÅ“ur -n'était pour rien[811], à être dupe des femmes qu'il croyait avoir -subjuguées; ce sont ces continuels efforts pour vouloir paraître -toujours succomber aux atteintes d'une passion qu'il ne ressentait pas, -qui lui avaient attiré les railleries du duc de la Rochefoucauld; et sa -sÅ“ur, qui l'aimait, voulut l'empêcher de s'y exposer; mais, moins bonne -que sa mère et ne craignant pas de le choquer, elle lui avait fait sur -ce sujet de vifs reproches, assaisonnés d'une piquante ironie. La -réponse de Sévigné jette du jour sur ses intrigues amoureuses et sur les -mÅ“urs de ce temps; elle termine une lettre que sa mère écrit à madame -de Grignan, et qui s'arrête à ces mots: - -«Je laisse la plume à l'honnête garçon qui est à mon côté droit; il dit -que vous avez trempé la vôtre dans du feu en lui écrivant: il est vrai -qu'il n'y a rien de si plaisant[812]. - - [808] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (29 décembre 1675), t. IV, p. 279, édit. - G. - - [809] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (23 octobre 1689), t. IX, p. 172, édit. - M.; t. X, p. 48, édit. G. - - [810] Après la mort de son père, qui eut lieu en 1672, et de son - grand-père, en 1674, le prince de Tarente, majeur, présida les - états de Bretagne à Saint-Brieuc en 1677 (20 août, 9 octobre), à - Nantes (1681, 19 août, 18 février), à Dinan (1687, 1er août et 23 - août), à Saint-Brieuc (1687, 1er et 30 octobre), à Rennes (1689, - 20 octobre, 13 novembre), à Vitré (1697, 16 octobre, 16 - novembre), à Nantes (1701, 30 juillet, 23 avril). _Registre ms. - de la tenue des états de Bretagne, Bibl._ nat., p. 385, 407, 433, - 437 et 535. - - [811] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 mai 1673), t. III, p. 153, édit. G. - -«Que dis-je du feu? (continue M. de Sévigné) c'est dans du fiel et du -vinaigre que vous l'avez trempée cette impertinente plume qui me dit -tant de sottises, sauf correction. Et où avez-vous donc pris, madame la -comtesse, que je ne fusse pas capable de choisir une amie? Est-ce parce -que je m'étais adonné pendant trois ans à une personne qui n'a pu -s'accommoder de ce que je ne parlais pas au public et que je ne donnais -pas la bénédiction au peuple? (Serait-il encore question ici de la belle -_Alsine_, de la duchesse d'Aumont, cette maîtresse de le Tellier, -l'archevêque de Reims, et du CHARMANT, le marquis de Villeroi[813]?) -Vous avez eu du moins grande raison d'assurer que ma blessure était -guérie et que j'étais dégagé de mes fers. Je suis trop bon catholique -pour vouloir rien disputer à l'Église. C'est depuis longtemps qu'il est -réglé que le clergé a le pas sur la noblesse... Je suis redevenu -esclave d'une autre beauté brune, dans mon voyage de Rennes: c'est de -madame de..., celle qui priait Dieu si joliment aux Capucins. Vous -souvenez-vous que vous la contrefaisiez? Elle est devenue bel esprit, et -dit les élégies de la comtesse de la Suze en langage breton.» - - [812] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er janvier 1676), t. IV, p. 286, édit. - G. - - [813] Conférez _Mémoires sur Sévigné_, part. IV, p. 211, 277 et - 356; ch. VIII et X, et les notes. - -Cependant Sévigné, engagé dans les liens d'une parente ou d'une alliée -de sa propre famille, devint plus réservé dans les confidences qu'il -faisait à sa mère. C'est ainsi qu'il s'efforça, mais en vain, de couvrir -du voile du mystère ses amours avec madame du Gué-Bagnols. Cette femme, -qui était loin d'avoir l'amabilité de sa sÅ“ur, madame de Coulanges, -était, ainsi que je l'ai déjà dit, mariée depuis quatre ans, à l'époque -dont nous nous occupons, à Louis du Gué-Bagnols, son cousin issu de -germain. Sa liaison avec Sévigné suivit presque celle de la dame brune -de Rennes, et eut lieu peu après, aussitôt le retour de Sévigné à -Paris[814]. - - [814] _Mémoires sur Sévigné_, 4e partie, p. 198.--SÉVIGNÉ, - _Lettres_ (17 février 1672), t. II, p. 391, édit. G. - -Madame de Sévigné mande à sa fille, de la manière suivante, un incident -fâcheux de cette intrigue: «Ah! c'est un homme bien amoureux que -monsieur votre frère! j'admire la peine qu'il se donne pour rien, pour -rien du tout. Il a été surpris dans une conversation fort secrète par un -mari; ce mari fit une mine très-chagrine, parla très-rudement à sa -femme: l'alarme était au camp quand je partis (pour Livry, d'où la -lettre est datée); je manderai la suite à Paris[815].» Et elle mande -quatre jours après, dans la même lettre datée de Paris: «Le baron a -tout raccommodé par son adresse; il en sait autant que les maîtres, et -plus; car, pour imiter l'indifférence, personne ne le peut surpasser; -elle est jouée si fort au naturel, et le vraisemblable imite si bien le -vrai, qu'il n'y a point de jalousie ni de soupçons qui puissent tenir -contre une si bonne conduite. Vous auriez bien ri si vous aviez su tout -le détail de cette aventure. Il me semble que vous devinez le nom du -mari. A tout hasard, la femme s'en va dans votre voisinage[816].» - - [815] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (3 et 7 juillet 1677), t. V, p. 269 et - 270, édit. M.--_Ibid._ (26 juillet 1677), t. V, p. 305, édit. G. - - [816] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 et 19 juillet 1677), t. V, p. 270 et - 294, édit. G. - -Parler ainsi, c'était nommer ce mari; car madame de Grignan savait -très-bien que madame du Gué-Bagnols devait aller à Lyon rejoindre ses -parents; et Sévigné, dont l'amour s'était attiédi, cherchait déjà , -suivant l'habitude des officiers en garnison, une autre maîtresse pour -remplacer celle qu'il allait perdre. Dans une lettre où madame de -Sévigné se complaît un peu trop, pour amuser sa fille, à railler une -femme qu'elle n'aimait pas, elle n'hésite point à nommer ce mari: «La -Bagnols est partie aujourd'hui; je mande à mon fils que, s'il n'est -point mort de douleur, il vienne demain dîner (à Livry) avec tous les -Pomponne; il sera plus heureux que M. de Grignan, qui se trouve -abandonné, parce qu'il n'avait à Aix que trois maîtresses, qui toutes -lui ont manqué: on ne peut en avoir une trop grande provision; qui n'en -a que trois n'en a point. J'entends tout ce qu'il dit là -dessus. Mon -fils est bien persuadé de cette vérité; je suis assurée qu'il lui en -reste plus de six, et je parierais bien qu'il n'en perdra aucune par la -fièvre maligne, tant il les choisit bien depuis quelque temps. Oh! vous -voyez que ma plume veut dire des sottises aussi bien que la -vôtre[817].» - - [817] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 juillet 1677), t. V, p. 294, édit. - G. - -On voit qu'alors la mère et la fille étaient en train de s'entretenir -d'aventures galantes: non-seulement madame de Bagnols, mais sa sÅ“ur -madame de Coulanges, donnaient matière à exercer la malignité de leurs -plumes. On se croit transporté en plein dix-huitième siècle. L'exemple -du monarque et de sa cour avait banni de la haute classe ces chastes -scrupules, cette susceptibilité qui honoraient la première génération -des précieuses à l'hôtel de Rambouillet. Déjà des mères respectables, -qui elles-mêmes se maintenaient dans toute la dignité de leur sexe, -voyaient sans peine leurs fils chercher à plaire à des femmes mariées, -habiles à couvrir d'un voile le mystère de leurs amours. C'était un -moyen nouveau de combiner l'indifférence pour les intérêts d'une vertu -sévère avec le respect dû aux convenances; de concilier la licence des -mÅ“urs avec la politesse des manières, et la sensualité des passions -avec la délicatesse des sentiments: toutes choses qui s'évanouissaient -dans le commerce ruineux des Laïs indépendantes[818]. - - [818] Conférez ces _Mémoires sur Sévigné_, I, 3, 86; III, 23; IV, - 102. - -Madame de Sévigné, quoique janséniste, était du nombre de ces mères; et, -pour tranquilliser sa conscience sur le tort que son fils pouvait faire -aux maris par ses amours volages, elle se persuadait facilement qu'avec -les femmes auxquelles il s'adressait il ne faisait que prévenir un plus -grand mal, et que, dans les mÅ“urs du siècle, la morale du CONTEUR, au -prologue de la _Coupe enchantée_, était la seule praticable. Mais -Sévigné n'était pas alors l'objet de la volage préférence de madame de -Coulanges; aussi madame de Sévigné n'en parle-t-elle que légèrement. -Admirez pourtant comme elle mêle habilement à ces frivolités les -nouvelles de la guerre qui alors tenait tout le monde en suspens! On -avait envoyé au maréchal de Créqui, pour grossir son armée, toutes les -troupes que commandait le maréchal de Schomberg, et celui-ci était resté -seul avec son état-major; et, comme madame de Sévigné fut de tout temps -liée avec la maréchale de Schomberg (Marie de Hautefort)[819], cette -nouvelle l'intéressait au plus haut degré. «La _Mouche_ (madame de -Coulanges), dit d'abord madame de Sévigné, ne peut pas quitter la cour -présentement; quand on y a de certains engagements, on n'est point -libre.» Puis, deux jours après: «La _Mouche_ est à la cour; c'est une -fatigue; mais que faire? M. de Schomberg est toujours vers la Meuse, -c'est-à -dire _tout seul tête à tête_. Madame de Coulanges disait l'autre -jour qu'il fallait donner à M. de Coulanges l'intendance de cette -armée[820].» L'aimable chansonnier qui s'était autrefois noyé _dans la -mare à Grappin_ était encore moins propre à être intendant d'armée que -juge; mais comme le maréchal n'avait plus d'armée, en lui envoyant -Coulanges pour intendant militaire, celui-ci aurait réjoui le maréchal -oisif par ses couplets, et se serait trouvé à la hauteur de ses -fonctions. Madame de Sévigné, soit qu'elle ait inventé ce propos, soit -qu'il ait été dit par madame de Coulanges, faisait entendre à madame de -Grignan que la présence de M. de Coulanges à Paris était, pour sa femme, -au moins inutile. - - [819] Sur Marie de Hautefort, conférez ces _Mémoires sur - Sévigné_, I, 229, 471; III, 134. - - [820] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (21 et 23 juillet 1677), t. V, p. 293 et - 303, éd. G. - - -Elle est moins laconique et surtout plus explicite sur le compte de la -sÅ“ur de madame de Coulanges. Les deux sÅ“urs étaient également l'objet -des railleries de madame de Grignan pour leur vanité[821]; mais il y -avait entre elles une grande différence sous le rapport de l'esprit, de -l'usage du monde, de l'amabilité, des grâces et du charme de la -conversation. Madame du Gué-Bagnols était pleine d'afféterie, de -prétentions et mortellement ennuyeuse. Madame de Sévigné désirait -non-seulement en détacher son fils, mais persuader à madame de Grignan -que Sévigné avait renoncé à cette maîtresse et n'entretenait avec elle -une correspondance que par un reste d'égard et pour ne pas s'écarter des -procédés d'un honnête homme. Par l'intermédiaire de madame de Grignan, -madame de Sévigné négociait alors le mariage de son fils avec -mademoiselle Rouillé, fille de l'intendant de Provence. A Aix, madame de -Sévigné avait fait la connaissance de madame de Rouillé, et la trouvait -aimable[822]. Madame de Rouillé vint à Paris en août 1675, et apprit à -madame de Sévigné qu'elle avait d'autres vues qu'elle pour le mariage de -sa fille; ce qui n'altéra point leur amitié. Rouillé, qui fut un de ces -grands administrateurs formés à l'école de Colbert et devint par la -suite intendant général des postes, avait une dot considérable à donner -à sa fille: il ne trouva pas que le marquis de Sévigné fût assez riche -ni assez avancé dans sa carrière militaire, et il ne se laissa point -tenter par une alliance plus brillante que solide[823]. - - [821] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 octobre 1679), t. VI, p. 151, édit. - G.; et MAINTENON, _Lettres_, 28 février (1678), t. I, p. 154, - édit. 1756, in-8º. - - [822] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 août 1675), t. IV, p. 16, édit. G. - - [823] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (21 juillet 1677), t. V, p. 297, édit. - G. - -Madame de Sévigné commence par annoncer le départ de madame de Bagnols -en ces termes: «La Bagnols est partie, et la Mousse est allé avec -elle[824].» Ceux qui ont lu la quatrième partie de ces Mémoires se -rappellent le petit abbé de la Mousse, dont madame de Sévigné estimait -le savoir et le caractère, qu'elle hébergea si longtemps et dont elle ne -se séparait jamais qu'avec peine. On sait qu'il était le fils naturel de -M. du Gué-Bagnols[825], l'intendant de Lyon, et par conséquent frère de -madame de Coulanges et de madame du Gué-Bagnols la jeune. Madame de -Sévigné, continuant sur celle-ci la plaisanterie de sa lettre du 19 -juillet, écrit, sept jours après[826]: - -«M. de Sévigné apprendra donc de M. de Grignan la nécessité d'avoir -plusieurs maîtresses, par les inconvénients qui arrivent de n'en avoir -que deux ou trois; mais il faut que M. de Grignan apprenne de M. de -Sévigné les douleurs de la séparation quand il arrive que quelqu'un s'en -va par la diligence. On reçoit un billet du jour du départ, qui -embarrasse beaucoup, parce qu'il est fort tendre: cela trouble la gaieté -et la liberté dont on prétend jouir. On reçoit encore un autre billet de -la première couchée, dont on est enragé. Comment diable? cela -continuera-t-il de cette force? On me conte cette douleur; on met sa -seule espérance au voyage que le mari doit faire, croyant que cette -grande régularité en sera interrompue; sans cela, on ne pourrait -souffrir un commerce de trois fois la semaine. On tire les réponses et -les tendresses à force de rêver; la lettre est _figée_, comme je -disais, avant que la _feuille qui chante_ soit pleine: la source est -entièrement sèche. On pâme de rire avec moi du style, de l'orthographe.» -Puis madame de Sévigné rapporte des fragments de la lettre de madame du -Gué-Bagnols, qui n'ont rien de ridicule, quoi qu'elle en puisse dire; et -si l'orthographe les rendait tels, on sait que celle de madame de -Coulanges n'était pas meilleure[827]: cependant nulle femme de son temps -n'a été plus célèbre par le talent de bien écrire des lettres. Madame de -Sévigné ajoute: «Voilà en l'air ce que j'ai attrapé, et voilà à quel -style votre frère est condamné de répondre trois fois la semaine. Ma -fille, cela est cruel, je vous assure. Voyez quelle gageure ces pauvres -gens se sont engagés de soutenir! c'est un martyre, ils me font pitié; -le pauvre garçon y succomberait sans la consolation qu'il trouve en moi. -Vous perdez bien, ma chère enfant, de n'être pas à portée de cette -confidence. J'écris ceci hors d'Å“uvre pour vous divertir, en vous -donnant une idée de cet aimable commerce[828].» - - [824] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 juillet 1677), t. V, p. 139, édit. - M.; t. V, p. 295, édit. G. - - [825] Conférez _Mémoires sur Sévigné_, t. IV, p. 349, dans les - notes et éclaircissements du chap. VII, et p. 190 du texte. - - [826] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (26 juillet 1677), t. V, p. 304-306, - édit. G. - - [827] Conférer ces _Mém. sur Sévigné_, t. I, p. 3, 86; t. III, p. - 23, 250, 395, 473; t. IV, 8, 198, 266, 286. - - [828] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (26 juillet 1677), t. V, p. 306, édit. - G. - -Mais elle revient encore sur le même sujet quelques jours après, et -cite, de ces lettres de madame de Bagnols à Sévigné, des traits -d'afféterie qui la mettaient hors d'elle. Il paraît que madame du -Gué-Bagnols devait aller voir madame de Grignan: - -«Le voyage de la Bagnols est assuré, dit madame de Sévigné. Vous serez -témoin de ses langueurs, de ses rêveries, qui sont des applications à -rêver; elle se redresse comme en sursaut, et madame de Coulanges lui -dit: _Ma pauvre sÅ“ur, vous ne rêvez point du tout_. Pour son style, il -m'est insupportable, et me jette dans des grossièretés, de peur d'être -comme elle. Elle me fait renoncer à la délicatesse, à la finesse, à la -politesse, de crainte de donner dans les tours de passe-passe, comme -vous dites: cela est triste de devenir une paysanne[829].» - - [829] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (13 août 1677), t. V, p. 346, édit. G.; - t. V, p. 185, édit. M.--_Ibid._ (6 octobre 1679), t. VI, p. - 151-152, édit. G. - -Après cette liaison, madame de Sévigné nous apprend que son fils en -forma une autre, qui ne fut pas plus sincère, avec la duchesse de V... -(peut-être la duchesse de Ventadour, mademoiselle de Houdancourt[830]). -«Ce qui est vrai, écrit madame de Sévigné à sa fille, c'est que votre -frère n'aime point du tout la duchesse et que c'est pour rien qu'il -prend un air si nuisible.» Quinze jours après, madame de Sévigné -entretient encore sa fille des relations intimes de Sévigné avec une de -ses parentes (peut-être est-il encore question de madame du -Gué-Bagnols): «Mon fils me parle de la grosse cousine d'une étrange -façon; il ne désire qu'une bonne cruelle pour le consoler un peu: une -ingrate lui paraît une chimère. Voilà le style de madame de Coulanges, -celui dont il se sert; et, en parlant de quelque argent qu'il a gagné -avec la cousine, il me dit: _Plût à Dieu que je n'y eusse gagné que -cela_! Que diantre veut-il dire? Il me promet mille confidences; mais il -me semble qu'ensuite d'un tel discours il doit dire, comme l'abbé -d'Effiat: _Je ne sais si je me fais bien entendre_. Tout ceci entre -nous, s'il vous plaît, et sans retour.» - - [830] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (3 et 24 juillet 1680), t. VII, p. - 95-129, édit. G. Conférez ces _Mém. sur Sévigné_, t. IV, p. 127. - -Sévigné conserva longtemps les inclinations de sa jeunesse, et ne -termina sa carrière amoureuse que lorsque le mariage en eut fait un tout -autre homme. Jusqu'alors madame de Sévigné, dans ses lettres à sa fille, -paraît toujours tourmentée non de ce que son fils a des maîtresses, mais -de ce qu'il les choisit mal. «J'attendais mon fils, dit-elle. Je croyais -donc le voir à chaque instant dans ces bois; mais devinez ce qu'il a -fait? Il a traversé je ne sais par où, et s'est trouvé à Rennes, où il -me mande qu'il sera jusqu'au départ de madame de Chaulnes. Il me paraît -qu'il a voulu faire cette équipée pour mademoiselle de Tonquedec: il -sera bien embarrassé, car mademoiselle de la Coste n'en jette pas moins -sa part aux chiens. Le voilà donc entre l'orge et l'avoine, mais la plus -mauvaise orge et la plus mauvaise avoine qu'il pût jamais trouver. Que -voulez-vous que j'y fasse? C'est en pareil cas que je suis toujours -résignée[831].» - - [831] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (18 août 1680), t. VII, p. 168, édit. G. - -La préférence avouée qu'elle donnait à sa fille dans son affection -l'obligeait envers ce fils si bon, si tendre pour elle à de grands -ménagements. Aussi elle écrit de Paris à madame de Grignan: «Mon fils -est aux Rochers, solitairement... Il vous aime tendrement, il en jure sa -foi; je conserverai entre vous l'amour fraternel, ou j'y périrai[832].» - - [832] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (18 octobre 1679), t. VI, p. 160, édit. - G. - -Elle ne courait pas ce danger, et pour réussir il ne lui fallait pas -faire de grands efforts. Si Sévigné était un amant faible et inconstant, -incapable d'inspirer comme de ressentir une forte passion, il n'exista -jamais[833] un fils plus tendre et plus dévoué, un frère plus généreux, -plus aimant, un époux plus fidèle et plus attaché. Pendant cet hiver que -madame de Sévigné fut forcée de passer aux Rochers, elle put -reconnaître, par les soins et les attentions de son fils, combien elle -en était aimée. Elle fut alors assaillie par bien des peines. Sévigné ne -pouvait les faire disparaître, mais il parvint à la soulager dans -toutes: il fut à la fois son confident, son lecteur, son garde-malade et -un compagnon charmant. «Mon fils, dit-elle, nous amuse et nous est -très-bon; il prend l'esprit des lieux où il est, et ne transporte de la -guerre et de la cour, dans cette solitude, que ce qu'il en faut pour la -conversation[834].» - - [833] Voyez la Lettre inédite de SÉVIGNÉ _à madame de Grignan, sa - sÅ“ur, sur les affaires de leur maison_, publiée par M. - Monmerqué; Paris, Dondey-Dupré, 1847, in-8º (24 pages). - - [834] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 décembre 1675), t. IV, p. 242, édit. - G. - -De tous les tourments qu'éprouvait madame de Sévigné, le plus vif était -celui qu'elle se faisait à elle-même par son amour pour sa fille. Elle -la savait enceinte, et le moindre retard de la poste lui causait des -inquiétudes mortelles. Ce sujet revient souvent sous sa plume, et elle -sait admirablement en varier l'expression. Madame de Grignan accoucha, -avant terme, d'un fils qui ne vécut que quelques mois. Sa mère lui -écrit: - -«Si on pouvait avoir un peu de patience, on épargnerait bien du chagrin. -Le temps en ôte autant qu'il en donne. Vous savez que nous le trouvons -un vrai brouillon, mettant, remettant, rangeant, dérangeant, imprimant, -effaçant, approchant, éloignant, et rendant toutes choses bonnes ou -mauvaises, et quasi toujours méconnaissables. Il n'y a que notre amitié -que le temps respecte et respectera toujours. Mais où suis-je, ma fille? -Voilà un étrange égarement; car je veux dire simplement que la poste me -retient vos lettres un ordinaire, parce qu'elle arrive trop tard à -Paris, et qu'elle me les rend au double le courrier d'après; c'est donc -pour cela que je me suis extravaguée comme vous voyez. Qu'importe? en -vérité, il faut un peu, entre bons amis, laisser trotter les plumes -comme elles veulent: la mienne a toujours la bride sur le cou[835].» - - [835] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 novembre et 11 décembre 1675), t. - IV, p. 216, 239, 242, édit. G. - -Ainsi nul arrêt, nul intervalle entre ces lignes qu'elle écrivait avec -tant de rapidité; et on s'aperçoit, par la différence des lettres -qu'elle a dictées et de celles qu'elle a écrites elle-même, qu'elle -avait besoin de s'aider du travail de ses doigts pour entretenir ses -pensées, et que son imagination ne se retraçait plus les choses avec -d'aussi vives couleurs quand elle se trouvait forcée de se servir d'une -autre main que la sienne. Hélas! cette nécessité devait bientôt surgir, -quoiqu'elle ne la soupçonnât point encore. - -Le mois de décembre était doux et sec, et elle en jouissait encore avec -délices, au milieu de ses belles allées[836] du Mail, surtout dans ces -bois «dont l'air admirable nourrit le teint comme à Livry, hormis qu'il -n'y a point de serein[837].» Mais elle ne se bornait pas aux oisives -jouissances de ses rêveuses promenades, et elle s'occupait -très-activement des embellissements de son parc. «Je m'amuse, -dit-elle[838], à faire abattre de grands arbres. Le tracas que cela fait -représente, au naturel, ces tapisseries où l'on peint les ouvrages de -l'hiver: des arbres qu'on abat, des gens qui scient, d'autres qui font -des bûches, d'autres qui chargent une charrette, et moi au milieu, -voilà le tableau. Je m'en vais faire planter; _car que faire aux -Rochers, à moins que l'on ne plante_[839]? - - [836] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (29 décembre 1675), t. IV, p. 278, édit. - G. - - [837] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (11 décembre 1675), t. IV, p. 245, édit. - G. - - [838] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 novembre 1675), t. IV, p. 215, édit. - G. - - [839] Car que faire en un gîte, à moins que l'on ne songe? LA - FONTAINE, _le Lièvre et les Grenouilles_, II, 14. - -«Nous avons (écrit-elle encore au beau milieu de janvier) -un admirable hiver; je me promène tous les jours, et je fais quasi un -nouveau parc autour de ces grandes places du bout du Mail. J'y fais -planter quatre rangs d'allées; ce sera une très-belle chose: tout cet -endroit est uni et défriché[840].» - - [840] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (12 janvier 1676), t. IV, p. 308 et 309, - édit. G. - -Sans les affaires, et surtout la hâte d'un procès qui l'appelait à -Paris, elle n'aurait pu se résoudre à quitter son aimable désert[841]; -mais elle avait un compte à terminer en Bretagne avec M. de Meneuf, -président au parlement de Rennes, qui lui devait et refusait de payer la -totalité de sa dette, parce qu'il voulait qu'on lui fit remise de cinq -ou six mille francs, somme à laquelle il n'avait aucun droit. Le _Bien -bon_ termina, avec son habileté ordinaire, cette contestation à -l'avantage de madame de Sévigné. Elle fut payée du président Meneuf. «Ce -président, écrit-elle à sa fille, m'est venu voir... Il avait avec lui -un fils de sa femme, qui a vingt ans, et que je trouvai, sans exception, -la plus agréable et la plus jolie figure que j'aie jamais vue. J'allais -dire que je l'avais vu à cinq ou six ans, et j'admirais, comme M. de -Montbazon, qu'on pût croître en si peu de temps. Sur cela il sort une -voix terrible de ce joli visage, qui vous plante au nez, d'un air -ridicule, _que_ _mauvaise herbe croît toujours_. Voilà qui fut fait, je -lui trouvai des cornes. S'il m'eût donné un coup de massue sur la tête, -il ne m'aurait pas plus affligée; je jurai de ne plus me fier aux -physionomies: - - Non, non, je le promets, - Non, je ne m'y fierai jamais[842].» - - [841] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (15 décembre 1675), t. IV, p. 250, édit. - G. - - [842] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (17 novembre 1675), t. IV, p. 299-10, - édit. G. - -Cependant, malgré le plaisir qu'éprouvait madame de Sévigné à diriger -ses travaux, à respirer le bon air de ses bois, loin des exigences de la -cour et de la ville, affranchie de l'ennui et de la fatigue des visites, -de l'importunité de celles qu'on lui faisait et de l'inquiétude de -celles qu'elle ne faisait pas[843], elle comptait dans le cours du mois -de février se rendre à Paris, où l'appelaient les affaires de madame de -Grignan et les siennes, ainsi que celles du bon abbé[844]; mais elle ne -put exécuter sa résolution, et fut obligée de passer l'hiver entier aux -Rochers. Sa robuste santé, qui déjà dans l'automne précédent avait reçu -de fortes atteintes[845], succomba entièrement sous un rhumatisme -général, accompagné de fièvre. Elle eut, ainsi que disait son fils, une -maladie rude et douloureuse, la première qui l'ait atteinte en sa -vie[846]. Il est presque certain que l'habitude qu'elle avait prise de -demeurer dans les allées de son mail «au delà de l'entre-chien et loup,» -a contribué à aggraver son mal et à mettre ses jours en danger[847]; -mais cependant on doit remarquer que son cousin Bussy et Louis XIV, tous -deux doués comme elle d'une forte constitution, eurent aussi la fièvre -vers le même temps[848]. - - [843] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (1er décembre 1675), t. IV, p. 225, - édit. G. - - [844] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (12 janvier 1676), t. IV, p. 309, édit. - G. - - [845] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (7 août 1675), t. III, p. 503, édit. G. - - [846] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (21 janvier 1676), t. IV, p. 321, édit. - G. - - [847] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (14 décembre 1675), t. IV, p. 248, édit. - G. - - [848] _Suite des Mémoires du comte_ DE BUSSY-RABUTIN, ms. de - l'Institut, p. 157.--PELLISSON, _Lettres historiques_ (8 et 10 - octobre 1675), t. II, p. 423, 424. - -La maladie de madame de Sévigné dura quarante jours[849]. Sa fièvre -s'apaisa; et aussitôt qu'elle fut hors de danger, dans son lit de satin -jaune et dans sa petite alcôve flanquée de deux cabinets, elle dicta à -son fils, qui ne l'avait pas quittée, une lettre pour madame de Grignan: -elle voulut la rassurer contre les craintes que Sévigné n'avait pu -parvenir à calmer durant ces longs jours de luttes et de souffrance. - - [849] SÉVIGNÉ, _Lettr._ (21, 27, 29 janv. 1676), t. IV, p. 321, - 323, 326, éd. G. - -«Il est donc vrai que depuis cette sueur, à la suite de quelques autres -petites, je me trouve sans fièvre et sans douleur! Il ne me reste plus -que la lassitude du rhumatisme. Vous savez ce que c'est pour moi d'être -seize jours sur les reins, sans pouvoir changer de situation. Je me suis -rangée dans ma petite alcôve, où j'ai été très-chaudement et -parfaitement bien servie. Je voudrais bien que mon fils ne fût pas mon -secrétaire en cet endroit, pour vous dire ce qu'il a fait en cette -occasion. Ce mal a été fort commun dans ce pays; et ceux qui ont évité -la fluxion sur la poitrine y sont tombés; mais pour vous dire vrai, je -ne croyais pas être sujette à cette loi commune; jamais une femme n'a -été plus humiliée ni plus traitée contre son tempérament. Si j'avais -fait un bon usage de ce que j'ai souffert, je n'aurais pas tout perdu; -il faudrait peut-être m'envier; mais je suis impatiente, ma fille, et je -ne comprends pas comment on peut vivre sans pieds, sans jambes, sans -jarrets et sans mains. Il faut que vous pardonniez aujourd'hui cette -lettre à l'occupation naturelle d'une personne malade; c'est à n'y plus -revenir: dans peu de jours je serai en état de vous écrire comme les -autres.» - -Madame de Sévigné se trompait: à la fièvre succéda une enflure générale, -plus forte aux mains que dans le reste du corps, et elle continua -pendant quelque temps encore à user des secours de son fils, qui -cependant put la quitter pour aller à Paris traiter de sa charge de -guidon avec le jeune de Viriville[850]. Mais quoiqu'elle se portât dès -lors de mieux en mieux, ses mains ne désenflèrent que lentement. Alors -la jeune fille de la dame voisine des Rochers, dont nous avons parlé -comme la rivale préférée de la du Plessis, fut pour elle «le petit -secrétaire aimable et joli qui vint au secours de sa main engourdie et -tremblante[851].» Ses lettres à madame de Grignan devinrent plus -longues, plus _jaseuses_ et plus _abandonnées_, soit parce que sa santé -s'améliorait, soit qu'elle craignît d'ennuyer son fils en le forçant -d'écrire longuement sur sa maladie, soit qu'elle éprouvât quelque gêne à -rendre le _frater_ confident de son excessive tendresse pour sa -sÅ“ur[852]. - - [850] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (20 février, 14 et 15 mars 1675), t. IV, - p. 351, 367, 370, édit. G. Conférez aussi la _Vie de la - Fontaine_, et SÉVIGNÉ, _Lettres_ (18 mars 1676), t. IV, p. 371, - édit. G. - - [851] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (27 janvier 1676), t. IV, p. 323, édit. - G. - - [852] SÉVIGNÉ _Lettres_, (8, 11, 14 et 18 mars 1676), t. IV, p. - 359, 363, 365. - -Vers la fin de mars, elle commence à s'intéresser à ce qui se passe à -Paris et à la cour; et, se ressouvenant de cette maîtresse de Bussy dont -elle avait tant à se plaindre, elle parle à madame de Grignan d'un -mariage qui, tel que celui de madame de Courcelles, dont il a été -question dans ces Mémoires, montre jusqu'où Louis XIV poussait le -despotisme quand il s'agissait de favoriser par des alliances ceux de -ses généraux et de ses officiers qui se distinguaient à son service. «Le -mariage, dit-elle, du duc de Lorges avec Geneviève de Fremont (fille de -Nicolas de Fremont, seigneur d'Auneuil, garde du trésor royal) me paraît -admirable; j'aime le bon goût du beau-père. Mais que dites-vous de -madame de la Baume, qui oblige le roi d'envoyer un exempt prendre -mademoiselle de la Tivolière d'entre les mains de père et mère, pour la -mettre à Lyon chez une de ses sÅ“urs? On ne doute point qu'en s'y -prenant de cette manière elle n'en fasse le mariage avec son fils[853].» - - [853] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (18 mars 1676), t. IV, p. 310-11; et - conférez t. I, p. 184-187; t. III, p. 195, édit. G.--CHOISY, - _Mémoires_, t. LXIII, p. 418. - -A ce sujet, le chevalier Perrin, le premier éditeur des lettres de -madame de Sévigné, fait observer qu'ainsi que madame de Sévigné l'avait -prévu Camille de la Baume, comte de Tallard, depuis maréchal de France -et duc d'Hostun, épousa, par contrat du 28 décembre 1677, -Marie-Catherine de Groslée de Viriville de la Tivolière. Il semble qu'il -était dans la destinée de madame de la Baume de toujours nuire à madame -de Sévigné sans en avoir l'intention, car ce mariage projeté de Tallard -empêcha de Viriville d'acheter la charge de Sévigné. Et madame de -Sévigné dit à sa fille: «Voilà nos mesures rompues; ne trouvez-vous pas -cela plaisant, c'est-à -dire cruel? Madame de la Baume frappe de -loin[854].» - - [854] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 mars 1676), t. IV, p. 379, édit. G. - -Enfin madame de Sévigné annonce son départ des Rochers; mais c'est -encore avec la main de son petit secrétaire; car les siennes, toujours -enflées, lui refusaient le service. «Je me porte très-bien, dit-elle; -mais pour mes mains, il n'y a ni rime ni raison. Je me sers donc de la -petite personne pour la dernière fois; c'est le plus aimable enfant du -monde. Je ne sais ce que j'aurais fait sans elle: elle me lit très-bien -ce que je veux; elle écrit comme vous voyez; elle m'aime; elle est -complaisante; elle sait me parler de madame de Grignan. Enfin, je vous -prie de l'aimer sur ma parole[855].» - - [855] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (22 mars 1676), t. IV, p. 373, édit. G. - -On regrette de ne pas connaître le nom de cette jeune fille, à laquelle -madame de Sévigné a su nous intéresser en nous faisant connaître l'amour -qu'elle lui avait inspiré. Dans la lettre datée de Laval le mardi 24 -mars, jour où elle partit des Rochers pour se rendre à Paris, elle dit: - -«Et pourquoi, ma fille, ne vous écrirais-je pas aujourd'hui, puisque je -le puis? Je suis partie ce matin des Rochers par un chaud et charmant -temps; le printemps est ouvert dans nos bois. La petite fille a été -enlevée dès le grand matin, pour éviter les grands éclats de sa douleur: -ce sont des cris d'enfant qui sont si naturels qu'ils en font pitié. -Peut-être que dans ce moment elle danse; mais depuis deux jours elle -fondait: elle n'a pas appris de moi à se gouverner. Il n'appartient qu'à -vous, ma très-chère, d'avoir de la tendresse et du courage[856].» - - [856] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (24 mars 1676), t. IV, p. 377, édit. G. - -Rien ne nous prouve mieux que ces lignes combien le cÅ“ur de madame de -Sévigné était souvent blessé par la froide raison de sa fille et par le -défaut de cette faculté sympathique qu'on nomme sensibilité, cause de -tant de jouissances et encore plus de tant de tourments. - -Quoique madame de Sévigné se trouvât bien du changement d'air, que sa -santé se rétablît assez promptement, sa main, continuant à être gonflée -et tremblante, la forçait toujours à dicter ses lettres; néanmoins, -quand elle écrivait à sa fille, elle aimait mieux s'en servir que -d'employer la main de l'ami le plus intime. Rendue à Paris, elle y -trouva Corbinelli, qui un jour, pour la soulager, écrivit dans une de -ses lettres les nouvelles qu'elle voulait mander à madame de Grignan; -mais en reprenant la plume elle ajoute aussitôt: «Je n'aime point à -avoir des secrétaires qui aient plus d'esprit que moi; ils font les -entendus, je n'ose leur faire écrire toutes mes sottises. La petite -fille m'était bien meilleure[857].» - - [857] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 avril 1676), t. IV, p. 383, édit. G. - -C'est le 8 avril que nous la retrouvons à Paris écrivant ainsi à madame -de Grignan. Elle avait passé huit jours au château de Malicorne, où elle -s'arrêta comme elle avait fait cinq ans auparavant[858]. Là elle fut -choyée par la marquise de Lavardin comme une amie convalescente qu'on -avait craint de perdre. Les Lavardin étaient de l'illustre maison de -Beaumanoir, et Coulanges avait dans ses chansons célébré la beauté de la -grande salle du château de Malicorne, que décoraient tous les portraits -des Beaumanoir et des personnages illustres avec lesquels cette famille -avait formé des alliances[859]. Madame de Sévigné et madame de Lavardin -vivaient à une époque trop féconde en grands événements, en hommes -illustres pour avoir envie de s'entretenir des siècles passés. Le -souvenir de Turenne ne s'effaçait pas, et les regrets de sa mort ne -pouvaient se calmer; la publication de l'oraison funèbre de ce héros par -Fléchier les avait encore ranimés. Madame de Sévigné, que sa maladie -avait empêchée de se mettre au courant des événements qui survenaient et -des nouveautés littéraires, ne connaissait pas ce discours, -chef-d'Å“uvre de ce très-élégant et très-spirituel écrivain. Elle avait -entendu, elle avait lu l'Å“uvre de Mascaron sur le même sujet: «C'est -une action pour l'immortalité, avait-elle dit;» et elle s'était figuré -que l'éloquence de l'évêque de Tulle ne pouvait être surpassée ni même -égalée[860].» Mais à Malicorne elle changea d'avis. «En arrivant ici -(écrit-elle à son gendre)» madame de Lavardin me parla de l'oraison -funèbre de Fléchier; nous la fîmes lire; et je demande mille et mille -fois pardon à M. de Tulle; mais il me parut que celle-ci était au-dessus -de la sienne: je la trouve plus également belle partout. Je l'écoutai -avec étonnement, ne croyant pas qu'il fût possible de trouver encore de -nouvelles manières d'exprimer les mêmes choses; en un mot, j'en fus -charmée[861].» - - [858] Conférez _Mém. sur madame_ DE SÉVIGNÉ, IVe part., p. 3, ch. - I. - - [859] DE COULANGES, _Chansons_, ms. aut. de la Bibl. nat., p. 66 - verso. Dans la protestation contre le pape Innocent XI (Paris, - 1688, in-18, p. 3), Lavardin se nomme lui-même Henri-Charles, - sire de Beaumanoir, marquis de Lavardin. - - [860] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 et 10 novembre 1675), t. IV, p. - 194-196.--_Ibid._ (1er janvier 1676), t. IV, p. 285, édit. G. - - [861] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 mars 1676), t. IV, p. 378 et 380, - édit. G. - -Madame de Sévigné était partie de Paris le 9 septembre[862] (1675); elle -y était revenue le 7 ou 8 avril de l'année suivante (1676): elle était -donc restée sept mois absente de la capitale, du centre des affaires et -des nouvelles; et comme dans cet intervalle madame de Grignan était -informée de tout aussi rapidement qu'elle-même, madame de Sévigné -s'abstint dans ses lettres de lui en parler, ou elle ne lui en parla que -brièvement. Durant ces sept mois néanmoins de grands événements eurent -lieu; la guerre sur terre et sur mer se continua, glorieuse pour la -France, entre Louis XIV et les puissances de l'Europe coalisées contre -lui. Le 14 septembre, le prince de Condé fit lever le siége de Saverne; -trois jours après mourut à Birkenfeld Charles IV, duc de Lorraine, et la -France fut délivrée d'un ennemi dangereux, d'un allié plus dangereux -encore[863]. Le 7 octobre l'armée française envahit le pays de Waës. -Cependant les négociations se poursuivaient, et l'on convint de prendre -Nimègue pour le lieu de réunion d'un congrès européen. Nimègue devait -devenir un lieu célèbre par la conclusion d'une paix que toutes les -puissances désiraient avec ardeur et qui fut pourtant encore longtemps -différée. Les prétentions variaient selon les victoires ou les défaites. -La douceur de l'hiver permettait de continuer les opérations de la -guerre. Le 9 janvier 1676 Duquesne défit la flotte espagnole près des -îles de Strombali; le 22 mars on rasa la citadelle de Liége; le 25 du -même mois le maréchal de Vivonne tailla en pièces sept mille hommes près -de Messine. C'est par madame de Grignan que madame de Sévigné apprend -cet exploit de son ami _le gros Crevé_; et l'on voit, par ce qu'elle en -dit, combien elle détestait ces tueries: «Quelle rage aux Messinois -d'avoir tant d'aversion pour les Français, qui sont si jolis! Mandez-moi -toujours toutes vos histoires tragiques, et ne vous mettez point dans la -tête de craindre le contre-temps de nos raisonnements: c'est un -mal que l'éloignement cause, et à quoi il faut se résoudre tout -simplement[864].» Vivonne s'était emparé de Messine; mais la licence des -troupes françaises occasionna des révoltes et des conspirations; il -fallut en venir à des rigueurs, à des massacres, enfin abandonner la -Sicile[865]. - - [862] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (9 septembre 1675), t. IV, p. - 87.--_Ibid._ (8 avril 1676), t. IV, p. 383, édit. G. - - [863] Sur le duc de Lorraine, conférez les _Mémoires sur - Sévigné_, 1re part., p. 347, 359, 401, 404, 405, 413, 418, 432, - 441; 2e part., p. 191, 394, 440, 441; 3e part., p. 200. - - [864] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (28 mars 1676), t. IV, p. 380, édit. G. - - [865] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (6 novembre 1675), t. IV, p. 190, édit. - G.--BOILEAU, _Å’uvres_, lettre au maréchal de Vivonne, t. IV, p. - 17-21. - -Le 26 avril la ville de Condé fut forcée par le roi, après huit jours de -siége[866]; le 12 mai Bouchain fut pris après huit jours de tranchée. Le -31 juillet Aire est pris en six jours par le maréchal d'Humières, qui, -le 9 août, s'empara aussi du fort de Linck. - - [866] PELLISSON, _Lettres historiques_ (22, 23, 24 et 27 avril - 1676, au camp devant Condé), t. III, p. 2-28. - -La nouvelle de la mort de Charles IV, duc de Lorraine, ne parvint à -Versailles, où était alors Louis XIV, que le 23 septembre; et madame de -Sévigné n'en parle dans une de ses lettres que quatre jours après[867]. -Pavillon ne s'est point écarté de l'histoire, quand il dit dans -l'épitaphe satirique de ce duc: - - Ci-gît un pauvre duc sans terres, - Qui fut jusqu'à ses derniers jours - Peu fidèle dans ses amours, - Et moins fidèle dans ses guerres. - - Il donna librement sa foi - Tour à tour à chaque couronne; - Il se fit une étrange loi - De ne la garder à personne. - - Trompeur même en son testament, - De sa femme il fit une nonne, - Et ne donna rien que du vent - A madame de Lillebonne[868]. - - [867] PELLISSON, _Lettres historiques_ (23 septembre 1675), p. - 415.--SÉVIGNÉ, _Lettres_ (29 septembre 1675), t. IV, p. 118, - édit. G. - - [868] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (15 octobre 1675), t. IV, p. 151, édit. - G.--PAVILLON, _Å’uvres_, 1715 et 1720, in-12. - -Madame de Lillebonne était la fille du duc de Lorraine; lorsqu'elle en -parlait, elle disait toujours _Son Altesse mon père_[869]. C'est -pourquoi madame de Sévigné, lorsqu'elle apprend cette grande nouvelle, -écrit à sa fille: «Mais n'admirez-vous point le bonheur du roi? On me -mande la mort de _Son Altesse royale mon père_, qui était un bon ennemi; -et que les Impériaux ont repassé le Rhin pour aller défendre l'empereur -des Turcs, qui le pressent en Hongrie. Voilà ce qui s'appelle des -étoiles heureuses; cela nous fait craindre en Bretagne de rudes -punitions[870].» Ainsi la Bretagne était à ce point désaffectionnée de -Louis XIV qu'elle désirait qu'il eût des revers pour qu'il fût plus -facile de s'opposer à son despotisme. - - [869] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (4 septembre 1675), t. IV, p. 77, édit. - G. - - [870] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (29 septembre 1675), t. IV, p. 119, - édit. G. - -Madame de Sévigné écrivit, au sujet de la mort du duc Charles IV, à -madame de Lillebonne et à sa belle-fille la princesse de Vaudemont. -Aimable, belle, discrète et dévouée, la princesse de Vaudemont avait été -fréquemment employée dans les négociations du duc Charles IV[871], et -elle fut de tout temps l'amie intime de madame de Grignan. Lorsque cette -princesse, longtemps après l'époque dont nous traitons, résidait à Rome -avec son mari, pensionnée par l'Espagne, et que toute liaison avec la -France lui était interdite, elle eut durant le conclave une entrevue -secrète avec Coulanges, au risque de se rendre suspecte au parti -espagnol et d'être privée de ses revenus. Elle ne voulait que -s'entretenir avec lui de madame de Grignan et le charger de lui -transmettre l'assurance de sa constante amitié[872]. - - [871] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 février 1672), t. II, p. - 394.--_Ibid._ (6 avril 1672), t. II, p. 451, édit. G. - - [872] DE COULANGES, _Mémoires_ (1820, édit. in-12).--SÉVIGNÉ, - _Lettres_ (15 mai 1691), t. X, p. 378, 379, édit. G. - -Quand madame de Sévigné rentra dans Paris, le roi, qui était resté à -Versailles depuis la fin de juillet de l'année précédente, allait en -partant emmener avec lui un grand nombre de ses amis. Néanmoins, à son -arrivée dans la capitale, elle trouva encore le chevalier de Grignan (le -chevalier de la Gloire), qui commandait le régiment de Grignan, et -s'était si fort distingué à Altenheim. «C'est un aimable garçon, -dit-elle; il cause fort bien avec moi jusqu'à onze heures. J'ai obtenu -de sa modestie de me parler de sa campagne; nous avons repleuré M. de -Turenne[873].» Elle apprend que le comte de Lorges, qui le 1er août -précédent repoussa l'ennemi au delà du Rhin, avait été nommé maréchal de -France; et elle dit, avec un petit sentiment d'envie pour son fils et -son cousin Bussy: «Le maréchal de Lorges n'est-il point trop heureux? -Les dignités, les grands biens et une très-jolie femme!... La fortune -est jolie, mais je ne puis lui pardonner les rudesses qu'elle a pour -nous[874].» - - [873] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 avril 1676), t. IV, p. 382.--_Ibid._ - (1er novembre 1671), t. II, p. 2-8.--_Ibid._ (7 août 1675), t. - III, p. 500, édit. G. - - [874] Conférez 3e part. de ces _Mémoires_, p. 291, chap. I, 1re - part.; p. 249, chap. IX. - -Elle apprit en même temps et manda à sa fille dans la même lettre, la -première de Paris depuis son arrivée, une anecdote qui présageait un -changement de fortune dans la famille de Grignan. Le duc de Vendôme, -nommé, encore enfant, gouverneur de Provence, et dont le comte de -Grignan tenait la place comme lieutenant général[875], avait fait sa -première campagne en Hollande en 1672, âgé seulement de seize ans: il en -avait vingt-deux en 1676, et devait partir en même temps que le roi pour -la campagne de Flandre; mais, aimant le plaisir et se trouvant gêné à la -cour, il manifesta le désir d'aller occuper son gouvernement. - - [875] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 avril 1676), t. IV, p. 382, édit. G. - -«M. de Vendôme dit au roi, il y a huit jours: Sire, j'espère qu'après -cette campagne Votre Majesté me permettra d'aller dans le gouvernement -qu'elle m'a fait l'honneur de me donner.--Monsieur, lui dit le roi, -quand vous saurez bien gouverner vos affaires, je vous donnerai le soin -des miennes[876].» - - [876] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (8 avril 1676), t. IV, p. 388, édit. G. - -Heureusement pour M. de Grignan et madame de Sévigné que le duc de -Vendôme, au lieu d'être simplement un aimable débauché, prit goût au -métier de la guerre, devint un grand général, et abandonna longtemps au -comte de Grignan le soin de gouverner la Provence[877]. Turenne mort, -Condé accablé par l'âge et les infirmités, Louis XIV fatigué, Vendôme -s'annonçait dès lors comme devant être le héros de cette jeune noblesse -brillante, frondeuse et dissolue qui, par sa bravoure et ses talents -militaires, soutint le trône et l'État. Mais, mécontente, elle sépara sa -gloire de celle de son roi, elle déserta sa cour, elle discrédita sa -personne et son gouvernement, et commença le déclin de la monarchie -fondée par Henri IV, Richelieu et Louis XIV. La France et son roi -avaient dès cette époque, dans le stathouder de Hollande, un ennemi -puissant par son génie politique: il était de la race des Cromwell, des -Ximenès, des Richelieu, des Mazarin; redoutable par son caractère -énergique, patient et persévérant comme celui du peuple dont il réglait -les destinées. Après chaque défaite des alliés, après chaque victoire -des armées françaises, Guillaume redoublait d'efforts pour empêcher -Louis XIV de conclure une paix glorieuse. Comme Pitt quand il parlait de -Bonaparte, Guillaume disait aux souverains et aux peuples: «La guerre, -la guerre! toujours la guerre! c'est le seul moyen de salut.» Ce n'était -pas seulement par ses armes que le prince d'Orange s'opposait aux -progrès de la puissance de Louis le Grand; c'était par des écrits qui -formaient un piquant contraste avec les louanges qu'on lui donnait. -L'industrieuse habileté des imprimeurs de Hollande avait su exploiter à -leur profit les productions littéraires de la France: les éditions des -livres français sorties de leurs presses, souvent plus belles, moins -coûteuses et non mutilées par la censure, étaient partout préférées aux -éditions originales; par là elles contribuaient à accroître l'influence -de la littérature, des modes, des usages de la France. Mais Guillaume -sut diriger contre Louis XIV cette universalité de la langue française, -conquête des beaux génies protégés par ce monarque et gloire éternelle -de son règne. Guillaume savait que la presse, comme la lance d'Achille, -guérit les blessures qu'elle a faites; à la fois arme et bouclier propre -également à protéger contre les coups d'un ennemi ou à le frapper à -mort. Par les soins de ce chef de la coalition et par ses -encouragements, l'Europe fut inondée d'écrits contre la France et contre -son roi. Un grand nombre n'étaient que des libelles infâmes, calomnieux -et orduriers contre Louis XIV et les hauts personnages de sa cour; mais -plusieurs aussi étaient très-habilement rédigés, et empruntaient le -langage ferme et éloquent de l'histoire pour retracer les torts de la -France et de son monarque et les rendre odieux aux souverains et aux -peuples de l'Europe. Dans ce nombre est un très-court écrit que -Guillaume, en cette même année 1676, répandit avec profusion dans les -Pays-Bas, où quelques provinces qui avaient appartenu autrefois à -l'Espagne inclinaient à se détacher de la Hollande et à se donner à la -puissance prépondérante, comme seule capable de les protéger contre les -maux de la guerre. Ce court écrit était intitulé _Mauvaise foy ou -violences de la France_. - - [877] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (19 juillet 1677), t. V, p. 291.--_Ibid._ - (18 août 1680), t. VII, p. 164, 165, édit G. - -L'auteur de cet écrit (anonyme inconnu) commence par rappeler les -envahissements de Henri IV, de Richelieu, de Louis XIV, et la politique -tour à tour insidieuse et menaçante de la France, toujours la même sous -trois règnes différents, toujours tendant au même but, l'extension de sa -domination sur toute l'Europe. Il retrace en termes énergiques -l'incendie du Palatinat et toutes les cruautés commises par les Français -dans les guerres qu'ils ont suscitées. Il inspire ainsi au bas peuple, -qui souffre le plus de la suite de ces désastres, la crainte de la faim -et de la mort. Aux nobles flamands il prédit les affronts et les -humiliations qui les attendent, en renouvelant le souvenir des indignes -traitements qu'ont éprouvés le prince de Ligne, les comtes de Solre et -toute la noblesse flamande; aux bourgeois des villes il leur retrace -tout ce qu'amèneront de désastreux pour leur bonheur domestique les -mÅ“urs corrompues, les modes, le luxe, les usages et les habitudes -licencieuses des Français, leur soumission aveugle à un despote, la -servilité dont ils se glorifient, leur haine et leur mépris pour les -républicains. Il n'oublie pas de leur tracer le tableau des avanies, des -humiliations, des affronts que seront forcés d'endurer leurs -respectables magistrats. Enfin il met toutes les classes en garde contre -les déceptions du vainqueur, qui promet de respecter leurs franchises et -qui les violera toutes; et il les exhorte à n'espérer d'autres remèdes à -tant de maux que dans leur courage et dans une opiniâtre résistance. - -«Mais, quand même, dit-il, notre lâcheté serait si grande, la foi si -légère et l'honneur si faible que de céder à la force ou aux charmes de -la France, nos chaînes n'en seraient pas plus douces, la liberté plus -réelle. - -«Si la Guyenne, le Languedoc, la Bourgogne, la Bretagne, le Roussillon -et les autres provinces ne sont plus que l'ombre de ce qu'elles étaient -sous leurs princes légitimes, doit-on s'attendre à un repos qu'elles ne -goûtent pas sous la pesanteur des tailles, des gabelles et de la -violence des édits qui les accablent? Et les nôtres n'étant ni -héréditaires ni dévolues par un droit fixe à la couronne, mais trahies -ou volontairement esclaves, seront-elles traitées moins inhumainement et -avec plus de modération? - -«Est-ce que l'on dormira ou que l'on fera un voyage en repos? Les modes -de France et ses libertés odieuses ne nous seront-elles pas aussi -offensantes? Leurs visites à sept heures le matin, à minuit et aux -ruelles d'un lit et d'une misérable chambre que l'on se réserve, ne nous -feront-elles pas souvenir de notre tranquillité passée, par la tyrannie -présente? Le faible sexe sera exposé à ces outrages; le nôtre aura les -siens, et n'en sera plus exempt. - -«Outre la honte de voir ces choses, on nous défendra jusqu'au murmure et -le moindre soupir. - -«On voudra encore les sommes entières que l'on demande; et si quelqu'un -du magistrat en murmure ou en dit son sentiment avec la liberté passée, -on lui donnera cent coups, ou un pied en l'endroit même que l'on fit à -un bourgmestre en Hollande, en lui disant piquamment: _Allez, monsieur -le souverain_! - -«La cour de France tient que rien ne lui est défendu pour troubler ses -voisins et y semer la division; qu'il y a une secrète joie à y faire le -crime; que la pitié est une vertu lâche, et qu'elle renverse les -couronnes; que la crainte en est l'appui, l'impiété la base; que les -armes inspirent le respect; que les troupes sont d'admirables avocats, -et qu'elles plaident bien une cause; que le droit canon l'emporte sur -les autres droits; que la justice est un fantôme, la raison une chimère, -le mariage une bagatelle, la foi des traités une illusion, ses paix une -amorce, ses congrès pleins de mystères, ses conférences insidieuses, et -ses serments un piége agréable, le jouet des enfants, l'appât d'un dupe -et le charme d'un innocent[878].» - - [878] _Mauvaise foy ou violences de la France_, avec une - exhortation sincère au peuple des Pays-Bas sur leur constance; - Villefranche, Jean Petit, 1677, in-18 (29 pages), pages 35, 37, - 39, 41, 46, 47. - -Ces violentes diatribes ne produisirent leur effet que plus tard. Au -temps où nous sommes parvenu, il restait devant le grand roi vingt -années encore de prospérité, de grandeur et de gloire. Nous n'aurons -donc point à nous occuper, dans la suite de ces Mémoires (si nous leur -donnons une suite), des désastres et des malheurs qui assombrirent le -dernier période de ce long règne. Le commencement de ce période -coïncide, plus ou moins exactement, avec l'époque de la mort de Racine, -de la Fontaine, de madame de Sévigné et aussi avec la naissance de -Voltaire, auquel Ninon tendit la main pour l'introduire (l'écolier -merveilleux!) dans ce nouveau siècle, dont elle ne vit pas finir le -premier lustre[879]. - - [879] Conférez la 1re partie de ces _Mémoires sur Sévigné_, 2e - édit., p. 236, 249.--_Hist. de la vie et des ouvrages (de) la - Fontaine_, 3e édit., p. 440. - - - - -NOTES - -ET - -ÉCLAIRCISSEMENTS. - - - - -NOTES - -ET - -ÉCLAIRCISSEMENTS. - - -CHAPITRE PREMIER. - - Page 5, ligne 20: Et composait pour elle des madrigaux. - -Tous paraissent avoir été des impromptus. Gayot de Pitaval, dans sa -_Bibliothèque des gens du monde_, 1726, in-12, t. I, p. 87, a cité de -Montreuil un impromptu qui vaut mieux qu'aucun de ceux que renferme son -recueil. Il est remarquable qu'aucune des femmes auxquelles s'adressent -les madrigaux de Montreuil n'a été nommée par lui, si ce n'est _madame -de Sévigny_. Son nom se trouve deux fois dans ce recueil: la première, -en tête du madrigal sur le jeu de colin-maillard, que j'ai cité; la -seconde, dans une chanson qu'il composa pour elle et qui se termine -ainsi: - - Sévigny, vos yeux pleins d'attraits - Éblouissent les nôtres; - Et quand l'amour n'a plus de traits - Il emprunte les vôtres. - -(_Å’uvres de M. de Montreuil_, p. 339, édit. 1671; p. 500 de l'édit. de -1666.) Un portrait bien gravé de M. de Montreuil accompagne cette -première édition, la plus belle. Voyez, pour d'autres éclaircissements -sur Matthieu de Montreuil, la note de la page 398, 2e partie de ces -_Mémoires_, 2e édit. - - Page 6, ligne 19: Il vint _incognito_ à Paris. - -Le curieux récit du voyage clandestin que, d'après les instigations de -MADAME, l'évêque de Valence fit à Paris, où il fut arrêté comme -faux-monnayeur, se trouve dans les Mémoires de Choisy; mais ce qu'on y -lit sur le voyage de ce prélat en Hollande, pour la suppression du -libelle des _Amours de_ MADAME, n'est pas exact, ainsi que le passage -suivant des _Mémoires_ inédits de Daniel de Cosnac, que Barbier a -transcrit dans son _Dictionnaire des anonymes et des pseudonymes_, 1823, -in-8º, p. 61 (art. 7294, _Histoire amoureuse des Gaules_): - -«L'assemblée du clergé finie, je pris la résolution d'aller dans mon -diocèse. Avant mon départ, j'appris par madame de Chaumont qu'un -manuscrit portant pour titre: _Amours de_ MADAME et _du comte de -Guiche_, courait par Paris, et s'imprimait en Hollande. MADAME -appréhendait que ce livre, plein de faussetés et de médisances -grossières, ne vînt à la connaissance de MONSIEUR par quelque maladroit -ou malintentionné, qui peut-être envenimerait la chose. Elle m'en -écrivit pour lui en porter la nouvelle; elle en écrivit à madame de -Chaumont, qui était à Saint-Cloud, et moi à Paris. J'allai à -Fontainebleau, d'abord près MADAME, pour m'instruire plus amplement. -Elle me dit que Boisfranc (trésorier du prince) avait déjà dit la chose -à MONSIEUR sans sa participation; mais ce qui la touchait davantage, -c'était l'impression du manuscrit. J'envoyai exprès en Hollande un homme -intelligent, ce fut M. Patin (Charles Patin, le fils de celui dont on a -des lettres), pour s'informer de tous les libraires entre les mains de -qui ce libelle était. Il s'acquitta si bien de sa commission, qu'il fit -faire par les états généraux défense de l'imprimer, retira les dix-huit -cents exemplaires déjà tirés, et me les apporta à Paris; et il les -remit, par ordre de MONSIEUR, entre les mains de Merille. Cette affaire -me coûta beaucoup de peine et d'argent; mais, bien loin d'y avoir -regret, je m'en tins trop payé par le gré que MADAME m'en témoigna.» - -Je crois que la première édition du libelle dont parle Cosnac, ou de -celui qu'on a substitué à l'ouvrage original, s'il a été anéanti, est -dans le recueil intitulé _Histoires galantes_; Cologne, chez Jean le -Blanc (sans date, p. 424 à 464). Ce morceau est intitulé _Histoire -galante de M... et du comte de G..._ On trouve la même histoire dans -quelques exemplaires de l'_Histoire amoureuse des Gaules_; Liége, édit. -Elzevir, 250 pages. L'ouvrage, dans cette édition, est intitulé tout -crument _Histoire galante de M. le comte de Guiche et de_ MADAME (58 -pages). Une autre édition de ce libelle est dans le recueil intitulé -_les Dames illustres de notre siècle_; Cologne, chez Jean le Blanc, -in-12, 1682, p. 135-176. Ce morceau a pour titre _la Princesse, ou les -amours de_ MADAME. On le trouve encore, avec le même titre, dans le -recueil intitulé _Histoire amoureuse des Gaules, de M. de Bussy_, 1754, -5 vol. in-12, p. 130-186. Tout ces petits faits, curieux à connaître, -seront probablement éclaircis par la publication des Mémoires de Daniel -de Cosnac, que la Société de l'Histoire de France a livrés à -l'impression, et qui s'exécutent d'après deux manuscrits émanés de la -plume de l'évêque de Valence, mais différents en bien des points, parce -qu'ils ont été écrits à deux époques distinctes de la vie de -l'auteur.--Le premier volume des Mémoires de Cosnac est déjà imprimé, et -le second est annoncé comme très-avancé, dans les derniers bulletins de -la Société de l'Histoire de France. - - Pages 7 et 8, lignes dernière et première: Deux petits poëmes de - Marigny, l'un intitulé _l'Enterrement_, l'autre _le Pain bénit_. - -Ce dernier poëme est une satire contre les marguilliers de la paroisse -de Saint-Paul, sur laquelle demeurait madame de Sévigné. Il a été -imprimé avec ce titre: _le Pain bénit_, par l'abbé de Marigny, in-12 (23 -pages); une autre édition a été donnée par Mercier de Compiègne, -intitulée _le Pain béni_ (_sic_), _avec autres pièces fugitives_, par -Marigny; nouvelle édition, revue, corrigée et augmentée d'une notice sur -la vie et les ouvrages de l'auteur; Paris, Mercier, 1795, in-18 (82 -pages). La notice est inepte; mais ce petit volume est curieux par la -satire contre Marigny, pages 35 et 42, qui est du temps. - - Page 8, avant-dernière ligne: Il y a eu ici de plus honnêtes gens - que moi. - -Ne donnez pas à ces mots le sens qu'ils ont aujourd'hui. Dans la langue -du siècle de Louis XIV, cela veut dire: Il y a eu de plus hauts -personnages que moi, des gens plus considérables. - - Page 9, ligne 14: Ce fut le 15 août 1664 que madame de Sévigné alla - à Tancourt. - -Les souvenirs de ce voyage que fit madame de Sévigné éclairent beaucoup -l'histoire de Bussy et de son libelle. C'est dans cette année 1664 que -Bussy se montra le plus occupé de ses intrigues amoureuses et qu'il -composa le plus de vers galants. C'est alors qu'il lut, dans les -sociétés où se trouvaient M. et madame de Montausier, ses _Maximes -d'amour, questions, sentiments et préceptes_, transcrits en entier dans -ses _Mémoires_ (t. II, p. 22 à 281); c'est alors qu'il se montre si -satisfait de sa fortune et de madame de Monglat, sa maîtresse (p. 285), -et qu'il se plaint d'avoir dans M. de Monglat un mari trop commode. Il -rime à ce sujet une imitation de l'élégie 19, liv. II, des _Amours -d'Ovide_, et dit (p. 286): - - Si tu n'es pas jaloux pour ton propre intérêt, - Sois-le du moins, s'il te plaît, - Pour augmenter dans mon âme - L'amour que j'ai pour ta femme. - Je tiens qu'il faut être brutal - Pour pouvoir aimer sans rival. - A nous autres amants il faut de l'espérance. - Mais sans la crainte on n'a pas de plaisir; - On languit dans trop d'assurance, - Et les difficultés irritent les désirs. - -A la fin d'août 1664, madame de Sévigné nous fait voir Bussy dans sa -terre de Forléans, lui rendant de fréquentes visites, et évidemment -tâchant de la séduire et de réveiller les langueurs que lui faisait -éprouver son amour satisfait. Lui-même parle d'un voyage (p. 292) qu'il -fit en Bourgogne, pour se consoler d'une affaire qu'on lui avait faite -auprès du roi. Cette affaire était son _Histoire amoureuse des Gaules_, -dont le secret commençait à percer, mais qui ne contenait encore ni le -morceau sur madame de Sévigné ni celui sur madame de Monglat, dont il se -croyait alors exclusivement aimé. De Forléans, il se rendit à son -château de Bussy, où une lettre, en date du 10 octobre 1664, au duc de -Saint-Aignan, nous le montre installé. (_Mémoires_, t. II, p. 293.) -C'est alors qu'il apprit que madame de Monglat lui était infidèle, et -que, dépité de cette trahison et d'avoir échoué près de sa cousine, il -se retourna vers madame de la Baume. Pour lui rendre plus agréable la -lecture du manuscrit qu'il lui prêtait et lui prouver qu'il lui -sacrifiait madame de Monglat, il ajouta le portrait de Bélise (de madame -de Monglat). Madame de la Baume le trahit; et, sur une copie qu'elle -laissa ou qu'elle fit faire, le libelle fut imprimé en Hollande. Dès -lors se forma l'orage qui devait pour toujours mettre obstacle à -l'ambition de Bussy. Ce ne fut cependant qu'après le mois de mars 1665 -qu'il éclata. Bussy fut alors reçu de l'Académie française, et y -prononça son discours d'admission. Par un billet qu'il adressa au duc de -Saint-Aignan le 12 avril 1662, on voit que déjà le scandaleux libelle -était connu de plusieurs personnes.--Le roi fit arrêter Bussy le -vendredi 17 avril; et on le conduisit aussitôt à la Bastille, afin de le -dérober aux recherches du prince de Condé, qui voulait se porter contre -lui aux dernières violences. - - Page 9, ligne 17: Bussy, qui était alors à sa terre de Forléans, - vint la voir.--Page 10, ligne 5: Bourbilly.--Page 11, ligne 5: - Époisses. - -FORLÉANS était une seigneurie indépendante; c'était une annexe de la -paroisse de Montberteau, du diocèse de Langres, du doyenné de -Moutier-Saint-Jean, du bailliage et recette de Semur-en-Auxois. Ses -dépendances étaient Forléans, Plumeron et Villers-Fremoy, et encore la -justice à Changy (GARNAU, _Description du gouvernement de Bourgogne_, 2e -édit., p. 486, 487) Du temps d'Expilly, en 1764, on ne comptait à -Forléans que vingt-huit feux, à peu près cent vingt habitants; en 1837, -il y avait deux cent dix-huit habitants. - -BOURBILLY, village de la paroisse de Vic-de-Chassenay, du bailliage de -Semur-en-Auxois (GARNAU, _Description_, etc., p. 374). En 1762, -d'Expilly, dans son _Dictionnaire_, tome I, page 729, donnait vingt-deux -feux (cent vingt habitants) à Bourbilly. - -ÉPOISSES, bourg de l'Auxois, était église collégiale et paroisse du -diocèse de Langres, du doyenné de Moutier-Saint-Jean, marquisat du -bailliage de Semur. Ses dépendances étaient Époisses, Coromble, -Torcy-lez-Époisses, Vic-de-Chassonay, Toutry (paroisse), Époissette, -Menetoy, Menetreux, Pijailly et Pontigny; et, dans le bailliage -d'Avallon, Atic-sous-Montréal, Saint-Magnence et presque tout -Cussy-les-Forges, communauté de la recette de Semur. La vallée -d'Époisses produit du froment, et passe pour une des plus fertiles de la -province (GARNAU, _Description de la Bourgogne_, page 478, 2e édition). -D'Expilly (_Dictionnaire des Gaules et de la France_, tome II, page 753) -dit que, de son temps (en 1762), Époisses comptait quatre-vingt-quinze -feux, ce qui suppose quatre cent soixante-quinze habitants. Le -_Dictionnaire de la poste aux lettres_ (in-folio, tome II, page 264) -porte ce nombre à mille six, en 1837. - - Page 11, avant-dernière ligne: Par son premier mariage avec - Françoise de la Grange. - -D'Expilly, dans son _Dictionnaire des Gaules et de la France_, tome I, -page 753, a donné la généalogie de Françoise de la Grange, marquise -d'Époisses. Elle fut mariée à Guillaume de Pechpeirou de Comenge, comte -de Guitaut, qu'elle fit son héritier, et qui devint ainsi marquis -d'Époisses. Elle mourut sans postérité le 31 mars 1661. Le comte de -Guitaud se remaria en 1669 à Élisabeth-Antoinette de Verthamont, d'où -descendent en ligne directe les Guitaud que nous avons vus de nos jours -possesseurs d'Époisses. C'est de cette dernière marquise d'Époisses que -parle madame de Sévigné. - - Page 13, ligne 3: En faisant de grands embellissements à son - magnifique château d'Époisses. - -Ce château subsiste toujours en entier et dans toute sa splendeur, avec -ses belles fortifications, ses vieux tilleuls, ses beaux ombrages, ses -archives, ses portraits, ses nobles souvenirs; il a été la propriété des -comtes de Montbard et des princes de Montagu, première race des ducs de -Bourgogne. Un descendant direct du comte de Guitaud le possède, bonheur -rare dans les temps où nous vivons. C'est à la plume du comte Athanase -de Guitaud qu'est due la notice qui accompagne la planche gravée de la -vue d'Époisses qui se trouve dans le _Voyage pittoresque de Bourgogne_, -publié à Dijon en 1823 (t. I, feuille 9, no 3). Les fortifications de ce -château avaient été construites par le prince de Condé (le grand Condé). -Ce prince en avait eu la jouissance en vertu d'un fidéicommis du comte -de Guitaud d'Époisses. Condé avait fait de ce château une petite place -forte, et n'avait consenti à le rendre qu'après le remboursement de -toutes les dépenses que les fortifications avaient coûtées. (Voyez la -_Lettre de_ BUSSY _au comte de Coligny_, en date du 18 mai 1667, dans -les _Mémoires du comte_ DE COLIGNY-SALIGNY, 1841, in-8º, p. 127.) - - Page 14, ligne 26: Dur et égoïste dans son intérieur. - -Lord Mahon, dans son Histoire du prince de Condé, en parlant du duel -entre Rabutin, page de la princesse de Condé, et son valet de chambre, a -soutenu que la princesse était parfaitement pure de toute intrigue -galante; qu'elle avait été calomniée et horriblement persécutée par son -époux et par son fils. Nous avons combattu cette opinion et fait -observer que, quels que soient les vices dont Condé et son fils -pouvaient être accusés, on ne saurait leur supposer un cÅ“ur assez -corrompu, assez pervers pour calomnier et tenir en captivité une femme -digne d'estime, une épouse et une mère. Lord Mahon, dans une lettre -qu'il m'a fait l'honneur de m'écrire, m'a cité Saint-Simon, qui dit que -M. le Duc était envers la princesse un fils dénaturé. Cette observation -est exacte, et il est très-vrai que le duc d'Enghien, au lieu de -protéger sa mère contre la colère de son époux, fut aussi d'avis que -l'on employât des mesures de rigueur. C'est que, connaissant l'abandon -où son père laissait la princesse et les moyens qu'elle prenait pour se -consoler, il avait plus d'intérêt que Condé même à prévenir les suites -de cet isolement.--Dans ce siècle si corrompu sous le rapport des -mÅ“urs, les femmes vertueuses inspiraient un grand respect: Louis XIV -donnait l'exemple de ce respect et de ces égards envers la reine. -L'opinion publique, à défaut du souverain, eût protégé la femme du grand -Condé contre un acte aussi odieux d'autorité maritale s'il n'avait été -motivé par la nécessité de pourvoir à l'honneur et aux intérêts de la -maison du premier prince du sang. Nous avons trouvé dans la recueil -manuscrit des vaudevilles et autres pièces de vers (édition de Maurepas) -qui est à la Bibliothèque nationale (vol. III, p. 397, sous la date de -1671) une fable allégorique, intitulée _le Lion, le Chat et le Chien_. -Cette fable, fort longue et assez bien versifiée, est relative à -l'aventure de Rabutin et du valet de chambre. Les notes disent que le -prince de Condé avait épousé malgré lui Claire-Clémence de Maillé-Brezé; -que, quoiqu'elle fût fort belle, il la négligea; qu'elle vivait fort -retirée, paraissant rarement à la cour. Presque toujours dans ses -appartements, elle sortait peu; mais on remarque qu'elle vivait trop -familièrement avec ses gens. Dans l'affaire du page et du valet de -chambre, il est dit qu'elle fut blessée d'un coup d'épée; que le valet -de chambre, condamné aux galères, mourut en s'y rendant, et qu'on -soupçonna qu'il avait été empoisonné. - - -CHAPITRE II. - - Page 19, ligne 14: Mademoiselle de Meri. - -Il résulte des lettres de madame de Sévigné que cette parente, qui ne se -maria jamais, était vaporeuse, maladive, ennuyeuse, mais bonne, sensible -et serviable. Dans le recueil des chansons choisies de Coulanges, 2e -édit., t. I, p. 280, il s'en trouve une intitulée _Pour mademoiselle de -Meri, conduisant jusqu'à Fontainebleau madame de Coulanges, qui s'en -allait en Berry_. - - Page 20, ligne 11: Il aimait à se rappeler surtout les heures de - gaieté folâtre; et note 53, renvoyant à la seconde partie de ces - _Mémoires_, p. 102 de la 2e édit.--Dans la lettre de madame de - Sévigné il est dit: «Vous aviez huit ans.» - -C'était donc en 1757, l'année même où l'abbé Arnauld vit aussi madame de -Sévigné chez son oncle Renaud de Sévigné, et où il fut si frappé de la -beauté de ses enfants. (_Mémoires de l'abbé_ ARNAULD, t. XXXIV, p. 314 -de la collection de Petitot; t. XI, p. 62 et 63 de l'édition de 1736.) - - Page 24, ligne 8: Frère de cette marquise de Montfuron. - -Le chevalier Perrin, dans ses Notes sur les lettres de madame de -Sévigné, nous apprend que Marie Pontever de Buous, marquise de -Montfuron, était femme de Léon de Valbelle et cousine germaine de M. de -Grignan. Elle était belle-sÅ“ur de l'évêque d'Alet. Le _Mercure galant_ -(juin 1679, p. 297), en annonçant la mort de la marquise de Montfuron, -ajoute qu'elle était d'une beauté surprenante. - - Page 26, ligne première: Traité secret conclu avec Charles II en - 1670. - -Ce traité, dont l'original est en la possession de lord Clifford, qui -l'a communiqué au docteur Lingard, a été signé, de la part de la France, -par Charles Colbert de Croissy, fils du ministre Colbert; par Arlington, -Thomas Arundell, T. Clifford et R. Billing; il a été conclu à Douvres le -22 mai 1670.--Les négociations avaient commencé le 31 octobre 1669. -Charles II s'y intitule _le Défenseur de la foi_. Il se dit convaincu -de la vérité de la religion catholique, et promet qu'aussitôt qu'il le -pourra il se réconciliera avec l'Église romaine. - - -CHAPITRE III. - - Page 37, ligne 17: Les princes d'Orange ne reconnaissaient pas - cette prétention. - -Après le décès de Guillaume III, roi d'Angleterre, mort sans enfants le -19 mars 1702, le prince de Nassau-Dietz et Frédéric 1er, roi de Prusse, -prétendirent avoir des droits à l'héritage de la principauté d'Orange. -Louis XIV se posa entre les deux contendants, et prétendit que la -principauté d'Orange était dévolue à la couronne de France, faute d'hoir -mâle. A cette occasion, il fit valoir l'hommage qui avait été rendu à -Louis XI en 1475. Le prince de Conti revendiqua la principauté d'Orange -en qualité d'héritier de la maison de Longueville, les ducs de cette -maison se prétendant héritiers du dernier des princes de Châlons ou de -la dynastie des princes d'Orange, qui avait précédé celle de Nassau. Sur -ces contestations, il intervint un arrêt du parlement de Paris qui -adjugea le domaine utile d'Orange au prince de Conti et le haut domaine -au roi de France, ce qui fut confirmé par l'article 10 du traité -d'Utrecht. Le 13 décembre 1714 un arrêt du conseil unit la principauté -d'Orange au Dauphiné. - - Page 41, ligne 17: De Guilleragues. - -Il est mort ambassadeur à Constantinople en 1679. Il se nommait -Girardin, et était probablement parent des Girardin d'Ermenonville; car, -dans un été que nous avons passé en 1810 dans ce beau lieu, nous avons -vu la copie de la correspondance de cet ambassadeur, reliée en huit ou -dix gros volumes in-fol., et reléguée dans une mansarde de la petite -maison qui était devant le château. - - Page 44, ligne 13: Lausier, son capitaine des gardes. - -Il est probable que c'est le même dont madame de Sévigné raconte la mort -subite dans le passage cité. Cependant, comme ils étaient plusieurs -frères, les uns morts et les autres vivants en janvier 1690, cela n'est -pas certain. - - Page 48, ligne 2: Procureur du pays-joint. - -Telle est l'expression consacrée et toujours la même pour cette charge. -Dans les _Extraits de délibérations_ imprimés, souvent on rencontre, par -abréviation, _procureur-joint_. Madame de Sévigné au contraire se sert -constamment du terme de syndic, parce que les procureurs, dans les -assemblées des villes et communautés, remplissaient les mêmes fonctions -que les syndics dans les assemblées des états, remplacées ensuite par -les assemblées des communautés.--Dans la 4e partie de ces Mémoires, au -lieu de procureur-joint, les imprimeurs ont mis _procureur-adjoint_. -C'est une faute. - - Page 55, ligne 21: Que vous nommez M. de Buous. - -Marguerite de Grignan, fille de Louis-François, comte de Grignan, -sénéchal de Valentinois, qui mourut en 1620, épousa Ange de Pontever de -Buous; et c'est par cette alliance que les de Buous étaient parents des -Grignan. Le marquis de Buous était probablement frère ou proche parent -du chevalier de Buous, capitaine de vaisseau en 1656. (Voir à la page 14 -des _Mémoires du marquis de Villette_, publiés en 1841, une note du -savant archiviste de la marine, M. Jal, sur le chevalier de Buous et le -marquis de Martel, mentionné si souvent dans les lettres de madame de -Sévigné.) - - Page 56, ligne 17: Deux députés, Saint-Aubin Treslon et Des Clos de - Sauvage. - -A la page 381 du _Recueil de la tenue des états de Bretagne_, mss. Bibl. -nat. (Bl.-Mant.), no 75, dans la liste des noms des députés envoyés à la -cour pour porter les remontrances on trouve ces lignes: «A la place de -SÉVIGNÉ, abbé de Geneston, député à la chambre aux états précédents, -décédé, a été nommé messire Louis du Metz, abbé de Sainte-Croix de -Guingamp.» - - Page 58, ligne 19: D'Harouïs était son ami et son allié. - -D'Harouïs avait épousé Marie Madeleine de Coulanges, cousine germaine de -la marquise de Sévigné; il la perdit le 22 septembre 1662. - - -CHAPITRE IV. - - Page 64, ligne 17: Qu'aucune femme ne peut pardonner. - -Voici le passage: - -«Je comprends fort bien que le baiser du roi, à ce que vous me mandez, -n'a été qu'un baiser de pitié; car je tiens le goût de notre maître trop -délicat pour prendre plaisir à baiser la La Baume.» (_Mém. de -Coligny-Soligny_, 1841, in-8º, p. 127.) - - Page 65, ligne 5 et note 151: La conversation, dit-il, avec madame de - la Morésan et moi. - -Cette madame de la Morésan ou Lamorésan avait la parole rude et son -franc-parler.--Le duc de Lauzun avait été à toute extrémité, et sa -sÅ“ur, madame de Nogent, pleurait du danger qu'il avait couru. Alors -madame de la Morésan lui dit en présence de MADEMOISELLE, plus éprise de -Lauzun depuis la rupture de son mariage: «Hélas! madame, vous -fâcherez-vous? Vous auriez été bien heureuse que monsieur votre frère -fût mort d'une mort ordinaire! C'est un homme si emporté qu'un de ces -jours on le trouvera pendu; il est tout propre à faire quelque folie.» - - Page 66, ligne 4: Sous une forme qui ne convenait pas à ce dernier. - -On peut voir la remarquable lettre de Louis XIV que nous citons en cet -endroit. En 1665, Martel était considéré comme un officier d'une grande -capacité, mais peu soumis au duc de Beaufort, qui avait le commandement -en chef de la flotte. - - Page 66, ligne 13: Un d'eux citait madame de Grignan. - -C'était le chevalier de Cissé, frère de madame de Martel. Voici comment -madame de Sévigné raconte la chose, à propos des éloges qu'elle donne -toujours à la danse des Bretons. - -«Je vis hier danser des hommes et des femmes fort bien: on ne danse pas -mieux les menuets et les passe-pieds. Justement, comme je pensais à -vous, j'entends derrière moi un homme qui dit assez haut: «Je n'ai -jamais vu si bien danser que madame la comtesse de Grignan.» Je me -tourne, je trouve un visage inconnu; je lui demande où il avait vu cette -madame de Grignan? C'est un chevalier de Cissé, frère de madame Martel, -qui vous a vue à Toulon avec madame de Sinturion. M. Martel vous donna -une fête dans son vaisseau; vous dansâtes, vous étiez belle comme un -ange. Me voilà ravie de trouver cet homme; mais je voudrais que vous -pussiez comprendre l'émotion que me donna votre nom, qu'on venait me -découvrir dans le secret de mon cÅ“ur, lorsque je m'y attendais le -moins.» (Lettre du 6 août 1680, t. VII, p. 157, édit. G.) - - Page 67, ligne 4: La foi de son exil. - -Cet exil se serait plus promptement terminé, si Bussy avait pu empêcher -la publicité toujours croissante de son libelle de l'_Histoire amoureuse -des Gaules_, par les éditions que l'on en faisait à l'étranger. Ces -éditions se sont multipliées à un point que l'on ne connaissait pas. -J'ai donné les titres de toutes celles que j'avais pu découvrir. J'en ai -depuis rencontré une, intitulée _Histoire amoureuse des Gaules_; Liége, -1665, in-12 de 260 pages, avec un feuillet pour la clef, exactement -comme l'édition qui porte le même titre, mais avec la date de 1666, et -les mots _nouvelle édition_, ce qui fait croire que cette dernière est -celle de 1666 avec un nouveau titre.--Je dois signaler encore une autre -édition dont j'ai un exemplaire en maroquin rouge, relié par Padeloup, -avec les armes du Dauphin, non pas sur le plat du livre, mais sur le -dos. Cette édition a un frontispice gravé avec une Renommée à la -trompette, et cette Renommée porte un étendard où se trouve le titre: -_Histoire amoureuse des Gaules_ (ce frontispice a été reproduit -grossièrement dans l'édition de 1710); point d'autre frontispice que -cette gravure. L'intitulé en tête du texte diffère du frontispice, et -porte: _Histoire amoureuse de France_, de même que l'édition avec le -frontispice gravé du salon de la Bastille; ce sont aussi les mêmes -caractères elzéviriens, petits. On croirait que c'est la même édition, à -laquelle on a mis des frontispices gravés, si, après la page 196, on ne -voyait que les deux éditions cessent de se correspondre. On s'aperçoit à -cette page que l'édition à la _Renommée_ est antérieure à celle du -_salon_, parce que le fameux cantique manque, et qu'il est dans celle du -_salon_. Ainsi l'édition de la _Renommée_ a deux cent quarante-quatre -pages, et ensuite douze pages, paginées séparément, pour les _Maximes -d'amour_ et la lettre à Saint-Aignan: l'édition au _salon_ a deux cent -cinquante-huit pages qui se suivent. - - Page 76, ligne 6: On accuse Bussy d'être l'auteur des chansons, - etc. - -Bussy fut prévenu de l'accusation portée contre lui au sujet des -chansons d'Hauterive, son ami. Le marquis d'Hauterive, grand amateur des -beaux-arts et pour lequel, dit M. Gault de Saint-Germain, le Poussin a -exécuté plusieurs tableaux, épousa la fille du duc de Villeroi, veuve de -trois maris. Cette union fut considérée comme une mésalliance de la part -de la femme, très-supérieure à son mari en naissance et en fortune, mais -aussi plus âgée. Bussy ne la désapprouva pas, parce que d'Hauterive -était son ami. «Le secret, dit-il à ce sujet, est d'être aimable et -d'être aimé; et quand cela est on est aussi riche que Crésus, et noble -comme le roi.» D'Hauterive ayant dit à Bussy que devant l'abbesse de -Merreton on l'avait accusé d'être l'auteur des chansons qui couraient -contre les ministres, et que celle-ci l'avait défendu, Bussy se hâta -aussitôt de lui adresser une lettre datée du 15 mai 1674, dans laquelle -on lit ce passage: «Je ne trouve pas étrange que le misérable qui a fait -ces chansons-là les ait mises sous mon nom, sous lequel toutes calomnies -sont crues; mais je suis surpris qu'il y ait des gens désintéressés -assez sots pour croire qu'un homme de mon âge et du rang que je tiens -dans le monde soit capable de si grandes extravagances.» Conf. -_Supplément aux Mémoires et lettres du comte_ DE BUSSY-RABUTIN, 2e -part., p. 22;--BUSSY, _Lettres_, t. V, p. 44 et 107.--SÉVIGNÉ, -_Lettres_, t. I, p. 284, édit. G.; t. I, p. 213, édit. M. - - -CHAPITRE V. - - Page 83, lignes 2 à 4: Le duc d'York vint, cette année, présenter - au roi de France la princesse de Modène. - -MADEMOISELLE, dans ses Mémoires, dit, t. LXIII, p. 369 (1674): «Lorsque -toutes ces propositions furent finies, le roi travailla, et fit le -mariage de la princesse de Modène; elle me parut une grande créature -mélancolique, ni belle ni laide, fort maigre, assez jaune. J'ai ouï dire -qu'elle est à présent fort enjouée et engraissée et qu'elle est devenue -belle.» - - Page 86, ligne 4: Ces conjectures sont démenties, selon nous, par - les faits. - -Celle de Voltaire, qui dit que c'était l'aventure de mademoiselle de -Guerchy et que ce fut pour elle qu'Hénault composa son sonnet de -l'Avorton, est doublement erronée, puisque ce sonnet a été imprimé trois -ans avant la mort de cette demoiselle. L'autre conjecture que ce -pourrait bien être madame de Ludres que madame de Sévigné désigne, parce -que le chevalier de Vendôme et Vivonne en étaient alors amoureux, noue -paraît plus vraie; mais non relativement à Louis XIV, qui certes ne -voulait pas de mal à madame de Ludres, comme il l'a prouvé depuis. - - Page 89, ligne 5: La plus jeune et la plus chérie de ses femmes - espagnoles. - -Elle se nommait doña Felippe-Maria-Térésa Abarca. Il est probable, -d'après ces prénoms, qu'elle fut tenue sur les fonts de baptême par la -reine elle-même. Elle figure comme la septième et dernière des femmes -espagnoles dans l'_Etat de la France_ de 1669 et dans celui de 1677. -Doña Maria Molina, qui avait prêté les mains à l'intrigue de Vardes et -du comte de Guiche contre la Vallière et qui se trouve encore comme -première femme de chambre espagnole dans le volume de 1669, fut au -nombre des femmes renvoyées; et peut-être est-ce à cause d'elle et de sa -nièce mademoiselle de Ribera que cette mesure fut prise.--Dans l'_État -de la France_ de 1669 il est dit, p. 377, que Maria-Térésa Abarca est -présentement madame de Visé. Le mari d'Abarca est probablement le -musicien dont il est fait mention dans la lettre de Coulanges à madame -de Sévigné (3 février 1669, t. XI, p. 259, édit. G.), et non pas Donneau -de Visé, l'auteur du _Mercure galant_. - - Page 92, ligne 18: Ces enfants moururent peu après leur naissance. - -L'un fut nommé Charles, et naquit le 19 septembre 1663; l'autre, nommé -Philippe, naquit le 19 janvier 1665. - - Page 93, lignes 4 et 5: Érigea pour elle et pour sa mère la terre - de Vaujour et la baronnie de Saint-Christophe. - -C'est au sujet de ce don fait à la Vallière après la naissance du comte -de Vermandois qu'un de ces écrivains qui transforma en roman les amours -de Louis XIV et des personnages de sa cour écrivit cette lettre de -madame de la Vallière à madame de Montausier que M. Matter a publiée, -d'après une copie du temps, dans ses _Lettres et pièces rares ou -inédites_, 1836, in-8º, p. 320-326. Cette lettre est datée du 24 mai -1667, et les lettres patentes pour l'érection de la terre de Vaujour en -duché-pairie furent enregistrées le 13 mai 1667. Dans une note inscrite -à la copie de cette même lettre, on suppose maladroitement que la -réponse de madame de Montausier, à qui la lettre était adressée, fut -faite le même jour. Le paraphe de la Reynie du 21 novembre 1670, s'il -est sincère, donnerait lieu de croire que cette lettre faisait partie -des pièces saisies par la police chez quelque libelliste. La Vallière se -gardait bien d'écrire à des tiers, et surtout à madame de Montausier, -sur les suites probables de ses amours avec Louis XIV; encore moins -aurait-elle pu parler du projet imaginaire de son mariage avec le -marquis de Vardes, ce qui décèle dans la fabrication de cette lettre un -écrivain peu instruit des choses de la cour à cette époque. - -Quoique M. de Bausset ait souvent cité les lettres de la Vallière -publiées par l'abbé Lequeux (_Lettres de madame la duchesse de la -Vallière, avec un abrégé de la vie de cette pénitente_, 1747, in-12), je -crois peu à leur authenticité. Plusieurs ont été certainement -fabriquées, et peut-être sont-elles toutes de l'invention de l'abbé -Lequeux, qui en est, dit-on, l'éditeur anonyme. A quel homme bien -instruit des choses et des personnes de ce temps persuadera-t-on que la -Vallière a pu écrire la lettre 14, p. 17, et bien d'autres qu'il serait -facile de citer? - - Page 94, ligne 13: Montespan, à peine relevée de sa dernière - couche, ne pouvant danser, etc. - -Il est probable que mademoiselle de Nantes fut légitimée peu après son -baptême: nous savons que ce fut en décembre, et madame de Sévigné nous -apprend (lettre du 8 janvier 1674) que les bals de Saint-Germain -commencèrent dès les premiers jours de janvier. - - Page 97, ligne 18: Louis XIV était incapable de faire souffrir à - celle qu'il avait tant aimée, etc. - -Il ne faut pas croire, par ce que dit madame Élisabeth de Bavière dans -ses lettres, dont les fragments ont été intitulés _Mémoires_, que Louis -XIV ait insulté à la douleur de la Vallière (voyez p. 55, édit. 1832, -in-8º). Il était incapable d'aussi ignobles procédés. Ces Mémoires n'ont -rien d'authentique. On sait que ce sont des extraits des huit cents -lettres de cette princesse qui se sont trouvées dans la succession de la -duchesse de Brunswick, morte en 1767, et écrites par la duchesse -d'Orléans à la princesse Wilhelmine-Charlotte de Galles et au duc -Antoine-Ulrich de Brunswick. Élisabeth-Charlotte, princesse Palatine, -resta toujours Allemande à la cour de France, et accueillit sans -discernement les bruits les plus vulgaires et les plus désavantageux sur -les personnes qui s'y trouvaient. Cependant ces extraits de lettres -contiennent des détails très-curieux; mais il faut les lire avec -défiance; et, pour les écrivains qui manquent de critique, ils sont une -mauvaise source pour l'histoire. - - Page 103, lignes 15 et 16: Elle obtint... que la marquise de la - Vallière fût mise dans le nombre des nouvelles dames d'honneur. - -Louis XIV, dans la lettre citée (au camp devant Besançon, le 23 mai -1674), refusa à la reine de Portugal une demande semblable en ces -termes: «Toutes les places des dames établies auprès de la reine furent -remplacées par le dernier choix, et c'est un nombre fixe qu'on a résolu -de ne point passer. Il n'est pas besoin de dire à V. M. que celle qui -fut depuis accordée à ma cousine la duchesse de la Vallière ne fait pas -conséquence: elle juge assez qu'une conjoncture comme celle de sa -retraite ne permettait pas de lui refuser cette consolation.» - - Page 105, ligne 12: Le troisième dimanche de la Pentecôte. - -Ce troisième dimanche, jour de la parabole du bon pasteur, était, en -1674, le 3 juin, et non le 2, comme le dit l'abbé Lequeux dans son -_Histoire de madame de la Vallière_, p. 54. La date du 9 juin, donnée -par M. de Bausset, _Histoire de Bossuet_, t. II, p. 36, est encore plus -fautive. - - Page 106, ligne 3: Les regrets qu'elle éprouvait de ne s'être point - trouvée, etc. - -La lettre de madame de Sévigné, datée du mercredi 5 juin 1674, a été -commencée le mardi 4; car elle dit: «La Vallière fit hier sa profession -de foi.» Cette date est parfaitement d'accord avec celle que donne -l'abbé Lequeux, _Histoire de la Vallière_, p. 59, où il est dit qu'elle -fit profession le lundi de la Pentecôte, 3 juin; ce qui est exact pour -l'année 1675. M. de Bausset se trompe quand il dit que ce fut le 26 juin -1675. Le 26 juin 1675 était un mercredi, et ne correspond à rien. (Voyez -_Histoire de Bossuet_, liv. V, édit. in-12, t. II, p. 36 de la 4e -édition, revue et corrigée.) - -Cela d'ailleurs ne peut être douteux d'après ce qu'on lit dans la lettre -d'une des religieuses compagnes de la Vallière, dont je parlerai dans la -note suivante: «Elle vit arriver avec joie le temps de sa profession; -elle la fit au chapitre, selon notre usage, le troisième de juin 1675. -La reine honora cette cérémonie de sa présence: le concours du monde fut -encore plus grand que le jour qu'elle avait pris l'habit.» - - Page 110, ligne 20: C'est dans son cloître, au pied des autels, que - la Vallière a préparé, etc. - -La vie de la Vallière comme religieuse fut racontée, le jour même de son -décès (6 juin 1710), dans une lettre de ses compagnes, nommée Magdeleine -du Saint-Esprit. Cette lettre fut adressée à la supérieure des -Carmélites, ensuite imprimée et envoyée à toutes les supérieures de -l'ordre en juillet 1710. Madame de la Vallière avait écrit des -_Réflexions sur la miséricorde de Dieu, par une dame pénitente_. Elles -furent publiées sous le voile de l'anonyme, et à son insu (Paris, -Dezallier, 1685, in-12 de 139 pages). Une nouvelle édition augmentée fut -donnée en 1726 (Paris, Christophe David, in-12 de 240 pages). -L'augmentation consiste en quelques prières tirées de l'Écriture sainte -et un _Récit abrégé de la sainte mort et de la vie pénitente de madame -la duchesse de la Vallière_. Ce récit est un plagiat: l'auteur a -transcrit la lettre de la sÅ“ur Magdeleine du Saint-Esprit, dont il a -gâté la touchante et sublime simplicité par des phrases de prédicateur. -Cette lettre, devenue rare, a été réimprimée dans l'_Annuaire de l'Aube_ -de 1849, avec quatre autres lettres inédites très-courtes de madame de -la Vallière, dont les autographes appartiennent à la bibliothèque et aux -archives de Troyes: l'une est adressée à l'abbesse Anne de -Choiseul-Praslin et datée du 13 mai 1688, et les trois autres à Denis -Dodart, médecin et membre de l'Académie des sciences, que le caustique -Gui Patin et le philosophe Fontenelle s'accordent à louer comme un des -hommes les plus savants, les plus pieux et les plus charitables de leur -temps. (_Lettres de_ GUI PATIN; Paris, Baillière, 1846, in-8º, t. III, -p. 231.) - -«La Vallière mourut à l'heure de midi, le 6 juin 1710, âgée de -soixante-cinq ans dix mois, et trente-six ans de religion.» _Récit -abrégé de la vie pénitente_, p. 234. - - Page 111, ligne 6: Elle sait bien aimer. - -Madame de Caylus nous apprend, à l'endroit cité, que cette réflexion fut -faite à l'occasion de l'aîné des enfants du roi et de madame de -Montespan, qui mourut à l'âge de trois ans. - - Page 111, ligne 8: Cette femme lui déplaisait souverainement, parce - qu'elle plaisait trop à sa maîtresse. (Sur la lettre de madame de - Coulanges à madame de Sévigné, du 20 mars 1673.) - -Il y a dans l'édition des _Lettres_ de madame de Sévigné, de M. de -Monmerqué, une note du savant éditeur (t. II, p. 75, édition 1820) à -laquelle M. RÅ“derer, dans son _Histoire de la société polie_, aurait dû -bien faire attention. C'est au sujet de ce passage remarquable: «Nous -avons enfin retrouvé madame Scarron, c'est-à -dire que nous savons où -elle est; car pour avoir commerce avec elle, cela n'est pas aisé. Il y -a, chez une de ses amies, un certain homme qui la trouve si aimable et -de si bonne compagnie qu'il souffre impatiemment de son absence.» On a -interprété ces derniers mots en supposant que ce certain homme était -Louis XIV; mais après avoir fait observer que la faveur dont a joui -madame de Maintenon auprès de Louis XIV n'a pu commencer qu'en 1675, ou -au plus tôt en 1674, puisqu'il est bien constaté qu'avant cette époque -le roi prit presque en aversion la veuve Scarron, M. de Monmerqué -présume très-judicieusement que cet homme si épris était Barillon. Et -c'était sans doute un ancien ami, puisque madame de Coulanges ajoute -immédiatement: «Elle est cependant plus occupée de ses anciens amis -qu'elle ne l'a jamais été: elle leur donne, avec le peu de temps qu'elle -a, un plaisir qui fait regretter qu'elle n'en ait pas davantage.» Deux -lignes plus loin, madame de Coulanges mentionne le roi, pour dire -«qu'ayant vu l'état des pensions il trouva deux mille francs pour madame -Scarron, et mit _deux mille écus_.» C'était la juste récompense de ses -soins. - - Page 111, note: _Souvenirs de madame_ DE CAYLUS. - -J'ai donné au long le titre de cette édition des _Souvenirs de Caylus_, -parce qu'elle a été inconnue à tous les éditeurs de ce livre curieux, et -que c'est la seule où Voltaire se trouve nommé comme éditeur. Elle est -sans la préface de Jean-Robert (Voltaire); mais la défense du siècle de -Louis XIV suit immédiatement, et commence à la page 162, au verso de -celle qui termine les _Souvenirs_. Cette édition diffère des autres. -Celle de M. Monmerqué finit ainsi: _Puisqu'il était avec elle._ - -FIN DES SOUVENIRS DE MADAME DE CAYLUS. - -Notre édition, p. 161, se termine par des notes, comme un ouvrage non -entier, avec ces mots de plus: «C'était bien plutôt une galanterie -innocente qu'une passion.» - - -CHAPITRE VI. - - Page 117, ligne 17: Je revins hier du Menil. - -Il s'agit ici du Mesnil-Saint-Denis, à cinq kilomètres ou une lieue et -quart de la Grange de Port-Royal. «Cette terre, dit l'abbé Lebeuf (t. -VIII, p. 463 de l'_Histoire du diocèse de Paris_), ayant été aliénée par -l'abbaye de Saint-Denis, était possédée à la fin du seizième siècle par -MM. Habert de Montmor, qui en ont joui jusque dans le siècle présent.... -On avait commencé, sur la fin du dernier siècle, à appeler ce lieu-là -Mesnil-Saint-Denis-Habert. J'ai vu des Provisions de la cure du 19 -décembre 1691, où cette dénomination est rejetée.» - -C'est donc chez Henri-Louis Habert de Montmor, conseiller du roi, maître -des requêtes de l'hôtel, qu'alla madame de Sévigné. Montmor fut de -l'Académie française; il mourut à Paris le 21 janvier 1679. C'est de son -fils, et non de son mari, qu'il est fait mention dans la lettre de -décembre 1694[880], datée de Grignan. Ce M. de Montmor était alors à -Grignan, et ce fut lui qui ménagea le mariage de Grignan avec -mademoiselle de Saint-Amand. - - [880] T. II, p. 10. - -C'était sans doute avec madame de Montmor plutôt qu'avec son mari que -madame de Sévigné était liée. Sa correspondance ne fait mention que -d'elle. MADEMOISELLE nous apprend que madame de Montmor était -belle-sÅ“ur de madame de Frontenac. Cette dernière vivait alors[881] -fort retirée, quoique possédant une grande maison; et elle prêta ses -chevaux à MADEMOISELLE pour s'échapper de Paris. (_Mémoires de -Montpensier_, vol. XLIII, p. 342 et 343.) - - [881] En 1652. - -Habert de Montmor fut reçu à l'Académie française en janvier 1635, ou un -peu avant[882]. Il était cousin de Cerisy, un des premiers académiciens. -Savant et humaniste, Montmor cultivait les sciences exactes et la -poésie. Il recueillit chez lui Gassendi, qui mourut dans son hôtel[883]. -Il rassembla ses ouvrages, et les fit imprimer en six volumes in-folio. -La préface latine qu'on y lit et trois ou quatre petites pièces de vers -français consignées dans les recueils du temps, voilà tout ce qu'on a de -lui. Il avait composé un poëme latin, avec le même titre que celui de -Lucrèce; et il y avait développé toute la physique moderne. Huet, dans -ses _Mémoires_[884], nous apprend que Montmor, en apparence sectateur de -la doctrine épicurienne de Gassendi, préférait en secret la philosophie -de Descartes. Il y avait chez lui, un certain jour de la semaine, une -réunion de savants physiciens et de littérateurs, formant entre eux une -petite académie dont Sorbier a donné les statuts dans une de ses -lettres. Ménage nous apprend qu'il était dans une de ces assemblées avec -Chapelain et l'abbé de Marolles lorsque Molière y lut les trois premiers -actes du _Tartufe_[885]. Il dit aussi qu'à la suite d'un revers de -fortune Habert de Montmor s'abandonna tellement au chagrin et à la -douleur qu'il devint invisible durant les douze dernières années de sa -vie[886]. Ceci explique le silence qui se fit sur lui à l'époque où -madame de Sévigné allait au Mesnil. Malgré les pertes qu'il avait -éprouvées, Montmor devait encore être riche, puisque cette belle -propriété lui restait. Son père, Jean-Habert de Montmor, sieur du -Mesnil, avait acheté en novembre 1627 l'hôtel de Sully (situé dans la -rue Saint-Antoine, près de la rue Royale). Cet hôtel avait été construit -par le partisan Galet, devenu célèbre par les vers de Regnier et de -Boileau, à cause de sa passion pour le jeu. Sa fortune se trouvant -ébréchée, son hôtel fut vendu d'abord à Montmor, ensuite au duc de -Sully. Tallemant raconte que Galet ayant confié cent mille livres à -Montmor, celui-ci nia les avoir reçues. Mais c'est là une historiette -invraisemblable et dont probablement Galet est l'inventeur[887].--La -_Biographie universelle_ ne fait mention de Montmor nulle part: c'est ce -qui nous a engagé à étendre cet article. - - [882] PELLISSON, _Histoire de l'Académie française_, 1729, in-4º, - p. 176 et 276. - - [883] _Ménagiana_, t. I, p. 2. - - [884] HUETII,_Commentarius de rebus ad eum pertinentibus_, p. - 186. - - [885] _Ménagiana_, t. I, p. 144. - - [886] _Ménagiana_, t. II, p. 8. - - [887] Les _Historiettes_ de TALLEMANT DES RÉAUX, t. X, p. 70, - édit. in-12; t. V, p. 374-376, Juillet.--_Recherches sur Paris, - quartier Saint-Antoine_, p. 35. - - Page 119, ligne 2 de la note: _Mémoires du comte_ DE GUICHE; - Utrecht, 1744. - -Ces Mémoires, qui ont été publiés par Prosper Marchand, commencent à -l'année 1665, se terminent en 1667, et sont suivis d'une relation du -siége de Wesel. Ils auraient dû être réimprimés dans la grande -collection des _Mémoires relatifs à l'histoire de France_. On n'y voit -nulle trace de cet esprit guindé que madame de Sévigné blâme dans le -comte de Guiche: ils sont écrits d'un style fort naturel.--L'article du -comte de Guiche, dans le _Dictionnaire_ de Prosper Marchand, est -excellent et très-complet. Il a été abrégé dans la _Biographie -universelle_. - - Page 124, lignes 22 à 24: Malgré la réunion des talents qui - contribuaient à sa réussite, il (_l'Opéra_) causa, dans la - nouveauté, plus d'admiration que de plaisir. - -Il est à remarquer que dès l'origine la France, dans l'opéra, surpassa -l'Italie pour la danse et les ballets, la composition et l'intérêt des -poëmes, mais qu'elle fut, malgré tous les efforts et les grandes -dépenses faites par son gouvernement, inférieure à l'Italie sous le -rapport du chant, de la musique, des décorations et des machines. Je -crois qu'il en est encore ainsi. L'épître de la Fontaine à M. de Nyert -est une satire spirituelle contre l'Opéra; elle aurait été plus mordante -si le bonhomme n'eût pas eu crainte de déplaire au monarque. Nous avons -rapporté le jugement de l'abbé Raguenet sur l'Opéra dans notre édition -de la Fontaine, t. VI, p. 112. Quarante ans plus tard, Thomas Gray, qui -avait vu l'Italie, était de la même opinion que cet abbé. (_Lettre_ à M. -West; Paris, 12 avril 1739.)--On sait ce que Rousseau a écrit sur notre -musique. Mais il n'en est plus ainsi depuis que l'Opéra a perdu son -privilége exclusif, et que, par l'établissement d'un théâtre, les -Italiens ont formé les oreilles françaises à leur mélodie. - - Page 134, lignes 8 et 9: La conquête de la Franche-Comté ne fut - complétée que le 5 juillet. - -Le roi était revenu avant la fin des opérations militaires, et il se -hâta de donner des fêtes pour célébrer sa nouvelle conquête. - -Ces fêtes employèrent six jours, mais non consécutivement. - -Elles commencèrent le samedi 4 juillet (1674)[888]. Ce fut la première -année où Versailles parut dans toute sa pompe. Il avait reçu bien des -embellissements depuis que la Fontaine en avait célébré l'éclat et les -merveilles dans son roman de _Psyché_. Le château avait été -terminé[889], ainsi que Trianon. - - [888] FÉLIBIEN, _Divertissements donnés par le roi à toute sa - cour, au retour de la conquête de Franche-Comté en l'année 1674_, - Paris, in-12 (114 pages). - -C'est à Trianon que, le second jour de ces fêtes, on représenta -l'_Eglogue de Versailles_. - - [889] FÉLIBIEN, _Description du château de Versailles_, 1674, - in-12 (102 pages). Ce volume est accompagné d'un petit plan du - parc et du château de Versailles, qui, par son échelle, offre une - comparaison facile avec le joli plan gravé, un siècle après, pour - l'almanach de Versailles, in-8º, 1789. - -La troisième journée, qui fut la plus brillante de toutes, se passa à la -_Ménagerie_. On y représenta le _Malade imaginaire_ de Molière, devant -la fameuse grotte des bains de Thétis, nouvellement achevée[890]. - - [890] FÉLIBIEN, _Description de la grotte de Versailles_, 1674, - in-12 (80 pages). - -Ce fut dans le petit parc que l'on représenta les _Fêtes de l'Amour et -de Bacchus_, premier résultat de l'alliance de Quinault, de Lulli et de -Vigaroni pour donner au spectacle de l'Opéra français la forme qu'il a -conservée depuis[891]. Dans cette pastorale de Quinault, il y a une -imitation charmante du dialogue d'Horace et de Lydie, bien préférable à -celles que l'on a faites depuis. - - [891] _Vie de Quinault_, dans l'édition de son _Théâtre_, 1715, - t. I, p. 34. - -Ces fêtes durèrent deux mois. Pour le cinquième jour, qui fut un samedi -18 août, on représenta _Iphigénie_, nouvelle tragédie de Racine. Cette -représentation donna lieu, de la part de l'abbé de Villiers, à des -remarques critiques sur ce chef-d'Å“uvre qui ne sont pas toujours sans -justesse, et aussi à une satire en vers intitulée _Apollon charlatan_, -laquelle, du reste, nous apprend que cette pièce faisait répandre -beaucoup de larmes et renchérir les mouchoirs aux dépens des -pleureurs[892]. - - [892] Les frères PARFAICT, _Histoire du théâtre françois_, t. XI, - p. 339. - -Racine fit imprimer _Iphigénie_ avec une courte et savante préface, mais -assez aigre envers ses critiques[893]. En même temps Corneille publia sa -tragédie de _Suréna_, qui fut le dernier effort de sa muse trafique. Il -la fit précéder de ses remercîments au roi, et il parvint à introduire -l'éloge de ce monarque dans le sujet même de sa pièce, qui n'y prêtait -guère[894]. Les deux derniers actes de cette tragédie nous montrent -encore quelques traits de vigueur; mais il se trompait beaucoup, le -grand génie, lorsque, dans ses remercîments à Louis XIV, il disait: - - . . . . . . . . . . . . Othon et Suréna - Ne sont pas des cadets indignes de Cinna. - - [893] _Iphigénie_ de M. RACINE: Paris, 1674, in-12 (73 pages). - - [894] _Suréna, général des Parthes_, tragédie, Paris, Guillaume - de Luynes, 1675, in-12, acte III, scène I, p. 31. - - Qu'un monarque est heureux, etc. - - - CHAPITRE VII. - - Page 141, ligne 3: Un enfant qui ne naquit pas viable. - -La preuve de cette grossesse de madame de Grignan et le terme de son -accouchement, résultent des passages des lettres de Bussy à madame de -Sévigné, cités en note. Mais, avant de rapporter ces passages, il faut -rectifier les dates des deux lettres de madame de Sévigné au comte de -Guitaud, mal données dans les éditions. Ces lettres furent d'abord -publiées par le libraire Klostermann, dans son édition des lettres -inédites, en 1814, in-8º, sans aucune date ni de jours ni d'années. Il -paraît cependant, d'après la préface des éditeurs, que les autographes -portaient l'indication du jour de la semaine (p. IX); mais, dans -l'embarras où ils ont été de déterminer la date de l'année, ils ont -supprimé celle du jour de la semaine, et bien à tort. Ces deux lettres, -comme toutes celles du même recueil qui sont adressées au comte de -Guitaud, proviennent des archives du château d'Époisses et de la -famille de Guillaume de Pechpeirou-Comenge, comte de Guitaud, marquis -d'Époisses, dont nous avons parlé au chapitre VI. L'éditeur nous apprend -que le comte de Guitaud naquit le 5 octobre 1626, la même année que -madame de Sévigné, et mourut en 1685, à Paris. Ces lettres inédites de -madame de Sévigné ont été redonnées en 1819, et le nouvel éditeur a cru -pouvoir y mettre des dates, qui ne sont, dit-il, qu'approximatives. M. -Gault de Saint-Germain, dans son édition de madame de Sévigné, les a -classées avec les dates fausses de cet éditeur. Les dates des 18 juin et -10 juillet 1675 ressortent de ce que dit madame de Sévigné sur les -adieux de sa fille et du cardinal de Retz et sur les événements -militaires (t. III, p. 347, édit. G.). Elles sont précises pour les mois -et l'année, et déduites approximativement pour les jours. - -Dans la lettre du 16 août 1674, t. III, p. 351, édit. G., Bussy dit à -madame de Grignan: «Comment vous portez-vous en votre grossesse, madame, -et du mal de madame votre mère?» Puis, un an après, lorsque la comtesse -accoucha aux îles Sainte-Marguerite, madame de Sévigné écrit au comte de -Guitaud (t. III, p. 348): «Madame de Guitaud est une raisonnable femme -d'être accouchée comme on a accoutumé et de ne pas aller chercher midi à -quatorze heures, comme madame de Grignan, pour faire un accouchement -hors de toutes les règles! Voilà les îles en honneur pour les femmes -_grosses de neuf mois_; si ma fille l'est, je lui conseille d'y aller. -Je ne sais point de ses nouvelles sur ce sujet; mais, comme vous dites, -ce n'est pas à dire que cela ne soit pas vrai; je vous assure que j'en -serais fort affligée.» D'autres passages, qu'il serait trop long de -citer, corroborent ces preuves de la grossesse de madame de Grignan et -de son accouchement. Le général de G..., qui, dans l'avertissement de -l'édition des lettres inédites de madame de Sévigné, a classé ces -lettres et mis les dates, est, je crois, le général de Grimoard, un des -éditeurs des _Å’uvres de Louis XIV_. - - Page 150, ligne 16: Sa sÅ“ur, Marie-Thérèse de Bussy-Rabutin, etc. - -Il y avait encore deux autres demoiselles de Rabutin, parentes de Bussy: -c'étaient les sÅ“urs de ce page de la princesse de Condé, lequel épousa -la duchesse de Holstein. Elles allèrent trouver leur frère en Allemagne, -et écrivirent à Bussy le 25 décembre 1686 et le 28 octobre 1687. (Voyez -BUSSY, _Lettres_, t. VI, p. 201 et 264.) - - Page 151, lignes dernières, et 152, ligne 1: Le jeune frère de - madame de Montataire et du marquis de Bussy (Michel-Celse-Roger de - Rabutin)..., qui n'était âgé que de six à sept ans. - -On lit dans les _Pièces fugitives_ de Flachat de Saint-Sauveur, 1704, -in-12, t. I, p. 123: - -«M. le comte de Bussy-Rabutin a laissé une belle famille, comme vous -savez. M. l'abbé de Bussy est grand vicaire d'Arles, et fait beaucoup -d'honneur à l'état qu'il a embrassé.» - -A la page 121, il est dit «qu'on travaille au Louvre à une édition plus -correcte des _Mémoires de Bussy_.» - -Malheureusement cette édition n'a point paru. Une nouvelle édition des -_Mémoires de Bussy_, dont la plus grande partie n'existe encore qu'en -manuscrit, serait un service rendu à l'histoire; mais il faudrait y -joindre sa vaste correspondance, puisqu'il ne semble avoir composé ses -Mémoires que pour y intercaler les lettres qu'il écrivait et qu'il -recevait. - - Page 154, ligne 4: Bussy avait eu trois filles de sa cousine - Gabrielle de Toulongeon. - -Bussy dit, t. I, p. 125 de ses _Mémoires_ pour l'année 1646: «Je ne fus -pas longtemps sans perdre ma femme, dont je fus extrêmement affligé. -Elle m'aimait fort, elle avait bien de la vertu et assez de beauté et -d'esprit. Elle me laissa trois filles, Diane, Charlotte et -Louise-Françoise. L'aînée n'avait pas deux ans lorsque sa mère mourut.» - -J'ai prouvé ci-dessus que Gabrielle de Toulongeon était morte le 26 -décembre 1646. Bussy s'était marié le 28 avril 1643; ainsi Diane n'a pu -naître qu'en février 1644. L'époque de la mort de Charlotte est ignorée; -mais il en résulte que, comme elle est née avant Louise-Françoise, cette -dernière n'a pu naître avant la fin de septembre ou le commencement -d'octobre 1645, ni plus tard que le 26 décembre 1646. Elle avait donc -environ vingt-huit ans et demi lorsqu'elle se maria. - - Page 154, ligne 18: Elle était cette pieuse religieuse de - Sainte-Marie de la Visitation. - -Mademoiselle Dupré, cette savante et spirituelle correspondante de -Bussy, lui écrit de Paris, le 1er juin 1670: - -«Je ne comprends pas, monsieur, que vous m'ayez si peu parlé de madame -votre fille aînée, religieuse aux Dames Sainte-Marie de la rue -Saint-Antoine. Mon bon génie m'a inspiré de l'aller voir. Je ne crois -pas qu'il y ait personne plus accomplie en vertu, en esprit et même en -agrément de sa personne, s'il lui plaisait d'en avoir.» - - Page 155, ligne 5: Celle qui, par les charmes de sa conversation et - de son style épistolaire. - -Dans sa lettre à l'abbé Papillon, en date du 7 août 1735, de la Rivière -(_Lettres choisies_, Paris, 1735, in-12, t. II, p. 207) dit: «Madame de -la Rivière (Louise-Françoise de Coligny) n'a composé que la Vie de saint -François de Sales et l'épitaphe de son père, à laquelle le P. Boubours -n'a eu nulle part.» - -«... Je ne sais pas ce qu'on pense à Dijon des lettres de feu ma femme. -Elles firent un tel bruit à la cour que le roi me les demanda. Je lui en -donnai une vingtaine; il les lut chez madame de Montespan, et me dit en -me les rendant: «La Rivière, votre femme a plus d'esprit que son père.» -Madame de Thianges, qui avait assisté à cette lecture, m'apprit que le -lendemain le roi s'en était diverti et que je lui avais donné une bonne -soirée.» (P. 208.) - -Le 18 août de la même année (t. II, p. 215), de la Rivière ajoute les -détails suivants sur les lettres de sa femme: «Je me suis reproché -d'avoir gardé longtemps une cassette pleine de lettres de feu ma femme; -enfin, je les ai brûlées. Elles n'étaient qu'un composé de sentiments -vifs, propres à inspirer des passions et à les allumer. Si on les avait -imprimées, le public aurait couru après; mais c'eût été un dangereux -présent que j'aurais fait à la postérité.» - - Pages 156, lig. dernière, et 157, lig. 1: Assez de la couleur de - celui de Saucourt (chose considérable en un futur). - -Le meilleur commentaire de ces mots de Bussy se trouve dans les vers de -Benserade, du _Ballet royal des amours de Guise_, où l'entrée du marquis -de Saucourt, qui devait représenter un démon, est ainsi annoncée: - - Non, ce n'est point ici le démon de Brutus - Ni de Socrate: - Par d'autres qualités et par d'autres vertus - Sa gloire éclate. - - Sous la forme d'un homme il prouve ce qu'il est: - Doux, sociable; - Sous la forme d'un homme aussi l'on reconnaît - Que c'est le diable. - - Le bruit de ses exploits confond les plus hardis - Et les plus mâles; - Les mères sont au guet, les amants interdits, - Les maris pâles. - - Contre ce fier démon voyez-vous aujourd'hui - Femme qui tienne? - Et toutes cependant sont contentes de lui, - Jusqu'à la sienne. - - BENSERADE, _Å’uvres_ (1697), t. II, p. 307. - - Page 157, lignes 3 et 8; Les terres de Cressia, de Coligny... Il - jouit de la terre de Dalet et de celle de Malintras. - -Dalet et Malintras sont en Auvergne, dans le département du Puy-de-Dôme. -Dalet est dans l'arrondissement de Clermont, canton de Pont-sur-Allier, -à huit kilomètres de Billom et onze de Clermont: il y a environ quatorze -cent cinquante habitants. Autrefois ce lieu était dans l'élection de -Clermont, intendance de Riom, et l'on y comptait cent soixante dix-huit -feux. Malintras est dans cette petite vallée qu'on nomme la Limagne, à -plus de deux lieues des montagnes. On y voit une roche qui distille la -poix minérale et qui est à quelque distance, au nord, de Pont-Château. -Malintras comptait soixante-six feux. Cressia est dans l'arrondissement -de Lons-le-Saulnier, canton d'Orgelet. Coligny est un bourg du -département de l'Ain, à vingt-deux kilomètres, au nord, de Bourg; sa -population est de seize à dix-sept cents individus. Ce lieu est sur les -confins de l'ancienne Franche-Comté, à sept lieues sud-ouest d'Orgelet, -dans un pays que l'on nomme _Revermont_, et que la maison de Châtillon -prétendait avoir possédé autrefois en souveraineté. Il y avait dans ce -bourg quarante-six feux. (Voyez d'Expilly, _Dictionnaire géogr. et -polit. des Gaules et de la France_, t. II, p. 389.) - - Page 157, ligne 19: Ainsi Bussy avait tout arrangé et tout prévu - pour le bonheur de sa fille chérie. - -On lit dans la _Suite des Mémoires du comte de Bussy-Rabutin_, in-8º, -ms. de l'Institut, p. 129 verso, un billet de madame de Scudéry en date -du 17 juillet 1675, auquel Bussy fait une réponse qui commence ainsi: - - «A Chaseu, ce 30 juillet 1675. - -«Le mariage de ma fille n'est pas encore fait, madame; il ne se fera -qu'au mois de novembre prochain. Si dans ces marchés il n'y avait point -d'intérêts mêlés, ils iraient beaucoup plus vite. Mais puisque nous -sommes sur cette matière, je vous veux dire les réflexions que je viens -de faire.» - -Ces réflexions sont celles d'un libertin impie, et elles ne peuvent être -transcrites. - - -CHAPITRE VIII. - - Page 169, lignes 8 et 9: «Vous ne sentez pas, dit-elle, l'agrément - de vos lettres; il n'y a rien qui n'ait un tour surprenant. - -Voici le jugement de la Rivière sur les lettres de madame de Grignan: - -«Madame de Grignan avait beaucoup d'esprit, mais il paraît qu'elle en -était bien aise. Son style est rêvé, peigné, limé, périodique et ne -tient rien du style épistolaire, qui ne demande, je crois, qu'une noble -simplicité.» _Lettres choisies de M. de la Rivière_, t. II, p. 217 et -218. - -Dans la note, il est dit que les lettres de madame de Grignan n'étaient -point perdues, comme le prétend le chevalier Perrin, et que M. de -Bouhier les vit autographes entre les mains de madame de Simiane, à Aix -en Provence, en 1733. Ainsi c'est madame de Simiane qui les a détruites. -Mais madame de Grignan n'écrivit pas qu'à sa mère, et ceux qui -recevaient des lettres de cette reine de Provence devaient les -conserver. - -Rivière, en écrivant à l'abbé Pavillon le 28 août 1737, dit: «Tant mieux -pour le public si on n'imprime pas les lettres de madame de Grignan. -C'était un esprit guindé, périodique, plus propre à l'éloquence du -barreau et de la chaire qu'aux agréments de la société. Je l'ai connue: -elle ne se permettait aucune négligence dans le style, ce qu'elle -portait jusqu'à l'affectation; d'ailleurs, d'une très-aimable figure. -Mais il y avait une mer de séparation entre la mère et la fille dans ce -qui regardait la gentillesse de l'esprit.» - - -CHAPITRE IX. - - Page 174, ligne 8: Le comte de Schomberg avait défait les - Espagnols; et note 2: _Relation de ce qui s'est passé en - Catalogne_. - -Cette relation est curieuse et faite par un homme qui se trouvait dans -l'armée de Schomberg. Elle commence par la conspiration qui fut ourdie -pour livrer Perpignan et Villefranche aux Espagnols. Il y a toute la -matière d'un drame des plus animés et des plus tragiques. A la fin se -trouve l'histoire plus plaisante du marquis de Rivarolles, qui eut une -cuisse emportée au siége de Boulau. Il fut transporté à Toulouse, et là -il tint à des femmes quelques propos légers sur Madaillan, qui avait -servi d'aide de camp à Schomberg. Madaillan, instruit par une lettre, -part de Paris en poste, arrive à Toulouse, et envoie à Rivarolles un -cartel pour le prier de monter à cheval, attendu qu'il veut se battre -avec lui. Le chirurgien de Rivarolles se présente de la part de ce -dernier chez Madaillan, et est introduit sans dire quelle est sa -profession ni quelle réponse il venait faire. Il déploie tranquillement -sa trousse d'instruments tranchants, à la grande surprise de Madaillan, -qui lui demande si c'est lui que M. de Rivarolles envoie pour répondre à -son billet. «C'est moi-même, monsieur, dit l'autre. Monsieur de -Rivarolles est tout prêt à se battre avec vous, comme vous le désirez; -mais, persuadé qu'un brave comme vous ne voudrait pas se battre avec -avantage, il m'a ordonné de vous couper une jambe auparavant, afin que -toutes choses soient égales entre vous.» La colère de Madaillan fut -grande. Mais le maréchal de Schomberg lui dépêcha le baron de -Montesquiou, qui, en sa qualité de subdélégué des maréchaux de France, -avait qualité pour arranger ces sortes d'affaires et qui parvint à -réconcilier les deux guerriers. (_Relation_, etc., p. 185-193.)--Barbier -(_Dict. des Anonymes_, t. III, p. 186, no 16,048) commet une erreur en -attribuant deux volumes à cet ouvrage. Il y a une seconde partie à ce -volume, intitulée _Suite de la Relation de ce qui s'est passé en -Catalogne depuis le commencement de la guerre jusqu'à la paix_; Paris, -Quinet, 1679, in-12 (170 pages). - -Plus loin, sous le no 16,057, Barbier mentionne une _Relation de la -campagne de Flandre en 1678_, par D. C.; Paris, Quinet, 2 vol. in-12. Il -attribue (t. III, p. 186) cet ouvrage, ainsi que le précédent à de -Caisses; puis dans les corrections de ce volume, p. 670, à un M. Doph, -quartier maître général et ensuite général des dragons. - - -CHAPITRE X. - - Page 190, lignes 28 à 30: A la reine, que... le roi n'avait jamais - entièrement négligée. - -«Le roi couchait toutes les nuits avec la reine; mais il ne se -comportait pas toujours comme le tempérament espagnol le désirait.» -(_Lettres de_ MADAME, du 17 avril 1719.) - -«La reine avait une telle affection pour le roi qu'elle cherchait à lire -dans ses yeux tout ce qui pouvait lui faire plaisir. Pourvu qu'il la -regardât avec amitié, elle était gaie toute la journée. Elle se -réjouissait que le roi couchât avec elle maritalement; elle en devenait -si gaie qu'on le remarquait chaque fois. Elle n'était pas fâchée qu'on -la raillât à ce sujet. Alors elle riait, clignotait, et se frottait les -mains.» (_Lettres de_ MADAME, du 24 mars 1719.) - - Page 195, lignes 4 et 5: Le roi enjoignit au ministre de prévenir - les désirs de celle qu'il lui était si pénible d'affliger. - -La lettre que Louis XIV écrit à Colbert, de son camp près de Dôle, le 9 -juin 1674, est curieuse, parce qu'elle nous fait voir ce roi, honteux -des exigences de madame de Montespan dans l'état de pénurie où l'on se -trouvait, dissimulant avec son ministre. Nous transcrirons ici une -partie de cette lettre, qui est tout entière de la main de Louis XIV. -Nous conservons l'orthographe: «Madame de Montespan ne veut pas -absoluement que je lui donne des pierreries; mais afin quelle n'en -manque pas, je désire que vous faciés travailler à une petite cassette -bien propre, pour mettre dedans ce que je vous diray ci-après, afin que -j'ai de quoy lui prester à point nommé ce qu'elle desirera. Cela parois -extraordinaire; mais elle ne veut point entendre raison sur les -présens.» Vient ensuite l'énumération d'une parure de femme en perles et -en diamants, tellement longue et minutieuse que Louis XIV a dû la copier -d'après celle que lui avait transmise madame de Montespan. Il termine -par ces mots: «Il faudra faire quelque depense à cela, mais elle me sera -fort agréable; et je désire qu'on la fasse sans ce (sic) presser. Mandés -moy les mesures que vous prendrez pour cela, et dans quel temps vous -pouvez avoir tout.» - -Louis XIV écrit encore à Colbert, du camp de Gembloux, le 28 mai 1675 -(_Lettres_, t. V, p. 533): - -«Madame de Montespan m'a mandé que vous avez donné ordre qu'on achète -des orangers, et que vous lui demandez toujours ce qu'elle désire. -Continuez à faire ce que je vous ai ordonné là -dessus, comme vous avez -fait jusqu'à cette heure.» - -Du camp de Latines, le roi adresse à Colbert, au sujet de madame de -Montespan, une lettre encore plus remarquable, qui répond à celle de -Colbert rendant compte de la commission dont il avait été chargé: - - «A M. COLBERT. - - «Au camp de Latines, le 8 juin 1675. - -«La dépense est excessive, et je vois par là que, pour me plaire, rien -ne vous est impossible. Madame de Montespan m'a mandé que vous vous -acquittiez fort bien de ce que je vous ai ordonné, et que vous lui -demandez toujours si elle veut quelque chose. Continuez à le faire -toujours. Elle me mande aussi qu'elle a été à Sceaux (Sceaux appartenait -à Colbert), où elle a passé agréablement la soirée. Je lui ai conseillé -d'aller un jour à Dampierre, et je l'ai assurée que madame de Chevreuse -et madame Colbert l'y recevraient de bon cÅ“ur. Je suis assuré que vous -en ferez de même. Je serai très-aise qu'elle s'amuse à quelque chose; et -celles-là sont très-propres à la divertir. Confirmez ce que je désire; -continuez à faire ce que je vous ai mandé là -dessus, comme vous avez -fait jusqu'à cette heure.» - -Cinq jours avant la lettre que l'on vient de lire, Pellisson, qui avait -suivi Louis XIV à la guerre, écrivait, de ce même camp de Latines: - - «_Du 3 juin 1675._ - -«Le roi dit hier au soir au petit coucher, avec plaisir, le grand -accueil qui avait été fait à Bourdeaux à M. le duc du Maine, et la joie -que le peuple témoigna de le voir, bien différente des mouvements où il -était naguère, comme marquant son repentir. C'est madame de Maintenon -qui lui a écrit une lettre de huit à dix pages. Elle marque qu'en son -absence le petit prince répondit de son chef aux harangues; et qu'au -retour l'ayant trouvé fort échauffé de la foule qui avait été auprès de -lui, elle lui demanda s'il n'aimerait pas mieux n'être point fils du roi -que d'avoir toute cette fatigue: à quoi il répondit que non, et _qu'il -aimait mieux être fils du roi_. Le roi dit encore que les médecins de -Bourdeaux, aussi incertains que ceux de Paris, avaient été d'avis qu'il -allât à Bourbon plutôt qu'à Baréges; et que le lendemain ils avaient -conclu, au contraire, qu'il essayât des eaux de Baréges avant d'aller à -Bourbon.» (PELLISSON, _Lettres historiques_, t. II, p. 278.) - -Il est évident, d'après la date de ces deux lettres, que la veuve -Scarron ne pouvait alors avoir la moindre idée de balancer dans le cÅ“ur -de Louis XIV l'amour qu'il avait pour Montespan; qu'elle cherchait -seulement à être agréable au monarque et à gagner sa confiance comme -gouvernante de ses enfants.--Par une autre lettre datée du camp de -Latines le 7 juin 1675, Louis XIV dit au maréchal duc d'Albret que rien -ne pouvait lui être plus sensible que ce qu'il lui avait écrit touchant -son fils le duc du Maine, ainsi que les soins qu'il prenait pour sa -personne. - - Page 195, lignes 7 à 10: A l'aide de Mansart et de Le Nôtre..., - elle fit de Clagny un magnifique séjour. - -Il ne reste plus rien de ce chef-d'Å“uvre de Le Nôtre et de -Jules-Hardouin Mansart. Tout est rasé.--En 1837, le grand _Dictionnaire -de la poste aux lettres_ comptait vingt habitants sur la butte de -Clagny, laquelle n'est pas même visitée par les voyageurs curieux qui -vont voir Versailles. Le château de Clagny n'était pas terminé en -septembre 1677, ainsi qu'on le voit par une lettre de Mansart à Colbert, -date du 7 de ce mois, publiée par DELORT dans les _Voyages aux environs -de Paris_, 1821, in-8º, t. II, p. 98. - - Page 197, lignes 13 à 16: C'était le P. la Chaise... On le disait - sévère. - -Le P. François de la Chaise succéda au P. Ferrier; on fit alors ce -couplet, sur l'air _Aimons, tout nous y convie_: - - Chantons, chantons, faisons bonne chère. - Notre monarque vainqueur - A pris pour son confesseur - La Chaise, père sévère. - Il promet que, dans un an, - Il rendra la Montespan - Compagne de la Vallière. - -(_Chansons historiques_, manuscrit de Maurepas, Bibl. nation., vol. IV, -p. 189.) - - Page 201, ligne 23: Ne soit que la même chose avec celui de M. de - Condom. - -On ne s'explique pas bien comment Bossuet, qui avait été nommé à -l'évêché de Condom le 13 septembre 1669, suivant M. de Bausset, mais qui -avait donné sa démission en 1671 et avait été remplacé dans cet évêché -par Goyon de Matignon le 31 octobre de la même année, est appelé _M. de -Condom_, non-seulement dans une lettre de madame de Sévigné à M. de -Grignan sur la mort de Turenne, du 31 juillet 1675, mais encore dans -plusieurs autres de Louis XIV, de 1676 et 1677. (LOUIS XIV, _Å’uvres_, -t. V, p. 549, 566, 572.) - -Dans le _Gallia christiana_, t. II (1720, in-folio), p. 972, il est dit -que Jacob-Bénigne Bossuet fut désigné évêque de Condom le 13 septembre -1668 et inauguré le 21 septembre 1670. Il fut désigné évêque le 13 -septembre 1669.--Ni M. de Bausset ni M. de Barante, dans son article de -la _Biographie universelle_ n'ont copié cette erreur du _Gallia -christiana_; mais elle a été reproduite par M. Jules Marion dans son -estimable travail de l'_Annuaire historique_ pour 1847. Bossuet se démit -de l'archevêché de Condom le 31 octobre 1671, et Jacob Goyon de -Matignon, de la famille des comtes de Thorigny, fut nommé à sa place -(_Gall. christ._, t. II, p. 974). Cependant Bossuet, jusqu'à sa -nomination à l'évêché de Meaux, signait _ancien évêque de Condom_; et -madame de Sévigné, et tout le monde, et Louis XIV lui-même, dans des -lettres de 1675 et 1676, l'appelaient _monsieur l'évêque de Condom_. -(Conférez LOUIS XIV, _Å’uvres_, t. V, p. 549, 566, 572, et SÉVIGNÉ, -lettre du 31 juillet 1675, sur la mort de Turenne.) C'est une singulière -anomalie, qui dérouterait bien des critiques si elle n'était expliquée -par la grande célébrité de Bossuet et l'obscurité de son successeur. - - Page 203, lignes dernières: Et d'y vivre aussi chrétiennement - qu'ailleurs; et note 452: CAYLUS, _Souvenirs_. - -On a dit que madame de Caylus paraît avoir confondu ensemble, dans cet -endroit, les souvenirs de deux années, qu'il fallait séparer. Mais on -n'a pas remarqué que ces souvenirs seraient bien plus fautifs dans la -page précédente (t. LXVI, p. 387) de la collection des _Mémoires_, édit. -1828, in-8º, ou page 95 de l'édit. Renouard, 1806, in-12, si, au lieu -de _madame de Montausier_, on ne corrigeait pas _M. de Montausier_. Il y -avait trop de temps que madame de Montausier était morte à l'époque -dont parle madame de Caylus pour qu'une telle erreur pût lui être -attribuée. - - Page 205, lignes 9 et 10: Louis XIV avait trente-sept ans. - -Néanmoins depuis deux ans le roi portait perruque, comme on le voit par -cette lettre de Pellisson, en date du 13 août 1673: - -«Le roi a commencé ces jours passés à mettre une perruque entière, au -lieu du tour de cheveux. Mais elle est d'une manière toute nouvelle: -elle s'accommode avec ses cheveux, qu'il ne veut point couper, et qui -s'y joignent fort bien, sans qu'on puisse les distinguer. Le dessus de -la tête est si bien fait et si naturel qu'il n'y a personne sans -exception qui n'y ait été trompé d'abord, et ceux-là même qui l'avaient -suivi tout le jour. Cette perruque n'a aucune tresse; tous les cheveux -sont passés dans la coiffe l'un après l'autre. C'est le frère de la -Vienne qui a trouvé cette invention et à qui le roi en a donné le -privilége. Mais on dit que ces perruques coûteront cinquante pistoles.» -(PELLISSON, _Lettres historiques_, t. I, p. 395.) - - Page 207, ligne première: Dans son épître à Seignelay. - -On n'a pas encore découvert, que je sache, d'édition séparée de cette -belle épître de Boileau, comme Berriat Saint-Prix (t. I, p. CXLV) en a -trouvé une de l'épître à Guilleragues; Paris, Billaine, 1674, in-4º de -10 pages.--L'édition des _Å’uvres diverses du sieur_ D*** (Despréaux); -Paris, Denys Thierry, 1675, in-12, ne contient que cinq épîtres, et -celle de Guilleragues est la dernière. - - Page 207, lignes 5 et 6: A ce brillant spectacle Pomponne conduisit - l'abbé Arnauld, son frère, revenu de Rome. - -Antoine Arnauld, né en 1616, fils aîné du célèbre Arnauld d'Andilly, -accompagna l'un de ses oncles, Henri Arnauld, abbé de Saint-Nicolas, qui -fut nommé, en 1645, chargé des affaires de France à Rome. L'oncle et le -neveu, à cette date, étaient hommes du monde, peu rigoristes, honnêtes -gens, mais non scrupuleux. De retour en France en 1648, ils se -trouvèrent insensiblement pris par les opinions et par les mÅ“urs de -leurs familles. Ils se retirèrent quelque temps à Port-Royal-des-Champs -auprès de M. d'Andilly. L'abbé de Saint-Nicolas devint un janséniste -fervent; il fut nommé évêque d'Angers. Son neveu, dégagé d'ambition et -sans beaucoup de zèle, le suivit dans son évêché, tout en conservant ses -relations de la ville et de la cour. Pendant le ministère de son frère -cadet M. de Pomponne, il obtint, en 1674, l'abbaye de Chaumes en Brie. -Il ne fut janséniste que parce qu'il était de la famille Arnauld, et -resta toujours volontiers homme du monde. Dans ses Mémoires il s'est -beaucoup plaint de son père, dont il était le fils aîné et nullement le -Benjamin: c'est M. de Pomponne qui était ce Benjamin. Après la disgrâce -de ce dernier (1679), l'abbé Arnauld se retira près de l'évêque -d'Angers, dont il administra le temporel. Il mourut en février 1698, âgé -de quatre-vingt-deux ans. Il a laissé d'assez agréables Mémoires, et son -récit s'étend entre les années 1634 et 1675. - - -CHAPITRE XI. - - Page 211, ligne 12: Elle en fut le chef. - -On créa pour elle alors le surnom de _matriarche_. Voyez les _Nouvelles -à la main de la cour_ du 9 mars 1685, p. XXXVIJ, dans la _Correspondance -administrative_ du règne de Louis XIV, recueillie par Depping. Déjà , dès -cette époque, l'envie répandait le bruit que madame de Maintenon -disposait de tous les emplois; que Louis XIV n'entreprenait rien sans -avoir son avis; qu'elle voulait se faire déclarer reine, et que le -Dauphin s'y opposait; enfin, tous les _cancans_ de cour que Saint-Simon -a consignés trente ans après. - - Page 211, lignes 14 et 15: Françoise d'Aubigné fut aimée et - recherchée par madame de Sévigné; et la note. - -Madame de Maintenon, lorsqu'elle voyait le plus madame de Sévigné, et -que celle-ci l'invitait à souper, demeurait rue des Tournelles ainsi que -Ninon, par conséquent très-près de la seconde demeure de madame de -Sévigné au Marais (rue Saint-Anastase); et quand elle fut arrivée à un -grand degré de faveur auprès du roi, qu'elle l'eut ramené à la reine et -séparé de madame de Montespan, elle ne discontinua pas entièrement ses -relations avec madame de Sévigné. Dans une lettre de cette dernière à sa -fille, on trouve ces lignes, remarquables surtout par leur date (29 mars -1680): «Madame de Maintenon, par un hasard, me fit une petite visite -d'un quart d'heure. Elle me conta mille choses de madame la Dauphine, et -me reparla de vous, de votre santé, de votre esprit, du goût que vous -avez l'une pour l'autre, de votre Provence, avec autant d'attention qu'à -la rue des Tournelles.» - - Page 212, ligne 18: De son ami qui voyage. - -Les éditeurs de madame de Sévigné ont cru qu'il s'agissait ici du voyage -que madame de Maintenon fit à Anvers avec le duc du Maine. Ils se -trompent. Madame Scarron arriva à Anvers au commencement d'avril 1674. - -Les Mémoires de Saint-Simon et des dames de Saint-Cyr constatent bien -que ce voyage de madame Scarron à Anvers est antérieur à celui fait à -Baréges, mais il n'en donnent pas la date. La Beaumelle s'y était trompé -dans la première _Vie de madame de Maintenon_, in-18, Nancy, 1753, p. -200. Mais il a pu, d'après les lettres qu'il avait retrouvées, corriger -cette erreur dans ses _Mémoires pour servir à l'histoire de Maintenon_ -(t. II, p. 41, liv. IV, et p. 118, liv. V). Cette date paraît bien -fixée: cependant mademoiselle de Montpensier dit dans ses Mémoires (t. -LXVI, p. 403), en parlant du duc du Maine: «Avant qu'il fût reconnu, -madame de Maintenon l'avait mené en Hollande.» Il fut légitimé en -décembre 1673; mais l'arrêt n'était peut-être pas enregistré en mars ou -en avril 1674, époque du départ de madame Scarron. - - Page 212, ligne 28: Son caractère ne se démentit jamais. - -Dans ses entretiens avec mademoiselle d'Aumale et les élèves de -Saint-Cyr, madame de Maintenon dit: - -«Il ne faut rien laisser voir à nos meilleurs amis dont ils puissent se -prévaloir quand ils ne le seront plus. Il est bien fâcheux d'avoir à -rougir dans un temps de ce que l'on aura fait ou dit par imprudence dans -un autre..... Je le disais il y a bien des années à madame de Barillon: -Rien n'est plus habile qu'une conduite irréprochable.» (_Entretiens de -mad._ DE MAINTENON, la Beaumelle, t. III, p. 153.) - -«Je me regarde, disait-elle encore, comme un instrument dont Dieu daigne -se servir pour faire quelque bien, pour unir nos princes, pour soutenir -et soulager les malheureux, pour délasser le roi des soins du -gouvernement. Dieu saura bien briser cet instrument quand il le jugera -inutile; et je n'y aurai pas de regret.» - -Et toute sa conduite, avant comme après son élévation, avant comme après -la mort du roi, fut d'accord avec ses paroles, et prouve qu'elles -étaient sincères. - - Page 213, ligne 5: Quelques _pastiches_ maladroits des lettres de - Coulanges et de Sévigné. - -Je désigne ici quelques _fragments de lettres_ fort courts, supposés -extraits de lettres adressées à madame de F*** et à madame de St-G***, -dans la première édition des lettres tirées de la nombreuse -correspondance de madame de Maintenon. Dans la seconde édition, madame -de F*** se trouve être madame de Frontenac, et madame de St-G*** madame -de Saint-Géran. Tous ces intitulés ont été reproduits dans plusieurs -éditions des _Lettres de Maintenon_[895], et ils ont plus ou moins -induit en erreur les historiens et les biographes. Il n'en est pas de -même d'une lettre entière supposée écrite par madame de Maintenon, -imprimée d'abord sans aucune date et sans indication de la personne à -qui elle devait être adressée. Cette lettre semblait avoir été réprouvée -comme suspecte par tous ceux qui ont écrit sur madame de Maintenon. Deux -écrivains très-spirituels se sont avisés de s'en servir comme d'un -document authentique pour pouvoir établir ainsi à une date certaine le -commencement de la passion imaginaire de Louis XIV et de madame de -Maintenon, et expliquer à leur manière la nature de leur liaison. Le -style de cette lettre ne ressemble aucunement à celui de madame de -Sévigné. On y trouve l'expression de _gros cousin_, copiée d'une des -lettres de celle-ci pour désigner le ministre Louvois, cousin de madame -de Coulanges. Or, l'on sait que madame de Maintenon, soigneuse de sa -dignité dans l'abaissement où le sort l'avait placée, ne parlait pas des -ministres, des personnages riches et puissants avec le ton familier des -Sévigné, des Coulanges et des grandes dames de la cour. - - [895] _Lettres de_ MAINTENON; Nancy (Francfort), 1752, in-12, t. - I, p. 76, 92, 123, 143, 145, 147, 150, 152, 156, 160, 163, 242, - 249; t. II, p. 13, 110, 113, 118.--_Ibid._, édit. de Dresde, - 1753, p. 81, 113, 128, 136, 153, etc.; édit. d'Amsterdam, 1755, - p. 48-68; édit. de Paris, 1806, p. 108 à 114. - -Enfin, on y trouve répété, avec une légère variante, ce mot que Voltaire -a le premier rapporté: «Je le renvoie toujours affligé, mais jamais -désespéré.» Mais Voltaire le place dans une lettre à madame de -Frontenac, d'accord en cela avec la Beaumelle. Cette antithèse a paru si -charmante à tous les historiens de Louis XIV ou de Maintenon que pas un -seul ne s'est abstenu de la répéter. Aucun n'a réfléchi que, si ces -paroles ont été écrites par madame de Maintenon, c'est dans un sens -tout différent de celui qu'on leur prête, dans tout autre circonstance -que celle qu'on suppose, puisque autrement elles impliqueraient que -Françoise d'Aubigné, pour réussir dans ses ambitieux desseins, ne -craignait pas de recourir aux artifices d'une coquette perfide ou d'une -habile courtisane. Quoique dans la seule édition complète du _Recueil -des lettres de Maintenon_ qu'il ait avouée[896] (Amsterdam, 1755, grand -in-12) la Beaumelle n'ait point inséré cette lettre supposée écrite à -madame de Coulanges, cependant il l'a connue; car à la page la plus -fausse et la plus romanesque qu'il ait tracée dans ces Mémoires, où il y -en a tant de vraies, de curieuses et de bien écrites, il a cité la -phrase la plus invraisemblable. Puis il ajoute: «L'original de cette -lettre est entre les mains de M. de M**, de l'Académie» (t. II, p. 193, -liv. VI, chap. III). Ceux, qui l'ont donnée depuis sans date, ainsi que -ceux qui l'ont imprimée, n'ont point vu cet original, puisqu'ils n'ont -su ni à qui elle était adressée ni comment elle était datée[897]. Quant -à lui, il assigne à cette lettre une date différente de celle que lui -ont donnée les historiens dont j'ai parlé, et il prête aux visites de -Louis XIV un motif tout autre que celui qu'ils ont supposé. - - [896] Voyez l'Avertissement qui est en tête de l'édit. - d'Amsterdam, 1755, grand in-12, sorte de prospectus des quinze - volumes de mémoires et lettres, qui ne se trouve, je crois, que - dans cette édition. - - [897] Voyez les dernières édit. des _Lettres_ de Maintenon, de - Léopold Collin. - -Les fragments ont été habilement fabriqués: ceux qui les ont écrits ont -puisé ce qu'ils ont de vrai dans les lettres adressées par madame de -Maintenon à l'abbé Gobelin. Françoise d'Aubigné fut, dans tout le temps -de sa prospérité, justement tourmentée par la crainte de ne pouvoir -concilier le soin de son salut avec les grandeurs et la vie agitée que -son ambition lui avait faite, et elle eut besoin d'être toujours -rassurée par des directeurs de conscience auxquels elle pût soumettre -ses craintes et confier les plus secrets mouvements de son cÅ“ur. L'abbé -Gobelin et Godetz-Desmarets, évêque de Chartres, furent ces deux prêtres -ou directeurs. Elle avait bien choisi: ni l'un ni l'autre -n'ambitionnaient ni la gloire de l'éloquence de la chaire ni les hautes -dignités de l'Église; ni l'un ni l'autre n'appartenaient à l'ordre trop -puissant des jésuites: c'étaient deux bons prêtres, uniquement occupés à -remplir avec ponctualité tous les devoirs de leur saint ministère, -très-attentifs à bien diriger une âme aussi belle, aussi pieuse que -celle de Françoise d'Aubigné. Le second surtout (Godetz-Desmarets), -sans ambitionner l'éclat que donne le talent des controverses -ecclésiastiques, sut, à une époque qui est hors des limites de ces -_Mémoires_, lui inspirer une assez haute idée de son savoir théologique -pour obtenir d'elle une soumission entière à ses décisions, et la faire -marcher dans cette nuit de la foi, comme dit madame de la Sablière[898], -au milieu des écueils que le jansénisme, le jésuitisme et le quiétisme -lui présentaient sur sa route et vers lesquels l'attiraient ou la -tiraillaient en sens contraire son alliance de famille avec le cardinal -de Noailles, sa tendresse pour Fénelon, et sa déférence obligée pour le -P. la Chaise. - - [898] _Lettres manuscrites de madame_ DE LA SABLIÈRE _à l'abbé de - Rancé_. - -Au nombre des écrits de madame de Maintenon ou relatifs à cette -fondatrice, écrits que les dames de Saint-Cyr conservaient dans leurs -archives et dont les élèves s'occupaient à faire des copies, les plus -précieux pour la bien connaître sont les lettres que lui a écrites -l'évêque de Chartres[899] et celles qu'elle-même écrivit à l'abbé -Gobelin. - - [899] _Lettres de messire_ GODETZ; Bruxelles, 1755.--_Lettres de - Maintenon_, t. II. - -Quoique très-courts, les fragments dont j'ai parlé décèlent leur -fausseté par le style toujours imité de Coulanges et de Sévigné, mais -plus encore par leur objet, qui est de donner à l'opinion un vague sur -la nature des liaisons de Louis XIV et de Maintenon, vague qui plaisait -tant aux imaginations des élèves et des dames de Saint-Cyr. Et ce qui -prouve encore plus que ces fragments et quelques autres passages de -lettres sont adressés aux mêmes personnes, ou ont été détournés, par des -changements et interpolations, de leur sens naturel et vrai, dans un -intérêt romanesque, c'est le nom des personnes auxquelles on suppose que -ces lettres ont été écrites. A la cour il n'y a jamais que de petites -indiscrétions calculées. A qui persuadera-t-on d'ailleurs que madame -Scarron, connue, dès sa plus tendre jeunesse, pour sa discrétion et sa -circonspection, se soit avisée d'écrire à qui que ce soit ce qui pouvait -se passer entre elle et Louis XIV dans leurs mystérieux tête-à -tête? - -Voltaire dit que madame de Frontenac était cousine de madame de -Maintenon; et cependant madame de Maintenon paraît avoir été liée moins -intimement avec elle qu'avec madame de Saint-Géran. Celle-ci est assez -connue par la lecture de ces _Mémoires_. On sait qu'elle fut quatre ans -expulsée de la cour, et qu'elle fit auprès de madame de Maintenon de -constants et inutiles efforts pour être admise à Marly. - -Sans doute mesdames de Frontenac et de Saint-Géran, devenues plus -régulières et peut-être sincèrement pieuses dans un âge avancé, -s'attirèrent la considération et les égards qui leur étaient dus, et -firent le charme des sociétés par leur esprit, leur amabilité et le -suprême talent du savoir-vivre. Saint-Simon l'atteste, et c'est -vraisemblablement le souvenir des temps de leur liaison avec madame de -Maintenon qui aura donné l'idée de placer leur nom en tête des fragments -dont j'ai parlé; mais alors même celle-ci ne leur aurait pas confié des -secrets qui étaient aussi ceux du roi. Ainsi les fragments de lettres ou -tous les passages de lettres qui tendent à accréditer une telle pensée -sont nécessairement apocryphes, ou formés à l'aide de phrases habilement -tronquées ou rapprochées de manière à présenter un sens tout opposé à -celui qu'elles avaient; ou bien ce sont de véritables lettres écrites -par une personne autre que madame de Maintenon et pour d'autres que -mesdames de Frontenac et de Saint-Géran. - -Cent ans se sont écoulés depuis que Voltaire et la Beaumelle ont écrit -sur le siècle de Louis XIV; et l'on trouve dans les ouvrages de ces deux -auteurs relatifs à madame de Maintenon des faits qui se heurtent, des -jugements inconciliables, qui les mettent en contradiction l'un avec -l'autre. Les écrivains qui depuis ont tracé des histoires ou des notices -sur la vie de Françoise d'Aubigné, ont rarement manqué l'occasion de se -plaindre de la légèreté de Voltaire; mais ils témoignent un mépris -complet pour l'ouvrage de la Beaumelle, et s'abstiennent de le citer, ou -ne le citent que fort rarement. Je suis néanmoins en mesure d'affirmer -qu'on ne trouve chez aucun d'eux un seul fait, un seul détail de faits, -une seule appréciation favorable ou défavorable, une seule vérité, une -seule erreur qui ne soit dans la Beaumelle. - -Comme pour décrire ce chapitre XI, restreint dans son objet, nous avions -besoin d'embrasser dans notre pensée l'histoire de la longue vie de -madame de Maintenon, nous avons été obligé, pour faire avec fruit cette -étude, de soumettre à un examen critique les écrits de la Beaumelle et -de Voltaire sur le siècle de Louis XIV et particulièrement sur madame de -Maintenon, et aussi la controverse violente qui s'est élevée entre les -deux auteurs.--Jamais sujet plus curieux d'investigation sur l'histoire -du grand siècle et sur l'histoire littéraire du siècle qui l'a suivi ne -s'était rencontré sur notre route. Mais, après avoir terminé cet examen, -nous nous sommes aperçu qu'il était trop volumineux, et que s'il devait -être publié un jour comme un appendice à ces _Mémoires_, ce n'était pas -dans ce volume qu'il était convenable de le placer. - - Page 213, ligne 7: Des mémoires rédigés d'après des bruits de cour. - -Du nombre de ces bruits de cour, je mets l'avis du duc de Montausier, -donné au roi au sujet du refus d'absolution fait à madame de Montespan, -le petit colloque de Louis XIV et de Bourdaloue sur la retraite de -madame de Montespan à Clagny, et l'entretien de Bossuet et de madame de -Montespan rapporté par M. de Bausset.--Relativement à ce dernier fait, -le judicieux M. de Bausset lui-même, qui l'a rapporté d'après le -manuscrit de l'abbé Ledieu (l'abbé Ledieu n'entra chez Bossuet qu'en -1684), fait observer que le caractère de madame de Montespan et celui de -Bossuet le rendent invraisemblable. M. de Bausset a été trompé, pour ce -qui concerne Montausier, par le fragment d'une lettre de madame de -Maintenon à madame de Saint-Géran, qui est apocryphe.--M. de Montausier -a contribué sans doute avec Bossuet à la détermination du roi: madame de -Caylus le dit[900]; mais ce ne fut pas de la même manière que le raconte -la lettre apocryphe. Il n'était point dans le caractère de Louis XIV de -consulter le duc de Montausier ou le maréchal de Bellefonds sur les -matières ecclésiastiques. Hors de la chaire évangélique et du -confessionnal, si quelqu'un de ses sujets se permettait de lui faire des -observations sur la religion, c'est qu'il lui en avait donné l'ordre. Il -ne plaisantait pas non plus avec le père Bourdaloue, homme sérieux, et -incapable de faire au roi, qui lui adressait la parole d'une manière -aimable, une réponse aussi impertinente que celle qu'on lui a prêtée. - - [900] CAYLUS, _Souvenirs_, coll. des Mém. sur l'hist. de France, - édit. 1828, t. LXVI, p. 387, in-8º.--_Ibid._, édit. de Renouard, - 1806, in-12, p. 95. Mais dans ces deux éditions, au lieu de - _madame de Montausier_, il faut lire _M. de Montausier_. Madame - de Montausier était morte depuis longtemps. - - Page 214, ligne 14: La grâce, l'esprit, la raison, s'unissaient en - elle dans une juste mesure... Naturellement impatiente, vive, - enjouée. - -L'âge ne la changea point, et ne la rendit pas plus sévère.--Voici ce -qu'elle disait à ses élèves de Saint-Cyr: - -«Pour vivre ensemble, la raison est préférable à l'esprit... Rien n'est -plus aimable que la raison; mais il ne faut pas la trop prodiguer, et -les personnes qui raisonnent toujours ne sont pas raisonnables. Ce qu'il -est plus essentiel de mettre dans le commerce de la vie, c'est de la -complaisance, de la joie, du badinage, du silence, de la condescendance -et de l'attention aux autres. La piété peut sauver sans la raison; mais -la piété ferait beaucoup plus de bien si elle était réglée par la -raison.» (_Conversations de madame la marquise_ DE MAINTENON; 3e édit., -Paris, Blaise, 1828, in-18, p. 8 et 9, _convers._ I.) - -«L'esprit ne nous rend pas plus sage ni plus heureuse. La raison nous -rend aimable; elle résiste aux passions, aux préventions; elle nous fait -surmonter nos passions, et souffrir celles des autres.» (_Ibid._, p. -100, _conv. XXIV._) - -«Un esprit mal fait, disait-elle, m'effraye partout.» (Voyez _Mémoires -de Maintenon_, recueillis pour les dames de Saint-Cyr, 1826, in-12, p. -VIII de la préface et p. 271.) - - Page 214, ligne 20: Le besoin de se faire des protecteurs la rendit - insinuante et complaisante. - -«Elle fait consister tous les moyens de plaire dans un seul, la -politesse. Mais la grande politesse consiste à ménager en tout et -partout les gens avec lesquels nous vivons, à ne les blesser jamais, à -entrer dans tout ce qu'ils veulent, à ne contrarier ni ce qu'on dit ni -ce qu'on fait.» (_Conversations de la marquise_ DE MAINTENON, 3e édit., -1828, in-18, _Dialogue sur la société_, p. 3.) - -«En société, on n'a qu'à choisir entre la souffrance ou la contrainte.» -(_Ibid._, p. 21.) - -Quand on s'accoutume de bonne heure à s'occuper des autres, on s'en fait -une habitude. Toute la philosophie de madame de Maintenon et le secret -de son élévation se trouvent dans ces paroles qu'elle a écrites, où elle -fait elle-même son éloge: - -«Je persiste à croire que la jeunesse ne peut être trop sensible aux -louanges des honnêtes gens, à l'honneur, à la réputation; et qu'il n'y a -que les courages élevés qui soient capables de tout faire pour y -parvenir.» (_Conv._, t. I, p. 239.) - - Page 214, ligne 20, et p. 215, ligne première: La religion, à - laquelle... elle savait faire parler un langage doux, juste, - éloquent et court, etc. - -«Dans le christianisme, dit-elle dans une de ses lettres, l'important -n'est pas de beaucoup agir, mais de beaucoup aimer.» - - Page 215, lignes 2 et 3: L'infortune lui ravit l'âge des illusions. - -De toutes les qualités que madame de Maintenon cherche à inspirer à ses -élèves de Saint-Cyr pour leur bonheur futur, c'est la prudence et la -circonspection. Elle leur dit: - -«Il faut de la discrétion, même dans la vertu..... Il faut se -contraindre, même dans le commerce que l'on a avec ses amis..... En -s'abstenant d'écrire, on se retranche un plaisir, on s'assure un grand -repos. Si on est assez malheureuse pour changer d'amis, on n'appréhende -point qu'ils confient à d'autres les confidences que nous leur avons -faites..... Il n'y a rien de si dangereux que les lettres: il y a -beaucoup de personnes imprudentes qui les montrent; il y en a beaucoup -de méchantes qui veulent nuire. Il s'en perd par hasard; le porteur peut -être gagné, la poste peut être infidèle. Celui à qui vous vous fiez se -fie souvent à d'autres. - -«Les lettres ont déshonoré des femmes. Elles ont coûté la vie à des -hommes, elles ont fait des querelles, elles ont découvert des mystères.» -(_Conversations inédites de madame_ DE MAINTENON; Paris, 1828, in-18, t. -II, p. 70-73, _Convers. IX sur les lettres_, et _Convers. XI des -anciennes_, t. I, 1828, in-18, p. 90.) - - Page 215, ligne 18: La jeune _Indienne_. - -On devait aimera lui donner ce surnom, parce qu'elle intéressait dans la -conversation par les souvenirs qu'elle avait conservés de l'île de la -Martinique, où elle avait passé sa toute petite enfance. Elle étonna -beaucoup Segrais en lui apprenant que, dans ce pays, les ananas se -mangeaient tout crus. On n'en recevait encore en Europe que confits et -en morceaux. Ce fut elle qui fit connaître au poëte traducteur des -_Géorgiques_ la couleur dorée, la forme globuleuse et festonnée de ce -fruit, surmonté de son magnifique panache de feuilles vertes et -élancées. (SEGRAIS, _Å’uvres diverses_, 1723, in-12, p. 148.) - - Page 216, ligne 6: Autrement que par l'aptitude négative de son - tempérament. - -Godetz Desmarets, évêque de Chartres, toucha ce point avec une grande -délicatesse, dans une réponse à madame de Maintenon sur une de ses -_redditions_, qui étaient des confessions écrites, plus explicites, plus -confidentielles que les confessions ordinaires. Elle lui avait dit -qu'elle croyait commettre un péché chaque fois que, cédant aux désirs du -roi, elle cessait d'être son amie pour devenir son épouse.--Il lui -répond: - -«C'est une grande pureté de préserver celui qui vous est confié des -impuretés et des scandales où il pourrait tomber. C'est en même temps un -acte de soumission de patience et de charité..... Malgré votre -inclination, il faut rentrer dans la sujétion que votre vocation vous a -prescrite..... Il faut servir d'asile à une âme qui se perdrait sans -cela. Quelle grâce que d'être l'instrument des conseils de Dieu, et de -_faire_ par pure vertu ce que tant d'autres font sans mérite ou par -passion!» (LA BEAUMELLE, t. VI, p. 79-82.) - -Elle avait bien choisi son directeur. Godetz-Desmarets n'était pas un -évêque de cour, c'était un saint homme; ses lettres à madame de -Maintenon et toute sa conduite le prouvent. A lui seul elle s'était -confiée, et il se pourrait bien que ce fût lui qui bénit en secret, et -seul, le mariage sur lequel on fit tant de récits à la cour. Harlay -était un homme de mauvaises mÅ“urs, et que madame de Maintenon estimait -peu; au lieu qu'elle ne cachait rien à l'évêque de Chartres. Celui-ci -lui écrit: «Après ma mort, vous choisirez un directeur auquel vous -donnerez vos _redditions_. Vous lui montrerez les écrits qu'on vous a -donnés pour votre conduite. _Vous lui direz vos liens._» - - Page 217, ligne 2: Lui valurent d'être tenue sur les fonts de - baptême par la femme du gouverneur. - -Dans la notice historique sur madame de Maintenon par M. Monmerqué, -placée en tête des _Conversations inédites_, in-18, Paris, Blaise, 1828, -il est dit qu'elle naquit le 27 novembre 1635, fut baptisée par un -prêtre catholique, et tenue sur les fonts par le duc de la -Rochefoucauld, gouverneur de Poitou, et par Françoise Tiraqueau, -comtesse de Neuillant, dont le mari était gouverneur de Niort. Le nouvel -historien de Maintenon, 1848, in-8º, t. I, p. 73, copiant la Beaumelle -(_Mémoires pour servir à l'histoire de mad. de Maintenon_; Amsterdam, -1755, in-12, t. I, p. 103), dit au contraire que la marraine fut Suzanne -de Baudran, fille du baron de Neuillant. La Beaumelle cite les Mémoires -mss. de mademoiselle d'Aumale; mais M. Monmerqué a vu aussi ces -Mémoires. La Beaumelle remarque, en note, que Françoise d'Aubigné ne fut -baptisée que le lendemain 28 novembre; circonstance omise par les deux -historiens mentionnés ci-dessus. - - Page 217, lignes 4 et 5: Sa mère, femme instruite, de courage et de - vertu. - -Les historiens de madame de Maintenon auraient bien dû éclaircir le -vague qui règne dans l'histoire de madame d'Aubigné et dans celle des -premières années de son illustre fille. Ils se sont contentés de se -copier les uns après les autres. La Beaumelle cependant est plus précis -et plus détaillé. Dans le tome VI de ses Mémoires, il a publié des -extraits de pièces qui jettent quelque jour sur cette partie de -l'histoire de Maintenon, et entre autres une lettre de madame d'Aubigné -à madame de Villette, écrite de la Martinique, datée du 2 juin 1646 dans -la copie, date que la Beaumelle croit fausse. (Voyez _Mém. pour servir à -l'histoire de Maintenon_, t. VI, p. 34 à 38.) On eût trouvé surtout -beaucoup de lumières sur l'histoire de la famille d'Aubigné dans les -pièces du procès que la mère de madame de Maintenon eut à soutenir -contre MM. de Nesmond-Sensac et de Caumont. (LA BEAUMELLE, _Mém._, t. I, -p. 107.) Ces pièces sont probablement dans les nombreux portefeuilles de -Noailles, ou dans les archives de Maintenon. Il faudrait surtout -discuter le récit contenu dans les fragments de Mémoires sur la vie de -la marquise de Maintenon, par le père Laguille, jésuite; récit erroné en -quelques endroits, mais curieux, en ce que son auteur cite des témoins -contemporains des faits. (Conférez _Fragments de Mémoires sur la vie de -la marquise de Maintenon_, par le père Laguille, jésuite, dans les -_Archives littéraires_, 12 vol., trim. d'octobre 1806, in-8º.) Ce -morceau, défiguré par des fautes typographiques, et qui fut publié par -Chardon de la Rochelle, n'a été, je crois, connu d'aucun des auteurs qui -ont écrit sur madame de Maintenon, car ils n'en font pas mention. -Laguille est né en 1658, et a été contemporain de madame de Maintenon. -Il dit que, dans le Béarn et le Poitou, Théodore-Agrippa d'Aubigné -passait pour fils bâtard de la reine Jeanne d'Albret et d'un de ses -secrétaires; assertion que la Beaumelle a bien réfuté dans ses _Mémoires -de Maintenon_, t. I, p. 10 et 14. (Conférez à ce sujet le _Mercure -galant_ de 1688 et de janvier 1705.)--Selon le récit d'un nommé Delarue, -de Niort, madame d'Aubigné, mère de madame de Maintenon, alla d'abord à -la Martinique et de là à la Guadeloupe, où elle resta deux ans -dans l'habitation de Delarue. Elle se rendit ensuite à l'île -Saint-Christophe, où elle mourut, attendant un bâtiment pour la -transporter en France. Ses deux enfants, d'Aubigné et sa sÅ“ur -_Francine_ (madame de Maintenon), furent, par les soins d'une -demoiselle, transportés à la Rochelle. Selon le père Duver, jésuite, -doyen, mort à Nantes en 1703, le collége des jésuites de la Rochelle -fournissait du pain et de la viande à d'Aubigné et à sa sÅ“ur. Ils -furent conduits ensuite chez M. de Montabert, à Angoulême. Ce fut là -qu'un jeune gentilhomme nommé d'Alens, voulut épouser la jeune Francine, -et lui prédit, dit-on, sa grande fortune. (P. 369-370.) Le reste du -récit de Laguille s'accorde assez bien avec ce que l'on sait de -l'histoire de madame de Maintenon; mais il y a des fautes de copiste -qu'il eût été facile à Chardon de la Rochette de corriger: ainsi le nom -de Neuillans est tantôt converti en _Noïailles_ et tantôt en -_Neuillians_. Laguille dit, p. 376, que d'Aubigné fut d'abord placé -comme page chez le marquis de Pardaillan, gouverneur du Poitou. - - Page 217, ligne 20: Les détails les plus minutieux de l'économie - domestique. - -La Dauphine avait une forêt de cheveux, que madame de Maintenon démêlait -sans douleur: elle régnait à la toilette. Louis XIV s'y rendait souvent. -Cette dame disait depuis: «Vous ne sauriez croire combien le talent de -bien peigner une tête a contribué à mon élévation.» (LA BEAUMELLE, tome -II, p. 175.) - - Page 218, ligne 10: De ne pouvoir parvenir «à l'_écrasement de - l'amour-propre_.» - -Madame de Maintenon a dit: - -«On n'échappe à l'amour-propre que par l'amour de Dieu.» (_Convers._, t. -I, p. 30.) - -«Le bon esprit ne peut se distinguer de la sagesse et de la raison.» -(_Convers._, t. I, p. 32.) - -«La sagesse implique la dévotion; car que serait une abnégation de -soi-même qui resterait sans récompense?» (_Convers._, t. I, p. 36.) - - Page 218, ligne 23: Celui de paraître par le cÅ“ur au-dessus de la - place qu'elle occupait. - -«L'élévation des sentiments consiste à se rendre digne de tout, sans -vouloir rien de disproportionné à ce que nous sommes.» (MAINTENON, -_Convers._, 3e édit., p. 219, chap. XXVII.) - - Page 222, lignes 1 et 2: _Les Conversations, les Proverbes._ - -Le dialogue le plus ingénieux et le plus piquant de tous ceux que madame -de Maintenon a composés pour ses élèves de Saint-Cyr, qu'elle leur -faisait apprendre par cÅ“ur, et qui nous donne l'idée la plus nette de -son caractère à la fois modéré et énergique, est celui sur les quatre -vertus cardinales, parce qu'elle a su donner à une vérité incontestable -l'apparence d'un paradoxe. (T. I, p. 63-73.) - -Elle fait parler la Justice, la Prudence, la Force et la Tempérance, -pour prouver que cette dernière vertu est la première de toutes, la plus -essentielle; et par la tempérance elle n'entend pas seulement la -sobriété, mais la modération en toutes choses. - -La Force fait à la Tempérance cette objection: «Ne peut-on point être -trop modéré?--Non, répond la Tempérance; cela ne serait plus la -modération, car elle ne souffre ni le trop ni le trop peu.» - -La Tempérance dit: «Je détruis la gourmandise et le luxe; je m'oppose à -tout mal, et je règle le bien. Sans moi, la justice serait insupportable -à la faiblesse des hommes; la force les mettrait au désespoir, la -prudence perdrait son temps à tout peser.» - - Page 223, ligne 18: Un gentilhomme de sa province. Et note 485: - Conférez MÉRÉ. - -On n'a imprimé, que je sache, aucun vers de Méré: il en faisait -cependant, et voici une jolie épigramme de lui que je tire du recueil de -Duval de Tours (_Nouveau choix de pièces choisies_; la Haye, 1715, p. -185): - - Au temps heureux où régnait l'innocence, - On goûtait en aimant mille et mille douceurs, - Et les amants ne faisaient de dépense - Qu'en soins et qu'en tendres ardeurs. - Mais aujourd'hui, sans opulence, - Il faut renoncer aux plaisirs. - Un amant qui ne peut dépenser qu'en soupirs - N'est plus payé qu'en espérance. - - Page 224, ligne 16: Écrivant selon l'occasion et le besoin, - facilement, agréablement. - -C'est ce dont il se vante et avec juste raison (t. I, p. 130), dans -cette ode de héros burlesque, en style qui n'est nullement burlesque: - - On peut écrire en vers, en prose, - Avec art, avec jugement; - Mais écrire avec agrément, - Mes chers maîtres, c'est autre chose. - - Les vers ont aussi leur destin: - Un poëme de genre sublime - Que son auteur lime et relime, - Ne vit quelquefois qu'un matin. - - Cependant des auteurs comiques, - Des meilleurs, dont il est fort peu, - Ne sont pas bons à mettre au feu, - Au jugement des héroïques. - - J'en sais de ceux au grand collier, - Des plus adroits à l'écritoire, - Qui pensent aller à la gloire, - Et ne vont que chez l'épicier. - - Ce n'est pas dans une ruelle, - Devant de célestes beautés - Ou des partisans apostés, - Qu'on met un livre à la coupelle: - - C'est au palais, chez les marchands, - Où la vente, mauvaise ou bonne, - A tous ouvrages ôte ou donne - Le nom de bons et de méchants. - - Page 225, ligne 21: Elle avait bien raison de se comparer à la cane - qui regrette sa bourbe[901]. - - [901] Ou plutôt: _à de petits poissons qui regrettent leur - bourbe_. - -Le 25 janvier 1702, elle écrit, de Saint-Cyr, au duc d'Ayen, depuis duc -de Noailles: «Il y aura demain quinze jours que je suis enrhumée, et en -spectacle aux courtisans, aux médecins, aux princes, caressée, ménagée, -blâmée, chicanée, tourmentée, considérée, accablée, dorlotée, -contrariée, tiraillée.» MAINTENON, _Lettres_, t. V, p. 27, édit. -d'Amst., 1756, in-8º. - -Dans une lettre datée de Marly le 27 avril 1705, elle dit au comte -d'Ayen: - -«Si j'habite encore longtemps la chambre du roi, je deviendrai -paralytique. Il n'y a ni porte ni fenêtre qui ferme; on y est battu d'un -vent qui me fait souvenir des ouragans d'Amérique.» (_Lettres_, t. V, p. -47, édit. 1756.)--Louis XIV avait un tempérament de fer, et n'aimait pas -les appartements trop renfermés et trop chauds. - -Le 19 avril 1717, deux ans avant sa mort, elle écrit à madame de Caylus: - -«On rachète bien les plaisirs et l'enivrement de la jeunesse. Je trouve, -en repassant ma vie, que depuis l'âge de trente-deux ans (cette date -nous reporte à 1675-1676, qui est celle du chapitre XI et de ceux qui le -précèdent et le suivent), qui fut le commencement de ma fortune, je n'ai -pas été un moment sans peines, et qu'elles ont toujours augmenté.» - - Page 226, lignes 2 à 4: Elle jouissait alors de l'amitié de tous, - sans rien perdre de l'estime, de la considération et du respect qui - lui étaient dus. - -Elle a dit de l'heureux temps de sa jeunesse: - -«Je ne voulais point être aimée en particulier de qui que ce fût: je -voulais l'être de tout le monde, faire prononcer mon nom avec -admiration, avec respect. Je me contrariais dans tous mes goûts. Il -n'est rien que je n'eusse été capable de souffrir pour conquérir le nom -de femme forte. Je ne me souciais point de richesses; j'étais élevée de -cent piques au-dessus de l'intérêt: je voulais de l'honneur.--Oh! -dites-moi, ma fille, y a-t-il rien de plus opposé à la vraie vertu que -cet orgueil dans lequel j'ai usé ma jeunesse?» (_Entretiens de madame_ -DE MAINTENON, dans LA BEAUMELLE, _Mémoires_, t. VI, p. 176 et 177, édit. -d'Amsterdam, 1756, in-12.) - - Page 229, lignes 2 et 3: Il désira vivement mettre, dans la galerie - de celles dont il avait triomphé, etc. - -Madame de Caylus, dont la conduite a été loin d'être régulière, -quoiqu'elle ait été l'élève chérie de madame de Maintenon, se montre -persuadée en ses Mémoires que, dans la liaison de sa tante avec -Villarceaux, il ne s'est rien passé de contraire à la vertu. Mais, en -rapportant le mot malin de la marquise de Sussay à ce sujet, elle semble -vouloir établir un doute. - -Il y a dans Gueroult, poëte du seizième siècle, une pièce de vers -charmante. Ce sont des stances qui expriment les sentiments d'un peintre -devenu amoureux fou d'une grande dame en faisant son portrait. Il n'osa -pas lui déclarer son amour; mais il fit en secret une copie de ce -portrait, et à cette charmante tête il ajouta un corps nu, aussi parfait -que celui de la Vénus de Médicis.--La grande dame surprit le peintre au -moment où il terminait son travail: courroucée, elle demande à l'artiste -pourquoi il a fait un portrait si mensonger, et comment il a eu l'audace -de peindre ce qu'il n'a jamais vu? «Cela est juste, lui dit le peintre; -mais, en voyant un visage si beau et si parfait, je n'ai jamais douté -que tout le reste du corps ne fût semblable; et, sans espérance de -pouvoir contempler tant d'appas, j'ai voulu, par mon art, en posséder -l'image.» D'après l'assertion de la Beaumelle, Villarceaux, irrité des -refus de madame de Maintenon, l'aurait fait peindre comme sortant du -bain, devant un génie noir et laid qui tient un miroir où se -réfléchissent les plus secrets appas de la beauté. (LA BEAUMELLE, -_Mémoires sur madame de Maintenon_, t. I, p. 198, Amsterdam, 1756, liv. -II, ch. XVI.) Quoique la Beaumelle ne cite aucune autorité, le fait est -possible. Mais cette basse vengeance, que Girodet a imitée de nos jours -à l'égard de madame Simons (autrefois mademoiselle Lange, jolie actrice, -si j'ai bonne mémoire), prouve plutôt l'échec de Villarceaux que son -triomphe. Ceux qui avouent que Françoise d'Aubigné, après avoir résisté -à ses nombreux adorateurs, n'a été faible qu'avec Villarceaux, oublient -la juste réflexion de la Rochefoucauld: «Qu'il est plus difficile de -trouver une femme qui n'a eu qu'un seul amant, qu'une femme qui n'en eut -jamais.» - - Page 230, avant-dernière ligne: Le nom de l'auteur de la - _Mazarinade_. - -Cette satire montre bien à quels excès on peut se laisser aller dans les -temps de divisions politiques. Scarron, qui n'était pas méchant, accuse -Mazarin d'avoir empoisonné le président Barillon, d'avoir volé les -diamants de la reine d'Angleterre, après l'avoir laissée mourir de faim. -Il lui souhaite le destin du maréchal d'Ancre; il veut que l'on vende -ses meubles à l'encan (ce qui fut fait), et il l'apostrophe ainsi: - - Va, va-t'en dans Rome étaler - Les biens qu'on t'a laissé voler; - Va, va-t'en, gredin de Calabre, - -Puis viennent d'ignobles gravelures qu'on ne saurait lire sans dégoût, -et dont les parlementaires se réjouissaient. Enfin il conclut en disant: - - On te reverra dans Paris; - Et là , comme au trébuchet pris, - Et de la rapine publique, - Et de ta fausse politique, - Et de ton sot gouvernement, - Au redoutable parlement, - Dont tu faisais si peu de compte, - Ultramontain, tu rendras compte; - Puis, après ton compte rendu, - Cher Jules, tu seras pendu - Au bout d'une vieille potence, - Sans remords et sans repentance, - Sans le moindre mot d'examen, - Comme un incorrigible. _Amen._ - - Page 236, note 521: _Å’uvres diverses d'un auteur de sept ans, ou - recueil des ouvrages de M. le duc_ DU MAINE, _qu'il a faits pendant - l'année 1677 et dans le commencement de l'année 1678_[902]. - - [902] Ce long titre indique une réimpression. Un exemplaire de - l'édition originale, imprimé sur vélin, relié en maroquin rouge - aux armes de Mortemart, et inscrit sous le no 1435 dans un - catalogue de vente des bibliothèques du feu roi Louis-Philippe, - Paris, Potier, 1852, porte seulement pour titre _Å’uvres diverses - d'un auteur de sept ans_. Cet exemplaire a été adjugé à la somme - de 700 francs. - -A la page 207 des _Nouvelles de la république des lettres_ (février -1685, Amsterdam, 1686, 2e édition), il est dit que c'est Benserade qui -a fait présent de ce rare volume au journaliste, qui était, je crois, le -Clerc, et non Bayle. On ajoute: «Selon toutes les apparences, c'est -madame de Maintenon qui a fait l'épître dédicatoire.» Puis en note il -est dit: «On a su depuis qu'elle a été composée par M. Racine; mais -c'était pour madame de Maintenon.» Racine, qui depuis a su prêter à -l'enfance, dans _Athalie_, un langage divin, ne composait pas les -lettres de madame de Maintenon; et s'il avait eu à faire parler le jeune -duc du Maine dans une épître dédicatoire, il l'aurait fait autrement que -madame de Maintenon. Mais il est tout naturel qu'un savant hollandais ne -sût pas cela, et ne soupçonnât pas en Françoise d'Aubigné le talent -d'écrivain. Le grand roi le connaissait bien, lui, qui, après avoir lu -les instructions données à la duchesse de Bourgogne par madame de -Maintenon, et trouvées dans la cassette de cette princesse après sa -mort, voulut qu'il en fût fait des copies. Madame de Maintenon s'y -opposait; mais Louis XIV insista et dit: «C'est pour mes enfants; il -faut bien que ma famille ait quelque chose de vous.» - -Qu'il me soit permis de faire remarquer que ces instructions -religieuses, sous le rapport des pensées, de la religion et du style -même, qui est vif et concis, sont bien supérieures à celles qui ont été -données par l'archevêque de Cambrai à madame de Maintenon elle-même, et -à sa demande. Il y a dans ces dernières une forte dose de mysticisme, -qui aurait pu avoir une influence fâcheuse sur un esprit faible[903]. -Fénelon s'y abandonne trop à sa rancune amère contre Louis XIV, qui, -avec juste raison, n'avait pu goûter ses chimériques systèmes de -gouvernement. Il dit durement à cette femme que le roi (son mari alors) -ne pratique pas ses devoirs, et qu'il n'en a aucune idée (t. III, p. -224). Enfin, tout en blâmant la règle qu'elle s'était faite de ne -s'occuper en rien des affaires d'État et de la politique, il lui -reproche son indifférence à cet égard, et, au nom de la religion, il -l'exhorte à s'en mêler, et cherche à la jeter par la flatterie dans les -intrigues de cour, en lui disant: «Il me paraît que votre esprit naturel -et acquis a bien plus d'étendue que vous ne lui en donnez.» (T. III, p. -219.) - - [903] _Lettres de_ MAINTENON, édit. 1756, in-12, t. III, p. 221: - «Au reste, il faut tellement sacrifier à Dieu le _moi_, qu'on ne - le recherche plus, ni pour la réputation, ni pour la consolation - du témoignage qu'on se rend à soi-même sur ses bonnes qualités ou - sur ses bons sentiments. _Il faut mourir à tout sans réserve, et - ne posséder pas même sa vertu par rapport à soi._» - -C'est le contraire qui était vrai. Madame de Maintenon avait un -excellent jugement, un esprit fin, délié, ferme et éclairé, dans le -cercle où elle s'était renfermée; mais ce cercle était resserré: elle -n'aimait pas à en sortir. Elle n'exprimait son avis sur les affaires -d'État que par un signe d'approbation ou de désapprobation, et encore -parce que Louis XIV l'y forçait. Une fois seulement, elle dressa un -mémoire sur la grande affaire de la révocation de l'édit de Nantes. Elle -y fut amenée par tout le clergé et par les ministres eux-mêmes, qui, -dans les circonstances difficiles où l'on se trouvait, avaient le droit -d'exiger le secours de ses lumières.--Le style de madame de Maintenon -est plus pur et plus régulier que celui de madame de Sévigné. Ses -lettres même sont mieux composées; elles ont toujours un motif, un but -qu'elles atteignent parfaitement. Il n'y a aucun désordre, aucune -inconséquence dans les idées, aucune contradiction dans les jugements; -mais on n'y retrouve pas l'imagination et le coloris de madame de -Sévigné. Les lettres de madame de Maintenon, c'est de l'histoire -générale ou particulière; celles de madame de Sévigné sont des -feuilletons pour amuser madame de Grignan. - - Page 238, lignes 27 et 28: Elle détermina le vieux duc de - Villars-Brancas à demander sa main. - -Cette seconde proposition d'un mariage pour madame Scarron paraît -résulter des récits comparés de madame du Pérou, que nomme positivement -la Beaumelle, qui semble avoir eu des mémoires plus circonstanciés sur -ce fait que les dames de Saint-Cyr; car il dit, t. II, p. 110: - -«Elle (madame de Montespan) avait jeté les yeux sur le duc de V... B..., -qu'une jeunesse passée dans les plaisirs, une vieillesse malsaine, et -deux femmes assez méchantes, n'avaient pas dégoûté du mariage.» Et en -note il ajoute que ce duc de V.. B.. était fils de George B..., et frère -de la princesse d'..., morte en 1679. Ce que dit Saint-Simon sur le -titre de duc donné au Brancas, fils de Villars (_Mémoires complets et -authentiques_, t. XIV, p. 201), semble confirmer que la Beaumelle a -voulu désigner ici le duc de Villars-Brancas, père de Brancas le -distrait.--Le duc de Brancas, né en 1663, mort en 1739, marié à sa -cousine germaine, fille de Brancas le distrait, et qui a fait le premier -un si juste éloge des lettres de madame de Sévigné (voyez t. XII, p. 450 -de l'édition de Gault de S.-G.), était peut-être le fils de celui qui se -proposa pour épouser la veuve Scarron. (Conférez _Lettres de_ SÉVIGNÉ, -tome VI, p. 240 et 379 de l'édit. Monmerqué, 1820, in-8º, et TALLEMANT -DES RÉAUX, _Historiettes_, t. II, p. 139 de l'édit. in-8º.) - - Page 241, ligne 16: Plus énergique. - -Elle écrit au cardinal de Noailles pour lui apprendre qu'elle avait -sacrifié les intérêts de sa propre nièce, la maréchale de Noailles: - -«Eh bien, voilà les dames nommées, voilà la maréchale désespérée! Mon -état et ma destinée est d'affliger et de desservir tout ce que j'aime. -J'en souffre beaucoup, mais je ne varierai point dans la loi que je me -suis faite, de sacrifier mes amis à la vérité et au bien.» - - Page 242, ligne 2: Auquel elle rendait compte dans des lettres qui - quelquefois avaient huit ou dix pages. - -Ces lettres, si on les possédait, pourraient seules servir de pièces de -comparaison avec celles de madame de Sévigné. Tout ce qui nous reste de -cette dame est uniquement relatif ou aux personnes à qui elle écrit, ou -à elle-même, et, par cette raison, offre peu de variété dans le fond -comme dans la forme. Mais madame de Maintenon savait que Louis XIV -aimait à trouver, dans la lecture des lettres bien écrites, une -distraction agréable. Elle dut donc, pendant son voyage à Baréges, -chercher, comme madame de Sévigné, à plaire autant qu'à informer; mais -ces lettres, moins riches de ces expressions heureuses qui jaillissent -d'une vive imagination, devaient être mieux rédigées et surtout plus -correctes. Madame de Maintenon est, pour le style épistolaire, un modèle -plus achevé que madame de Sévigné. Presque toujours celle-ci n'écrit que -par le besoin qu'elle éprouve de s'entretenir avec sa fille, avec les -personnes qu'elle aime; enfin, de tout dire, de tout raconter. Madame de -Maintenon, au contraire, a toujours, en écrivant, un objet distinct et -déterminé. La clarté, la mesure, l'élégance, la justesse des pensées, la -finesse des réflexions, lui font agréablement atteindre le but où elle -vise. Sa marche est droite et soutenue; elle suit sa route sans battre -les buissons, sans s'écarter ni à droite ni à gauche. En un mot, madame -de Maintenon était en garde contre le danger de commettre ces -indiscrétions qui donnent tant d'esprit aux lettres de madame de -Sévigné, et elle tâchait d'en prémunir ses élèves de Saint-Cyr en les -détournant de l'envie d'écrire sans nécessité. - - Page 243, ligne dernière, et 244, lig. 1: «Et qui souvent sont - chassées par un clin d'Å“il qu'on fait à la femme de chambre.» Et - note 532, lig. 3: Dans toutes les autres éditions, sans exception, le - texte de cet important passage est faux ou défiguré. Les notes de - ces éditions doivent disparaître. - -Cela provient du premier éditeur de 1726; tous les autres ont copié. -Mais ce qui est plus fâcheux, c'est qu'on ait reproduit, dans les -éditions les plus récentes et les meilleures, l'absurde commentaire que -Grouvelle a fait sur le texte: d'où il résulterait que Louis XIV, connu -par son respect pour les convenances, la dignité de ses manières, son -attachement pour la reine, l'aurait traitée avec indignité et mépris -dans l'habitude de la vie. Je ferai remarquer que dans ce passage il n'y -a pas _Quanto_ comme dans toutes les autres éditions, mais que le nom de -Montespan est en toutes lettres; ce qui démontre qu'il n'y a ni -sous-entendu ni déguisement dans la mention de la femme de chambre. -Madame la duchesse de Richelieu, qu'on fait obéir par un clin d'Å“il à -madame de Montespan, était alors dame d'honneur de la reine; et la -marquise de Montespan n'était encore inscrite que la quatrième sur le -tableau. (Voyez l'_État de la France_, 1678, in-12, p. 326.) - - Page 245, lignes 12 à 14: La naissance de mademoiselle de Tours, - morte jeune, venue à terme au mois de janvier 1676. - -Et c'est alors même que Louis XIV manifestait publiquement ses -sentiments religieux et sa soumission à l'Église, qu'il communiait en -public, qu'il permettait qu'on mît plus souvent dans la gazette -officielle son exactitude à remplir ses devoirs de piété. On lit dans le -volume du Recueil des gazettes, imprimé en 1677, p. 280, cet article: - - «Avril 1676. - - «Saint-Germain en Laye - -«Le 4 de ce mois, veille de la Résurrection, le roi, qui avait _assisté -à tous les offices_ de la semaine sainte, communia dans l'église -paroissiale par les mains du cardinal de Bouillon, grand aumônier de -France, monseigneur le Dauphin tenant la serviette.» - - Page 245, lignes 28 et 29: On savait que la nature de sentiments - exempts de toute faiblesse que lui inspirait madame de Maintenon, - etc. - -Ce ne fut qu'après la mort de la reine, après celle de Fontanges, après -la disgrâce de Montespan, que l'opinion des gens de cour et du public -changea, et que l'intimité toujours croissante de Louis XIV et de madame -de Maintenon fit travailler les imaginations, et convertir en passion -amoureuse un attachement constant et pieux, fondé, de la part de Louis -XIV, sur le respect pour la piété, les vertus et les qualités de celle -qu'il s'était choisie pour compagne; et, de la part de madame de -Maintenon, sur l'admiration que lui avaient inspirée les qualités du -grand roi. - - -CHAPITRE XII. - - Page 247, ligne 6: Près du village de Sasbach, dans l'État de Bade. - -Il faut écrire Sasbach, et non Salzbach et Saspach, comme a fait Ramsay -(_Histoire du vicomte de Turenne, maréchal général des armées du roi_; -Paris, 1735, in-4º, p. 581). Ce lieu se trouve près d'Achern, sur la -route d'Offenburg à Bade, au sud de Steinbach. La carte de l'atlas de -Ramsay, insérée dans l'édition de 1735, in-4º, à la page 581, intitulée -_Plan des différents camps du vicomte de Turenne et du comte -Montecuculli dans l'Ortnaw_, dessinée et gravée par Cocquart, est -fautive, et trop mauvaise pour qu'on y puisse suivre les opérations -militaires de Turenne dans cette campagne; il faut consulter la carte -intitulée STRASBOURG, dans l'atlas des _Mémoires militaires des guerres -de Louis XIV_, 1836, grand in-folio, exécuté sous la direction du -général Pelet. - - Page 252, ligne 19: «Et qu'elle y avait mille affaires.» - -Une de ces affaires était celle de la terre de Meneuf, vendue à Jean du -Bois-Geslin, reçu président de Bretagne le 13 juin 1653, et fait depuis -conseiller d'État. Madame de Sévigné lui vendit cette terre en 1674; et -comme elle avait garanti les droits seigneuriaux, elle eut des -difficultés qui furent levées, car elle toucha son argent en décembre -1675. (SÉVIGNÉ, _Lettres_, 17 novembre, 15 et 29 décembre 1675; t. IV, -p. 209, 250 et 279, édit. G.) - - Page 254, ligne 13: Elle avait alors quarante-neuf ans. - -Ce fut son âge critique. Par son tempérament fort et sanguin, madame de -Sévigné avait assez fréquemment recours à la saignée. Cette doctrine -médicale était fortement controversée au temps de Louis XIV, comme elle -l'a été de nos jours du vivant du docteur Broussais. Gui Patin, -conséquent avec ses principes, se fit saigner sept fois dans un rhume -(voir sa lettre du 10 mars 1648, t. I, p. 375; 1846, in-8º), et fit -pratiquer vingt saignées sur son fils.--A l'âge de trois ans, le fils de -madame de Grignan tomba malade: on le saigna. Madame de Sévigné ne put -s'empêcher de témoigner à sa fille des craintes au sujet de cette -saignée: «Je reçois votre lettre, qui m'apprend la maladie du pauvre -petit marquis. J'en suis extrêmement en peine; et pour cette saignée, je -ne comprends pas qu'elle puisse faire du bien à un enfant de trois ans, -avec l'agitation qu'elle lui donne: de mon temps, on ne savait ce que -c'était que de saigner un enfant.» (SÉVIGNÉ, _Lettres_, 26 juin 1675, t. -III, p. 436, édit. G.)--Gui Patin pensait tout différemment; car en -1648, au sujet d'un médecin allemand nommé Sennertus, dont il avait lu -l'ouvrage, il écrit: «Il n'entend rien à la saignée des enfants; ce -misérable me fait pitié! Si l'on faisait ainsi à Paris, tous nos malades -mourraient bien vite. Nous guérissons nos malades après quatre-vingts -ans par la saignée, et saignons aussi heureusement les enfants de deux -et trois mois, sans aucun inconvénient... Il ne se passe pas de jour à -Paris que nous ne fassions saigner plusieurs enfants à la mamelle et -plusieurs septuagénaires, _qui singuli feliciter inde convalescunt_.» -(GUI PATIN, _Lettres_, 13 août 1648), t. II, p. 419, édit. 1846, in-8º. - - Page 254, lignes 20 à 22: Bourdelot, ce célèbre médecin des Condé - et de la reine Christine. - -Le haineux et satirique Gui Patin (_Lettres_, édit. 1846, in-8º, t. I, -p. 513) a tracé de ce médecin un portrait qui nous en donne une idée -bien différente de celle que présente l'article _Pierre Michon_ du -savant M. Weiss, dans la _Biographie universelle_ (t. XXVIII, p. 596). -Bourdelot fut d'abord le précepteur du grand Condé avant d'être son -médecin (GUI PATIN, t. II, p. 5). Il revint de Suède en 1653. Il -n'allait faire ses visites qu'avec de grands habits à longue queue, en -chaise à porteurs ou en carrosse, et suivi de trois laquais. Il devint -riche par l'obtention de l'abbaye de Macé en Berri, et par les bienfaits -de la reine de Suède. On a oublié dans la _Biographie_ de mentionner le -plus curieux de ses écrits: c'est la _Relation des assemblées faites à -Versailles dans le grand appartement du Roi_ durant le carnaval de 1683, -in-12. Bourdelot réunissait chez lui, chaque jour de la semaine, un -certain nombre de ses confrères, médecins et hommes de lettres; cette -réunion avait pris le titre d'_Académie de Bourdelot_; et lorsque madame -de Sévigné se confia à ses soins, un auteur nommé le Gallois venait de -publier un ouvrage intitulé _Conversations académiques tirées de -l'Académie de Bourdelot_; Paris, 1674, 2 vol. in-12. Ce livre est dédié -à Huet; il contient des dialogues uniquement relatifs à la médecine, et, -à propos de médecine, des excursions sur la métaphysique et la -philosophie de Descartes, qui alors faisait irruption dans tout. - - Page 258, lignes 6 à 9: Le ridicule que madame de Grignan versait - sur madame de la Charce et sur Philis, sa fille aînée, la faisait - rire aux larmes. - -Philis de la Tour du Pin de la Charce était l'amie de mademoiselle -d'Alerac (Françoise-Julie Grignan), cette belle-fille de madame de -Grignan, qu'elle aimait si peu. (Voyez, sur cette courageuse demoiselle, -le livre intitulé _Histoire de mademoiselle de la Charce, de la maison -de la Tour du Pin en Dauphiné, ou Mémoire de ce qui s'est passé sous le -règne de Louis XIV_; Paris, chez Pierre Gaudouin, 1731, p. 11, 36: c'est -une espèce de roman, dont l'auteur est inconnu. Conférez madame de -Genlis dans _Mademoiselle de la Fayette_, ou _le siècle de Louis XIII_; -2e édit., 1813, t. I, p. 42, note 4.) On lit dans la _Gazette de -France_, du 23 juin 1703, que Philis de la Tour du Pin de la Charce, -nouvelle convertie, mourut à Nions en Dauphiné, âgée de cinquante-huit -ans. Ainsi cette demoiselle avait trente ans lorsqu'elle était le sujet -des sarcasmes de madame de Grignan.--En relisant la note où j'ai parlé -de mademoiselle de la Charce (4e partie de ces _Mémoires_, p. 354), je -m'aperçois que j'ai attribué à madame Deshoulières des vers qui sont de -sa fille, et que l'on a placés à la suite de ceux de la mère dans -l'édition que je cite (1695, in-8º). L'épître et les madrigaux de M. -Cazes sont adressés à mademoiselle Deshoulières, p. 257 et 278. Les -poésies de cette demoiselle, non mentionnées sur le titre, commencent à -la page 218. Cette édition des poésies de madame Deshoulières a été -donnée par sa fille, ainsi qu'elle le dit dans l'avertissement du second -volume; et la lettre de M. Cazes, datée de Bois-le-Vicomte le 4 octobre -1689, qui se trouve dans l'édition des Å“uvres de madame et de -mademoiselle Deshoulières (1764, in-12, t. II, p. 204), est adressée à -cette dernière. Les détails sur la mort de M. Cazes (datés de 1692), -page 238 de cette même édition, sont de mademoiselle Deshoulières. - - Page 259, ligne 17: «J'ai couché cette nuit à Veretz.» - -Toutes les cartes et tous les livres géographiques de la France écrivent -Veretz ou Verets; mais dans les éditions de madame de Sévigné on lit -_Veret_, et c'est ainsi qu'elle a écrit; car dans le vol. XXXII -(département d'Indre-et-Loire, premier arrondissement de Tours), je -trouve une aquarelle du château où coucha madame de Sévigné, faite il y -a cent cinquante ans, et qui porte pour intitulé _Veue du chasteau de -Veret en Touraine, sur la rivière du Cher_ (1689). - - Page 261, ligne 15: «Nous allons à la Seilleraye, etc.»--_Sur les - portraits de madame de Sévigné et de madame de Grignan_. - -Le château de la Seilleraye est situé dans le canton de Carquefou, à -environ sept kilomètres à l'est de ce bourg. Il est à deux kilomètres de -Mauves et du bord septentrional de la Loire, sur le versant d'un coteau -au bas duquel coule un ruisseau qui se jette dans la Loire au-dessous de -Mauves. Sur la carte de Cassini (no 131), ce ruisseau n'est pas nommé; -mais dans le pays on l'appelle _la Seille_, c'est pourquoi il faut -écrire la Seilleraye, comme dans le grand _Dictionnaire de la poste aux -lettres_, 1836, in-folio, p. 660, et dans la dernière carte de la poste -aux chevaux, dressée par les ordres de M. Conte, et non pas _la -Sailleraye_, ainsi qu'il est marqué sur la carte de Cassini. - -Voici ce que madame de Sévigné mande à sa fille au sujet de ce château, -qu'elle n'avait pas vu depuis sa jeunesse, et qui lui parut peu -reconnaissable: «M. d'Harouïs manda de Paris, il y a quatre ans, à un -architecte de Nantes, qu'il le priait de lui bâtir une maison, dont il -lui envoya le dessin, qui est très-beau et très-grand. C'est un grand -corps de logis de trente toises de face, deux ailes, deux pavillons; -mais comme il n'y a pas été trois fois pendant tout cet ouvrage, tout -cela est mal exécuté. Notre abbé est au désespoir, M. d'Harouïs ne fait -qu'en rire.» (SÉVIGNÉ, _Lettres_, 24 septembre 1675, t. IV, p. 112, -édit. G.) - -Ce beau domaine a eu le rare privilége d'être transmis à une famille -alliée à celle de d'Harouïs (la famille de Bec-de-Lièvre), par suite du -mariage de Jean-Baptiste de Bec-de-Lièvre avec Louise d'Harouïs en 1649. -Cette famille le possède encore.--L'auteur d'une _Vie de madame de -Sévigné_ très-agréablement écrite, M. le vicomte Walsh, nous a donné des -détails sur les embellissements faits à ce domaine par le propriétaire -actuel: «La Seilleraye couronne bien le coteau; M. de Bec-de-Lièvre a -_désengoncé_ le château des murailles qui fermaient la cour et les -jardins, dessinés par Le Nôtre; une belle grille, à fers de lances -dorés, ferme aujourd'hui la cour; le parc anglais se lie à merveille -avec les anciens jardins.» (_Vie de Sévigné_; par M. le vicomte Walsh, -1842, in-12, p. 355.) M. Monmerqué a fait graver une _Vue du château de -la Silleraye_ (_sic_) pour accompagner l'édition des _Lettres inédites -de madame de Sévigné_; Paris, Blaise, 1827, in-8º. Dans l'avertissement -de ces _Lettres_ (pag. XIII), le savant éditeur dit que M. le marquis de -Bec-de-Lièvre conserve dans ce château un beau portrait de madame de -Sévigné, peint en Diane. M. le vicomte Walsh décrit ainsi ce tableau: - -«Dans ce magnifique portrait de Mignard, donné, dit-on, par madame de -Sévigné à d'Harouïs, Marie de Rabutin-Chantal, _qui venait de se -marier_, est vêtue en Diane chasseresse, selon le goût du temps. Elle a -dansé dans un quadrille devant Louis XIV avec ce costume.» Nous ne -pouvons croire que ce portrait soit celui de madame de Sévigné (Marie de -Rabutin-Chantal). Il est bien vrai que les femmes qui avaient eu -l'honneur de figurer dans les ballets de Louis XIV aimaient à se faire -peindre dans les beaux costumes mythologiques dont elles étaient -revêtues pour le rôle qu'elles remplissaient; mais madame de Sévigné n'a -paru dans les ballets de Louis XIV à aucune époque, et encore moins -_lorsqu'elle venait de se marier_. Marie de Rabutin-Chantal épousa, le 4 -août 1641[904], le marquis de Sévigné; Louis XIV n'avait alors que six -ans, et ne donnait pas de ballets. Madame de Sévigné a été peinte par -Nanteuil, et aussi, je crois, par Lefebvre; mais il n'est pas aussi -certain qu'elle l'ait été par Mignard. Elle parle tant et si souvent du -portrait de madame de Grignan par Mignard, que si elle avait été peinte -aussi par ce maître, nous le saurions. Le portrait de la collection de -tableaux qu'on voit à la Seilleraye n'est donc pas plus, _s'il est de -son temps_, le portrait de Marie de Rabutin-Chantal que celui qu'on a -placé avec une semblable désignation dans la galerie de Versailles. -(Voyez partie I, p. 512 de ces _Mémoires_.) Mais si ce n'est pas le -portrait de Marie de Rabutin-Chantal, c'est peut-être celui de -mademoiselle de Sévigné. Celle-là , par exemple, figura dans les ballets -_costumés_ du roi (voyez 2e partie de ces _Mémoires_, p. 332-341), et a -bien véritablement été peinte par Mignard. - - [904] Voyez la 1re partie de ces _Mémoires sur madame_ DE - SÉVIGNÉ, 2e édit., 1843, p. 20 et 21. Dans l'édition de 1842, il - y avait, par faute d'impression, _le_ 1er _août_. Un auteur qui a - écrit en 1849 un très-bon opuscule sur l'administration de Louis - XIV nous accuse, d'après cette erreur typographique depuis - longtemps corrigée lorsqu'il écrivait, d'avoir confondu les - fiançailles avec les noces. Il y a, ce nous semble, dans cette - critique, plus que de la rigueur. - -Je crois devoir ajouter ici quelques détails à la longue note que j'ai -écrite _sur différents portraits qu'on a gravés de madame de Sévigné_ -(2e partie de ces _Mémoires_, p. 512). - -Ce qui met hors de doute l'authenticité du portrait peint par Nanteuil -_ad vivum_, et gravé par Édelinck (Nicolas Édelinck, fils de Gérard), ce -sont les lettres où madame de Sévigné parle de son nez carré et de ses -paupières bigarrées[905]. - - [905] SÉVIGNÉ, _Lettres_ (26 juillet 1668 et 27 février 1671), - tome I, pag. 129 et 268, édit. M. - -Indépendamment de la gravure du portrait de madame de Sévigné, finement -exécutée par Jacques Chereau pour l'édition des _Lettres_ de 1734, le -chevalier Perrin en fit faire une autre pour son édition de 1754. Ce -portrait a été peint par Febure ou Lefebvre, le même qui fit celui de -Bussy, reproduit en tête de ses _Mémoires_, édition in-4º, et gravé par -Édelinck. Ce portrait de Lefebvre ressemble plus à celui de Nanteuil -qu'à celui de l'édition de 1734: la coiffure est presque semblable, mais -la tête est penchée; il est vu de trois quarts; les yeux sont plus -grands, la face moins pleine, et il a plus de physionomie. Lefebvre a -fait beaucoup de portraits de personnages illustres; un grand nombre ont -été reproduits par Poilly, Van Schuppen, Balechou, et d'autres. Né en -1736, il mourut à Londres en 1775. Il était l'élève de Charles le Brun; -il ne flattait point les traits, et n'aimait pas à peindre les femmes -avec du fard. C'est peut-être pour cela que madame de Sévigné estimait -peu ses ouvrages. Dans la belle collection d'Odieuvre il y a un portrait -de madame de Grignan par Ferdinand, celui qui a peint Ninon: il est -gravé par Pinssio. Ce portrait, quoique différent de ceux qu'on a faits -depuis, est bien celui de la même femme, et a dû être ressemblant. Il -paraît que M. de Grignan avait donné son portrait, peint par un artiste -provençal, à M. de Coulanges, et qu'il existait du comte un autre -portrait peint par Lefebvre; car madame de Sévigné écrit à sa fille (le -19 février 1672, t. II, p. 392, édit. G.): «Mais que vous dirai-je de -l'aimable portrait que M. de Grignan a donné à M. de Coulanges? Il est -beau et très-ressemblant: celui de Lefebvre est un misérable auprès de -celui-ci. Je fais vÅ“u de ne jamais revenir de Provence que je n'en aie -un pareil, et un autre de vous: il n'y a point de dépense qui me soit si -agréable.» - -Madame de Sévigné, avec toute raison, préféra Mignard au peintre -provençal, et elle profita du séjour de madame de Grignan à Paris pour -faire exécuter pour elle, dans les premiers mois de l'année 1675, le -portrait de sa fille. Il obtint bientôt une certaine célébrité. -(SÉVIGNÉ, _Lettres_, 4 et 9 septembre, t. III, p. 452 et 460.) Dans sa -lettre du 19 août 1675 (t. III, p. 411, édit. M., et t. IV, p. 35, édit. -G.), elle dit à madame de Grignan: «Votre portrait a servi à la -conversation; il devient chef-d'Å“uvre à vue d'Å“il; je crois que c'est -parce que Mignard n'en veut plus faire.» Mignard avait, il est vrai, -soixante-cinq ans lorsqu'il peignit madame de Grignan; mais aucun -peintre n'a prolongé plus longtemps sa carrière d'artiste. Né en 1610, -il mourut en 1695. Ses derniers portraits furent ceux de la famille -royale d'Angleterre, qu'il exécuta à l'âge de quatre-vingt-quatre ans. -Un peu auparavant il fit celui de madame de Maintenon, le plus célèbre -de tous, et peignit Louis XIV pour la dixième fois. - -Je possède un grand tableau de Mignard provenant de la vente de M. -Quentin Craufurd, connu par la belle collection de portraits qu'il avait -réunis, et par le soin qu'il s'était donné pour s'assurer de -l'exactitude des désignations qu'il leur donnait. Cette toile est -décrite sous le no 162, page 47 du catalogue, comme représentant madame -de Thianges et le duc du Maine, son neveu. Il n'en est rien: elle -renferme les portraits de madame de Seignelay et de ses deux fils, -peints un an après la mort du ministre Seignelay. Ce tableau, -parfaitement bien décrit dans la _Vie de Mignard_ (page 148 de l'édit. -de Paris, 1730, et p. 123 de l'édit. d'Amst., 1731), est signé _Mignard_ -et daté de 1691: Mignard avait donc quatre-vingt-un ans lorsqu'il fit le -portrait de Catherine-Thérèse de Matignon, femme de Seignelay, laquelle -se remaria, le 22 février 1696, au comte de Marsan. Mignard résida -vingt-deux ans à Rome, et ne vint se fixer à Paris qu'en 1660; par -conséquent il n'a pu peindre Marie de Rabutin-Chantal peu après son -mariage. - -En faisant connaître le portrait le plus authentique et le plus certain -de la marquise de Sévigné, gravé par Édelinck fils, d'après Nanteuil, -j'ai oublié de dire que le premier pastel de Nanteuil existe, très-bien -conservé: nous l'avons vu chez M. le comte de Laubespin de Tracy, auquel -il appartient. De la collection de M. Traullé il a passé dans les mains -de madame Bredt, qui l'a donné à madame de Laubespin. - -J'ai parlé du portrait de Ninon par Ferdinand. Il a été très-bien gravé -par Thomas Wastley en 1757, aux frais de Walpole, comte de Sandwich, -d'après le tableau original donné par Ninon de Lenclos à la comtesse de -Sandwich, son amie. Ferdinand peignit aussi madame de Maintenon avant -que Mignard fît d'elle le beau portrait si admirablement gravé par -Ficquet. - -«Madame de Maintenon, dit madame du Pérou (_Mémoires de madame de -Maintenon recueillis par les dames de Saint-Cyr_; Paris, Olivier -Fulgence, 1846, in-12, p. 261, chap. XVII), se rendit à nos instances, -et souffrit que Ferdinand, assez habile peintre pour la ressemblance, la -tirât. Il fit un portrait où elle est représentée dans tout son air -naturel, avec mademoiselle d'Aubigné sa nièce, qui était un enfant, et -qui depuis a été la duchesse de Noailles; elle n'avait alors que trois -ou quatre ans, et était aussi jolie et aussi aimable que le peintre l'a -représentée: c'est le portrait qui est dans la salle de la Communauté, à -côté de la cheminée. Il résulte du récit de madame du Pérou que ce -portrait fut fait après le 19 mai 1689, époque de l'élection de -mademoiselle de Loubert. Je ne connais aucune gravure de ce tableau, et -j'ignore s'il existe encore. Mais quand Horace Walpole visita Saint-Cyr, -il vit le portrait de madame de Maintenon dans presque toutes les -chambres. Celui de Mignard a été souvent copié, dit-on, par lui-même -avec des variations. Je possède une de ces copies qui était à Saint-Cyr, -et que j'ai achetée à la vente de M. Craufurd. Elle est semblable, à la -couleur du manteau près, à celle qu'on voit dans la galerie de -Versailles. Ferdinand a aussi peint le duc de Montausier. Ce portrait a -été gravé par Lenfant, in-fol., en 1757. - - Page 267, lignes 2 à 4: La partie inédite de ses Mémoires... offre - un exemple d'une aussi forte distraction. - -Ainsi, dans le manuscrit autographe de la _Suite des Mémoires de Bussy_, -après la transcription de la lettre que Bussy écrivit à madame de -Sévigné le 19 octobre 1675, on lit au verso de la page 154: «Huit jours -après que j'eus écrit cette lettre, j'en reçus cette réponse.» - -Vient ensuite la transcription d'une lettre de madame de Sévigné sous la -date du 27 octobre 1675, qui est la même que celle du 20 décembre 1675 -dans l'édit. de Gault de S.-G., sauf le commencement, qui diffère du -manuscrit et des éditions imprimées. Les lignes qui précèdent cette -lettre assurent l'exactitude de sa date, qui est d'ailleurs confirmée, -par tout ce qu'elle contient, comme répondant à celle du 19 octobre. -Elle devrait être, suivant nous, placée immédiatement après cette -lettre; mais, par une étrange méprise, la lettre de madame de Sévigné, -du 27 octobre, est datée de Paris, et commence ainsi: «J'arrivai hier -ici, et on me vient d'apporter votre lettre du 19 de ce mois. Je partis -de Bretagne trois jours après que je vous écrivis.» A moins de -substituer dans la date Vitré à Paris, et _Rochers_ à _Bretagne_, il est -impossible de concilier ce commencement avec la date de 1675 et avec -tout le reste de la lettre. - -Cependant tous les faits qui résultent de la correspondance de madame de -Sévigné en Bretagne avec Bussy en Bourgogne, se trouvent confirmés dans -une lettre de cette dame (20 octobre 1675), par laquelle elle envoie à -son cousin sa procuration pour le mariage de sa nièce. Le ms. ne fait -pas mention de cette lettre; mais à la suite de celle du 27 octobre, -Bussy écrit: - -«Trois jours après que j'ai reçu cette lettre, je fis cette réponse;» et -cette réponse est en effet datée de Chaseu le 30 octobre. - -Cette lettre, dans ce qu'elle a de plus essentiel à partir de la ligne -«Quand je vous ai mandé, etc.,» est la même que celle qui, dans diverses -éditions, est datée de Bussy le 9 janvier 1676. Il y a encore ici -divergence non-seulement dans les dates, mais dans le commencement des -deux lettres: celle du ms. commence, comme l'autre, par la même -impossibilité, en s'exprimant ainsi: - -«Je suis fort aise, madame, que nous soyons à Paris: nous y gagnerons -tous deux.» Puis elle répond à la précédente sur la fièvre du roi. - -Rien de tout cela dans la lettre imprimée, qui commence ainsi: «Je reçus -avant-hier votre lettre du 20 décembre, qui est une réponse à une lettre -que je vous écrivis le 19 octobre. Vous devez avoir reçu depuis ce -temps-là deux lettres de moi, sans compter celle que je viens de vous -écrire, avec une lettre pour madame de Grignan.» On a vu que cette -lettre du 20 décembre était précisément celle du 27 octobre du ms., et -l'explication paraît une interpolation du copiste-éditeur ajoutée à la -lettre de Bussy. Mais si le ms. de la _Suite des Mémoires_ est -autographe, l'étrange confusion qui fait supposer madame de Sévigné à -Paris est de Bussy lui-même, qui, ayant devant les yeux plusieurs -lettres de sa cousine sous la même date, et sans désignation d'année, -aura été distrait en les transcrivant. - -Ces distractions de Bussy, quand il fit la _Suite des Mémoires_, -démontrent que c'est également lui qui a transposé à une date fausse la -lettre que madame de Sévigné a écrite sur la naissance de son fils. - - Page 267, lignes 12 à 15: Des fragments des Mémoires autographes - d'Ormesson... constatent que madame de Sévigné accoucha, à Paris, - de sa fille le 10 octobre 1646. - -La fin de la lettre de madame de Sévigné à madame de Grignan, en date du -28 août 1680 (t. VI, p. 436 de l'édit. de Monmerqué), ne prouve pas, -comme le dit cet éditeur dans sa note, que madame de Grignan fût née aux -Rochers. Elle signifie seulement que madame de Sévigné envoya à Paris, à -madame de la Fayette ou à madame de Coulanges, une lettre de sa fille, -qu'elle a trouvée très-amusante et bien écrite; et que la réputation de -madame de Grignan, si bien établie comme femme d'esprit à Paris (dans -son air natal), était faite aussi dans les parties les plus reculées de -la France (la Bretagne): «Vos lettres nous ont servi d'un grand -amusement: nous remettons votre nom dans son air natal. Croyez, ma -fille, qu'il est célébré partout où je suis; il vole, il vole jusqu'au -bout du monde, puisqu'il est en ce pays.» - - Page 271, ligne dern., et 272, ligne 1: Le père du Chastellet - s'illustra dans les lettres. - -Paul Hay du Chastellet mourut en 1636. Il rédigea les premiers statuts -de l'Académie française (réglem. du 27 mars 1634), prononça le premier -discours dans le sein de cette Académie, dont le sujet était sur -_l'éloquence française_. Il écrivit des satires en vers français et en -vers latins, et eut le courage de braver le despotisme de Richelieu, en -défendant le maréchal de Marillac. - - -CHAPITRE XIII. - - Page 292, ligne 16; Elle (_la princesse de Tarente_) lui fit sur - elle-même d'étranges confidences. - -Madame de Grignan s'imaginait que la princesse de Tarente, après quatre -ans de veuvage, était encore plongée dans la douleur du souvenir de la -perte de son mari. Madame de Sévigné lui répond: - -«Je ne sais quelle idée vous avez de la princesse; elle n'est rien moins -qu'_Artémise_; elle a le cÅ“ur comme de cire, et s'en vante, disant -plaisamment qu'elle a le cÅ“ur ridicule. Cela tombe sur le général, mais -le monde en fait des applications particulières. J'espère que je mettrai -des bornes à cette ridiculité par tous les discours que je fais, comme -une innocente, de l'horreur qu'il faut avoir pour les femmes qui -poussent cette tendresse un peu trop loin, et du mépris que cela leur -attire. Je dis des merveilles, et l'on m'écoute, et l'on m'approuve tout -autant que l'on peut. Je me crois obligée, en conscience, à lui parler -sur ce ton-là , et je veux avoir l'honneur de la redresser.» - - Page 293, ligne 10: Il faut cependant en excepter le roi, qu'elle - aimait plus... qu'il ne fallait pour son repos. - -Madame de Sévigné écrit à sa fille: «La princesse de Tarente n'attribue -l'agitation de sa nièce qu'à l'ignorance de son état; elle dit que c'est -une _fièvre violente_, et qu'elle s'y connaît. Voulez-vous que je -dispute contre elle?» - -Il n'est pas exact de dire que ces derniers mots prouvent que madame de -Sévigné ne croyait pas à la passion de la duchesse d'Orléans pour le -roi. Et il en serait ainsi, que le témoignage de la princesse de Tarente -deviendrait autrement décisif sur cet objet que celui de madame de -Sévigné. Cela explique parfaitement bien la haine de la duchesse pour -madame de Montespan et pour madame de Maintenon. - - Page 296, lig. 5 de la note 652: Cette famille subsiste encore. - -Un duc de Tarente, candidat du gouvernement, a été nommé membre du corps -législatif dans la deuxième circonscription du département du Loiret, en -mars 1852. - - Page 306, ligne 8: Les éloges qu'elle donne au grand historien du - peuple juif. - -Dans la biographie de Josèphe (Flavien), on n'indique pas de plus -ancienne édition de la traduction de cet auteur que celle de 1681, in-8º -et in-12. Les lettres de madame de Sévigné prouvent qu'il y en a -d'antérieures en date; mais je n'ai pu en trouver encore la mention dans -aucune notice. - - -CHAPITRE XIV. - - Page 318, lignes 7 à 9: «Je n'eusse jamais cru que d'Olonne eût été - propre à se soucier de son nom et de sa famille.» - -La lettre de madame de Sévigné, du 5 janvier 1676, rectifie une erreur -de la _Gazette de Hollande_: elle nous apprend que mademoiselle de -Noirmoutier était aussi de la maison de la Trémouille, et qu'après son -mariage elle s'appellera madame de Royan. La citation de Feuquières -renvoie à une lettre de madame de Saint-Chamand à madame de Feuquières, -qui annonce (le 17 janvier 1676) que la comtesse d'Olonne était à -Baréges, parce qu'elle avait fait une chute de voiture et avait eu le -bras cassé. - - Page 329, ligne 21: Quoique l'assemblée ait voté, sous l'influence - de la terreur exercée par le duc de Chaulnes, etc. - -Le procès-verbal de la tenue des états en l'endroit cité (p. 379 verso), -sous la date du 12 décembre 1675, porte: «M. de Chaulnes est entré aux -états, pour leur dire de la part du roi de faire les fonds, etc.» - - Page 330, ligne 7: Presque en même temps que se terminait à Dinan - la tenue des états de Bretagne. - -La tenue de l'assemblée des états de Bretagne commença à Dinan le 9 -novembre 1675, et se termina le 15 décembre; l'assemblée des communautés -de Provence ouvrit ses séances à Lambesc le 23 octobre, et les termina -le 20 décembre 1675. - - Page 338, lignes 2 et 3: Madame de Sévigné allait quelquefois dîner - au château d'Argentré. - -Malheureusement les lettres de madame de Sévigné qui constatent ce fait -nous apprennent que, malgré son intimité avec les habitants de ce -château et ses railleries fréquentes sur les sottises de mademoiselle du -Plessis, elle s'égayait par trop aussi sur les ridicules provinciaux de -toute la famille. M. Corbière, qui, au milieu de ses travaux -ministériels, ne pouvait s'empêcher de causer longuement de littérature, -m'a dit qu'on savait en Bretagne qu'avant la publication des lettres de -madame de Sévigné, sa mémoire était en vénération parmi les descendants -des du Plessis: le portrait de cette illustre amie se trouvait dans -toutes les chambres du château, comme celui d'une parente vénérée qu'on -a perdue. Mais quand les lettres eurent paru, la famille d'Argentré, -cruellement détrompée, fit remettre au grenier les images de la dame des -Rochers; et sa mémoire y fut en exécration parmi les personnes qui -auraient recherché son estime, si elles avaient vécu de son temps. Cet -exemple vient à l'appui des sages instructions de madame de Maintenon -pour ses élèves de Saint-Cyr, sur le danger d'écrire des lettres. Afin -de mieux concevoir l'effet que dut produire au château d'Argentré la -lecture de la correspondance de madame de Sévigné, il faut citer le -passage de sa lettre à madame de Grignan, en date du 5 janvier 1676: - -«Au reste, mademoiselle du Plessis s'en meurt; toute morte de jalousie, -elle s'enquiert de tous nos gens comme je la traite. Il n'y en a pas un -qui ne se divertisse à lui donner des coups de poignard: l'un lui dit -que je l'aime autant que vous; l'autre, que je la fais coucher avec moi, -ce qui serait assurément la plus grande marque de ma tendresse; l'autre, -que je la mène à Paris, que je la baise, que j'en suis folle; que mon -oncle l'abbé lui donne dix mille francs; que si elle avait seulement -vingt mille écus, je la ferais épouser à mon fils. Enfin, ce sont de -telles folies, et si bien répandues dans le petit domestique, que nous -sommes contraints d'en rire très-souvent, à cause des contes perpétuels -qu'ils nous font. La pauvre fille ne résiste pas à tout cela. Mais ce -qui nous a paru très-plaisant, c'est que vous la connaissiez encore si -bien, et qu'il soit vrai, comme vous le dites, qu'elle n'ait plus de -fièvre quarte dès que j'arrive; par conséquent elle la joue; mais je -suis assurée que nous la lui redonnons _véritable_ tout au moins. Cette -famille est bien destinée à nous réjouir. Ne vous ai-je pas conté comme -feu son père nous a fait pâmer de rire six semaines de suite? Mon fils -commence à comprendre que ce voisinage est la plus grande beauté des -Rochers.» (SÉVIGNÉ, _Lettres_, t. IV, p. 295, édit. G.) - - Page 345, ligne 15: D'anciennes dettes contractées envers la - famille de Mirepoix. - -L'inventaire des archives de la maison de Grignan démontre que le -chevalier Perrin, s'il a été bien informé, entend, dans sa note, parler -de la première femme du comte de Grignan. Il s'agissait d'une -réclamation du sieur Jabach pour une somme de 4,000 liv. qui lui était -due comme complément d'une obligation faite à son profit par M. le comte -de Grignan et feu son épouse. Cette affaire ne fut terminée que le 31 -mars 1677, au moyen d'une constitution de 250 liv. de rentes, par M. le -comte et madame la comtesse de Grignan, au profit de mademoiselle de -Grignan, fille de madame de Grignan-Rambouillet. Après cette -constitution, le sieur Jabach donna quittance. (_Catalogue des archives -de la maison de Grignan_, p. 33.--Les pièces les plus importantes ont -été achetées par la Bibl. nat., où elles sont conservées.) - - Page 346, ligne 10: Puis marquis de Vins. - -L'abbé de Vins, dont il est fait mention dans la lettre du 11 mars 1671 -(t. I, p. 365, édit. G.), et qui était venu trouver madame de Sévigné -pour lui donner des nouvelles de madame de Grignan, était probablement -le frère cadet du marquis de Vins. - -Dans une lettre de M. de Pomponne au marquis Isaac de Feuquières, -ambassadeur en Suède, datée de Paris le 29 avril 1674, on lit: - -«...La grande affaire que nous avons faite a été de marier ma sÅ“ur (sa -belle-sÅ“ur) à M. le marquis de Vins, qui est un homme de qualité de -Provence, seul et unique héritier de sa maison, ayant un père et une -mère, toutes dettes payées.» (_Lettres de_ FEUQUIÈRES, t. II, p. 429.) - - Page 355, lignes 1 et 2: Sans inspirer à l'une et à l'autre ni - estime ni confiance. - -Dans la lettre de madame de Maintenon au cardinal de Noailles (mars -1700), on lit: «Madame de Saint-Géran m'a demandé une audience, en -m'assurant qu'elle voulait être dévote, et très-dévote. Elle a voulu me -persuader de la faire aller à Marly. Je lui ai parlé avec une grande -franchise sur sa mauvaise conduite. Je l'ai renvoyée à madame la -maréchale de Noailles, pour juger si pour se détacher du monde il faut -aller à Marly. Que de conversions fausses! Le péché vaut encore mieux -que l'hypocrisie.» (_Lettres de madame_ DE MAINTENON, t. IV, p. 191.) - - Page 355, lignes dernières: Elle (_madame de Saint-Géran_) n'eut - qu'une fille, dont elle accoucha après vingt et un ans de mariage. - -Dans l'ignorance où elles étaient de ce fait, les personnes qui ont à -Saint-Cyr composé ou falsifié nombre de lettres de madame de Maintenon -lui font dire dans une de celles adressées à madame de Saint-Géran: -«Votre fils est très-joli.» Et plus loin; «La _du Fresnoy_ est -délaissée. Elle a recours à moi... Nous nous sommes embrassées. Je lui -rendrai service.» (Mai 1679, p. 133, édit. de Dresde, 1753, in-12.) -Combien madame de Maintenon eût eu pitié de celles qui croyaient servir -sa mémoire en lui prêtant de tels sentiments, un tel langage, à l'époque -même où elle faisait tous ses efforts pour ramener le roi à la -soumission religieuse! - - -CHAPITRE XV. - - Page 356, lignes dernières: Madame de Sévigné se plaint fréquemment - à sa fille du grand nombre de lettres qu'elle recevait, etc. - -Nous avons remarqué dans la troisième partie de ces _Mémoires_, chapitre -VI, p. 108, que la réputation de madame de Sévigné dans le genre -épistolaire, bien établie à la cour et parmi le grand monde, devint -populaire aussitôt après la publication des _Mémoires de Bussy_ en 1694; -nous avons cité les vers latins de l'Épître sur la manière l'écrire des -lettres, par le jésuite Montaigu. Cette épître, qui fut publiée en -1713, reparut encore en 1749 dans le recueil intitulé _Poëmata -didascaloïca_; Parisiis, le Mercier, 1749, 3 vol. in-12.--Le passage sur -Sévigné se trouve t. I, p. 314; et pour qu'on ne commît aucune méprise -sur la personne, au mot _Sevinia_ on a ajouté cette note, qui n'était -pas dans l'édition première: «Marie de Rabutin, marquise de Sévigné.» - - Page 366, lignes 1 à 3: Les deux sÅ“urs étaient également l'objet - des railleries de madame de Grignan pour leur vanité. - -Il paraît que cela était assez fondé, et que madame de Grignan n'était -pas la seule qui raillât madame de Coulanges sur sa vanité. Madame de -Maintenon écrivant à son frère (28 février 1678, t. I, p. 154, Amst., -1756), afin de lui recommander l'économie, lui dit: «Je ne suis pas plus -avare que vous; mais j'aurais 50,000 livres de rente, que je n'aurais -pas le train de grande dame, ni un lit galonné d'or, comme madame de la -Fayette; ni un valet de chambre, comme madame de Coulanges. Le plaisir -qu'elles en ont vaut-il les railleries qu'elles en essuient? M. le -chancelier son oncle (c'est-à -dire le Tellier, oncle de madame de -Coulanges) est plein de modération, et le roi l'estime.» - - -FIN. - - - - - TABLE SOMMAIRE - DES CHAPITRES DE CE VOLUME. - - - CHAPITRE PREMIER.--1673. - - Pages - - Madame de Sévigné quitte la Provence.--Elle écrit de Montélimar.--Elle - arrive à Bourbilly.--Conduite du comte de Bussy.--Détails sur la - comtesse de Fiesque.--La cour de Monsieur et la cour de - Condé.--Arrivée à Paris de madame de Sévigné. 1 - - - CHAPITRE II.--1673-1674. - - Visites que reçoit madame de Sévigné.--Pour la voir, son fils - quitte deux fois l'armée.--Mort du marquis de Maillane.--Louis - XIV se prépare à conquérir la Franche-Comté.--Il charge - l'évêque de Marseille d'une négociation auprès de la - duchesse de Toscane. 18 - - - CHAPITRE III.--1673-1674. - - Détails sur la principauté d'Orange et sur ceux qui la - possédèrent.--Le comte de Grignan s'empare de la citadelle - d'Orange et la fait démolir.--Lutte entre l'évêque de Marseille - et Grignan.--Ouverture des états de Bretagne. 36 - - - CHAPITRE IV.--1673-1674. - - Madame de Sévigné retrouve Bussy à Paris.--Origine de la liaison de - la marquise de Martel avec madame de Sévigné.--Bussy demande une - nouvelle prolongation de séjour.--La duchesse de Longueville - intercède pour lui auprès de Condé, mais inutilement.--Bussy reste - caché dans Paris.--Louis XIV fait venir la reine à Dijon.--La - guerre de Franche-Comté s'achève. 60 - - - CHAPITRE V.--1674. - - Portrait de Louis XIV.--Détails sur la reine.--Madame de - Montespan donne des bals d'enfants.--Amours de Louis XIV - et de la Vallière.--Elle est faite duchesse.--Triomphe de - madame de Montespan.--Madame de la Vallière entre aux - Carmélites.--Sa prise d'habit et ses vÅ“ux.--Grâce que lui - accorde le roi.--Pourquoi il s'abstint de l'aller voir. 81 - - - CHAPITRE VI.--1674-1675. - - Le parti religieux et le parti mondain se disputent l'influence sur - Louis XIV.--Réforme dans la maison de la reine.--Madame de Sévigné - visite Port-Royal des Champs.--Mort du grand Condé.--Colbert est - chargé de la réorganisation des spectacles de Paris.--L'Opéra - devient le spectacle dominant.--Sociétés de Paris à cette époque. 112 - - - CHAPITRE VII.--1674-1675. - - Arrivée à Paris de M. et madame de Grignan.--Madame de - Grignan demeure quinze mois avec sa mère.--Ouverture - de l'assemblée des communautés de Provence.--Correspondance - de Bussy et de madame de Sévigné.--Détails sur les - deux femmes et les enfants de Bussy. 137 - - - CHAPITRE VIII.--1675. - - Madame de Grignan retourne en Provence.--Retz va en Lorraine, - et donne sa démission du cardinalat.--Son portrait, - par la Rochefoucauld.--Douleur de madame de Sévigné en - se séparant de Retz.--Elle quitte Paris pour aller en Bretagne. 160 - - - CHAPITRE IX.--1674-1675. - - Succès de Louis XIV en Franche-Comté et en Roussillon.--Bataille - de Senef.--Révoltes en Bretagne et en Guienne.--Le - duc de Chaulnes sévit contre les Bretons.--Les états - de Bretagne s'assemblent à Dinan.--Remontrances adressées - au roi.--D'Harouïs, trésorier des états, est condamné à une - prison perpétuelle. 173 - - - CHAPITRE X.--1675-1676. - - L'opinion publique se déclare contre madame de Montespan.--Un - prêtre lui refuse l'absolution.--Bossuet et Bourdaloue - conseillent au roi et à madame de Montespan de se séparer.--Ils - le promettent.--Madame de Montespan construit Clagny.--Le - roi ordonne qu'elle soit réintégrée à Versailles, mais - avec l'intention de ne plus avoir commerce avec elle.--Madame - de Montespan parvient à le faire changer de résolution.--La - cour reprend sa splendeur et ses plaisirs. 189 - - - CHAPITRE XI.--1675-1676. - - Espoir du parti pieux dans l'influence de madame de Maintenon. - --Nécessité de jeter un coup d'Å“il rétrospectif sur la vie de - cette dame.--Le roi lui confie l'éducation de ses enfants - issus de madame de Montespan.--Elle devient marquise de - Maintenon.--Obtient de correspondre directement avec le - roi.--Durée du règne de madame de Montespan. 209 - - - CHAPITRE XII.--1675-1676. - - Turenne est tué.--Création de nouveaux maréchaux.--La - révolte continue à Rennes.--Madame de Sévigné arrive à - Nantes.--Souvenirs que ce voyage lui rappelle.--Faits importants - relatifs à sa jeunesse, rectifiés.--Date de la naissance - de ses enfants, etc.--Détails fournis par les Mémoires - de d'Ormesson sur madame de Sévigné et sur les événements. 246 - - - CHAPITRE XIII.--1676. - - Liaison de madame de Sévigné avec la princesse de Tarente.--Nouvelles - du Danemark et de la cour de France, données - par cette princesse à madame de Sévigné durant son séjour - aux Rochers.--Détails sur Griffenfeld.--Mariage de la princesse - de la Trémouille.--Caractère de MADAME, seconde - femme du duc d'Orléans.--Détails sur le prince et la princesse - de Tarente.--Madame de Sévigné passe l'hiver aux - Rochers. 283 - - - CHAPITRE XIV.--1675-1676. - - Malheurs de la Bretagne.--Forbin marche sur cette province - avec six mille hommes.--Exil du parlement.--M. de Chaulnes est - insulté.--Tenue des états de Provence.--Détails sur les affaires - de Bretagne et sur celles des provinces.--Correspondance de - madame de Sévigné avec ses amis de Paris.--Ses liaisons avec - différentes personnes. 314 - - - CHAPITRE XV.--1675-1680. - - Plaintes de madame de Sévigné sur le grand nombre de lettres - qu'elle est obligée d'écrire.--Soins et attentions que lui - prodigue son fils.--Volages amours de celui-ci.--Nouveaux - travaux qu'entreprend aux Rochers madame de Sévigné.--Elle - y tombe dangereusement malade.--Sévigné vient à Paris pour - vendre sa charge de guidon.--Madame de Sévigné quitte les - Rochers.--Elle s'arrête à Malicorne, où on lui lit l'oraison - funèbre de Turenne par Fléchier.--Elle arrive à Paris. 356 - - -FIN DE LA TABLE DES CHAPITRES. - - - - -TABLE SOMMAIRE - -DES - -MATIÈRES PRINCIPALES DES NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS CONTENUS DANS CE -VOLUME. - - - Pages - - Sur les madrigaux de Montreuil pour madame de Sévigné 393 - - Sur le voyage clandestin de l'évêque de Valence à Paris 393 - - Sur deux petits poëmes de Marigny 395 - - Sur _Forléans_, _Bourbilly_ et _Époisses_ 397 - - Sur le château d'Époisses 398 - - Sur madame de la Morésan 403 - - Sur les éditions de l'_Histoire amoureuse des Gaules_ 404 - - Sur doña Felippe-Maria-Térésa Abarca 406 - - Sur la lettre de la sÅ“ur Magdeleine du Saint-Esprit 409 - - Sur la terre du Mesnil Saint-Denis 411 - - Sur l'opéra en France 413 - - Sur une grossesse de madame de Grignan 415 - - Vers de Benserade sur le marquis de Saucourt 418 - - Jugement de M. de la Rivière sur les lettres de madame de Grignan 420 - - Sur la _Relation de ce qui s'est passé en Catalogne_ 421 - - Sur des lettres de Louis XIV à Colbert, relatives à madame de - Montespan 422 - - Sur M. de Condom 425 - - Sur la perruque de Louis XIV 426 - - Sur une lettre et des fragments de lettres attribués à madame - de Maintenon 429 - - Sur des bruits de cour relatifs à madame de Montespan 433 - - Passages extraits des _Conversations de madame de Maintenon_ 433 - - Sur le vague qui règne dans l'histoire de madame d'Aubigné et - dans celle des premières années de sa fille 437 - - Sur un dialogue de madame de Maintenon pour ses élèves de - Saint-Cyr 439 - - Épigramme du chevalier de Méré 439 - - Sur l'auteur de la _Mazarinade_ 443 - - Sur les _Å’uvres diverses d'un auteur de sept ans_ 443 - - Sur Gui Patin 449 - - Sur le château de la Seilleraye, et sur les portraits de madame de - Sévigné et de sa fille 451 - - Sur madame de Sévigné et la famille du Plessis 460 - - -FIN DE LA TABLE DES NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS. - - - - - -End of the Project Gutenberg EBook of Mémoires touchant la vie et les écri -s de Marie de Rabutin-Chantal, Volume , by Charles Athanase Walckenaer - -*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK MARIE DE RABUTIN-CHANTAL *** - -***** This file should be named 52428-0.txt or 52428-0.zip ***** -This and all associated files of various formats will be found in: - http://www.gutenberg.org/5/2/4/2/52428/ - -Produced by Clarity, Hélène de Mink, and the Online -Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This -file was produced from images generously made available -by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at -http://gallica.bnf.fr) - 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Information about the Project Gutenberg -Literary Archive Foundation - -The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit -501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the -state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal -Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification -number is 64-6221541. Contributions to the Project Gutenberg Literary -Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by -U.S. federal laws and your state's laws. - -The Foundation's principal office is in Fairbanks, Alaska, with the -mailing address: PO Box 750175, Fairbanks, AK 99775, but its -volunteers and employees are scattered throughout numerous -locations. Its business office is located at 809 North 1500 West, Salt -Lake City, UT 84116, (801) 596-1887. Email contact links and up to -date contact information can be found at the Foundation's web site and -official page at www.gutenberg.org/contact - -For additional contact information: - - Dr. Gregory B. Newby - Chief Executive and Director - gbnewby@pglaf.org - -Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg -Literary Archive Foundation - -Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide -spread public support and donations to carry out its mission of -increasing the number of public domain and licensed works that can be -freely distributed in machine readable form accessible by the widest -array of equipment including outdated equipment. Many small donations -($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt -status with the IRS. - -The Foundation is committed to complying with the laws regulating -charities and charitable donations in all 50 states of the United -States. Compliance requirements are not uniform and it takes a -considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up -with these requirements. We do not solicit donations in locations -where we have not received written confirmation of compliance. To SEND -DONATIONS or determine the status of compliance for any particular -state visit www.gutenberg.org/donate - -While we cannot and do not solicit contributions from states where we -have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition -against accepting unsolicited donations from donors in such states who -approach us with offers to donate. - -International donations are gratefully accepted, but we cannot make -any statements concerning tax treatment of donations received from -outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff. - -Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation -methods and addresses. 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Thus, we do not -necessarily keep eBooks in compliance with any particular paper -edition. - -Most people start at our Web site which has the main PG search -facility: www.gutenberg.org - -This Web site includes information about Project Gutenberg-tm, -including how to make donations to the Project Gutenberg Literary -Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to -subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks. - diff --git a/old/52428-0.zip b/old/52428-0.zip Binary files differdeleted file mode 100644 index 57f9fb8..0000000 --- a/old/52428-0.zip +++ /dev/null diff --git a/old/52428-h.zip b/old/52428-h.zip Binary files differdeleted file mode 100644 index d9dfdc9..0000000 --- a/old/52428-h.zip +++ /dev/null diff --git a/old/52428-h/52428-h.htm b/old/52428-h/52428-h.htm deleted file mode 100644 index 07594fd..0000000 --- a/old/52428-h/52428-h.htm +++ /dev/null @@ -1,18344 +0,0 @@ - <!DOCTYPE html PUBLIC "-//W3C//DTD XHTML 1.0 Strict//EN" - "http://www.w3.org/TR/xhtml1/DTD/xhtml1-strict.dtd"> - <html xmlns="http://www.w3.org/1999/xhtml" xml:lang="fr" lang="fr"> - <head> - <meta http-equiv="Content-Type" - content="text/html;charset=iso-8859-1" /> - <meta http-equiv="Content-Style-Type" content="text/css" /> - <title> - The Project Gutenberg's eBook of Mémoires touchant la vie et les écrits de Marie de Rabutin-Chantal, vol. 4/6, by Charles Athanase Walckenaer</title> - <link rel="coverpage" href="images/cover.jpg" /> - <style type="text/css"> - - h1,h2 {text-align: center; 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You may copy it, give it away or re-use it under the terms of -the Project Gutenberg License included with this eBook or online at -www.gutenberg.org. If you are not located in the United States, you'll have -to check the laws of the country where you are located before using this ebook. - - - -Title: Mémoires touchant la vie et les écrits de Marie de Rabutin-Chantal, Volume 5 of 6 - -Author: Charles Athanase Walckenaer - -Release Date: June 28, 2016 [EBook #52428] - -Language: French - -Character set encoding: ISO-8859-1 - -*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK MARIE DE RABUTIN-CHANTAL *** - - - - -Produced by Clarity, Hélène de Mink, and the Online -Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This -file was produced from images generously made available -by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at -http://gallica.bnf.fr) - - - - - - -</pre> - - -<div class="tnote"> -<p>Note sur la transcription: Les erreurs clairement introduites par le typographe ont été corrigées. -L'orthographe d'origine a été conservée et n'a pas été harmonisée. -Les numéros des pages blanches n'ont pas été repris.</p> -</div> - -<p><span class="pagenumh"><a id="Page_I">I</a></span> -<span class="pagenumh"><a id="Page_II">II</a></span></p> - -<h1><span class="large">MÉMOIRES</span><br /> -<span class="xs">SUR MADAME</span><br /> -<span class="xlarge">DE SÉVIGNÉ</span><br /> -<span class="medium">CINQUIÈME PARTIE</span></h1> - -<p><span class="pagenumh"><a id="Page_III">III</a></span></p> - -<div class="topspace frontmatter"> -<hr class="tb" /> -<p class="small">TYPOGRAPHIE FIRMIN-DIDOT.—MESNIL (EURE).</p> -</div> - -<p><span class="pagenumh"><a id="Page_IV">IV</a></span></p> - -<div class="topspace titlepage"> - -<p><span class="xxlarge">MÉMOIRES</span><br /> -<span class="medium">TOUCHANT</span><br /> -<span class="xlarge">LA VIE ET LES ÉCRITS</span><br /> -<span class="large">DE MARIE DE RABUTIN-CHANTAL</span><br /> -<span class="small">DAME DE BOURBILLY</span><br /> -<span class="large">MARQUISE DE SÉVIGNÉ,</span></p> -<p><span class="small">DURANT LA SECONDE CONQUÊTE DE LA FRANCHE-COMTÉ PAR LOUIS XIV</span><br /> -<span class="small">ET LA PREMIÈRE COALITION DES PUISSANCES CONTRE LA FRANCE,</span><br /> -<span class="xs">SUIVIS</span><br /> -<span class="xs">De Notes et d'Éclaircissements,</span><br /> -<span class="xs">PAR</span><br /> -<span class="large">M. LE BARON WALCKENAER.</span></p> -<hr class="deco" /> -<p><span class="medium">QUATRIÈME ÉDITION,</span><br /> -<span class="small">REVUE ET CORRIGÉE.</span></p> -<div class="figcenter"> -<img src="images/deco.jpg" width="120" height="13" alt="" /> -</div> - -<p><span class="large">PARIS</span>,<br /> -<span class="medium">LIBRAIRIE DE FIRMIN DIDOT FRÈRES, FILS ET C<sup>ie</sup>,</span><br /> -<span class="xs">IMPRIMEURS DE L'INSTITUT DE FRANCE,</span><br /> -<span class="xs">RUE JACOB, 56.</span></p> -<hr class="deco" /> -<p><span class="medium">1875</span></p> -</div> - -<p><span class="pagenumh"><a id="Page_V">V</a></span></p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_1"> 1</a></span></p> -<h2><span class="xxlarge">MÉMOIRES</span><br /> -<span class="large">TOUCHANT LA VIE ET LES ÉCRITS</span><br /> -<span class="xs">DE</span><br /> -<span class="medium">MARIE DE RABUTIN-CHANTAL,</span><br /> -<span class="small">DAME DE BOURBILLY,</span><br /> -<span class="xlarge">MARQUISE DE SÉVIGNÉ.</span></h2> - -<p class="extra">CHAPITRE PREMIER.<br /> -<span class="medium">1673</span></p> -</div> - -<p class="hanging indent"> -Madame de Sévigné quitte la Provence et retourne à Paris.—Mauvais -état des routes.—Craintes de madame de Sévigné pour sa -fille.—Avantage qu'elle retire de son voyage en Provence pour -son commerce épistolaire.—Elle écrit de Montélimar.—Elle -voit à Valence l'évêque, M. de Cosnac, et Montreuil.—Détails sur -ceux-ci.—Marie-Adhémar.—Les filles de Sainte-Marie.—Madame -de Sévigné arrive à Lyon.—Loge chez Châteauneuf.—Voit -l'archevêque.—Elle part avec M. et madame de Rochebonne.—Madame -de Sévigné écrit de Châlon-sur-Saône.—Recommande -à sa fille deux ouvrages de Marigny.—Arrive à Bourbilly.—Ses -souvenirs dans ce lieu.—Du voyage qu'elle fit en 1664.—Conduite -de Bussy.—Il est à Paris.—Le comte et la comtesse de -Guitaud sont à Époisses.—Madame de Sévigné ne peut réconcilier -Guitaud avec Bussy.—Elle est venue à Bourbilly pour le règlement -de ses affaires.—Le comte et la comtesse de Guitaud et -la comtesse de Fiesque viennent voir madame de Sévigné.—Détails -sur la comtesse de Fiesque—Deux petites cours auprès de -celle du roi.—Cour de Monsieur; cour de Condé.—Nouvelles sur -ces deux cours données à madame de Sévigné.—L'Espagne déclare -la guerre à la France.—Détails sur la comtesse de Marci et mademoiselle -<span class="pagenum"><a id="Page_2"> 2</a></span> -de Grancey.—Leur influence.—Madame de Sévigné va -passer un jour à Époisses.—Elle écrit de Moret.—Arrive à Paris.</p> - -<p class="space">Le séjour de madame de Sévigné en Provence avait -duré quatorze mois. Ce temps fut pour elle marqué par -des jouissances de tous les jours et de tous les moments. -Objet des constantes sollicitudes de madame de Grignan, -elle avait promptement contracté l'habitude de la voir, -de lui parler, de l'écouter, d'être sans cesse occupée -d'elle. Ce n'était donc pas sans des déchirements de -cœur qu'elle s'arrachait forcément aux douceurs de ce -genre de vie. Diverses causes contribuaient à rendre -cette nécessité plus cruelle. En même temps que, parcourant -la route de Montélimar, elle s'éloignait de sa -fille, sa fille s'éloignait d'elle, et prenait le chemin de -Salons pour se rendre chez l'archevêque d'Arles. Quoique -ce court trajet accrût imperceptiblement la distance -qui devait toutes deux les séparer, néanmoins -il ajoutait encore au trouble violent que cette séparation -avait produit dans l'âme de madame de Sévigné. -Elle avait espéré ramener sa fille avec elle; mais de -puissants motifs s'y opposaient. L'assemblée des communautés -de Provence devait avoir lieu en décembre, -et ne pouvait se terminer qu'au milieu de janvier. Madame -de Grignan se trouvait par là forcée de différer de -trois mois le voyage qu'elle avait promis de faire à Paris<a id="FNanchor_1" href="#Footnote_1" class="fnanchor"> [1]</a>. -Obligée de se rendre à de si bonnes raisons, madame -de Sévigné trouvait dans la promesse même que -sa fille lui avait faite un sujet de peine et d'inquiétude. -La route de Montélimar à Lyon, qu'elle parcourait, était -<span class="pagenum"><a id="Page_3"> 3</a></span> -horriblement abîmée et dans plusieurs endroits entièrement -défoncée. Ce n'était pas sans effroi qu'elle songeait -que dans trois mois sa fille, au milieu de l'hiver, -aurait, pour venir la rejoindre, à parcourir cette même -route, devenue plus dangereuse encore par des dégradations -successives. Ses lettres nous montrent avec -quelle scrupuleuse attention elle observait l'état des chemins -et quel soin elle mettait à indiquer à madame de -Grignan les parties détériorées où, selon elle, on devait -descendre de voiture et se faire porter en litière, «sous -peine de la vie<a id="FNanchor_2" href="#Footnote_2" class="fnanchor"> [2]</a>.»</p> - -<p>Entre deux personnes qui s'aiment il y a dans les -entretiens familiers et confidentiels un échange sympathique -de sentiments et d'idées qui ne peut être suppléé -par la correspondance la plus assidue. La voix, le geste, -les yeux, les traits du visage manifestent nos sensations, -nos désirs, nos inclinations, notre trouble, nos espérances, -les subites inspirations de notre esprit, les éclairs capricieux -de notre imagination mieux que ne peuvent le -faire les mots les mieux arrangés, les plus expressifs, -tracés sur un froid papier. C'est ce que madame de Sévigné -ressentait amèrement lorsque de Montélimar elle -écrivait: «Hélas! nous revoilà dans les lettres.» Et cependant -le temps qu'elle avait passé en Provence, au -milieu de la famille des Grignan, lui donnait, pour sa -correspondance, plus de moyens de remédier aux inconvénients -de l'absence. Elle pouvait désormais apprécier -les changements que le temps, une nouvelle situation -avaient opérés dans l'esprit, les opinions, les goûts et les -<span class="pagenum"><a id="Page_4"> 4</a></span> -habitudes de madame de Grignan. Elle connaissait le -monde avec lequel vivait sa fille, ses occupations de chaque -jour, la distribution de ses heures, les qualités et les -défauts de ceux qui étaient placés sous sa dépendance, les -causes de ses tracas domestiques, toutes les misères, toutes -les nuances si variables de l'existence, tous ces riens -qu'on méprise et que pourtant on ressent si vivement, -qu'on redoute ou qu'on dédaigne d'écrire, mais qu'à tout -moment on voudrait confier à ceux qui s'intéressent à -notre bonheur. Madame de Sévigné savait et prévoyait -toutes les tribulations auxquelles sa fille était exposée; -elle pouvait donc se faire comprendre d'elle à demi-mot, -deviner ses désirs et pénétrer plus avant dans les replis -de son cœur. Il lui devenait plus facile de lui être agréable -par ses lettres, écrites avec plus de confiance, de facilité -et d'abandon. Aussi lui dit-elle peu de jours après -l'avoir quittée: «Je suis toute pétrie des Grignan, je -tiens partout... Hélas! ma fille, j'ai apporté toute la Provence -et toutes vos affaires avec moi<a id="FNanchor_3" href="#Footnote_3" class="fnanchor"> [3]</a>. Je vous vois, je -vous suis pas à pas; je vois entrer, je vois sortir; je vois -quelques-unes de vos pensées<a id="FNanchor_4" href="#Footnote_4" class="fnanchor"> [4]</a>.» Et le temps ne faisait -qu'ajouter encore à l'effet des souvenirs de son séjour à -Grignan; mais après elle y revient. «Il est vrai, dit-elle, -que le voyage de Provence m'a plus attachée à vous que -je n'étais encore. Je ne vous avais jamais tant vue, et -je n'avais jamais tant joui de votre esprit et de votre -cœur<a id="FNanchor_5" href="#Footnote_5" class="fnanchor"> [5]</a>.»</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_5"> 5</a></span> -La mélancolie qui dominait madame de Sévigné en -s'éloignant de sa fille ne fut pas allégée par les livres -qu'elle avait emportés pour se distraire en voyage. C'étaient -le <i>Socrate chrétien</i> de Balzac et les <i>Déclamations</i> -de Quintilien. On est étonné de voir au nombre -de ses lectures ce dernier ouvrage, d'une authenticité -douteuse et d'un mérite très-secondaire; il est probable -que c'était par suite des études d'auteurs anciens qu'elle -avait faites avec Corbinelli pendant son séjour à Grignan -qu'elle s'était imposé la tâche de lire ces <i>Déclamations</i>. -Elle écrit à sa fille après les avoir lues: -«Il y en a qui m'ont amusée et d'autres qui m'ont ennuyée<a id="FNanchor_6" href="#Footnote_6" class="fnanchor"> [6]</a>.»</p> - -<p>Partie de Montélimar, elle arriva le même jour à -Valence. L'évêque de Valence, M. de Cosnac, était une -de ses plus anciennes connaissances; il avait envoyé au-devant -d'elle son carrosse avec Montreuil<a id="FNanchor_7" href="#Footnote_7" class="fnanchor"> [7]</a> et son secrétaire -pour l'accompagner. Nos lecteurs se rappellent -ce joyeux abbé qui, dans la jeunesse de madame de -Sévigné, lui écrivait des lettres folles et composait pour -elle des madrigaux qu'il fit imprimer et même réimprimer<a id="FNanchor_8" href="#Footnote_8" class="fnanchor"> [8]</a>. -Ce fut chez lui qu'elle soupa et logea. L'évêque -et ses deux nièces vinrent lui rendre visite; mais, en entrant -dans la ville, elle s'était dirigée directement chez ce -prélat. «Il a bien de l'esprit, dit-elle à madame de Grignan. -<span class="pagenum"><a id="Page_6"> 6</a></span> -Ses malheurs et votre mérite ont été les deux principaux -points de sa conversation<a id="FNanchor_9" href="#Footnote_9" class="fnanchor"> [9]</a>.»</p> - -<p>Les malheurs de Daniel de Cosnac se réduisaient à ce -qu'il était forcé de résider dans son diocèse, sous le plus -beau climat et dans le plus riant pays de France. Mais, -homme de cour plutôt qu'évêque, il considérait comme -un exil l'obligation où il se trouvait de ne pouvoir être à -Versailles ou à Saint-Germain. Par son esprit et son -adresse il s'était introduit fort jeune chez le prince -de Conti, et contribua à son mariage avec la nièce de -Mazarin<a id="FNanchor_10" href="#Footnote_10" class="fnanchor"> [10]</a>. Cosnac n'avait que vingt-deux ans lorsqu'il -négocia avec une rare habilité ce qu'on appelait la paix -de Bordeaux. Mazarin, pour ses signalés services, le fit -nommer évêque de Valence; mais, au lieu de remplir -les devoirs de son épiscopat, Cosnac s'attacha à <span class="smallc">Monsieur</span>, -qui le nomma son premier aumônier. Les conseils -qu'il donna à ce prince et que celui-ci ne suivit -pas occasionnèrent son exil<a id="FNanchor_11" href="#Footnote_11" class="fnanchor"> [11]</a>. Dévoué de cœur à <span class="smallc">Madame</span> -(l'aimable Henriette), il vint <i>incognito</i> à Paris; et, pour -cet acte de désobéissance aux ordres du roi, il fut mis en -prison, puis envoyé à l'Ile-en-Jourdain. Après quatorze -ans d'exil, il avait enfin obtenu la permission de retourner -à Valence, où madame de Sévigné fut charmée de -le trouver en compagnie avec Montreuil<a id="FNanchor_12" href="#Footnote_12" class="fnanchor"> [12]</a>. Elle vit encore -à Valence la sœur de M. de Grignan, Marie-Adhémar -<span class="pagenum"><a id="Page_7"> 7</a></span> -de Monteil, religieuse à Aubenas, et les sœurs du -couvent de Sainte-Marie. C'était pour elle, en quelque -sorte, un devoir de famille, même dans les lieux où elle -ne faisait que passer, de rendre visite aux religieuses de -cet ordre, fondé par sa grand'mère<a id="FNanchor_13" href="#Footnote_13" class="fnanchor"> [13]</a>. Elle resta un jour -entier avec celles de Valence, et se dirigea sur Lyon, -où elle arriva le 10 octobre. Elle fut reçue dans cette -ville, comme précédemment, par le beau-frère de M. de -Grignan, l'aimable M. de Châteauneuf. Elle eut la visite -et reçut des civilités gracieuses de l'archevêque de -Lyon, Henri de Villars, qui lui fit voir d'admirables -tableaux.</p> - -<p>Le jour suivant elle partit accompagnée de M. et -de madame de Rochebonne<a id="FNanchor_14" href="#Footnote_14" class="fnanchor"> [14]</a>, qui allaient à leur terre. -Rochebonne voulait mettre ordre à ses affaires et se -préparer à rejoindre l'armée, prévoyant une guerre avec -l'Espagne, qui en effet était imminente. Madame de -Sévigné fut obligée de s'arrêter à six lieues de Lyon. -Elle date sa lettre «d'un petit <i>chien de village</i>» qu'elle -ne nomme pas. Ce village, d'après la distance qu'elle indique, -doit être la petite ville d'Anse, fort ancienne et -assez célèbre par les conciles qui s'y sont tenus<a id="FNanchor_15" href="#Footnote_15" class="fnanchor"> [15]</a>.</p> - -<p>Deux jours après, à vingt-cinq lieues plus loin, elle -écrit à madame de Grignan, et date sa lettre de Châlon-sur-Saône. -Elle annonce qu'elle a rencontré en chemin -un M. de Sainte-Marthe, qui lui fera parvenir -deux petits poëmes de Marigny, l'un intitulé <i>l'Enterrement</i>; -<span class="pagenum"><a id="Page_8"> 8</a></span> -l'autre, <i>le Pain bénit</i>. Ce dernier était une -satire virulente contre les marguilliers de la paroisse -de Saint-Paul et contre les exactions et les abus qui -avaient lieu de la part des fabriques pour les frais de -mariage, d'enterrement et pour rendre le pain bénit. -Ces abus existent encore; la forme seulement en est -changée. On se rappelle que dans sa jeunesse madame -de Sévigné était liée avec Marigny, ce grand chansonnier -de la Fronde<a id="FNanchor_16" href="#Footnote_16" class="fnanchor"> [16]</a>. Elle remarque avec raison que le -jugement qu'on porte de ces futiles opuscules dépend -de la disposition d'esprit où l'on se trouve en les lisant<a id="FNanchor_17" href="#Footnote_17" class="fnanchor"> [17]</a>. -Madame de Grignan n'avait pas le même motif que madame -de Sévigné pour se complaire à l'odieux et au ridicule -versé sur les obscurs administrateurs de la paroisse -Saint-Paul, dont sa mère, comme paroissienne, était -légèrement victime.</p> - -<p>Après un trajet de trente lieues fait en trois jours, madame -de Sévigné arriva enfin, le 21 octobre, dans son château -de Bourbilly, qu'elle n'avait pas vu depuis neuf ans.</p> - -<p>«Enfin, ma chère fille, dit-elle, j'arrive présentement -dans le vieux château de mes pères. Voici où ils ont -triomphé, suivant la mode de ce temps-là. Je trouve mes -belles prairies, ma petite rivière, mes magnifiques bois -et mon beau moulin à la même place où je les avais laissés. -Il y a eu ici de plus honnêtes gens que moi; et cependant -au sortir de Grignan, après vous avoir quittée, -<span class="pagenum"><a id="Page_9"> 9</a></span> -je m'y meurs de tristesse. Je pleurerais présentement de -tout mon cœur si je m'en voulais croire; mais je m'en -détourne, suivant vos conseils. Je vous ai vue ici; Bussy -y était, qui nous empêchait fort de nous ennuyer. Voilà -où vous m'appelâtes <i>marâtre</i> d'un si bon ton<a id="FNanchor_18" href="#Footnote_18" class="fnanchor"> [18]</a>.»</p> - -<p>On conçoit le douloureux plaisir qu'éprouvait cette -mère passionnée à se rappeler, en arrivant dans son -vieux château, le dernier voyage qu'elle y avait fait avec -sa fille. Nous l'avons seulement mentionné à sa date<a id="FNanchor_19" href="#Footnote_19" class="fnanchor"> [19]</a>; -rappelons-le ici, et ajoutons quelques mots de plus, -nécessaires pour compléter le récit de celui dont nous -nous occupons. Le présent se compose-t-il d'autre chose -que des souvenirs du passé et des rêves sur l'avenir?</p> - -<p>Ce fut le 15 août 1664 que madame de Sévigné alla à -Tancourt (commune de Vaurezis, près de Soissons), où -l'attendait Ménage<a id="FNanchor_20" href="#Footnote_20" class="fnanchor"> [20]</a>. De là elle se rendit à Commercy, -chez le cardinal de Retz, puis ensuite à Bourbilly. Bussy, -qui était alors à sa terre de Forléans, vint la voir: -il n'avait que quarante-cinq ans. Madame de Sévigné -en avait trente-huit; sa fille était dans sa seizième année. -Comme la fleur qui vient de s'épanouir, elle brillait de -tout l'éclat de sa fraîcheur et de sa beauté; elle était la -joie, les délices, l'orgueil de sa mère; elle n'appartenait -qu'à elle seule: aucun lien, aucun devoir ne la forçait -de s'en séparer. Ces deux charmantes femmes, dans -<span class="pagenum"><a id="Page_10"> 10</a></span> -leur gothique domaine, firent à cette époque sur Bussy -une impression si vive et si durable que, plus de deux -ans après (le 11 novembre 1666), appelé par des affaires -à se transporter avec toute sa famille à Forléans, -il en profita pour revoir encore Bourbilly. Il écrivit -alors à sa cousine pour lui exprimer combien lui et ses -enfants avaient été flattés de contempler les portraits -des Christophe et des Gui, leurs ancêtres, tapissant les -murs des Rabutin. «Ces Rabutin vivants, dit-il, voyant -tant d'écussons, s'estimèrent encore davantage, connaissant -par là le cas que les Rabutin morts faisaient de -leur maison<a id="FNanchor_21" href="#Footnote_21" class="fnanchor"> [21]</a>.»</p> - -<p>Madame de Sévigné avait, plus anciennement encore, -fait un voyage à Bourbilly, accompagnée de son mari; et -Bussy, qui à cette époque se trouvait à sa terre de Forléans, -fit une visite aux nouveaux mariés. Longtemps -après, il rappelle avec orgueil à sa cousine combien, à -la vue de tous ces portraits, le marquis de Sévigné fut -frappé de la grandeur de la maison des Rabutin<a id="FNanchor_22" href="#Footnote_22" class="fnanchor"> [22]</a>.</p> - -<p>A ce dernier voyage que madame de Sévigné fit à -Bourbilly (en 1673), Bussy ne se trouva point au rendez-vous -qu'elle lui avait assigné dans sa lettre écrite de -Grignan<a id="FNanchor_23" href="#Footnote_23" class="fnanchor"> [23]</a>. La manière railleuse avec laquelle elle mande -<span class="pagenum"><a id="Page_11"> 11</a></span> -à sa fille que son cousin avait pris soin de se faire habiller -à Semur, lui et toute sa famille<a id="FNanchor_24" href="#Footnote_24" class="fnanchor"> [24]</a>, pour se rendre à -Paris, prouve qu'elle aimait mieux le voir là qu'à Bourbilly. -Bussy s'était brouillé avec le comte de Guitaud, qui -alors habitait Époisses. Lui et sa femme comptaient au -nombre des meilleurs amis de madame de Sévigné: -possesseurs de la terre seigneuriale du fief de ses ancêtres<a id="FNanchor_25" href="#Footnote_25" class="fnanchor"> [25]</a>, -ils lui étaient très-utiles pour la gestion de ses -intérêts en Bourgogne et jouissaient dans toute la province -d'une grande considération. Madame de Sévigné -aurait voulu faire cesser l'ancienne inimitié de Bussy et -de Guitaud; mais Bussy, dévoré d'ambition et d'envie, -s'y refusa toujours<a id="FNanchor_26" href="#Footnote_26" class="fnanchor"> [26]</a>. Il reprochait à Guitaud de l'avoir -autrefois desservi dans l'esprit de Condé et de n'avoir -pas voulu exécuter l'accord qu'ils avaient conclu ensemble -pour la vente de la charge de capitaine-lieutenant -des chevau-légers du prince, lorsque celui-ci fut -arrêté<a id="FNanchor_27" href="#Footnote_27" class="fnanchor"> [27]</a>.</p> - -<p>Orgueilleux de l'antiquité de sa race, Bussy voyait avec -déplaisir que Guitaud, qui avait servi sous lui comme cornette -et ne s'était jamais distingué dans aucun combat, -fût devenu, par son premier mariage avec Françoise de -la Grange, possesseur du marquisat d'Epoisses et qu'en -<span class="pagenum"><a id="Page_12"> 12</a></span> -cette qualité madame de Sévigné, le dernier rejeton de -la branche aînée des Rabutin, l'appelât, même en plaisantant, -son seigneur<a id="FNanchor_28" href="#Footnote_28" class="fnanchor"> [28]</a>.</p> - -<p>Ce n'était point, au reste, un voyage sentimental que -madame de Sévigné avait voulu faire à Bourbilly. Elle -ne s'était pas dérangée de sa route seulement pour le -plaisir de revoir ce séjour, encore moins pour s'y rencontrer -avec Bussy, ni même pour jouir de la société du -comte et de la comtesse de Guitaud; le soin de ses intérêts -l'avait forcée d'y venir. Elle avait du blé à vendre, -des baux à renouveler, des mesures à prendre pour être -payée plus exactement de ses revenus. Elle s'occupa si activement -de ces affaires qu'elle trouva pour les terminer -des expédients auxquels le <i>bon abbé</i>, si expert en ces -matières, n'avait pas pensé<a id="FNanchor_29" href="#Footnote_29" class="fnanchor"> [29]</a>.</p> - -<p>Dès le lendemain de son arrivée, le comte de Guitaud, -dans l'espoir de l'attirer à Époisses, était accouru à cheval -de grand matin à Bourbilly par une pluie battante. -Madame de Sévigné le retint à dîner. Guitaud lui apprit -les nouvelles qu'il venait de recevoir. Le comte de Monterès -avait publié à Bruxelles, le 15 octobre, la rupture -de la paix entre la France et l'Espagne; la guerre paraissait -imminente<a id="FNanchor_30" href="#Footnote_30" class="fnanchor"> [30]</a>, et on présumait que M. de Grignan -serait obligé de venir pour expliquer sa conduite. Quant -à Guitaud, il n'espérait pas être employé; il raconta à -<span class="pagenum"><a id="Page_13"> 13</a></span> -madame de Sévigné les intrigues qui l'avaient fait déchoir -dans les bonnes grâces du prince de Condé, et comment -il s'en consolait en faisant de grands embellissements à -son magnifique château, où il se proposait de passer -l'hiver<a id="FNanchor_31" href="#Footnote_31" class="fnanchor"> [31]</a>. Après le dîner, madame de Sévigné, que le -comte de Guitaud n'avait pas prévenue, vit arriver dans -un carrosse à six chevaux la comtesse de Guitaud, accompagnée -de cette comtesse de Fiesque qui, selon madame -de Sévigné<a id="FNanchor_32" href="#Footnote_32" class="fnanchor"> [32]</a>, donnait de la joie à tout un pays et le -paraît. Cette femme, insouciante et frivole, conservait -sa beauté, que les années semblaient épargner: «c'est -disait madame de Cornuel, parce qu'elle est salée dans -sa folie<a id="FNanchor_33" href="#Footnote_33" class="fnanchor"> [33]</a>.» Madame de Sévigné eut par elle des nouvelles -de cour qui étaient de nature à amuser sa fille -dans les prochaines lettres qu'elle devait lui écrire.</p> - -<p>Comme deux satellites qui se meuvent autour d'un -astre principal, la cour de France entraînait à sa suite -deux petites cours, où s'agitaient dans leurs orbites particulières -les ambitions et les intrigues des courtisans. Ces -cours étaient celle de <span class="smallc">Monsieur</span>, frère du roi, et celle de -Condé, premier prince du sang. Toutes deux donnaient -l'exemple d'une licence de mœurs trop autorisée par -celle du monarque, mais d'une nature plus désastreuse -pour la morale publique. Deux femmes, deux sœurs, -qu'à cause de leur beauté et par une allusion dérisoire à -leur conduite impudente on nommait <i>les anges</i>, se partageaient -<span class="pagenum"><a id="Page_14"> 14</a></span> -dans ces cours la principale influence. Elles -étaient les filles du maréchal de Grancey, mais de deux -lits différents<a id="FNanchor_34" href="#Footnote_34" class="fnanchor"> [34]</a>. L'aînée ne se maria pas, et passait (afin de -masquer de plus honteux penchants) pour être la maîtresse -de <span class="smallc">Monsieur</span>. Elle était réellement celle de son favori, -le chevalier de Lorraine. Par lui, elle dominait <span class="smallc">Monsieur</span>. -Charlotte de Bavière, la <i>nouvelle Madame</i>, celle -qui fut la mère du régent, n'eut jamais aucune influence -sur son mari ou sur le roi. D'une laideur repoussante, -qui n'était contre-balancée par aucune qualité de l'esprit, -elle déplaisait à tout le monde par sa hauteur et sa fierté -maussade; étrangère à tous les personnages de cette cour -brillante où elle était forcée de vivre, elle fut toujours -Allemande en France. Pour son mari, qu'elle méprisait, -elle était complaisante et douce, afin d'en être bien -traitée et de rester en repos. Elle soulageait son ennui en -écrivant sans cesse à ses nobles parents d'Allemagne -tout ce que la médisance et la calomnie inspiraient de -plus odieux sur sa nouvelle famille, sur cette cour -où pourtant elle occupait le premier rang après la -reine.</p> - -<p>La sœur cadette de la belle Grancey, la comtesse de -Marci, était aimée de Henri-Jules de Bourbon, duc d'Enghien, -qu'on appelait alors monsieur le Duc. Ce fils du -grand Condé ne manquait pas de valeur; mais il n'avait -ni goût ni talent pour la guerre. Dur et égoïste dans -son intérieur, il était dans le monde aimable et spirituel. -Petit et maigre, par le feu de ses yeux et l'audace de -<span class="pagenum"><a id="Page_15"> 15</a></span> -son regard, il faisait, malgré sa mine chétive, une forte -et vive impression sur les femmes. Il les aimait et savait -s'en faire aimer. Il recherchait leur société, même -quand elles ne pouvaient lui offrir d'autre plaisir que -celui de la conversation<a id="FNanchor_35" href="#Footnote_35" class="fnanchor"> [35]</a>. Lorsqu'il était véritablement -amoureux, nul ne le surpassait dans les moyens de -séduction; nul n'égalait son activité pour vaincre les -obstacles, l'habileté et la fécondité de ses inventions -pour les travestissements et les ruses. La grâce, la noblesse -des manières, les flatteries les plus délicates, -l'éloquence de la passion, les galanteries les plus ingénieuses, -la magnificence des fêtes, les dons les plus dispendieux, -rien n'était omis, rien n'était épargné pour -assurer son triomphe. Homme de goût et de jugement, -il avait un savoir très-varié. C'est lui qui ordonnait tous -les embellissements de Chantilly et les grandes fêtes -que l'on y donnait au roi ou aux princes<a id="FNanchor_36" href="#Footnote_36" class="fnanchor"> [36]</a>.</p> - -<p>Louis XIV avait permis qu'en l'absence de son père -M. le Duc exerçât les fonctions de gouverneur en -Bourgogne; il lui avait donné la survivance de cette -charge ainsi que celle de grand maître de la maison -du roi. Le grand Condé n'était un homme supérieur qu'à -la guerre; il se déchargeait sur son fils de l'ennui des -affaires à Paris comme à Chantilly, comme à Dijon. -M. le Duc savait s'appliquer à l'administration des vastes -domaines de Condé; et il est probable que Guitaud -ne fut écarté de cette petite cour que parce que la société -habituelle des princes dont il dépendait ne convenait -<span class="pagenum"><a id="Page_16"> 16</a></span> -pas à sa femme, jeune, belle et pieuse<a id="FNanchor_37" href="#Footnote_37" class="fnanchor"> [37]</a>. Madame -de Sévigné, dans sa lettre à sa fille, rapportant tout ce -que lui a raconté sur les <i>anges</i> la comtesse de Fiesque, -dit: «Madame de Marci quitta Paris par pure sagesse, -quand on commença toutes ces collations de cet été<a id="FNanchor_38" href="#Footnote_38" class="fnanchor"> [38]</a>, et -s'en vint en Bourgogne; on la reçut à Dijon au bruit du -canon. Vous pouvez penser comment cela faisait dire de -belles choses et comme ce voyage paraissait en public. -La vérité, c'est qu'elle avait un procès qu'elle voulait -faire juger; mais cette rencontre est toujours plaisante<a id="FNanchor_39" href="#Footnote_39" class="fnanchor"> [39]</a>.»</p> - -<p>Sur l'autre sœur madame de Sévigné dit: «<span class="smallc">Monsieur</span> -veut faire mademoiselle<a id="FNanchor_40" href="#Footnote_40" class="fnanchor"> [40]</a> de Grancey dame d'atour de -<span class="smallc">Madame</span>, à la place de la Gordon, à qui il faut donner -cinquante mille écus: voilà qui est un peu difficile. Madame -de Monaco mène cette affaire.» Cette affaire ne -put réussir, probablement à cause de l'opposition qu'y -mit <span class="smallc">Madame</span>; mais <span class="smallc">Monsieur</span> fit mademoiselle de Grancey -dame d'atour de la fille de sa première femme, qui -devint reine d'Espagne<a id="FNanchor_41" href="#Footnote_41" class="fnanchor"> [41]</a>.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_17"> 17</a></span> -Madame de Sévigné céda enfin aux instances du comte -et de la comtesse de Guitaud. Elle alla passer un jour -à Époisses. Elle y trouva, outre la comtesse de Fiesque, -la comtesse de Toulongeon, son aimable cousine, puis -madame de Chatelus et le marquis de Bonneval. Elle fut -charmée de toutes les personnes qu'elle vit dans ce -château, dont elle admira la magnificence. Longtemps -après, elle déclara à Bussy<a id="FNanchor_42" href="#Footnote_42" class="fnanchor"> [42]</a> qu'elle conservait un souvenir -tendre et précieux de la réception qui lui avait été -faite alors par le comte et la comtesse de Guitaud.</p> - -<p>Le lendemain (27 octobre), madame de Sévigné arriva -à Auxerre, trajet de soixante-dix kilomètres ou dix-sept -lieues et demie. Elle paraît s'être arrêtée ensuite à -Sens (distance de cinquante kilomètres ou quatorze -lieues et demie). Elle regretta de n'y pas trouver l'archevêque, -Louis-Henri de Gondrin<a id="FNanchor_43" href="#Footnote_43" class="fnanchor"> [43]</a>, oncle de madame -de Montespan, janséniste renforcé, qui avait beaucoup -d'amitié pour madame de Grignan.</p> - -<p>De la petite ville de Moret, où elle coucha, madame -de Sévigné écrivit à sa fille le 30 octobre, et le surlendemain, -jour de la Toussaint, elle entra dans Paris -après quatre semaines de voyages<a id="FNanchor_44" href="#Footnote_44" class="fnanchor"> [44]</a>.</p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_18"> 18</a></span></p> -<h2 class="normal"><a id="CHAPITRE_II"></a>CHAPITRE II.<br /> -<span class="medium">1673-1674.</span></h2> -</div> - -<p class="hanging indent"> -Madame de Sévigné arrive à Paris, et descend chez son voisin de -Coulanges.—Visites qu'elle y reçoit.—Empressement de tous ses -amis, de Pomponne, du cardinal de Retz, de la Rochefoucauld, -de madame Scarron.—Sévigné quitte l'armée deux fois pour venir -voir sa mère.—Mort du marquis de Maillane.—Nouvelle lutte -qu'elle occasionne entre l'évêque de Marseille et madame de Grignan.—Madame -de Sévigné invite madame de Grignan à venir -avec son mari solliciter à la cour.—Madame de Grignan s'y refuse.—Madame -de Sévigné se trouve chargée de combattre seule l'influence -de l'évêque de Marseille auprès des ministres et du roi.—Louis -XIV, alors en guerre avec presque toute l'Europe, se prépare -à conquérir la Franche-Comté.—Il suffisait à tout.—S'interposait -dans les affaires de sa famille et dans celles des grands de -sa cour.—Il charge l'évêque de Marseille d'une négociation secrète -pour la duchesse de Toscane.—Il s'inquiète de la rivalité de ce -prélat avec le comte de Grignan.—Louis XIV allait nommer le -candidat qui lui était présenté par ce prélat.—La nouvelle de la -prise de la citadelle d'Orange le fait changer de résolution.</p> - -<p class="space">En attendant que ses appartements fussent disposés -pour la recevoir, madame de Sévigné descendit chez son -cousin de Coulanges, rue du Parc-Royal<a id="FNanchor_45" href="#Footnote_45" class="fnanchor"> [45]</a>. Cette rue -était voisine de celle de Saint-Anastase, où elle et le -comte de Guitaud demeuraient. Elle espérait ainsi pouvoir -être seule dans les premiers moments de son arrivée -<span class="pagenum"><a id="Page_19"> 19</a></span> -et cacher la faiblesse qu'elle avait de pleurer sans -cesse en lisant les lettres qu'elle recevait de sa fille. Ces -lettres lui ôtaient l'espoir de la revoir prochainement. -Cette combinaison, heureusement pour elle, ne réussit -point; il fallut, pour ne pas paraître ingrate, qu'elle se -détournât de ses tristes pensées ou qu'elle dît que le -vent lui avait rougi les yeux<a id="FNanchor_46" href="#Footnote_46" class="fnanchor"> [46]</a>. Depuis plusieurs jours -on épiait son arrivée, et jamais flot plus nombreux -de visiteurs et de visiteuses n'assaillit le logis de l'aimable -chansonnier. Il dut à cette faveur que lui fit sa -cousine le plaisir de voir sa femme, qui vint une des -premières; puis ensuite, ensemble ou successivement, -l'excellente sœur du marquis de la Trousse, mademoiselle -de Meri<a id="FNanchor_47" href="#Footnote_47" class="fnanchor"> [47]</a>, madame de Rarai<a id="FNanchor_48" href="#Footnote_48" class="fnanchor"> [48]</a>, la comtesse -de Sanzei<a id="FNanchor_49" href="#Footnote_49" class="fnanchor"> [49]</a>, madame de Bagnols, l'archevêque de -Reims (le Tellier), madame de la Fayette, M. de la -Rochefoucauld, madame Scarron, d'Hacqueville, la -Garde<a id="FNanchor_50" href="#Footnote_50" class="fnanchor"> [50]</a>, l'abbé de Grignan, l'abbé Têtu, Pierre Camus, -<span class="pagenum"><a id="Page_20"> 20</a></span> -le gros abbé de Pontcarré<a id="FNanchor_51" href="#Footnote_51" class="fnanchor"> [51]</a>, ami de d'Hacqueville, Brancas, -de Bezons, la marquise d'Uxelles, madame de Villars -et enfin M. de Pomponne, qui revint encore les jours -suivants. L'amitié si vive et si constante que ce ministre -avait témoignée pour M. et madame de Sévigné devenait -d'autant plus précieuse à celle-ci qu'elle pouvait -l'aider à soutenir la lutte où sa fille allait l'engager; aussi -mettait-elle tous ses soins à lui plaire<a id="FNanchor_52" href="#Footnote_52" class="fnanchor"> [52]</a>. Pomponne trouvait -dans son commerce avec cette femme spirituelle -un délassement aux peines et aux soucis des affaires; il -aimait à se rappeler surtout les heures de gaieté folâtre -qu'il avait autrefois passées dans sa société<a id="FNanchor_53" href="#Footnote_53" class="fnanchor"> [53]</a>.</p> - -<p>Peu de temps après son arrivée à Paris, madame de -Sévigné vit aussi un grand nombre de personnages, les -uns ses amis, les autres qu'elle était habituée à rencontrer -dans le monde où elle était répandue. Plusieurs -venaient des armées et devaient y retourner promptement; -ils étaient attirés, par le retour du roi, à Paris et -à Saint-Germain en Laye. C'étaient le prince de Condé, -M. le Duc, son fils, la duchesse de Bouillon, le cardinal -de Bouillon, la duchesse de Chaulnes, madame de Richelieu, -Vivonne, madame de Crussol, la comtesse de -Guiche<a id="FNanchor_54" href="#Footnote_54" class="fnanchor"> [54]</a>, madame de Thianges, madame de Monaco, les -<span class="pagenum"><a id="Page_21"> 21</a></span> -Noailles, les d'Effiat, les Beuvron-Louvigny, le marquis -de Villeroi, Charost et le chevalier de Buous, ce brave marin, -cousin germain de M. de Grignan<a id="FNanchor_55" href="#Footnote_55" class="fnanchor"> [55]</a>; puis son excellent -ami Corbinelli, et Barillon, et Caumartin, et Guilleragues, -dont l'esprit était en possession d'électriser le sien; -enfin madame de Marans, dont la sincère conversion et -«l'<i>absorbée</i> retraite» lui avaient été annoncées par une -lettre de la marquise de Villars, qu'elle reçut à Grignan<a id="FNanchor_56" href="#Footnote_56" class="fnanchor"> [56]</a>.</p> - -<p>Cependant la guerre continuait et devait durer encore; -mais les rigueurs de l'hiver mettaient quelque relâchement -dans les opérations militaires et permettaient -qu'on vînt prendre part, pendant de cours intervalles, -aux plaisirs de la capitale et à ceux de la cour. Le baron -de Sévigné lui-même quitta deux fois l'armée, et vint -voir sa mère; mais il fut obligé de s'en séparer au bout -de quelques jours et de repartir pour rejoindre son régiment. -Madame de Sévigné se montra peu alarmée sur -les périls auxquels son fils allait être exposé; elle disait -plaisamment: «M. de Turenne est dans l'armée de mon -fils, et les Allemands la redoutent.» Elle paraît aussi -peu inquiète d'apprendre qu'une amourette arrête le -jeune guidon des gendarmes à Sézanne et retarde son -arrivée, «attendu, dit-elle, qu'elle sait qu'il ne peut être -question de mariage<a id="FNanchor_57" href="#Footnote_57" class="fnanchor"> [57]</a>.»</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_22"> 22</a></span> -Aux anciennes et nombreuses connaissances de madame -de Sévigné s'en réunirent d'autres d'une date plus -récente, qu'elle était obligée d'accueillir avec empressement -par intérêt pour sa fille: telle était madame -d'Herbigny, sœur de Rouillé, comte de Melai, intendant -de Provence<a id="FNanchor_58" href="#Footnote_58" class="fnanchor"> [58]</a>; et Marin, qui venait d'être nommé -premier président du parlement d'Aix, homme d'une -physionomie agréable, aimable dans le monde, mais -despote dans son intérieur, dur envers sa femme et -auquel madame de Sévigné nous apprend qu'on avait -donné le surnom de <i>cheval Marin</i><a id="FNanchor_59" href="#Footnote_59" class="fnanchor"> [59]</a>.</p> - -<p>De tous les amis que madame de Sévigné eut alors -le plus de bonheur à revoir, ce fut le cardinal de Retz; -car il aimait et admirait sincèrement dans madame de -Grignan, qu'il avait vue naître et grandir, l'union des -qualités essentielles que l'on apprécie dans les deux -sexes: la beauté, le jugement et le savoir, l'énergie du -caractère, l'orgueil du rang, une noble ambition, un -esprit capable d'application dans les affaires et un -penchant prononcé pour l'étude des plus hautes questions -de la philosophie cartésienne, que Retz se plaisait -à débattre. Non-seulement il conservait les lettres -que madame de Grignan lui écrivait, mais il gardait des -copies de celles qu'elle avait écrites à d'autres<a id="FNanchor_60" href="#Footnote_60" class="fnanchor"> [60]</a>. Aussi -<span class="pagenum"><a id="Page_23"> 23</a></span> -n'était-ce qu'à lui que madame de Sévigné osait révéler -les secrets de toutes ses faiblesses pour sa fille, parce -que lui seul savait la plaindre et compatir à ses maternelles -douleurs.</p> - -<p>Bussy et Forbin-Janson se trouvaient aussi présents à -Paris lors du retour de madame de Sévigné; mais ni l'un -ni l'autre ne vint la voir. Le premier s'en abstint forcément -par des motifs de prudence que nous ferons connaître<a id="FNanchor_61" href="#Footnote_61" class="fnanchor"> [61]</a>; -le second ne pouvait, malgré le désir qu'il en -avait, se livrer au plaisir qu'il aurait eu d'entretenir un -commerce amical avec l'aimable belle-mère du comte -de Grignan, puisqu'il était en hostilité ouverte avec ce -dernier<a id="FNanchor_62" href="#Footnote_62" class="fnanchor"> [62]</a>. Ceci nous conduit à exposer les faits qui, -cette année, marquèrent la lutte que Forbin-Janson eut -à soutenir contre le lieutenant général gouverneur de -Provence.</p> - -<p>Cette lutte, qui se renouvelait tous les ans, fut cette -fois plus vive et plus animée<a id="FNanchor_63" href="#Footnote_63" class="fnanchor"> [63]</a>, parce qu'un nouveau -sujet de litige avait surgi entre le prélat et M. de Grignan, -d'où dépendait l'influence de l'un ou de l'autre -sur la Provence. Le marquis de Maillane de la Rousselle, -procureur-joint de la noblesse, était mort<a id="FNanchor_64" href="#Footnote_64" class="fnanchor"> [64]</a>; il s'agissait -<span class="pagenum"><a id="Page_24"> 24</a></span> -de lui nommer un successeur. L'assemblée des -communautés avait de droit la nomination à cette place; -mais dans le fait l'assemblée choisissait toujours celui -que désignait le gouverneur parmi les hauts dignitaires -qui dirigeaient le mieux les délibérations et qu'on supposait -le plus accrédité auprès du roi et de ses ministres. -M. de Grignan voulait faire nommer son cousin, le marquis -Pontever de Buous, frère de cette marquise de -Montfuron dont madame de Sévigné était ravie, parce -qu'elle était aimable, «et qu'on l'aimait sans balancer<a id="FNanchor_65" href="#Footnote_65" class="fnanchor"> [65]</a>.» -L'évêque de Marseille demandait qu'on lui préférât -M. de la Barben, qui, l'année précédente, avait, comme -courrier et à ses frais, porté au roi les délibérations des -états et qui, d'ailleurs, avait été principal consul d'Aix -et procureur du pays<a id="FNanchor_66" href="#Footnote_66" class="fnanchor"> [66]</a>.</p> - -<p>Cette affaire, qui paraissait si peu importante au milieu -des grands événements de la guerre et de la politique, -embarrassait cependant Louis XIV et ses ministres. C'est -qu'alors on était non-seulement très-préoccupé des dangers -qui à l'extérieur menaçaient la France, mais encore -attentif aux périls qui surgissaient à l'intérieur par -l'effet du mécontentement des populations, accablées d'impôts, -et d'une noblesse fière et brave, toujours prête à -s'agiter sous le frein qui l'avait domptée. Les provinces -maritimes, la Normandie, la Bretagne, la Gascogne<a id="FNanchor_67" href="#Footnote_67" class="fnanchor"> [67]</a>, la -Provence, plus exposées aux insultes des flottes ennemies, -<span class="pagenum"><a id="Page_25"> 25</a></span> -plus en proie aux intrigues et aux corruptions de -l'étranger, étaient surtout assujetties à une active surveillance. -C'est pour protéger les côtes de la Provence -contre l'Espagne que Louis XIV, dès qu'il eut déclaré -la guerre à cette puissance, nomma gouverneur des îles -Sainte-Marguerite le comte de Guitaud. Le court séjour -que madame de Sévigné fit à Bourbilly et à Époisses -avait eu pour résultat un redoublement d'amitié et -de confiance entre elle et le comte et la comtesse de -Guitaud, dont on s'aperçoit facilement par les lettres -qui nous restent de leur correspondance à partir de cette -époque. Louis XIV suivait avec attention tout ce qui se -passait en Provence, et ne dédaignait pas de chercher -à concilier les prétentions rivales de Forbin-Janson et de -Grignan. Lorsque Marin, récemment nommé premier -président du parlement d'Aix, vint, avant de partir pour -prendre possession de sa nouvelle charge, saluer le roi, -Louis XIV lui dit: «Vous aurez d'étranges esprits à gouverner -en Provence<a id="FNanchor_68" href="#Footnote_68" class="fnanchor"> [68]</a>!» Mais le choix de Marin n'était -pas bon pour manier habilement l'esprit turbulent des -Provençaux; il se fit détester de sa compagnie par sa -servilité maladroite et par ses susceptibilités en fait de -préséances<a id="FNanchor_69" href="#Footnote_69" class="fnanchor"> [69]</a>.</p> - -<p>L'empereur, l'Espagne, le Danemark, la Hollande, -toute l'Allemagne, hors les ducs de Bavière et de Hanovre, -étaient alors ligués contre Louis XIV. Malgré le -<span class="pagenum"><a id="Page_26"> 26</a></span> -traité secret conclu avec Charles II en 1670<a id="FNanchor_70" href="#Footnote_70" class="fnanchor"> [70]</a>, celui-ci -avait été forcé par son parlement de se réunir aux Hollandais -et de diriger toutes les forces navales de l'Angleterre -contre la France<a id="FNanchor_71" href="#Footnote_71" class="fnanchor"> [71]</a>. A l'insuffisance de ses ressources -en hommes et en argent contre une aussi formidable coalition -Louis XIV opposa le génie de ses généraux et de -ses ministres et son infatigable activité. Il aurait désiré -faire consentir l'Espagne à déclarer la neutralité de la -Franche-Comté demandée par les Suisses; mais l'Espagne -ne le voulut pas. A l'exception de Maestricht et de Grave, -Louis XIV avait sagement abandonné ses conquêtes en -Hollande; et, en concentrant ses forces, il était parvenu, -avec des armées inférieures en nombre, à repousser partout -ses ennemis; au nord comme au midi, il avait accru -la gloire de ses armes<a id="FNanchor_72" href="#Footnote_72" class="fnanchor"> [72]</a>. Ce qui lui restait de troupes -devait être employé à la conquête de la Franche-Comté, -à laquelle il voulait marcher en personne<a id="FNanchor_73" href="#Footnote_73" class="fnanchor"> [73]</a>.</p> - -<p>Les provinces maritimes, que ne pouvaient protéger -suffisamment des escadres trop faibles, étaient livrées aux -dangers des incursions désastreuses. Les gouverneurs qui -<span class="pagenum"><a id="Page_27"> 27</a></span> -y commandaient, par leur bravoure, leurs talents militaires -et leur influence personnelle, pouvaient seuls les -défendre contre l'invasion, en faisant un appel au zèle -et au patriotisme des nobles pour la défense du pays. -Louis XIV le savait, et il mit à profit ce moyen en -Guyenne<a id="FNanchor_74" href="#Footnote_74" class="fnanchor"> [74]</a>, en Bretagne et en Normandie. Alors il se -vit forcé par la nécessité de donner plus de puissance -aux gouverneurs des provinces menacées; mais ce ne -pouvait être au point de nuire à sa propre autorité et de -détruire l'œuvre de Richelieu, qui avait institué les intendants -pour amoindrir le pouvoir des gouverneurs, devenu -redoutable pour la couronne. Rouillé, intendant -de la Provence, dont madame de Grignan disait «que -la justice était sa passion dominante<a id="FNanchor_75" href="#Footnote_75" class="fnanchor"> [75]</a>,» s'accordait assez -bien avec le gouverneur et ménageait cette puissante maison -de Grignan. Néanmoins, quand le comte de Grignan -réclamait des gardes et des accroissements d'attribution -ou d'appointements, Rouillé devenait tout naturellement -son antagoniste, et, dans l'intérêt de sa charge et de -ses propres prérogatives, il s'opposait aux prétentions -du lieutenant général gouverneur. C'est pourquoi madame -de Sévigné n'avait pu faire consentir cet intendant -à favoriser les demandes de son gendre pour ce -qui concernait le payement des gardes et des courriers: -Rouillé s'était rangé, pour ces questions, du -côté de l'évêque de Marseille. Mais il ne se trouvait pas -dans les mêmes conditions pour le remplacement du -procureur du pays-joint pour la noblesse dans l'assemblée -<span class="pagenum"><a id="Page_28"> 28</a></span> -des communautés. Rouillé, homme de robe, quoique -ayant le titre de comte de Melay, était de cette caste -intermédiaire entre la roture et la haute noblesse, et il -avait intérêt à ménager celle-ci dans tout ce qui ne -pouvait pas entraver les devoirs dont sa charge l'obligeait -de s'acquitter. Lorsqu'il s'agissait de faire donner la -préférence à un roturier sur un noble pour une place auparavant -occupée par un noble, on espérait que Rouillé -se mettrait du parti de M. de Grignan, et non de celui -de l'évêque de Marseille. C'est par ce motif que madame -de Sévigné s'était empressée de cultiver la société de madame -d'Herbigny<a id="FNanchor_76" href="#Footnote_76" class="fnanchor"> [76]</a>, sœur de la femme de l'intendant, -alors à Paris. Elle l'avait charmée par son esprit, et était -parvenue à la mettre dans le parti de M. de Grignan. Caumartin, -ami de madame de Sévigné et de sa fille, avait été -gagné sans peine. Il en fut de même du premier président -nouvellement nommé, de Marin, «cet homme qui met -le bon sens et la raison partout,» dit madame de Sévigné, -toujours disposée à louer ceux qui agissent selon -ses désirs. Quoique circonvenu et entouré par tant d'influences, -Louis XIV n'aurait pas hésité à préférer au protégé -de M. de Grignan celui de l'évêque de Marseille. -Forbin-Janson avait donné au roi des preuves de son habileté, -de sa prudence, de sa discrétion dans des affaires -secrètes et intimes qu'il avait l'habitude de traiter avec -lui, par lui-même et sans intermédiaire.</p> - -<p>Ce roi qu'on a si souvent représenté comme uniquement -occupé de sa seule personne et subissant l'influence -de ses ministres, de ses maîtresses et de ses -<span class="pagenum"><a id="Page_29"> 29</a></span> -serviteurs se mêlait de tout, intervenait dans tout, réglait -tout, entrait dans les détails des susceptibilités -d'amour-propre et de rang de ses maréchaux et de ses -généraux, se livrait à toutes les enquêtes nécessaires -pour distribuer de la manière la plus avantageuse les -commandements de ses armées et les plus hautes fonctions -de l'État<a id="FNanchor_77" href="#Footnote_77" class="fnanchor"> [77]</a>. Dans ses palais, dans sa famille rien ne se -faisait sans son ordre direct. Le fier Montausier, voulant -transporter le jeune Dauphin confié à ses soins dans une -habitation plus salubre et lui donner un confesseur, ne -l'osa pas sans avoir été approuvé par le jeune roi, qui lui -désigna un prêtre de son choix<a id="FNanchor_78" href="#Footnote_78" class="fnanchor"> [78]</a>. La belle duchesse de -Mazarin espérait que, pour la protéger contre son mari, -Louis XIV suspendrait l'autorité des lois, et afin de l'y -engager elle fit intervenir en vain le roi d'Angleterre, -la reine de Portugal et toutes les femmes qui pouvaient -exercer quelque influence sur le tout-puissant -monarque<a id="FNanchor_79" href="#Footnote_79" class="fnanchor"> [79]</a>.</p> - -<p>C'est encore à Louis XIV que sa cousine la duchesse -de Toscane s'adressait pour que le grand-duc, qu'elle -n'aimait pas et qu'elle voulait quitter, eût plus d'indulgence -pour elle et de meilleurs procédés<a id="FNanchor_80" href="#Footnote_80" class="fnanchor"> [80]</a>. Louis XIV -<span class="pagenum"><a id="Page_30"> 30</a></span> -avait envoyé à Florence l'évêque de Marseille pour cette -négociation confidentielle, et l'évêque n'en rendit compte -qu'à lui seul. Louis XIV ne voulait pas mécontenter le -prélat relativement aux affaires de Marseille ni être injuste. -Avant de se prononcer, il témoigna le désir que -l'évêque et M. de Grignan se missent d'accord sur le -choix à faire du procureur-joint de la noblesse. Forbin-Janson, -plutôt pour complaire au monarque et à ses -ministres que par inclination, fit quelques concessions; -il promit d'être favorable dans l'assemblée des états -à la demande ordinaire de Grignan pour la somme -de cinq mille livres de la solde des gardes, et de celle -de trois mille livres pour frais de courrier. Madame de -Sévigné et bon nombre de ses amis, et même, parmi les -Grignan, l'imposant suffrage de l'archevêque d'Arles, -étaient pour la conclusion de la paix à ce prix. M. de -Grignan se serait volontiers rangé aussi à cette opinion; -mais madame de Grignan s'y opposa. Elle abhorrait -l'évêque de Marseille, et elle comprenait très-bien -que la considération de son mari et l'ascendant du -gouverneur sur les nobles de province dépendaient du -succès de la lutte engagée contre le prélat. En cela -elle voyait juste. Si Forbin-Janson parvenait à faire -nommer un homme de son choix, un roturier, c'en -était fait de l'autorité dont jouissait le gouverneur, de -l'affection que la noblesse avait pour lui et du respect -qu'elle lui portait. Madame de Grignan ameuta donc -tous ses amis de Provence et tous ceux de Paris et de la -cour contre l'évêque de Marseille. Elle le représenta sous -<span class="pagenum"><a id="Page_31"> 31</a></span> -les plus noires couleurs; selon elle, c'était un prélat -ambitieux, brouillon, hypocrite, ennemi de la noblesse -et cherchant à nuire sous les apparences de l'aménité, -de la charité et de la justice.</p> - -<p>Elle écrivit à ce sujet à sa mère, à d'Hacqueville, à -Caumartin, aux Grignan présents à la cour. Elle les -persuada tous d'autant plus facilement que l'évêque de -Marseille, soit parce que c'était sa conviction, soit parce -qu'il était révolté qu'on prêtât à ses actions et à ses paroles -des motifs indignes de lui, cherchait à faire croire -que Grignan, par paresse et par incapacité, ne s'acquittait -qu'avec négligence des fonctions de sa charge. -Madame de Grignan poussait le désir d'assurer son -triomphe dans l'assemblée des communautés jusqu'à -vouloir que le comte de Grignan ne demandât aucune -allocation d'argent pour les gardes et le courrier, -afin d'ôter à l'évêque de Marseille l'occasion de -se populariser en s'y opposant. C'était aussi l'avis de -Guitaud, qui s'était rangé du parti de madame de -Grignan; et en effet cette manière de procéder se -présentait sous une apparence noble et digne. Mais -ce n'était pas là le compte de M. de Grignan, qui -avec raison pensait que, par l'effet de cette renonciation, -il reconnaîtrait en même temps qu'en qualité -de lieutenant général gouverneur il n'avait pas -le droit d'avoir des gardes. Fier et généreux jusqu'à -la prodigalité, il songeait à se laisser allouer encore -la somme de cinq mille francs et à en faire ensuite -la remise à l'assemblée, comme étant insuffisante -pour la dépense des gardes qu'il demandait<a id="FNanchor_81" href="#Footnote_81" class="fnanchor"> [81]</a>. Ces résolutions -<span class="pagenum"><a id="Page_32"> 32</a></span> -de son gendre et de sa fille effrayaient madame -de Sévigné, qui ne pouvait penser<a id="FNanchor_82" href="#Footnote_82" class="fnanchor"> [82]</a> sans une mortelle -inquiétude au grand train de maison du gouverneur de -Provence, à ses fêtes, à ses festins, à son jeu, dépenses -jugées indispensables pour soutenir la splendeur du rang -qu'il occupait. Madame de Grignan se montrait à cet égard -sourde aux remontrances d'une mère sage et prévoyante.</p> - -<p>Madame de Sévigné désirait surtout que sa fille vînt elle-même -à la cour plaider sa cause. Sans doute le désir de -la posséder entrait pour beaucoup dans l'insistance qu'elle -mettait à la persuader; mais elle croyait sincèrement -que la vue d'une femme si belle, si considérée, qui parlait -admirablement le langage des affaires était de nature, -dans cette cour galante, à affaiblir l'influence de -l'évêque de Marseille et à dissiper tous les nuages qu'il -avait répandus sur la réputation du lieutenant général -gouverneur. Elle voulait d'ailleurs que M. de Grignan -accompagnât sa femme pour mieux contre-balancer par -sa présence à la cour celle de Forbin-Janson. Elle pensait -que le lieutenant général gouverneur pourrait retourner -ensuite en Provence pour la tenue des états, en lui -laissant sa fille comme soutien de ses intérêts pendant -cet intervalle de temps. Afin de forcer madame de Grignan -à suivre ses conseils, madame de Sévigné disait -que l'abbé avait décidé qu'il était pressant pour elle de -rendre son compte de tutelle à ses enfants, et que, par -cette raison, la réunion de son fils et de sa fille à Paris -était d'une indispensable nécessité. A ce plan madame -<span class="pagenum"><a id="Page_33"> 33</a></span> -de Grignan opposait, avec juste raison, l'énorme accroissement -de dépenses qu'occasionnerait au gouverneur -de la Provence un voyage à Paris, pour paraître convenablement -à la cour. Elle disait que, dans les circonstances -critiques où se trouvait le royaume et durant une -guerre aussi acharnée, M. de Grignan pourrait difficilement -obtenir un congé<a id="FNanchor_83" href="#Footnote_83" class="fnanchor"> [83]</a>; et que, s'il l'obtenait, il serait -blâmé d'abandonner les intérêts du roi et du pays pour -jouer le rôle de solliciteur à Paris et celui de courtisan -à Versailles et à Saint-Germain. En outre, à mesure -que l'on approchait le plus de l'époque où devait se -réunir l'assemblée des communautés, il était essentiel -pour madame de Grignan qu'elle restât en Provence, -afin de concilier par elle-même et par ses adhérents, en -faveur du parti des Grignan, les suffrages des membres -de cette assemblée. Ces raisons étaient excellentes; et -madame de Sévigné devait d'autant plus se rendre à -leur évidence, que sa fille lui promettait d'aller la rejoindre -après la tenue de l'assemblée et lorsque seraient -terminées des affaires qui en étaient la suite. -Madame de Sévigné aurait ressenti moins de répugnance -et de douloureux regrets à reconnaître la vérité -des motifs allégués par sa fille, si celle-ci avait montré -plus de sympathie pour ses maternelles faiblesses, et si -elle n'avait pas blessé son cœur par le pédantisme de -ses remontrances et par les bouffées de sa philosophie -raisonneuse<a id="FNanchor_84" href="#Footnote_84" class="fnanchor"> [84]</a>.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_34"> 34</a></span> -Par ses lettres madame de Grignan était parvenue à -faire partager à sa mère une partie de son aversion<a id="FNanchor_85" href="#Footnote_85" class="fnanchor"> [85]</a> -contre l'évêque de Marseille; et, pour le combattre, -madame de Sévigné se mit à l'œuvre avec toute l'activité -dont elle était redevable à sa nature vive et passionnée. -Sa fille, dont elle admirait, tout en la blâmant, la -fierté et la fermeté, la portait à ne négliger aucun -moyen pour la réussite d'une affaire où la dignité de son -gendre était si fortement engagée; et, plus que jamais, -elle mérita le titre que lui donnait le comte de Grignan, -qui l'appelait <i>son petit ministre</i><a id="FNanchor_86" href="#Footnote_86" class="fnanchor"> [86]</a>. Elle agit sur l'esprit du -monarque par madame de Montespan<a id="FNanchor_87" href="#Footnote_87" class="fnanchor"> [87]</a>, par Marsillac, la -Rochefoucauld<a id="FNanchor_88" href="#Footnote_88" class="fnanchor"> [88]</a>; et sur Colbert par Marin, premier président -d'Aix, dont la famille était alliée à celle de ce ministre. -Par madame de Coulanges elle aurait pu s'assurer -de Louvois; mais madame de Coulanges n'était pas -bien alors avec son cousin. Madame de Sévigné dut employer -l'archevêque de Reims et le père de Marin<a id="FNanchor_89" href="#Footnote_89" class="fnanchor"> [89]</a>, ainsi -que d'autres personnages qui entouraient ce ministre; -mais Louvois poussait toujours Louis XIV aux mesures -despotiques, et il ne cessait de l'occuper des moyens -propres à anéantir ce qui restait encore de franchises aux -villes et aux pays d'états. D'ailleurs il suffisait que Pomponne -se fût fortement déclaré en faveur de M. de Grignan -<span class="pagenum"><a id="Page_35"> 35</a></span> -contre l'évêque de Marseille<a id="FNanchor_90" href="#Footnote_90" class="fnanchor"> [90]</a> pour que Louvois -ne lui fût pas favorable: ce fut beaucoup que d'obtenir -qu'il ne lui serait pas contraire<a id="FNanchor_91" href="#Footnote_91" class="fnanchor"> [91]</a>. Malgré le grand nombre -de personnes qui s'intéressaient à madame de Sévigné -et à sa fille, tant à la cour qu'en Provence, il paraît -certain que Louis XIV aurait refusé de s'opposer à ce -que l'évêque de Marseille eût la liberté d'user comme il -le voulait de sa légitime influence sur l'assemblée des -communautés si un événement militaire n'avait pas -donné occasion au comte de Grignan de prouver combien -la noblesse de Provence lui était attachée, et n'avait -pas engagé le roi à adopter l'avis de ses ministres en -favorisant la nomination du parent du comte de Grignan. -Comme cet événement, trop négligé par nos historiens -et honorable pour M. de Grignan, a un intérêt historique, -nous allons le faire connaître à nos lecteurs.</p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_36"> 36</a></span></p> -<h2 class="normal"><a id="CHAPITRE_III"></a>CHAPITRE III.<br /> -<span class="medium">1673-1674.</span></h2> -</div> - -<p class="hanging indent"> -Détails sur la principauté d'Orange.—De ceux qui la possédèrent.—Le -comte d'Hona, dernier gouverneur.—Mazarin la fait saisir.—Il -fait démolir les fortifications de la ville d'Orange.—Cette principauté -est donnée à la comtesse d'Auvergne par Louis XIV, qui -ordonne au comte de Grignan de s'en emparer et d'assiéger la -citadelle d'Orange.—Bercoffer, gouverneur de cette citadelle, veut -se défendre.—Diverses allégations faites à madame de Sévigné, -qui craint les résultats de ce siége.—Grignan est suivi de toute la -noblesse.—Il attaque la citadelle d'Orange, qui se rend le 12 novembre.—Grignan -la fait démolir.—Joie de madame de Sévigné -en apprenant la prise de cette citadelle.—Ouverture de l'assemblée -des communautés de Provence.—Discours de l'intendant.—Réponse -de l'évêque de Marseille.—Don gratuit accordé.—Lutte -entre le comte de Grignan et l'évêque de Marseille.—Une lettre -de Colbert à l'évêque de Marseille l'oblige de céder.—Le marquis -de Buous est nommé procureur du pays-joint.—Les 5,000 livres -sont accordées par l'assemblée au comte de Grignan.—Opposition -de l'évêque de Marseille et de l'évêque de Toulon à ce -vote.—Colbert écrit encore à l'évêque de Marseille, et l'opposition -est levée.—Félicitations et réflexions de madame de Sévigné sur -ce double triomphe.—Ouverture des états de Bretagne.—Deux -membres arrêtés pour avoir fait de l'opposition; ils sont rendus.—On -abolit les édits oppresseurs, mais on double les impositions.—Le -marquis de Coëtquen reproche à d'Harouis ses richesses et -la ruine de la Provence.—La duchesse de Rohan, aïeule de Coëtquen, -le rappelle à Paris, et l'entrée des états lui est interdite.—Madame -de Sévigné approuve cet acte.—Le duc de Chaulnes repousse -les ennemis des côtes de Bretagne.</p> - -<p class="space">A quinze lieues de la mer et des côtes de Provence, -dans le département qui a reçu le nom poétique de Vaucluse, -s'étend, borné par le Rhône à l'ouest, le petit -<span class="pagenum"><a id="Page_37"> 37</a></span> -pays dont Orange est la capitale. Il n'a que cinq lieues -de long sur quatre de large. Le nombre de ses habitants, -au temps de Louis XIV, n'a jamais dû excéder douze -mille<a id="FNanchor_92" href="#Footnote_92" class="fnanchor"> [92]</a>, et la ville d'Orange, célèbre par plusieurs conciles, -en renfermait plus de la moitié. Placé entre le Languedoc -et le comtat Venaissin, la Provence et le Dauphiné, -par le grand nombre de monuments et de constructions -antiques que le temps a respectés, ce riant canton de la -France est comme un fragment de la classique Italie -transporté dans la Gaule. Riche par l'industrie de ses habitants, -par ses vignes, sa garance, son safran, qui revêt -ses plaines d'une teinte violette, il a, depuis les temps -les plus reculés, formé un État indépendant. Néanmoins -les rois de France le considéraient<a id="FNanchor_93" href="#Footnote_93" class="fnanchor"> [93]</a> comme un fief de la -Provence ou du Dauphiné, et, à titre de dauphins ou de -comtes de Provence, ils prétendaient en être les premiers -souverains; mais les princes d'Orange ne reconnaissaient -pas cette prétention<a id="FNanchor_94" href="#Footnote_94" class="fnanchor"> [94]</a>, et leurs droits étaient depuis longtemps -établis par des traités.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_38"> 38</a></span> -On comptait, depuis sept siècles, quatre dynasties des -princes d'Orange. La dernière était celle des princes de -Nassau, qui possédait cette principauté depuis cent cinquante -ans. A ce titre elle fut, en 1650, transmise par -héritage à Guillaume III<a id="FNanchor_95" href="#Footnote_95" class="fnanchor"> [95]</a>, qui, à l'époque dont nous -traitons, était le grand ennemi de Louis XIV, et commandait -les troupes de la majeure partie des puissances -coalisées contre lui. Peu après l'époque de la naissance -de Guillaume, sa mère, la princesse royale, fille de Charles -I<sup>er</sup>, qui espérait l'appui de la cour de France, où ses -deux frères Charles et Jacques II (le duc d'York) s'étaient -réfugiés, conclut un traité qui permettait à Louis XIV -de se mettre en possession de la principauté d'Orange -et qui stipulait que, dans le cas où le roi pour cette -prise de possession serait obligé d'employer la force, et -qu'il consentît ensuite à la rendre, il pourrait préalablement -faire raser les fortifications de la capitale. Mazarin, -en vertu de ce traité, fit résoudre dans le conseil -que l'on se saisirait de la ville d'Orange et de la citadelle. -Le maréchal Duplessis-Praslin fut chargé de cette -expédition. Il préleva sur les plus riches protestants de -Nîmes un impôt qui fut destiné à payer le comte d'Hona, -gouverneur d'Orange<a id="FNanchor_96" href="#Footnote_96" class="fnanchor"> [96]</a>.</p> - -<p>D'Hona, après une faible résistance, rendit la ville et -la citadelle au maréchal Duplessis-Praslin, qui, après -avoir fait transporter tous les canons et les munitions de -guerre dans la citadelle, y mit une garnison de cinq cents -<span class="pagenum"><a id="Page_39"> 39</a></span> -hommes. Duplessis alla ensuite rejoindre le cardinal -Mazarin à Saint-Jean-de-Luz. Un ingénieur fut envoyé -à Orange pour diriger le travail de la démolition des fortifications. -Cette destruction de leurs remparts et ce -changement de domination désolèrent les habitants et -en firent fuir un grand nombre<a id="FNanchor_97" href="#Footnote_97" class="fnanchor"> [97]</a>. «Ce fut là, dit le pasteur -de la maison de Guillaume III, le premier échec -que reçut la ville d'Orange; il fit perdre à cette ville -tout le lustre qu'elle avait sous le gouvernement du -comte d'Hona, seigneur libéral, civil et magnifique, qui, -tenant une cour aussi leste que celle des princes d'Orange -eux-mêmes, y attirait une foule d'étrangers de -toutes les nations, et la rendait un des plus agréables -séjours de la France<a id="FNanchor_98" href="#Footnote_98" class="fnanchor"> [98]</a>.»</p> - -<p>Après le décès de la princesse royale, la princesse -douairière, veuve de Frédéric-Henri de Nassau et grand'mère -de Guillaume III, eut la libre jouissance de l'administration -des biens de son petit-fils. La principauté -d'Orange rentra ainsi, en 1665, sous la domination hollandaise<a id="FNanchor_99" href="#Footnote_99" class="fnanchor"> [99]</a>. -On fit alors de grandes réjouissances dans -toute la principauté; les festins, les fêtes durèrent huit -jours. Les temples protestants furent rouverts, et la -foule vint entendre les prédications des ministres. Dans -la ville d'Orange les fenêtres furent toutes illuminées, et -<span class="pagenum"><a id="Page_40"> 40</a></span> -des lampions de couleur y figuraient partout le chiffre -du prince.</p> - -<p>Dans le mois de janvier 1673, Guillaume ayant fait -confisquer le marquisat de Berg-op-Zoom et d'autres -lieux qui appartenaient au comte d'Auvergne du chef de -sa femme, Louis XIV fit don de la principauté d'Orange -au comte d'Auvergne, et ordonna au comte de Grignan -de s'en emparer de vive force si celui qui y commandait -voulait résister<a id="FNanchor_100" href="#Footnote_100" class="fnanchor"> [100]</a>.</p> - -<p>Dire au comte de Grignan de se rendre maître de ce -pays d'Orange, c'était l'envoyer à la conquête du berceau -de son illustre maison et le ramener dans la patrie -de ses ancêtres; car il était historiquement prouvé que -le premier comte propriétaire d'Orange fut Giraud-Adhémar -IV, auquel l'empereur Frédéric I<sup>er</sup>, comme suzerain -de l'ancien royaume d'Arles, accorda l'investiture -des seigneuries de Monteil et de Grignan. C'est du nom -de Monteil-Adhémar que, par corruption, est venu celui -de la ville de Montélimar<a id="FNanchor_101" href="#Footnote_101" class="fnanchor"> [101]</a>.</p> - -<p>Le comte de Grignan se porta avec un grand zèle à -l'exécution de l'ordre qu'il avait reçu.</p> - -<p>Un Hollandais, nommé Berkoffer, était depuis sept -ans, pour Guillaume, gouverneur de la principauté d'Orange; -il refusa de se soumettre aux injonctions du comte -de Grignan, et, avec le petit nombre de soldats qu'il -avait à sa disposition, il se retira dans la citadelle, et parut -<span class="pagenum"><a id="Page_41"> 41</a></span> -déterminé à se défendre à outrance. Le bruit courait -que Berkoffer avait deux cents hommes avec lui, et l'on -savait qu'il ne manquait ni de canons ni de munitions<a id="FNanchor_102" href="#Footnote_102" class="fnanchor"> [102]</a>. -Grignan se vit donc dans la nécessité d'entreprendre un -siége; et cependant Louvois s'était refusé à lui envoyer -les troupes et l'artillerie nécessaires pour une telle entreprise. -Ce fut pour madame de Sévigné une cause -d'inquiétude et d'angoisses. Elle redoutait les dangers, -et s'affligeait de la dépense; et si son gendre ne réussissait -pas, elle voyait le triomphe de l'évêque de Marseille -assuré: toutes les négociations conduites avec tant de -labeur et d'adresse pour faire nommer le marquis de -Buous devaient échouer alors infailliblement. Les uns -épouvantaient madame de Sévigné en exagérant les difficultés -du siége; les autres la rassuraient et même la -raillaient sur le peu de fondement de ses craintes. De -Guilleragues,</p> - -<p class="quote">Esprit né pour la cour et maître en l'art de plaire<a id="FNanchor_103" href="#Footnote_103" class="fnanchor"> [103]</a>,</p> - -<p>ne tarissait pas sur ce sujet. Selon lui<a id="FNanchor_104" href="#Footnote_104" class="fnanchor"> [104]</a>, il ne fallait que -des pommes cuites pour venir à bout de ce siége. C'était -un duel entre Berkoffer et Grignan; donc il fallait couper -le cou à Grignan, parce qu'il enfreignait les ordonnances -contre les duels; et lui, Guilleragues, déjà demandait sa -charge. Mais le marquis de Gorze, grand sénéchal de Provence, -et de Vivonne prétendaient au contraire que le -<span class="pagenum"><a id="Page_42"> 42</a></span> -siége d'Orange serait long; qu'il était plus difficile qu'on -ne croyait; que la citadelle était entourée de bons fossés, -bien pourvue de canons, et avait des forces suffisantes -pour faire une vive défense; qu'enfin M. de Grignan, -avec sa petite troupe, avait tort d'entreprendre de forcer -le gouverneur. Le duc d'Enghien et la Rochefoucauld -assuraient qu'il ne réussirait pas<a id="FNanchor_105" href="#Footnote_105" class="fnanchor"> [105]</a>; que l'attaque d'une -place de guerre exigeait des connaissances militaires spéciales, -dont Grignan était dépourvu.</p> - -<p>Tandis qu'on tenait ces discours, le comte de Grignan, -quoiqu'il fût saisi de la fièvre<a id="FNanchor_106" href="#Footnote_106" class="fnanchor"> [106]</a>, ne se laissa pas -décourager. Le ministre ne lui donnait ni argent ni soldats. -Il fit prier cinq cents gentilshommes de la province -de venir le joindre. Pas un ne refusa de répondre à son -appel. Plusieurs nobles du comtat d'Avignon vinrent à -sa rencontre sans avoir été convoqués: marque de sympathie -qui le toucha vivement. Ainsi, à la tête d'environ -sept cents cavaliers et de deux mille soldats des galères, -qu'il avait commandés, Grignan se mit en marche le -31 octobre, et arriva le 2 novembre devant Orange avec -sa petite armée, munie de quelques canons.</p> - -<p>Il commença aussitôt le siége de la citadelle. On remplit -les fossés avec des fagots et des mannequins fournis -par la ville d'Orange, d'après les réquisitions faites aux -<span class="pagenum"><a id="Page_43"> 43</a></span> -magistrats<a id="FNanchor_107" href="#Footnote_107" class="fnanchor"> [107]</a>. Berkoffer voulut en vain s'opposer aux travaux -des assiégeants par quelques volées de canon. Deux -gentilshommes, le marquis de Briancour et M. de Roays, -se distinguèrent par leur bravoure.</p> - -<p>Le 12 novembre la tranchée fut ouverte, et le comte -de Grignan ordonna l'assaut. Le marquis de Barbantane<a id="FNanchor_108" href="#Footnote_108" class="fnanchor"> [108]</a>, -d'une valeur romanesque, selon madame de Sévigné, -et M. de Ramatuelle commandaient l'escadron -des nobles destinés à soutenir les soldats qui étaient sur la -tranchée. Après que le comte de Grignan eut fait tirer -deux décharges de canon, Berkoffer fit battre la chamade<a id="FNanchor_109" href="#Footnote_109" class="fnanchor"> [109]</a>, -et M. de Beaufin fut admis dans la place. Le -gouverneur promit de se rendre le 17, et l'on donna des -otages de part et d'autre. Berkoffer avait assez d'artillerie -pour faire acheter cher le triomphe aux assiégeants; -mais il eût fallu abîmer la ville, ruiner ses amis: il aima -mieux se rendre.</p> - -<p>Le 18 novembre (1673), la garnison sortit de la citadelle -sans aucune marque d'honneur; elle se composait -de trente et un hommes; tous eurent la liberté d'emporter -ce qui leur appartenait. Berkoffer se retira en -Hollande avec sa famille<a id="FNanchor_110" href="#Footnote_110" class="fnanchor"> [110]</a>.</p> - -<p>Le comte de Grignan fit démanteler la citadelle deux -jours après son entrée; il y trouva douze canons de -trente-six de balles de bronze, quarante petites pièces -de campagne, deux coulevrines et onze autres pièces de -<span class="pagenum"><a id="Page_44"> 44</a></span> -moyen calibre, sept cents mousquets, deux cents fusils, -des piques, des mousquetons, des obus, douze mille -livres de poudre: il y avait de quoi armer une garnison -de quatre mille hommes.</p> - -<p>Huit jours après la reddition de la citadelle d'Orange, -le comte de Grignan, conformément aux ordres qu'il -avait reçus du roi, fit travailler à la démolition entière -de la citadelle; mais ce travail ne put être terminé que -dans le mois de mai suivant (1674). Le puits, qui avait -83 toises de profondeur et 30 de circonférence, fut comblé.</p> - -<p>Le comte de Grignan s'était retiré aussitôt après avoir -vu commencer la démolition de la place, et avait laissé -la direction des travaux à Lausier<a id="FNanchor_111" href="#Footnote_111" class="fnanchor"> [111]</a>, son capitaine des -gardes, qui commandait aux quatre compagnies des soldats -de galères. Le comte de Grignan fut escorté à son -retour par toute la noblesse de Provence et du comtat -d'Avignon, qui l'avait volontairement suivi dans cette -petite campagne<a id="FNanchor_112" href="#Footnote_112" class="fnanchor"> [112]</a>. La joie de madame de Sévigné fut -grande quand elle en connut le glorieux résultat<a id="FNanchor_113" href="#Footnote_113" class="fnanchor"> [113]</a>. «J'embrasse -le vainqueur d'Orange» (dit-elle dans sa lettre à -sa fille)... «L'affaire d'Orange fait ici un bruit très-agréable -pour M. de Grignan. Cette grande quantité de noblesse -qui l'a suivi par le seul attachement pour lui, cette -grande dépense, cet heureux succès, car voilà tout; tout -cela fait honneur et donne de la joie à ses amis, qui ne -sont pas ici en petit nombre. Le roi dit à souper: «Orange -<span class="pagenum"><a id="Page_45"> 45</a></span> -est pris; Grignan avait sept cents gentilshommes avec -lui. On a tiraillé du dedans, et enfin on s'est rendu le -troisième jour. Je suis fort content de Grignan<a id="FNanchor_114" href="#Footnote_114" class="fnanchor"> [114]</a>.»</p> - -<p>Mais, comme l'observe madame de Sévigné, après -avoir gagné cette bataille d'Orange il fallait en commencer -une autre contre l'évêque de Marseille<a id="FNanchor_115" href="#Footnote_115" class="fnanchor"> [115]</a>; et, le -lendemain du jour où elle écrivait ces lignes (le 5 décembre -1673), l'assemblée des communautés de Provence, -siégeant à Lambesc, s'ouvrait «par authorité et -permission de monseigneur le comte de Grignan, lieutenant -général, commandant pour le roy au païs, et -par mandement de messieurs les procureurs dudit pays, -et par M. de Gerard, comte palatin, conseiller du roy -en ses conseils, commissaire député, par mondit seigneur -le comte de Grignan, pendant la maladie ou absence -du seigneur de Rouillé, comte de Melay<a id="FNanchor_116" href="#Footnote_116" class="fnanchor"> [116]</a>.»</p> - -<p>Mais de Rouillé, qui n'était ni malade ni absent, -ouvrit le lendemain les délibérations par un assez long -discours. Il demanda au nom du roi à l'assemblée de -voter le don gratuit de 500,000 francs, la même somme -qui avait été accordée l'année précédente. De Rouillé prétendait -seulement exciter des sujets fidèles à remplir leur -devoir envers leur souverain. «Si vous faites comparaison, -disait-il<a id="FNanchor_117" href="#Footnote_117" class="fnanchor"> [117]</a>, de ce temps-ci avec celui des troubles et -des désordres passés de cette province, vous reconnaîtrez -<span class="pagenum"><a id="Page_46"> 46</a></span> -encore mieux que votre bonheur est un pur effet de -sa bonté et de sa clémence, que votre obéissance et vos -soumissions vous ont acquis et vous peuvent conserver.»</p> - -<p>Cependant de Rouillé, quittant le ton d'un servile courtisan, -fait valoir, pour déterminer le vote de l'assemblée, -des considérations plus justes et des motifs plus réels. La -déclaration de guerre de l'Espagne a forcé le roi d'augmenter -le nombre de ses armées de terre et de mer, et -il est nécessaire pour le bien du royaume «qu'il fasse -trembler toute la maison d'Autriche, et qu'il abaisse à -ses pieds l'orgueil de cette république, autant ingrate -qu'elle est insolente et ambitieuse, qui doit à la couronne -de France toute son élévation et sa grandeur.»</p> - -<p>«Vous n'ignorez pas, ajouta-t-il<a id="FNanchor_118" href="#Footnote_118" class="fnanchor"> [118]</a>, messieurs, que Sa -Majesté emploie tous les ans dans cette province des -sommes de deniers beaucoup plus grandes qu'elle n'en -retire; et que les dépenses qu'elle fait à Toulon et à Marseille -pour la construction, l'armement et l'entretien des -vaisseaux et des galères, ou pour réparer ou fortifier ces -places et les autres ports et lieux maritimes de ce pays, -y apportent l'abondance par l'augmentation du commerce, -par le débit et la consommation de vos denrées -et par l'emploi de toutes sortes d'artisans et d'ouvriers, -qui y trouvent leur subsistance et le soutien de leurs familles.»</p> - -<p>L'évêque de Marseille répondit à l'intendant avec -plus de dignité et de convenance. «Comme vous connaissez, -monsieur, lui dit-il, notre zèle, vous connaissez -aussi notre faiblesse; et il faut, s'il vous plaît, que, comme -vous êtes l'homme du roi par votre caractère, vous -<span class="pagenum"><a id="Page_47"> 47</a></span> -soyez l'homme du peuple par votre générosité. Le roi -aura sujet dans cette occasion d'être satisfait de la province, -parce qu'elle ira pour son service aussi loin que -ses forces le lui permettront; et il le sera en effet si -vous employez, pour lui représenter les misères et les -besoins du peuple, cette vivacité et cette lumière d'esprit -que vous venez de montrer pour représenter à l'assemblée -les besoins et les intentions de Sa Majesté.»</p> - -<p>L'assesseur Decorio réitéra les condoléances sur la -misère générale: «Les riches même n'ont point d'argent -pour secourir les pauvres et les faire travailler. -Les sources du commerce se trouvent taries par les -nouveaux édits créant de nouveaux impôts, soit pour -les contrôles des exploits, pour l'enregistrement des oppositions, -pour conserver les hypothèques, les greffes -des arbitrages, et le papier timbré.» Cependant il conclut -à l'adoption de la proposition sur le don gratuit. -Les 500,000 francs furent accordés, et l'assemblée décida -en outre qu'il serait, comme précédemment, envoyé -un courrier à la cour<a id="FNanchor_119" href="#Footnote_119" class="fnanchor"> [119]</a>, dont la dépense fut réglée, -selon le taux habituel, à la somme de mille livres.</p> - -<p>Après ce vote, qui, quoique le plus important, préoccupait -peu, vu qu'il était considéré comme un vote -obligatoire et de pure forme, vint l'affaire qui tenait tous -les esprits suspendus, parce que tous les membres de -l'assemblée avaient pris parti soit pour l'évêque de Marseille, -soit pour le comte de Grignan, dont les intérêts -étaient en présence. Il était impossible que le vote qui -allait intervenir pût donner satisfaction à l'un des deux -rivaux sans offenser l'autre.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_48"> 48</a></span> -L'assesseur déclara à l'assemblée que M. le marquis -de Maillanne de la Rousselle, procureur du pays-joint -pour la noblesse, étant décédé, il fallait pourvoir à -son remplacement<a id="FNanchor_120" href="#Footnote_120" class="fnanchor"> [120]</a>; et l'intendant dit que M. de Pomponne -lui avait écrit que le roi trouvait bon que l'assemblée -fît cette nomination avec une pleine et entière -liberté.</p> - -<p>Nonobstant cette déclaration, le plus grand nombre des -membres de l'assemblée ne doutaient pas que le roi n'eût -fait un choix, et ils désiraient le connaître pour s'y conformer. -Le succès du siége d'Orange avait déterminé le -roi à donner toute satisfaction au comte de Grignan; et ce -fut l'évêque de Marseille, dont l'influence sur l'assemblée -était connue, qu'il chargea d'empêcher toute division -et de réunir tous les votes sur le marquis de Buous. -On ignorait cela, et l'attention fut grande lorsque l'évêque -de Marseille, procureur-joint du clergé, prit la -parole.</p> - -<p>Il exposa que, se trouvant à la cour pour d'autres affaires -lorsque cette place de procureur-joint pour la noblesse -était venue à vaquer, il avait représenté que l'assemblée -des communautés était de droit en possession de -faire cette élection, au défaut des états; et que, pour ne -pas perdre une occasion de servir la province, il avait -prié instamment Sa Majesté de la maintenir dans ce droit -et dans cet usage: ce qu'il a plu à Sa Majesté de lui accorder. -Mais le roi avait appris depuis qu'il se présentait -plusieurs concurrents et qu'il y avait contestation à cet -égard. L'évêque déclara qu'il avait reçu à ce sujet une -lettre de monseigneur Colbert, datée de Saint-Germain -<span class="pagenum"><a id="Page_49"> 49</a></span> -le 1<sup>er</sup> janvier, et il demanda qu'il en fût donné lecture. -Cette lettre contenait ce qui suit:</p> - -<p class="oline">«Monsieur,</p> - -<p>«Le roi vous écrit, et à M. le comte de Grignan, -sur le sujet de la mésintelligence qui est à présent -entre vos maisons; et comme l'intention de Sa Majesté -est que M. de Rouillé vous accommode ensemble, je -crois vous devoir dire que vous ne pouvez rien faire qui -soit plus conforme à son inclination pour son service -que d'y apporter toutes les facilités qui dépendent de -vous, étant bien difficile qu'il puisse avoir le succès -qu'il est nécessaire pour sa satisfaction quand deux -maisons aussi considérables que la vôtre et celle dudit -sieur comte de Grignan seront dans une si grande division -que celle où elles sont de présent; et je puis vous -assurer que ceux qui apporteront plus de facilité à cet -accommodement s'attireront plus de considération et -de mérite dans l'esprit de Sa Majesté<a id="FNanchor_121" href="#Footnote_121" class="fnanchor"> [121]</a>.»</p> - -<p>L'évêque de Marseille, après la lecture de cette lettre, -déclara que M. de la Barben, qu'il avait proposé -pour occuper cette charge de procureur-joint, avait le -plus de droits pour l'obtenir; mais de la Barben avait -un emploi qui l'appelait près de S. M., et il suppliait -l'assemblée de ne pas penser à lui. «Et comme, par -la lettre de monseigneur Colbert, dont on vient de -donner lecture, il lui est donné avis, à lui évêque de -Marseille, que le roi désire qu'il vive en bonne intelligence -avec M. le comte de Grignan, et que ceux qui -feront le plus d'avances en cette affaire seront ceux -<span class="pagenum"><a id="Page_50"> 50</a></span> -qui s'attireront plus de mérite dans l'esprit de S. M., -n'ayant point de plus forte passion que celle de lui -obéir et de donner à la province une marque de sa -soumission aux ordres du roi, quoiqu'il y ait dans les -pays beaucoup de sujets capables de remplir cet emploi, -néanmoins il nomme M. le marquis de Buous<a id="FNanchor_122" href="#Footnote_122" class="fnanchor"> [122]</a> -en ladite charge de procureur du pays-joint pour la noblesse, -et prie tous ses amis (c'est-à-dire qu'il prie -tous les assistants sans en excepter aucun, car il les -croit tous ses amis) de donner leur suffrage à M. le marquis -de Buous, d'autant plus que c'est une personne -de beaucoup de qualité et de mérite.</p> - -<p>«Et tout de suite, continuant d'appeler les voix, l'assemblée -a unanimement élu et nommé, <i>sous le bon -plaisir des prochains états et jusqu'à la tenue d'iceux</i>, -le sieur marquis de Buous (Pontevès) en ladite -charge de procureur du pays-joint pour la noblesse, au -lieu et place dudit sieur le marquis de Maillanne et de la -Rousselle.»</p> - -<p>Ainsi se termina cette grande affaire, grande seulement -pour M. de Grignan et pour madame de Sévigné. -L'on voit que l'évêque de Marseille, en cédant à M. de -Grignan le champ de bataille, eut encore l'habileté de -paraître en triomphateur; car tout se fit par lui, tout -parut combiné pour lui procurer l'occasion de donner -une nouvelle preuve de son dévouement au roi et de -son influence singulière sur le pays de Provence.</p> - -<p>Dans le cours des autres délibérations qui suivirent, -l'évêque de Marseille eut bien soin de montrer qu'il avait -voulu par ce vote aider aux désirs du roi, mais non -<span class="pagenum"><a id="Page_51"> 51</a></span> -complaire au gouverneur. Il s'empressa de combattre -la proposition qui fut faite d'accorder au comte de Grignan -les cinq mille francs de gratification pour l'entretènement -de ses gardes qui lui avait été concédée dans les -années précédentes. L'évêque de Marseille, en son nom -et en celui de l'évêque de Toulon, dit que c'était par la -pensée qu'ils avaient eue jusqu'ici que cette proposition -n'aurait pas de suite pour l'avenir que, dans les dernières -assemblées, ils ne s'étaient point opposés tous deux à ce -qui avait été arrêté et délibéré sur ce sujet; mais comme -ils s'apercevaient que cette gratification devenait insensiblement -une charge et un tribut ordinaire de la province, -il ne leur était pas permis de balancer entre des -considérations particulières et l'intérêt public; et non-seulement -ils s'opposaient à l'adoption de la proposition, -mais ils espéraient que le seigneur intendant userait -de son autorité pour qu'elle ne fût pas même mise -en délibération<a id="FNanchor_123" href="#Footnote_123" class="fnanchor"> [123]</a>.</p> - -<p>L'évêque de Marseille motiva cette opinion sur des raisons -déjà alléguées dans les années précédentes. Il savait -bien qu'elle ne pourrait prévaloir, et il n'était pas même -dans ses intentions de faire changer l'avis de l'assemblée -sur ce point. On ne l'ignorait pas; mais néanmoins, -après que les cinq mille francs eurent été accordés par -une délibération spéciale, l'évêque de Marseille et celui -de Toulon protestèrent, et déclarèrent qu'ils étaient dans -l'intention de se pourvoir vers S. M., «requérant messieurs -les procureurs du pays de ne faire aucun mandement -avant que ladite opposition soit décidée.»</p> - -<p>Cette opposition elle-même était de pure forme, car -<span class="pagenum"><a id="Page_52"> 52</a></span> -l'évêque de Marseille ne doutait pas que cette délibération -de l'assemblée serait approuvée par le roi comme -elle l'avait été dans les années précédentes, et que l'assemblée -allait en anéantir l'effet à l'instant même. On -arrêta donc que, nonobstant ladite opposition, lesdits -procureurs généraux du pays expédieraient leurs mandements<a id="FNanchor_124" href="#Footnote_124" class="fnanchor"> [124]</a>. -L'intention des évêques était de conserver le -droit et de maintenir le principe.</p> - -<p>Cependant l'évêque de Marseille ne voulut pas que son -opposition fût une vaine menace, ni rester entièrement -étranger à la concession faite au comte de Grignan; il -écrivit en cour, et dans la dernière séance de l'assemblée -(le 12 janvier 1674) il dit «qu'il venait de recevoir -une lettre du <i>petit cachet</i> du roi, datée du 1<sup>er</sup> de ce -mois, par laquelle S. M., pour cette fois seulement -et sans conséquence pour l'avenir, désire que l'assemblée -accorde à monseigneur le comte de Grignan la -somme de cinq mille livres pour la compagnie des gardes, -en considération des dépenses qu'il vient de faire -à Orange; et S. M. invite l'évêque de Marseille à concourir -à cette décision avec ses amis.»—«Et par ainsi -l'évêque de Marseille et le seigneur évêque de Toulon -ont dit que, pour obéir à la volonté du roi, ils se départent -de l'opposition qu'ils ont formée sur la délibération -prise pour lesdits cinq mille livres aux termes de ladite -lettre de Sa Majesté, pour cette fois seulement et sans -conséquence pour l'avenir<a id="FNanchor_125" href="#Footnote_125" class="fnanchor"> [125]</a>.»</p> - -<p>Telle fut la fin de cette lutte, et le dernier acte d'autorité -de Forbin-Janson en Provence. Il ne tarda pas -<span class="pagenum"><a id="Page_53"> 53</a></span> -à être appelé à de plus hautes destinées<a id="FNanchor_126" href="#Footnote_126" class="fnanchor"> [126]</a>. Trois mois -après la fin des délibérations de cette assemblée, Louis XIV -écrivait à Sobieski, grand maréchal de Pologne, qu'il -envoyait pour ambassadeur à la diète polonaise l'évêque -de Marseille, dont la capacité lui était connue et dans -lequel il désirait qu'il eût autant de confiance qu'en lui-même<a id="FNanchor_127" href="#Footnote_127" class="fnanchor"> [127]</a>.</p> - -<p>Forbin-Janson fut encore pendant cinq ou six ans -évêque de Marseille; mais, engagé dans des négociations -diplomatiques, il n'eut pas plus de part à l'administration -de son diocèse qu'à celle de la Provence. -Aucun des évêques qui furent successivement nommés -procureurs-joints par l'assemblée<a id="FNanchor_128" href="#Footnote_128" class="fnanchor"> [128]</a> des communautés de -la Provence n'eut ses talents, l'énergie de son caractère, -son crédit à la cour et sa popularité. Le comte de -Grignan fut donc pour toujours débarrassé d'un rival -dangereux<a id="FNanchor_129" href="#Footnote_129" class="fnanchor"> [129]</a>. Janson plaisait beaucoup à madame de -Sévigné; elle s'était flattée, par l'amitié qu'il lui témoignait, -de le réconcilier avec sa fille. Elle écrivait à -celle-ci que, si elle venait à Paris, on la verrait avec -l'évêque dans le même carrosse<a id="FNanchor_130" href="#Footnote_130" class="fnanchor"> [130]</a>, sollicitant ensemble -<span class="pagenum"><a id="Page_54"> 54</a></span> -pour le comte de Grignan. Mais cet espoir ne se réalisa -jamais, et madame de Grignan ne put pardonner -à Janson sa longue opposition, quoique depuis il eût -cessé de se montrer hostile envers elle ou aucun des -siens<a id="FNanchor_131" href="#Footnote_131" class="fnanchor"> [131]</a>.</p> - -<p>Madame de Sévigné avait eu lieu de craindre qu'il ne -parvînt à faire échouer toutes ses démarches en faveur -de la nomination du marquis de Buous, et elle avait -cherché à persuader à sa fille que la réussite était de -peu d'importance pour le lieutenant général gouverneur -de Provence; mais quand elle se vit assurée du succès, -elle changea de ton. En répondant à madame de Grignan, -elle dit<a id="FNanchor_132" href="#Footnote_132" class="fnanchor"> [132]</a>: «Présentement que par votre lettre, qui -me donne la vie, nous voyons votre triomphe quasi assuré, -je vous avoue franchement que par tout pays c'est -la plus jolie chose du monde que d'avoir emporté cette -affaire malgré toutes les précautions, les prévenances, -les prières, les menaces, les sollicitations, les vanteries -de vos ennemis: en vérité cela est délicieux, et fait -voir, autant que le siége d'Orange, la considération de -M. de Grignan dans toute la Provence.»</p> - -<p>On apprend par les lettres de l'archevêque d'Arles à -madame de Sévigné que madame de Grignan avait tous -les honneurs de la réussite, parce que, contre les conseils -de sa mère, contre ceux de l'archevêque, elle -avait toujours insisté pour qu'on ne fît aucune concession -à l'évêque de Marseille. «L'archevêque, dit madame -de Sévigné, est contraint d'avouer que, par l'événement, -<span class="pagenum"><a id="Page_55"> 55</a></span> -votre vigueur a mieux valu que sa prudence, -et qu'enfin, à votre exemple, il s'est tout à fait jeté dans -la bravoure. Cela m'a réjouie<a id="FNanchor_133" href="#Footnote_133" class="fnanchor"> [133]</a>.»</p> - -<p>Tout cela s'écrivait avant la nomination du marquis de -Buous et lorsqu'on la considérait comme très-probable; -mais lorsque madame de Sévigné apprend que cette -nomination est faite et a été l'objet d'un vote unanime, -sa joie éclate dans toute sa force; et nous sommes -instruits depuis combien de temps elle était, ainsi que -les Grignan, préoccupée de cette affaire. «Ah! quel -succès! quel succès! L'eussions-nous cru à Grignan? -Hélas! nous faisions nos délices d'une suspension. Le -moyen de croire qu'on renverse en un mois des mesures -prises depuis un an? Et quelles mesures, puisqu'on -offrait de l'argent!» Et très-judicieusement elle -ajoute cette réflexion, faite par elle et par ses nombreux -amis, qui, dès huit heures du matin, étaient venus -la complimenter sur cette nouvelle: «Nous trouvons -l'évêque toujours habile et toujours prenant les -bons partis; il voit que vous êtes les plus forts et que -vous nommez M. de Buous, et il nomme M. de Buous. -Nous voulons tous que présentement vous changiez de -style et que vous soyez aussi modestes dans la victoire -que fiers dans le combat<a id="FNanchor_134" href="#Footnote_134" class="fnanchor"> [134]</a>.» Ce conseil dut être suivi forcément, -car des ordres du roi parvinrent à M. de Grignan -de s'abstenir de tout sentiment hostile envers l'évêque. -«Voilà donc votre paix toute faite, dit madame -de Sévigné. Je vous conseille de vous comporter selon le -<span class="pagenum"><a id="Page_56"> 56</a></span> -temps; et puisque le roi veut que vous soyez bien avec -l'évêque, il faut lui obéir<a id="FNanchor_135" href="#Footnote_135" class="fnanchor"> [135]</a>.»</p> - -<p>Les états de Bretagne se tinrent cette année à Vitré et -en même temps que l'assemblée de Provence. Madame -de Sévigné n'y alla point; mais elle fut parfaitement -instruite de ce qui s'y passa. Ils s'ouvrirent le 24 novembre -1673, sous la présidence de la Trémouille, prince -de Tarente, baron de Vitré, et ils ne furent terminés -que le 10 janvier 1674. Ils ne présentèrent pas un spectacle -aussi animé ni aussi brillant que ceux où, deux ans -avant, madame de Sévigné s'était trouvée; mais ils ont -un intérêt historique plus puissant. On y vit les derniers -efforts des Bretons pour conserver contre les envahisseurs -du despotisme les restes de leurs libertés, en vain -garanties par les traités du double mariage d'Anne -de Bretagne. Les demandes de subsides ayant donné -lieu à des objections de la part de deux députés, Saint-Aubin -Treslon et Des Clos de Sauvage (les noms de ces -hommes courageux méritent d'être rappelés), le duc de -Chaulnes, gouverneur, les fit arrêter. Six députés de -chaque ordre furent envoyés au gouverneur pour réclamer -contre cette mesure. Le duc de Chaulnes répondit -qu'il n'avait fait qu'exécuter les ordres du roi. Mais la -princesse de Tarente intervint auprès de M. de Chaulnes, -et les deux députés furent relâchés. Douze députés furent -délégués par les états pour aller rendre grâces à la -<span class="pagenum"><a id="Page_57"> 57</a></span> -princesse<a id="FNanchor_136" href="#Footnote_136" class="fnanchor"> [136]</a>. C'est cette affaire qui fait dire à madame -de Sévigné: «il y a eu bien du bruit à nos états de -Bretagne; vous êtes plus sages que nous<a id="FNanchor_137" href="#Footnote_137" class="fnanchor"> [137]</a>.» Ce qui se -passa à ces états de plus important fut la révocation de -plusieurs édits oppresseurs, depuis longtemps demandée, -et en même temps le vote obligé d'une somme égale au -don gratuit, pour suppléer au déficit que l'abolition des -impôts perçus en vertu des édits occasionnait dans le -trésor de l'État. Ainsi plaisir et chagrin en même -temps; c'était une grâce vendue, et non accordée. La -chose est très-exactement racontée dans une lettre de -madame de Sévigné à sa fille.</p> - -<p>«A propos, on a révoqué tous les édits qui nous -étranglaient dans notre province. Le jour que M. de -Chaulnes l'annonça, ce fut un cri de <i>vive le roi!</i> qui fit -pleurer tous les états; chacun s'embrassait, on était -hors de soi; on ordonna un <i>Te Deum</i>, des feux de joie -et des remercîments publics à M. de Chaulnes. Mais -savez-vous ce que nous donnons au roi? 2,600,000 livres, -et autant de don gratuit. C'est justement 5,200,000 -livres. Que dites-vous de cette petite somme? Vous -pouvez juger par là la grâce qu'on nous a faite de nous -ôter les édits<a id="FNanchor_138" href="#Footnote_138" class="fnanchor"> [138]</a>.» Madame de Sévigné ne fait pas mention -des gratifications, parce qu'elles étaient les mêmes -<span class="pagenum"><a id="Page_58"> 58</a></span> -tous les ans: 100,000 fr. au duc de Chaulnes, 20,000 fr. -pour ses gardes, 20,000 fr. au marquis de Lavardin, et -ainsi de suite aux ministres de Pomponne, à Louvois, -à Colbert, à Seignelay, son fils, et à leurs commis. Le -marquis de Lavardin, comme lieutenant général, eut -50,000 livres; mais il refusa de toucher la somme de -10,000 fr. qui lui était accordée pour l'ouverture des -états, donnant en cela l'exemple d'un noble désintéressement -qui ne fut pas imité par le prince de Tarente, -lequel reçut 32,000 fr. pour sa présidence, et 15,000 fr. -pour sa femme. Cette province était accablée; un -jeune membre de l'assemblée des états, qui sans doute -n'était que l'organe de beaucoup d'autres, le marquis -de Coëtquen, en fit aigrement la remarque à d'Haroüis, -le trésorier de la province. Pour ce fait, Coëtquen fut -rappelé à Paris par sa grand'mère la duchesse de Rohan, -et le duc de Chaulnes lui défendit de paraître aux -états. Madame de Sévigné applaudit à cette mesure despotique, -parce que d'Haroüis était son ami et son allié<a id="FNanchor_139" href="#Footnote_139" class="fnanchor"> [139]</a>. -Cependant il est facile de s'apercevoir, par plusieurs -passages de ses lettres pleines d'une ironie amère, -qu'on a prise pour de l'indifférence et de l'insensibilité, -qu'elle ressentait vivement la dureté du gouverneur -son ami, envers la Bretagne. Le duc de Chaulnes pouvait -tout se permettre; il s'était concilié la faveur du monarque -par sa capacité, sa fermeté, sa vigilance. Peu -après la tenue des états, il repoussa, avec les seules -forces de la province, les ennemis qui avaient voulu faire -<span class="pagenum"><a id="Page_59"> 59</a></span> -une descente sur les côtes, et les força à s'éloigner de -Belle-Isle, qu'ils voulaient assiéger<a id="FNanchor_140" href="#Footnote_140" class="fnanchor"> [140]</a>.</p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_60"> 60</a></span></p> -<h2 class="normal">CHAPITRE IV.<br /> -<span class="medium">1673-1674.</span></h2> -</div> - -<p class="hanging indent">Madame de Sévigné retrouve son cousin Bussy à Paris.—Lettre de -Bussy à madame de Sévigné.—Leur amitié s'était refroidie.—Bussy -veut se réconcilier avec madame de la Baume.—Il avait un -procès au conseil, qu'il gagna.—Il va voir madame de la Morésan.—Exemple -de Martel, mis à la Bastille pour défaut de soumission.—Détails -sur l'origine de la liaison de madame de Sévigné avec la -marquise de Martel.—Effrayé par l'exemple de Martel, Bussy demande -une nouvelle prolongation de séjour.—Il écrit au duc de -Montausier, à madame de Thianges, pour qu'elle le réconcilie -avec la Rochefoucauld.—Elle échoue dans cette négociation.—La -duchesse de Longueville intercède pour Bussy auprès de Condé.—La -colère de Condé contre Bussy subsiste.—Bussy écrit à madame -de Sévigné une lettre pour être montrée à madame Scarron.—Madame -de Sévigné va à Saint-Germain en Laye, et couche -chez M. de la Rochefoucauld.—Billet de madame de Sévigné à -Bussy, qui lui transmet la réponse faite par madame Scarron.—Bussy -fait demander au roi une nouvelle prolongation de séjour.—Le -refus en était connu de madame de Sévigné avant d'avoir -été notifié à Bussy.—Bussy fait ses adieux à tout le monde, et -reste à Paris caché.—Il va voir secrètement madame de Sévigné -et madame de Grignan.—Il est visité par le duc de Saint-Aignan.—Deux -entretiens du roi et du duc de Saint-Aignan.—Le -roi permet à Bussy de rester encore trois semaines.—Il part, -et retourne en Bourgogne.—Le roi en Franche-Comté fait venir -la reine à Dijon.—Bussy écrit à <span class="smallc">Mademoiselle</span> pour offrir son -château à la reine et à elle.—A chaque victoire, Bussy adresse une -lettre au roi.—La guerre de Franche-Comté s'achève, et Bussy -n'obtient rien.</p> - -<p class="space">Lorsque, à la fin du mois d'août 1673, madame de -Sévigné, alors au château de Grignan, écrivait à Bussy: -«Je me console de ne point vous voir à Bourbilly, -<span class="pagenum"><a id="Page_61"> 61</a></span> -puisque je vous verrai à Paris<a id="FNanchor_141" href="#Footnote_141" class="fnanchor"> [141]</a>,» elle croyait déjà son -cousin dans la capitale. Il n'y arriva que le 16 septembre, -et ce ne fut que lorsqu'il se trouvait menacé -de ne pouvoir plus y rester qu'il répondit à cette lettre.</p> - -<p>Voici cette réponse, un peu énigmatique:</p> - -<p class="dater">«Paris, ce 10 octobre 1673.</p> - -<p>«Je viens de demander au roi plus de temps qu'il ne -m'avait accordé pour faire ici mes affaires. Je crois -qu'il m'en accordera. Je suis d'accord avec vous, madame, -que la fortune est bien folle; et j'ai pris mon parti -sur ce que sa persécution durera toute ma vie. Les grands -chagrins même ne sont pas sus; et, comme je vous ai -déjà mandé, ma raison m'a rendu fort tranquille. Faites -comme moi, madame. Il vous est bien plus aisé, car le -secret de vos peines est fort au-dessous du mien<a id="FNanchor_142" href="#Footnote_142" class="fnanchor"> [142]</a>.»</p> - -<p>On s'aperçoit facilement, d'après le ton et le ralentissement -de leur correspondance, que l'amitié qui existait -autrefois entre Bussy et sa cousine n'était plus la -même. La susceptibilité orgueilleuse, le caractère vindicatif -et l'immoralité de Bussy avaient considérablement -refroidi cette chaleur de cœur que madame de -Sévigné avait éprouvée pour son cousin. Les années -seules l'auraient guérie d'une inclination qui, dans -son jeune âge, n'avait pas été sans péril. Intimement -liée avec tous ceux auxquels Bussy avait déplu et -<span class="pagenum"><a id="Page_62"> 62</a></span> -qui, ainsi qu'elle, brillaient à la cour et dans les hautes -sphères de la société, madame de Sévigné devait souvent -entendre des railleries sur ce courtisan émérite et -disgracié, vivant solitairement en province, et qui dans -ses manières, ses discours, ses écrits voulait toujours -paraître le type parfait du gentilhomme, du guerrier, -du bel esprit et de l'honnête homme, c'est-à-dire de -l'homme à bonnes fortunes. Madame de Sévigné avait -trop d'usage et de discernement pour ne pas s'apercevoir -des ridicules de Bussy; et dans plusieurs passages -des lettres à sa fille elle y fait allusion, mais -avec finesse et avec ménagement. Elle n'avait plus autant -d'admiration pour le talent épistolaire si vanté de -Bussy; il en montrait moins qu'autrefois dans les lettres -qu'elle recevait de lui, et par cette raison peut-être, -sans le vouloir, elle en mettait moins aussi dans les réponses -qu'elle lui adressait. Elle lui avait dit jadis: -«Vous êtes le fagot de mon esprit.» Le fagot manquait, -et le feu qu'il devait allumer ne pouvait se produire. Cependant -l'étroite parenté qui les unissait, les souvenirs de -jeunesse qui leur étaient communs, l'habitude d'une longue -liaison, surtout l'intérêt du nom que tous deux portaient, -dont tous deux étaient fiers et dont ni l'un ni -l'autre certainement ne ternissait l'éclat, formaient entre -eux un attachement indissoluble et entretenaient une -intimité d'autant plus égale qu'ils ne s'aimaient plus -assez pour se quereller.</p> - -<p>La seule lettre que madame de Sévigné reçut de -Bussy pendant son voyage fut celle que nous venons -de transcrire; mais elle eut de ses nouvelles par d'autres -personnes, car de Bourbilly elle écrit à sa fille: -«Bussy est toujours à Paris, faisant tous les jours des -<span class="pagenum"><a id="Page_63"> 63</a></span> -réconciliations; il a commencé par madame de la Baume. -Ce brouillon de temps, qui change tout, changera peut-être -sa fortune<a id="FNanchor_143" href="#Footnote_143" class="fnanchor"> [143]</a>.»</p> - -<p>Madame de Sévigné était mal informée; cette réconciliation -qu'elle redoutait n'eut pas lieu. On en avait -parlé dans le monde. Bussy voulait se faire la réputation -d'un homme à qui on devait pardonner toutes ses fautes, -parce que lui, disait-il, n'éprouvait aucun ressentiment -contre ceux qui avaient eu des torts envers lui; et il entrait -dans ses desseins de ne point accréditer ni démentir -le bruit de sa réconciliation avec madame de la Baume. -Dès son arrivée à Paris, il s'empressa d'aller rendre visite -à madame de Thianges, «sa parente et sa bonne -amie.»—«Elle me demanda, dit-il, s'il était vrai que -je fusse raccommodé avec madame de la Baume. Je lui -dis qu'elle m'avait fait faire des honnêtetés, auxquelles -j'avais répondu de même, et que j'étais résolu non-seulement -de recevoir les amitiés que me pourraient faire -ceux qui m'avaient fait du mal, mais encore de leur faire -des avances<a id="FNanchor_144" href="#Footnote_144" class="fnanchor"> [144]</a>.»</p> - -<p>Le principal motif du séjour de Bussy à Paris était -une contestation qu'il avait au conseil pour une somme -de 60,000 fr. qu'on lui disputait. Il gagna son procès<a id="FNanchor_145" href="#Footnote_145" class="fnanchor"> [145]</a>.</p> - -<p>Il est bien vrai qu'il fit des tentatives de réconciliation; -mais il ne réussit dans aucune, comme le sut bientôt -madame de Sévigné, dont les secours ne lui faillirent -<span class="pagenum"><a id="Page_64"> 64</a></span> -point en cette circonstance. Quand Bussy écrivait à sa -cousine, l'époque de la permission qu'il avait obtenue -pour rester dans la capitale était expirée depuis deux -jours, et il avait demandé à M. de Pomponne une prolongation -de séjour, qui lui fut accordée<a id="FNanchor_146" href="#Footnote_146" class="fnanchor"> [146]</a>.</p> - -<p>Depuis un mois qu'il était à Paris, il avait employé -son temps aux projets de son ambition plus encore qu'au -profit de ses affaires. Il n'ignorait pas que le roi, bien -disposé pour lui par le duc de Saint-Aignan, consentirait -volontiers à faire cesser son exil s'il pouvait se réconcilier -avec Condé et empêcher Louvois de lui être -contraire. Ce fut de ce côté qu'il dirigea d'abord ses -efforts. Lorsque la marquise de la Baume eut la perfidie -de laisser publier le manuscrit des <i>Amours des Gaules</i> -qu'il lui avait confié, il rompit entièrement avec elle, et -il ne parlait de ses attraits et de sa personne qu'avec ce -dédain et ce dénigrement qu'aucune femme ne peut -pardonner<a id="FNanchor_147" href="#Footnote_147" class="fnanchor"> [147]</a>. Depuis il ne chercha point à renouer une -liaison avec une femme qu'il n'aimait pas et qu'il ne -pouvait estimer; mais, comme toujours, il s'efforça de -profiter de ses amitiés de femmes pour se réconcilier avec -ceux qui lui étaient contraires. Il raconte dans ses -Mémoires qu'il était depuis trois ans assez bien vu de -madame de la Morésan, qui, par ses attraits, son esprit -<span class="pagenum"><a id="Page_65"> 65</a></span> -caustique et son caractère décidé et tranchant, par son -alliance avec son beau-frère Dufresnoy, le principal -commis de Louvois, était recherchée et redoutée<a id="FNanchor_148" href="#Footnote_148" class="fnanchor"> [148]</a>. Le -jour où Bussy l'alla voir<a id="FNanchor_149" href="#Footnote_149" class="fnanchor"> [149]</a>, il y trouva Dufresnoy. -«La conversation, dit-il, avec madame de la Morésan -et moi se passa à nous renouveler des assurances d'amitié. -Comme j'y fus jusqu'à l'entrée de la nuit, il y -vint beaucoup de gens, et entre autres mesdames de la -Baume et Louvois; j'en sortis bientôt après, ne pouvant -soutenir la présence de gens que j'aimais si peu<a id="FNanchor_150" href="#Footnote_150" class="fnanchor"> [150]</a>.» -Lorsque Bussy écrivait à Paris ce fragment de ses -<i>Mémoires</i>, madame de Sévigné s'y trouvait aussi; elle -dut donc être dissuadée par lui de l'opinion qu'elle -avait eue de sa réconciliation avec madame de la -Baume.</p> - -<p>Bussy s'était empressé de demander une nouvelle permission -pour continuer son séjour à Paris. Il avait alors -un exemple récent du danger que l'on courait, sous -un roi tel que Louis XIV, de ne pas se soumettre aux -ordres de ses supérieurs. Le marquis de Martel, vieil -officier de marine, avait passé par tous les grades avant -de devenir lieutenant général à la mer; il trouva dur -d'être obligé d'obéir au comte d'Estrées, vice-amiral -<span class="pagenum"><a id="Page_66"> 66</a></span> -d'une plus grande noblesse, mais moins ancien que lui -comme officier, et qui avait gagné son grade de lieutenant -général dans le service de terre. D'Estrées transmit -à Martel, par écrit, un ordre sous une forme qui ne -convenait pas à ce dernier<a id="FNanchor_151" href="#Footnote_151" class="fnanchor"> [151]</a>; il ne refusait pas d'obéir à -l'ordre, mais il voulait que la rédaction en fût changée. -Pour ce léger tort, il fut arrêté par ordre du roi -le 31 octobre, et mis à la Bastille. Cette rigueur dut -faire de la peine à madame de Sévigné, qui était liée -avec la femme du marquis de Martel depuis que celui-ci -avait donné, sur le beau et célèbre <i>Royal-Louis</i>, vaisseau -qu'il commandait<a id="FNanchor_152" href="#Footnote_152" class="fnanchor"> [152]</a>, une fête à madame de Grignan -lorsqu'elle alla voir le fort de Toulon vers le milieu du -mois de mai 1672. La femme du lieutenant général -gouverneur de Provence parut si belle alors, dansa si -bien, que tous les jeunes officiers invités à cette fête en -conservèrent un long souvenir, et que, plusieurs années -après, un d'eux citait madame de Grignan comme le -modèle le plus parfait de grâce et de légèreté dans la -danse, en présence de madame de Sévigné, qu'il ne -connaissait pas et dont la satisfaction et l'émotion furent -grandes<a id="FNanchor_153" href="#Footnote_153" class="fnanchor"> [153]</a>. La prolongation de séjour accordée à -<span class="pagenum"><a id="Page_67"> 67</a></span> -Bussy, par l'entremise de M. de Pomponne<a id="FNanchor_154" href="#Footnote_154" class="fnanchor"> [154]</a>, était de -deux mois; elle lui fit concevoir l'espérance de pouvoir -obtenir durant ce temps, par ses démarches, la fin de -son exil et la permission de paraître à la cour; puis enfin -d'avoir un commandement, et de prendre sa part de -succès et de gloire dans les guerres qui agrandissaient -la France. C'était un noble orgueil, un rêve chéri auquel -Bussy ne put jamais renoncer et qui, ne s'étant point -réalisé, fit le malheur de sa vie.</p> - -<p>Il écrivit d'abord au duc de Montausier pour demander -d'être présenté au Dauphin et de le voir: «curiosité, -dit-il, que j'aurais, quand je serais du Japon.» Il reçut -une réponse polie et presque affectueuse<a id="FNanchor_155" href="#Footnote_155" class="fnanchor"> [155]</a>. Pendant le -temps de son séjour à Paris, Bussy vit encore madame -de Thianges; elle lui apprit qu'on avait rapporté de lui -de mauvais propos qui entachaient la valeur du prince -de Marsillac lors du fameux passage du Rhin à Tholus. -Il protesta à madame de Thianges que c'était sans -doute une fausseté et une perfidie de mademoiselle de -Montalais, «parce que, disait-il, il n'y a qu'elle au -monde assez méchante et assez folle pour inventer une -chose dont la fausseté est aussi facile à découvrir que -celle-là.» Bussy avait été très-bien avec cette spirituelle -et intrigante sœur de madame de Marans; mais -<span class="pagenum"><a id="Page_68"> 68</a></span> -depuis peu (Montalais n'était plus jeune) il s'était brouillé -avec elle<a id="FNanchor_156" href="#Footnote_156" class="fnanchor"> [156]</a>. Après cet entretien, Bussy écrivit une longue -lettre à madame de Thianges pour se disculper des torts -qu'on lui imputait envers la Rochefoucauld et son fils -Marsillac. Il n'y a personne en France, selon Bussy, qui -puisse rendre de plus assurés témoignages que lui «de -la valeur du père et de celle du fils. Ils ont été blessés -eu deux occasions où j'avais l'honneur de commander; -l'une à Mardick et l'autre à Valenciennes<a id="FNanchor_157" href="#Footnote_157" class="fnanchor"> [157]</a>.» Il paraît -que le duc de la Rochefoucauld fut peu touché de lire -un certificat de service militaire, pour lui et pour son -fils, tracé de la main du comte de Bussy-Rabutin; car -après que madame de Thianges lui eut communiqué cette -lettre, il ne répondit à cette avance de Bussy par aucune -parole polie<a id="FNanchor_158" href="#Footnote_158" class="fnanchor"> [158]</a>.</p> - -<p>Bussy, qui connaissait l'influence que la Rochefoucauld -et Marsillac avaient auprès du roi, de Condé et du -duc d'Enghien, fit taire son orgueil, et s'adressa à madame -de Sévigné; il la pria de faire en sorte, par madame -de la Fayette, que le duc de la Rochefoucauld -consentît à le voir, afin qu'ils pussent être ensemble sur -de meilleurs termes.</p> - -<p>«Madame de Sévigné, dit Bussy dans ses <i>Mémoires</i>, -s'en chargea; et, quatre ou cinq jours après, elle me dit -<span class="pagenum"><a id="Page_69"> 69</a></span> -que le duc de la Rochefoucauld avait répondu à son amie -que, puisque avant que nous fussions brouillés nous ne -nous voyions pas les uns les autres et que nous nous -contentions de vivre honnêtement ensemble quand nous -nous rencontrions, une plus grande liaison n'était pas -nécessaire; que, pour lui, il serait très-aise de me rencontrer -souvent, et qu'il se <i>clouerait où je serais</i>: ce -furent ses propres termes.»—«Cette réponse, ajoute -Bussy, me fit juger que j'aurais toujours à craindre de -ce côté-là, et que je ne devais espérer de soutien que de -la bonté du roi<a id="FNanchor_159" href="#Footnote_159" class="fnanchor"> [159]</a>.»</p> - -<p>Si Bussy faisait cette réflexion, c'est qu'en même temps -qu'il avait fait des démarches pour se réconcilier avec la -Rochefoucauld il en avait tenté auprès du prince de -Condé qui avaient encore moins réussi. Comme c'était -la princesse de Longueville qu'il avait blessée par ses -écrits et ses discours, et qu'il connaissait les sentiments -chrétiens qui l'avaient déjà portée à le protéger contre la -colère du prince lorsque l'outrage était récent<a id="FNanchor_160" href="#Footnote_160" class="fnanchor"> [160]</a>, il jugea -avec raison qu'elle interviendrait en sa faveur avec toute -la chaleur qu'inspire la céleste charité aux âmes pénétrées -de repentir. Il ne se trompait pas: la duchesse de -Longueville fit de grands efforts pour calmer le ressentiment -de Condé; elle ne put y parvenir. Elle fut obligée -de lui annoncer par mademoiselle Desportes<a id="FNanchor_161" href="#Footnote_161" class="fnanchor"> [161]</a>, dont -Bussy, pour cette négociation, avait réclamé le secours, -<span class="pagenum"><a id="Page_70"> 70</a></span> -que monsieur son frère ne voulait point pardonner, et -que même il lui avait dit «qu'il ne souffrirait pas que -Bussy fût sur le pavé de Paris.»—«Ce discours, dit -Bussy, me surprit; et je répondis à mademoiselle Desportes -qu'il n'appartenait qu'au roi de parler ainsi: elle -en convint.»</p> - -<p>Bussy n'en fut que plus ardent à chercher des appuis -contre une si puissante inimitié. Il savait que madame -Scarron, dont l'influence auprès de madame de Montespan -était connue, avait contre lui des préventions qui -n'étaient que trop motivées; il écrivit à sa cousine pour -la faire consentir à être son intermédiaire entre lui et -cette gouvernante des enfants naturels du roi, avec laquelle -il n'avait jamais eu de liaison ni de correspondance<a id="FNanchor_162" href="#Footnote_162" class="fnanchor"> [162]</a>.</p> - -<p>Madame de Sévigné reçut la lettre que Bussy lui écrivit -à ce sujet au retour d'un voyage à Saint-Germain. -Elle y était allée pour voir ces mêmes personnes si contraires -à Bussy et pour elle si amicales. Voici ce qu'elle -dit de ce voyage en écrivant à sa fille: «Je viens de -Saint-Germain, où j'ai été deux jours avec madame de -Coulanges et M. de la Rochefoucauld; nous logions chez -lui. Nous fîmes, le soir, notre cour à la reine, qui me -dit bien des choses obligeantes pour vous... Mais s'il -fallait vous dire tous les bonjours, tous les compliments -d'hommes et de femmes, vieux et jeunes, qui me parlèrent -de vous, ce serait nommer quasi toute la cour. -J'ai dîné avec madame de Louvois; il y avait presse à -qui nous en donnerait. Je voulais revenir hier; on nous -arrêta d'autorité pour souper chez M. de Marsillac, dans -<span class="pagenum"><a id="Page_71"> 71</a></span> -un appartement enchanté, avec madame de Thianges et -madame Scarron, M. le Duc et M. de la Rochefoucauld, -M. de Vivonne, et une musique céleste. Ce matin, nous -sommes revenues<a id="FNanchor_163" href="#Footnote_163" class="fnanchor"> [163]</a>.»</p> - -<p>Ce fut deux jours après qu'elle reçut de Bussy la lettre -suivante<a id="FNanchor_164" href="#Footnote_164" class="fnanchor"> [164]</a>:</p> - -<p class="letter">LETTRE DE BUSSY A MADAME DE SÉVIGNÉ.</p> - -<p class="dater">«Paris, le 13 décembre 1673.</p> - -<p>«Vous pouvez vous souvenir, madame, de la conversation -que nous eûmes l'autre jour. Elle fut presque toute -sur les gens qui pouvaient traverser mon retour; et -quoique je pense que nous les ayons tous nommés, je -ne crois pas que nous ayons parlé des voies dont ils se -servent pour me nuire. Cependant j'en ai découvert -quelques-unes depuis que je vous ai vue; et l'on m'a -assuré, entre autres, que madame Scarron en était une. -Je ne l'ai pas cru au point de n'en pas douter un peu; -car, bien que je sache qu'elle est aimée des personnes -qui ne m'aiment pas, je sais qu'elle est encore plus -amie de la raison, et il n'en paraît pas à persécuter, par -complaisance seulement, un homme de qualité, qui -n'est pas sans mérite, accablé de disgrâces. Je sais bien -<span class="pagenum"><a id="Page_72"> 72</a></span> -que les gens d'honneur entrent et doivent entrer dans -les ressentiments de leurs amis; mais quand ces ressentiments -sont ou trop aigres ou poussés trop loin, il est -(ce me semble) de la prudence de ceux qui agissent de -sang-froid de modérer les passions de leurs amis et de -leur faire entendre raison. La politique conseille ce que -je vous dis, madame, et l'expérience apprend à ne pas -croire que les choses sont toujours en même état. On l'a -vu en moi; car enfin, quand je sortis de la Bastille, ma -liberté surprit tout le monde. Le roi a commencé de me -faire de petites grâces sur mon retour, dans un temps -où personne ne les attendait; et sa bonté et ma patience -me feront tôt ou tard recevoir de plus grandes faveurs. -Il n'en faut pas douter, madame: les disgrâces ont leurs -bornes comme les prospérités. Ne trouvez-vous donc -pas qu'il est de la politique de ne pas outrer les haines -et de ne pas désespérer les gens? Mais quand on se -flatterait assez pour croire que le roi ne radoucira jamais -pour moi, où est l'humanité? où est le christianisme? -Je connais assez les courtisans, madame, pour -savoir que ces sentiments-là sont très-faibles en eux; et -moi-même, avant mes malheurs, je ne les avais guère. -Mais je sais la générosité de madame Scarron, son honnêteté -et sa vertu; et je suis persuadé que la corruption -de la cour ne les gâtera jamais. Si je ne croyais ceci, je -ne vous le dirais pas, car je ne suis point flatteur; et -même je ne vous supplierais pas comme je fais, madame, -de lui parler sur ce sujet; c'est l'estime que j'ai pour -elle qui me fait souhaiter de lui être obligé, et croire -qu'elle n'y aura pas de répugnance. Si elle craint l'amitié -des malheureux, elle ne fera rien pour avoir la -mienne; mais si l'amitié de l'homme du monde le plus -<span class="pagenum"><a id="Page_73"> 73</a></span> -reconnaissant (et à qui il ne manquait que la mauvaise -fortune pour avoir assez de vertu) lui est considérable, -elle voudra bien me faire plaisir.»</p> - -<p>A cette lettre verbeuse, mais assez adroite, madame -Scarron fit une prudente et courte réponse, contenue -dans le billet suivant de madame de Sévigné à Bussy<a id="FNanchor_165" href="#Footnote_165" class="fnanchor"> [165]</a>.</p> - -<p class="letter">BILLET DE MADAME DE SÉVIGNÉ A BUSSY.</p> - -<p class="dater">«A Paris, ce 15 décembre 1673.</p> - -<p>«Je fis voir hier soir à madame Scarron la lettre -que vous m'avez écrite. Elle m'a dit n'avoir jamais entendu -nommer votre nom en mauvaise part. Du reste, -elle a très-bien reçu votre civilité. Elle ne trouvera jamais -occasion de vous servir qu'elle ne le fasse. Elle -connaît votre mérite et plaint vos malheurs.»</p> - -<p>Dans une longue lettre à sa fille<a id="FNanchor_166" href="#Footnote_166" class="fnanchor"> [166]</a>, écrite le même jour -que le billet qu'on vient de lire, madame de Sévigné -annonce très-laconiquement, en ces termes, que Bussy -va quitter Paris: «Bussy a ordre de retourner en Bourgogne. -Il n'a pas fait la paix avec ses principaux ennemis.»</p> - -<p>La permission accordée à Bussy de prolonger son -séjour à Paris finissait le jour même où madame de -Sévigné écrivait le billet que nous avons transcrit<a id="FNanchor_167" href="#Footnote_167" class="fnanchor"> [167]</a>. Mais -<span class="pagenum"><a id="Page_74"> 74</a></span> -Bussy avait, dès le 2 décembre, écrit au roi et à M. de -Pomponne pour obtenir une nouvelle prolongation de -séjour, et ces lettres furent envoyées à Saint-Germain -en Laye, où était la cour. Ce ne fut que par une lettre -de M. de Pomponne, datée de Saint-Germain le -17 décembre, que Bussy fut informé du refus du roi<a id="FNanchor_168" href="#Footnote_168" class="fnanchor"> [168]</a>. -Madame de Sévigné, par son intimité avec de Pomponne, -savait donc avant Bussy que la permission ne -lui serait pas accordée; et on voit, d'après la suite des -<i>Mémoires</i> de celui-ci, qu'elle ne lui en a rien dit. On -n'est jamais pressé d'annoncer une mauvaise nouvelle à -un ami. Ce refus affligea beaucoup Bussy, et le mit dans -une grande perplexité. Ses affaires n'étaient point terminées, -ses espérances de rentrer en grâce s'évanouissaient, -et il craignait de déplaire au roi et de s'attirer -sa colère s'il prolongeait son séjour à Paris. Il prit cependant -ce dernier parti, et fit ses adieux aux secrétaires -d'État, à tous ses amis et à toutes les femmes -de sa connaissance; de sorte qu'on le crut en Bourgogne, -tandis qu'il était caché dans Paris. Il confia son -secret au seul duc de Saint-Aignan; et, de la retraite -où il se tenait renfermé, il faisait parvenir des lettres -qu'il datait de son château de Bussy. Il écrivit au roi, -au secrétaire d'État Châteauneuf, au comte de Vivonne, -à madame de Thianges et à divers puissants personnages<a id="FNanchor_169" href="#Footnote_169" class="fnanchor"> [169]</a>.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_75"> 75</a></span> -Néanmoins, malgré toutes ces précautions, le secret -transpira; Bussy n'avait pu se résoudre à le cacher à -sa cousine<a id="FNanchor_170" href="#Footnote_170" class="fnanchor"> [170]</a>. Madame de Sévigné avait depuis un mois le -bonheur de posséder sa fille avec elle lorsqu'elle apprit -que Bussy était resté à Paris, et elle s'empressa d'aller -rendre visite au captif volontaire; le billet qu'il lui adressa -le lendemain de cette visite, en lui envoyant du vieux vin -de Cotignac qui lui avait été donné autrefois par madame -de Monglas, prouve évidemment que Bussy avait reçu -des reproches de la mère et de la fille. Il s'ensuivit des -explications et des épanchements réciproques, dont -le cœur de Bussy dut être satisfait; il écrit alors à sa -cousine: «Je ne vous aime pas plus que je ne vous aimais -hier matin; mais la conversation d'hier soir me -fait plus sentir ma tendresse; elle était cachée au fond -de mon cœur, et le commerce l'a ranimée. Je vois bien -par là que les longues absences nuisent à la chaleur de -l'amitié aussi bien qu'à celle de l'amour<a id="FNanchor_171" href="#Footnote_171" class="fnanchor"> [171]</a>.»</p> - -<p>Le duc de Saint-Aignan, ce fidèle ami de Bussy, vint -souvent le visiter secrètement. Il se chargea de remettre -ses lettres au roi et de plaider sa cause. Bussy demandait -qu'il lui fût permis d'aller combattre en Flandre -comme volontaire, sous les ordres de Condé; et Saint-Aignan -suppliait le roi de lui accorder au moins cette -<span class="pagenum"><a id="Page_76"> 76</a></span> -faveur<a id="FNanchor_172" href="#Footnote_172" class="fnanchor"> [172]</a>. Les entretiens qui eurent lieu à ce sujet entre -Louis XIV et son complaisant courtisan sont des scènes -d'intérieur des plus curieuses, qui confirment tout ce que -nous avons dit sur les sentiments du monarque à l'égard -de Bussy.</p> - -<p>Le roi dit: «Saint-Aignan, on accuse Bussy d'être -l'auteur des chansons qui courent contre les ministres -et contre quelques personnes de ma cour. Je ne crois pas -cela, mais on le dit.»</p> - -<p>Saint-Aignan répond: «Bussy trouve bien étrange, -sire, d'être toujours accusé et jamais convaincu; et, pour -déconcerter la malice de ses ennemis, il demande à -Votre Majesté de trouver bon qu'il se remette à la Bastille -et que les accusations soient de nouveau jugées.»</p> - -<p>«Bussy perd l'esprit,» dit le roi.</p> - -<p>«Nullement, sire; et pour être convaincu que Bussy -n'est pas fou, il prie Votre Majesté de lire la lettre qu'il -a écrite au roi, et de prendre un recueil de pièces qu'il -m'a chargé de lui remettre, et qui, j'en suis certain, divertiront -le roi, s'il veut se donner la peine d'y jeter les -yeux.»</p> - -<p>Louis XIV répondit qu'il recevrait tout cela quand -il serait habillé; et en effet il fit appeler Saint-Aignan -au sortir de son prie-Dieu, reçut les manuscrits et les -lettres, et rentra dans son cabinet<a id="FNanchor_173" href="#Footnote_173" class="fnanchor"> [173]</a>.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_77"> 77</a></span> -Ainsi se termina ce premier entretien. Le duc de -Saint-Aignan promit de faire plus, et il tint parole.</p> - -<p>Le jeudi 19 avril (le jour même où Louis XIV -partit de Versailles pour aller conquérir la Franche-Comté), -Bussy reçut une longue lettre du duc de Saint-Aignan, -dans laquelle celui-ci lui rendait compte de -deux autres entretiens qu'il avait eus avec le roi à son -sujet. «Je m'approchai, dit le duc, du lit du roi, mardi -17, à neuf heures du matin, et, m'étant mis à genoux, -je pris la liberté de lui dire: Oserai-je, sire, demander -à Votre Majesté si elle a lu le livre que je lui ai donné -de la part du comte de Bussy; et, au cas qu'elle ne l'ait -pas encore lu, si elle l'emportera avec elle?»</p> - -<p>«Le roi me répondit:</p> - -<p>«A propos, Saint-Aignan, j'ai un reproche à vous -faire! Bussy est à Paris, et vous ne m'en avez rien dit.»</p> - -<p>«Je lui répondis:</p> - -<p>«Mon Dieu! sire, y va-t-il du service de Votre Majesté -de lui donner ces sortes d'avis? Un pauvre homme -de qualité, malheureux, est accablé d'affaires; pour y -mettre quelque ordre, il se cache le plus qu'il peut, et -cependant il se trouve des gens assez lâches pour lui -rendre en cet état de méchants offices.»</p> - -<p>«Mais enfin (me répliqua le roi), après que le temps -que je lui avais donné est expiré, il faut qu'il s'en aille. -Cela a trop paru, et si vous ne voulez vous charger de -lui dire de ma part (à cause que vous êtes son ami), -je serai contraint de le lui faire dire par quelque autre -moins doucement.»</p> - -<p>Saint-Aignan osa répliquer, et le roi s'adoucit et dit: -«Je n'ai pas encore lu son recueil; il est dans ce petit -cabinet, sur ma table.»</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_78"> 78</a></span> -Saint-Aignan répondit:</p> - -<p>«Sire, il faut l'emporter; et je voudrais que Votre -Majesté y voulût joindre le premier tome de ses <i>Mémoires</i>. -Outre qu'il est bien écrit, le roi y verrait de -petites histoires galantes qui le divertiraient.»</p> - -<p>Le roi termina en disant:</p> - -<p>«Songez seulement à lui dire ce que je vous ai dit, -et à mon retour toutes choses nouvelles.»</p> - -<p>Saint-Aignan ne se rebuta pas; fidèle ami et habile -courtisan, il connaissait tout le pouvoir de l'importunité -sur une volonté flottante. Il retourna à Versailles le -surlendemain, jour fixé pour le départ du roi, et pénétra -de très-grand matin et lorsque le roi était encore couché. -Après avoir pris congé de lui et baisé un bout de ses -draps, il lui déclara, les yeux humides, qu'il n'avait pu -encore se résoudre à parler au pauvre comte de Bussy -de ce qu'il lui avait commandé de lui dire, parce que -Bussy serait parti à l'instant même, au préjudice d'une -affaire importante toute prête à être jugée; et que, d'ailleurs, -lui Saint-Aignan espérait encore de la bouche du -roi un ordre moins rigoureux.</p> - -<p>«Eh bien! dit le roi, qu'il demeure encore quinze -jours ou trois semaines, et qu'il s'en aille chez lui après. -Entendez-vous, Saint-Aignan? Dites-lui cela au moins, -n'y manquez pas.»</p> - -<p>«Je le ferai, sire,» répliqua Saint-Aignan.</p> - -<p>En effet, quatre jours après ce dernier entretien, -Bussy gagna son procès. Il écrivit au roi, qui alors était -au camp devant Besançon, pour lui témoigner la reconnaissance -de cette nouvelle permission. Il adressa sa -lettre au secrétaire d'État Châteauneuf, dont la réponse, -quoique très-polie et même affectueuse, ne lui parut -<span class="pagenum"><a id="Page_79"> 79</a></span> -pas, par la souscription, assez respectueuse pour être -adressée par un ministre à un ancien lieutenant général -mestre de camp de la cavalerie légère, tel que lui. Le -12 mai, les trois semaines qui lui avaient été accordées -par le roi étant expirées, Bussy partit avec sa fille Françoise, -et retourna en Bourgogne<a id="FNanchor_174" href="#Footnote_174" class="fnanchor"> [174]</a>.</p> - -<p>Dans les circonstances qui avaient accompagné le refus -fait à Saint-Aignan, Bussy trouvait des motifs d'espérance. -La guerre faite en Franche-Comté avait déterminé -le roi à faire venir la reine à Dijon, et l'on croyait -généralement que Louis XIV en prendrait occasion de -rappeler près de lui un personnage aussi utile en Bourgogne -que l'était Bussy. C'est ce que nous apprend -<span class="smallc">Mademoiselle</span> dans une réponse qu'elle fit à une lettre -que Bussy lui avait écrite. Elle-même souffrait cruellement -du refus du roi de consentir à son mariage avec -Lauzun, et plaignait Bussy; elle lui écrivait en parlant -du roi: «Il est comme Dieu; il faut attendre sa volonté -avec soumission et tout espérer de sa justice et -de sa bonté sans impatience, afin d'en avoir plus de -mérite.» Bussy écrivit aussi à <span class="smallc">Mademoiselle</span> pour la -prier d'offrir à la reine de venir s'installer dans son -château. «Le bruit est en ce pays-ci, dit-il dans sa -lettre, que la reine viendra faire ses dévotions à Sainte-Reine. -Si Sa Majesté prend cette pensée, je voudrais -lui pouvoir offrir ma maison; et j'en sortirais, pour ne -pas me présenter devant elle en l'état où je suis à la -cour. Elle serait mieux logée que dans le village de -Sainte-Reine, et n'en serait qu'à une demi-lieue. En tout -<span class="pagenum"><a id="Page_80"> 80</a></span> -cas, <span class="smallc">Mademoiselle</span>, si la reine ne me faisait pas cet -honneur, je l'espérerais de V. A. R.; je l'en supplie -très-humblement<a id="FNanchor_175" href="#Footnote_175" class="fnanchor"> [175]</a>.»</p> - -<p>La reine ne vint pas à Sainte-Reine. Bussy, à chaque -nouvelle victoire, écrivait une lettre au roi; mais la conquête -de la Franche-Comté s'acheva, et Louis XIV était -de retour à Versailles sans que Bussy eût rien obtenu de -lui<a id="FNanchor_176" href="#Footnote_176" class="fnanchor"> [176]</a>.</p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_81"> 81</a></span></p> -<h2 class="normal">CHAPITRE V.<br /> -<span class="medium">1674.</span></h2> -</div> - -<p class="hanging indent"> -Madame de Sévigné sollicite un congé pour M. de Grignan, afin qu'il -puisse venir en cour avec sa femme.—Gloire et puissance de -Louis XIV.—Par son influence le grand Sobieski est roi de Pologne.—Le -duc d'York épouse la princesse de Modène.—Portrait de -Louis XIV.—Son ascendant sur sa cour.—Les filles d'honneur sont -remplacées près de la reine par les dames du palais.—Louis XIV -avait tous les goûts, toutes les passions.—Les femmes étaient nécessaires -à son existence.—Détails sur la reine; comment Louis XIV -se conduisait envers elle.—Madame de Montespan cherche à inspirer -au roi les affections de la paternité.—Elle donne des bals d'enfants.—Description -de ces bals par madame de Sévigné.—Amours -de Louis XIV avec la Vallière.—Lettres patentes qui lui confèrent -le titre de duchesse.—Sa fille, madame de Blois (princesse de -Conti), brille à la cour dès son plus jeune âge.—Montespan triomphe -de la Vallière, et celle-ci se décide à se retirer de la cour.—Elle -y reste encore par esprit de religion.—Le maréchal de Bellefonds, -Bossuet, Bourdaloue la soutiennent dans le projet qu'elle -a formé de se retirer aux Carmélites.—Méprise de madame de -Sévigné à son sujet.—La Vallière entre aux Carmélites.—Sa prise -d'habit.—Ses vœux.—Jugement de madame de Sévigné sur le -discours de Bossuet.—Ce que dit la Vallière à la duchesse d'Orléans -après la cérémonie.—Visite que lui fait madame de Sévigné, -cinq ans après, aux Carmélites.—Grâce que le roi accorde à la -Vallière.—Visite que lui fait madame de Montespan, et questions -indiscrètes qu'elle lui adresse.—Influence qu'eut la retraite de la -Vallière sur Louis XIV.—Pourquoi il s'abstint de l'aller voir.—La -conduite du roi en cette occasion a été mal interprétée.—Réflexion -à ce sujet, confirmée par un mot de Louis XIV à la veuve -de Scarron.</p> - -<p class="space">Pendant les quatre mois d'hiver que madame de Sévigné -passa avant l'arrivée de sa fille à Paris, elle fut -sans cesse occupée à faire valoir à la cour les services -<span class="pagenum"><a id="Page_82"> 82</a></span> -de son gendre en Provence, à demander qu'il fût appelé -à Paris et qu'il vînt avec sa femme saluer le roi -et se concerter avec ses ministres sur les affaires de son -gouvernement. La bonne gestion et l'affermissement de -l'autorité du comte de Grignan dépendaient, selon elle, -de cette faveur et de l'accueil qui lui serait fait par Sa -Majesté.</p> - -<p>Comme ce voyage était arrêté ou prévu, madame de -Sévigné, dans les lettres qu'elle écrivait à sa fille, n'oubliait -rien de ce qui pouvait la tenir au courant des intrigues -de la cour. Objet d'imitation et d'envie, la splendeur -de cette cour rayonnait sur l'Europe entière. Son -monarque était à la fois servi par son génie, par sa fortune -et par le hasard. L'habileté de ses ennemis ne -servait qu'à faire éclater la supériorité de ses généraux -et de ses hommes d'État. Son nom était respecté et -sa puissance redoutée jusqu'aux extrémités du monde. -La gloire des héros de l'étranger semblait n'être qu'un -apanage de la sienne. Autour de lui la poésie, l'éloquence, -les sublimes conceptions de la science, les prodiges -de l'industrie agrandissaient, ennoblissaient les -destinées de l'humanité.</p> - -<p>Le mari d'une des filles d'honneur de la reine, le -grand Sobiesky, simple mousquetaire de Louis XIV, fut, -par l'influence de ce monarque, élu roi de Pologne, et -sauva deux fois l'Europe chrétienne en la préservant, -par sa double victoire, de l'invasion des Turcs, alors si -redoutables<a id="FNanchor_177" href="#Footnote_177" class="fnanchor"> [177]</a>.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_83"> 83</a></span> -Marié pour la seconde fois par les soins de Louis XIV<a id="FNanchor_178" href="#Footnote_178" class="fnanchor"> [178]</a>, -le duc d'York, qui eût paru digne du trône s'il n'y fût -jamais monté, vint cette année (1673) présenter au roi -de France la princesse de Modène, sa nouvelle épouse<a id="FNanchor_179" href="#Footnote_179" class="fnanchor"> [179]</a>, -et par la suite la ramena en France, comme son dernier -asile, quand, dépouillé de sa couronne, il eut accompli -sa destinée<a id="FNanchor_180" href="#Footnote_180" class="fnanchor"> [180]</a>.</p> - -<p>Rien d'important n'avait lieu en Europe sans que -Louis XIV n'apparût comme un moteur puissant ou -comme un obstacle invincible; mais c'est surtout sur sa -propre cour que son ascendant était le plus fortement -senti. Là était son existence propre et individuelle, tous -ses moyens de bonheur, tous les appuis de son trône, -tous les exécuteurs de ses volontés. La nature lui avait -donné la vigueur de tempérament et l'activité d'esprit -nécessaires pour acquérir toutes les gloires et s'approprier -toutes les jouissances du pouvoir suprême. -L'orgueil de son rang et de ses succès lui faisait tout -rapporter à sa personne. L'État, c'était lui; et, par -une conséquence nécessaire de ce sentiment égoïste, le -gouvernement de sa cour, de sa famille, de son gynécée -était pour lui des affaires d'État. Pour celles-là il n'avait -point d'autre ministre que lui-même, il ne se -fiait qu'à lui seul. A une foi sincère, à un vif désir du -salut il unissait tous les goûts, toutes les passions qui -s'opposent à l'accomplissement des devoirs et des sacrifices -<span class="pagenum"><a id="Page_84"> 84</a></span> -qu'il exige. Il aimait le beau, le magnifique en -toutes choses. Les arts, la musique, la danse le charmaient. -Il se complaisait dans l'admiration des grandes -batailles, des actes d'héroïsme et de courage, dans les -appareils guerriers, dans les opérations de siéges savamment -combinées, dans les terribles mêlées des batailles -et, au milieu des forêts, dans le bruyant tumulte des grandes -chasses. Il se délectait, il s'admirait lui-même dans -le faste et le bruit des fêtes pompeuses qu'il avait ordonnées. -Il avait encore des penchants plus impérieux, plus -personnels, plus dangereux: il aimait le jeu; il aimait les -femmes, mais non avec cet amour qui les avilit. Il mettait -autant de prix à s'en faire aimer qu'à les posséder. Pour -lui, nul commerce avec elles ne pouvait avoir de durée -sans celui de l'âme et de la pensée. Chez lui le cœur -désirait toujours avoir quelque part dans les caprices -passagers des sens. D'un tempérament robuste, l'habitude -ne lui permettait pas de se contraindre dans les intervalles -de repos que les grossesses ou les infirmités -imposaient à la maîtresse dont il était épris; mais alors -il fallait encore que celles qui le rendaient infidèle, en -affrontant les lois de la pudeur, parussent entraînées -par la passion qu'il leur inspirait; et comme il était un -des plus beaux hommes de son royaume, il suffisait aux -beautés dont il était assiégé d'assortir leurs regards -aux illusions de son amour-propre. De là cette politesse -attentive envers les femmes de tous rangs, dont il fut le -plus parfait modèle; cette élégance des manières, si fort -en honneur à la cour d'Anne d'Autriche et à l'hôtel de -Rambouillet, qui, par l'empire que Louis XIV avait acquis -sur sa cour, a régi la société française pendant tout -le cours de son règne et qui, malgré les mœurs crapuleuses -du règne suivant, malgré nos hideuses révolutions, -<span class="pagenum"><a id="Page_85"> 85</a></span> -n'ont pu, après un siècle et demi, disparaître entièrement -du caractère national.</p> - -<p>Cependant tant d'entraînements opposés et d'inclinations -contraires créaient à Louis XIV des obstacles -pour le gouvernement de sa cour. Sa renommée remplissait -le monde, et le monde s'occupait de lui. On -cherchait à pénétrer dans les secrets de l'existence intérieure -de celui dont l'influence était si forte sur la fortune -des États et des individus. Voilà pourquoi ce qui -concerne ses maîtresses et les anecdotes de sa vie privée -sont des faits qui ont une grande importance historique; -mais ils ont besoin qu'on leur applique ce -même esprit critique sans lequel l'histoire ne peut nous -retracer qu'une image incomplète et fantastique du -passé.</p> - -<p>Le 1<sup>er</sup> janvier 1674, Louis XIV opéra un changement -considérable dans la maison de la reine. Il supprima -les filles d'honneur, qui, pour la plupart, avaient une -réputation équivoque, à laquelle le roi avait beaucoup -contribué<a id="FNanchor_181" href="#Footnote_181" class="fnanchor"> [181]</a>. Elles furent remplacées par des femmes -mariées à de hauts personnages et portant de grands -noms. Ce furent d'abord cinq dames d'honneur ou dames -du palais, ajoutées aux sept qui existaient déjà. -Elles furent toutes assujetties auprès de la reine au -même service que les filles d'honneur, sans qu'aucune -d'elles pût s'en exempter, même lorsqu'elles étaient -enceintes<a id="FNanchor_182" href="#Footnote_182" class="fnanchor"> [182]</a>. Madame de Sévigné nous apprend que -<span class="pagenum"><a id="Page_86"> 86</a></span> -les uns attribuaient cette mesure à l'inquiète jalousie de -Montespan, et d'autres à ce que, pour écarter une -seule de ces filles d'honneur, on les renvoya toutes. Ces -conjectures sont démenties, selon nous, par les faits -que madame de Sévigné elle-même nous apprend. «Le -roi, dit-elle, veut de la soumission. Il est très-sûr qu'en -certain lieu on ne veut séparer aucune femme de son -mari ou de ses devoirs; on n'aime pas le bruit, à moins -qu'on ne le fasse<a id="FNanchor_183" href="#Footnote_183" class="fnanchor"> [183]</a>.»</p> - -<p>Louis XIV se dégageait peu à peu, par les années, -de la tyrannie de sa constitution chaleureuse, et il cédait -de plus en plus au sentiment de dignité morale qui -ne l'abandonna jamais entièrement. Il voulait racheter -par son respect pour la religion et par les services qu'il -croyait lui rendre les graves infractions faites à ses -saintes lois. Il ne lui suffisait pas que les dames du -palais eussent un bon renom de fidélité conjugale, il -aurait désiré auprès de sa pieuse épouse des femmes -qui lui ressemblassent. Alors prévalut, parmi celles qui -voulaient parvenir aux dignités et aux honneurs (le nombre -en était grand), une pruderie et une affectation de -piété dont madame de Sévigné, dans l'intime secret de -sa correspondance avec sa fille, se moque en toute occasion. -«La princesse d'Harcourt, dit-elle, danse au -bal, et même toutes les petites danses; vous pouvez -<span class="pagenum"><a id="Page_87"> 87</a></span> -penser combien on trouve qu'elle a jeté le froc aux orties -et qu'elle a fait la dévote pour être dame du palais! -Elle disait il y a deux jours: Je suis une païenne auprès -de <i>ma sœur</i> d'Aumont. On trouve qu'elle dit bien présentement: -<i>La sœur</i> d'Aumont n'a pris goût à rien; -elle est toujours de méchante humeur, et ne cherche -qu'à ensevelir les morts. La princesse d'Harcourt n'a -point encore mis de rouge; elle dit à tout moment: -J'en mettrai si la reine ou M. le prince d'Harcourt me -le commandent. La reine ne lui commande pas, ni le -prince d'Harcourt; de sorte qu'elle se pince les joues, -et l'on croit que M. de Sainte-Beuve (savant casuiste et -théologien de la Sorbonne) entre dans ce tempérament<a id="FNanchor_184" href="#Footnote_184" class="fnanchor"> [184]</a>.»</p> - -<p>Lorsque Mazarin, d'après les considérations de la politique, -décida que le roi de France s'unirait à l'infante -d'Espagne, le jeune monarque, alors dans toute la fougue -de l'âge, était épris de Marie Mancini. L'infante -espagnole, timide, froide et gauche, avec ses grands -yeux d'un bleu pâle, sa figure d'un blond argenté, son -teint d'un blanc blafard, le vermillon de ses lèvres -épaisses qui faisait ressortir le peu de blancheur de ses -dents, contrastait désagréablement avec les attraits de -cette belle et gracieuse Italienne au teint coloré, à la -taille élancée, à la parole chaleureuse, aux regards -enflammés<a id="FNanchor_185" href="#Footnote_185" class="fnanchor"> [185]</a>. Le jeune roi fut obligé de résister à ses -<span class="pagenum"><a id="Page_88"> 88</a></span> -plus ardents désirs et de refouler dans son cœur ses plus -tendres sentiments en recevant dans ses bras Marie-Thérèse. -Celle-ci ne put jamais inspirer de l'amour à -son époux; mais elle était bonne, douce, pieuse; et -de toutes les femmes qui se passionnèrent pour Louis -jusqu'à l'idolâtrie aucune ne l'aima plus fortement, -plus constamment. Il le savait, et, malgré toutes les séductions -qui l'entraînaient, il eut toujours pour elle les -procédés d'un honnête homme qui connaît tout le prix -d'une épouse fidèle et d'un roi qui n'ignore pas qu'un -des plus grands intérêts de sa politique est celui de -perpétuer sa race. Il en eut six enfants; tous moururent -jeunes, excepté le premier, qui fut dauphin; et -comme cet aîné fut un homme d'un esprit médiocre -et d'un caractère peu aimable, malgré les soins de -Montausier et de Bossuet, ou peut-être en partie à -cause de ces soins, Louis XIV préférait à tous ses enfants -ceux qu'il eut de ses maîtresses. Mais il environna -toujours de respect et d'hommages sa compagne -couronnée, la mère du Dauphin et de toute la progéniture -légitime et royale. Soumise à toutes ses volontés, -elle les devinait dans ses yeux; elle ne pensait, -elle n'agissait que par lui; la peur de lui déplaire la -glaçait d'effroi, et son amour augmentait sa crainte. -Pour qu'aucune femme n'aigrît en elle les sentiments -de jalousie qui la tourmentaient, Louis XIV ne se contenta -pas de remplacer les filles d'honneur par des -dames du palais, il renvoya dans leur pays toutes les -femmes de chambre espagnoles que la reine<a id="FNanchor_186" href="#Footnote_186" class="fnanchor"> [186]</a> avait -<span class="pagenum"><a id="Page_89"> 89</a></span> -amenées avec elle, et mit à leur place des femmes de -chambre françaises. Ce changement parut dur à Marie-Thérèse; -mais elle n'osa pas s'en plaindre, et ce fut par -madame de Montespan qu'elle obtint de pouvoir garder -la plus jeune et la plus chérie de ses femmes espagnoles<a id="FNanchor_187" href="#Footnote_187" class="fnanchor"> [187]</a>.</p> - -<p>Marie-Thérèse, élevée pour un trône, avait cependant -de la grandeur et de la dignité; ce fut elle qui répondit -naïvement qu'elle n'avait pu devenir amoureuse d'aucun -homme à la cour de son père, parce qu'il n'y avait -d'autre roi que lui. Elle savait tenir une cour; mais, -élevée dans l'ignorance et sans goût pour la lecture, -elle aimait les jeux de cartes; ce qui plaisait d'autant -plus aux dames d'honneur et aux femmes admises à -l'honneur de faire habituellement sa partie qu'elle ne -savait pas bien jouer, et qu'elle perdait presque toujours. -Celles qui, par leurs charges, étaient obligées de -l'accompagner partout ne sympathisaient pas avec -sa dévotion, et trouvaient pénible d'aller tous les jours -à vêpres, au sermon, au salut: «Ainsi, disait à ce -propos madame de Sévigné, rien n'est pur en ce -monde<a id="FNanchor_188" href="#Footnote_188" class="fnanchor"> [188]</a>.»</p> - -<p>Lorsqu'il allait faire la guerre en personne, Louis XIV -transportait la reine et sa cour dans les lieux les moins -éloignés des opérations militaires. Quand ses plans de -campagne devaient se porter hors du royaume et auraient -exposé la reine à quelques dangers, il la laissait -<span class="pagenum"><a id="Page_90"> 90</a></span> -à Versailles et la décorait du titre de régente. Si donc -Marie-Thérèse ne suffisait pas au bonheur de Louis XIV, -elle y contribuait, et ne le troublait en rien. Il n'en était -pas de même des maîtresses: leur rivalité, celle de -leurs enfants, qui tous issus du même père se croyaient -les mêmes droits aux bienfaits et à la faveur, y fomentaient -des divisions et des haines<a id="FNanchor_189" href="#Footnote_189" class="fnanchor"> [189]</a>. Le passage suivant -d'une des lettres de madame de Sévigné nous dessine -trop exactement l'état de la cour sous ce rapport, à -l'époque dont nous nous occupons, pour que nous ne -le transcrivions pas:</p> - -<p>«...Parlons de Saint-Germain: j'y fus il y a trois -jours... J'allai d'abord chez M. de Pomponne... Nous -allâmes chez la reine avec madame de Chaulnes. Il n'y -eut que pour moi à parler. La reine dit sans hésiter -qu'il y avait trois ans que vous étiez partie et qu'il fallait -revenir. Nous fûmes ensuite chez madame Colbert, -qui est extrêmement civile et sait très-bien vivre. Mademoiselle -de Blois dansait; c'est un prodige d'agrément -et de bonne grâce. Desairs dit qu'il n'y a qu'elle qui le -fasse souvenir de vous; il me prenait pour juge de sa -danse, et c'était proprement mon admiration que l'on -voulait: elle l'eut, en vérité, tout entière. La duchesse -de la Vallière y était; elle appelle sa fille <i>mademoiselle</i>, -et la princesse l'appelle <i>belle maman</i>. M. de Vermandois -y était aussi. On ne voit point encore d'autres enfants. -Nous allâmes voir <span class="smallc">Monsieur</span> et <span class="smallc">Madame</span>; vous n'êtes -point oubliée de <span class="smallc">Monsieur</span>, et je lui fais toujours mes -très-humbles remercîments. Je trouvai Vivonne, qui -<span class="pagenum"><a id="Page_91"> 91</a></span> -me dit: <i>Maman mignonne</i>, embrassez, je vous prie, le -gouverneur de Champagne.—Et qui est-ce? lui dis-je.—C'est -moi, reprit-il.—Et qui vous l'a dit?—C'est le -roi, qui vient de me l'apprendre tout à l'heure. Je lui en -fis mes compliments tout chauds. Madame la comtesse -(de Soissons) l'espérait pour son fils<a id="FNanchor_190" href="#Footnote_190" class="fnanchor"> [190]</a>.»</p> - -<p>Presque tous les grands intérêts de cour, au moment -où ces lignes furent écrites, y sont touchés.</p> - -<p>Le gouvernement de Champagne était devenu vacant -par la mort d'Eugène-Maurice de Savoie, comte de -Soissons, arrivée le 7 juin 1673. Il était naturel que ce -gouvernement fût donné à son fils aîné, Louis-Thomas. -Sa mère était Olympe Mancini, surintendante et chef du -conseil de la maison de la reine<a id="FNanchor_191" href="#Footnote_191" class="fnanchor"> [191]</a>, qui avait conservé -un grand crédit à la cour; mais madame de Montespan -l'emporta sur elle, et fit donner ce gouvernement à son -frère, le duc de Vivonne. Alors dans toute la force et -l'éclat de sa puissance, madame de Montespan triomphait -par la certitude d'être aimée sans redouter sa rivale. -Lorsque, par un retour de tendresse, Louis XIV -avait impérieusement redemandé la Vallière aux saintes -filles du couvent de Chaillot<a id="FNanchor_192" href="#Footnote_192" class="fnanchor"> [192]</a>, celle-ci, pressentant son -malheur, dit: «Hélas! mes sœurs, vous me reverrez -bientôt.» Bientôt, en effet, l'abandon et la froideur toujours -croissants de celui qui l'avait accoutumée à tant -d'adoration et d'hommages rouvrirent plus saignantes -et plus déchirantes les blessures faites à son cœur. Elle -vit enfin arriver ces jours de douleur et de larmes, où -<span class="pagenum"><a id="Page_92"> 92</a></span> -la mélancolique expression de ses beaux yeux, qui tant -de fois avaient fait repentir Louis XIV de ses infidélités -et rallumé l'ardeur d'une flamme languissante, ne -trouvait plus en lui aucune sympathie. Une nouvelle -séparation était devenue indispensable; elle dut enfin -s'y résigner; mais, incertaine, timide et tremblante au -moindre signe de la volonté d'un maître qui avait cessé -d'être amant, elle n'osait pas lui résister; elle ne savait -ni comment rester avec lui ni comment le quitter. Il -fuyait la présence, il évitait les regards de celle qui aurait -voulu lui sacrifier sa vie. Sa vie! elle ne lui appartenait -plus; elle était au père de ses enfants, enfants du -sang royal, reconnus légitimes. Dans les commencements, -le jeune monarque avait consenti à ce que la -Vallière couvrît ses faiblesses des ombres du mystère. -Deux enfants nés de ce commerce amoureux furent mis -au monde et baptisés comme nés de père et de mère -supposés; ces enfants moururent peu après leur naissance<a id="FNanchor_193" href="#Footnote_193" class="fnanchor"> [193]</a>, -et le secret de ces passagères existences ne fut -pas alors révélé. Louis XIV se lassa de ces feintes, qui le -gênaient et qui lui paraissaient peu d'accord avec la dignité -royale; il voulut se montrer généreux jusque dans -le désordre de ses mœurs, il voulut imposer à l'opinion -et se mettre au-dessus d'elle. Il rendit ses sujets confidents -de ses plaisirs, et les admit à contempler la -beauté de celle qui l'avait subjugué. Toute sa cour devait -participer à l'enivrement de sa joie et de son bonheur. -Il donna des fêtes splendides dont la Vallière fut -l'objet. Au lieu de désavouer les enfants qu'il en obtint, -<span class="pagenum"><a id="Page_93"> 93</a></span> -il les reconnut et les légitima. La sincérité de ses sentiments -et de son admiration pour sa belle maîtresse -éclate dans les lettres patentes données après la naissance -de mademoiselle de Blois, lorsqu'il érigea, pour -elle et pour sa mère, la terre de Vaujour et la baronnie -de Saint-Christophe en duché-pairie, sous le nom de <i>la -Vallière</i>.</p> - -<p>«Nous avons cru, dit-il, par cet acte<a id="FNanchor_194" href="#Footnote_194" class="fnanchor"> [194]</a>, ne pouvoir -mieux exprimer dans le public l'estime toute particulière -que nous faisons de notre très-chère, bien-aimée -et très-féale Louise-Françoise de la Vallière qu'en lui -conférant les plus hauts titres d'honneur... Quoique sa -modestie se soit souvent opposée au désir que nous -avions de l'élever plus tôt dans un rang proportionné à -notre estime et à ses bonnes qualités, néanmoins l'affection -que nous avons pour elle et la justice, ne nous -permettant plus de différer les témoignages de notre -reconnaissance pour un mérite qui nous est connu, ni -de refuser plus longtemps à la nature les effets de notre -tendresse pour Marie-Anne, notre fille naturelle, en la -personne de sa mère...»</p> - -<p>C'est le 2 octobre 1666 que la Vallière accoucha de -cette fille, dite <i>mademoiselle de Blois</i>; et son frère, le -comte de Vermandois, qui fut aussi légitimé, naquit, -jour pour jour, un an après elle. Les trois enfants de -Louis XIV et de madame de Montespan, le duc du -<span class="pagenum"><a id="Page_94"> 94</a></span> -Maine<a id="FNanchor_195" href="#Footnote_195" class="fnanchor"> [195]</a>, le comte de Vexin<a id="FNanchor_196" href="#Footnote_196" class="fnanchor"> [196]</a> et mademoiselle de Nantes<a id="FNanchor_197" href="#Footnote_197" class="fnanchor"> [197]</a>, -furent aussi légitimés. Ils s'élevaient sous l'admirable -tutelle de Françoise d'Aubigné, veuve de Scarron. -Les enfants de madame de la Vallière furent confiés aux -soins de la femme du ministre Colbert. Les enfants de -Montespan étaient trop jeunes à l'époque dont nous traitons -pour être montrés à la cour. Il n'en était pas de -même de ceux de la Vallière; ils étaient charmants, et -Louis XIV se plaisait à les voir développer leurs grâces -enfantines.</p> - -<p>Montespan avait intérêt à nourrir dans le cœur de -Louis XIV cette prédilection pour son illégitime postérité; -et à peine relevée de sa dernière couche, ne pouvant -danser, elle imagina de faire danser des enfants dans les -bals de la cour. Ainsi on vit <span class="smallc">Monsieur</span>, frère du roi, -danser avec mademoiselle de Blois, ayant à peine huit -ans, et le Dauphin avec <span class="smallc">Mademoiselle</span>, sa cousine, -âgée de douze à treize ans<a id="FNanchor_198" href="#Footnote_198" class="fnanchor"> [198]</a>. Ces bals ressemblaient peu -à ceux qui se donnaient dans la jeunesse de Louis XIV, -au temps du règne de la Vallière; mais le roi s'y amusait -et y dansait. Plusieurs des belles femmes de la -cour, craignant l'ennui, sous divers prétextes s'abstenaient -d'y paraître; ce qui ne déplaisait nullement à -madame de Montespan, qui n'avait aucun désir de les -faire briller.</p> - -<p>Dans les lettres de madame de Sévigné à sa fille pendant -<span class="pagenum"><a id="Page_95"> 95</a></span> -le mois de janvier 1674 et avant le départ du roi -pour le siége de Besançon, nous lisons: «Il y a des -comédies à la cour et un bal toutes les semaines. On -manque de danseuses...»</p> - -<p>Et huit jours après:</p> - -<p>«Le bal fut fort triste, et finit à onze heures et demie. -Le roi menait la reine; le Dauphin, <span class="smallc">Madame</span>; le comte -de la Roche-sur-Yon, mademoiselle de Blois, habillée de -velours noir avec des diamants, et un tablier et une bavette -de point de France<a id="FNanchor_199" href="#Footnote_199" class="fnanchor"> [199]</a>.»</p> - -<p>Huit jours après elle écrit encore:</p> - -<p>«Ces bals sont pleins de petits enfants; madame de -Montespan y est négligée, mais placée en perfection; -elle dit que mademoiselle de Rouvroi est déjà trop vieille -pour danser au bal: <span class="smallc">Mademoiselle</span>, mademoiselle de -Blois, les petites de Piennes, mademoiselle de Roquelaure -(un peu trop vieille, elle a quinze ans); mademoiselle -de Blois est un chef-d'œuvre: le roi et tout le monde -en est ravi; elle vint dire au milieu du bal à madame -de Richelieu: Madame, ne sauriez-vous me dire si le roi -est content de moi? Elle passe près de madame de -Montespan, et lui dit: Madame, vous ne regardez pas -aujourd'hui vos amies. Enfin, avec de certaines <i>chosettes</i> -sorties de sa belle bouche, elle enchante par son esprit, -sans qu'on croie qu'on puisse en avoir davantage<a id="FNanchor_200" href="#Footnote_200" class="fnanchor"> [200]</a>.»</p> - -<p>On sait que cette délicieuse enfant fut depuis cette princesse -<span class="pagenum"><a id="Page_96"> 96</a></span> -de Conti célèbre par la majesté de son port et la -beauté de ses traits, celle-là même qui, par la grâce et -la légèreté de sa danse, troublait le sommeil du poëte:</p> - -<p class="quote">L'herbe l'aurait portée, une fleur n'aurait pas<br /> -<span class="i2"> Reçu l'empreinte de ses pas<a id="FNanchor_201" href="#Footnote_201" class="fnanchor"> [201]</a>.</span></p> - -<p>Ainsi les enfants de la Vallière servaient de divertissement -à sa rivale; et Louis, sans en être ému, trouvait -bon qu'une autre que celle qui les avait mis au monde -s'en emparât pour lui procurer de la distraction et le -rendre sensible aux sentiments de la paternité. Montespan, -par ses couches fréquentes, fut conduite à ce calcul; -mais elle eut la douleur de voir qu'une autre en recueillît -les fruits. Le duc du Maine, prince si faible et si -médiocre, mais enfant précoce, fut le préféré de Louis: -loin que sa mère en profitât, il prépara le règne de l'habile -institutrice que Montespan avait appelée près d'elle -pour élever sa royale famille.</p> - -<p>Quant à la Vallière, son cœur était encore trop opprimé -par sa passion pour trouver des consolations -dans les joies maternelles. La vue de ses enfants lui rappelait -au contraire tout ce qu'avaient de cruel l'indifférence -et l'abandon de celui qui les honorait de ses paternelles -tendresses. Elle eut la pensée de se retirer près de son -amie, mademoiselle de la Mothe d'Argencourt<a id="FNanchor_202" href="#Footnote_202" class="fnanchor"> [202]</a>, dans le -couvent de Chaillot, qui eût ainsi réuni deux victimes -d'un même amour. Sa mère l'engageait à prendre ce -parti. Celle-ci calculait que sa fille avait à peine trente -ans, et que sa beauté, ses grandes richesses, son titre de -duchesse qu'elle tenait du roi détermineraient quelque -<span class="pagenum"><a id="Page_97"> 97</a></span> -grand et puissant personnage à demander sa main. Le -bruit courait que le duc de Longueville et Lauzun en -étaient amoureux et désiraient l'épouser. Elle pourrait -donc reparaître dans le monde avec un double avantage, -briller encore à la cour, et éclipser Montespan, qui, -quoique supérieure à elle par la naissance, lui était inférieure -par le rang. Nul doute qu'un mariage honorable -n'eût été pour la Vallière le meilleur parti et le seul qui -pût lui assurer une existence calme et heureuse; mais -pour que ce mariage pût avoir lieu il fallait qu'elle le -voulût et que le roi y donnât son adhésion. La Vallière -fut toujours incapable d'aucun calcul d'intérêt personnel. -Sa passion avait triomphé de sa pudeur; mais son -âme était restée chaste et pure, toujours ouverte aux -aspirations de la piété et du repentir, et elle eût considéré -comme une honte de s'unir à un autre homme -que l'unique auquel son honneur avait été sacrifié. -Louis XIV était incapable de faire souffrir à celle qu'il -avait tant aimée le moindre des outrages dont on l'a accusé; -mais, sans désirer que la Vallière restât à sa cour, -il craignait, en la laissant s'éloigner, de lui accorder -trop de liberté. Il l'empêchait de voir sa mère, qu'il n'estimait -pas et dont il se défiait; et il favorisait indirectement -ses longs entretiens avec le maréchal de Bellefonds, bien -connu pour sa pieuse ferveur et par son étroite liaison -avec Bossuet. Bellefonds soutint la Vallière dans la résolution -qu'elle voulait prendre de s'éloigner de Louis XIV, -de ne plus le revoir, de diriger vers Dieu toutes ses pensées, -toutes ses affections. Il fallait, pour exécuter cette -courageuse résolution, le consentement de Louis XIV, -auquel elle n'était pas libre de désobéir, auquel elle n'aurait -pas voulu refuser de se soumettre lors même qu'elle -<span class="pagenum"><a id="Page_98"> 98</a></span> -en eût eu le pouvoir. Elle pensa d'abord à se retirer au -couvent des Capucines. Mais le maréchal de Bellefonds -avait une sœur qui était prieure des Carmélites de Paris. La -Vallière la rendit confidente de ses peines, et celle-ci parvint -à lui persuader que plus grande serait son expiation, -plus grandes seraient la grâce de Dieu et ses espérances de -salut. Fortement préoccupée de cette pensée, la Vallière -eut l'idée de se faire carmélite. C'était là une rude et -difficile détermination à prendre. L'austérité des règles -prescrites par sainte Thérèse faisait pâlir d'effroi la piété -la plus fervente; et pour celle dont la vie s'était écoulée -dans les délices du luxe et de la mollesse, au milieu des -pompes et des orgueilleuses jouissances de la grandeur, -se faire carmélite, c'était s'immoler vivante dans un -tombeau, comme une vestale criminelle des temps antiques, -sans espérance de trouver comme elle, par la mort, -une prompte fin à son supplice.</p> - -<p>Aussi la Vallière hésitait-elle beaucoup. A mesure que -la religion s'emparait de sa pensée, le repentir même de -ses fautes ravivait dans son cœur ses souvenirs d'amour, -et sa tendresse pour ses enfants renaissait avec plus de -force. Elle regrettait surtout de se séparer de sa charmante -fille, mademoiselle de Blois<a id="FNanchor_203" href="#Footnote_203" class="fnanchor"> [203]</a>. Cependant de nombreuses -conférences avec Bossuet, avec le P. Bourdaloue, -le P. Cazan et avec de Rancé, abbé de la -Trappe<a id="FNanchor_204" href="#Footnote_204" class="fnanchor"> [204]</a>, achevèrent de l'affermir dans sa résolution. -<span class="pagenum"><a id="Page_99"> 99</a></span> -Mais elle voulait que cette résolution fût inébranlable, et -la peur qu'elle avait d'en être détournée par le roi lui -faisait craindre de lui en parler.</p> - -<p>Elle pria Bossuet de traiter d'abord de cette affaire avec -madame de Montespan; celle-ci, effrayée d'un si étrange -projet, le combattit, et tâcha même de le rendre impossible -en le tournant en ridicule. Montespan voyait sa rivale, -par cette immolation, devenir un objet d'admiration -et de pitié; et, ce qui la touchait plus fortement, elle -pressentait que le blâme d'avoir permis un si cruel sacrifice -rejaillirait sur elle, et ferait ressortir plus fortement -le scandale qu'elle donnait au monde. L'austère prélat -insista; et tel était alors l'empire de la religion, même -sur les rois les plus absolus, que Louis XIV, quoiqu'il -en eût le désir, n'osa pas s'opposer à Bossuet et l'empêcher -de continuer son œuvre<a id="FNanchor_205" href="#Footnote_205" class="fnanchor"> [205]</a>. Madame de la Vallière, -pour transporter à Dieu cette sensibilité qui débordait, -évita tout ce qui pouvait rappeler en elle le désir de -plaire au roi; elle eut soin de se vêtir avec plus de -simplicité et de modestie; elle rechercha les occasions -d'humiliation que faisait naître le triomphe de sa -rivale. Celle-ci, aigrie par la jalousie, les saisissait -avec un empressement qu'elle croyait cruel; mais elle -se trompait, la Vallière lui savait gré de ses rigueurs. -Elle s'exerçait à souffrir. Elle répondait à Montespan -avec douceur; elle la parait de ses propres mains. -Quand la Vallière reconnut que Montespan ne lui inspirait -<span class="pagenum"><a id="Page_100"> 100</a></span> -plus aucun mouvement de jalousie, quand elle -sentit qu'elle lui faisait éprouver un sentiment de bienveillance -et de compassion, elle cessa de désespérer -de sa force. Elle se sentit suffisamment transformée pour -exécuter son effrayante résolution. Elle aimait encore -Louis plus qu'elle-même; mais cet amour était bien faible -en comparaison de celui dont elle se sentait embrasée -pour Jésus-Christ. Ce fut alors que, pour effacer les vains -fantômes de sa vie passée et pour s'affermir dans -cet état de volupté divine dont elle était redevable à la -grâce, elle écrivit ces <i>Réflexions sur la miséricorde de -Dieu</i> dont on lui a dérobé longtemps après le manuscrit -pour le publier<a id="FNanchor_206" href="#Footnote_206" class="fnanchor"> [206]</a>. Cet ouvrage n'est qu'une continuelle -prière pour demander à Dieu le don de la prière. -Elle trouva dans ses aspirations religieuses un calme -si grand, un tel désir d'une autre existence qu'il devint -évident pour ceux qui la voyaient que Louis XIV -lui-même n'aurait pu, par les plus tendres protestations, -la ramener à lui. Sa tranquille joie augmentait à -mesure que le temps approchait où elle devait se renfermer. -Bossuet, accoutumé à ces retours de l'âme, dont -il était un si grand et si heureux artisan, en fut cependant -<span class="pagenum"><a id="Page_101"> 101</a></span> -étonné; et il écrivit au maréchal de Bellefonds: -«C'est la force et l'humilité qui accompagnent toutes ses -pensées. Elle ne respire plus que la pénitence; et, sans -être effrayée de l'austérité de la vie qu'elle est prête à -embrasser, elle en regarde la fin avec une consolation -qui ne lui permet pas d'en craindre la peine. Cela me -ravit et me confond: je parle, et elle fait; j'ai les discours, -elle a les œuvres. Quand je considère ces choses, -j'entre dans le désir de me taire et de me cacher; et je -ne prononce pas un seul mot où je ne croie prononcer -ma condamnation<a id="FNanchor_207" href="#Footnote_207" class="fnanchor"> [207]</a>.» Dans la chambre même de la -duchesse de la Vallière, Bossuet écrit encore: «C'est -s'abîmer dans la mort que de se chercher soi-même. -Sortir de soi-même pour aller à Dieu, c'est la vie.» -Cette seule phrase peut nous faire juger avec quelle -énergique éloquence le prélat encourageait la Vallière -à persister dans sa pieuse résolution.</p> - -<p>«J'étais curieuse de savoir (écrivait madame la duchesse -d'Orléans) pourquoi elle était restée si longtemps -comme une suivante chez la Montespan. Elle me -dit que Dieu avait touché son cœur; qu'il lui avait fait -connaître son péché, et qu'elle avait pensé qu'il fallait -en faire pénitence et souffrir, par conséquent, ce qui -lui serait le plus douloureux... Et puisque son péché -avait été public, il fallait que sa pénitence le fût aussi... -Elle avait offert à Dieu toutes ses douleurs, et Dieu lui -avait inspiré la résolution de ne servir que lui; mais -qu'elle se regardait comme indigne de vivre auprès d'âmes -<span class="pagenum"><a id="Page_102"> 102</a></span> -aussi pures que l'étaient les autres carmélites. On voyait -que cela partait du cœur<a id="FNanchor_208" href="#Footnote_208" class="fnanchor"> [208]</a>.»</p> - -<p>On ne la jugea pas d'abord ainsi à la cour et dans le -monde; ce monde croit difficilement aux sublimes efforts -de la vertu religieuse. Mademoiselle de la Vallière -était moins aimée que madame de Montespan, parce -que, nulle pour tout autre que pour son amant, préoccupée -de la pensée qu'elle avait perdu ses droits à la -considération, elle était mal à l'aise avec les autres -femmes. Étrangère aux intrigues, à l'ambition, elle n'avait -et ne voulait exercer aucun empire sur Louis XIV<a id="FNanchor_209" href="#Footnote_209" class="fnanchor"> [209]</a>; -elle ne se rendait utile à personne; bonne, modeste, -douce et tendre, sans aucun défaut, mais sans éminentes -qualités. Aimer et être aimée, c'était sa vie. Une influence -assez grande sur son amant pour verser des bienfaits, -pour conférer la puissance ou les richesses pouvait -seule relever cette femme de l'abaissement où elle -s'était placée par ses faiblesses, même avec un roi.</p> - -<p>La religion, en précipitant la Vallière au pied des autels, -la releva de cet abaissement. Mais on ajouta d'abord -peu de foi, sinon à la sincérité, du moins à la durée de son -repentir. Son prompt retour après sa retraite de Chaillot -devait faire croire que cette retraite avait été un stratagème -de l'amour; et on eut la même opinion quand le -bruit se répandit qu'elle songeait à se retirer de la cour. -Ce bruit fut ensuite démenti, et la duchesse de la Vallière -fut l'objet des railleries de toutes les femmes, même de -<span class="pagenum"><a id="Page_103"> 103</a></span> -madame de Sévigné, qui (le 15 décembre 1673) écrivait -à madame de Grignan: «Madame de la Vallière ne parle -plus d'aucune retraite; c'est assez de l'avoir dit. Sa -femme de chambre s'est jetée à ses pieds pour l'en empêcher. -Peut-on résister à cela<a id="FNanchor_210" href="#Footnote_210" class="fnanchor"> [210]</a>?»</p> - -<p>Madame de Sévigné jugeait en femme vulgaire une -femme qui ne l'était plus. La religion l'avait régénérée; -elle lui avait donné une élévation, une énergie de caractère, -une prévoyance pour l'avenir, une vigueur de -pensée étrangère jusqu'alors à cette âme indolente et -faible. La Vallière ne restait à la cour que pour régler, -par l'entremise de Colbert, ce qui concernait la fortune -de ses enfants. Par le canal de madame de Montespan, -elle obtint encore du roi, auquel elle ne voulait rien demander, -que la marquise de la Vallière, sa belle-sœur<a id="FNanchor_211" href="#Footnote_211" class="fnanchor"> [211]</a>, -fût mise dans le nombre des nouvelles dames d'honneur -de la reine qu'on avait ajoutées aux anciennes<a id="FNanchor_212" href="#Footnote_212" class="fnanchor"> [212]</a>.</p> - -<p>La veille de son départ de la cour, la Vallière soupa -chez madame de Montespan, où mademoiselle de Montpensier -alla lui faire ses adieux; et le lendemain, vendredi -20 avril (1674), elle entendit la messe du roi. -Louis XIV partit aussitôt après pour se rendre en Franche-Comté -assiéger Besançon, et madame de la Vallière -<span class="pagenum"><a id="Page_104"> 104</a></span> -monta en carrosse, et alla, vis-à-vis le Val-de-Grâce, -se renfermer au couvent des grandes Carmélites -du faubourg Saint-Jacques<a id="FNanchor_213" href="#Footnote_213" class="fnanchor"> [213]</a>.</p> - -<p>De quelle admiration durent être saisies toutes ces -austères religieuses, tout habituées qu'elles étaient aux -prodiges de la grâce divine et aux miracles du repentir, -lorsqu'elles virent entrer dans leur cloître cette belle -femme, disant à la mère Claire du Saint-Sacrement, -leur prieure: «Ma mère, j'ai fait toute ma vie un si -mauvais usage de ma volonté que je viens la remettre -entre vos mains, pour ne la plus reprendre!» Jusqu'à -sa mort et pendant trente-six ans elle n'eut pas un -seul instant la pensée de cesser d'être fidèle à cet engagement<a id="FNanchor_214" href="#Footnote_214" class="fnanchor"> [214]</a>.</p> - -<p>Cet acte solennel ne persuada pas encore madame de -Sévigné; elle eut de la peine à croire à l'entière conversion -de celle qui cependant, au milieu de sa plus grande -fortune et de sa plus haute élévation, avait voulu que -Mignard la peignît au milieu de ses deux enfants, tenant -un chalumeau à la main, où pendait une bulle de savon -autour de laquelle on lisait écrit: <i>Sic transit gloria -mundi</i>: «Ainsi passe la gloire du monde<a id="FNanchor_215" href="#Footnote_215" class="fnanchor"> [215]</a>.»</p> - -<p>Madame de Sévigné, huit jours après l'entrée de madame -de la Vallière aux Carmélites, écrit au comte de -Guitaud, alors gouverneur des îles Sainte-Marguerite:</p> - -<p>«Je veux parler de madame la duchesse de la Vallière. -La pauvre personne a tiré la lie de tout; elle n'a pas -<span class="pagenum"><a id="Page_105"> 105</a></span> -voulu perdre un adieu ni une larme. Elle est aux Carmélites, -où, huit jours durant, elle a vu ses enfants et -toute la cour (c'est-à-dire ce qui en reste<a id="FNanchor_216" href="#Footnote_216" class="fnanchor"> [216]</a>). Elle a fait -couper ses cheveux, mais elle a gardé deux belles boucles -sur le front. Elle caquète et dit merveilles. Elle assure -qu'elle est ravie d'être dans une solitude; elle croit -être dans un désert, pendue à cette grille. Elle nous fait -souvenir de ce que nous disait, il y a bien longtemps -madame de la Fayette après avoir été deux jours à -Ruel, que, pour elle, elle s'accommoderait bien de la -campagne<a id="FNanchor_217" href="#Footnote_217" class="fnanchor"> [217]</a>.»</p> - -<p>Six semaines après, le troisième dimanche de la Pentecôte -(le 3 juin), la Vallière revêtit l'habit des carmélites, -et quitta, ayant à peine trente ans, son nom -et ses titres pour prendre celui de <i>sœur Louise de la -Miséricorde</i>. Cette cérémonie de la vêture attira un auditoire -nombreux au discours que prononça dans cette -occasion l'évêque d'Aire<a id="FNanchor_218" href="#Footnote_218" class="fnanchor"> [218]</a>. Nous ignorons si madame de -Sévigné revint de Livry, où elle était au commencement -de juin, pour assister à cette cérémonie; mais nous savons -qu'elle n'assista pas à la cérémonie plus auguste -qui eut lieu l'année suivante, le mardi (4 juin 1675) de -la Pentecôte, lorsque la Vallière, ayant terminé son noviciat, -<span class="pagenum"><a id="Page_106"> 106</a></span> -prononça ses vœux, reçut le voile noir des mains -de la reine, et dit au monde un éternel adieu. Madame de -Sévigné exprima ainsi à sa fille les regrets qu'elle éprouvait -de ne s'être point trouvée ce jour-là aux Carmélites -avec la reine, <span class="smallc">Mademoiselle</span>, mademoiselle d'Orléans, -la duchesse de Longueville, la duchesse de Guise et -beaucoup d'autres princesses et dames, dit <i>la Gazette</i><a id="FNanchor_219" href="#Footnote_219" class="fnanchor"> [219]</a>:</p> - -<p>«La duchesse de la Vallière fit hier profession. Madame -de Villars m'avait promis de m'y mener, et, par -un malentendu, nous crûmes n'avoir point de places. -Il n'y avait qu'à se présenter, quoique la reine eût -dit qu'elle ne voulait pas que la permission fût étendue. -Tant y a que Dieu ne le voulut pas. Madame de Villars -en a été affligée. Elle fit donc cette action, cette -belle et courageuse personne, comme toutes les autres -de sa vie, d'une manière noble et charmante. Elle était -d'une beauté qui surprit tout le monde; mais ce qui -vous étonnera, c'est que le sermon de M. de Condom -(Bossuet) ne fut pas aussi divin qu'on l'espérait<a id="FNanchor_220" href="#Footnote_220" class="fnanchor"> [220]</a>.»</p> - -<p>Le jugement que porte madame de Sévigné de ce discours -paraîtra exact à ceux qui ne le liront pas avec les -favorables préventions de l'historien du grand prélat<a id="FNanchor_221" href="#Footnote_221" class="fnanchor"> [221]</a>, -qui en a jugé différemment. Cette action de la Vallière -<span class="pagenum"><a id="Page_107"> 107</a></span> -était plus sublime que la plus sublime éloquence. «Au -moment où on la mit sous le drap mortuaire (dit la duchesse -d'Orléans), je versai tant de larmes que je ne -pus me laisser voir davantage. Après la cérémonie elle -vint me trouver pour me consoler, et elle me dit qu'il -fallait plutôt la féliciter que la plaindre, puisque son -bonheur commençait dès ce moment<a id="FNanchor_222" href="#Footnote_222" class="fnanchor"> [222]</a>.»</p> - -<p>Cinq ans après, madame de Sévigné revit encore madame -de la Vallière; et sa correspondance nous prouve -que toujours elle conserva pour elle les généreux sentiments -qu'elle a manifestés dans les dernières lettres que -nous avons citées.</p> - -<p>Le 5 janvier 1680 elle écrit à sa fille<a id="FNanchor_223" href="#Footnote_223" class="fnanchor"> [223]</a>:</p> - -<p>«Je fus hier aux grandes Carmélites avec <span class="smallc">Mademoiselle</span> -(mademoiselle de Montpensier), qui eut la bonne -pensée de mander à madame de Lesdiguières de me mener. -Nous entrâmes dans ce saint lieu. Je fus ravie de -l'esprit de la mère Agnès (Gigault de Bellefonds, sœur -du maréchal); elle me parla de vous comme vous connaissant -par sa sœur (la marquise de Villars). Je vis -madame Stuart, belle et contente. Je vis mademoiselle -d'Épernon (elle s'était faite carmélite par la douleur que -lui causa la mort du chevalier de Fiesque en 1648), qui -ne me trouva pas défigurée; il y avait plus de trente ans -que nous ne nous étions vues..... Mais quel ange m'apparut -<span class="pagenum"><a id="Page_108"> 108</a></span> -à la fin! car M. le prince de Conti (le gendre de la -Vallière) la tenait au parloir. Ce fut, à mes yeux, tous -les charmes que nous avons vus autrefois; je ne la trouvai -ni bouffie ni jaune; elle est moins maigre et plus -contente; elle a ses mêmes yeux et ses mêmes regards; -l'austérité, la mauvaise nourriture et le peu de sommeil -ne les lui ont ni creusés ni battus; cet habit si étrange -n'ôte rien à la bonne grâce ni au bon air. Pour sa modestie, -elle n'est pas plus grande que quand elle donnait -au monde une princesse de Conti; mais c'est assez pour -une carmélite. Elle me dit mille honnêtetés, me parla de -vous si bien, si à propos; tout ce qu'elle dit était si assorti -à sa personne que je ne crois pas qu'il y ait rien de -mieux. M. de Conti l'aime et l'honore tendrement; elle -est son directeur; ce prince est dévot et le sera comme -son père. En vérité, cet habit et cette retraite sont une -grande dignité pour elle.»</p> - -<p>Et plus tard madame de Sévigné oppose à l'orgueil -des autres maîtresses de Louis XIV le souvenir de cette -«petite violette qui se cachait sous l'herbe, honteuse -d'être maîtresse, d'être mère, d'être duchesse<a id="FNanchor_224" href="#Footnote_224" class="fnanchor"> [224]</a>.» C'est -encore madame de Sévigné qui, en annonçant à sa fille la -mort du frère de madame de la Vallière (gouverneur et -grand sénéchal de la province du Bourbonnais), nous -fait connaître l'admiration et les regrets peut-être (les -passions sont si capricieuses et produisent sur les volontés -humaines des effets si bizarres!) que fit éprouver à -Louis XIV ce grand triomphe, dans la Vallière, de la -religion sur l'amour.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_109"> 109</a></span> -«M. de la Vallière est mort... Sœur Louise de la Miséricorde -fit supplier le roi de conserver le gouvernement -pour acquitter les dettes, sans faire mention de -ses neveux. Le roi lui a donc donné ce gouvernement, -et lui a mandé que, s'il était assez homme de bien pour -voir une carmélite aussi sainte qu'elle, il irait lui dire -lui-même la part qu'il prend de la perte qu'elle a -faite<a id="FNanchor_225" href="#Footnote_225" class="fnanchor"> [225]</a>.»</p> - -<p>Louis XIV était sincère: la pensée du salut, qui devait -bientôt le préoccuper assez fortement pour mettre un -terme à la licence de ses mœurs, lui faisait mieux comprendre -qu'à tous ceux qui l'entouraient ce que pouvait -sur le cœur de la Vallière la passion pour Dieu. Il savait, -lui, le grand coupable, que, pour avoir la plus forte -part aux prières de cette vraie religieuse, il devait respecter -l'enceinte où elle s'était retirée. Madame de Montespan -était aussi tourmentée; mais alors, dans l'enivrement -de la faveur, elle ne pouvait avoir cette même -délicatesse de sentiment, et elle crut se montrer généreuse -en accompagnant plusieurs fois la reine, dont elle -était une dame d'honneur, dans ses visites aux grandes -Carmélites. Madame de Montespan, par des questions indiscrètes -et par l'offre plus indiscrète encore de ses services, -s'attira une réponse courte, froide et digne de -madame de la Vallière; réponse faite, dit madame de -Sévigné, d'un air tout aimable et avec toute la grâce, -l'esprit et la modestie imaginables<a id="FNanchor_226" href="#Footnote_226" class="fnanchor"> [226]</a>.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_110"> 110</a></span> -Peu d'années après, Montespan, retirée de la cour, -mais non du monde, et, dans le monde, tourmentée du -désir de faire son salut, apprécia mieux Louise de la Miséricorde; -elle en fit son amie, sa consolatrice et enfin -le directeur de sa conscience<a id="FNanchor_227" href="#Footnote_227" class="fnanchor"> [227]</a>.</p> - -<p>La Vallière occupe plus de place dans la vie de -Louis XIV par son repentir que par son amour. Cette -belle victime, offerte à Dieu en expiation des désordres -de ce roi, fit sur lui une impression profonde, que ni les -autres maîtresses ni les distractions de la guerre ou de la -politique ne purent effacer. La Vallière ne fut jamais -plus présente à la pensée de Louis XIV que depuis qu'elle -eut abandonné sa cour; jamais elle ne lui apparut sous -des traits plus divins que lorsqu'il se fut interdit sa vue. -Il saisissait avec joie les occasions de lui continuer ses -bienfaits dans ses parents, dans ses enfants. Aux occasions -solennelles de mort ou de mariage il était satisfait -d'apprendre que la reine et toute la cour donnaient à la -Vallière des témoignages d'intérêt et de vénération<a id="FNanchor_228" href="#Footnote_228" class="fnanchor"> [228]</a>. -C'est dans son cloître, au pied des autels, que la Vallière -a préparé, à son insu, la chute de Montespan et le -long règne de Maintenon.</p> - -<p>Si Louis XIV, par sa conduite réservée envers Louise -de la Miséricorde, a été taxé d'ingratitude et d'oubli, -c'est que le monde ne connaît d'autre passion que celle -qu'inspirent les enchantements de la volupté, de l'esprit -<span class="pagenum"><a id="Page_111"> 111</a></span> -ou des talents, et qu'il ignore la force d'un attachement -où l'âme et le cœur ont la principale part. -Louis XIV y était sensible. On sait qu'en voyant la veuve -de Scarron amaigrie par la douleur d'avoir perdu l'aîné -des enfants de Montespan, confié à ses soins et âgé de -trois ans, il avait dit: «Elle sait bien aimer; il y aurait -du plaisir à être aimé d'elle<a id="FNanchor_229" href="#Footnote_229" class="fnanchor"> [229]</a>.» Et cependant, à cette -époque, cette femme lui déplaisait souverainement, parce -qu'elle plaisait trop à sa maîtresse.</p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_112"> 112</a></span></p> -<h2 class="normal">CHAPITRE VI.<br /> -<span class="medium">1674-1675.</span></h2> -</div> - -<p class="hanging indent">Le parti religieux et le parti mondain se disputent l'influence sur -Louis XIV.—Réforme dans la maison de la reine.—Les filles -d'honneur sont remplacées par les dames du palais.—Effets de -cette mesure.—Scrupules religieux de madame de Sévigné.—Sa -visite à Port-Royal des Champs.—Son admiration pour le -P. Bourdaloue.—Mort du grand Condé.—Bourdaloue console le -duc de Gramont après la mort du comte de Guiche.—Madame de -Sévigné détrompe sa fille, qui croit que l'on peut être à la cour -longtemps triste.—Changement dans les spectacles de la cour.—Pour -quelle raison <i>le Malade imaginaire</i> ne fut pas joué à la cour.—Molière -et Lulli étaient rivaux.—Après la mort de Molière, -Louis XIV charge Colbert de réorganiser les spectacles de Paris.—L'Opéra -devient le spectacle dominant.—Alliance de Quinault et -de Lulli.—On répète chez madame de Montespan l'opéra d'<i>Alceste</i>.—La -Rochefoucauld est appelé à ces représentations.—Éloge que -fait de cet ouvrage madame de Sévigné.—Le chœur des suivants de -Pluton cité.—L'impulsion donnée à l'Opéra ne profite qu'à la musique -instrumentale.—L'Italie reste supérieure à la France pour tout -le reste.—Madame de Sévigné va à un opéra.—Des musiciens.—Molière -chez Pelissari.—Des sociétés de Paris à cette époque.—Madame -Pelissari réunit chez elle les littérateurs médiocres.—Composition -de l'Académie française.—Madame de Sévigné annonce -à sa fille la mort prochaine de Chapelain.—Cause de son -peu de sympathie pour cet ancien maître de son enfance.—Elle -devient l'admiratrice de Boileau.—Elle entend la lecture de son -<i>Art poétique</i> chez Gourville et chez M. de Pomponne.—Ce -poëme est livré à l'impression.—L'auteur y intercale, au moment -de la publication, quatre vers pour célébrer la seconde conquête -de la Franche-Comté.—Ces quatre vers nuisent à ceux qui les -suivent, auparavant composés.</p> - -<p class="space">Il y avait à la cour deux partis qui se disputaient l'influence -sur le roi. L'un, composé de tous les courtisans -<span class="pagenum"><a id="Page_113"> 113</a></span> -dévoués qui avaient part à ses largesses, de ceux qui -désiraient obtenir à tout prix des grades, des commandements -militaires, des gouvernements, de grandes -charges, des intendances, des ambassades, des emplois -lucratifs, des distinctions honorifiques: ceux-là pensaient -que Louis XIV devait continuer le cours de ses conquêtes; -que ses maîtresses, le faste de ses palais, de ses fêtes, -de sa maison étaient des démonstrations obligées de sa -grandeur et des manifestations nécessaires de sa puissance. -Louvois et Montespan étaient les appuis naturels -de ce parti. Le parti contraire aurait voulu que Louis XIV -renonçât à ses maîtresses; qu'il épargnât à ses sujets le -scandale de ses amours avec une femme mariée; qu'il -restreignît ses dépenses et mît un terme à son ambition -et qu'il n'excitât pas la haine des souverains et de toute -l'Europe contre lui et contre la France. Dans ce parti -étaient tous ceux qui voyaient le bien public dans le règne -de la religion et des mœurs. Colbert, homme réglé dans -sa conduite, pensait ainsi; mais il ne pouvait avoir sur -son parti la même influence que Louvois sur le sien<a id="FNanchor_230" href="#Footnote_230" class="fnanchor"> [230]</a>. -Chargé de l'administration des finances, il était obligé -de mettre sans cesse de nouveaux impôts pour suffire à -des dépenses qui s'accroissaient sans cesse; il ne le pouvait -qu'en appesantissant de plus en plus le joug du -despotisme sur les parlements, les assemblées des états, -les magistrats municipaux, les membres de toutes les -corporations qui jouissaient de quelque liberté, tous partisans -de la paix et d'une sage réforme. La confiance -<span class="pagenum"><a id="Page_114"> 114</a></span> -que Louis XIV avait en Colbert comme habile administrateur -était encore un obstacle qui lui faisait perdre -tout crédit sur les hommes les plus honorables. Louis XIV -ne lui imposait pas seulement le devoir de régler les -finances de l'État, d'organiser la marine, le commerce; -il ne se fiait qu'à lui pour ses dépenses privées, et il le -chargeait du détail de celles qui concernaient ses maîtresses. -Il n'oublia jamais que Colbert avait été sous -Mazarin un excellent intendant; il s'en servait toujours -comme tel, et rendait ce grand ministre complice -des désordres que celui-ci aurait voulu empêcher. Plus -que Louvois, et avec juste raison, Colbert excitait l'envie. -Il est vrai qu'en travaillant sans cesse au bien de -l'État il travaillait aussi à l'accroissement de sa fortune -et à l'élévation de sa famille. Dans le clergé, dans la diplomatie -et dans la marine les Colbert occupaient les -principaux emplois, étaient revêtus des plus hautes dignités. -Ne pouvant restreindre le roi dans son penchant -à la profusion, Colbert en profitait pour son compte. Il -laissa à sa mort douze millions, qui font vingt-quatre -millions de notre monnaie actuelle. Cette fortune n'était -pas, comme celle de Fouquet, le fruit de coupables manœuvres; -mais, en définitive, c'était le trésor et les impôts -sur les peuples, ruinés par la guerre, qui subvenaient -aux générosités du monarque et à celles des provinces et -des villes en faveur des ministres, de leurs parents et de -leurs amis. Cependant ce parti, qui était véritablement -celui des bonnes mœurs et le plus favorable aux intérêts -du roi et du pays, ne manquait pas de soutiens à la -cour: la religion lui en créait, pleins d'activité et de -zèle. Parmi eux on comptait le duc de Beauvilliers et -le maréchal de Bellefonds, Pomponne et beaucoup d'autres; -<span class="pagenum"><a id="Page_115"> 115</a></span> -enfin, il avait dans Bossuet et dans Bourdaloue -deux apôtres sublimes.</p> - -<p>Tous fondaient leur espoir sur l'auguste empire de la -religion, qui parvient toujours à faire entendre sa voix -puissante quand les passions sont apaisées. La foi était -vivante dans l'âme de madame de Montespan comme -dans celle de Louis XIV, et elle se manifestait dans tous -les deux par leur exactitude à s'assujettir aux pratiques -religieuses que l'Église prescrit.</p> - -<p>Ce parti considéra avec raison comme un premier succès -la religieuse retraite de la Vallière, et comme un second -le renvoi des filles d'honneur. Quel qu'ait été le motif -qui fit agir Montespan, il est certain que ce fut elle qui -eut la principale part à cette réforme, qu'elle la désira -et la voulut avec toutes ses conséquences. Madame de -Sévigné, en donnant à madame de Grignan des détails -sur l'intérieur de <i>Quantova</i> (c'est le nom chiffré par lequel -elle désigne madame de Montespan), dit: «Il est -très-sûr qu'en certain lieu on ne veut séparer aucune -femme de son mari ni de ses devoirs; on n'aime pas le -bruit, à moins qu'on ne le fasse<a id="FNanchor_231" href="#Footnote_231" class="fnanchor"> [231]</a>.»</p> - -<p>On avait pensé à madame de Grignan pour être dame -du palais; mais sans doute que madame de Montespan -la trouva trop jeune et trop belle<a id="FNanchor_232" href="#Footnote_232" class="fnanchor"> [232]</a>.</p> - -<p>Madame de Grignan dut peu regretter de n'avoir pas -été nommée. Avec les filles d'honneur disparurent les -joies et la gaieté de cette cour brillante: toute liberté en -fut bannie; le service pénible et l'étiquette sévère auxquels -les dames du palais furent assujetties firent souffrir -<span class="pagenum"><a id="Page_116"> 116</a></span> -celles qui avaient brigué avec ardeur ces charges -lucratives et honorifiques. La contrainte et l'ennui s'appesantirent -jusque sur les bals et les divertissements que -le roi donnait fréquemment<a id="FNanchor_233" href="#Footnote_233" class="fnanchor"> [233]</a>.</p> - -<p>Cependant cette réforme eut un très-heureux effet sur -les mœurs; madame de Sévigné elle-même, qui plaisante -sur les femmes devenues subitement dévotes, fut -alors plus fortement tourmentée par les scrupules que -lui causait souvent son amour excessif pour sa fille; elle -trouva très-bien que l'animosité que celle-ci lui avait -inspirée contre l'évêque de Marseille lui eût attiré un -refus d'absolution. Elle dit à madame de Grignan: «Ce -confesseur est un fort habile homme; et si les vôtres ne -vous traitent pas de même, ce sont des ignorants, qui -ne savent pas leur métier<a id="FNanchor_234" href="#Footnote_234" class="fnanchor"> [234]</a>.»</p> - -<p>On voit par là que madame de Sévigné avait lu le -traité du grand Arnauld sur la <i>fréquente communion</i>. -Dans la lettre où elle dit à sa fille que d'Hacqueville ne -voudrait pas des douceurs d'un attachement tel que celui -qu'elle a pour elle, parce qu'il est mêlé de trop d'inquiétude -et de tourments, elle ajoute: «D'Hacqueville -a raison de ne vouloir rien de pareil; pour moi, je m'en -trouve fort bien, pourvu que Dieu me fasse la grâce de -l'aimer encore plus que vous: voilà ce dont il est question. -Cette petite circonstance d'un cœur que l'on ôte au -Créateur pour le donner à la créature me donne quelquefois -de grandes agitations. La <i>Pluie</i> (M. de Pomponne) -<span class="pagenum"><a id="Page_117"> 117</a></span> -et moi nous en parlions l'autre jour très-sérieusement. -Mon Dieu, qu'elle est à mon goût cette <i>pluie</i>! Je crois -que je suis au sien; nous retrouvons avec plaisir nos anciennes -liaisons<a id="FNanchor_235" href="#Footnote_235" class="fnanchor"> [235]</a>.» On ne peut douter que madame de -Sévigné, lorsqu'elle écrivait cette lettre, n'eût alors la -mémoire toute fraîche de l'admirable petit traité de saint -Eucher sur le <i>mépris du monde</i>, dont son ami Arnauld -d'Andilly venait de publier une traduction<a id="FNanchor_236" href="#Footnote_236" class="fnanchor"> [236]</a>, puisqu'elle -reproduit une pensée d'Eucher en se servant des mêmes -expressions.</p> - -<p>Quand ses scrupules la préoccupent, elle se rapproche -de ses anciens amis les jansénistes, surtout d'Arnauld -d'Andilly; et alors les rigueurs de l'hiver ne peuvent -l'arrêter. Ce fut un 23 janvier (1674) qu'elle alla voir -pour la première fois Port-Royal des Champs; et elle -écrit à sa fille: «Je revins hier du Mesnil (de chez -madame Habert de Montmor), où j'étais allée pour voir -le lendemain M. d'Andilly. Je fus six heures avec lui; -j'eus toute la joie que peut donner la conversation d'un -homme admirable; je vis aussi mon oncle Sévigné, mais -un moment. Ce Port-Royal est une Thébaïde; c'est un -paradis; c'est un désert où toute la dévotion du christianisme -s'est rangée; c'est une sainteté répandue dans -tout le pays, à une lieue à la ronde. Il y a cinq ou six -<span class="pagenum"><a id="Page_118"> 118</a></span> -solitaires qu'on ne connaît point, qui vivent comme les -pénitents de saint Jean-Climaque. Les religieuses sont -des anges sur terre. Mademoiselle de Vertus y achève -sa vie. Je vous avoue que j'ai été ravie de voir cette -divine solitude, dont j'ai tant ouï parler: c'est un vallon -affreux, tout propre à inspirer le goût de faire son salut. -Je revins coucher au Mesnil, et hier ici (Paris), après -avoir embrassé M. d'Andilly en passant. Je crois que -je dînerai demain chez M. de Pomponne; ce ne sera -pas sans parler de son père (Arnauld d'Andilly) et de -ma fille. Voilà deux chapitres qui nous tiennent au -cœur<a id="FNanchor_237" href="#Footnote_237" class="fnanchor"> [237]</a>.»</p> - -<p>Le penchant de madame de Sévigné pour ses amis les -jansénistes ne diminuait en rien son admiration pour le -jésuite Bourdaloue. Elle dit: «Le P. Bourdaloue fit un -sermon le jour de Notre-Dame<a id="FNanchor_238" href="#Footnote_238" class="fnanchor"> [238]</a> qui transporta tout le -monde; il était d'une force à faire trembler les courtisans, -et jamais prédicateur évangélique n'a prêché si hautement -ni si généreusement les vérités chrétiennes<a id="FNanchor_239" href="#Footnote_239" class="fnanchor"> [239]</a>.»</p> - -<p>On connaît ce mot du grand Condé, qui, à l'église, -lorsque le P. Bourdaloue montait en chaire, appuyant -une main sur l'épaule de la duchesse de Longueville assoupie -et de l'autre lui montrant la chaire, lui disait: -«Ma sœur, réveillez-vous; voilà l'ennemi!»</p> - -<p>Mais c'est lorsque madame de Sévigné peint le père -<span class="pagenum"><a id="Page_119"> 119</a></span> -Bourdaloue consolant le vieux maréchal de Gramont de -la perte de son fils aîné, l'espoir de sa race, qu'elle nous -montre toute l'influence de ce prédicateur sur les grands -de cette époque. Elle trace de cette scène un admirable -tableau. Guiche, qui fut exilé pour ses amours avec l'aimable -Henriette et pour son intrigue avec Vardes contre -la Vallière, n'était point généralement aimé. Madame -de Sévigné, qui lui plaisait beaucoup par son esprit, -trouvait le sien guindé, ceinturé comme sa personne. -Cependant sa mort fit une sensation profonde. On comprit -qu'en lui disparaissait l'homme de la cour le plus -beau, le plus brillant, le plus chevaleresque, le plus instruit; -le comte de Guiche aurait eu toutes les qualités qui -font le héros s'il n'avait eu les défauts qui empêchent -de le devenir: la vanité et la présomption. Ce fut lui -qui, en s'élançant le premier dans le courant rapide du -Rhin, assura le passage de ce fleuve. Louis XIV, témoin -de son courage impétueux, lui eût accordé toute sa faveur -s'il avait pu abattre en lui cet orgueil hautain qui le -mettait mal à l'aise avec toute supériorité. Un léger revers -à la guerre lui fut si sensible qu'il en mourut de -chagrin<a id="FNanchor_240" href="#Footnote_240" class="fnanchor"> [240]</a>.</p> - -<p>«Il faut commencer, ma chère enfant, par la mort du -comte de Guiche. Le P. Bourdaloue l'a annoncée au -maréchal de Gramont, qui s'en douta, sachant l'extrémité -de son fils. Il fit sortir tout le monde de sa chambre. -Il était dans un petit appartement qu'il a au dehors des -<span class="pagenum"><a id="Page_120"> 120</a></span> -Capucines. Quand il fut seul avec ce père, il se jeta à son -cou, disant qu'il devinait bien ce qu'il avait à lui dire; -que c'était le coup de sa mort; qu'il la recevait de la -main de Dieu; qu'il perdait le seul et véritable objet de -toute sa tendresse et de toute son inclination naturelle; -que jamais il n'avait eu de sensible joie et de violente -douleur que par ce fils, qui avait des choses admirables. -Il se jeta sur un lit, n'en pouvant plus, mais sans pleurer, -car on ne pleure plus dans cet état. Le père pleurait, -et n'avait encore rien dit. Enfin il lui parla de Dieu -comme vous savez qu'il en parle. Ils furent six heures -ensemble; et puis le père, pour lui faire faire son sacrifice -entier, le mena à l'église de ces bonnes Capucines, où -l'on disait vigiles pour ce cher fils. Le maréchal y entra -en tremblant, plutôt traîné et poussé que sur ses jambes; -son visage n'était plus connaissable. Monsieur le -Duc le vit en cet état, et, en nous le contant chez madame -de la Fayette, il pleurait. Le maréchal revint enfin -dans sa petite chambre; il est comme un homme condamné. -Le roi lui a écrit; personne ne le voit<a id="FNanchor_241" href="#Footnote_241" class="fnanchor"> [241]</a>.»</p> - -<p>Ce touchant récit fit croire à madame de Grignan que -sa mère, ses amis étaient inconsolables de la mort du -comte de Guiche. Mais dans cette cour, tout occupée de -plaisirs et d'ambition, et de gloire et d'amour, personne -ne pouvait paraître triste, surtout lorsque le roi avait -<span class="pagenum"><a id="Page_121"> 121</a></span> -daigné vous consoler. Aussi madame de Sévigné écrit à -sa fille: «Hors le maréchal de Gramont, on ne songe -déjà plus au comte de Guiche: voilà qui est fait<a id="FNanchor_242" href="#Footnote_242" class="fnanchor"> [242]</a>.» -Mais elle fut obligée de s'y reprendre à plusieurs fois -pour ramener madame de Grignan à son unisson. «Ha! -fort bien; nous voici dans les lamentations du comte de -Guiche. Hélas! ma pauvre enfant, nous n'y pensons -plus ici, pas même le maréchal, qui a repris le soin de -faire sa cour.» Quelques jours après, nouvelle réprimande: -«Vous vous moquez avec vos longues douleurs! -Nous n'aurions jamais fait ici si nous voulions appuyer -autant sur chaque nouvelle: il faut expédier; expédiez, -à notre exemple<a id="FNanchor_243" href="#Footnote_243" class="fnanchor"> [243]</a>.»</p> - -<p>Elle expédie en effet; et il est impossible de trouver -dans aucune correspondance autant de faits intéressants -sur les événements publics, les personnages du temps, -les spectacles, la littérature et la vie de toute une époque, -touchés avec tant de concision, d'esprit, de finesse -et de gaieté.</p> - -<p>Un grand changement eut lieu dans les spectacles à -la cour et à la ville, car alors Paris se conformait à la -cour; c'était le roi qui réglait l'un et l'autre.</p> - -<p>Louis XIV a dit, dans ses Instructions au Dauphin, -qu'il est du devoir d'un monarque de donner des amusements -à sa cour, à son peuple, à lui-même<a id="FNanchor_244" href="#Footnote_244" class="fnanchor"> [244]</a>. Les spectacles -<span class="pagenum"><a id="Page_122"> 122</a></span> -publics furent donc par lui mis au nombre des -affaires d'État. La mort de Molière les avait désorganisés. -Cependant la comédie n'était pas le genre de spectacle -que préférait Louis XIV: il aimait par-dessus tout -la danse, la musique, les belles décorations; il n'oubliait -pas qu'il avait autrefois brillé dans les ballets composés -pour lui. Il avait été, dans sa jeunesse, un très-bon -joueur de guitare<a id="FNanchor_245" href="#Footnote_245" class="fnanchor"> [245]</a>; ce qui n'étonne pas quand on sait -qu'on lui donna un maître de cet instrument lorsqu'il -était à peine âgé de huit ans<a id="FNanchor_246" href="#Footnote_246" class="fnanchor"> [246]</a>. C'est cette préférence du -roi pour la musique qui avait fait le succès de l'opéra, -introduit en France par Mazarin. Mais Molière, aussi -habile directeur de spectacles qu'auteur illustre et bon -acteur, pour donner au roi le goût de la comédie, imagina -de joindre à ses pièces des danses, des chants, des -ballets-mascarades, bien ou mal motivés<a id="FNanchor_247" href="#Footnote_247" class="fnanchor"> [247]</a>. Il chargeait -Lulli d'en faire la musique; et même, dans la composition -de la tragi-comédie-ballet de <i>Psyché</i>, il fit concorder -heureusement, pour aller plus vite, Lulli, Quinault -et Corneille. Le grand tragique fut lui-même -étonné qu'en remplissant le cadre qui lui était donné -sa muse, affaiblie par l'âge, eût retrouvé, pour une -déclaration d'amour, tout le feu de la jeunesse. C'est -<span class="pagenum"><a id="Page_123"> 123</a></span> -ainsi que Molière soutint son théâtre florissant contre -les dangereuses rivalités du théâtre de la rue Guénégaud, -où se jouait l'opéra; du théâtre de l'hôtel de Bourgogne -et de celui du Marais, où l'on représentait les pièces de -Racine et celles de Corneille<a id="FNanchor_248" href="#Footnote_248" class="fnanchor"> [248]</a>.</p> - -<p>La musique est un art qui ne parle au cœur et à l'imagination -que par les sons. Par cela même elle convient -mieux que les compositions dramatiques à ceux -que l'âge ou la multiplicité des affaires ont rendus, dans -leurs moments de distraction, peu capables d'une attention -soutenue. Tel commençait à être Louis XIV. Lulli -s'aperçut du déclin de son goût pour la comédie. Il s'associa -avec Quinault, dont il espérait avec raison obtenir des -opéras meilleurs que ceux de l'abbé Perrin<a id="FNanchor_249" href="#Footnote_249" class="fnanchor"> [249]</a>; et, pour empêcher -que Molière ne pût réunir dans ses compositions -la comédie et l'opéra, il obtint une ordonnance (22 avril -1672) qui portait défense aux comédiens d'avoir, pour -leurs représentations, plus de deux voix et plus de -six violons. Dès lors Molière, brouillé avec Lulli ne -put se servir de lui pour les ballets du <i>Malade imaginaire</i>, -et il en fit composer la musique par Charpentier, -musicien aussi habile, mais non aussi goûté que -Lulli, qui le persécuta par jalousie<a id="FNanchor_250" href="#Footnote_250" class="fnanchor"> [250]</a>. <i>Le Malade imaginaire</i> -<span class="pagenum"><a id="Page_124"> 124</a></span> -fut cependant représenté sur le théâtre du Palais-Royal, -le 10 février 1673, avec toute sa musique, et imprimé -la même année<a id="FNanchor_251" href="#Footnote_251" class="fnanchor"> [251]</a>; mais il ne fut joué à la cour que -l'année suivante<a id="FNanchor_252" href="#Footnote_252" class="fnanchor"> [252]</a>. Débarrassé d'un redoutable rival par -la mort de Molière, Lulli resta le directeur favorisé des -divertissements du roi. Quatre des principaux acteurs de -la troupe de Molière s'en étant séparés pour entrer dans -la troupe de l'hôtel de Bourgogne, Colbert fut chargé par -Louis XIV de former, des débris de la troupe du grand -comique et de celle du Marais, une nouvelle troupe qui fut -transportée rue Mazarine; et le théâtre du Palais-Royal -fut donné à Lulli pour y établir l'Opéra, décoré du nom -d'<i>Académie royale de musique</i>. L'ancien Opéra du marquis -de Sourdac disparut, et le nouvel Opéra fut fondé par -l'association de Lulli, de Quinault, de Vigaroni; le musicien, -le poëte et le décorateur formèrent un spectacle -tout nouveau, d'une grandeur et d'une magnificence fort -au-dessus de tout ce qu'on avait vu jusqu'alors. Il devint -célèbre dans toute l'Europe, et n'a cessé de contribuer aux -progrès de la chorégraphie, de la musique vocale et instrumentale. -Quoique toujours onéreux pour l'État, il a survécu -à tous les désastres de nos révolutions. Malgré la réunion -des talents qui contribuaient à sa réussite, il causa, -dans la nouveauté, plus d'admiration que de plaisir<a id="FNanchor_253" href="#Footnote_253" class="fnanchor"> [253]</a>, et il -<span class="pagenum"><a id="Page_125"> 125</a></span> -ne se soutint que par la volonté et la munificence de -Louis XIV, qui le mit à la mode. Jamais, depuis, l'empressement -du public ne suffit pour entretenir ce spectacle -dans la splendeur et le luxe qui est de son essence; -pour qu'il pût subsister il a fallu que tous les gouvernements -qui se sont succédé en France fussent pour lui -plus prodigues encore que n'avait été Louis XIV.</p> - -<p>Ce fut madame de Montespan qui eut la principale -part à cette rénovation de l'Opéra. Pour faire cette révolution -théâtrale, elle s'appuya sur l'opinion de la Rochefoucauld, -alors, à la cour, le grand arbitre du goût. -«M. de la Rochefoucauld, dit madame de Sévigné à -sa fille, ne bouge de Versailles; le roi le fait entrer chez -madame de Montespan pour entendre les répétitions -d'un opéra qui passera tous les autres: il faut que vous -le voyiez<a id="FNanchor_254" href="#Footnote_254" class="fnanchor"> [254]</a>.» Cet opéra était celui d'<i>Alceste ou le Triomphe -d'Alcide</i>, qui fut le premier que composa Quinault -depuis qu'il avait fait alliance avec Lulli et que la salle -du Palais-Royal avait été accordée à ce dernier pour son -spectacle<a id="FNanchor_255" href="#Footnote_255" class="fnanchor"> [255]</a>. Le succès de ce nouvel ouvrage fut grand, -et fit oublier à ce public ému et flatté que Molière, dans -cette même salle, en le bafouant le faisait rire. Madame -de Sévigné écrit le 8 janvier 1674: «On joue -jeudi l'opéra qui est un prodige de beauté; il y a des -endroits de la musique qui m'ont fait pleurer; je ne suis -<span class="pagenum"><a id="Page_126"> 126</a></span> -pas seule à ne le pouvoir soutenir; l'âme de madame de -la Fayette en est tout alarmée<a id="FNanchor_256" href="#Footnote_256" class="fnanchor"> [256]</a>.» Je le crois sans peine: -celle qui n'avait jusqu'alors entendu que les opéras de -François Perrin, les maigres instruments de Gabriel -Gilbert et les accompagnements monotones de Cambert<a id="FNanchor_257" href="#Footnote_257" class="fnanchor"> [257]</a> -devait être agréablement surprise de cette variété -d'instruments, de ces timbales, de ces trompettes qui -produisaient, par leur éclatante harmonie, des effets inconnus -à la musique française. Les récitatifs du musicien -florentin, admirés encore de nos artistes modernes par -la vérité de la déclamation et la justesse de la prosodie, -ne devaient pas médiocrement toucher des femmes d'un -goût aussi exercé que madame de la Fayette et madame -de Sévigné. Le beau chœur des suivants de Pluton, qui -se réjouissent de la venue d'Alceste dans les enfers, rehaussé -par la musique de Lulli, était surtout propre à -alarmer la constitution maladive et vaporeuse de madame -de la Fayette:</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p>Tout mortel doit ici paraître:</p> -<p class="i2"> On ne peut naître</p> -<p class="i2"> Que pour mourir.</p> -<p>De cent maux le trépas délivre:</p> -<p class="i2"> Qui cherche à vivre</p> -<p class="i2"> Cherche à souffrir.</p> -<p>Chacun vient ici-bas prendre place;</p> -<p class="i2"> Sans cesse on y passe,</p> -<p class="i2"> Jamais on n'en sort.</p> -<p class="i2"> Est-on sage</p> -<p class="i2"> De fuir ce passage?</p> -<div><span class="pagenum"><a id="Page_127"> 127</a></span></div> -<p class="i2"> C'est un orage</p> -<p class="i2"> Qui mène au port.</p> -<p><b>. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .</b></p> -<p class="i2"> Plaintes, cris, larmes,</p> -<p class="i2"> Tout est sans armes</p> -<p class="i2"> Contre la mort.</p> -<p>Chacun vient ici-bas prendre place;</p> -<p class="i2"> Sans cesse on y passe,</p> -<p class="i2"> Jamais on n'en sort<a id="FNanchor_258" href="#Footnote_258" class="fnanchor"> [258]</a>.</p> -</div></div> - -<p>Cependant l'impulsion donnée par la faveur de -Louis XIV au théâtre de l'Opéra, décoré du nom d'Académie, -ne profita bien qu'à la musique et à la danse. La -France resta toujours inférieure à l'Italie sous le rapport -des machines et des décorations comme sous celui du -chant et de la poésie. Les plus belles pièces de Quinault -ne sont pas comparables aux plus médiocres de Métastase; -et néanmoins aucun de nos poëtes, depuis Louis XIV, -n'a réussi mieux que Quinault dans ce genre de composition. -Mais l'Opéra français devint, dès son début au Palais-Royal, -supérieur dans la musique instrumentale. Le -poëme, les danses, les ballets n'excitaient qu'un plaisir -secondaire en comparaison des belles symphonies que -Lulli composait; ses opéras ressemblaient à des concerts. -C'est ce dont se plaint amèrement la Bruyère, ce grand -peintre de la société française dans le grand siècle<a id="FNanchor_259" href="#Footnote_259" class="fnanchor"> [259]</a>. Les -imitateurs du Florentin profitèrent du goût régnant pour -composer des opéras courts, presque sans récitatifs, tout -en symphonies et qui pouvaient se passer des prestiges du -théâtre. Un musicien nommé Molière (qui n'avait rien de -<span class="pagenum"><a id="Page_128"> 128</a></span> -commun que le nom avec le grand comique) paraît avoir -particulièrement réussi dans ces opéras-concerts, dont -l'abbé Tallemant composait les paroles et qu'il faisait -chanter chez lui et dans des fêtes particulières<a id="FNanchor_260" href="#Footnote_260" class="fnanchor"> [260]</a>. Le -5 février (jour anniversaire de sa naissance), madame de -Sévigné écrit à sa fille: «Je m'en vais à un petit opéra -de Molière, beau-père d'Itier<a id="FNanchor_261" href="#Footnote_261" class="fnanchor"> [261]</a>, qui se chante chez Pelissari; -c'est une musique très-parfaite. M. le Prince, -M. le Duc et madame la Duchesse y seront.»</p> - -<p>Pelissari était un riche financier, ami de Gourville et -de d'Hervart<a id="FNanchor_262" href="#Footnote_262" class="fnanchor"> [262]</a>. Madame de Sévigné l'avait connu chez -Fouquet au temps de la Fronde, et avec lui, comme -avec Jeannin de Castille, elle était restée liée. Déjà les -plus grands personnages de ce temps aimaient à se réunir -chez ces riches roturiers, qui acquirent dans le -siècle suivant une influence toujours croissante. Le jeu, -la bonne chère faisaient éprouver à tous ces hommes -de la cour des plaisirs plus vifs que ceux qu'ils devaient -à la magnificence du monarque, parce que les -plus élevés parvenaient, par la familiarité même de leur -excessive politesse, à faire régner dans ces cercles, honorés -par leur présence, tout le charme d'une parfaite -égalité sans rien perdre des avantages que leur donnait -la supériorité de leur rang et de leur naissance; et depuis -lors ce fut là le triomphe du savoir-vivre et du suprême -<span class="pagenum"><a id="Page_129"> 129</a></span> -bon ton. Ainsi nous voyons madame de Sévigné, -vivement pressée de se rendre à une invitation de la -duchesse de Chaulnes avec les cardinaux de Retz et de -Bouillon, préférer un souper chez Gourville<a id="FNanchor_263" href="#Footnote_263" class="fnanchor"> [263]</a>, où elle devait -se réunir avec toute sa société, M. de la Rochefoucauld, -madame de la Fayette, M. le Duc, le comte -de Briord<a id="FNanchor_264" href="#Footnote_264" class="fnanchor"> [264]</a>, son aide de camp, madame de Thianges, -madame de Coulanges, Corbinelli. Madame de Sévigné -ne pouvait être attirée chez Pelissari que les jours de -concerts et de grandes réunions. La société de madame -Pelissari était toute différente de la sienne. Celle-ci -recevait beaucoup d'hommes de lettres, mais c'étaient -précisément ceux qui régnaient alors à l'Académie et -qui n'avaient aucun succès à l'hôtel de la Rochefoucauld. -Pavillon était le Voiture de ce <i>pastiche</i> de l'hôtel de -Rambouillet<a id="FNanchor_265" href="#Footnote_265" class="fnanchor"> [265]</a>. Le jour que madame de Sévigné se rendit -chez madame Pelissari pour entendre l'opéra de Molière, -elle dut y trouver Cotin, qui récita peu après, en séance -publique, des vers à la louange du roi; Gilles Boileau<a id="FNanchor_266" href="#Footnote_266" class="fnanchor"> [266]</a>, -l'ami de Cotin et l'ennemi de Despréaux, son frère; puis -Furetière, Charpentier, l'abbé Tallemant, Perrault, le vieux -Bois-Robert, Quinault, Regnier, Desmarais, Benserade -et d'autres moins connus. C'étaient alors les coryphées -de l'Académie française, peuplée en majeure partie de -<span class="pagenum"><a id="Page_130"> 130</a></span> -grands seigneurs, loués par leurs confrères en vers et -en prose. Ceux-ci formaient une ligue en faveur des -médiocrités intrigantes; ils exaltaient le siècle présent, -et dépréciaient tous les siècles qui l'avaient précédé. -Leur règne allait cesser. A la vérité Despréaux et la Fontaine -devaient attendre dix ans encore leur admission à -l'Académie; mais déjà depuis deux ou trois ans l'ennemi -avait commencé à pénétrer dans la place. Bossuet avait été -reçu de l'Académie en 1671, Racine et Fléchier en 1673, -le savant Huet, qui écrivait des poëmes charmants dans -la langue de Virgile, en 1674. Benserade, sans beaucoup -d'avantages pour l'illustre compagnie, allait y remplacer -Chapelain. Madame de Sévigné ne manque pas de donner -à madame de Grignan des nouvelles de ce dernier, -si connu d'elle et de toute sa famille: «M. Chapelain -se meurt; il a une manière d'apoplexie qui l'empêche -de parler; il se confesse en serrant la main; il est dans -sa chaise comme une statue: ainsi Dieu confond l'orgueil -des philosophes. Adieu, ma bonne<a id="FNanchor_267" href="#Footnote_267" class="fnanchor"> [267]</a>.»</p> - -<p>On est étonné du peu d'affection que manifeste en -cette circonstance madame de Sévigné pour l'ancien -précepteur des MM. de la Trousse, ses parents; pour -celui qui, avec Ménage, lui avait donné à elle-même -des leçons dont elle avait si bien profité. Mais Chapelain, -qui avait été une des grandes notabilités littéraires -chez la marquise de Sablé<a id="FNanchor_268" href="#Footnote_268" class="fnanchor"> [268]</a>, dans les réunions -<span class="pagenum"><a id="Page_131"> 131</a></span> -hebdomadaires de mademoiselle de Scudéry et à l'hôtel -de Rambouillet, où Arnauld d'Andilly l'avait introduit<a id="FNanchor_269" href="#Footnote_269" class="fnanchor"> [269]</a>, -où ses liaisons avec les solitaires de Port-Royal lui donnaient -de l'importance; cet auteur tant prôné, si magnifiquement -récompensé par les ducs de Longueville -et de Montausier; ce juge souverain en matière de goût, -selon Balzac<a id="FNanchor_270" href="#Footnote_270" class="fnanchor"> [270]</a>, était devenu ridicule par la publication -de son grand poëme et par son avarice<a id="FNanchor_271" href="#Footnote_271" class="fnanchor"> [271]</a>. On convenait -que Boileau Despréaux, pour répondre aux reproches -que lui adressait le spirituel de Coupeauville<a id="FNanchor_272" href="#Footnote_272" class="fnanchor"> [272]</a> d'avoir -si maltraité le chantre malencontreux de la célèbre Pucelle, -avait eu raison de dire: «Mais je n'ai été que le -secrétaire du public; je ne suis coupable que d'avoir dit -en vers ce que tout le monde dit en prose<a id="FNanchor_273" href="#Footnote_273" class="fnanchor"> [273]</a>.» Madame -de Sévigné fut tout étonnée de voir le satirique «s'attendrir -pour le pauvre Chapelain,» et elle lui pardonnait -de s'être montré si cruel en vers, puisqu'il était si -tendre en prose<a id="FNanchor_274" href="#Footnote_274" class="fnanchor"> [274]</a>. Elle admirait plus que personne le -<span class="pagenum"><a id="Page_132"> 132</a></span> -talent de Despréaux, et recherchait les réunions ou il -faisait des lectures de son <i>Art poétique</i>, qui devait bientôt -paraître et faire époque dans la littérature française.</p> - -<p>Le 15 décembre (1673), elle écrit: «Je dînai hier -avec M. le Duc, M. de la Rochefoucauld, madame de -Thianges, madame de la Fayette, madame de Coulanges, -l'abbé Têtu, M. de Marsillac et Guilleragues, chez -Gourville. Vous y fûtes célébrée et souhaitée; et puis -on écouta la <i>Poétique</i> de Despréaux, qui est un chef-d'œuvre<a id="FNanchor_275" href="#Footnote_275" class="fnanchor"> [275]</a>.»</p> - -<p>Elle n'entendit cette fois qu'une portion du poëme; -car, un mois après, elle écrit encore: «De Pomponne -m'a priée de dîner demain avec lui et Despréaux, qui -doit lire sa <i>Poétique</i>.» Le surlendemain, elle commence -ainsi une autre lettre: «J'allai donc dîner samedi chez -M. de Pomponne, comme je vous avais dit; et puis (on -dînait alors à midi), jusqu'à cinq heures, il fut enchanté, -enlevé, transporté de la perfection des vers de la <i>Poétique</i> -de Despréaux. D'Hacqueville y était. Nous parlâmes -deux ou trois fois du plaisir que j'aurais de vous la voir -entendre<a id="FNanchor_276" href="#Footnote_276" class="fnanchor"> [276]</a>.»</p> - -<p>J'ai dit que madame de Sévigné entendit la lecture de -l'<i>Art poétique</i> en entier. En effet, ce poëme était achevé, -puisque Boileau l'inséra dans la première édition de ses -œuvres, dont il devait bientôt faire commencer l'impression -et qui parut six mois après la date de la lettre de -madame de Sévigné. Il y a cependant des vers, dans ce -poëme, que l'auteur ne composa qu'après la lecture -<span class="pagenum"><a id="Page_133"> 133</a></span> -qu'il en avait faite chez M. de Pomponne: ce sont ceux -où la conquête de la Franche-Comté est célébrée. Cette -conquête ne fut commencée que six semaines après cette -lecture et terminée seulement cinq jours après l'impression -des <i>Œuvres diverses du sieur D***</i>. (Despréaux).</p> - -<p>Condé, qui, lorsqu'il s'était révolté, avait servi et -commandé chez les Espagnols, connaissait leurs hommes -d'État et leurs guerriers; il lui fut donc facile de préparer -la seconde conquête de la <i>comté de Bourgogne</i><a id="FNanchor_277" href="#Footnote_277" class="fnanchor"> [277]</a>. -Rentrée, par le traité d'Aix-la-Chapelle, sous la domination -espagnole, cette province était mécontente des dons -gratuits et des subsides que l'Espagne avait exigés d'elle -pour le rétablissement des fortifications détruites par la -France et pour l'entretien des garnisons que la guerre -forçait d'y placer. Mais cette fois aussi, mieux fortifiée, -plus garnie de troupes et préparée depuis longtemps -pour l'état de guerre, on ne pouvait plus la surprendre; -et la conquérir était devenu plus difficile. Louis XIV -empêcha très-habilement les Suisses, qui craignaient de -devenir les voisins de la France, de se joindre aux Espagnols, -en offrant au roi d'Espagne de déclarer la neutralité -de la Franche-Comté. Il s'y refusa, quoique sollicité -par les Suisses, qui s'étaient joints à Louis pour cette -négociation. Dès lors l'état de guerre qui existait entre -l'Espagne et la France légitima l'attaque de la Franche-Comté, -et les Suisses n'eurent aucune raison valable -pour s'y opposer. Gourville, l'homme de Condé, -Bouchu, l'intendant de la Bourgogne, le marquis de -Vaubrun préparèrent les succès de cette attaque par -leurs secrètes négociations avec le prince d'Aremberg, -<span class="pagenum"><a id="Page_134"> 134</a></span> -le marquis de Listenay et don Guignones<a id="FNanchor_278" href="#Footnote_278" class="fnanchor"> [278]</a>. Le maréchal -de Navailles commença l'invasion; il prit Gray en trois -jours, le 1<sup>er</sup> mars; Vesoul, le 10<a id="FNanchor_279" href="#Footnote_279" class="fnanchor"> [279]</a>. Le siége de Besançon, -fait par le roi en personne, fut pénible: cette place ne se -rendit qu'après huit jours de tranchée, le 15 mai; et la citadelle, -le 22. Dôle ouvrit ses portes le 6 juin, après sept -jours de tranchée; et la Feuillade entra dans Salins le -22 juin, après un siége de sept jours. Mais la conquête -de la Franche-Comté ne fut complétée que le 5 juillet, -lorsque le marquis de Renel (ami et allié de Bussy) eut -pris Lure et Fauconier<a id="FNanchor_280" href="#Footnote_280" class="fnanchor"> [280]</a>.</p> - -<p>Comme le volume des œuvres diverses de Despréaux -ne fut achevé d'imprimer que le 10 juillet, et qu'après -les vers où il célèbre la conquête de la Franche-Comté -près des deux tiers de son volume étaient à imprimer, -et que le privilége du roi est daté du 12 juin, il en résulte -que ce fut après avoir livré son manuscrit à l'imprimeur, -c'est-à-dire après le 22 juin, et sur les épreuves -mêmes de son ouvrage, que Boileau, sans craindre -qu'on lui révoquât son privilége, ajouta les vers suivants, -adressés, comme ceux qui les précèdent, aux auteurs -qui voudront célébrer les victoires de Louis XIV:</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p>Mais tandis que je parle une gloire nouvelle</p> -<p>Vers ce vainqueur rapide aux Alpes vous appelle.</p> -<div><span class="pagenum"><a id="Page_135"> 135</a></span></div> -<p>Déjà Dôle et Salins sous le joug ont ployé;</p> -<p>Besançon fume encor sur son roc foudroyé.</p> -</div></div> - -<p>Remarquons que ce fut au détriment du poëme que -ces quatre vers furent intercalés. Les vers qui les suivent -étaient, avant cette intercalation, à la suite de ceux -sur le passage du Rhin et de la conquête de la Hollande, -et s'appliquaient mieux à ce passage et à cette conquête -qu'au siége de Besançon et de Salins. Quel auteur, dit -le poëte,</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p>Chantera le Batave, éperdu dans l'orage,</p> -<p>Soi-même se noyant pour sortir du naufrage;</p> -<p>Dira les bataillons sous Mastricht enterrés,</p> -<p>Dans ces affreux assauts du soleil éclairés?</p> -<p>. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .</p> -<p>Où sont ces grands guerriers dont les fatales ligues</p> -<p>Devaient à ce torrent apporter tant de digues?</p> -<p>Est-ce encore en fuyant qu'ils pensent l'arrêter</p> -<p>Fiers du honteux honneur d'avoir su l'éviter<a id="FNanchor_281" href="#Footnote_281" class="fnanchor"> [281]</a>.</p> -</div></div> - -<p>Quand Despréaux écrivit ces vers, on était à la fin de -l'année 1673. Le Rhin avait été passé le 12 juin 1672, et -Maestricht s'était rendu au roi le 29 juin 1673. Ces exploits, -quoique récents, étaient déjà anciens; ils avaient -fatigué les muses adulatrices, et ces vers, au moment de -leur publication, formaient un anachronisme. Louis XIV, -dès la fin d'octobre de l'année précédente, pour mieux attaquer -l'Espagne, avait commencé à retirer ses troupes de -la Hollande: le <i>Batave éperdu</i>, au lieu de fuir, rentrait -dans ses foyers. Les forces qui avaient envahi la république -<span class="pagenum"><a id="Page_136"> 136</a></span> -étaient postées sur le haut Rhin; et Bonne, mal -fortifiée, avait capitulé le 12 novembre 1673, après -huit jours de siége. La conquête de la Franche-Comté, -célébrée par le poëte avant même d'être achevée, avait -pour les lecteurs le mérite si grand de la nouveauté; -mais les vers qui suivaient, depuis l'évacuation des places -conquises sur la Hollande, n'étaient plus d'accord avec -l'histoire. Le <i>Batave</i>, ligué avec toute l'Europe, après -avoir fait rebrousser le torrent dévastateur, espérait l'anéantir -ou lui imposer des digues qu'il ne pourrait franchir: -il ne parvint alors qu'à en détourner le cours. -Condé, à la tête d'une poignée de troupes, soutint, dans -les plaines des Pays-Bas, le choc des puissances armées; -Luxembourg, son disciple, leur ferma les passages -de la Suisse; Turenne, ceux de l'Alsace, et il les -rejeta au delà du Rhin<a id="FNanchor_282" href="#Footnote_282" class="fnanchor"> [282]</a>. Louis XIV, couvert par l'habileté -de ses grands capitaines, put, en achevant la conquête -de la Franche-Comté, compléter ainsi le sol de la -France, depuis maintenu par la Providence dans son intégrité, -malgré soixante ans de délire révolutionnaire et -d'usurpations insensées<a id="FNanchor_283" href="#Footnote_283" class="fnanchor"> [283]</a>.</p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_137"> 137</a></span></p> -<h2 class="normal">CHAPITRE VII.<br /> -<span class="medium">1674-1675.</span></h2> -</div> - -<p class="hanging indent">M. et madame de Grignan viennent à Paris.—M. de Grignan retourne -en Provence.—Madame de Grignan reste avec madame de Sévigné -pendant quinze mois.—Correspondance de madame de Sévigné -avec Guitaud et avec Bussy.—Bussy obtient la permission de venir -à Paris, et vit pendant six mois dans la société de madame de -Sévigné et de madame de Grignan.—Ouverture de l'assemblée des -communautés de la Provence le 3 novembre.—L'évêque de Toulouse -forme opposition à M. de Grignan.—Grignan est soutenu par -Guitaud, gouverneur des îles Sainte-Marguerite.—Correspondance -de Bussy et de madame de Sévigné.—Détails sur la femme et les -enfants de Bussy.—Sur l'aîné de ses fils, Nicolas, marquis de -Bussy.—Sur Marie-Thérèse de Bussy, marquise de Montalaire.—Sur -Michel-Celse-Roger de Bussy, évêque de Luçon.—Sur Louise -de Rouville de Clinchamps, seconde femme du comte de Bussy-Rabutin.—Sur -Diane de Rabutin, chanoinesse.—Sur Louise-Françoise -de Bussy.—Sur le mariage de celle-ci avec Gilbert de Langheac, -marquis de Coligny.—Coligny est tué.—Sa veuve se -remarie.—Elle ne prend pas le nom de son nouveau mari, et se -fait nommer comtesse de Dalet.—Son fils, le comte de Langheac, -meurt sans postérité mâle.</p> - -<p class="space">Ce fut dans cette belliqueuse année, et lorsque la -France était assiégée par cette multitude d'ennemis que -lui avaient faits l'ambition et la despotique arrogance de -son monarque, que madame de Sévigné put goûter, plus -complétement qu'elle ne l'avait fait depuis longtemps, -les douceurs de l'amour maternel et celles de l'amitié. -Elle en éprouvait le besoin pour se consoler de l'ennui -et de la fatigue qu'entraînent avec eux les plaisirs du -<span class="pagenum"><a id="Page_138"> 138</a></span> -monde, les liaisons passagères de la société et les intrigues -de la cour.</p> - -<p>Elle était enfin parvenue à obtenir un congé pour -M. de Grignan<a id="FNanchor_284" href="#Footnote_284" class="fnanchor"> [284]</a>; il arriva à Lyon avec sa femme au -commencement de février<a id="FNanchor_285" href="#Footnote_285" class="fnanchor"> [285]</a> et à Paris vers le 15 du même -mois (1674).</p> - -<p>Le comte de Grignan retourna au mois de mai suivant -en Provence<a id="FNanchor_286" href="#Footnote_286" class="fnanchor"> [286]</a>, mais madame de Grignan ne se sépara -de sa mère qu'un an après: leur commerce de lettres -fut donc interrompu pendant quinze mois entiers -Dans cet intervalle de temps, madame de Sévigné -entretint une correspondance active avec son cousin -Bussy, le comte de Guitaud et M. de Grignan. Elle -n'eut pas non plus, durant toute cette année et les six -premiers mois de l'année suivante, besoin d'écrire à -celui qu'elle nommait son <i>bon cardinal</i>. Retz résida -pendant tout ce temps à Paris, passant de longues heures -avec madame de Sévigné et avec sa fille<a id="FNanchor_287" href="#Footnote_287" class="fnanchor"> [287]</a>, dont il -préférait la société à toutes les autres. De son côté, madame -de Sévigné trouvait qu'il était l'homme de France -dont la conversation était la plus agréable, l'homme le -<span class="pagenum"><a id="Page_139"> 139</a></span> -plus charmant qu'on pût voir; et ce qui contribuait -surtout à le lui faire trouver tel, c'est qu'il semblait -partager son admiration pour madame de Grignan et -sympathiser à ses faiblesses maternelles<a id="FNanchor_288" href="#Footnote_288" class="fnanchor"> [288]</a>. Sévigné était -à l'armée, mais il venait par intervalle se réunir à -sa mère et à sa sœur et jouir avec elles des plaisirs de -la cour<a id="FNanchor_289" href="#Footnote_289" class="fnanchor"> [289]</a>. Le petit-cousin de Coulanges et Corbinelli -<i>le fidèle Achate</i>, l'officieux d'Hacqueville étaient aussi -alors à Paris; et Gourville et Guilleragues, et les hommes -de lettres qui fréquentaient les hôtels des la Rochefoucauld -et des Condé, et toute la brillante jeunesse de ces -sociétés montraient d'autant plus d'empressement encore -à se rapprocher de madame de Sévigné qu'ils étaient -certains de rencontrer toujours près d'elle la belle comtesse -de Grignan, la reine de la Provence, si longtemps -regrettée, si ardemment attendue.</p> - -<p>Il semble que rien ne manquait au bonheur de madame -de Sévigné; mais elle était arrivée à un âge ou -les joies les plus vives sont amorties par tout ce que -l'existence humaine a de triste et de sérieux. Elle n'avait -que quarante-huit ans; et aux souhaits que, selon l'usage, -sa fille lui exprimait au premier jour de l'an (1674) -elle répondit<a id="FNanchor_290" href="#Footnote_290" class="fnanchor"> [290]</a>:</p> - -<p>«Vous me dites mille douceurs sur le commencement -de l'année: rien ne peut me flatter davantage; vous -<span class="pagenum"><a id="Page_140"> 140</a></span> -m'êtes toutes choses, et je ne suis appliquée qu'à faire -que tout le monde ne voie pas toujours à quel point -cela est vrai. J'ai passé le commencement de l'année assez -brutalement; je ne vous ai dit qu'un pauvre petit -mot; mais comptez, mon enfant, que cette année et -toutes celles de ma vie sont à vous: c'est un tissu, c'est -une vie tout entière qui vous est dévouée jusqu'au dernier -soupir. Vos moralités sont admirables; il est vrai -que le temps passe partout, et passe vite. Vous criez -après lui, parce qu'il vous emporte quelque chose de -votre belle jeunesse; mais il vous en reste beaucoup. -Pour moi, je le vois courir avec horreur, et m'apporter -en passant l'affreuse vieillesse, les incommodités et enfin -la mort. Voilà de quelle couleur sont les réflexions -d'une personne de mon âge; priez Dieu, ma fille, qu'il -m'en fasse tirer la conclusion que le christianisme nous -enseigne.»</p> - -<p>Quoique madame de Grignan, pour sa propre tranquillité, -blessât souvent le cœur de madame de Sévigné en -tâchant de renfermer dans de justes bornes les soins et -les inquiétudes maternelles, pour elle gênantes et importunes, -cependant il est probable qu'elle ne fît jamais -de bien ferventes prières pour la guérir entièrement de -cette tendance passionnée et pour la lui faire reporter -vers Dieu, comme le christianisme le lui ordonnait; ou si -elle fit de telles prières, elles eurent bien peu d'efficacité: -nous en avons la preuve dans la seule lettre qui -soit restée de madame de Sévigné à sa fille pendant le -séjour que celle-ci fit auprès d'elle<a id="FNanchor_291" href="#Footnote_291" class="fnanchor"> [291]</a>. Voici quelle fut -l'occasion de cette lettre:</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_141"> 141</a></span> -Madame de Grignan, aussitôt son arrivée à Paris, devint -grosse, fit une fausse couche, et mit au monde au -bout de sept mois un enfant qui ne naquit pas viable<a id="FNanchor_292" href="#Footnote_292" class="fnanchor"> [292]</a>. -Dans les deux derniers mois qui précédèrent cet accouchement, -madame de Grignan fut souvent souffrante et -langoureuse, et madame de Sévigné, moins que jamais, -ne pouvait être disposée à la quitter d'un seul instant. -Cependant le <i>Bien bon</i>, qui suivait partout madame -de Sévigné, s'en était séparé pour se transporter à Livry, -où il se trouvait à la fin de mai avec sa société, -composée de plusieurs de ses parents et de ses amis. -Madame de Grignan, que le monde et les affaires retenaient -à Paris, sachant bien que sa mère ne restait en -ville qu'à cause d'elle, la pressait toujours d'aller à Livry, -comme elle avait coutume de faire dans la belle saison. -Madame de Sévigné s'y détermina, et c'est alors qu'elle -écrivit à sa fille<a id="FNanchor_293" href="#Footnote_293" class="fnanchor"> [293]</a>:</p> - -<p class="dater"><span class="pagenum"><a id="Page_142"> 142</a></span> -«De Livry, le 1<sup>er</sup> juin 1674.»</p> - -<p>«Il faut, ma bonne, que je sois persuadée de votre -fonds pour moi, puisque je vis encore. C'est une chose -bien étrange que la tendresse que j'ai pour vous! Je ne -sais si, contre mon dessein, j'en témoigne beaucoup; -mais je sais bien que j'en cache encore davantage. Je -ne veux pas vous dire l'émotion et la joie que m'ont -données votre laquais et votre lettre. J'ai eu même le -plaisir de ne point croire que vous fussiez malade; j'ai -été assez heureuse pour croire ce que c'était. Il y a longtemps -que je l'ai dit: quand vous voulez, vous êtes adorable; -rien ne manque à ce que vous faites. J'écris dans -le milieu du jardin, comme vous l'avez imaginé; et les -rossignols et les petits oiseaux ont reçu avec un grand -plaisir, mais sans beaucoup de respect, ce que je leur -ai dit de votre part; ils sont situés d'une manière qui -leur ôte toute sorte d'humilité. Je fus hier deux heures -toute seule avec les hamadryades; je leur parlai de -vous; elles me contentèrent beaucoup par leur réponse. -Je ne sais si ce pays tout entier est bien content de moi, -car enfin, après avoir joui de toutes ses beautés, je n'ai -pu m'empêcher de dire:</p> - -<p class="quote">Mais, quoi que vous ayez, vous n'avez point Caliste;<br /> -Et moi je ne vois rien quand je ne la vois pas.</p> - -<p>Cela est si vrai que je repars après dîner avec joie. La -bienséance n'a nulle part à tout ce que je fais; c'est -ce qui est cause que les excès de liberté que vous me -donnez me blessent le cœur. Il y a deux ressources -dans le mien que vous ne sauriez comprendre. Je vous -loue d'avoir gagné vingt pistoles; cette perte a paru -<span class="pagenum"><a id="Page_143"> 143</a></span> -légère, étant suivie d'un grand honneur et d'une bonne -collation. J'ai fait vos compliments à nos oncles et cousins. -Ils vous adorent, et sont ravis de la relation...»</p> - -<p>Il est probable que les oncles et les cousins dont parle -ici madame de Sévigné sont l'abbé de Coulanges, son -frère de Chezière, de Coulanges, sa femme, le comte -et la comtesse de Sanzei et madame d'Harouis.</p> - -<p>Le principal motif du voyage de M. et de madame de -Grignan à Paris avait été d'obtenir, du roi et des ministres, -des gardes comme lieutenant général gouverneur -et une allocation de fonds pour cette dépense. Mais -tout le crédit de madame de Sévigné, de tous les Grignan -et du comte de Guitaud échoua contre l'opposition -de Forbin d'Oppède, évêque de Toulon, opposition -qui fut aussi forte et aussi efficace qu'avait été -celle de Forbin-Janson, évêque de Marseille, alors absent<a id="FNanchor_294" href="#Footnote_294" class="fnanchor"> [294]</a>.</p> - -<p>Le comte de Guitaud était plus fortement dévoué aux -intérêts de madame de Sévigné depuis le voyage qu'elle -avait fait à Bourbilly<a id="FNanchor_295" href="#Footnote_295" class="fnanchor"> [295]</a>. Il est dans la vie des époques où -l'amitié fait plus de progrès en quelques heures que durant -le grand nombre d'années d'une liaison que la communauté -des intérêts, les liens de parenté ou les convenances -ont prolongée sans la renforcer, sans l'affaiblir -et sans la rompre. C'est lorsqu'après des joies inespérées -ou des malheurs accablants, une circonstance fortuite -ou les loisirs de la solitude forcent des personnes ainsi -unies selon le monde à se rapprocher, et déterminent -<span class="pagenum"><a id="Page_144"> 144</a></span> -entre elles des explications franches, des confidences -intimes, de longs et sympathiques entretiens où le cœur -se dénude, où l'âme s'exhale, où rien de nos craintes, de -nos projets, de nos espérances, de nos aversions, de nos -préférences, de nos qualités, de nos défauts n'y est dissimulé. -Alors l'estime se fonde sur le respect qu'inspire la -loyauté du caractère; la confiance s'établit, et l'amitié se -fortifie par une tendresse mutuelle que l'on sait être capable -de dévouement. Tel était l'effet qu'avait produit sur -le comte et la comtesse de Guitaud le court séjour de -madame de Sévigné. Leur correspondance le prouve<a id="FNanchor_296" href="#Footnote_296" class="fnanchor"> [296]</a>.</p> - -<p>Le comte de Guitaud avait été nommé gouverneur -des îles Sainte-Marguerite; il avait donc, comme tel, de -l'influence en Provence, et il s'en servait pour soutenir -le parti du lieutenant général gouverneur. Non-seulement -son amitié pour madame de Sévigné et pour M. de -Grignan l'y portaient, mais il y était encore excité par -un intérêt personnel. Il était en procès avec un Forbin: -il n'en fallait pas tant pour réveiller dans le cœur de -madame de Sévigné son antipathie contre les Forbin. -Elle les appela toujours <i>les Fourbins</i><a id="FNanchor_297" href="#Footnote_297" class="fnanchor"> [297]</a>, et le procès que -Forbin avait avec Guitaud et les oppositions de l'évêque -de Toulon étaient pour elle de la <i>Fourbinerie</i><a id="FNanchor_298" href="#Footnote_298" class="fnanchor"> [298]</a>.</p> - -<p>Le comte de Guitaud avait vu les choses plus froidement: -<span class="pagenum"><a id="Page_145"> 145</a></span> -il pensait que M. de Grignan devait se borner à -demander aux états les cinq mille francs de gratification, -et qu'il avait tort d'insister sur l'allocation des -gardes d'honneur. Guitaud croyait, par l'abandon de cette -somme, prévenir l'opposition de l'évêque de Toulon<a id="FNanchor_299" href="#Footnote_299" class="fnanchor"> [299]</a>. -Cet évêque avait besoin du comte de Grignan pour une -affaire où les Forbin étaient intéressés et qui ressortissait -de l'autorité du lieutenant général gouverneur. Mais celui-ci -résista; et, dans une lettre du 14 octobre 1674, datée -de Grignan, il dit à Guitaud: «L'affaire de mes gardes -est une affaire d'honneur; si je la perds, ces messieurs -doivent compter que je ne saurai jamais revenir pour -eux. Ce n'est pas les cinq mille francs<a id="FNanchor_300" href="#Footnote_300" class="fnanchor"> [300]</a> qui me tiennent -au cœur, comme vous pouvez croire; car je les rendrai -à la province dans le moment, pourvu qu'il paraisse que -j'en ai été absolument le maître. Je serai encore ici jusqu'à -la Toussaint.»</p> - -<p>L'assemblée des communautés de Provence s'ouvrit -le 23 novembre (1674) par un discours de l'intendant de -Rouillé, comte de Meslay, contenant les éloges ordinaires -du roi et de ses victoires. Garidel, l'assesseur, -parla ensuite au nom de M. de Grignan; il demanda -le don de cinq cent mille francs pour le roi, et qu'il fût -pourvu au payement des gardes d'honneur et à une -somme de cinq mille francs comme supplément au traitement -de dix-huit mille francs fixé, par les délibérations -<span class="pagenum"><a id="Page_146"> 146</a></span> -des années précédentes, pour le payement des -gardes d'honneur<a id="FNanchor_301" href="#Footnote_301" class="fnanchor"> [301]</a>.</p> - -<p>L'évêque de Toulon (Louis Forbin d'Oppède), procureur-joint -pour le clergé, s'opposa au payement des -gardes d'honneur et au supplément de cinq mille francs. Il -déclara qu'il protestait d'avance contre toute délibération -qui interviendrait pour accorder une de ces deux -sommes. L'assemblée refusa les gardes d'honneur; elle -accorda la somme de cinq mille francs, non comme supplément -de traitement, mais à titre de gratification et -sans tirer à conséquence pour l'avenir<a id="FNanchor_302" href="#Footnote_302" class="fnanchor"> [302]</a>.</p> - -<p>Quoique le résultat des délibérations de cette assemblée -fût loin de satisfaire les prétentions que le comte -de Grignan avait manifestées dans sa lettre au comte de -Guitaud, cependant il paraît que celui-ci contribua à faciliter -la décision de l'autorité en faveur de M. de Grignan, -dont l'intendant fit l'éloge dans son discours. Nous -apprenons cela par une lettre de madame de Sévigné, -écrite pendant la tenue de l'assemblée des communautés -et adressée au comte de Guitaud, alors dans le château -des îles Sainte-Marguerite: «Parlons des merveilles -que vous avez faites en Provence; vous n'avez pensé -qu'aux véritables intérêts de M. et de madame de Grignan. -J'ai trouvé fort dure et fort opiniâtre la vision de -M. de Toulon pour les cinq mille francs à l'assemblée. Je -crois que la permission que donne le roi d'opiner sur -cette gratification ôtera l'envie de s'y opposer. M. de Pomponne -<span class="pagenum"><a id="Page_147"> 147</a></span> -a fait régler aussi le <i>monseigneur</i> qu'on doit dire -à M. de Grignan<a id="FNanchor_303" href="#Footnote_303" class="fnanchor"> [303]</a> en présence de l'intendant, quand on -vient lui rendre compte de l'assemblée; et comme ce -règlement donnera sans doute quelque chagrin à M. de -Rouillé<a id="FNanchor_304" href="#Footnote_304" class="fnanchor"> [304]</a>, je crois que M. de Pomponne ne l'enverra qu'à -la fin.»</p> - -<p>Pendant tout le temps du séjour de madame de Grignan -à Paris, la correspondance de Bussy avec madame -de Sévigné devint plus active. Bussy reprit ce ton de -galanterie aimable et familière qu'avec elle, dans sa jeunesse, -il ne quittait jamais, et qu'autorisaient l'étroite -parenté qui les unissait et le goût qu'ils avaient l'un pour -l'autre. Le séjour que Bussy faisait à Paris lui avait permis -de jouir, pendant l'espace de six semaines, de la -société de madame de Sévigné et de madame de Grignan. -Le souvenir du plaisir que lui avait causé la -conversation de la mère et de la fille se manifeste dans -ses lettres, malgré les retranchements faits, par les -éditeurs, de tous les passages inspirés par une jovialité -un peu crue. Scrupule étrange, puisqu'ils ont imprimé -sans aucun changement la réponse de madame de Sévigné, -qui, bien loin de se fâcher de ces gravelures, -répond sur le même ton. Bussy avait entendu dire que -sa cousine était tourmentée de vapeurs: il lui écrit que, -d'après un habile médecin qu'il a consulté, son mal -ne vient que d'un excès de sagesse et de vertu; et il lui -conseille, afin de vivre longtemps, de prendre un amant: -«Cela vaudra mieux, dit-il, que du vin émétique.» Il -<span class="pagenum"><a id="Page_148"> 148</a></span> -ajoute: «Mon conseil, ma chère cousine, ne saurait -vous paraître intéressé; car si vous aviez besoin de vous -mettre dans les remèdes, étant, comme je suis, à cent -lieues de vous, ce ne serait pas moi qui vous en servirait.» -Elle lui répond: «Le conseil que vous me donnez -n'est pas si estimable qu'il l'aurait été du temps de -notre belle jeunesse; peut-être qu'en ce temps-là auriez-vous -eu plus de mérite<a id="FNanchor_305" href="#Footnote_305" class="fnanchor"> [305]</a>.»</p> - -<p>L'intérêt se joignait au plaisir que Bussy avait à correspondre -avec madame de Sévigné; presque toute sa -famille, à Paris, était en quelque sorte sous la direction -ou la protection de sa cousine. Bussy jugeait le moment -favorable pour la faire agir. De tout temps madame de -Sévigné avait été bien avec le prince de Condé: il était -au pouvoir de ce prince de faire cesser l'exil de Bussy, -et madame de Sévigné avait, pour la seconder dans ses -sollicitations, le cardinal de Retz et la belle comtesse de -Grignan.</p> - -<p>Le 15 octobre 1674, madame de Sévigné avait écrit à -Bussy: «J'ai donné à dîner à mon cousin votre fils et à la -petite chanoinesse de Rabutin, sa sœur, que j'aime fort. -Leur nom touche mon cœur, et leur jeune mérite me réjouit. -Je voudrais que le garçon eût une bonne éducation: -c'est trop présumer que d'espérer tout du bon naturel<a id="FNanchor_306" href="#Footnote_306" class="fnanchor"> [306]</a>. -<span class="pagenum"><a id="Page_149"> 149</a></span> -Ce fils (Amé-Nicolas de Bussy-Rabutin) était l'aîné des fils -de Bussy, mais du second lit. C'est lui que madame de Sévigné -allait voir quand il était écolier au collége de Clermont<a id="FNanchor_307" href="#Footnote_307" class="fnanchor"> [307]</a>. -Il eut, à son entrée dans le monde, le titre de marquis de -Bussy. Le roi lui donna la compagnie de cavalerie dans le -régiment de Cibours<a id="FNanchor_308" href="#Footnote_308" class="fnanchor"> [308]</a>; ce fut en considération du père que -cette faveur fut accordée au fils. Le comte de Bussy avait -raison de dire que les offres réitérées de service qu'il faisait -au roi à l'entrée de chaque campagne et les lettres qu'il -lui écrivait, tant admirées de madame de Sévigné, ne déplaisaient -point et lui seraient un jour comptées. Il parut -à la cour lorsque les causes qui forçaient le roi à le tenir -éloigné eurent disparu. Louis XIV accorda au comte de -Bussy une pension de quatre mille francs, une de deux -mille francs pour son fils aîné<a id="FNanchor_309" href="#Footnote_309" class="fnanchor"> [309]</a>, et des bénéfices au cadet. -Madame de Sévigné n'avait pas en vain pressenti les défauts -d'éducation du jeune Bussy. Quelques années après -elle avertit son père que le jeune homme passait dans le -monde «pour être trop violent et trop avantageux en paroles.» -C'étaient précisément les défauts de son père, qui -prit assez mal cet avertissement. Quoique Bussy désirât -qu'avec la raison et l'esprit qui le distinguaient son fils améliorât -son caractère, il ne lui en voulut pas trop d'avoir mis, -comme il le dit, «sur la chaleur des Rabutin une dose de la -férocité des Rouville<a id="FNanchor_310" href="#Footnote_310" class="fnanchor"> [310]</a>.» Malgré ses défauts, le marquis -<span class="pagenum"><a id="Page_150"> 150</a></span> -de Bussy fut un brave militaire, qui se concilia la faveur -du Dauphin et de ses supérieurs et parcourut sa carrière -d'une manière plus brillante que son cousin le -baron de Sévigné. Malgré l'excellente éducation que celui-ci -avait reçue, malgré son esprit, son savoir, sa bravoure -et les puissants amis de sa mère, il fut obligé d'acheter -son grade; du vivant de madame de Sévigné, il -renonça à l'état militaire sans avoir obtenu aucun avancement; -puis, marié et veuf, il termina ses jours dans -l'obscurité d'une pieuse solitude<a id="FNanchor_311" href="#Footnote_311" class="fnanchor"> [311]</a>. Quand madame de -Sévigné, le comte et la comtesse de Bussy eurent disparu -du monde, Amable de Bussy, s'abandonnant à tous les -défauts de son caractère, força le roi à lui faire subir la -même peine qui avait été infligée à son père: il fut exilé -dans ses terres, où il mourut<a id="FNanchor_312" href="#Footnote_312" class="fnanchor"> [312]</a>.</p> - -<p>Sa sœur, Marie-Thérèse de Bussy-Rabutin, était filleule -de madame de Sévigné; Bussy l'avait fait recevoir chanoinesse -au chapitre de Remiremont; elle était pour lui -un correspondant très-habile. Six semaines avant le dîner -dont parle madame de Sévigné dans sa lettre du -14 octobre, Marie-Thérèse avait écrit de Paris à son père -pour lui rendre compte de la sanglante victoire remportée -par le prince de Condé à Senef; elle le fit avec une -exactitude de détails qu'auraient enviée le plus soigneux -<span class="pagenum"><a id="Page_151"> 151</a></span> -gazetier et l'écrivain le plus exercé aux narrations des -batailles. Ce fut elle qui annonça à Bussy que Sévigné -avait été, dans ce combat, blessé à la tête, et qu'à -cause du grand nombre d'officiers et de soldats tués -on devait convoquer l'arrière-ban<a id="FNanchor_313" href="#Footnote_313" class="fnanchor"> [313]</a>. Marie-Thérèse, -en 1677, fut mariée à Louis de Madaillan de Lesparre, -seigneur de Montataire, marquis de Lassay. Bussy eut à -se louer de son gendre, quoique son caractère parût -s'accorder peu avec le sien<a id="FNanchor_314" href="#Footnote_314" class="fnanchor"> [314]</a>. Par sa capacité pour les -affaires madame de Montataire fut, avant et depuis son -mariage, très-utile à sa mère, particulièrement dans -l'important procès que celle-ci eut à soutenir contre -Gabrielle d'Estrées de Longueval, veuve du maréchal -d'Estrées, et Françoise de Longueval, chanoinesse de -Remiremont, pour partager des biens de son aïeul -maternel<a id="FNanchor_315" href="#Footnote_315" class="fnanchor"> [315]</a>.</p> - -<p>Le jeune frère de madame de Montataire et du marquis -de Bussy (Michel Celse-Roger de Rabutin), qui n'était -<span class="pagenum"><a id="Page_152"> 152</a></span> -au temps dont nous parlons âgé que de six à sept ans, -appartient plutôt au dix-huitième siècle qu'au siècle de -Louis XIV. C'est cet homme aimable et spirituel, ami -de Voltaire et de Gresset, renommé comme le <i>Dieu de -la bonne compagnie</i> (de cette époque!), qui fut académicien -sans œuvre et évêque sans piété. Élevé au séminaire, -il fut peu connu de madame de Sévigné. Bussy -apprend à sa cousine que le roi a donné à ce fils un -prieuré de deux mille livres; qu'il a soutenu sa thèse -en Sorbonne avec l'approbation générale et qu'il a -surtout obtenu le suffrage du P. la Chaise<a id="FNanchor_316" href="#Footnote_316" class="fnanchor"> [316]</a>. Ce fut ce -fils de Bussy qui, devenu évêque de Luçon, contribua -le plus à la publicité des lettres de madame de -Sévigné à sa fille<a id="FNanchor_317" href="#Footnote_317" class="fnanchor"> [317]</a>: il devait trouver place dans ces -Mémoires.</p> - -<p>Ces trois enfants de Bussy étaient nés de Louise de -Rouville de Clinchamp, sa seconde femme, qu'il avait -épousée en 1650. Louise de Rouville était peu goûtée de -madame de Sévigné, probablement parce qu'elle montrait -peu d'esprit et qu'elle s'occupait uniquement de -ses enfants et des intérêts de sa famille<a id="FNanchor_318" href="#Footnote_318" class="fnanchor"> [318]</a>. Madame de -Sévigné négligeait même de répondre aux lettres qu'elle -en recevait, ou n'y répondait qu'indirectement dans les -lettres qu'elle adressait à Bussy. Quand une seule fois -elle en agit autrement, c'est pour lui témoigner sa surprise -<span class="pagenum"><a id="Page_153"> 153</a></span> -d'avoir reçu d'elle, en si bons termes, une invitation -de s'arrêter dans son château lorsqu'elle traversait -la Bourgogne pour aller en Provence, et c'est avec ce -ton d'assurance et de supériorité d'une femme de la -cour s'adressant à une provinciale: «Est-ce ainsi que -vous écrivez, madame la comtesse? Il y a du Rouville -et du Rabutin dans votre style.» La comtesse -de Rabutin ménageait beaucoup madame de Sévigné, -à cause des bontés qu'elle avait pour son fils aîné et -du bien qu'elle en disait alors<a id="FNanchor_319" href="#Footnote_319" class="fnanchor"> [319]</a>. Madame de Sévigné a -eu le tort de méconnaître le mérite de la comtesse de -Bussy: c'était une épouse dévouée, une excellente mère -et une femme d'une rare capacité pour les affaires; sollicitant -sans cesse pour désarmer les ennemis de son -mari, et attentive à exécuter toutes ses volontés<a id="FNanchor_320" href="#Footnote_320" class="fnanchor"> [320]</a>; suivant -avec persévérance de longs et difficiles procès, -et sachant les gagner. Bussy lui rendait justice, et il -sait la lui faire rendre par sa cousine. Celle-ci lui avait -écrit qu'elle craignait que la comtesse de Bussy ne se -tirât mal d'une vente considérable de biens qu'elle avait -à faire. Bussy répond:</p> - -<p>«La peine que vous avez, ma chère cousine, à croire -que madame de Bussy puisse faire vendre le bien de la -maréchale d'Estrées, vient de ce que vous croyez que -celle-ci a plus d'esprit que l'autre; et, en effet, il en -pourrait être quelque chose: elle sait mieux vivre et -parler; mais cela ne paye pas les dettes d'une maison, -<span class="pagenum"><a id="Page_154"> 154</a></span> -et madame de Bussy sait mieux les affaires, parce -qu'elle s'y est plus appliquée<a id="FNanchor_321" href="#Footnote_321" class="fnanchor"> [321]</a>.»</p> - -<p>Nos lecteurs se rappellent qu'outre les trois enfants de -Louise de Rouville Bussy avait eu trois filles de sa cousine -Gabrielle de Toulongeon<a id="FNanchor_322" href="#Footnote_322" class="fnanchor"> [322]</a>, qu'il avait épousée le -8 avril 1643 et qu'il perdit quatre ans après<a id="FNanchor_323" href="#Footnote_323" class="fnanchor"> [323]</a>. Cette femme -jolie, aimable et spirituelle, enlevée au monde à la fleur -de l'âge, fut vivement regrettée de son mari et de madame -de Sévigné, qui, par cette raison, eut pour ces -aînées des enfants de Bussy une préférence que justifièrent -leurs aimables qualités. Une de ces trois filles, -Charlotte, était morte probablement en bas âge. Il en -restait deux, qui, sous tous les rapports, faisaient honneur -à la famille des Rabutin. Nous ne dirons rien de la -plus âgée, Diane de Rabutin: celle-là, de tous les siens, -avait «certes choisi la meilleure part.» Faite pour plaire -par son esprit, par l'élégance et la gentillesse de ses -manières, elle s'était consacrée à Dieu; elle était cette -pieuse religieuse de Sainte-Marie de la Visitation<a id="FNanchor_324" href="#Footnote_324" class="fnanchor"> [324]</a> dont -madame de Sévigné disait: «Je me hâte de l'aimer -beaucoup, afin de n'être pas obligée de trop la respecter<a id="FNanchor_325" href="#Footnote_325" class="fnanchor"> [325]</a>.» -La plus jeune des filles de Bussy issues de Gabrielle -<span class="pagenum"><a id="Page_155"> 155</a></span> -de Toulongeon était Louise-Françoise, que nous -avons fait connaître à nos lecteurs dans la quatrième -partie de ces Mémoires<a id="FNanchor_326" href="#Footnote_326" class="fnanchor"> [326]</a>. Par les qualités de son esprit, -par l'amabilité de son caractère, c'était, de toutes les -filles de Bussy, la plus brillante, celle qui, par les charmes -de sa conversation et de son style épistolaire, -ressemblait le plus à madame de Sévigné. Elle a une -large part dans la correspondance de Bussy avec sa -cousine; et c'est afin que tout ce que nous dirons -d'elle par la suite soit bien compris des lecteurs que -nous nous sommes livré à ces détails sur tous les personnages -qui composaient la famille de Bussy. On se -rappelle comment Louise-Françoise (qu'on nommait exclusivement -mademoiselle de Bussy parce qu'elle était -l'aînée de toutes les filles de Bussy, pouvant être mariée) -faisait tout l'agrément de la maison paternelle. Une passion -funeste, dont nous aurons à considérer les phases -sous leur véritable point de vue, lui acquit, à une certaine -époque, une courte, mais malheureuse célébrité. -Le séducteur qui en fit sa victime, dans un libelle écrit -avec l'intention avouée de la diffamer<a id="FNanchor_327" href="#Footnote_327" class="fnanchor"> [327]</a> et de la rendre -odieuse, a cependant tracé de Louise-Françoise, alors -veuve du marquis de Coligny, le portrait suivant: «Madame -de Coligny est de la plus belle taille du monde; -<span class="pagenum"><a id="Page_156"> 156</a></span> -son air est modeste, doux et majestueux. Rien ne déplaît -de ce qu'elle montre, et tout ce qu'elle cache -coûte à sa beauté. On la respecte quand on la voit, on -l'aime dès qu'on la connaît; et les gens qui ne lui ont -pas trouvé l'art de plaire n'avaient pas de quoi sentir -qu'elle plaît sans art.»</p> - -<p>Nos lecteurs n'ont pas oublié comment le marquis de -Coligny, qui s'était présenté pour épouser Louise-Françoise, -fut écarté pour faire place aux prétentions du -comte de Limoges, qui plut encore moins que Coligny à -mademoiselle de Rabutin<a id="FNanchor_328" href="#Footnote_328" class="fnanchor"> [328]</a>. Après la mort du jeune -comte de Limoges, Coligny, malgré le refus qu'il avait -éprouvé, se remit sur les rangs; et Bussy, jugeant qu'il -ne fallait pas laisser passer le temps opportun pour marier -sa fille (elle avait vingt-huit ans et demi), agréa -les propositions du jeune marquis. Madame de Sévigné -eut indirectement connaissance de cette intention -de Bussy, et elle interrogea son cousin pour savoir -ce qui en était; il lui répondit<a id="FNanchor_329" href="#Footnote_329" class="fnanchor"> [329]</a>: «L'époux donc, ma -cousine, est presque aussi grand que moi; il a plus de -trente ans, l'air bon, le visage long, le nez aquilin et le -plus grand du monde; le teint un peu plombé, assez de -<span class="pagenum"><a id="Page_157"> 157</a></span> -la couleur de celui de Saucourt (chose considérable<a id="FNanchor_330" href="#Footnote_330" class="fnanchor"> [330]</a> en -un futur). Il a dix mille livres de rentes sur la frontière -du comté de la Bresse, dans les terres de Cressia, de -Coligny, d'Andelot, de Valfin et de Loysia, desquelles il -jouit présentement par la succession de Joachim de Coligny, -frère de sa mère. Le comte de Dalet, son père, remarié, -comme vous savez, avec mademoiselle d'Estaing, -jouit de la terre de Dalet et de celle de Malintras, et -après sa mort elles viennent au futur par une donation -que son père et sa mère firent, dans leur contrat de mariage, -de ces deux terres à leur fils aîné: elles valent encore -dix mille livres de rente et plus. Une de ses tantes -vient de lui faire donation d'une terre de trois mille livres -de rente après sa mort. Son intention est de prendre emploi -aussitôt qu'il sera marié. Sa maison de Cressia, qui sera -sa demeure, est à deux journées de Chaseu et à trois de -Bussy. J'ai donné à ma fille tout le bien de sa mère dès à -présent, et je ne la fais pas renoncer à ses droits paternels.»</p> - -<p>Ainsi Bussy avait tout arrangé et tout prévu pour le -bonheur de sa fille chérie: aussi madame de Sévigné, à -qui on demanda, par préférence, son consentement à ce -mariage, le donna-t-elle de grand cœur<a id="FNanchor_331" href="#Footnote_331" class="fnanchor"> [331]</a>; et à Chaseu, -le 5 novembre 1675, fut célébré le mariage du marquis -de Coligny de Gilbert de Langheac, comte de Dalet, avec -Louise-Françoise de Rabutin, qui devint ainsi la marquise -de Coligny<a id="FNanchor_332" href="#Footnote_332" class="fnanchor"> [332]</a>.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_158"> 158</a></span> -Elle eut un fils dès la première année de son mariage, -et les vaniteuses espérances de Bussy, partagées -par madame de Sévigné, parurent ainsi se réaliser. Ils -étaient tous deux flattés de voir le beau nom des Coligny -greffé sur celui des Rabutin. Le petit-fils de Bussy -(Marie-Roger) fut d'abord nommé d'Andelot<a id="FNanchor_333" href="#Footnote_333" class="fnanchor"> [333]</a>. Joli de -figure, aimable et spirituel, il fut un objet de tendresse -et d'orgueil pour son grand-père, qui, toujours frivole -jusque dans sa vieillesse, dit des vers pour favoriser les -premières amours de cet adolescent avec une jeune et -jolie fille de la maison de Damas<a id="FNanchor_334" href="#Footnote_334" class="fnanchor"> [334]</a>. Avant même que -Françoise de Rabutin fût accouchée de d'Andelot<a id="FNanchor_335" href="#Footnote_335" class="fnanchor"> [335]</a>, -Coligny était mort, peu regretté de sa femme, qu'il -avait quittée aussitôt après son mariage, pour se rendre -à l'armée du maréchal de Schomberg, où il fut tué<a id="FNanchor_336" href="#Footnote_336" class="fnanchor"> [336]</a>. -Sa veuve hérita de l'usufruit de tous ses biens. Elle aliéna -bientôt le beau nom de Coligny, sans vouloir porter -celui que lui imposait un second mariage, dont nous aurons -à raconter les romanesques circonstances. Elle -prit par la suite le nom de son beau-père, avec lequel -<span class="pagenum"><a id="Page_159"> 159</a></span> -elle eut un procès, qu'elle gagna, et se fit appeler comtesse -de Dalet<a id="FNanchor_337" href="#Footnote_337" class="fnanchor"> [337]</a>. Ce fut sous ce nom qu'elle publia les -Mémoires de son père, décédé. Son fils, qui avait pris le -nom de Coligny-Saligny, le changea pour celui de Langheac, -qui était le nom de famille de son grand-père<a id="FNanchor_338" href="#Footnote_338" class="fnanchor"> [338]</a>; -et comme il n'eut que des filles par son mariage avec -Jeanne-Palatine de Dio de Montpeyroux, le nom même de -Langheac, qui, quoique moins illustre que celui de Coligny, -rappelait une très-ancienne noblesse, disparut de la -postérité mâle des Bussy. Ainsi le temps se joue de la -présomption de ceux qui s'efforcent d'échapper à son -pouvoir<a id="FNanchor_339" href="#Footnote_339" class="fnanchor"> [339]</a>!</p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_160"> 160</a></span></p> -<h2 class="normal"><a id="CHAPITRE_VIII"></a>CHAPITRE VIII.<br /> -<span class="medium">1675.</span></h2> -</div> - -<p class="hanging indent">Tristesse de madame de Sévigné.—Mort de son oncle Chésières.—Départ -de madame de Grignan pour la Provence, et de Retz -pour la Lorraine.—Retz fait faire son portrait pour madame -de Grignan.—Il donne sa démission du cardinalat.—Elle n'est -pas acceptée.—Portrait de Retz par la Rochefoucauld.—Amitié -de madame de Sévigné pour Retz.—Elle se rend chez M. de Caumartin -pour recevoir ses adieux.—Retz veut donner une cassolette -d'argent à madame de Grignan.—Madame de Grignan la refuse.—Douleur -qu'éprouve madame de Sévigné de se séparer de -Retz.—Différence du caractère de madame de Grignan et de celui -de madame de Sévigné.—Madame de Sévigné se décide à quitter -Paris pour se rendre en Bretagne.</p> - -<p class="space">A la gaieté qu'avaient introduite dans la correspondance -de madame de Sévigné les lettres de Bussy et de -Guitaud et au plaisir qu'elle éprouvait de se trouver -réunie avec ceux qui lui étaient chers succéda l'expression -de la tristesse la plus accablante.</p> - -<p>Madame de Sévigné perdit son oncle Chésières<a id="FNanchor_340" href="#Footnote_340" class="fnanchor"> [340]</a>; sa -fille retourna en Provence; Retz, son bon cardinal, la -quitta pour aller en Lorraine, et son fils alla rejoindre -son régiment. «Je n'ai pas vécu depuis six semaines, -écrivait-elle au comte de Guitaud. L'adieu de ma fille -m'a désolée et celui du cardinal de Retz m'a achevée. -Il y a des circonstances, dans ces deux séparations, qui -m'ont assommée<a id="FNanchor_341" href="#Footnote_341" class="fnanchor"> [341]</a>.»</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_161"> 161</a></span> -Louis de la Tour-Coulanges, seigneur de Chésières, -troisième fils de l'aïeul maternel<a id="FNanchor_342" href="#Footnote_342" class="fnanchor"> [342]</a> de madame de Sévigné, -son premier tuteur, mourut en avril, après une courte -maladie de dix jours, lorsqu'il était encore plein de vie<a id="FNanchor_343" href="#Footnote_343" class="fnanchor"> [343]</a>: -il fut regretté de Bussy, de madame de Sévigné et des -nombreux amis qu'il s'était faits.</p> - -<p>Peu après, madame de Grignan partit de Paris; sa -mère la conduisit jusqu'à Fontainebleau. En cette ville, -à l'auberge du <i>Lion d'or</i>, qu'elle prit en aversion<a id="FNanchor_344" href="#Footnote_344" class="fnanchor"> [344]</a>, madame -de Sévigné s'en sépara le 24 mai<a id="FNanchor_345" href="#Footnote_345" class="fnanchor"> [345]</a>, jour à jamais -néfaste pour elle et qu'elle rappelle bien souvent avec -douleur<a id="FNanchor_346" href="#Footnote_346" class="fnanchor"> [346]</a>. Elle écrivit alors à Bussy: «Les sentiments -que j'ai pour la <i>Provençale</i>, il faut les cacher à la -plupart du monde, parce qu'ils ne sont pas vraisemblables<a id="FNanchor_347" href="#Footnote_347" class="fnanchor"> [347]</a>;» -puis, après sa séparation, elle se réfugie -seule à Livry, et sa correspondance avec madame de -<span class="pagenum"><a id="Page_162"> 162</a></span> -Grignan recommence par ces mots: «Quel jour, ma -fille, que celui qui ouvre l'absence<a id="FNanchor_348" href="#Footnote_348" class="fnanchor"> [348]</a>!» et elle soulage, -comme de coutume, sa peine par l'expression de sa vive -tendresse. Elle entretient madame de Grignan du cardinal -de Retz, qui alors faisait faire son portrait par un -religieux de Saint-Victor, dans le dessein d'en faire cadeau -à la <i>Provençale</i>.</p> - -<p>Madame de Sévigné, ainsi que je l'ai déjà dit<a id="FNanchor_349" href="#Footnote_349" class="fnanchor"> [349]</a>, ignorait -qu'alors Retz se préparât à donner un grand exemple -au monde. Quand elle connut sa résolution, son -attachement pour lui s'accrut en même raison que son -admiration et ses regrets. Par nature et par habitude, -Retz ne pouvait se passer d'exercer l'activité de son esprit. -Les loisirs forcés de sa retraite de Commercy avaient -pesé lourdement sur son existence. Il avait cherché une -distraction à son ennui en écrivant le récit des événements -de la Fronde. C'était retracer l'histoire de sa -jeunesse si brillante et si scandaleuse, alors que le bouillonnement -des passions et l'effervescence de l'imagination -marquaient tous ses jours par une variété de -plaisirs, d'agitation et d'intrigues. Le souvenir s'en -était gravé dans sa mémoire en traces ineffaçables; les -déposer sur le papier et les laisser après sa mort était -pour lui un besoin; il y trouvait du charme<a id="FNanchor_350" href="#Footnote_350" class="fnanchor"> [350]</a>. Mais il -<span class="pagenum"><a id="Page_163"> 163</a></span> -semble que cette tâche fut la dernière satisfaction qu'il -voulut accorder à son orgueil; car lorsqu'il l'eut terminée -il parut comme subitement touché de la grâce et -décidé à mener une vie de religieux et de pénitent. C'est -au même temps qu'il s'apprêtait à quitter Paris pour aller -se renfermer dans le monastère de Saint-Mihiel qu'on apprit -qu'il avait écrit au roi pour se démettre de son cardinalat<a id="FNanchor_351" href="#Footnote_351" class="fnanchor"> [351]</a>. -Quoi qu'il en puisse être (car à Dieu seul appartient -de sonder jusque dans les plus profonds replis de la conscience -humaine), madame de Sévigné crut à la conversion -de Retz; elle s'alarma des suites qu'elle pourrait avoir. -Le 7 juin, elle écrit à sa fille: «Je vis hier les Villars, dont -vous êtes révérée. Nous étions en solitude aux Tuileries; -j'avais dîné chez M. le cardinal, où je trouvai bien mauvais -de ne vous voir pas. J'y causai avec l'abbé de Saint-Mihiel -(dom Hennezon), à qui nous donnons, ce me semble, -comme en dépôt, la personne de Son Éminence. -Il me parut un fort honnête homme, un esprit droit et -tout plein de raison, qui a de la passion pour lui, qui le -gouverne même sur sa santé, et l'empêchera de prendre -le feu trop chaud sur la pénitence. Ils partiront mardi, -et ce sera encore un jour douloureux pour moi, quoiqu'il -ne puisse être comparé à celui de Fontainebleau<a id="FNanchor_352" href="#Footnote_352" class="fnanchor"> [352]</a>.» -Personne, parmi les amis des Sévigné, ne craignit comme -<span class="pagenum"><a id="Page_164"> 164</a></span> -elle que Retz ne prit «le feu trop chaud sur la pénitence;» -on ne voulut pas croire à la sincérité de conversion de -celui qui, cependant, avait été élevé par le pieux Vincent -de Paul. La Rochefoucauld fit, à cette occasion, -un portrait de Retz qui est un des morceaux les plus ingénieux, -les mieux peints et les mieux écrits qui soient -sortis de sa plume. Sévigné en transmit une copie à madame -de Grignan; ce portrait se termine ainsi: «La retraite -que Retz vient de faire est la plus fausse action de -sa vie: c'est un sacrifice qu'il fait à son orgueil sous -prétexte de dévotion; il quitte la cour, où il ne peut s'attacher, -et il s'éloigne du monde, qui s'éloigne de lui<a id="FNanchor_353" href="#Footnote_353" class="fnanchor"> [353]</a>.»</p> - -<p>Mais s'éloigner du monde quand le monde s'éloigne de -nous est déjà un acte de sagesse auquel bien des sages -ne peuvent se résoudre. Et ce qui montre dans Retz un -esprit supérieur, dompté par la religion et élevé par -elle au-dessus des rivalités et des rancunes de parti qui -l'avaient dominé si longtemps, c'est que madame de -Sévigné, qui le connaissait et savait l'apprécier, ne craignit -pas de lui communiquer le portrait que la Rochefoucauld -avait tracé de lui, et qu'il en fut satisfait. Dans -cette peinture, qu'il ne devait pas être censé connaître, -il ne fit attention qu'aux traits conformes à la vérité qui -lui étaient favorables, et bien saisis, bien touchés par -son satirique adversaire<a id="FNanchor_354" href="#Footnote_354" class="fnanchor"> [354]</a>.</p> - -<p>Madame de Sévigné ne doutait donc pas que son ami, -son parent Retz ne fût mû par les motifs les plus respectables. -Elle écrivait à Bussy, en lui parlant de ce cher -<span class="pagenum"><a id="Page_165"> 165</a></span> -cardinal: «Le monde, par rage de ne pouvoir mordre -sur un aussi beau dessein, dit qu'il en sortira. Hé bien, -envieux, attendez donc qu'il en sorte! et, en attendant, -taisez-vous. Car, de quelque côté qu'on puisse regarder -cette action, elle est belle; et si l'on savait comme -moi qu'elle vient purement du désir de faire son salut -et de l'horreur de sa vie passée, on ne cesserait de l'admirer<a id="FNanchor_355" href="#Footnote_355" class="fnanchor"> [355]</a>.»</p> - -<p>Lorsque madame de Sévigné écrivait des Rochers ces -lignes, Pomponne avait mandé au cardinal d'Estrées -que «le roi ne voulait pas que cet ambassadeur fît aucune -instance auprès du pape pour l'engager à rétracter -le refus qu'il avait fait d'accepter la démission de -Retz; et il lui donnait ordre, au contraire, d'assurer -à Sa Sainteté que Sa Majesté ne pourrait voir qu'avec -satisfaction qu'un sujet de ce mérite fût conservé dans le -sacré collége<a id="FNanchor_356" href="#Footnote_356" class="fnanchor"> [356]</a>.»</p> - -<p>Ainsi Retz resta cardinal, et même le pape lui donna -l'ordre de sortir de sa retraite de Saint-Mihiel. Il alla de -nouveau résider à Commercy; il reprit ses insignes et -le train de vie d'un prince de l'Église, mais non avec le -même luxe<a id="FNanchor_357" href="#Footnote_357" class="fnanchor"> [357]</a>. Madame de Sévigné en avertit sa fille, et lui -mande qu'elle peut lui écrire avec la liberté permise à -un grand dignitaire ecclésiastique; et même de ne pas -s'interdire avec lui quelques <i>chamarrures</i> qu'elle eût été -<span class="pagenum"><a id="Page_166"> 166</a></span> -forcée de supprimer s'il avait continué à vivre en cénobite<a id="FNanchor_358" href="#Footnote_358" class="fnanchor"> [358]</a>.</p> - -<p>Cependant Retz ne donna aucun lieu de croire que la -résolution qu'il avait prise ne fût pas sincère. Il édifia -par sa piété, se fit aimer des pauvres par sa bienfaisance -et des riches par sa bonté; sa modération, sa douceur, -l'égalité de son humeur et les charmes de sa conversation -lui firent des amis de tous ceux qui l'approchaient. -A Saint-Mihiel et à Commercy il avait inspiré une telle -vénération au peuple que tout le monde, hommes, femmes -et enfants, se mettait à genoux sur son passage<a id="FNanchor_359" href="#Footnote_359" class="fnanchor"> [359]</a>.</p> - -<p>Madame de Sévigné se rendit à la maison de campagne -de M. de Caumartin pour faire ses adieux à Retz -le 18 juin<a id="FNanchor_360" href="#Footnote_360" class="fnanchor"> [360]</a>; et alors elle écrit à sa fille:</p> - -<p>«Je vous assure, ma très-chère, qu'après l'adieu que -je vous fis à Fontainebleau, et qui ne peut être comparé -à nul autre, je n'en pouvais faire un plus douloureux -que celui que je fis hier au cardinal de Retz chez M. de -Caumartin, à quatre lieues d'ici... Madame de Caumartin -(c'est à elle que Retz avait adressé ses Mémoires) -arriva de Paris, et, avec tous les hommes qui étaient restés -au logis, elle vint nous trouver dans le bois. Je voulus -m'en retourner à Paris; ils m'arrêtèrent à coucher -sans beaucoup de peine. J'ai mal dormi; le matin, j'ai -<span class="pagenum"><a id="Page_167"> 167</a></span> -embrassé notre cher cardinal avec beaucoup de larmes -et sans pouvoir dire un mot aux autres. Je suis revenue ici, -où je ne puis me remettre encore de cette séparation: -elle a trouvé la fontaine assez en train; mais, en vérité, -elle l'aurait rouverte quand elle aurait été fermée.»</p> - -<p>Retz voulait faire présent d'une cassolette d'argent à -madame de Grignan, qui, malgré les instances de sa -mère, la refusa obstinément, et mécontenta ainsi par sa -hauteur le cardinal et madame de Sévigné<a id="FNanchor_361" href="#Footnote_361" class="fnanchor"> [361]</a>. Et cependant, -sans sa fin prématurée, Retz, qui comme cardinal -devait encore être utile à Louis XIV, aurait été le protecteur -du jeune marquis de Grignan, ainsi que, dans -le temps de sa grande puissance de factieux, il l'avait -été du jeune marquis de Sévigné, son parent, quand -il épousa Marie de Rabutin-Chantal<a id="FNanchor_362" href="#Footnote_362" class="fnanchor"> [362]</a>. Aussi madame de -Sévigné écrit-elle à sa fille précisément à ce sujet: -«Vous ne trouverez personne de votre sentiment, et -vous devez vous défier de vous quand vous êtes seule -de votre avis.»</p> - -<p>Retz avait bien annoncé à madame de Sévigné son -projet de retraite à Saint-Mihiel et sa démission du cardinalat; -mais il lui avait caché les efforts que le cardinal -d'Estrées, ambassadeur de France à Rome, faisait -pour que le pape et le sacré collége ne refusassent point -cette démission. Elle apprit tout cela par d'Hacqueville, -et ses inquiétudes furent d'autant plus vives qu'on lui -<span class="pagenum"><a id="Page_168"> 168</a></span> -dit aussi que le roi avait le dessein de donner ce chapeau -si délaissé par Retz à Forbin-Janson<a id="FNanchor_363" href="#Footnote_363" class="fnanchor"> [363]</a>, l'évêque -de Marseille, qu'elle considérait comme l'ennemi de -M. de Grignan. Aussi sa joie fut grande lorsqu'elle apprit -que Retz était, comme elle dit, <i>recardinalisé</i><a id="FNanchor_364" href="#Footnote_364" class="fnanchor"> [364]</a>.</p> - -<p>«D'Hacqueville (écrit-elle à sa fille) m'a fait grand -plaisir, cette dernière fois, de m'ôter la colère que j'avais -contre le cardinal d'Estrées. Il m'apprend que le -nôtre (le cardinal de Retz) a été refusé en plein consistoire, -sur sa propre lettre, et qu'après cette dernière -cérémonie il n'a plus rien à craindre; de sorte que le -voilà trois fois cardinal malgré lui, du moins les deux -dernières; car pour la première, s'il m'en souvient, il -ne fut pas trop fâché<a id="FNanchor_365" href="#Footnote_365" class="fnanchor"> [365]</a>. Écrivez-lui pour vous moquer -de son chagrin. D'Hacqueville en est ravi: je l'en aime. -Je reçois souvent de petits billets de ce cher cardinal; -je lui en écris aussi. Je tiens ce léger commerce mystérieux -et très-secret: il m'en est plus cher.»</p> - -<p>Ce qui attache le plus à madame de Sévigné quand -on lit ses lettres, ce qui devait la rendre adorable, c'est -moins le brillant de son esprit que les qualités de son -cœur. On lui pardonne volontiers son amour extravagant -pour sa fille en faveur de sa vivacité, de sa franchise, -de sa constance en amitié. Elle était aussi expansive, -aussi affectueuse que sa fille était froide et réservée. -Dans une lettre où madame de Sévigné se montre -<span class="pagenum"><a id="Page_169"> 169</a></span> -toujours plus charmée de sa correspondance avec madame -de Grignan, elle manifeste bien clairement la différence -qui existait entre elles deux et comment l'excès -de sa tendresse mettait obstacle aux jouissances de -leur réunion, comment elles ne pouvaient s'accorder -sur la nature des sentiments que l'une et l'autre ressentaient -pour Dieu et pour leurs amis.</p> - -<p>«Vous ne sentez pas, dit-elle, l'agrément de vos -lettres; il n'y a rien qui n'ait un tour surprenant. Nous -avons bien compris votre réponse au capucin: <i>Mon -père, qu'il fait chaud!</i> et nous ne trouvons pas que, de -l'humeur dont vous êtes, vous puissiez jamais aller à -confesse: comment parler à cœur ouvert à des gens inconnus? -C'est bien tout ce que vous pouvez faire à vos -meilleurs amis... Je vous remercie, ma fille, de la peine -que vous prenez de vous défendre si bien d'avoir jamais -été oppressée de mon amitié; il n'était pas besoin d'une -explication si obligeante; je crois de votre tendresse -pour moi tout ce que vous pouvez souhaiter que j'en -pense: cette persuasion fait le bonheur de ma vie. Vous -expliquez très-bien aussi cette volonté que je ne pouvais -deviner, parce que vous ne vouliez rien; je devais vous -connaître; et sur cet article je ferai encore mieux que -je n'ai fait, parce qu'il n'y a qu'à s'entendre. Quand mon -bonheur vous redonnera à moi, croyez, ma bonne, que -vous serez encore plus contente de moi mille fois que -vous ne l'êtes. Plût à Dieu que nous fussions déjà à portée -de voir le jour où nous pourrons nous embrasser<a id="FNanchor_366" href="#Footnote_366" class="fnanchor"> [366]</a>!»</p> - -<p>Madame de Grignan, qui n'avait pas, comme sa mère -<span class="pagenum"><a id="Page_170"> 170</a></span> -la conscience timorée d'une janséniste, ne comprenait -pas comment madame de Sévigné, à cause de la tendresse -qu'elle lui portait, n'osait s'approcher de la sainte -table, et elle l'avait raillée sur ses scrupules. Madame de -Sévigné lui répond:</p> - -<p>«Vous riez, mon enfant, de la pauvre amitié; vous -trouverez qu'on lui fait trop d'honneur de la prendre -pour un empêchement de la dévotion; il ne lui appartient -pas d'être un obstacle au salut. On ne la considère -jamais que par comparaison; mais je crois qu'il suffit -qu'elle remplisse tout le cœur pour être condamnable; -et quoi que ce puisse être qui nous occupe de cette -sorte, c'est plus qu'il n'en faut pour n'être pas en état de -communier. Vous voyez que l'affaire du syndic (la nomination -du marquis de Maillane<a id="FNanchor_367" href="#Footnote_367" class="fnanchor"> [367]</a>) m'avait mise hors de -combat; enfin, c'est une pitié que d'être si vive: il faut -tâcher de calmer et de posséder un peu son âme; je -n'en serai pas moins à vous, et j'en serai un peu plus à -moi-même. Corbinelli me priait fort d'entrer dans ce -sentiment; il est vrai que son absence me donne une -augmentation de chagrin: il m'aime fort, je l'aime -aussi; il m'est bon à tout ce que je veux. Mais il faut -que je sois dénuée de tout pendant mon voyage en Bretagne; -j'ai tant de raisons pour y aller que je ne puis pas -y mettre la moindre incertitude<a id="FNanchor_368" href="#Footnote_368" class="fnanchor"> [368]</a>.»</p> - -<p>Pauvre mère! combien ce voyage de Bretagne, qui -l'éloignera de sa fille, lui pèse! Ni ses judicieuses réflexions -<span class="pagenum"><a id="Page_171"> 171</a></span> -ni les conseils de Corbinelli ne lui servent de -rien; et elle est encore obligée de demander pardon à la -<i>philosophie</i> de sa fille de lui faire voir tant de faiblesse. -«Mais (ajoute-t-elle), une fois entre mille, ne soyez -point fâchée que je me donne le soulagement de vous -dire ce que je souffre si souvent sans en rien dire à personne. -Il est vrai que la Bretagne nous va encore éloigner; -c'est une rage: il semble que nous voulions nous -aller jeter chacune dans la mer, et laisser toute la -France entre nous deux. Dieu nous bénisse<a id="FNanchor_369" href="#Footnote_369" class="fnanchor"> [369]</a>!»</p> - -<p>Elle ne put se résoudre à partir pour la Bretagne -sans avoir terminé les affaires de sa fille<a id="FNanchor_370" href="#Footnote_370" class="fnanchor"> [370]</a>. Elle fut aussi -fort occupée de son fils. Sévigné s'ennuyait de ne point -obtenir d'avancement; il voulait résigner son grade de -guidon des gendarmes et devenir colonel d'un régiment; -il espérait avoir celui du comte de Sanzei, son parent, tué -à l'affaire de Consabrick<a id="FNanchor_371" href="#Footnote_371" class="fnanchor"> [371]</a>. Madame de Sévigné sollicitait -cette place pour son fils. La veuve du comte de Sanzei était -Anne-Marie de Coulanges, sœur d'Emmanuel de Coulanges -et par conséquent la cousine de madame de Sévigné: -il semble donc que ce régiment appartenait à la -famille des Coulanges et des Sévigné. Malgré les sollicitations -du vicomte de Marsilly, que madame de Sévigné -nommait son résident auprès de Louvois, on ne donna -point ce régiment à Sévigné, qui fut très-mécontent de -<span class="pagenum"><a id="Page_172"> 172</a></span> -ce refus<a id="FNanchor_372" href="#Footnote_372" class="fnanchor"> [372]</a>. Sa mère désirait le marier et l'arracher à ses -intrigues d'amour, qui nuisaient à sa santé et l'empêchaient -de s'occuper de son avancement<a id="FNanchor_373" href="#Footnote_373" class="fnanchor"> [373]</a>.</p> - -<p>Tandis que la cour abandonnait Fontainebleau, où elle -avait passé tout l'été, madame de Sévigné se décidait -à quitter la capitale pour se rendre en Bretagne<a id="FNanchor_374" href="#Footnote_374" class="fnanchor"> [374]</a>. Elle -n'ignorait pas que cette province était en révolte ouverte; -mais elle était entraînée par la nécessité de ses affaires<a id="FNanchor_375" href="#Footnote_375" class="fnanchor"> [375]</a>.</p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_173"> 173</a></span></p> -<h2 class="normal">CHAPITRE IX.<br /> -<span class="medium">1674-1675.</span></h2> -</div> - -<p class="hanging indent">Madame de Grignan s'alarme du projet de madame de Sévigné d'aller -en Bretagne.—Succès de Louis XIV; conquête de la Franche-Comté, -du Roussillon.—Bataille de Senef.—Accroissement des -impôts.—Misère du peuple, qui se révolte en Bretagne et en -Guienne.—Le duc de Chaulnes quitte Cologne et se rend en Bretagne.—On -annonce qu'on va y envoyer des troupes.—Le duc -de Chaulnes s'y oppose.—Une émeute à Rennes.—Madame de -Sévigné diffère son voyage.—Elle se décide à aller à Nantes.—Forbin -conduit six mille hommes en Bretagne.—Le duc de Chaulnes, -détesté des Bretons, sévit contre eux.—Madame de Sévigné -veut qu'on agisse avec énergie contre les révoltés, mais désapprouve -le despotisme de Louis XIV.—Refus fait à madame de Froulay.—Tragique -histoire d'un passementier à Paris.—Les états de Bretagne -s'assemblent à Dinan.—Sommes accordées.—Madame de -Sévigné s'indigne du servilisme des députés.—Elle blâme l'évêque -de Saint-Malo.—Libertés de la province violées par l'envoi -des troupes.—Remontrances au roi à ce sujet.—Madame de Sévigné -manifeste ses sentiments désapprobateurs.—Elle approuve son -fils, qui les partage.—D'Harouis, trésorier des états.—Mauvaise -situation de ses affaires.—Inquiétudes de madame de Sévigné à ce -sujet.—Elles se réalisent par la suite.—Les comptes de d'Harouis -sont examinés.—Vers de la Fontaine à ce sujet.—D'Harouis est -condamné à une prison perpétuelle.—Il est plaint et secouru.</p> - -<p class="space">Aussitôt que madame de Grignan eut appris que sa -mère se disposait à se rendre en Bretagne, elle s'alarma, -et lui écrivit pour la détourner de faire ce voyage. Madame -de Sévigné lui répondit:</p> - -<p>«Vous êtes bonne sur vos lamentations de Bretagne; -je voudrais avoir Corbinelli; vous l'aurez à Grignan. Je -vous le recommande; et moi j'irai voir ces coquins qui -<span class="pagenum"><a id="Page_174"> 174</a></span> -jettent des pierres dans le jardin du patron (du duc de -Chaulnes, gouverneur de Bretagne). On dit qu'il y a cinq -ou six cents bonnets bleus en Bretagne qui auraient -bon besoin d'être pendus, pour leur apprendre à parler. -La haute Bretagne est sage, et c'est mon pays<a id="FNanchor_376" href="#Footnote_376" class="fnanchor"> [376]</a>.»</p> - -<p>Elle se trompait. Il est bien vrai que partout Louis XIV -triomphait. La conquête de la Franche-Comté était achevée. -Le comte de Schomberg avait défait les Espagnols et -les avait chassés du Roussillon<a id="FNanchor_377" href="#Footnote_377" class="fnanchor"> [377]</a>. La flotte des Hollandais, -commandée par Ruyter, avait été repoussée de Belle-Ile<a id="FNanchor_378" href="#Footnote_378" class="fnanchor"> [378]</a> -et de la Martinique<a id="FNanchor_379" href="#Footnote_379" class="fnanchor"> [379]</a>. Le prince d'Orange, après le sanglant -combat de Senef<a id="FNanchor_380" href="#Footnote_380" class="fnanchor"> [380]</a>, avait été forcé de lever le siége -d'Oudenarde. Turenne avait battu les Allemands à Ensisheim<a id="FNanchor_381" href="#Footnote_381" class="fnanchor"> [381]</a>, -à Mulhausen<a id="FNanchor_382" href="#Footnote_382" class="fnanchor"> [382]</a>, à Turkheim<a id="FNanchor_383" href="#Footnote_383" class="fnanchor"> [383]</a>. Vaubrun avait pris -Dachstein<a id="FNanchor_384" href="#Footnote_384" class="fnanchor"> [384]</a>. Vivonne, après avoir dispersé l'armée navale -d'Espagne, était entré dans Messine<a id="FNanchor_385" href="#Footnote_385" class="fnanchor"> [385]</a> et d'Estrades avait -mis une garnison dans la citadelle de Liége<a id="FNanchor_386" href="#Footnote_386" class="fnanchor"> [386]</a>. Dinan s'était -rendu au maréchal de Créquy<a id="FNanchor_387" href="#Footnote_387" class="fnanchor"> [387]</a>, Huy au marquis de -Rochefort<a id="FNanchor_388" href="#Footnote_388" class="fnanchor"> [388]</a>, Limbourg au duc d'Enghien<a id="FNanchor_389" href="#Footnote_389" class="fnanchor"> [389]</a>. La Suède fait -<span class="pagenum"><a id="Page_175"> 175</a></span> -une diversion en faveur de la France<a id="FNanchor_390" href="#Footnote_390" class="fnanchor"> [390]</a>. Les colonies nouvellement -fondées prospèrent, et le roi nomme le premier -évêque de Québec<a id="FNanchor_391" href="#Footnote_391" class="fnanchor"> [391]</a>. Sobieski s'assied sur le trône de Pologne -par l'influence de Louis XIV, et la femme de la cour -du grand monarque qu'il avait épousée devient reine de -la Pologne<a id="FNanchor_392" href="#Footnote_392" class="fnanchor"> [392]</a>. Enfin madame de Sévigné écrivait: «Rien -n'égale le bonheur des Français.» Et cependant c'est -alors qu'il y eut des révoltes alarmantes en Guienne et -en Bretagne, et qu'on craignit pour la Normandie, où -les ennemis de la France entretenaient des intelligences. -L'accroissement des impôts et la nécessité d'appesantir -le joug du despotisme, qui en était la conséquence, furent -la cause de ces troubles. Les dépenses de la guerre, -les constructions de Versailles, le luxe de la cour, les largesses -faites aux courtisans, aux maîtresses, aux ministres -forcèrent Colbert, qui avait aussi part à ces largesses, de -recourir à des taxes inaccoutumées, nuisibles à l'agriculture -et au commerce. On afferma ces nouveaux impôts à -des traitants, qui les rendaient, par leurs exactions, plus -odieux au peuple. Les taxes sur le papier timbré et sur la -vaisselle d'étain offensèrent surtout la Guienne; celles sur -le tabac parurent intolérables aux paysans bretons<a id="FNanchor_393" href="#Footnote_393" class="fnanchor"> [393]</a>. Ces -mécontentements étaient sourdement excités par les parlements, -que Louis XIV avait contraints (février 1673) à -enregistrer sans délibération ses édits avant de s'occuper -d'aucune autre affaire; ce qui les réduisait à n'être plus que -des cours de justice, et leur ôtait toute importance politique. -<span class="pagenum"><a id="Page_176"> 176</a></span> -Le feu de la rébellion était aussi attisé par les membres -du tiers état, qui étaient punis par l'exil ou par la -prison s'ils se permettaient de parler avec liberté dans -les assemblées provinciales ou lorsqu'ils se montraient -opposés aux demandes du gouvernement. Le duc de -Chaulnes, qu'on avait tiré du congrès de Cologne pour -l'envoyer dans son gouvernement de Bretagne, avait -averti Colbert du danger que courait l'ordre public si on -ne renonçait pas à l'exécution stricte et rigoureuse des -impôts, si on ne remédiait pas aux vexations des traitants. -Mais Colbert, qui voulait partout une comptabilité -uniforme, répondit que les édits étaient exécutés en Languedoc -et en Bourgogne; et il enjoignit au duc de -Chaulnes de faire en sorte qu'il en fût de même en Bretagne<a id="FNanchor_394" href="#Footnote_394" class="fnanchor"> [394]</a>. -Comme il y avait eu une légère émeute à Rennes, -on donna ordre aux archers de Normandie de se rendre -dans cette ville. De Chaulnes écrivit que l'exécution d'une -telle mesure était le moyen de faire soulever Rennes et -toute la province. Il espérait, si on révoquait cet ordre, -pouvoir assurer la tranquillité. Il était parvenu à la rétablir -sans rigueur et sans violence. «Il n'y a, écrivait-il, -qu'en l'évêché de Quimper où les paysans s'attroupent -tous les jours; et toute leur rage est présentement contre -les gentilshommes, dont ils ont reçu de mauvais traitements<a id="FNanchor_395" href="#Footnote_395" class="fnanchor"> [395]</a>. -Il est certain que la noblesse a traité fort rudement -<span class="pagenum"><a id="Page_177"> 177</a></span> -les paysans; ils s'en vengent présentement, et -ont exercé déjà, vers cinq ou six, de très-grandes barbaries, -les ayant blessés et pillé leurs maisons, et même -brûlé quelques-unes<a id="FNanchor_396" href="#Footnote_396" class="fnanchor"> [396]</a>.» Le duc de Chaulnes ne se maintint -pas longtemps dans ces dispositions bienveillantes; -il y eut, le 18 juillet<a id="FNanchor_397" href="#Footnote_397" class="fnanchor"> [397]</a>, une nouvelle émeute à Rennes, et -madame de Sévigné la raconte ainsi à sa fille:</p> - -<p>«On a recommencé, dit-elle, à piller un bureau à -Rennes; madame de Chaulnes est à demi morte des -menaces qu'on lui fait tous les jours. On me dit hier -qu'elle était arrêtée, et que même les plus sages l'ont -retenue, et ont mandé à M. de Chaulnes, qui est au Fort-Louis, -que, si les troupes qu'il a demandées font un pas -dans la province, madame de Chaulnes court risque -d'être mise en pièces. Il n'est cependant que trop vrai -qu'on doit envoyer des troupes; et on a raison de le -faire, car, dans l'état où sont les choses, il ne faut pas -de remèdes anodins<a id="FNanchor_398" href="#Footnote_398" class="fnanchor"> [398]</a>.»</p> - -<p>La légèreté avec laquelle madame de Sévigné parle -des souffrances du peuple blesse avec raison les sentiments -des lecteurs modernes et lui a été souvent reprochée. -Il est bien vrai que, redoutant pour ses amis et pour -elle-même les suites de la révolte, elle désirait qu'elle -fût réprimée avec énergie; mais elle blâmait, elle détestait -la tyrannie qui rendait cette répression nécessaire -et les cruelles rancunes du gouverneur, son ami. Cette -<span class="pagenum"><a id="Page_178"> 178</a></span> -insensibilité qui nous surprend n'est qu'apparente, et le -ton léger avec lequel elle s'exprime est une amère ironie. -Nombre de fois, dans sa correspondance, elle manifeste -toute l'indépendance d'une janséniste, d'une ancienne -frondeuse, du parti sous les drapeaux duquel -avaient lutté, avaient combattu les Condé, les la Rochefoucauld, -les Retz, qui étaient restés ses amis. Elle -se moque et elle bafoue la servilité des courtisans, l'immoralité -des gens d'Église, l'avidité des ministres et des -gens en place, la facilité des états de Bretagne à prodiguer -l'argent des contribuables; et, malgré son admiration -sincère pour Louis XIV, elle déteste en lui son -arrogante domination et sa dureté despotique.</p> - -<p>«La royauté (écrit-elle à madame de Grignan) est -établie au delà de ce que vous pouvez vous imaginer; -on ne se lève plus, on ne regarde plus personne. L'autre -jour, une pauvre mère tout en pleurs, qui a perdu le -plus joli garçon du monde, demandait cette charge à -Sa Majesté, elle passa. Ensuite, et tout à genoux, cette -pauvre madame de Froulay (elle réclamait le prix de la -charge de maréchal des logis qu'elle avait achetée pour -son fils, tué à la guerre) se traîna à ses pieds, lui demandant -avec des cris et des sanglots qu'elle eût pitié d'elle: -Sa Majesté passa sans s'arrêter<a id="FNanchor_399" href="#Footnote_399" class="fnanchor"> [399]</a>.»</p> - -<p>Madame de Sévigné annonce ainsi le prochain départ -du roi: «Je vous ai mandé, ma très-chère, comme -nos folies de Bretagne m'arrêtaient pour quelques jours. -M. de Forbin (le bailli de Forbin, capitaine-lieutenant -de la première compagnie des mousquetaires et lieutenant -<span class="pagenum"><a id="Page_179"> 179</a></span> -général) doit partir avec six mille hommes pour -punir notre Bretagne, c'est-a-dire la ruiner. Ils s'en -vont par Nantes; c'est ce qui fait que je prendrai la -route du Mans avec madame de Lavardin.» Cependant -elle se décida à passer par Nantes, et put se convaincre -qu'on faisait plus que ruiner la province<a id="FNanchor_400" href="#Footnote_400" class="fnanchor"> [400]</a>.</p> - -<p>«Nos pauvres Bas-Bretons (mande-t-elle à sa fille -quand elle fut arrivée au terme de son voyage) s'attroupent -quarante, cinquante par les champs; et dès qu'ils -voient les soldats ils se jettent à genoux, et disent <i>Mea -culpa</i>; c'est le seul mot de <i>français</i> qu'ils sachent, -comme nos Français disaient qu'en Allemagne le seul -mot de <i>latin</i> qu'on disait à la messe, c'était <i>Kyrie, eleison</i>. -On ne laisse pas de pendre ces pauvres Bas-Bretons; -ils demandent à boire et du tabac, et qu'on les -dépêche<a id="FNanchor_401" href="#Footnote_401" class="fnanchor"> [401]</a>.»</p> - -<p>C'est alors même que madame de Sévigné annonce -qu'on a fait filer les troupes en Bretagne et que M. de -Pomponne a donné à M. de Forbin les noms des terres -de son fils pour qu'elles fussent ménagées qu'elle fait connaître -à sa fille les affreuses conséquences de l'énormité -des taxes dans les provinces, dans la capitale, dans les -villes, aussi bien que dans les campagnes. «Voici, dit-elle, -une petite histoire qui se passa il y a trois jours. Un pauvre -passementier, dans le faubourg Saint-Marceau, était taxé -à dix écus pour un impôt sur les maîtrises; il ne les avait -pas. On le presse et represse; il demande du temps, on -le lui refuse; on prend son pauvre lit et sa pauvre écuelle. -<span class="pagenum"><a id="Page_180"> 180</a></span> -Quand il se vit en cet état, la rage s'empara de son cœur; -il coupa la gorge à trois de ses enfants qui étaient dans -sa chambre; sa femme sauva le quatrième et s'enfuit. -Le pauvre homme est au Châtelet; il sera pendu dans un -jour ou deux. Il dit que tout son déplaisir c'est de n'avoir -pas tué sa femme et l'enfant qu'elle a sauvé. Songez, -ma fille, que cela est vrai comme si vous l'aviez vu, -et que depuis le siége de Jérusalem il ne s'est pas vu -une telle fureur<a id="FNanchor_402" href="#Footnote_402" class="fnanchor"> [402]</a>.»</p> - -<p>L'assise des états de Bretagne s'ouvrit, cette année, le -9 novembre (1675), dans la salle des Jacobins de Dinan; -elle fut close le 12 décembre. Les trois millions demandés -au nom du roi et les gratifications au duc de Chaulnes, -au marquis de Lavardin et à l'évêque de Saint-Malo -(président de l'Église), etc., furent accordés sans difficulté. -Cependant, malgré la terreur qui pesait sur les états, -ils osèrent envoyer des commissaires au roi, pour s'opposer -à ce qu'on mît en Bretagne des troupes en quartier -d'hiver: ils représentèrent que c'était une mesure illégale -et contraire aux droits et aux franchises de la province. -Je transcrirai ici ce qui est dit à ce sujet dans le procès-verbal -de l'assise sur la réponse faite au nom du roi:</p> - -<p>«<i>Du 10 décembre 1675.</i> Monseigneur le duc de -Chaulnes est entré en l'assemblée, et a dit qu'ayant écrit -à Sa Majesté que la province était alarmée de ce que Sa -Majesté, au préjudice des contrats faits entre Sa Majesté -et elle, y avait envoyé des troupes en quartier -d'hiver, il avait reçu une lettre de Sa Majesté par laquelle -elle l'assurait que ce qu'elle en avait fait était -<span class="pagenum"><a id="Page_181"> 181</a></span> -par nécessité, se trouvant chargée d'une infinité de -troupes qu'elle avait été obligée de distribuer dans les -provinces; que cela ne tirerait à conséquence, et que Sa -Majesté conserverait toujours les priviléges de la province<a id="FNanchor_403" href="#Footnote_403" class="fnanchor"> [403]</a>.»</p> - -<p>Madame de Sévigné cette fois, animée d'un vrai patriotisme -breton, fait bien ressortir tout ce que cette réponse -à la protestation avait de dérisoire, et montre en -même temps combien elle ressentait vivement le malheur -des populations; mais quoiqu'elle blâme ses amis, -ce n'est pas sur eux qu'elle dirige les traits les plus acérés -de sa critique. Ceux-ci, le duc de Chaulnes et le -marquis de Lavardin étaient cependant les premiers exécuteurs -des ordres du roi et de ses ministres; mais, dans -les intervalles de ces orages passagers de la politique, -les deux premiers couvraient madame de Sévigné de -leur protection et la garantissaient de toutes vexations: -dans les temps calmes, ils la comblaient de soins, de -louanges, de politesse, et ils ajoutaient infiniment aux -agréments de son séjour aux Rochers. Elle n'accusait -pas non plus d'Harouis, qui, en qualité de trésorier des -états, était le surintendant des finances, le Fouquet de -la Bretagne; de même que Fouquet, fastueux, grand, -généreux, prodigue des richesses, peu scrupuleux sur -les moyens d'en acquérir, et, comme lui, se précipitant -aussi par la ruine dans la prison. Madame -de Sévigné ne voyait en d'Harouis qu'un parent qui -lui était dévoué, qu'un ami désintéressé, toujours prêt -à venir à son secours dans tous ses embarras d'affaires; -<span class="pagenum"><a id="Page_182"> 182</a></span> -et elle avait autant d'amitié pour lui qu'elle en -avait eu pour Fouquet, avec plus d'admiration encore<a id="FNanchor_404" href="#Footnote_404" class="fnanchor"> [404]</a>.</p> - -<p>C'est sur un autre parent des Sévigné, sur Sébastien -de Guémadeuc, évêque de Saint-Malo, qu'elle se plaît -à épancher tout le fiel de sa censure. Cependant il n'avait -eu que la plus petite part aux maux dont elle se -plaignait; il avait été envoyé en qualité de commissaire -près du roi pour faire des représentations contre la mise -des troupes en quartier d'hiver, et avait eu le malheur -de rapporter cette réponse dont elle se plaint avec juste -raison. Quoique cette fois les états se tinssent loin d'elle, -elle était parfaitement bien informée de tout ce qui s'y -passait, et elle en instruit madame de Grignan.</p> - -<p>«Voici, dit-elle, des nouvelles de notre province; -j'en ai reçu un fagot de lettres: les Lavardin, les Boucherat -et les d'Harouis me rendent compte de tout. M. de -Harlay demanda trois millions<a id="FNanchor_405" href="#Footnote_405" class="fnanchor"> [405]</a>, chose qui ne s'est jamais -donnée que quand le roi vint à Nantes; pour moi, j'aurais -cru que c'eût été pour rire. Ils promirent d'abord, -comme des insensés, de les donner; et en même temps -M. de Chaulnes proposa de faire une députation au roi -pour l'assurer de la fidélité de la province et de l'obligation -qu'elle lui a d'avoir bien voulu envoyer des troupes -pour la remettre en paix, et que sa noblesse n'a eu -aucune part aux désordres qui sont arrivés. M. de Saint-Malo -<span class="pagenum"><a id="Page_183"> 183</a></span> -se botte aussitôt pour le clergé; Tonquedec voulait -aller pour la noblesse; mais M. de Rohan (président -des états) a voulu aller, et un autre pour le tiers<a id="FNanchor_406" href="#Footnote_406" class="fnanchor"> [406]</a>. Ils -passèrent tous trois avant-hier à Vitré; il est inouï qu'un -président de la noblesse ait jamais fait une pareille -course... On ne voit point l'effet de cette députation; -pour moi, je crois que tout est réglé et joué, et qu'ils -nous rapporteront quelque grâce. Je vous le manderai; -mais jusqu'ici nous n'en voyons pas davantage<a id="FNanchor_407" href="#Footnote_407" class="fnanchor"> [407]</a>.»</p> - -<p>Puis elle continue trois semaines après, et dit:</p> - -<p>«M. de Lavardin est mon résident aux états; il m'instruit -de tout; et comme nous mêlons quelquefois de -l'italien dans nos lettres, je lui avais mandé, pour lui expliquer -mon repos et ma paresse ici:</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p class="i3">..... D'ogni oltraggio e scorno</p> -<p>La mia famiglia e la mia greggia illese</p> -<p>Sempre qui fur, ne strepito di Marte</p> -<p>Ancor turbò questa remota parte<a id="FNanchor_408" href="#Footnote_408" class="fnanchor"> [408]</a>.</p> -</div></div> - -<p>«A peine ma lettre a-t-elle été partie qu'il est arrivé -à Vitré huit cents cavaliers, dont la princesse (de Tarente) -est bien mal contente: il est vrai qu'ils ne font que passer; -mais ils vivent, ma foi, comme dans un pays de conquête, -<span class="pagenum"><a id="Page_184"> 184</a></span> -nonobstant notre bon mariage avec Charles VIII -et Louis XII. Les députés sont revenus de Paris; M. de -Saint-Malo, qui est Guémadeuc, votre parent, et sur le -tout une <i>linote mitrée</i>, comme disait madame de Choisy, -a paru aux états, transporté et plein des bontés du roi -et surtout des honnêtetés particulières qu'il a eues pour -lui, sans faire attention à la ruine de la province, qu'il a -apportée agréablement avec lui; ce style est d'un bon -goût à des gens pleins, de leur côté, du mauvais état de -leurs affaires. Il dit que Sa Majesté est contente de la -Bretagne et de son présent; qu'elle a oublié le passé, et -que c'est par confiance qu'on envoie ici huit mille hommes, -comme on envoie un équipage chez soi quand on -n'en a que faire<a id="FNanchor_409" href="#Footnote_409" class="fnanchor"> [409]</a>.»</p> - -<p>Et précédemment elle avait dit:</p> - -<p>«Nos députés, qui étaient courus si extravagamment -porter la nouvelle du don, ont eu la satisfaction que notre -présent a été reçu sans chagrin; et, contre l'espérance de -toute la province, ils reviennent sans rapporter aucune -grâce. Je suis accablée des lettres des états; chacun se -presse de m'instruire: ce commerce de traverse me fatigue -un peu. On tâche d'y réformer les libéralités et les pensions, -et l'on reprend de vieux règlements qui couperaient -tout par la moitié; mais je parie qu'il n'en sera rien; et -comme cela tombe sur nos amis les gouverneurs, lieutenants -généraux, commissaires du roi, premiers présidents -et autres, on n'aura ni la hardiesse ni la générosité -de rien retrancher<a id="FNanchor_410" href="#Footnote_410" class="fnanchor"> [410]</a>.»</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_185"> 185</a></span> -Elle se trompait encore, et elle se trouva bientôt dans -l'heureuse nécessité d'annoncer à sa fille qu'elle a trop -mal jugé ses compatriotes.</p> - -<p>«Nos états sont finis<a id="FNanchor_411" href="#Footnote_411" class="fnanchor"> [411]</a>; il nous manque neuf cent mille -francs de fonds; cela me trouble à cause de M. d'Harouis. -On a retranché toutes les pensions et qualifications à -moitié. M. de Rohan n'osait, dans la tristesse où est cette -province, donner le moindre plaisir; mais M. de Saint-Malo, -<i>linote mitrée</i>, âgé de soixante ans, a commencé, -vous croyez que c'est les prières de quarante heures; -c'est le bal à toutes les dames et un grand souper: ç'a été -un scandale public. M. de Rohan, honteux, a continué. -C'est ainsi que nous chantons en mourant, semblables au -cygne; car mon fils le dit, et il cite l'endroit où il l'a lu: -c'est sur la fin de Lucrèce<a id="FNanchor_412" href="#Footnote_412" class="fnanchor"> [412]</a>.»</p> - -<p>Ce n'était pas seulement à sa fille qu'elle manifestait -ces sentiments, c'était encore dans les visites qu'elle faisait -à Vitré et dans les cercles de hauts personnages des -états, dans ses entretiens avec la femme du gouverneur, -la duchesse de Chaulnes; et elle applaudissait aux discours -de son fils, qui soutenait les mêmes opinions<a id="FNanchor_413" href="#Footnote_413" class="fnanchor"> [413]</a>. Pour -ce dernier, ce n'était pas le moyen d'avancer ni d'être -bien en cour; mais, indépendamment des motifs de bien -<span class="pagenum"><a id="Page_186"> 186</a></span> -public et d'intérêt particulier qui faisaient désapprouver -à madame de Sévigné la facilité des députés de Bretagne -à voter d'aussi fortes contributions sur le pays où elle -avait sa plus grande propriété, une autre cause agissait -fortement sur elle: c'était l'amitié qu'elle avait pour -d'Harouis, son cousin germain, qui avait contracté -mariage avec Madeleine de Coulanges, morte en 1662. -La mauvaise situation pécuniaire de ce financier était -un secret qui commençait à se divulguer, et l'on doutait -qu'il pût réaliser la somme de trois millions qui -avait été votée.</p> - -<p>Le 11 décembre, madame de Sévigné avait écrit à sa -fille:</p> - -<p>«Je crois que nous ne laisserons pas de trouver ou -du moins de promettre toujours les trois millions, sans -que notre ami (M. d'Harouis) soit abîmé; car il s'est coulé -une affection pour lui dans les états qui fait qu'on ne songe -qu'à l'empêcher de périr<a id="FNanchor_414" href="#Footnote_414" class="fnanchor"> [414]</a>.» Cela était impossible. D'Harouis -était un homme sans ordre, qui se faisait beaucoup -de partisans en donnant l'argent sans compter avec lui-même -ni avec l'État. De l'aveu même de madame de Sévigné -(qui changea d'opinion sur son compte), «cette passion -d'obliger tout le monde sans mesure et sans raison, -offusquant toutes les autres, le rendait injuste<a id="FNanchor_415" href="#Footnote_415" class="fnanchor"> [415]</a>.» L'affection -qu'on avait pour lui, dont parle madame de Sévigné, -était grande, et l'empêcha de faire faillite à cette époque où -<span class="pagenum"><a id="Page_187"> 187</a></span> -sa perte paraissait certaine<a id="FNanchor_416" href="#Footnote_416" class="fnanchor"> [416]</a>. Mais en fermant les yeux sur -son désordre on rendit son malheur plus infaillible, et on -fit perdre beaucoup d'argent à la province. Il put cependant -vivre ainsi durant douze ans encore, et était devenu -le créancier de madame de Sévigné<a id="FNanchor_417" href="#Footnote_417" class="fnanchor"> [417]</a>; mais en 1687 -il fut fait un nouveau règlement général par les états -de Bretagne réunis à Saint-Brieuc, afin de remédier aux -abus qui s'étaient introduits pendant les années de négligence; -et le chapitre XIV de ce règlement, concernant -uniquement le trésorier général et ses commis, soumit -ces comptables à un contrôle rigoureux<a id="FNanchor_418" href="#Footnote_418" class="fnanchor"> [418]</a>. D'Harouis se -trouva dans l'impossibilité de rendre ses comptes. C'est -alors que l'on nomma la Briffe, conseiller d'État<a id="FNanchor_419" href="#Footnote_419" class="fnanchor"> [419]</a>, pour -examiner la gestion du trésorier des états de Bretagne, -qui fut arrêté et interrogé; et c'est peu de temps après que -la Fontaine, écrivant au prince de Conti, lui disait<a id="FNanchor_420" href="#Footnote_420" class="fnanchor"> [420]</a>:</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p>La Briffe est chargé des affaires</p> -<p>Du public et du souverain.</p> -<p>Au gré de tous il sut enfin</p> -<p>Débrouiller ce chaos de dettes</p> -<p>Qu'un maudit compteur avait faites.</p> -</div></div> - -<p>D'Harouis, <i>ce maudit compteur</i>, fut complétement -<span class="pagenum"><a id="Page_188"> 188</a></span> -ruiné et mis à la Bastille, où il mourut le 10 novembre -1699<a id="FNanchor_421" href="#Footnote_421" class="fnanchor"> [421]</a>. Il justifia, dans sa disgrâce, la tendresse que -madame de Sévigné avait pour lui. D'Harouis a joui du -bonheur bien rare de conserver dans l'infortune les amis -qu'il s'était acquis dans sa prospérité; et Saint-Simon, -dans ses Mémoires<a id="FNanchor_422" href="#Footnote_422" class="fnanchor"> [422]</a>, fait à ce sujet cette remarque: -«C'est, je crois, l'unique exemple d'un comptable de -deniers publics avec qui ses maîtres et tout le public -perdent sans que sa probité en ait reçu le plus léger -soupçon. Les perdants même le plaignirent; tout le -monde s'affligea de son malheur; ce qui fit que le roi -se contenta d'une prison perpétuelle. Il la souffrit sans -se plaindre, et la passa dans une grande piété, fort -visité de beaucoup d'amis et secouru de plusieurs.» -Presque toujours la religion recevait dans ses bras les -hommes de ce siècle, les consolait dans leur infortune -et, par l'attente du bonheur éternel, les rattachait à la -vie!</p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_189"> 189</a></span></p> -<h2 class="normal"><a id="CHAPITRE_X"></a>CHAPITRE X.<br /> -<span class="medium">1675-1676.</span></h2> -</div> - -<p class="hanging indent">L'opinion du peuple se tourne contre Louis XIV, et attribue les malheurs -publics à ses amours avec madame de Montespan.—Le parti -religieux cherche à se séparer d'elle.—Un prêtre refuse l'absolution -à madame de Montespan.—Le curé et Bossuet sont consultés, -et déclarent tous deux que le prêtre a fait son devoir.—Bossuet -et Bourdaloue profitent de cette circonstance pour persuader au roi -et à madame de Montespan de se séparer.—Ils le promettent.—Le -roi et madame de Montespan communient tous deux le jour de -la Pentecôte.—Le roi écrit à Colbert pour qu'il pourvoie aux dépenses -de madame de Montespan, et fasse en sorte de la distraire.—Elle -construit Clagny.—Le roi revient de l'armée, et ordonne que -madame de Montespan soit réintégrée à Versailles, mais avec -l'intention de ne pas renouer son commerce avec elle.—Madame de -Montespan cherche à le faire changer de résolution.—Elle y parvient.—Son -triomphe est complet.—La cour reprend sa splendeur -et ses plaisirs.—Racine fait jouer <i>Iphigénie</i>.—Boileau compose -l'épître à Seignelay contre les flatteurs.—On rejoue l'opéra de -<i>Thésée</i>.—Le ministre de Pomponne mène madame de Sévigné à -ce spectacle.—Vers du Prologue: ils sont tout entiers à la louange -du roi.</p> - -<p class="space">Madame de Sévigné, en donnant à sa fille de désastreuses -nouvelles, ajoute: «Le peuple dit que c'est à -cause de <i>Quantova</i> (madame de Montespan<a id="FNanchor_423" href="#Footnote_423" class="fnanchor"> [423]</a>.»</p> - -<p>Ce peu de mots nous apprend que l'opinion publique, -qui s'était montrée si favorable à la jeunesse de Louis XIV, -se tournait contre lui. Ses amours avec la Vallière, sur -<span class="pagenum"><a id="Page_190"> 190</a></span> -lesquelles se reflétaient les premiers rayons de sa gloire, -avaient trouvé plus de sympathie que de blâme. La mémoire -de Henri IV, plus récente et plus populaire que -celle de saint Louis, avait habitué la nation à considérer -le libre commerce avec la beauté comme un des -priviléges et presque une des qualités d'un roi français. -Mais la prolongation des guerres engagea de -plus en plus le gouvernement dans la voie du despotisme. -Par les impôts excessifs les fortunes privées furent -anéanties, et les populations appauvries par le sang -versé sur les champs de bataille. Les provinces étaient -mécontentes, et ne pouvaient pardonner à Louis XIV -son luxe, ses prodigalités et le scandale de sa liaison -avec une femme mariée. Il se forma à la cour un parti -composé d'hommes sincèrement attachés au monarque -et à la monarchie, dans l'espoir d'opérer une réforme -salutaire. Ce parti, qu'on pouvait appeler le parti pieux, -parce que ses principaux chefs se faisaient remarquer -par leur zèle pour la religion, était peu considérable; -mais il était puissamment soutenu par les dignitaires -ecclésiastiques et par le contraste que présentaient -alors les mœurs sévères des magistrats, des bourgeois -industrieux, économes et rangés et la classe licencieuse, -besoigneuse, des nobles grands seigneurs, des courtisans -et des militaires. Dès que ce parti s'aperçut que la -pensée du salut acquérait tous les jours plus de force -dans l'esprit du roi, il espéra le rendre tout entier à sa -<i>bonne petite Espagnole</i>, à la reine, que, par intérêt pour -sa dynastie, par attachement, par conscience d'honnête -homme, le roi n'avait jamais entièrement négligée<a id="FNanchor_424" href="#Footnote_424" class="fnanchor"> [424]</a>. Bourdaloue -<span class="pagenum"><a id="Page_191"> 191</a></span> -et Bossuet, qui donnaient les appuis de la raison -à la foi, et à la piété la chaleur du sentiment, considéraient -tous deux comme l'acte le plus méritoire envers -Dieu et le plus utile à l'humanité, de soumettre aux -préceptes de la religion et aux lois de l'Église le plus -puissant souverain du monde. Ils employaient pour y -parvenir tous les moyens qui n'étaient pas incompatibles -avec leurs scrupules religieux. La victoire qu'ils -avaient remportée sur la Vallière leur permettait d'en -espérer une plus décisive encore; mais ce second triomphe -était plus difficile à obtenir. Ils n'avaient pas, il est -vrai, à combattre dans Montespan ce sentiment profond, -inaltérable, sincère, désintéressé qui faisait de la Vallière -une victime disposée à quitter la vie plutôt qu'à renoncer -à son amour; mais cet amour de la Vallière était sans -joie, sans consolation, sans espérance, et torturait le -cœur de celle qu'il subjuguait, par le supplice incessant -de la jalousie. On put donc persuader à cette infortunée -qu'elle échapperait au désespoir en se jetant au pied de -la croix, et que là le calme de ses sens, les extases de -l'amour divin lui feraient anticiper, dès cette vie même, -les pures délices que Dieu, dans la vie éternelle, réserve -à ses élus.</p> - -<p>Bien différente était Montespan, qui, en devenant la -maîtresse de Louis XIV, avait moins cédé à l'amour qu'à -la séduction. Si, en public, elle se conformait à tout -ce qu'exigeaient d'elle l'étiquette de la cour et son titre de -dame d'honneur; quand Louis était chez elle, le roi disparaissait, -elle ne voyait plus que l'amant. Voluptueuse -<span class="pagenum"><a id="Page_192"> 192</a></span> -et tendre, capricieuse et fière, par sa conversation pleine -d'à-propos, de verve et de gaieté, par ses saillies, qu'on -n'oublie pas et qu'on répète, elle ne permettait pas à -l'ennui de se glisser dans ces longs tête-à-tête. Elle satisfaisait -son amour-propre et la haute opinion que -Louis XIV avait de lui-même en faisant ressortir par des -mots piquants les ridicules et les faiblesses de ceux qui -l'approchaient. Elle avait avec lui des rapports de ressemblance -dans ses qualités et dans ses défauts, qui devaient -contribuer à la force et à la durée de leur mutuel -attachement. Comme lui elle aimait le faste, le luxe -et la grandeur; plus que lui elle avait le goût et le sentiment -des arts et de la poésie; elle prenait intérêt à tout -ce qui pouvait augmenter la gloire de la France, et -ses idées sur la politique et les affaires d'État étaient -justes et élevées. De toutes les femmes que Louis XIV -a aimées, elle fut certainement la seule qui obtint sur -lui un véritable empire, la seule qui força les ministres -à compter avec elle, la seule qui ait osé combattre -les préventions justes ou injustes du monarque tout-puissant -et qui, en toute circonstance, ait lutté courageusement -en faveur de ses amis ou de ceux qu'elle avait -pris sous sa protection. Aussi fut-elle, de toutes les maîtresses -de Louis XIV, la seule que les courtisans aient -regrettée.</p> - -<p>Montespan était encore trop enivrée de l'orgueilleux -plaisir de l'avoir emporté sur sa rivale pour qu'on pût -espérer que ses scrupules lui donnassent la force de -rompre ses liens. Ceux qui entreprenaient de faire d'elle -une maîtresse répudiée et de lui ôter le seul dédommagement -du sacrifice de son honneur, sacrifice que la -noble fierté de sa naissance et les vertueux penchants -<span class="pagenum"><a id="Page_193"> 193</a></span> -de sa jeunesse lui avaient rendu pénible<a id="FNanchor_425" href="#Footnote_425" class="fnanchor"> [425]</a>, ceux-là -devenaient nécessairement ses ennemis déclarés. -En travaillant à la conversion de la Vallière lorsque -Louis XIV était épris de Montespan, on n'avait pas la -crainte de déplaire et de s'attirer une disgrâce à laquelle -personne alors n'était insensible; mais la pieuse ligue -qui entreprenait d'enlever au roi celle qui le charmait -par son esprit autant que par ses grâces et sa beauté -pouvait craindre les terribles effets de son ressentiment.</p> - -<p>Les hommes religieux qui formaient cette ligue ne -pouvaient être retenus par de telles considérations; ils -savaient que Louis et Montespan, en cédant à la force de -leur passion, ne renonçaient pas pour cela à l'héritage -de Jésus-Christ, mais qu'ils considéraient comme un -privilége de leur rang de pouvoir s'écarter de quelques-uns -de ses divins commandements, pourvu qu'ils se soumissent -à ceux plus impérieusement exigés par l'Église. -Cette aberration, qui leur était commune avec un grand -nombre de catholiques peu fervents, moins élevés -qu'eux en dignités, ne les aveuglait pas au point qu'à -l'approche des grandes fêtes leur conscience ne fût troublée -et leur repos intérieur détruit par de puissants -scrupules.</p> - -<p>Le jeudi saint 11 avril (1675), madame de Montespan -se présenta au tribunal de la pénitence devant un prêtre -de sa paroisse, se croyant assurée d'obtenir l'approbation -nécessaire pour communier le jour de Pâques -(14 avril). Le prêtre<a id="FNanchor_426" href="#Footnote_426" class="fnanchor"> [426]</a> lui refusa l'absolution. L'orgueil -de Montespan fut révolté d'une telle audace. Elle s'en -<span class="pagenum"><a id="Page_194"> 194</a></span> -plaignit au roi, qui fit venir le curé<a id="FNanchor_427" href="#Footnote_427" class="fnanchor"> [427]</a>. Celui-ci déclara -que le prêtre avait fait son devoir. Le roi appela près de -lui Bossuet; et Bossuet non-seulement approuva la conduite -du prêtre, mais il dit au roi que l'Église avait toujours -décidé<a id="FNanchor_428" href="#Footnote_428" class="fnanchor"> [428]</a> «que, dans des circonstances semblables, -une séparation entière et absolue était une disposition -indispensable pour être admis à la participation des sacrements.» -Le roi fut singulièrement troublé en apprenant, -de la bouche du prélat qui avait toute sa confiance, -qu'alors qu'il se disposait à affronter à la guerre -de nouveaux périls il ne pouvait faire ses pâques, à -moins de se soumettre aux décisions de L'Église. Bossuet -saisit cette occasion pour agir fortement sur l'esprit du -monarque: Louis XIV consentit à tout. Le prélat fut -chargé d'aller annoncer à madame de Montespan la résolution -du roi, de faire ses efforts pour la persuader à -en prendre volontairement une semblable et à s'éloigner -de la cour. «Mes paroles, écrivait Bossuet au -roi, ont fait verser à madame de Montespan beaucoup -de larmes; et certainement, sire, il n'y a point de plus -juste sujet de pleurer que de sentir qu'on a engagé -à la créature un cœur que Dieu veut avoir. Qu'il est -malaisé de se retirer d'un funeste engagement! Mais -cependant, sire, il le faut; ou il n'y a point de salut à -espérer<a id="FNanchor_429" href="#Footnote_429" class="fnanchor"> [429]</a>.»</p> - -<p>Madame de Montespan parut décidée à se conformer -aux intentions du roi et comme lui se soumettre aux -<span class="pagenum"><a id="Page_195"> 195</a></span> -injonctions de Bossuet. Elle se retira à Clagny, et -Louis XIV s'empressa de donner des ordres à Colbert<a id="FNanchor_430" href="#Footnote_430" class="fnanchor"> [430]</a> -pour qu'il pourvût à toutes les dépenses qu'elle voudrait -y faire. Le roi enjoignit au ministre de prévenir les désirs -de celle qu'il lui était si pénible d'affliger et de lui procurer -toutes sortes de distractions. Madame de Montespan -usa largement des dons du roi. A l'aide de Mansart et -de Le Nôtre et des habiles artistes qu'ils appelèrent à -leur aide, elle fit de Clagny un magnifique séjour, une -miniature de Versailles; et les sommes auxquelles Colbert -dut pourvoir pour cette résidence excédèrent de -beaucoup celles que le roi avait, l'année précédente, -paru honteux d'exiger du sage administrateur de ses finances. -Par une lettre écrite de son camp près de Dôle<a id="FNanchor_431" href="#Footnote_431" class="fnanchor"> [431]</a>, -Louis XIV donnait ordre à Colbert de commander pour -madame de Montespan un collier de belles perles, des -boucles d'oreilles, des bracelets, des boutons et des boîtes -ornées en diamants, d'autres en pierres de toutes -couleurs. Avant de faire cette commande, qui est minutieusement -détaillée dans sa lettre, Louis XIV commence -par dire au ministre: «Madame de Montespan ne veut -pas absolument que je lui donne des pierreries; cela paraît -extraordinaire, mais elle ne veut pas entendre raison -sur les présents. Je veux avoir de quoi lui prêter à point -nommé ce qu'elle désirera.»</p> - -<p>Dans sa nouvelle et élégante retraite, madame de -<span class="pagenum"><a id="Page_196"> 196</a></span> -Montespan reçut de fréquentes visites de la reine; toute -la cour s'empressa autour d'elle, et jamais elle ne fut -comblée de plus d'honneurs, ne parut jouir de plus de -crédit et de puissance<a id="FNanchor_432" href="#Footnote_432" class="fnanchor"> [432]</a> que depuis qu'elle sembla vouloir -renoncer à toutes les grandeurs du monde et à tout -attachement illégitime.</p> - -<p>Le roi était parti de Saint-Germain le samedi 11 mai, -pour rejoindre son armée de Flandre. Il n'avait pas -manqué à la promesse faite à Bossuet, et il autorisa le -prélat à lui écrire pour l'entretenir dans les pieuses dispositions -qu'il lui avait inspirées. Ce fut alors que l'illustre -précepteur de l'héritier du trône transmit au roi -lui-même, pour son usage personnel, des instructions -qui sont d'admirables monuments de son zèle apostolique<a id="FNanchor_433" href="#Footnote_433" class="fnanchor"> [433]</a>. -Pénétré de l'importance de sa mission, Bossuet -écrivait en même temps au maréchal de Bellefonds: -«Priez Dieu pour moi, je vous en conjure; et priez-le -pour qu'il me délivre du plus grand poids dont un homme -puisse être chargé, et qu'il fasse mourir tout l'homme -en moi, pour n'agir que pour lui seul<a id="FNanchor_434" href="#Footnote_434" class="fnanchor"> [434]</a>.»</p> - -<p>Bossuet, qui comprenait que le succès de cette grande -œuvre dépendait principalement de madame de Montespan, -ne la négligeait pas. Il écrivait au roi, à son sujet: -«Je vois autant que je puis madame de Montespan, -comme Votre Majesté me l'a commandé. Je la trouve -assez tranquille; elle s'occupe beaucoup de bonnes œuvres, -<span class="pagenum"><a id="Page_197"> 197</a></span> -et je la vois fort touchée des vérités que je lui propose, -qui sont les mêmes que je dis à Votre Majesté. -Dieu veuille les mettre à tous deux dans le fond du cœur -et achever son ouvrage, afin que tant de larmes, tant -de violence, tant d'efforts que vous avez faits sur vous-même -ne soient pas inutiles<a id="FNanchor_435" href="#Footnote_435" class="fnanchor"> [435]</a>!»</p> - -<p>Par sa docilité à suivre les conseils de Bossuet, madame -de Montespan put communier le 2 juin, jour de la -Pentecôte<a id="FNanchor_436" href="#Footnote_436" class="fnanchor"> [436]</a>, deux jours avant la profession de foi de -madame de la Vallière<a id="FNanchor_437" href="#Footnote_437" class="fnanchor"> [437]</a>. Le roi communia le même jour, -dans son camp de Latines<a id="FNanchor_438" href="#Footnote_438" class="fnanchor"> [438]</a>, «avec beaucoup de marques -de piété,» dit Pellisson. Il avait près de lui son nouveau -confesseur. C'était le P. la Chaise, jésuite. La Chaise -était un gentilhomme, âgé de cinquante-un ans, auteur -d'un excellent abrégé de philosophie. On le disait sévère, -et Bossuet avait fondé de grandes espérances sur -son concours: il se trompait. Il eût été mieux servi par -le confesseur janséniste de madame de Sévigné, qui lui -refusa de la laisser communier, comme firent le roi et -madame de Montespan, le jour de la Pentecôte, parce -que la préoccupation de sa fille l'empêchait d'être suffisamment -à Dieu; rigueur que madame de Sévigné approuva, -en bonne janséniste. «Je me suis trouvée si uniquement -occupée et remplie de vous, dit-elle, que, mon -cœur n'étant capable de nulle autre pensée, on m'a défendu -<span class="pagenum"><a id="Page_198"> 198</a></span> -de faire mes dévotions à la Pentecôte; et c'est savoir -le christianisme<a id="FNanchor_439" href="#Footnote_439" class="fnanchor"> [439]</a>.»</p> - -<p>Le roi revint, non pas tel qu'il était à son départ: les -pieuses exhortations de Bossuet ne s'étaient pas entièrement -effacées de son esprit. Le prélat avait fait promettre -une séparation absolue comme condition essentielle du -salut, et par conséquent demandé, exigé<a id="FNanchor_440" href="#Footnote_440" class="fnanchor"> [440]</a> que madame -de Montespan fût expulsée de la cour. A cet égard l'auteur -du <i>Traité de Philosophie</i>, le P. la Chaise, se montra -moins rigoureux que Bossuet. Les courtisans amis -de madame de Montespan qui étaient à l'armée avec le -roi tournèrent en ridicule l'exigence de l'évêque. Était-il -possible de bannir entièrement de la cour une dame -d'honneur de la reine, que l'exercice de sa charge y attachait -nécessairement? Et qui ne voyait qu'en croyant -éviter un scandale le prélat en causait un plus grand, -dont tout le monde se préoccuperait? Le roi, persuadé -par ces discours, se décida à ne pas tenir sa promesse. -Bossuet, informé de son changement de résolution, voulut -encore tenter un dernier effort. Il alla résolument de -lui-même au-devant de Sa Majesté, et la joignit à huit -lieues de Versailles. Sans être appelé, Bossuet parut inopinément -devant Louis XIV. Son visage était triste et -sévère: «Ne me dites rien! lui cria le roi dès qu'il l'aperçut -de loin. J'ai donné des ordres pour qu'on préparât -au château le logement de madame de Montespan.»</p> - -<p>«Le roi (écrit à sa fille madame de Sévigné, qui -ignorait tout ce qui s'était passé entre Bossuet et -<span class="pagenum"><a id="Page_199"> 199</a></span> -Louis XIV) arriva dimanche matin à Versailles (21 juillet -1675); la reine, madame de Montespan et toutes les -dames étaient allées, dès le samedi, reprendre tous leurs -appartements ordinaires. Un moment après être arrivé, -le roi alla faire ses visites. La seule différence, c'est qu'on -joue dans les grands appartements que vous connaissez<a id="FNanchor_441" href="#Footnote_441" class="fnanchor"> [441]</a>.» -Cette différence était grande: elle indiquait que, -bien que la séparation absolue exigée par Bossuet au -nom de l'Église n'eût pas eu lieu, cependant Louis XIV -hésitait encore, et qu'il se contentait de jouir de la présence -et de la société d'une femme dont les grâces, l'enjouement, -l'esprit, l'élévation des sentiments, les sympathies -pour sa gloire étaient devenus pour lui un -dédommagement indispensable aux peines et aux soucis -de la royauté. Tout n'était donc pas perdu pour madame -de Montespan; et ce qui le prouve c'est ce qu'écrit madame -de Sévigné à sa fille quatre jours après: «La cour -s'en va à Fontainebleau; c'est <span class="smallc">Madame</span> qui le veut. Il -est certain que l'<i>ami de Quantova</i> (Louis XIV) a dit à -sa femme et à son curé par deux fois: «Soyez persuadés -que je n'ai pas changé les résolutions que j'avais -en partant; fiez-vous à ma parole, et instruisez les -curieux de mes sentiments<a id="FNanchor_442" href="#Footnote_442" class="fnanchor"> [442]</a>.»</p> - -<p>Dominé par l'influence des habitudes de sa jeunesse, -Louis XIV, on le savait, ne pouvait se contraindre: il -s'abandonnait sans résistance et sans scrupule aux séductions -<span class="pagenum"><a id="Page_200"> 200</a></span> -des belles femmes de sa cour, par lesquelles il -était sans cesse assiégé; mais aucune de celles qui avaient -profité des intervalles laissés à ses désirs par les grossesses -ou les courtes absences de madame de Montespan n'avait -pu parvenir à toucher son cœur, à intéresser son esprit. -Toutes n'avaient obtenu que le facile et honteux -triomphe d'être pendant quelques mois, ou même quelques -heures, l'objet préféré du caprice des sens; toutes -n'avaient fait que fortifier, par la comparaison, le vif -attachement qu'il avait pour sa maîtresse. Si, par tous -les moyens qu'elle possédait d'agir sur son esprit, elle -était restée à la cour dans l'unique but de seconder le -parti religieux et de rendre à la reine son époux, madame -de Montespan, majestueuse et belle, serait devenue -l'objet de l'admiration générale; elle eût exercé sur les -affaires d'État une salutaire influence, que, du vivant de -Louis XIV, aucune femme à la cour n'a su obtenir; elle -eût paru incorporée à la gloire du grand siècle comme -une divinité bienfaisante: elle eût régné!</p> - -<p>Telle avait été, après les communions de la Pentecôte, -l'espérance du parti moral et religieux, de Montausier, -du maréchal de Bellefonds, des Colbert, des -duchesses d'Albret, de Richelieu. On apprend, par les -lettres de madame de Sévigné, quelle brillante et honorable -existence pour madame de Montespan cet espoir -seul avait fait naître. Madame de Sévigné écrit à sa fille, -tandis que le roi était encore à l'armée au camp de Nerhespen<a id="FNanchor_443" href="#Footnote_443" class="fnanchor"> [443]</a>: -«Vous jugez très-bien de <i>Quantova</i>. Si elle -<span class="pagenum"><a id="Page_201"> 201</a></span> -ne peut point reprendre ses vieilles brisées, elle poussera -son autorité et sa grandeur au-dessus des nues; mais il -faudrait qu'elle se mît en état d'être aimée toute l'année -sans scrupule. En attendant, sa maison est pleine de toute -la cour; les visites se font alternativement, et sa considération -est sans bornes.»</p> - -<p>Cependant dès lors même on doutait de la constance -du roi et de madame de Montespan à garder la résolution -qu'ils avaient prise. A propos de la grande-duchesse -de Toscane (Marguerite-Louise d'Orléans), qui, après -quinze ans de séjour, avait quitté son mari et venait en -France<a id="FNanchor_444" href="#Footnote_444" class="fnanchor"> [444]</a> dans l'espoir de plaire à Louis XIV, le même -jour où la vue du saint sacrement qu'on portait à deux -soldats suisses qui allaient être fusillés comme déserteurs -donna au roi l'idée de leur faire grâce<a id="FNanchor_445" href="#Footnote_445" class="fnanchor"> [445]</a>, madame de Sévigné -écrit à sa fille: «Je suis persuadée qu'elle aimerait -fort cette <i>maison</i> (c'est-à-dire le cœur du roi), qui -n'est point à louer. Ah! qu'elle n'est point à louer! et -que l'autorité et la considération seront poussés loin si -la conduite du retour est habile! Cela est plaisant, que -tous les intérêts de <i>Quanto</i> et toute sa politique s'accordent -avec le christianisme, et que le conseil de ses amis -ne soit que la même chose avec celui de M. de Condom. -Vous ne sauriez vous représenter le triomphe où elle est -au milieu de ses ouvriers (à Clagny), qui sont au nombre -de douze cents; le palais d'Appollidon<a id="FNanchor_446" href="#Footnote_446" class="fnanchor"> [446]</a> et les jardins -d'Armide en sont une légère description. La femme -<span class="pagenum"><a id="Page_202"> 202</a></span> -de son ami solide (<i>la reine</i>) lui fait des visites, et toute -la famille tour à tour; elle passe nettement devant toutes -les duchesses; et celle qu'elle a placée (<i>madame de Richelieu</i>) -témoigne tous les jours sa reconnaissance par -les pas qu'elle fait faire<a id="FNanchor_447" href="#Footnote_447" class="fnanchor"> [447]</a>.» Et, dans une lettre du mois -précédent, elle avait écrit: «La reine alla hier faire -collation à Trianon; elle descendit à l'église, puis à Clagny, -où elle prit madame de Montespan dans son carrosse, -et la mena avec elle à Trianon<a id="FNanchor_448" href="#Footnote_448" class="fnanchor"> [448]</a>.»</p> - -<p>La séparation du roi et de madame de Montespan ne -pouvait être connue à la cour sans l'être aussi à Paris et -dans la province. Madame de Scudéry en écrivit en ces -termes à Bussy-Rabutin: «Le roi et madame de Montespan -se sont quittés, dit-on, s'aimant plus que leur vie, -purement par principe de religion; on dit qu'elle retournera -à la cour sans être logée au château et sans voir -jamais le roi que chez la reine... La douce et tranquille -amitié suffit pour bien remplir un cœur. Pour moi, je -trouve que madame de Montespan aura deux paradis au -lieu d'un: elle sera toujours aimée, et elle saura qu'il n'y -aura que Dieu au-dessus d'elle dans son cœur<a id="FNanchor_449" href="#Footnote_449" class="fnanchor"> [449]</a>.»</p> - -<p>Mais on apprend, par la réponse de Bussy, que lui ne -se laissait point abuser par ces belles apparences; il en -était de même de madame de Sévigné: elle prévit quel -<span class="pagenum"><a id="Page_203"> 203</a></span> -serait le dénoûment de cette amoureuse épopée. Deux -jours après, écrivant encore à sa fille, elle revient sur -cette remarquable visite de la reine à madame de Montespan, -et dit: «La reine fut voir madame de Montespan -à Clagny le jour que je vous avais dit qu'elle l'avait prise -en passant; elle monta dans sa chambre, où elle fut une -demi-heure; elle alla dans celle de M. du Vexin<a id="FNanchor_450" href="#Footnote_450" class="fnanchor"> [450]</a>, qui -était un peu malade, et puis emmena madame de Montespan -à Trianon, comme je vous l'avais mandé. Il y a -des dames qui ont été à Clagny: elles trouvèrent la belle -si occupée des ouvrages et des enchantements que l'on -fait pour elle que, pour moi, je me représente Didon -qui fait bâtir Carthage. La suite de cette histoire ne se -ressemblera pas<a id="FNanchor_451" href="#Footnote_451" class="fnanchor"> [451]</a>.»</p> - -<p>Madame de Montespan parut quelque temps vouloir -participer à la bonne résolution du roi et se montrer -satisfaite «d'être aimée toute l'année sans scrupule.» -Bossuet lui-même crut à cet effort de sa raison, et c'est -peut-être ce qui le fit relâcher de la décision rigoureuse -qu'il avait donnée, au nom de l'Église, de la nécessité -d'une séparation absolue. Il prononça, dit-on, que rien -n'empêchait madame de Montespan de rester à la cour, -d'y remplir sa charge de dame d'honneur de la reine et -d'y vivre aussi chrétiennement qu'ailleurs<a id="FNanchor_452" href="#Footnote_452" class="fnanchor"> [452]</a>.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_204"> 204</a></span> -On peut suivre dans les lettres de madame de Sévigné, -qui mit toujours beaucoup d'empressement à se faire initier, -autant qu'elle le pouvait, dans le secret des petits -appartements du roi et à en instruire sa fille, cette phase -curieuse de la liaison des amours de Louis XIV et de madame -de Montespan.</p> - -<p>«Toutes les dames de la reine sont précisément celles -qui font compagnie à madame de Montespan: on y joue -tour à tour, on y mange; il y a des concerts tous les -soirs; rien n'est caché, rien n'est secret; les promenades -en triomphe. Cet air déplairait encore plus à une femme -qui serait un peu jalouse (allusion à la reine); tout le -monde est content. Nous fûmes à Clagny: que vous dirai-je? -c'est le palais d'Armide; le bâtiment s'élève à vue -d'œil; les jardins sont faits. Vous connaissez la manière -de Le Nôtre: il a laissé un petit bois sombre qui fait -fort bien; il y a un bois d'orangers dans de grandes caisses; -on s'y promène; ce sont des allées où l'on est à -l'ombre; et, pour cacher les caisses, il y a des deux cotés -de petites palissades à hauteur d'appui, toutes fleuries -de tubéreuses, de roses, de jasmins et d'œillets. -C'est assurément la plus belle, la plus surprenante, la -plus enchantée nouveauté qui se puisse imaginer: on -aime fort ce bois<a id="FNanchor_453" href="#Footnote_453" class="fnanchor"> [453]</a>.»</p> - -<p>Madame de Sévigné avait déjà dit, en parlant de -<i>Quantova</i>: «L'attachement est toujours extrême; on en -fait assez pour fâcher le curé et tout le monde, et peut-être -<span class="pagenum"><a id="Page_205"> 205</a></span> -pas assez pour elle; car dans son triomphe extérieur -il y a un fonds de tristesse<a id="FNanchor_454" href="#Footnote_454" class="fnanchor"> [454]</a>.»</p> - -<p>C'est que ce triomphe n'était pas complet. Il ne suffisait -pas à madame de Montespan d'avoir été, contre le -vœu de Bossuet et du parti pieux, réintégrée au château, -d'y faire sa charge, d'être estimée et considérée de la -reine et de toute la cour: tous ces honneurs, toute cette -pompe ne pouvaient la distraire de ses désirs. Louis XIV -avait trente-sept ans, madame de Montespan n'en avait -que trente, et, comme lui, elle était encore dans toute -la force, dans tout l'éclat de la beauté. La vive impression -du passé pesait trop fortement sur elle et sur le roi pour -que le présent ne leur devînt pas insupportable. Bussy, -qui était instruit de tout par madame de Scudéry, prédisait -avec certitude que madame de Montespan ne pourrait -demeurer à la cour que comme maîtresse. «On ne remporte, -disait-il, la victoire sur l'amour qu'en fuyant. Si, -ayant quitté le roi, elle avait encore du plaisir à s'en -croire aimée, elle ne serait pas selon le cœur de Dieu.»—«Il -est vrai (ajoutait-il avec ce solide jugement que -donne l'expérience) que le bon sens voudrait qu'on ne se -chargeât point d'une grande passion, puisqu'on sait bien -qu'elle finira avant la mort; mais chacun se flatte; on ne -veut pas trouver des raisons qui empêchent de faire une -chose agréable. Il est certain que l'amitié est bien plus -solide; mais il n'y a que des gens qui ne sont plus propres -à l'amour qui en soient capables<a id="FNanchor_455" href="#Footnote_455" class="fnanchor"> [455]</a>.»</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_206"> 206</a></span> -Habitués depuis longtemps à se comprendre sans proférer -une seule parole, Louis et Montespan connurent -par leurs regards, dès les premiers moments de leur entrevue, -que leur amour mutuel s'était accru par l'absence -et par la contrainte. Alors Montespan, par son attitude, -ses paroles, ses manières, annonça qu'elle avait -renoncé au rôle froid qu'on avait voulu lui imposer, et -montra la ferme volonté d'être rétablie dans tous ses -droits et dans la double puissance d'amante et de favorite.</p> - -<p>Le roi subissait l'influence de tout le parti pieux. Retenu -par la promesse faite à Bossuet, il résistait encore; -mais les charmes séducteurs de celle dont le son de voix -seul suffisait pour l'émouvoir, les amusants sarcasmes -de son brillant esprit, sa folle gaieté, sa tristesse et ses -larmes domptèrent un courage qu'avaient seuls pu soutenir -les dangers et les distractions de la guerre. Le -triomphe de Montespan fut complet; et sa faveur, sa -puissance parurent plus grandes et plus affermies que jamais. -Tout prit alors à la cour un aspect plus gai et plus -conforme aux mœurs et aux habitudes qui y régnaient. -L'année put se terminer comme elle avait commencé, -lorsque, pendant le carnaval, au retour de la seconde -conquête de la Franche-Comté, on représenta le dernier -ballet où Louis XIV avait dansé et l'opéra de <i>Thésée</i>, -par Quinault et Lulli. Malgré les traits satiriques dirigés -contre Lulli et Quinault par Despréaux<a id="FNanchor_456" href="#Footnote_456" class="fnanchor"> [456]</a>, dans son -<span class="pagenum"><a id="Page_207"> 207</a></span> -épître à Seignelay, récemment publiée (et cette épître -avait pour but de stigmatiser les flatteurs), on reprit les -représentations de cet opéra; et pour cette reprise on -négligea <i>Iphigénie</i><a id="FNanchor_457" href="#Footnote_457" class="fnanchor"> [457]</a>, nouveau et admirable chef-d'œuvre -de Racine. A ce brillant spectacle Pomponne conduisit -l'abbé Arnauld, son frère, revenu de Rome, madame -de Sévigné, madame de Vins, M. de la Troche et d'Hacqueville<a id="FNanchor_458" href="#Footnote_458" class="fnanchor"> [458]</a>. -Le prologue tout entier était consacré aux -louanges du roi, et la décoration représentait les jardins -et la façade du palais de Versailles. Louis XIV entendit -encore chanter les vers suivants:</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p class="i6">VÉNUS.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p>Vénus répand sur lui tout ce qui peut charmer.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p class="i6">MARS.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p>Malheur, malheur à qui voudra contraindre</p> -<p class="i1"> Un si grand héros à s'armer!</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p class="i6">VÉNUS.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p>Tout doit l'aimer.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p class="i6">MARS.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p>Tout doit le craindre.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p class="i3">VÉNUS ET MARS.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p>Tout doit le craindre,</p> -<p>Tout doit l'aimer.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p class="i3">MARS ET VÉNUS.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p class="i2"> Qu'il passe, au gré de ses désirs</p> -<p class="i2"> De la gloire aux plaisirs,</p> -<p class="i2"> Des plaisirs à la gloire!</p> -<p>Venez, aimables dieux, venez tous dans sa cour.</p> -<p class="i1"> Mêlez aux chants de la victoire</p> -<p class="i1"> Les douces chansons de l'amour.</p> -<div><span class="pagenum"><a id="Page_208"> 208</a></span></div> -</div> -<div class="stanza"> -<p class="i4">LE CHŒUR.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p>Mêlons aux chants de la victoire</p> -<p>Les douces chansons de l'amour<a id="FNanchor_459" href="#Footnote_459" class="fnanchor"> [459]</a>.</p> -</div></div> - -<p>Ce n'étaient pas là les exhortations de Bossuet, ce n'était -pas avec de tels vers,</p> - -<p class="quote"><span class="i9"> De morale lubrique,</span><br /> -Que Lulli réchauffait des sons de sa musique,</p> - -<p>que Despréaux, accusé à tort d'être un flatteur, louait le -grand monarque. C'est depuis même que l'auteur de -<i>Thésée</i> était le plus comblé des dons de la faveur royale -que le courageux législateur du Parnasse français n'a cessé -de flétrir ses fades adulations<a id="FNanchor_460" href="#Footnote_460" class="fnanchor"> [460]</a> et de condamner l'opéra -comme un spectacle immoral<a id="FNanchor_461" href="#Footnote_461" class="fnanchor"> [461]</a>.</p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_209"> 209</a></span></p> -<h2 class="normal">CHAPITRE XI.<br /> -<span class="medium">1675-1676.</span></h2> -</div> - -<p class="hanging indent">Le parti pieux espère dans l'influence de madame de Maintenon.—Explication -des causes qui font qu'à partir de cette époque madame -de Sévigné ne parle plus de madame de Maintenon qu'avec -un esprit de dénigrement.—Nécessité de jeter une vue rétrograde -sur la vie de madame de Maintenon.—Pourquoi les historiens se -sont égarés à son sujet.—Sa pauvreté, son mariage, sa figure.—Ce -qui la défendait contre la séduction.—Sa naissance.—Son -éducation.—Son désir de s'attirer la considération et des éloges.—Son -impuissance à s'en corriger.—Éducation des filles pauvres.—Fondation -des couvents d'Ursulines.—Françoise d'Aubigné d'abord -mise aux Ursulines à Niort, à Paris, ensuite aux Ursulines de -la rue Saint-Jacques.—Elle abjure la religion protestante.—Elle -se forme dans cette maison aux vertus et aux talents qu'elle a déployés -par la suite.—Sa tante Neuillant obtient la permission de la -faire mener dans le monde.—Elle va chez Scarron.—Elle devient -sa femme.—Bonheur dont elle a joui pendant les huit années de -son union.—A la mort de Scarron, la reine donne et augmente -pour sa veuve la pension qu'elle faisait à celui-ci.—Madame -Scarron se retire au couvent des Hospitalières.—On veut la marier -à un vieux duc.—Elle refuse.—Elle est désapprouvée.—Ninon -et madame de Villarceaux.—Étroite liaison de madame Scarron -avec ces deux femmes.—Villarceaux veut la séduire, et n'y -peut parvenir.—Elle perd sa pension par la mort de la reine.—Refuse -de nouveau de se marier.—S'apprête à suivre la reine de -Portugal.—Madame de Montespan s'y oppose.—Sa pension est -rétablie par le crédit de Montespan.—Le roi confie à madame -Scarron l'éducation de ses enfants issus de madame de Montespan.—Influence -de madame Scarron sur Montespan.—Madame -Scarron achète un marquisat, et le roi la nomme marquise -de Maintenon.—Contrariée par Montespan, elle est prête -à se retirer.—Se brouille avec Montespan.—Obtient de correspondre -<span class="pagenum"><a id="Page_210"> 210</a></span> -directement avec le roi.—Revient de Baréges, et est rétablie -à la cour sur le même pied qu'autrefois.—Durée du règne -de madame de Montespan.—Les sentiments que madame de Maintenon -inspirait au roi différaient de ceux qu'il avait pour les autres -femmes.</p> - -<p class="space">Par le triomphe de madame de Montespan, le parti -pieux ne fut découragé ni vaincu; il ne pouvait pas -l'être. Sans doute le petit nombre de personnes qui le -composaient n'étaient point indifférentes à la fortune et -aux honneurs; mais il n'était pas non plus formé d'ambitieux -sans principes et de courtisans sans conscience, -se faisant de la religion un honorable moyen d'acquérir -du crédit, du pouvoir et des richesses. Les chefs de ce -parti étaient parfaitement convaincus des vérités de la -foi; ils savaient que le roi et sa maîtresse, malgré l'indulgence -qu'ils accordaient à leurs passions, avaient, ainsi -qu'eux, de sincères convictions; et la piété bien connue -de la gouvernante des enfants de madame de Montespan, -l'amitié que celle-ci avait pour elle avaient fait concevoir -des espérances par l'ascendant qu'on lui connaissait sur -l'esprit de la favorite: ces espérances avaient été détruites -par la faiblesse du monarque et la mollesse du P. la -Chaise; mais d'autres plus fortes avaient succédé. Les -enfants du roi que madame de Montespan avait confiés -à madame de Maintenon étaient ceux que Louis XIV -chérissait de préférence. Par les soins que leur prodiguait -cette gouvernante, par l'éducation qu'elle leur donnait, -ils n'avaient pour celle qui les avait mis au jour -qu'une soumission et une tendresse de commande; leurs -sentiments les plus affectueux, les plus tendres se reportaient -sur celle qui leur avait servi de mère. Les dons -du roi furent la juste récompense d'une sollicitude si paternelle -<span class="pagenum"><a id="Page_211"> 211</a></span> -et si éclairée. Alors la gouvernante, devenue plus -indépendante, contrariée dans son système d'éducation, -se prévalut de la condition qu'elle avait faite de n'être -obligée de se soumettre qu'aux ordres et aux volontés du -roi dans ce qui concernait les enfants qui lui étaient confiés. -L'orgueil de Montespan fut blessé; la défiance et la -jalousie firent disparaître l'attachement que des sympathies -communes avaient formé entre elles. Il n'y eut pas -rivalité, mais désunion. Ce désaccord procura à madame -de Maintenon toute la confiance du parti pieux. Elle en -avait été jusqu'alors le principal appui; elle en devint -l'âme, elle en fut le chef.</p> - -<p>J'ai souvent eu occasion de parler dans ces Mémoires<a id="FNanchor_462" href="#Footnote_462" class="fnanchor"> [462]</a> -de Françoise d'Aubigné, qui, dès qu'elle fut unie -à Scarron, fut aimée et recherchée par madame de Sévigné. -Mais dans les lettres de celle-ci, à partir de l'époque -où nous sommes parvenus, on voit succéder aux -louanges qu'elle lui accordait un esprit de dénigrement -qui étonne. En cela madame de Sévigné n'exprimait pas -ses sentiments personnels, elle n'était que l'écho de -madame de Coulanges, des anciennes amies et protectrices -de madame de Maintenon et de toute la cour, -à l'exception de ce petit nombre de personnes unies -entre elles pour arracher le roi au scandale donné à -ses sujets par ses adultères amours. Il est nécessaire, -pour l'intelligence des lettres de madame de Sévigné -et encore plus pour la parfaite connaissance de l'histoire -du siècle de Louis le Grand, d'éclaircir les causes -<span class="pagenum"><a id="Page_212"> 212</a></span> -d'un tel changement envers une femme justement célèbre, -que la considération et la faveur générales entourèrent, -dès son entrée dans le monde et pendant -toute sa jeunesse, d'une auréole lumineuse qui disparut -aussitôt qu'elle eut obtenu toute la confiance de Louis -le Grand. Les nuages qui, depuis cette époque, la voilèrent -aux regards des contemporains ne se sont pas -encore dissipés et ont causé cette divergence dans l'opinion, -ces jugements contradictoires qui ont égaré les -historiens quand ils ont voulu scruter les causes des -événements qu'ils avaient à raconter. Les personnes -qu'on croit être parvenues à un rang élevé par l'exercice -d'un pouvoir occulte sont rarement jugées avec -impartialité; on les apprécie moins par ce qu'elles ont -dû et pu être que par ce qu'on eût désiré qu'elles fussent. -Leurs vertus et leurs qualités tournent contre elles -dans notre esprit, parce qu'elles sont autres que celles -dont nous eussions voulu les décorer ou incompatibles -avec elles. Les historiens, pour de telles personnes, aiment -mieux s'efforcer de les imaginer que les peindre, -de les deviner que les définir; ils en tracent des portraits -fantastiques, sans ressemblance comme sans -vérité.</p> - -<p>Cependant nulle complication dans la vie de Françoise -d'Aubigné; nulle contradiction entre ses discours, ses -actions et ses écrits; nulle aberration dans sa conduite. -Rien de plus uniforme, de plus certain que les motifs qui -la firent agir. Son caractère ne se démentit jamais; le -monde changea souvent autour d'elle et pour elle, mais -elle, ne changea point; dans la pauvreté et dans la richesse, -dans l'abaissement et dans les grandeurs, durant -les années glorieuses du règne de Louis XIV et durant ses -<span class="pagenum"><a id="Page_213"> 213</a></span> -désastres, elle fut toujours la même. Madame de Maintenon -est le personnage historique sur lequel on possède -le plus de documents émanés de sa bouche ou tracés par -sa plume: il est donc à regretter que les historiens, même -les plus judicieux, aient préféré des satires contemporaines, -quelques <i>pastiches</i> maladroits des lettres de Coulanges -et de Sévigné, des mémoires rédigés d'après des bruits -de cour et des traditions mensongères aux témoignages -certains et authentiques fournis par elle-même, et qu'ils -aient converti une simple et intéressante histoire en un -vulgaire et incompréhensible roman.</p> - -<p>Je n'ai pas sans doute le projet de recommencer l'histoire -si souvent écrite de madame de Maintenon; elle -n'appartient qu'en partie au sujet qui m'occupe; mais je -dois éclaircir les particularités qui la concernent, intéressantes -à connaître pour les lecteurs de ces Mémoires.</p> - -<p>Quoique la vie de madame de Sévigné se soit en partie -écoulée dans les mêmes lieux et au milieu des mêmes -sociétés que celle de madame de Maintenon, ces deux -vies, si on les écrivait avec les mêmes intentions que -j'ai eues en composant ces Mémoires, sont des sujets qui -n'ont presque aucune connexité. La vie de madame de -Sévigné se termine avec la gloire du grand siècle; celle -de madame de Maintenon s'est prolongée au delà même -des jours de Louis XIV, qui a malheureusement survécu -à son siècle. C'est durant les vingt années qui s'écoulèrent -entre la mort de madame de Sévigné et celle du -roi que madame de Maintenon apparaît comme une des -figures principales que l'historien doit retracer entières -au milieu d'événements que madame de Sévigné n'a -point connus, de personnes qu'elles n'a pas vues ou qui -de son temps ne figuraient point encore sur la grande -<span class="pagenum"><a id="Page_214"> 214</a></span> -scène du monde. Il me suffira donc de jeter un regard -rétrospectif sur les premières années de la vie de madame -de Maintenon et de bien apprécier la nature de son intimité -avec Louis XIV et de ses rapports avec madame -de Montespan lorsque celle-ci était plus que jamais heureuse -et fière de l'amour qu'elle inspirait au roi.</p> - -<p>Cette belle <i>pauvresse</i><a id="FNanchor_463" href="#Footnote_463" class="fnanchor"> [463]</a>, qu'à l'âge de seize ans l'avarice -d'une parente livrait à la merci d'une jeunesse ardente, -de grands seigneurs, d'hommes de lettres et d'éminents -artistes qui se rassemblaient chez Scarron, avait -les cheveux châtain clair; ses beaux yeux noirs brillaient -d'un doux éclat, mais s'assombrissaient soudainement -lorsque quelque émotion pénible traversait son âme<a id="FNanchor_464" href="#Footnote_464" class="fnanchor"> [464]</a>. -La grâce, l'esprit, la raison s'unissaient en elle dans -une juste mesure pour plaire à l'enfance, à l'âge viril, à -la vieillesse. Naturellement impatiente, vive, enjouée<a id="FNanchor_465" href="#Footnote_465" class="fnanchor"> [465]</a>, -formée à la rude école de l'adversité, elle devint calme, -réfléchie et d'une grande égalité d'humeur. Fière et -orgueilleuse, le besoin de se faire des protecteurs la rendit -insinuante et complaisante. La religion, à laquelle -(selon les expressions mêmes d'un de ses plus grands -détracteurs<a id="FNanchor_466" href="#Footnote_466" class="fnanchor"> [466]</a>) elle savait faire parler un langage doux, -<span class="pagenum"><a id="Page_215"> 215</a></span> -juste, éloquent et court, inspirait à son cœur de généreuses -résolutions. L'infortune lui ravit l'âge des illusions, -et la fit avancer toute jeune dans celui de la réflexion et -de l'expérience que donne le monde. Ce qu'on appelle -le monde, le beau monde, est un <i>diorama</i>. Vu de loin, -vous y contemplez un ciel brillant, des paysages délicieux, -des palais enchantés et dorés: approchez, voyez -et touchez; tout cela n'est plus qu'une toile salie par des -couleurs. Françoise d'Aubigné put se convaincre de cette -triste vérité presque au sortir de l'enfance. C'était l'époque -du règne des précieuses, de l'amour platonique et -d'une licencieuse galanterie; le culte de la beauté occupait -encore plus les esprits que la politique; on se déclarait -sans ridicule amant d'une femme; elle vous accueillait -comme tel sans se compromettre. Les poëtes surtout, -amoureux par état et auxquels toute liberté en vers -était permise, célébrèrent donc sans façon la belle gorge<a id="FNanchor_467" href="#Footnote_467" class="fnanchor"> [467]</a> -de la jeune <i>Indienne</i>, ses belles mains, sa taille élancée, -le parfait ovale de sa figure, sa physionomie fine et spirituelle, -son beau teint<a id="FNanchor_468" href="#Footnote_468" class="fnanchor"> [468]</a>; et comme on savait que l'infirme -vieillard dont elle était devenue la compagne -avait bien pu l'épouser, mais non en faire réellement sa -femme, les plus brillants, les plus renommés, les plus -dangereux séducteurs d'alors s'empressèrent autour d'elle, -et la regardèrent<a id="FNanchor_469" href="#Footnote_469" class="fnanchor"> [469]</a> comme une proie facile à saisir. Une -triple force la défendait contre leurs attaques: la religion, -<span class="pagenum"><a id="Page_216"> 216</a></span> -l'orgueil de son nom et de ses vertus et le besoin de -s'attirer des éloges. Pour lutter avec succès contre l'adversité, -la nature lui avait donné tous les moyens de -séduire, et pour résister à la séduction ce que je ne puis -exprimer autrement que par l'aptitude négative de son -tempérament<a id="FNanchor_470" href="#Footnote_470" class="fnanchor"> [470]</a>. Elle était du nombre de celles qui, très-sensibles -aux caresses que les femmes aiment à se prodiguer -entre elles en témoignage de leur mutuelle tendresse -et qu'avec plus de réserve elles échangent avec -l'autre sexe, ont une répugnance instinctive à se soumettre -à ce qu'exige d'elles l'amour conjugal pour -devenir mères, moins par la persistance d'une primitive -pudeur que par l'effet d'une nature qui leur a refusé ce -qu'elle a accordé à tant d'autres avec trop de libéralité<a id="FNanchor_471" href="#Footnote_471" class="fnanchor"> [471]</a>. -Françoise d'Aubigné eut souvent besoin d'être rassurée -par son confesseur sur les scrupules que lui firent naître -ses complaisances aux contrariantes importunités de son -royal époux à un âge où elle ne pouvait plus espérer -d'engendrer de postérité<a id="FNanchor_472" href="#Footnote_472" class="fnanchor"> [472]</a>. L'ancienneté non contestée -de sa noblesse et l'illustration qu'elle avait reçue -de son grand-père lui valurent d'être tenue sur les -<span class="pagenum"><a id="Page_217"> 217</a></span> -fonts de baptême par la femme du gouverneur de la -ville où elle naquit et par le gouverneur de la province. -Sa mère, femme instruite, de courage et de vertu, devenue -veuve et réduite à la misère, fut obligée de gagner -sa subsistance par le travail de ses doigts, et commença -pour sa fille cette éducation qui devait développer splendidement -tous les germes d'une heureuse nature. Aussitôt -qu'elle put tenir une aiguille, Françoise d'Aubigné -apprit à travailler, et acquit, pour tous les ouvrages de -femme, une adresse de fée et une application infatigable. -Enfant, elle charmait les yeux maternels par sa -prévoyante et courageuse activité à remplir les tâches les -plus difficiles, comme les plus humbles, d'un ménage -pauvre. Par la suite, lorsqu'elle eut équipage et gens à -ses ordres, pour qu'un secret important fût bien gardé, -elle arrangea de ses propres mains, comme aurait pu le -faire un tapissier exercé, la chambre où elle élevait la -royale postérité qui lui était confiée. Elle devint, très-jeune, -savante dans les détails les plus minutieux de -l'économie domestique, et put parfaitement, lorsqu'elle -fut grande dame, former des servantes et bien choisir -les intendants et les serviteurs de la grande maison de -Saint-Cyr. Dès qu'elle sut lire, elle apprit dans les Vies -de Plutarque dans les écrits de Théodore-Agrippa -d'Aubigné, son grand-père, le rang qu'elle aurait pu -tenir dans le monde sans les honteux désordres de son -père, et elle pressentit ce qu'elle pourrait devenir un -jour. De là cette soif orgueilleuse de considération et de -bonne renommée, qui fut le mobile de toute sa vie<a id="FNanchor_473" href="#Footnote_473" class="fnanchor"> [473]</a> et -<span class="pagenum"><a id="Page_218"> 218</a></span> -la principale cause de son élévation. Ce sentiment, auquel -se joignit ensuite le désir ardent du salut, ne l'abandonna -jamais. Ces deux penchants se fortifièrent en elle -avec l'âge et devinrent ses uniques passions; passions -inconciliables, et qui ne tendaient pas au même but: -elle le savait, et ses résolutions furent livrées à deux -impulsions contraires. Jamais elle ne put assurer le -triomphe complet de celle qui l'élevait vers le ciel sur -celle qui l'entraînait vers l'abîme. L'humilité de ses -aveux, si souvent répétés, de ne pouvoir parvenir «à l'<i>écrasement -de l'amour-propre</i>» constate l'impuissance -de ses efforts. C'est que la religion, qui lui commandait -ce sacrifice, était elle-même la cause qui l'empêchait de -l'accomplir<a id="FNanchor_474" href="#Footnote_474" class="fnanchor"> [474]</a>. En lui assignant une place éminente dans -l'estime de ceux qui alors formaient l'opinion du monde, -la religion entretenait en elle une ambition de s'élever -sans cesse, et madame de Maintenon ne pouvait se repentir -des succès dus aux vertus qu'elle pratiquait avec amour. -Lorsqu'elle fut assise près du trône, quand elle fut devenue -la compagne du grand monarque, Fénelon, dans un -avis sur ses défauts, qu'elle avait transcrit de sa main, lui -reprochait «d'être trop sensible au plaisir de soutenir sa -prospérité avec modération et à celui de paraître par le -cœur au-dessus de la place qu'elle occupait<a id="FNanchor_475" href="#Footnote_475" class="fnanchor"> [475]</a>.» Mais n'est-ce -pas rendre le christianisme impossible que d'exiger -ce genre de perfection de l'humanité? Doit-on expulser -du monde la vertu, en lui refusant d'être sensible à -<span class="pagenum"><a id="Page_219"> 219</a></span> -la seule récompense que le monde peut lui accorder?</p> - -<p>Tout concourut dans Françoise d'Aubigné à soumettre -sa raison aux vérités de la religion et à imprégner -son âme de la foi de ses promesses. Les misères de son -enfance, l'adversité si longtemps combattue reportaient -sans cesse ses pensées et ses espérances de bonheur vers -le ciel. Elle avait une mère catholique; mais une tante -riche la prit avec elle, et profita de son esprit précoce -pour lui donner une forte instruction religieuse. Née dans -la religion protestante, cette tante (madame de Villette) -voulut lui donner une éducation protestante, et elle s'attacha -surtout à lui faire connaître les vérités fondamentales -du christianisme; elle grava dans sa jeune âme, elle -insinua dans son esprit naturellement réfléchi tout ce qui -pouvait raffermir la croyance de la révélation contre les -attaques des incrédules. Mais le zèle du catholicisme de -sa mère et d'une parente dure et avare l'arracha à la tendresse -et aux soins de cette tante, qu'elle chérissait: on la -mit au couvent pour la forcer à abjurer la religion qu'on -lui avait enseignée.</p> - -<p>Dans les premières années du dix-septième siècle, -deux femmes instruites<a id="FNanchor_476" href="#Footnote_476" class="fnanchor"> [476]</a> et pieuses, dont les noms mériteraient -d'être plus connus, avaient, dans l'intention de -s'opposer aux invasions du protestantisme, fondé à Paris, -dans la rue Saint-Jacques, une maison d'instruction qui -devint bientôt célèbre par l'excellence de l'éducation que -les jeunes filles pauvres y recevaient. Des religieuses ursulines -<span class="pagenum"><a id="Page_220"> 220</a></span> -séculières et ensuite des ursulines cloîtrées dirigèrent -cette maison, qui fut la pépinière et le modèle -des nombreux couvents du même ordre répandus dans -toute la France. Les ursulines de Niort, où Françoise -d'Aubigné fut mise, émanaient de celles de Paris; mais -elles n'étaient ni aussi éclairées ni aussi habiles. Françoise -d'Aubigné s'attacha la maîtresse des pensionnaires; -et, quoique âgée seulement de onze ans, elle la suppléait -dans ses fonctions, faisait lire, écrire, travailler ses compagnes -et avait soin de les tenir propres. Cette instruction -et ces soins ennuyaient sa maîtresse, qui aimait à se -livrer à des occupations moins fastidieuses<a id="FNanchor_477" href="#Footnote_477" class="fnanchor"> [477]</a>. La vanité de -la jeune d'Aubigné fut singulièrement enflée par la confiance -qui lui était accordée; et quand les religieuses -voulurent lui faire abjurer les dogmes de sa croyance, -elle résista. Alors on voulut l'intimider; on lui fit un -crime de ses raisonnements et de ses pratiques protestantes, -ou la soumit aux plus serviles fonctions, et, ne -pouvant vaincre sa résistance, on la rendit à sa mère, -qui était dans l'impossibilité de payer pour elle une pension. -Un sentiment profond de sympathie pour ses condisciples -pauvres comme elle, et l'orgueil blessé d'avoir -été méconnue, laissa dans l'âme de la jeune d'Aubigné -une empreinte ineffaçable. Sa mère la plaça à Paris -dans la maison principale des ursulines de la rue Saint-Jacques. -Ce fut là que Françoise d'Aubigné trouva des -supérieures qui surent apprécier toutes les ressources que -présentait, pour une facile conversion, la précoce intelligence -de cette jeune fille. Sans se scandaliser, comme -les religieuses de Niort, de ses manières d'adorer Dieu, -<span class="pagenum"><a id="Page_221"> 221</a></span> -sans gêner sa liberté, les ursulines de Paris firent comprendre -à leur jeune élève, par le bel ordre qui régnait -dans leur maison, celui qui était nécessaire au maintien -de la bonne harmonie de la société chrétienne. On lui -enseigna comment Jésus-Christ avait lui-même institué -l'ordre de son Église en donnant à ses apôtres la mission -de répandre et d'interpréter sa doctrine et d'instituer -leurs successeurs; que par conséquent le premier devoir -de tout croyant qui voulait être un parfait chrétien était -de se soumettre, en matière de foi et d'actes religieux, -à ses supérieurs ecclésiastiques, à ceux auxquels avait -été déléguée, par transmission successive, la puissance -apostolique. Françoise d'Aubigné, convaincue, abjura, -et fit avec toute la ferveur d'une néophyte sa première -communion. Elle fut reconnaissante envers celles qui -lui avaient enseigné cette belle et féconde doctrine de -l'Église catholique. En elle était déjà le germe de la -femme qui traça, d'après le modèle de cette maison des -Ursulines, les <i>Constitutions</i> de Saint-Cyr<a id="FNanchor_478" href="#Footnote_478" class="fnanchor"> [478]</a>; qui écrivit -l'<i>Avis à madame la duchesse de Bourgogne</i>, tant -admiré de Louis XIV<a id="FNanchor_479" href="#Footnote_479" class="fnanchor"> [479]</a>, les admirables lettres à l'<i>abbesse -de Gomer-Fontaine et aux dames de Saint-Louis</i><a id="FNanchor_480" href="#Footnote_480" class="fnanchor"> [480]</a>, l'<i>Esprit -<span class="pagenum"><a id="Page_222"> 222</a></span> -de l'institut des Filles de Saint-Louis</i><a id="FNanchor_481" href="#Footnote_481" class="fnanchor"> [481]</a>, les <i>Conversations</i>, -les <i>Proverbes</i> composés pour ses élèves chéries<a id="FNanchor_482" href="#Footnote_482" class="fnanchor"> [482]</a>.</p> - -<p>C'est en recueillant les bienfaits d'une instruction supérieure -à celle qu'elle avait reçue et en mangeant le -pain de la charité que, jeune fille pauvre, Françoise -d'Aubigné éprouva par la suite le besoin de partager son -nécessaire avec de jeunes filles pauvres, de leur procurer -le bonheur par l'instruction morale et religieuse. Ainsi -la grande dame qui fonda et dirigea à Saint-Cyr un si -haut et si complet enseignement se plaisait encore, lors -des voyages de Fontainebleau, à faire le catéchisme aux -<i>pauvresses</i> dans l'église d'Avon. Ce goût pour les fonctions -d'institutrice de la jeunesse, Françoise d'Aubigné -le conserva toute sa vie. Agée de plus de soixante ans, -elle écrivait à l'évêque d'Autun avec le style de Montaigne: -«Quand vous auriez envie de me plaire, vous -ne me parleriez pas mieux sur mes inclinations, qui sont -toutes portées à l'instruction et au potage<a id="FNanchor_483" href="#Footnote_483" class="fnanchor"> [483]</a>.»</p> - -<p>Les religieuses de la rue Saint-Jacques, en élevant -avec tant de soin la jeune orpheline, espéraient faire pour -leur ordre une acquisition précieuse. Sa pauvreté ne lui -laissait (elles le croyaient) d'autre ressource que le cloître. -<span class="pagenum"><a id="Page_223"> 223</a></span> -Son avare parente, qui ne voulait pas l'avoir à sa charge, -lui déclara qu'elle ne devait pas hésiter à prendre ce -parti. Mais l'influence qu'elle avait acquise sur ses compagnes, -qui toutes la prenaient pour amie et pour conseil, -lui avait donné le sentiment de sa supériorité. Elle -aurait bien consenti à rester dans un couvent, pourvu -qu'elle en fût l'abbesse. Active d'esprit et de corps, persévérante -et réfléchie, d'un caractère énergique, plus la -fortune faisait peser sur elle sa main de plomb, plus elle -se refusait à ployer sous le joug de la dure nécessité, -plus elle répugnait à aliéner son indépendance. Si l'éducation -et le malheur lui avaient donné de l'aptitude pour -se renfermer dans les asiles de la prière, elles l'avaient -encore mieux préparée aux agitations et aux intrigues -du monde. C'est dans le château de Mursay qu'élevée -avec sa cousine de Villette elle avait commencé son -instruction profane. A Niort, et peut-être aussi à Paris, -un gentilhomme de sa province, vaniteux, mais spirituel, -écrivain disert et châtié<a id="FNanchor_484" href="#Footnote_484" class="fnanchor"> [484]</a>, ami des plus célèbres précieuses<a id="FNanchor_485" href="#Footnote_485" class="fnanchor"> [485]</a>, -des littérateurs et des savants, savant lui-même<a id="FNanchor_486" href="#Footnote_486" class="fnanchor"> [486]</a>, -se plut de bonne heure à lui donner des leçons; -et lorsqu'elle fut sortie de l'adolescence, il les lui continua -avec ce zèle intéressé que donne l'amour dont ne peut -se défendre un homme qui, dans la force de l'âge, reçoit -<span class="pagenum"><a id="Page_224"> 224</a></span> -fréquemment des témoignages de reconnaissance d'une innocente -et gracieuse beauté à laquelle il prodigue ses soins.</p> - -<p>Pendant que Françoise d'Aubigné était aux Ursulines -de la rue Saint-Jacques, sa tante Neuillant, glorieuse d'avoir -contribué à la conversion de sa nièce, avait obtenu -la permission de la mener avec elle dans la société, et -elle la conduisait fréquemment chez Scarron. On sait le -reste<a id="FNanchor_487" href="#Footnote_487" class="fnanchor"> [487]</a>. Le plus hideux, le plus célèbre, le plus populaire -des auteurs de ce temps fut charmé de son esprit en lisant -une de ses lettres, ravi de sa figure en la voyant; et -Françoise d'Aubigné, pour échapper au cloître, épousa -ce poëte, ce philosophe cynique, mais pourtant vraiment -philosophe, et même philosophe stoïcien, par cet indomptable -courage avec lequel il luttait gaiement contre les -souffrances et la mort. Il se faisait de sa plume un moyen -d'existence, écrivant, selon l'occasion et le besoin, facilement, -agréablement, des pièces de théâtre, des contes, -des romans, des épîtres, des satires, des stances, des -rondeaux, des lettres en vers et en prose, de grands -poëmes en style burlesque; style qu'il mit à la mode, -style détestable, mais original, que lui seul a su bien -manier, en se jouant toujours heureusement de sa muse, -des lecteurs et de lui-même; encore plus empressé de -plaire au public en général qu'aux grands et aux délicats -de la haute société, qu'il amusait néanmoins par son enjouement -et les jeux de son esprit<a id="FNanchor_488" href="#Footnote_488" class="fnanchor"> [488]</a>.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_225"> 225</a></span> -Dans tout le cours d'une vie qui pour Françoise d'Aubigné -se prolongea jusqu'à l'âge de quatre-vingt-quatre -ans, la période la plus heureuse fut celle des neuf années -que cette gracieuse beauté passa dans son union avec -Scarron, qui, en l'épousant, fut obligé de renoncer à un -canonicat, portion notable de son modique revenu; mais -elle jeta un rayon doré sur les dernières et douloureuses -années de cet infirme et généreux vieillard. Il l'avait adoptée -moins comme son épouse que comme sa secourable -fille. C'est dans ces neuf années que se développèrent les -éminentes qualités qu'on admire en elle. Madame de Maintenon -se retrouve tout entière dans madame Scarron; -c'est la même femme qui se continue bienfaisante et chérie -jusqu'au dernier souffle de sa longue existence. Elle -savait être à la fois à Dieu et au monde. Toutes les personnes -que Scarron aimait ou qui avaient de l'affection -pour lui, tous ceux qui se plaisaient dans sa société et s'étaient -déclarés ses amis ou ses protecteurs restèrent en -tout temps les amis de Françoise d'Aubigné. Ceux qu'elle -fréquenta dans sa jeunesse furent ceux qu'elle protégea -dans son âge mûr<a id="FNanchor_489" href="#Footnote_489" class="fnanchor"> [489]</a>. Elle avait bien raison de se comparer -à la cane qui regrette sa bourbe quand lui revenait -en souvenance l'appartement qu'elle occupait chez -Scarron. Cette salutaire contrainte qu'elle recommande -tant aux élèves de Saint-Cyr<a id="FNanchor_490" href="#Footnote_490" class="fnanchor"> [490]</a> ne l'empêchait pas de s'abandonner -à la gaieté de son âge et aux joyeux entretiens -<span class="pagenum"><a id="Page_226"> 226</a></span> -de l'aimable et spirituelle société qu'elle recevait -chez elle. Elle jouissait alors de l'amitié de tous, sans -rien perdre de l'estime, de la considération et du respect -qui lui étaient dus. Quand elle quittait son modeste -logis et qu'elle cédait aux invitations, elle se retrouvait -à l'aise dans le salon de Ninon, dans les jardins de Vaux, -«où l'on pense, disait-elle, avec tant de raison, où l'on -badine avec tant de grâce<a id="FNanchor_491" href="#Footnote_491" class="fnanchor"> [491]</a>.» Elle se dédommageait ainsi -de l'ennui qu'elle s'imposait pour plaire à ses puissantes -protectrices dans les hôtels d'Albret et de Richelieu.</p> - -<p>Lorsque Scarron mourut, Françoise d'Aubigné se -trouva de nouveau dénuée de toute fortune; mais la reine -mère lui continua la pension qu'elle faisait à son mari, et -même l'augmenta d'un quart. Elle donna ce quart aux -pauvres<a id="FNanchor_492" href="#Footnote_492" class="fnanchor"> [492]</a>. Elle n'avait plus d'époux à soutenir, plus -d'autres besoins que les siens. A toutes les époques de -sa vie, l'économie fit sa richesse. Elle s'isola des grandes -dames ses protectrices. En ayant auprès d'elles la même -assiduité qu'avant son veuvage, elle se serait exposée -à refuser leurs largesses; nulle ne sut mieux qu'elle -conserver avec dignité son indépendance en vivant -de peu. Elle se retira chez les ursulines de la rue Saint-Jacques, -et ensuite elle alla demeurer chez les religieuses -de la Charité-Notre-Dame. Ce couvent, fondé -par Anne d'Autriche<a id="FNanchor_493" href="#Footnote_493" class="fnanchor"> [493]</a> pour soigner les pauvres femmes -<span class="pagenum"><a id="Page_227"> 227</a></span> -malades, était près de la Place-Royale et de la rue des Tournelles, -où elle avait demeuré<a id="FNanchor_494" href="#Footnote_494" class="fnanchor"> [494]</a>. Elle se trouvait ainsi dans -le voisinage de ses plus intimes connaissances. Dans cet -asile, âgée alors de vingt-cinq ans et dans tout l'éclat de -sa beauté, elle parut oublier le monde; le monde vint la -chercher<a id="FNanchor_495" href="#Footnote_495" class="fnanchor"> [495]</a>. Lorsqu'elle était la femme de Scarron, elle -payait par d'utiles services les bienfaits qu'elle recevait; -elle avait su, en se rendant agréable à tous, devenir nécessaire -à plusieurs. Quand les libéralités ne purent plus -profiter qu'à elle seule, elle les refusa, alléguant que -son modique revenu lui suffisait avec luxe<a id="FNanchor_496" href="#Footnote_496" class="fnanchor"> [496]</a>, et elle parut -vouloir se consacrer uniquement à la piété et aux œuvres -de charité. Cela ne pouvait convenir aux sociétés -qui perdaient de leur agrément par son absence. On -voulut la reprendre et l'arracher à sa retraite. On s'ingéra -pour lui donner un rang et une existence. A l'instigation -de ses protectrices et de ses amies, un vieux duc -se proposa pour l'épouser<a id="FNanchor_497" href="#Footnote_497" class="fnanchor"> [497]</a>. Il était riche, mais débauché, -sans esprit: elle le refusa. On se choqua; on ne put comprendre -que la femme qui s'était déterminée à épouser -Scarron pût dédaigner un tel parti; il fut décidé qu'elle -était orgueilleuse et ingrate, et le monde se retira d'elle. -Mais Ninon l'approuva. Ninon avait été la meilleure -amie de Scarron<a id="FNanchor_498" href="#Footnote_498" class="fnanchor"> [498]</a>, qui demeurait dans son voisinage -<span class="pagenum"><a id="Page_228"> 228</a></span> -et se faisait souvent transporter chez elle pour y dîner<a id="FNanchor_499" href="#Footnote_499" class="fnanchor"> [499]</a>. -La marquise de Villarceaux, qui s'était montrée «toute -bonne, toute généreuse» pour le pauvre Scarron, sut -gré à sa veuve d'avoir refusé le vieux duc, et la vit plus -souvent<a id="FNanchor_500" href="#Footnote_500" class="fnanchor"> [500]</a>. Le marquis de Villarceaux, l'admirateur, -l'ami et le bienfaiteur de Scarron, était l'amant de -Ninon, et fut le seul qu'elle ait aimé de cœur. La veuve -de Scarron ne demandait rien à personne, mais elle -était jalouse de la considération qu'on lui avait toujours -et partout témoignée; et elle ne se vit pas sans -peine désapprouvée et délaissée de tous ceux qui avaient -été ses protecteurs et ses amis. Les témoignages d'affection -qu'elle reçut alors de Ninon et de madame de -Villarceaux la touchèrent vivement. Elle répondit par -un redoublement d'attentions et de complaisances. Elle -accepta les invitations de Ninon comme celles de madame -de Villarceaux. Ninon et madame Scarron partagèrent -occasionnellement le même lit<a id="FNanchor_501" href="#Footnote_501" class="fnanchor"> [501]</a>. Comme les -Soyecourt, les Vardes, les Bussy, les du Lude, les Villeroi, -le mari de madame de Villarceaux passait pour un -<span class="pagenum"><a id="Page_229"> 229</a></span> -des hommes de la cour qui réussissait le plus facilement -à se faire aimer des dames; il désira vivement pouvoir -mettre dans la galerie de celles dont il avait triomphé -la belle Françoise d'Aubigné. Chez sa femme, -chez Ninon, chez Scarron, Villarceaux eut tout le loisir -de mettre à profit ses moyens de séduction, et Françoise -d'Aubigné, dans une intimité journalière, devint constamment -l'objet des soins empressés, des discours flatteurs -et passionnés de l'amant de Ninon<a id="FNanchor_502" href="#Footnote_502" class="fnanchor"> [502]</a>. Ainsi que -Ninon, et selon les mœurs et les habitudes de ce temps, -Françoise d'Aubigné acceptait comme amis ceux qui se -déclaraient ses amants. Parmi eux Villarceaux était un des -plus aimables, un de ceux qui lui plaisaient le plus. Personne -alors, même parmi ceux qui s'adonnaient le plus -à répandre de scandaleuses médisances, ne fut tenté d'entacher -l'honneur de la femme de Scarron. La réputation -de sa vertu, la constante amitié de Ninon et de madame -de Villarceaux<a id="FNanchor_503" href="#Footnote_503" class="fnanchor"> [503]</a> eussent ôté toute vraisemblance à de -telles imputations. Ce ne fut qu'après que l'étonnante -élévation de Françoise d'Aubigné l'eut exposée aux traits -acérés de l'envie et de la haine<a id="FNanchor_504" href="#Footnote_504" class="fnanchor"> [504]</a> que la calomnie put jeter -des doutes injurieux sur cette femme<a id="FNanchor_505" href="#Footnote_505" class="fnanchor"> [505]</a> si aimée et si -<span class="pagenum"><a id="Page_230"> 230</a></span> -respectée de tous durant tout le temps de son humble -fortune.</p> - -<p>Singulier mélange de contrastes et de ressemblances -que les destinées de Françoise d'Aubigné et de Ninon de -Lenclos! Toutes deux parvinrent à un grand âge, toutes -deux restèrent longtemps unies, et durent cesser de se -voir sans cesser de ressentir l'amitié qui les avait rapprochées. -Leurs attraits, leur art de plaire, leur rare esprit -de conduite, la sûreté de leur commerce, firent le charme -des sociétés de leur temps. Toutes deux devinrent célèbres -et se concilièrent, à des degrés divers et par des -moyens différents, la considération du monde. L'une ne -s'est jamais départie de la philosophie épicurienne, qui -permettait tout aux passions; l'autre fut constamment -fidèle à la religion, qui ne leur permettait rien. L'une fut -le modèle de son sexe; malheur à toute femme qui, séduite -par le succès de l'autre, oserait la prendre pour -modèle<a id="FNanchor_506" href="#Footnote_506" class="fnanchor"> [506]</a>!</p> - -<p>La mort de la reine mère, au mois de janvier 1666, -enleva à madame Scarron la pension qu'elle recevait, et -la misère retomba sur elle de tout son poids. Elle se vit -forcée d'avoir recours à ses anciennes protectrices. Toutes -s'employèrent pour obtenir le rétablissement de sa -pension. Louis XIV fut fatigué des sollicitations des femmes -de sa cour en faveur de la veuve de Scarron. Colbert -était là, et le jeune roi ferme encore dans la résolution que -le ministre lui avait inspirée de ne pas charger le trésor de -dépenses inutiles et improfitables. Le nom de l'auteur de la -<i>Mazarinade</i><a id="FNanchor_507" href="#Footnote_507" class="fnanchor"> [507]</a> faisait d'ailleurs sur le monarque une désagréable -<span class="pagenum"><a id="Page_231"> 231</a></span> -impression: il refusa. Le grand personnage qui -avait voulu épouser Françoise d'Aubigné crut l'occasion -favorable pour s'offrir de nouveau<a id="FNanchor_508" href="#Footnote_508" class="fnanchor"> [508]</a>, et elle se trouva encore, -comme avant son mariage avec Scarron, forcée de -choisir entre le couvent ou un époux. Elle rejeta l'un et -l'autre. Pour ne recevoir de dons de personne, elle se -détermina à prendre un parti violent qui lui coûtait beaucoup, -puisqu'il lui enlevait son indépendance, rompait -toutes ses habitudes et des liens d'amitié qui lui étaient -chers: elle résolut de s'exiler. La princesse de Nemours -allait épouser Alphonse VI, roi de Portugal: Françoise -d'Aubigné consentit à la suivre à Lisbonne, en se plaçant -sous les ordres de sa <i>donna cameira</i><a id="FNanchor_509" href="#Footnote_509" class="fnanchor"> [509]</a> ou dame d'honneur. -La nouvelle de ce départ émut ses nombreux amis -«de la Place-Royale et de Saint-Germain,» c'est-à-dire -de la ville et de la cour.</p> - -<p>Madame de Montespan, que sa sœur madame de -Thianges, le maréchal d'Albret et Villeroi avaient informée -de ce départ, s'y opposa. Elle obtint pour madame -Scarron le rétablissement de sa pension et un -gracieux accueil du roi<a id="FNanchor_510" href="#Footnote_510" class="fnanchor"> [510]</a>, qui doublait le prix de cette -faveur. La reconnaissance de Françoise d'Aubigné pour -madame de Montespan fut proportionnée au service -qu'elle lui avait rendu. Madame Scarron n'avait pas sans -terreur prévu les privations qu'elle s'imposait en quittant -<span class="pagenum"><a id="Page_232"> 232</a></span> -la France, en s'éloignant de tout ce qui lui faisait aimer -la vie. Quoique sa piété se fût accrue par la douleur d'avoir -perdu sa protectrice et avec elle ses moyens d'existence, -elle ne pouvait, même avec le secours du sévère -confesseur<a id="FNanchor_511" href="#Footnote_511" class="fnanchor"> [511]</a> qu'elle s'était choisi, dompter cette coquetterie -naturelle aux femmes que leur beauté ou les charmes -de leur esprit ont habituées aux douceurs d'une société -aimable et polie, dont elles accroissent la joie par -leur seule présence. Françoise d'Aubigné pratiquait très-bien, -par des moyens dont la pureté d'intention lui déguisait -le danger, cet art que l'exemple de Ninon, plus -âgée et plus avancée qu'elle dans la science du monde, -lui avait enseigné, de désintéresser ceux qu'elle désirait -s'attacher, en les forçant de préférer à l'enivrement produit -par ses grâces et ses attraits la douce séduction de -l'estime et de la confiance que leur inspiraient son esprit, -son abandon aimable et sa solide raison.</p> - -<p>Madame de Montespan avait travaillé pour elle-même -en obligeant madame Scarron; celle-ci lui plut par ses -entretiens enjoués, par sa discrétion, son tact délicat -des convenances, son aversion pour les grandes affaires -de la politique, son éloignement pour les intrigues -de cour, qui étaient pour madame de Montespan une -occupation principale<a id="FNanchor_512" href="#Footnote_512" class="fnanchor"> [512]</a>. Ce qui surtout, dans Françoise -d'Aubigné, charmait madame de Montespan, c'était -<span class="pagenum"><a id="Page_233"> 233</a></span> -cette morale toute chrétienne, stricte, mais non austère, -qu'elle se plaisait à considérer comme un refuge assuré -dans un avenir lointain. Françoise d'Aubigné avait moins -de brillant, moins de soudaineté et d'originalité dans -l'esprit que Montespan, mais plus de justesse, de discernement -et de finesse. Dégagée qu'elle était du joug des -passions, elle avait dans les idées et dans les sentiments -une netteté, une sûreté de jugement, une constance et -une rectitude d'action que ne possédait pas madame de -Montespan, sans cesse en proie aux agitations et aux -inquiétudes de l'amour, de la jalousie, de l'ambition. -Montespan d'ailleurs était moins instruite que Françoise -d'Aubigné, qui écrivait avec cette facilité et cette grâce -particulières à plusieurs femmes de ce temps et avec -l'exactitude grammaticale d'un académicien. Par ce talent, -par ses connaissances pratiques de la science domestique, -par ses qualités essentielles comme par celles -qui sont frivoles, madame Scarron se rendit indispensable -à madame de Montespan, qui ne s'en séparait -qu'avec peine. Tant que dura l'éducation du duc du -Maine et avant qu'à l'âge de dix ans il fût remis entre -les mains des hommes, madame Scarron demeura à la -cour, dans les appartements de madame de Montespan<a id="FNanchor_513" href="#Footnote_513" class="fnanchor"> [513]</a>, -et fut initiée à tous les secrets de sa vie intérieure, à -toutes les particularités de sa liaison avec le roi, et souvent -consultée avec fruit. Elle sut profiter de la confiance -qu'elle avait obtenue pour favoriser l'élévation -des grands personnages qui l'avaient aidée au temps -de sa détresse. Les d'Albret, les Richelieu, les Montchevreuil -<span class="pagenum"><a id="Page_234"> 234</a></span> -et autres<a id="FNanchor_514" href="#Footnote_514" class="fnanchor"> [514]</a> usèrent avantageusement de la facilité -qu'elle avait de se faire écouter. On peut même affirmer -que jamais son influence sur Louis XIV ne fut plus -grande que lorsqu'elle s'exerçait par le crédit d'une autre. -On ne l'ignorait pas; et jamais on ne fut plus empressé -auprès d'elle, jamais elle ne se fit plus d'amis et ne rendit -plus de services que lorsqu'elle ne pouvait rien par elle-même -et ne voulait rien pour elle-même. Le roi, qu'importunait -sa présence lorsqu'il aurait désiré être seul avec -sa maîtresse, ne s'habitua que difficilement, et non sans -une sorte de jalousie, à voir madame de Montespan -prendre tant de plaisir dans le commerce intime d'une -femme si bien connue pour la sévérité de ses principes<a id="FNanchor_515" href="#Footnote_515" class="fnanchor"> [515]</a>. -Les premiers dons de Louis XIV à Françoise d'Aubigné, -après le rétablissement de sa pension, ne furent dus qu'à -l'importunité de Montespan; ce fut elle qui insista fortement, -et sans y être excitée par personne, pour que son -amie, sa protégée reçût, par l'achat et la possession d'une -terre, un titre et un nom plus convenable que celui de -veuve Scarron<a id="FNanchor_516" href="#Footnote_516" class="fnanchor"> [516]</a>.</p> - -<p>Mais alors tout était changé pour Françoise d'Aubigné; -elle s'était chargée d'élever les enfants du roi et -de Montespan. Sa destinée fut fixée<a id="FNanchor_517" href="#Footnote_517" class="fnanchor"> [517]</a> selon ses désirs, -selon ses goûts, selon sa vocation. Elle était par là appelée -à faire le meilleur emploi de ses éminentes facultés, -à donner tous les soins d'une tendre mère aux enfants -<span class="pagenum"><a id="Page_235"> 235</a></span> -de son roi<a id="FNanchor_518" href="#Footnote_518" class="fnanchor"> [518]</a>, à leur inculquer les vérités de la foi, -à diriger leurs premiers penchants, à guider leurs premiers -pas dans ce monde splendide et corrompu où ils -devaient apparaître, à recueillir enfin pour récompense, -pour prix des soins qu'elle leur donnait l'affection et -le respect de leur âge mûr. Elle se promettait, par leur -moyen, d'obtenir un salutaire ascendant sur l'esprit de -leur mère, de cette belle Mortemart, qu'elle avait connue -autrefois si jeune, si vertueuse, si fortement imbue des -principes de religion qu'elle conservait encore. Françoise -d'Aubigné espérait payer ainsi les bienfaits qu'elle pourrait -recevoir de Louis XIV par des bienfaits plus grands, -et devenir un des humbles instruments que Dieu avait -choisis pour ramener dans la voie du salut le plus grand -des souverains.</p> - -<p>Tels étaient les projets de la veuve Scarron; on sait le -courage et l'habileté qu'elle mit à les exécuter. Les commencements -répondirent à ses ambitieuses espérances: -l'éducation du jeune duc du Maine fut, de la part du -roi, récompensée par des dons qui mirent pour toujours -Françoise d'Aubigné à l'abri du besoin dont elle avait si -longtemps souffert. Elle put acheter (le 27 décembre -1674) la terre de Maintenon<a id="FNanchor_519" href="#Footnote_519" class="fnanchor"> [519]</a>, qui était un marquisat; -le roi lui donna lui-même le titre de marquise de Maintenon. -Sous l'éclat de ce dernier nom disparut alors celui -de Scarron: il ne servit plus qu'à marquer dans l'histoire -la distance prodigieuse qu'a franchie Françoise -<span class="pagenum"><a id="Page_236"> 236</a></span> -d'Aubigné pour parvenir à la miraculeuse élévation où -elle s'est trouvée portée.</p> - -<p>Elle avait réussi du côté du roi dans le plan qu'elle -s'était tracé; mais c'est à l'époque même de ses premiers -succès qu'elle fut sur le point d'échouer et qu'elle parut -résolue à quitter la cour, à se renfermer dans son -château ou dans une maison religieuse, à faire une -retraite qui ne lui fit rien perdre des éloges et de la -considération du monde, dont elle était de plus en plus -jalouse<a id="FNanchor_520" href="#Footnote_520" class="fnanchor"> [520]</a>.</p> - -<p>Madame de Montespan, comme toutes les femmes que -leurs passions, leurs plaisirs ou leur ambition entraînent -dans le mouvement rapide du monde, prenait peu de -souci de ses enfants, et trouvait très-bon qu'ils préférassent -à leur mère celle qui s'occupait d'eux sans cesse et -qui les élevait avec un zèle éclairé. Françoise d'Aubigné, -d'ailleurs, avait soin d'assujettir ses élèves aux démonstrations -d'une tendresse respectueuse envers leurs augustes -parents; mais l'accomplissement de ce devoir -ressemblait peu à l'amoureuse soumission qu'ils témoignaient -pour leur gouvernante. Elle se montra très-habile -à inspirer à l'aîné de ces enfants les saillies charmantes -d'un esprit enfantin; et on peut juger avec quelle mesure, -quelle délicatesse elle savait se servir de l'intelligence -précoce de cet enfant pour flatter sa mère quand on a -lu les quelques pages intitulées: [<i>OE]uvres diverses d'un -auteur de sept ans</i>, qu'elle fit imprimer à un petit nombre -d'exemplaires, et dont elle composa l'épître dédicatoire -adressée à madame de Montespan<a id="FNanchor_521" href="#Footnote_521" class="fnanchor"> [521]</a>.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_237"> 237</a></span> -L'accord de madame de Montespan et de Françoise -d'Aubigné fut parfait tant que les enfants restèrent en -bas âge et lorsqu'ils ne réclamaient que des soins matériels; -mais il n'en fut pas de même lorsque le secret de -leur naissance eut été dévoilé et quand le duc du Maine, -ayant paru à la cour, eut attiré l'attention du roi; quand -la gouvernante lui eut donné le Ragois, neveu de son -confesseur, pour précepteur, et eut annoncé l'intention -de diriger entièrement son éducation. Madame de Montespan -voulut s'en mêler; elle éprouva de la résistance. -Françoise d'Aubigné soutenait qu'elle ne devait compte -qu'au roi de ses enfants, parce qu'elle n'avait consenti à -se charger de leur éducation qu'à cette condition. Madame -de Montespan, qui jusqu'ici avait traité en amie la -gouvernante, voulut avec hauteur exercer son autorité. -Françoise d'Aubigné faisait en quelque sorte partie du -ménage du roi et de madame de Montespan. Le roi, qui -avait l'habitude de les voir ensemble toujours unies, fut -surpris et ennuyé de leurs fréquentes altercations<a id="FNanchor_522" href="#Footnote_522" class="fnanchor"> [522]</a>; et -quoiqu'il eût plus qu'aucun homme au monde un tact -sûr pour discerner promptement tous les genres de mérite -et qu'il eût conçu de celui de la gouvernante une -idée supérieure encore aux éloges qu'on lui en avait faits, -<span class="pagenum"><a id="Page_238"> 238</a></span> -cependant, comme il était dans le paroxysme de son -amour pour Montespan, il préféra donner à celle-ci la -permission de la renvoyer. Mais il n'était pas facile à -madame de Montespan d'user de cette faculté: désormais -elle avait plus besoin de madame de Maintenon -que madame de Maintenon n'avait besoin d'elle.</p> - -<p>Madame de Montespan comprenait très-bien qu'elle -causerait un chagrin profond à ses enfants si elle les privait -d'une gouvernante aussi tendrement aimée et qu'il -eût été impossible de remplacer. Mais c'était surtout pour -elle-même qu'elle désirait garder celle qu'elle avait été -habituée à considérer comme son amie, celle qui l'aidait -toujours à détruire dans l'esprit du roi le mauvais effet -de ses caprices et de ses humeurs, à rompre la monotonie -des tête-à-tête et à dissiper les ennuis et les tristesses -de son intérieur.</p> - -<p>D'ailleurs, quoique le parti religieux fût contraire à -madame de Montespan, il la ménageait précisément à -cause de l'étroite liaison qui existait entre elle et madame -de Maintenon; et celle-ci, par cette intimité même, avait -acquis à la cour une importance au-dessus du rang -qu'elle y occupait: en la disgraciant, madame de Montespan -eût mécontenté le parti qu'elle désirait ménager -dans l'intérêt de sa conscience et de celle du roi. Ainsi -madame de Montespan renonça à l'idée de renvoyer la -gouvernante; mais elle résolut de l'éloigner de la cour -en lui procurant un établissement. Elle détermina le -vieux duc de Villars-Brancas à demander sa main<a id="FNanchor_523" href="#Footnote_523" class="fnanchor"> [523]</a>. Françoise -d'Aubigné refusa ce parti. Madame de Montespan -dissimula, et continua, en présence du roi, à traiter -<span class="pagenum"><a id="Page_239"> 239</a></span> -madame de Maintenon en amie; elle chercha à la réduire -à plus d'obéissance et de soumission par le moyen du roi -lui-même. Elle avait observé que, malgré son humilité -chrétienne, Françoise d'Aubigné ambitionnait surtout -l'approbation et l'estime du roi, et que les éloges qu'il -lui donnait ou qu'il faisait de son élève le duc du -Maine «chatouillaient de son cœur l'orgueilleuse faiblesse.»</p> - -<p>Ce ne fut plus qu'en l'absence du roi que Montespan -se permit envers elle ces hauteurs insultantes et ces exigences -humiliantes qui la blessaient au cœur; de sorte -qu'il fut facile à la favorite, quand elle était mécontente -de la gouvernante, de lui donner tous les torts dans l'esprit -du monarque. C'est ainsi que, selon que Montespan -était satisfaite ou mécontente, la gouvernante recevait -de Louis XIV un accueil plus ou moins gracieux, plus -ou moins froid, ou tout à fait glacial. Ainsi agitée par -des alternatives de crainte et d'espérance, et dans l'incertitude -de savoir si elle plaisait ou si elle déplaisait<a id="FNanchor_524" href="#Footnote_524" class="fnanchor"> [524]</a>, -Françoise d'Aubigné, dont la fierté se révoltait de voir -ses services méconnus, résolut de saisir la première occasion -pour avoir une explication franche et hardie avec -Louis XIV<a id="FNanchor_525" href="#Footnote_525" class="fnanchor"> [525]</a>, de demander à se retirer de la cour et à -<span class="pagenum"><a id="Page_240"> 240</a></span> -cesser de diriger l'éducation des princes si elle restait -sous la dépendance de madame de Montespan, ou à continuer -de faire sa charge si elle avait permission de n'obéir -qu'au roi et de correspondre directement avec lui. -Cette occasion se trouva, cette explication eut lieu<a id="FNanchor_526" href="#Footnote_526" class="fnanchor"> [526]</a> à -la grande satisfaction du roi: Françoise d'Aubigné, -devenue madame de Maintenon, redoubla d'égards envers -madame de Montespan, et leur amitié ne parut en rien -altérée. La passion du roi pour cette dernière continuait -toujours aussi vive, et la division qui existait entre elle -et madame de Maintenon se déroba longtemps aux regards -jaloux et envieux des courtisans.</p> - -<p>Ce secret ne commença à percer que lors du voyage -de madame de Maintenon et du duc du Maine à Baréges.</p> - -<p>Le duc du Maine avait eu pendant sa dentition des -convulsions qui lui avaient raccourci une jambe. Il fut -décidé qu'on conduirait le jeune prince à Anvers pour -consulter un médecin renommé de cette ville. Françoise -d'Aubigné prit le nom de marquise de Surgères, et partit -incognito avec son élève. Elle arriva à Anvers au -milieu d'avril 1674. De là elle écrivit à madame de -Montespan et au roi, et revint s'installer à Versailles<a id="FNanchor_527" href="#Footnote_527" class="fnanchor"> [527]</a>. -Le jeune prince revint d'Anvers plus boiteux qu'il n'était -avant de partir, ce qui nécessita deux voyages à -<span class="pagenum"><a id="Page_241"> 241</a></span> -Baréges qui eurent le plus heureux succès. Dans ces -deux voyages, madame de Maintenon rendait compte -de la santé du prince au roi et à sa mère. C'est par -cette correspondance que Louis XIV put apprécier tout -l'esprit et le talent d'écrire de madame de Maintenon. -Ce roi, si habile à discerner dans ceux qui l'approchaient -tous les genres de mérite, reconnut que cette -gouvernante était capable de développer dans celui de -ses fils qu'il chérissait le plus, non-seulement les grâces -de l'enfant, mais aussi les qualités de l'homme, et de -le rendre par là digne du rang qu'il devait occuper. -Louis XIV sut comprendre que la nécessité, cette mère -des grands succès, et la religion, cette consolatrice de -l'âme, ne formèrent jamais de femme plus judicieuse, -plus instruite, plus énergique, plus involontairement -gracieuse, plus naturellement vertueuse que celle qu'avait -choisie Montespan pour élever les enfants qu'il avait -eus d'elle.</p> - -<p>En l'année 1675, le mercredi des Cendres, ou l'ouverture -du carême, était le 27 février, et Pâques le -14 avril; c'est dans cet intervalle qu'a eu lieu le refus -d'absolution dont nous avons raconté les circonstances.</p> - -<p>Madame de Maintenon était aux eaux de Baréges -lorsqu'elle apprit ce qui se passait à la cour et dans le -camp du roi, le projet de séparation des deux amants -et leurs pieuses résolutions; il n'est pas douteux qu'elle -dut alors en féliciter madame de Montespan et le roi -<span class="pagenum"><a id="Page_242"> 242</a></span> -lui-même, auquel elle rendait compte, dans des lettres -qui quelquefois avaient huit ou dix pages, de tout ce qui -concernait les voyages entrepris pour la santé du duc -du Maine<a id="FNanchor_528" href="#Footnote_528" class="fnanchor"> [528]</a>. Elle écrivit à plusieurs personnes, on n'en -peut douter, sur ce sujet important pour elle-même et -pour l'intérêt de ses élèves, qu'elle chérissait comme une -mère<a id="FNanchor_529" href="#Footnote_529" class="fnanchor"> [529]</a>; on la désabusa, et on lui apprit que Montespan -cherchait de nouveau à passionner le roi. Ce fut alors -que commença à percer un secret jusqu'ici caché soigneusement -à toute la cour: ce secret était le désaccord -de madame de Montespan et de madame de Maintenon -et la révélation de la cause qui avait produit cette mésintelligence. -Madame de Sévigné se hâta, aussitôt qu'elle -le connut, d'en instruire sa fille.</p> - -<p>«Je veux vous faire voir un petit dessous de cartes -qui vous surprendra: c'est que cette belle amitié de -<i>Quantova</i> (madame de Montespan) et de son amie (madame -de Maintenon) qui voyage est une véritable aversion -depuis près de deux ans; c'est une aigreur, une antipathie; -c'est du blanc, c'est du noir. Vous demandez -d'où vient cela? C'est que l'amie est d'un orgueil qui la -rend révoltée contre les ordres de <i>Quanto</i>; elle n'aime -pas à obéir; elle veut bien être au père, mais non pas à -la mère; elle fait le voyage à cause de lui, et point du -tout pour l'amour d'elle; elle rend compte à l'un, et point -à l'autre: on gronde l'ami (le roi) d'avoir trop d'amitié -pour cette glorieuse; mais on ne croit pas que cela dure, -à moins que l'aversion ne se change ou que le bon succès -<span class="pagenum"><a id="Page_243"> 243</a></span> -d'un voyage ne fît changer ces cœurs. Ce secret roule -sous terre depuis plus de six mois; il se répand un peu, -et je crois que vous en serez surprise. Les amis de l'amie -en sont assez affligés<a id="FNanchor_530" href="#Footnote_530" class="fnanchor"> [530]</a>.»</p> - -<p>Les amis de madame de Montespan, comme ceux de -madame de Maintenon, étaient également intéressés à -déguiser cette désunion et à la nier. Le crédit des uns et -des autres s'affaiblissait par celui que madame de Maintenon -cessait d'avoir auprès de madame de Montespan, -et par l'atteinte que portait au pouvoir de celle-ci, sur -l'esprit du roi, la désapprobation de madame de Maintenon, -estimée de toute la cour.</p> - -<p>Quinze jours après cette lettre, madame de Sévigné -apprend à sa fille que les amis de madame de Maintenon -nient qu'il y ait aucune altercation sérieuse entre elle et -Montespan; et ceci indique les progrès que faisait cette -dernière pour enflammer de nouveau le roi lorsqu'il allait -lui rendre visite.</p> - -<p>«Les amis de la <i>voyageuse</i>, voyant que le dessous des -cartes se répand, affectent fort d'en rire et de tourner -cela en ridicule, ou bien conviennent qu'il y a eu quelque -chose, mais que tout est accommodé. Je ne réponds -ni du présent ni de l'avenir dans un tel pays; mais du -passé, je vous en assure... Pour la souveraineté, elle est -établie comme depuis Pharamond. Madame de Montespan -joue en robe de chambre avec les dames du château (les -dames du palais, dont elle faisait partie), qui se trouvent -trop heureuses d'être reçues et qui souvent sont chassées -par un clin d'œil qu'on fait à la femme de chambre<a id="FNanchor_531" href="#Footnote_531" class="fnanchor"> [531]</a>.»</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_244"> 244</a></span> -Les dernières nouvelles que madame de Sévigné transmet -à sa fille prouvent qu'au commencement de septembre -madame de Montespan n'était pas encore parvenue -à faire changer le roi de résolution et qu'elle craignait, -en pressant trop vivement la conclusion de son rappel -à la cour, de perdre la confiance et l'estime du -monarque.</p> - -<p>«Il est certain, dit madame de Sévigné, que l'ami et -<i>Quanto</i> sont véritablement séparés; mais la douleur de -la demoiselle est fréquente, et même jusqu'aux larmes, -de voir à quel point l'ami s'en passe bien; il ne pleurait -que sa liberté, et ce lieu de sûreté contre la dame du -château (la reine): le reste, pour quelque raison que ce -puisse être, ne lui tenait plus au cœur. Il a retrouvé cette -société qui lui plaît; il est gai et content de n'être plus -dans le trouble, et l'on tremble que cela ne veuille dire -une diminution, et l'on pleure; et si le contraire était, -on pleurerait et on tremblerait encore: ainsi le repos -est banni de cette place. Voilà sur quoi vous pouvez faire -vos réflexions, comme sur une vérité; je crois que vous -m'entendez<a id="FNanchor_532" href="#Footnote_532" class="fnanchor"> [532]</a>.»</p> - -<p>Cette situation ne pouvait durer. Les charmes séducteurs -de Montespan, le son de sa voix, le feu de ses regards, -les amusants sarcasmes de son brillant esprit, sa -folle gaieté, sa tristesse et ses larmes domptèrent bientôt -le courage de Louis XIV. Les divertissements du -<span class="pagenum"><a id="Page_245"> 245</a></span> -théâtre, auquel il ne voulut jamais renoncer; la musique -de Lulli, les vers de Quinault, les danses voluptueuses -de leurs drames magiques, l'indulgence intéressée du -P. la Chaise facilitèrent le triomphe de Montespan, -qui fut enfin complet. La date et la durée de ce triomphe -furent révélées au monde le 9 mai 1677 par la naissance -de la seconde mademoiselle de Blois, depuis -femme du régent, qui fut si laide, et, le 6 juin 1678, -par celle du comte de Toulouse, qui fut si beau. La naissance -de mademoiselle de Tours, morte jeune, venue à -terme au mois de janvier 1676, prouva aussi que l'intimité -de madame de Montespan avec Louis XIV était aussi -forte après son retour de l'armée qu'avant le départ.</p> - -<p>Tout était donc ramené sur l'ancien pied lorsque -la <i>voyageuse</i> revint avec son élève le duc du Maine. -Comme elle n'avait jamais varié dans sa conduite et -dans son langage, elle se retrouva aussi bien établie à -la cour que lorsqu'elle l'avait quittée, et même mieux. -Son absence lui avait profité en nécessitant une correspondance -directe avec le roi. L'espoir que le parti religieux -avait fondé sur son influence s'accrut encore par -la part qu'elle avait eue dans le succès momentané de ce -parti. On connaissait Louis XIV, dont rien n'ébranlait -l'opinion pour ceux qui avaient su mériter son estime. -On savait que la nature de sentiments exempts de toute -faiblesse que lui inspirait madame de Maintenon était -entièrement étrangère à celle qui, par une force irrésistible, -l'entraînait vers madame de Montespan ou vers -toute autre femme.</p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_246"> 246</a></span></p> -<h2 class="normal">CHAPITRE XII.<br /> -<span class="medium">1675-1676.</span></h2> -</div> - -<p class="hanging indent">Turenne est tué.—Effet que produit cette nouvelle.—Lettres écrites -par madame de Sévigné à ce sujet.—La guerre se rallume.—On -crée de nouveaux maréchaux.—Le marquis de Rochefort est -nommé, par l'influence de sa femme, maréchal de France, avec sept -autres lieutenants généraux.—Il meurt.—Détails sur la maréchale -de Rochefort.—Elle devient la maîtresse de Louvois.—Son crédit -à la cour.—La révolte continue à Rennes.—Madame de Sévigné -se décide à partir.—Motifs des regrets qu'elle a de quitter -Paris.—Dérangement de sa santé.—Elle consulte Bourdelot.—Elle -va revoir Livry.—Elle recommence ses lamentations sur la mort -de Turenne.—Elle se rend à Orléans.—S'embarque sur la Loire.—Entrevue -au château de l'abbé d'Effiat.—Elle arrive à Nantes.—Souvenirs -que ce voyage lui rappelle.—Elle avait mis sa fille au -couvent à Nantes.—Souvenirs devant Blois.—Elle arrive à la -Seilleraye.—Récit rétrospectif.—Faits importants relatifs à la -jeunesse de madame de Sévigné rectifiés à propos de ces souvenirs.—Date -de la naissance et de la mort de Sévigné le fils.—Date de -la naissance de madame de Grignan.—Celle-ci est née avant son -frère.—Date du premier voyage de madame de Sévigné à Nantes.—Age -qu'avait mademoiselle de Sévigné quand elle parut dans le -ballet des Arts et quand elle épousa le comte de Grignan.—Duel -de Sévigné avec du Chastellet.—Célébration du mariage de Sévigné -avec Marie de Rabutin-Chantal.—Liaison de la famille -d'Ormesson et de celle de madame de Sévigné.—Madame de Sévigné -va aux Rochers et revient à Paris.—S'occupe d'un procès,—de -ses plaisirs,—de l'Opéra,—et est lancée dans les intrigues -de la Fronde.—Détails fournis par les Mémoires d'Ormesson sur -cette époque de la vie de madame de Sévigné et sur les événements.—Récit -sur un des domestiques de madame de Sévigné -qui devint fou furieux, et sur lequel on opéra la transfusion -du sang.</p> - -<p class="space">Le vif intérêt qu'excitait dans le grand monde la nouvelle -<span class="pagenum"><a id="Page_247"> 247</a></span> -de la dissension des deux femmes qui approchaient -le plus souvent le roi fut tout à coup absorbé par une -autre nouvelle, désastreuse, terrible, qui frappa de stupeur -la France entière et retentit aussitôt dans toute -l'Europe<a id="FNanchor_533" href="#Footnote_533" class="fnanchor"> [533]</a>. Ce fut celle de ce boulet qui, tiré au hasard -près du village de Sasbach, dans l'État de Bade, le -27 juillet 1675, frappa Turenne et le tua<a id="FNanchor_534" href="#Footnote_534" class="fnanchor"> [534]</a>.</p> - -<p>Ce ne fut pas à sa fille, ce ne fut pas à une femme, mais -à des hommes, à des militaires, à Bussy, au comte de Grignan -que madame de Sévigné adressa ces admirables -lettres où elle peint sa douleur, celle du roi, les larmes -de toute la cour, la tristesse de Bossuet, l'abasourdissement -des habitants de Paris, s'attroupant à l'entour -de l'hôtel du héros<a id="FNanchor_535" href="#Footnote_535" class="fnanchor"> [535]</a>; la consternation et la fureur de sa -brave armée; la terreur des campagnes des bords du -Rhin, tranquilles et rassurées par Turenne contre les -invasions de l'ennemi, désormais exposées à ses féroces -représailles; l'effroi de la France entière, et cette -vive, cette universelle émotion causée par la perte d'un -seul homme. «Mais cet homme, disait madame de -<span class="pagenum"><a id="Page_248"> 248</a></span> -Sévigné, était le plus grand capitaine et le plus honnête -homme du monde<a id="FNanchor_536" href="#Footnote_536" class="fnanchor"> [536]</a>.»</p> - -<p>«Dès le lendemain de cette nouvelle, dit encore madame -de Sévigné, M. de Louvois proposa au roi de réparer -cette perte en faisant huit généraux au lieu d'un: -c'est y gagner. En même temps on fit huit maréchaux -de France, savoir: M. de Rochefort, <i>à qui les autres -doivent un remercîment</i>; MM. de Luxembourg, Duras, -la Feuillade, d'Estrades, Navailles, Schomberg et Vivonne: -en voilà huit bien comptés. Je vous laisse à -méditer sur cet endroit<a id="FNanchor_537" href="#Footnote_537" class="fnanchor"> [537]</a>.» Ainsi madame de Sévigné -insinue à sa fille que ces huit maréchaux, que madame de -Cornuel appelait spirituellement la monnaie de M. de Turenne, -n'avaient été nommés que parce que la marquise -de Rochefort (Madeleine de Laval, devenue de Bois-Dauphin), -qui était aimée de Louvois, exigea que son -mari fût fait maréchal de France, ce qui ne se pouvait -qu'en proposant sept autres lieutenants généraux -plus anciens que lui. Irrité de cette promotion, le -comte de Gramont, son ennemi, lui envoya ce laconique -et insolent billet que madame de Sévigné a -rapporté. Rochefort ne jouit pas longtemps du grade -éminent qu'il avait obtenu. Quoique homme d'esprit et -de courage, il s'en montra peu digne en ne secourant<a id="FNanchor_538" href="#Footnote_538" class="fnanchor"> [538]</a> -<span class="pagenum"><a id="Page_249"> 249</a></span> -pas à temps le brave du Fay, assiégé dans Philisbourg. -Rochefort mourut moins d'un an après sa nomination, -le 22 mai 1676<a id="FNanchor_539" href="#Footnote_539" class="fnanchor"> [539]</a>, âgé seulement de quarante ans: -sa haute dignité ne profita qu'à sa veuve, qui acquit -ainsi à la cour un rang favorable à l'influence qu'elle -ambitionnait d'exercer. C'était une beauté piquante, née -pour le grand monde, l'intrigue et la galanterie. Elle -était liée avec madame de Grignan, dont l'âge se rapprochait -du sien et qui avait alors trente ans. Elle se donna -à Louvois, et remplaça dans l'existence de ce ministre, -jusqu'à sa mort, madame Dufrénoy. La Fare s'en était -cru amoureux avant de se persuader qu'il l'était de madame -de la Sablière<a id="FNanchor_540" href="#Footnote_540" class="fnanchor"> [540]</a>; mais l'adroite coquette ne parut -vouloir écouter la Fare que pour mieux captiver -Louvois, ce qui empêcha la Fare d'obtenir aucun avancement, -et l'obligea de quitter le service<a id="FNanchor_541" href="#Footnote_541" class="fnanchor"> [541]</a>.</p> - -<p>La maréchale de Rochefort, par l'art facile à certaines -natures de se rendre utiles aux grands et aux puissants, -sut, sans beaucoup d'esprit ni d'efforts, se maintenir -toujours bien en cour. Elle fut l'amie, la confidente -de toutes les femmes que Louis XIV s'attacha, de -mademoiselle de la Vallière comme de madame de Montespan; -et ce fut elle qui, d'accord avec Bontemps, servit -admirablement les mystérieuses amours de Louis XIV -et de la duchesse de Soubise, et en déroba longtemps la -<span class="pagenum"><a id="Page_250"> 250</a></span> -connaissance au duc son époux, et même, ce qui était -plus difficile, à madame de Montespan. La maréchale -de Rochefort se maintint dans une convenable intimité -avec madame de Maintenon; elle fut goûtée de son élève, -la duchesse de Bourgogne, comme elle l'avait été de la seconde -Dauphine<a id="FNanchor_542" href="#Footnote_542" class="fnanchor"> [542]</a>. Par une conduite habile, elle contribua -pendant longtemps à donner de la force au parti de Louvois, -qui, dans les conseils et à la cour, disputait au -parti de Colbert l'influence sur l'esprit et les résolutions -du monarque; et elle parvint à conserver tout son crédit -lorsque la mort lui eut enlevé l'appui du grand ministre.</p> - -<p>Quand, le lundi, la nouvelle de la mort de Turenne -arriva à Versailles, «on allait, dit madame de Sévigné, -à Fontainebleau s'abîmer dans la joie<a id="FNanchor_543" href="#Footnote_543" class="fnanchor"> [543]</a>;» mais cet événement -changea les dispositions de tout le monde, et fit -hésiter madame de Sévigné elle-même sur son voyage de -Bretagne, qui devenait plus dangereux. Ainsi la mort d'un -seul homme ébranlait l'État, et dérangeait tous les projets -de plaisirs ou d'occupations sérieuses. La guerre, qu'on -<span class="pagenum"><a id="Page_251"> 251</a></span> -croyait devoir être bientôt terminée, se ralluma avec -une nouvelle ardeur; il n'y avait plus d'espoir pour madame -de Sévigné d'avoir de longtemps son fils avec elle, -et sa fille l'invitait fortement à profiter de l'intervalle -de la suspension forcée de toutes choses pour faire le -voyage de Provence. Elle en fut très-tentée; mais ses -propres affaires l'appelaient en Bretagne<a id="FNanchor_544" href="#Footnote_544" class="fnanchor"> [544]</a> et elles étaient -d'une telle gravité qu'elle se vit forcée de céder aux -conseils de son tuteur, l'abbé de Coulanges. Après deux -mois d'hésitation, elle partit. Ce n'est qu'alors qu'elle -cessa de s'entretenir, dans ses lettres, de M. de Turenne, -de revenir sans cesse sur ses admirables qualités, de varier -l'expression de ses regrets, de prévoir les tristes -conséquences de sa mort. Le dîner qu'elle fit chez le cardinal -de Bouillon avec madame d'Elbeuf<a id="FNanchor_545" href="#Footnote_545" class="fnanchor"> [545]</a> et madame de -la Fayette, pour pleurer ensemble le héros, fut pour elle -cependant une nouvelle occasion de recommencer ses -lamentations sur ce triste sujet; et elle ne cessa d'en parler -que quand elle eut fait connaître la douleur de tous les -amis du héros, la profonde affliction de Pertuis, son capitaine -des gardes, qui voulut se démettre de sa place de -gouverneur de Courtray; et enfin quand elle eut décrit la -cérémonie des funérailles à Saint-Denis, où elle assista<a id="FNanchor_546" href="#Footnote_546" class="fnanchor"> [546]</a>.</p> - -<p>Effrayée par les nouvelles qu'elle recevait, madame de -Sévigné différa donc son départ; elle aurait bien voulu -le différer plus longtemps, et profiter de cet empêchement -<span class="pagenum"><a id="Page_252"> 252</a></span> -pour faire le voyage de Provence; mais quand on -sut qu'on s'était décidé à envoyer des troupes contre les -révoltés et que la lettre de Louis XIV pour la tenue des -états de Bretagne allait être transmise au duc de Chaulnes<a id="FNanchor_547" href="#Footnote_547" class="fnanchor"> [547]</a>, -on crut la tranquillité publique assurée. L'abbé de -Coulanges, qui ne s'épouvantait de rien lorsque la nécessité -des affaires réclamait sa présence, détermina enfin madame -de Sévigné à partir: cependant elle n'y consentit que -quand le <i>bon abbé</i> lui eut promis de ne pas vouloir passer -l'hiver aux Rochers. «Au reste, ma fille, l'abbé croit mon -voyage si nécessaire que je ne puis m'y opposer. Je ne -l'aurai pas toujours ainsi; je dois profiter de sa bonne volonté. -C'est une course de deux mois; car le bon abbé ne -se porte pas assez bien pour aimer à passer là l'hiver. Il -m'en parle d'un air sincère, dont je fais vœu d'être toujours -la dupe: tant pis pour ceux qui me trompent<a id="FNanchor_548" href="#Footnote_548" class="fnanchor"> [548]</a>!»</p> - -<p>Elle-même avoue qu'elle avait tant de raisons pour -aller en Bretagne qu'elle ne pouvait y mettre la moindre -incertitude, «et qu'elle y avait mille affaires<a id="FNanchor_549" href="#Footnote_549" class="fnanchor"> [549]</a>.» -Cependant, cette fois, ce voyage ressemblait peu à -ceux qu'elle faisait depuis longtemps, presque chaque année, -pour aller se délasser des fatigues du grand monde -<span class="pagenum"><a id="Page_253"> 253</a></span> -dans sa terre des Rochers, y faire des embellissements, -et jouir de ses livres et d'elle-même, en la société de -son fils, de sa fille et du petit nombre d'amis qui -venaient la voir. Elle ne pouvait non plus se promettre -aucun plaisir de la réunion des états, qui, lorsqu'elle -avait lieu à Vitré, lui attirait les hommages de -toutes les personnes les plus aimables et les plus considérables -de la Bretagne, que lui conciliait la réputation -qu'elle s'était acquise à la cour par son esprit, -ses attraits personnels, les agréments de son commerce, -et surtout par les égards, l'amitié, les déférences -que lui témoignaient les la Trémouille, les Rohan, -les Chaulnes, les Lavardin. Les chefs de ces deux dernières -familles étaient investis de toute l'autorité du -gouvernement; les la Trémouille et les Rohan étaient -en possession de présider presque alternativement les -assises des états de Bretagne, Rohan à titre de baron de -Léon, la Trémouille comme baron de Vitré. Cette fois -les états ne tenaient pas leurs assises à Vitré, mais à -Dinan, ce qui éloignait de madame de Sévigné tous les -membres de cette assemblée, et donnait de l'importance -à l'évêque de Saint-Malo, qu'elle n'aimait pas. Accoutumée -dès sa jeunesse à scruter les actes du pouvoir, elle -n'avait jamais vu qu'avec déplaisir et avec les sentiments -d'une ancienne frondeuse l'obséquiosité des -états en Bourgogne et en Bretagne et leur déplorable -facilité à voter l'argent des contribuables. Ce secret -penchant au blâme et à la résistance s'était encore accru -par les derniers événements. La manière dont madame -de Sévigné mande à sa fille qu'à Rennes on a jeté -des pierres au duc de Chaulnes, lorsqu'il voulut haranguer -<span class="pagenum"><a id="Page_254"> 254</a></span> -le peuple pour apaiser l'émeute, prouve qu'elle n'était -nullement contristée de l'avanie qu'avait éprouvée -le gouverneur: «Il y a eu même à Rennes une <i>colique -pierreuse</i>. M. de Chaulnes voulut, par sa présence, dissiper -le peuple; il fut repoussé chez lui à coups de -pierres. Il faut avouer que cela est bien insolent<a id="FNanchor_550" href="#Footnote_550" class="fnanchor"> [550]</a>.»</p> - -<p>Cette fois ce n'était pas même sur la route facile de -Rennes, de Vitré et des Rochers qu'elle devait voyager; -c'était vers Nantes et au delà de la Loire que l'urgence -de ses affaires l'appelait. Enfin sa vigueur commençait -à s'altérer par l'annonce des infirmités qui -assiégent souvent les femmes de son âge; elle avait -quarante-neuf ans<a id="FNanchor_551" href="#Footnote_551" class="fnanchor"> [551]</a>. Elle déguise autant qu'elle peut à -sa fille ces perturbations de son tempérament; mais à -Bussy elle dit: «J'ai bien eu des vapeurs, et cette -belle santé, que vous avez vue si triomphante, a reçu -quelques attaques, dont j'ai été humiliée comme si -j'avais reçu un affront<a id="FNanchor_552" href="#Footnote_552" class="fnanchor"> [552]</a>.» Elle fut obligée d'avoir recours -à la science du docteur Bourdelot (Pierre Michon), -ce célèbre médecin des Condé et de la reine -Christine. Madame de Sévigné aimait les soins qu'il prenait -d'elle; mais il l'ennuyait par les vers détestables -<span class="pagenum"><a id="Page_255"> 255</a></span> -qu'il composait à sa louange et à celle de madame de -Grignan<a id="FNanchor_553" href="#Footnote_553" class="fnanchor"> [553]</a>.</p> - -<p>Depuis la mort de Turenne, madame de Sévigné avait -des craintes qu'elle tâchait sagement de réprimer, mais -qui lui faisaient redouter l'isolement et la solitude des -Rochers: «J'emporte, dit-elle à madame de Grignan, -du chagrin de mon fils; on ne quitte qu'avec peine, -les nouvelles de l'armée. Je lui mandais comme à vous, -l'autre jour, qu'il me semblait que j'allais mettre ma -tête dans un sac, où je ne verrais ni n'entendrais rien -de tout ce qui va se passer sur la terre<a id="FNanchor_554" href="#Footnote_554" class="fnanchor"> [554]</a>.»</p> - -<p>Ce qui ajouterait encore à toutes les contrariétés qu'éprouvait -madame de Sévigné en faisant ce voyage de -Bretagne, c'est qu'elle l'avait tant différé que sa femme -de chambre Hélène, qui était enceinte, avait atteint son -neuvième mois et ne pouvait la suivre; elle prit le parti, -pour la désennuyer pendant son absence, de lui laisser -le soin de <i>Marphise</i>, sa chienne favorite, et se contenta, -pour son service, d'une jeune fille nommée Marie, qui jetait -sa gourme, et fit cependant aussi bien qu'Hélène<a id="FNanchor_555" href="#Footnote_555" class="fnanchor"> [555]</a>. -Tous ces contre-temps la rendaient si triste qu'elle refusa, -trois jours avant son départ, une invitation qui lui -fut faite par les Condé d'aller passer quelques jours à -Chantilly: elle préféra au palais, aux jardins enchanteurs, -à la princière société de cette splendide résidence -la solitude sauvage de Livry, remplie des souvenirs de -<span class="pagenum"><a id="Page_256"> 256</a></span> -sa fille et du bonheur dont elle avait joui en la possédant. -«Je fus avant-hier, toute seule (dit-elle), à Livry, -me promener délicieusement avec la lune; il n'y avait -aucun serein; j'y fus depuis six heures du soir jusqu'à -minuit, et je me suis fort bien trouvée de cette petite -équipée. Je devais bien cette honnêteté à la belle Diane -et à l'aimable abbaye. Il n'a tenu qu'à moi d'aller à Chantilly -en très-bonne compagnie; mais je ne me suis pas -trouvée assez libre pour faire un si délicieux voyage: ce -sera pour le printemps qui vient<a id="FNanchor_556" href="#Footnote_556" class="fnanchor"> [556]</a>.»</p> - -<p>Après avoir vu, dans la matinée, du Lude, grand -maître de l'artillerie, depuis peu fait duc, et madame -de la Fayette; après s'être laissé conduire à la messe -par la bonne madame de la Troche, madame de Sévigné -partit le lundi 9 septembre, sans autre compagnie -que l'abbé de Coulanges et cette fille Marie dont nous -venons de parler<a id="FNanchor_557" href="#Footnote_557" class="fnanchor"> [557]</a>. La Mousse était à Autry, chez madame -de Sanzei, et Coulanges s'en alla à Lyon. Madame -de Sévigné se dirigea d'abord sur Orléans; son carrosse -était attelé de quatre chevaux. Elle n'oublia pas d'emporter -avec elle son <i>petit ami</i>, c'est-à-dire le portrait de -sa fille<a id="FNanchor_558" href="#Footnote_558" class="fnanchor"> [558]</a>. Avant de monter en voiture, elle écrit à celle-ci -une longue lettre pleine de nouvelles et de faits intéressants. -Elle parodie plaisamment trois vers de l'opéra de -<i>Cadmus</i>:</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<div><span class="pagenum"><a id="Page_257"> 257</a></span></div> -<p class="i1"> «Je vais partir, belle Hermione;</p> -<p>Je vais exécuter ce que l'<i>abbé</i> m'ordonne,</p> -<p class="i1"> Malgré le péril qui m'attend.</p> -</div></div> - -<p>C'est pour dire une folie, car notre province est plus -calme que la Saône<a id="FNanchor_559" href="#Footnote_559" class="fnanchor"> [559]</a>.» Cela n'était pas exact; elle le -savait, mais elle voulait rassurer sa fille.</p> - -<p>Puis elle revient aussitôt aux pensées sérieuses que -lui inspire le service de Turenne, que l'on exécutait en -grande pompe dans le moment où elle écrivait: «Le cardinal -de Bouillon et madame d'Elbeuf vinrent hier me -le proposer; mais je me contente de celui de Saint-Denis: -je n'en ai jamais vu de si bon. N'admirez-vous -pas ce que fait la mort de ce héros et la face que prennent -les affaires depuis que nous ne l'avons plus? Ah! -ma chère enfant, qu'il y a longtemps que je suis de -votre avis! rien n'est bon que d'avoir une belle âme: -on la voit en toute chose, comme au travers d'un cœur -de cristal. On ne se cache point: vous n'avez point vu -de dupes là-dessus. On n'a jamais pris l'ombre pour le -corps. Il faut être si l'on veut paraître. Le monde n'a -point de longues injustices. Vous devez être de cet avis -pour vos propres intérêts.»</p> - -<p>Elle se délassait dans sa voiture, pendant tout le cours -de son voyage, de la société un peu ennuyeuse du <i>bon -abbé</i> en lisant la <i>Vie du cardinal Commendon</i>, que -<span class="pagenum"><a id="Page_258"> 258</a></span> -Fléchier avait récemment traduite du latin<a id="FNanchor_560" href="#Footnote_560" class="fnanchor"> [560]</a>, et aussi les -lettres qu'elle recevait de sa fille sur l'<i>Histoire des croisades</i>, -«qui est très-belle pour ceux qui ont lu le Tasse,» et -la <i>Vie d'Origène</i>, par un auteur janséniste (Pierre-Thomas -des Fossés), et qu'elle trouvait divine<a id="FNanchor_561" href="#Footnote_561" class="fnanchor"> [561]</a>. Mais, par des -motifs moins exempts de blâme, le ridicule que madame -de Grignan versait sur madame de la Charce et -sur Philis, sa fille aînée, la faisait rire aux larmes<a id="FNanchor_562" href="#Footnote_562" class="fnanchor"> [562]</a>.</p> - -<p>Madame de Sévigné coucha à Orléans; et le lendemain -(10 septembre) elle s'embarqua sur la Loire, munie -d'une lettre de sa fille, qu'elle reçut au moment de se -mettre en bateau, et remplie d'admiration en voyant les -rives de ce fleuve, «si belles, si agréables, si magnifiques.»</p> - -<p>Cette navigation était pour elle toute volontaire. «Le -temps et les chemins, dit-elle, sont admirables: ce sont -de ces jours de cristal où l'on ne sent ni chaud ni froid. -Notre équipage nous amènerait fort bien par terre; c'est -pour nous divertir que nous allons sur l'eau<a id="FNanchor_563" href="#Footnote_563" class="fnanchor"> [563]</a>.»</p> - -<p>Le détail de son embarquement, qu'elle donne à son -cousin de Coulanges, nous prouve que cette manière de -se rendre d'Orléans à Nantes était plus commune dans -ce siècle qu'elle ne l'a été dans le nôtre, où la voie de -transport de terre est préférée.</p> - -<p>«A peine sommes-nous descendus ici (Orléans) que -voilà vingt bateliers autour de nous, chacun faisant valoir -la qualité des personnes qu'il a menées et la bonté de -<span class="pagenum"><a id="Page_259"> 259</a></span> -son bateau. Jamais les couteaux de Nogent ni les chapelets -de Chartres n'ont fait plus de bruit. Nous avons été -longtemps à choisir: l'un nous paraissait trop jeune, -l'autre trop vieux; l'un avait trop d'envie de nous avoir, -cela nous paraissait d'un gueux dont le bateau était -pourri; l'autre était glorieux d'avoir mené M. de Chaulnes. -Enfin la prédestination a paru visible sur un grand -garçon fort bien fait, dont la moustache et le procédé -nous ont décidés<a id="FNanchor_564" href="#Footnote_564" class="fnanchor"> [564]</a>.»</p> - -<p>Elle débarqua à deux lieues de Tours, à Mont-Louis; -et de là, traversant par terre l'espace de quatre kilomètres -qui sépare la Loire et le Cher, elle alla coucher (le 13 -septembre) à Veretz<a id="FNanchor_565" href="#Footnote_565" class="fnanchor"> [565]</a>, dans le château originairement -bâti par Jean de la Barre, comte d'Étampes, et qui appartenait -alors à l'abbé d'Effiat<a id="FNanchor_566" href="#Footnote_566" class="fnanchor"> [566]</a>, connu de nos lecteurs par -l'impôt qu'il préleva sur la marquise de Courcelles<a id="FNanchor_567" href="#Footnote_567" class="fnanchor"> [567]</a>.</p> - -<p>«J'ai couché cette nuit à Veretz. M. d'Effiat savait -ma marche; il me vint prendre sur le bord de l'eau, -avec l'abbé (de Coulanges). Sa maison passe tout ce que -vous avez jamais vu de beau, d'agréable, de magnifique, -et le pays est le plus charmant qu'<i>aucun autre qui soit -sur la terre habitable</i>: je ne finirais pas. M. et madame -de Dangeau y sont venus dîner avec moi, et s'en vont à -Valence. M. d'Effiat vient de nous ramener ici (c'est à -Tours, d'où la lettre est datée); il n'y a qu'une lieue et -demie d'un chemin semé de fleurs... Nous reprenons -<span class="pagenum"><a id="Page_260"> 260</a></span> -demain notre bateau, et nous allons à Saumur<a id="FNanchor_568" href="#Footnote_568" class="fnanchor"> [568]</a> -<b>. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .</b></p> - -<p>«Je vous ai mandé comme j'avais vu l'abbé d'Effiat -dans sa belle maison; je vous écrivis de Tours. Je vins -à Saumur, où nous vîmes Vineuil; nous repleurâmes -M. de Turenne..... Il y a trente lieues de Saumur à -Nantes<a id="FNanchor_569" href="#Footnote_569" class="fnanchor"> [569]</a>. Dans ce dessein, nous allâmes hier deux heures -de nuit; nous nous engravâmes, et nous demeurâmes à -deux cents pas de notre hôtellerie, sans pouvoir aborder. -Nous revînmes au bruit d'un chien, et nous arrivâmes à -minuit dans un <i>tugurio</i> (une cabane) plus pauvre, plus -misérable qu'on ne peut vous le représenter; nous n'y -avons trouvé que deux ou trois vieilles femmes qui -filaient, et de la paille fraîche sur quoi nous avons tous -couché sans nous déshabiller; j'aurais bien ri sans l'abbé, -que je meurs de honte d'exposer ainsi à la fatigue d'un -voyage. Nous nous sommes rembarqués à la pointe du -jour, et nous étions si parfaitement bien établis dans -notre gravier que nous avons été près d'une heure avant -de prendre le fil de notre discours. Nous voulons, contre -vent et marée, arriver à Nantes; nous ramons tous.»</p> - -<p>En passant, à la poste d'Ingrande, madame de Sévigné -met la lettre qu'elle vient d'écrire, et deux jours -après elle est à Nantes. Là elle se hâte d'annoncer son -arrivée à sa fille<a id="FNanchor_570" href="#Footnote_570" class="fnanchor"> [570]</a>: «Je vous ai écrit sur la route et même -du bateau, autant que je l'ai pu. J'arrivai ici à neuf -<span class="pagenum"><a id="Page_261"> 261</a></span> -heures du soir, au pied de ce grand château que vous -connaissez, au même endroit où se sauva notre cardinal -(de Retz). On entend une petite barque; on demande: -<i>Qui va là?</i> J'avais ma réponse toute prête; et en même -temps je vois sortir par la petite porte M. de Lavardin, -avec cinq ou six flambeaux de poing devant lui, accompagné -de plusieurs nobles, qui vient me donner la -main et me reçoit parfaitement bien. Je suis assurée que, -du milieu de la rivière, cette scène était admirable; elle -donna une grande idée de moi à mes bateliers. Je soupai -fort bien; je n'avais ni dormi ni mangé depuis vingt-quatre -heures. J'allai coucher chez M. d'Harouis. Ce ne -sont que festins au château et ici. M. de Lavardin ne me -quitte pas; il est ravi de causer avec moi<a id="FNanchor_571" href="#Footnote_571" class="fnanchor"> [571]</a>.»</p> - -<p class="i2">«<b>. . .</b> Nous allons à la Seilleraye<a id="FNanchor_572" href="#Footnote_572" class="fnanchor"> [572]</a>, M. de Lavardin m'y -vient conduire; et de là aux Rochers, où je serai mardi.»</p> - -<p>Elle resta sept jours à Nantes, et d'Harouis la conduisit -lui-même après dîner à son beau château de la Seilleraye, -à quatorze kilomètres à l'est de Nantes<a id="FNanchor_573" href="#Footnote_573" class="fnanchor"> [573]</a>, où elle resta deux -jours; elle partit le 15 septembre. M. de Lavardin la -mit en carrosse, et M. d'Harouis l'accabla de provisions. -Elle arriva le jour suivant aux Rochers<a id="FNanchor_574" href="#Footnote_574" class="fnanchor"> [574]</a>. De la Seilleraye -à Vitré, par la route directe de Châteaubriant et la Guerche, -on mesure dix myriamètres, ou vingt-cinq lieues de -<span class="pagenum"><a id="Page_262"> 262</a></span> -poste; et madame de Sévigné, pour franchir cet espace -en un jour, a dû d'avance envoyer des chevaux de relais -sur la route, ce qui lui était facile, puisqu'elle avait -amené avec elle six chevaux et deux hommes; et au -besoin, si ses équipages n'eussent pas suffi, elle eût eu -recours à ceux du lieutenant général et du trésorier de -Bretagne.</p> - -<p>Voilà les seuls détails que nous avons pu recueillir sur -ce voyage de madame de Sévigné, qui, avec juste raison, -inquiéta si fort ses amis. «Ils ont fait, écrit-elle, l'honneur -à la Loire de croire qu'elle m'avait abîmée: hélas! -la pauvre créature! je serais la première à qui elle eût -fait ce mauvais tour. Je n'ai eu d'incommodité que -parce qu'il n'y avait pas assez d'eau dans cette rivière.» -Et, en effet, bien loin de s'en trouver plus mal, le violent -exercice qu'elle se donna lui rendit la santé, que les remèdes -des médecins de Lorme et Bourdelot<a id="FNanchor_575" href="#Footnote_575" class="fnanchor"> [575]</a> avaient -peut-être contribué à détruire. «Ma santé, dit-elle, est -comme il y a six ans; je ne sais d'où me revient cette fontaine -de Jouvence<a id="FNanchor_576" href="#Footnote_576" class="fnanchor"> [576]</a>.» Ces paroles prouvent que ce -n'était pas par raison de santé que madame de Sévigné -préféra les tracas, les fatigues, les dangers d'une aventureuse -navigation aux douceurs d'une pérégrination -faite en calèche richement attelée, roulant sur une belle -route par un temps chaud, pur et serein et avec l'escorte -de deux serviteurs à cheval.</p> - -<p>Ses lettres nous révèlent les véritables motifs de cette -équipée et ce qui se passait dans son âme. Elle était -<span class="pagenum"><a id="Page_263"> 263</a></span> -contrariée de la nécessité d'être obligée de quitter Paris, -de la pauvreté provinciale<a id="FNanchor_577" href="#Footnote_577" class="fnanchor"> [577]</a> où allait être réduite sa -correspondance avec sa fille, de l'inquiétude que lui -causaient pour son fils les nouvelles de l'armée<a id="FNanchor_578" href="#Footnote_578" class="fnanchor"> [578]</a>. Elle -était triste, vaporeuse<a id="FNanchor_579" href="#Footnote_579" class="fnanchor"> [579]</a>. De tous les maux qui assiégent -la vie, l'ennui est celui auquel les femmes du grand -monde sont le plus exposées, qu'elles redoutent le plus -et qu'elles savent le moins supporter; pour y échapper -elles ne reculent devant aucune extravagance. Madame -de Sévigné craignait surtout l'atteinte de ce mal durant -un trajet lent et long, seule avec le bon et vieil -abbé, sans son fils, sans la Mousse, sans Corbinelli, -sans même son Hélène, enfin sans aucun des êtres qui -avaient coutume de causer avec elle, de l'intéresser, -de la distraire. Elle avait autrefois navigué sur la Loire; -elle avait conduit sa fille au couvent des Filles-Sainte-Marie, -à Nantes. Dès cette époque, elle adorait cette enfant -belle et gracieuse, âgée de dix ans, et elle l'avait -mise en pension chez les pieuses filles de l'ordre fondé -par son aïeule, afin qu'elle y reçût les instructions chrétiennes -pour sa première communion. C'était le beau -temps de la jeunesse de madame de Sévigné, et elle eut -un désir extrême de contempler de nouveau les rives qui -devaient lui retracer avec vivacité de si agréables et de si -touchants souvenirs. Aussi, sans se déguiser ce que sa -résolution présentait de difficultés et d'inconvénients et -ce qu'elle avait de téméraire, au moment de quitter le -<span class="pagenum"><a id="Page_264"> 264</a></span> -rivage elle fut saisie d'une sorte d'ivresse joyeuse, bientôt -suivie d'un léger repentir; ce qui ne l'empêcha pas -d'exécuter son projet avec courage et gaieté.</p> - -<p>«C'est une folie, dit-elle, de s'embarquer quand on -est à Orléans, peut-être même à Paris; il est vrai cependant -qu'on se croit obligé de prendre des bateliers à -Orléans, comme à Chartres d'acheter des chapelets...»</p> - -<p>«<i>Je suis dans un bateau, dans le courant de l'eau, -fort loin de mon château</i>; je pense que je puis achever, -<i>Ah! quelle folie!</i> car les eaux sont si basses et je suis -si souvent engravée que je regrette mon équipage, qui -ne s'arrête pas et qui va toujours. On s'ennuie sur l'eau -quand on y est seule; il faut un petit comte des Chapelles -et une mademoiselle de Sévigné.» Et à son cousin de -Coulanges elle dit: «Nous allons voguer sur la belle -Loire; elle est un peu sujette à déborder, mais elle en -est plus douce<a id="FNanchor_580" href="#Footnote_580" class="fnanchor"> [580]</a>.»</p> - -<p>Immédiatement avant d'entrer en bateau elle avait -écrit à madame de Grignan: «Enfin, ma fille, me voilà -prête à m'embarquer sur notre Loire! Vous souvient-il -du joli voyage que nous y fîmes<a id="FNanchor_581" href="#Footnote_581" class="fnanchor"> [581]</a>?»</p> - -<p>Pour elle, ce souvenir ne la quitte pas; et toujours il -lui faut parler de ce voyage quand elle passe devant le -lieu qui lui en rappelle quelques circonstances:</p> - -<p>«Je me ressouvins, dit-elle, l'autre jour, à Blois, d'un -endroit si beau, où nous nous promenions avec le petit -comte des Chapelles, qui voulait retourner le sonnet -d'Uranie:</p> - -<p class="quote">Je veux finir mes jours dans l'amour de <span class="smallc">Marie</span>.»</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_265"> 265</a></span> -Et de Nantes elle écrit à sa fille: «J'ai vu nos sœurs -de Sainte-Marie, qui vous adorent encore, et se souviennent -de toutes les paroles que vous prononçâtes chez -elles<a id="FNanchor_582" href="#Footnote_582" class="fnanchor"> [582]</a>.»</p> - -<p>«Des sept jours que j'ai été à Nantes, j'ai passé trois -jours après-dîner chez nos sœurs de Sainte-Marie. Elles -ont de l'esprit, elles vous adorent et sont charmées du -<i>petit ami</i><a id="FNanchor_583" href="#Footnote_583" class="fnanchor"> [583]</a>, que je porte toujours avec moi.»</p> - -<p>Et quand elle est à la Seilleraye, elle écrit: «Me voici, -ma fille, dans ce lieu où vous avez été un jour avec moi; -mais il n'est pas reconnaissable: il n'y a pas pierre sur -pierre de ce qu'il était en ce temps-là<a id="FNanchor_584" href="#Footnote_584" class="fnanchor"> [584]</a>.»</p> - -<p>Les émotions produites par la vue des lieux où madame -de Grignan avait passé son enfance s'accrurent dans -le cœur de sa mère à la vue des Rochers. «J'ai trouvé -ces bois, dit-elle, d'une beauté et d'une tristesse extraordinaires: -tous les arbres que vous avez vus petits sont -devenus grands et droits, et beaux en perfection. Ils sont -élagués, et font une ombre agréable; ils ont quarante ou -cinquante pieds de hauteur. Il y a un petit air d'amour -maternel dans ce détail: songez que je les ai tous plantés, -et que je les ai vus, comme disait M. de Montbazon, -<i>pas plus grands que cela</i>. (M. de Montbazon avait l'habitude -de dire cela de ses propres enfants.) C'est ici une -solitude faite exprès pour y bien rêver: j'y pense à vous -à tout moment; je vous regrette, je vous souhaite. Votre -<span class="pagenum"><a id="Page_266"> 266</a></span> -santé, vos affaires, votre éloignement, que pensez-vous -que tout cela fasse entre chien et loup? J'ai ces vers dans -la tête:</p> - -<p class="quote">Sous quel astre cruel l'avez-vous mis au jour<br /> -L'objet infortuné d'une si tendre amour?</p> - -<p>«Il faut regarder la volonté de Dieu bien fixement pour -envisager sans désespoir tout ce que je vois, dont assurément -je ne vous entretiendrai pas..... Je trouvai l'autre -jour une lettre de vous où vous m'appelez <i>ma bonne -maman</i>; vous aviez dix ans, vous étiez à Sainte Marie, -et vous me contiez la culbute de madame Amelot, qui de -la salle se trouva dans une cave. Il y a déjà du bon style -à cette lettre. J'en ai trouvé mille autres, qu'on écrivait -autrefois à mademoiselle de Sévigné. Toutes ces circonstances -sont bien heureuses pour me faire souvenir de -vous; car sans cela où pourrais-je prendre cette idée<a id="FNanchor_585" href="#Footnote_585" class="fnanchor"> [585]</a>?»</p> - -<p>Ce singulier voyage de madame de Sévigné à Nantes, -ses souvenirs, ses regrets donnent le désir de connaître -à quelle époque elle fit celui qui n'a point été raconté -dans ces Mémoires, et dans quelles circonstances elle -mit sa fille au couvent. Puisque des documents nouveaux -jettent un jour inattendu sur les premières années -de cette tendre mère, imitons-la, complétons ses souvenirs, -et rétrogradons jusqu'au temps où elle devint enceinte -de cette fille bien-aimée.</p> - -<p>Une lettre de madame de Sévigné annonçant à Bussy -la naissance de Sévigné fils et la réponse de Bussy, mal -<span class="pagenum"><a id="Page_267"> 267</a></span> -datées, placées par le P. Bouhours et par la comtesse -Dalet (ou par Bussy lui-même, car la partie inédite -de ses Mémoires, écrite de sa main, offre un exemple -d'une aussi forte distraction et d'une si étrange erreur), -ont produit la confusion qui a existé pendant longtemps -sur les dates de la naissance du frère et de la sœur<a id="FNanchor_586" href="#Footnote_586" class="fnanchor"> [586]</a>.</p> - -<p>Le fils de madame de Sévigné est mort le 26 mars -1713, et les témoins les plus capables d'être bien informés -(Simiane de Mauron, d'Harouis, l'abbé de la -Fayette<a id="FNanchor_587" href="#Footnote_587" class="fnanchor"> [587]</a>) attestent qu'il avait alors soixante-cinq ans; il -était donc né en mars 1648, époque que l'on croyait être -celle de la naissance de sa sœur. Des fragments des Mémoires -autographes d'Ormesson, récemment publiés, -constatent que madame de Sévigné accoucha, à Paris, de -sa fille le 10 octobre 1646<a id="FNanchor_588" href="#Footnote_588" class="fnanchor"> [588]</a>. Ainsi il est certain que madame -de Grignan était l'aînée et âgée d'un an et demi -de plus que son frère. Il résulte de ce fait qu'en l'année -1675, dont nous nous occupons, madame de Grignan -avait près de vingt-neuf ans, et Sévigné au plus vingt-sept; -et aussi que lorsque l'abbé Arnauld vit madame -de Sévigné avec ses deux enfants, et qu'il fut -frappé de la beauté de la mère, de la fille et du fils, mademoiselle -de Sévigné avait onze ans et demi, et Sévigné -seulement neuf ans<a id="FNanchor_589" href="#Footnote_589" class="fnanchor"> [589]</a>. Ces dates ne peuvent être regardées -comme indifférentes lorsque l'on considère que -l'esprit et le cœur échappent bien plus vite aux langes de -<span class="pagenum"><a id="Page_268"> 268</a></span> -l'enfance chez le sexe le plus faible et le plus délicatement -organisé; et ainsi s'explique comment, dès son -plus jeune âge, Sévigné s'habitua à reconnaître la supériorité -de sa sœur en toutes choses, et eut pour elle en -toute occasion cette déférence, je dirai presque cette vénération, -qu'il manifeste admirablement dans la lettre -où il lui exprime ses dernières volontés<a id="FNanchor_590" href="#Footnote_590" class="fnanchor"> [590]</a>. Les premières -opinions, les premiers jugements formés par la raison -ont sur certaines natures une influence indélébile.</p> - -<p>Nous venons d'apprendre par madame de Sévigné -qu'elle avait conservé les lettres de sa fille depuis son -enfance, et que celle-ci avait dix ans quand elle écrivit -la lettre où elle racontait à sa mère l'accident arrivé à -madame Amelot. Ceci nous reporte à l'année 1656. C'est -donc lorsque, à la fin de septembre de l'année 1654, -madame de Sévigné se rendit à sa terre des Rochers, -qu'elle fit une première fois cette navigation d'Orléans à -Nantes, où elle mit alors sa fille au couvent des sœurs -Sainte-Marie, de cette dernière ville. Ce fut dans les -années 1654 à 1657 que madame de Sévigné fut le -plus préoccupée de son cousin Bussy<a id="FNanchor_591" href="#Footnote_591" class="fnanchor"> [591]</a>. Cependant, -avant la fin de 1656, elle avait retiré sa fille du couvent; -et, dans le mois d'octobre de cette même année, -elle l'emmena avec elle à Bourbilly et à Monjeu, où elle -vit Bussy et Jeannin de Castille<a id="FNanchor_592" href="#Footnote_592" class="fnanchor"> [592]</a>. Après un séjour de quelques -<span class="pagenum"><a id="Page_269"> 269</a></span> -semaines, elle retourna à Paris; et au commencement -de l'année 1657, accompagnée de ses deux enfants, -elle vit pour la première fois, chez leur oncle, l'abbé Arnauld, -qui dans ses Mémoires a exprimé l'admiration -que lui fit éprouver la beauté de la mère, de la fille et -du fils<a id="FNanchor_593" href="#Footnote_593" class="fnanchor"> [593]</a>.</p> - -<p>Les attraits de mademoiselle de Sévigné se développèrent -rapidement et excitèrent la verve des poëtes. Elle -avait à peine treize ans lorsqu'elle commença à inspirer -heureusement la muse badine de Saint-Pavin<a id="FNanchor_594" href="#Footnote_594" class="fnanchor"> [594]</a>; elle en -avait dix-sept quand Ménage lui adressa un madrigal en -italien, qui fut imprimé dans la cinquième édition de ses -poésies<a id="FNanchor_595" href="#Footnote_595" class="fnanchor"> [595]</a>; elle était âgée d'environ dix-neuf ans lorsque -la Fontaine lui dédia en vers gracieux sa fable du <i>Lyon -amoureux</i><a id="FNanchor_596" href="#Footnote_596" class="fnanchor"> [596]</a>, publiée deux ans après dans le recueil du -fabuliste: cet hommage dut donner à sa beauté une renommée -populaire. Mais ce qui acquit très-vite à mademoiselle -de Sévigné une célébrité qui faillit ternir pour -toujours sa réputation, fut son apparition dans les ballets -du roi. On crut alors qu'elle était devenue l'objet -des préférences de Louis XIV. C'est dans sa seizième -année qu'elle fut produite, en 1663, aux dangereux regards -<span class="pagenum"><a id="Page_270"> 270</a></span> -du monarque<a id="FNanchor_597" href="#Footnote_597" class="fnanchor"> [597]</a>. On l'admira dans le ballet où le -roi était déguisé en berger, et toutes les beautés de la -cour y figuraient, ainsi qu'elle, en bergères. Elle reparut, -l'année suivante, en Amour déguisé en nymphe -maritime; et elle avait dix-huit ans quand elle joua le -rôle d'<i>Omphale</i>, dans le ballet de la <i>Naissance de Vénus</i><a id="FNanchor_598" href="#Footnote_598" class="fnanchor"> [598]</a>. -La lettre qu'elle écrivit à l'abbé le Tellier, que -nous avons fait connaître, prouve qu'à vingt et un ans -elle liait librement des correspondances avec les beaux -esprits du temps<a id="FNanchor_599" href="#Footnote_599" class="fnanchor"> [599]</a>.</p> - -<p>Enfin, lorsque Françoise-Marguerite de Sévigné épousa -François-Adhémar, comte de Grignan, le 29 janvier -1668, elle avait vingt-deux ans et quatre mois, ce qui -réduit à moins de quinze années la différence d'âge qui -existait entre elle et le comte de Grignan. Le mariage -se fit à l'église de Saint-Nicolas des Champs, paroisse où -habitait madame de Sévigné; et, le jour même, les deux -époux allèrent coucher à Livry<a id="FNanchor_600" href="#Footnote_600" class="fnanchor"> [600]</a>.</p> - -<p>Après ces rectifications essentielles sur la fille, revenons -à la mère, à Marie de Rabutin-Chantal. A l'âge de dix-huit -ans elle quitta les ombrages de l'abbaye de Livry, où s'était -terminée son éducation; et elle entra dans le monde -<span class="pagenum"><a id="Page_271"> 271</a></span> -pour se marier, et elle se maria<a id="FNanchor_601" href="#Footnote_601" class="fnanchor"> [601]</a>. Le séduisant et jovial -marquis de Sévigné, gentilhomme breton, présenté par le -cardinal de Retz, son parent, est préféré par la jeune héritière -de Bourgogne. Le 27 mai 1644, les articles du contrat -furent arrêtés par André d'Ormesson et le président Barillon<a id="FNanchor_602" href="#Footnote_602" class="fnanchor"> [602]</a>, -tous deux pères de ceux qui, sous ces mêmes noms, -furent par la suite les constants amis de madame de Sévigné. -Deux jours après que le contrat eut été rédigé et -qu'on parlait de prendre jour pour le signer, Sévigné eut -une querelle avec du Chastellet, son compatriote. Sévigné -l'arrêta sur le Pont-Neuf, et lui donna des coups de -plat d'épée pour quelques propos que celui-ci avait tenus. -Un duel s'ensuivit, qui eut lieu au Pré-aux-Clercs<a id="FNanchor_603" href="#Footnote_603" class="fnanchor"> [603]</a>. Sévigné -reçut une blessure à la cuisse, qui mit sa vie en danger. -Du Chastellet était de l'ancienne famille de Hay de -Bretagne, qui se vantait d'être sortie, il y a six cents ans, -des comtes de Castille. Le père de du Chastellet avait été -avocat au parlement de Rennes, et ensuite conseiller -d'État<a id="FNanchor_604" href="#Footnote_604" class="fnanchor"> [604]</a>: ainsi son fils était de robe, tandis que Sévigné -était d'épée. Cela explique l'arrogance de ce dernier; -il en fut sévèrement puni. Le père de du Chastellet -<span class="pagenum"><a id="Page_272"> 272</a></span> -s'illustra dans les lettres, et son fils, dans toutes les -occasions importantes, montra autant de talent et d'esprit -que de courage; il devint par la suite un publiciste -distingué<a id="FNanchor_605" href="#Footnote_605" class="fnanchor"> [605]</a>, et nous retrouvons son nom ou celui de son -fils, trente et quarante ans après ce duel, sur les listes de -ceux qui siégèrent aux états de Bretagne, avec le nom du -fils de madame de Sévigné<a id="FNanchor_606" href="#Footnote_606" class="fnanchor"> [606]</a>. Près de deux mois et demi -se passèrent avant que Henri de Sévigné fût guéri de sa -blessure, et son contrat de mariage ne put être signé que -le 1<sup>er</sup> juillet. Il le fut sans témoins. Le lundi soir 1<sup>er</sup> août, -les fiançailles se firent en présence du P. de Gondy, de -l'Oratoire; du coadjuteur (Retz), et des évêques d'Alby -et de Châlons; de la duchesse de Retz et de plusieurs -autres dames. Le mariage fut célébré le jeudi 4 août, -à deux heures du matin. Cette heure tardive explique -pourquoi l'acte de mariage, qu'on a retrouvé dans le registre -de l'ancienne paroisse de Saint-Gervais, n'est signé -ni du curé ni du vicaire qui le dressèrent. Ils remirent -au lendemain<a id="FNanchor_607" href="#Footnote_607" class="fnanchor"> [607]</a> pour compléter leur ouvrage, -<span class="pagenum"><a id="Page_273"> 273</a></span> -et, comme il arrive souvent, ce qui avait dû être fait la -veille fut oublié le jour d'ensuite.</p> - -<p>Les deux conjoints partirent huit à dix jours après -pour la Bretagne, se rendirent à leur terre des Rochers, -et ne revinrent à Paris qu'en décembre de l'année suivante. -Ainsi les souvenirs du séjour de madame de Sévigné -aux Rochers se trouvaient liés à l'acte le plus important -de sa vie et à cette année qu'elle passa seule -avec celui qu'elle aimait, corrigé, pendant quelque temps -du moins, de sa brutale insolence et de ses fougueux -emportements par la dure leçon qui lui avait été donnée -par du Chastellet.</p> - -<p>Dès cette époque, on aperçoit dans madame de Sévigné -le désir qu'elle manifeste, à l'égard de son cousin -Bussy, de son fils et de sa fille, de voir ceux des deux -familles auxquelles elle appartenait parvenir à de hautes -fonctions et à un rang élevé dans le monde; et comme -cette ambition ne put réussir que par sa fille, son amour -maternel pour le premier fruit d'une union enfanté dans -les délices d'une passion qu'aucune autre ne remplaça -fut encore accru par le contentement de l'amour-propre -satisfait<a id="FNanchor_608" href="#Footnote_608" class="fnanchor"> [608]</a>. Avant de partir pour les Rochers, elle avait -prié son ami Olivier d'Ormesson de s'informer si M. de -Rogmont voulait vendre sa charge de cornette des chevau-légers; -car il ne paraît pas, ainsi qu'on l'a dit, qu'au -moment de son mariage Sévigné eût encore été revêtu du -grade de maréchal de camp. Des négociations, qui durèrent -deux ans, furent entamées pour lui procurer une -<span class="pagenum"><a id="Page_274"> 274</a></span> -charge; elles échouèrent, parce que madame de Sévigné -ne put obtenir de son tuteur l'abbé de Coulanges -et de ses frères de servir de caution à M. de Sévigné. -Ces hommes judicieux avaient aperçu les graves défauts -de ce jeune éventé, et regrettaient que leur nièce lui eût -donné la préférence sur ses rivaux. L'abbé de Coulanges -se plaignait hautement de ce que, par tendresse pour la -mariée, lui et madame de la Trousse s'étaient engagés, -contre leur intention, plus qu'ils n'auraient dû -le faire<a id="FNanchor_609" href="#Footnote_609" class="fnanchor"> [609]</a>.</p> - -<p>Madame de Sévigné, privée de sa mère et n'ayant -jamais eu de sœur, n'eut auprès d'elle, pour l'assister -dans son premier accouchement, que la mère et la femme -d'Olivier d'Ormesson, son ami intime, son conseil. -L'enfant qui devait bientôt remplir d'amour et de tourments -toute l'existence de madame de Sévigné l'occupa -faiblement: ce n'était qu'une fille. Mais, seize mois -après la naissance de cette fille, une lettre qu'elle écrit à -Bussy<a id="FNanchor_610" href="#Footnote_610" class="fnanchor"> [610]</a> nous montre l'orgueilleuse mère triomphante -d'avoir donné un fils à son mari. Elle était trop entièrement -dominée par sa tendresse conjugale pour qu'elle -pût encore en reporter une grande part sur ses enfants. -Le cœur est exclusif, et sent qu'il affaiblit ses forces en -les partageant. Toujours l'amour d'une femme pour son -mari faiblit quand le sentiment maternel se développe -en elle avec énergie. La raison resserre, il est vrai, les -nœuds qui l'unissent au père de ses enfants; mais quand -<span class="pagenum"><a id="Page_275"> 275</a></span> -la raison domine il n'y a plus de passion, il n'y a plus -d'amour.</p> - -<p>D'ailleurs, dans l'intervalle de ses deux accouchements, -pendant l'hiver de 1646 à 1647 et dans le cours -de cette dernière année, madame de Sévigné fut occupée -d'un procès qui la concernait personnellement, ce -qui la rapprocha encore plus d'Olivier d'Ormesson et de -sa famille. Elle résida donc à Paris avec son mari, et le -procès ne les empêcha pas de goûter les plaisirs de la -capitale; ils invitaient fréquemment à dîner M. Olivier -d'Ormesson, avec leur oncle Renaud de Sévigné, qui arrivait -d'Italie.</p> - -<p>Dans le journal d'Olivier d'Ormesson, du 27 février -1647, on lit<a id="FNanchor_611" href="#Footnote_611" class="fnanchor"> [611]</a>: «Je fus dîner chez M. de Sévigné. Je fus, -avec M. et madame de Sévigné, chez M. du Verger pour -leur affaire; ils soupèrent ce soir-là au logis, et (nous) fûmes voir -après souper, chez M. Novion (le président), <i>le Ballet -des Rues de Paris</i>, qui n'est pas grand'chose<a id="FNanchor_612" href="#Footnote_612" class="fnanchor"> [612]</a>.»</p> - -<p>La journée du samedi 2 mars 1647 dut se graver aussi -dans la mémoire de madame de Sévigné; car, après avoir -été avec d'Ormesson chez ses hommes d'affaires, elle se -rendit ensuite avec lui au Palais-Royal pour voir la représentation -de la <i>Grande Comédie</i><a id="FNanchor_613" href="#Footnote_613" class="fnanchor"> [613]</a>. Cette grande comédie, -dont parle Olivier d'Ormesson, lui parut ennuyeuse, -parce qu'il ne connaissait pas l'italien. Elle dut, par -une raison contraire, intéresser la jeune élève de Ménage -et de Chapelain. C'est le premier opéra italien qui ait été -<span class="pagenum"><a id="Page_276"> 276</a></span> -joué en France. Il fait époque dans l'histoire de notre -théâtre. Ceux qui le connaissent savent qu'il s'agit ici -du <i>Mariage d'Orphée et d'Eurydice</i><a id="FNanchor_614" href="#Footnote_614" class="fnanchor"> [614]</a>, pièce pour laquelle -Mazarin fit de si grandes dépenses. Transcrivons -le récit que fait madame de Motteville de la première -représentation de cette pièce. Il peint si bien la cour -et les courtisans et l'époque heureuse de la régence -d'Anne d'Autriche, il nous initie si parfaitement au -temps de la jeunesse de madame de Sévigné, que l'on -ne peut, sans l'avoir lu, se faire une idée des souvenirs -dont la dame des Rochers aimait à entretenir sa vive -imagination durant les journées passées dans sa champêtre -solitude<a id="FNanchor_615" href="#Footnote_615" class="fnanchor"> [615]</a>.</p> - -<p>«Sur la fin des jours gras (le 2 mars 1747), le cardinal -Mazarin donna un grand régal à la cour, qui fut -beau et fortement loué par les adulateurs qui se rencontrent -en tout temps. C'était une comédie à machines et -en musique à la mode d'Italie, qui fut belle et qui nous -parut extraordinaire et royale. Il avait fait venir les -musiciens de Rome avec de grands soins, et le machiniste -aussi, qui était un homme de grande réputation pour -ces sortes de spectacles. Les habits en furent magnifiques, -et l'appareil tout de même sorte. Les mondains -s'en divertirent, les dévots en murmurèrent; et ceux -qui, par un esprit déréglé, blâment tout ce qui se fait -ne manquèrent pas, à leur ordinaire, d'empoisonner ces -plaisirs, parce qu'ils ne respirent pas l'air sans chagrin -et sans rage. Cette comédie ne put être prête que les -<span class="pagenum"><a id="Page_277"> 277</a></span> -derniers jours de carnaval; ce qui fut cause que le cardinal -Mazarin et le duc d'Orléans pressèrent la reine pour -qu'elle se jouât dans le carême; mais elle, qui conservait -une volonté pour tout ce qui regardait sa conscience, -n'y voulut pas consentir. Elle témoigna même quelque -dépit de ce que la comédie, qui se représenta le samedi -pour la première fois, ne pût commencer que tard, -parce qu'elle voulait faire ses dévotions le dimanche gras, -et que, la veille des jours qu'elle voulait communier, -elle s'était accoutumée à se retirer de meilleure heure, -pour se lever le lendemain plus matin. Elle ne voulut -pas perdre ce plaisir, pour obliger celui qui le donnait; -mais, ne voulant pas aussi manquer à ce qu'elle croyait -être son devoir, elle quitta la comédie à moitié, et se -retira pour prier Dieu, pour se coucher et souper à l'heure -qu'il convenait, pour ne rien troubler à l'ordre de sa -vie. Le cardinal Mazarin en témoigna quelque déplaisir; -et quoique ce ne fût qu'une bagatelle qui avait en soi un -fondement assez sérieux et assez grand pour obliger la -reine à faire plus qu'elle ne fit, c'est-à-dire à ne la point -voir du tout, elle fut néanmoins estimée d'avoir agi contre -les sentiments de son ministre; et comme il témoigna -d'en être fâché, cette petite amertume fut une très-grande -douceur pour un grand nombre d'hommes. Les -langues et les oreilles inutiles en furent occupées quelques -jours, et les plus graves en sentirent des moments -de joie qui leur furent délectables.»</p> - -<p>Nul doute que madame de Sévigné, lorsqu'elle voyait -ce spectacle magique de l'Opéra tel que Louis XIV et -les grands artistes d'alors l'avaient créé, ne se ressouvînt -souvent de la <i>Grande Comédie</i> et des événements qu'elle -précéda presque immédiatement.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_278"> 278</a></span> -Madame de Sévigné, après avoir passé tranquillement -les premiers mois de 1648 chez son oncle l'évêque de -Châlons, dans sa belle campagne de Ferrières, revint à -Paris; et le 11 décembre suivant elle était dans la lanterne -«avec d'Ormesson pour entendre plaider un procès, -lorsque les députés des enquêtes envahirent la grand'chambre, -et demandèrent l'assemblée générale<a id="FNanchor_616" href="#Footnote_616" class="fnanchor"> [616]</a>.» Puis, -le lendemain du repas de famille, le 6 janvier 1649, elle -apprit que le roi était parti dans la nuit, que la porte -Saint-Honoré était gardée, que le peuple avait forcé le -bagage du roi. La guerre civile commença: tous les Sévigné -y prirent part, et suivirent le parti de Retz. Le -marquis de Sévigné se sépara de sa femme, et suivit le -duc de Longueville en Normandie. Renaud de Sévigné -se fit battre à Longjumeau; et madame de Sévigné, malgré -cet échec, se réjouissait des progrès de la Fronde, -en haine du ministre, qui était l'ennemi de Gondi. Son -naturel, enclin à la gaieté, la portait à se laisser distraire -des inquiétudes et des tourments que lui causait l'absence -de son mari par la société et les lettres de Bussy, -et surtout par le jovial et spirituel chansonnier que d'Ormesson -rencontrait toujours chez elle lorsqu'il y allait. -C'était Marigny, fougueux frondeur, qui, non content -de rimer des épigrammes et des chansons, joignait l'action -aux paroles, et souffletait un membre du parlement -(Boislesve) qui l'avait insulté par ses propos<a id="FNanchor_617" href="#Footnote_617" class="fnanchor"> [617]</a>. Ce fut -alors aussi qu'elle s'occupa le plus de musique, de vers -<span class="pagenum"><a id="Page_279"> 279</a></span> -italiens et de littérature, et qu'elle mit à profit, pour -son instruction, l'inclination qu'avait pour elle Ménage, -jeune encore, quoique déjà célèbre<a id="FNanchor_618" href="#Footnote_618" class="fnanchor"> [618]</a>. L'amitié qu'Olivier -d'Ormesson avait pour madame de Sévigné et l'influence -qu'elle exerçait sur ce magistrat étaient si bien connues -qu'à la cour et dans sa propre famille on le soupçonnait, -dans le célèbre procès de Fouquet, dont il était rapporteur, -de ne se conduire que par les conseils de madame -de Sévigné<a id="FNanchor_619" href="#Footnote_619" class="fnanchor"> [619]</a>.</p> - -<p>L'intimité des deux familles de Rabutin, de Coulanges -et des d'Ormesson fut entretenue par Olivier après -la mort de son père. «Le jour de Pâques (5 avril 1665), -dit celui-ci dans ses Mémoires, nous donnâmes, le soir, -à souper, suivant l'usage de mon père, à toute la famille; -et s'y trouvèrent MM. de Colanges, Sanzé et d'Harouis, -mesdames de Sévigné mère et fille.» Le 12 octobre suivant, -nous apprenons de ces mêmes Mémoires que -«d'Ormesson se rendit à Livry pour voir madame de -Sévigné, qui s'était blessée à l'œil<a id="FNanchor_620" href="#Footnote_620" class="fnanchor"> [620]</a>.» D'Ormesson a bien -soin de noter sur son journal que, le mercredi 3 février -1666, madame de Sévigné lui amena Pellisson et mademoiselle -de Scudéry, qui lui témoignèrent toute l'estime -et l'amitié possibles sur l'histoire du procès de Fouquet; -qu'au mois d'août de la même année madame de Sévigné -partit pour la Bretagne; et qu'enfin, le 25 août -de l'année suivante (1667), «il alla à Livry voir l'abbé -<span class="pagenum"><a id="Page_280"> 280</a></span> -de Colanges et madame de Sévigné, où arrivèrent -M. d'Andilly et madame Duplessis-Guénégaud<a id="FNanchor_621" href="#Footnote_621" class="fnanchor"> [621]</a>.»</p> - -<p>A la fin de cette même année (1667), le nom de madame -de Sévigné fut bien souvent répété dans le monde -et dans les journaux scientifiques, non pas à cause d'elle -ou de sa famille, mais parce qu'un de ses domestiques, -nommé Saint-Amand, était devenu fou furieux; on pratiqua -sur lui une opération de thérapeutique alors très-vantée: -c'était celle de la transfusion du sang. Ce fut -M. de Montmort<a id="FNanchor_622" href="#Footnote_622" class="fnanchor"> [622]</a>, ami de madame de Sévigné comme -de d'Ormesson, qui apprit à ce dernier que, «le 2 décembre -(1667), Saint-Amand était retombé dans sa folie -pour la troisième fois; qu'on avait tiré tout son sang, et -introduit dans ses veines le sang d'un veau; qu'il avait -dormi la nuit, ce qu'il n'avait pas fait depuis six semaines, -et qu'on espérait un bon succès.» Cette opération -de la <i>transfusion du sang</i> était nouvelle en France lorsqu'on -la pratiqua sur le domestique de madame de Sévigné. -Suivant Mackensie, on l'avait essayée en Angleterre -dès l'an 1648<a id="FNanchor_623" href="#Footnote_623" class="fnanchor"> [623]</a>. Robert Lower s'en prétendit l'inventeur, -et en 1665 il en fit l'expérience publique à Oxford<a id="FNanchor_624" href="#Footnote_624" class="fnanchor"> [624]</a>. -Ce moyen curatif fut fort préconisé en Allemagne, et enfin -pratiqué en France, pour la première fois, par Denis et -Emmerets, en 1666; mais Lamartinière et Perrault -<span class="pagenum"><a id="Page_281"> 281</a></span> -attaquèrent Denis et Emmerets pour ces essais trop hardis -de l'art médical; et une sentence du Châtelet, rendue -le 17 avril 1668, c'est-à-dire moins de quatre mois -après l'expérience tentée sur le domestique de madame -de Sévigné, défendit de pratiquer la transfusion du sang -tant qu'elle n'aurait pas reçu l'approbation de la faculté -de médecine de Paris; et cette approbation ne fut jamais -donnée<a id="FNanchor_625" href="#Footnote_625" class="fnanchor"> [625]</a>. On vient de la tenter de nouveau, au moment -où j'écris ceci, en transfusant du sang humain dans -les veines d'une femme expirante, et on lui a rendu la -vie et la santé<a id="FNanchor_626" href="#Footnote_626" class="fnanchor"> [626]</a>.</p> - -<p>L'année suivante (1668) devait occuper encore plus de -place que toutes celles qui l'avaient précédée dans la -mémoire de madame de Sévigné. C'était le temps de la -première conquête de la Franche-Comté, le temps où -elle parut conduisant sa fille, éclatante de jeunesse et -de beauté, aux splendides fêtes de Versailles. Madame -de Sévigné se rappelait encore les jours heureux passés -à Livry, pendant l'été et l'automne de cette même année, -dans la société des Coulanges, de tous ses amis, de d'Ormesson -et de ses fils. Ce fut à Livry que la vocation de -l'un d'eux se décida pour la vie religieuse, et que mademoiselle -de Sévigné et sa mère durent être étonnées de -voir ce jeune homme, près d'elles, persister dans le désir -de se faire génovéfain<a id="FNanchor_627" href="#Footnote_627" class="fnanchor"> [627]</a>.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_282"> 282</a></span> -Il était nécessaire de rappeler tout ce qui, dans les -Mémoires de d'Ormesson, nous révélait des faits ignorés -jusqu'ici sur madame de Sévigné et les objets des réminiscences -dont elle était principalement préoccupée pendant -son séjour aux Rochers durant l'année 1675. Le -petit nombre de lettres qui nous restent de sa correspondance -pendant la première moitié de sa vie, qui seraient -les plus intéressantes à bien connaître, laissent dans sa -biographie des lacunes qu'il n'est pas possible de combler, -et des incertitudes qu'on ne peut faire disparaître -entièrement; mais les Mémoires de d'Ormesson, en nous -donnant les moyens de retracer les souvenirs dont elle -était préoccupée à l'époque où nous sommes parvenus, -nous ont permis d'en diminuer le nombre. Après l'avoir -accompagnée dans cette course rétrograde, allons la retrouver -en Bretagne, où elle jouit de la société de la princesse -de Tarente.</p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_283"> 283</a></span></p> -<h2 class="normal">CHAPITRE XIII.<br /> -<span class="medium">1676.</span></h2> -</div> - -<p class="hanging indent">Liaisons de madame de Sévigné avec la princesse de Tarente.—Elles -aimaient à s'entretenir ensemble de leurs filles et des souvenirs de -leur jeunesse.—Nouvelles du Danemark et de la cour de France, -données par cette princesse à madame de Sévigné pendant son séjour -aux Rochers.—Griffenfeld devient amoureux de la princesse -de la Trémouille, qui le rejette.—Il se fait des ennemis;—conspire;—est -condamné à mort;—reçoit sa grâce;—se marie et -meurt.—Madame de la Trémouille épouse le comte d'Oldenbourg.—Colère -de la princesse de Tarente sur ce mariage.—Madame de -Sévigné l'apaise.—Motifs de l'attachement que la princesse avait -pour elle.—Liaison de la princesse de Tarente avec <span class="smallc">Madame</span>, -femme de <span class="smallc">Monsieur</span>, sa nièce.—Caractère de <span class="smallc">Madame</span>.—Rang et -naissance de la princesse de Tarente et de Henri-Charles de la Trémouille, -son mari.—Pourquoi celui-ci était appelé prince de Tarente.—Caractère -du prince de Tarente.—Il fuit en Hollande.—Il -épouse la fille du landgrave de Hesse-Cassel.—Il s'attache à -Condé, et lui reste fidèle.—Rentre en France.—Influence de la -maison de la Trémouille en Poitou et en Bretagne.—La baronnie de -Vitré la plus ancienne de Bretagne.—Le prince de Tarente préside -les états de Bretagne, notamment ceux de 1669.—Mort du prince -de Tarente.—Son fils est élevé dans la religion catholique.—La -princesse de Tarente devient héritière et maîtresse de tous les -biens de sa maison.—Pourquoi elle avait tant d'amitié pour madame -de Sévigné.—Elle lui donne un petit chien.—Confidences -de la princesse.—Madame de Sévigné se décide à passer l'hiver -aux Rochers.—Ses distractions.—Ses lectures.—L'opéra d'<i>Atys</i> -est donné.—L'<i>Art poétique</i> de Boileau est publié.—Souvenirs -du passé retrouvés dans les papiers de la princesse de Tarente.—Portrait -de madame de Sévigné.—Vue rétrospective du temps -de sa jeunesse.—Détails sur la duchesse de la Trémouille, belle-mère -de la princesse de Tarente.</p> - -<p class="space">C'est avec la princesse de Tarente que madame de -<span class="pagenum"><a id="Page_284"> 284</a></span> -Sévigné aimait à s'entretenir du beau temps de sa jeunesse. -Cette bonne princesse avait des recettes curatives -pour tous les souffrants et des consolations pour tous les -soupirants, badinant elle-même de son <i>cœur de cire</i><a id="FNanchor_628" href="#Footnote_628" class="fnanchor"> [628]</a>. -Elle avait pour madame de Sévigné une véritable amitié: -elle lui faisait aux Rochers de fréquentes visites, et -y passait des journées entières<a id="FNanchor_629" href="#Footnote_629" class="fnanchor"> [629]</a>.</p> - -<p>Le pays, la langue, la religion, la naissance, le rang, -le caractère, les habitudes, les manières, les mœurs, -tout était différent entre la princesse de Tarente et madame -de Sévigné; et cependant une singulière analogie -dans leur destinée les rapprochait et établissait entre -elles une grande intimité. Toutes deux étaient veuves et -à peu près du même âge; toutes deux avaient une fille -qu'elles aimaient avec une tendresse excessive et qu'elles -préféraient à l'héritier de leur nom; leurs filles se trouvaient -séparées d'elles par de grandes distances, de sorte -qu'elles seules sympathisaient parfaitement quand elles -se confiaient leurs inquiétudes, quand elles s'entretenaient -de leurs communes douleurs<a id="FNanchor_630" href="#Footnote_630" class="fnanchor"> [630]</a>. Celles qui tourmentaient -<span class="pagenum"><a id="Page_285"> 285</a></span> -alors la princesse de Tarente étaient grandes, -et les lettres de madame de Sévigné, en nous instruisant -de leur cause, nous donnent sur l'histoire de Danemark -des documents précieux et certains. Voici ce qu'elle -écrit à sa fille sur ce sujet<a id="FNanchor_631" href="#Footnote_631" class="fnanchor"> [631]</a>:</p> - -<p>«J'ai été voir la bonne princesse; elle me reçut avec -transport. Le goût qu'elle a pour vous n'est pas d'une -Allemande; elle est touchée de votre personne et de ce -qu'elle croit de votre esprit. Elle n'en manque pas, à sa -manière; elle aime sa fille et en est occupée; elle me -conta ce qu'elle souffre de son absence, et m'en parla -comme à la seule personne qui puisse comprendre sa -peine.</p> - -<p>«Voici donc, ma chère enfant, des nouvelles de la -cour de Danemark: je n'en sais plus de la cour de France; -mais pour celles de Copenhague, elles ne vous manqueront -pas. Vous saurez donc que cette princesse de la Trémouille -est favorite du roi et de la reine, qui est sa cousine -germaine. Il y a un prince, frère du roi, fort joli, -fort galant, que nous avons vu en France, qui est passionné -de la princesse, et la princesse pourrait peut-être -sentir quelques dispositions à ne le haïr pas; mais il se -trouve un rival qui s'appelle M. le comte de <i>Kingstoghmfelt</i> -(madame de Sévigné s'amusait, ainsi qu'elle -le dit elle-même, à défigurer ridiculement tous les noms -allemands, pour faire rire sa fille<a id="FNanchor_632" href="#Footnote_632" class="fnanchor"> [632]</a>). Vous entendez -<span class="pagenum"><a id="Page_286"> 286</a></span> -bien: ce comte est amoureux de la princesse, mais la -princesse le hait. Ce n'est pas qu'il ne soit brave, bien -fait et qu'il n'ait de l'esprit, de la politesse; mais il n'est -pas gentilhomme, et cette seule pensée fait évanouir. Le -roi est son confident, et voudrait bien faire ce mariage; -la reine soutient sa cousine, et voudrait bien le prince; -mais le roi s'y oppose, et le favori fait sentir à son rival -tout le poids de sa jalousie et de sa faveur. La princesse -pleure, et écrit à sa mère deux lettres de quarante pages: -elle a demandé son congé; le roi ni la reine n'y -veulent point consentir, chacun pour différents intérêts. -On éloigne le prince sous divers prétextes; mais il revient -toujours. Présentement ils sont tous à la guerre contre -les Suédois, se piquant de faire des actions romanesques -pour plaire à la princesse. Le favori lui dit en partant: -«Madame, je vois de quelle manière vous me traitez; -mais je suis assuré que vous ne sauriez me refuser votre -estime.» Voilà le premier tome; je vous en manderai -la suite, et je ne veux pas qu'il y ait dorénavant en -France une personne mieux instruite que vous des intrigues -de Danemark.»</p> - -<p>Et quatre mois après elle ne donne pas encore le -second volume du roman; mais elle continue le premier, -et ajoute<a id="FNanchor_633" href="#Footnote_633" class="fnanchor"> [633]</a>: «Disons deux mots du Danemark. La princesse -est au siége de Wismar, avec le roi et la reine; les -deux amants font des choses romanesques. Le favori a -traité un mariage pour le prince, et a laissé le soin à la -renommée d'apprendre cette nouvelle à la jolie princesse: -il fut même deux jours sans la voir. Cela n'est -<span class="pagenum"><a id="Page_287"> 287</a></span> -pas le procédé d'un sot. Pour moi, je crois qu'il se -trouvera à la fin qu'il est le fils de quelque roi des Wisigoths.»</p> - -<p>Non, ce fut toujours <i>Schuhmacher</i> (Cordonnier), Allemand -d'origine, fils d'un marchand de vin à Copenhague, -créé comte de Griffenfeld et grand chancelier. La reine -elle-même, cédant à son influence, voulut le marier -avec la fille du duc de Holstein-Augustenbourg, de -la branche cadette de la maison royale, et la princesse -s'était déjà mise en route pour Copenhague; mais -Griffenfeld mit lui-même obstacle à ce mariage. Ce grand -homme d'État, ce Richelieu du Nord, ce législateur du -Danemark, qu'il gouverna longtemps admirablement, se -laissa détourner des larges voies de sa noble ambition par -l'espoir d'épouser cette fille de la princesse de Tarente, -la charmante Charlotte-Amélie de la Trémouille. L'esprit, -les grâces, la beauté de cette princesse l'avaient séduit. -Rebuté par elle, il abusa de son autorité pour écarter -le prince son rival, et chercha à se ménager l'appui -tout-puissant de Louis XIV; il lia avec ce monarque une -correspondance coupable, en reçut de l'argent, négligea -les affaires du royaume pour suivre celles qui intéressaient -sa funeste passion, fut dénoncé, arrêté, mis en jugement -et condamné à perdre ses biens, ses emplois et -à avoir la tête tranchée. Le jour fixé pour l'exécution, il -monta avec une contenance assurée sur l'échafaud; mais -au moment où l'exécuteur levait le glaive, un aide de -camp du roi accourt, et crie: «Grâce, de la part de Sa -Majesté, pour Schuhmacher!» Et l'aide de camp remet -un papier à Schuhmacher, qui le reçut sans émotion. Il -apprit, en le lisant, que sa peine était commuée en une -prison perpétuelle. Schuhmacher dit froidement: «Cette -<span class="pagenum"><a id="Page_288"> 288</a></span> -grâce est plus douloureuse que la mort même.» Il -redescendit lentement, et comme à regret, les degrés -de l'échafaud. Il fit solliciter le roi de lui permettre de -le servir comme soldat: cette faveur lui fut refusée. Détenu -étroitement à Copenhague pendant quatre ans, il -fut ensuite transféré au château fort de Muncholm, près -de Drontheim, en Norwége; il y resta vingt-trois ans, -regretté de son souverain, qui désirait et n'osait pas -l'employer. En 1698, sa captivité cessa; mais il ne -jouit pas longtemps de sa liberté, puisqu'il mourut le -11 mai 1699, âgé de soixante-quatre ans. Il avait été marié -à une Catherine Nansen de Copenhague, et en eut -une fille<a id="FNanchor_634" href="#Footnote_634" class="fnanchor"> [634]</a>.</p> - -<p>Tel est le second tome du <i>roman vrai</i> et trop malheureusement -historique que madame de Sévigné avait promis -à sa fille, mais qu'elle n'aurait pu lui donner complet; -car elle mourut deux ans avant ce <i>favori tout-puissant</i>, -qu'elle appelle <i>M. le comte de Kinghstoghmfelt</i><a id="FNanchor_635" href="#Footnote_635" class="fnanchor"> [635]</a>.</p> - -<p>Le troisième et dernier tome doit nécessairement nous -apprendre quel fut le sort de celle qui inspira une passion -si funeste au principal personnage, et madame de -Sévigné, qui nous a donné le premier, nous fournira -encore celui-là. Elle nous apprend que, la princesse de -la Trémouille n'ayant pu épouser le prince de Danemark, -sa mère la princesse de Tarente ne trouvait personne -d'assez noble. Elle était parente de la Dauphine et -de deux électeurs palatins de Hesse, et elle ne voulait -point déroger. Plusieurs partis se présentèrent, et furent</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_289"> 289</a></span> -refusés; mais sa fille, qui ne pensait pas comme sa mère, -fit un choix sans sa participation, qui mit en courroux -la princesse de Tarente<a id="FNanchor_636" href="#Footnote_636" class="fnanchor"> [636]</a>. C'est dans sa lettre à madame -de Grignan du 3 mai 1680, écrite dans l'agitation d'un -départ, que madame de Sévigné nous instruit de ce -mariage: «Encore, si j'avais à vous apprendre des nouvelles -de Danemark, comme je faisais il y a quatre ou -cinq ans, ce serait quelque chose; mais je suis dénuée -de tout. A propos, la princesse de la Trémouille épouse -un comte d'<i>Ochtensilbourg</i><a id="FNanchor_637" href="#Footnote_637" class="fnanchor"> [637]</a> (lisez comte d'Oldenbourg), -qui est très-riche et le plus honnête homme -du monde: vous connaissez ce nom-là. Sa naissance -est un peu équivoque: toute l'Allemagne soupire de -l'outrage fait à l'écusson de la bonne Tarente; mais -le roi lui parla l'autre jour si agréablement sur cette -affaire, et son neveu le roi de Danemark et même -l'amour lui font de si pressantes sollicitations qu'elle -s'est rendue. Elle vint me conter cela l'autre jour. -Voilà une belle occasion de lui écrire, et de réparer -vos fautes passées. N'êtes-vous pas bien aise de savoir -ce détail<a id="FNanchor_638" href="#Footnote_638" class="fnanchor"> [638]</a>?»</p> - -<p>Et dans sa lettre du 16 juillet, écrite des Rochers, madame -de Sévigné continue de donner à sa fille des nouvelles -de ce nouveau mariage: «J'ai vu ma voisine (la -princesse de Tarente, qui était à Vitré). Elle me fit beaucoup -d'amitié, et me montra d'abord votre lettre... Elle -dit qu'elle est venue ici pour faire réponse. Sa fille est -<span class="pagenum"><a id="Page_290"> 290</a></span> -transportée de joie; elle est en Allemagne, ravie d'avoir -quitté le Danemark, charmée de son mari et de ses -richesses. Elle s'est un peu précipitée de se marier avant -les signatures de sa famille: la mère en est en colère; -mais je me moque d'elle<a id="FNanchor_639" href="#Footnote_639" class="fnanchor"> [639]</a>.»</p> - -<p>Quinze jours après cette lettre, elle continue dans une -autre<a id="FNanchor_640" href="#Footnote_640" class="fnanchor"> [640]</a>:</p> - -<p>«La bonne princesse me vient voir sans m'en avertir, -pour supprimer la sottise des fricassées: elle me surprit -vendredi; nous nous promenâmes fort, et au bout du -mail il se trouva une petite collation légère et propre, -qui réussit fort bien. Elle me conta les torts de sa fille -de n'avoir pas rempli son écusson d'une souveraineté; -je me moquai fort d'elle; je la renvoyai en Allemagne -pour tenir ce discours; et, dans le bois des Rochers, je -lui fis avouer que sa fille avait très-bien fait. Elle est si -étonnée de trouver quelqu'un qui ose lui contester quelque -chose que cette nouveauté la réjouit. Le roi et la -reine de Danemark vont voir ce comte d'Oldenbourg -dans sa comté: il défraye toute cette cour, et sa magnificence -surpasse toute principauté. Je vois les lettres de -cette comtesse, que je trouve toutes pleines de passion -pour son mari, de raison, de générosité, de dévotion et -de justice.—«Eh! madame, que pouvez-vous leur souhaiter -de plus, puisqu'avec cela elle est riche et contente?»—Il -semble que j'aie une pension pour soutenir -l'intérêt de cette fille.»</p> - -<p>Cette fille rentra en grâce, et madame de Sévigné -<span class="pagenum"><a id="Page_291"> 291</a></span> -fait honneur à ses exhortations et aux lettres écrites -par madame de Grignan de cette réconciliation: il est -bien plus probable qu'elle fut due aux lettres de la -comtesse d'Oldenbourg, si tendrement aimée de sa -mère<a id="FNanchor_641" href="#Footnote_641" class="fnanchor"> [641]</a>. Madame de Sévigné, habituée à traiter d'égale -à égale avec sa fille, à prévenir ses désirs, à lui pardonner -tout et à ne se rien pardonner de ce qui avait pu lui -déplaire, mesurait la force du sentiment par l'élégante -énergie de l'expression, et elle ne trouvait pas que les -lettres de la comtesse d'Oldenbourg fussent de nature -à produire beaucoup d'effet. «Ce sont, dit-elle à madame -de Grignan, des lettres d'un style qui n'est point fait; -ce sont des <i>chères mamans</i> et des tendresses d'enfant, -quoiqu'elle ait vingt ans<a id="FNanchor_642" href="#Footnote_642" class="fnanchor"> [642]</a>.» L'éducation et les mœurs -allemandes, l'étiquette sévère, l'obéissance passive des -enfants envers leurs parents, exigées en Allemagne, -donnaient, auprès d'une femme du rang et du caractère de -la princesse de Tarente, une grande puissance à la naïve -et sincère expression du sentiment filial. Dans les lettres -d'Amélie de la Trémouille à sa mère, le ton familier, leste -et dégagé de madame de Grignan, ses saillies plaisantes -et ses spirituelles tendresses n'eussent certainement pas -produit le même effet. Ce qui plaisait à la princesse de -Tarente dans madame de Sévigné, dans madame de -Grignan, lui eût déplu dans sa fille. On change difficilement -les mœurs et les habitudes, les opinions et les -croyances que l'on a reçues du pays qui nous a vu naître, -<span class="pagenum"><a id="Page_292"> 292</a></span> -où notre intelligence s'est développée, où nos premières -passions ont rivé nos penchants à notre caractère; mais -on prend facilement les manières des personnes avec -qui l'on vit, et on renonce aisément à celles qu'on -nous avait données. Toute l'Europe, à cette époque, -était enivrée de la richesse, de l'élégance, de la politesse -de la cour de Louis XIV; cette cour était pour -toutes les autres un objet constant d'émulation, et les -Françaises avaient acquis une renommée d'amabilité, de -savoir-vivre qui les faisait rechercher et prendre pour -modèle en tous lieux par les femmes des classes élevées. -Madame de Sévigné était une des plus éminentes sous -ce rapport. La princesse de Tarente fut séduite par son -esprit: elle se livra sans réserve au charme d'un commerce -intime, elle n'eut plus de secrets pour madame -de Sévigné; elle lui fit sur elle-même d'étranges confidences, -moins étonnantes encore que la hardiesse des -observations et des réprimandes de madame de Sévigné, -qui, loin de déplaire, affermissait ainsi la confiance -qu'avait en elle la bonne princesse<a id="FNanchor_643" href="#Footnote_643" class="fnanchor"> [643]</a>. Bien des causes -mettaient obstacle à ce que madame de Sévigné eût -pour elle la même chaleur de sentiment, la même franchise, -le même abandon. Cependant les épanchements -réciproques des tendresses maternelles n'étaient pas les -seuls motifs qui portaient madame de Sévigné à rechercher -avec empressement la société de cette princesse. -Amélie de Hesse, qui avait épousé en 1647 le -duc de la Trémouille, prince de Tarente, qu'elle perdit -<span class="pagenum"><a id="Page_293"> 293</a></span> -le 14 septembre 1672<a id="FNanchor_644" href="#Footnote_644" class="fnanchor"> [644]</a>, était fille de Guillaume V, -landgrave de Hesse-Cassel, et tante (tante très-chérie) -de la seconde <span class="smallc">Madame</span> (Charlotte-Élisabeth de Bavière), -que Louis XIV avait, dans l'intérêt de sa politique, -imposée à son frère. La nouvelle duchesse d'Orléans se -distinguait à la cour par son originalité, que personne -n'était tenté d'imiter; elle y vivait dans un isolement -complet, en véritable Allemande, conservant ses goûts -et sa rude fierté; elle ne plaisait à personne, et personne -ne lui plaisait. Il faut cependant en excepter le roi, qu'elle -admirait, qu'elle aimait plus qu'il ne fallait pour son repos; -elle n'avait de complaisance que pour lui et pour -son mari, qu'elle parvint à s'attacher par sa soumission et -sa résignation. Louis XIV lui en savait gré, et respectait -dans cette princesse les droits éventuels qu'elle avait sur -la Bavière et le Palatinat, dont il sut tirer bon parti dans ses -négociations. Quoique laide, elle ne parut pas désagréable -au roi le premier jour qu'il la vit. Son gros visage, sa taille -courte, ses bras massifs, ses mains fortes et mal faites -étaient relevés par sa jeunesse, son air de vigueur et de -santé, l'ampleur de ses formes et l'éclatante fraîcheur -des femmes de son pays. Louis XIV estimait sa vertu, la -loyauté de sa brusque franchise; ses goûts virils, sa passion -pour les chiens, les chevaux avaient son approbation et ses -sympathies<a id="FNanchor_645" href="#Footnote_645" class="fnanchor"> [645]</a>. Il lui savait même gré de son isolement, de -sa sauvagerie, dont elle ne se départait que pour lui. Elle -<span class="pagenum"><a id="Page_294"> 294</a></span> -aimait à le voir et à lui tenir compagnie. Tout le temps -qu'elle ne passait pas près de lui, à la chasse et aux spectacles<a id="FNanchor_646" href="#Footnote_646" class="fnanchor"> [646]</a>, -elle l'employait à écrire à ses nobles parents -d'Allemagne de longues lettres dont les fragments ont -servi à former ces singuliers Mémoires où la cour de -France, à l'exception du roi, est déchirée, injuriée impitoyablement; -où les anecdotes les plus scandaleuses, souvent -même les plus fausses sont racontées avec un cynisme -révoltant<a id="FNanchor_647" href="#Footnote_647" class="fnanchor"> [647]</a>; où elle exhale sa jalouse haine contre -madame de Montespan, surtout contre madame de Maintenon, -à laquelle elle prodigue les épithètes de <i>vieille -sorcière</i>, de <i>vieille truie</i> et autres semblables. Trois Allemandes -composaient sa société habituelle; la princesse -de Tarente était de ces petites réunions, où l'on ne parlait -qu'allemand. <span class="smallc">Madame</span> lui écrivait en langue allemande -de longues lettres, que la princesse, lorsqu'elle était -à Vitré, s'empressait de communiquer à madame de -Sévigné en les traduisant. Par ce canal, encore plus que -par celui de madame de Coulanges, madame de Sévigné -parvenait à entretenir dans sa correspondance -avec madame de Grignan cette variété piquante de -faits curieux, d'anecdotes bouffonnes, de traits de médisance -dont sa plume rapide savait déguiser le venin -par un tour plaisant ou gracieux, et faire disparaître -la crudité par de discrètes réticences.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_295"> 295</a></span> -Si la princesse de Tarente avait voulu consentir à abjurer -la religion protestante, ainsi qu'avait fait Élisabeth-Charlotte -de Bavière lorsqu'elle épousa le duc d'Orléans, -elle eût infailliblement tenu à la cour un rang -distingué; elle eût rempli près de la reine la place -qu'y occupait la princesse de Monaco<a id="FNanchor_648" href="#Footnote_648" class="fnanchor"> [648]</a>, celle de première -dame ou de présidente de sa maison<a id="FNanchor_649" href="#Footnote_649" class="fnanchor"> [649]</a>. Mais -quoique l'attachement de la princesse de Tarente pour -sa religion l'empêchât d'être de la cour, elle n'en était -pas moins une très-grande dame par sa naissance, par -celle de son mari et par les richesses dont elle pouvait -disposer. Fille d'un prince souverain et parente de la -Dauphine, alliée par son mariage à la famille royale de -France, elle exigea et obtint, depuis son veuvage, que -dans l'occasion on la traitât d'<i>Altesse</i>. L'époux que s'était -donné la fille du landgrave de Hesse-Cassel justifiait -par sa naissance, et plus encore par le renom -qu'il avait laissé, ces hautes prétentions. Henri-Charles -de la Trémouille était fils de Henri, duc de la Trémouille, -qui avait épousé en 1619 Marie de la Tour-d'Auvergne, -sa cousine germaine, fille du maréchal de -Bouillon, prince souverain de Sedan, et d'Élisabeth de -Nassau, sa seconde femme<a id="FNanchor_650" href="#Footnote_650" class="fnanchor"> [650]</a>. Son père, ayant recueilli -les biens de la maison de Laval, réclama en 1743<a id="FNanchor_651" href="#Footnote_651" class="fnanchor"> [651]</a> -<span class="pagenum"><a id="Page_296"> 296</a></span> -les droits qu'il prétendait avoir sur la couronne de Naples -comme représentant Charlotte d'Aragon, sa trisaïeule; -et il fit prendre, dans la suite, à son fils aîné -le nom de prince de Tarente, que les fils aînés des ducs -de la Trémouille ont toujours porté depuis sans conteste: -les chefs de cette maison n'ont cessé, avec l'agrément -du roi, de renouveler, pour la forme, leur réclamation<a id="FNanchor_652" href="#Footnote_652" class="fnanchor"> [652]</a>. -Si l'on excepte Louis II, cinquième aïeul, -le conquérant de la Lombardie et l'époux de Gabrielle -de Montpensier, princesse du sang, aucun des la Trémouille, -ni avant ni depuis, ne s'est acquis une aussi -grande illustration que le fils de celui qui porta le premier -ce nom de prince de Tarente et qui épousa la -princesse si fort affectionnée à madame de Sévigné. -Nul homme de son temps, jeté au milieu d'événements -où le monde était divisé en partis par la religion et la politique, -n'a su mieux concilier ce qu'il devait au drapeau -sous lequel il se plaçait avec ce que l'honneur, -l'amitié, la conscience lui prescrivaient. Il embrassa la -religion protestante, qui était celle de sa mère; et dès -qu'il eut terminé ses études et ses exercices, il passa en -Hollande. Il fit ses premières armes sous son grand-oncle -le prince d'Orange: mis à la tête d'un régiment de -cavalerie, il s'acquit chez les Hollandais la réputation -<span class="pagenum"><a id="Page_297"> 297</a></span> -d'un excellent officier. Ne pouvant épouser la princesse -d'Orange, qui l'aimait et dont il était amoureux<a id="FNanchor_653" href="#Footnote_653" class="fnanchor"> [653]</a>, -il céda aux conseils de sa mère, et reçut à Cassel la -main de la fille du landgrave Guillaume V, «avec plus -de cérémonies, dit-il dans ses Mémoires, que je n'aurais -voulu<a id="FNanchor_654" href="#Footnote_654" class="fnanchor"> [654]</a>.»</p> - -<p>Après son mariage, Henri-Charles de la Trémouille -revint en France, comblé de faveurs par les Hollandais, -qu'il avait servis pendant cinq ans avec zèle. Ils le regrettaient, -et auraient voulu le conserver; mais il ne -pouvait renoncer à sa patrie, et il y rentra pourvu de -titres, d'honneurs et de forts émoluments. La Fronde -survint; son père avait fait abjuration du calvinisme -entre les mains du cardinal de Richelieu et contribué à -la prise de la Rochelle en 1628<a id="FNanchor_655" href="#Footnote_655" class="fnanchor"> [655]</a>. Le prince de Tarente -se trouva ainsi engagé dans le parti de la cour; mais, -fatigué des promesses sans effet que lui faisait Mazarin, -il suivit encore les conseils de sa mère, et s'attacha au -prince de Condé, dont il était parent par le mariage de -Charlotte de la Trémouille avec un Condé. Tarente -combattit pour la cause de ce prince dans le Midi et en -Saintonge, et, comme lui, faillit périr au combat du -faubourg Saint-Antoine, où il eut un cheval tué sous -lui, et reçut, dit-il dans ses Mémoires, <i>deux coups -très-favorables</i><a id="FNanchor_656" href="#Footnote_656" class="fnanchor"> [656]</a>. Il suivit Condé en exil au commencement -<span class="pagenum"><a id="Page_298"> 298</a></span> -de l'année 1653<a id="FNanchor_657" href="#Footnote_657" class="fnanchor"> [657]</a>, et retourna en Hollande, où il -fut accueilli avec empressement: favorisé par les états -généraux et le prince d'Orange, il en rapporta des -sommes considérables, qui suffirent au payement des -dettes qu'il avait contractées au service des princes<a id="FNanchor_658" href="#Footnote_658" class="fnanchor"> [658]</a>.</p> - -<p>En décembre 1654, Cromwell voulut profiter des -troubles de la France pour l'affaiblir en y fomentant la -guerre civile: il envoya un nommé Stouppe à Henri de -la Trémouille, pour lui proposer de se mettre à la tête -d'une ligue protestante. La Trémouille refusa. Il lui eût -été plus difficile qu'à tout autre d'accepter une pareille -offre sans manquer aux devoirs les plus sacrés. Son -enfance avait été confiée aux jésuites par son père, qui -depuis longtemps avait abjuré le protestantisme. Ainsi -les soins paternels avaient donné à sa primitive éducation -une direction toute catholique; mais sa mère, qui -était protestante, le convertit durant son adolescence -à la religion qu'elle professait. S'il avait pris les armes -en faveur de ses coreligionnaires, il aurait nui à sa propre -fortune, il aurait agi en fils ingrat et troublé le bonheur -de sa famille<a id="FNanchor_659" href="#Footnote_659" class="fnanchor"> [659]</a>.</p> - -<p>Tel était à l'étranger le crédit de Henri-Charles de la -Trémouille que lorsque la princesse sa femme accoucha -à la Haye, le 5 mai, du second prince de Tarente<a id="FNanchor_660" href="#Footnote_660" class="fnanchor"> [660]</a>, cet -enfant eut pour parrains le roi de Suède, les états généraux -des Provinces-Unies et les états particuliers de la -<span class="pagenum"><a id="Page_299"> 299</a></span> -province de Hollande, et reçut de ce roi et des représentants -de ces états les noms de Charles-Belgique-Hollande<a id="FNanchor_661" href="#Footnote_661" class="fnanchor"> [661]</a>.</p> - -<p>Le prince de Tarente fut bien accueilli à son retour -en France par la reine et par Mazarin<a id="FNanchor_662" href="#Footnote_662" class="fnanchor"> [662]</a>; l'une et l'autre -firent de vains efforts pour l'attacher au parti de la cour. -Mazarin, irrité de sa résistance, le fit arrêter et enfermer -dans la citadelle d'Amiens<a id="FNanchor_663" href="#Footnote_663" class="fnanchor"> [663]</a>. Toute la province du -Poitou, le landgrave de Hesse-Cassel, Turenne, son parent, -sollicitèrent en vain son élargissement. Sa mère -négocia avec le cardinal, et l'obtint<a id="FNanchor_664" href="#Footnote_664" class="fnanchor"> [664]</a>. Il ne retourna pas -dans l'armée de Condé, mais il demeura attaché au -parti de ce prince, alors exilé à Bruxelles<a id="FNanchor_665" href="#Footnote_665" class="fnanchor"> [665]</a>. Il envoya sa -femme pour conférer avec lui<a id="FNanchor_666" href="#Footnote_666" class="fnanchor"> [666]</a> et avec l'archiduc, et se -fit, par cette conduite douteuse, exiler à Auxerre<a id="FNanchor_667" href="#Footnote_667" class="fnanchor"> [667]</a>, -d'où il continua de correspondre avec Condé<a id="FNanchor_668" href="#Footnote_668" class="fnanchor"> [668]</a>. Il ne voulut -rentrer en grâce qu'après que le prince eut fait sa -paix. Depuis cette époque, il se dévoua entièrement aux -intérêts du roi, et le servit d'une manière utile par ses -talents et son influence dans le Poitou et dans la Bretagne, -deux grandes provinces où il tenait le premier -rang. Son père, Henri de la Trémouille, pair de France, -duc de Thouars, prince de Talmont, comte de Montfort, -baron de Vitré, etc., tenait à Thouars un grand -état; et mademoiselle de Montpensier, habituée à une -magnificence royale, fut, en 1657, émerveillée de la -réception que lui fit le duc de la Trémouille, de l'imposant -aspect de son château, du grand nombre de gentilshommes -<span class="pagenum"><a id="Page_300"> 300</a></span> -à cheval et de dames parées et de l'air noble -et grandiose de son escorte<a id="FNanchor_669" href="#Footnote_669" class="fnanchor"> [669]</a>.</p> - -<p>Par acte du 9 avril 1661, le duc de la Trémouille avait -cédé et transporté au prince de Tarente la baronnie de -Vitré et le titre de premier baron de Bretagne<a id="FNanchor_670" href="#Footnote_670" class="fnanchor"> [670]</a>. Ce titre -donnait au prince de Tarente le droit de disputer la présidence -de la noblesse aux états de Bretagne au grand -Condé lui-même, que Fouquet avait voulu nommer, -mais qui ne consentait à accepter qu'autant que la gratification -des états serait accordée au prince de Tarente<a id="FNanchor_671" href="#Footnote_671" class="fnanchor"> [671]</a>. -«Je fis entendre, dit Tarente dans ses Mémoires, à -monsieur le Prince que le rang ne se réglait en Bretagne -que par l'ancienneté des baronnies; que celle de Vitré, -qui était dans ma maison, précédait incontestablement -celle de Châteaubrilliant.» Il avait soutenu avec succès -les droits de sa maison à la présidence de la noblesse -dans un procès qu'il avait eu avec le duc de Rohan-Chabot.</p> - -<p>Alors que se préparait l'arrestation de Fouquet, le -18 août 1661, s'ouvrirent à Nantes les assises des états -généraux de Bretagne<a id="FNanchor_672" href="#Footnote_672" class="fnanchor"> [672]</a>, qui furent terminées le 21 septembre: -le prince de Tarente les présida. Il présida également, -mais pour la dernière fois, les états de 1669, -qui s'assemblèrent à Dinan le 26 septembre<a id="FNanchor_673" href="#Footnote_673" class="fnanchor"> [673]</a>, et se séparèrent -<span class="pagenum"><a id="Page_301"> 301</a></span> -le 28 octobre. En 1670, il obtint du roi la -permission d'aller encore faire un voyage en Hollande, -et il put alors observer le misérable état de la Flandre -espagnole, qui présentait une conquête facile aux armes -de la France<a id="FNanchor_674" href="#Footnote_674" class="fnanchor"> [674]</a>. Les deux assemblées des états de Bretagne, -de 1671 et de 1673, se tinrent à Vitré: pour celle -de 1671, selon ce qui avait été réglé par le parlement -de Rennes en 1652, entre les maisons de Rohan et de la -Trémouille, c'était au duc de Rohan-Chabot à présider<a id="FNanchor_675" href="#Footnote_675" class="fnanchor"> [675]</a>; -mais le prince de Tarente mourut à Thouars le -14 septembre 1672, à l'âge de cinquante-deux ans, et -fut remplacé par son père dans la présidence des états -qui eurent lieu l'année suivante<a id="FNanchor_676" href="#Footnote_676" class="fnanchor"> [676]</a>; le jeune prince de Tarente, -second héritier de son nom et de ses titres, d'après -la volonté de son aïeul et de son père, avait été -élevé dans la religion catholique. Le duc Henri-Charles -de la Trémouille, deux ans avant sa mort, était rentré -dans le sein de l'Église romaine; sa femme et sa fille -aînée, plutôt affligées que touchées de cet exemple, restèrent -invariablement fidèles à la religion protestante<a id="FNanchor_677" href="#Footnote_677" class="fnanchor"> [677]</a>. -Ce père, le duc Henri de la Trémouille, mourut deux ans -après son fils le prince de Tarente; de sorte que la princesse -se trouva, comme tutrice, avoir l'administration -<span class="pagenum"><a id="Page_302"> 302</a></span> -des biens immenses de toute la maison de la Trémouille; -et, comme mère, elle devint régente d'un prince âgé de -dix-huit ans<a id="FNanchor_678" href="#Footnote_678" class="fnanchor"> [678]</a>. Elle était ainsi, depuis près d'un an, la -personnification de la grandeur et de la puissance des la -Trémouille lorsqu'elle se prit d'une amitié si vive pour -madame de Sévigné. «Elle m'aime beaucoup, disait à -sa fille madame de Sévigné. On en médirait à Paris; -mais ici c'est une faveur qui me fait honorer de mes -paysans.»</p> - -<p>Ce n'était pas seulement par ses visites, par ses confidences, -par les nouvelles qu'elle apportait que la princesse -de Tarente se rendait agréable à madame de Sévigné; -elle avait, pour la distraire et la réjouir dans sa -solitude, les prévoyances et les attentions les plus aimables. -Elle s'était aperçue que la dame des Rochers n'avait -pas avec elle <i>Marphise</i>, sa chienne favorite, laissée -à Paris avec Hélène, sa femme de chambre. Aussitôt la -princesse de Tarente conçut l'idée de lui donner un petit -chien pour la désennuyer<a id="FNanchor_679" href="#Footnote_679" class="fnanchor"> [679]</a>.</p> - -<p>«Vous êtes étonnée, dit madame de Sévigné, que -j'aie un petit chien; voici l'aventure. J'appelais, par -contenance, une chienne courante d'une madame qui -demeure au bout du parc. Madame de Tarente me dit: -Quoi! vous savez appeler un chien? Je veux vous en -envoyer un, le plus joli du monde. Je la remerciai, et -lui dis la résolution que j'avais prise de ne plus m'engager -dans cette sottise. Cela se passe, on n'y pense -<span class="pagenum"><a id="Page_303"> 303</a></span> -plus. Deux jours après, je vois entrer un valet de chambre -avec une petite maison de chien toute pleine de -rubans, et sortir de cette jolie maison un petit chien -tout parfumé, d'une beauté extraordinaire: des oreilles, -des soies, une haleine douce, petit comme une sylphide, -blondin comme un blondin. Jamais je ne fus plus étonnée -ni plus embarrassée; je voulus le renvoyer, on ne -voulut jamais le reporter. La femme de chambre qui -l'avait élevé en a pensé mourir de douleur. C'est Marie<a id="FNanchor_680" href="#Footnote_680" class="fnanchor"> [680]</a> -qu'aime le petit chien; il couche dans sa maison et -dans la chambre de Beaulieu, il ne mange que du -pain; je ne m'y attache point, mais il commence à -m'aimer; je crains de succomber. Voilà l'histoire que je -vous prie de ne pas mander à <i>Marphise</i>, car je crains ses -reproches. Au reste, une propreté extraordinaire; il s'appelle -<i>Fidèle</i>, c'est un nom que les amants de la princesse -n'ont jamais mérité de porter; ils ont été pourtant d'un assez -bel air. Je vous conterai quelques jours ses aventures.»</p> - -<p>D'après ces derniers mots, il y a tout lieu de croire -qu'il est heureux pour la bonne princesse<a id="FNanchor_681" href="#Footnote_681" class="fnanchor"> [681]</a> au <i>cœur -de cire</i> que les conversations orales de madame de Sévigné -avec sa fille n'aient pas reçu la même publicité -que ses conversations écrites. Le passage de la lettre -du 11 décembre que nous avons transcrit le prouve -encore; c'est dans cette lettre que l'idée de la princesse -ramène madame de Sévigné à celle du chien -<span class="pagenum"><a id="Page_304"> 304</a></span> -qui lui a été donné, et qu'elle continue ce badinage.</p> - -<p>«Ce que vous dites de <i>Fidèle</i>, écrit-elle à madame de -Grignan<a id="FNanchor_682" href="#Footnote_682" class="fnanchor"> [682]</a>, est fort joli; c'est la vraie conduite d'une coquette -que celle que j'ai eue. Il est vrai que j'en ai la -honte, et que je m'en justifie comme vous avez vu; car -il est certain que j'aspirerais au chef-d'œuvre de n'avoir -aimé qu'un chien, malgré les <i>Maximes</i> de la Rochefoucauld, -et je suis embarrassée de <i>Marphise</i>. Je ne comprends -pas ce qu'on me fait. Quelle raison lui donnerai-je? -Cela jette insensiblement dans les menteries; tout -au moins je lui conterai bien toutes les circonstances de -mon nouvel engagement. Enfin, c'est un embarras où -j'avais résolu de ne jamais me trouver, car c'est un -grand exemple de la misère humaine: ce malheur m'est -arrivé par le voisinage de Vitré.»</p> - -<p>Plus le séjour de madame de Sévigné aux Rochers se -prolongeait, plus forte devenait l'amitié qu'avait pour -elle la princesse de Tarente, et plus les confidences que -madame de Sévigné faisait à son sujet à sa fille étaient -explicites: «La bonne princesse et <i>son bon cœur</i> m'aiment -toujours... Elle dit toujours des merveilles de -vous; elle vous connaît et vous estime. Pour moi, je crois -que, par métempsycose, vous vous êtes trouvée autrefois -en Allemagne. Votre âme aurait-elle été dans le -corps d'un Allemand? Non, vous étiez sans doute le roi -de Suède, un de ses amants; car la plupart <i>des amants -sont des Allemands</i><a id="FNanchor_683" href="#Footnote_683" class="fnanchor"> [683]</a>.» Ces derniers mots sont d'une jolie -<span class="pagenum"><a id="Page_305"> 305</a></span> -chanson de Sarrazin, fort en vogue dans la jeunesse de -madame de Sévigné<a id="FNanchor_684" href="#Footnote_684" class="fnanchor"> [684]</a>.</p> - -<p>La maxime de la Rochefoucauld à laquelle madame -de Sévigné fait allusion dans sa plaisanterie sur <i>Marphise</i> -est celle-ci: «On peut trouver des femmes qui -n'ont jamais eu de galanterie; mais il est rare d'en trouver -qui n'en aient jamais eu qu'une.» Une quatrième -édition de ces Maximes avait paru au commencement de -l'année (1675)<a id="FNanchor_685" href="#Footnote_685" class="fnanchor"> [685]</a>, revue, corrigée et augmentée par l'auteur, -qui fit de ce petit livre l'œuvre de toute sa vie; et -nul doute qu'aussitôt après en avoir reçu un exemplaire -madame de Sévigné ne se soit empressée de le lire. C'est -aux Rochers que madame de Sévigné faisait surtout ses -grandes lectures. A Paris, elle était trop distraite par le -plaisir et par les affaires.</p> - -<p>Ramenée par les événements et les malheurs de la -Bretagne aux lectures sérieuses, surtout à l'histoire, son -ardeur pour ce genre de distraction s'accrut encore en -la trouvant partagée par son fils, revenu de l'armée -pour passer avec elle l'hiver aux Rochers; elle la communiqua -à sa fille, de sorte que toutes deux trouvèrent, -par leur correspondance, des sujets d'entretien bien -préférables à ceux que l'éloignement de Paris et de la -cour leur enlevait. «C'est une belle conversation, dit -madame de Sévigné, que celle que l'on fait de deux -<span class="pagenum"><a id="Page_306"> 306</a></span> -cents lieues. Nous faisons de cela ce qu'on en peut -faire<a id="FNanchor_686" href="#Footnote_686" class="fnanchor"> [686]</a>.»</p> - -<p>Madame de Sévigné se montre surtout ravie que sa -fille ait entrepris de lire la grande histoire des Juifs de -Flavius Josèphe, dont la traduction était l'œuvre la plus -considérable de son vénérable ami Arnauld d'Andilly, -qu'elle avait perdu depuis peu de temps (le 7 septembre -1674). Elle ne tarit pas sur les éloges qu'elle donne -au grand historien du peuple juif<a id="FNanchor_687" href="#Footnote_687" class="fnanchor"> [687]</a>. Elle envoya à sa -fille, par Rippert, la troisième partie des <i>Essais de morale -de Nicole</i>, parmi lesquels elle a distingué trois traités: -<i>de l'Éducation d'un prince</i>, <i>de la Connaissance de soi-même</i>, -<i>de l'Usage qu'on peut faire des mauvais sermons</i><a id="FNanchor_688" href="#Footnote_688" class="fnanchor"> [688]</a>. -La mère et la fille étaient du même avis sur ces excellents -Essais de Nicole; il n'en était pas de même de -Sévigné, auquel le premier tome déplaisait, qui trouvait -ces traités obscurs, et se plaignait que la Marans et l'abbé -Têtu avaient accoutumé sa sœur aux choses fines et distillées<a id="FNanchor_689" href="#Footnote_689" class="fnanchor"> [689]</a>; -mais, au contraire, il défendait à juste titre le -nouvel opéra de Quinault contre le dédain de madame -de Grignan, et sur ce sujet il était de l'avis de sa mère<a id="FNanchor_690" href="#Footnote_690" class="fnanchor"> [690]</a>. -<span class="pagenum"><a id="Page_307"> 307</a></span> -Heureuses les familles où, comme dans celle de madame -de Sévigné, il n'y a pas d'autre sujet de division!</p> - -<p>Ce nouvel opéra de Quinault était <i>Atys</i>, que ni madame -de Grignan, qui était en Provence, ni Sévigné -ni sa mère, qui étaient aux Rochers, n'avaient pu -voir alors représenter à Saint-Germain en Laye le -10 janvier (1676), jour où, en présence de Louis XIV, -il fut joué pour la première fois<a id="FNanchor_691" href="#Footnote_691" class="fnanchor"> [691]</a>. Mais tous les trois -ils l'avaient lu, et un exemplaire de l'imprimé parvint -aux Rochers neuf jours après la première représentation. -Cet opéra fit grand bruit, parce qu'il parut à -une époque de forte cabale contre Quinault. Parmi -les gens de lettres et certaines personnes du beau monde, -il était devenu de mode de déprécier les œuvres de -ce poëte, trop applaudi par la cour. C'était là le premier -symptôme d'une altération dans l'opinion publique, -jusqu'alors si enthousiaste de la gloire de Louis XIV<a id="FNanchor_692" href="#Footnote_692" class="fnanchor"> [692]</a>. -On était las des succès guerriers chèrement achetés -par la continuation d'une lutte sanglante sur terre et -sur mer; et alors que des conférences étaient ouvertes -à Nimègue et donnaient des espérances de paix, on écoutait -avec déplaisir les paroles par lesquelles se terminait -le prologue d'<i>Atys</i>:</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p class="i1"> Préparons de nouvelles fêtes,</p> -<p>Profitons des loisirs du plus grand des héros:</p> -<p class="i1"> Le temps des jeux et du repos</p> -<p>Lui sert à méditer de nouvelles conquêtes<a id="FNanchor_693" href="#Footnote_693" class="fnanchor"> [693]</a>.</p> -</div></div> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_308"> 308</a></span> -Boileau, qui possédait à un degré suprême l'art de -cadencer des vers qui se gravent dans la mémoire, ne -contribuait pas peu à faire méconnaître le mérite de -Quinault. La renommée du satirique était populaire, et -son influence croissait à chaque nouvelle publication -de ses ouvrages. Il avait donné, deux années de suite, -de nouvelles éditions de ses poésies. Elles contenaient -neuf de ses Satires, cinq Épîtres, son <i>Art poétique</i> -et les quatre premiers livres du <i>Lutrin</i>. On voit par -les citations qu'en fait madame de Sévigné qu'elle -savait par cœur les beaux passages de ce dernier -poëme<a id="FNanchor_694" href="#Footnote_694" class="fnanchor"> [694]</a>. Boileau n'avait rien retranché, dans cette -nouvelle édition, des vers qu'il avait faits contre Quinault; -mais, afin de montrer quelque déférence pour -l'approbation que le roi donnait à l'opéra d'<i>Atys</i>, il -crut devoir, dans cette dernière édition, laisser en -blanc le nom de Quinault dans un vers de sa satire -IX, et déguiser ce nom sous celui de <i>Kainaut</i> -dans les autres satires: dans l'édition publiée l'année -précédente il n'y avait, pour ce nom, ni déguisement -ni suppression<a id="FNanchor_695" href="#Footnote_695" class="fnanchor"> [695]</a>. Mais de pareils ménagements -servaient plutôt qu'ils ne contrariaient la malice -du poëte.</p> - -<p>Quoique madame de Sévigné mande à sa fille qu'elle -<span class="pagenum"><a id="Page_309"> 309</a></span> -se livrait avec avidité à toutes sortes de lectures, histoire, -morale, fictions, poésies, etc., c'est principalement -par des lectures instructives qu'elle cherchait un -soulagement à l'affliction que lui causaient, pendant ce -calamiteux hiver, les maux qui fondaient sur sa province, -et les souffrances dont elle fut affligée. Après ces <i>Essais -de morale</i> de Nicole, qui la consolaient et dont elle -parle sans cesse, aucune lecture ne lui plaisait plus -que celle sur l'histoire de France du temps des croisades. -Malgré sa répugnance pour le style du P. Maimbourg, -elle y lisait avec délices les hauts faits des Castellane -et des Adhémar, ancêtres de la maison de -son gendre; elle ajoutait à cette lecture celle de l'histoire -de son temps, si remplie du souvenir de sa jeunesse. -«Le matin, dit-elle à madame de Grignan, -je lis l'<i>Histoire de France</i>; l'après-dînée (c'est-à-dire -après midi, on était alors en décembre), un petit livre -dans les bois, comme ces <i>Essais</i> (de Nicole, dont elle -vient de parler), la <i>Vie de saint Thomas de Cantorbéry</i>, -que je trouve admirable, ou <i>les Iconoclastes</i>; et le soir -tout ce qu'il y a de plus gros en impression: je n'ai point -d'autre règle<a id="FNanchor_696" href="#Footnote_696" class="fnanchor"> [696]</a>.» Pour ses lectures du soir, c'était surtout -l'<i>Histoire de la prison et de la liberté de M. le -Prince</i> qui obtenait la préférence. «On y parle, dit-elle, -sans cesse de notre cardinal; il me semble que je -n'ai que dix-huit ans; je me souviens de tout; cela divertit -fort. Je suis plus charmée de la grosseur des caractères -que de la bonté du style.» Cette histoire lui retraçait -les temps les plus heureux et les plus agités de sa -<span class="pagenum"><a id="Page_310"> 310</a></span> -jeunesse<a id="FNanchor_697" href="#Footnote_697" class="fnanchor"> [697]</a>: elle était l'œuvre d'un frondeur, de Claude -Joly; mais les faits y sont racontés, sinon avec talent, -du moins avec impartialité<a id="FNanchor_698" href="#Footnote_698" class="fnanchor"> [698]</a>.</p> - -<p>Ce n'était pas seulement dans les livres imprimés -qu'elle cherchait à raviver les souvenirs de la Fronde<a id="FNanchor_699" href="#Footnote_699" class="fnanchor"> [699]</a>, -mais encore par des documents manuscrits: «La -princesse (de Tarente) et moi, dit-elle, nous ravaudions -l'autre jour dans des paperasses de feu madame -de la Trémouille; il y a mille vers; nous trouvâmes -une infinité de portraits, entre autres celui que madame -de la Fayette fit de moi sous le nom d'un inconnu. -Il vaut cent fois mieux que moi; mais ceux qui -m'eussent aimée, il y a seize ans, l'eussent pu trouver -ressemblant.»</p> - -<p>Ainsi c'est à la fin de l'année 1659 ou dans les premiers -mois de 1660 que madame de la Fayette<a id="FNanchor_700" href="#Footnote_700" class="fnanchor"> [700]</a> commença sa -réputation de bel esprit et d'habile écrivain en traçant -le portrait de son amie. C'est alors que mademoiselle de -Scudéry plaçait sous le nom de <i>Clarinte</i>, entre les mains -des nombreux lecteurs du célèbre roman de <i>Clélie</i><a id="FNanchor_701" href="#Footnote_701" class="fnanchor"> [701]</a>, -un autre portrait de madame de Sévigné: elle était depuis -longtemps vantée comme une des précieuses les plus -célèbres dans la Gazette de Loret, dans le Dictionnaire -de Somaize, et louée dans les madrigaux et les poëmes -<span class="pagenum"><a id="Page_311"> 311</a></span> -de Ménage, de Montreuil, de Marigny, et enfin inscrite, -avec la superlative épithète de <span class="smallc">SUBLIME</span>, comme l'<span class="smallc">ANGE -SUR LA TERRE</span>, la <span class="smallc">GLOIRE DU MONDE</span>, dans le singulier livre -du <i>Mérite des Dames</i>, de Jean Gabriel<a id="FNanchor_702" href="#Footnote_702" class="fnanchor"> [702]</a>. Ainsi l'époque -où madame de Sévigné se trouvait ramenée par -ce portrait trouvé dans les papiers de la duchesse de la -Trémouille était celle où, âgée de trente-trois ans, sans -avoir rien perdu de ses attraits et de sa fraîcheur, elle -avait acquis plus de connaissance du monde, plus d'instruction, -d'amabilité; où elle possédait, dans toute sa -puissance, ses moyens de plaire; où elle jouissait de sa -célébrité; c'était enfin dans un temps où le calme, les -plaisirs et les fêtes avaient succédé aux troubles de la -Fronde, c'était l'époque de la paix des Pyrénées, du mariage -du roi et des réjouissances qui en furent la suite<a id="FNanchor_703" href="#Footnote_703" class="fnanchor"> [703]</a>.</p> - -<p>La duchesse de la Trémouille, mère du prince de Tarente, -qui avait le goût des vers et qui avait réuni les -portraits et les écrits des beaux esprits de son temps, était -Marie de la Tour-d'Auvergne, cousine germaine du duc son -mari et fille cadette du maréchal de Bouillon, prince souverain -de Sedan, et d'Élisabeth de Nassau, sa seconde -femme<a id="FNanchor_704" href="#Footnote_704" class="fnanchor"> [704]</a>. Marie était une femme forte et de grande capacité, -qui réussissait, dit son fils, dans tout ce qu'elle -entreprenait. Pendant la guerre dont nous avons parlé, -elle sut déterminer son mari à lui abandonner la conduite -de toutes les affaires de la maison de la Trémouille<a id="FNanchor_705" href="#Footnote_705" class="fnanchor"> [705]</a>; elle -<span class="pagenum"><a id="Page_312"> 312</a></span> -l'aidait de ses conseils, que cependant il ne suivait pas -toujours, et elle parvint, dit madame de Motteville<a id="FNanchor_706" href="#Footnote_706" class="fnanchor"> [706]</a>, à -faire révolter toutes les provinces. Habile et ambitieuse, -elle voulait que son mari fût prince, comme étant issu, par -les femmes, de Charlotte d'Aragon, héritière du royaume -de Naples. Marie de la Trémouille crut que, pour parvenir -à ses desseins, il fallait faire quelque mal ou quelque peur -aux ministres, et comme les la Trémouille étaient de -puissants et riches seigneurs, il leur fut facile d'émouvoir -des troubles dans les provinces où ils résidaient. Ces nouvelles -donnèrent de l'irritation aux ministres, et M. le -Prince en eut du chagrin. Il avait répondu de la famille -de la Trémouille, qui avait l'honneur de lui appartenir; -et afin de ne pas passer pour dupe en cette affaire, il -montra dans le conseil une lettre du prince de Tarente, -fils aîné du duc, qui le suppliait d'assurer le roi et la -reine de sa fidélité<a id="FNanchor_707" href="#Footnote_707" class="fnanchor"> [707]</a>. A la même époque, la duchesse -de Montausier, pendant que son mari était au lit, malade, -repoussait les révoltés de la Saintonge, que la -duchesse de la Trémouille avait soulevés<a id="FNanchor_708" href="#Footnote_708" class="fnanchor"> [708]</a>.</p> - -<p>On s'étonne du nombre de femmes remarquables par -le courage, la vigueur d'esprit, la force du caractère -que ce siècle a produit. Presque toutes aimaient la -poésie, la littérature, les sciences; et toutes celles qui -par leur rang ou leurs richesses se trouvaient en mesure -<span class="pagenum"><a id="Page_313"> 313</a></span> -de protéger les gens de lettres en adoptaient quelques-uns: -ainsi la duchesse de Bouillon, Montespan, -madame de Thianges, la Sablière et plus tard madame -d'Hervart, prirent en quelque sorte successivement la -tutelle du bon et indolent la Fontaine. Madame de la -Sablière donna aussi asile à l'orientaliste d'Herbelot; -elle recueillit Bernier, le voyageur philosophe, Roberval -et Sauveur, mathématiciens. L'abbesse de Fontevrault -et après elle madame de Maintenon eurent le bonheur -de ranimer la plume de Racine. Madame de Sévigné -avait Ménage, Montreuil, Marigny. La duchesse Marie -de la Trémouille, dont le mari avait combattu, contre -Mazarin et le roi, avec Turenne et Condé, appartenait à -cette noblesse rancuneuse qui se tenait fièrement dans -ses vastes domaines et n'allait point à la cour. Cependant -elle était au courant de ce qui s'y passait, et savait -quelles étaient les femmes qui y brillaient et les -vers qu'on y composait.</p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_314"> 314</a></span></p> -<h2 class="normal">CHAPITRE XIV.<br /> -<span class="medium">1675-1676.</span></h2> -</div> - -<p class="hanging indent">Malheurs de la Bretagne.—Le duc de Chaulnes veut s'opposer à un envoi -de troupes.—Forbin marche sur cette province avec six mille -hommes.—Madame de Sévigné s'indigne de la lâcheté de l'assemblée -des états.—Le parlement est exilé.—Journal de ce qui s'est -passé en Bretagne.—Extrait des lettres de madame de Sévigné.—Révolte.—M. -de Chaulnes est insulté.—Se venge par des cruautés.—Madame -de Sévigné le désapprouve.—Belle conduite du -parlement de Rennes.—Date de son institution.—Tenue des -états de Provence.—Contraste entre ceux-ci et ceux de Bretagne.—M. -de Chaulnes est détesté.—M. de Grignan est aimé.—On -envoie M. de Pommereuil comme intendant en Bretagne.—Suite -des affaires de ce pays.—M. de Chaulnes vient à Vitré.—Détails -sur les affaires de Bretagne et sur celles des provinces.—Madame -de Sévigné va à Vitré pour recevoir le gouverneur.—Inimitiés -entre M. de Chaulnes et M. de Coëtquen.—Madame de -Sévigné conserve son courage et sa sérénité.—Sa liaison avec la -famille Duplessis.—Ridicules de mademoiselle Duplessis.—Correspondance -de madame de Sévigné avec ses amis de Paris; avec -madame de Vins.—Sévigné est dégoûté de sa charge de guidon; -n'obtient pas d'avancement; a peu de goût pour le métier des armes.—Bien -différent en cela du jeune Villars et du chevalier de -Grignan.—Détails sur ceux-ci.—Madame de Grignan approuve -la sévérité de M. de Chaulnes.—Elle est blâmée par sa mère.—Sa -correspondance avec madame de Vins.—Madame de Sévigné -se crée des occupations et des distractions par les travaux qu'elle -entreprend, par ses liaisons avec ses voisins.—D'Hacqueville est -l'informateur et l'agent d'affaires de madame de Sévigné et de madame -de Grignan.—Liaison de madame de Sévigné avec madame -de Pomponne et madame de Vins, sa sœur.—Liaison de madame de -Sévigné avec madame de Villars.—Détails sur cette dame et sur -<span class="pagenum"><a id="Page_315"> 315</a></span> -le marquis de Villars.—Liaison de madame de Sévigné avec madame -de Saint-Céran.—Détails sur cette dame.</p> - -<p class="space">Mais toutes les distractions que se donnait madame -de Sévigné par ses lectures, par ses entretiens avec la -princesse de Tarente ne pouvaient écarter d'elle les inquiétudes -et la tristesse que lui causait la Bretagne accablée, -ruinée, dévastée par les troupes du roi et devenue -un objet d'horreur et de compassion par la révolte, -la misère et les supplices.</p> - -<p>Quoique madame de Sévigné vît toujours à regret -l'établissement de nouveaux impôts en Bretagne, cependant -elle trouvait mauvais que les Bretons se fussent -révoltés pour ne pas payer. Elle sut grand gré à son ami -le duc de Chaulnes de se refuser d'abord à l'introduction -des troupes du roi en Bretagne; mais quand elle sut qu'il -ne pouvait apaiser la sédition par les troupes municipales -et par ses harangues, et qu'on l'avait grossièrement insulté, -elle trouve bon que le comte de Forbin eût été envoyé -avec six mille hommes à Nantes: elle espérait qu'il -suffirait de montrer des uniformes pour apaiser la rébellion -et assurer la tranquillité publique.</p> - -<p>Quant à Vitré, madame de Sévigné croyait cette ville -garantie de toute vexation par la présence de la princesse -de Tarente, à laquelle la duchesse de Chaulnes -devait venir rendre visite<a id="FNanchor_709" href="#Footnote_709" class="fnanchor"> [709]</a>. Mais lorsque madame de Sévigné -vit que l'on s'en prenait aux hautes classes de la -population, aux membres du parlement irrités par l'oppression, -alors elle redevint bonne Bretonne, et elle -<span class="pagenum"><a id="Page_316"> 316</a></span> -s'expliqua ouvertement sur la lâcheté de la noblesse des -états, qui votaient si facilement d'énormes dons gratuits; -elle loua le courage du parlement, qui aima mieux -être exilé à Vannes que de laisser bâtir une citadelle -dans la ville où il résidait; elle fut offensée que, malgré -les réclamations de la princesse de Tarente, appuyée -par <span class="smallc">Madame</span>, sa nièce, on envoyât des troupes à Vitré, -où l'on n'avait nulle envie de se révolter; elle s'indigna -que le gouverneur songeât plus à se venger qu'à faire -bonne justice; enfin elle considéra la Bretagne comme -perdue à jamais, et fit entendre à sa fille qu'à l'exemple -de quelques personnes qui ont exécuté leurs projets -elle songe à abandonner cette province et à n'y plus -conserver de séjour. La puissante ironie qui se révèle -dons les récits de madame de Sévigné, par le contraste -de son ton froidement léger et plaisant avec la gravité -des faits qu'elle raconte, nous prouve sa profonde indignation -à la vue de telles cruautés.</p> - -<p>La gazette a gardé le silence sur ces tristes événements, -et ceux qui ont eu recours aux dépêches administratives -ont remarqué qu'il existait une lacune à -cette époque des affaires de Bretagne<a id="FNanchor_710" href="#Footnote_710" class="fnanchor"> [710]</a>; de sorte que le -journal tenu par madame de Sévigné dans ses lettres -à sa fille est le seul document qui nous en reste. Donnons -ce document, et joignons-y au besoin un commentaire -qui l'éclaircisse. L'histoire ne perd rien de son importance -et de son utilité, parce que dans ces <i>Mémoires</i> -<span class="pagenum"><a id="Page_317"> 317</a></span> -nous avons espéré y répandre quelque lueur en la rattachant -aux manchettes d'une femme dont la mémoire -raconte tout, dont l'esprit apprécie tout, dont l'imagination -sait tout colorer.</p> - -<p class="dater">«9 octobre 1675.</p> - -<p>«Le duc de Chaulnes amène quatre mille hommes à -Rennes, pour en punir les habitants; l'émotion est -grande dans la ville et la haine incroyable dans toute -la province contre le gouverneur.»</p> - -<p>Et, dans la même lettre, madame de Sévigné montre -combien était grand son mécontentement contre le roi -en mandant à sa fille les nouvelles les plus désavantageuses -sur le gouvernement, qu'elle avait reçues de Paris et -d'ailleurs. «On joue des sommes immenses à Versailles; -le <i>hoca</i> est défendu à Paris, sur peine de la vie, et on le -joue chez le roi; cinq mille pistoles en un matin, ce n'est -rien. C'est un coupe-gorge; chassez bien ce jeu de -chez vous.» «J'ai mandé à M. de Lavardin l'affaire de -M. d'Ambres (celle du <i>monseigneur</i>, auquel les gouverneurs -de province, comme le comte de Grignan, les -lieutenants généraux étaient astreints, par décision du -roi, envers les maréchaux de France<a id="FNanchor_711" href="#Footnote_711" class="fnanchor"> [711]</a>). Vous voilà un -peu mortifiés, MM. les grands seigneurs! Vous jugez bien -que ceux qui décident ont intérêt à soutenir les dignités: -il faut suivre les siècles, celui-ci n'est pas pour -vous<a id="FNanchor_712" href="#Footnote_712" class="fnanchor"> [712]</a>.» «Nos pauvres exilés de la Loire ne savent point -<span class="pagenum"><a id="Page_318"> 318</a></span> -encore leur crime; ils s'ennuient fort.» Ces exilés -étaient Louis de la Trémouille, comte d'Olonne, le marquis -de Vassé et Vineuil<a id="FNanchor_713" href="#Footnote_713" class="fnanchor"> [713]</a>. Le premier est célèbre par les -désordres de sa femme. Madame de Sévigné, qui l'avait vu -en passant à Orléans, écrit à sa fille que le comte d'Olonne -mariait son frère à mademoiselle de Noirmoutiers, -et ajoute malignement: «Je n'eusse jamais cru que d'Olonne -eût été propre à se soucier de son nom et de sa -famille.» Et en annonçant que mademoiselle de Noirmoutiers -s'appellera madame de Royan, elle répète, -d'après madame de Grignan: «Vous dites vrai, le nom -d'Olonne est trop difficile à purifier<a id="FNanchor_714" href="#Footnote_714" class="fnanchor"> [714]</a>.» Vassé et Vineuil, -déjà plusieurs fois mentionnés dans ces Mémoires, -étaient deux hommes aimables, depuis longtemps amis -de madame de Sévigné, tous deux connus dans leur jeunesse -par leurs succès auprès des femmes. Le marquis -de Vassé, compromis par son audace et son impertinence, -avait depuis quelques mois rompu son ban, et était venu -à Paris pour voir madame de Sévigné<a id="FNanchor_715" href="#Footnote_715" class="fnanchor"> [715]</a>: probablement -son exil avait une toute autre cause que la politique. La -<span class="pagenum"><a id="Page_319"> 319</a></span> -continuation de l'exil de Vineuil, que madame de Sévigné -avait vu en passant à Saumur<a id="FNanchor_716" href="#Footnote_716" class="fnanchor"> [716]</a>, l'affligeait plus que -l'exil de Vassé et de d'Olonne. Confident de Condé, -Vineuil avait été l'ami de Turenne et écrivait la vie de -ce héros; son ardeur pour les plaisirs l'avait condamné -à une vieillesse précoce, et il était devenu dévot; mais -il n'en était pas moins resté un homme aimable et spirituel. -Sa conversation plaisait à madame de Sévigné<a id="FNanchor_717" href="#Footnote_717" class="fnanchor"> [717]</a>. -Avec lui, plus encore qu'avec la princesse de Tarente, -elle aimait à remonter vers son passé.</p> - -<p>Mais continuons le journal des désastres de la Bretagne.</p> - -<p class="dater">«13 octobre 1675.</p> - -<p>«M. de Chaulnes est à Rennes avec beaucoup de -troupes; il a mandé que, si on en sortait, si l'on faisait -le moindre bruit, il ôterait pour dix ans le parlement -de cette ville. Cette crainte fait tout souffrir<a id="FNanchor_718" href="#Footnote_718" class="fnanchor"> [718]</a>.»</p> - -<p>L'institution du parlement de Bretagne n'était pas très-ancienne; -elle fut précédée en 1492 par le tribunal des -<i>grands jours</i>, espèce de juridiction présidiale dont on -pouvait appeler au parlement de Paris. Le tribunal des -grands jours fut transformé en parlement par l'édit de -Henri II, au mois de mars 1553. Selon cet édit, ce parlement -devait être composé de quatre présidents et de -trente-deux conseillers, tous choisis par le roi; mais seize -<span class="pagenum"><a id="Page_320"> 320</a></span> -des conseillers devaient être originaires de Bretagne; les -autres conseillers et présidents pouvaient être choisis -dans les autres pays de l'obéissance du roi. Le parlement, -d'après cette institution, devait se tenir en deux -sessions de trois mois chacune, la première à Rennes, la -seconde à Nantes. Cette cour fut fixée à Rennes par un -édit de Charles IX, en 1560.</p> - -<p>La famille des Sévigné avait des parents dans le parlement -et dans l'administration. Dans la marine on comptait -deux Sévigné, qui tous deux commandèrent des -vaisseaux et dont l'un était le filleul bien-aimé de madame -de Sévigné: ce fut par elle et par l'appui de -M. de Grignan qu'il obtint un commandement. Enfin -la terre de Sévigné était près de Rennes: ainsi les intérêts -de madame de Sévigné, ses liaisons de parenté, -ses affections particulières, tout la portait à prendre parti -pour le parlement et la ville contre son ami le gouverneur, -qui poussait alors le ministre à des mesures de -rigueur. Dès le 15 juin (1675) et aussitôt après la seconde -émeute qui eut lieu à Rennes, de Chaulnes avait -écrit à Colbert. A tort ou à raison, il accusait le parlement -d'avoir conduit la révolte. Il disait que, malgré le -calme apparent, les procureurs, les conseillers et jusqu'aux -présidents à mortier conseillaient au peuple de -ne pas quitter les armes, et de venir demander au parlement -la révocation des édits et particulièrement de -celui sur le papier timbré<a id="FNanchor_719" href="#Footnote_719" class="fnanchor"> [719]</a>. Ce fut ainsi qu'il obtint d'avance -<span class="pagenum"><a id="Page_321"> 321</a></span> -la tenue des états et de leurs assemblées dans la -ville qu'il lui plairait de choisir. Il exila le parlement à -Vannes, et il traita la malheureuse Bretagne avec -une barbarie que les lettres de madame de Sévigné et -la correspondance administrative nous font douloureusement -connaître<a id="FNanchor_720" href="#Footnote_720" class="fnanchor"> [720]</a>.</p> - -<p class="dater">«16 octobre 1675.</p> - -<p>«M. de Chaulnes est à Rennes avec les Forbin et les -Vins et quatre mille hommes; on croit qu'il y aura -bien de la <i>penderie</i>. M. de Chaulnes a été reçu comme -le roi; mais comme c'est la crainte qui a fait changer -leur langage, M. de Chaulnes n'oublie pas toutes les injures -qu'on lui a dites, dont la plus douce et la plus familière -était <i>gros cochon</i>, sans compter les pierres dans -sa maison et dans son jardin et des menaces dont -Dieu seul a empêché l'exécution. C'est cela qu'on va -punir<a id="FNanchor_721" href="#Footnote_721" class="fnanchor"> [721]</a>.»</p> - -<p class="dater">«20 octobre 1675.</p> - -<p>«M. de Chaulnes est à Rennes avec quatre mille hommes; -il a transféré le parlement à Vannes; c'est une -<span class="pagenum"><a id="Page_322"> 322</a></span> -désolation terrible. La ruine de Rennes emporte celle -de la province<a id="FNanchor_722" href="#Footnote_722" class="fnanchor"> [722]</a>.»</p> - -<p class="dater">«27 octobre 1675.</p> - -<p>«Cette province a grand tort, mais elle est rudement -punie, et au point de ne s'en remettre jamais. Il y a -cinq mille hommes à Rennes, dont plus de la moitié y -passeront l'hiver. On a pris à l'aventure vingt-cinq ou -trente hommes, que l'on va pendre. On a transféré le -parlement: c'est le dernier coup, car Rennes sans cela -ne vaut pas Vitré<a id="FNanchor_723" href="#Footnote_723" class="fnanchor"> [723]</a>.»</p> - -<p class="dater">«30 octobre 1675.</p> - -<p>«Voulez-vous savoir des nouvelles de Rennes? Il y a -présentement cinq mille hommes, car il en est venu -encore de Nantes. On a fait une taxe de cent mille -écus sur le bourgeois; et si on ne trouve point cette -somme dans les vingt-quatre heures, elle sera doublée -et exigible par les soldats. On a chassé et banni toute -une grande rue, et défendu de les recueillir sur peine -de la vie; de sorte qu'on voyait tous ces misérables, -femmes accouchées, vieillards, enfants, errer en pleurs -au sortir de cette ville, sans savoir où aller, sans avoir -de nourriture ni de quoi se coucher. Avant-hier on -roua un violon qui avait commencé la danse et la pillerie -du papier timbré. Il a été écartelé après sa mort, -et ses quatre quartiers exposés aux quatre coins de la -<span class="pagenum"><a id="Page_323"> 323</a></span> -ville, comme ceux de <i>Josserau</i> (gentilhomme de -Provence, de la maison de Pontiver, qui avait assassiné -son maître à Aix). Il (le violon) dit en mourant que -c'étaient les fermiers du papier timbré qui lui avaient -donné vingt-cinq écus pour commencer la sédition; et -jamais on n'a pu en tirer autre chose. On a pris soixante -bourgeois; on commence demain à pendre. Cette province -est un bel exemple pour les autres, et surtout -de respecter les gouverneurs et les gouvernants, de -ne leur point dire d'injures et de ne point jeter de -pierres dans leur jardin.</p> - -<p>«Tous les villages contribuent pour nourrir les troupes, -et l'on sauve son pain en sauvant ses denrées. -Autrefois on les vendait, et l'on avait de l'argent; mais -ce n'est plus la mode, tout cela est changé. M. de -Molac est retourné à Nantes; M. de Lavardin vient à -Rennes<a id="FNanchor_724" href="#Footnote_724" class="fnanchor"> [724]</a>.»</p> - -<p class="dater">«3 novembre 1675.</p> - -<p>«M. et madame de Chaulnes ne sont plus à Rennes; -les rigueurs s'adoucissent; à force d'avoir pendu, on -ne pendra plus; il ne reste que deux mille hommes à -Rennes<a id="FNanchor_725" href="#Footnote_725" class="fnanchor"> [725]</a>. Je crois que Forbin et Vins s'en vont par -Nantes; Molac y est retourné. C'est M. de Pomponne -qui a protégé le malheureux dont je vous ai parlé; si -vous m'envoyez le roman de votre premier président, -je vous enverrai en récompense l'histoire lamentable -du violon qui fut roué à Rennes.»</p> - -<p class="dater"><span class="pagenum"><a id="Page_324"> 324</a></span> -«13 novembre 1675.</p> - -<p>«Ce que vous dites de M. de Chaulnes est admirable. -Il s'est hier roué vif un homme à Rennes (c'est le -dixième), qui confessa d'avoir eu dessein de tuer ce -gouverneur: pour celui-là, il méritait bien la mort. -On voulait, en exilant le parlement, le faire consentir, -pour se racheter, qu'on bâtit une citadelle à -Rennes; mais cette noble compagnie voulut obéir fièrement, -et partit plus vite qu'on ne voulait, car tout -se tournerait en négociation; mais on aime mieux -les maux que les remèdes<a id="FNanchor_726" href="#Footnote_726" class="fnanchor"> [726]</a>.»</p> - -<p>L'opinion que manifeste madame de Sévigné sur le -généreux dévouement du parlement, qui aime mieux -souffrir que de trahir par un lâche compromis les intérêts -de la province<a id="FNanchor_727" href="#Footnote_727" class="fnanchor"> [727]</a>, prouve bien que c'est pour faire -ressortir plus fortement la cruauté de M. de Chaulnes -qu'elle vient de rapporter si froidement le supplice -de ces deux roués, en insinuant qu'il y en avait peut-être -neuf qui ne méritaient pas la mort; et ce qu'elle -ajoute après, en écrivant à sa fille avec une amère ironie, -nous fait pénétrer plus avant dans le secret de ses véritables -sentiments.</p> - -<p>«Vous me parlez bien plaisamment de nos misères. -Nous ne sommes plus si roués; un en huit jours seulement, -pour entretenir la justice. Il est vrai que la <i>penderie</i> -me paraît maintenant un rafraîchissement; j'ai une -tout autre idée de la justice depuis que je suis dans ce -<span class="pagenum"><a id="Page_325"> 325</a></span> -pays: vos galériens me paraissent une société d'honnêtes -gens qui se sont retirés du monde pour mener une vie -douce. Nous vous en avons bien envoyé par centaines. -Ceux qui sont demeurés sont plus malheureux que -ceux-là<a id="FNanchor_728" href="#Footnote_728" class="fnanchor"> [728]</a>.»</p> - -<p>Quand madame de Sévigné exprimait de tels sentiments, -ce n'est pas qu'elle fût brouillée avec le duc -de Chaulnes; au contraire, la duchesse n'avait pas -manqué de venir lui rendre visite ainsi qu'à la princesse -de Tarente. Elle avait cherché à excuser auprès d'elles -les cruautés de son mari par la nécessité de réprimer -l'insurrection par la terreur. Les terres des Rochers, -de Bodegat et de Sévigné et la ville de Vitré, où était -la princesse, avaient été exemptes de payer les contributions -imposées sur toute la province. Nonobstant -cette faveur, madame de Sévigné ressentait si vivement -les blessures faites aux droits et aux libertés de la Bretagne, -qu'à l'exemple de quelques-uns de ses amis, elle -semble persister dans le projet qu'elle avait conçu d'abandonner -pour toujours cette province, et de transporter -ailleurs son principal domicile<a id="FNanchor_729" href="#Footnote_729" class="fnanchor"> [729]</a>.</p> - -<p>L'arbitraire et la cruauté ne faisaient qu'accroître le -mal. Les prisons s'emplissaient, les supplices se multipliaient; -et, sous la mauvaise administration financière -du trésorier général et du parlement, les impôts, -qui avaient enfanté la révolte, ne s'établissaient pas régulièrement. -Plus d'agriculture, plus de commerce; l'argent -avait disparu, et l'on ne trafiquait plus que par -<span class="pagenum"><a id="Page_326"> 326</a></span> -échanges. D'Harouis ne pouvait par son crédit trouver les -trois millions que les états avaient votés pour le roi, avec -les gratifications ordinaires au gouverneur, au lieutenant -général et aux présidents des états, puisqu'il ne pouvait -même faire face aux engagements contractés pour -satisfaire aux besoins les plus urgents de la province. Alors -Colbert appliqua à la Bretagne la mesure que Richelieu -avait prise pour les autres provinces de France. On sait -que, pour restreindre le pouvoir des gouverneurs et l'influence -des parlements, Richelieu avait créé des intendants -chargés de la répartition, de la levée des impôts et -de statuer sur tout ce qui était du ressort de l'administration -civile. Nulle institution n'avait plus contribué à -consolider le pouvoir royal en centralisant le gouvernement -et en donnant la faculté d'établir une législation uniforme, -assujettie à des règles constantes.</p> - -<p>Mais Richelieu, malgré l'énergie de son despotisme, -n'avait pas osé appliquer cette mesure à la Bretagne, -dont les droits, lors de la réunion de ce duché à la couronne -de France, avaient été si solennellement reconnus -au mariage d'Anne, duchesse de Bretagne, en décembre -1491, avec Charles VIII, et, en janvier 1499, avec -Louis XII. Cette puissante considération n'arrêta point -Colbert; il se décida à donner un intendant à la Bretagne, -mais se garda bien de supprimer le gouverneur -et d'ôter à de Chaulnes cette belle charge: c'eût été -affaiblir dans la province l'autorité du roi, donner plus -d'espoir aux mécontents et rendre impossible l'administration -de l'intendant. Il prescrivit au gouverneur -d'abandonner, jusqu'au parfait établissement des impôts, -l'exercice de tous ses pouvoirs. Afin que l'intendant pût -exercer les siens avec une sorte de légalité, Colbert ne -<span class="pagenum"><a id="Page_327"> 327</a></span> -donna pas à cet administrateur le titre d'intendant, mais -celui de commissaire du roi, et pour cette grande innovation -il choisit un homme capable: il prit Pommereuil<a id="FNanchor_730" href="#Footnote_730" class="fnanchor"> [730]</a>. -«Pommereuil, dit Saint-Simon, est le premier intendant -qu'on ait hasardé d'envoyer en Bretagne et qui -trouva moyen d'y apprivoiser la province... C'était celui -des conseillers d'État qui avait le plus d'esprit et de -capacité; d'ailleurs grand travailleur, bon homme et honnête -homme, ferme, transcendant, qui avait et méritait -des amis<a id="FNanchor_731" href="#Footnote_731" class="fnanchor"> [731]</a>.» Madame de Sévigné était de ce nombre, et -fut très-satisfaite du choix qu'on avait fait de lui; elle -eut connaissance du grand pouvoir qu'on lui avait confié -et des instructions qui avaient été données à M. de -Chaulnes.</p> - -<p>Elle continue son journal:</p> - -<p class="dater">«11 décembre 1675.</p> - -<p>«Venons aux malheurs de cette province: tout y est -plein de gens de guerre; il y en aura à Vitré, malgré -la princesse. <span class="smallc">Monsieur</span> l'appelle sa bonne, sa chère -tante; je ne trouve pas qu'elle en soit mieux traitée. -Il en passe beaucoup par la Guerche, qui est au marquis -de Villeroy, et il s'en écarte qui vont chez les -paysans, les volent et les dépouillent. C'est une étrange -douleur en Bretagne que d'éprouver cette sorte d'affliction, -à quoi ils ne sont pas accoutumés. Notre gouverneur -<span class="pagenum"><a id="Page_328"> 328</a></span> -a une amnistie générale; il la donne d'une main, et -de l'autre huit mille hommes qu'il commande comme -vous: ils ont leurs ordres. M. de Pommereuil vient; nous -l'attendons tous les jours: il a l'inspection de cette -petite armée, et il pourra bientôt se vanter d'y joindre -un assez beau gouvernement. C'est le plus honnête -homme et le plus bel esprit de la robe; il est fort de -mes amis; mais je doute qu'il soit aussi bon à l'user -que votre intendant (de Rouillé), que vous avez si bien -apprivoisé<a id="FNanchor_732" href="#Footnote_732" class="fnanchor"> [732]</a>.»</p> - -<p>Et onze jours après, madame de Sévigné écrit encore<a id="FNanchor_733" href="#Footnote_733" class="fnanchor"> [733]</a>:</p> - -<p class="dater">«A Vitré, samedi pour dimanche 22 décembre 1675.</p> - -<p>«Je suis venue ici, ma fille, pour voir madame de Chaulnes -et la petite personne, et M. de Rohan, qui s'en vont -à Paris. Madame de Chaulnes m'a écrit pour me prier de -lui venir dire adieu ici. Elle devait venir dès hier; et l'excuse -qu'elle donne, c'est qu'elle craignait d'être volée -par les troupes qui sont sur les chemins: c'est aussi que -M. de Rohan l'avait priée d'attendre à aujourd'hui; -et cependant chair et poisson se perdent, car dès jeudi -on l'attendait. Je trouve cela un peu familier, après -avoir mandé positivement qu'elle viendrait. Madame -la princesse de Tarente ne trouve pas ce procédé de -bon goût, elle a raison; mais il faut excuser les gens -qui ont perdu la tramontane: c'est dommage que vous -n'éprouviez la centième partie de ce qu'ils ont souffert -ici depuis un mois. Il est arrivé dix mille hommes -<span class="pagenum"><a id="Page_329"> 329</a></span> -dans la province, dont ils ont été aussi peu avertis, -et sur lesquels ils ont autant de pouvoir que vous; ils -ne sont en état de faire ni bien ni mal à personne. -M. de Pommereuil est à Rennes avec eux tous; il est -regardé comme un dieu: non pas que tous les logements -ne soient réglés dès Paris, mais il punit et empêche -le désordre: c'est beaucoup. Madame de Rohan -et madame de Coëtquen ont été fort soulagées. Madame -la princesse de Tarente espère que <span class="smallc">Monsieur</span> et <span class="smallc">Madame</span> -la feront soulager aussi: c'est une grande justice, -puisqu'elle n'a au monde que cette terre, et qu'il -est fâcheux, en sa présence, de voir ruiner ses habitants. -Nous nous sauverons si la princesse se sauve.»</p> - -<p>Le refroidissement qu'éprouvait madame de Sévigné -pour madame la duchesse de Chaulnes était bien naturel -après les actes de tyrannie et de cruauté du duc -son mari; mais ce sentiment était injuste à l'égard de la -duchesse, qui n'exerçait aucune influence sur les résolutions -du gouverneur, et qui était pour madame de Sévigné -«une bonne, solide et vigilante amie<a id="FNanchor_734" href="#Footnote_734" class="fnanchor"> [734]</a>.»</p> - -<p>Quoique l'assemblée des états eût voté, sous l'influence -de la terreur exercée par le duc de Chaulnes, toutes les -sommes que ce gouverneur avait exigées d'eux au nom -du roi<a id="FNanchor_735" href="#Footnote_735" class="fnanchor"> [735]</a>, cependant elle avait osé représenter que l'introduction -des troupes en Bretagne était contraire aux -contrats faits entre le roi et la province; et elle réclama -aussi le rétablissement du parlement à Rennes. Il ne fut -fait droit à aucune de ces légitimes réclamations. Ce ne -<span class="pagenum"><a id="Page_330"> 330</a></span> -fut que douze ans après, en septembre 1689 et lorsque -le duc de Chaulnes quitta la Bretagne pour se rendre à -Rome comme ambassadeur du roi, que Rennes redevint -de fait la capitale de la province. Le parlement fut rétabli -dans cette ville, et on y tint, la même année, l'assemblée -des états.</p> - -<p>Presque en même temps que se terminait à Dinan la -tenue des états de Bretagne en 1675, finissait aussi, à -Lambesc, celle de l'assemblée générale des communautés -de Provence. Cette assemblée avait offert un spectacle -bien différent de l'autre<a id="FNanchor_736" href="#Footnote_736" class="fnanchor"> [736]</a>; et, sous la sage administration -du comte de Grignan et de l'intendant Rouillé, le -pays prospérait, les populations étaient calmes. Les -villes, et surtout celle de Marseille, florissaient par les progrès -toujours croissants du commerce et de l'industrie; -les campagnes se plaignaient vivement de l'énormité des -impôts, du passage et du séjour des gens de guerre; -mais elles n'avaient nulle envie de se révolter, et manifestaient -avec soumission leurs sujets de mécontentement. -L'assemblée réclamait, comme tous les ans, l'exécution -franche de l'édit du mois d'août 1661, qui, en augmentant -la taxe sur le sel, avait promis de décharger la province -des dons gratuits<a id="FNanchor_737" href="#Footnote_737" class="fnanchor"> [737]</a>; et elle n'en votait pas moins -sans difficulté la totalité de la somme (500,000 livres) -qui lui était demandée par le gouverneur pour le don -gratuit. Toujours arguant la teneur de l'édit de 1630, -<span class="pagenum"><a id="Page_331"> 331</a></span> -elle refusait d'imposer à la province une nouvelle surcharge -pour l'entretènement des troupes du gouverneur<a id="FNanchor_738" href="#Footnote_738" class="fnanchor"> [738]</a>; -mais elle accordait la gratification de cinq mille -livres au comte de Grignan, en considération «de tant -de bons offices qu'il a rendus et qu'il rend encore à la -province<a id="FNanchor_739" href="#Footnote_739" class="fnanchor"> [739]</a>.» Le comte de Grignan n'éprouvait plus d'opposition -dans l'assemblée ni dans le pays: Forbin-Janson, -ambassadeur auprès de Sobiesky, n'avait plus à -s'occuper des affaires de la Provence; Louis de Forbin -d'Oppède, évêque de Toulon, était mort le 29 avril 1675; -ainsi le puissant parti des Forbin ne formait plus d'obstacles -aux ambitions de la maison de Grignan. Le clergé -avait nommé pour procureur-joint aux états messire Jean -de Gaillard, évêque d'Apt<a id="FNanchor_740" href="#Footnote_740" class="fnanchor"> [740]</a>, qui n'avait aucune influence -en cour, aucun intérêt à se déclarer l'antagoniste du gouverneur -pour se rendre populaire dans son petit et antique -évêché, auquel on ne disputait rien et qui n'avait -tien à disputer à personne. D'un autre côté, le comte -de Grignan vivait en parfaite intelligence avec l'intendant -M. de Rouillé, dont la <i>justice</i> selon l'aveu même -de madame de Grignan, était la passion dominante<a id="FNanchor_741" href="#Footnote_741" class="fnanchor"> [741]</a>. -De Rouillé, qui présida l'assemblée des états, dans le -discours d'ouverture qu'il prononça, fit l'éloge du comte -de Grignan, «qui, dit-il, outre la bonté de son naturel, -jointe aux grands engagements qu'il a depuis longtemps -dans cette province, n'épargne ni ses soins ni son crédit -pour procurer des avantages aux habitants et pour conserver -<span class="pagenum"><a id="Page_332"> 332</a></span> -leurs intérêts.» La réponse à ce discours, par le -vicaire général du cardinal Grimaldi, au nom de l'archevêque -d'Aix, premier procureur-né du pays, renchérit -encore sur les louanges que M. de Rouillé avait faites -du comte de Grignan<a id="FNanchor_742" href="#Footnote_742" class="fnanchor"> [742]</a>.</p> - -<p>Madame de Sévigné savait que les mêmes rigueurs -qu'on exerçait sur la Bretagne avaient lieu, par les mêmes -motifs, en Gascogne, en Guienne et en Languedoc<a id="FNanchor_743" href="#Footnote_743" class="fnanchor"> [743]</a>, -et c'était pour elle un grand sujet de consolation qu'il en -fût tout autrement pour la Provence. Elle jouissait du -contraste qui existait entre la réputation de son gendre -et celle de M. le duc de Chaulnes.</p> - -<p>Mais ce que M. et madame de Grignan ignoraient, -c'est que la faveur accordée au lieutenant général gouverneur -de Provence et le rejet des propositions et des -dénonciations de la faction des Forbin dans le conseil -du roi étaient dus à l'appui de M. de Pomponne, vivement -sollicité par sa belle-sœur madame de Vins et par -d'Hacqueville, en l'absence de madame de Sévigné. De -Pomponne et madame de Vins ne voulaient pas se faire -des ennemis des Colbert et des autres puissants amis des -Forbin, surtout de l'évêque de Marseille, ambassadeur -auprès de Sobiesky, également bien accrédité en France -et en Pologne. Ils désiraient que les services qu'ils avaient -rendus aux Grignan fussent ignorés d'eux. Mais d'Hacqueville, -l'empressé d'Hacqueville ne pouvait taire une -si bonne nouvelle à madame de Sévigné; et madame de -Sévigné pouvait-elle avoir un secret sans le confier à sa -<span class="pagenum"><a id="Page_333"> 333</a></span> -fille? Elle lui envoya donc la lettre de d'Hacqueville: -«Voilà, écrit-elle, une lettre de d'Hacqueville qui vous -apprendra l'agréable succès de nos affaires de Provence: -il surpasse de beaucoup mes espérances... Voilà donc -cette grande épine hors du pied; voilà cette caverne de -larrons détruite; voilà l'ombre de M. de Marseille conjurée; -voilà le crédit de la cabale évanoui; voilà l'insolence -terrassée: j'en dirais jusqu'à demain. Mais, au nom de -Dieu, soyez modestes dans vos victoires; voyez ce que dit -le bon d'Hacqueville: la politique et la générosité vous y -obligent. Vous verrez aussi comme je trahis son secret -pour vous par le plaisir de vous faire voir le dessous de -cartes qu'il a dessein de vous cacher à vous-mêmes<a id="FNanchor_744" href="#Footnote_744" class="fnanchor"> [744]</a>.»</p> - -<p>«Je comprends avec plaisir, dit-elle à sa fille, la considération -de M. de Grignan dans la Provence après ce -que j'ai vu. C'est un agrément que vous ne sentez plus; -vous êtes trop accoutumés d'être honorés et aimés dans -une province où l'on commande. Si vous voyiez l'horreur, -la détestation, la haine qu'on a ici pour le gouverneur, -vous sentiriez bien plus que vous ne faites la douceur -d'être aimés et honorés partout. Quels affronts! -quelles injures! quelles menaces! quels reproches! avec -de bonnes pierres qui volaient autour d'eux. Je ne crois -pas que M. de Grignan voulût de cette place à de telles -conditions; son étoile est bien contraire à celle-là<a id="FNanchor_745" href="#Footnote_745" class="fnanchor"> [745]</a>.»</p> - -<p>Mais madame de Grignan, dont les sympathies n'étaient -nullement populaires, jugeait différemment de sa mère; -et, comme femme d'un gouverneur à qui elle aurait -voulu voir surmonter les résistances par la force, elle -<span class="pagenum"><a id="Page_334"> 234</a></span> -approuvait assez la sévérité du duc de Chaulnes. Madame -de Sévigné réprime ce sentiment avec un ton d'autorité qui -ne lui est pas ordinaire quand elle écrit à sa fille: «Vous -jugez superficiellement, lui dit-elle, de celui qui gouverne -cette province; non, vous ne feriez point comme -il a fait, et le service du roi ne le voudrait pas<a id="FNanchor_746" href="#Footnote_746" class="fnanchor"> [746]</a>.»</p> - -<p>Cependant <i>celui qui gouverne cette province</i>, le duc -de Chaulnes, l'ami de madame de Sévigné, était loin -d'être alors en disgrâce; au contraire, sa cruelle énergie -envers les Bretons récalcitrants avait encore accru la -faveur dont il jouissait avant la révolte. C'est ce que -prouve le récit que fait madame de Sévigné de la suite -qu'eut la dénonciation faite contre le duc de Chaulnes -par le marquis de Coëtquen, gouverneur de Saint-Malo. -Madame de Sévigné n'aimait ni Coëtquen ni sa femme, -parce que celle-ci, coquette dépravée, avait trahi l'amour -et la confiance de Turenne et livré ses secrets -au chevalier de Lorraine<a id="FNanchor_747" href="#Footnote_747" class="fnanchor"> [747]</a>, et que le mari avait dénoncé -le premier les désordres d'Harouis à l'époque où ce -financier jouissait encore de l'estime générale et de la -confiance des états<a id="FNanchor_748" href="#Footnote_748" class="fnanchor"> [748]</a>.</p> - -<p>«Voici l'histoire de notre province<a id="FNanchor_749" href="#Footnote_749" class="fnanchor"> [749]</a>. On vous a mandé -comme était Coëtquen avec M. de Chaulnes; il était avec -<span class="pagenum"><a id="Page_335"> 335</a></span> -lui ouvertement aux épées et aux couteaux; il avait -présenté au roi des mémoires contre la conduite de M. de -Chaulnes depuis qu'il est gouverneur de cette province. -M. de Coëtquen revient de la cour pour se rendre à son -gouvernement (de Saint-Malo) par ordre du roi. Il arrive -à Rennes, va voir M. de Pommereuil, et passe depuis huit -heures du matin jusqu'à neuf heures du soir sans aller chez -M. de Chaulnes; il n'avait pas même dessein d'y aller, -comme il le dit à M. de Coëtlogon, et se faisait un honneur -de braver M. de Chaulnes dans sa ville capitale. A neuf heures -du soir, comme il était à son hôtellerie et n'avait qu'à -se coucher, il entend arriver un carrosse, et voit monter -dans sa chambre un homme avec un bâton d'exempt: -c'était le capitaine des gardes de M. de Chaulnes, qui -le pria de la part de son maître de venir jusqu'à l'évêché: -c'est où demeure M. de Chaulnes. M. de Coëtquen -descend, et voit vingt-quatre gardes autour du carrosse, -qui le mènent sans bruit et en fort bon ordre à l'évêché. -Il entre dans l'antichambre de M. de Chaulnes, et y demeure -un demi-quart d'heure avec des gens qui avaient -l'ordre de l'y arrêter. M. de Chaulnes paraît enfin, et -lui dit: «Monsieur, je vous ai envoyé quérir pour vous -ordonner de faire payer les francs fiefs dans votre -gouvernement. Je sais, ajouta-t-il, ce que vous avez -dit au roi; mais il le fallait prouver.» Et tout de suite -il lui tourna le dos et rentra dans son cabinet. Le Coëtquen -demeura fort déconcerté, et, tout enragé, regagna -son hôtellerie.»</p> - -<p>Madame de Sévigné trouva dans l'énergie de son caractère -des moyens de ne pas se laisser abattre par la -tristesse durant les malheurs qui affligeaient sa province -et qui rejaillissaient sur tous les habitants, même -<span class="pagenum"><a id="Page_336"> 336</a></span> -sur ceux qui, comme elle, étaient entourés de plus -de protections et d'appuis: «Il faut regarder, disait-elle -à madame de Grignan, la volonté de Dieu bien -fixement pour envisager sans désespoir tout ce que je -vois<a id="FNanchor_750" href="#Footnote_750" class="fnanchor"> [750]</a>.» Elle sut se créer des distractions; mais ses -principaux soulagements furent dus sans doute à sa -fille et à son fils, dont l'une par ses lettres et l'autre par -ses assiduités, ses soins, sa tendresse, ses lectures, ses -confidences, ses promesses de réforme étaient pour -elle un sujet de joie et de bonheur. Madame de Sévigné -trouva encore de douces consolations dans ses -entretiens avec la duchesse de Tarente, si bien d'accord -avec elle pour critiquer et blâmer tout ce qui se faisait -alors, et qui, comme elle, cherchait à combattre la -pénible impression du présent par le souvenir du passé. -Les soins donnés par madame de Sévigné aux travaux de -sa terre des Rochers et sa nombreuse correspondance -remplissaient sans aucun vide toutes les heures de sa -journée: assujetties à une distribution uniforme, ses -occupations étaient réglées de manière à suffire à toutes. -Dans le commencement de son séjour aux Rochers, -sa santé était excellente; mais vers la fin elle s'altéra, -et c'est alors qu'elle montra le plus de courage et de -véritable philosophie. Le 27 octobre, elle écrit à madame -de Grignan:</p> - -<p>«Les malheurs de cette province retardent toutes les -affaires et achèvent de nous ruiner. Je fus coucher à -ma <i>tour</i> (à sa maison de Vitré). Dès huit heures du matin, -ces deux bonnes princesse et duchesse (la princesse de -<span class="pagenum"><a id="Page_337"> 337</a></span> -Tarente et la duchesse de Chaulnes) étaient à mon lever... -Je fus ravie de revenir ici: je fais une allée nouvelle -qui m'occupe; je paye mes ouvriers en blé, et ne trouve -rien de solide que de s'amuser et de se détourner de la -triste méditation de nos misères. Ces soirées dont vous -êtes en peine, ma fille, je les passe sans ennui; j'ai -quasi toujours à écrire, ou bien je lis, et insensiblement -je trouve minuit. L'abbé (de Coulanges, son tuteur) me -quitte à dix, et les deux heures que je suis seule ne me -font point mourir non plus que les autres. Pour le jour, -je suis en affaires avec l'abbé, ou je suis avec mes chers -ouvriers, ou je travaille à mon très-commode ouvrage. -Enfin, mon enfant, la vie passe si vite, et par conséquent -nous approchons sitôt de notre fin que je ne sais -comme on peut si profondément se désespérer des affaires -de ce monde. On a le temps ici de faire des réflexions; -c'est ma faute si mes bois ne m'en inspirent pas -l'envie. Je me porte toujours très-bien; tous mes gens vous -obéissent admirablement; ils ont des soins ridicules de -moi; ils viennent me trouver le soir, armés de toutes pièces, -et c'est contre un écureuil qu'ils veulent tirer l'épée<a id="FNanchor_751" href="#Footnote_751" class="fnanchor"> [751]</a>.»</p> - -<p>Ce n'était pas seulement la princesse et la duchesse -qui faisaient diversion à la solitude des Rochers; madame -de Sévigné avait encore, dans un château voisin du -sien, une famille d'une noblesse obscure, mais très-ancienne, -qu'elle honorait de son amitié et qui se -trouvait heureuse de lui plaire. Cette liaison datait du -commencement du séjour de madame de Sévigné aux -<span class="pagenum"><a id="Page_338"> 338</a></span> -Rochers<a id="FNanchor_752" href="#Footnote_752" class="fnanchor"> [752]</a>; elle était devenue très-intime, puisque, malgré -sa répugnance à sortir de chez elle, madame de Sévigné -allait quelquefois dîner au château d'Argentré<a id="FNanchor_753" href="#Footnote_753" class="fnanchor"> [753]</a>, et -que du Plessis, le maître de ce château, se rendait quelquefois -aux Rochers avec toute sa famille, et y était -invité dans toutes les occasions solennelles. C'est ainsi -qu'il s'y trouvait le 15 décembre, le jour où l'on dit la -première messe à la chapelle construite par madame -de Sévigné<a id="FNanchor_754" href="#Footnote_754" class="fnanchor"> [754]</a>. Du Plessis, qui allait aussi fréquemment -aux Rochers pour y faire sa partie de reversi<a id="FNanchor_755" href="#Footnote_755" class="fnanchor"> [755]</a>, paraît -avoir été un bon gentilhomme, vivant indépendant -dans sa province, sans avoir envie d'en sortir. Sa femme, -comme lui fort modeste, sans ambition, menait une vie -très-retirée. Elle lui avait donné un fils et une fille. Le -fils était marié à une jolie et spirituelle Gasconne, qui -plaisait beaucoup à madame de Sévigné. Malheureusement -elle ne la voyait pas souvent, parce que, établie -avec son mari en Provence, elle n'était que passagèrement -chez son beau-père<a id="FNanchor_756" href="#Footnote_756" class="fnanchor"> [756]</a>. La seule personne de la famille -qui se montrât empressée<a id="FNanchor_757" href="#Footnote_757" class="fnanchor"> [757]</a> auprès de madame de -Sévigné était cette demoiselle du Plessis, que madame -de Grignan, dès son plus jeune âge<a id="FNanchor_758" href="#Footnote_758" class="fnanchor"> [758]</a>, avait appris à molester. -<span class="pagenum"><a id="Page_339"> 339</a></span> -On a dit que madame de Sévigné n'avait pas pour -mademoiselle du Plessis toute l'aversion qu'elle manifeste -dans ses lettres, et que c'était pour amuser sa fille -qu'elle traçait de cette personne d'aussi grotesques peintures. -Il est certain que, s'il ne nous était resté des lettres -de madame de Sévigné que celles de l'époque dont nous -nous occupons, on serait autorisé à penser ainsi; et madame -de Sévigné mériterait le reproche d'ingratitude -en ne sachant pas pardonner à une jeune fille, si constante -dans son attachement pour elle, les imperfections -qui déparaient ses bonnes qualités. Il est dans notre -nature d'être plus indulgents pour les vices que pour -les défauts. Les vices se dissimulent, et nous les ignorons -quand ils nous nuisent; il ne se montrent que pour nous -plaire ou nous être utiles: les défauts se produisent à chaque -instant, nous blessent, nous irritent quelquefois et -nous importunent toujours. Madame de Sévigné, par sa -mansuétude et sa prédilection envers l'aimable et brillant -Pomenars, par son dédain, sa sévérité envers mademoiselle -du Plessis, peut donc être accusée justement de s'être -abandonnée sans réserve à ce penchant égoïste auquel la -raison et l'équité nous ordonnent de résister. Mais en -rapprochant tout ce que madame de Sévigné nous apprend -sur mademoiselle du Plessis il paraît qu'elle avait -peu de droits à l'indulgence; qu'elle était envieuse, intéressée, -hypocrite; qu'elle avait dans les sentiments une -certaine bassesse que madame de Sévigné ne pouvait -supporter chez une personne de noble naissance. Mademoiselle -du Plessis faisait preuve, il est vrai, d'une admiration -<span class="pagenum"><a id="Page_340"> 340</a></span> -exaltée et d'un dévouement sans bornes pour la -dame des Rochers; mais il était facile de s'apercevoir que -cela avait pour cause la faiblesse commune alors à presque -tous les nobles de province, qui cherchaient à tirer -vanité de leurs liaisons avec la noblesse de cour.</p> - -<p>Mademoiselle du Plessis croyait s'être rendue nécessaire -à madame de Sévigné par son empressement à -exécuter ses volontés ou à prévenir ses désirs: elle lui -tenait lieu de demoiselle de compagnie, ainsi qu'une -très-jolie et très-innocente jeune fille qui demeurait au -bout du parc des Rochers. Toutes deux étaient dociles, -complaisantes et prêtes à tout; leur présence n'imposait -pas plus de gêne à la dame des Rochers que celle -de <i>Marphise</i> ou de <i>Fidèle</i><a id="FNanchor_759" href="#Footnote_759" class="fnanchor"> [759]</a>.</p> - -<p>Mademoiselle du Plessis, dont les services étaient acceptés -sans façon, sans remerciements, se croyait chérie -de madame de Sévigné, et avait assez raison de penser -ainsi. Cependant madame de Sévigné n'eut jamais pour -elle que de l'antipathie. Mademoiselle du Plessis louchait -horriblement<a id="FNanchor_760" href="#Footnote_760" class="fnanchor"> [760]</a>, était d'une laideur affreuse, fausse et -gauche dans toutes ses actions, maladroite dans ses flatteries, -choquante par ses indiscrètes familiarités, étourdissante -par ses ricanements, sotte et ridicule par son -intarissable babil et ses exagérations<a id="FNanchor_761" href="#Footnote_761" class="fnanchor"> [761]</a>; tellement dépourvue -<span class="pagenum"><a id="Page_341"> 341</a></span> -de sens qu'elle prenait pour contre-vérités dictées par -des accès de tendresse les dures paroles que lui adressait -quelquefois madame de Sévigné. Plus les louanges -de celle-ci étaient ironiques, plus sa raillerie était mordante, -plus les épithètes dont elle l'affublait étaient injurieuses, -plus mademoiselle du Plessis montrait de satisfaction -et semblait reconnaissante<a id="FNanchor_762" href="#Footnote_762" class="fnanchor"> [762]</a>. Madame de Sévigné se -permettait de renouveler assez souvent ces insultantes -mystifications en présence de ses amis les moins respectables, -tels que Pomenars; et alors la Plessis, comme -dit madame de Sévigné, ne manquait jamais d'accroître, -par ses gros rires, les retentissements de la bruyante -gaieté qu'elle excitait, et complétait ainsi une scène digne -du haut comique: celle de la sottise satisfaite, qui, -se croyant louée, s'outrage et s'injurie elle-même.</p> - -<p>Cela n'était ni charitable ni chrétien de la part de -madame de Sévigné. Aussi est-elle quelquefois touchée -de repentir, et elle s'écrie: «La Plessis a les meilleurs -sentiments du monde; j'admets que cela puisse être gâté -par l'impertinence de son esprit et la <i>ridiculité</i> de ses -manières<a id="FNanchor_763" href="#Footnote_763" class="fnanchor"> [763]</a>.»</p> - -<p>Mais bientôt elle reconnaît que la Plessis est jalouse, -envieuse, hypocrite, intéressée; elle s'étonne que dans -les filles nobles il puisse s'en trouver une avec des -sentiments aussi bas; et elle dit:</p> - -<p>«Mademoiselle du Plessis est à son couvent. Si vous -<span class="pagenum"><a id="Page_342"> 342</a></span> -saviez comme elle a joué l'affligée<a id="FNanchor_764" href="#Footnote_764" class="fnanchor"> [764]</a> et comme elle volait -la cassette pendant que sa mère expirait, vous ririez -de voir comme tous les vices et toutes les vertus sont -jetés pêle-mêle dans le fond de ces provinces; car je -trouve des âmes de paysans plus droites que des lignes, -aimant la vertu comme naturellement les chevaux trottent. -La main qui jette tout cela dans son univers sait -fort bien ce qu'elle fait, et tire sa gloire de tout; et tout -est bien<a id="FNanchor_765" href="#Footnote_765" class="fnanchor"> [765]</a>.»</p> - -<p>De tous les correspondants de madame de Sévigné, -le plus exact, le plus actif, le plus fécond des <i>informateurs</i> -était sans contredit d'Hacqueville. Il se plaisait à -être l'homme d'affaires et le nouvelliste de tous ses amis -et de toutes ses connaissances; et quand il était éloigné -d'eux il ne pouvait se dispenser de leur écrire -souvent, de leur donner des nouvelles de tout le monde -et sur toutes choses; et comme il exigeait qu'on lui répondît, -sa correspondance ressemblait à un véritable -journal manuscrit. Les nouvelles qu'il transmettait étaient -de deux sortes: celles qu'il avait recueillies personnellement -et qui composaient les matières des lettres écrites en -entier de sa main, et celles qu'il faisait extraire et transcrire -de sa nombreuse correspondance; celles-ci étaient -sur des feuilles volantes, les mêmes pour tous les correspondants, -et formant une sorte de supplément à ses lettres. -Madame de Sévigné nous peint d'une manière intéressante -l'embarras où la mettait, ainsi que beaucoup -<span class="pagenum"><a id="Page_343"> 343</a></span> -d'autres, l'intempérance épistolaire de d'Hacqueville et -en même temps le fruit qu'elle en recueillait<a id="FNanchor_766" href="#Footnote_766" class="fnanchor"> [766]</a>. Cet embarras -n'était pas moins grand que celui de concilier les -règles de conduite contenues dans les devises qu'elle -avait inscrites sur les arbres de son parc:</p> - -<p>«J'ai écrit, dit-elle, à d'Hacqueville. Au reste, qu'il -ne me vienne plus parler de ses accablements, c'est lui -qui les aime; il vous écrit trois fois la semaine; vous -vous contenteriez d'une, et le gros abbé (de Pontcarré) -le soulagerait d'une autre; voilà comme il s'accommoderait. -Je lui ai proposé la même chose, et je ne lui écris -qu'une fois en huit jours pour lui donner l'exemple; il -n'entend point cette sorte de tendresse, et veut écrire -comme le juge voulait juger. J'en suis dans une véritable -peine, car je suis persuadée que cet accablement -nous le fera mourir. Si vous aviez vu sa table les mercredis, -les vendredis, les samedis, vous croiriez être au -bureau de la grande poste. Pour moi, je ne me tue -point à écrire; je lis, je travaille, je me promène, je ne -fais rien: <i>Bella cosa far niente</i>, dit un de mes arbres; -l'autre lui répond: <i>Amor odit inertes</i>: on ne sait auquel -entendre; mais ce que je sens de vrai, c'est que -je n'aime point à m'enivrer d'écriture. J'aime à vous -écrire, je parle à vous, je cause avec vous: il me serait -impossible de m'en passer; mais je ne multiplie point -ce goût; le reste va parce qu'il le faut.»</p> - -<p>Et quinze jours après, elle écrit encore<a id="FNanchor_767" href="#Footnote_767" class="fnanchor"> [767]</a>:</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_344"> 344</a></span> -«D'Hacqueville me dit qu'une fois la semaine c'est -assez écrire pour des affaires; mais que ce n'est pas -assez pour son amitié, et qu'il augmenterait plutôt -d'une lettre que d'en retrancher une. Vous jugez bien -que, puisque le régime que je lui avais ordonné ne lui -plaît pas, je lâche la bride à toutes ses bontés, et lui -laisse la liberté de son écriture; songez qu'il écrit de -cette furie à tout ce qui est hors de Paris, et voit tous -les jours tout ce qui y reste: ce sont <i>les d'Hacqueville</i>. -Adressez-vous à eux, ma fille, en toute confiance: -leurs bons cœurs suffisent à tout. Je me veux donc ôter -de l'esprit de les ménager; j'en veux abuser; aussi bien -si ce n'est moi qui le tue, ce sera un autre. Il n'aime que -ceux dont il est accablé; accablons-le donc sans ménagement.»</p> - -<p>Mais dans un grand nombre de nouvelles diverses que -d'Hacqueville adressait à tant de personnes différentes<a id="FNanchor_768" href="#Footnote_768" class="fnanchor"> [768]</a>, -il lui arrivait quelquefois de se tromper, et de mander -par distraction à madame de Sévigné, quand elle était -aux Rochers, des nouvelles de Rennes: alors par malice -elle lui adressait, des Rochers à Paris, des nouvelles -de Paris qu'elle avait reçues d'une autre main et dont -bien certainement il était plus tôt informé qu'elle. Dans -une de ses lettres à madame de Grignan, égalant souvent -en longueur les dépêches diplomatiques, elle dit: -«D'Hacqueville, de sa <i>propre main</i>, car ce n'est point -dans son billet de nouvelles, me mande que M. de -Chaulnes, suivi de ses troupes, est arrivé à Rennes le -samedi 12 octobre. Je l'ai remercié de ce soin, et je -<span class="pagenum"><a id="Page_345"> 345</a></span> -lui apprends que M. de Pomponne se fait peindre par -Mignard.» Mais elle se trouvait bien heureuse de ce -travers de d'Hacqueville quand, le courrier de Provence -ayant manqué, les lettres qu'il lui écrivait contenaient -des nouvelles récentes de madame de Grignan<a id="FNanchor_769" href="#Footnote_769" class="fnanchor"> [769]</a>.</p> - -<p>Un motif plus puissant encore rendait la correspondance -de d'Hacqueville importante pour madame de -Grignan pendant le séjour de sa mère en Bretagne. -Quoique le parti des Forbin-Janson n'eût plus de chef -dans l'assemblée des états, cependant il existait toujours; -et les Forbin qui se trouvaient en cour avaient continué -à être leur organe, et dénigraient l'administration du -gouverneur. M. de Grignan, qui n'avait jamais eu beaucoup -d'ordre dans ses affaires, avait des procès à faire -juger à Paris pour d'anciennes dettes contractées envers -la famille de Mirepoix<a id="FNanchor_770" href="#Footnote_770" class="fnanchor"> [770]</a> en raison de son double mariage, -d'abord avec mademoiselle de Rambouillet et ensuite -avec mademoiselle du Puy du Fou. Ce débat aurait enfanté -de nouveaux procès si l'on n'avait pas pris des -arrangements avec les créanciers<a id="FNanchor_771" href="#Footnote_771" class="fnanchor"> [771]</a>. Pour toutes ces choses -la protection de M. de Pomponne était utile et quelquefois -décisive; il fallait donc la solliciter sans cesse et -mettre à profit la bonne volonté de ce ministre. Madame -de Sévigné, aidée de l'abbé de Coulanges et de ses nombreux -amis, s'acquittait merveilleusement de cette tâche -<span class="pagenum"><a id="Page_346"> 346</a></span> -lorsqu'elle était à Paris; et les intérêts du gouverneur de -la Provence et de madame de Grignan eussent beaucoup -souffert si en leur absence d'Hacqueville, de concert -avec madame de Vins, n'y eût suppléé avec le zèle de -l'amitié la plus dévouée. Madame de Vins était la belle-sœur -de M. de Pomponne, jolie et charmante personne -dont madame de Sévigné se servait pour agir sur l'esprit -de ce ministre. Elle avait épousé Jean de la Garde d'Agoult, -bon gentilhomme de Provence, d'abord chevalier, -puis marquis de Vins, brigadier et ensuite lieutenant -général des armées du roi et proche parent des -Grignan<a id="FNanchor_772" href="#Footnote_772" class="fnanchor"> [772]</a>. Il fut chargé, comme lieutenant des mousquetaires, -de conduire des troupes en Bretagne<a id="FNanchor_773" href="#Footnote_773" class="fnanchor"> [773]</a>. Madame -de Sévigné eut peu de rapports avec lui, et il s'abstint -même d'aller lui rendre visite lorsqu'il passa à -Laval et à trois lieues des Rochers. Comme beaucoup de -militaires de son âge, le marquis de Vins menait une -vie peu régulière, et, dans la bonne société, il avait -avec les dames cette gaucherie et cette timidité que contractent -ceux qui ne se plaisent que dans le sans-gêne des -femmes qui ont abdiqué toute pudeur<a id="FNanchor_774" href="#Footnote_774" class="fnanchor"> [774]</a>. Il n'en était pas -de même de madame de Vins, qui résidait à Paris tandis -que son mari était en Bretagne: elle faisait les délices des -élégantes sommités du monde et de la cour. L'influence -qu'elle avait auprès de son beau-frère n'avait rien perdu -de sa force depuis qu'indépendante par sa fortune ses -attraits, son esprit, ses grâces lui attiraient un plus -grand nombre d'hommages et planaient sur un plus -<span class="pagenum"><a id="Page_347"> 347</a></span> -vaste horizon. Aussi madame de Sévigné, qui savait -que d'Hacqueville avait souvent recours à elle pour -le succès de ses démarches, répondait avec empressement -aux lettres qu'elle en recevait<a id="FNanchor_775" href="#Footnote_775" class="fnanchor"> [775]</a>. Madame de Vins -était heureuse d'avoir une amie de l'âge et du mérite de -madame de Sévigné<a id="FNanchor_776" href="#Footnote_776" class="fnanchor"> [776]</a> et fière d'entretenir avec elle une -correspondance si bien assortie à toutes les sympathies -de son cœur et de son esprit. De cette correspondance -il ne nous reste pas le moindre débris, et les lettres de -madame de Sévigné à sa fille nous prouvent que cette -perte est très-regrettable. L'étroite liaison qui existait -entre la marquise de Vins et madame de Sévigné jamais -ne se relâcha et ne fut troublée par aucun nuage. -La correspondance de madame de Vins avec madame de -Grignan nous eût appris beaucoup de particularités qui -auraient éclairé les lettres que nous possédons de madame -de Sévigné, et elle eût aussi jeté du jour sur l'existence -intérieure du ministre Pomponne, qui a eu une -part si grande aux affaires publiques de ce temps. On -s'étonne que madame de Sévigné, qui a vécu si longtemps -dans l'intimité de ce ministre et celle de toute -sa famille, dans les nombreuses lettres qui nous restent -d'elle ne parle qu'une seule fois de madame de Pomponne, -tandis qu'elle s'entretient fort souvent de sa sœur, -mademoiselle de Ladvocat, qui fut depuis la marquise de -Vins. La publication récente que l'on a faite des lettres -de la famille de Feuquières nous explique cette apparente -anomalie. Ces lettres nous font connaître que madame -<span class="pagenum"><a id="Page_348"> 348</a></span> -de Pomponne n'était nullement, comme sa sœur, -comme madame de Sévigné, de ces femmes favorisées -du ciel, toujours inspirées par le désir de plaire, qui -appellent au secours de leurs attraits naturels les -charmes de leur esprit et de leur doux langage. Madame -de Pomponne était une excellente femme, qui -donnait tout son temps à ses affaires de ménage; -comme le bon abbé de Coulanges, elle aimait beaucoup -à calculer, à équilibrer avec précision ses recettes et ses -dépenses; elle prenait même aussi volontiers sur elle -le soin de bien régler les intérêts de ses jeunes parents, -qu'elle morigénait lorsqu'ils violaient les principes d'une -sage économie<a id="FNanchor_777" href="#Footnote_777" class="fnanchor"> [777]</a>. Une pareille femme ne pouvait suffire à -un homme tel que Pomponne, qui s'était habitué à -se délasser de ses travaux diplomatiques par les agréments -d'une société choisie et par le commerce des -lettres. Voilà pourquoi mademoiselle de Ladvocat était -devenue pour lui, dans son intérieur, comme le complément -de sa femme. Dès lors on comprend facilement -pourquoi madame de Sévigné, ne pouvant entretenir -M. de Pomponne aussi promptement et aussi -fréquemment que le réclamait l'urgence de ses affaires, -employait pour suppléer à ces entretiens mademoiselle -de Ladvocat, qui, avant son mariage, demeurait -avec sa sœur dans la maison de ce ministre et qui depuis -conserva toujours près de lui, comme belle-sœur, des -privautés que nulle autre ne pouvait avoir. C'est ainsi -que madame de Vins fut initiée aux choses du gouvernement -et aux intrigues auxquelles elles donnaient lieu, -tandis que madame de Pomponne n'avait ni le temps ni -<span class="pagenum"><a id="Page_349"> 349</a></span> -la volonté de s'en mêler, et y resta constamment étrangère. -Ainsi doit s'interpréter le silence de madame de -Sévigné et de tous ses contemporains sur madame de -Pomponne, respectable matrone qu'un sage chez les -Romains eût louée pour les qualités qu'elle avait et encore -plus pour celles qu'elle n'avait pas et que son -mari, bel esprit, aurait souhaité de trouver en elle; ce -qui n'empêchait pas qu'elle ne possédât toute sa confiance -et sa plus constante affection. Elle la méritait -sous tous les rapports. Madame de Pomponne joignait -aux vertus solides et aux talents d'une habile maîtresse -de maison beaucoup d'instruction; madame de Sévigné -nous apprend que ce fut elle qui dirigea l'éducation de -sa belle-sœur madame de Vins et aussi celle de sa fille, -femme du ministre d'Etat Colbert de Torcy<a id="FNanchor_778" href="#Footnote_778" class="fnanchor"> [778]</a>.</p> - -<p>A cette époque, madame de Sévigné avait à Paris une -amie avec laquelle elle entretenait un commerce de -lettres assez actif pour que madame de Vins voulût bien -s'en montrer jalouse<a id="FNanchor_779" href="#Footnote_779" class="fnanchor"> [779]</a>. Cette amie était madame de Villars, -sœur du maréchal de Bellefonds: elle avait épousé -le marquis de Villars, qui suppléait au défaut d'une -naissance ancienne et d'un riche patrimoine par un -air noble et digne, une taille élevée, une belle figure; -avantages qui lui avaient fait donner le nom romanesque -d'<i>Orondate</i><a id="FNanchor_780" href="#Footnote_780" class="fnanchor"> [780]</a>. «La marquise de Villars, dit -Saint-Simon, était une bonne petite femme maigre et -<span class="pagenum"><a id="Page_350"> 350</a></span> -sèche, active, méchante comme un serpent, de l'esprit -comme un démon, d'excellente compagnie et qui recommandait -à son fils de se vanter au roi tant qu'il pourrait, -mais de ne jamais parler de soi à personne<a id="FNanchor_781" href="#Footnote_781" class="fnanchor"> [781]</a>. Les trente-sept -lettres qui nous restent de madame de Villars à madame -de Coulanges et ce que nous apprend madame de -Coulanges, ne se rapportent pas entièrement à cette peinture -du caustique Saint-Simon<a id="FNanchor_782" href="#Footnote_782" class="fnanchor"> [782]</a>. «Elle est charmante par -ses mines (dit madame de Coulanges) et par les petits discours -qu'elle commence et qui ne sont entendus que -par les personnes qui la connaissent.» Madame de Coulanges -atteste encore que, bien loin d'être méchante -comme un serpent, «madame de Villars était tendre, -qu'elle savait bien aimer; ce qui donnait de l'amitié pour -elle.» Sa mémoire doit être sous la protection de tous -ceux qui portent un cœur français, puisqu'elle eut le -bonheur de donner le jour au dernier des grands généraux -de Louis XIV, au maréchal de Villars, qui sauva -la France à Denain. La correspondance de madame de -Sévigné avec la marquise de Villars nous manque entièrement; -mais nous savons le motif qui donnait plus -de chaleur à l'amitié qui les unissait<a id="FNanchor_783" href="#Footnote_783" class="fnanchor"> [783]</a> et leur faisait -éprouver le besoin de se communiquer leurs pensées. -Toutes deux avaient un fils à l'armée de Condé, et ces -fils causaient à leurs mères de mortelles inquiétudes: ces -deux fils furent blessés au sanglant combat de Senef<a id="FNanchor_784" href="#Footnote_784" class="fnanchor"> [784]</a>; -<span class="pagenum"><a id="Page_351"> 351</a></span> -mais les destinées de l'un et de l'autre furent bien -différentes. Madame de Sévigné avait acheté malgré elle, -pour son fils, la charge de guidon des gendarmes, parce -qu'on lui avait persuadé que, lorsqu'elle mariait sa fille, -il était convenable qu'elle fît aussi un établissement à son -fils. Celui de guidon était trop subordonné à sa naissance -et à sa fortune; Sévigné n'avait pris cette charge que pour -pouvoir servir autrement que comme simple volontaire -et dans l'espoir d'obtenir un prompt avancement. Cet espoir -avait été déçu; et, à l'époque dont nous traitons, sa -mère faisait des démarches pour vendre cette charge<a id="FNanchor_785" href="#Footnote_785" class="fnanchor"> [785]</a> et -en acheter une autre: elle ne put y parvenir. Fils et frère -de deux femmes des plus lettrées et des plus aimables -de son temps, comme elles Sévigné aimait les lettres, -les arts et les jouissances sociales. Un homme de son -nom et de sa naissance devait n'être rien ou être militaire, -et par cette raison il avait embrassé la carrière -des armes. Il avait la bravoure (aucun gentilhomme n'en -manquait), mais non le talent d'un guerrier. Sa mère, -après qu'il eut été blessé au combat de Senef, avait -écrit au maréchal de Luxembourg et à son parent le -marquis de la Trousse pour lui faire avoir un congé, -afin qu'il pût venir se rétablir aux Rochers, où elle -serait aussi heureuse de le posséder que lui de s'y trouver<a id="FNanchor_786" href="#Footnote_786" class="fnanchor"> [786]</a>. -C'était la seconde fois que Sévigné quittait l'armée -<span class="pagenum"><a id="Page_352"> 352</a></span> -alors que les opérations de la guerre étaient en pleine -activité<a id="FNanchor_787" href="#Footnote_787" class="fnanchor"> [787]</a>.</p> - -<p>Il n'en était pas ainsi du jeune Villars, qui ne voulait -point de congé; ni Condé ni Luxembourg n'auraient accordé -ce congé aux prières de sa mère, si elle avait pensé -à le demander. Son père, le brillant <i>Orondate</i>, s'était -distingué comme militaire par de beaux faits d'armes; -mais Louvois, qui haïssait en lui l'époux de la fille du -maréchal de Bellefonds, le traversait sans cesse dans -tous ses projets d'avancement. Alors il quitta l'état militaire -et se jeta dans la diplomatie, où il réussit comme -à la guerre. Après s'être acquitté avec succès d'une -ambassade en Espagne<a id="FNanchor_788" href="#Footnote_788" class="fnanchor"> [788]</a>, il fut rappelé, et venait d'être -nommé ambassadeur à la cour de Savoie<a id="FNanchor_789" href="#Footnote_789" class="fnanchor"> [789]</a>, ce qui était, -comme le remarque plaisamment madame de Sévigné, -une application du proverbe: <i>Devenir d'évêque meunier</i>; -mais ce n'était point une disgrâce, et il devait par -la suite retourner ambassadeur en Espagne. D'ailleurs il -fallait se retirer de la cour et du monde si l'on n'était -pas résolu à servir le roi dans le poste, quelque médiocre -qu'il fût, qu'il plaisait à Sa Majesté de vous assigner. -Cependant Villars était mécontent, et ne se trouvait pas -récompensé en raison des services qu'il avait rendus; et -lui et sa femme se plaignant un jour devant leur jeune -fils de leur mauvaise fortune: «Pour moi, dit résolûment -cet enfant, j'en ferai une grande, ou je périrai<a id="FNanchor_790" href="#Footnote_790" class="fnanchor"> [790]</a>.» -Il tint parole.</p> - -<p>Louis XIV venait de créer à cette époque, sous le nom -<span class="pagenum"><a id="Page_353"> 353</a></span> -de <i>Pages de la grande écurie</i>, un établissement pour -l'éducation de la haute noblesse<a id="FNanchor_791" href="#Footnote_791" class="fnanchor"> [791]</a> du royaume. Ces -jeunes gens, l'espérance des premières familles du -royaume, accompagnaient comme volontaires le roi -dans ses campagnes lorsque leur éducation était terminée. -Ces volontaires montraient une telle ardeur pour -courir au combat quand Louis XIV était présent qu'il -leur était défendu d'aller au feu sans sa permission. Le -jeune Villars, dès la première affaire où il se trouva, désobéit -à cet ordre du roi, qui le gronda sévèrement. -Mais sous ses yeux, sous les regards de Condé, de Turenne -et de Luxembourg il déploya une valeur si brillante, -montra un tel enthousiasme pour la guerre, une -intelligence si élevée de la tactique, tant pour l'infanterie -que pour la cavalerie; il étonna tellement ses chefs -par son coup d'œil rapide et sûr, eut un bonheur si -constant que, de désobéissance en désobéissance et de -gronde en gronde, il s'éleva rapidement jusqu'au rang -de colonel malgré l'inflexible Louvois et quoique son -oncle le maréchal de Bellefonds, dont il était l'élève, -fût en pleine disgrâce pour avoir refusé de servir sous -Turenne. Le jeune Villars en était là<a id="FNanchor_792" href="#Footnote_792" class="fnanchor"> [792]</a> alors que son -ami Sévigné, aux Rochers, assistait sa mère dans sa -correspondance avec l'ambassadrice de Savoie, ou s'occupait -à faire sa cour aux dames de Vitré ou de Rennes<a id="FNanchor_793" href="#Footnote_793" class="fnanchor"> [793]</a>, -et tandis que le chevalier de Grignan, à la tête -de son régiment, se distinguait aussi dans cette guerre. -<span class="pagenum"><a id="Page_354"> 354</a></span> -Madame de Sévigné convient avec joie que ce chevalier -de Grignan, qu'elle avait surnommé <i>le petit Glorieux</i>, -acquérait une gloire solide<a id="FNanchor_794" href="#Footnote_794" class="fnanchor"> [794]</a>: Sévigné au contraire -n'exerçait sa charge qu'avec négligence, et se laissait -entraîner à la dissipation et à l'oisiveté par l'exemple -des jeunes gens de son âge. «Le roi, dit madame de -Sévigné à sa fille, a parlé encore comme étant persuadé -que Sévigné a pris le mauvais air des officiers subalternes -de son régiment<a id="FNanchor_795" href="#Footnote_795" class="fnanchor"> [795]</a>.»</p> - -<p>Un autre genre de correspondance qui occupait alors -comme malgré elle la plume de madame de Sévigné aux -Rochers, c'est celle qu'elle entretenait avec cette parente -et amie de madame de Villars<a id="FNanchor_796" href="#Footnote_796" class="fnanchor"> [796]</a> qui avait été élevée -avant celle-ci chez la maréchale de Bellefonds. Nous -avons déjà fait connaître à nos lecteurs, dans la quatrième -partie de ces Mémoires, la comtesse de Saint-Géran<a id="FNanchor_797" href="#Footnote_797" class="fnanchor"> [797]</a>, -cette petite femme si jolie, si spirituelle, dame -du palais de la reine, toujours en cour, faite pour la -cour, dont elle suivait tous les mouvements, à laquelle -elle assortissait sa vie, ses goûts, ses plaisirs, ses croyances, -ses occupations, successivement et suivant les -temps galante, dévote, prodigue et rangée; toujours -aimable, toujours recherchée, toujours ménagée, même -durant les rigueurs qu'elle s'attira par ses imprudences. -Elle ne cessa jamais d'entretenir les liaisons qu'elle -<span class="pagenum"><a id="Page_355"> 355</a></span> -avait formées avec madame de Sévigné et avec madame -de Maintenon, auxquelles elle plaisait sans inspirer -à l'une et à l'autre ni estime ni confiance<a id="FNanchor_798" href="#Footnote_798" class="fnanchor"> [798]</a>. Il en -est de même de madame de Frontenac<a id="FNanchor_799" href="#Footnote_799" class="fnanchor"> [799]</a>, l'une des <i>divines</i>; -et on a droit de s'étonner que les historiens de -Maintenon et de Louis XIV se soient laissé égarer à l'égard -de ces deux femmes par des fragments de lettres -apocryphes, dont le plus faible examen aurait dû leur -démontrer la fausseté<a id="FNanchor_800" href="#Footnote_800" class="fnanchor"> [800]</a>. Le gros Saint-Géran était cousin -des Villars, et se trouvait à l'armée en même temps que -Sévigné et Villars; ce qui contribuait à donner plus d'intérêt -aux lettres adressées aux Rochers par la Saint-Géran, -comme l'appelle madame de Sévigné<a id="FNanchor_801" href="#Footnote_801" class="fnanchor"> [801]</a>. Aucun obstacle -de famille n'avait empêché madame de Saint-Géran de -prendre sa part aux plaisirs de cette cour si brillante et si -agitée, où elle consuma son existence sans aucun profit -pour sa fortune. Elle n'eut qu'une fille, dont elle accoucha -après vingt et un ans de mariage<a id="FNanchor_802" href="#Footnote_802" class="fnanchor"> [802]</a>.</p> -<div class="chapter"> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_356"> 356</a></span></p> -<h2>CHAPITRE XV.<br /> -<span class="medium">1675-1680.</span></h2> -</div> - -<p class="hanging indent">Madame de Sévigné se plaint du grand nombre de lettres qu'elle est -obligée d'écrire.—Les correspondances particulières suppléaient -autrefois aux gazettes.—Le nombre des correspondants de madame -de Sévigné s'accroissait chaque jour avec sa célébrité.—Sa liaison -avec madame de Marbeuf.—Elle espère par elle marier son fils.—Soins -et attentions de Sévigné pour sa mère.—Contraste de sa -manière de vivre avec son fils et de celle qu'avait la princesse de -Tarente avec le sien.—Opinion de madame de Sévigné sur le jeune -prince de Tarente.—Celui-ci fait mieux son chemin dans le monde -que Sévigné.—Volages amours de ce dernier.—Son intimité avec -madame du Gué-Bagnols.—Détails sur cette intrigue.—Madame de -Sévigné cherche à marier son fils avec la fille du comte de Rouillé, -intendant de Provence, et ne réussit point.—Craintes de madame -de Sévigné en apprenant que madame de Grignan est enceinte.—Suite -des détails sur la liaison amoureuse de Sévigné et de madame -du Gué-Bagnols.—Autres attachements de Sévigné avec la duchesse -de V..., avec mademoiselle de la Coste et mademoiselle de -Tonquedec.—Nouveaux travaux entrepris par madame de Sévigné -aux Rochers.—Elle est retenue à la campagne par le plaisir qu'elle -trouve à y séjourner.—Affaire du président Méneuf.—Niaiserie -du fils de ce président.—Les affaires de madame de Sévigné l'obligeaient -à retourner à Paris, mais elle tombe malade dangereusement.—Guérie -de sa fièvre, elle ne peut plus écrire qu'en dictant à son -fils et ensuite à la jeune fille de sa voisine.—Sévigné part pour -Paris, afin de traiter de sa charge de guidon avec de Viriville.—Madame -de la Baume y met un empêchement indirect en faisant -enlever madame de la Tivolière pour la marier avec son fils.—Madame -de Sévigné part des Rochers le 24 mars pour retourner à Paris.—Désespoir -de la jeune fille qui lui servait de secrétaire.—Madame -de Sévigné s'arrête à Malicorne.—Elle y entend l'oraison -funèbre de Turenne par Fléchier.—Elle arrive à Paris.</p> - -<p class="space">Madame de Sévigné se plaint fréquemment à sa fille -du nombre de lettres qu'elle recevait et auxquelles elle -<span class="pagenum"><a id="Page_357"> 357</a></span> -était obligée de répondre. C'est qu'à une époque où le -commerce épistolaire était mieux apprécié, plus recherché -qu'il ne peut l'être depuis la publication de ces milliers -de journaux partout imprimés, partout répandus, -les intrigues des cours, les mouvements des armées, les -promotions aux places, aux honneurs, aux titres, aux -rangs; les succès et les revers de fortune, les anecdotes -du jour, les grands accidents, les procès célèbres, le -théâtre, la littérature et les arts, toutes les nouveautés, -tous les faits, tous les événements publics ou privés, -grands ou petits, étaient alors du domaine des correspondances -individuelles et particulières. Il était naturel alors -que madame de Sévigné, qui se montrait la plus diligente -à jaser spirituellement, agréablement de toutes -ces choses; qui, par sa position et ses relations multipliées, -était la mieux et la plus promptement instruite, -fût, à chaque nouvelle liaison qu'elle formait, obligée -d'ajouter un nom de plus à la liste déjà si nombreuse -des personnes dont elle recevait régulièrement des lettres -pleines d'informations, et encore plus de questions, -auxquelles il fallait répondre. Parmi ces nouvelles connaissances -était la marquise de Marbeuf, avec laquelle -elle se lia assez intimement durant le long séjour qu'elle -fit cette fois en Bretagne. La marquise de Marbeuf était -la femme de Claude de Marbeuf, président à mortier -du parlement de Bretagne. Indignée de la tyrannie -du duc de Chaulnes, elle résolut, à l'exemple de plusieurs -Bretons, d'aller se fixer à Paris; projet qu'elle -effectua<a id="FNanchor_803" href="#Footnote_803" class="fnanchor"> [803]</a> du vivant de son mari, peu de temps après -<span class="pagenum"><a id="Page_358"> 358</a></span> -le commencement de son intimité avec madame de Sévigné. -Elle eut du succès dans le monde, elle y acquit -de l'influence; et madame de Sévigné, à laquelle elle -plaisait, espérait qu'elle l'aiderait à marier son fils et à -vendre sa charge de guidon.</p> - -<p>Le baron de Sévigné était depuis longtemps l'objet -des vives sollicitudes de sa mère; il était fréquemment -obligé de quitter les Rochers pour aller à Vitré ou à -Rennes, mais il prolongeait son séjour dans ces deux -villes plus qu'il n'était besoin, et s'y occupait d'intrigues -amoureuses. Il continua ce genre de vie lorsqu'il fut de -retour à Paris, ce qui contrariait la tendresse maternelle -de madame de Sévigné, qui aurait voulu lui voir former -des liens sérieux et utiles<a id="FNanchor_804" href="#Footnote_804" class="fnanchor"> [804]</a>. Pour parvenir à lui -faire changer de conduite, elle ne lui montrait jamais -un visage sévère, et continuait toujours, afin de capter -sa confiance, de traiter avec lui ces matières sans -nulle aigreur. Madame de Grignan approuvait à cet -égard la conduite de sa mère, qui ne lui cachait rien, -mais dissimulait quelquefois avec son fils. Sévigné avait -plus de sensibilité, mais une tête et un caractère plus -faibles que sa sœur. Il se repentait souvent de ne pas -suivre les conseils de sa mère, et revenait toujours -à elle avec des résolutions meilleures et plus de soumission.</p> - -<p>«Nous suivons vos avis pour mon fils, écrit madame -de Sévigné à madame de Grignan; nous consentons à -quelques fausses mines; et si l'on nous refuse, chacun -en rendra de son côté. En attendant, il me fait ici fort -<span class="pagenum"><a id="Page_359"> 359</a></span> -bonne compagnie, et il trouve que j'en suis une aussi: il -n'y a nul air de maternité à notre affaire<a id="FNanchor_805" href="#Footnote_805" class="fnanchor"> [805]</a>.»</p> - -<p>Dans une autre lettre, elle avait dit: «Comme je -venais, je trouvai au bout du Mail le <i>frater</i>, qui se -mit à deux genoux aussitôt qu'il m'aperçut, se sentant -si coupable d'avoir été trois semaines sous terre à -<i>chanter matines</i> qu'il ne croyait pas me pouvoir aborder -d'une autre façon. J'avais bien résolu de le gronder, -et je ne sus jamais où trouver de la colère. Je fus -fort aise de le voir. Vous savez comme il est divertissant: -il m'embrassa mille fois; il me donna les plus -mauvaises raisons du monde, que je pris pour bonnes. -Nous causons fort, nous lisons, nous nous promenons, -et nous achèverons ainsi l'année, c'est-à-dire le reste<a id="FNanchor_806" href="#Footnote_806" class="fnanchor"> [806]</a>.»</p> - -<p>Mais Sévigné va encore à Rennes, et en revient trois -semaines après; et sa mère écrit:</p> - -<p>«Le <i>frater</i> est revenu de Rennes; il m'a rapporté une -chanson qui m'a fait rire: elle vous fera voir en vers une -partie de ce que je vous ai dit l'autre jour en prose<a id="FNanchor_807" href="#Footnote_807" class="fnanchor"> [807]</a>.»</p> - -<p>La princesse de Tarente avait envers son fils, non -encore majeur, la morgue allemande, et elle le maintenait -dans le respect qui lui était dû. Elle ne pouvait comprendre -la conduite de madame de Sévigné, et était toujours -de plus en plus choquée des familiarités du fils envers -sa mère. «Cela n'est pas étonnant, disait madame de -Sévigné: elle qui n'a qu'un grand benêt de fils, qui n'a -point d'âme dans le corps<a id="FNanchor_808" href="#Footnote_808" class="fnanchor"> [808]</a>!» Ce jeune prince de Tarente, -cet unique héritier des la Trémouille, qui déplaisait -<span class="pagenum"><a id="Page_360"> 360</a></span> -tant à madame de Sévigné parce qu'il était encore -plus laid que M. de Grignan<a id="FNanchor_809" href="#Footnote_809" class="fnanchor"> [809]</a>, élevé en province, n'avait -ni les grâces ni les manières d'un homme de cour. Sans -avoir le génie et les grandes qualités de son père, il -mena cependant une existence brillante et honorée; il -s'acquit l'estime et la confiance de la noblesse de Bretagne, -qu'il présida au moins sept fois dans l'assemblée -des états, au détriment du duc de Rohan<a id="FNanchor_810" href="#Footnote_810" class="fnanchor"> [810]</a>; et il obtint -pour prix de ses services, sans courtisanerie et sans sollicitations, -d'être nommé chevalier des ordres du roi. -Le marquis de Sévigné au contraire gouverna mal sa fortune, -son ambition et ses amours; il passa le temps de sa -jeunesse dans la société des poëtes, des artistes et des -jeunes fous de son temps, moitié homme du monde, -moitié militaire. La jolie figure, les grâces, l'élégance, -l'esprit de cet officier blondin inspiraient à beaucoup -de beautés galantes le désir de s'en faire aimer; mais -elles le quittaient aussitôt qu'elles s'apercevaient que -le reste ne répondait pas à ces brillants dehors. C'est -cette disposition à former des liaisons où le cœur n'était -pour rien<a id="FNanchor_811" href="#Footnote_811" class="fnanchor"> [811]</a>, à être dupe des femmes qu'il croyait avoir -subjuguées; ce sont ces continuels efforts pour vouloir -<span class="pagenum"><a id="Page_361"> 361</a></span> -paraître toujours succomber aux atteintes d'une -passion qu'il ne ressentait pas, qui lui avaient attiré les -railleries du duc de la Rochefoucauld; et sa sœur, qui -l'aimait, voulut l'empêcher de s'y exposer; mais, moins -bonne que sa mère et ne craignant pas de le choquer, -elle lui avait fait sur ce sujet de vifs reproches, assaisonnés -d'une piquante ironie. La réponse de Sévigné -jette du jour sur ses intrigues amoureuses et sur les -mœurs de ce temps; elle termine une lettre que sa mère -écrit à madame de Grignan, et qui s'arrête à ces mots:</p> - -<p>«Je laisse la plume à l'honnête garçon qui est à mon -côté droit; il dit que vous avez trempé la vôtre dans du -feu en lui écrivant: il est vrai qu'il n'y a rien de si plaisant<a id="FNanchor_812" href="#Footnote_812" class="fnanchor"> [812]</a>.</p> - -<p>«Que dis-je du feu? (continue M. de Sévigné) c'est -dans du fiel et du vinaigre que vous l'avez trempée cette -impertinente plume qui me dit tant de sottises, sauf -correction. Et où avez-vous donc pris, madame la comtesse, -que je ne fusse pas capable de choisir une amie? -Est-ce parce que je m'étais adonné pendant trois ans à une -personne qui n'a pu s'accommoder de ce que je ne parlais -pas au public et que je ne donnais pas la bénédiction au -peuple? (Serait-il encore question ici de la belle <i>Alsine</i>, -de la duchesse d'Aumont, cette maîtresse de le Tellier, -l'archevêque de Reims, et du <span class="smallc">Charmant</span>, le marquis de -Villeroi<a id="FNanchor_813" href="#Footnote_813" class="fnanchor"> [813]</a>?) Vous avez eu du moins grande raison d'assurer -que ma blessure était guérie et que j'étais dégagé -de mes fers. Je suis trop bon catholique pour vouloir -rien disputer à l'Église. C'est depuis longtemps qu'il est -<span class="pagenum"><a id="Page_362"> 362</a></span> -réglé que le clergé a le pas sur la noblesse... Je suis redevenu -esclave d'une autre beauté brune, dans mon -voyage de Rennes: c'est de madame de..., celle qui -priait Dieu si joliment aux Capucins. Vous souvenez-vous -que vous la contrefaisiez? Elle est devenue bel esprit, et -dit les élégies de la comtesse de la Suze en langage breton.»</p> - -<p>Cependant Sévigné, engagé dans les liens d'une parente -ou d'une alliée de sa propre famille, devint plus -réservé dans les confidences qu'il faisait à sa mère. -C'est ainsi qu'il s'efforça, mais en vain, de couvrir du -voile du mystère ses amours avec madame du Gué-Bagnols. -Cette femme, qui était loin d'avoir l'amabilité -de sa sœur, madame de Coulanges, était, ainsi que je l'ai -déjà dit, mariée depuis quatre ans, à l'époque dont -nous nous occupons, à Louis du Gué-Bagnols, son -cousin issu de germain. Sa liaison avec Sévigné suivit -presque celle de la dame brune de Rennes, et eut lieu -peu après, aussitôt le retour de Sévigné à Paris<a id="FNanchor_814" href="#Footnote_814" class="fnanchor"> [814]</a>.</p> - -<p>Madame de Sévigné mande à sa fille, de la manière -suivante, un incident fâcheux de cette intrigue: «Ah! -c'est un homme bien amoureux que monsieur votre -frère! j'admire la peine qu'il se donne pour rien, pour -rien du tout. Il a été surpris dans une conversation fort -secrète par un mari; ce mari fit une mine très-chagrine, -parla très-rudement à sa femme: l'alarme était au camp -quand je partis (pour Livry, d'où la lettre est datée); je -manderai la suite à Paris<a id="FNanchor_815" href="#Footnote_815" class="fnanchor"> [815]</a>.» Et elle mande quatre jours -<span class="pagenum"><a id="Page_363"> 363</a></span> -après, dans la même lettre datée de Paris: «Le baron -a tout raccommodé par son adresse; il en sait autant -que les maîtres, et plus; car, pour imiter l'indifférence, -personne ne le peut surpasser; elle est jouée si fort au -naturel, et le vraisemblable imite si bien le vrai, qu'il -n'y a point de jalousie ni de soupçons qui puissent tenir -contre une si bonne conduite. Vous auriez bien ri si vous -aviez su tout le détail de cette aventure. Il me semble -que vous devinez le nom du mari. A tout hasard, la -femme s'en va dans votre voisinage<a id="FNanchor_816" href="#Footnote_816" class="fnanchor"> [816]</a>.»</p> - -<p>Parler ainsi, c'était nommer ce mari; car madame -de Grignan savait très-bien que madame du Gué-Bagnols -devait aller à Lyon rejoindre ses parents; et Sévigné, -dont l'amour s'était attiédi, cherchait déjà, suivant l'habitude -des officiers en garnison, une autre maîtresse -pour remplacer celle qu'il allait perdre. Dans une lettre -où madame de Sévigné se complaît un peu trop, pour -amuser sa fille, à railler une femme qu'elle n'aimait pas, -elle n'hésite point à nommer ce mari: «La Bagnols est -partie aujourd'hui; je mande à mon fils que, s'il n'est -point mort de douleur, il vienne demain dîner (à Livry) -avec tous les Pomponne; il sera plus heureux que M. de -Grignan, qui se trouve abandonné, parce qu'il n'avait -à Aix que trois maîtresses, qui toutes lui ont manqué: -on ne peut en avoir une trop grande provision; qui n'en -a que trois n'en a point. J'entends tout ce qu'il dit là-dessus. -Mon fils est bien persuadé de cette vérité; je suis -assurée qu'il lui en reste plus de six, et je parierais bien -qu'il n'en perdra aucune par la fièvre maligne, tant il les -choisit bien depuis quelque temps. Oh! vous voyez que -<span class="pagenum"><a id="Page_364"> 364</a></span> -ma plume veut dire des sottises aussi bien que la vôtre<a id="FNanchor_817" href="#Footnote_817" class="fnanchor"> [817]</a>.»</p> - -<p>On voit qu'alors la mère et la fille étaient en train de -s'entretenir d'aventures galantes: non-seulement madame -de Bagnols, mais sa sœur madame de Coulanges, -donnaient matière à exercer la malignité de leurs plumes. -On se croit transporté en plein dix-huitième siècle. -L'exemple du monarque et de sa cour avait banni de la -haute classe ces chastes scrupules, cette susceptibilité -qui honoraient la première génération des précieuses à -l'hôtel de Rambouillet. Déjà des mères respectables, -qui elles-mêmes se maintenaient dans toute la dignité -de leur sexe, voyaient sans peine leurs fils chercher à -plaire à des femmes mariées, habiles à couvrir d'un voile -le mystère de leurs amours. C'était un moyen nouveau -de combiner l'indifférence pour les intérêts d'une vertu -sévère avec le respect dû aux convenances; de concilier -la licence des mœurs avec la politesse des manières, et -la sensualité des passions avec la délicatesse des sentiments: -toutes choses qui s'évanouissaient dans le commerce -ruineux des Laïs indépendantes<a id="FNanchor_818" href="#Footnote_818" class="fnanchor"> [818]</a>.</p> - -<p>Madame de Sévigné, quoique janséniste, était du -nombre de ces mères; et, pour tranquilliser sa conscience -sur le tort que son fils pouvait faire aux maris par ses -amours volages, elle se persuadait facilement qu'avec les -femmes auxquelles il s'adressait il ne faisait que prévenir -un plus grand mal, et que, dans les mœurs du siècle, -la morale du <span class="smallc">Conteur</span>, au prologue de la <i>Coupe -enchantée</i>, était la seule praticable. Mais Sévigné n'était -pas alors l'objet de la volage préférence de madame de -<span class="pagenum"><a id="Page_365"> 365</a></span> -Coulanges; aussi madame de Sévigné n'en parle-t-elle -que légèrement. Admirez pourtant comme elle mêle habilement -à ces frivolités les nouvelles de la guerre qui alors -tenait tout le monde en suspens! On avait envoyé au -maréchal de Créqui, pour grossir son armée, toutes les -troupes que commandait le maréchal de Schomberg, et -celui-ci était resté seul avec son état-major; et, comme -madame de Sévigné fut de tout temps liée avec la maréchale -de Schomberg (Marie de Hautefort)<a id="FNanchor_819" href="#Footnote_819" class="fnanchor"> [819]</a>, cette nouvelle -l'intéressait au plus haut degré. «La <i>Mouche</i> (madame -de Coulanges), dit d'abord madame de Sévigné, -ne peut pas quitter la cour présentement; quand on y -a de certains engagements, on n'est point libre.» Puis, -deux jours après: «La <i>Mouche</i> est à la cour; c'est -une fatigue; mais que faire? M. de Schomberg est toujours -vers la Meuse, c'est-à-dire <i>tout seul tête à tête</i>. Madame -de Coulanges disait l'autre jour qu'il fallait donner -à M. de Coulanges l'intendance de cette armée<a id="FNanchor_820" href="#Footnote_820" class="fnanchor"> [820]</a>.» L'aimable -chansonnier qui s'était autrefois noyé <i>dans la -mare à Grappin</i> était encore moins propre à être intendant -d'armée que juge; mais comme le maréchal n'avait -plus d'armée, en lui envoyant Coulanges pour -intendant militaire, celui-ci aurait réjoui le maréchal -oisif par ses couplets, et se serait trouvé à la hauteur de -ses fonctions. Madame de Sévigné, soit qu'elle ait inventé -ce propos, soit qu'il ait été dit par madame de Coulanges, -faisait entendre à madame de Grignan que la présence -de M. de Coulanges à Paris était, pour sa femme, -au moins inutile.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_366"> 366</a></span> -Elle est moins laconique et surtout plus explicite sur -le compte de la sœur de madame de Coulanges. Les -deux sœurs étaient également l'objet des railleries de -madame de Grignan pour leur vanité<a id="FNanchor_821" href="#Footnote_821" class="fnanchor"> [821]</a>; mais il y avait -entre elles une grande différence sous le rapport de l'esprit, -de l'usage du monde, de l'amabilité, des grâces et -du charme de la conversation. Madame du Gué-Bagnols -était pleine d'afféterie, de prétentions et mortellement -ennuyeuse. Madame de Sévigné désirait non-seulement -en détacher son fils, mais persuader à madame de Grignan -que Sévigné avait renoncé à cette maîtresse et -n'entretenait avec elle une correspondance que par un -reste d'égard et pour ne pas s'écarter des procédés d'un -honnête homme. Par l'intermédiaire de madame de Grignan, -madame de Sévigné négociait alors le mariage de -son fils avec mademoiselle Rouillé, fille de l'intendant de -Provence. A Aix, madame de Sévigné avait fait la connaissance -de madame de Rouillé, et la trouvait aimable<a id="FNanchor_822" href="#Footnote_822" class="fnanchor"> [822]</a>. -Madame de Rouillé vint à Paris en août 1675, et apprit à -madame de Sévigné qu'elle avait d'autres vues qu'elle -pour le mariage de sa fille; ce qui n'altéra point leur -amitié. Rouillé, qui fut un de ces grands administrateurs -formés à l'école de Colbert et devint par la suite -intendant général des postes, avait une dot considérable -à donner à sa fille: il ne trouva pas que le marquis de -Sévigné fût assez riche ni assez avancé dans sa carrière -militaire, et il ne se laissa point tenter par une alliance -plus brillante que solide<a id="FNanchor_823" href="#Footnote_823" class="fnanchor"> [823]</a>.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_367"> 367</a></span> -Madame de Sévigné commence par annoncer le départ -de madame de Bagnols en ces termes: «La Bagnols -est partie, et la Mousse est allé avec elle<a id="FNanchor_824" href="#Footnote_824" class="fnanchor"> [824]</a>.» Ceux qui -ont lu la quatrième partie de ces Mémoires se rappellent -le petit abbé de la Mousse, dont madame de Sévigné -estimait le savoir et le caractère, qu'elle hébergea si -longtemps et dont elle ne se séparait jamais qu'avec -peine. On sait qu'il était le fils naturel de M. du Gué-Bagnols<a id="FNanchor_825" href="#Footnote_825" class="fnanchor"> [825]</a>, -l'intendant de Lyon, et par conséquent frère de -madame de Coulanges et de madame du Gué-Bagnols la -jeune. Madame de Sévigné, continuant sur celle-ci la plaisanterie -de sa lettre du 19 juillet, écrit, sept jours après<a id="FNanchor_826" href="#Footnote_826" class="fnanchor"> [826]</a>:</p> - -<p>«M. de Sévigné apprendra donc de M. de Grignan -la nécessité d'avoir plusieurs maîtresses, par les inconvénients -qui arrivent de n'en avoir que deux ou trois; -mais il faut que M. de Grignan apprenne de M. de Sévigné -les douleurs de la séparation quand il arrive que -quelqu'un s'en va par la diligence. On reçoit un billet -du jour du départ, qui embarrasse beaucoup, parce qu'il -est fort tendre: cela trouble la gaieté et la liberté dont -on prétend jouir. On reçoit encore un autre billet de la -première couchée, dont on est enragé. Comment diable? -cela continuera-t-il de cette force? On me conte cette -douleur; on met sa seule espérance au voyage que le -mari doit faire, croyant que cette grande régularité en -sera interrompue; sans cela, on ne pourrait souffrir un -commerce de trois fois la semaine. On tire les réponses et -<span class="pagenum"><a id="Page_368"> 368</a></span> -les tendresses à force de rêver; la lettre est <i>figée</i>, -comme je disais, avant que la <i>feuille qui chante</i> soit -pleine: la source est entièrement sèche. On pâme de rire -avec moi du style, de l'orthographe.» Puis madame de -Sévigné rapporte des fragments de la lettre de madame -du Gué-Bagnols, qui n'ont rien de ridicule, quoi qu'elle -en puisse dire; et si l'orthographe les rendait tels, on -sait que celle de madame de Coulanges n'était pas -meilleure<a id="FNanchor_827" href="#Footnote_827" class="fnanchor"> [827]</a>: cependant nulle femme de son temps n'a -été plus célèbre par le talent de bien écrire des lettres. -Madame de Sévigné ajoute: «Voilà en l'air ce que j'ai -attrapé, et voilà à quel style votre frère est condamné -de répondre trois fois la semaine. Ma fille, cela est -cruel, je vous assure. Voyez quelle gageure ces pauvres -gens se sont engagés de soutenir! c'est un martyre, -ils me font pitié; le pauvre garçon y succomberait sans -la consolation qu'il trouve en moi. Vous perdez bien, -ma chère enfant, de n'être pas à portée de cette confidence. -J'écris ceci hors d'œuvre pour vous divertir, en -vous donnant une idée de cet aimable commerce<a id="FNanchor_828" href="#Footnote_828" class="fnanchor"> [828]</a>.»</p> - -<p>Mais elle revient encore sur le même sujet quelques -jours après, et cite, de ces lettres de madame de Bagnols -à Sévigné, des traits d'afféterie qui la mettaient -hors d'elle. Il paraît que madame du Gué-Bagnols devait -aller voir madame de Grignan:</p> - -<p>«Le voyage de la Bagnols est assuré, dit madame de -Sévigné. Vous serez témoin de ses langueurs, de ses rêveries, -qui sont des applications à rêver; elle se redresse -<span class="pagenum"><a id="Page_369"> 369</a></span> -comme en sursaut, et madame de Coulanges lui dit: <i>Ma -pauvre sœur, vous ne rêvez point du tout</i>. Pour son style, -il m'est insupportable, et me jette dans des grossièretés, -de peur d'être comme elle. Elle me fait renoncer à la délicatesse, -à la finesse, à la politesse, de crainte de donner -dans les tours de passe-passe, comme vous dites: cela -est triste de devenir une paysanne<a id="FNanchor_829" href="#Footnote_829" class="fnanchor"> [829]</a>.»</p> - -<p>Après cette liaison, madame de Sévigné nous apprend -que son fils en forma une autre, qui ne fut pas plus sincère, -avec la duchesse de V... (peut-être la duchesse de -Ventadour, mademoiselle de Houdancourt<a id="FNanchor_830" href="#Footnote_830" class="fnanchor"> [830]</a>). «Ce qui est -vrai, écrit madame de Sévigné à sa fille, c'est que votre -frère n'aime point du tout la duchesse et que c'est pour -rien qu'il prend un air si nuisible.» Quinze jours après, -madame de Sévigné entretient encore sa fille des relations -intimes de Sévigné avec une de ses parentes (peut-être -est-il encore question de madame du Gué-Bagnols): -«Mon fils me parle de la grosse cousine d'une étrange -façon; il ne désire qu'une bonne cruelle pour le consoler -un peu: une ingrate lui paraît une chimère. Voilà -le style de madame de Coulanges, celui dont il se sert; -et, en parlant de quelque argent qu'il a gagné avec la -cousine, il me dit: <i>Plût à Dieu que je n'y eusse gagné -que cela</i>! Que diantre veut-il dire? Il me promet mille -confidences; mais il me semble qu'ensuite d'un tel discours -il doit dire, comme l'abbé d'Effiat: <i>Je ne sais si je -me fais bien entendre</i>. Tout ceci entre nous, s'il vous -plaît, et sans retour.»</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_370"> 370</a></span> -Sévigné conserva longtemps les inclinations de sa jeunesse, -et ne termina sa carrière amoureuse que lorsque -le mariage en eut fait un tout autre homme. Jusqu'alors -madame de Sévigné, dans ses lettres à sa fille, paraît -toujours tourmentée non de ce que son fils a des maîtresses, -mais de ce qu'il les choisit mal. «J'attendais -mon fils, dit-elle. Je croyais donc le voir à chaque instant -dans ces bois; mais devinez ce qu'il a fait? Il a traversé -je ne sais par où, et s'est trouvé à Rennes, où il me -mande qu'il sera jusqu'au départ de madame de Chaulnes. -Il me paraît qu'il a voulu faire cette équipée pour mademoiselle -de Tonquedec: il sera bien embarrassé, car -mademoiselle de la Coste n'en jette pas moins sa part -aux chiens. Le voilà donc entre l'orge et l'avoine, mais -la plus mauvaise orge et la plus mauvaise avoine qu'il -pût jamais trouver. Que voulez-vous que j'y fasse? C'est -en pareil cas que je suis toujours résignée<a id="FNanchor_831" href="#Footnote_831" class="fnanchor"> [831]</a>.»</p> - -<p>La préférence avouée qu'elle donnait à sa fille dans -son affection l'obligeait envers ce fils si bon, si tendre -pour elle à de grands ménagements. Aussi elle écrit -de Paris à madame de Grignan: «Mon fils est aux Rochers, -solitairement... Il vous aime tendrement, il en -jure sa foi; je conserverai entre vous l'amour fraternel, -ou j'y périrai<a id="FNanchor_832" href="#Footnote_832" class="fnanchor"> [832]</a>.»</p> - -<p>Elle ne courait pas ce danger, et pour réussir il ne lui -fallait pas faire de grands efforts. Si Sévigné était un amant -faible et inconstant, incapable d'inspirer comme de ressentir -une forte passion, il n'exista jamais<a id="FNanchor_833" href="#Footnote_833" class="fnanchor"> [833]</a> un fils plus tendre -<span class="pagenum"><a id="Page_371"> 371</a></span> -et plus dévoué, un frère plus généreux, plus aimant, -un époux plus fidèle et plus attaché. Pendant cet hiver -que madame de Sévigné fut forcée de passer aux Rochers, -elle put reconnaître, par les soins et les attentions -de son fils, combien elle en était aimée. Elle fut -alors assaillie par bien des peines. Sévigné ne pouvait -les faire disparaître, mais il parvint à la soulager -dans toutes: il fut à la fois son confident, son lecteur, -son garde-malade et un compagnon charmant. «Mon -fils, dit-elle, nous amuse et nous est très-bon; il prend -l'esprit des lieux où il est, et ne transporte de la guerre -et de la cour, dans cette solitude, que ce qu'il en faut -pour la conversation<a id="FNanchor_834" href="#Footnote_834" class="fnanchor"> [834]</a>.»</p> - -<p>De tous les tourments qu'éprouvait madame de Sévigné, -le plus vif était celui qu'elle se faisait à elle-même -par son amour pour sa fille. Elle la savait enceinte, et le -moindre retard de la poste lui causait des inquiétudes -mortelles. Ce sujet revient souvent sous sa plume, et -elle sait admirablement en varier l'expression. Madame -de Grignan accoucha, avant terme, d'un fils qui ne vécut -que quelques mois. Sa mère lui écrit:</p> - -<p>«Si on pouvait avoir un peu de patience, on épargnerait -bien du chagrin. Le temps en ôte autant qu'il en -donne. Vous savez que nous le trouvons un vrai brouillon, -mettant, remettant, rangeant, dérangeant, imprimant, -effaçant, approchant, éloignant, et rendant toutes choses -bonnes ou mauvaises, et quasi toujours méconnaissables. -Il n'y a que notre amitié que le temps respecte et -respectera toujours. Mais où suis-je, ma fille? Voilà un -<span class="pagenum"><a id="Page_372"> 372</a></span> -étrange égarement; car je veux dire simplement que la -poste me retient vos lettres un ordinaire, parce qu'elle arrive -trop tard à Paris, et qu'elle me les rend au double le -courrier d'après; c'est donc pour cela que je me suis extravaguée -comme vous voyez. Qu'importe? en vérité, il faut -un peu, entre bons amis, laisser trotter les plumes comme -elles veulent: la mienne a toujours la bride sur le cou<a id="FNanchor_835" href="#Footnote_835" class="fnanchor"> [835]</a>.»</p> - -<p>Ainsi nul arrêt, nul intervalle entre ces lignes qu'elle -écrivait avec tant de rapidité; et on s'aperçoit, par la différence -des lettres qu'elle a dictées et de celles qu'elle a écrites -elle-même, qu'elle avait besoin de s'aider du travail de -ses doigts pour entretenir ses pensées, et que son imagination -ne se retraçait plus les choses avec d'aussi vives -couleurs quand elle se trouvait forcée de se servir d'une -autre main que la sienne. Hélas! cette nécessité devait -bientôt surgir, quoiqu'elle ne la soupçonnât point encore.</p> - -<p>Le mois de décembre était doux et sec, et elle en -jouissait encore avec délices, au milieu de ses belles -allées<a id="FNanchor_836" href="#Footnote_836" class="fnanchor"> [836]</a> du Mail, surtout dans ces bois «dont l'air admirable -nourrit le teint comme à Livry, hormis qu'il n'y a -point de serein<a id="FNanchor_837" href="#Footnote_837" class="fnanchor"> [837]</a>.» Mais elle ne se bornait pas aux oisives -jouissances de ses rêveuses promenades, et elle s'occupait -très-activement des embellissements de son parc. «Je -m'amuse, dit-elle<a id="FNanchor_838" href="#Footnote_838" class="fnanchor"> [838]</a>, à faire abattre de grands arbres. Le -tracas que cela fait représente, au naturel, ces tapisseries -où l'on peint les ouvrages de l'hiver: des arbres qu'on -abat, des gens qui scient, d'autres qui font des bûches, -<span class="pagenum"><a id="Page_373"> 373</a></span> -d'autres qui chargent une charrette, et moi au milieu, -voilà le tableau. Je m'en vais faire planter; <i>car que faire -aux Rochers, à moins que l'on ne plante</i><a id="FNanchor_839" href="#Footnote_839" class="fnanchor"> [839]</a>?</p> - -<p>«Nous avons (écrit-elle encore au beau milieu de janvier) -un admirable hiver; je me promène tous les jours, -et je fais quasi un nouveau parc autour de ces grandes -places du bout du Mail. J'y fais planter quatre rangs -d'allées; ce sera une très-belle chose: tout cet endroit -est uni et défriché<a id="FNanchor_840" href="#Footnote_840" class="fnanchor"> [840]</a>.»</p> - -<p>Sans les affaires, et surtout la hâte d'un procès qui -l'appelait à Paris, elle n'aurait pu se résoudre à quitter -son aimable désert<a id="FNanchor_841" href="#Footnote_841" class="fnanchor"> [841]</a>; mais elle avait un compte -à terminer en Bretagne avec M. de Meneuf, président -au parlement de Rennes, qui lui devait et refusait -de payer la totalité de sa dette, parce qu'il voulait -qu'on lui fit remise de cinq ou six mille francs, -somme à laquelle il n'avait aucun droit. Le <i>Bien bon</i> termina, -avec son habileté ordinaire, cette contestation à -l'avantage de madame de Sévigné. Elle fut payée du -président Meneuf. «Ce président, écrit-elle à sa fille, -m'est venu voir... Il avait avec lui un fils de sa femme, -qui a vingt ans, et que je trouvai, sans exception, la -plus agréable et la plus jolie figure que j'aie jamais vue. -J'allais dire que je l'avais vu à cinq ou six ans, et j'admirais, -comme M. de Montbazon, qu'on pût croître en -si peu de temps. Sur cela il sort une voix terrible de ce -joli visage, qui vous plante au nez, d'un air ridicule, <i>que</i> -<span class="pagenum"><a id="Page_374"> 374</a></span> -<i>mauvaise herbe croît toujours</i>. Voilà qui fut fait, je lui -trouvai des cornes. S'il m'eût donné un coup de massue -sur la tête, il ne m'aurait pas plus affligée; je jurai de -ne plus me fier aux physionomies:</p> - -<p class="quote"><span class="i1">Non, non, je le promets,</span> -Non, je ne m'y fierai jamais<a id="FNanchor_842" href="#Footnote_842" class="fnanchor"> [842]</a>.»</p> - -<p>Cependant, malgré le plaisir qu'éprouvait madame de -Sévigné à diriger ses travaux, à respirer le bon air de -ses bois, loin des exigences de la cour et de la ville, affranchie -de l'ennui et de la fatigue des visites, de l'importunité -de celles qu'on lui faisait et de l'inquiétude -de celles qu'elle ne faisait pas<a id="FNanchor_843" href="#Footnote_843" class="fnanchor"> [843]</a>, elle comptait dans le -cours du mois de février se rendre à Paris, où l'appelaient -les affaires de madame de Grignan et les siennes, -ainsi que celles du bon abbé<a id="FNanchor_844" href="#Footnote_844" class="fnanchor"> [844]</a>; mais elle ne put exécuter -sa résolution, et fut obligée de passer l'hiver entier -aux Rochers. Sa robuste santé, qui déjà dans l'automne -précédent avait reçu de fortes atteintes<a id="FNanchor_845" href="#Footnote_845" class="fnanchor"> [845]</a>, succomba entièrement -sous un rhumatisme général, accompagné de -fièvre. Elle eut, ainsi que disait son fils, une maladie rude -et douloureuse, la première qui l'ait atteinte en sa vie<a id="FNanchor_846" href="#Footnote_846" class="fnanchor"> [846]</a>. -Il est presque certain que l'habitude qu'elle avait prise de -demeurer dans les allées de son mail «au delà de l'entre-chien -et loup,» a contribué à aggraver son mal et à -mettre ses jours en danger<a id="FNanchor_847" href="#Footnote_847" class="fnanchor"> [847]</a>; mais cependant on doit remarquer -que son cousin Bussy et Louis XIV, tous deux -<span class="pagenum"><a id="Page_375"> 375</a></span> -doués comme elle d'une forte constitution, eurent aussi -la fièvre vers le même temps<a id="FNanchor_848" href="#Footnote_848" class="fnanchor"> [848]</a>.</p> - -<p>La maladie de madame de Sévigné dura quarante -jours<a id="FNanchor_849" href="#Footnote_849" class="fnanchor"> [849]</a>. Sa fièvre s'apaisa; et aussitôt qu'elle fut hors -de danger, dans son lit de satin jaune et dans sa petite -alcôve flanquée de deux cabinets, elle dicta à son fils, -qui ne l'avait pas quittée, une lettre pour madame de -Grignan: elle voulut la rassurer contre les craintes que -Sévigné n'avait pu parvenir à calmer durant ces longs -jours de luttes et de souffrance.</p> - -<p>«Il est donc vrai que depuis cette sueur, à la suite -de quelques autres petites, je me trouve sans fièvre et -sans douleur! Il ne me reste plus que la lassitude du -rhumatisme. Vous savez ce que c'est pour moi d'être -seize jours sur les reins, sans pouvoir changer de situation. -Je me suis rangée dans ma petite alcôve, où j'ai -été très-chaudement et parfaitement bien servie. Je voudrais -bien que mon fils ne fût pas mon secrétaire en cet -endroit, pour vous dire ce qu'il a fait en cette occasion. Ce -mal a été fort commun dans ce pays; et ceux qui ont -évité la fluxion sur la poitrine y sont tombés; mais pour -vous dire vrai, je ne croyais pas être sujette à cette loi -commune; jamais une femme n'a été plus humiliée ni -plus traitée contre son tempérament. Si j'avais fait un -bon usage de ce que j'ai souffert, je n'aurais pas tout -perdu; il faudrait peut-être m'envier; mais je suis impatiente, -ma fille, et je ne comprends pas comment on -peut vivre sans pieds, sans jambes, sans jarrets et sans -<span class="pagenum"><a id="Page_376"> 376</a></span> -mains. Il faut que vous pardonniez aujourd'hui cette -lettre à l'occupation naturelle d'une personne malade; -c'est à n'y plus revenir: dans peu de jours je serai en -état de vous écrire comme les autres.»</p> - -<p>Madame de Sévigné se trompait: à la fièvre succéda -une enflure générale, plus forte aux mains que dans le -reste du corps, et elle continua pendant quelque temps -encore à user des secours de son fils, qui cependant put -la quitter pour aller à Paris traiter de sa charge de guidon -avec le jeune de Viriville<a id="FNanchor_850" href="#Footnote_850" class="fnanchor"> [850]</a>. Mais quoiqu'elle se portât -dès lors de mieux en mieux, ses mains ne désenflèrent -que lentement. Alors la jeune fille de la dame voisine des -Rochers, dont nous avons parlé comme la rivale préférée -de la du Plessis, fut pour elle «le petit secrétaire aimable -et joli qui vint au secours de sa main engourdie -et tremblante<a id="FNanchor_851" href="#Footnote_851" class="fnanchor"> [851]</a>.» Ses lettres à madame de Grignan -devinrent plus longues, plus <i>jaseuses</i> et plus <i>abandonnées</i>, -soit parce que sa santé s'améliorait, soit qu'elle -craignît d'ennuyer son fils en le forçant d'écrire longuement -sur sa maladie, soit qu'elle éprouvât quelque gêne -à rendre le <i>frater</i> confident de son excessive tendresse -pour sa sœur<a id="FNanchor_852" href="#Footnote_852" class="fnanchor"> [852]</a>.</p> - -<p>Vers la fin de mars, elle commence à s'intéresser à ce -qui se passe à Paris et à la cour; et, se ressouvenant de -cette maîtresse de Bussy dont elle avait tant à se plaindre, -elle parle à madame de Grignan d'un mariage qui, -tel que celui de madame de Courcelles, dont il a -<span class="pagenum"><a id="Page_377"> 377</a></span> -été question dans ces Mémoires, montre jusqu'où -Louis XIV poussait le despotisme quand il s'agissait -de favoriser par des alliances ceux de ses généraux et -de ses officiers qui se distinguaient à son service. «Le -mariage, dit-elle, du duc de Lorges avec Geneviève -de Fremont (fille de Nicolas de Fremont, seigneur -d'Auneuil, garde du trésor royal) me paraît admirable; -j'aime le bon goût du beau-père. Mais que -dites-vous de madame de la Baume, qui oblige le roi -d'envoyer un exempt prendre mademoiselle de la Tivolière -d'entre les mains de père et mère, pour la mettre -à Lyon chez une de ses sœurs? On ne doute point qu'en -s'y prenant de cette manière elle n'en fasse le mariage -avec son fils<a id="FNanchor_853" href="#Footnote_853" class="fnanchor"> [853]</a>.»</p> - -<p>A ce sujet, le chevalier Perrin, le premier éditeur des -lettres de madame de Sévigné, fait observer qu'ainsi que -madame de Sévigné l'avait prévu Camille de la Baume, -comte de Tallard, depuis maréchal de France et duc -d'Hostun, épousa, par contrat du 28 décembre 1677, -Marie-Catherine de Groslée de Viriville de la Tivolière. -Il semble qu'il était dans la destinée de madame de la -Baume de toujours nuire à madame de Sévigné sans -en avoir l'intention, car ce mariage projeté de Tallard -empêcha de Viriville d'acheter la charge de Sévigné. Et -madame de Sévigné dit à sa fille: «Voilà nos mesures -rompues; ne trouvez-vous pas cela plaisant, c'est-à-dire -cruel? Madame de la Baume frappe de loin<a id="FNanchor_854" href="#Footnote_854" class="fnanchor"> [854]</a>.»</p> - -<p>Enfin madame de Sévigné annonce son départ des -Rochers; mais c'est encore avec la main de son petit -<span class="pagenum"><a id="Page_378"> 378</a></span> -secrétaire; car les siennes, toujours enflées, lui refusaient -le service. «Je me porte très-bien, dit-elle; -mais pour mes mains, il n'y a ni rime ni raison. Je me -sers donc de la petite personne pour la dernière fois; -c'est le plus aimable enfant du monde. Je ne sais ce -que j'aurais fait sans elle: elle me lit très-bien ce que je -veux; elle écrit comme vous voyez; elle m'aime; elle -est complaisante; elle sait me parler de madame de Grignan. -Enfin, je vous prie de l'aimer sur ma parole<a id="FNanchor_855" href="#Footnote_855" class="fnanchor"> [855]</a>.»</p> - -<p>On regrette de ne pas connaître le nom de cette jeune -fille, à laquelle madame de Sévigné a su nous intéresser -en nous faisant connaître l'amour qu'elle lui avait inspiré. -Dans la lettre datée de Laval le mardi 24 mars, -jour où elle partit des Rochers pour se rendre à Paris, -elle dit:</p> - -<p>«Et pourquoi, ma fille, ne vous écrirais-je pas aujourd'hui, -puisque je le puis? Je suis partie ce matin des -Rochers par un chaud et charmant temps; le printemps -est ouvert dans nos bois. La petite fille a été enlevée -dès le grand matin, pour éviter les grands éclats -de sa douleur: ce sont des cris d'enfant qui sont si naturels -qu'ils en font pitié. Peut-être que dans ce moment -elle danse; mais depuis deux jours elle fondait: -elle n'a pas appris de moi à se gouverner. Il n'appartient -qu'à vous, ma très-chère, d'avoir de la tendresse et -du courage<a id="FNanchor_856" href="#Footnote_856" class="fnanchor"> [856]</a>.»</p> - -<p>Rien ne nous prouve mieux que ces lignes combien -le cœur de madame de Sévigné était souvent blessé par -la froide raison de sa fille et par le défaut de cette faculté -<span class="pagenum"><a id="Page_379"> 379</a></span> -sympathique qu'on nomme sensibilité, cause de -tant de jouissances et encore plus de tant de tourments.</p> - -<p>Quoique madame de Sévigné se trouvât bien du changement -d'air, que sa santé se rétablît assez promptement, -sa main, continuant à être gonflée et tremblante, -la forçait toujours à dicter ses lettres; néanmoins, -quand elle écrivait à sa fille, elle aimait mieux s'en servir -que d'employer la main de l'ami le plus intime. Rendue -à Paris, elle y trouva Corbinelli, qui un jour, pour -la soulager, écrivit dans une de ses lettres les nouvelles -qu'elle voulait mander à madame de Grignan; -mais en reprenant la plume elle ajoute aussitôt: -«Je n'aime point à avoir des secrétaires qui aient plus -d'esprit que moi; ils font les entendus, je n'ose leur -faire écrire toutes mes sottises. La petite fille m'était bien -meilleure<a id="FNanchor_857" href="#Footnote_857" class="fnanchor"> [857]</a>.»</p> - -<p>C'est le 8 avril que nous la retrouvons à Paris écrivant -ainsi à madame de Grignan. Elle avait passé huit -jours au château de Malicorne, où elle s'arrêta comme -elle avait fait cinq ans auparavant<a id="FNanchor_858" href="#Footnote_858" class="fnanchor"> [858]</a>. Là elle fut choyée -par la marquise de Lavardin comme une amie convalescente -qu'on avait craint de perdre. Les Lavardin -étaient de l'illustre maison de Beaumanoir, et Coulanges -avait dans ses chansons célébré la beauté de la grande -salle du château de Malicorne, que décoraient tous les -portraits des Beaumanoir et des personnages illustres -avec lesquels cette famille avait formé des alliances<a id="FNanchor_859" href="#Footnote_859" class="fnanchor"> [859]</a>. -<span class="pagenum"><a id="Page_380"> 380</a></span> -Madame de Sévigné et madame de Lavardin vivaient -à une époque trop féconde en grands événements, en -hommes illustres pour avoir envie de s'entretenir des -siècles passés. Le souvenir de Turenne ne s'effaçait pas, -et les regrets de sa mort ne pouvaient se calmer; la publication -de l'oraison funèbre de ce héros par Fléchier -les avait encore ranimés. Madame de Sévigné, que sa -maladie avait empêchée de se mettre au courant des -événements qui survenaient et des nouveautés littéraires, -ne connaissait pas ce discours, chef-d'œuvre de -ce très-élégant et très-spirituel écrivain. Elle avait entendu, -elle avait lu l'œuvre de Mascaron sur le même -sujet: «C'est une action pour l'immortalité, avait-elle -dit;» et elle s'était figuré que l'éloquence de l'évêque -de Tulle ne pouvait être surpassée ni même égalée<a id="FNanchor_860" href="#Footnote_860" class="fnanchor"> [860]</a>.» -Mais à Malicorne elle changea d'avis. «En arrivant ici -(écrit-elle à son gendre)» madame de Lavardin me parla -de l'oraison funèbre de Fléchier; nous la fîmes lire; et -je demande mille et mille fois pardon à M. de Tulle; -mais il me parut que celle-ci était au-dessus de la sienne: -je la trouve plus également belle partout. Je l'écoutai -avec étonnement, ne croyant pas qu'il fût possible de -trouver encore de nouvelles manières d'exprimer les -mêmes choses; en un mot, j'en fus charmée<a id="FNanchor_861" href="#Footnote_861" class="fnanchor"> [861]</a>.»</p> - -<p>Madame de Sévigné était partie de Paris le 9 septembre<a id="FNanchor_862" href="#Footnote_862" class="fnanchor"> [862]</a> -(1675); elle y était revenue le 7 ou 8 avril de -<span class="pagenum"><a id="Page_381"> 381</a></span> -l'année suivante (1676): elle était donc restée sept mois -absente de la capitale, du centre des affaires et des nouvelles; -et comme dans cet intervalle madame de Grignan -était informée de tout aussi rapidement qu'elle-même, -madame de Sévigné s'abstint dans ses lettres de -lui en parler, ou elle ne lui en parla que brièvement. -Durant ces sept mois néanmoins de grands événements -eurent lieu; la guerre sur terre et sur mer -se continua, glorieuse pour la France, entre Louis XIV -et les puissances de l'Europe coalisées contre lui. Le -14 septembre, le prince de Condé fit lever le siége -de Saverne; trois jours après mourut à Birkenfeld -Charles IV, duc de Lorraine, et la France fut délivrée -d'un ennemi dangereux, d'un allié plus dangereux encore<a id="FNanchor_863" href="#Footnote_863" class="fnanchor"> [863]</a>. -Le 7 octobre l'armée française envahit le pays -de Waës. Cependant les négociations se poursuivaient, -et l'on convint de prendre Nimègue pour le lieu de -réunion d'un congrès européen. Nimègue devait devenir -un lieu célèbre par la conclusion d'une paix que toutes -les puissances désiraient avec ardeur et qui fut pourtant -encore longtemps différée. Les prétentions variaient selon -les victoires ou les défaites. La douceur de l'hiver permettait -de continuer les opérations de la guerre. Le -9 janvier 1676 Duquesne défit la flotte espagnole près -des îles de Strombali; le 22 mars on rasa la citadelle de -Liége; le 25 du même mois le maréchal de Vivonne tailla -en pièces sept mille hommes près de Messine. C'est par -madame de Grignan que madame de Sévigné apprend -cet exploit de son ami <i>le gros Crevé</i>; et l'on voit, par -<span class="pagenum"><a id="Page_382"> 382</a></span> -ce qu'elle en dit, combien elle détestait ces tueries: -«Quelle rage aux Messinois d'avoir tant d'aversion pour -les Français, qui sont si jolis! Mandez-moi toujours toutes -vos histoires tragiques, et ne vous mettez point dans la -tête de craindre le contre-temps de nos raisonnements: -c'est un mal que l'éloignement cause, et à quoi il faut se -résoudre tout simplement<a id="FNanchor_864" href="#Footnote_864" class="fnanchor"> [864]</a>.» Vivonne s'était emparé de -Messine; mais la licence des troupes françaises occasionna -des révoltes et des conspirations; il fallut en venir -à des rigueurs, à des massacres, enfin abandonner -la Sicile<a id="FNanchor_865" href="#Footnote_865" class="fnanchor"> [865]</a>.</p> - -<p>Le 26 avril la ville de Condé fut forcée par le roi, -après huit jours de siége<a id="FNanchor_866" href="#Footnote_866" class="fnanchor"> [866]</a>; le 12 mai Bouchain fut -pris après huit jours de tranchée. Le 31 juillet Aire est -pris en six jours par le maréchal d'Humières, qui, le -9 août, s'empara aussi du fort de Linck.</p> - -<p>La nouvelle de la mort de Charles IV, duc de Lorraine, -ne parvint à Versailles, où était alors Louis XIV, -que le 23 septembre; et madame de Sévigné n'en parle -dans une de ses lettres que quatre jours après<a id="FNanchor_867" href="#Footnote_867" class="fnanchor"> [867]</a>. Pavillon -ne s'est point écarté de l'histoire, quand il dit dans l'épitaphe -satirique de ce duc:</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p>Ci-gît un pauvre duc sans terres,</p> -<p>Qui fut jusqu'à ses derniers jours</p> -<p>Peu fidèle dans ses amours,</p> -<p>Et moins fidèle dans ses guerres.</p> -<div><span class="pagenum"><a id="Page_383"> 383</a></span></div> -</div> -<div class="stanza"> -<p>Il donna librement sa foi</p> -<p>Tour à tour à chaque couronne;</p> -<p>Il se fit une étrange loi</p> -<p>De ne la garder à personne.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p>Trompeur même en son testament,</p> -<p>De sa femme il fit une nonne,</p> -<p>Et ne donna rien que du vent</p> -<p>A madame de Lillebonne<a id="FNanchor_868" href="#Footnote_868" class="fnanchor"> [868]</a>.</p> -</div></div> - -<p>Madame de Lillebonne était la fille du duc de Lorraine; -lorsqu'elle en parlait, elle disait toujours <i>Son -Altesse mon père</i><a id="FNanchor_869" href="#Footnote_869" class="fnanchor"> [869]</a>. C'est pourquoi madame de Sévigné, -lorsqu'elle apprend cette grande nouvelle, écrit à sa -fille: «Mais n'admirez-vous point le bonheur du roi? -On me mande la mort de <i>Son Altesse royale mon père</i>, -qui était un bon ennemi; et que les Impériaux ont repassé -le Rhin pour aller défendre l'empereur des Turcs, -qui le pressent en Hongrie. Voilà ce qui s'appelle des étoiles -heureuses; cela nous fait craindre en Bretagne de -rudes punitions<a id="FNanchor_870" href="#Footnote_870" class="fnanchor"> [870]</a>.» Ainsi la Bretagne était à ce point -désaffectionnée de Louis XIV qu'elle désirait qu'il eût -des revers pour qu'il fût plus facile de s'opposer à son -despotisme.</p> - -<p>Madame de Sévigné écrivit, au sujet de la mort du -duc Charles IV, à madame de Lillebonne et à sa belle-fille -la princesse de Vaudemont. Aimable, belle, discrète -et dévouée, la princesse de Vaudemont avait été -fréquemment employée dans les négociations du duc -<span class="pagenum"><a id="Page_384"> 384</a></span> -Charles IV<a id="FNanchor_871" href="#Footnote_871" class="fnanchor"> [871]</a>, et elle fut de tout temps l'amie intime -de madame de Grignan. Lorsque cette princesse, longtemps -après l'époque dont nous traitons, résidait à -Rome avec son mari, pensionnée par l'Espagne, et que -toute liaison avec la France lui était interdite, elle eut -durant le conclave une entrevue secrète avec Coulanges, -au risque de se rendre suspecte au parti espagnol -et d'être privée de ses revenus. Elle ne voulait que s'entretenir -avec lui de madame de Grignan et le charger -de lui transmettre l'assurance de sa constante amitié<a id="FNanchor_872" href="#Footnote_872" class="fnanchor"> [872]</a>.</p> - -<p>Quand madame de Sévigné rentra dans Paris, le roi, -qui était resté à Versailles depuis la fin de juillet de l'année -précédente, allait en partant emmener avec lui un -grand nombre de ses amis. Néanmoins, à son arrivée -dans la capitale, elle trouva encore le chevalier de Grignan -(le chevalier de la Gloire), qui commandait le régiment -de Grignan, et s'était si fort distingué à Altenheim. -«C'est un aimable garçon, dit-elle; il cause fort bien -avec moi jusqu'à onze heures. J'ai obtenu de sa modestie -de me parler de sa campagne; nous avons repleuré -M. de Turenne<a id="FNanchor_873" href="#Footnote_873" class="fnanchor"> [873]</a>.» Elle apprend que le comte de Lorges, -qui le 1<sup>er</sup> août précédent repoussa l'ennemi au -delà du Rhin, avait été nommé maréchal de France; -et elle dit, avec un petit sentiment d'envie pour son fils -et son cousin Bussy: «Le maréchal de Lorges n'est-il -point trop heureux? Les dignités, les grands biens et -<span class="pagenum"><a id="Page_385"> 385</a></span> -une très-jolie femme!... La fortune est jolie, mais je ne -puis lui pardonner les rudesses qu'elle a pour nous<a id="FNanchor_874" href="#Footnote_874" class="fnanchor"> [874]</a>.»</p> - -<p>Elle apprit en même temps et manda à sa fille dans -la même lettre, la première de Paris depuis son arrivée, -une anecdote qui présageait un changement de fortune -dans la famille de Grignan. Le duc de Vendôme, nommé, -encore enfant, gouverneur de Provence, et dont le comte -de Grignan tenait la place comme lieutenant général<a id="FNanchor_875" href="#Footnote_875" class="fnanchor"> [875]</a>, -avait fait sa première campagne en Hollande en 1672, -âgé seulement de seize ans: il en avait vingt-deux en -1676, et devait partir en même temps que le roi pour -la campagne de Flandre; mais, aimant le plaisir et se -trouvant gêné à la cour, il manifesta le désir d'aller -occuper son gouvernement.</p> - -<p>«M. de Vendôme dit au roi, il y a huit jours: Sire, -j'espère qu'après cette campagne Votre Majesté me -permettra d'aller dans le gouvernement qu'elle m'a fait -l'honneur de me donner.—Monsieur, lui dit le roi, -quand vous saurez bien gouverner vos affaires, je vous -donnerai le soin des miennes<a id="FNanchor_876" href="#Footnote_876" class="fnanchor"> [876]</a>.»</p> - -<p>Heureusement pour M. de Grignan et madame de -Sévigné que le duc de Vendôme, au lieu d'être simplement -un aimable débauché, prit goût au métier de -la guerre, devint un grand général, et abandonna -longtemps au comte de Grignan le soin de gouverner -la Provence<a id="FNanchor_877" href="#Footnote_877" class="fnanchor"> [877]</a>. Turenne mort, Condé accablé par l'âge -<span class="pagenum"><a id="Page_386"> 386</a></span> -et les infirmités, Louis XIV fatigué, Vendôme s'annonçait -dès lors comme devant être le héros de cette -jeune noblesse brillante, frondeuse et dissolue qui, par -sa bravoure et ses talents militaires, soutint le trône et -l'État. Mais, mécontente, elle sépara sa gloire de celle -de son roi, elle déserta sa cour, elle discrédita sa personne -et son gouvernement, et commença le déclin de la -monarchie fondée par Henri IV, Richelieu et Louis XIV. -La France et son roi avaient dès cette époque, dans -le stathouder de Hollande, un ennemi puissant par son -génie politique: il était de la race des Cromwell, des Ximenès, -des Richelieu, des Mazarin; redoutable par son -caractère énergique, patient et persévérant comme celui -du peuple dont il réglait les destinées. Après chaque -défaite des alliés, après chaque victoire des armées -françaises, Guillaume redoublait d'efforts pour empêcher -Louis XIV de conclure une paix glorieuse. Comme -Pitt quand il parlait de Bonaparte, Guillaume disait aux -souverains et aux peuples: «La guerre, la guerre! toujours -la guerre! c'est le seul moyen de salut.» Ce n'était -pas seulement par ses armes que le prince d'Orange -s'opposait aux progrès de la puissance de Louis le Grand; -c'était par des écrits qui formaient un piquant contraste -avec les louanges qu'on lui donnait. L'industrieuse habileté -des imprimeurs de Hollande avait su exploiter à leur -profit les productions littéraires de la France: les éditions -des livres français sorties de leurs presses, souvent plus -belles, moins coûteuses et non mutilées par la censure, -étaient partout préférées aux éditions originales; par là -elles contribuaient à accroître l'influence de la littérature, -des modes, des usages de la France. Mais Guillaume -sut diriger contre Louis XIV cette universalité de -<span class="pagenum"><a id="Page_387"> 387</a></span> -la langue française, conquête des beaux génies protégés -par ce monarque et gloire éternelle de son règne. Guillaume -savait que la presse, comme la lance d'Achille, -guérit les blessures qu'elle a faites; à la fois arme et -bouclier propre également à protéger contre les coups -d'un ennemi ou à le frapper à mort. Par les soins de ce -chef de la coalition et par ses encouragements, l'Europe -fut inondée d'écrits contre la France et contre son roi. -Un grand nombre n'étaient que des libelles infâmes, -calomnieux et orduriers contre Louis XIV et les hauts -personnages de sa cour; mais plusieurs aussi étaient très-habilement -rédigés, et empruntaient le langage ferme et -éloquent de l'histoire pour retracer les torts de la France -et de son monarque et les rendre odieux aux souverains -et aux peuples de l'Europe. Dans ce nombre est un très-court -écrit que Guillaume, en cette même année 1676, -répandit avec profusion dans les Pays-Bas, où quelques -provinces qui avaient appartenu autrefois à l'Espagne -inclinaient à se détacher de la Hollande et à se donner à -la puissance prépondérante, comme seule capable de -les protéger contre les maux de la guerre. Ce court écrit -était intitulé <i>Mauvaise foy ou violences de la France</i>.</p> - -<p>L'auteur de cet écrit (anonyme inconnu) commence -par rappeler les envahissements de Henri IV, de Richelieu, -de Louis XIV, et la politique tour à tour insidieuse -et menaçante de la France, toujours la même sous trois -règnes différents, toujours tendant au même but, l'extension -de sa domination sur toute l'Europe. Il retrace -en termes énergiques l'incendie du Palatinat et toutes -les cruautés commises par les Français dans les guerres -qu'ils ont suscitées. Il inspire ainsi au bas peuple, qui -souffre le plus de la suite de ces désastres, la crainte de -<span class="pagenum"><a id="Page_388"> 388</a></span> -la faim et de la mort. Aux nobles flamands il prédit les -affronts et les humiliations qui les attendent, en renouvelant -le souvenir des indignes traitements qu'ont éprouvés -le prince de Ligne, les comtes de Solre et toute la -noblesse flamande; aux bourgeois des villes il leur retrace -tout ce qu'amèneront de désastreux pour leur bonheur -domestique les mœurs corrompues, les modes, le -luxe, les usages et les habitudes licencieuses des Français, -leur soumission aveugle à un despote, la servilité dont -ils se glorifient, leur haine et leur mépris pour les -républicains. Il n'oublie pas de leur tracer le tableau -des avanies, des humiliations, des affronts que seront -forcés d'endurer leurs respectables magistrats. Enfin il -met toutes les classes en garde contre les déceptions du -vainqueur, qui promet de respecter leurs franchises et -qui les violera toutes; et il les exhorte à n'espérer d'autres -remèdes à tant de maux que dans leur courage et -dans une opiniâtre résistance.</p> - -<p>«Mais, quand même, dit-il, notre lâcheté serait si -grande, la foi si légère et l'honneur si faible que de céder -à la force ou aux charmes de la France, nos chaînes -n'en seraient pas plus douces, la liberté plus réelle.</p> - -<p>«Si la Guyenne, le Languedoc, la Bourgogne, la Bretagne, -le Roussillon et les autres provinces ne sont plus -que l'ombre de ce qu'elles étaient sous leurs princes -légitimes, doit-on s'attendre à un repos qu'elles ne goûtent -pas sous la pesanteur des tailles, des gabelles et de -la violence des édits qui les accablent? Et les nôtres -n'étant ni héréditaires ni dévolues par un droit fixe à la -couronne, mais trahies ou volontairement esclaves, seront-elles -traitées moins inhumainement et avec plus de -modération?</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_389"> 389</a></span> -«Est-ce que l'on dormira ou que l'on fera un voyage -en repos? Les modes de France et ses libertés odieuses -ne nous seront-elles pas aussi offensantes? Leurs visites -à sept heures le matin, à minuit et aux ruelles d'un lit -et d'une misérable chambre que l'on se réserve, ne nous -feront-elles pas souvenir de notre tranquillité passée, -par la tyrannie présente? Le faible sexe sera exposé à -ces outrages; le nôtre aura les siens, et n'en sera plus -exempt.</p> - -<p>«Outre la honte de voir ces choses, on nous défendra -jusqu'au murmure et le moindre soupir.</p> - -<p>«On voudra encore les sommes entières que l'on demande; -et si quelqu'un du magistrat en murmure ou en -dit son sentiment avec la liberté passée, on lui donnera -cent coups, ou un pied en l'endroit même que l'on fit à -un bourgmestre en Hollande, en lui disant piquamment: -<i>Allez, monsieur le souverain</i>!</p> - -<p>«La cour de France tient que rien ne lui est défendu -pour troubler ses voisins et y semer la division; qu'il y a -une secrète joie à y faire le crime; que la pitié est une -vertu lâche, et qu'elle renverse les couronnes; que la -crainte en est l'appui, l'impiété la base; que les armes -inspirent le respect; que les troupes sont d'admirables -avocats, et qu'elles plaident bien une cause; que le droit -canon l'emporte sur les autres droits; que la justice est -un fantôme, la raison une chimère, le mariage une bagatelle, -la foi des traités une illusion, ses paix une amorce, -ses congrès pleins de mystères, ses conférences insidieuses, -et ses serments un piége agréable, le jouet des enfants, -l'appât d'un dupe et le charme d'un innocent<a id="FNanchor_878" href="#Footnote_878" class="fnanchor"> [878]</a>.»</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_390"> 390</a></span> -Ces violentes diatribes ne produisirent leur effet que -plus tard. Au temps où nous sommes parvenu, il restait -devant le grand roi vingt années encore de prospérité, -de grandeur et de gloire. Nous n'aurons donc point à nous -occuper, dans la suite de ces Mémoires (si nous leur -donnons une suite), des désastres et des malheurs qui -assombrirent le dernier période de ce long règne. Le -commencement de ce période coïncide, plus ou moins -exactement, avec l'époque de la mort de Racine, de la -Fontaine, de madame de Sévigné et aussi avec la naissance -de Voltaire, auquel Ninon tendit la main pour l'introduire -(l'écolier merveilleux!) dans ce nouveau siècle, -dont elle ne vit pas finir le premier lustre<a id="FNanchor_879" href="#Footnote_879" class="fnanchor"> [879]</a>.</p> - -<div class="topspace eclair"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_391"> 391</a></span></p> -<p><span class="xlarge">NOTES</span><br /> -<span class="xs">ET</span><br /> -<span class="large">ÉCLAIRCISSEMENTS.</span></p> -</div> - -<p><span class="pagenumh"><a id="Page_392"> 392</a></span></p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_393"> 393</a></span></p> -<p class="extra"><span class="xxlarge">NOTES</span><br /> -<span class="xs">ET</span><br /> -<span class="xlarge">ÉCLAIRCISSEMENTS.</span><br /> -<span class="large">CHAPITRE PREMIER.</span></p> -</div> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_5">5</a>, ligne 20: Et composait pour elle des madrigaux.</p> - -<p>Tous paraissent avoir été des impromptus. Gayot de Pitaval, dans -sa <i>Bibliothèque des gens du monde</i>, 1726, in-12, t. I, p. 87, a cité -de Montreuil un impromptu qui vaut mieux qu'aucun de ceux que -renferme son recueil. Il est remarquable qu'aucune des femmes auxquelles -s'adressent les madrigaux de Montreuil n'a été nommée par -lui, si ce n'est <i>madame de Sévigny</i>. Son nom se trouve deux fois -dans ce recueil: la première, en tête du madrigal sur le jeu de colin-maillard, -que j'ai cité; la seconde, dans une chanson qu'il composa -pour elle et qui se termine ainsi:</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p>Sévigny, vos yeux pleins d'attraits</p> -<p class="i1"> Éblouissent les nôtres;</p> -<p>Et quand l'amour n'a plus de traits</p> -<p class="i1"> Il emprunte les vôtres.</p> -</div></div> - -<p>(<i>Œuvres de M. de Montreuil</i>, p. 339, édit. 1671; p. 500 de l'édit. -de 1666.) Un portrait bien gravé de M. de Montreuil accompagne -cette première édition, la plus belle. Voyez, pour d'autres éclaircissements -sur Matthieu de Montreuil, la note de la page 398, 2<sup>e</sup> partie -de ces <i>Mémoires</i>, 2<sup>e</sup> édit.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_6">6</a>, ligne 19: Il vint <i>incognito</i> à Paris.</p> - -<p>Le curieux récit du voyage clandestin que, d'après les instigations -de <span class="smallc">Madame</span>, l'évêque de Valence fit à Paris, où il fut arrêté comme -faux-monnayeur, se trouve dans les Mémoires de Choisy; mais ce -qu'on y lit sur le voyage de ce prélat en Hollande, pour la suppression -<span class="pagenum"><a id="Page_394"> 394</a></span> -du libelle des <i>Amours de</i> <span class="smallc">Madame</span>, n'est pas exact, ainsi que le -passage suivant des <i>Mémoires</i> inédits de Daniel de Cosnac, que Barbier -a transcrit dans son <i>Dictionnaire des anonymes et des pseudonymes</i>, -1823, in-8<sup>o</sup>, p. 61 (art. 7294, <i>Histoire amoureuse des -Gaules</i>):</p> - -<p>«L'assemblée du clergé finie, je pris la résolution d'aller dans mon -diocèse. Avant mon départ, j'appris par madame de Chaumont qu'un -manuscrit portant pour titre: <i>Amours de</i> <span class="smallc">Madame</span> et <i>du comte de -Guiche</i>, courait par Paris, et s'imprimait en Hollande. <span class="smallc">Madame</span> appréhendait -que ce livre, plein de faussetés et de médisances grossières, -ne vînt à la connaissance de <span class="smallc">Monsieur</span> par quelque maladroit ou -malintentionné, qui peut-être envenimerait la chose. Elle m'en écrivit -pour lui en porter la nouvelle; elle en écrivit à madame de Chaumont, -qui était à Saint-Cloud, et moi à Paris. J'allai à Fontainebleau, -d'abord près <span class="smallc">Madame</span>, pour m'instruire plus amplement. Elle me dit -que Boisfranc (trésorier du prince) avait déjà dit la chose à <span class="smallc">Monsieur</span> -sans sa participation; mais ce qui la touchait davantage, c'était -l'impression du manuscrit. J'envoyai exprès en Hollande un homme -intelligent, ce fut M. Patin (Charles Patin, le fils de celui dont on -a des lettres), pour s'informer de tous les libraires entre les mains -de qui ce libelle était. Il s'acquitta si bien de sa commission, qu'il fit -faire par les états généraux défense de l'imprimer, retira les dix-huit -cents exemplaires déjà tirés, et me les apporta à Paris; et il les remit, -par ordre de <span class="smallc">Monsieur</span>, entre les mains de Merille. Cette affaire -me coûta beaucoup de peine et d'argent; mais, bien loin d'y avoir -regret, je m'en tins trop payé par le gré que <span class="smallc">Madame</span> m'en témoigna.»</p> - -<p>Je crois que la première édition du libelle dont parle Cosnac, ou -de celui qu'on a substitué à l'ouvrage original, s'il a été anéanti, -est dans le recueil intitulé <i>Histoires galantes</i>; Cologne, chez Jean -le Blanc (sans date, p. 424 à 464). Ce morceau est intitulé <i>Histoire galante -de M... et du comte de G...</i> On trouve la même histoire dans -quelques exemplaires de l'<i>Histoire amoureuse des Gaules</i>; Liége, -édit. Elzevir, 250 pages. L'ouvrage, dans cette édition, est intitulé -tout crument <i>Histoire galante de M. le comte de Guiche et de</i> -<span class="smallc">Madame</span> (58 pages). Une autre édition de ce libelle est dans le recueil -intitulé <i>les Dames illustres de notre siècle</i>; Cologne, chez -Jean le Blanc, in-12, 1682, p. 135-176. Ce morceau a pour titre <i>la -Princesse, ou les amours de</i> <span class="smallc">Madame</span>. On le trouve encore, avec le -<span class="pagenum"><a id="Page_395"> 395</a></span> -même titre, dans le recueil intitulé <i>Histoire amoureuse des Gaules, -de M. de Bussy</i>, 1754, 5 vol. in-12, p. 130-186. Tout ces petits -faits, curieux à connaître, seront probablement éclaircis par la publication -des Mémoires de Daniel de Cosnac, que la Société de l'Histoire -de France a livrés à l'impression, et qui s'exécutent d'après -deux manuscrits émanés de la plume de l'évêque de Valence, mais -différents en bien des points, parce qu'ils ont été écrits à deux époques -distinctes de la vie de l'auteur.—Le premier volume des -Mémoires de Cosnac est déjà imprimé, et le second est annoncé -comme très-avancé, dans les derniers bulletins de la Société de -l'Histoire de France.</p> - -<p class="pnote">Pages <a href="#Page_7">7</a> et <a href="#Page_8">8</a>, lignes dernière et première: Deux petits poëmes de -Marigny, l'un intitulé <i>l'Enterrement</i>, l'autre <i>le Pain bénit</i>.</p> - -<p>Ce dernier poëme est une satire contre les marguilliers de la paroisse -de Saint-Paul, sur laquelle demeurait madame de Sévigné. -Il a été imprimé avec ce titre: <i>le Pain bénit</i>, par l'abbé de Marigny, -in-12 (23 pages); une autre édition a été donnée par Mercier de -Compiègne, intitulée <i>le Pain béni</i> (<i>sic</i>), <i>avec autres pièces fugitives</i>, -par Marigny; nouvelle édition, revue, corrigée et augmentée d'une notice -sur la vie et les ouvrages de l'auteur; Paris, Mercier, 1795, in-18 -(82 pages). La notice est inepte; mais ce petit volume est curieux par -la satire contre Marigny, pages 35 et 42, qui est du temps.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_8">8</a>, avant-dernière ligne: Il y a eu ici de plus honnêtes gens -que moi.</p> - -<p>Ne donnez pas à ces mots le sens qu'ils ont aujourd'hui. Dans la -langue du siècle de Louis XIV, cela veut dire: Il y a eu de plus -hauts personnages que moi, des gens plus considérables.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_9">9</a>, ligne 14: Ce fut le 15 août 1664 que madame de Sévigné -alla à Tancourt.</p> - -<p>Les souvenirs de ce voyage que fit madame de Sévigné éclairent -beaucoup l'histoire de Bussy et de son libelle. C'est dans cette année -1664 que Bussy se montra le plus occupé de ses intrigues amoureuses -et qu'il composa le plus de vers galants. C'est alors qu'il lut, dans -les sociétés où se trouvaient M. et madame de Montausier, ses -<span class="pagenum"><a id="Page_396"> 396</a></span> -<i>Maximes d'amour, questions, sentiments et préceptes</i>, transcrits -en entier dans ses <i>Mémoires</i> (t. II, p. 22 à 281); c'est alors qu'il se -montre si satisfait de sa fortune et de madame de Monglat, sa maîtresse -(p. 285), et qu'il se plaint d'avoir dans M. de Monglat un mari -trop commode. Il rime à ce sujet une imitation de l'élégie 19, liv. II, -des <i>Amours d'Ovide</i>, et dit (p. 286):</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p>Si tu n'es pas jaloux pour ton propre intérêt,</p> -<p class="i2"> Sois-le du moins, s'il te plaît,</p> -<p class="i2"> Pour augmenter dans mon âme</p> -<p class="i2"> L'amour que j'ai pour ta femme.</p> -<p class="i2"> Je tiens qu'il faut être brutal</p> -<p class="i2"> Pour pouvoir aimer sans rival.</p> -<p>A nous autres amants il faut de l'espérance.</p> -<p class="i1"> Mais sans la crainte on n'a pas de plaisir;</p> -<p class="i2"> On languit dans trop d'assurance,</p> -<p class="i2"> Et les difficultés irritent les désirs.</p> -</div></div> - -<p>A la fin d'août 1664, madame de Sévigné nous fait voir Bussy dans -sa terre de Forléans, lui rendant de fréquentes visites, et évidemment -tâchant de la séduire et de réveiller les langueurs que lui faisait -éprouver son amour satisfait. Lui-même parle d'un voyage (p. 292) -qu'il fit en Bourgogne, pour se consoler d'une affaire qu'on lui avait -faite auprès du roi. Cette affaire était son <i>Histoire amoureuse des -Gaules</i>, dont le secret commençait à percer, mais qui ne contenait -encore ni le morceau sur madame de Sévigné ni celui sur madame -de Monglat, dont il se croyait alors exclusivement aimé. De Forléans, -il se rendit à son château de Bussy, où une lettre, en date du 10 octobre -1664, au duc de Saint-Aignan, nous le montre installé. (<i>Mémoires</i>, -t. II, p. 293.) C'est alors qu'il apprit que madame de Monglat -lui était infidèle, et que, dépité de cette trahison et d'avoir -échoué près de sa cousine, il se retourna vers madame de la Baume. -Pour lui rendre plus agréable la lecture du manuscrit qu'il lui prêtait -et lui prouver qu'il lui sacrifiait madame de Monglat, il ajouta le -portrait de Bélise (de madame de Monglat). Madame de la Baume le -trahit; et, sur une copie qu'elle laissa ou qu'elle fit faire, le libelle fut -imprimé en Hollande. Dès lors se forma l'orage qui devait pour toujours -mettre obstacle à l'ambition de Bussy. Ce ne fut cependant qu'après le -mois de mars 1665 qu'il éclata. Bussy fut alors reçu de l'Académie -<span class="pagenum"><a id="Page_397"> 397</a></span> -française, et y prononça son discours d'admission. Par un billet qu'il -adressa au duc de Saint-Aignan le 12 avril 1662, on voit que déjà le -scandaleux libelle était connu de plusieurs personnes.—Le roi fit -arrêter Bussy le vendredi 17 avril; et on le conduisit aussitôt à la -Bastille, afin de le dérober aux recherches du prince de Condé, qui -voulait se porter contre lui aux dernières violences.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_9">9</a>, ligne 17: Bussy, qui était alors à sa terre de Forléans, vint -la voir.—Page <a href="#Page_10">10</a>, ligne 5: Bourbilly.—Page <a href="#Page_11">11</a>, ligne 5: -Époisses.</p> - -<p><span class="smallc">Forléans</span> était une seigneurie indépendante; c'était une annexe de -la paroisse de Montberteau, du diocèse de Langres, du doyenné de -Moutier-Saint-Jean, du bailliage et recette de Semur-en-Auxois. Ses -dépendances étaient Forléans, Plumeron et Villers-Fremoy, et encore -la justice à Changy (<span class="smallc">Garnau</span>, <i>Description du gouvernement de -Bourgogne</i>, 2<sup>e</sup> édit., p. 486, 487) Du temps d'Expilly, en 1764, on ne -comptait à Forléans que vingt-huit feux, à peu près cent vingt habitants; -en 1837, il y avait deux cent dix-huit habitants.</p> - -<p><span class="smallc">Bourbilly</span>, village de la paroisse de Vic-de-Chassenay, du bailliage -de Semur-en-Auxois (<span class="smallc">Garnau</span>, <i>Description</i>, etc., p. 374). En 1762, -d'Expilly, dans son <i>Dictionnaire</i>, tome I, page 729, donnait vingt-deux -feux (cent vingt habitants) à Bourbilly.</p> - -<p><span class="smallc">Époisses</span>, bourg de l'Auxois, était église collégiale et paroisse du -diocèse de Langres, du doyenné de Moutier-Saint-Jean, marquisat du -bailliage de Semur. Ses dépendances étaient Époisses, Coromble, -Torcy-lez-Époisses, Vic-de-Chassonay, Toutry (paroisse), Époissette, -Menetoy, Menetreux, Pijailly et Pontigny; et, dans le bailliage -d'Avallon, Atic-sous-Montréal, Saint-Magnence et presque tout -Cussy-les-Forges, communauté de la recette de Semur. La vallée -d'Époisses produit du froment, et passe pour une des plus fertiles de -la province (<span class="smallc">Garnau</span>, <i>Description de la Bourgogne</i>, page 478, -2<sup>e</sup> édition). D'Expilly (<i>Dictionnaire des Gaules et de la France</i>, -tome II, page 753) dit que, de son temps (en 1762), Époisses comptait -quatre-vingt-quinze feux, ce qui suppose quatre cent soixante-quinze -habitants. Le <i>Dictionnaire de la poste aux lettres</i> (in-folio, -tome II, page 264) porte ce nombre à mille six, en 1837.</p> - -<p class="pnote"><span class="pagenum"><a id="Page_398"> 398</a></span> -Page <a href="#Page_11">11</a>, avant-dernière ligne: Par son premier mariage avec -Françoise de la Grange.</p> - -<p>D'Expilly, dans son <i>Dictionnaire des Gaules et de la France</i>, -tome I, page 753, a donné la généalogie de Françoise de la Grange, -marquise d'Époisses. Elle fut mariée à Guillaume de Pechpeirou de -Comenge, comte de Guitaut, qu'elle fit son héritier, et qui devint -ainsi marquis d'Époisses. Elle mourut sans postérité le 31 mars 1661. -Le comte de Guitaud se remaria en 1669 à Élisabeth-Antoinette de -Verthamont, d'où descendent en ligne directe les Guitaud que nous -avons vus de nos jours possesseurs d'Époisses. C'est de cette dernière -marquise d'Époisses que parle madame de Sévigné.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_13">13</a>, ligne 3: En faisant de grands embellissements à son magnifique -château d'Époisses.</p> - -<p>Ce château subsiste toujours en entier et dans toute sa splendeur, -avec ses belles fortifications, ses vieux tilleuls, ses beaux ombrages, -ses archives, ses portraits, ses nobles souvenirs; il a été la propriété -des comtes de Montbard et des princes de Montagu, première race des -ducs de Bourgogne. Un descendant direct du comte de Guitaud le -possède, bonheur rare dans les temps où nous vivons. C'est à la -plume du comte Athanase de Guitaud qu'est due la notice qui accompagne -la planche gravée de la vue d'Époisses qui se trouve dans -le <i>Voyage pittoresque de Bourgogne</i>, publié à Dijon en 1823 (t. I, -feuille 9, n<sup>o</sup> 3). Les fortifications de ce château avaient été construites -par le prince de Condé (le grand Condé). Ce prince en avait eu la -jouissance en vertu d'un fidéicommis du comte de Guitaud d'Époisses. -Condé avait fait de ce château une petite place forte, et n'avait -consenti à le rendre qu'après le remboursement de toutes les dépenses -que les fortifications avaient coûtées. (Voyez la <i>Lettre de</i> <span class="smallc">Bussy</span> <i>au -comte de Coligny</i>, en date du 18 mai 1667, dans les <i>Mémoires du -comte</i> <span class="smallc">de Coligny-Saligny</span>, 1841, in-8<sup>o</sup>, p. 127.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_14">14</a>, ligne 26: Dur et égoïste dans son intérieur.</p> - -<p>Lord Mahon, dans son Histoire du prince de Condé, en parlant -du duel entre Rabutin, page de la princesse de Condé, et son valet -de chambre, a soutenu que la princesse était parfaitement pure de -<span class="pagenum"><a id="Page_399"> 399</a></span> -toute intrigue galante; qu'elle avait été calomniée et horriblement -persécutée par son époux et par son fils. Nous avons combattu cette -opinion et fait observer que, quels que soient les vices dont Condé et -son fils pouvaient être accusés, on ne saurait leur supposer un -cœur assez corrompu, assez pervers pour calomnier et tenir en captivité -une femme digne d'estime, une épouse et une mère. Lord -Mahon, dans une lettre qu'il m'a fait l'honneur de m'écrire, m'a cité -Saint-Simon, qui dit que M. le Duc était envers la princesse un fils -dénaturé. Cette observation est exacte, et il est très-vrai que le duc -d'Enghien, au lieu de protéger sa mère contre la colère de son -époux, fut aussi d'avis que l'on employât des mesures de rigueur. -C'est que, connaissant l'abandon où son père laissait la princesse et -les moyens qu'elle prenait pour se consoler, il avait plus d'intérêt -que Condé même à prévenir les suites de cet isolement.—Dans ce -siècle si corrompu sous le rapport des mœurs, les femmes vertueuses -inspiraient un grand respect: Louis XIV donnait l'exemple de ce respect -et de ces égards envers la reine. L'opinion publique, à défaut -du souverain, eût protégé la femme du grand Condé contre un acte -aussi odieux d'autorité maritale s'il n'avait été motivé par la nécessité -de pourvoir à l'honneur et aux intérêts de la maison du -premier prince du sang. Nous avons trouvé dans la recueil manuscrit -des vaudevilles et autres pièces de vers (édition de Maurepas) qui est -à la Bibliothèque nationale (vol. III, p. 397, sous la date de 1671) -une fable allégorique, intitulée <i>le Lion, le Chat et le Chien</i>. Cette -fable, fort longue et assez bien versifiée, est relative à l'aventure -de Rabutin et du valet de chambre. Les notes disent que le prince -de Condé avait épousé malgré lui Claire-Clémence de Maillé-Brezé; -que, quoiqu'elle fût fort belle, il la négligea; qu'elle vivait fort retirée, -paraissant rarement à la cour. Presque toujours dans ses appartements, -elle sortait peu; mais on remarque qu'elle vivait trop -familièrement avec ses gens. Dans l'affaire du page et du valet de -chambre, il est dit qu'elle fut blessée d'un coup d'épée; que le valet -de chambre, condamné aux galères, mourut en s'y rendant, et qu'on -soupçonna qu'il avait été empoisonné.</p> - -<p class="echap"><span class="pagenum"><a id="Page_400"> 400</a></span> -CHAPITRE II.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_19">19</a>, ligne 14: Mademoiselle de Meri.</p> - -<p>Il résulte des lettres de madame de Sévigné que cette parente, qui -ne se maria jamais, était vaporeuse, maladive, ennuyeuse, mais -bonne, sensible et serviable. Dans le recueil des chansons choisies de -Coulanges, 2<sup>e</sup> édit., t. I, p. 280, il s'en trouve une intitulée <i>Pour -mademoiselle de Meri, conduisant jusqu'à Fontainebleau madame -de Coulanges, qui s'en allait en Berry</i>.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_20">20</a>, ligne 11: Il aimait à se rappeler surtout les heures de -gaieté folâtre; et note <a href="#FNanchor_53">53</a>, renvoyant à la seconde partie de ces <i>Mémoires</i>, -p. 102 de la 2<sup>e</sup> édit.—Dans la lettre de madame de Sévigné -il est dit: «Vous aviez huit ans.»</p> - -<p>C'était donc en 1757, l'année même où l'abbé Arnauld vit aussi -madame de Sévigné chez son oncle Renaud de Sévigné, et où il fut -si frappé de la beauté de ses enfants. (<i>Mémoires de l'abbé</i> <span class="smallc">Arnauld</span>, -t. XXXIV, p. 314 de la collection de Petitot; t. XI, p. 62 et 63 de -l'édition de 1736.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_24">24</a>, ligne 8: Frère de cette marquise de Montfuron.</p> - -<p>Le chevalier Perrin, dans ses Notes sur les lettres de madame de -Sévigné, nous apprend que Marie Pontever de Buous, marquise de -Montfuron, était femme de Léon de Valbelle et cousine germaine -de M. de Grignan. Elle était belle-sœur de l'évêque d'Alet. Le <i>Mercure -galant</i> (juin 1679, p. 297), en annonçant la mort de la marquise -de Montfuron, ajoute qu'elle était d'une beauté surprenante.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_26">26</a>, ligne première: Traité secret conclu avec Charles II -en 1670.</p> - -<p>Ce traité, dont l'original est en la possession de lord Clifford, qui -l'a communiqué au docteur Lingard, a été signé, de la part de la -France, par Charles Colbert de Croissy, fils du ministre Colbert; par -Arlington, Thomas Arundell, T. Clifford et R. Billing; il a été conclu -à Douvres le 22 mai 1670.—Les négociations avaient commencé -le 31 octobre 1669. Charles II s'y intitule <i>le Défenseur de la foi</i>. Il se -<span class="pagenum"><a id="Page_401"> 401</a></span> -dit convaincu de la vérité de la religion catholique, et promet qu'aussitôt -qu'il le pourra il se réconciliera avec l'Église romaine.</p> - -<p class="echap">CHAPITRE III.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_37">37</a>, ligne 17: Les princes d'Orange ne reconnaissaient pas cette -prétention.</p> - -<p>Après le décès de Guillaume III, roi d'Angleterre, mort sans enfants -le 19 mars 1702, le prince de Nassau-Dietz et Frédéric 1<sup>er</sup>, roi de -Prusse, prétendirent avoir des droits à l'héritage de la principauté -d'Orange. Louis XIV se posa entre les deux contendants, et prétendit -que la principauté d'Orange était dévolue à la couronne de France, -faute d'hoir mâle. A cette occasion, il fit valoir l'hommage qui -avait été rendu à Louis XI en 1475. Le prince de Conti revendiqua -la principauté d'Orange en qualité d'héritier de la maison de Longueville, -les ducs de cette maison se prétendant héritiers du dernier -des princes de Châlons ou de la dynastie des princes d'Orange, qui -avait précédé celle de Nassau. Sur ces contestations, il intervint un -arrêt du parlement de Paris qui adjugea le domaine utile d'Orange -au prince de Conti et le haut domaine au roi de France, ce qui fut -confirmé par l'article 10 du traité d'Utrecht. Le 13 décembre 1714 -un arrêt du conseil unit la principauté d'Orange au Dauphiné.</p> - -<p>Page <a href="#Page_41">41</a>, ligne 17: De Guilleragues.</p> - -<p>Il est mort ambassadeur à Constantinople en 1679. Il se nommait -Girardin, et était probablement parent des Girardin d'Ermenonville; -car, dans un été que nous avons passé en 1810 dans ce beau lieu, -nous avons vu la copie de la correspondance de cet ambassadeur, -reliée en huit ou dix gros volumes in-fol., et reléguée dans une mansarde -de la petite maison qui était devant le château.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_44">44</a>, ligne 13: Lausier, son capitaine des gardes.</p> - -<p>Il est probable que c'est le même dont madame de Sévigné raconte -la mort subite dans le passage cité. Cependant, comme ils étaient -plusieurs frères, les uns morts et les autres vivants en janvier 1690, -cela n'est pas certain.</p> - -<p class="pnote"><span class="pagenum"><a id="Page_402"> 402</a></span> -Page <a href="#Page_48">48</a>, ligne 2: Procureur du pays-joint.</p> - -<p>Telle est l'expression consacrée et toujours la même pour cette -charge. Dans les <i>Extraits de délibérations</i> imprimés, souvent on -rencontre, par abréviation, <i>procureur-joint</i>. Madame de Sévigné au -contraire se sert constamment du terme de syndic, parce que les procureurs, -dans les assemblées des villes et communautés, remplissaient -les mêmes fonctions que les syndics dans les assemblées des états, -remplacées ensuite par les assemblées des communautés.—Dans la -4<sup>e</sup> partie de ces Mémoires, au lieu de procureur-joint, les imprimeurs -ont mis <i>procureur-adjoint</i>. C'est une faute.</p> - -<p class="pnote">Page<a href="#Page_55"> 55</a>, ligne 21: Que vous nommez M. de Buous.</p> - -<p>Marguerite de Grignan, fille de Louis-François, comte de Grignan, -sénéchal de Valentinois, qui mourut en 1620, épousa Ange de Pontever -de Buous; et c'est par cette alliance que les de Buous étaient -parents des Grignan. Le marquis de Buous était probablement frère -ou proche parent du chevalier de Buous, capitaine de vaisseau en -1656. (Voir à la page 14 des <i>Mémoires du marquis de Villette</i>, publiés -en 1841, une note du savant archiviste de la marine, M. Jal, -sur le chevalier de Buous et le marquis de Martel, mentionné si souvent -dans les lettres de madame de Sévigné.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_56">56</a>, ligne 17: Deux députés, Saint-Aubin Treslon et Des Clos de -Sauvage.</p> - -<p>A la page 381 du <i>Recueil de la tenue des états de Bretagne</i>, -mss. Bibl. nat. (Bl.-Mant.), n<sup>o</sup> 75, dans la liste des noms des députés -envoyés à la cour pour porter les remontrances on trouve ces lignes: -«A la place de <span class="smallc">Sévigné</span>, abbé de Geneston, député à la chambre aux -états précédents, décédé, a été nommé messire Louis du Metz, -abbé de Sainte-Croix de Guingamp.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_58">58</a>, ligne 19: D'Harouïs était son ami et son allié.</p> - -<p>D'Harouïs avait épousé Marie Madeleine de Coulanges, cousine germaine -de la marquise de Sévigné; il la perdit le 22 septembre 1662.</p> - -<p class="echap"><span class="pagenum"><a id="Page_403"> 403</a></span> -CHAPITRE IV.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_64">64</a>, ligne 17: Qu'aucune femme ne peut pardonner.</p> - -<p>Voici le passage:</p> - -<p>«Je comprends fort bien que le baiser du roi, à ce que vous me mandez, -n'a été qu'un baiser de pitié; car je tiens le goût de notre maître -trop délicat pour prendre plaisir à baiser la La Baume.» (<i>Mém. de -Coligny-Saligny</i>, 1841, in-8<sup>o</sup>, p. 127.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_65">65</a>, ligne 5 et note <a href="#FNanchor_151">151</a>: La conversation, dit-il, avec madame de -la Morésan et moi.</p> - -<p>Cette madame de la Morésan ou Lamorésan avait la parole rude -et son franc-parler.—Le duc de Lauzun avait été à toute extrémité, et -sa sœur, madame de Nogent, pleurait du danger qu'il avait couru. -Alors madame de la Morésan lui dit en présence de <span class="smallc">Mademoiselle</span>, -plus éprise de Lauzun depuis la rupture de son mariage: «Hélas! -madame, vous fâcherez-vous? Vous auriez été bien heureuse que monsieur -votre frère fût mort d'une mort ordinaire! C'est un homme si -emporté qu'un de ces jours on le trouvera pendu; il est tout propre -à faire quelque folie.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_66">66</a>, ligne 4: Sous une forme qui ne convenait pas à ce -dernier.</p> - -<p>On peut voir la remarquable lettre de Louis XIV que nous citons -en cet endroit. En 1665, Martel était considéré comme un officier -d'une grande capacité, mais peu soumis au duc de Beaufort, qui -avait le commandement en chef de la flotte.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_66">66</a>, ligne 13: Un d'eux citait madame de Grignan.</p> - -<p>C'était le chevalier de Cissé, frère de madame de Martel. Voici -comment madame de Sévigné raconte la chose, à propos des éloges -qu'elle donne toujours à la danse des Bretons.</p> - -<p>«Je vis hier danser des hommes et des femmes fort bien: on ne -danse pas mieux les menuets et les passe-pieds. Justement, comme je -pensais à vous, j'entends derrière moi un homme qui dit assez haut: -<span class="pagenum"><a id="Page_404"> 404</a></span> -«Je n'ai jamais vu si bien danser que madame la comtesse de Grignan.» -Je me tourne, je trouve un visage inconnu; je lui demande -où il avait vu cette madame de Grignan? C'est un chevalier de Cissé, -frère de madame Martel, qui vous a vue à Toulon avec madame de -Sinturion. M. Martel vous donna une fête dans son vaisseau; vous -dansâtes, vous étiez belle comme un ange. Me voilà ravie de trouver -cet homme; mais je voudrais que vous pussiez comprendre l'émotion -que me donna votre nom, qu'on venait me découvrir dans le secret -de mon cœur, lorsque je m'y attendais le moins.» (Lettre du 6 août -1680, t. VII, p. 157, édit. G.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_67">67</a>, ligne 4: La foi de son exil.</p> - -<p>Cet exil se serait plus promptement terminé, si Bussy avait pu empêcher -la publicité toujours croissante de son libelle de l'<i>Histoire -amoureuse des Gaules</i>, par les éditions que l'on en faisait à l'étranger. -Ces éditions se sont multipliées à un point que l'on ne connaissait -pas. J'ai donné les titres de toutes celles que j'avais pu découvrir. -J'en ai depuis rencontré une, intitulée <i>Histoire amoureuse des -Gaules</i>; Liége, 1665, in-12 de 260 pages, avec un feuillet pour la clef, -exactement comme l'édition qui porte le même titre, mais avec la date -de 1666, et les mots <i>nouvelle édition</i>, ce qui fait croire que cette dernière -est celle de 1666 avec un nouveau titre.—Je dois signaler encore -une autre édition dont j'ai un exemplaire en maroquin rouge, -relié par Padeloup, avec les armes du Dauphin, non pas sur le plat -du livre, mais sur le dos. Cette édition a un frontispice gravé avec -une Renommée à la trompette, et cette Renommée porte un étendard -où se trouve le titre: <i>Histoire amoureuse des Gaules</i> (ce frontispice -a été reproduit grossièrement dans l'édition de 1710); point -d'autre frontispice que cette gravure. L'intitulé en tête du texte diffère -du frontispice, et porte: <i>Histoire amoureuse de France</i>, de même -que l'édition avec le frontispice gravé du salon de la Bastille; ce -sont aussi les mêmes caractères elzéviriens, petits. On croirait que -c'est la même édition, à laquelle on a mis des frontispices gravés, si, -après la page 196, on ne voyait que les deux éditions cessent de se -correspondre. On s'aperçoit à cette page que l'édition à la <i>Renommée</i> -est antérieure à celle du <i>salon</i>, parce que le fameux cantique -manque, et qu'il est dans celle du <i>salon</i>. Ainsi l'édition de la <i>Renommée</i> -a deux cent quarante-quatre pages, et ensuite douze pages, -<span class="pagenum"><a id="Page_405"> 405</a></span> -paginées séparément, pour les <i>Maximes d'amour</i> et la lettre à -Saint-Aignan: l'édition au <i>salon</i> a deux cent cinquante-huit pages -qui se suivent.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_76">76</a>, ligne 6: On accuse Bussy d'être l'auteur des chansons, etc.</p> - -<p>Bussy fut prévenu de l'accusation portée contre lui au sujet des -chansons d'Hauterive, son ami. Le marquis d'Hauterive, grand amateur -des beaux-arts et pour lequel, dit M. Gault de Saint-Germain, le -Poussin a exécuté plusieurs tableaux, épousa la fille du duc de Villeroi, -veuve de trois maris. Cette union fut considérée comme une mésalliance -de la part de la femme, très-supérieure à son mari en naissance -et en fortune, mais aussi plus âgée. Bussy ne la désapprouva pas, -parce que d'Hauterive était son ami. «Le secret, dit-il à ce sujet, est -d'être aimable et d'être aimé; et quand cela est on est aussi riche -que Crésus, et noble comme le roi.» D'Hauterive ayant dit à Bussy -que devant l'abbesse de Merreton on l'avait accusé d'être l'auteur -des chansons qui couraient contre les ministres, et que celle-ci l'avait -défendu, Bussy se hâta aussitôt de lui adresser une lettre datée -du 15 mai 1674, dans laquelle on lit ce passage: «Je ne trouve pas -étrange que le misérable qui a fait ces chansons-là les ait mises sous -mon nom, sous lequel toutes calomnies sont crues; mais je suis surpris -qu'il y ait des gens désintéressés assez sots pour croire qu'un -homme de mon âge et du rang que je tiens dans le monde soit capable -de si grandes extravagances.» Conf. <i>Supplément aux Mémoires -et lettres du comte</i> <span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span>, 2<sup>e</sup> part., p. 22;—<span class="smallc">Bussy</span>, -<i>Lettres</i>, t. V, p. 44 et 107.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i>, t. I, p. 284, -édit. G.; t. I, p. 213, édit. M.</p> - -<p class="echap">CHAPITRE V.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_83">83</a>, lignes 2 à 4: Le duc d'York vint, cette année, présenter au -roi de France la princesse de Modène.</p> - -<p><span class="smallc">Mademoiselle</span>, dans ses Mémoires, dit, t. LXIII, p. 369 (1674): -«Lorsque toutes ces propositions furent finies, le roi travailla, et fit -le mariage de la princesse de Modène; elle me parut une grande -créature mélancolique, ni belle ni laide, fort maigre, assez jaune. -J'ai ouï dire qu'elle est à présent fort enjouée et engraissée et qu'elle -est devenue belle.»</p> - -<p class="pnote"><span class="pagenum"><a id="Page_406"> 406</a></span> -Page <a href="#Page_86">86</a>, ligne 4: Ces conjectures sont démenties, selon nous, -par les faits.</p> - -<p>Celle de Voltaire, qui dit que c'était l'aventure de mademoiselle -de Guerchy et que ce fut pour elle qu'Hénault composa son sonnet -de l'Avorton, est doublement erronée, puisque ce sonnet a été imprimé -trois ans avant la mort de cette demoiselle. L'autre conjecture -que ce pourrait bien être madame de Ludres que madame de Sévigné -désigne, parce que le chevalier de Vendôme et Vivonne en étaient alors -amoureux, noue paraît plus vraie; mais non relativement à Louis XIV, -qui certes ne voulait pas de mal à madame de Ludres, comme il l'a -prouvé depuis.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_89">89</a>, ligne 5: La plus jeune et la plus chérie de ses femmes -espagnoles.</p> - -<p>Elle se nommait doña Felippe-Maria-Térésa Abarca. Il est probable, -d'après ces prénoms, qu'elle fut tenue sur les fonts de baptême par -la reine elle-même. Elle figure comme la septième et dernière des femmes -espagnoles dans l'<i>Etat de la France</i> de 1669 et dans celui de -1677. Doña Maria Molina, qui avait prêté les mains à l'intrigue de -Vardes et du comte de Guiche contre la Vallière et qui se trouve -encore comme première femme de chambre espagnole dans le volume -de 1669, fut au nombre des femmes renvoyées; et peut-être est-ce -à cause d'elle et de sa nièce mademoiselle de Ribera que cette mesure -fut prise.—Dans l'<i>État de la France</i> de 1669 il est dit, -p. 377, que Maria-Térésa Abarca est présentement madame de -Visé. Le mari d'Abarca est probablement le musicien dont il est fait -mention dans la lettre de Coulanges à madame de Sévigné (3 février -1669, t. XI, p. 259, édit. G.), et non pas Donneau de Visé, l'auteur du -<i>Mercure galant</i>.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_92">92</a>, ligne 18: Ces enfants moururent peu après leur naissance.</p> - -<p>L'un fut nommé Charles, et naquit le 19 septembre 1663; l'autre, -nommé Philippe, naquit le 19 janvier 1665.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_93">93</a>, lignes 4 et 5: Érigea pour elle et pour sa mère la terre -de Vaujour et la baronnie de Saint-Christophe.</p> - -<p>C'est au sujet de ce don fait à la Vallière après la naissance du -<span class="pagenum"><a id="Page_407"> 407</a></span> -comte de Vermandois qu'un de ces écrivains qui transforma en roman -les amours de Louis XIV et des personnages de sa cour écrivit -cette lettre de madame de la Vallière à madame de Montausier que -M. Matter a publiée, d'après une copie du temps, dans ses <i>Lettres et -pièces rares ou inédites</i>, 1836, in-8<sup>o</sup>, p. 320-326. Cette lettre est -datée du 24 mai 1667, et les lettres patentes pour l'érection de la terre -de Vaujour en duché-pairie furent enregistrées le 13 mai 1667. Dans -une note inscrite à la copie de cette même lettre, on suppose maladroitement -que la réponse de madame de Montausier, à qui la lettre -était adressée, fut faite le même jour. Le paraphe de la Reynie du -21 novembre 1670, s'il est sincère, donnerait lieu de croire que cette -lettre faisait partie des pièces saisies par la police chez quelque libelliste. -La Vallière se gardait bien d'écrire à des tiers, et surtout à madame -de Montausier, sur les suites probables de ses amours avec -Louis XIV; encore moins aurait-elle pu parler du projet imaginaire -de son mariage avec le marquis de Vardes, ce qui décèle dans la fabrication -de cette lettre un écrivain peu instruit des choses de la cour -à cette époque.</p> - -<p>Quoique M. de Bausset ait souvent cité les lettres de la Vallière -publiées par l'abbé Lequeux (<i>Lettres de madame la duchesse de la -Vallière, avec un abrégé de la vie de cette pénitente</i>, 1747, in-12), -je crois peu à leur authenticité. Plusieurs ont été certainement fabriquées, -et peut-être sont-elles toutes de l'invention de l'abbé Lequeux, -qui en est, dit-on, l'éditeur anonyme. A quel homme bien instruit -des choses et des personnes de ce temps persuadera-t-on que la -Vallière a pu écrire la lettre 14, p. 17, et bien d'autres qu'il serait facile -de citer?</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_94">94</a>, ligne 13: Montespan, à peine relevée de sa dernière couche, -ne pouvant danser, etc.</p> - -<p>Il est probable que mademoiselle de Nantes fut légitimée peu après -son baptême: nous savons que ce fut en décembre, et madame de -Sévigné nous apprend (lettre du 8 janvier 1674) que les bals de Saint-Germain -commencèrent dès les premiers jours de janvier.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_97">97</a>, ligne 18: Louis XIV était incapable de faire souffrir à celle -qu'il avait tant aimée, etc.</p> - -<p>Il ne faut pas croire, par ce que dit madame Élisabeth de Bavière -<span class="pagenum"><a id="Page_408"> 408</a></span> -dans ses lettres, dont les fragments ont été intitulés <i>Mémoires</i>, que -Louis XIV ait insulté à la douleur de la Vallière (voyez p. 55, édit. -1832, in-8<sup>o</sup>). Il était incapable d'aussi ignobles procédés. Ces Mémoires -n'ont rien d'authentique. On sait que ce sont des extraits des huit -cents lettres de cette princesse qui se sont trouvées dans la succession -de la duchesse de Brunswick, morte en 1767, et écrites par la -duchesse d'Orléans à la princesse Wilhelmine-Charlotte de Galles et -au duc Antoine-Ulrich de Brunswick. Élisabeth-Charlotte, princesse -Palatine, resta toujours Allemande à la cour de France, et accueillit -sans discernement les bruits les plus vulgaires et les plus désavantageux -sur les personnes qui s'y trouvaient. Cependant ces extraits -de lettres contiennent des détails très-curieux; mais il faut les lire avec -défiance; et, pour les écrivains qui manquent de critique, ils sont -une mauvaise source pour l'histoire.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_103">103</a>, lignes 15 et 16: Elle obtint... que la marquise de la Vallière -fût mise dans le nombre des nouvelles dames d'honneur.</p> - -<p>Louis XIV, dans la lettre citée (au camp devant Besançon, le -23 mai 1674), refusa à la reine de Portugal une demande semblable en -ces termes: «Toutes les places des dames établies auprès de la reine -furent remplacées par le dernier choix, et c'est un nombre fixe qu'on -a résolu de ne point passer. Il n'est pas besoin de dire à V. M. que -celle qui fut depuis accordée à ma cousine la duchesse de la Vallière -ne fait pas conséquence: elle juge assez qu'une conjoncture comme -celle de sa retraite ne permettait pas de lui refuser cette consolation.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_105">105</a>, ligne 12: Le troisième dimanche de la Pentecôte.</p> - -<p>Ce troisième dimanche, jour de la parabole du bon pasteur, était, -en 1674, le 3 juin, et non le 2, comme le dit l'abbé Lequeux dans son -<i>Histoire de madame de la Vallière</i>, p. 54. La date du 9 juin, donnée -par M. de Bausset, <i>Histoire de Bossuet</i>, t. II, p. 36, est encore -plus fautive.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_106">106</a>, ligne 3: Les regrets qu'elle éprouvait de ne s'être point -trouvée, etc.</p> - -<p>La lettre de madame de Sévigné, datée du mercredi 5 juin 1674, -a été commencée le mardi 4; car elle dit: «La Vallière fit hier sa -<span class="pagenum"><a id="Page_409"> 409</a></span> -profession de foi.» Cette date est parfaitement d'accord avec celle -que donne l'abbé Lequeux, <i>Histoire de la Vallière</i>, p. 59, où il est -dit qu'elle fit profession le lundi de la Pentecôte, 3 juin; ce qui est -exact pour l'année 1675. M. de Bausset se trompe quand il dit que -ce fut le 26 juin 1675. Le 26 juin 1675 était un mercredi, et ne correspond -à rien. (Voyez <i>Histoire de Bossuet</i>, liv. V, édit. in-12, t. II, -p. 36 de la 4<sup>e</sup> édition, revue et corrigée.)</p> - -<p>Cela d'ailleurs ne peut être douteux d'après ce qu'on lit dans la -lettre d'une des religieuses compagnes de la Vallière, dont je parlerai -dans la note suivante: «Elle vit arriver avec joie le temps de sa profession; -elle la fit au chapitre, selon notre usage, le troisième de juin -1675. La reine honora cette cérémonie de sa présence: le concours -du monde fut encore plus grand que le jour qu'elle avait pris l'habit.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_110">110</a>, ligne 20: C'est dans son cloître, au pied des autels, que -la Vallière a préparé, etc.</p> - -<p>La vie de la Vallière comme religieuse fut racontée, le jour même -de son décès (6 juin 1710), dans une lettre de ses compagnes, nommée -Magdeleine du Saint-Esprit. Cette lettre fut adressée à la supérieure -des Carmélites, ensuite imprimée et envoyée à toutes les supérieures -de l'ordre en juillet 1710. Madame de la Vallière avait écrit des <i>Réflexions -sur la miséricorde de Dieu, par une dame pénitente</i>. -Elles furent publiées sous le voile de l'anonyme, et à son insu (Paris, -Dezallier, 1685, in-12 de 139 pages). Une nouvelle édition augmentée -fut donnée en 1726 (Paris, Christophe David, in-12 de 240 pages). -L'augmentation consiste en quelques prières tirées de l'Écriture sainte -et un <i>Récit abrégé de la sainte mort et de la vie pénitente de madame -la duchesse de la Vallière</i>. Ce récit est un plagiat: l'auteur a -transcrit la lettre de la sœur Magdeleine du Saint-Esprit, dont il a -gâté la touchante et sublime simplicité par des phrases de prédicateur. -Cette lettre, devenue rare, a été réimprimée dans l'<i>Annuaire de l'Aube</i> -de 1849, avec quatre autres lettres inédites très-courtes de madame -de la Vallière, dont les autographes appartiennent à la bibliothèque -et aux archives de Troyes: l'une est adressée à l'abbesse Anne de -Choiseul-Praslin et datée du 13 mai 1688, et les trois autres à Denis -Dodart, médecin et membre de l'Académie des sciences, que le caustique -Gui Patin et le philosophe Fontenelle s'accordent à louer comme -un des hommes les plus savants, les plus pieux et les plus charitables -<span class="pagenum"><a id="Page_410"> 410</a></span> -de leur temps. (<i>Lettres de</i> <span class="smallc">Gui Patin</span>; Paris, Baillière, 1846, in-8<sup>o</sup>, -t. III, p. 231.)</p> - -<p>«La Vallière mourut à l'heure de midi, le 6 juin 1710, âgée de -soixante-cinq ans dix mois, et trente-six ans de religion.» <i>Récit -abrégé de la vie pénitente</i>, p. 234.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_111">111</a>, ligne 6: Elle sait bien aimer.</p> - -<p>Madame de Caylus nous apprend, à l'endroit cité, que cette réflexion -fut faite à l'occasion de l'aîné des enfants du roi et de madame de -Montespan, qui mourut à l'âge de trois ans.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_111">111</a>, ligne 8: Cette femme lui déplaisait souverainement, parce -qu'elle plaisait trop à sa maîtresse. (Sur la lettre de madame de -Coulanges à madame de Sévigné, du 20 mars 1673.)</p> - -<p>Il y a dans l'édition des <i>Lettres</i> de madame de Sévigné, de M. de -Monmerqué, une note du savant éditeur (t. II, p. 75, édition 1820) -à laquelle M. Rœderer, dans son <i>Histoire de la société polie</i>, aurait -dû bien faire attention. C'est au sujet de ce passage remarquable: -«Nous avons enfin retrouvé madame Scarron, c'est-à-dire que nous -savons où elle est; car pour avoir commerce avec elle, cela n'est -pas aisé. Il y a, chez une de ses amies, un certain homme qui la trouve -si aimable et de si bonne compagnie qu'il souffre impatiemment de -son absence.» On a interprété ces derniers mots en supposant que -ce certain homme était Louis XIV; mais après avoir fait observer -que la faveur dont a joui madame de Maintenon auprès de Louis XIV -n'a pu commencer qu'en 1675, ou au plus tôt en 1674, puisqu'il est -bien constaté qu'avant cette époque le roi prit presque en aversion -la veuve Scarron, M. de Monmerqué présume très-judicieusement que -cet homme si épris était Barillon. Et c'était sans doute un ancien ami, -puisque madame de Coulanges ajoute immédiatement: «Elle est -cependant plus occupée de ses anciens amis qu'elle ne l'a jamais été: -elle leur donne, avec le peu de temps qu'elle a, un plaisir qui fait -regretter qu'elle n'en ait pas davantage.» Deux lignes plus loin, madame -de Coulanges mentionne le roi, pour dire «qu'ayant vu l'état -des pensions il trouva deux mille francs pour madame Scarron, et -mit <i>deux mille écus</i>.» C'était la juste récompense de ses soins.</p> - -<p class="pnote"><span class="pagenum"><a id="Page_411"> 411</a></span> -Page <a href="#Page_111">111</a>, note: <i>Souvenirs de madame</i> <span class="smallc">de Caylus</span>.</p> - -<p>J'ai donné au long le titre de cette édition des <i>Souvenirs de Caylus</i>, -parce qu'elle a été inconnue à tous les éditeurs de ce livre curieux, et -que c'est la seule où Voltaire se trouve nommé comme éditeur. Elle -est sans la préface de Jean-Robert (Voltaire); mais la défense du -siècle de Louis XIV suit immédiatement, et commence à la page 162, -au verso de celle qui termine les <i>Souvenirs</i>. Cette édition diffère des -autres. Celle de M. Monmerqué finit ainsi: <i>Puisqu'il était avec elle.</i></p> - -<p class="end">FIN DES SOUVENIRS DE MADAME DE CAYLUS.</p> - -<p>Notre édition, p. 161, se termine par des notes, comme un ouvrage -non entier, avec ces mots de plus: «C'était bien plutôt une galanterie -innocente qu'une passion.»</p> - -<p class="echap">CHAPITRE VI.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_117">117</a>, ligne 17: Je revins hier du Menil.</p> - -<p>Il s'agit ici du Mesnil-Saint-Denis, à cinq kilomètres ou une lieue -et quart de la Grange de Port-Royal. «Cette terre, dit l'abbé Lebeuf -(t. VIII, p. 463 de l'<i>Histoire du diocèse de Paris</i>), ayant été aliénée -par l'abbaye de Saint-Denis, était possédée à la fin du seizième siècle -par MM. Habert de Montmor, qui en ont joui jusque dans le siècle -présent.... On avait commencé, sur la fin du dernier siècle, à -appeler ce lieu-là Mesnil-Saint-Denis-Habert. J'ai vu des Provisions -de la cure du 19 décembre 1691, où cette dénomination est rejetée.»</p> - -<p>C'est donc chez Henri-Louis Habert de Montmor, conseiller du roi, -maître des requêtes de l'hôtel, qu'alla madame de Sévigné. Montmor -fut de l'Académie française; il mourut à Paris le 21 janvier 1679. -C'est de son fils, et non de son mari, qu'il est fait mention dans la -lettre de décembre 1694<a id="FNanchor_880" href="#Footnote_880" class="fnanchor"> [880]</a>, datée de Grignan. Ce M. de Montmor était -alors à Grignan, et ce fut lui qui ménagea le mariage de Grignan avec -mademoiselle de Saint-Amand.</p> - -<p>C'était sans doute avec madame de Montmor plutôt qu'avec son -<span class="pagenum"><a id="Page_412"> 412</a></span> -mari que madame de Sévigné était liée. Sa correspondance ne fait -mention que d'elle. <span class="smallc">Mademoiselle</span> nous apprend que madame de -Montmor était belle-sœur de madame de Frontenac. Cette dernière -vivait alors<a id="FNanchor_881" href="#Footnote_881" class="fnanchor"> [881]</a> fort retirée, quoique possédant une grande maison; -et elle prêta ses chevaux à <span class="smallc">Mademoiselle</span> pour s'échapper de Paris. -(<i>Mémoires de Montpensier</i>, vol. XLIII, p. 342 et 343.)</p> - -<p>Habert de Montmor fut reçu à l'Académie française en janvier -1635, ou un peu avant<a id="FNanchor_882" href="#Footnote_882" class="fnanchor"> [882]</a>. Il était cousin de Cerisy, un des premiers -académiciens. Savant et humaniste, Montmor cultivait les sciences -exactes et la poésie. Il recueillit chez lui Gassendi, qui mourut dans -son hôtel<a id="FNanchor_883" href="#Footnote_883" class="fnanchor"> [883]</a>. Il rassembla ses ouvrages, et les fit imprimer en six volumes -in-folio. La préface latine qu'on y lit et trois ou quatre petites pièces -de vers français consignées dans les recueils du temps, voilà tout ce -qu'on a de lui. Il avait composé un poëme latin, avec le même titre -que celui de Lucrèce; et il y avait développé toute la physique moderne. -Huet, dans ses <i>Mémoires</i><a id="FNanchor_884" href="#Footnote_884" class="fnanchor"> [884]</a>, nous apprend que Montmor, -en apparence sectateur de la doctrine épicurienne de Gassendi, préférait -en secret la philosophie de Descartes. Il y avait chez lui, un -certain jour de la semaine, une réunion de savants physiciens et de -littérateurs, formant entre eux une petite académie dont Sorbier a -donné les statuts dans une de ses lettres. Ménage nous apprend qu'il -était dans une de ces assemblées avec Chapelain et l'abbé de Marolles -lorsque Molière y lut les trois premiers actes du <i>Tartufe</i><a id="FNanchor_885" href="#Footnote_885" class="fnanchor"> [885]</a>. -Il dit aussi qu'à la suite d'un revers de fortune Habert de Montmor -s'abandonna tellement au chagrin et à la douleur qu'il devint invisible -durant les douze dernières années de sa vie<a id="FNanchor_886" href="#Footnote_886" class="fnanchor"> [886]</a>. Ceci explique le silence -qui se fit sur lui à l'époque où madame de Sévigné allait au -Mesnil. Malgré les pertes qu'il avait éprouvées, Montmor devait encore -être riche, puisque cette belle propriété lui restait. Son père, -Jean-Habert de Montmor, sieur du Mesnil, avait acheté en novembre -1627 l'hôtel de Sully (situé dans la rue Saint-Antoine, près de -la rue Royale). Cet hôtel avait été construit par le partisan Galet, -devenu célèbre par les vers de Regnier et de Boileau, à cause de sa -<span class="pagenum"><a id="Page_413"> 413</a></span> -passion pour le jeu. Sa fortune se trouvant ébréchée, son hôtel fut -vendu d'abord à Montmor, ensuite au duc de Sully. Tallemant raconte -que Galet ayant confié cent mille livres à Montmor, celui-ci nia -les avoir reçues. Mais c'est là une historiette invraisemblable et dont -probablement Galet est l'inventeur<a id="FNanchor_887" href="#Footnote_887" class="fnanchor"> [887]</a>.—La <i>Biographie universelle</i> ne -fait mention de Montmor nulle part: c'est ce qui nous a engagé à -étendre cet article.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_119">119</a>, ligne 2 de la note: <i>Mémoires du comte</i> <span class="smallc">de Guiche</span>; -Utrecht, 1744.</p> - -<p>Ces Mémoires, qui ont été publiés par Prosper Marchand, commencent -à l'année 1665, se terminent en 1667, et sont suivis d'une relation -du siége de Wesel. Ils auraient dû être réimprimés dans la -grande collection des <i>Mémoires relatifs à l'histoire de France</i>. On -n'y voit nulle trace de cet esprit guindé que madame de Sévigné -blâme dans le comte de Guiche: ils sont écrits d'un style fort naturel.—L'article -du comte de Guiche, dans le <i>Dictionnaire</i> de Prosper -Marchand, est excellent et très-complet. Il a été abrégé dans la <i>Biographie -universelle</i>.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_124">124</a>, lignes 22 à 24: Malgré la réunion des talents qui contribuaient -à sa réussite, il (<i>l'Opéra</i>) causa, dans la nouveauté, plus -d'admiration que de plaisir.</p> - -<p>Il est à remarquer que dès l'origine la France, dans l'opéra, surpassa -l'Italie pour la danse et les ballets, la composition et l'intérêt -des poëmes, mais qu'elle fut, malgré tous les efforts et les grandes -dépenses faites par son gouvernement, inférieure à l'Italie sous le -rapport du chant, de la musique, des décorations et des machines. -Je crois qu'il en est encore ainsi. L'épître de la Fontaine à M. de -Nyert est une satire spirituelle contre l'Opéra; elle aurait été plus -mordante si le bonhomme n'eût pas eu crainte de déplaire au monarque. -Nous avons rapporté le jugement de l'abbé Raguenet sur l'Opéra -dans notre édition de la Fontaine, t. VI, p. 112. Quarante ans -plus tard, Thomas Gray, qui avait vu l'Italie, était de la même opinion -que cet abbé. (<i>Lettre</i> à M. West; Paris, 12 avril 1739.)—On -sait ce que Rousseau a écrit sur notre musique. Mais il n'en est plus -<span class="pagenum"><a id="Page_414"> 414</a></span> -ainsi depuis que l'Opéra a perdu son privilége exclusif, et que, par -l'établissement d'un théâtre, les Italiens ont formé les oreilles françaises -à leur mélodie.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_134">134</a>, lignes 8 et 9: La conquête de la Franche-Comté ne fut -complétée que le 5 juillet.</p> - -<p>Le roi était revenu avant la fin des opérations militaires, et il se -hâta de donner des fêtes pour célébrer sa nouvelle conquête.</p> - -<p>Ces fêtes employèrent six jours, mais non consécutivement.</p> - -<p>Elles commencèrent le samedi 4 juillet (1674)<a id="FNanchor_888" href="#Footnote_888" class="fnanchor"> [888]</a>. Ce fut la première -année où Versailles parut dans toute sa pompe. Il avait reçu bien -des embellissements depuis que la Fontaine en avait célébré l'éclat -et les merveilles dans son roman de <i>Psyché</i>. Le château avait été -terminé<a id="FNanchor_889" href="#Footnote_889" class="fnanchor"> [889]</a>, ainsi que Trianon.</p> - -<p>C'est à Trianon que, le second jour de ces fêtes, on représenta -l'<i>Eglogue de Versailles</i>.</p> - -<p>La troisième journée, qui fut la plus brillante de toutes, se passa -à la <i>Ménagerie</i>. On y représenta le <i>Malade imaginaire</i> de Molière, -devant la fameuse grotte des bains de Thétis, nouvellement -achevée<a id="FNanchor_890" href="#Footnote_890" class="fnanchor"> [890]</a>.</p> - -<p>Ce fut dans le petit parc que l'on représenta les <i>Fêtes de l'Amour -et de Bacchus</i>, premier résultat de l'alliance de Quinault, de Lulli -et de Vigaroni pour donner au spectacle de l'Opéra français la forme -qu'il a conservée depuis<a id="FNanchor_891" href="#Footnote_891" class="fnanchor"> [891]</a>. Dans cette pastorale de Quinault, il y a une -imitation charmante du dialogue d'Horace et de Lydie, bien préférable -à celles que l'on a faites depuis.</p> - -<p>Ces fêtes durèrent deux mois. Pour le cinquième jour, qui fut un -samedi 18 août, on représenta <i>Iphigénie</i>, nouvelle tragédie de Racine. -Cette représentation donna lieu, de la part de l'abbé de Villiers, -à des remarques critiques sur ce chef-d'œuvre qui ne sont -pas toujours sans justesse, et aussi à une satire en vers intitulée -<span class="pagenum"><a id="Page_415"> 415</a></span> -<i>Apollon charlatan</i>, laquelle, du reste, nous apprend que cette pièce -faisait répandre beaucoup de larmes et renchérir les mouchoirs aux -dépens des pleureurs<a id="FNanchor_892" href="#Footnote_892" class="fnanchor"> [892]</a>.</p> - -<p>Racine fit imprimer <i>Iphigénie</i> avec une courte et savante préface, -mais assez aigre envers ses critiques<a id="FNanchor_893" href="#Footnote_893" class="fnanchor"> [893]</a>. En même temps Corneille publia -sa tragédie de <i>Suréna</i>, qui fut le dernier effort de sa muse trafique. -Il la fit précéder de ses remercîments au roi, et il parvint à -introduire l'éloge de ce monarque dans le sujet même de sa pièce, -qui n'y prêtait guère<a id="FNanchor_894" href="#Footnote_894" class="fnanchor"> [894]</a>. Les deux derniers actes de cette tragédie nous -montrent encore quelques traits de vigueur; mais il se trompait -beaucoup, le grand génie, lorsque, dans ses remercîments à -Louis XIV, il disait:</p> - -<p class="quote"><span class="i4"><b>. . . . . . . . . . . .</b>Othon et Suréna</span><br /> -Ne sont pas des cadets indignes de Cinna.</p> - -<p class="echap">CHAPITRE VII.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_141">141</a>, ligne 3: Un enfant qui ne naquit pas viable.</p> - -<p>La preuve de cette grossesse de madame de Grignan et le terme de -son accouchement, résultent des passages des lettres de Bussy à madame -de Sévigné, cités en note. Mais, avant de rapporter ces passages, -il faut rectifier les dates des deux lettres de madame de Sévigné au -comte de Guitaud, mal données dans les éditions. Ces lettres furent -d'abord publiées par le libraire Klostermann, dans son édition des -lettres inédites, en 1814, in-8<sup>o</sup>, sans aucune date ni de jours ni -d'années. Il paraît cependant, d'après la préface des éditeurs, que les -autographes portaient l'indication du jour de la semaine (p. <span class="smallc">IX</span>); -mais, dans l'embarras où ils ont été de déterminer la date de l'année, -ils ont supprimé celle du jour de la semaine, et bien à tort. Ces -deux lettres, comme toutes celles du même recueil qui sont adressées -au comte de Guitaud, proviennent des archives du château -<span class="pagenum"><a id="Page_416"> 416</a></span> -d'Époisses et de la famille de Guillaume de Pechpeirou-Comenge, -comte de Guitaud, marquis d'Époisses, dont nous avons parlé au -chapitre VI. L'éditeur nous apprend que le comte de Guitaud naquit -le 5 octobre 1626, la même année que madame de Sévigné, et -mourut en 1685, à Paris. Ces lettres inédites de madame de Sévigné -ont été redonnées en 1819, et le nouvel éditeur a cru pouvoir -y mettre des dates, qui ne sont, dit-il, qu'approximatives. M. Gault -de Saint-Germain, dans son édition de madame de Sévigné, les -a classées avec les dates fausses de cet éditeur. Les dates des 18 juin -et 10 juillet 1675 ressortent de ce que dit madame de Sévigné sur -les adieux de sa fille et du cardinal de Retz et sur les événements -militaires (t. III, p. 347, édit. G.). Elles sont précises pour les mois -et l'année, et déduites approximativement pour les jours.</p> - -<p>Dans la lettre du 16 août 1674, t. III, p. 351, édit. G., Bussy dit -à madame de Grignan: «Comment vous portez-vous en votre grossesse, -madame, et du mal de madame votre mère?» Puis, un an -après, lorsque la comtesse accoucha aux îles Sainte-Marguerite, madame -de Sévigné écrit au comte de Guitaud (t. III, p. 348): «Madame -de Guitaud est une raisonnable femme d'être accouchée comme -on a accoutumé et de ne pas aller chercher midi à quatorze heures, -comme madame de Grignan, pour faire un accouchement hors de -toutes les règles! Voilà les îles en honneur pour les femmes <i>grosses -de neuf mois</i>; si ma fille l'est, je lui conseille d'y aller. Je ne sais -point de ses nouvelles sur ce sujet; mais, comme vous dites, ce -n'est pas à dire que cela ne soit pas vrai; je vous assure que j'en -serais fort affligée.» D'autres passages, qu'il serait trop long de -citer, corroborent ces preuves de la grossesse de madame de Grignan -et de son accouchement. Le général de G..., qui, dans l'avertissement -de l'édition des lettres inédites de madame de Sévigné, -a classé ces lettres et mis les dates, est, je crois, le général de Grimoard, -un des éditeurs des <i>Œuvres de Louis XIV</i>.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_150">150</a>, ligne 16: Sa sœur, Marie-Thérèse de Bussy-Rabutin, etc.</p> - -<p>Il y avait encore deux autres demoiselles de Rabutin, parentes de -Bussy: c'étaient les sœurs de ce page de la princesse de Condé, lequel -épousa la duchesse de Holstein. Elles allèrent trouver leur frère -en Allemagne, et écrivirent à Bussy le 25 décembre 1686 et le -28 octobre 1687. (Voyez <span class="smallc">Bussy</span>, <i>Lettres</i>, t. VI, p. 201 et 264.)</p> - -<p class="pnote"><span class="pagenum"><a id="Page_417"> 417</a></span> -Page <a href="#Page_151">151</a>, lignes dernières, et <a href="#Page_152">152</a>, ligne 1: Le jeune frère de -madame de Montataire et du marquis de Bussy (Michel-Celse-Roger -de Rabutin)..., qui n'était âgé que de six à sept ans.</p> - -<p>On lit dans les <i>Pièces fugitives</i> de Flachat de Saint-Sauveur, -1704, in-12, t. I, p. 123:</p> - -<p>«M. le comte de Bussy-Rabutin a laissé une belle famille, comme -vous savez. M. l'abbé de Bussy est grand vicaire d'Arles, et fait beaucoup -d'honneur à l'état qu'il a embrassé.»</p> - -<p>A la page 121, il est dit «qu'on travaille au Louvre à une édition -plus correcte des <i>Mémoires de Bussy</i>.»</p> - -<p>Malheureusement cette édition n'a point paru. Une nouvelle édition -des <i>Mémoires de Bussy</i>, dont la plus grande partie n'existe -encore qu'en manuscrit, serait un service rendu à l'histoire; mais il -faudrait y joindre sa vaste correspondance, puisqu'il ne semble avoir -composé ses Mémoires que pour y intercaler les lettres qu'il écrivait -et qu'il recevait.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_154">154</a>, ligne 4: Bussy avait eu trois filles de sa cousine Gabrielle -de Toulongeon.</p> - -<p>Bussy dit, t. I, p. 125 de ses <i>Mémoires</i> pour l'année 1646: «Je ne -fus pas longtemps sans perdre ma femme, dont je fus extrêmement -affligé. Elle m'aimait fort, elle avait bien de la vertu et assez de -beauté et d'esprit. Elle me laissa trois filles, Diane, Charlotte et Louise-Françoise. -L'aînée n'avait pas deux ans lorsque sa mère mourut.»</p> - -<p>J'ai prouvé ci-dessus que Gabrielle de Toulongeon était morte le -26 décembre 1646. Bussy s'était marié le 28 avril 1643; ainsi Diane -n'a pu naître qu'en février 1644. L'époque de la mort de Charlotte -est ignorée; mais il en résulte que, comme elle est née avant Louise-Françoise, -cette dernière n'a pu naître avant la fin de septembre ou -le commencement d'octobre 1645, ni plus tard que le 26 décembre -1646. Elle avait donc environ vingt-huit ans et demi lorsqu'elle se -maria.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_154">154</a>, ligne 18: Elle était cette pieuse religieuse de Sainte-Marie -de la Visitation.</p> - -<p>Mademoiselle Dupré, cette savante et spirituelle correspondante -de Bussy, lui écrit de Paris, le 1<sup>er</sup> juin 1670:</p> - -<p>«Je ne comprends pas, monsieur, que vous m'ayez si peu parlé de -<span class="pagenum"><a id="Page_418"> 418</a></span> -madame votre fille aînée, religieuse aux Dames Sainte-Marie de la -rue Saint-Antoine. Mon bon génie m'a inspiré de l'aller voir. Je -ne crois pas qu'il y ait personne plus accomplie en vertu, en esprit -et même en agrément de sa personne, s'il lui plaisait d'en avoir.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_155">155</a>, ligne 5: Celle qui, par les charmes de sa conversation -et de son style épistolaire.</p> - -<p>Dans sa lettre à l'abbé Papillon, en date du 7 août 1735, de la -Rivière (<i>Lettres choisies</i>, Paris, 1735, in-12, t. II, p. 207) dit: «Madame -de la Rivière (Louise-Françoise de Coligny) n'a composé que -la Vie de saint François de Sales et l'épitaphe de son père, à laquelle -le P. Boubours n'a eu nulle part.»</p> - -<p>«... Je ne sais pas ce qu'on pense à Dijon des lettres de feu ma -femme. Elles firent un tel bruit à la cour que le roi me les demanda. -Je lui en donnai une vingtaine; il les lut chez madame de Montespan, -et me dit en me les rendant: «La Rivière, votre femme a plus -d'esprit que son père.» Madame de Thianges, qui avait assisté à -cette lecture, m'apprit que le lendemain le roi s'en était diverti -et que je lui avais donné une bonne soirée.» (P. 208.)</p> - -<p>Le 18 août de la même année (t. II, p. 215), de la Rivière ajoute -les détails suivants sur les lettres de sa femme: «Je me suis reproché -d'avoir gardé longtemps une cassette pleine de lettres de feu -ma femme; enfin, je les ai brûlées. Elles n'étaient qu'un composé de -sentiments vifs, propres à inspirer des passions et à les allumer. Si -on les avait imprimées, le public aurait couru après; mais c'eût -été un dangereux présent que j'aurais fait à la postérité.»</p> - -<p class="pnote">Pages <a href="#Page_156">156</a>, lig. dernière, et <a href="#Page_157">157</a>, lig. 1: Assez de la couleur de celui -de Saucourt (chose considérable en un futur).</p> - -<p>Le meilleur commentaire de ces mots de Bussy se trouve dans -les vers de Benserade, du <i>Ballet royal des amours de Guise</i>, où -l'entrée du marquis de Saucourt, qui devait représenter un démon, -est ainsi annoncée:</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p>Non, ce n'est point ici le démon de Brutus</p> -<p class="i6"> Ni de Socrate:</p> -<p>Par d'autres qualités et par d'autres vertus</p> -<p class="i6"> Sa gloire éclate.</p> -<div><span class="pagenum"><a id="Page_419"> 419</a></span></div> -</div> -<div class="stanza"> -<p>Sous la forme d'un homme il prouve ce qu'il est:</p> -<p class="i6"> Doux, sociable;</p> -<p>Sous la forme d'un homme aussi l'on reconnaît</p> -<p class="i6"> Que c'est le diable.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p>Le bruit de ses exploits confond les plus hardis</p> -<p class="i6"> Et les plus mâles;</p> -<p>Les mères sont au guet, les amants interdits,</p> -<p class="i6"> Les maris pâles.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p>Contre ce fier démon voyez-vous aujourd'hui</p> -<p class="i6"> Femme qui tienne?</p> -<p>Et toutes cependant sont contentes de lui,</p> -<p class="i6"> Jusqu'à la sienne.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p><span class="signature smallc">Benserade</span>, <i>Œuvres</i> (1697), t. II, p. 307.</p> -</div></div> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_157">157</a>, lignes 3 et 8; Les terres de Cressia, de Coligny... Il jouit -de la terre de Dalet et de celle de Malintras.</p> - -<p>Dalet et Malintras sont en Auvergne, dans le département du Puy-de-Dôme. -Dalet est dans l'arrondissement de Clermont, canton de -Pont-sur-Allier, à huit kilomètres de Billom et onze de Clermont: il -y a environ quatorze cent cinquante habitants. Autrefois ce lieu était -dans l'élection de Clermont, intendance de Riom, et l'on y comptait -cent soixante dix-huit feux. Malintras est dans cette petite vallée -qu'on nomme la Limagne, à plus de deux lieues des montagnes. -On y voit une roche qui distille la poix minérale et qui est à quelque -distance, au nord, de Pont-Château. Malintras comptait soixante-six -feux. Cressia est dans l'arrondissement de Lons-le-Saulnier, canton -d'Orgelet. Coligny est un bourg du département de l'Ain, à vingt-deux -kilomètres, au nord, de Bourg; sa population est de seize à dix-sept -cents individus. Ce lieu est sur les confins de l'ancienne Franche-Comté, -à sept lieues sud-ouest d'Orgelet, dans un pays que l'on -nomme <i>Revermont</i>, et que la maison de Châtillon prétendait avoir -possédé autrefois en souveraineté. Il y avait dans ce bourg quarante-six -feux. (Voyez d'Expilly, <i>Dictionnaire géogr. et polit. des Gaules -et de la France</i>, t. II, p. 389.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_157">157</a>, ligne 19: Ainsi Bussy avait tout arrangé et tout prévu -pour le bonheur de sa fille chérie.</p> - -<p>On lit dans la <i>Suite des Mémoires du comte de Bussy-Rabutin</i>, -<span class="pagenum"><a id="Page_420"> 420</a></span> -in-8<sup>o</sup>, ms. de l'Institut, p. 129 verso, un billet de madame de Scudéry -en date du 17 juillet 1675, auquel Bussy fait une réponse qui -commence ainsi:</p> - -<p class="titel1">«A Chaseu, ce 30 juillet 1675.</p> - -<p>«Le mariage de ma fille n'est pas encore fait, madame; il ne se -fera qu'au mois de novembre prochain. Si dans ces marchés il n'y -avait point d'intérêts mêlés, ils iraient beaucoup plus vite. Mais -puisque nous sommes sur cette matière, je vous veux dire les réflexions -que je viens de faire.»</p> - -<p>Ces réflexions sont celles d'un libertin impie, et elles ne peuvent -être transcrites.</p> - -<p class="echap">CHAPITRE VIII.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_169">169</a>, lignes 8 et 9: «Vous ne sentez pas, dit-elle, l'agrément -de vos lettres; il n'y a rien qui n'ait un tour surprenant.</p> - -<p>Voici le jugement de la Rivière sur les lettres de madame de Grignan:</p> - -<p>«Madame de Grignan avait beaucoup d'esprit, mais il paraît qu'elle -en était bien aise. Son style est rêvé, peigné, limé, périodique et ne -tient rien du style épistolaire, qui ne demande, je crois, qu'une noble -simplicité.» <i>Lettres choisies de M. de la Rivière</i>, t. II, p. 217 -et 218.</p> - -<p>Dans la note, il est dit que les lettres de madame de Grignan n'étaient -point perdues, comme le prétend le chevalier Perrin, et que -M. de Bouhier les vit autographes entre les mains de madame de Simiane, -à Aix en Provence, en 1733. Ainsi c'est madame de Simiane -qui les a détruites. Mais madame de Grignan n'écrivit pas qu'à sa -mère, et ceux qui recevaient des lettres de cette reine de Provence -devaient les conserver.</p> - -<p>Rivière, en écrivant à l'abbé Pavillon le 28 août 1737, dit: «Tant -mieux pour le public si on n'imprime pas les lettres de madame de -Grignan. C'était un esprit guindé, périodique, plus propre à l'éloquence -du barreau et de la chaire qu'aux agréments de la société. Je -l'ai connue: elle ne se permettait aucune négligence dans le style, ce -qu'elle portait jusqu'à l'affectation; d'ailleurs, d'une très-aimable -figure. Mais il y avait une mer de séparation entre la mère et la -fille dans ce qui regardait la gentillesse de l'esprit.»</p> - -<p class="echap"><span class="pagenum"><a id="Page_421"> 421</a></span> -CHAPITRE IX.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_174">174</a>, ligne 8: Le comte de Schomberg avait défait les Espagnols; -et note 2: <i>Relation de ce qui s'est passé en Catalogne</i>.</p> - -<p>Cette relation est curieuse et faite par un homme qui se trouvait -dans l'armée de Schomberg. Elle commence par la conspiration qui -fut ourdie pour livrer Perpignan et Villefranche aux Espagnols. Il -y a toute la matière d'un drame des plus animés et des plus tragiques. -A la fin se trouve l'histoire plus plaisante du marquis de Rivarolles, -qui eut une cuisse emportée au siége de Boulau. Il fut transporté à -Toulouse, et là il tint à des femmes quelques propos légers sur -Madaillan, qui avait servi d'aide de camp à Schomberg. Madaillan, -instruit par une lettre, part de Paris en poste, arrive à Toulouse, et envoie -à Rivarolles un cartel pour le prier de monter à cheval, attendu -qu'il veut se battre avec lui. Le chirurgien de Rivarolles se présente -de la part de ce dernier chez Madaillan, et est introduit sans dire quelle -est sa profession ni quelle réponse il venait faire. Il déploie tranquillement -sa trousse d'instruments tranchants, à la grande surprise -de Madaillan, qui lui demande si c'est lui que M. de Rivarolles envoie -pour répondre à son billet. «C'est moi-même, monsieur, dit -l'autre. Monsieur de Rivarolles est tout prêt à se battre avec vous, -comme vous le désirez; mais, persuadé qu'un brave comme vous ne -voudrait pas se battre avec avantage, il m'a ordonné de vous couper -une jambe auparavant, afin que toutes choses soient égales entre -vous.» La colère de Madaillan fut grande. Mais le maréchal de -Schomberg lui dépêcha le baron de Montesquiou, qui, en sa qualité -de subdélégué des maréchaux de France, avait qualité pour arranger -ces sortes d'affaires et qui parvint à réconcilier les deux guerriers. -(<i>Relation</i>, etc., p. 185-193.)—Barbier (<i>Dict. des Anonymes</i>, t. III, -p. 186, n<sup>o</sup> 16,048) commet une erreur en attribuant deux volumes à -cet ouvrage. Il y a une seconde partie à ce volume, intitulée <i>Suite de -la Relation de ce qui s'est passé en Catalogne depuis le commencement -de la guerre jusqu'à la paix</i>; Paris, Quinet, 1679, in-12 -(170 pages).</p> - -<p>Plus loin, sous le n<sup>o</sup> 16,057, Barbier mentionne une <i>Relation de -la campagne de Flandre en 1678</i>, par D. C.; Paris, Quinet, 2 vol. -in-12. Il attribue (t. III, p. 186) cet ouvrage, ainsi que le précédent -<span class="pagenum"><a id="Page_422"> 422</a></span> -à de Caisses; puis dans les corrections de ce volume, p. 670, à un -M. Doph, quartier maître général et ensuite général des dragons.</p> - -<p class="echap">CHAPITRE X.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_190">190</a>, lignes 28 à 30: A la reine, que... le roi n'avait jamais -entièrement négligée.</p> - -<p>«Le roi couchait toutes les nuits avec la reine; mais il ne se -comportait pas toujours comme le tempérament espagnol le désirait.» -(<i>Lettres de</i> <span class="smallc">Madame</span>, du 17 avril 1719.)</p> - -<p>«La reine avait une telle affection pour le roi qu'elle cherchait à -lire dans ses yeux tout ce qui pouvait lui faire plaisir. Pourvu qu'il -la regardât avec amitié, elle était gaie toute la journée. Elle se réjouissait -que le roi couchât avec elle maritalement; elle en devenait si -gaie qu'on le remarquait chaque fois. Elle n'était pas fâchée qu'on -la raillât à ce sujet. Alors elle riait, clignotait, et se frottait les mains.» -(<i>Lettres de</i> <span class="smallc">Madame</span>, du 24 mars 1719.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_195">195</a>, lignes 4 et 5: Le roi enjoignit au ministre de prévenir les -désirs de celle qu'il lui était si pénible d'affliger.</p> - -<p>La lettre que Louis XIV écrit à Colbert, de son camp près de -Dôle, le 9 juin 1674, est curieuse, parce qu'elle nous fait voir ce -roi, honteux des exigences de madame de Montespan dans l'état de -pénurie où l'on se trouvait, dissimulant avec son ministre. Nous -transcrirons ici une partie de cette lettre, qui est tout entière de la -main de Louis XIV. Nous conservons l'orthographe: «Madame de -Montespan ne veut pas absoluement que je lui donne des pierreries; -mais afin quelle n'en manque pas, je désire que vous faciés travailler -à une petite cassette bien propre, pour mettre dedans ce -que je vous diray ci-après, afin que j'ai de quoy lui prester à point -nommé ce qu'elle desirera. Cela parois extraordinaire; mais elle ne -veut point entendre raison sur les présens.» Vient ensuite l'énumération -d'une parure de femme en perles et en diamants, tellement -longue et minutieuse que Louis XIV a dû la copier d'après celle -que lui avait transmise madame de Montespan. Il termine par ces -mots: «Il faudra faire quelque depense à cela, mais elle me sera -fort agréable; et je désire qu'on la fasse sans ce (sic) presser. Mandés -moy les mesures que vous prendrez pour cela, et dans quel temps -vous pouvez avoir tout.»</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_423"> 423</a></span> -Louis XIV écrit encore à Colbert, du camp de Gembloux, le -28 mai 1675 (<i>Lettres</i>, t. V, p. 533):</p> - -<p>«Madame de Montespan m'a mandé que vous avez donné ordre -qu'on achète des orangers, et que vous lui demandez toujours ce -qu'elle désire. Continuez à faire ce que je vous ai ordonné là-dessus, -comme vous avez fait jusqu'à cette heure.»</p> - -<p>Du camp de Latines, le roi adresse à Colbert, au sujet de madame -de Montespan, une lettre encore plus remarquable, qui répond à celle -de Colbert rendant compte de la commission dont il avait été chargé:</p> - -<p class="titel1">«A M. <span class="smallc">Colbert</span>.</p> - -<p class="dater">«Au camp de Latines, le 8 juin 1675.</p> - -<p>«La dépense est excessive, et je vois par là que, pour me plaire, rien -ne vous est impossible. Madame de Montespan m'a mandé que vous -vous acquittiez fort bien de ce que je vous ai ordonné, et que vous -lui demandez toujours si elle veut quelque chose. Continuez à le -faire toujours. Elle me mande aussi qu'elle a été à Sceaux (Sceaux appartenait -à Colbert), où elle a passé agréablement la soirée. Je lui ai -conseillé d'aller un jour à Dampierre, et je l'ai assurée que madame de -Chevreuse et madame Colbert l'y recevraient de bon cœur. Je suis -assuré que vous en ferez de même. Je serai très-aise qu'elle s'amuse -à quelque chose; et celles-là sont très-propres à la divertir. Confirmez -ce que je désire; continuez à faire ce que je vous ai mandé -là-dessus, comme vous avez fait jusqu'à cette heure.»</p> - -<p>Cinq jours avant la lettre que l'on vient de lire, Pellisson, qui -avait suivi Louis XIV à la guerre, écrivait, de ce même camp de Latines:</p> - -<p class="datem">«<i>Du 3 juin 1675.</i></p> - -<p>«Le roi dit hier au soir au petit coucher, avec plaisir, le grand accueil -qui avait été fait à Bourdeaux à M. le duc du Maine, et la joie que -le peuple témoigna de le voir, bien différente des mouvements où il -était naguère, comme marquant son repentir. C'est madame de Maintenon -qui lui a écrit une lettre de huit à dix pages. Elle marque qu'en -son absence le petit prince répondit de son chef aux harangues; et -qu'au retour l'ayant trouvé fort échauffé de la foule qui avait été auprès -de lui, elle lui demanda s'il n'aimerait pas mieux n'être point fils -du roi que d'avoir toute cette fatigue: à quoi il répondit que non, et -<i>qu'il aimait mieux être fils du roi</i>. Le roi dit encore que les médecins -<span class="pagenum"><a id="Page_424"> 424</a></span> -de Bourdeaux, aussi incertains que ceux de Paris, avaient été d'avis -qu'il allât à Bourbon plutôt qu'à Baréges; et que le lendemain ils -avaient conclu, au contraire, qu'il essayât des eaux de Baréges avant -d'aller à Bourbon.» (<span class="smallc">Pellisson</span>, <i>Lettres historiques</i>, t. II, p. 278.)</p> - -<p>Il est évident, d'après la date de ces deux lettres, que la veuve -Scarron ne pouvait alors avoir la moindre idée de balancer dans -le cœur de Louis XIV l'amour qu'il avait pour Montespan; qu'elle -cherchait seulement à être agréable au monarque et à gagner sa -confiance comme gouvernante de ses enfants.—Par une autre lettre -datée du camp de Latines le 7 juin 1675, Louis XIV dit au maréchal -duc d'Albret que rien ne pouvait lui être plus sensible que ce -qu'il lui avait écrit touchant son fils le duc du Maine, ainsi que les -soins qu'il prenait pour sa personne.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_195">195</a>, lignes 7 à 10: A l'aide de Mansart et de Le Nôtre..., elle -fit de Clagny un magnifique séjour.</p> - -<p>Il ne reste plus rien de ce chef-d'œuvre de Le Nôtre et de Jules-Hardouin -Mansart. Tout est rasé.—En 1837, le grand <i>Dictionnaire -de la poste aux lettres</i> comptait vingt habitants sur la butte de -Clagny, laquelle n'est pas même visitée par les voyageurs curieux qui -vont voir Versailles. Le château de Clagny n'était pas terminé en septembre -1677, ainsi qu'on le voit par une lettre de Mansart à Colbert, -date du 7 de ce mois, publiée par <span class="smallc">Delort</span> dans les <i>Voyages aux -environs de Paris</i>, 1821, in-8<sup>o</sup>, t. II, p. 98.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_197">197</a>, lignes 13 à 16: C'était le P. la Chaise... On le disait -sévère.</p> - -<p>Le P. François de la Chaise succéda au P. Ferrier; on fit alors -ce couplet, sur l'air <i>Aimons, tout nous y convie</i>:</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p>Chantons, chantons, faisons bonne chère.</p> -<p class="i1"> Notre monarque vainqueur</p> -<p class="i1"> A pris pour son confesseur</p> -<p class="i1"> La Chaise, père sévère.</p> -<p class="i1"> Il promet que, dans un an,</p> -<p class="i1"> Il rendra la Montespan</p> -<p class="i1"> Compagne de la Vallière.</p> -</div></div> - -<p>(<i>Chansons historiques</i>, manuscrit de Maurepas, Bibl. nation., -vol. IV, p. 189.)</p> - -<p class="pnote"><span class="pagenum"><a id="Page_425"> 425</a></span> -Page <a href="#Page_201">201</a>, ligne 23: Ne soit que la même chose avec celui de M. de -Condom.</p> - -<p>On ne s'explique pas bien comment Bossuet, qui avait été nommé -à l'évêché de Condom le 13 septembre 1669, suivant M. de Bausset, -mais qui avait donné sa démission en 1671 et avait été remplacé -dans cet évêché par Goyon de Matignon le 31 octobre de la même année, -est appelé <i>M. de Condom</i>, non-seulement dans une lettre de madame -de Sévigné à M. de Grignan sur la mort de Turenne, du -31 juillet 1675, mais encore dans plusieurs autres de Louis XIV, de -1676 et 1677. (<span class="smallc">Louis</span> XIV, <i>Œuvres</i>, t. V, p. 549, 566, 572.)</p> - -<p>Dans le <i>Gallia christiana</i>, t. II (1720, in-folio), p. 972, il est -dit que Jacob-Bénigne Bossuet fut désigné évêque de Condom le -13 septembre 1668 et inauguré le 21 septembre 1670. Il fut désigné -évêque le 13 septembre 1669.—Ni M. de Bausset ni M. de Barante, -dans son article de la <i>Biographie universelle</i> n'ont copié cette erreur -du <i>Gallia christiana</i>; mais elle a été reproduite par M. Jules -Marion dans son estimable travail de l'<i>Annuaire historique</i> pour -1847. Bossuet se démit de l'archevêché de Condom le 31 octobre -1671, et Jacob Goyon de Matignon, de la famille des comtes de Thorigny, -fut nommé à sa place (<i>Gall. christ.</i>, t. II, p. 974). Cependant -Bossuet, jusqu'à sa nomination à l'évêché de Meaux, signait <i>ancien -évêque de Condom</i>; et madame de Sévigné, et tout le monde, et -Louis XIV lui-même, dans des lettres de 1675 et 1676, l'appelaient -<i>monsieur l'évêque de Condom</i>. (Conférez <span class="smallc">Louis</span> XIV, <i>Œuvres</i>, t. V, -p. 549, 566, 572, et <span class="smallc">Sévigné</span>, lettre du 31 juillet 1675, sur la mort -de Turenne.) C'est une singulière anomalie, qui dérouterait bien des -critiques si elle n'était expliquée par la grande célébrité de Bossuet -et l'obscurité de son successeur.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_203">203</a>, lignes dernières: Et d'y vivre aussi chrétiennement -qu'ailleurs; et note 452: <span class="smallc">Caylus</span>, <i>Souvenirs</i>.</p> - -<p>On a dit que madame de Caylus paraît avoir confondu ensemble, -dans cet endroit, les souvenirs de deux années, qu'il fallait séparer. -Mais on n'a pas remarqué que ces souvenirs seraient bien plus -fautifs dans la page précédente (t. LXVI, p. 387) de la collection des -<i>Mémoires</i>, édit. 1828, in-8<sup>o</sup>, ou page 95 de l'édit. Renouard, 1806, -in-12, si, au lieu de <i>madame de Montausier</i>, on ne corrigeait pas -<i>M. de Montausier</i>. Il y avait trop de temps que madame de Montausier -<span class="pagenum"><a id="Page_426"> 426</a></span> -était morte à l'époque dont parle madame de Caylus pour -qu'une telle erreur pût lui être attribuée.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_205">205</a>, lignes 9 et 10: Louis XIV avait trente-sept ans.</p> - -<p>Néanmoins depuis deux ans le roi portait perruque, comme on le -voit par cette lettre de Pellisson, en date du 13 août 1673:</p> - -<p>«Le roi a commencé ces jours passés à mettre une perruque entière, -au lieu du tour de cheveux. Mais elle est d'une manière toute nouvelle: -elle s'accommode avec ses cheveux, qu'il ne veut point couper, et qui -s'y joignent fort bien, sans qu'on puisse les distinguer. Le dessus de -la tête est si bien fait et si naturel qu'il n'y a personne sans exception -qui n'y ait été trompé d'abord, et ceux-là même qui l'avaient -suivi tout le jour. Cette perruque n'a aucune tresse; tous les cheveux -sont passés dans la coiffe l'un après l'autre. C'est le frère de la -Vienne qui a trouvé cette invention et à qui le roi en a donné le privilége. -Mais on dit que ces perruques coûteront cinquante pistoles.» -(<span class="smallc">Pellisson</span>, <i>Lettres historiques</i>, t. I, p. 395.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_207">207</a>, ligne première: Dans son épître à Seignelay.</p> - -<p>On n'a pas encore découvert, que je sache, d'édition séparée de -cette belle épître de Boileau, comme Berriat Saint-Prix (t. I, p. <span class="smallc">CXLV</span>) -en a trouvé une de l'épître à Guilleragues; Paris, Billaine, 1674, in-4<sup>o</sup> -de 10 pages.—L'édition des <i>Œuvres diverses du sieur</i> D*** (Despréaux); -Paris, Denys Thierry, 1675, in-12, ne contient que cinq -épîtres, et celle de Guilleragues est la dernière.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_207">207</a>, lignes 5 et 6: A ce brillant spectacle Pomponne conduisit -l'abbé Arnauld, son frère, revenu de Rome.</p> - -<p>Antoine Arnauld, né en 1616, fils aîné du célèbre Arnauld d'Andilly, -accompagna l'un de ses oncles, Henri Arnauld, abbé de Saint-Nicolas, -qui fut nommé, en 1645, chargé des affaires de France à Rome. -L'oncle et le neveu, à cette date, étaient hommes du monde, peu rigoristes, -honnêtes gens, mais non scrupuleux. De retour en France -en 1648, ils se trouvèrent insensiblement pris par les opinions et par -les mœurs de leurs familles. Ils se retirèrent quelque temps à Port-Royal-des-Champs -auprès de M. d'Andilly. L'abbé de Saint-Nicolas -devint un janséniste fervent; il fut nommé évêque d'Angers. Son neveu, -dégagé d'ambition et sans beaucoup de zèle, le suivit dans son -évêché, tout en conservant ses relations de la ville et de la cour. -<span class="pagenum"><a id="Page_427"> 427</a></span> -Pendant le ministère de son frère cadet M. de Pomponne, il obtint, -en 1674, l'abbaye de Chaumes en Brie. Il ne fut janséniste que parce -qu'il était de la famille Arnauld, et resta toujours volontiers homme -du monde. Dans ses Mémoires il s'est beaucoup plaint de son père, -dont il était le fils aîné et nullement le Benjamin: c'est M. de Pomponne -qui était ce Benjamin. Après la disgrâce de ce dernier (1679), -l'abbé Arnauld se retira près de l'évêque d'Angers, dont il administra -le temporel. Il mourut en février 1698, âgé de quatre-vingt-deux -ans. Il a laissé d'assez agréables Mémoires, et son récit s'étend entre -les années 1634 et 1675.</p> - -<p class="echap">CHAPITRE XI.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_211">211</a>, ligne 12: Elle en fut le chef.</p> - -<p>On créa pour elle alors le surnom de <i>matriarche</i>. Voyez les <i>Nouvelles -à la main de la cour</i> du 9 mars 1685, p. <span class="smallc">XXXVIJ</span>, dans la <i>Correspondance -administrative</i> du règne de Louis XIV, recueillie par -Depping. Déjà, dès cette époque, l'envie répandait le bruit que madame -de Maintenon disposait de tous les emplois; que Louis XIV -n'entreprenait rien sans avoir son avis; qu'elle voulait se faire déclarer -reine, et que le Dauphin s'y opposait; enfin, tous les <i>cancans</i> -de cour que Saint-Simon a consignés trente ans après.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_211">211</a>, lignes 14 et 15: Françoise d'Aubigné fut aimée et recherchée -par madame de Sévigné; et la note.</p> - -<p>Madame de Maintenon, lorsqu'elle voyait le plus madame de Sévigné, -et que celle-ci l'invitait à souper, demeurait rue des Tournelles -ainsi que Ninon, par conséquent très-près de la seconde demeure -de madame de Sévigné au Marais (rue Saint-Anastase); et -quand elle fut arrivée à un grand degré de faveur auprès du roi, -qu'elle l'eut ramené à la reine et séparé de madame de Montespan, -elle ne discontinua pas entièrement ses relations avec madame de Sévigné. -Dans une lettre de cette dernière à sa fille, on trouve ces -lignes, remarquables surtout par leur date (29 mars 1680): «Madame -de Maintenon, par un hasard, me fit une petite visite d'un -quart d'heure. Elle me conta mille choses de madame la Dauphine, -et me reparla de vous, de votre santé, de votre esprit, du goût que -vous avez l'une pour l'autre, de votre Provence, avec autant d'attention -qu'à la rue des Tournelles.»</p> - -<p class="pnote"><span class="pagenum"><a id="Page_428"> 428</a></span> -Page <a href="#Page_212">212</a>, ligne 18: De son ami qui voyage.</p> - -<p>Les éditeurs de madame de Sévigné ont cru qu'il s'agissait ici du -voyage que madame de Maintenon fit à Anvers avec le duc du Maine. -Ils se trompent. Madame Scarron arriva à Anvers au commencement -d'avril 1674.</p> - -<p>Les Mémoires de Saint-Simon et des dames de Saint-Cyr constatent -bien que ce voyage de madame Scarron à Anvers est antérieur -à celui fait à Baréges, mais il n'en donnent pas la date. La Beaumelle -s'y était trompé dans la première <i>Vie de madame de Maintenon</i>, -in-18, Nancy, 1753, p. 200. Mais il a pu, d'après les lettres -qu'il avait retrouvées, corriger cette erreur dans ses <i>Mémoires pour -servir à l'histoire de Maintenon</i> (t. II, p. 41, liv. IV, et p. 118, -liv. V). Cette date paraît bien fixée: cependant mademoiselle de -Montpensier dit dans ses Mémoires (t. LXVI, p. 403), en parlant du -duc du Maine: «Avant qu'il fût reconnu, madame de Maintenon -l'avait mené en Hollande.» Il fut légitimé en décembre 1673; mais -l'arrêt n'était peut-être pas enregistré en mars ou en avril 1674, époque -du départ de madame Scarron.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_212">212</a>, ligne 28: Son caractère ne se démentit jamais.</p> - -<p>Dans ses entretiens avec mademoiselle d'Aumale et les élèves de -Saint-Cyr, madame de Maintenon dit:</p> - -<p>«Il ne faut rien laisser voir à nos meilleurs amis dont ils puissent -se prévaloir quand ils ne le seront plus. Il est bien fâcheux d'avoir -à rougir dans un temps de ce que l'on aura fait ou dit par imprudence -dans un autre..... Je le disais il y a bien des années à madame -de Barillon: Rien n'est plus habile qu'une conduite irréprochable.» -(<i>Entretiens de mad.</i> <span class="smallc">de Maintenon</span>, la Beaumelle, t. III, p. 153.)</p> - -<p>«Je me regarde, disait-elle encore, comme un instrument dont -Dieu daigne se servir pour faire quelque bien, pour unir nos princes, -pour soutenir et soulager les malheureux, pour délasser le roi des -soins du gouvernement. Dieu saura bien briser cet instrument quand -il le jugera inutile; et je n'y aurai pas de regret.»</p> - -<p>Et toute sa conduite, avant comme après son élévation, avant -comme après la mort du roi, fut d'accord avec ses paroles, et -prouve qu'elles étaient sincères.</p> - -<p class="pnote"><span class="pagenum"><a id="Page_429"> 429</a></span> -Page <a href="#Page_213">213</a>, ligne 5: Quelques <i>pastiches</i> maladroits des lettres -de Coulanges et de Sévigné.</p> - -<p>Je désigne ici quelques <i>fragments de lettres</i> fort courts, supposés -extraits de lettres adressées à madame de F*** et à madame de -St-G***, dans la première édition des lettres tirées de la nombreuse -correspondance de madame de Maintenon. Dans la seconde édition, -madame de F*** se trouve être madame de Frontenac, et madame -de St-G*** madame de Saint-Géran. Tous ces intitulés ont été reproduits -dans plusieurs éditions des <i>Lettres de Maintenon</i><a id="FNanchor_895" href="#Footnote_895" class="fnanchor"> [895]</a>, et ils -ont plus ou moins induit en erreur les historiens et les biographes. -Il n'en est pas de même d'une lettre entière supposée écrite par madame -de Maintenon, imprimée d'abord sans aucune date et sans -indication de la personne à qui elle devait être adressée. Cette lettre -semblait avoir été réprouvée comme suspecte par tous ceux qui ont -écrit sur madame de Maintenon. Deux écrivains très-spirituels se -sont avisés de s'en servir comme d'un document authentique pour -pouvoir établir ainsi à une date certaine le commencement de la -passion imaginaire de Louis XIV et de madame de Maintenon, et -expliquer à leur manière la nature de leur liaison. Le style de cette -lettre ne ressemble aucunement à celui de madame de Sévigné. -On y trouve l'expression de <i>gros cousin</i>, copiée d'une des lettres de -celle-ci pour désigner le ministre Louvois, cousin de madame de -Coulanges. Or, l'on sait que madame de Maintenon, soigneuse de -sa dignité dans l'abaissement où le sort l'avait placée, ne parlait -pas des ministres, des personnages riches et puissants avec le -ton familier des Sévigné, des Coulanges et des grandes dames de -la cour.</p> - -<p>Enfin, on y trouve répété, avec une légère variante, ce mot que -Voltaire a le premier rapporté: «Je le renvoie toujours affligé, -mais jamais désespéré.» Mais Voltaire le place dans une lettre à -madame de Frontenac, d'accord en cela avec la Beaumelle. Cette -antithèse a paru si charmante à tous les historiens de Louis XIV ou -de Maintenon que pas un seul ne s'est abstenu de la répéter. Aucun -n'a réfléchi que, si ces paroles ont été écrites par madame de Maintenon, -<span class="pagenum"><a id="Page_430"> 430</a></span> -c'est dans un sens tout différent de celui qu'on leur prête, -dans tout autre circonstance que celle qu'on suppose, puisque autrement -elles impliqueraient que Françoise d'Aubigné, pour réussir dans -ses ambitieux desseins, ne craignait pas de recourir aux artifices -d'une coquette perfide ou d'une habile courtisane. Quoique dans la -seule édition complète du <i>Recueil des lettres de Maintenon</i> qu'il -ait avouée<a id="FNanchor_896" href="#Footnote_896" class="fnanchor"> [896]</a> (Amsterdam, 1755, grand in-12) la Beaumelle n'ait -point inséré cette lettre supposée écrite à madame de Coulanges, -cependant il l'a connue; car à la page la plus fausse et la plus romanesque -qu'il ait tracée dans ces Mémoires, où il y en a tant de -vraies, de curieuses et de bien écrites, il a cité la phrase la plus invraisemblable. -Puis il ajoute: «L'original de cette lettre est entre les -mains de M. de M**, de l'Académie» (t. II, p. 193, liv. VI, chap. III). -Ceux, qui l'ont donnée depuis sans date, ainsi que ceux qui l'ont imprimée, -n'ont point vu cet original, puisqu'ils n'ont su ni à qui elle -était adressée ni comment elle était datée<a id="FNanchor_897" href="#Footnote_897" class="fnanchor"> [897]</a>. Quant à lui, il assigne à -cette lettre une date différente de celle que lui ont donnée les historiens -dont j'ai parlé, et il prête aux visites de Louis XIV un motif -tout autre que celui qu'ils ont supposé.</p> - -<p>Les fragments ont été habilement fabriqués: ceux qui les ont écrits -ont puisé ce qu'ils ont de vrai dans les lettres adressées par madame -de Maintenon à l'abbé Gobelin. Françoise d'Aubigné fut, dans tout -le temps de sa prospérité, justement tourmentée par la crainte de -ne pouvoir concilier le soin de son salut avec les grandeurs et la -vie agitée que son ambition lui avait faite, et elle eut besoin d'être -toujours rassurée par des directeurs de conscience auxquels elle pût -soumettre ses craintes et confier les plus secrets mouvements de son -cœur. L'abbé Gobelin et Godetz-Desmarets, évêque de Chartres, -furent ces deux prêtres ou directeurs. Elle avait bien choisi: ni l'un -ni l'autre n'ambitionnaient ni la gloire de l'éloquence de la chaire ni -les hautes dignités de l'Église; ni l'un ni l'autre n'appartenaient à -l'ordre trop puissant des jésuites: c'étaient deux bons prêtres, uniquement -occupés à remplir avec ponctualité tous les devoirs de leur -saint ministère, très-attentifs à bien diriger une âme aussi belle, -aussi pieuse que celle de Françoise d'Aubigné. Le second surtout -<span class="pagenum"><a id="Page_431"> 431</a></span> -(Godetz-Desmarets), sans ambitionner l'éclat que donne le talent -des controverses ecclésiastiques, sut, à une époque qui est hors des -limites de ces <i>Mémoires</i>, lui inspirer une assez haute idée de son -savoir théologique pour obtenir d'elle une soumission entière à ses -décisions, et la faire marcher dans cette nuit de la foi, comme dit -madame de la Sablière<a id="FNanchor_898" href="#Footnote_898" class="fnanchor"> [898]</a>, au milieu des écueils que le jansénisme, le -jésuitisme et le quiétisme lui présentaient sur sa route et vers lesquels -l'attiraient ou la tiraillaient en sens contraire son alliance de famille -avec le cardinal de Noailles, sa tendresse pour Fénelon, et sa déférence -obligée pour le P. la Chaise.</p> - -<p>Au nombre des écrits de madame de Maintenon ou relatifs à cette -fondatrice, écrits que les dames de Saint-Cyr conservaient dans leurs -archives et dont les élèves s'occupaient à faire des copies, les plus -précieux pour la bien connaître sont les lettres que lui a écrites -l'évêque de Chartres<a id="FNanchor_899" href="#Footnote_899" class="fnanchor"> [899]</a> et celles qu'elle-même écrivit à l'abbé Gobelin.</p> - -<p>Quoique très-courts, les fragments dont j'ai parlé décèlent leur -fausseté par le style toujours imité de Coulanges et de Sévigné, mais -plus encore par leur objet, qui est de donner à l'opinion un vague -sur la nature des liaisons de Louis XIV et de Maintenon, vague qui -plaisait tant aux imaginations des élèves et des dames de Saint-Cyr. -Et ce qui prouve encore plus que ces fragments et quelques autres passages -de lettres sont adressés aux mêmes personnes, ou ont été détournés, -par des changements et interpolations, de leur sens naturel -et vrai, dans un intérêt romanesque, c'est le nom des personnes -auxquelles on suppose que ces lettres ont été écrites. A la cour il -n'y a jamais que de petites indiscrétions calculées. A qui persuadera-t-on -d'ailleurs que madame Scarron, connue, dès sa plus tendre jeunesse, -pour sa discrétion et sa circonspection, se soit avisée d'écrire -à qui que ce soit ce qui pouvait se passer entre elle et Louis XIV -dans leurs mystérieux tête-à-tête?</p> - -<p>Voltaire dit que madame de Frontenac était cousine de madame -de Maintenon; et cependant madame de Maintenon paraît avoir été -liée moins intimement avec elle qu'avec madame de Saint-Géran. -Celle-ci est assez connue par la lecture de ces <i>Mémoires</i>. On sait -qu'elle fut quatre ans expulsée de la cour, et qu'elle fit auprès de madame -de Maintenon de constants et inutiles efforts pour être admise -à Marly.</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_432"> 432</a></span> -Sans doute mesdames de Frontenac et de Saint-Géran, devenues -plus régulières et peut-être sincèrement pieuses dans un âge avancé, -s'attirèrent la considération et les égards qui leur étaient dus, et firent -le charme des sociétés par leur esprit, leur amabilité et le suprême -talent du savoir-vivre. Saint-Simon l'atteste, et c'est vraisemblablement -le souvenir des temps de leur liaison avec madame de Maintenon -qui aura donné l'idée de placer leur nom en tête des fragments -dont j'ai parlé; mais alors même celle-ci ne leur aurait pas confié -des secrets qui étaient aussi ceux du roi. Ainsi les fragments de -lettres ou tous les passages de lettres qui tendent à accréditer une -telle pensée sont nécessairement apocryphes, ou formés à l'aide de -phrases habilement tronquées ou rapprochées de manière à présenter -un sens tout opposé à celui qu'elles avaient; ou bien ce sont de -véritables lettres écrites par une personne autre que madame de -Maintenon et pour d'autres que mesdames de Frontenac et de Saint-Géran.</p> - -<p>Cent ans se sont écoulés depuis que Voltaire et la Beaumelle ont -écrit sur le siècle de Louis XIV; et l'on trouve dans les ouvrages de -ces deux auteurs relatifs à madame de Maintenon des faits qui se -heurtent, des jugements inconciliables, qui les mettent en contradiction -l'un avec l'autre. Les écrivains qui depuis ont tracé des histoires -ou des notices sur la vie de Françoise d'Aubigné, ont rarement manqué -l'occasion de se plaindre de la légèreté de Voltaire; mais ils témoignent -un mépris complet pour l'ouvrage de la Beaumelle, et s'abstiennent -de le citer, ou ne le citent que fort rarement. Je suis néanmoins -en mesure d'affirmer qu'on ne trouve chez aucun d'eux un seul -fait, un seul détail de faits, une seule appréciation favorable ou défavorable, -une seule vérité, une seule erreur qui ne soit dans la Beaumelle.</p> - -<p>Comme pour décrire ce chapitre <span class="smallc">XI</span>, restreint dans son objet, nous -avions besoin d'embrasser dans notre pensée l'histoire de la longue -vie de madame de Maintenon, nous avons été obligé, pour faire avec -fruit cette étude, de soumettre à un examen critique les écrits de -la Beaumelle et de Voltaire sur le siècle de Louis XIV et particulièrement -sur madame de Maintenon, et aussi la controverse violente -qui s'est élevée entre les deux auteurs.—Jamais sujet plus curieux -d'investigation sur l'histoire du grand siècle et sur l'histoire -littéraire du siècle qui l'a suivi ne s'était rencontré sur notre route. -Mais, après avoir terminé cet examen, nous nous sommes aperçu -qu'il était trop volumineux, et que s'il devait être publié un jour -<span class="pagenum"><a id="Page_433"> 433</a></span> -comme un appendice à ces <i>Mémoires</i>, ce n'était pas dans ce volume -qu'il était convenable de le placer.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_213">213</a>, ligne 7: Des mémoires rédigés d'après des bruits de cour.</p> - -<p>Du nombre de ces bruits de cour, je mets l'avis du duc de Montausier, -donné au roi au sujet du refus d'absolution fait à madame -de Montespan, le petit colloque de Louis XIV et de Bourdaloue -sur la retraite de madame de Montespan à Clagny, et l'entretien -de Bossuet et de madame de Montespan rapporté par M. de Bausset.—Relativement -à ce dernier fait, le judicieux M. de Bausset lui-même, -qui l'a rapporté d'après le manuscrit de l'abbé Ledieu (l'abbé -Ledieu n'entra chez Bossuet qu'en 1684), fait observer que le caractère -de madame de Montespan et celui de Bossuet le rendent invraisemblable. -M. de Bausset a été trompé, pour ce qui concerne -Montausier, par le fragment d'une lettre de madame de Maintenon -à madame de Saint-Géran, qui est apocryphe.—M. de Montausier a -contribué sans doute avec Bossuet à la détermination du roi: madame -de Caylus le dit<a id="FNanchor_900" href="#Footnote_900" class="fnanchor"> [900]</a>; mais ce ne fut pas de la même manière que le -raconte la lettre apocryphe. Il n'était point dans le caractère de -Louis XIV de consulter le duc de Montausier ou le maréchal de Bellefonds -sur les matières ecclésiastiques. Hors de la chaire évangélique -et du confessionnal, si quelqu'un de ses sujets se permettait de -lui faire des observations sur la religion, c'est qu'il lui en avait donné -l'ordre. Il ne plaisantait pas non plus avec le père Bourdaloue, -homme sérieux, et incapable de faire au roi, qui lui adressait la parole -d'une manière aimable, une réponse aussi impertinente que celle -qu'on lui a prêtée.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_214">214</a>, ligne 14: La grâce, l'esprit, la raison, s'unissaient en elle -dans une juste mesure... Naturellement impatiente, vive, enjouée.</p> - -<p>L'âge ne la changea point, et ne la rendit pas plus sévère.—Voici -ce qu'elle disait à ses élèves de Saint-Cyr:</p> - -<p>«Pour vivre ensemble, la raison est préférable à l'esprit... Rien -n'est plus aimable que la raison; mais il ne faut pas la trop prodiguer, -<span class="pagenum"><a id="Page_434"> 434</a></span> -et les personnes qui raisonnent toujours ne sont pas raisonnables. -Ce qu'il est plus essentiel de mettre dans le commerce de la -vie, c'est de la complaisance, de la joie, du badinage, du silence, de -la condescendance et de l'attention aux autres. La piété peut sauver -sans la raison; mais la piété ferait beaucoup plus de bien si elle était -réglée par la raison.» (<i>Conversations de madame la marquise</i> -<span class="smallc">de Maintenon</span>; 3<sup>e</sup> édit., Paris, Blaise, 1828, in-18, p. 8 et 9, <i>convers.</i> -I.)</p> - -<p>«L'esprit ne nous rend pas plus sage ni plus heureuse. La raison -nous rend aimable; elle résiste aux passions, aux préventions; elle -nous fait surmonter nos passions, et souffrir celles des autres.» -(<i>Ibid.</i>, p. 100, <i>conv. XXIV.</i>)</p> - -<p>«Un esprit mal fait, disait-elle, m'effraye partout.» (Voyez <i>Mémoires -de Maintenon</i>, recueillis pour les dames de Saint-Cyr, 1826, -in-12, p. <span class="smallc">VIII</span> de la préface et p. 271.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_214">214</a>, ligne 20: Le besoin de se faire des protecteurs la rendit -insinuante et complaisante.</p> - -<p>«Elle fait consister tous les moyens de plaire dans un seul, la politesse. -Mais la grande politesse consiste à ménager en tout et partout -les gens avec lesquels nous vivons, à ne les blesser jamais, à entrer -dans tout ce qu'ils veulent, à ne contrarier ni ce qu'on dit ni ce -qu'on fait.» (<i>Conversations de la marquise</i> <span class="smallc">de Maintenon</span>, 3<sup>e</sup> édit., -1828, in-18, <i>Dialogue sur la société</i>, p. 3.)</p> - -<p>«En société, on n'a qu'à choisir entre la souffrance ou la contrainte.» -(<i>Ibid.</i>, p. 21.)</p> - -<p>Quand on s'accoutume de bonne heure à s'occuper des autres, on -s'en fait une habitude. Toute la philosophie de madame de Maintenon -et le secret de son élévation se trouvent dans ces paroles qu'elle -a écrites, où elle fait elle-même son éloge:</p> - -<p>«Je persiste à croire que la jeunesse ne peut être trop sensible -aux louanges des honnêtes gens, à l'honneur, à la réputation; et -qu'il n'y a que les courages élevés qui soient capables de tout faire -pour y parvenir.» (<i>Conv.</i>, t. I, p. 239.)</p> - -<p class="pnote"><span class="pagenum"><a id="Page_435"> 435</a></span> -Page <a href="#Page_214">214</a>, ligne 20, et p. <a href="#Page_215">215</a>, ligne première: La religion, à laquelle... -elle savait faire parler un langage doux, juste, éloquent -et court, etc.</p> - -<p>«Dans le christianisme, dit-elle dans une de ses lettres, l'important -n'est pas de beaucoup agir, mais de beaucoup aimer.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_215">215</a>, lignes 2 et 3: L'infortune lui ravit l'âge des illusions.</p> - -<p>De toutes les qualités que madame de Maintenon cherche à inspirer -à ses élèves de Saint-Cyr pour leur bonheur futur, c'est la prudence -et la circonspection. Elle leur dit:</p> - -<p>«Il faut de la discrétion, même dans la vertu..... Il faut se contraindre, -même dans le commerce que l'on a avec ses amis..... En -s'abstenant d'écrire, on se retranche un plaisir, on s'assure un grand -repos. Si on est assez malheureuse pour changer d'amis, on n'appréhende -point qu'ils confient à d'autres les confidences que nous -leur avons faites..... Il n'y a rien de si dangereux que les lettres: -il y a beaucoup de personnes imprudentes qui les montrent; il y en -a beaucoup de méchantes qui veulent nuire. Il s'en perd par hasard; -le porteur peut être gagné, la poste peut être infidèle. Celui à -qui vous vous fiez se fie souvent à d'autres.</p> - -<p>«Les lettres ont déshonoré des femmes. Elles ont coûté la vie à -des hommes, elles ont fait des querelles, elles ont découvert des -mystères.» (<i>Conversations inédites de madame</i> <span class="smallc">de Maintenon</span>; Paris, -1828, in-18, t. II, p. 70-73, <i>Convers. IX sur les lettres</i>, et -<i>Convers. XI des anciennes</i>, t. I, 1828, in-18, p. 90.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_215">215</a>, ligne 18: La jeune <i>Indienne</i>.</p> - -<p>On devait aimera lui donner ce surnom, parce qu'elle intéressait -dans la conversation par les souvenirs qu'elle avait conservés de l'île -de la Martinique, où elle avait passé sa toute petite enfance. Elle -étonna beaucoup Segrais en lui apprenant que, dans ce pays, les -ananas se mangeaient tout crus. On n'en recevait encore en Europe -que confits et en morceaux. Ce fut elle qui fit connaître au poëte -traducteur des <i>Géorgiques</i> la couleur dorée, la forme globuleuse et -festonnée de ce fruit, surmonté de son magnifique panache de -<span class="pagenum"><a id="Page_436"> 436</a></span> -feuilles vertes et élancées. (<span class="smallc">Segrais</span>, <i>Œuvres diverses</i>, 1723, in-12, -p. 148.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_216">216</a>, ligne 6: Autrement que par l'aptitude négative de son -tempérament.</p> - -<p>Godetz Desmarets, évêque de Chartres, toucha ce point avec une -grande délicatesse, dans une réponse à madame de Maintenon sur une -de ses <i>redditions</i>, qui étaient des confessions écrites, plus explicites, -plus confidentielles que les confessions ordinaires. Elle lui avait dit -qu'elle croyait commettre un péché chaque fois que, cédant aux désirs -du roi, elle cessait d'être son amie pour devenir son épouse.—Il lui -répond:</p> - -<p>«C'est une grande pureté de préserver celui qui vous est confié des -impuretés et des scandales où il pourrait tomber. C'est en même -temps un acte de soumission de patience et de charité..... Malgré -votre inclination, il faut rentrer dans la sujétion que votre vocation -vous a prescrite..... Il faut servir d'asile à une âme qui se perdrait -sans cela. Quelle grâce que d'être l'instrument des conseils de Dieu, -et de <i>faire</i> par pure vertu ce que tant d'autres font sans mérite ou -par passion!» (<span class="smallc">La Beaumelle</span>, t. VI, p. 79-82.)</p> - -<p>Elle avait bien choisi son directeur. Godetz-Desmarets n'était pas -un évêque de cour, c'était un saint homme; ses lettres à madame -de Maintenon et toute sa conduite le prouvent. A lui seul elle s'était -confiée, et il se pourrait bien que ce fût lui qui bénit en secret, -et seul, le mariage sur lequel on fit tant de récits à la cour. Harlay -était un homme de mauvaises mœurs, et que madame de Maintenon -estimait peu; au lieu qu'elle ne cachait rien à l'évêque de Chartres. -Celui-ci lui écrit: «Après ma mort, vous choisirez un directeur auquel -vous donnerez vos <i>redditions</i>. Vous lui montrerez les écrits qu'on -vous a donnés pour votre conduite. <i>Vous lui direz vos liens.</i>»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_217">217</a>, ligne 2: Lui valurent d'être tenue sur les fonts de baptême -par la femme du gouverneur.</p> - -<p>Dans la notice historique sur madame de Maintenon par M. Monmerqué, -placée en tête des <i>Conversations inédites</i>, in-18, Paris, -Blaise, 1828, il est dit qu'elle naquit le 27 novembre 1635, fut baptisée -par un prêtre catholique, et tenue sur les fonts par le duc de la -<span class="pagenum"><a id="Page_437"> 437</a></span> -Rochefoucauld, gouverneur de Poitou, et par Françoise Tiraqueau, -comtesse de Neuillant, dont le mari était gouverneur de Niort. Le -nouvel historien de Maintenon, 1848, in-8<sup>o</sup>, t. I, p. 73, copiant la -Beaumelle (<i>Mémoires pour servir à l'histoire de mad. de Maintenon</i>; -Amsterdam, 1755, in-12, t. I, p. 103), dit au contraire que la -marraine fut Suzanne de Baudran, fille du baron de Neuillant. La -Beaumelle cite les Mémoires mss. de mademoiselle d'Aumale; mais -M. Monmerqué a vu aussi ces Mémoires. La Beaumelle remarque, en -note, que Françoise d'Aubigné ne fut baptisée que le lendemain -28 novembre; circonstance omise par les deux historiens mentionnés -ci-dessus.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_217">217</a>, lignes 4 et 5: Sa mère, femme instruite, de courage et de -vertu.</p> - -<p>Les historiens de madame de Maintenon auraient bien dû éclaircir -le vague qui règne dans l'histoire de madame d'Aubigné et dans -celle des premières années de son illustre fille. Ils se sont contentés -de se copier les uns après les autres. La Beaumelle cependant est plus -précis et plus détaillé. Dans le tome VI de ses Mémoires, il a publié -des extraits de pièces qui jettent quelque jour sur cette partie de -l'histoire de Maintenon, et entre autres une lettre de madame d'Aubigné -à madame de Villette, écrite de la Martinique, datée du 2 juin -1646 dans la copie, date que la Beaumelle croit fausse. (Voyez <i>Mém. -pour servir à l'histoire de Maintenon</i>, t. VI, p. 34 à 38.) On eût -trouvé surtout beaucoup de lumières sur l'histoire de la famille d'Aubigné -dans les pièces du procès que la mère de madame de Maintenon -eut à soutenir contre MM. de Nesmond-Sensac et de Caumont. -(<span class="smallc">La Beaumelle</span>, <i>Mém.</i>, t. I, p. 107.) Ces pièces sont probablement -dans les nombreux portefeuilles de Noailles, ou dans les archives de -Maintenon. Il faudrait surtout discuter le récit contenu dans les fragments -de Mémoires sur la vie de la marquise de Maintenon, par le père -Laguille, jésuite; récit erroné en quelques endroits, mais curieux, en -ce que son auteur cite des témoins contemporains des faits. (Conférez -<i>Fragments de Mémoires sur la vie de la marquise de Maintenon</i>, -par le père Laguille, jésuite, dans les <i>Archives littéraires</i>, -12 vol., trim. d'octobre 1806, in-8<sup>o</sup>.) Ce morceau, défiguré par des -fautes typographiques, et qui fut publié par Chardon de la Rochelle, -n'a été, je crois, connu d'aucun des auteurs qui ont écrit sur madame -<span class="pagenum"><a id="Page_438"> 438</a></span> -de Maintenon, car ils n'en font pas mention. Laguille est né en 1658, -et a été contemporain de madame de Maintenon. Il dit que, dans le -Béarn et le Poitou, Théodore-Agrippa d'Aubigné passait pour fils bâtard -de la reine Jeanne d'Albret et d'un de ses secrétaires; assertion -que la Beaumelle a bien réfuté dans ses <i>Mémoires de Maintenon</i>, -t. I, p. 10 et 14. (Conférez à ce sujet le <i>Mercure galant</i> de -1688 et de janvier 1705.)—Selon le récit d'un nommé Delarue, de -Niort, madame d'Aubigné, mère de madame de Maintenon, alla d'abord -à la Martinique et de là à la Guadeloupe, où elle resta deux ans dans -l'habitation de Delarue. Elle se rendit ensuite à l'île Saint-Christophe, -où elle mourut, attendant un bâtiment pour la transporter en France. -Ses deux enfants, d'Aubigné et sa sœur <i>Francine</i> (madame de Maintenon), -furent, par les soins d'une demoiselle, transportés à la Rochelle. -Selon le père Duver, jésuite, doyen, mort à Nantes en 1703, -le collége des jésuites de la Rochelle fournissait du pain et de la viande -à d'Aubigné et à sa sœur. Ils furent conduits ensuite chez M. de Montabert, -à Angoulême. Ce fut là qu'un jeune gentilhomme nommé d'Alens, -voulut épouser la jeune Francine, et lui prédit, dit-on, sa -grande fortune. (P. 369-370.) Le reste du récit de Laguille s'accorde -assez bien avec ce que l'on sait de l'histoire de madame de Maintenon; -mais il y a des fautes de copiste qu'il eût été facile à Chardon de la -Rochette de corriger: ainsi le nom de Neuillans est tantôt converti -en <i>Noïailles</i> et tantôt en <i>Neuillians</i>. Laguille dit, p. 376, que d'Aubigné -fut d'abord placé comme page chez le marquis de Pardaillan, -gouverneur du Poitou.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_217">217</a>, ligne 20: Les détails les plus minutieux de l'économie -domestique.</p> - -<p>La Dauphine avait une forêt de cheveux, que madame de Maintenon -démêlait sans douleur: elle régnait à la toilette. Louis XIV s'y rendait -souvent. Cette dame disait depuis: «Vous ne sauriez croire combien -le talent de bien peigner une tête a contribué à mon élévation.» -(<span class="smallc">La Beaumelle</span>, tome II, p. 175.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_218">218</a>, ligne 10: De ne pouvoir parvenir «à l'<i>écrasement de -l'amour-propre</i>.»</p> - -<p>Madame de Maintenon a dit:</p> - -<p>«On n'échappe à l'amour-propre que par l'amour de Dieu.» (<i>Convers.</i>, -t. I, p. 30.)</p> - -<p><span class="pagenum"><a id="Page_439"> 439</a></span> -«Le bon esprit ne peut se distinguer de la sagesse et de la raison.» -(<i>Convers.</i>, t. I, p. 32.)</p> - -<p>«La sagesse implique la dévotion; car que serait une abnégation -de soi-même qui resterait sans récompense?» (<i>Convers.</i>, t. I, p. 36.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_218">218</a>, ligne 23: Celui de paraître par le cœur au-dessus de la -place qu'elle occupait.</p> - -<p>«L'élévation des sentiments consiste à se rendre digne de tout, sans -vouloir rien de disproportionné à ce que nous sommes.» (<span class="smallc">Maintenon</span>, -<i>Convers.</i>, 3<sup>e</sup> édit., p. 219, chap. <span class="smallc">XXVII</span>.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_222">222</a>, lignes 1 et 2: <i>Les Conversations, les Proverbes.</i></p> - -<p>Le dialogue le plus ingénieux et le plus piquant de tous ceux que -madame de Maintenon a composés pour ses élèves de Saint-Cyr, -qu'elle leur faisait apprendre par cœur, et qui nous donne l'idée la -plus nette de son caractère à la fois modéré et énergique, est celui sur -les quatre vertus cardinales, parce qu'elle a su donner à une vérité -incontestable l'apparence d'un paradoxe. (T. I, p. 63-73.)</p> - -<p>Elle fait parler la Justice, la Prudence, la Force et la Tempérance, -pour prouver que cette dernière vertu est la première de toutes, la -plus essentielle; et par la tempérance elle n'entend pas seulement -la sobriété, mais la modération en toutes choses.</p> - -<p>La Force fait à la Tempérance cette objection: «Ne peut-on point -être trop modéré?—Non, répond la Tempérance; cela ne serait -plus la modération, car elle ne souffre ni le trop ni le trop peu.»</p> - -<p>La Tempérance dit: «Je détruis la gourmandise et le luxe; je -m'oppose à tout mal, et je règle le bien. Sans moi, la justice serait -insupportable à la faiblesse des hommes; la force les mettrait au -désespoir, la prudence perdrait son temps à tout peser.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_223">223</a>, ligne 18: Un gentilhomme de sa province. Et note 485: -Conférez <span class="smallc">Méré</span>.</p> - -<p>On n'a imprimé, que je sache, aucun vers de Méré: il en faisait cependant, -et voici une jolie épigramme de lui que je tire du recueil -de Duval de Tours (<i>Nouveau choix de pièces choisies</i>; la Haye, -1715, p. 185):</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p>Au temps heureux où régnait l'innocence,</p> -<div><span class="pagenum"><a id="Page_440"> 440</a></span></div> -<p>On goûtait en aimant mille et mille douceurs,</p> -<p class="i1"> Et les amants ne faisaient de dépense</p> -<p class="i3"> Qu'en soins et qu'en tendres ardeurs.</p> -<p class="i3"> Mais aujourd'hui, sans opulence,</p> -<p class="i3"> Il faut renoncer aux plaisirs.</p> -<p>Un amant qui ne peut dépenser qu'en soupirs</p> -<p class="i3"> N'est plus payé qu'en espérance.</p> -</div></div> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_224">224</a>, ligne 16: Écrivant selon l'occasion et le besoin, facilement, -agréablement.</p> - -<p>C'est ce dont il se vante et avec juste raison (t. I, p. 130), dans cette -ode de héros burlesque, en style qui n'est nullement burlesque:</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p>On peut écrire en vers, en prose,</p> -<p>Avec art, avec jugement;</p> -<p>Mais écrire avec agrément,</p> -<p>Mes chers maîtres, c'est autre chose.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p>Les vers ont aussi leur destin:</p> -<p>Un poëme de genre sublime</p> -<p>Que son auteur lime et relime,</p> -<p>Ne vit quelquefois qu'un matin.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p>Cependant des auteurs comiques,</p> -<p>Des meilleurs, dont il est fort peu,</p> -<p>Ne sont pas bons à mettre au feu,</p> -<p>Au jugement des héroïques.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p>J'en sais de ceux au grand collier,</p> -<p>Des plus adroits à l'écritoire,</p> -<p>Qui pensent aller à la gloire,</p> -<p>Et ne vont que chez l'épicier.</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p>Ce n'est pas dans une ruelle,</p> -<p>Devant de célestes beautés</p> -<p>Ou des partisans apostés,</p> -<p>Qu'on met un livre à la coupelle:</p> -</div> -<div class="stanza"> -<p>C'est au palais, chez les marchands,</p> -<p>Où la vente, mauvaise ou bonne,</p> -<span class="pagenum"><a id="Page_441"> 441</a></span> -<p>A tous ouvrages ôte ou donne</p> -<p>Le nom de bons et de méchants.</p> -</div></div> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_225">225</a>, ligne 21: Elle avait bien raison de se comparer à la cane -qui regrette sa bourbe<a id="FNanchor_901" href="#Footnote_901" class="fnanchor"> [901]</a>.</p> - -<p>Le 25 janvier 1702, elle écrit, de Saint-Cyr, au duc d'Ayen, depuis -duc de Noailles: «Il y aura demain quinze jours que je suis enrhumée, -et en spectacle aux courtisans, aux médecins, aux princes, -caressée, ménagée, blâmée, chicanée, tourmentée, considérée, accablée, -dorlotée, contrariée, tiraillée.» <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres</i>, t. V, -p. 27, édit. d'Amst., 1756, in-8<sup>o</sup>.</p> - -<p>Dans une lettre datée de Marly le 27 avril 1705, elle dit au comte -d'Ayen:</p> - -<p>«Si j'habite encore longtemps la chambre du roi, je deviendrai -paralytique. Il n'y a ni porte ni fenêtre qui ferme; on y est battu -d'un vent qui me fait souvenir des ouragans d'Amérique.» (<i>Lettres</i>, -t. V, p. 47, édit. 1756.)—Louis XIV avait un tempérament de fer, et -n'aimait pas les appartements trop renfermés et trop chauds.</p> - -<p>Le 19 avril 1717, deux ans avant sa mort, elle écrit à madame de -Caylus:</p> - -<p>«On rachète bien les plaisirs et l'enivrement de la jeunesse. Je -trouve, en repassant ma vie, que depuis l'âge de trente-deux ans -(cette date nous reporte à 1675-1676, qui est celle du chapitre <span class="smallc">XI</span> et -de ceux qui le précèdent et le suivent), qui fut le commencement -de ma fortune, je n'ai pas été un moment sans peines, et qu'elles ont -toujours augmenté.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_226">226</a>, lignes 2 à 4: Elle jouissait alors de l'amitié de tous, sans -rien perdre de l'estime, de la considération et du respect qui lui -étaient dus.</p> - -<p>Elle a dit de l'heureux temps de sa jeunesse:</p> - -<p>«Je ne voulais point être aimée en particulier de qui que ce fût: -je voulais l'être de tout le monde, faire prononcer mon nom avec admiration, -avec respect. Je me contrariais dans tous mes goûts. Il -n'est rien que je n'eusse été capable de souffrir pour conquérir le -nom de femme forte. Je ne me souciais point de richesses; j'étais -<span class="pagenum"><a id="Page_442"> 442</a></span> -élevée de cent piques au-dessus de l'intérêt: je voulais de l'honneur.—Oh! -dites-moi, ma fille, y a-t-il rien de plus opposé à la vraie -vertu que cet orgueil dans lequel j'ai usé ma jeunesse?» (<i>Entretiens -de madame</i> <span class="smallc">de Maintenon</span>, dans <span class="smallc">la Beaumelle</span>, <i>Mémoires</i>, t. VI, -p. 176 et 177, édit. d'Amsterdam, 1756, in-12.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_229">229</a>, lignes 2 et 3: Il désira vivement mettre, dans la galerie -de celles dont il avait triomphé, etc.</p> - -<p>Madame de Caylus, dont la conduite a été loin d'être régulière, -quoiqu'elle ait été l'élève chérie de madame de Maintenon, se montre -persuadée en ses Mémoires que, dans la liaison de sa tante avec -Villarceaux, il ne s'est rien passé de contraire à la vertu. Mais, en -rapportant le mot malin de la marquise de Sussay à ce sujet, elle -semble vouloir établir un doute.</p> - -<p>Il y a dans Gueroult, poëte du seizième siècle, une pièce de vers -charmante. Ce sont des stances qui expriment les sentiments d'un -peintre devenu amoureux fou d'une grande dame en faisant son -portrait. Il n'osa pas lui déclarer son amour; mais il fit en secret une -copie de ce portrait, et à cette charmante tête il ajouta un corps nu, -aussi parfait que celui de la Vénus de Médicis.—La grande dame surprit -le peintre au moment où il terminait son travail: courroucée, -elle demande à l'artiste pourquoi il a fait un portrait si mensonger, -et comment il a eu l'audace de peindre ce qu'il n'a jamais vu? «Cela -est juste, lui dit le peintre; mais, en voyant un visage si beau et si -parfait, je n'ai jamais douté que tout le reste du corps ne fût semblable; -et, sans espérance de pouvoir contempler tant d'appas, j'ai -voulu, par mon art, en posséder l'image.» D'après l'assertion de -la Beaumelle, Villarceaux, irrité des refus de madame de Maintenon, -l'aurait fait peindre comme sortant du bain, devant un génie noir et -laid qui tient un miroir où se réfléchissent les plus secrets appas de la -beauté. (<span class="smallc">La Beaumelle</span>, <i>Mémoires sur madame de Maintenon</i>, t. I, -p. 198, Amsterdam, 1756, liv. II, ch. XVI.) Quoique la Beaumelle ne -cite aucune autorité, le fait est possible. Mais cette basse vengeance, -que Girodet a imitée de nos jours à l'égard de madame Simons (autrefois -mademoiselle Lange, jolie actrice, si j'ai bonne mémoire), prouve -plutôt l'échec de Villarceaux que son triomphe. Ceux qui avouent -que Françoise d'Aubigné, après avoir résisté à ses nombreux adorateurs, -n'a été faible qu'avec Villarceaux, oublient la juste réflexion de -<span class="pagenum"><a id="Page_443"> 443</a></span> -la Rochefoucauld: «Qu'il est plus difficile de trouver une femme -qui n'a eu qu'un seul amant, qu'une femme qui n'en eut jamais.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_230">230</a>, avant-dernière ligne: Le nom de l'auteur de la -<i>Mazarinade</i>.</p> - -<p>Cette satire montre bien à quels excès on peut se laisser aller dans -les temps de divisions politiques. Scarron, qui n'était pas méchant, -accuse Mazarin d'avoir empoisonné le président Barillon, d'avoir -volé les diamants de la reine d'Angleterre, après l'avoir laissée mourir -de faim. Il lui souhaite le destin du maréchal d'Ancre; il veut que l'on -vende ses meubles à l'encan (ce qui fut fait), et il l'apostrophe ainsi:</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p>Va, va-t'en dans Rome étaler</p> -<p>Les biens qu'on t'a laissé voler;</p> -<p>Va, va-t'en, gredin de Calabre,</p> -</div></div> - -<p>Puis viennent d'ignobles gravelures qu'on ne saurait lire sans dégoût, -et dont les parlementaires se réjouissaient. Enfin il conclut en -disant:</p> - -<div class="poetry"><div class="stanza"> -<p>On te reverra dans Paris;</p> -<p>Et là, comme au trébuchet pris,</p> -<p>Et de la rapine publique,</p> -<p>Et de ta fausse politique,</p> -<p>Et de ton sot gouvernement,</p> -<p>Au redoutable parlement,</p> -<p>Dont tu faisais si peu de compte,</p> -<p>Ultramontain, tu rendras compte;</p> -<p>Puis, après ton compte rendu,</p> -<p>Cher Jules, tu seras pendu</p> -<p>Au bout d'une vieille potence,</p> -<p>Sans remords et sans repentance,</p> -<p>Sans le moindre mot d'examen,</p> -<p>Comme un incorrigible. <i>Amen.</i></p> -</div></div> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_236">236</a>, note 521: <i>Œuvres diverses d'un auteur de sept ans, ou -recueil des ouvrages de M. le duc</i> <span class="smallc">du Maine</span>, <i>qu'il a faits pendant -l'année 1677 et dans le commencement de l'année 1678</i><a id="FNanchor_902" href="#Footnote_902" class="fnanchor"> [902]</a>.</p> - -<p>A la page 207 des <i>Nouvelles de la république des lettres</i> (février -<span class="pagenum"><a id="Page_444"> 444</a></span> -1685, Amsterdam, 1686, 2<sup>e</sup> édition), il est dit que c'est Benserade qui -a fait présent de ce rare volume au journaliste, qui était, je crois, le -Clerc, et non Bayle. On ajoute: «Selon toutes les apparences, c'est -madame de Maintenon qui a fait l'épître dédicatoire.» Puis en note -il est dit: «On a su depuis qu'elle a été composée par M. Racine; -mais c'était pour madame de Maintenon.» Racine, qui depuis a su -prêter à l'enfance, dans <i>Athalie</i>, un langage divin, ne composait pas -les lettres de madame de Maintenon; et s'il avait eu à faire parler -le jeune duc du Maine dans une épître dédicatoire, il l'aurait fait -autrement que madame de Maintenon. Mais il est tout naturel qu'un -savant hollandais ne sût pas cela, et ne soupçonnât pas en Françoise -d'Aubigné le talent d'écrivain. Le grand roi le connaissait bien, lui, -qui, après avoir lu les instructions données à la duchesse de Bourgogne -par madame de Maintenon, et trouvées dans la cassette de -cette princesse après sa mort, voulut qu'il en fût fait des copies. Madame -de Maintenon s'y opposait; mais Louis XIV insista et dit: -«C'est pour mes enfants; il faut bien que ma famille ait quelque -chose de vous.»</p> - -<p>Qu'il me soit permis de faire remarquer que ces instructions religieuses, -sous le rapport des pensées, de la religion et du style même, -qui est vif et concis, sont bien supérieures à celles qui ont été données -par l'archevêque de Cambrai à madame de Maintenon elle-même, -et à sa demande. Il y a dans ces dernières une forte dose de -mysticisme, qui aurait pu avoir une influence fâcheuse sur un esprit -faible<a id="FNanchor_903" href="#Footnote_903" class="fnanchor"> [903]</a>. Fénelon s'y abandonne trop à sa rancune amère contre -Louis XIV, qui, avec juste raison, n'avait pu goûter ses chimériques -systèmes de gouvernement. Il dit durement à cette femme que -le roi (son mari alors) ne pratique pas ses devoirs, et qu'il n'en a aucune -idée (t. III, p. 224). Enfin, tout en blâmant la règle qu'elle -s'était faite de ne s'occuper en rien des affaires d'État et de la politique, -il lui reproche son indifférence à cet égard, et, au nom de la -<span class="pagenum"><a id="Page_445"> 445</a></span> -religion, il l'exhorte à s'en mêler, et cherche à la jeter par la flatterie -dans les intrigues de cour, en lui disant: «Il me paraît que votre esprit -naturel et acquis a bien plus d'étendue que vous ne lui en donnez.» -(T. III, p. 219.)</p> - -<p>C'est le contraire qui était vrai. Madame de Maintenon avait un -excellent jugement, un esprit fin, délié, ferme et éclairé, dans le -cercle où elle s'était renfermée; mais ce cercle était resserré: elle -n'aimait pas à en sortir. Elle n'exprimait son avis sur les affaires -d'État que par un signe d'approbation ou de désapprobation, et encore -parce que Louis XIV l'y forçait. Une fois seulement, elle dressa -un mémoire sur la grande affaire de la révocation de l'édit de Nantes. -Elle y fut amenée par tout le clergé et par les ministres eux-mêmes, -qui, dans les circonstances difficiles où l'on se trouvait, avaient le -droit d'exiger le secours de ses lumières.—Le style de madame -de Maintenon est plus pur et plus régulier que celui de madame de Sévigné. -Ses lettres même sont mieux composées; elles ont toujours -un motif, un but qu'elles atteignent parfaitement. Il n'y a aucun désordre, -aucune inconséquence dans les idées, aucune contradiction -dans les jugements; mais on n'y retrouve pas l'imagination et le coloris -de madame de Sévigné. Les lettres de madame de Maintenon, -c'est de l'histoire générale ou particulière; celles de madame de Sévigné -sont des feuilletons pour amuser madame de Grignan.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_238">238</a>, lignes 27 et 28: Elle détermina le vieux duc de Villars-Brancas -à demander sa main.</p> - -<p>Cette seconde proposition d'un mariage pour madame Scarron -paraît résulter des récits comparés de madame du Pérou, que nomme -positivement la Beaumelle, qui semble avoir eu des mémoires plus -circonstanciés sur ce fait que les dames de Saint-Cyr; car il dit, -t. II, p. 110:</p> - -<p>«Elle (madame de Montespan) avait jeté les yeux sur le duc de V... -B..., qu'une jeunesse passée dans les plaisirs, une vieillesse malsaine, -et deux femmes assez méchantes, n'avaient pas dégoûté du mariage.» -Et en note il ajoute que ce duc de V.. B.. était fils de George -B..., et frère de la princesse d'..., morte en 1679. Ce que dit Saint-Simon -sur le titre de duc donné au Brancas, fils de Villars (<i>Mémoires -complets et authentiques</i>, t. XIV, p. 201), semble confirmer -que la Beaumelle a voulu désigner ici le duc de Villars-Brancas, -<span class="pagenum"><a id="Page_446"> 446</a></span> -père de Brancas le distrait.—Le duc de Brancas, né en 1663, mort -en 1739, marié à sa cousine germaine, fille de Brancas le distrait, -et qui a fait le premier un si juste éloge des lettres de madame de -Sévigné (voyez t. XII, p. 450 de l'édition de Gault de S.-G.), était -peut-être le fils de celui qui se proposa pour épouser la veuve Scarron. -(Conférez <i>Lettres de</i> <span class="smallc">Sévigné</span>, tome VI, p. 240 et 379 de l'édit. -Monmerqué, 1820, in-8<sup>o</sup>, et <span class="smallc">Tallemant des Réaux</span>, <i>Historiettes</i>, t. II, -p. 139 de l'édit. in-8<sup>o</sup>.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_241">241</a>, ligne 16: Plus énergique.</p> - -<p>Elle écrit au cardinal de Noailles pour lui apprendre qu'elle avait -sacrifié les intérêts de sa propre nièce, la maréchale de Noailles:</p> - -<p>«Eh bien, voilà les dames nommées, voilà la maréchale désespérée! -Mon état et ma destinée est d'affliger et de desservir tout ce -que j'aime. J'en souffre beaucoup, mais je ne varierai point dans la -loi que je me suis faite, de sacrifier mes amis à la vérité et au bien.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_242">242</a>, ligne 2: Auquel elle rendait compte dans des lettres qui -quelquefois avaient huit ou dix pages.</p> - -<p>Ces lettres, si on les possédait, pourraient seules servir de pièces -de comparaison avec celles de madame de Sévigné. Tout ce qui nous -reste de cette dame est uniquement relatif ou aux personnes à qui elle -écrit, ou à elle-même, et, par cette raison, offre peu de variété dans -le fond comme dans la forme. Mais madame de Maintenon savait que -Louis XIV aimait à trouver, dans la lecture des lettres bien écrites, -une distraction agréable. Elle dut donc, pendant son voyage à Baréges, -chercher, comme madame de Sévigné, à plaire autant qu'à informer; -mais ces lettres, moins riches de ces expressions heureuses qui jaillissent -d'une vive imagination, devaient être mieux rédigées et surtout -plus correctes. Madame de Maintenon est, pour le style épistolaire, -un modèle plus achevé que madame de Sévigné. Presque toujours -celle-ci n'écrit que par le besoin qu'elle éprouve de s'entretenir avec -sa fille, avec les personnes qu'elle aime; enfin, de tout dire, de tout -raconter. Madame de Maintenon, au contraire, a toujours, en écrivant, -un objet distinct et déterminé. La clarté, la mesure, l'élégance, la -justesse des pensées, la finesse des réflexions, lui font agréablement -atteindre le but où elle vise. Sa marche est droite et soutenue; elle -suit sa route sans battre les buissons, sans s'écarter ni à droite ni à -<span class="pagenum"><a id="Page_447"> 447</a></span> -gauche. En un mot, madame de Maintenon était en garde contre le -danger de commettre ces indiscrétions qui donnent tant d'esprit aux -lettres de madame de Sévigné, et elle tâchait d'en prémunir ses élèves -de Saint-Cyr en les détournant de l'envie d'écrire sans nécessité.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_243">243</a>, ligne dernière, et <a href="#Page_244">244</a>, lig. 1: «Et qui souvent sont chassées -par un clin d'œil qu'on fait à la femme de chambre.» Et note 532, -lig. 3: Dans toutes les autres éditions, sans exception, le texte de -cet important passage est faux ou défiguré. Les notes de ces éditions -doivent disparaître.</p> - -<p>Cela provient du premier éditeur de 1726; tous les autres ont copié. -Mais ce qui est plus fâcheux, c'est qu'on ait reproduit, dans les éditions -les plus récentes et les meilleures, l'absurde commentaire que Grouvelle -a fait sur le texte: d'où il résulterait que Louis XIV, connu par -son respect pour les convenances, la dignité de ses manières, son attachement -pour la reine, l'aurait traitée avec indignité et mépris dans -l'habitude de la vie. Je ferai remarquer que dans ce passage il n'y a -pas <i>Quanto</i> comme dans toutes les autres éditions, mais que le nom -de Montespan est en toutes lettres; ce qui démontre qu'il n'y a ni -sous-entendu ni déguisement dans la mention de la femme de chambre. -Madame la duchesse de Richelieu, qu'on fait obéir par un clin d'œil -à madame de Montespan, était alors dame d'honneur de la reine; -et la marquise de Montespan n'était encore inscrite que la quatrième -sur le tableau. (Voyez l'<i>État de la France</i>, 1678, in-12, -p. 326.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_245">245</a>, lignes 12 à 14: La naissance de mademoiselle de Tours, -morte jeune, venue à terme au mois de janvier 1676.</p> - -<p>Et c'est alors même que Louis XIV manifestait publiquement ses -sentiments religieux et sa soumission à l'Église, qu'il communiait en -public, qu'il permettait qu'on mît plus souvent dans la gazette officielle -son exactitude à remplir ses devoirs de piété. On lit dans le -volume du Recueil des gazettes, imprimé en 1677, p. 280, cet article:</p> - -<p class="datem">«Avril 1676.</p> - -<p class="dater">«Saint-Germain en Laye</p> - -<p>«Le 4 de ce mois, veille de la Résurrection, le roi, qui avait <i>assisté -<span class="pagenum"><a id="Page_448"> 448</a></span> -à tous les offices</i> de la semaine sainte, communia dans l'église -paroissiale par les mains du cardinal de Bouillon, grand aumônier -de France, monseigneur le Dauphin tenant la serviette.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_245">245</a>, lignes 28 et 29: On savait que la nature de sentiments -exempts de toute faiblesse que lui inspirait madame de Maintenon, -etc.</p> - -<p>Ce ne fut qu'après la mort de la reine, après celle de Fontanges, -après la disgrâce de Montespan, que l'opinion des gens de cour et du -public changea, et que l'intimité toujours croissante de Louis XIV -et de madame de Maintenon fit travailler les imaginations, et convertir -en passion amoureuse un attachement constant et pieux, -fondé, de la part de Louis XIV, sur le respect pour la piété, les -vertus et les qualités de celle qu'il s'était choisie pour compagne; -et, de la part de madame de Maintenon, sur l'admiration que lui -avaient inspirée les qualités du grand roi.</p> - -<p class="echap">CHAPITRE XII.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_247">247</a>, ligne 6: Près du village de Sasbach, dans l'État de Bade.</p> - -<p>Il faut écrire Sasbach, et non Salzbach et Saspach, comme a fait -Ramsay (<i>Histoire du vicomte de Turenne, maréchal général des -armées du roi</i>; Paris, 1735, in-4<sup>o</sup>, p. 581). Ce lieu se trouve près -d'Achern, sur la route d'Offenburg à Bade, au sud de Steinbach. La -carte de l'atlas de Ramsay, insérée dans l'édition de 1735, in-4<sup>o</sup>, à -la page 581, intitulée <i>Plan des différents camps du vicomte de Turenne -et du comte Montecuculli dans l'Ortnaw</i>, dessinée et gravée -par Cocquart, est fautive, et trop mauvaise pour qu'on y puisse suivre -les opérations militaires de Turenne dans cette campagne; il faut -consulter la carte intitulée <span class="smallc">Strasbourg</span>, dans l'atlas des <i>Mémoires -militaires des guerres de Louis XIV</i>, 1836, grand in-folio, exécuté -sous la direction du général Pelet.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_252">252</a>, ligne 19: «Et qu'elle y avait mille affaires.»</p> - -<p>Une de ces affaires était celle de la terre de Meneuf, vendue à -Jean du Bois-Geslin, reçu président de Bretagne le 13 juin 1653, et -fait depuis conseiller d'État. Madame de Sévigné lui vendit cette -<span class="pagenum"><a id="Page_449"> 449</a></span> -terre en 1674; et comme elle avait garanti les droits seigneuriaux, -elle eut des difficultés qui furent levées, car elle toucha son argent -en décembre 1675. (<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i>, 17 novembre, 15 et 29 décembre -1675; t. IV, p. 209, 250 et 279, édit. G.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_254">254</a>, ligne 13: Elle avait alors quarante-neuf ans.</p> - -<p>Ce fut son âge critique. Par son tempérament fort et sanguin, madame -de Sévigné avait assez fréquemment recours à la saignée. Cette -doctrine médicale était fortement controversée au temps de Louis XIV, -comme elle l'a été de nos jours du vivant du docteur Broussais. Gui -Patin, conséquent avec ses principes, se fit saigner sept fois dans un -rhume (voir sa lettre du 10 mars 1648, t. I, p. 375; 1846, in-8<sup>o</sup>), et -fit pratiquer vingt saignées sur son fils.—A l'âge de trois ans, le fils de -madame de Grignan tomba malade: on le saigna. Madame de Sévigné -ne put s'empêcher de témoigner à sa fille des craintes au sujet de -cette saignée: «Je reçois votre lettre, qui m'apprend la maladie du -pauvre petit marquis. J'en suis extrêmement en peine; et pour cette -saignée, je ne comprends pas qu'elle puisse faire du bien à un enfant -de trois ans, avec l'agitation qu'elle lui donne: de mon temps, on ne -savait ce que c'était que de saigner un enfant.» (<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i>, -26 juin 1675, t. III, p. 436, édit. G.)—Gui Patin pensait tout différemment; -car en 1648, au sujet d'un médecin allemand nommé -Sennertus, dont il avait lu l'ouvrage, il écrit: «Il n'entend rien à la -saignée des enfants; ce misérable me fait pitié! Si l'on faisait ainsi -à Paris, tous nos malades mourraient bien vite. Nous guérissons nos -malades après quatre-vingts ans par la saignée, et saignons aussi -heureusement les enfants de deux et trois mois, sans aucun inconvénient... -Il ne se passe pas de jour à Paris que nous ne fassions -saigner plusieurs enfants à la mamelle et plusieurs septuagénaires, -<i>qui singuli feliciter inde convalescunt</i>.» (<span class="smallc">Gui Patin</span>, <i>Lettres</i>, -13 août 1648), t. II, p. 419, édit. 1846, in-8<sup>o</sup>.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_254">254</a>, lignes 20 à 22: Bourdelot, ce célèbre médecin des Condé -et de la reine Christine.</p> - -<p>Le haineux et satirique Gui Patin (<i>Lettres</i>, édit. 1846, in-8<sup>o</sup>, t. I, -p. 513) a tracé de ce médecin un portrait qui nous en donne une -idée bien différente de celle que présente l'article <i>Pierre Michon</i> -<span class="pagenum"><a id="Page_450"> 450</a></span> -du savant M. Weiss, dans la <i>Biographie universelle</i> (t. XXVIII, -p. 596). Bourdelot fut d'abord le précepteur du grand Condé avant -d'être son médecin (<span class="smallc">Gui Patin</span>, t. II, p. 5). Il revint de Suède en 1653. -Il n'allait faire ses visites qu'avec de grands habits à longue queue, -en chaise à porteurs ou en carrosse, et suivi de trois laquais. Il devint -riche par l'obtention de l'abbaye de Macé en Berri, et par les bienfaits -de la reine de Suède. On a oublié dans la <i>Biographie</i> de mentionner -le plus curieux de ses écrits: c'est la <i>Relation des assemblées -faites à Versailles dans le grand appartement du Roi</i> durant le -carnaval de 1683, in-12. Bourdelot réunissait chez lui, chaque jour -de la semaine, un certain nombre de ses confrères, médecins et -hommes de lettres; cette réunion avait pris le titre d'<i>Académie de -Bourdelot</i>; et lorsque madame de Sévigné se confia à ses soins, un -auteur nommé le Gallois venait de publier un ouvrage intitulé <i>Conversations -académiques tirées de l'Académie de Bourdelot</i>; Paris, -1674, 2 vol. in-12. Ce livre est dédié à Huet; il contient des dialogues -uniquement relatifs à la médecine, et, à propos de médecine, -des excursions sur la métaphysique et la philosophie de Descartes, -qui alors faisait irruption dans tout.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_258">258</a>, lignes 6 à 9: Le ridicule que madame de Grignan versait -sur madame de la Charce et sur Philis, sa fille aînée, la faisait -rire aux larmes.</p> - -<p>Philis de la Tour du Pin de la Charce était l'amie de mademoiselle -d'Alerac (Françoise-Julie Grignan), cette belle-fille de madame de -Grignan, qu'elle aimait si peu. (Voyez, sur cette courageuse demoiselle, -le livre intitulé <i>Histoire de mademoiselle de la Charce, de -la maison de la Tour du Pin en Dauphiné, ou Mémoire de ce qui -s'est passé sous le règne de Louis XIV</i>; Paris, chez Pierre Gaudouin, -1731, p. 11, 36: c'est une espèce de roman, dont l'auteur est -inconnu. Conférez madame de Genlis dans <i>Mademoiselle de la -Fayette</i>, ou <i>le siècle de Louis XIII</i>; 2<sup>e</sup> édit., 1813, t. I, p. 42, -note 4.) On lit dans la <i>Gazette de France</i>, du 23 juin 1703, que -Philis de la Tour du Pin de la Charce, nouvelle convertie, mourut à -Nions en Dauphiné, âgée de cinquante-huit ans. Ainsi cette demoiselle -avait trente ans lorsqu'elle était le sujet des sarcasmes de -madame de Grignan.—En relisant la note où j'ai parlé de mademoiselle -de la Charce (4<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 354), je m'aperçois -<span class="pagenum"><a id="Page_451"> 451</a></span> -que j'ai attribué à madame Deshoulières des vers qui sont de -sa fille, et que l'on a placés à la suite de ceux de la mère dans l'édition -que je cite (1695, in-8<sup>o</sup>). L'épître et les madrigaux de M. Cazes -sont adressés à mademoiselle Deshoulières, p. 257 et 278. Les poésies -de cette demoiselle, non mentionnées sur le titre, commencent à -la page 218. Cette édition des poésies de madame Deshoulières -a été donnée par sa fille, ainsi qu'elle le dit dans l'avertissement -du second volume; et la lettre de M. Cazes, datée de Bois-le-Vicomte -le 4 octobre 1689, qui se trouve dans l'édition des œuvres -de madame et de mademoiselle Deshoulières (1764, in-12, t. II, -p. 204), est adressée à cette dernière. Les détails sur la mort de -M. Cazes (datés de 1692), page 238 de cette même édition, sont de -mademoiselle Deshoulières.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_259">259</a>, ligne 17: «J'ai couché cette nuit à Veretz.»</p> - -<p>Toutes les cartes et tous les livres géographiques de la France écrivent -Veretz ou Verets; mais dans les éditions de madame de Sévigné -on lit <i>Veret</i>, et c'est ainsi qu'elle a écrit; car dans le vol. XXXII -(département d'Indre-et-Loire, premier arrondissement de Tours), -je trouve une aquarelle du château où coucha madame de Sévigné, -faite il y a cent cinquante ans, et qui porte pour intitulé <i>Veue du -chasteau de Veret en Touraine, sur la rivière du Cher</i> (1689).</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_261">261</a>, ligne 15: «Nous allons à la Seilleraye, etc.»—<i>Sur les -portraits de madame de Sévigné et de madame de Grignan</i>.</p> - -<p>Le château de la Seilleraye est situé dans le canton de Carquefou, -à environ sept kilomètres à l'est de ce bourg. Il est à deux kilomètres -de Mauves et du bord septentrional de la Loire, sur le versant d'un -coteau au bas duquel coule un ruisseau qui se jette dans la Loire au-dessous -de Mauves. Sur la carte de Cassini (n<sup>o</sup> 131), ce ruisseau n'est -pas nommé; mais dans le pays on l'appelle <i>la Seille</i>, c'est pourquoi -il faut écrire la Seilleraye, comme dans le grand <i>Dictionnaire de -la poste aux lettres</i>, 1836, in-folio, p. 660, et dans la dernière carte -de la poste aux chevaux, dressée par les ordres de M. Conte, et non -pas <i>la Sailleraye</i>, ainsi qu'il est marqué sur la carte de Cassini.</p> - -<p>Voici ce que madame de Sévigné mande à sa fille au sujet de ce château, -qu'elle n'avait pas vu depuis sa jeunesse, et qui lui parut peu -reconnaissable: «M. d'Harouïs manda de Paris, il y a quatre ans, -<span class="pagenum"><a id="Page_452"> 452</a></span> -à un architecte de Nantes, qu'il le priait de lui bâtir une maison, dont -il lui envoya le dessin, qui est très-beau et très-grand. C'est un grand -corps de logis de trente toises de face, deux ailes, deux pavillons; -mais comme il n'y a pas été trois fois pendant tout cet ouvrage, tout -cela est mal exécuté. Notre abbé est au désespoir, M. d'Harouïs ne -fait qu'en rire.» (<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i>, 24 septembre 1675, t. IV, p. 112, -édit. G.)</p> - -<p>Ce beau domaine a eu le rare privilége d'être transmis à une famille -alliée à celle de d'Harouïs (la famille de Bec-de-Lièvre), par suite du -mariage de Jean-Baptiste de Bec-de-Lièvre avec Louise d'Harouïs -en 1649. Cette famille le possède encore.—L'auteur d'une <i>Vie de -madame de Sévigné</i> très-agréablement écrite, M. le vicomte Walsh, -nous a donné des détails sur les embellissements faits à ce domaine -par le propriétaire actuel: «La Seilleraye couronne bien le coteau; -M. de Bec-de-Lièvre a <i>désengoncé</i> le château des murailles qui fermaient -la cour et les jardins, dessinés par Le Nôtre; une belle grille, -à fers de lances dorés, ferme aujourd'hui la cour; le parc anglais se -lie à merveille avec les anciens jardins.» (<i>Vie de Sévigné</i>; par M. le -vicomte Walsh, 1842, in-12, p. 355.) M. Monmerqué a fait graver -une <i>Vue du château de la Silleraye</i> (<i>sic</i>) pour accompagner l'édition -des <i>Lettres inédites de madame de Sévigné</i>; Paris, Blaise, 1827, -in-8<sup>o</sup>. Dans l'avertissement de ces <i>Lettres</i> (pag. <span class="smallc">XIII</span>), le savant éditeur -dit que M. le marquis de Bec-de-Lièvre conserve dans ce château -un beau portrait de madame de Sévigné, peint en Diane. M. le -vicomte Walsh décrit ainsi ce tableau:</p> - -<p>«Dans ce magnifique portrait de Mignard, donné, dit-on, par madame -de Sévigné à d'Harouïs, Marie de Rabutin-Chantal, <i>qui venait -de se marier</i>, est vêtue en Diane chasseresse, selon le goût du temps. -Elle a dansé dans un quadrille devant Louis XIV avec ce costume.» -Nous ne pouvons croire que ce portrait soit celui de madame de Sévigné -(Marie de Rabutin-Chantal). Il est bien vrai que les femmes qui -avaient eu l'honneur de figurer dans les ballets de Louis XIV aimaient -à se faire peindre dans les beaux costumes mythologiques dont elles -étaient revêtues pour le rôle qu'elles remplissaient; mais madame -de Sévigné n'a paru dans les ballets de Louis XIV à aucune époque, -et encore moins <i>lorsqu'elle venait de se marier</i>. Marie de Rabutin-Chantal -épousa, le 4 août 1641<a id="FNanchor_904" href="#Footnote_904" class="fnanchor"> [904]</a>, le marquis de Sévigné; Louis XIV -<span class="pagenum"><a id="Page_453"> 453</a></span> -n'avait alors que six ans, et ne donnait pas de ballets. Madame de -Sévigné a été peinte par Nanteuil, et aussi, je crois, par Lefebvre; -mais il n'est pas aussi certain qu'elle l'ait été par Mignard. Elle -parle tant et si souvent du portrait de madame de Grignan par Mignard, -que si elle avait été peinte aussi par ce maître, nous le saurions. -Le portrait de la collection de tableaux qu'on voit à la Seilleraye -n'est donc pas plus, <i>s'il est de son temps</i>, le portrait de -Marie de Rabutin-Chantal que celui qu'on a placé avec une semblable -désignation dans la galerie de Versailles. (Voyez partie I, p. 512 de -ces <i>Mémoires</i>.) Mais si ce n'est pas le portrait de Marie de Rabutin-Chantal, -c'est peut-être celui de mademoiselle de Sévigné. Celle-là, -par exemple, figura dans les ballets <i>costumés</i> du roi (voyez 2<sup>e</sup> partie -de ces <i>Mémoires</i>, p. 332-341), et a bien véritablement été peinte -par Mignard.</p> - -<p>Je crois devoir ajouter ici quelques détails à la longue note que -j'ai écrite <i>sur différents portraits qu'on a gravés de madame de -Sévigné</i> (2<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 512).</p> - -<p>Ce qui met hors de doute l'authenticité du portrait peint par Nanteuil -<i>ad vivum</i>, et gravé par Édelinck (Nicolas Édelinck, fils de Gérard), -ce sont les lettres où madame de Sévigné parle de son nez -carré et de ses paupières bigarrées<a id="FNanchor_905" href="#Footnote_905" class="fnanchor"> [905]</a>.</p> - -<p>Indépendamment de la gravure du portrait de madame de Sévigné, -finement exécutée par Jacques Chereau pour l'édition des <i>Lettres</i> de -1734, le chevalier Perrin en fit faire une autre pour son édition de -1754. Ce portrait a été peint par Febure ou Lefebvre, le même qui fit -celui de Bussy, reproduit en tête de ses <i>Mémoires</i>, édition in-4<sup>o</sup>, et -gravé par Édelinck. Ce portrait de Lefebvre ressemble plus à celui de -Nanteuil qu'à celui de l'édition de 1734: la coiffure est presque semblable, -mais la tête est penchée; il est vu de trois quarts; les yeux -sont plus grands, la face moins pleine, et il a plus de physionomie. -Lefebvre a fait beaucoup de portraits de personnages illustres; un -grand nombre ont été reproduits par Poilly, Van Schuppen, Balechou, -<span class="pagenum"><a id="Page_454"> 454</a></span> -et d'autres. Né en 1736, il mourut à Londres en 1775. Il était l'élève -de Charles le Brun; il ne flattait point les traits, et n'aimait pas à -peindre les femmes avec du fard. C'est peut-être pour cela que madame -de Sévigné estimait peu ses ouvrages. Dans la belle collection -d'Odieuvre il y a un portrait de madame de Grignan par Ferdinand, -celui qui a peint Ninon: il est gravé par Pinssio. Ce portrait, quoique -différent de ceux qu'on a faits depuis, est bien celui de la même -femme, et a dû être ressemblant. Il paraît que M. de Grignan avait -donné son portrait, peint par un artiste provençal, à M. de Coulanges, -et qu'il existait du comte un autre portrait peint par Lefebvre; -car madame de Sévigné écrit à sa fille (le 19 février 1672, t. II, p. 392, -édit. G.): «Mais que vous dirai-je de l'aimable portrait que M. de -Grignan a donné à M. de Coulanges? Il est beau et très-ressemblant: -celui de Lefebvre est un misérable auprès de celui-ci. Je fais vœu de -ne jamais revenir de Provence que je n'en aie un pareil, et un autre -de vous: il n'y a point de dépense qui me soit si agréable.»</p> - -<p>Madame de Sévigné, avec toute raison, préféra Mignard au peintre -provençal, et elle profita du séjour de madame de Grignan à Paris -pour faire exécuter pour elle, dans les premiers mois de l'année -1675, le portrait de sa fille. Il obtint bientôt une certaine célébrité. -(<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i>, 4 et 9 septembre, t. III, p. 452 et 460.) Dans sa -lettre du 19 août 1675 (t. III, p. 411, édit. M., et t. IV, p. 35, édit. G.), -elle dit à madame de Grignan: «Votre portrait a servi à la conversation; -il devient chef-d'œuvre à vue d'œil; je crois que c'est parce -que Mignard n'en veut plus faire.» Mignard avait, il est vrai, -soixante-cinq ans lorsqu'il peignit madame de Grignan; mais aucun -peintre n'a prolongé plus longtemps sa carrière d'artiste. Né en 1610, -il mourut en 1695. Ses derniers portraits furent ceux de la famille -royale d'Angleterre, qu'il exécuta à l'âge de quatre-vingt-quatre ans. -Un peu auparavant il fit celui de madame de Maintenon, le plus -célèbre de tous, et peignit Louis XIV pour la dixième fois.</p> - -<p>Je possède un grand tableau de Mignard provenant de la vente de -M. Quentin Craufurd, connu par la belle collection de portraits qu'il -avait réunis, et par le soin qu'il s'était donné pour s'assurer de l'exactitude -des désignations qu'il leur donnait. Cette toile est décrite sous -le n<sup>o</sup> 162, page 47 du catalogue, comme représentant madame de -Thianges et le duc du Maine, son neveu. Il n'en est rien: elle renferme -les portraits de madame de Seignelay et de ses deux fils, -peints un an après la mort du ministre Seignelay. Ce tableau, parfaitement -<span class="pagenum"><a id="Page_455"> 455</a></span> -bien décrit dans la <i>Vie de Mignard</i> (page 148 de l'édit. de -Paris, 1730, et p. 123 de l'édit. d'Amst., 1731), est signé <i>Mignard</i> -et daté de 1691: Mignard avait donc quatre-vingt-un ans lorsqu'il -fit le portrait de Catherine-Thérèse de Matignon, femme de Seignelay, -laquelle se remaria, le 22 février 1696, au comte de Marsan. Mignard -résida vingt-deux ans à Rome, et ne vint se fixer à Paris qu'en 1660; -par conséquent il n'a pu peindre Marie de Rabutin-Chantal peu après -son mariage.</p> - -<p>En faisant connaître le portrait le plus authentique et le plus certain -de la marquise de Sévigné, gravé par Édelinck fils, d'après Nanteuil, -j'ai oublié de dire que le premier pastel de Nanteuil existe, -très-bien conservé: nous l'avons vu chez M. le comte de Laubespin -de Tracy, auquel il appartient. De la collection de M. Traullé il a -passé dans les mains de madame Bredt, qui l'a donné à madame de -Laubespin.</p> - -<p>J'ai parlé du portrait de Ninon par Ferdinand. Il a été très-bien -gravé par Thomas Wastley en 1757, aux frais de Walpole, comte -de Sandwich, d'après le tableau original donné par Ninon de Lenclos -à la comtesse de Sandwich, son amie. Ferdinand peignit aussi madame -de Maintenon avant que Mignard fît d'elle le beau portrait si -admirablement gravé par Ficquet.</p> - -<p>«Madame de Maintenon, dit madame du Pérou (<i>Mémoires de -madame de Maintenon recueillis par les dames de Saint-Cyr</i>; -Paris, Olivier Fulgence, 1846, in-12, p. 261, chap. <span class="smallc">XVII</span>), se rendit à -nos instances, et souffrit que Ferdinand, assez habile peintre pour la -ressemblance, la tirât. Il fit un portrait où elle est représentée dans -tout son air naturel, avec mademoiselle d'Aubigné sa nièce, qui était -un enfant, et qui depuis a été la duchesse de Noailles; elle n'avait -alors que trois ou quatre ans, et était aussi jolie et aussi aimable -que le peintre l'a représentée: c'est le portrait qui est dans la salle -de la Communauté, à côté de la cheminée. Il résulte du récit de madame -du Pérou que ce portrait fut fait après le 19 mai 1689, époque -de l'élection de mademoiselle de Loubert. Je ne connais aucune gravure -de ce tableau, et j'ignore s'il existe encore. Mais quand Horace -Walpole visita Saint-Cyr, il vit le portrait de madame de Maintenon -dans presque toutes les chambres. Celui de Mignard a été souvent -copié, dit-on, par lui-même avec des variations. Je possède une de -ces copies qui était à Saint-Cyr, et que j'ai achetée à la vente de -M. Craufurd. Elle est semblable, à la couleur du manteau près, à -<span class="pagenum"><a id="Page_456"> 456</a></span> -celle qu'on voit dans la galerie de Versailles. Ferdinand a aussi peint -le duc de Montausier. Ce portrait a été gravé par Lenfant, in-fol., -en 1757.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_267">267</a>, lignes 2 à 4: La partie inédite de ses Mémoires... offre -un exemple d'une aussi forte distraction.</p> - -<p>Ainsi, dans le manuscrit autographe de la <i>Suite des Mémoires -de Bussy</i>, après la transcription de la lettre que Bussy écrivit à madame -de Sévigné le 19 octobre 1675, on lit au verso de la page 154: -«Huit jours après que j'eus écrit cette lettre, j'en reçus cette réponse.»</p> - -<p>Vient ensuite la transcription d'une lettre de madame de Sévigné -sous la date du 27 octobre 1675, qui est la même que celle du -20 décembre 1675 dans l'édit. de Gault de S.-G., sauf le commencement, -qui diffère du manuscrit et des éditions imprimées. Les lignes -qui précèdent cette lettre assurent l'exactitude de sa date, qui est -d'ailleurs confirmée, par tout ce qu'elle contient, comme répondant -à celle du 19 octobre. Elle devrait être, suivant nous, placée immédiatement -après cette lettre; mais, par une étrange méprise, la lettre -de madame de Sévigné, du 27 octobre, est datée de Paris, et commence -ainsi: «J'arrivai hier ici, et on me vient d'apporter votre -lettre du 19 de ce mois. Je partis de Bretagne trois jours après que -je vous écrivis.» A moins de substituer dans la date Vitré à Paris, -et <i>Rochers</i> à <i>Bretagne</i>, il est impossible de concilier ce commencement -avec la date de 1675 et avec tout le reste de la lettre.</p> - -<p>Cependant tous les faits qui résultent de la correspondance de -madame de Sévigné en Bretagne avec Bussy en Bourgogne, se trouvent -confirmés dans une lettre de cette dame (20 octobre 1675), par laquelle -elle envoie à son cousin sa procuration pour le mariage de -sa nièce. Le ms. ne fait pas mention de cette lettre; mais à la suite -de celle du 27 octobre, Bussy écrit:</p> - -<p>«Trois jours après que j'ai reçu cette lettre, je fis cette réponse;» -et cette réponse est en effet datée de Chaseu le 30 octobre.</p> - -<p>Cette lettre, dans ce qu'elle a de plus essentiel à partir de la ligne -«Quand je vous ai mandé, etc.,» est la même que celle qui, -dans diverses éditions, est datée de Bussy le 9 janvier 1676. Il y a -encore ici divergence non-seulement dans les dates, mais dans le -commencement des deux lettres: celle du ms. commence, comme -l'autre, par la même impossibilité, en s'exprimant ainsi:</p> - -<p>«Je suis fort aise, madame, que nous soyons à Paris: nous y -<span class="pagenum"><a id="Page_457"> 457</a></span> -gagnerons tous deux.» Puis elle répond à la précédente sur la fièvre -du roi.</p> - -<p>Rien de tout cela dans la lettre imprimée, qui commence ainsi: -«Je reçus avant-hier votre lettre du 20 décembre, qui est une réponse -à une lettre que je vous écrivis le 19 octobre. Vous devez -avoir reçu depuis ce temps-là deux lettres de moi, sans compter celle -que je viens de vous écrire, avec une lettre pour madame de Grignan.» -On a vu que cette lettre du 20 décembre était précisément celle -du 27 octobre du ms., et l'explication paraît une interpolation du -copiste-éditeur ajoutée à la lettre de Bussy. Mais si le ms. de la <i>Suite -des Mémoires</i> est autographe, l'étrange confusion qui fait supposer -madame de Sévigné à Paris est de Bussy lui-même, qui, ayant devant -les yeux plusieurs lettres de sa cousine sous la même date, et -sans désignation d'année, aura été distrait en les transcrivant.</p> - -<p>Ces distractions de Bussy, quand il fit la <i>Suite des Mémoires</i>, démontrent -que c'est également lui qui a transposé à une date fausse la -lettre que madame de Sévigné a écrite sur la naissance de son fils.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_267">267</a>, lignes 12 à 15: Des fragments des Mémoires autographes -d'Ormesson... constatent que madame de Sévigné accoucha, à -Paris, de sa fille le 10 octobre 1646.</p> - -<p>La fin de la lettre de madame de Sévigné à madame de Grignan, -en date du 28 août 1680 (t. VI, p. 436 de l'édit. de Monmerqué), -ne prouve pas, comme le dit cet éditeur dans sa note, que madame -de Grignan fût née aux Rochers. Elle signifie seulement que madame -de Sévigné envoya à Paris, à madame de la Fayette ou à madame de -Coulanges, une lettre de sa fille, qu'elle a trouvée très-amusante et -bien écrite; et que la réputation de madame de Grignan, si bien établie -comme femme d'esprit à Paris (dans son air natal), était faite -aussi dans les parties les plus reculées de la France (la Bretagne): -«Vos lettres nous ont servi d'un grand amusement: nous remettons -votre nom dans son air natal. Croyez, ma fille, qu'il est célébré partout -où je suis; il vole, il vole jusqu'au bout du monde, puisqu'il est -en ce pays.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_271">271</a>, ligne dern., et <a href="#Page_272">272</a>, ligne 1: Le père du Chastellet -s'illustra dans les lettres.</p> - -<p>Paul Hay du Chastellet mourut en 1636. Il rédigea les premiers -<span class="pagenum"><a id="Page_458"> 458</a></span> -statuts de l'Académie française (réglem. du 27 mars 1634), prononça -le premier discours dans le sein de cette Académie, dont le sujet -était sur <i>l'éloquence française</i>. Il écrivit des satires en vers français -et en vers latins, et eut le courage de braver le despotisme de Richelieu, -en défendant le maréchal de Marillac.</p> - -<p class="echap">CHAPITRE XIII.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_292">292</a>, ligne 16; Elle (<i>la princesse de Tarente</i>) lui fit sur elle-même -d'étranges confidences.</p> - -<p>Madame de Grignan s'imaginait que la princesse de Tarente, après -quatre ans de veuvage, était encore plongée dans la douleur du souvenir -de la perte de son mari. Madame de Sévigné lui répond:</p> - -<p>«Je ne sais quelle idée vous avez de la princesse; elle n'est rien -moins qu'<i>Artémise</i>; elle a le cœur comme de cire, et s'en vante, -disant plaisamment qu'elle a le cœur ridicule. Cela tombe sur le -général, mais le monde en fait des applications particulières. J'espère -que je mettrai des bornes à cette ridiculité par tous les discours -que je fais, comme une innocente, de l'horreur qu'il faut avoir pour -les femmes qui poussent cette tendresse un peu trop loin, et du mépris -que cela leur attire. Je dis des merveilles, et l'on m'écoute, et -l'on m'approuve tout autant que l'on peut. Je me crois obligée, en -conscience, à lui parler sur ce ton-là, et je veux avoir l'honneur de -la redresser.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_293">293</a>, ligne 10: Il faut cependant en excepter le roi, qu'elle aimait -plus... qu'il ne fallait pour son repos.</p> - -<p>Madame de Sévigné écrit à sa fille: «La princesse de Tarente -n'attribue l'agitation de sa nièce qu'à l'ignorance de son état; elle -dit que c'est une <i>fièvre violente</i>, et qu'elle s'y connaît. Voulez-vous -que je dispute contre elle?»</p> - -<p>Il n'est pas exact de dire que ces derniers mots prouvent que madame -de Sévigné ne croyait pas à la passion de la duchesse d'Orléans -pour le roi. Et il en serait ainsi, que le témoignage de la princesse de -Tarente deviendrait autrement décisif sur cet objet que celui de -madame de Sévigné. Cela explique parfaitement bien la haine de la -duchesse pour madame de Montespan et pour madame de Maintenon.</p> - -<p class="pnote"><span class="pagenum"><a id="Page_459"> 459</a></span> -Page <a href="#Page_296">296</a>, lig. 5 de la note 652: Cette famille subsiste encore.</p> - -<p>Un duc de Tarente, candidat du gouvernement, a été nommé -membre du corps législatif dans la deuxième circonscription du -département du Loiret, en mars 1852.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_306">306</a>, ligne 8: Les éloges qu'elle donne au grand historien -du peuple juif.</p> - -<p>Dans la biographie de Josèphe (Flavien), on n'indique pas de -plus ancienne édition de la traduction de cet auteur que celle de -1681, in-8<sup>o</sup> et in-12. Les lettres de madame de Sévigné prouvent -qu'il y en a d'antérieures en date; mais je n'ai pu en trouver encore -la mention dans aucune notice.</p> - -<p class="echap">CHAPITRE XIV.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_318">318</a>, lignes 7 à 9: «Je n'eusse jamais cru que d'Olonne eût été -propre à se soucier de son nom et de sa famille.»</p> - -<p>La lettre de madame de Sévigné, du 5 janvier 1676, rectifie une -erreur de la <i>Gazette de Hollande</i>: elle nous apprend que mademoiselle -de Noirmoutier était aussi de la maison de la Trémouille, -et qu'après son mariage elle s'appellera madame de Royan. La citation -de Feuquières renvoie à une lettre de madame de Saint-Chamand -à madame de Feuquières, qui annonce (le 17 janvier 1676) -que la comtesse d'Olonne était à Baréges, parce qu'elle avait fait -une chute de voiture et avait eu le bras cassé.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_329">329</a>, ligne 21: Quoique l'assemblée ait voté, sous l'influence -de la terreur exercée par le duc de Chaulnes, etc.</p> - -<p>Le procès-verbal de la tenue des états en l'endroit cité (p. 379 -verso), sous la date du 12 décembre 1675, porte: «M. de Chaulnes -est entré aux états, pour leur dire de la part du roi de faire les -fonds, etc.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_330">330</a>, ligne 7: Presque en même temps que se terminait à Dinan -la tenue des états de Bretagne.</p> - -<p>La tenue de l'assemblée des états de Bretagne commença à Dinan -<span class="pagenum"><a id="Page_460"> 460</a></span> -le 9 novembre 1675, et se termina le 15 décembre; l'assemblée des -communautés de Provence ouvrit ses séances à Lambesc le 23 octobre, -et les termina le 20 décembre 1675.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_338">338</a>, lignes 2 et 3: Madame de Sévigné allait quelquefois dîner -au château d'Argentré.</p> - -<p>Malheureusement les lettres de madame de Sévigné qui constatent -ce fait nous apprennent que, malgré son intimité avec les habitants -de ce château et ses railleries fréquentes sur les sottises de mademoiselle -du Plessis, elle s'égayait par trop aussi sur les ridicules -provinciaux de toute la famille. M. Corbière, qui, au milieu de ses -travaux ministériels, ne pouvait s'empêcher de causer longuement de -littérature, m'a dit qu'on savait en Bretagne qu'avant la publication -des lettres de madame de Sévigné, sa mémoire était en vénération -parmi les descendants des du Plessis: le portrait de cette illustre -amie se trouvait dans toutes les chambres du château, comme celui -d'une parente vénérée qu'on a perdue. Mais quand les lettres eurent -paru, la famille d'Argentré, cruellement détrompée, fit remettre au -grenier les images de la dame des Rochers; et sa mémoire y fut en -exécration parmi les personnes qui auraient recherché son estime, si -elles avaient vécu de son temps. Cet exemple vient à l'appui des sages -instructions de madame de Maintenon pour ses élèves de Saint-Cyr, -sur le danger d'écrire des lettres. Afin de mieux concevoir l'effet que -dut produire au château d'Argentré la lecture de la correspondance -de madame de Sévigné, il faut citer le passage de sa lettre à madame -de Grignan, en date du 5 janvier 1676:</p> - -<p>«Au reste, mademoiselle du Plessis s'en meurt; toute morte de -jalousie, elle s'enquiert de tous nos gens comme je la traite. Il n'y -en a pas un qui ne se divertisse à lui donner des coups de poignard: -l'un lui dit que je l'aime autant que vous; l'autre, que je la fais coucher -avec moi, ce qui serait assurément la plus grande marque de ma -tendresse; l'autre, que je la mène à Paris, que je la baise, que j'en -suis folle; que mon oncle l'abbé lui donne dix mille francs; que si -elle avait seulement vingt mille écus, je la ferais épouser à mon fils. -Enfin, ce sont de telles folies, et si bien répandues dans le petit -domestique, que nous sommes contraints d'en rire très-souvent, à -cause des contes perpétuels qu'ils nous font. La pauvre fille ne résiste -pas à tout cela. Mais ce qui nous a paru très-plaisant, c'est que -<span class="pagenum"><a id="Page_461"> 461</a></span> -vous la connaissiez encore si bien, et qu'il soit vrai, comme vous le -dites, qu'elle n'ait plus de fièvre quarte dès que j'arrive; par conséquent -elle la joue; mais je suis assurée que nous la lui redonnons -<i>véritable</i> tout au moins. Cette famille est bien destinée à nous réjouir. -Ne vous ai-je pas conté comme feu son père nous a fait pâmer -de rire six semaines de suite? Mon fils commence à comprendre que -ce voisinage est la plus grande beauté des Rochers.» (<span class="smallc">Sévigné</span>, -<i>Lettres</i>, t. IV, p. 295, édit. G.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_345">345</a>, ligne 15: D'anciennes dettes contractées envers la famille -de Mirepoix.</p> - -<p>L'inventaire des archives de la maison de Grignan démontre que -le chevalier Perrin, s'il a été bien informé, entend, dans sa note, -parler de la première femme du comte de Grignan. Il s'agissait d'une -réclamation du sieur Jabach pour une somme de 4,000 liv. qui lui -était due comme complément d'une obligation faite à son profit par -M. le comte de Grignan et feu son épouse. Cette affaire ne fut terminée -que le 31 mars 1677, au moyen d'une constitution de 250 liv. -de rentes, par M. le comte et madame la comtesse de Grignan, au -profit de mademoiselle de Grignan, fille de madame de Grignan-Rambouillet. -Après cette constitution, le sieur Jabach donna quittance. -(<i>Catalogue des archives de la maison de Grignan</i>, p. 33.—Les -pièces les plus importantes ont été achetées par la Bibl. nat., où elles -sont conservées.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_346">346</a>, ligne 10: Puis marquis de Vins.</p> - -<p>L'abbé de Vins, dont il est fait mention dans la lettre du 11 mars -1671 (t. I, p. 365, édit. G.), et qui était venu trouver madame de -Sévigné pour lui donner des nouvelles de madame de Grignan, était -probablement le frère cadet du marquis de Vins.</p> - -<p>Dans une lettre de M. de Pomponne au marquis Isaac de Feuquières, -ambassadeur en Suède, datée de Paris le 29 avril 1674, on lit:</p> - -<p>«...La grande affaire que nous avons faite a été de marier ma -sœur (sa belle-sœur) à M. le marquis de Vins, qui est un homme de -qualité de Provence, seul et unique héritier de sa maison, ayant un -père et une mère, toutes dettes payées.» (<i>Lettres de</i> <span class="smallc">Feuquières</span>, -t. II, p. 429.)</p> - -<p class="pnote"><span class="pagenum"><a id="Page_462"> 462</a></span> -Page <a href="#Page_355">355</a>, lignes 1 et 2: Sans inspirer à l'une et à l'autre ni estime -ni confiance.</p> - -<p>Dans la lettre de madame de Maintenon au cardinal de Noailles -(mars 1700), on lit: «Madame de Saint-Géran m'a demandé une -audience, en m'assurant qu'elle voulait être dévote, et très-dévote. -Elle a voulu me persuader de la faire aller à Marly. Je lui ai parlé -avec une grande franchise sur sa mauvaise conduite. Je l'ai renvoyée -à madame la maréchale de Noailles, pour juger si pour se détacher -du monde il faut aller à Marly. Que de conversions fausses! Le -péché vaut encore mieux que l'hypocrisie.» (<i>Lettres de madame</i> -<span class="smallc">de Maintenon</span>, t. IV, p. 191.)</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_355">355</a>, lignes dernières: Elle (<i>madame de Saint-Géran</i>) n'eut -qu'une fille, dont elle accoucha après vingt et un ans de mariage.</p> - -<p>Dans l'ignorance où elles étaient de ce fait, les personnes qui ont -à Saint-Cyr composé ou falsifié nombre de lettres de madame de -Maintenon lui font dire dans une de celles adressées à madame de -Saint-Géran: «Votre fils est très-joli.» Et plus loin; «La <i>du Fresnoy</i> -est délaissée. Elle a recours à moi... Nous nous sommes embrassées. -Je lui rendrai service.» (Mai 1679, p. 133, édit. de Dresde, -1753, in-12.) Combien madame de Maintenon eût eu pitié de celles qui -croyaient servir sa mémoire en lui prêtant de tels sentiments, un -tel langage, à l'époque même où elle faisait tous ses efforts pour ramener -le roi à la soumission religieuse!</p> - -<p class="echap">CHAPITRE XV.</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_356">356</a>, lignes dernières: Madame de Sévigné se plaint fréquemment -à sa fille du grand nombre de lettres qu'elle recevait, etc.</p> - -<p>Nous avons remarqué dans la troisième partie de ces <i>Mémoires</i>, -chapitre <span class="smallc">VI</span>, p. 108, que la réputation de madame de Sévigné dans -le genre épistolaire, bien établie à la cour et parmi le grand monde, -devint populaire aussitôt après la publication des <i>Mémoires de Bussy</i> -en 1694; nous avons cité les vers latins de l'Épître sur la manière -l'écrire des lettres, par le jésuite Montaigu. Cette épître, qui fut publiée -<span class="pagenum"><a id="Page_463"> 463</a></span> -en 1713, reparut encore en 1749 dans le recueil intitulé <i>Poëmata -didascaloïca</i>; Parisiis, le Mercier, 1749, 3 vol. in-12.—Le -passage sur Sévigné se trouve t. I, p. 314; et pour qu'on ne commît -aucune méprise sur la personne, au mot <i>Sevinia</i> on a ajouté cette -note, qui n'était pas dans l'édition première: «Marie de Rabutin, -marquise de Sévigné.»</p> - -<p class="pnote">Page <a href="#Page_366">366</a>, lignes 1 à 3: Les deux sœurs étaient également l'objet -des railleries de madame de Grignan pour leur vanité.</p> - -<p>Il paraît que cela était assez fondé, et que madame de Grignan -n'était pas la seule qui raillât madame de Coulanges sur sa vanité. -Madame de Maintenon écrivant à son frère (28 février 1678, t. I, -p. 154, Amst., 1756), afin de lui recommander l'économie, lui dit: -«Je ne suis pas plus avare que vous; mais j'aurais 50,000 livres de -rente, que je n'aurais pas le train de grande dame, ni un lit galonné -d'or, comme madame de la Fayette; ni un valet de chambre, -comme madame de Coulanges. Le plaisir qu'elles en ont vaut-il les -railleries qu'elles en essuient? M. le chancelier son oncle (c'est-à-dire -le Tellier, oncle de madame de Coulanges) est plein de modération, -et le roi l'estime.»</p> - -<p class="end">FIN.</p> - -<p><span class="pagenumh"><a id="Page_464"> 464</a></span></p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_465"> 465</a></span></p> -<h2 class="normal"><span class="xlarge">TABLE SOMMAIRE</span><br /> -<span class="medium">DES CHAPITRES DE CE VOLUME.</span></h2> -</div> - -<table id="ToC" summary="contents"> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE PREMIER.—1673.</th> -</tr> -<tr> -<td> </td> -<td class="tdr">Pages</td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Madame de Sévigné quitte la Provence.—Elle écrit de Montélimar.—Elle -arrive à Bourbilly.—Conduite du comte de -Bussy.—Détails sur la comtesse de Fiesque.—La cour de -Monsieur et la cour de Condé.—Arrivée à Paris de madame -de Sévigné.</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_1">1</a></td> -</tr> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE II.—1673-1674.</th> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Visites que reçoit madame de Sévigné.—Pour la voir, son fils -quitte deux fois l'armée.—Mort du marquis de Maillane.—Louis -XIV se prépare à conquérir la Franche-Comté.—Il -charge l'évêque de Marseille d'une négociation auprès de la -duchesse de Toscane.</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_18">18</a></td> -</tr> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE III.—1673-1674.</th> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Détails sur la principauté d'Orange et sur ceux qui la possédèrent.—Le -comte de Grignan s'empare de la citadelle d'Orange -et la fait démolir.—Lutte entre l'évêque de Marseille -et Grignan.—Ouverture des états de Bretagne.</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_36">36</a></td> -</tr> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE IV.—1673-1674.</th> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Madame de Sévigné retrouve Bussy à Paris.—Origine de la -liaison de la marquise de Martel avec madame de Sévigné.—Bussy -demande une nouvelle prolongation de séjour.—La -duchesse de Longueville intercède pour lui auprès de -Condé, mais inutilement.—Bussy reste caché dans Paris.—Louis -XIV fait venir la reine à Dijon.—La guerre de Franche-Comté -s'achève.</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_60">60</a></td> -</tr> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE V.—1674.</th> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Portrait de Louis XIV.—Détails sur la reine.—Madame de -Montespan donne des bals d'enfants.—Amours de Louis XIV -<span class="pagenum"><a id="Page_466"> 466</a></span> -et de la Vallière.—Elle est faite duchesse.—Triomphe de -madame de Montespan.—Madame de la Vallière entre aux -Carmélites.—Sa prise d'habit et ses vœux.—Grâce que lui -accorde le roi.—Pourquoi il s'abstint de l'aller voir.</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_81">81</a></td> -</tr> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE VI.—1674-1675.</th> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Le parti religieux et le parti mondain se disputent l'influence sur -Louis XIV.—Réforme dans la maison de la reine.—Madame -de Sévigné visite Port-Royal des Champs.—Mort du -grand Condé.—Colbert est chargé de la réorganisation des -spectacles de Paris.—L'Opéra devient le spectacle dominant.—Sociétés -de Paris à cette époque.</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_112">112</a></td> -</tr> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE VII.—1674-1675.</th> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Arrivée à Paris de M. et madame de Grignan.—Madame de -Grignan demeure quinze mois avec sa mère.—Ouverture -de l'assemblée des communautés de Provence.—Correspondance -de Bussy et de madame de Sévigné.—Détails sur les -deux femmes et les enfants de Bussy.</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_137">137</a></td> -</tr> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE VIII.—1675.</th> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Madame de Grignan retourne en Provence.—Retz va en Lorraine, -et donne sa démission du cardinalat.—Son portrait, -par la Rochefoucauld.—Douleur de madame de Sévigné en -se séparant de Retz.—Elle quitte Paris pour aller en Bretagne.</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_160">160</a></td> -</tr> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE IX.—1674-1675.</th> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Succès de Louis XIV en Franche-Comté et en Roussillon.—Bataille -de Senef.—Révoltes en Bretagne et en Guienne.—Le -duc de Chaulnes sévit contre les Bretons.—Les états -de Bretagne s'assemblent à Dinan.—Remontrances adressées -au roi.—D'Harouïs, trésorier des états, est condamné à une -prison perpétuelle.</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_173">173</a></td> -</tr> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE X.—1675-1676.</th> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">L'opinion publique se déclare contre madame de Montespan.—Un -prêtre lui refuse l'absolution.—Bossuet et Bourdaloue -conseillent au roi et à madame de Montespan de se séparer.—Ils -<span class="pagenum"><a id="Page_467"> 467</a></span> -le promettent.—Madame de Montespan construit Clagny.—Le -roi ordonne qu'elle soit réintégrée à Versailles, mais -avec l'intention de ne plus avoir commerce avec elle.—Madame -de Montespan parvient à le faire changer de résolution.—La -cour reprend sa splendeur et ses plaisirs.</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_189">189</a></td> -</tr> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE XI.—1675-1676.</th> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Espoir du parti pieux dans l'influence de madame de Maintenon.—Nécessité -de jeter un coup d'œil rétrospectif sur la vie de -cette dame.—Le roi lui confie l'éducation de ses enfants -issus de madame de Montespan.—Elle devient marquise de -Maintenon.—Obtient de correspondre directement avec le -roi.—Durée du règne de madame de Montespan.</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_209">209</a></td> -</tr> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE XII.—1675-1676.</th> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Turenne est tué.—Création de nouveaux maréchaux.—La -révolte continue à Rennes.—Madame de Sévigné arrive à -Nantes.—Souvenirs que ce voyage lui rappelle.—Faits importants -relatifs à sa jeunesse, rectifiés.—Date de la naissance -de ses enfants, etc.—Détails fournis par les Mémoires -de d'Ormesson sur madame de Sévigné et sur les événements.</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_246">246</a></td> -</tr> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE XIII.—1676.</th> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Liaison de madame de Sévigné avec la princesse de Tarente.—Nouvelles -du Danemark et de la cour de France, données -par cette princesse à madame de Sévigné durant son séjour -aux Rochers.—Détails sur Griffenfeld.—Mariage de la princesse -de la Trémouille.—Caractère de <span class="smallc">Madame</span>, seconde -femme du duc d'Orléans.—Détails sur le prince et la princesse -de Tarente.—Madame de Sévigné passe l'hiver aux -Rochers.</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_283">283</a></td> -</tr> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE XIV.—1675-1676.</th> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Malheurs de la Bretagne.—Forbin marche sur cette province -avec six mille hommes.—Exil du parlement.—M. de -Chaulnes est insulté.—Tenue des états de Provence.—Détails -sur les affaires de Bretagne et sur celles des provinces.—Correspondance -de madame de Sévigné avec ses amis de -Paris.—Ses liaisons avec différentes personnes.</td> -<td class="tdr"><span class="pagenum"><a id="Page_468"> 468</a></span> -<a href="#Page_314">314</a></td> -</tr> -<tr> -<th colspan="2" class="tdc">CHAPITRE XV.—1675-1680.</th> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Plaintes de madame de Sévigné sur le grand nombre de lettres -qu'elle est obligée d'écrire.—Soins et attentions que lui prodigue -son fils.—Volages amours de celui-ci.—Nouveaux -travaux qu'entreprend aux Rochers madame de Sévigné.—Elle -y tombe dangereusement malade.—Sévigné vient à -Paris pour vendre sa charge de guidon.—Madame de Sévigné -quitte les Rochers.—Elle s'arrête à Malicorne, où on lui -lit l'oraison funèbre de Turenne par Fléchier.—Elle arrive -à Paris.</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_356">356</a></td> -</tr> -</table> - -<p class="end">FIN DE LA TABLE DES CHAPITRES.</p> - -<div class="chapter"> -<p><span class="pagenum"><a id="Page_469"> 469</a></span></p> -<h2 class="normal"><span class="xlarge">TABLE SOMMAIRE</span><br /> -<span class="xs">DES</span><br /> -<span class="medium">MATIÈRES PRINCIPALES DES NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS</span><br /> -<span class="medium">CONTENUS DANS CE VOLUME.</span></h2> -</div> - -<table id="enotes" summary="contents"> -<tr> -<td> </td> -<td class="tdr">Pages</td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur les madrigaux de Montreuil pour madame de Sévigné</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_393">393</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur le voyage clandestin de l'évêque de Valence à Paris</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_393">393</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur deux petits poëmes de Marigny</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_395">395</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur <i>Forléans</i>, <i>Bourbilly</i> et <i>Époisses</i></td> -<td class="tdr"><a href="#Page_397">397</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur le château d'Époisses</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_398">398</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur madame de la Morésan</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_403">403</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur les éditions de l'<i>Histoire amoureuse des Gaules</i></td> -<td class="tdr"><a href="#Page_404">404</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur doña Felippe-Maria-Térésa Abarca</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_406">406</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur la lettre de la sœur Magdeleine du Saint-Esprit</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_409">409</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur la terre du Mesnil Saint-Denis</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_411">411</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur l'opéra en France</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_413">413</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur une grossesse de madame de Grignan</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_415">415</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Vers de Benserade sur le marquis de Saucourt</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_418">418</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Jugement de M. de la Rivière sur les lettres de madame de Grignan</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_420">420</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur la <i>Relation de ce qui s'est passé en Catalogne</i></td> -<td class="tdr"><a href="#Page_421">421</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur des lettres de Louis XIV à Colbert, relatives à madame de -Montespan</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_422">422</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur M. de Condom</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_425">425</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur la perruque de Louis XIV</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_426">426</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur une lettre et des fragments de lettres attribués à madame -de Maintenon</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_429">429</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur des bruits de cour relatifs à madame de Montespan</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_433">433</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Passages extraits des <i>Conversations de madame de Maintenon</i></td> -<td class="tdr"><a href="#Page_433">433</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur le vague qui règne dans l'histoire de madame d'Aubigné et -dans celle des premières années de sa fille</td> -<td class="tdr"><span class="pagenum"><a id="Page_470"> 470</a></span> -<a href="#Page_437">437</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur un dialogue de madame de Maintenon pour ses élèves de -Saint-Cyr</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_439">439</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Épigramme du chevalier de Méré</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_439">439</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur l'auteur de la <i>Mazarinade</i></td> -<td class="tdr"><a href="#Page_443">443</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur les <i>Œuvres diverses d'un auteur de sept ans</i></td> -<td class="tdr"><a href="#Page_443">443</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur Gui Patin</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_449">449</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur le château de la Seilleraye, et sur les portraits de madame de -Sévigné et de sa fille</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_451">451</a></td> -</tr> -<tr> -<td class="tdl">Sur madame de Sévigné et la famille du Plessis</td> -<td class="tdr"><a href="#Page_460">460</a></td> -</tr> -</table> -<p class="end">FIN DE LA TABLE DES NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS.</p> - -<div class="chapter"> -<div class="footnotes"> -<h2 class="normal">NOTES:</h2> -<div class="footnote"> - -<p><a id="Footnote_1" href="#FNanchor_1" class="label">[1]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 octobre 1673), t. III, p. 176, édit. de Gault -de Saint-Germain; t. III, p. 101, édition de Monmerqué.</p> - -<p><a id="Footnote_2" href="#FNanchor_2" class="label">[2]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 et 10 octobre 1673), t. III, p. 181, édit. G.;—<i>Ibid.</i>, -t. III, p. 103 et 105, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_3" href="#FNanchor_3" class="label">[3]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 octobre 1673), t. III, p. 178, édit. G.; t. III, -p. 101, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_4" href="#FNanchor_4" class="label">[4]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 octobre et 10 novembre 1673), t. III, -p. 186, 213, édit. G.; t. III, p. 109, 131, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_5" href="#FNanchor_5" class="label">[5]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 décembre 1673), t. III, p. 268, édit. G.; -t. III, p. 177, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_6" href="#FNanchor_6" class="label">[6]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 octobre 1673), t. III, p. 188, édit. G.; -t. III, p. 111, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_7" href="#FNanchor_7" class="label">[7]</a> <i>Mémoires touchant la vie et les écrits de Marie</i> <span class="smallc">de Rabutin-Chantal</span> -<i>pendant la Régence et la Fronde</i>, 2<sup>e</sup> édit., p. 49 et 50, -chap. <span class="smallc">V</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_8" href="#FNanchor_8" class="label">[8]</a> <span class="smallc">Montreuil</span>, <i>Œuvres</i>, 1666, p. 5, 107, 472, 500; 1671, p. 4, -72, 321, 339.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 octobre 1673), t. III, p. 179.</p> -</div> -<div class="footnote"> -<p><a id="Footnote_9" href="#FNanchor_9" class="label">[9]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 octobre 1679), t. III, p. 178, édit. G.; t. III, -p. 103, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_10" href="#FNanchor_10" class="label">[10]</a> <span class="smallc">Gourville</span>, <i>Mémoires</i>, vol. LII, p. 286.</p> - -<p><a id="Footnote_11" href="#FNanchor_11" class="label">[11]</a> <span class="smallc">Choisy</span>, <i>Mémoires</i>, vol. LXIII, p. 369 à 387.—<span class="smallc">Montpensier</span>, -<i>Mémoires</i>, vol. XLIII, p. 135 (année 1663).</p> - -<p><a id="Footnote_12" href="#FNanchor_12" class="label">[12]</a> <span class="smallc">Choisy</span>, <i>Mémoires</i>, vol. LXIII, p. 391, 397, 408, 410, 417, -418.—<span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mémoires authentiques</i>, t. III, p. 141, ch. <span class="smallc">XI</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_13" href="#FNanchor_13" class="label">[13]</a> <i>Abrégé de la vie de la bienheureuse mère Jeanne-Françoise -Fremyot de Chantal</i>, 1752, p. 39.</p> - -<p><a id="Footnote_14" href="#FNanchor_14" class="label">[14]</a> Voyez la 4<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 199.</p> - -<p><a id="Footnote_15" href="#FNanchor_15" class="label">[15]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6, 10 et 11 octobre 1673), t. III, p. 184-187, -édit. G.; t. III, p. 103, 108, 110, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_16" href="#FNanchor_16" class="label">[16]</a> Conférez la 1<sup>re</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, t. I, p. 479, chap. <span class="smallc">XXXV</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_17" href="#FNanchor_17" class="label">[17]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 octobre 1673), t. III, p. 187, 189, édit. G.; -t. III, p. 111, édit. M. Ces deux pièces de vers ne se trouvent pas -dans les <i>Œuvres</i> de Marigny, 1674, in-12. Auparavant avait paru -<i>le Pain bénit</i>, par M. l'abbé de Marigny, 1673, in-12 (23 pages); -on a réimprimé cet opuscule en 1795, avec une sotte préface.</p> - -<p><a id="Footnote_18" href="#FNanchor_18" class="label">[18]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (16 octobre 1673), t. III, p. 190, édit. G.; -t. III, p. 112, édit. M.—<i>Lettres de madame</i> <span class="smallc">de Rabutin-Chantal</span>, -<i>marquise</i> <span class="smallc">de Sévigné</span>; la Haye, 1726, t. I, p. 317.</p> - -<p><a id="Footnote_19" href="#FNanchor_19" class="label">[19]</a> Deuxième partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 331, chap. <span class="smallc">XXII</span> (2<sup>e</sup> édit.).</p> - -<p><a id="Footnote_20" href="#FNanchor_20" class="label">[20]</a> <i>Lettres de</i> <span class="smallc">Ménage</span>, dans les <i>Lettres et pièces rares et inédites</i> -publiées par M. Matter, 1846, in-8<sup>o</sup>, p. 235.—<span class="smallc">Bussy</span>, <i>Lettres</i>, 173, -in-12, t. I, p. 1.</p> - -<p><a id="Footnote_21" href="#FNanchor_21" class="label">[21]</a> <span class="smallc">Bussy</span>, <i>Lettres</i> (11 novembre 1666), Paris, Delaulne, 1637, in-12, -t. II, p. 2.—Dans <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i>, t. I, p. 154, édit. G.; t. I, p. 109, -édit. M., et p. 1, 3, chap. <span class="smallc">I</span> de la 1<sup>re</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_22" href="#FNanchor_22" class="label">[22]</a> <span class="smallc">Bussy</span>, <i>Lettres</i> (29 octobre 1675), t. I, p. 170, édit. 1737.—<span class="smallc">Sévigné</span>, -<i>Lettres</i> (19 octobre 1675), t. IV, p. 31, édit. M.; t. IV, -p. 146, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_23" href="#FNanchor_23" class="label">[23]</a> <i>Suite des Mémoires du comte</i> <span class="smallc">de Bussy</span>, ms., p. 37, v<sup>o</sup> (15 -juillet 1673).—<span class="smallc">Bussy</span> (lettre du 29 octobre 1675), dans <span class="smallc">Sévigné</span>, -t. IV, p. 146, édit. G., et t. IV, p. 34, édit. M.—Voyez la 4<sup>e</sup> partie -de ces <i>Mémoires</i>, p. 313.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (15 juillet 1673), t. III, -p. 164, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_24" href="#FNanchor_24" class="label">[24]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (21 octobre et 6 novembre 1673), t. III, p. 195 -et 210, édit. G.; t. III, p. 117 et 130, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_25" href="#FNanchor_25" class="label">[25]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 février et 23 août 1678), t. V, p. 481; -t. VI, p. 24, édit. G.; t. V, p. 308 et 354, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_26" href="#FNanchor_26" class="label">[26]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (juillet 1679), t. VI, p. 101 à 104.</p> - -<p><a id="Footnote_27" href="#FNanchor_27" class="label">[27]</a> Voyez la 1<sup>re</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, t. I, p. 203.—<span class="smallc">Bussy-Rabutin</span>, -<i>Mémoires</i>, édit. 1721, t. I, p. 151, 152, 165, 172 et suiv., -185, 191, 192, 202, 337.</p> - -<p><a id="Footnote_28" href="#FNanchor_28" class="label">[28]</a> <span class="smallc">Expilly</span>, <i>Dictionnaire des Gaules et de la France</i>, 1764, in-fol., -t. II, p. 753, au mot <i>Époisses.—Voyage pittoresque de Bourgogne</i>, -Dijon, 1833, t. I, feuille 9, n<sup>o</sup> 3.</p> - -<p><a id="Footnote_29" href="#FNanchor_29" class="label">[29]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (25 octobre 1673), t. III, p. 196, édit. G.; t. III, -p. 118, édit. M.—<i>Ibid.</i> (juillet 1679), t. VI, p. 101, 104, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_30" href="#FNanchor_30" class="label">[30]</a> <span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Œuvres</i>, t. III, p. 403.—<span class="smallc">Mignet</span>, <i>Négociations</i>, t. IV, -p. 215.</p> - -<p><a id="Footnote_31" href="#FNanchor_31" class="label">[31]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (21 octobre 1673), t. III, p. 191, édit. G., -t. III, p. 114, 118, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_32" href="#FNanchor_32" class="label">[32]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (21 octobre 1673), t. III, p. 196, édit. G.; -t. III, p. 118, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_33" href="#FNanchor_33" class="label">[33]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 avril 1676), t. IV, p. 202, édit. M.; t. IV, -p. 262, édit G.—<span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mémoires</i>, t. II, p. 354.</p> - -<p><a id="Footnote_34" href="#FNanchor_34" class="label">[34]</a> <span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mémoires complets et authentiques</i>, 1829, in 8<sup>o</sup>, -t. X, p. 111, chap. <span class="smallc">II</span>.—<span class="smallc">Madame</span>, duchesse d'Orléans, <i>Mémoires, -fragments historiques et correspondances</i>, 1832, in-8<sup>o</sup>, p. 99, 103 -et 242.</p> - -<p><a id="Footnote_35" href="#FNanchor_35" class="label">[35]</a> Voyez la 4<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 274 et 275.</p> - -<p><a id="Footnote_36" href="#FNanchor_36" class="label">[36]</a> <span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mémoires</i>, t. VII, p. 117, 139, et notre note sur -les <i>Caractères</i> de la Bruyère, p. 658, 660, 662. Conférez la 4<sup>e</sup> partie -de ces <i>Mémoires</i>, p. 271.</p> - -<p><a id="Footnote_37" href="#FNanchor_37" class="label">[37]</a> Voyez 4<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 133, chap. <span class="smallc">V</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_38" href="#FNanchor_38" class="label">[38]</a> Sur ces soupers donnés à Saint-Maur, par le duc d'Enghien, -<i>aux anges</i>, voyez <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 avril 1672), t. II, p. 449, -édit. G.; t. II, p. 377, édit. M.—<i>La France devenue italienne -dans la France galante</i>, Cologne, 1695, in-12, p. 359 et 360.</p> - -<p><a id="Footnote_39" href="#FNanchor_39" class="label">[39]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (21 octobre 1673), t. III, p. 193, édit. G.; -t. III, p. 115, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_40" href="#FNanchor_40" class="label">[40]</a> On donnait aussi à mademoiselle de Grancey le titre de madame, -comme étant chanoinesse.</p> - -<p><a id="Footnote_41" href="#FNanchor_41" class="label">[41]</a> Marie-Louise, fille d'Henriette d'Angleterre, née à Paris le 27 mars -1662, mariée à Charles II, roi d'Espagne, le 30 août 1679. Sur madame -de Grancey, conférez <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i>, édit. de la Haye, 1726, -t. I, p. 165 (dans cette édition le nom de Grancey est en toutes -lettres); <i>ibid.</i> (21 octobre 1673, 2 octobre 1676, 6 décembre 1679), -t. II, p. 189; t. III, p. 193; t. VI, p. 147; t. V, p. 237, édit. G.—<i>Ibid.</i> -(15 juillet 1672), t. II, p. 223, édit. M.—<i>Ibid.</i> (23 décembre -1671), t. II, p. 269; t. III, p. 115; t. VI, p. 53.—<i>Ibid.</i> (29 janvier -1685), t. VII, p. 229, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_42" href="#FNanchor_42" class="label">[42]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 avril 1678), t. V, p. 501.</p> - -<p><a id="Footnote_43" href="#FNanchor_43" class="label">[43]</a> Sur Gondrin, conférez <span class="smallc">Gourville</span>, <i>Mémoires</i>, t. LII, p. 309.</p> - -<p><a id="Footnote_44" href="#FNanchor_44" class="label">[44]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (27, 30 octobre et 2 novembre 1673), t. III, -p. 198-203, édit. G.; t. III, p. 120-124, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_45" href="#FNanchor_45" class="label">[45]</a> <span class="smallc">De Coulanges</span>, <i>Chansons</i>, ms. autographe, p. 68. Le manuscrit -des chansons de Coulanges, qui est à la Bibliothèque impériale, a -133 feuillets ou 266 pages.</p> - -<p><a id="Footnote_46" href="#FNanchor_46" class="label">[46]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (2 novembre 1673), t. III, p. 204, édit. G.; -t. III, p. 125, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_47" href="#FNanchor_47" class="label">[47]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (22 avril 1671 et 12 juillet 1673), t. III, -p. 204, 214, 452; t. IV, p. 465, édit. G.—<i>Ibid.</i> (15, 18 septembre et -10 novembre, 13 décembre 1679, 1<sup>er</sup> et 26 mai, 10 juin 1680, 7 juillet -1682), t. IV, p. 94; t. V, p. 465; t. VII, p. 94, édit. G.; et -t. II, p. 359; t. III, p. 149, 328; t. IV, p. 82, 251; t. V, p. 425 et -431; t. VI, p. 6, 21, 30, 66, 209, 238, 242, 249, 364, 368; t. VII, -p. 38, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_48" href="#FNanchor_48" class="label">[48]</a> Sur la famille Rarai ou Raray, voyez la 3<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, -p. 134.—<span class="smallc">Montpensier</span>, <i>Mém.</i>, t. XLII, p. 150.—<span class="smallc">Sévigné</span>, -<i>Lettres</i> (31 juillet 1639), t. VII, p. 142, édit. G.; t. VI, p. 401, -édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_49" href="#FNanchor_49" class="label">[49]</a> Marie de Coulanges; voyez la 4<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 349.</p> - -<p><a id="Footnote_50" href="#FNanchor_50" class="label">[50]</a> Voyez la 3<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 129.</p> - -<p><a id="Footnote_51" href="#FNanchor_51" class="label">[51]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 juin et 20 juillet 1671), t. II, p. 102-161, -édit. G.—<i>Ibid.</i> (15 décembre et 25 octobre 1675), t. IV, p. 181 et -249.—<i>Ibid.</i> (19 juillet 1675), t. III, édit. G., et t. IX, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_52" href="#FNanchor_52" class="label">[52]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 et 13 novembre 1673), t. III, p. 209, 220.</p> - -<p><a id="Footnote_53" href="#FNanchor_53" class="label">[53]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (15 janvier 1674), t. III, p. 307, édit. G.; t. III, -p. 210, édit. M.—Voyez la 2<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, chap. <span class="smallc">VIII</span>, -p. 101, 2<sup>e</sup> édit.</p> - -<p><a id="Footnote_54" href="#FNanchor_54" class="label">[54]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 novembre 1673), t. III, p. 225, édit. G.—(22 -janvier 1674), t. III, p. 323 et 324, édit. G.—(5 février -1674), t. III, p. 335.</p> - -<p><a id="Footnote_55" href="#FNanchor_55" class="label">[55]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (27 novembre 1672), t. III, p. 243.—<i>Ibid.</i> -(20 septembre 1671), t. II, p. 232, édit. G.—(4 mai 1676), t. IV, -p. 430, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_56" href="#FNanchor_56" class="label">[56]</a> <i>Lettres inédites de madame de Sévigné, de sa famille et de -ses amis, avec son portrait, vue et fac-simile</i>; Paris, Blaise, 1827, -in-8<sup>o</sup>, p. 66, 67.—<i>Lettres de la marquise</i> <span class="smallc">de Villars</span>, Paris, 25 août -1673; et <i>Lettres</i> <span class="smallc">de Sévigné</span> (15 janvier 1674), t. III, p. 289, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_57" href="#FNanchor_57" class="label">[57]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (26 janvier 1674), t. III, p. 327, édit. G.—<i>Ibid.</i>, -t. III, p. 227, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_58" href="#FNanchor_58" class="label">[58]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 décembre 1673), t. III, p. 281, éd. G.</p> - -<p><a id="Footnote_59" href="#FNanchor_59" class="label">[59]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (10 novembre 1673, 16 octobre 1675, 25 septembre -1687), t. III, p. 217; t. IV, p. 159; t. X, p. 8, éd. G.</p> - -<p><a id="Footnote_60" href="#FNanchor_60" class="label">[60]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (10 juillet et 26 août 1675), t. III, p. 381 et -429, édit. M.—<i>Ibid.</i>, t. III, p. 456, et t. IV, p. 56, édit. G.—Sur -Pontcarré, auquel madame de Grignan écrivait, conférez encore -<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 juin 1671), t. II, p. 204, édit. G.—<i>Ibid.</i> (15 -décembre 1675), t. IV, p. 249, édit. G.—<i>Ibid.</i> (25 octobre 1675), -t. IV, p. 181, édit. G.—(31 août 1689), t. IX, p. 94, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_61" href="#FNanchor_61" class="label">[61]</a> Conférez <span class="smallc">Bussy-Rabutin</span>, <i>Suite de ses Mémoires</i> (ms. de l'Institut), -p. 42 à 57. (Lettres <span class="smallc">de Bussy</span>, datées de Paris 16, 20, 22, -25 octobre, et 2, 26 décembre 1673.—Le 23 janvier 1674, Bussy -écrit de Chaseu.)</p> - -<p><a id="Footnote_62" href="#FNanchor_62" class="label">[62]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (2 novembre 1673), t. III, p. 206, édit. G.; -t. III, p. 26, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_63" href="#FNanchor_63" class="label">[63]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 novembre 1673), t. III, p. 136, édit. M.; -t. III, p. 218, 221, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_64" href="#FNanchor_64" class="label">[64]</a> <i>Abrégé des délibérations prises en l'assemblée générale du pays -de Provence</i> tenue à Lambesc les mois de décembre 1673 et janvier -1674; Aix, in-4<sup>o</sup> (1680), p. 20 et 21.—<span class="smallc">Expilly</span>, <i>Dict.</i>, t. IV, p. 486.</p> - -<p><a id="Footnote_65" href="#FNanchor_65" class="label">[65]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (21 déc. 1672), t. III, p. 124, édit. G.; t. III, -p. 54, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_66" href="#FNanchor_66" class="label">[66]</a> <i>Abrégé des délibérations</i>, etc., p. 21.</p> - -<p><a id="Footnote_67" href="#FNanchor_67" class="label">[67]</a> Lettres de Sève à Colbert (22 août 1075).—<span class="smallc">Depping</span>, <i>Correspondance -administrative sous le règne de Louis XIV</i>, 1851, -t. II, in-4<sup>o</sup>, p. 201.</p> - -<p><a id="Footnote_68" href="#FNanchor_68" class="label">[68]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (10 novembre 1673), t. III, p. 215, édit. G.; -t. III, p. 133, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_69" href="#FNanchor_69" class="label">[69]</a> Lettres du chancelier le Tellier à Marin, premier président -(7 juillet 1682). Dans <span class="smallc">Depping</span>, <i>Correspondance administrative -sous Louis XIV</i>, t. II, p. 240.</p> - -<p><a id="Footnote_70" href="#FNanchor_70" class="label">[70]</a> <span class="smallc">Lingard</span>, <i>History of England</i>, 4<sup>e</sup> édit., t. XII, p. 369.—Ce -traité fut conclu le 22 mars 1670.</p> - -<p><a id="Footnote_71" href="#FNanchor_71" class="label">[71]</a> <span class="smallc">Temple</span>, <i>Mémoires</i>, vol. LXIV, p. 37, 40, 46.</p> - -<p><a id="Footnote_72" href="#FNanchor_72" class="label">[72]</a> <span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Œuvres</i> (<i>Mém. militaires</i>, 1673, 1674, 1675), t. III, -p. 303, 532.—<span class="smallc">Ramsay</span>, <i>Histoire du vicomte de Turenne</i>, édit. 1773, -in-12.—<i>Mémoires du vicomte de Turenne</i>, t. III, p. 309 à 443.—<i>Histoire</i>, -t. II, liv. <span class="smallc">VI</span>, p. 241 à 360.—L'abbé <span class="smallc">Raguenet</span>, <i>Histoire -du vicomte de Turenne</i> (1738, in-12, liv. <span class="smallc">V</span> et <span class="smallc">VI</span>), t. II, p. 49, -220.—<span class="smallc">Desormeaux</span>, <i>Histoire de Louis II, prince de Condé</i>, 1769, -in-12, t. IV, liv. <span class="smallc">IX</span>, p. 337 à 427.</p> - -<p><a id="Footnote_73" href="#FNanchor_73" class="label">[73]</a> <span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Œuvres</i> (fragment sur la campagne de 1674; Siége -de Besançon; Précis de la conquête de Franche-Comté), t. III, -p. 453, 459, 473.</p> - -<p><a id="Footnote_74" href="#FNanchor_74" class="label">[74]</a> <span class="smallc">Grammont</span>, <i>Mémoires</i>, vol. LVII, p. 96, 99 (1674).—<span class="smallc">Sévigné</span>, -<i>Lettres</i> (avril 1674, au comte de Guitaud), t. III, p. 339, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_75" href="#FNanchor_75" class="label">[75]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 décembre 1673), t. III, p. 280, édit. G.; -t. III, p. 188, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_76" href="#FNanchor_76" class="label">[76]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 décembre 1673), t. III, p. 281, édit. G.; -t. II, p. 188, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_77" href="#FNanchor_77" class="label">[77]</a> Le duc <span class="smallc">de Navailles</span> et <span class="smallc">de la Valette</span>, <i>Mémoires</i>, Paris, 1701, -in-12, p. 278 (année 1673).</p> - -<p><a id="Footnote_78" href="#FNanchor_78" class="label">[78]</a> <span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Œuvres</i> (lettres au duc de Montausier, 13 août, -2 octobre 1673, 23 mai 1675, 11 mars 1677, 2 et 23 mai 1698), t. V, -p. 310, 515, 532, 559, 575.</p> - -<p><a id="Footnote_79" href="#FNanchor_79" class="label">[79]</a> <span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Œuvres</i> (lettre au roi d'Angleterre, 17 février 1668), -t. V, p. 547.</p> - -<p><a id="Footnote_80" href="#FNanchor_80" class="label">[80]</a> Conférez <i>Histoire de la vie et des ouvrages de Jean de la -Fontaine</i>, 3<sup>e</sup> édit., 1824, in-8<sup>o</sup>, p. 151 à 154.—<span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Œuvres</i> -(lettres à la princesse de Toscane, 3 octobre 1662, 28 mars 1664, -23 novembre 1665, 29 octobre 1669), t. V, p. 98, 172, 333, 458. -(22 août et 6 décembre 1673), t. V, p. 511 et 518.—<span class="smallc">Montpensier</span>, -<i>Mémoires</i>, 1674, t. XLIII, p. 373.</p> - -<p><a id="Footnote_81" href="#FNanchor_81" class="label">[81]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (14 octobre 1674), t. III, p. 357, édit. G. (Lettre -du comte de Grignan au comte de Guitaud. A la page 359, -au lieu de: les cent mille francs, lisez: les cinq mille francs.)</p> - -<p><a id="Footnote_82" href="#FNanchor_82" class="label">[82]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (31 août 1673), t. IX, p. 93 et 94, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_83" href="#FNanchor_83" class="label">[83]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (10 novembre 1673), t. III, p. 214-15, édit. -G.; t. III, p. 132, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_84" href="#FNanchor_84" class="label">[84]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 décembre 1673), t. III, p. 279, édit. G.; -t. III, p. 131, édit M.</p> - -<p><a id="Footnote_85" href="#FNanchor_85" class="label">[85]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (22 janvier 1674), t. III, p. 323, édit. G.—<i>Ibid.</i> -t. III, p. 224, édit. M.—<i>Ibid.</i> (4 déc. 1673), t. III, p. 249, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_86" href="#FNanchor_86" class="label">[86]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 février 1672), t. II, p. 392, édit. G.; t. II, -p. 333, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_87" href="#FNanchor_87" class="label">[87]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 décembre 1673), t. III, p. 258-262, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_88" href="#FNanchor_88" class="label">[88]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 novembre 1673), t. III, p. 222, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_89" href="#FNanchor_89" class="label">[89]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (10, 12 et 27 novembre 1673), t. III, p. 217, -220 et 243, édit. G.—<i>Ibid.</i> (4 décembre 1673), t. III, p. 246 et -247, édit. G.—<span class="smallc">Pellisson</span>, <i>Lettres historiques</i>, in-12, t. II, p. 73.</p> - -<p><a id="Footnote_90" href="#FNanchor_90" class="label">[90]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (4 décembre 1673), t. III, p. 247, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_91" href="#FNanchor_91" class="label">[91]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 et 20 novembre 1673), t. III, p. 227, 228, -édit. G.—<i>Ibid.</i> (24 décembre 1673), t. III, p. 277.</p> - -<p><a id="Footnote_92" href="#FNanchor_92" class="label">[92]</a> <span class="smallc">Expilly</span>, <i>Dictionnaire des Gaules et de la France</i>, t. V, -p. 304 à 314.—J. <span class="smallc">Convenent</span>, ci-devant pasteur de la maison de Sa -Majesté Britannique Guillaume III, <i>Histoire abrégée des dernières -révolutions arrivées dans la principauté d'Orange</i>; Londres, -chez Robert Roger, 1704, in-12, chap. <span class="smallc">I</span>, p. 5, 6.</p> - -<p><a id="Footnote_93" href="#FNanchor_93" class="label">[93]</a> Conférez l'abbé <span class="smallc">d'Expilly</span>, <i>Dictionnaire des Gaules et de la -France</i>, t. V, p. 315. Il cite du Tillet en son Recueil des barons et -pairs de France, Bodin, de la République, livre <span class="smallc">I</span>, ch. 9, et Nostradamus, -Histoire de Provence, partie 4, sur l'année 1330.</p> - -<p><a id="Footnote_94" href="#FNanchor_94" class="label">[94]</a> P. <span class="smallc">Duval</span>, géographe de Sa Majesté, <i>la France depuis son -agrandissement par conquêtes du roy</i>; 1680, in-12, p. 258.—J. -<span class="smallc">Convenent</span>, <i>Histoire des diverses révolutions arrivées dans la -principauté d'Orange</i>; Londres, 1704, in-8<sup>o</sup>.—Madame <span class="smallc">Dunoyer</span>, -<i>Mémoires</i>, dans les <i>Lettres histor. et galantes</i>, t. VIII, p. 9 et 10.—<i>L'Art -de vérifier les dates</i>, 3<sup>e</sup> édit., 1784, in-folio, p. 453.</p> - -<p><a id="Footnote_95" href="#FNanchor_95" class="label">[95]</a> Guillaume-Henri de Nassau.</p> - -<p><a id="Footnote_96" href="#FNanchor_96" class="label">[96]</a> J. <span class="smallc">Convenent</span>, <i>Abrégé des diverses révolutions</i>, p. 8.—<i>Relation -de ce qui se passa dans le rasement du château d'Orange -et de ses fortifications, par ordre du roi de France surnommé -le Grand</i> (manuscrit du cabinet de M. Aubenas), p. 24 à 240.</p> - -<p><a id="Footnote_97" href="#FNanchor_97" class="label">[97]</a> <i>Lettre écrite d'Orange, le 25 juillet 1712, à M. le baron de -Roays</i>, par l'abbé ***, chanoine de la cathédrale (manuscrit de -M. Aubenas).</p> - -<p><a id="Footnote_98" href="#FNanchor_98" class="label">[98]</a> J. <span class="smallc">Convenent</span>, <i>Histoire abrégée des dernières révolutions -d'Orange</i>; 1704, in-8<sup>o</sup>, chap. <span class="smallc">ii</span>, p. 8. La démolition eut lieu en janvier -et en février.</p> - -<p><a id="Footnote_99" href="#FNanchor_99" class="label">[99]</a> J. <span class="smallc">Convenent</span>, <i>Hist. abrégée des dernières révolutions d'Orange</i>; -1704, in-8<sup>o</sup>.—<i>Relation</i>, etc. (manuscrit d'Aubenas), p. 261.</p> - -<p><a id="Footnote_100" href="#FNanchor_100" class="label">[100]</a> <i>Manuscrit d'Aubenas</i>, p. 269.—J. <span class="smallc">Convenent</span>, <i>Hist. abrégée -des dernières révolutions</i>, chap. <span class="smallc">II</span>, p. 10.—<i>Recueil des Gazettes -de l'année 1673</i>, in-4<sup>o</sup>, janvier et décembre 1673, p. 48.</p> - -<p><a id="Footnote_101" href="#FNanchor_101" class="label">[101]</a> Dom <span class="smallc">Clément</span>, <i>Art de vérifier les dates</i>; 1784, édit. in-folio, -t. II, p. 448.—<span class="smallc">Aubenas</span>, <i>Notice historique sur la maison de Grignan</i>, -dans l'<i>Histoire de madame de Sévigné</i>; 1842, in-8<sup>o</sup>, p. 523.</p> - -<p><a id="Footnote_102" href="#FNanchor_102" class="label">[102]</a> <span class="smallc">J. Convenent</span>, <i>Histoire abrégée</i>, p. 10, chap. <span class="smallc">II</span>.—<i>Manuscrit -d'Aubenas</i>, p. 261 et 267.</p> - -<p><a id="Footnote_103" href="#FNanchor_103" class="label">[103]</a> Boileau, épître V, t. I, p. 320 à 321, édit. de Saint-Marc, 1747.</p> - -<p><a id="Footnote_104" href="#FNanchor_104" class="label">[104]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 et 24 novembre 1673), t. III, p. 233 et -234, 236 et 237, édit. G.; t. III, p. 148 et 149, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_105" href="#FNanchor_105" class="label">[105]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 novembre 1673), t. III, p. 237, édit. G.; -t. III, p. 148 et 149, édit. M.—Conférez encore, <i>ibid.</i> (2, 6, 17, -19, 27 novembre et 1<sup>er</sup> décembre 1673), t. III, p. 207, 211, 224, -227, 241, édit. G., et t. III, p. 126, 127, 131, 140, 143, 145, 151, -155, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_106" href="#FNanchor_106" class="label">[106]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (2 novembre 1673), t. III, p. 205, édit. G.; -t. III, p. 126, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_107" href="#FNanchor_107" class="label">[107]</a> <i>Relation de tout ce qui se passa dans le rasement du château -d'Orange</i>, ms. d'Aubenas, p. 272-276.</p> - -<p><a id="Footnote_108" href="#FNanchor_108" class="label">[108]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 janvier 1674), t. III, p. 300, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_109" href="#FNanchor_109" class="label">[109]</a> <i>Relation</i>, etc., ms. d'Aubenas, p. 277.—<i>Mémoires historiques -et galants de madame</i> <span class="smallc">Dunoyer</span>, t. VIII, p. 12 à 17.</p> - -<p><a id="Footnote_110" href="#FNanchor_110" class="label">[110]</a> <i>Relation</i>, etc., p. 279.</p> - -<p><a id="Footnote_111" href="#FNanchor_111" class="label">[111]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> janvier 1690), t. X, p. 162, édit. G.; t. IX, -p. 275, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_112" href="#FNanchor_112" class="label">[112]</a> <i>Relation de ce qui passa dans le rasement du château -d'Orange</i>, ms. d'Aubenas, p. 283 et 284.</p> - -<p><a id="Footnote_113" href="#FNanchor_113" class="label">[113]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (4 décembre 1673), t. III, p. 246 et 247, édit. -G.; t. III, p. 157, 158, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_114" href="#FNanchor_114" class="label">[114]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 et 11 décembre 1673), t. III, p. 254-259, -édit. G.; t. III, p. 154 et 169, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_115" href="#FNanchor_115" class="label">[115]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (4 décembre 1673), t. III, p. 247, édit. G.; -t. III, p. 164, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_116" href="#FNanchor_116" class="label">[116]</a> <i>Abrégé des délibérations prises en l'assemblée générale des -communautés du pays de Provence</i>; Aix, Charles David, imprimeur -du roi, du clergé et de la ville, 1674, in-4<sup>o</sup>, p. 3.</p> - -<p><a id="Footnote_117" href="#FNanchor_117" class="label">[117]</a> <i>Abrégé des délibérations</i>, etc.; Aix, 1674, in-4<sup>o</sup>, p. 4.</p> - -<p><a id="Footnote_118" href="#FNanchor_118" class="label">[118]</a> <i>Abrégé des délibérations</i>, etc.; Aix, 1674, in-4<sup>o</sup>, p. 5 et 6.</p> - -<p><a id="Footnote_119" href="#FNanchor_119" class="label">[119]</a> <i>Abrégé des délibérations</i>, p. 11, 12 et 18.</p> - -<p><a id="Footnote_120" href="#FNanchor_120" class="label">[120]</a> <i>Abrégé des délibérations</i>, etc., p. 30.</p> - -<p><a id="Footnote_121" href="#FNanchor_121" class="label">[121]</a> <i>Abrégé des délibérations</i>, etc., p. 21.</p> - -<p><a id="Footnote_122" href="#FNanchor_122" class="label">[122]</a> <i>Abrégé des délibérations</i>; Aix, etc., 1674, in-4<sup>o</sup>, p. 22.</p> - -<p><a id="Footnote_123" href="#FNanchor_123" class="label">[123]</a> <i>Abrégé des délibérations</i>, etc., p. 31-32.</p> - -<p><a id="Footnote_124" href="#FNanchor_124" class="label">[124]</a> <i>Abrégé des délibérations prises en l'assemblée générale des -communautés de Provence</i>; Aix, 1674, in-4<sup>o</sup>, p. 35 et 36.</p> - -<p><a id="Footnote_125" href="#FNanchor_125" class="label">[125]</a> <i>Abrégé des délibérations</i>, etc.; Aix, 1674, in-4<sup>o</sup>, p. 63 et 64.</p> - -<p><a id="Footnote_126" href="#FNanchor_126" class="label">[126]</a> Conférez la 4<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 237, 239, 259.</p> - -<p><a id="Footnote_127" href="#FNanchor_127" class="label">[127]</a> <span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Œuvres</i>, t. V, p. 122 (Lettre de Louis XIV à Sobieski, -en date du 31 mars 1674).—<span class="smallc">Montpensier</span>, <i>Mémoires</i>, t. XLIII, -p. 372.</p> - -<p><a id="Footnote_128" href="#FNanchor_128" class="label">[128]</a> <i>Abrégé des délibérations de l'assemblée générale des communautés -de Provence, tenue à Lambesc les mois d'octobre et de -novembre 1674</i>; Aix, 1675, in-4<sup>o</sup>, p. 12.—<i>Idem</i>, pour octobre et -novembre 1675; Aix, 1675, in-4<sup>o</sup>, p. 16.</p> - -<p><a id="Footnote_129" href="#FNanchor_129" class="label">[129]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 décembre 1674), t. III, p 274, édit. G.; -t. III, p. 182, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_130" href="#FNanchor_130" class="label">[130]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 novembre 1673), t. III, p. 232, édit. G.; -t. III, p. 147, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_131" href="#FNanchor_131" class="label">[131]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (22 janvier 1674), t. III, p. 323, édit. G.; -t. III, p. 224, édit. M.—(18 juin 1676), t. II, p. 373.</p> - -<p><a id="Footnote_132" href="#FNanchor_132" class="label">[132]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (15 décembre 1673), t. III, p. 261, édit. G.; -t. III, p. 170, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_133" href="#FNanchor_133" class="label">[133]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (22 décembre 1673), t. III, p. 271, édit. G.; -t. III, p. 179, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_134" href="#FNanchor_134" class="label">[134]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 décembre 1673), t. III, p. 273 et 274, édit. -G.; t. III, p. 181, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_135" href="#FNanchor_135" class="label">[135]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (12 janvier 1674), t. III, p. 302, édit. G.; -t. III, p. 205, édit. M.—De Buous, qui fut l'objet de cette lutte, -était le frère ou le proche parent du capitaine de vaisseau, sur lequel -on peut consulter, ainsi que sur le marquis de Martel, la note du -savant archiviste de la marine, M. Jal, dans les <i>Mémoires de Villette</i>, -1841, in-8<sup>o</sup>, p. 14.</p> - -<p><a id="Footnote_136" href="#FNanchor_136" class="label">[136]</a> <i>Recueil de la tenue des états de Bretagne dans diverses villes -de cette province, de 1619 à 1703</i>, ms. de la Bibl. nation. (Bl.-Mant.), -n<sup>o</sup> 75, p. 357 et 363.</p> - -<p><a id="Footnote_137" href="#FNanchor_137" class="label">[137]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (18 décembre 1673), t. III, p. 265, édit. G.; -t. III, p. 173, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_138" href="#FNanchor_138" class="label">[138]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> janvier 1674), t. III, p. 287 et 295, éd. -G.; t. III, p. 193 et 200, édit. M.—<i>Recueil de la tenue des états -de Bretagne</i>, ms. de la Bibl. nation. (Bl.-Mant.), n<sup>o</sup> 75, p. 365.</p> - -<p><a id="Footnote_139" href="#FNanchor_139" class="label">[139]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 décembre 1673), t. III, p. 255, 256, édit. -G.; t. III, p. 165, 356, édit. M.—Voyez la 3<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, -p. 29; 4<sup>e</sup> partie, p. 29, 33.</p> - -<p><a id="Footnote_140" href="#FNanchor_140" class="label">[140]</a> <i>Recueil des lettres pour servir d'éclaircissement à l'histoire -militaire du règne de Louis XIV</i>; Paris, 1760, in-12, t. II, p. 329, -335. Lettre du duc de Chaulnes à Louvois, datée d'Auray le 30 mai -1674.</p> - -<p><a id="Footnote_141" href="#FNanchor_141" class="label">[141]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (23 août 1673), t. III, p. 171 et 172, édit. G.; -t. III, p. 97, édit. M.—<i>Suite des Mémoires du comte</i> <span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span>, -p. 41, ms. de l'Institut. (Dans ce ms., la lettre est datée -du 27 août.)</p> - -<p><a id="Footnote_142" href="#FNanchor_142" class="label">[142]</a> <i>Suite des Mémoires du comte</i> <span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span>, ms. de l'Institut, -p. 42 verso.</p> - -<p><a id="Footnote_143" href="#FNanchor_143" class="label">[143]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (21 octobre 1673), t. III, p. 195; t. III, p. 117.</p> - -<p><a id="Footnote_144" href="#FNanchor_144" class="label">[144]</a> <i>Suite des Mémoires du comte</i> <span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span>, ms. de l'Inst., -p. 44 verso.</p> - -<p><a id="Footnote_145" href="#FNanchor_145" class="label">[145]</a> Lettre de Bussy-Rabutin à Louis XIV (26 avril 1674) et à Châteauneuf, -secrétaire d'État, dans la <i>Suite des Mémoires du comte</i> -<span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span>, ms. de l'Inst., p. 65 et 66.</p> - -<p><a id="Footnote_146" href="#FNanchor_146" class="label">[146]</a> Lettre de Bussy-Rabutin à M. de Pomponne, datée de Paris le -8 octobre 1673, et de M. de Pomponne à Bussy, datée de Nancy le -15 oct., dans la <i>Suite des Mém. de</i> <span class="smallc">Bussy-Rabutin</span>, ms. de l'Inst., -in-4<sup>o</sup>, p. 42 et 44.—<span class="smallc">Roger de Rabutin</span>, comte <span class="smallc">de Bussy</span>, édit. 1737, -t. V, p. 85. Mais la lettre est à tort datée du 15 septembre; c'est le -15 octobre qu'il faut lire. (Voy. la 4<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 156 -et 344.)</p> - -<p><a id="Footnote_147" href="#FNanchor_147" class="label">[147]</a> Voyez la lettre du comte de Bussy insérée dans les <i>Mémoires -de</i> <span class="smallc">Coligny-Saligny</span>, 1841, p. 127, en date du 18 mai 1667.</p> - -<p><a id="Footnote_148" href="#FNanchor_148" class="label">[148]</a> <span class="smallc">Montpensier</span>, <i>Mémoires</i>, t. XLIII, p. 379.—<i>Supplément aux -Mémoires de</i> <span class="smallc">Bussy</span>, 2<sup>e</sup> partie, p. 14 et 17.—<span class="smallc">Bussy-Rabutin</span>, <i>Lettres</i> -(20 juin et 28 novembre 1671), t. V, p. 190 et 315.</p> - -<p><a id="Footnote_149" href="#FNanchor_149" class="label">[149]</a> <span class="smallc">Bussy-Rabutin</span>, <i>Lettres</i> (28 novembre 1673, de madame de la -Morésan au comte de Bussy), t. V, p. 319.</p> - -<p><a id="Footnote_150" href="#FNanchor_150" class="label">[150]</a> <i>Supplément aux Mémoires de M. le comte</i> <span class="smallc">de Bussy</span>, t. II, p. 17.—Au -lieu de madame Damorisan, il faut lire la Morésan, comme le -prouvent le <i>Recueil des lettres de</i> <span class="smallc">Bussy</span>, t. V, p. 319 et 190, -et les <i>Mémoires de</i> <span class="smallc">Montpensier</span>, t. XLIII, p. 379 (année 1674).</p> - -<p><a id="Footnote_151" href="#FNanchor_151" class="label">[151]</a> <span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Œuvres</i> (Lettre du roi au duc de Beaufort, en date -du 8 décembre 1665), t. V, p. 338 et 342.</p> - -<p><a id="Footnote_152" href="#FNanchor_152" class="label">[152]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 mai 1672), t. III, p. 31, éd. G.; t. II, -p. 442, édit. M.—<i>Mémoires du marquis</i> <span class="smallc">de Villette</span>, 1844, in-8<sup>o</sup>, -p. 14. Martel, capitaine en 1635, lieutenant général en 1656-1679, -n'est plus porté sur les états de la marine en 1682.</p> - -<p><a id="Footnote_153" href="#FNanchor_153" class="label">[153]</a> <i>Suite des Mémoires du comte</i> <span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span>, ms. de l'Institut, -p. 46 et 47.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13, 16 et 20 mai 1672; 23 août -1675, 6 août 1680), t. III, p. 15, 27, 31; t. IV, p. 48 et 49; t. VII, -p. 156 et 157, édit. G.; t. II, p. 428, 439, 442; t. III, p. 422 et -423; t. VI, p. 413, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_154" href="#FNanchor_154" class="label">[154]</a> <i>Suite des Mémoires du comte</i> <span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span>, ms. de l'Institut, -in-4<sup>o</sup>, p. 42 et 44.—Lettre de Bussy à M. de Pomponne, des -8 et 10 octobre 1673, et de M. de Pomponne à Bussy, datée de -Nancy le 15 octobre 1673.</p> - -<p><a id="Footnote_155" href="#FNanchor_155" class="label">[155]</a> Lettre de Bussy au duc de Montpensier (Paris, le 11 octobre -1673).—Réponse du duc de Montpensier à Bussy (Versailles, 20 octobre -1673). Dans la <i>Suite des Mém. de</i> <span class="smallc">Bussy-Rabutin</span>, ms. de -l'Inst., in-4<sup>o</sup>, p. 43 et 44.</p> - -<p><a id="Footnote_156" href="#FNanchor_156" class="label">[156]</a> <i>Suite des Mém. de</i> <span class="smallc">Bussy-Rabutin</span>, ms. de l'Inst, p. 45.—<span class="smallc">Sévigné</span>, -<i>Lettres</i> (8 juillet 1672 et 5 juin 1675), t. III, p. 97 et 108, -édit. G.; t. III, p. 31, 237, édit. M.—<span class="smallc">Choisy</span>, <i>Mém.</i>, t. III, p. 264.—<span class="smallc">Motteville</span>, -<i>Mém.</i>, t. XLIII, p. 22.—<span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Œuvres</i>, t. V, -p. 90, 103, 340. (Voy. 4<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 212.)</p> - -<p><a id="Footnote_157" href="#FNanchor_157" class="label">[157]</a> <i>Suite des Mém.</i>, ms., p. 45. (Lettre de Bussy à madame de -Thianges, Paris, 25 octobre 1673.)</p> - -<p><a id="Footnote_158" href="#FNanchor_158" class="label">[158]</a> <i>Suite des Mém.</i>, etc., ms. de l'Inst., p. 50.</p> - -<p><a id="Footnote_159" href="#FNanchor_159" class="label">[159]</a> <i>Suite des Mémoires</i>, etc., ms. de l'Inst., p. 50.</p> - -<p><a id="Footnote_160" href="#FNanchor_160" class="label">[160]</a> <span class="smallc">Villefort</span>, <i>Vie de madame de Longueville</i>, Amsterdam, 1739, -in-12, t. II, p. 161, ou Paris, 1738, in-8<sup>o</sup>, p. 169; et 4<sup>e</sup> partie de ces -<i>Mémoires</i>, p. 351 et 352.</p> - -<p><a id="Footnote_161" href="#FNanchor_161" class="label">[161]</a> Bussy dit: «Mademoiselle Desportes, ma bonne amie, fille d'une -rare vertu et d'un mérite extraordinaire.»</p> - -<p><a id="Footnote_162" href="#FNanchor_162" class="label">[162]</a> Voyez ci-après, chap. <span class="smallc"><a href="#CHAPITRE_VIII">VIII</a></span>.</p> - -<p><a id="Footnote_163" href="#FNanchor_163" class="label">[163]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 décembre 1673), t. III, p. 257, 258, édit. G.; -t. III, p. 167, édit. M.—Sur les anciens plans gravés de Saint-Germain -en Laye comme sur ceux de Fontainebleau, on trouve l'emplacement -de tous ces hôtels des grands de la cour, et entre autres -de ceux de Condé, de la Rochefoucauld et de Vivonne.—Conférez -1<sup>re</sup> partie, p. 365, 483; <span class="smallc">IV</span><sup>e</sup>, p. 273.</p> - -<p><a id="Footnote_164" href="#FNanchor_164" class="label">[164]</a> <i>Suite des Mémoires de</i> <span class="smallc">Bussy-Rabutin</span>, ms. de l'Inst., in-4<sup>o</sup>, -p. 51.</p> - -<p><a id="Footnote_165" href="#FNanchor_165" class="label">[165]</a> <i>Suite des Mémoires de</i> <span class="smallc">Bussy-Rabutin</span> (ms. de l'Inst.), p. 52 -verso. Ce billet de madame de Sévigné est inédit et a échappé à ses -soigneux éditeurs.</p> - -<p><a id="Footnote_166" href="#FNanchor_166" class="label">[166]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (15 décembre 1673), t. III, p. 265, édit. G.; -t. III, p. 173, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_167" href="#FNanchor_167" class="label">[167]</a> <i>Suite des Mémoires</i> (ms. de l'Inst.), p. 48, 49, 50 et 52 verso.</p> - -<p><a id="Footnote_168" href="#FNanchor_168" class="label">[168]</a> <i>Suite des Mémoires du comte</i> <span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span>, p. 48 et 50.—Lettres -de Bussy au roi et à M. de Pomponne, Paris, ce 2 décembre -1673, p. 54 et 55.—Lettre de Pomponne à Bussy, Saint-Germain -en Laye, le 17 décembre 1673.</p> - -<p><a id="Footnote_169" href="#FNanchor_169" class="label">[169]</a> <i>Suite des Mémoires</i>, p. 58 (ms. de l'Inst.).—Lettre de Bussy -au roi, datée de Bussy, le 31 décembre 1673—Bussy-Rabutin, <i>lettres</i>, -t. V, p. 322, 323, 327, à la marquise de Villeroy, le 15 décembre, -au duc de Montpensier, à madame de Thianges; 2<sup>e</sup> édit., -p. 58, 59.—Lettre de Bussy au comte de Vivonne à Bussy, Paris, -13 janvier 1674; à madame de Pisieux, le 19 décembre; à mademoiselle -Armantières, le 28 décembre 1673.</p> - -<p><a id="Footnote_170" href="#FNanchor_170" class="label">[170]</a> <span class="smallc">Bussy-Rabutin</span>, <i>Mémoires</i>. Manuscrit cité par M. Monmerqué, -<i>Lettres de</i> <span class="smallc">Sévigné</span>, t. III, p. 236, n<sup>o</sup> 1, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_171" href="#FNanchor_171" class="label">[171]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (Paris, 20 mars 1674), t. III, p. 338, édit. G.; -t. III, p. 236, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_172" href="#FNanchor_172" class="label">[172]</a> <i>Suite des Mémoires de</i> <span class="smallc">Bussy-Rabutin</span>, p. 61 verso.—Le duc -de Saint-Aignan rapporte sa conversation avec le roi au 7 avril -1674.</p> - -<p><a id="Footnote_173" href="#FNanchor_173" class="label">[173]</a> <i>Suite des Mémoires</i> (ms. de l'Inst.), p. 62 verso.—<i>Supplément -aux Mémoires et Lettres de M. le comte</i> <span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span>, -2<sup>e</sup> partie, p. 23.—Conférez <span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Œuvres</i>, t. V, p. 445 (mémoires -militaires).</p> - -<p><a id="Footnote_174" href="#FNanchor_174" class="label">[174]</a> <i>Suite des Mémoires du comte</i> <span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span> (ms. de l'Inst.), -n<sup>o</sup> 221, p. 67 verso.</p> - -<p><a id="Footnote_175" href="#FNanchor_175" class="label">[175]</a> <i>Suite des Mémoires de</i> <span class="smallc">Bussy-Rabutin</span>, p. 67-68. Lettre de Bussy -à <span class="smallc">Mademoiselle</span>, en date de Bussy, du 28 mai 1674, p. 74.—Lettre -de <span class="smallc">Mademoiselle</span> à Bussy, Dijon, le 2 juin 1674. La lettre est -signée <span class="smallc">Anne-Marie-Louise d'Orléans</span>.—Conférez sur cette signature -l'<i>État de la France</i>, 1677, p. 468 et 469.—<span class="smallc">Bussy</span>, <i>Lettres</i>, t. V, -p. 334.</p> - -<p><a id="Footnote_176" href="#FNanchor_176" class="label">[176]</a> <span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Œuvres</i>, t. III, p. 512 (lettre datée de Versailles, -le 1<sup>er</sup> juillet 1674, au maréchal de Turenne).—<i>Suite des Mémoires -de</i> <span class="smallc">Bussy-Rabutin</span>, p. 75 et 75 <i>bis</i>. (Lettre de madame Scudéry à -Bussy, à Paris, 23 juin 1674.—Réponse de Bussy, datée de Bussy, -le 26 juin 1674.)</p> - -<p><a id="Footnote_177" href="#FNanchor_177" class="label">[177]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (22 décembre 1673, 1<sup>er</sup> janvier 1674, 4 juin -et 11 août, 18 décembre 1676, 23 octobre 1683), t. III, p. 270, 288; -t. IV, p. 470, et t. V, p. 41 et 71; t. VII, p. 396, édit. G.—<span class="smallc">Louis XIV</span>, -<i>Lettres</i>, t. V, p. 426.—<span class="smallc">Choisy</span>, <i>Mém.</i>, t. LXIII, p. 429, 423, 491, -514.—<span class="smallc">Barrière</span>, <i>la Cour et la Ville</i>, p. 39.—<span class="smallc">Salvandy</span>, <i>Histoire -de Pologne</i>, liv. <span class="smallc">VII</span>, t. II, p. 346 et 349.</p> - -<p><a id="Footnote_178" href="#FNanchor_178" class="label">[178]</a> <span class="smallc">Montpensier</span>, <i>Mémoires</i>, t. XLIII, p. 368 et 369.</p> - -<p><a id="Footnote_179" href="#FNanchor_179" class="label">[179]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (2 et 6 novembre 1673), t. III, p. 208 et 210, -édit. G.; t. III, p. 128 et 130, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_180" href="#FNanchor_180" class="label">[180]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 décembre 1688, 17 janvier et 2 mars 1689), -t. IX, p. 102, 103, 109, 119, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_181" href="#FNanchor_181" class="label">[181]</a> <i>Requeste des filles d'honneur persécutées à madame D. L. V.</i> -(de la Vallière). <i>Recueil des histoires galantes</i>; à Cologne, chez -Jean le Blanc, p. 346.—<i>Amours des dames illustres de notre siècle</i>; -à Cologne, chez Jean le Blanc, p. 381.</p> - -<p><a id="Footnote_182" href="#FNanchor_182" class="label">[182]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (27 novembre 1673), t. III, p. 242, édit. G.; -t. III, p. 153, édit. M.—<i>Ibid.</i> (1<sup>er</sup> et 5 janvier 1674), t. III, p. 288, -292, 297.—<i>État de la France</i>, 1669, p. 361.—<i>Ibid.</i>, 1677, p. 346, -et 1678, p. 376.</p> - -<p><a id="Footnote_183" href="#FNanchor_183" class="label">[183]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> décembre 1673), t. III, p. 245, édit. G.; -t. III, p. 156, édit. M.—<i>Ibid.</i> (8 janvier 1674), t. III, p. 299, édit. G.; -t. III, p. 205, édit. M.—Madame la duchesse <span class="smallc">d'Orléans</span>, <i>Mémoires -et fragments historiques</i>, p. 47, édit. 1832.—<i>Ibid.</i>, éd. 1833, p. 46.</p> - -<p><a id="Footnote_184" href="#FNanchor_184" class="label">[184]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 janvier 1674), t. III, p. 316, édit. G.; -t. III, p. 218, édit. M.—Conférez la 4<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, -p. 277, et t. III, p. 374.</p> - -<p><a id="Footnote_185" href="#FNanchor_185" class="label">[185]</a> Voyez la 2<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, 2<sup>e</sup> édit, p. 151-155.—Madame -la duchesse <span class="smallc">d'Orléans</span>, princesse palatine, <i>Mémoires</i>, édit. de -Busoni, 1832, p. 90.—<span class="smallc">Motteville</span>, <i>Mémoires</i>, t. XL, p. 52, 53.</p> - -<p><a id="Footnote_186" href="#FNanchor_186" class="label">[186]</a> Madame la duchesse <span class="smallc">d'Orléans</span>, <i>Mémoires</i>, 1833, in-8<sup>o</sup>, p. 90, -91. <i>Lettres originales de madame</i> <span class="smallc">Charlotte-Élisabeth de Bavière</span>, -<i>veuve de</i> <span class="smallc">Monsieur</span>; 1788, in-12, t. I, p. 84 et 85.</p> - -<p><a id="Footnote_187" href="#FNanchor_187" class="label">[187]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> et 5 janvier 1674), t. III, p. 286 et 292, -édit. G.; t. III, p. 288 et 292, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_188" href="#FNanchor_188" class="label">[188]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (10 novembre 1673), t. III, p. 216, édit. G.; -t. III, p. 133 et 134, édit. M.—L'<i>État de la France</i>, édit. 1669, -p. 361, 362, 363.—Édit. 1677, p. 341, 347.—Édit. 1678, p. 377.</p> - -<p><a id="Footnote_189" href="#FNanchor_189" class="label">[189]</a> <span class="smallc">Montpensier</span>, <i>Mémoires</i> (1681 et 1668), t. XLIII, p. 20 et 121.—<span class="smallc">Motteville</span>, -<i>Mémoires</i> (1661), t. XL, p. 154.—<span class="smallc">Caylus</span>, <i>Souvenirs</i>, -t. LXVI, p. 434-35, édit. de Voltaire; Ferney, 1770, p. 93.</p> - -<p><a id="Footnote_190" href="#FNanchor_190" class="label">[190]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (12 janvier 1674), t. III, p. 303, édit. G.; -t. III, p. 206-207, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_191" href="#FNanchor_191" class="label">[191]</a> <i>État de la France</i>, 1678, in-12, p. 375.</p> - -<p><a id="Footnote_192" href="#FNanchor_192" class="label">[192]</a> Voyez la 3<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, ch. <span class="smallc">XII</span> et <span class="smallc">XIII</span>, p. 212 et 240.</p> - -<p><a id="Footnote_193" href="#FNanchor_193" class="label">[193]</a> <span class="smallc">Taschereau</span>, <i>Revue rétrospective</i>, numéro <span class="smallc">XI</span>, août 1834, p. 251 -à 255.</p> - -<p><a id="Footnote_194" href="#FNanchor_194" class="label">[194]</a> <i>Lettres patentes</i> données à Saint-Germain en Laye au mois de -mai 1667, et registrées au parlement le 13.—Ces lettres patentes -sont rapportées dans l'ouvrage de Dreux du Radier intitulé <i>Mémoires -et anecdotes des reines et régentes de France</i>, t. VI, -p. 415 du même ouvrage, édit. 1782.</p> - -<p><a id="Footnote_195" href="#FNanchor_195" class="label">[195]</a> Né le 31 mars 1670, mort à Sceaux le 14 mai 1736.</p> - -<p><a id="Footnote_196" href="#FNanchor_196" class="label">[196]</a> Né le 20 juin 1672, mort le 10 janvier 1683.</p> - -<p><a id="Footnote_197" href="#FNanchor_197" class="label">[197]</a> Née en juin 1673 à Tournay (<span class="smallc">Montpensier</span>, <i>Mémoires</i>, t. XLIII, -p. 381), morte le 16 juin 1743.</p> - -<p><a id="Footnote_198" href="#FNanchor_198" class="label">[198]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (lundi, 8 janvier 1674), t. III, p. 299, édit. G; -t. III, p. 203, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_199" href="#FNanchor_199" class="label">[199]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (12 janvier 1674), t. III, p. 306, édit. G.; t. III, -p. 209, édit. M.—Sur mademoiselle de Rouvroi, voyez <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> -(7 juin 1675), t. III, p. 414; et Lettre de <span class="smallc">le Camus</span>, évêque de Grenoble -(5 juin 1675), dans les <i>Œuvres</i> de Louis XIV, t. V, p. 534.</p> - -<p><a id="Footnote_200" href="#FNanchor_200" class="label">[200]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 janvier 1674), t. III, p. 317-318, édit. G.; -t. III, p. 218-219.</p> - -<p><a id="Footnote_201" href="#FNanchor_201" class="label">[201]</a> <span class="smallc">La Fontaine</span>, <i>le Songe</i>, dans ses <i>Œuvres</i>, 1827, t. VI, p. 189.</p> - -<p><a id="Footnote_202" href="#FNanchor_202" class="label">[202]</a> Sur mademoiselle la Mothe d'Argencourt, voyez les <i>Mémoires</i> -sur <span class="smallc">Sévigné</span>, 2<sup>e</sup> partie, chap. <span class="smallc">IX</span>, p. 109, 114.</p> - -<p><a id="Footnote_203" href="#FNanchor_203" class="label">[203]</a> Lettre de madame <span class="smallc">de la Vallière</span> au maréchal de Bellefonds -(3 février 1674), citée dans <span class="smallc">Bausset</span>, <i>Hist. de Bossuet</i>, livre <span class="smallc">V</span>, -t. II, p. 35, édit. in-12.—<span class="smallc">Montpensier</span>, <i>Mémoires</i>, t. XLIII, p. 382.—<i>Madame</i> -<span class="smallc">de la Vallière</span>, <i>Lettres</i>, 1747, in-12, p. 27.</p> - -<p><a id="Footnote_204" href="#FNanchor_204" class="label">[204]</a> L'abbé <span class="smallc">Lequeux</span>, <i>Histoire de madame de la Vallière</i>, p. 27, -dans les Lettres de madame la duchesse de la Vallière, 1767, in-12.—Madame -la duchesse <span class="smallc">d'Orléans</span>, <i>Fragments de lettres</i>, 1788, -in-12, t. I, p. 112.—Idem, <i>Mémoires</i>, Paris, 1832, in-8<sup>o</sup>, p. 58.</p> - -<p><a id="Footnote_205" href="#FNanchor_205" class="label">[205]</a> <span class="smallc">Bossuet</span>, <i>Œuvres</i>, édit. 1818, in-8<sup>o</sup>, t. XXXVII, p. 55-66 (lettres -au maréchal de Bellefonds, datées de Saint-Germain, le 25 décembre -1673, 27 janvier 1674; de Versailles, le 8 février et 6 avril 1674).</p> - -<p><a id="Footnote_206" href="#FNanchor_206" class="label">[206]</a> <span class="smallc">La Vallière</span>, <i>Réflexions sur la miséricorde de Dieu, par une -dame pénitente</i>; Paris, Antoine Dezallier, 1680, in-12. C'est la première -édition; elle fut achevée d'imprimer le 20 juin 1680. Une nouvelle -édition parut, augmentée de prières tirées de l'Écriture sainte et -du récit abrégé de la vie pénitente et de la sainte mort de madame -la duchesse de la Vallière; Paris, Christophe David, 1726, in-12.—Conférez -l'abbé <span class="smallc">Lequeux</span>, <i>Histoire de la Vallière</i>, dans les <i>Lettres</i>, -1768, in-12, p. 25.—Une nouvelle édition des <i>Réflexions</i> et -des <i>Lettres</i> a été donnée par Maradan en 1807; elle est précédée -d'une <i>Vie pénitente de madame de la Vallière</i>, par madame -<span class="smallc">de Genlis</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_207" href="#FNanchor_207" class="label">[207]</a> <span class="smallc">Bossuet</span>, <i>Œuvres</i>, édit. 1818, in-8<sup>o</sup>, t. XXXVII, p. 66 (lettre au -maréchal de Bellefonds, Versailles, ce 6 avril 1674).—<i>Ibid.</i> (lettres -du 27 janvier 1674), t. XXXVII, p. 58.</p> - -<p><a id="Footnote_208" href="#FNanchor_208" class="label">[208]</a> Madame la duchesse <span class="smallc">d'Orléans</span>, princesse palatine, <i>Mémoires</i>, -édit. 1832, in-8<sup>o</sup>, p. 58.—Id., <i>Fragments</i>, 1788, in-12 (lettres du -1<sup>er</sup> mars 1719), t. I, p. 113.—Id., <i>Mémoires de la cour de Louis XIV -et de la Régence</i>, Paris, 1805, in-8<sup>o</sup>, p. 56.</p> - -<p><a id="Footnote_209" href="#FNanchor_209" class="label">[209]</a> <span class="smallc">Montpensier</span>, <i>Mémoires</i> (1674), t. XLIII, p. 382.</p> - -<p><a id="Footnote_210" href="#FNanchor_210" class="label">[210]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (15 décembre 1673), t. III, p. 263 et 264, -édit. G.; t. III, p. 172, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_211" href="#FNanchor_211" class="label">[211]</a> Sur le frère de la Vallière, conférez <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (16 octobre -1676), t. V, p. 176, édit. G.; t. V, p. 10, édit. M.—<i>État de la -France</i>, 1678, in-12, p. 376.</p> - -<p><a id="Footnote_212" href="#FNanchor_212" class="label">[212]</a> <span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Œuvres</i>, t. V, p. 524 (lettre à la reine de Portugal, -en date du 23 mai 1674).—<i>État de la France</i>, 1677, p. 376. La marquise -de la Vallière est dans cet <i>État</i> la dernière inscrite de celles -de la création du 1<sup>er</sup> janvier 1674.</p> - -<p><a id="Footnote_213" href="#FNanchor_213" class="label">[213]</a> <span class="smallc">Montpensier</span>, <i>Mémoires</i>, t. XLIII, p. 383 (année 1674).</p> - -<p><a id="Footnote_214" href="#FNanchor_214" class="label">[214]</a> L'abbé <span class="smallc">Lequeux</span>, <i>Lettres de madame de la Vallière, morte -religieuse carmélite, avec un abrégé de sa vie pénitente</i>, p. 47.</p> - -<p><a id="Footnote_215" href="#FNanchor_215" class="label">[215]</a> <i>La Vie de Pierre Mignard</i>, Paris, 1730, in-12, p. 100; et dans -l'édition d'Amsterdam, 1731, in-12, p. 84.</p> - -<p><a id="Footnote_216" href="#FNanchor_216" class="label">[216]</a> Le roi était devant Besançon et la reine à Dijon.</p> - -<p><a id="Footnote_217" href="#FNanchor_217" class="label">[217]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 avril 1674), t. III, p. 340, édit. G.—<i>Lettres -inédites de madame</i> <span class="smallc">de Sévigné</span>, Paris, Klostermann, 1814, -in-8<sup>o</sup>, p. 6.—<i>Id.</i>, édit. Bossange, 1819, in-12, p. 5.</p> - -<p><a id="Footnote_218" href="#FNanchor_218" class="label">[218]</a> <span class="smallc">Bossuet</span>, <i>Lettres au maréchal de Bellefonds</i> (6 avril 1674), -t. XXXVII, p. 65, édit. 1818, in-8<sup>o</sup>.—<i>Sermon sur la vêture de madame -la duchesse de la Vallière</i>, par M. l'abbé <span class="smallc">de Fromentières</span>, -dans les <i>Lettres de madame la duchesse</i> <span class="smallc">de la Vallière</span>, 1767, -in-12, p. 39, 145, 191. L'abbé Jean-Louis de Fromentières fut évêque -d'Aire le 14 janvier 1673, et mourut en décembre 1684.</p> - -<p><a id="Footnote_219" href="#FNanchor_219" class="label">[219]</a> <i>Recueil des Gazettes nouvelles pour</i> 1675, Paris, 1676, in-4<sup>o</sup>, -n<sup>o</sup> 57, p. 409.—L'abbé <span class="smallc">Lequeux</span>, <i>Histoire de madame de la Vallière</i>, -p. 59, et dans le <i>Recueil des Oraisons funèbres</i> de <span class="smallc">Bossuet</span>, -1762, in-12, p. <span class="smallc">CLI</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_220" href="#FNanchor_220" class="label">[220]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 juin 1675), t. III, p. 403, édit. G.; t. III, -p. 283, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_221" href="#FNanchor_221" class="label">[221]</a> <span class="smallc">De Bausset</span>, <i>Hist. de Bossuet</i>, 4<sup>e</sup> édit., 1824, in-12, t. II, p. 40 à -42. Il est dit, dans le recueil des <i>Oraisons funèbres</i> de Bossuet, 1762, -in-12, p. 424, que Bossuet n'a jamais publié lui-même ce sermon sur -la Vallière ni communiqué son manuscrit. Et cependant on ajoute: -«Il fut imprimé plusieurs fois depuis 1691, année où il fut inséré -dans un recueil de pièces d'éloquence.»</p> - -<p><a id="Footnote_222" href="#FNanchor_222" class="label">[222]</a> Madame la duchesse <span class="smallc">d'Orléans</span>, <i>Mémoires et Fragments</i>, in-8<sup>o</sup>, -1832, p. 58.—Id., <i>Mémoires de la cour de Louis XIV</i>, 1827, in-8<sup>o</sup>, -p. 56.</p> - -<p><a id="Footnote_223" href="#FNanchor_223" class="label">[223]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (4 janvier 1680), t. VI, p. 286, édit. G.; t. VI, -p. 92, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_224" href="#FNanchor_224" class="label">[224]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> septembre 1680), t. VII, p. 190, édit. G.; -t. VI, p. 443, édit. M.—Conférez les vers de la <i>Couronne de Julie</i> -(la duchesse de Montausier).</p> - -<p><a id="Footnote_225" href="#FNanchor_225" class="label">[225]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (16 octobre 1676), t. V, p. 170, édit. G.; t. V, -p. 30, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_226" href="#FNanchor_226" class="label">[226]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (29 avril 1676), t. IV, p. 412, édit. G.; t. IV, -p. 272, édit. M.—Conférez <span class="smallc">Magdeleine du Saint-Esprit</span>, <i>Lettres</i>, -1710.</p> - -<p><a id="Footnote_227" href="#FNanchor_227" class="label">[227]</a> Conférez <span class="smallc">Magdeleine du Saint-Esprit</span>, par une dame pénitente, -1710, et l'Annuaire de l'Aube pour 1849, 2<sup>e</sup> partie, p. 25.—<i>Réflexions -sur la miséricorde de Dieu, par une dame pénitente</i>, -1685 et 1686, in-12, p. 170.</p> - -<p><a id="Footnote_228" href="#FNanchor_228" class="label">[228]</a> <span class="smallc">Caylus</span>, <i>Souvenirs</i>, édit. de Renouard, 1806, in-12, p. 89.—<i>Ibid.</i>, -t. LXVI, p. 384 de la Collect. de Petitot, 1828, in-8<sup>o</sup>.</p> - -<p><a id="Footnote_229" href="#FNanchor_229" class="label">[229]</a> <i>Les souvenirs de madame</i> <span class="smallc">de Caylus</span> <i>sur les intrigues amoureuses -de la cour, avec des notes de</i> <span class="smallc">M. de Voltaire</span>; <i>seconde édition, -augmentée de la défense de Louis XIV, pour servir de suite -à son Siècle</i>; au château de Ferney, 1770, in-12 (186 pages), p. 31. -C'est la meilleure édition; elle a été faite sur le manuscrit donné à -Voltaire par M. de Caylus (<i>Souvenirs</i>, 1806, in-12, p. 89, édit. de -Renouard).—<i>Idem.</i>, Collection Petitot, t. LXVI, p. 384, in-8<sup>o</sup>, -1828, édit. M. Voyez ces <i>Mémoires sur la Vallière, sur Sévigné</i>, -t. II, p. 191, 247, 297, 505, 506; III, 45, 237, 240, 319, 325; IV, 89.</p> - -<p><a id="Footnote_230" href="#FNanchor_230" class="label">[230]</a> <span class="smallc">Depping</span>, <i>Correspondance administrative de Louis XIV</i>. Lettres -du roi à Colbert (18 mai et 19 juin 1674), dans les <i>Documents -historiques tirés des collections manuscrites de la Bibliothèque -royale</i>, 1843, in-4<sup>o</sup>, t. II, p. 524, 525 et 526.</p> - -<p><a id="Footnote_231" href="#FNanchor_231" class="label">[231]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 janvier 1674), t. III, p. 299, édit. G.; t. III, -p. 203, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_232" href="#FNanchor_232" class="label">[232]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (18 décembre 1673), édit. G., t. III, p. 268.</p> - -<p><a id="Footnote_233" href="#FNanchor_233" class="label">[233]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (22 et 29 janvier 1674), t. III, p. 324 et 331, -édit. G.; t. III, p. 225 et 231, éd. M.—<i>Lettres des</i> <span class="smallc">Feuquières</span> -(25 janvier 1674), t. II, p. 248.</p> - -<p><a id="Footnote_234" href="#FNanchor_234" class="label">[234]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (4 décembre 1673), t. III, p. 249, édit. G.; -t. III, p. 160, édit. M. Voyez ci-après chap. <span class="smallc"><a href="#CHAPITRE_X">X</a></span>, p. <a href="#Page_198">198</a>.</p> - -<p><a id="Footnote_235" href="#FNanchor_235" class="label">[235]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (18 décembre 1673), t. III, p. 268; t. III, -p. 177, édit. M. (1820).</p> - -<p><a id="Footnote_236" href="#FNanchor_236" class="label">[236]</a> <span class="smallc">Saint-Eucher</span>, <i>Du mépris du monde</i>, traduit par <span class="smallc">Arnauld d'Andilly</span> -dans Pierre le Petit, 1687, in-12 (81 pages), p. 54. Après le -privilége il est dit: «Achevé d'imprimer pour la première fois le -3 décembre 1671.» Ainsi il y a eu une édition antérieure, et nous -apprenons par l'avertissement que cette édition contenait aussi le -latin. Il manque dans la nôtre.</p> - -<p><a id="Footnote_237" href="#FNanchor_237" class="label">[237]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (26 janvier 1674), t. III, p. 326 et 327, édit. G.; -t. III, p. 227, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_238" href="#FNanchor_238" class="label">[238]</a> Le jour de la Purification, le 2 février, ou peut-être le dimanche -28 janvier; car cette fête commençait le dimanche qui précédait ce -jour et se continuait jusqu'au jour même. Voyez <span class="smallc">Bossuet</span>, <i>Catéchisme -des festes</i>, 1687, p. 86.</p> - -<p><a id="Footnote_239" href="#FNanchor_239" class="label">[239]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 février 1674), t. III, p. 336, édit. G.; t. III, -p. 234, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_240" href="#FNanchor_240" class="label">[240]</a> Voyez <span class="smallc">Prosper Marchand</span>, <i>Dictionnaire historique</i>, 1758, in-folio, -p. 296-300.—<i>Mémoires du comte</i> <span class="smallc">de Guiche</span>, Utrecht, 1744, -in-12, deux volumes.—Conférez ces <i>Mémoires</i> sur madame de Sévigné, -I, 302; II, 139, 191, 312; IV, 134, 212.—<span class="smallc">Hamilton</span>, <i>Œuvres</i>, -t. I, p. 25.</p> - -<p><a id="Footnote_241" href="#FNanchor_241" class="label">[241]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 décembre 1673), t. III, p. 251, édit. G.; -t. III, p. 161, édit. M.—Le comte de Guiche mourut le 29 novembre -1674 à Creutznach dans le palatinat du Rhin, entre les bras de son -frère le comte de Louvigny.—Conférez <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (27 septembre -et 4 octobre 1671), t. II, p. 243, 254, 350, édit. G.; et <i>Mémoires -et fragments historiques de</i> <span class="smallc">Madame</span>, <i>duchesse</i> <span class="smallc">d'Orléans</span>, -<i>princesse Palatine</i>, édit. 1832, p. 207.—<i>Lettres des</i> <span class="smallc">Feuquières</span>, -t. VI, p. 321.</p> - -<p><a id="Footnote_242" href="#FNanchor_242" class="label">[242]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (18 décembre 1673), t. III, p. 266, édit. G.; -t. III, p. 175, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_243" href="#FNanchor_243" class="label">[243]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (25 décembre 1673), t. III, p. 276, édit. G.; -t. III, p. 183, édit. M.—<i>Ibid.</i> (28 décembre 1673), t. III, p. 283, -éd. G.; t. III, p. 189, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_244" href="#FNanchor_244" class="label">[244]</a> <span class="smallc">Duc de Noailles</span>, notes sur les <i>Mémoires de Louis XIV</i>; appendice -à la Vie de Maintenon, 1848, in-8<sup>o</sup>, t. I, p. 558.</p> - -<p><a id="Footnote_245" href="#FNanchor_245" class="label">[245]</a> <i>Mémoires de Noailles</i>, dans Petitot, t. LXIV, p. 104. Lettre -de la princesse des Ursins (11 juillet 1698).</p> - -<p><a id="Footnote_246" href="#FNanchor_246" class="label">[246]</a> <i>État général des officiers, domestiques et commensaux du -Roi</i>, mis en ordre par le sieur <span class="smallc">de la Martinière</span>, p. 116. Ce maître de -guitare se nommait Bernard Jourdan, sieur de la Salle, et c'est le -29 avril 1651 que de la Salle fut placé près du jeune roi, afin de lui -enseigner à jouer de la guitare. Le maître de luth n'avait que le -quart des appointements du maître de guitare.</p> - -<p><a id="Footnote_247" href="#FNanchor_247" class="label">[247]</a> Conférez <i>Mémoires sur Sévigné</i>, t. I, p. 513, 525; t. II, ch. <span class="smallc">XXIII</span>, -p. 332, 340; t. III, ch. <span class="smallc">V</span>, p. 98.</p> - -<p><a id="Footnote_248" href="#FNanchor_248" class="label">[248]</a> Vie de <span class="smallc">Philippe Quinault</span>, dans l'édition de ses <i>Œuvres</i>, 1715, -in-12, t. I, p. 33-35.—<span class="smallc">Chapuzeau</span>, <i>le Théâtre français</i>, divisé en -trois livres, 1674, in-12, p. 198-211.</p> - -<p><a id="Footnote_249" href="#FNanchor_249" class="label">[249]</a> Les frères <span class="smallc">Parfaict</span>, <i>Histoire du Théâtre français</i>, t. XI, -p. 293.</p> - -<p><a id="Footnote_250" href="#FNanchor_250" class="label">[250]</a> <span class="smallc">Titon du Tillet</span>, <i>Parnasse françois</i>, Paris, 1732, in-folio, -p. 490.—<span class="smallc">Roquefort</span>, dans la <i>Biographie universelle</i>, t. VIII, p. 244, -article <i>Charpentier</i> (Marc-Antoine). Ce savant maître de musique -de la Sainte-Chapelle naquit à Paris en 1634, et y mourut en 1702, -âgé de soixante-huit ans.</p> - -<p><a id="Footnote_251" href="#FNanchor_251" class="label">[251]</a> Avec le Prologue, 36 pages in-4<sup>o</sup>, Paris, 1663, chez Christophe -Ballard.</p> - -<p><a id="Footnote_252" href="#FNanchor_252" class="label">[252]</a> <span class="smallc">Félibien</span>, <i>les Divertissements de Versailles</i>, p. 28.</p> - -<p><a id="Footnote_253" href="#FNanchor_253" class="label">[253]</a> Conférez <span class="smallc">la Fontaine</span>, <i>Épître à M. Nyert sur l'Opéra</i>, et nos -notes dans les <i>Œuvres</i>, édit. 1827, t. VI, p. 108 à 119.—<span class="smallc">Raguenet</span>, -<i>Parallèle des Italiens et des Français en ce qui regarde la musique -et l'Opéra</i>, in-12, Paris, 1702, p. 124.—<span class="smallc">La Bruyère</span>, <i>Caractères</i>, -ch. <span class="smallc">XLVII</span>, t. I, p. 164, édit. W., 1835, in-8<sup>o</sup> et in-12.</p> - -<p><a id="Footnote_254" href="#FNanchor_254" class="label">[254]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 novembre 1673), t. III, p. 231, édit. G.; -t. III, p. 146, édit. M.—Vie de <span class="smallc">Quinault</span>, dans les <i>Œuvres de</i> <span class="smallc">Quinault</span>, -édit. 1715, p. 34.</p> - -<p><a id="Footnote_255" href="#FNanchor_255" class="label">[255]</a> Le premier opéra de ces deux auteurs, joué dans cette salle, fut -<i>Cadmus et Hermione</i>, représenté le 17 avril 1673; mais cette pièce -avait déjà été jouée au jeu de paume du Bel-Air. Conférez <i>Vie de -Quinault</i>, dans les <i>Œuvres de</i> <span class="smallc">Quinault</span>, édit. 1715, in-12.</p> - -<p><a id="Footnote_256" href="#FNanchor_256" class="label">[256]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 janvier 1674), t. III, p. 299, édit. G.; t. III, -p. 283, édit. M (Corrigez la note dans les deux édit.).</p> - -<p><a id="Footnote_257" href="#FNanchor_257" class="label">[257]</a> <span class="smallc">De Beauchamps</span>, <i>Recherches sur les théâtres de France</i>, t. III, -p. 202-207.</p> - -<p><a id="Footnote_258" href="#FNanchor_258" class="label">[258]</a> <span class="smallc">Quinault</span>, <i>Alceste</i>, tragédie, acte III, scène 3, t. IV, p. 182 du -<i>Théâtre de</i> <span class="smallc">M. Quinault</span>, 1715, in-12.</p> - -<p><a id="Footnote_259" href="#FNanchor_259" class="label">[259]</a> <span class="smallc">La Bruyère</span>, <i>Caractères</i>, ch. <span class="smallc">I</span>, n<sup>o</sup> <span class="smallc">XLVII</span>, p. 165.</p> - -<p><a id="Footnote_260" href="#FNanchor_260" class="label">[260]</a> <span class="smallc">B. de Beauchamps</span>, <i>Recherches sur les théâtres de France</i>, -t. III, p. 178.—<span class="smallc">Pavillon</span> (lettre à mademoiselle Itier), <i>Œuvres</i>, -édit. 1750, in-12, p. 96.</p> - -<p><a id="Footnote_261" href="#FNanchor_261" class="label">[261]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 février 1674), t. III, p. 335, édit. M.; t. III, -p. 233, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_262" href="#FNanchor_262" class="label">[262]</a> <span class="smallc">De Gourville</span>, <i>Mémoires</i> (1657), collect. de Petitot, t. LII, -p. 317-341.</p> - -<p><a id="Footnote_263" href="#FNanchor_263" class="label">[263]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 février 1674), t. III, p. 335, édit. G.; t. III, -p. 233, édit. M.—<span class="smallc">Pavillon</span>, <i>Œuvres</i>, édit. 1750, t. I, p. <span class="smallc">LXXVIII</span>, Remarques -sur Briord.</p> - -<p><a id="Footnote_264" href="#FNanchor_264" class="label">[264]</a> Voyez <i>Lettres de</i> <span class="smallc">Louis XIV</span> au comte de Briord, la Haye, 1726, -pet. in-12, 209 pag.; pièces justificatives, 50 pag.</p> - -<p><a id="Footnote_265" href="#FNanchor_265" class="label">[265]</a> <span class="smallc">Pavillon</span>, <i>Œuvres</i>, édit. 1750, t. I, p. 154. Conférez t. I, p. 146, -148, 152, 157, 165, et t. II, p. 202, 205, 284.</p> - -<p><a id="Footnote_266" href="#FNanchor_266" class="label">[266]</a> <span class="smallc">D'Olivet</span>, <i>Histoire de l'Académie françoise</i>, édit. in-4<sup>o</sup>, 1729, -t. II, p. 158.</p> - -<p><a id="Footnote_267" href="#FNanchor_267" class="label">[267]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 novembre 1673), t. III, p. 223, édit. G.; -t. III, p. 139, édit. M.—Chapelain ne mourut que plusieurs mois -après cette lettre, le 22 février 1674.</p> - -<p><a id="Footnote_268" href="#FNanchor_268" class="label">[268]</a> <span class="smallc">Tallemant des Réaux</span>, <i>Historiettes</i>, t. II, p. 399, 416, édit. -in-8<sup>o</sup>; t. IV, p. 152, 170, édit. in-12.—<span class="smallc">D'Olivet</span>, <i>Histoire de l'Académie -françoise</i>, édit. 1729, in-4<sup>o</sup>, t. II, p. 124.</p> - -<p><a id="Footnote_269" href="#FNanchor_269" class="label">[269]</a> <span class="smallc">Sainte-Beuve</span>, <i>Port-Royal</i>, t. III, p. 470.</p> - -<p><a id="Footnote_270" href="#FNanchor_270" class="label">[270]</a> <i>Vie de Costar</i>, t. VI, p. 263 des <i>Historiettes</i> de <span class="smallc">Tallemant des -Réaux</span>, et <i>ibid.</i>, p. 264 et 265. Lettres autographes d'Arnauld d'Andilly -et de Chapelain.</p> - -<p><a id="Footnote_271" href="#FNanchor_271" class="label">[271]</a> <span class="smallc">D'Olivet</span>, <i>Histoire de l'Académie françoise</i>, édit. in-4<sup>o</sup>, t. II, -p. 128.</p> - -<p><a id="Footnote_272" href="#FNanchor_272" class="label">[272]</a> <span class="smallc">Claude Duval de Coupeauville</span>, abbé de la Victoire, mort en -1676. Conférez sur ce personnage <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (27 février 1671), -éd. G.; t. I, p. 265, édit. M. (M. M. a corrigé sa note ailleurs.)—<span class="smallc">Tallemant -des Réaux</span>, <i>Historiettes</i>, t. II, p. 303-332 (et la note 726 -à la page <a href="#Page_330">330</a>), édit. in-8<sup>o</sup>; t. IV, p. 87, 88, et la note 1.—<i>Ménagiana</i>, -t. II, p. 1; t. III, p. 79.</p> - -<p><a id="Footnote_273" href="#FNanchor_273" class="label">[273]</a> <i>Œuvres de</i> <span class="smallc">Boileau Despréaux</span>, édit. de Saint-Marc, 1747, t. I, -p. 154. Note sur le vers 203 de la satire <span class="smallc">IX</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_274" href="#FNanchor_274" class="label">[274]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (15 décembre 1673), t. III, p. 264, édit. G.; -t. III, p. 173, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_275" href="#FNanchor_275" class="label">[275]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (15 décembre 1673), t. III, p. 262, édit. G.; -t. III, p. 171, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_276" href="#FNanchor_276" class="label">[276]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 et 15 janvier 1674), t. III, p. 307, édit. G.; -t. III, p. 209, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_277" href="#FNanchor_277" class="label">[277]</a> Voyez la 3<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 82, ch. <span class="smallc">V</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_278" href="#FNanchor_278" class="label">[278]</a> <span class="smallc">Griffet</span>, <i>Recueil de lettres pour servir d'éclaircissements à -l'histoire militaire de Louis XIV</i>, 1760, in-12, t. II, p. 262 et 270. -Depuis le 7 janvier 1674 jusqu'au 11 mars, toutes ces lettres sont à -tort datées de 1673; c'est 1674 qu'il faut lire. Ces fautes ne sont pas -corrigées dans la table.</p> - -<p><a id="Footnote_279" href="#FNanchor_279" class="label">[279]</a> <i>Mémoires du duc</i> <span class="smallc">de Navailles</span> <i>et</i> <span class="smallc">de la Valette</span>, 1702, in-12, -p. 285.—<span class="smallc">Du Londel</span>, <i>Fastes des rois</i>, 1697, in-8<sup>o</sup>, p. 213, 214.</p> - -<p><a id="Footnote_280" href="#FNanchor_280" class="label">[280]</a> <span class="smallc">Griffet</span>, <i>Recueil de lettres pour servir à l'éclaircissement de -l'histoire militaire de Louis XIV</i>, t. II, p. 320.</p> - -<p><a id="Footnote_281" href="#FNanchor_281" class="label">[281]</a> <i>Œuvres diverses</i> du sieur D***, avec le <i>Traité du sublime</i> -de Longin; Paris, chez Denis Thierry, 1674, in-4<sup>o</sup>, p. 140 et 141. -(Au dernier feuillet: «Achevé d'imprimer pour la première fois le -10 juillet 1674).»</p> - -<p><a id="Footnote_282" href="#FNanchor_282" class="label">[282]</a> <span class="smallc">Desormeaux</span>, <i>Histoire de Louis, prince de Condé</i>, 1769, in-12, -p. 380.—<span class="smallc">Ramsay</span>, <i>Histoire du vicomte de Turenne</i>, 1773, in-12, -t. II, p. 240 à 304.—<span class="smallc">Deschamps</span>, <i>Dernières campagnes de M. de -Turenne</i>, dans l'<i>Histoire du vicomte de Turenne</i>, t. III, p. 306-406—<span class="smallc">Pellisson</span>, -<i>Histoire de Louis XIV</i>, Paris, 1749, in-12, t. III, -p. 227-228.</p> - -<p><a id="Footnote_283" href="#FNanchor_283" class="label">[283]</a> <span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Œuvres</i>, <i>fragment sur la conquête de la Franche-Comté</i>.—Et -le général <span class="smallc">Grimoard</span>, <i>Précis sur la conquête de la -Franche-Comté</i>, dans les <i>Œuvres de</i> <span class="smallc">Louis XIV</span>, t. III, p. 453 -et 473.—<i>Recueil de lettres pour servir d'éclaircissement à -l'histoire militaire de Louis XIV</i>, 1760, in-12, t. II, p. 273, 286.</p> - -<p><a id="Footnote_284" href="#FNanchor_284" class="label">[284]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 janvier 1674), t. III, p. 315, édit. G.; -t. III, p. 217, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_285" href="#FNanchor_285" class="label">[285]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 février 1674), t. III, p. 336, édit. G.; t. III, -p. 235, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_286" href="#FNanchor_286" class="label">[286]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (22 mai 1674), t. III, p. 341, édit. G.; t. III, -p. 237, édit. M.; t. III, p. 19 et 20 de l'édit. de 1754.</p> - -<p><a id="Footnote_287" href="#FNanchor_287" class="label">[287]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (27 mai et 15 juin 1674.), t. III, p. 393-409, -édit. G.; t. III, p. 237, édit. M.—<i>Ibid.</i> (25 mai et 19 juin 1675), -t. III, p. 386, 391 et 422, édit. G.; t. III, p. 267, 272, 299, édit. M.—<i>Suite -des Mémoires de</i> <span class="smallc">Bussy</span>, ms. (lettre à madame de Grignan, -datée du 12 mai). C'est la même que celle qui est datée du 10 mai -dans les édit., t. III, p. 386.</p> - -<p><a id="Footnote_288" href="#FNanchor_288" class="label">[288]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (15 octobre 1674), t. III, p. 361, édit. G.; t. III, -p. 248 (27 mai 1675), p. 304, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_289" href="#FNanchor_289" class="label">[289]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (2 février 1674), t. III, p. 333, édit. G.; t. III, -p. 212, édit. M.—<i>Ibid.</i> (22 mai 1674), t. III, p. 238, édit. M.; -t. III, p. 343, édit. G.; t. III, p. 275, édit. M.—<i>Ibid.</i> (5 février -1674), t. III, p. 337, édit. G.; t. III, p. 235, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_290" href="#FNanchor_290" class="label">[290]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 janvier 1674), t. III, p. 297, édit. G.; t. III, -p. 201, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_291" href="#FNanchor_291" class="label">[291]</a> Conférez la 3<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, ch. <span class="smallc">XVIII</span>, p. 348 et 349.</p> - -<p><a id="Footnote_292" href="#FNanchor_292" class="label">[292]</a> Conférez <i>Suite des Mémoires du comte</i> <span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span>, ms. -autographe de l'Institut, p. 79 verso (lettre du 16 août 1674 à madame -de Sévigné).—<span class="smallc">Bussy-Rabutin</span>, <i>Lettres</i> (16 août 1674), t. I, -p. 127, édit. de 1737, in-12.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (16 août 1673), t. III, -p. 242, édit. M.; t. III, p. 351, édit. G. Dans ces deux dernières éditions -cette lettre est tronquée.—<i>Lettres inédites de madame</i> <span class="smallc">de -Sévigné</span>, Paris, Klostermann, 1814, in-8<sup>o</sup>, t. III et IV, p. 8 et 10.—<i>Ibid.</i>, -Paris, in-12, édit. Bossange et Masson (Paris, juin et juillet -1674), fausse date, p. 8 et 9.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (18 juin et 10 juillet, -vraie date), t. III, p. 347 et 348, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_293" href="#FNanchor_293" class="label">[293]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> juin 1674), t. III, p. 343, édit G.; t. III, -p. 239, édit M.—<i>Lettres de madame</i> <span class="smallc">de Rabutin-Chantal</span> (samedi, -juin 1674), la Haye, Gosse, 1726, in-12, t. II, p. 7.—<i>Ibid.</i> (à Livry, -ce 1<sup>er</sup> juin 1674), édit. 1726, sans nom de lieu, dite de Rouen, t. II, -p. 23. La date du samedi de l'édition de la Haye, si on la complétait -par l'édition de Rouen, reporterait cette lettre à l'année 1675, -ce qui n'est pas; il faut mettre: Vendredi 1<sup>er</sup> juin 1674.</p> - -<p><a id="Footnote_294" href="#FNanchor_294" class="label">[294]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i>, t. III, p. 357, 359, 361 et 362.</p> - -<p><a id="Footnote_295" href="#FNanchor_295" class="label">[295]</a> Voyez ci-dessus, ch. I, p. <a href="#Page_8">8</a>-<a href="#Page_17">17</a>, et dans les précédentes parties, -t. I, p. 195, 198, 203, 365, 429; t. II, p. 35, 295; t. III, p. 94, 410; -t. IV, p. 68, 127, 132.</p> - -<p><a id="Footnote_296" href="#FNanchor_296" class="label">[296]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres inédites</i>, 1814, in-8<sup>o</sup> (lettres de M. le comte -de Guitaud, p. 1 à 110, à la comtesse de Guitaud), p. 111, 196; -éd. 1819, p. 1-110, et p. 111 à 194.</p> - -<p><a id="Footnote_297" href="#FNanchor_297" class="label">[297]</a> <i>Lettres inédites de madame</i> <span class="smallc">de Sévigné</span>, édit. 1819, in-12, p. 7.—<span class="smallc">Sévigné</span>, -<i>Lettres</i> (28 avril 1674), t. III, p. 341.</p> - -<p><a id="Footnote_298" href="#FNanchor_298" class="label">[298]</a> <i>Lettres inédites</i>, édit. 1819, p. 11.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (30 juin? -1675), t. III, p. 349, édit. G. Cette lettre est à tort datée de 1674 -dans l'édition des lettres inédites et dans l'édition de G. de S.-G.</p> - -<p><a id="Footnote_299" href="#FNanchor_299" class="label">[299]</a> Confér. la 3<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, ch. <span class="smallc">XVI</span>, p. 307, et la -4<sup>e</sup> partie, ch. <span class="smallc">IX</span>, p. 245.</p> - -<p><a id="Footnote_300" href="#FNanchor_300" class="label">[300]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (14 octobre 1674), t. III, p. 357, édit. de Gault -de Saint-Germain. On lit <i>cent mille francs</i>, mais c'est une faute -de copiste ou d'imprimeur: il faut lire <i>cinq mille</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_301" href="#FNanchor_301" class="label">[301]</a> <i>Abrégé des délibérations prises en l'assemblée générale des -communautés</i>, tenue à Lambesc dans les mois de novembre et décembre -1674; Aix, Charles David, 1675, in-4<sup>o</sup>, p. 4 et 13.</p> - -<p><a id="Footnote_302" href="#FNanchor_302" class="label">[302]</a> <i>Abrégé des délibérations</i>, etc., p. 4.—Conférez la 4<sup>e</sup> partie de -ces <i>Mémoires</i>, ch. <span class="smallc">IX</span>, p. 230.</p> - -<p><a id="Footnote_303" href="#FNanchor_303" class="label">[303]</a> Conférez la 4<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, ch. <span class="smallc">X</span>, p. 278-280.</p> - -<p><a id="Footnote_304" href="#FNanchor_304" class="label">[304]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (novembre 1674), t. III, p. 362, édit. G. de S.-G. -Il y a dans l'édition <i>M. de Bouilli</i>. Gault de Saint-Germ., qui a donné -le premier cette lettre d'après l'autographe, n'a pas bien su la lire.</p> - -<p><a id="Footnote_305" href="#FNanchor_305" class="label">[305]</a> <i>Lettres de messire</i> <span class="smallc">Roger de Rabutin</span>, Paris, Delaulne, 1726, -in-12, t. I, p. 117 (Chaseu, ce 16 août 1674), date conforme dans cette -édition au ms. (n<sup>o</sup> 231, in-4<sup>o</sup>) de la <i>Suite des Mémoires</i>, p. 78 -verso. <span class="smallc">Bussy</span> prétend, dans ses <i>Mémoires</i>, qu'il avait entendu dire -que madame de Sévigné avait failli mourir d'apoplexie. Celle-ci -dément cette nouvelle.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (16 août et 5 septembre -1674), t. III, p. 350 et 352, édit G.; t. III, p. 241 et 242, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_306" href="#FNanchor_306" class="label">[306]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (15 octobre 1674), t. III, p. 359, édit G.; -t. III, p. 247, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_307" href="#FNanchor_307" class="label">[307]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 avril 1672), t. II, p. 475, édit. G.; t. II, -p. 400, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_308" href="#FNanchor_308" class="label">[308]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 décembre 1677), t. V, p. 464, édit. G.; -t. V, p. 288, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_309" href="#FNanchor_309" class="label">[309]</a> <span class="smallc">Bussy</span>, <i>Lettres</i>, édit. 1737, in-12 (3 mars 1680), t. IV, p. 425.—(13 -novembre 1688), t. VI, p. 317.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (25 février -et 3 novembre 1688), t. VIII, p. 156 et 414, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_310" href="#FNanchor_310" class="label">[310]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (4 octobre 1680), t. VII, p. 231, édit. G.—<i>Ibid.</i> -(25 février 1686), t. VIII, p. 231, édit. G.; t. VII, p. 365, -édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_311" href="#FNanchor_311" class="label">[311]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 février 1690), t. X, p. 232, et tome I, -p. <span class="smallc">CIX</span>, édit. G.—(5 novembre 1691), t. IX, p. 486, édit. M.; t. X, -p. 423, édit. G.—(10 mai et 7 juillet 1703), t. XI, p. 345 et 394, -édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_312" href="#FNanchor_312" class="label">[312]</a> <span class="smallc">La Beauhelle</span>, <i>Mélanges</i>, mss. cités par Monmerqué dans <span class="smallc">Sévigné</span>, -<i>Lettres</i>, t. VII, p. 366.</p> - -<p><a id="Footnote_313" href="#FNanchor_313" class="label">[313]</a> <span class="smallc">Bussy</span>, <i>Lettres</i> (14 août 1674), t. IV, p. 136—<i>Suite des Mémoires -de</i> <span class="smallc">Bussy</span>, ms., p. 80. Avant de transcrire dans ses <i>Mémoires</i> -cette lettre tout à fait historique et très-instructive, Bussy dit: -«Deux jours après que j'eus écrit cette lettre (la lettre à madame de -Sévigné du 16 août 1674, qu'on a mutilée), je reçus celle-ci de ma -fille de Rabutin, dame de Remiremont.»</p> - -<p><a id="Footnote_314" href="#FNanchor_314" class="label">[314]</a> <span class="smallc">Bussy</span>, <i>Discours à ses enfants</i>; 1694, in-12, p. 441.—<span class="smallc">Sévigné</span>, -<i>Lettres</i> (2 juillet 1690), t. IX, p. 389, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_315" href="#FNanchor_315" class="label">[315]</a> Voyez <span class="smallc">Monmerqué</span> dans les notes sur Sévigné, t. VI, p. 355; -t. VII, p. 108; et t. VIII, p. 71 et 417, édit. G.; p. 138, édit. M. -(26 juin et 14 novembre 1688).—<span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Œuvres complètes</i>, -t. X, p. 77.—<span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mém. authentiques</i>, 1829, in-8<sup>o</sup>, t. V, -p. 305.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i>, édit. G., t. V, p. 5; VI, 335; VII, 84; -X, 291. L'arrêt du 30 mai et du 31 janvier 1689 donna gain de -cause à la comtesse de Bussy.</p> - -<p><a id="Footnote_316" href="#FNanchor_316" class="label">[316]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (3 mars 1690), t. X, p. 237, édit. G.; t. IX, -p. 339, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_317" href="#FNanchor_317" class="label">[317]</a> <span class="smallc">Monmerqué</span>, <i>Notice bibliographique des différentes éditions -des Lettres de madame de Sévigné</i>, dans l'édition de Sévigné, 1820, -in 8<sup>o</sup>, t. I, p. 23.</p> - -<p><a id="Footnote_318" href="#FNanchor_318" class="label">[318]</a> <span class="smallc">Bussy</span>, <i>Discours à ses enfants</i>, 1694, Paris, in-12, p. 240.—Conférez -<i>Mémoires sur Sévigné</i>, 2<sup>e</sup> édit., I, 204-205; II, 351.</p> - -<p><a id="Footnote_319" href="#FNanchor_319" class="label">[319]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (7 juillet 1672), t. III, p. 93 et 94, édit. G.; -t. III, p. 27 et 28, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_320" href="#FNanchor_320" class="label">[320]</a> <i>Suite des Mémoires de</i> <span class="smallc">Bussy</span> (ms. de l'Institut), p. 110. Lettre -de Bussy à Pellisson (25 mai 1675).</p> - -<p><a id="Footnote_321" href="#FNanchor_321" class="label">[321]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (4 octobre 1680), t. VII, p. 231, édit. G.; t. VI, -p. 478, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_322" href="#FNanchor_322" class="label">[322]</a> 1<sup>re</sup> partie des <i>Mémoires sur madame de Sévigné</i>, p. 101, ch. <span class="smallc">VII</span>; -2<sup>e</sup> partie, p. 407, et 4<sup>e</sup> partie, p. 195 et 452.</p> - -<p><a id="Footnote_323" href="#FNanchor_323" class="label">[323]</a> <span class="smallc">Bussy</span>, <i>Discours à ses enfants</i>, p 207.—<i>Ibid.</i>, <i>Mémoires</i>, édit. -d'Amsterdam, 1721, t. I, p. 93 et 125.</p> - -<p><a id="Footnote_324" href="#FNanchor_324" class="label">[324]</a> <i>Nouvelles Lettres du comte</i> <span class="smallc">de Bussy</span>, t. V, p. 163.</p> - -<p><a id="Footnote_325" href="#FNanchor_325" class="label">[325]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 mai 1671), t. II, p. 73, édit. G. (24 mai -1672), t. II, p. 75, édit. G., et t. II, p. 61 et 62, édit. M.—<i>Ibid.</i> -(24 et 28 janvier 1672), t. II, p. 351 et 359; t. II, p. 303 et 304.—<i>Ibid.</i> -(6 août 1675), t. III, p. 488, édit. G.; t. II. p 352, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_326" href="#FNanchor_326" class="label">[326]</a> Conférez la 4<sup>e</sup> partie des <i>Mémoires sur madame</i> <span class="smallc">de Sévigné</span>, -p. 309, ch. <span class="smallc">IX</span>. Nous avons dit dans cet endroit <i>la fille aînée de -Bussy</i>, en parlant de Louise-Françoise, parce qu'elle était l'aînée -de ses autres filles à marier; mais Diane de Rabutin, la religieuse, -était de dix-huit mois plus âgée qu'elle.</p> - -<p><a id="Footnote_327" href="#FNanchor_327" class="label">[327]</a> <span class="smallc">De la Rivière</span>, réponse à Bussy, dans le <i>Recueil de pièces fugitives -sur des sujets intéressants</i>, Rotterdam, Bradshaw, 1743, in-12, -page 21. Nous aurons à réformer l'opinion commune sur la Rivière.</p> - -<p><a id="Footnote_328" href="#FNanchor_328" class="label">[328]</a> Conférez la 4<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 310.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> -(3 avril 1675), t. III, p. 377, édit. G.; t. III, p. 260, édit. M.—<span class="smallc">Bussy-Rabutin</span>, -<i>Suite de ses Mémoires</i>, ms. de l'Institut, p. 114. -Cette lettre est datée du 8 avril 1675, et dans ces Mémoires tout le -commencement est supprimé.</p> - -<p><a id="Footnote_329" href="#FNanchor_329" class="label">[329]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (lettre de Bussy, 7 avril 1675), t. III, p. 381, -édit. G.; t. III, p. 262, édit. M.—<i>Suite des Mémoires du comte</i> <span class="smallc">de -Bussy de Rabutin</span>, ms. de l'Institut, p. 114. Mais la lettre est datée -de Chaseu, du 12 avril 1675; le commencement manque dans le ms. -comme pour la lettre précédente. Les éditeurs ont peut-être réuni -deux lettres en une seule; cela expliquerait la différence des dates.</p> - -<p><a id="Footnote_330" href="#FNanchor_330" class="label">[330]</a> Le vrai nom est Soyecourt; pour le sens de cette phrase de Bussy, -voyez ces <i>Mémoires</i>, I, 244 et 288; II, p. 416.</p> - -<p><a id="Footnote_331" href="#FNanchor_331" class="label">[331]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (9 octobre 1675), t. V, p. 136.—<i>Ibid.</i> (9 octobre -1675), p. 142, édit. G.; t. IV, p. 29, édit. M.—<i>Ibid.</i> (3 août -1679), t. VI, p. 105, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_332" href="#FNanchor_332" class="label">[332]</a> <i>Lettres choisies de</i> <span class="smallc">M. de la Rivière</span>, 1751; in-12, t. I, p. 25, -note 14.</p> - -<p><a id="Footnote_333" href="#FNanchor_333" class="label">[333]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 février 1687), t. VIII, p. 320, édit. G.; -t. VIII, p. 425, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_334" href="#FNanchor_334" class="label">[334]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (31 janvier 1692), t. X, p 429, édit. G.—<i>Ibid.</i>, -(2 juillet 1690), t. X, p. 311, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_335" href="#FNanchor_335" class="label">[335]</a> Madame de Grignan à Bussy, dans <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (15 mars -1676), t. IV, p. 368, et dans la <i>Suite des Mémoires de</i> <span class="smallc">Bussy</span>, p. 164 -verso, ms. de l'Institut.</p> - -<p><a id="Footnote_336" href="#FNanchor_336" class="label">[336]</a> Il fut tué devant Condé et enterré dans le chœur de la grande -église de cette ville. Voyez la lettre de Bussy fils à son père, en date -du 7 juillet 1676, p. 177 verso de la <i>Suite des Mém. de</i> <span class="smallc">Bussy</span>, -ms. de l'Institut.—<span class="smallc">Bussy</span>, <i>Lettres</i> (8 juillet 1676, lettre de Schomberg), -t. IV, p. 268.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 juillet 1676), t. V, p. 4, -édit. G.; t. IV, p. 367, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_337" href="#FNanchor_337" class="label">[337]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (2 août 1679), t. VI, p. 105, édit. G.; t. V, -p. 417, édit. M.—(31 mai 1690), t. IX, p. 379, édit. M.; t. X, p. 291, -édit. G.—(31 janvier 1692), t. IX, p. 491, édit. M.; t. X, p. 429, -édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_338" href="#FNanchor_338" class="label">[338]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 mars et 2 juillet 1690), t. X, p. 236 et 311, -édit. G.—<span class="smallc">Monmerqué</span>, <i>Notice sur le comte de Coligny-Saligny</i>, -dans les Mémoires du comte <span class="smallc">de Coligny-Saligny</span>, 1841, in-8<sup>o</sup>, p. <span class="smallc">XI</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_339" href="#FNanchor_339" class="label">[339]</a> Marie-Roger, comte de Langheac, petit-fils de Bussy de Rabutin -par madame de Coligny, sa fille, mourut à Avignon en 1746. Voyez -<span class="smallc">Monmerqué</span>, dans <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 août 1676), t. IV, p. 414, -édit. M., note <i>b</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_340" href="#FNanchor_340" class="label">[340]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (30 avril et 10 mai 1675), t. III, p. 383 et -385, édit. G.—<i>Ibid.</i> (28 mai 1675), t. III, p. 391 et 422, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_341" href="#FNanchor_341" class="label">[341]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i>, t. III, p. 346, n<sup>o</sup> 370, édit. G. Cette lettre est -déplacée, elle est à tort datée <i>juin</i> 1674; elle doit être transposée à -la page 393, après la lettre n<sup>o</sup> 388, et datée du 18 juin 1675.—Conférez -<i>Lettres inédites de madame</i> <span class="smallc">de Sévigné</span>, 1814, p. 8 et 9, où -cette lettre ne porte aucune date. La date fausse commence avec -l'édition stéréotype, 1819, in-12, p. 7.</p> - -<p><a id="Footnote_342" href="#FNanchor_342" class="label">[342]</a> Ceci rectifie une erreur que nous avons commise, t. I, p. 9 de -ces <i>Mémoires</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_343" href="#FNanchor_343" class="label">[343]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (12 mai 1675), ms. de l'Institut, p. 118.—(10 -mai 1675), t. III, p. 385, édit. G.—(30 avril 1675), t. III, p. 383, -édit. G.; t. III, p. 264 et 266, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_344" href="#FNanchor_344" class="label">[344]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (26 juin 1676), t. IV, p. 504, édit. G.; t. IV, -p. 355, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_345" href="#FNanchor_345" class="label">[345]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (16 mai 1675), <i>suite des Mémoires de</i> <span class="smallc">Bussy</span>, -ms. de l'Institut, p. 120, t. III, p. 389, édit. G., mal datée du 14 mai.</p> - -<p><a id="Footnote_346" href="#FNanchor_346" class="label">[346]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 mai 1676), ms. de l'Institut; t. IV, p. 462, -édit. G.—(26 août 1675), t. I, p. 5, édit. G.—(7 août 1675), t. III, -p. 506, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_347" href="#FNanchor_347" class="label">[347]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (12 mars 1675), <i>Suite des Mémoires de</i> <span class="smallc">Bussy</span>, -ms. de l'Institut, p. 104, t. III, p. 369, édit. G.; t. III, p. 254, édit. M., -datée, dans les deux éditions, du 24 janvier 1675. Cette date est fausse.—<i>Ibid.</i>, -<i>Lettres</i> (25 mai 1675), t. III, p. 273, édit. M.; t. III, p. 391, -édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_348" href="#FNanchor_348" class="label">[348]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (27 mai 1675), t. III, p. 27, édit. M.; t. III, p. 393, -édit. G. (7 août 1675), t. III, p. 506, édit. G.; t. III, p. 366-7, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_349" href="#FNanchor_349" class="label">[349]</a> <i>Mémoires touchant la vie et les écrits de madame</i> <span class="smallc">de Sévigné</span> -durant les premières conquêtes de Louis XIV, 3<sup>e</sup> partie, p. 112 et 114.</p> - -<p><a id="Footnote_350" href="#FNanchor_350" class="label">[350]</a> <span class="smallc">Dumont</span>, <i>Histoire de la ville et des seigneurs de Commercy</i>, -t. II, p. 166 et 168.</p> - -<p><a id="Footnote_351" href="#FNanchor_351" class="label">[351]</a> Lettres de Louis XIV au duc de Pomponne et au cardinal d'Estrées -en date des 3, 19 et 27 juin, 12 juillet, 20 et 23 septembre -et 11 octobre 1675, au duc et au cardinal d'Estrées, à l'abbé Servien, -<i>Mémoires du cardinal</i> <span class="smallc">de Retz</span>, Paris. 1836, in-8<sup>o</sup>, p. 612 -à 614, tome 1<sup>er</sup> de la <i>Collection des Mémoires sur l'histoire de -France</i>, édit. Michaud et Poujoulat.</p> - -<p><a id="Footnote_352" href="#FNanchor_352" class="label">[352]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (7 juin 1675), t. III, p 410, édit. G.; t. IV, -p. 299, éd. M.</p> - -<p><a id="Footnote_353" href="#FNanchor_353" class="label">[353]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 juin 1675), t. III, p. 428, édit. G.; t. III, -p. 304, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_354" href="#FNanchor_354" class="label">[354]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (3 juillet 1675), t. III, p. 316, édit. M.; t. III, -p. 443, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_355" href="#FNanchor_355" class="label">[355]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (9 octobre 1675), t. IV, p. 142, édit. G.; t. IV, -p. 31, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_356" href="#FNanchor_356" class="label">[356]</a> <i>Lettres de</i> <span class="smallc">Pomponne</span> au cardinal <i>d'Estrées</i> (en date des 23 septembre -et 11 octobre 1675). Dans les <i>Mémoires</i> <span class="smallc">de Rais</span>, <i>Nouvelle -Collection des Mémoires pour servir à l'histoire de France</i>, 1836, -in-8<sup>o</sup>, p. 614.</p> - -<p><a id="Footnote_357" href="#FNanchor_357" class="label">[357]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (23 octobre 1675), t. IV, p. 54, édit. M.; t. IV, -p. 165, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_358" href="#FNanchor_358" class="label">[358]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 et 23 octobre; 6 et 13 novembre 1675), -t. IV, p. 35, 54, 74, 75, 86, édit. M.—<i>Ibid.</i>, t. IV, p. 146, 169, 192, -205, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_359" href="#FNanchor_359" class="label">[359]</a> <span class="smallc">Dumont</span>, <i>Histoire de la ville et des seigneurs de Commercy</i>, -t. II, p. 172.</p> - -<p><a id="Footnote_360" href="#FNanchor_360" class="label">[360]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (mercredi 19 juin 1675), t. III, p. 422, édit. -G.; t. III, p. 299, édit. M.—<i>Ibid.</i> (10 juillet 1675), t. III, p. 325, -édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_361" href="#FNanchor_361" class="label">[361]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (26 juin, 22 août 1675), t. III, p. 431; t. IV, -p. 47, édit. G.; t. III, p. 307 et 421, édit. M.—<i>Ibid.</i> (9 septembre -1675), t. IV, p. 90, édit. G.; t. III, p. 460, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_362" href="#FNanchor_362" class="label">[362]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 et 13 mai 1680), t. VI, p. 269, édit. M., -et la note.—<i>Ibid.</i> (25 août 1680), t. VI, p. 433, édit. M.; t. VI, -p. 489, édit. G., et t. VII, p. 179, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_363" href="#FNanchor_363" class="label">[363]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 juin 1675), t. III, p. 402, édit. G.; t. IV, -p. 26.</p> - -<p><a id="Footnote_364" href="#FNanchor_364" class="label">[364]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (23 octobre 1675), t. IV, p. 54, édit. M.; -t. IV, p. 169, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_365" href="#FNanchor_365" class="label">[365]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 octobre 1675), t. IV, p. 150, édit. G.; t. IV, -p. 37 et 38, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_366" href="#FNanchor_366" class="label">[366]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (26 juin 1675), t. III, p. 433, édit. G.; t. III, -p. 309, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_367" href="#FNanchor_367" class="label">[367]</a> Voyez ci-dessus, ch. <span class="smallc"><a href="#CHAPITRE_II">II</a></span> et <span class="smallc"><a href="#CHAPITRE_III">III</a></span> de cette 5<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, -p. <a href="#Page_18">18</a> et <a href="#Page_36">36</a>; et <span class="smallc">Depping</span>, <i>Correspondance administrative sous le -règne de Louis XIV</i>, in-4<sup>o</sup>, 1850, p. 407.—<i>Lettre</i> de l'évêque de -Marseille à Colbert, en date du 17 décembre 1672.</p> - -<p><a id="Footnote_368" href="#FNanchor_368" class="label">[368]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (26 juin 1675), t. III, p. 436.</p> - -<p><a id="Footnote_369" href="#FNanchor_369" class="label">[369]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (3 juillet 1675), t. III, p. 440, édit. G.; t. III, -p. 315, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_370" href="#FNanchor_370" class="label">[370]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (26 juin 1675), t. III, p. 436, édit. G.; t. III, -p. 311, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_371" href="#FNanchor_371" class="label">[371]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19, 28 et 30 août 1675), t. IV, p. 32, 34, 69, -75, édit. G.—<i>Ibid.</i> (4 septembre), p. 77 et 78, édit. G.—<i>Ibid.</i>, -t. III, p. 396, 402, 408, 426, 447, 449, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_372" href="#FNanchor_372" class="label">[372]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (7, 21, 26 août 1675), t. III, p. 494 et 499; -t. IV, p. 24, édit. G.; t. III, p. 360, 419, 426, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_373" href="#FNanchor_373" class="label">[373]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (7 août 1675), t. III, p. 504, édit. G.; t. III, -p. 125, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_374" href="#FNanchor_374" class="label">[374]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (3 juillet 1675), t. III, p. 442, édit. G.; t. III, -p. 317, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_375" href="#FNanchor_375" class="label">[375]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (31 juillet et 2, 6, 7, 9, 16, 19, 27 et 28 août), -t. III, p. 475, 480, 487, 492; t. IV, p. 9, 25, 27, 57, 64 à 73, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_376" href="#FNanchor_376" class="label">[376]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (30 août 1675), t. IV, p. 73.</p> - -<p><a id="Footnote_377" href="#FNanchor_377" class="label">[377]</a> <i>Relation de ce qui s'est passé en Catalogne</i>, 1678, in-12, Paris, -Quinet, 194 pages. Il prit Bellegarde le 27 juillet 1675.</p> - -<p><a id="Footnote_378" href="#FNanchor_378" class="label">[378]</a> Le 28 juin 1674.</p> - -<p><a id="Footnote_379" href="#FNanchor_379" class="label">[379]</a> Le 21 juillet 1674. Ruyter avait quarante-six vaisseaux.</p> - -<p><a id="Footnote_380" href="#FNanchor_380" class="label">[380]</a> Le 11 août 1674.</p> - -<p><a id="Footnote_381" href="#FNanchor_381" class="label">[381]</a> Le 4 octobre 1674.</p> - -<p><a id="Footnote_382" href="#FNanchor_382" class="label">[382]</a> Le 29 décembre 1674.</p> - -<p><a id="Footnote_383" href="#FNanchor_383" class="label">[383]</a> Le 5 janvier 1675.</p> - -<p><a id="Footnote_384" href="#FNanchor_384" class="label">[384]</a> Le 29 janvier 1675.</p> - -<p><a id="Footnote_385" href="#FNanchor_385" class="label">[385]</a> Le 11 février 1675.</p> - -<p><a id="Footnote_386" href="#FNanchor_386" class="label">[386]</a> Le 27 mars 1675.</p> - -<p><a id="Footnote_387" href="#FNanchor_387" class="label">[387]</a> Le 29 mai 1675.</p> - -<p><a id="Footnote_388" href="#FNanchor_388" class="label">[388]</a> Le 6 juin 1675.</p> - -<p><a id="Footnote_389" href="#FNanchor_389" class="label">[389]</a> Le 21 juin 1675.</p> - -<p><a id="Footnote_390" href="#FNanchor_390" class="label">[390]</a> Vers le milieu de janvier 1675.</p> - -<p><a id="Footnote_391" href="#FNanchor_391" class="label">[391]</a> Le 23 avril 1675.</p> - -<p><a id="Footnote_392" href="#FNanchor_392" class="label">[392]</a> Le 21 mai 1674.</p> - -<p><a id="Footnote_393" href="#FNanchor_393" class="label">[393]</a> <i>Nouvelles ou Mémoires historiques</i>, in-12 (par mad. Daulnois), -t. I, p. 185 et 186.</p> - -<p><a id="Footnote_394" href="#FNanchor_394" class="label">[394]</a> <span class="smallc">Forbonnais</span>, <i>Recherches sur les finances de la France</i>, édit. -de 1758, in-12, t. II, p. 105, 123, 131.—<span class="smallc">Clément</span>, <i>Hist. de Colbert</i>, -p. 344, 348, 365.</p> - -<p><a id="Footnote_395" href="#FNanchor_395" class="label">[395]</a> Le duc <span class="smallc">de Chaulnes</span>, <i>Lettres à Colbert</i> (30 juin 1675), dans -<span class="smallc">Depping</span>, <i>Correspondance administr. sous le règne de Louis XIV</i>, -in-4<sup>o</sup>, 1850, p. 54, 348, 545, 546, 561.—<span class="smallc">Clément</span>, <i>Histoire de la vie -et de l'administration de Colbert</i>, in-8<sup>o</sup>, p. 370.</p> - -<p><a id="Footnote_396" href="#FNanchor_396" class="label">[396]</a> Le duc <span class="smallc">de Chaulnes</span>, dans <span class="smallc">Depping</span>, <i>Correspondance administrative -de Louis XIV</i>, 1850, in-4<sup>o</sup>, t. I, p. 547.</p> - -<p><a id="Footnote_397" href="#FNanchor_397" class="label">[397]</a> <span class="smallc">Clément</span>, <i>Vie de Colbert</i>, p. 371.</p> - -<p><a id="Footnote_398" href="#FNanchor_398" class="label">[398]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 juillet 1675), t. III, p. 459, édit. G.; t. III, -p. 334, édit. M.—<span class="smallc">Feuquières</span>, <i>Lettres inédites</i>, 1845, in-8<sup>o</sup>, t. II, -p. 169.</p> - -<p><a id="Footnote_399" href="#FNanchor_399" class="label">[399]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (22 août 1675), t. IV, p. 46, édit. G.; t. III, -p. 21, édit. M.; t. II, p. 58, édit. de la Haye, 1726, in-4<sup>o</sup>.</p> - -<p><a id="Footnote_400" href="#FNanchor_400" class="label">[400]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (31 juillet 1675), t. III, p. 472, édit. G.; t. III, -p. 345, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_401" href="#FNanchor_401" class="label">[401]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 septembre 1675), t. IV, p. 113, édit. G; -t. IV, p. 6, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_402" href="#FNanchor_402" class="label">[402]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (31 juillet 1675), t. III, p. 472-73, édit. G.; -t. III, p. 345, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_403" href="#FNanchor_403" class="label">[403]</a> <i>Recueil ms. de la Bibl. nat. de la tenue des états de Bretagne</i>, -p. 379.</p> - -<p><a id="Footnote_404" href="#FNanchor_404" class="label">[404]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 septembre 1675), t. IV, p. 112, édit. G.; -t. IV, p. 7, édit. M.—Sur d'Harouis, voy. 4<sup>e</sup> partie, 29, 33.</p> - -<p><a id="Footnote_405" href="#FNanchor_405" class="label">[405]</a> Dans le procès-verbal de l'assise de ces états, il est dit simplement, -sous la date du 11 novembre 1675: «MM. les commissaires -sont rentrés... M. de Harlay a demandé trois millions pour le roy, -et les états les ont accordés.» <i>Recueil</i>, etc., ms. de la Bibl. nat., -p. 377.</p> - -<p><a id="Footnote_406" href="#FNanchor_406" class="label">[406]</a> Cet autre, que madame de Sévigné ne daigne pas nommer, était -M. de la Gascherie-Charette, maire de Nantes. (<i>Rec. ms.</i>, p. 377.)</p> - -<p><a id="Footnote_407" href="#FNanchor_407" class="label">[407]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 novembre 1675), t. IV, p. 210, édit. G.; -t. IV, p. 90, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_408" href="#FNanchor_408" class="label">[408]</a> <span class="smallc">Tasso</span>, <i>Ger. liber.</i>, canto VII, st. 8. Mad. de Sévigné venait alors -de relire le Tasse avec Charles de Sévigné, comte de Montmoron, -doyen du parlement de Bretagne, parent des Sévigné, homme d'esprit, -grand amateur de devises et qui faisait des vers. Voyez les lettres -du 17 novembre 1675, du 20 octobre 1675 et du 15 septembre 1680. -Le comte de Montmoron mourut le 30 septembre 1684 (voyez la -lettre du 4 octobre 1684).</p> - -<p><a id="Footnote_409" href="#FNanchor_409" class="label">[409]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 décembre 1675), t. IV, p. 236, édit. G.; -t. IV, p. 113, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_410" href="#FNanchor_410" class="label">[410]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (27 novembre 1675), t. IV, p. 222, édit. G.; -t. IV, p. 101, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_411" href="#FNanchor_411" class="label">[411]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (15 décembre 1675), p. 252, édit. G.; t. IV, -p. 128.</p> - -<p><a id="Footnote_412" href="#FNanchor_412" class="label">[412]</a> Il y a dans toutes les éditions de Sévigné Quinte-Curce; mais il -est certain qu'il faut lire Lucrèce (Lucretius Carus), qui en effet, -au vers 547 du IV<sup>e</sup> chant de son poëme, parle du chant du cygne. -Quinte-Curce n'en fait pas mention, et les autres auteurs qui en ont -parlé sont Callimaque, Eschyle, Théocrite, Euripide, Ovide, Properce.</p> - -<p><a id="Footnote_413" href="#FNanchor_413" class="label">[413]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (25 décembre 1675), t. IV, p 114, édit. M.; -t. IV, p. 271, édit. G.—<i>Ibid.</i> (22 décembre 1675), t. IV, p. 270, -édit. G.; t. IV, p. 143, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_414" href="#FNanchor_414" class="label">[414]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 décembre 1675), t. IV, p. 242, édit. G.; -t. IV, p. 119, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_415" href="#FNanchor_415" class="label">[415]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 février 1690), t. X, p. 267, édit. G. Conférez -cette lettre avec celle du 24 septembre 1675, t. IV, p. 7, édit. M.; -t. IV, p. 114, édit. M.—<i>Ibid.</i> (29 janvier 1692), t. IX, p. 326, édit. M.—<i>Ibid.</i> -(19 février 1690), t. IX, p. 364, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_416" href="#FNanchor_416" class="label">[416]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 novembre 1675), t. IV, p. 90, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_417" href="#FNanchor_417" class="label">[417]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> mars 1684), t. IV, p. 139, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_418" href="#FNanchor_418" class="label">[418]</a> <i>Registre ms. de la tenue des états de Bretagne de</i> 1629 à 1703. -(Bl.-Mant., 75, p. 472, ch. <span class="smallc">XIV</span> du règlement intitulé <i>du Trésorier -des états et de ses commis</i>, ms. de l'Institut.)</p> - -<p><a id="Footnote_419" href="#FNanchor_419" class="label">[419]</a> <i>Lettres inédites de madame de</i> <span class="smallc">Grignan</span> <i>à son mari</i>; Paris, -décembre 1830, p. 11 (12 p. publiées par M. Monmerqué).</p> - -<p><a id="Footnote_420" href="#FNanchor_420" class="label">[420]</a> <span class="smallc">La Fontaine</span>, <i>Œuvres</i>, Paris, Lefèvre, 1827, t. VI, p. 180. (Lettre -au prince de Conti, novembre 1689.)</p> - -<p><a id="Footnote_421" href="#FNanchor_421" class="label">[421]</a> Voyez extrait du <i>Journal de France</i> dans la note de M. Monmerqué -sur <span class="smallc">Sévigné</span>, t. X, p. 227, édit. 1820, in-8<sup>o</sup>.</p> - -<p><a id="Footnote_422" href="#FNanchor_422" class="label">[422]</a> <span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mémoires authentiques</i>, t. II, p. 372.</p> - -<p><a id="Footnote_423" href="#FNanchor_423" class="label">[423]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (31 juillet 1675), t. III, p. 473, édit. G.; t. III, -p. 338, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_424" href="#FNanchor_424" class="label">[424]</a> <span class="smallc">Madame</span>, duchesse d'Orléans, <i>Fragments de lettres</i>, 1788, in-12, -t. I, p. 175, 176.—<i>Mémoires</i>, édit. 1732, in-8<sup>o</sup>, p. 45 et 90—<i>Mémoires -sur Sévigné</i>, 3<sup>e</sup> partie, ch. <span class="smallc">V</span>, p. 166.</p> - -<p><a id="Footnote_425" href="#FNanchor_425" class="label">[425]</a> <span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mémoires authentiques</i>, 1829, in-8<sup>o</sup>, t. V, p. 403.</p> - -<p><a id="Footnote_426" href="#FNanchor_426" class="label">[426]</a> Il se nommait Lecuyer.</p> - -<p><a id="Footnote_427" href="#FNanchor_427" class="label">[427]</a> Thibault.</p> - -<p><a id="Footnote_428" href="#FNanchor_428" class="label">[428]</a> <span class="smallc">Bossuet</span>, <i>Lettres</i>, t. XXXVII, p. 86, 92, 98.—<span class="smallc">De Bausset</span>, <i>Histoire -de Bossuet</i>, 4<sup>e</sup> édit. in-12, t. II, p. 45 et 55.</p> - -<p><a id="Footnote_429" href="#FNanchor_429" class="label">[429]</a> <span class="smallc">Bossuet</span>, <i>Œuvres</i>, t. XXXVII, p. 82 et suiv.</p> - -<p><a id="Footnote_430" href="#FNanchor_430" class="label">[430]</a> <span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Lettres</i> (28 mai et 8 juin 1675), t. V, p. 533, 536, -537 des <i>Œuvres</i>, 1806, in-8<sup>o</sup>.—<span class="smallc">Champollion-Figeac</span>, <i>Documents -hist. sur l'hist. de France</i>, 1843, in-4<sup>o</sup>.</p> - -<p><a id="Footnote_431" href="#FNanchor_431" class="label">[431]</a> Lettre de <span class="smallc">Louis XIV</span> à Colbert (9 juin 1674), dans les <i>Documents -historiques inédits</i> publiés par Champollion-Figeac, 1843, -in-4<sup>o</sup>, p. 526 et 527.</p> - -<p><a id="Footnote_432" href="#FNanchor_432" class="label">[432]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (12 et 14 juin 1675), t. III, p. 416, 418 et 419, -édit. G.; t. III, p. 295, 296 et 297, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_433" href="#FNanchor_433" class="label">[433]</a> <span class="smallc">De Bausset</span>, <i>Histoire de Bossuet</i>, 4<sup>e</sup> édit. in-12, t. II, p. 52, 54 -et 55, liv. <span class="smallc">V</span>, <span class="smallc">VIII</span>, <span class="smallc">IX</span> et <span class="smallc">X</span>.—<span class="smallc">Bossuet</span>, <i>Œuvres</i>, t. XXXVII, p. 52.</p> - -<p><a id="Footnote_434" href="#FNanchor_434" class="label">[434]</a> <span class="smallc">De Bausset</span>, <i>Histoire de Bossuet</i>, 4<sup>e</sup> édit. in-12, p. 49 (lettre -du 20 juin 1675).</p> - -<p><a id="Footnote_435" href="#FNanchor_435" class="label">[435]</a> <span class="smallc">Bossuet</span>, <i>Œuvres</i>, t. XXXVII, p. 92 et 98 (lettre au roi, 1675).</p> - -<p><a id="Footnote_436" href="#FNanchor_436" class="label">[436]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (7 juin 1675), t. III, p. 411, édit. G.; t. III, -p. 290, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_437" href="#FNanchor_437" class="label">[437]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 juin 1675), t. III, p. 403, édit. G.; t. III, -p. 283, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_438" href="#FNanchor_438" class="label">[438]</a> <span class="smallc">Pellisson</span>, <i>Lettres historiques</i>, 1729, in-12 (3 juin 1675), t. II, -p. 276.—<span class="smallc">Sévigné</span>, loc. cit.</p> - -<p><a id="Footnote_439" href="#FNanchor_439" class="label">[439]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 juin 1675), t. III, p. 405, édit. G.; t. III, -p. 285, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_440" href="#FNanchor_440" class="label">[440]</a> <span class="smallc">De Bausset</span>, <i>Histoire de Bossuet</i>, 1824, in-12, t. II, p. 60.</p> - -<p><a id="Footnote_441" href="#FNanchor_441" class="label">[441]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (mercredi 24 juillet 1675), t. III, p. 456, -édit. G.; t. III, p. 331, édit. M.—<span class="smallc">Bussy</span>, <i>Suite des Mémoires</i>, ms. -de l'Institut, p. 129 et 130 (lettre à madame de Scudéry, du 20 juillet -1675).—<i>Supplément aux Mémoires et Lettres de M. le comte</i> -<span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span>, t. I, p. 189.</p> - -<p><a id="Footnote_442" href="#FNanchor_442" class="label">[442]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i>, t. III, p. 470, édit. G.; t. III, p. 343, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_443" href="#FNanchor_443" class="label">[443]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 juin 1675), t. III, p. 439, édit. G.; t. III, -p. 314, édit. M.—<span class="smallc">Pellisson</span>, <i>Lettres historiques</i> (28 juin 1675), -t. II, p. 334.</p> - -<p><a id="Footnote_444" href="#FNanchor_444" class="label">[444]</a> <span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mémoires complets et authentiques</i>, 1829, in 8<sup>o</sup>, -t. XVIII, chap. <span class="smallc">XXVI</span>, p. 400.</p> - -<p><a id="Footnote_445" href="#FNanchor_445" class="label">[445]</a> Conférez <span class="smallc">Pellisson</span>, <i>Lettres historiques</i> (3 juillet 1675), t. II, -p. 344.</p> - -<p><a id="Footnote_446" href="#FNanchor_446" class="label">[446]</a> Conférez <span class="smallc">Michel-Hardouin Mansart</span>, <i>Livre de tous les plans, -coupes, profils et élévations du château de Clagny</i>, 1680, in-folio.—<span class="smallc">Sévigné</span>, -<i>Lettres</i> (7 août 1675), t. III, p. 499 et 500.</p> - -<p><a id="Footnote_447" href="#FNanchor_447" class="label">[447]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (3 juillet 1675), t. III, p. 316, édit. M.; t. III, -p. 442, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_448" href="#FNanchor_448" class="label">[448]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (12 juin 1675), t. III, p. 418, édit. G.; t. III, -p. 296.</p> - -<p><a id="Footnote_449" href="#FNanchor_449" class="label">[449]</a> <i>Supplément aux Mémoires et Lettres de M. le comte</i> <span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span>, -t. I, p. 184-187.</p> - -<p><a id="Footnote_450" href="#FNanchor_450" class="label">[450]</a> Louis-César de Bourbon, comte du Vexin, second fils de Louis XIV -et de madame de Montespan, né le 20 juin 1672; il n'avait alors que -trois ans. Il avait été légitimé en novembre 1673, et mourut en 1683.</p> - -<p><a id="Footnote_451" href="#FNanchor_451" class="label">[451]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (14 juin 1675), t. III, p. 419, édit. G.; t. III, -p. 297, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_452" href="#FNanchor_452" class="label">[452]</a> <span class="smallc">Caylus</span>, <i>Souvenirs</i>, collect. des Mémoires relatifs à l'histoire de -France, édit. de Petitot et Monmerqué, 1828, in-8<sup>o</sup>, t. LXVI, p. 89.—Et -la note de Monmerqué, t. III, p. 269 des <i>Lettres de</i> <span class="smallc">Sévigné</span> -(14 mai 1675).</p> - -<p><a id="Footnote_453" href="#FNanchor_453" class="label">[453]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (7 août 1675), t. III, p. 490 et 500, édit. G.; -t. III, p. 361. Conférez <span class="smallc">Michel-Hardouin Mansart</span>, <i>Les plans, profits -et élévations du château de Clagny</i>, 1680. Voyez le plan général, -qui est le meilleur commentaire de cette lettre.</p> - -<p><a id="Footnote_454" href="#FNanchor_454" class="label">[454]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (31 juillet 1675), t. III, p. 473, édit. G.; t. III, -p. 346.</p> - -<p><a id="Footnote_455" href="#FNanchor_455" class="label">[455]</a> <i>Supplément aux Mémoires et Lettres du comte</i> <span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span>, -t. I, p. 185.</p> - -<p><a id="Footnote_456" href="#FNanchor_456" class="label">[456]</a> <span class="smallc">Boileau</span>, épître à Seignelay, vers 1, 91, 93, 134, 140, 146, 170, -174.—<i>Œuvres</i> <span class="smallc">de Boileau Despréaux</span>, épître IX, 1747, in-8<sup>o</sup>, édit. -de Saint-Marc, p. 330-393; édit. 1830, in-8<sup>o</sup>, de Berriat Saint-Prix, -t. II, p. 105 à 119.</p> - -<p><a id="Footnote_457" href="#FNanchor_457" class="label">[457]</a> <span class="smallc">Racine</span>, <i>Iphigénie</i>, Paris, Barbin, 1675, in-12 (72 pages).</p> - -<p><a id="Footnote_458" href="#FNanchor_458" class="label">[458]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (26 juillet 1675), t. III, p. 468, édit. G.; t. III, -p. 341, édit. M.—L'abbé <span class="smallc">Arnauld</span>, <i>Mémoires</i>, coll. Petitot, t. XXXIV, -p. 358.</p> - -<p><a id="Footnote_459" href="#FNanchor_459" class="label">[459]</a> <span class="smallc">Félibien</span>, <i>Relation des divertissements de Versailles</i> donnés -par le roi à toute la cour, au retour de la conquête de la Franche-Comté, -l'année 1674, in-4<sup>o</sup> (5 pages).—Cinquième journée du samedi -18 août, p. 426 à 428.—Les frères <span class="smallc">Parfaict</span>, <i>Histoire du -Théâtre françois</i>, t. XI, p. 318.—<span class="smallc">De Beauchamp</span>, <i>Recherches sur -les théâtres</i>, t. III, p. 172 et 207.—<span class="smallc">Quinault</span>, <i>Théâtre</i>, édit. 1715, -Paris, in-12, t. IV, p. 200 et 201.—Opéra de <i>Thésée</i>, représenté -devant Sa Majesté à Saint-Germain en Laye (le dixième jour de -janvier 1675; Paris, Ballard, in-4<sup>o</sup>, p. 5).</p> - -<p><a id="Footnote_460" href="#FNanchor_460" class="label">[460]</a> <span class="smallc">Boileau</span>, satire II, 20; III, 195; IX, 98; IX, 288.—Lutrin, II, -92-8.</p> - -<p><a id="Footnote_461" href="#FNanchor_461" class="label">[461]</a> <span class="smallc">Boileau</span>, satire X, 131, 141-2.</p> - -<p><a id="Footnote_462" href="#FNanchor_462" class="label">[462]</a> <i>Mémoires sur Sévigné</i>, I, 74, 463, 466, 467, 469; II, 127, 172, -448, 450, 451, 452; III, 62, 95, 96, 212, 219, 279; IV, 88, 89, 91, -93, 94, 96, 144, 270, 314.</p> - -<p><a id="Footnote_463" href="#FNanchor_463" class="label">[463]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres à la princesse des Ursins</i> (29 avril 1713), -t. II, p. 380, édit de 1765.—<span class="smallc">La Beaumelle</span>, t. VIII, p. 289-293.</p> - -<p><a id="Footnote_464" href="#FNanchor_464" class="label">[464]</a> <i>Mémoires sur Sévigné</i>, 1<sup>re</sup> partie, 2<sup>e</sup> édit., p. 464.</p> - -<p><a id="Footnote_465" href="#FNanchor_465" class="label">[465]</a> <span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mémoires authentiques</i>, t. XIII, p. 109, ch. <span class="smallc">VIII</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_466" href="#FNanchor_466" class="label">[466]</a> <span class="smallc">Madame du Pérou</span>, <i>Mémoires sur madame</i> de Maintenon, recueillis -par les dames de Saint-Cyr; Paris, Olivier Fulgence, éditeur, -1846, in-12, p. 1-12.—Le <span class="smallc">P. Laguille</span>, <i>Fragments de Mémoires -sur la vie de madame</i> <span class="smallc">de Maintenon</span>, dans les <i>Archives littéraires -de</i> <span class="smallc">Vanderbourg</span>, vol. XII, trimestre d'octobre 1806, p. 363 à 370. -Lisez <i>Navailles</i> au lieu de Noailles, et <i>Neuillant</i> au lieu de Neuillans.—<i>Mémoires -sur Sévigné</i>, 1<sup>re</sup> partie, p. 404.</p> - -<p><a id="Footnote_467" href="#FNanchor_467" class="label">[467]</a> Poésies de <span class="smallc">la Mesnardière</span>, in-folio, pièce intitulée <i>Galanterie</i>, -et dans <span class="smallc">la Beaumelle</span>, <i>Mémoires</i>, t. VI, p. 54 et 55.</p> - -<p><a id="Footnote_468" href="#FNanchor_468" class="label">[468]</a> Conférez la 1<sup>re</sup> partie de ces <i>Mémoires sur Sévigné</i>, p. 464-69, -et la 2<sup>e</sup> partie, p. 448, 449, 450, 451 à 453.</p> - -<p><a id="Footnote_469" href="#FNanchor_469" class="label">[469]</a> <span class="smallc">Du Pérou</span>, <i>Mémoires sur madame de Maintenon</i>, 1846, in-12, -p. 273.</p> - -<p><a id="Footnote_470" href="#FNanchor_470" class="label">[470]</a> <i>Lettres de messire</i> <span class="smallc">Godetz des Marais</span> <i>à madame de Maintenon</i>, -Bruxelles, 1755, in-8<sup>o</sup>, p. 108 et <i>passim</i>. C'est le t. IX de la collection -des lettres données par la Beaumelle, et t. XV de toute sa -collection sur Maintenon; conférez encore t. VI, p. 79 des <i>Mémoires</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_471" href="#FNanchor_471" class="label">[471]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres</i> (8 janvier 1680, lettre de l'abbé Gobelin), -t. II, p. 69 de l'édit. gr. in-12; Amsterdam, 1656, Dresde, 1753, petit -in-12, p. 142; Nancy, 1752, t. I, p. 158; Paris, 1806, p. 81.—<span class="smallc">Du -Pérou</span>, <i>Mémoires sur madame de Maintenon</i>, 1846, in-12, p. 273.</p> - -<p><a id="Footnote_472" href="#FNanchor_472" class="label">[472]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Conversations</i>, 3<sup>e</sup> édit., 1828, in-18, p. 239.—Mademoiselle -<span class="smallc">d'Aumale</span>, <i>Mémoires</i>, ms. cité par la Beaumelle, t. I; p. -150 et 151 des <i>Mém. p. s. à l'hist. de M. et dus. de Louis XIV</i>.—Conférez -ci-après les notes et éclaircissements.</p> - -<p><a id="Footnote_473" href="#FNanchor_473" class="label">[473]</a> Mesdames <span class="smallc">du Pérou</span> et <span class="smallc">Glapion</span>, <i>Mémoires sur madame de -Maintenon</i>, 1846, in-12, p. 5.</p> - -<p><a id="Footnote_474" href="#FNanchor_474" class="label">[474]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Entretien III</i>, dans <span class="smallc">la Beaumelle</span>, <i>Mémoires</i>, etc., -édit. 1756, t. VI, p. 174-176.</p> - -<p><a id="Footnote_475" href="#FNanchor_475" class="label">[475]</a> Avis de <span class="smallc">M. de Fénelon</span> à madame de Maintenon, dans les <i>Lettres -de madame</i> <span class="smallc">De Maintenon</span>, t. III, p. 212, édit. de <span class="smallc">la Beaumelle</span>, -Amsterdam, 1756.</p> - -<p><a id="Footnote_476" href="#FNanchor_476" class="label">[476]</a> Demoiselle Avrillot, femme d'Acaric, maître des requêtes, et -dame Madeleine L'Huillier, veuve de M. le Roux de Sainte-Beuve.—Voyez -<span class="smallc">Jaillot</span>, <i>Recherches sur Paris, quartier Saint-Benoît</i>, p. 141 -et 157, t. V. On a un portrait, gravé en 1673, de Madeleine L'Huillier, -décédée le 29 août 1640.</p> - -<p><a id="Footnote_477" href="#FNanchor_477" class="label">[477]</a> <span class="smallc">Du Pérou</span> et <span class="smallc">Glapion</span>, <i>Mémoires sur madame de Maintenon</i>, -recueillis par les dames de Saint-Cyr, 1846, in-12, p. 7 et 8.</p> - -<p><a id="Footnote_478" href="#FNanchor_478" class="label">[478]</a> <i>Les Souvenirs de madame</i> <span class="smallc">de Caylus</span> <i>sur les intrigues amoureuses -de la cour</i>, avec les notes de M. <span class="smallc">de Voltaire</span>, au château de -Ferney, 1770, in-12, p. 112.—<i>Ibid.</i>, Paris, 1806, Renouard, in-12, -p. 193.—<i>Ibid.</i>, collection des <i>Mémoires</i> de Petitot et Monmerqué, -t. LXVI, p. 448. Dans ces trois éditions il y a une faute grave: c'est -d'avoir mis Noisy-le-Sec an lieu de Noisy (le berceau de Saint-Cyr). -Cette faute est copiée de la Beaumelle.</p> - -<p><a id="Footnote_479" href="#FNanchor_479" class="label">[479]</a> <i>Avis de madame</i> <span class="smallc">de Maintenon</span> <i>à madame la duchesse de -Bourgogne</i>. <span class="smallc">La Beaumelle</span>, <i>Lettres de madame de Maintenon</i>, -Amsterdam, 1756, t. III, p. 201-10.—<span class="smallc">Léopold Collin</span>, <i>Lettres de -madame de Maintenon</i>, t. VI, p. 114, édit. 1806.</p> - -<p><a id="Footnote_480" href="#FNanchor_480" class="label">[480]</a> <i>Ibid.</i>, t. III, p. 1-10.</p> - -<p><a id="Footnote_481" href="#FNanchor_481" class="label">[481]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>l'Esprit</i>, etc., 1699, in-12; 1711, 1808, in-12 et in-18.</p> - -<p><a id="Footnote_482" href="#FNanchor_482" class="label">[482]</a> <i>Conversations de madame la marquise</i> <span class="smallc">de Maintenon</span>, publiées -par M. de Monmerqué, 1 vol. in-18, 1818, 3<sup>e</sup> édit.—<i>Conversations -inédites de madame</i> <span class="smallc">de Maintenon</span>, précédées d'une notice par M. de -Monmerqué, 1828, in-18.—<i>Mémoires de madame</i> <span class="smallc">de Maintenon</span>; -Paris, édit. Fulgence, 1846, in-12, p. 402, ch. <span class="smallc">XXII</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_483" href="#FNanchor_483" class="label">[483]</a> <i>Lettres de madame</i> <span class="smallc">de Maintenon</span> à M. de Caylus, évêque -d'Autun (26 juin 1709).—Dans les <i>Mélanges</i> publiés par la Société -des bibliophiles français, 1827, in-8<sup>o</sup>, p. 3.—<span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres à -madame de Glapion</i>, t. III, p. 181.</p> - -<p><a id="Footnote_484" href="#FNanchor_484" class="label">[484]</a> Conférez <span class="smallc">Méré</span>, <i>Œuvres</i>, 1692, in-12, t. I, p. 107, 126, 135, -162, 326, 333, 370. Lettres à Mitton, le plus grand puriste, en fait de -langage, de cette époque.—Conférez ces <i>Mémoires sur Sévigné</i>, t. II, -p. 255, 419.</p> - -<p><a id="Footnote_485" href="#FNanchor_485" class="label">[485]</a> Conférez <span class="smallc">Méré</span>, <i>Œuvres</i>, t. I, p. 96, 97, 115, 116, 149, 150, etc. -Lettres à mesdames de Sablé, de Lesdiguières, à M<sup>lle</sup> de Scudéry, etc.</p> - -<p><a id="Footnote_486" href="#FNanchor_486" class="label">[486]</a> Conférez <span class="smallc">Méré</span>, <i>Œuvres</i>, t. I, p. 6, 84, 145, 150, 159, 215. Lettres -à Balzac, Ménage, Simon, Saint-Pavin, etc.—<i>Ibid.</i>, t. I, p. 60, -159. Lettres à Pascal et à Bourdelot.</p> - -<p><a id="Footnote_487" href="#FNanchor_487" class="label">[487]</a> Voyez ci-dessus, <i>Mémoires sur Sévigné</i>, t. I, p. 228-31, ch. <span class="smallc">XVI</span>, -et p. 466-469, ch. <span class="smallc">XXXIV</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_488" href="#FNanchor_488" class="label">[488]</a> <span class="smallc">Scarron</span>, <i>les dernières Œuvres</i>, 1700, in-12, t. I, p. 229. Héro -et Léandre, ode burlesque.—<i>Ibid.</i>, <i>Œuvres de</i> <span class="smallc">M. Scarron</span>, Amsterdam, -1737, in-12, t. VIII, p. 339.—Conférez la <i>Prison</i> de -<span class="smallc">M. d'Assoucy</span>, Paris, 1674, p. 10.</p> - -<p><a id="Footnote_489" href="#FNanchor_489" class="label">[489]</a> Conférez <span class="smallc">Scarron</span>, <i>Œuvres</i>, Amsterdam, 1637, in-18, t. I, p. 32, -35, 43, 45, 47, 62, 64, 78, 90-9, 101-29, 124, 163, 167. Lettres de Scarron -à la comtesse de Fiesque, à mademoiselle de Neuillant, à la marquise -de Sévigné, à madame Renaud de Sévigné, au marquis et à la -marquise de Villarceaux, au comte de Vivonne, au maréchal d'Albret.</p> - -<p><a id="Footnote_490" href="#FNanchor_490" class="label">[490]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Conversations</i>, 3<sup>e</sup> édit., 1828, in-18, p. 184 à 192.</p> - -<p><a id="Footnote_491" href="#FNanchor_491" class="label">[491]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres</i> (25 mai 1648, à madame Fouquet), t. I, p. 25, -édit. L. B. 1756. Conférez 1<sup>re</sup> partie de ces <i>Mémoires sur Sévigné</i>, -ch. <span class="smallc">XXXIV</span>, p. 464.</p> - -<p><a id="Footnote_492" href="#FNanchor_492" class="label">[492]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres</i> (1660), t. I, p. 34, édit. 1756.—<i>Ibid.</i>, t. I, -p. 32, Nancy, 1752, in-12.—<i>Ibid.</i>, Dresde, 1753, p. 28, in-12.</p> - -<p><a id="Footnote_493" href="#FNanchor_493" class="label">[493]</a> <span class="smallc">Jaillot</span>, <i>Recherches sur Paris</i>, quartier Saint-Antoine, p. 88, -et <span class="smallc">Hurtaut</span>, <i>Dictionnaire de la ville de Paris</i>, t. III, p. 230.</p> - -<p><a id="Footnote_494" href="#FNanchor_494" class="label">[494]</a> <span class="smallc">Du Pérou</span>, <i>Mémoires de madame de Maintenon</i>, p. 49 et 50.</p> - -<p><a id="Footnote_495" href="#FNanchor_495" class="label">[495]</a> <span class="smallc">Tallemant des Réaux</span>, <i>les Historiettes</i>, t. V, p. 263, édit. in-8<sup>o</sup>, -et t. IX, p. 129, édit. in-12. Historiette du petit Scarron.</p> - -<p><a id="Footnote_496" href="#FNanchor_496" class="label">[496]</a> <span class="smallc">Madame du Pérou</span>, <i>Mémoires sur madame de Maintenon</i>, p. 19.—<span class="smallc">La -Beaumelle</span>, <i>Mémoires pour servir à l'hist. de madame de -Maintenon</i>, t. II, p. 110.</p> - -<p><a id="Footnote_497" href="#FNanchor_497" class="label">[497]</a> <i>Mémoires sur Sévigné</i>, 1<sup>re</sup> partie, p. 230, ch. <span class="smallc">XVI</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_498" href="#FNanchor_498" class="label">[498]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres</i>, t. I, p. 37 et 38, édit. 1756; <i>ibid.</i>, t. I, p. 37, -édit. 1752; <i>ibid.</i>, p. 30 et 31, édit. 1753.</p> - -<p><a id="Footnote_499" href="#FNanchor_499" class="label">[499]</a> <span class="smallc">Scarron</span>, <i>Œuvres</i>, 1737, t. I, p. 48.—<i>Les dernières Œuvres -de Monsieur</i> <span class="smallc">Scarron</span> (<i>sic</i>), t. I, p. 34, Paris, 1669, in-12 (lettre au -marquis de Villarceaux).</p> - -<p><a id="Footnote_500" href="#FNanchor_500" class="label">[500]</a> <span class="smallc">Scarron</span>, <i>Œuvres</i>, t. I, p. 46 (lettre à la marquise de Villarceaux, -p. 48, lettre au marquis de Villarceaux).—<i>Ibid.</i>, <i>les dernières Œuvres -de M.</i> <span class="smallc">Scarron</span>, 1669, in-12, p. 25 et 31.</p> - -<p><a id="Footnote_501" href="#FNanchor_501" class="label">[501]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres</i> (8 mars 1666), <i>ibid.</i>, édit. d'Amsterdam, chez -Sweares, t. I, p. 32; édit. 1756, t. I, p. 37 et 38, Amsterdam, aux dépens -de l'éditeur.—<i>Ibid.</i>, édit. de Nancy, 1752, in-12, p. 37; édit. -de Dresde, in-12, p. 31; édit. de Léopold Collin, Paris, 1806, t. I, p. 33.—<span class="smallc">Dret</span>, -<i>Mémoires de madame de Lenclos</i>, 1751, in-18, p. 74, à -tort contredit par <span class="smallc">la Beaumelle</span>, <i>Mémoires sur Maintenon</i>, t. I, -p. 217.—<span class="smallc">Douxmesnil</span>, <i>Mémoires et Lettres de Lenclos</i>, 1751, p. 22.—<span class="smallc">Tallemant</span>, -t. I, p. 130.</p> - -<p><a id="Footnote_502" href="#FNanchor_502" class="label">[502]</a> Conférez <i>Mémoires sur Sévigné</i>, 2<sup>e</sup> partie, p. 468-9, ch. <span class="smallc">XXXIV</span>.—<span class="smallc">Tallemant -des Réaux</span>, <i>Historiettes</i>, t. V, p. 262, édit. 1834; t. IX, -p. 128, édit. in-12.—<span class="smallc">Voltaire</span>, <i>Œuvres</i>, t. XXXIX, p. 404.</p> - -<p><a id="Footnote_503" href="#FNanchor_503" class="label">[503]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres</i>, t. I, p. 28, édit. 1756 (27 août 1607, à madame -de Villarceaux).</p> - -<p><a id="Footnote_504" href="#FNanchor_504" class="label">[504]</a> <span class="smallc">Tallemant des Réaux</span>, <i>Historiettes</i>, édit. in-12. Historiette de -Scarron, t. IV, p. 128; t. V, p. 262 de l'édition in-8<sup>o</sup>.</p> - -<p><a id="Footnote_505" href="#FNanchor_505" class="label">[505]</a> <span class="smallc">Caylus</span>, <i>Mém.</i>, collect. Petitot, t. LXVI, p. 420.—<i>Ibid.</i>, édit. -de Voltaire, au château de Ferney, 1770, p. 76 et 77, et la note de -Voltaire.—<i>Ibid.</i>, édit. Renouard, 1806, in-12, p. 148.</p> - -<p><a id="Footnote_506" href="#FNanchor_506" class="label">[506]</a> Conférez ces <i>Mémoires sur Sévigné</i>, 4<sup>e</sup> partie, p. 111; <i>ibid.</i>, -1<sup>re</sup> partie, p. 236-243, 254-263.</p> - -<p><a id="Footnote_507" href="#FNanchor_507" class="label">[507]</a> <span class="smallc">Scarron</span>, <i>Œuvres</i>, édit. 1737, t. IX, p. <span class="smallc">VI</span>, <span class="smallc">VII</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_508" href="#FNanchor_508" class="label">[508]</a> <span class="smallc">La Beaumelle</span>, <i>Mémoires pour servir à l'hist. de madame de -Maintenon</i>, liv. VI, c. <span class="smallc">IV</span>, t. II, p. 109.</p> - -<p><a id="Footnote_509" href="#FNanchor_509" class="label">[509]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres</i>, t. I, p. 41, édit. 1656; <i>ibid.</i>, p. 38, édit. -1758; <i>ibid.</i>, t. I, p. 35, Nancy, 1752; <i>ibid.</i>, p. 41, Dresde, 1753; <i>ibid.</i>, -t. I, p. 39, édit. de 1806. Dans les éditions seules de 1752 et 1753 la -lettre est complétement datée (30 juin 1666), et il y a <i>dona almera</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_510" href="#FNanchor_510" class="label">[510]</a> <i>Mémoires sur Sévigné</i>, 3<sup>e</sup> partie, p. 95 à 97.</p> - -<p><a id="Footnote_511" href="#FNanchor_511" class="label">[511]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres</i>, édit. 1756, t. II, p. 1 à 96 (à l'abbé Gobelin).—Madame -<span class="smallc">du Pérou</span>, <i>Mém. de madame de Maintenon</i>, p. 54 à 58.</p> - -<p><a id="Footnote_512" href="#FNanchor_512" class="label">[512]</a> <span class="smallc">Caylus</span>, <i>Souvenirs</i>, p. 66, édit. Raynouard, 1806; collect. Petitot, -t. LXVI, p. 270; <i>ibid.</i>, p. 13 de l'édition de Voltaire, du château -de Ferney, 1770, in-12.—Madame <span class="smallc">du Pérou</span>, <i>Mémoires de madame -de Maintenon</i>, 1846, p. 44, 47 et 48.—<span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres à -la princesse des Ursins</i>, 30 septembre 1713, t. II, p. 440.</p> - -<p><a id="Footnote_513" href="#FNanchor_513" class="label">[513]</a> <span class="smallc">Du Pérou</span>, <i>Mém. sur madame de Maintenon</i>, p. 44-8, 235.—<span class="smallc">Maintenon</span>, -<i>Lettres à la princesse des Ursins</i>, Paris, 1806, in-8<sup>o</sup> -(10-11 septembre 1805), t. III, p. 218.</p> - -<p><a id="Footnote_514" href="#FNanchor_514" class="label">[514]</a> Madame <span class="smallc">du Pérou</span>, <i>Mémoires de madame de Maintenon</i>, 1846, -in-12, p. 21 et 22.</p> - -<p><a id="Footnote_515" href="#FNanchor_515" class="label">[515]</a> Conférez <i>Mémoires sur Sévigné</i>, 3<sup>e</sup> partie, p. 62-95-97-279.</p> - -<p><a id="Footnote_516" href="#FNanchor_516" class="label">[516]</a> <span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mémoires complets et authentiques</i>, édit. 1829, -t. XIII, p. 102 et 103.</p> - -<p><a id="Footnote_517" href="#FNanchor_517" class="label">[517]</a> Conférez <i>Mémoires sur Sévigné</i>, 3<sup>e</sup> partie, p. 213-215.</p> - -<p><a id="Footnote_518" href="#FNanchor_518" class="label">[518]</a> Conférez <i>Mémoires sur Sévigné</i>, 4<sup>e</sup> partie, p. 144.</p> - -<p><a id="Footnote_519" href="#FNanchor_519" class="label">[519]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres</i> (Saint-Germain, le 10 novembre 1674), t. I, -p. 106, édit. 1756.—<i>Ibid.</i> (16 juillet 1674), t. II, p. 6. Lettre à l'abbé -Gobelin.—Duc <span class="smallc">de Noailles</span>, <i>Histoire de madame de Maintenon</i>, -1848, in-8<sup>o</sup>, t. I, p. 485.</p> - -<p><a id="Footnote_520" href="#FNanchor_520" class="label">[520]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres</i> (Saint-Germain, 31 octobre 1674), t. II, p. 21 -et 22 de l'édit. 1806; <i>ibid.</i>, t. II, p. 11 et 12, édit. 1756.</p> - -<p><a id="Footnote_521" href="#FNanchor_521" class="label">[521]</a> <i>Œuvres diverses d'un auteur de sept ans, ou recueil des ouvrages -de M. le duc</i> <span class="smallc">du Maine</span>, <i>qu'il a faits pendant l'année 1677 -et dans le commencement de l'année 1678</i>, Paris, in-4<sup>o</sup>.—Conférez -<i>Nouvelles de la république des lettres</i>, février 1685, t. IV, -2<sup>e</sup> édit., 1686, p. 203 à 209. L'épître dédicatoire se trouve dans les -<i>Lettres</i> <span class="smallc">de Maintenon</span>, édit. 1806, t. I, p. 54.</p> - -<p><a id="Footnote_522" href="#FNanchor_522" class="label">[522]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres</i>, édit. de Dresde, 1753, in-12, p. 48 et 50 (à -l'abbé Gobelin, 6 mai et 16 juin 1671, lisez 1673); <i>ibid.</i>, édit. de -Nancy, 1752, petit in-12, t. I, p. 54 et 57; <i>ibid.</i>, édit. in-12, 1756, -grand vol., p. 9-12-14 (31 octobre et novembre 1674); édit. 1806, -t. I, p. 18-23. Les dates de l'année sont inexactes.</p> - -<p><a id="Footnote_523" href="#FNanchor_523" class="label">[523]</a> <span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Œuvres complètes</i>, t. XIII, p. 104.</p> - -<p><a id="Footnote_524" href="#FNanchor_524" class="label">[524]</a> <span class="smallc">Madame du Pérou</span>, <i>Mém. de madame de Maintenon</i>, p. 19.—<span class="smallc">La -Beaumelle</span>, <i>Mém. p. s. à l'hist. de madame de Maintenon</i>, t. II, -p. 110.—Monmerqué, <span class="smallc">Sévigné</span>, t. VI, p. 240 et 379, note sur la lettre -du 19 avril 1680.—<span class="smallc">Tallemant des Réaux</span>, <i>Historiettes</i>, II, 139, -édit. in-8<sup>o</sup>; <i>ibid.</i>, III, édit. in-12, p. 135.—<span class="smallc">Madame du Pérou</span>, <i>Mém. -sur madame de Maintenon</i>, p. 19.—<span class="smallc">La Beaumelle</span>, <i>Mémoires pour -servir à l'histoire de madame de Maintenon</i>, t. II, p. 110.</p> - -<p><a id="Footnote_525" href="#FNanchor_525" class="label">[525]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres</i> (14 juillet, 31 octobre 1674), t. II, p. 21 et 22 -de l'édit. 1806; <i>ibid.</i>, t. II, p. 11 et 12 de l'édit. d'Amsterd., 1756.</p> - -<p><a id="Footnote_526" href="#FNanchor_526" class="label">[526]</a> Mesdames <span class="smallc">du Pérou</span> et <span class="smallc">Glapion</span>, <i>Mémoires sur madame</i> <span class="smallc">de -Maintenon</span>, recueillis par les dames de Saint-Cyr, 1846, in-12, -p. 22.</p> - -<p><a id="Footnote_527" href="#FNanchor_527" class="label">[527]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres</i> (18 avril 1674), édit. 1756, t. I, p. 52 et 53.—<i>Mémoires -de madame</i> <span class="smallc">de Maintenon</span>, recueillis par les dames de -Saint-Cyr, 1846, in-12, p. 17.—<span class="smallc">Montpensier</span>, <i>Mémoires</i>, collection -Petitot, t. XLIII, p. 403.—<span class="smallc">Caylus</span>, <i>Souvenirs</i>, t. LXVI, p. 391.—Les -Mémoires manuscrits de mademoiselle <span class="smallc">d'Aumale</span>, cités à cet endroit -par M. Monmerqué, <i>ibid.</i>, p. 40 de l'édit. de Voltaire, au château -de Ferney, 1770, édit. in-12.</p> - -<p><a id="Footnote_528" href="#FNanchor_528" class="label">[528]</a> <span class="smallc">Pellisson</span>, <i>Lettres historiques</i> (3 juin 1675, du camp de Latines), -t. II, p. 277.</p> - -<p><a id="Footnote_529" href="#FNanchor_529" class="label">[529]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres à l'abbé Gobelin</i> (8 mai 1675), in-12, t. II, -p. 32.</p> - -<p><a id="Footnote_530" href="#FNanchor_530" class="label">[530]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (7 août 1675), t. III, p. 501, édit. G.; t. III, -p. 362, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_531" href="#FNanchor_531" class="label">[531]</a> <i>Lettres de madame</i> <span class="smallc">de Rabutin-Chantal</span>, <i>marquise</i> <span class="smallc">de Sévigné</span>, -<i>à madame la comtesse de Grignan, sa fille</i>; la Haye, 1726, in-12, -t. II, p. 55, mercredi 19 août (<i>corrigez</i> 21 août) 1675. Dans toutes -les autres éditions, sans exception, le texte de cet important passage. -est faux ou défiguré. Les notes de ces éditions doivent disparaître.</p> - -<p><a id="Footnote_532" href="#FNanchor_532" class="label">[532]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 septembre 1675), t. IV, p, 94, édit. G.; -t. III, p. 464, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_533" href="#FNanchor_533" class="label">[533]</a> L'annonce dans la <i>Gazette</i> est du 9 août 1675, n<sup>o</sup> 78, p. 582. -Il est dit que le roi en avait reçu la nouvelle le 29 juillet, à Versailles.</p> - -<p><a id="Footnote_534" href="#FNanchor_534" class="label">[534]</a> S.-H*** (<span class="smallc">Saint-Hilaire</span>), <i>Mémoires</i>, 1756, in-12, t. I, p. 104.—<i>Recueil -de lettres pour servir d'éclaircissements à l'histoire militaire -du règne de Louis XIV</i>, 1761, in-12, t. III, p. 216.—<span class="smallc">Ramsay</span>, -<i>Histoire du vicomte de Turenne</i>, 1773, in-12, liv. <span class="smallc">VI</span>, t. II, p. 342; -<i>id.</i>, 1735, in-4<sup>o</sup>, t. I, p. 581.—<span class="smallc">Raguenet</span>, <i>Histoire de Turenne</i>, -1732, in-12, t. II, p. 105.</p> - -<p><a id="Footnote_535" href="#FNanchor_535" class="label">[535]</a> Cet hôtel, construit sur le plan de Gomboust et indiqué comme -appartenant en 1652 à un M. de Levassier, était rue Saint-Louis, -au Marais, au coin de la rue Saint-Claude. (Voy. Jaillot, <i>Recherches -sur Paris</i>, quartier du Temple, p. 18.)</p> - -<p><a id="Footnote_536" href="#FNanchor_536" class="label">[536]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (31 juillet 1675), t. III, p. 477 et 478, édit. G.; -<i>idem</i>, t. III, p. 348 et 349, édit. M.—<span class="smallc">Louis XIV</span>, <i>Œuvres</i>, t. V, -p. 451.</p> - -<p><a id="Footnote_537" href="#FNanchor_537" class="label">[537]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (31 juillet 1675), t. III, p. 350, édit. M.; t. III, -p. 478, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_538" href="#FNanchor_538" class="label">[538]</a> <span class="smallc">Pellisson</span>, <i>Lettres historiques</i> (24 septembre 1676), t. III, -p. 154.—<span class="smallc">La Fare</span>, <i>Mémoires</i>, collect. Petitot, t. LXV, p. 223-225.—<i>Œuvres -diverses du marquis</i> <span class="smallc">de la Fare</span>, 1750, p. 145.</p> - -<p><a id="Footnote_539" href="#FNanchor_539" class="label">[539]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> juin 1676), t. IV, p. 466, 467, édit. G.; -t. III, p. 321, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_540" href="#FNanchor_540" class="label">[540]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 février 1672), t. II, p. 396.—Conférez la -4<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, chap. <span class="smallc">X</span>, p. 287, et la note p. 366.</p> - -<p><a id="Footnote_541" href="#FNanchor_541" class="label">[541]</a> <i>Œuvres diverses du marquis</i> <span class="smallc">de la Fare</span>; Amsterdam, 1650, -in-12.—<span class="smallc">La Fare</span>, <i>Mémoires</i> (1675), collect. Petitot, t. LXV, -p. 223.</p> - -<p><a id="Footnote_542" href="#FNanchor_542" class="label">[542]</a> <span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mémoires complets et authentiques</i>, t. I, 29 et 389; -II, 171.—<span class="smallc">La Fare</span>, <i>Mémoires</i>, collect. Petitot, p. 223 (année 1676).—<i>Ibid.</i>, -<i>Œuvres diverses</i>, Amsterdam, 1750, p. 141 et 142.—<span class="smallc">Sévigné</span>, -<i>Lettres</i> (19 mai 1673), t. II, p. 196; t. III, p. 153, édit. G.—<i>Ibid.</i> -(1<sup>er</sup> janvier 1674), t. III, p. 188, édit. G.—<i>Ibid.</i> (11 septembre -1674), t. IV, p. 467; t. V, p. 117, édit. G.—<i>Ibid.</i> (25 décembre -1679), t. VI, p. 265, édit. G.; t. III, p. 81, 194, édit. M.; t. IV, -341, 449 et 460, édit. G.; t. IV, 73, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_543" href="#FNanchor_543" class="label">[543]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (30 et 31 juillet, 2, 6, 7, 9, 11, 12, 16, 19, 21, -22, 26, 27 et 28 août, 1<sup>er</sup> et 9 septembre), t. III, p. 471, 475, 480, -483, 489, 499, 504; t. IV, p. 3, 5, 7, 10, 13, 16, 19, 20, 21, 27, 41, -47, 54, 59, 65, 73, 76, 79, 87, 92, 135, 186, du ms. de l'Institut.—Dans -la <i>Suite des Mémoires</i> <span class="smallc">de Bussy</span>, et dans l'édit. Monmerqué, -1820, in-8<sup>o</sup>, t. III, p. 346, 347, 353, 369, 372, 375, 377, 387, 388, 390, -397, 404, 416, 427, 430, 437 (1<sup>er</sup> septembre), 438, 448, 453, 457.</p> - -<p><a id="Footnote_544" href="#FNanchor_544" class="label">[544]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (7 et 25 août 1675), t. III, p. 504; t. IV, p. 55; -édit. G.—<i>Ibid.</i> (26 janvier 1689), t. IX, p. 122.—Conférez la -4<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 333.</p> - -<p><a id="Footnote_545" href="#FNanchor_545" class="label">[545]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 août et 4 septembre 1675), t. IV, p. 65, -76 et 92, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_546" href="#FNanchor_546" class="label">[546]</a> Lettres de Louis XIV aux abbés et religieux de Saint-Denis, <span class="smallc">Ramsay</span>, -<i>Vie de Turenne</i>, t. IV, p. 372, in-12.</p> - -<p><a id="Footnote_547" href="#FNanchor_547" class="label">[547]</a> <i>Correspondance administrative sous le règne de Louis XIV</i>, -1850, in-4<sup>o</sup>, <i>Lettres</i>, t. I, p. 551. Lettre de l'évêque de Saint-Malo à -Colbert, en date du 28 août 1575.</p> - -<p><a id="Footnote_548" href="#FNanchor_548" class="label">[548]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 août 1675), t. IV, p. 70, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_549" href="#FNanchor_549" class="label">[549]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (7 et 26 août 1675), t. III, p. 504; t. IV, p. 55.—<i>Ibid.</i> -(26 janvier 1689), t. IX, p. 122.—Conférez la 4<sup>e</sup> partie de -ces <i>Mémoires</i>, p. 333. Les lettres de convocation pour la tenue des -états de Bretagne sont datées du 16 septembre 1675. (<i>Recueil ms.</i>, etc., -de la Bibl. nat., p. 371.) Madame de Sévigné partit le 9 du même -mois.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (26 juin 1675), t. III, p. 434, édit. G; t. III, -p. 309, édit. M.—<i>Ibid.</i> (6 août 1675), t. III, p. 487, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_550" href="#FNanchor_550" class="label">[550]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 juin 1675), t. III, p. 424, édit. G.; t. III, -p. 300, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_551" href="#FNanchor_551" class="label">[551]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 juillet 1675?), t. III, p. 448, 467, édit G.; -t. III, p. 339, édit. M.—<i>Ibid.</i> (10 juillet 1675), t. III, p. 448, édit. G.; -t. III, p. 323 et 324, édit. M.—<i>Ibid.</i> (19 août 1675), t. IV, p. 35, -édit. G.; t. III, p. 411, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_552" href="#FNanchor_552" class="label">[552]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 août 1675), t. III, p. 487, édit. G.; t. III, -p. 371, édit. M.—<i>Ibid.</i> (5, 10 et 24 juillet 1675), t. III, p. 435, 448 -et 467, édit. G.; t. III, p. 439, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_553" href="#FNanchor_553" class="label">[553]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (4 et 22 décembre 1675), t. IV, p. 233 et 267, -édit. G.; t. IV, p. 111 et 141, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_554" href="#FNanchor_554" class="label">[554]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 et 14 septembre 1675), t. IV, p. 93 et 101, -édit. G.; t. III, p. 463 et 469, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_555" href="#FNanchor_555" class="label">[555]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 et 29 septembre 1675), t. IV, p. 97-117, -édit. G.; t. IV, p. 10, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_556" href="#FNanchor_556" class="label">[556]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 septembre 1675), t. IV, p. 85, édit. G.; t. III, -p. 455, édit M.</p> - -<p><a id="Footnote_557" href="#FNanchor_557" class="label">[557]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 septembre 1675), t. IV, p. 117, édit. G.; -t. IV, p. 7, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_558" href="#FNanchor_558" class="label">[558]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (9 et 11 septembre 1675), t. IV, p. 87, 94, édit. -G.; t. III, p. 463, édit. M.—<i>Ibid.</i> (20 septembre 1675), t. IV, p. 107 -et 109, édit. G.; t. IV, p. 475, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_559" href="#FNanchor_559" class="label">[559]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (9 septembre 1675), t. IV, p. 92, édit. G.; t. III, -p. 461, édit. M.—<i>Cadmus et Hermione</i>, tragédie, acte II, scène <span class="smallc">IV</span>.—Le -<i>Théâtre de</i> <span class="smallc">M. Quinault</span> (1735), t. IV, p. 95.—Madame de -Sévigné a pu assister à la représentation de cet opéra, dont la musique -était de Lulli. Il fut joué sur le théâtre du Bel-Air en 1672, et le -17 avril 1673 sur le théâtre du Palais-Royal, après la mort de Molière. -Voyez la <i>Vie de Quinault</i>, t. I, p. 35 des <i>Œuvres</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_560" href="#FNanchor_560" class="label">[560]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 septembre 1675), t. IV, p. 96, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_561" href="#FNanchor_561" class="label">[561]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 septembre 1675), l. IV, p. 105, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_562" href="#FNanchor_562" class="label">[562]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (9 et 11 sept. 1675), t. IV, p. 91, 93, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_563" href="#FNanchor_563" class="label">[563]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 et 14 septembre 1675), t. IV, p. 97, 98 et -100, éd. G.</p> - -<p><a id="Footnote_564" href="#FNanchor_564" class="label">[564]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 septembre 1675), t. IV, p. 98, 99, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_565" href="#FNanchor_565" class="label">[565]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (14 septembre 1675), t. IV, p. 100, édit. G.; -t. III, p. 467, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_566" href="#FNanchor_566" class="label">[566]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (14 et 17 septembre), t. IV, p. 100-103, édit. G.; -t. III, p. 469, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_567" href="#FNanchor_567" class="label">[567]</a> <i>Mémoires sur madame de Sévigné</i>, 4<sup>e</sup> partie, p. 160.</p> - -<p><a id="Footnote_568" href="#FNanchor_568" class="label">[568]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (14 septembre 1675), t. IV, p. 100 et 101, -édit. G.; t. III, p. 469, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_569" href="#FNanchor_569" class="label">[569]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 septembre 1675), t. IV, p. 103 et 104, -édit. G.; t. III, p. 472, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_570" href="#FNanchor_570" class="label">[570]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 septembre 1675), t. IV, p. 106, édit. G.; -t. III, p. 473, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_571" href="#FNanchor_571" class="label">[571]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> octobre 1654), t. I, p. 34, édit. G.; t. I, -p. 27, édit. M.; et 2<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, 2<sup>e</sup> édit., p. 9 et 10.</p> - -<p><a id="Footnote_572" href="#FNanchor_572" class="label">[572]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 et 24 septembre 1675), t. IV, p. 109 et 114, -édit. G.; t. III, p. 475, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_573" href="#FNanchor_573" class="label">[573]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 septembre 1675), t. IV, p. 111 et 112, -édit. G.; t. IV, p. 1. édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_574" href="#FNanchor_574" class="label">[574]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (29 septembre 1675), t. IV, p. 115 et 117, -édit. G.; t. IV, p. 10, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_575" href="#FNanchor_575" class="label">[575]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (7 août 1675), t. III, p. 503, édit. G.; t. III, -p. 363, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_576" href="#FNanchor_576" class="label">[576]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (29 septembre 1675), t. IV, p. 117, édit. G.; -t. IV, p. 10, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_577" href="#FNanchor_577" class="label">[577]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 septembre 1675), t. IV, p. 107, édit. G.; -t. III, p. 470, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_578" href="#FNanchor_578" class="label">[578]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 et 14 sept. 1675), t. IV, p. 93, 100 et 102.</p> - -<p><a id="Footnote_579" href="#FNanchor_579" class="label">[579]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 août 1675), t. III, p. 487, édit. G.; t. III, -p. 371, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_580" href="#FNanchor_580" class="label">[580]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 septembre 1675), t. IV, p. 103 (11 septembre), -t. IV, p. 99, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_581" href="#FNanchor_581" class="label">[581]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 septembre 1675), t. IV, p. 99, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_582" href="#FNanchor_582" class="label">[582]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 et 24 septembre 1675), t. IV, p. 107 et -114, édit G.; t. III, p. 474, et t. IV, p. 7, édit. M.—Les sœurs de -Sainte-Marie logeaient à Nantes, près de la cour de Saint-Pierre.</p> - -<p><a id="Footnote_583" href="#FNanchor_583" class="label">[583]</a> Le portrait de madame de Grignan. Voyez ci-dessus, p. <a href="#Page_256">256</a>.</p> - -<p><a id="Footnote_584" href="#FNanchor_584" class="label">[584]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 septembre 1675), t. IV, p. 111, édit. G.; -t. IV, p. 1, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_585" href="#FNanchor_585" class="label">[585]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (29 septembre 1675), t. IV, p. 116-118, -édit. G.; t. IV, p. 9-10, édit. M.—<i>Ibid.</i> (2 octobre 1675), t. IV, -p. 124, édit. G.; t. IV, p. 14, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_586" href="#FNanchor_586" class="label">[586]</a> Voyez la 1<sup>re</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, 2<sup>e</sup> édit., p. 120 et 121, et -la note 2.—Les deux lettres doivent être datées du 15 mars et du -12 avril 1648, et non 1647.</p> - -<p><a id="Footnote_587" href="#FNanchor_587" class="label">[587]</a> <i>Lettre inédite de</i> <span class="smallc">Sévigné</span>, publiée par M. Monmerqué, p. 23.</p> - -<p><a id="Footnote_588" href="#FNanchor_588" class="label">[588]</a> <i>Journal</i> <span class="smallc">d'Ormesson</span>, dans <span class="smallc">Cheruel</span>, p. 215.</p> - -<p><a id="Footnote_589" href="#FNanchor_589" class="label">[589]</a> Deuxième partie de ces <i>Mémoires</i>, 2<sup>e</sup> édit., p. 101.</p> - -<p><a id="Footnote_590" href="#FNanchor_590" class="label">[590]</a> <i>Lettre inédite du marquis</i> <span class="smallc">de Sévigné</span> <i>à la comtesse de Grignan -sa sœur</i>, publiée par M. Monmerqué; Paris, 1847, in-8<sup>o</sup>.</p> - -<p><a id="Footnote_591" href="#FNanchor_591" class="label">[591]</a> Conférez 1<sup>re</sup> part. de ces <i>Mémoires</i>, 2<sup>e</sup> édit., chap. <span class="smallc">XXXVIII</span>, <span class="smallc">XXXIX</span>, -p. 513, 520, et la 2<sup>e</sup> partie, chap. <span class="smallc">I</span>, <span class="smallc">II</span>, <span class="smallc">III</span>, <span class="smallc">IV</span> et <span class="smallc">V</span>, pag. 1 à 48.—<span class="smallc">Sévigné</span>, -<i>Lettres</i> (datée des Rochers, le 1<sup>er</sup> octobre 1654), t. I, p. 34, -édit. G.; t. I, p. 27, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_592" href="#FNanchor_592" class="label">[592]</a> Conférez 2<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, ch. <span class="smallc">VII</span> et <span class="smallc">VIII</span>, p. 73.—4<sup>e</sup> -partie, ch. <span class="smallc">VII</span>, p. 194.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (22 juillet 1672), t. III, -p. 108, édit. G.—<span class="smallc">Bussy</span>, <i>Mémoires</i>, édit. Amst., 1721, t. II, p. 84.</p> - -<p><a id="Footnote_593" href="#FNanchor_593" class="label">[593]</a> Conférez 2<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, 2<sup>e</sup> édit., ch. <span class="smallc">VIII</span>, p. 101.</p> - -<p><a id="Footnote_594" href="#FNanchor_594" class="label">[594]</a> Voyez <i>Poésies de</i> <span class="smallc">Saint-Pavin</span> <i>et</i> <span class="smallc">Charleval</span>, 1759, in-12, p. 68 -à 110.—<i>Recueil des plus belles pièces de poésie française</i>, 1692, -t. IV, p. 325.</p> - -<p><a id="Footnote_595" href="#FNanchor_595" class="label">[595]</a> <span class="smallc">Menagii</span>, <i>Poemata</i>, septima editio, 1680, p. 305.—Octava editio, -1687, p. 337.</p> - -<p><a id="Footnote_596" href="#FNanchor_596" class="label">[596]</a> <i>Fables choisies mises en vers par M.</i> <span class="smallc">de la Fontaine</span>; Paris, -Claude Barbin, 1668, p. 143, liv. IV, fable 1<sup>re</sup>; t. I, p. 177 de l'édit. -in-8<sup>o</sup>, 1827.</p> - -<p><a id="Footnote_597" href="#FNanchor_597" class="label">[597]</a> <span class="smallc">Benserade</span>, <i>Œuvres</i>, 1697, in-12, t. II, p. 288.</p> - -<p><a id="Footnote_598" href="#FNanchor_598" class="label">[598]</a> <i>Ibid.</i>, t. II, p. 316; et dans la 2<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, chapitres -<span class="smallc">XXII</span> et <span class="smallc">XXIII</span>, p. 325 à 333.</p> - -<p><a id="Footnote_599" href="#FNanchor_599" class="label">[599]</a> Voyez 3<sup>e</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, p. 80, ch. <span class="smallc">IV</span>.—Sévigné n'avait -que vingt et un ans lorsqu'il revint de son expédition de Candie -(6 mars 1669), et vingt-trois lors de sa liaison avec Ninon.—<i>Ibid.</i>, -p. 124.</p> - -<p><a id="Footnote_600" href="#FNanchor_600" class="label">[600]</a> Troisième partie de ces <i>Mémoires</i>, 2<sup>e</sup> édit., p. 127, et l'extrait -des <i>Mémoires d</i>'<span class="smallc">Olivier d'Ormesson</span>, dans <span class="smallc">Cheruel</span>, <i>De l'administration -de Louis XIV</i>, p. 322.</p> - -<p><a id="Footnote_601" href="#FNanchor_601" class="label">[601]</a> Première partie de ces <i>Mémoires</i>, ch. <span class="smallc">II</span>, p. 9 et 10. Mais il -y a une erreur à l'égard de Philippe de la Tour de Coulanges, le premier -tuteur de madame de Sévigné. Il était son aïeul, et non pas -son oncle maternel, et il était le père et non le frère de Christophe -de Coulanges, abbé de Livry, le second tuteur de madame de -Sévigné.</p> - -<p><a id="Footnote_602" href="#FNanchor_602" class="label">[602]</a> <i>Mémoires d</i>'<span class="smallc">Olivier d'Ormesson</span>, dans <span class="smallc">Cheruel</span>, <i>De l'administration -de Louis XIV</i>, p. 213.</p> - -<p><a id="Footnote_603" href="#FNanchor_603" class="label">[603]</a> <i>Ibid.</i>, p. 214.</p> - -<p><a id="Footnote_604" href="#FNanchor_604" class="label">[604]</a> <span class="smallc">Pellisson</span>, <i>Histoire de l'Académie française</i>, édit. 1729, in-4<sup>o</sup>, -p. 193-198, et aussi 28, 80, 86.</p> - -<p><a id="Footnote_605" href="#FNanchor_605" class="label">[605]</a> <i>Traité de la politique de France</i>, par monsieur P. H. (Paul <span class="smallc">Hay</span>), -marquis de C. (Chastellet); Cologne (Elzeviers), chez Pierre Marteau, -1669 (264 pages); 2<sup>e</sup> édit., 1670; 3<sup>e</sup> édit., 1677; 4<sup>e</sup> édit., 1680.—Barbier, -dans son <i>Dictionnaire des Anonymes</i>, donne les titres des -autres ouvrages de du Chastellet.</p> - -<p><a id="Footnote_606" href="#FNanchor_606" class="label">[606]</a> <i>Recueil manuscrit des états de Bretagne dans diverses villes -de cette province</i>, Bl.-Mant., 75, p. 419, 481 verso, 507, 523, 535, -549.—A toutes ces pages, dans les états tenus à Nantes, à Dinan, à -Rennes, à Vannes, à Vitré, depuis 1681 jusqu'en 1699, on trouve le -nom du marquis de Sévigné et celui de M. Paul Hay, marquis du -Chastellet.</p> - -<p><a id="Footnote_607" href="#FNanchor_607" class="label">[607]</a> Partie 1<sup>re</sup> de ces <i>Mémoires</i>, ch. <span class="smallc">II</span>, 2<sup>e</sup> édit., p. 18.—<i>Mémoires -d</i>'<span class="smallc">Olivier d'Ormesson</span>, dans <span class="smallc">Cheruel</span>, <i>Administration de Louis XIV</i>, -p. 214.—Acte du mariage de Henri de Sévigné et de Marie de -Rabutin-Chantal, dans <span class="smallc">Monmerqué</span>, <i>Billet italien de madame de -Sévigné</i>; Paris, 1844, in-8<sup>o</sup>, p. 8 et 9, <i>notes</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_608" href="#FNanchor_608" class="label">[608]</a> Conférer la 1<sup>re</sup> partie de ces <i>Mémoires</i>, 2<sup>e</sup> édit., ch. <span class="smallc">III</span>, p. 22.</p> - -<p><a id="Footnote_609" href="#FNanchor_609" class="label">[609]</a> <span class="smallc">Olivier d'Ormesson</span>, <i>Mémoires</i>, dans <span class="smallc">Cheruel</span>, <i>Administration -de Louis XIV</i>, p. 215.</p> - -<p><a id="Footnote_610" href="#FNanchor_610" class="label">[610]</a> Première partie de ces <i>Mémoires</i>, 2<sup>e</sup> édit., t. I, p. 120. Mais il -faut rectifier la date de la lettre de Bussy, et mettre: 15 <i>mars</i> 1648.</p> - -<p><a id="Footnote_611" href="#FNanchor_611" class="label">[611]</a> <span class="smallc">Olivier d'Ormesson</span>, <i>Mémoires</i>, dans <span class="smallc">Cheruel</span>, p. 216.</p> - -<p><a id="Footnote_612" href="#FNanchor_612" class="label">[612]</a> Sur le président de Novion, conférez <span class="smallc">Motteville</span>, <i>Mémoires</i>, -t. XXXVIII, p. 129, et <span class="smallc">Retz</span>, <i>Mémoires</i>, t. XLVI, p. 13.</p> - -<p><a id="Footnote_613" href="#FNanchor_613" class="label">[613]</a> Ballet en dix-neuf entrées. Conférez de <span class="smallc">Beauchamps</span>, <i>Recherches -sur les théâtres de France</i>, t. III, p. 121.</p> - -<p><a id="Footnote_614" href="#FNanchor_614" class="label">[614]</a> <span class="smallc">D'Ormesson</span>, <i>Mémoires</i>, dans <span class="smallc">Cheruel</span>, p. 216.—<span class="smallc">De Beauchamps</span>, -<i>Recherches sur les théâtres de France</i>, t. III, p. 127 (il cite la -<i>Gazette</i> de 1647, n<sup>o</sup> 27, p. 201).</p> - -<p><a id="Footnote_615" href="#FNanchor_615" class="label">[615]</a> <span class="smallc">Motteville</span>, <i>Mémoires</i>, collection Petitot, t. XXXVII, p. 216.</p> - -<p><a id="Footnote_616" href="#FNanchor_616" class="label">[616]</a> Voyez la première partie de ces <i>Mémoires</i>, 2<sup>e</sup> édit., p. 450, -chap. <span class="smallc">XI</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_617" href="#FNanchor_617" class="label">[617]</a> <i>Mémoires d</i>'<span class="smallc">Olivier d'Ormesson</span>, dans <span class="smallc">Cheruel</span>, p. 217.—Sur -Boislesve et sa fille, voy. <span class="smallc">Moreau</span>, <i>Bibliographie des Mazarinades</i>, -t. III, p. 199, et t. II, p. 241.</p> - -<p><a id="Footnote_618" href="#FNanchor_618" class="label">[618]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettre à Ménage</i> (aux Rochers, 12 septembre 1656), -publiée par M. Cousin dans le <i>Journal des Savants</i>, année 1852, -p. 52.</p> - -<p><a id="Footnote_619" href="#FNanchor_619" class="label">[619]</a> <i>Mémoires d</i>'<span class="smallc">Olivier d'Ormesson</span>, dans <span class="smallc">Cheruel</span>, p. 220.</p> - -<p><a id="Footnote_620" href="#FNanchor_620" class="label">[620]</a> <span class="smallc">D'Ormesson</span>, <i>Mémoires</i>, dans <span class="smallc">Cheruel</span>, p. 221.</p> - -<p><a id="Footnote_621" href="#FNanchor_621" class="label">[621]</a> <i>Mémoires d</i>'<span class="smallc">Olivier d'Ormesson</span>, dans <span class="smallc">Cheruel</span>, p. 221.—3<sup>e</sup> part. -de ces <i>Mémoires</i>, 2<sup>e</sup> édit., p. 49, chap. <span class="smallc">III</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_622" href="#FNanchor_622" class="label">[622]</a> <i>De l'administration de Louis XIV</i>, par <span class="smallc">Cheruel</span>; Rouen, 1849, -in-8<sup>o</sup>, p. 222, dans l'appendice.</p> - -<p><a id="Footnote_623" href="#FNanchor_623" class="label">[623]</a> <span class="smallc">Mackensie</span>, <i>Histoire de la santé</i>, cité par Rochoux dans l'article -du Dictionnaire de médecine de <span class="smallc">Panckoucke</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_624" href="#FNanchor_624" class="label">[624]</a> <span class="smallc">Furetière</span>, <i>Le grand Dictionnaire des arts et des sciences de -l'Académie française</i>, Paris, 1696, t. IV, p. 300, au mot <i>Transfusion</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_625" href="#FNanchor_625" class="label">[625]</a> <span class="smallc">Rochoux</span>, dans le Dictionnaire de médecine de <span class="smallc">Panckoucke</span>, article -<i>Transfusion</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_626" href="#FNanchor_626" class="label">[626]</a> <i>De la transfusion du sang à propos d'un nouveau cas suivi -de guérison, par MM.</i> <span class="smallc">Desray</span> <i>et</i> <span class="smallc">Desgranges</span>, <i>dans les comptes -rendus hebbomadaires de l'Académie des sciences</i>, t. XXXIII, -p. 657 (séance du 8 décembre 1851).</p> - -<p><a id="Footnote_627" href="#FNanchor_627" class="label">[627]</a> <i>Journal de</i> <span class="smallc">d'Ormesson</span>, du dimanche 14 octobre 1668, dans -<span class="smallc">Cheruel</span>, p. 222.</p> - -<p><a id="Footnote_628" href="#FNanchor_628" class="label">[628]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 décembre 1678), t. IV, p. 243, édit G.; t. IV, -p. 120, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_629" href="#FNanchor_629" class="label">[629]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (16 octobre 1675), t. IV, p. 155, édit. G.; -t. IV, p. 44, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_630" href="#FNanchor_630" class="label">[630]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (2 octobre 1675), t. IV, p. 124 et 128, édit. G.; -t. IV, p. 14 et 18, édit. M.—(11 décembre 1675), t. IV, p. 243, -édit. G.; t. IV, p. 120, édit. M.—(25 février 1685), t. VIII, p. 20, -édit. G.; t. VII, p. 244, édit. M.—Conférez <i>Portrait de la princesse -de Tarente</i>, fait par elle-même à la Haye en 1656, dans Petitot, -collection des <i>Mémoires sur l'histoire de France</i>, t. XLIII, -p. 507-512, à la suite des <i>Mémoires de</i> <span class="smallc">Montpensier</span>.—Il est parlé -de ce portrait dans les <i>Mémoires de</i> <span class="smallc">Montpensier</span> (année 1677), -t. XLII, p. 360.—Le portrait de mademoiselle de la Trémouille est celui -de la belle-sœur de la princesse de Tarente, 1657.</p> - -<p><a id="Footnote_631" href="#FNanchor_631" class="label">[631]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (2 octobre 1675), t. IV, p. 124 et 125, édit. G.; -t. IV, p. 14 et 15, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_632" href="#FNanchor_632" class="label">[632]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (3 et 31 mai et 2 juin 1680), t. VI, p. 459, -édit. M.; t. VII, p. 13, édit. G.—<i>Ibid.</i>, t. VI, p. 299, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_633" href="#FNanchor_633" class="label">[633]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (22 décembre 1675), t. IV, p. 268, édit. G.; -t. IV, p. 141, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_634" href="#FNanchor_634" class="label">[634]</a> <span class="smallc">Catteau-Calleville</span>, <i>Biographie universelle</i>, t. XVIII, p. 477, -article <span class="smallc">Griffenfeld</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_635" href="#FNanchor_635" class="label">[635]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (2 octobre 1675), t. IV, p. 125, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_636" href="#FNanchor_636" class="label">[636]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (25 mai 1680), t. VI, p. 511, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_637" href="#FNanchor_637" class="label">[637]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (31 mai, 2 juin), t. VI, p. 299, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_638" href="#FNanchor_638" class="label">[638]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (3 mai 1680), t. VI, p. 469, édit. G.; t. VI, -p. 251, édit. M.—<i>Ibid.</i> (11 juin 1680), t. VI, p. 333, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_639" href="#FNanchor_639" class="label">[639]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (7 juillet 1680), t. VI, p. 362, édit. M.; t. VII, -p. 91 et 92, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_640" href="#FNanchor_640" class="label">[640]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (21 juillet 1680), t. VI, p. 384, édit. M.; -t. VII, p. 123, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_641" href="#FNanchor_641" class="label">[641]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (18 août 1680), t. VI, p. 424, édit. M.—<i>Ibid.</i> -(2 octobre 1680), t. VII, p. 10 et 11, édit. M.; t. VII, p. 168 et 239, -édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_642" href="#FNanchor_642" class="label">[642]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (23 octobre 1675), t. IV, p. 53, édit. M.; t. IV, -p. 167, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_643" href="#FNanchor_643" class="label">[643]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 décembre 1675), t. IV, p. 243, édit. G.; -t. IV, p. 120, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_644" href="#FNanchor_644" class="label">[644]</a> <i>Mémoires de Henri-Charles</i> <span class="smallc">de la Trémouille</span>, <i>prince</i> <span class="smallc">de -Tarente</span>; Liége, 1767, in-12, p. 56 et 312.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> -(28 mars 1676), t. IV, p. 241, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_645" href="#FNanchor_645" class="label">[645]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 juillet 1680), t. VII, p. 133, 134, édit. G.; -t. VI, p. 394, édit. M.—<span class="smallc">Élisabeth de Bavière</span>, <i>duchesse</i> <span class="smallc">d'Orléans</span>, -<i>Mémoires</i>, <i>Fragments</i>, édit. de 1822, p. 32.</p> - -<p><a id="Footnote_646" href="#FNanchor_646" class="label">[646]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (16 août 1671), t. II, p. 56, édit. M.; t. II, -p. 189, édit. G.—<span class="smallc">Montpensier</span>, <i>Mémoires</i> (1671), t. XLIII (coll. -Petitot), p. 334.—<span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mémoires authentiques</i>, in-8<sup>o</sup>, t. X, -p. 478; XII, 220; XX, 344.</p> - -<p><a id="Footnote_647" href="#FNanchor_647" class="label">[647]</a> Conférez <i>Fragments et lettres originales de Madame</i> <span class="smallc">Charlotte-Élisabeth -de Bavière</span>, 1788, t. I, p. 67, in-12.—<i>Mémoires et -Fragments d</i>'<span class="smallc">Élisabeth de Bavière</span>, etc., 1822, in-8<sup>o</sup>, <i>passim</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_648" href="#FNanchor_648" class="label">[648]</a> <i>État de la France</i>, 1677, in-12, p. 452.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> -(8 avril 1676), t. IV, p. 308, édit. G.—<i>Ibid.</i> (8 mai 1676), t. IV, -p. 249, édit. M.—<i>Ibid.</i>, t. IV, p. 388, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_649" href="#FNanchor_649" class="label">[649]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 mars 1676), t. IV, p. 379, édit. G.; t. IV, -p. 241, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_650" href="#FNanchor_650" class="label">[650]</a> <span class="smallc">Griffet</span>, <i>Préface historique</i>, p. 7 des <i>Mémoires du prince</i> -<span class="smallc">de Tarente</span>; Liége, 1767, in-12.</p> - -<p><a id="Footnote_651" href="#FNanchor_651" class="label">[651]</a> <i>Ibid.</i>, p. <span class="smallc">XX</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_652" href="#FNanchor_652" class="label">[652]</a> Les réclamations de la famille la Trémouille furent faites à tous les -congrès: au congrès de Nimègue, en 1678; de Ryswick, en 1697; -d'Utrecht, en 1713; de Rastadt, en 1714. On sait que le vrai nom est -la Trémoïlle; mais, par un usage ancien, on prononce et on écrit la -Trémouille. Cette famille subsiste encore, et l'héritier direct, Louis-Charles, -né le 26 octobre 1838, réside à Paris, et porte, dans l'almanach -de Gotha (1848, p. 141, et 1851, p. 130), les titres de prince -de la Trémoïlle et de Thouars, de Tarente et de Talmont.</p> - -<p><a id="Footnote_653" href="#FNanchor_653" class="label">[653]</a> <i>Mémoires du prince</i> <span class="smallc">de Tarente</span>, 1767, in-12, p. 56 et 306.</p> - -<p><a id="Footnote_654" href="#FNanchor_654" class="label">[654]</a> <i>Ibid.</i>, p. 129, 172, 259.—<span class="smallc">Griffet</span>, p. viij de la préface des -<i>Mémoires du prince</i> <span class="smallc">de Tarente</span>.—<span class="smallc">La Rochefoucauld</span>, <i>Mémoires</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_655" href="#FNanchor_655" class="label">[655]</a> <i>Mémoires du prince</i> <span class="smallc">de Tarente</span>, p. 72 et 104.</p> - -<p><a id="Footnote_656" href="#FNanchor_656" class="label">[656]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (29 décembre 1675), t. IV, p. 276, édit. G; -t. IV, p. 152, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_657" href="#FNanchor_657" class="label">[657]</a> <i>Mémoires du prince</i> <span class="smallc">de Tarente</span>, 1767, p. 110, 112, 113.—<i>Mémoires -du duc</i> <span class="smallc">de Montausier</span>, 1731, p. 110.—<span class="smallc">La Rochefoucauld</span>, -<i>Mémoires</i>, p. 56 et 172.</p> - -<p><a id="Footnote_658" href="#FNanchor_658" class="label">[658]</a> <i>Mémoires du prince</i> <span class="smallc">de Tarente</span>, p. 129, 172, 259.</p> - -<p><a id="Footnote_659" href="#FNanchor_659" class="label">[659]</a> <i>Ibid.</i>, p. 172.</p> - -<p><a id="Footnote_660" href="#FNanchor_660" class="label">[660]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (29 décembre 1675), t. IV, p. 279, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_661" href="#FNanchor_661" class="label">[661]</a> <i>Mémoires du prince</i> <span class="smallc">de Tarente</span>, p. 175.</p> - -<p><a id="Footnote_662" href="#FNanchor_662" class="label">[662]</a> <i>Ibid.</i>, p. 184.</p> - -<p><a id="Footnote_663" href="#FNanchor_663" class="label">[663]</a> <i>Ibid.</i>, p. 188.</p> - -<p><a id="Footnote_664" href="#FNanchor_664" class="label">[664]</a> <i>Ibid.</i>, p. 196.</p> - -<p><a id="Footnote_665" href="#FNanchor_665" class="label">[665]</a> <i>Ibid.</i>, p. 201.</p> - -<p><a id="Footnote_666" href="#FNanchor_666" class="label">[666]</a> <i>Ibid.</i>, p. 202.</p> - -<p><a id="Footnote_667" href="#FNanchor_667" class="label">[667]</a> <i>Ibid.</i>, p. 215.</p> - -<p><a id="Footnote_668" href="#FNanchor_668" class="label">[668]</a> <i>Ibid.</i>, p. 225.</p> - -<p><a id="Footnote_669" href="#FNanchor_669" class="label">[669]</a> <span class="smallc">Montpensier</span>, <i>Mémoires</i> (collection Petitot), t. XLII, p. 255 et -256.</p> - -<p><a id="Footnote_670" href="#FNanchor_670" class="label">[670]</a> <i>Mémoires du prince</i> <span class="smallc">de Tarente</span>, p. 255.</p> - -<p><a id="Footnote_671" href="#FNanchor_671" class="label">[671]</a> <i>Ibid.</i>, p. 257.</p> - -<p><a id="Footnote_672" href="#FNanchor_672" class="label">[672]</a> <i>Recueil des tenues des états de Bretagne</i>, mss. Bl.-Mant., n<sup>o</sup> 75, -p. 273 verso, et 285.</p> - -<p><a id="Footnote_673" href="#FNanchor_673" class="label">[673]</a> <i>Ibid.</i>, p. 323 et 327.</p> - -<p><a id="Footnote_674" href="#FNanchor_674" class="label">[674]</a> Prince <span class="smallc">de Tarente</span>, <i>Mémoires</i>, p. 255.</p> - -<p><a id="Footnote_675" href="#FNanchor_675" class="label">[675]</a> Prince <span class="smallc">de Tarente</span>, <i>Mémoires</i>, p. 280.—<i>Recueil ms. des tenues -des états de Bretagne</i>, p. 339. (Ils s'ouvrirent le 4 août et se terminèrent -le 22.)</p> - -<p><a id="Footnote_676" href="#FNanchor_676" class="label">[676]</a> Prince <span class="smallc">de Tarente</span>, <i>Mémoires</i>, p. 312, et <i>Recueil ms.</i>, p. 357. -(Ces états s'ouvrirent le 10 novembre 1673, et se terminèrent le -10 janvier 1674.)</p> - -<p><a id="Footnote_677" href="#FNanchor_677" class="label">[677]</a> <i>Mémoires de</i> <span class="smallc">Charles-Henri</span>, <i>prince</i> <span class="smallc">de Tarente</span>; Liége, 1767, -p. 170, 306, 311.</p> - -<p><a id="Footnote_678" href="#FNanchor_678" class="label">[678]</a> <i>Mémoires du</i> <span class="smallc">prince de Tarente</span>, p. 312.</p> - -<p><a id="Footnote_679" href="#FNanchor_679" class="label">[679]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 novembre 1675), t. IV, p. 201, édit. G.; -t. IV, p. 83, édit. M. Ce chien fut donné en octobre.—<i>Ibid.</i> (23 octobre -1675), t. IV, p. 171, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_680" href="#FNanchor_680" class="label">[680]</a> Conférez ci-dessus, p. 255, chap. <span class="smallc">XII</span>; et <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 et -9 septembre, 23 octobre et 16 novembre), t. IV, p. 84, 87, 171 et 201, -édit. G.; t. IV, p. 84 et 87, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_681" href="#FNanchor_681" class="label">[681]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 décembre 1675), t. IV, p. 243, édit. G.; -et ci-dessus, p. 284.</p> - -<p><a id="Footnote_682" href="#FNanchor_682" class="label">[682]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 décembre 1675), t. IV, p. 243-244, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_683" href="#FNanchor_683" class="label">[683]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 janvier 1676), t. IV, p. 298, édit. G.—<i>Ibid.</i> -(1<sup>er</sup> mai 1671), t. II, p. 52, édit. G.; t. IV, p. 170, et t. II, p. 43, -édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_684" href="#FNanchor_684" class="label">[684]</a> <span class="smallc">Sarrazin</span>, <i>Œuvres</i>; Paris, Cramoisy, 1694, in-12, p. 414.</p> - -<p><a id="Footnote_685" href="#FNanchor_685" class="label">[685]</a> <i>Réflexions ou sentiments et maximes morales</i>, 4<sup>e</sup> édition, -revue, corrigée et augmentée depuis la troisième; Paris, Claude -Barbin, 1675, in-12 (157 pages), sans l'avis du libraire ni la table; -achevé d'imprimer le 17 décembre 1674. La maxime est page 27, -n<sup>o</sup> 73. Dans la 3<sup>e</sup> édition (1665) elle est p. 41, n<sup>o</sup> 83. Dans la 6<sup>e</sup> -comme dans la 4<sup>e</sup>.</p> - -<p><a id="Footnote_686" href="#FNanchor_686" class="label">[686]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> janvier 1676), t. IV, p. 286.</p> - -<p><a id="Footnote_687" href="#FNanchor_687" class="label">[687]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 et 13 novembre 1675), t. IV, p. 189, 193, -édit. G.—<i>Ibid.</i> (1<sup>er</sup> décembre 1675), t. IV, p. 227, édit. G.—<i>Ibid.</i> -(11 décembre 1675), t. IV, p. 245, édit. G.—<i>Ibid.</i> (27 novembre -1675), t. IV, p. 221, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_688" href="#FNanchor_688" class="label">[688]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (10 novembre, 11 et 18 décembre 1675, 12 janvier -1676), t. IV, p. 204, 245, 260, 307-8, édit. G.; t. IV, p. 182, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_689" href="#FNanchor_689" class="label">[689]</a> <i>Ibid.</i> t. IV, p. 204, édit. G.; t. IV, p. 76 et 85, édit. M.—<i>Ibid</i>, -(8 mars 1676), t. IV, p. 362, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_690" href="#FNanchor_690" class="label">[690]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (2 février 1676), t. IV, p. 331-2, édit. G.; t. IV, -p. 199, édit. M.—<i>Ibid.</i> (19 janvier 1676), t. IV, p. 318, édit. G.; -t. IV, p. 188, édit. M.—<i>Ibid.</i> (12 janvier 1676), t. IV, p. 182, éd. M.; -t. IV, p. 307 et 309, édit. G.—<i>Ibid.</i> (5 janvier 1676), t. IV, p. 293.</p> - -<p><a id="Footnote_691" href="#FNanchor_691" class="label">[691]</a> <i>Le Théâtre de M. Quinault</i>; Paris, 1715, in-12, t. IV, p. 265, -328.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (2 février 1676), t. IV, p. 332, édit. G.—<i>Ibid.</i> -(19 janvier 1676), p. 318 et 319, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_692" href="#FNanchor_692" class="label">[692]</a> <span class="smallc">Germain Boffrand</span>, <i>Vie de Quinault</i>, t. I<sup>er</sup>, p. 41 et 42 du -<i>Théâtre de M.</i> <span class="smallc">Quinault</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_693" href="#FNanchor_693" class="label">[693]</a> <span class="smallc">Quinault</span>, <i>Théâtre</i>, 1715, in-12, t. IV, p. 270.</p> - -<p><a id="Footnote_694" href="#FNanchor_694" class="label">[694]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 novembre 1675), t. IV, p. 191, édit. G.; t. IV, -p. 73, édit M.—<i>Œuvres diverses du sieur</i> D*** (<span class="smallc">Despréaux</span>); Paris, -Louis Billaine, 1675, p. 211, 213. <i>Le Lutrin</i>, chant second.</p> - -<p><a id="Footnote_695" href="#FNanchor_695" class="label">[695]</a> <i>Œuvres diverses du sieur</i> D***; Paris, Denys Thierry, 1674, -in-4<sup>o</sup>, p. 66.—<i>Ibid.</i>, Paris, Louis Billaine, 1675, in-12, p. 26, 38, -92. M. Berriat Saint-Prix prétend qu'il y a un carton pour le feuillet -où un blanc remplace le nom de Quinault: je n'ai pas trouvé de -trace de ce carton dans l'exemplaire que je possède.</p> - -<p><a id="Footnote_696" href="#FNanchor_696" class="label">[696]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (27 novembre et 1<sup>er</sup> décembre 1675), t. IV, -p. 221, 227, édit G.</p> - -<p><a id="Footnote_697" href="#FNanchor_697" class="label">[697]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (27 novembre 1675), t. IV, p. 224, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_698" href="#FNanchor_698" class="label">[698]</a> <i>Histoire de la prison et de la liberté de M. le Prince</i>; Paris, -A. Courbé, 227 pages.—<span class="smallc">Moreau</span>, <i>Histoire des Mazarinades</i>, -t. II, p. 52, 144, 227; t. III, p. 23, 261.</p> - -<p><a id="Footnote_699" href="#FNanchor_699" class="label">[699]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> décembre 1675), t. IV, p. 228.</p> - -<p><a id="Footnote_700" href="#FNanchor_700" class="label">[700]</a> <i>Mémoires touchant la vie et les écrits de Marie de Rabutin-Chantal</i>, -1<sup>re</sup> partie, ch. <span class="smallc">VI</span>, p. 60, et 2<sup>e</sup> partie, p. 166.</p> - -<p><a id="Footnote_701" href="#FNanchor_701" class="label">[701]</a> <i>Ibid.</i>, 2<sup>e</sup> partie, p. 162.</p> - -<p><a id="Footnote_702" href="#FNanchor_702" class="label">[702]</a> <i>Mémoires sur Sévigné</i>, 4<sup>e</sup> partie, p. 381 et 382.</p> - -<p><a id="Footnote_703" href="#FNanchor_703" class="label">[703]</a> <i>Mémoires sur la vie et les écrits de Marie de Rabutin-Chantal</i>, -2<sup>e</sup> partie, p. 176-187, ch. <span class="smallc">XIV</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_704" href="#FNanchor_704" class="label">[704]</a> <span class="smallc">Griffet</span>, dans les <i>Mémoires de</i> <span class="smallc">Tarente</span>, p. <span class="smallc">VII</span> de la Préface.</p> - -<p><a id="Footnote_705" href="#FNanchor_705" class="label">[705]</a> <span class="smallc">Motteville</span>, <i>Mémoires</i>, t. XXXVIII, p. 239.—Prince <span class="smallc">de Tarente</span>, -<i>Mémoires</i>, p. 111.</p> - -<p><a id="Footnote_706" href="#FNanchor_706" class="label">[706]</a> <span class="smallc">Motteville</span>, <i>Mémoires</i>, t. LXVIII, pag. 239.—<i>Mémoires du -prince</i> <span class="smallc">de Tarente</span>, p. 74 et 104, et ci-dessus, p. 295 de ces <i>Mémoires -sur Sévigné</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_707" href="#FNanchor_707" class="label">[707]</a> <i>Mémoires du prince</i> <span class="smallc">de Tarente</span>, p. 86, 92, 94; et <i>Mémoires -sur Sévigné</i>, 1848, 4<sup>e</sup> partie, p. 85, chap. <span class="smallc">III</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_708" href="#FNanchor_708" class="label">[708]</a> <span class="smallc">Sismondi</span>, <i>Histoire des Français</i>, 1840, in-8<sup>o</sup>, t. XXIV, p. 260, -261, 316, 319, 341, 348; et <i>Vie du duc de Montausier</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_709" href="#FNanchor_709" class="label">[709]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 octobre 1675), t. IV, p. 149, édit. G.; -t. IV, p. 37, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_710" href="#FNanchor_710" class="label">[710]</a> Conférez <span class="smallc">Pierre Clément</span>, <i>Histoire de la vie et de l'administration -de Colbert</i>, 1846, in-8<sup>o</sup>, p. 371.—<span class="smallc">Depping</span>, <i>Correspondance -administrative sous le règne de Louis XIV</i>, 1850, in-4<sup>o</sup>. Lettres du -duc de Chaulnes à Colbert, 30 juin 1675, p. 546; de l'évêque de -Saint-Malo à Colbert, 28 août 1675, p. 550.</p> - -<p><a id="Footnote_711" href="#FNanchor_711" class="label">[711]</a> Conférez <i>Mémoires sur Sévigné</i>, 4<sup>e</sup> partie, in-12, p. 278-280, -chap. <span class="smallc">X</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_712" href="#FNanchor_712" class="label">[712]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (9 et 20 octobre 1675), p. 137, 138 et 165, édit. G.; -t. IV, p. 20 et 51, édit. M.—<i>Ibid.</i> (5 janvier 1676), t. IV, p. 297, -édit G.; t. IV, p. 169, édit. M.—<span class="smallc">Feuquières</span>, <i>Lettres</i> (17 juillet 1676), -t. IV, p. 44.—<span class="smallc">Bussy</span>, <i>Histoire amoureuse des Gaules, dans le Recueil -des histoires galantes</i>; Cologne, chez Pierre Marteau, p. 82, -86, et aux p. 494 à 522.</p> - -<p><a id="Footnote_713" href="#FNanchor_713" class="label">[713]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 janvier 1676), t. IV, p. 297, édit. G.—<span class="smallc">Bussy</span>, -<i>Lettres</i> (19 octobre), dans <span class="smallc">Sévigné</span>, t. IV, p. 145, édit. G.; -t. IV, p. 30, édit. M.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 novembre 1675), t. IV, -p. 206, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_714" href="#FNanchor_714" class="label">[714]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 novembre 1675), t. IV, p. 206, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_715" href="#FNanchor_715" class="label">[715]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (12 juin 1675), t. III, p. 415, édit. G.; t. III, -p. 293, édit. M.—Sur <i>Vassé</i>, conférez ces <i>Mémoires</i>, 2<sup>e</sup> édition, -t. I, p. 263, 267, 275; et, dans <span class="smallc">Tallemant</span>, les <i>Historiettes de -la présidente</i> <span class="smallc">Lescaloppier</span>, et l'<i>Historiette de</i> <span class="smallc">Vassé</span>, t. IV, -p. 19, 25, 28 de l'édit. in-8<sup>o</sup>; t. VI, p. 175, 176, 181-188 de l'édition -in-12.</p> - -<p><a id="Footnote_716" href="#FNanchor_716" class="label">[716]</a> Voyez ci-dessus, p. <a href="#Page_260">260</a>.</p> - -<p><a id="Footnote_717" href="#FNanchor_717" class="label">[717]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 septembre, 9 octobre 1675), t. III, p. 471, -édit. M.; t. IV, p. 30, édit. G.—<i>Ibid.</i> (30 novembre 1670), t. V, -p. 68; et dans ces <i>Mémoires</i>, 2<sup>e</sup> édit., t. I, p. 337.</p> - -<p><a id="Footnote_718" href="#FNanchor_718" class="label">[718]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 octobre 1675), t. IV, p. 149, édit. G.; -t. IV, p. 36, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_719" href="#FNanchor_719" class="label">[719]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 novembre 1675), t. IV, p. 93, édit. M.—<i>Ibid.</i> -(5 août 1675), t. IV, p. 421, édit. M.—<i>Ibid.</i> (3 septembre -1677), t. V, p. 217, édit. M.—Voy. <i>Mémoires de</i> <span class="smallc">Dangeau</span>, <i>abrégé -de madame</i> <span class="smallc">de Genlis</span>, t. I, p. 343, état sous la date du 6 juillet -1690: Cet état n'est pas dans l'édit. de Paul Lacroix de 1830, t. I, -p. 318.</p> - -<p><a id="Footnote_720" href="#FNanchor_720" class="label">[720]</a> <span class="smallc">Depping</span>, <i>Correspondance administrative sous le règne de -Louis XIV</i>, in-4<sup>o</sup>, 1850, p. 546-551. (Lettre du duc de Chaulnes à -Colbert, datée de Rennes, le 30 juin 1675, et l'extrait de celle du -12 juin; puis la lettre de l'évêque de Saint-Malo à Colbert, en date -du 28 août 1675).—<span class="smallc">P. Clément</span>, <i>Vie de Colbert</i>, in-8<sup>o</sup>, 1846, p. 370 -(extrait d'une lettre du duc de Chaulnes à Colbert, du 12 juin 1675).</p> - -<p><a id="Footnote_721" href="#FNanchor_721" class="label">[721]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (16 octobre 1675), t. IV, p. 158, édit. G.; t. IV, -p. 44, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_722" href="#FNanchor_722" class="label">[722]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 octobre 1675), t. IV, p. 164-166, édit. G.; -t. IV, p. 48 et 52, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_723" href="#FNanchor_723" class="label">[723]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (27 octobre 1675), t. IV, p. 174, édit. G.; t. IV, -p. 50, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_724" href="#FNanchor_724" class="label">[724]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (30 octobre 1675), t. IV, p. 178-180, édit. G.; -t. IV, p. 63-64, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_725" href="#FNanchor_725" class="label">[725]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (3 novembre 1675), t. IV, p. 184, édit. G.; -t. IV, p. 67, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_726" href="#FNanchor_726" class="label">[726]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 novembre 1675), t. IV, p. 204, édit. G.; -t. IV, p. 85, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_727" href="#FNanchor_727" class="label">[727]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 novembre 1675), t. IV, p. 205, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_728" href="#FNanchor_728" class="label">[728]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 novembre 1675), t. IV, p. 219, édit. G.; -t. IV, p. 99, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_729" href="#FNanchor_729" class="label">[729]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 décembre 1675), t. IV, p. 240, édit. G.; -t. IV, p. 117, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_730" href="#FNanchor_730" class="label">[730]</a> Auguste-Robert de Pommereuil fut en 1676 prévôt des marchands -et en 1689 envoyé intendant en Bretagne. Il mourut en 1702.</p> - -<p><a id="Footnote_731" href="#FNanchor_731" class="label">[731]</a> <span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mémoires complets et authentiques</i>, 1829, in-8<sup>o</sup>, -t. I<sup>er</sup>, p. 451, ch. <span class="smallc">XXXIX</span>; t. II, p. 331, ch. <span class="smallc">XXI</span>. Le vrai nom est Pommereuil, -mais on prononçait Pommereu, et c'est ainsi que Saint-Simon -écrit ce nom.</p> - -<p><a id="Footnote_732" href="#FNanchor_732" class="label">[732]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 décembre 1675), t. IV, p. 241, édit. G.; -t. IV, p. 118, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_733" href="#FNanchor_733" class="label">[733]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (22 décembre 1675) t. IV, p. 263, édit. G.; -t. IV, p. 127, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_734" href="#FNanchor_734" class="label">[734]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (7 septembre 1689), t. IX, p. 448, édit. G; -t. IX, p. 103, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_735" href="#FNanchor_735" class="label">[735]</a> <i>Registres mss. de la tenue des états de Bretagne</i> (Bl.-M., 75), -p. 379 recto.</p> - -<p><a id="Footnote_736" href="#FNanchor_736" class="label">[736]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (14 septembre 1689), t. IX, p. 458 et 459, -édit. G.; t. IX, p. 112, édit. M.—<i>Mémoires de</i> <span class="smallc">Coulanges</span>, 1820, -in-8<sup>o</sup>, p. 2.</p> - -<p><a id="Footnote_737" href="#FNanchor_737" class="label">[737]</a> <i>Abrégé des délibérations de l'assemblée générale des communautés -de Provence</i>; à Aix, chez Charles David, 1675, in-4<sup>o</sup>, -61 pages.</p> - -<p><a id="Footnote_738" href="#FNanchor_738" class="label">[738]</a> <i>Abrégé des délibérations</i>, etc.; Aix, 1675, in-4<sup>o</sup>, p. 18 et 20.</p> - -<p><a id="Footnote_739" href="#FNanchor_739" class="label">[739]</a> <i>Ibid.</i>, p. 25.</p> - -<p><a id="Footnote_740" href="#FNanchor_740" class="label">[740]</a> <i>Ibid.</i>, p. 16.</p> - -<p><a id="Footnote_741" href="#FNanchor_741" class="label">[741]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 décembre 1673), t. III, p. 281, 282, -édit. G.; t. III, p. 188, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_742" href="#FNanchor_742" class="label">[742]</a> <i>Abrégé des délibérations</i>, etc., p. 10 et 14.</p> - -<p><a id="Footnote_743" href="#FNanchor_743" class="label">[743]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> et 11 décembre 1675), t. IV, p. 226 et 241, -édit. G.; t. IV, p. 103 et 245, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_744" href="#FNanchor_744" class="label">[744]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> janvier 1676), t. IV, p. 283.</p> - -<p><a id="Footnote_745" href="#FNanchor_745" class="label">[745]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 novembre 1675), t. IV, p. 187, éd. G.; t. IV, -p. 70, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_746" href="#FNanchor_746" class="label">[746]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 décembre 1675), t. IV, p. 245, édit. G.; -t. IV, p. 121, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_747" href="#FNanchor_747" class="label">[747]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 août 1671), t. II, p. 196 et 406, édit. G.; -t. II, p. 161-393 et 421, édit. M.—<i>Ibid.</i> (4 septembre 1675), t. IV, -p. 82, édit. G.; t. III, p. 453, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_748" href="#FNanchor_748" class="label">[748]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 décembre 1673), t. III, p. 255, 256, édit. G.; -t. III, p. 165, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_749" href="#FNanchor_749" class="label">[749]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 janvier 1676), t. IV, p. 314, édit. G.; t. IV, -p. 185, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_750" href="#FNanchor_750" class="label">[750]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (29 septembre 1675), t. IV, p. 117, éd. G.; t. IV, -p. 9, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_751" href="#FNanchor_751" class="label">[751]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (27 octobre 1675), t. IV, p. 175, éd. G.; t. IV, -p. 60, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_752" href="#FNanchor_752" class="label">[752]</a> Conférez ces <i>Mémoires sur Sévigné</i>, 4<sup>e</sup> partie, p. 259, ch. <span class="smallc">IX</span>, -et p. 362 et 363.</p> - -<p><a id="Footnote_753" href="#FNanchor_753" class="label">[753]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 janvier 1676), t. IV, p. 298, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_754" href="#FNanchor_754" class="label">[754]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (15 décembre 1675), t. IV, p. 253, édit. G.; -t. IV, p. 127, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_755" href="#FNanchor_755" class="label">[755]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (23 février 1676), t. IV, p. 348, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_756" href="#FNanchor_756" class="label">[756]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 juin 1671), t. II, p. 95 et 96, édit. M.; -t. II, p. 115, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_757" href="#FNanchor_757" class="label">[757]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (26 juillet 1671), t. II, p. 157, édit. G.; t. II, -p. 130, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_758" href="#FNanchor_758" class="label">[758]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (31 mai et 10 juin 1671), t. II, p. 86, 91 et 95, -édit. G.; t. II, p. 72, 76, 77, 80.—<i>Ibid.</i> (29 septembre 1675), -t, IV, p. 116, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_759" href="#FNanchor_759" class="label">[759]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 et 25 décembre 1675), t. IV, p. 237, 238 et -271, édit. G.—<i>Ibid.</i> (1<sup>er</sup> janvier 1676), p. 287, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_760" href="#FNanchor_760" class="label">[760]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (21 juin 1671), t. II, p. 104, édit. G.; t. II, -p. 86, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_761" href="#FNanchor_761" class="label">[761]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 juillet 1671), t. II, p. 142, édit. G.—<i>Ibid.</i> -(19 juillet 1671), t. II, p. 147, édit. G.; t. II, p. 122, édit. M.—<i>Ibid.</i> -(15 décembre 1675) t. IV, p. 256.—<i>Ibid.</i> (12 juillet 1671), t. II, -p. 142, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_762" href="#FNanchor_762" class="label">[762]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (16 octobre 1680), t. VI, p. 148, édit. G.; t. VII, -p. 25, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_763" href="#FNanchor_763" class="label">[763]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 octobre 1675), t. IV, p. 148, édit. G.; t. IV, -p. 36, édit. M.—<i>Ibid.</i> (8 décembre 1675), t. IV, p. 115, édit. M.; -t. IV, p. 338, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_764" href="#FNanchor_764" class="label">[764]</a> Conférez <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (31 mai 1680), t. VI, p. 295, édit. M.; -t. VII, p. 8, édit. G.—<i>Ibid.</i> (5 juin 1680), t. VI, p. 301, édit. M.; -t. VII, p. 20, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_765" href="#FNanchor_765" class="label">[765]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (21 juin 1680), t. VII, p. 66, édit. G.; t. VI, -p. 340, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_766" href="#FNanchor_766" class="label">[766]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (9 octobre 1675), t. IV, p. 135, édit. G.; t. IV, -p. 25, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_767" href="#FNanchor_767" class="label">[767]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (16 octobre 1675), t. IV, p. 156, éd. G.; t. IV, -p. 43, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_768" href="#FNanchor_768" class="label">[768]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (16 et 23 octobre), t. IV, p. 158 et 169-171, -édit. G.; t. IV, p. 43 et 54-57, édit. M.</p> - -<p><a id="Footnote_769" href="#FNanchor_769" class="label">[769]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> mars 1676), t. IV, p. 353, édit. G.; t. IV, -p. 219, 220.</p> - -<p><a id="Footnote_770" href="#FNanchor_770" class="label">[770]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (21 août 1675), t. IV, p. 42-43.—<i>Ibid.</i> (8 mars -1676), t. IV, p. 358, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_771" href="#FNanchor_771" class="label">[771]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (25 décembre 1675), t. IV, p. 274, édit. G.—<i>Alliance -des arts, Catalogue des archives de la maison de Grignan</i>, -1844, in-8<sup>o</sup>, p. 33 (1677, mars 3).</p> - -<p><a id="Footnote_772" href="#FNanchor_772" class="label">[772]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (31 juillet 1673), t. III, p. 256, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_773" href="#FNanchor_773" class="label">[773]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (31 juillet 1675), t. III, p. 479, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_774" href="#FNanchor_774" class="label">[774]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 novembre 1675), t. IV, p. 207 et 208, -édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_775" href="#FNanchor_775" class="label">[775]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 décembre et 5 janvier 1676), t. IV, p. 287, -296, 297, édit. G.—<i>Ibid.</i> (24 juillet 1680), t. VII, p. 128, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_776" href="#FNanchor_776" class="label">[776]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 novembre et 25 décembre 1675), t. II, p. 214 -et 273, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_777" href="#FNanchor_777" class="label">[777]</a> <i>Mémoires et lettres de</i> <span class="smallc">Feuquières</span>, t. II, p. 429.</p> - -<p><a id="Footnote_778" href="#FNanchor_778" class="label">[778]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 mai 1689), t. X, p. 298, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_779" href="#FNanchor_779" class="label">[779]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 novembre 1675), t. IV, p. 207, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_780" href="#FNanchor_780" class="label">[780]</a> <span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mémoires authentiques</i>, 1829, in-8<sup>o</sup>, t. II, p. 114.—<span class="smallc">Gourville</span>, -<i>Mémoires</i>, t. XLII, p. 294; t. XLI, p. 190, 280-288.—<i>Mémoires -sur Sévigné</i>, part. I, p. 256, ch. <span class="smallc">XVII</span>, et part. IV, -p. 132, ch. <span class="smallc">VII</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_781" href="#FNanchor_781" class="label">[781]</a> <i>Supplément aux Mémoires de</i> <span class="smallc">Dangeau</span>, cité par Monmerqué, -<i>Biographie universelle</i>, article <i>Villars</i>, t. XLVIII, p. 423.</p> - -<p><a id="Footnote_782" href="#FNanchor_782" class="label">[782]</a> Madame <span class="smallc">de Villars</span>, <i>Lettres</i>, 1800, in-12, t. I, p. 9-196.</p> - -<p><a id="Footnote_783" href="#FNanchor_783" class="label">[783]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 juillet 1671; 6, 9 et 13 octobre 1675), -t. II, p. 140 et 438, et t. IV, p. 132 et 142, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_784" href="#FNanchor_784" class="label">[784]</a> Duc <span class="smallc">de Villars</span>, <i>Mémoires</i>, p. 34-36.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (5 septembre -1674), t. IV, p. 353, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_785" href="#FNanchor_785" class="label">[785]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> décembre 1675), t. IV, p. 525 et 526.—<i>Ibid.</i> -(3 juillet 1680), p. 85 et 86.</p> - -<p><a id="Footnote_786" href="#FNanchor_786" class="label">[786]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (9 octobre et 8 décembre 1675), t. IV, p. 137 -et 257, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_787" href="#FNanchor_787" class="label">[787]</a> <i>Mémoires sur Sévigné</i>, part. IV, p. 286, ch. <span class="smallc">X</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_788" href="#FNanchor_788" class="label">[788]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (30 mars 1672), t. II, p. 438, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_789" href="#FNanchor_789" class="label">[789]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 octobre 1675), t. IV, p. 132, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_790" href="#FNanchor_790" class="label">[790]</a> <span class="smallc">De Villars</span>, <i>Mémoires</i>, édit. 1734, in-12, p. 7.</p> - -<p><a id="Footnote_791" href="#FNanchor_791" class="label">[791]</a> <span class="smallc">Duc de Villars</span>, <i>Mémoires</i>; la Haye, chez Pierre Gosse, 1734, -in-12, p. 1, 16, 38 (années 1670-1672), et p. 23, 38, 52 (années -1673-1675), t. LXVIII de la collection Petitot.</p> - -<p><a id="Footnote_792" href="#FNanchor_792" class="label">[792]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 janvier 1676), t. IV, p. 303, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_793" href="#FNanchor_793" class="label">[793]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (3 juillet 1680), t. VII. p. 85 et 86, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_794" href="#FNanchor_794" class="label">[794]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 novembre 1675), t. IV, p. 207, édit. G.—<i>Mémoires -sur Sévigné</i>, 4<sup>e</sup> part., p. 133.</p> - -<p><a id="Footnote_795" href="#FNanchor_795" class="label">[795]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (3 juillet 1677), t. V, p. 268, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_796" href="#FNanchor_796" class="label">[796]</a> <span class="smallc">Saint-Simon</span>, <i>Mémoires</i> (1694), t. I, p. 350, 440 et 441; t. II, -p. 287. «Elle était, dit Saint-Simon, fille du cadet de Blainville.»</p> - -<p><a id="Footnote_797" href="#FNanchor_797" class="label">[797]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 octobre 1675), t. IV, p. 132, édit. G.—<i>Mémoires -sur madame de Sévigné</i>, 4<sup>e</sup> partie, p. 133.</p> - -<p><a id="Footnote_798" href="#FNanchor_798" class="label">[798]</a> <span class="smallc">Maintenon</span>, <i>Lettres au cardinal de Noailles</i> (mars 1700).—<span class="smallc">Sévigné</span>, -<i>Lettres</i> (24 février 1680), t. III, p. 396, édit. G.—<i>Ibid.</i> -(17 juillet 1671), t. II, p. 141, édit. G.—<i>Ibid.</i> (6 avril 1696, de -madame <span class="smallc">de Coulanges</span>), t. X, p. 296, édit G.—<i>Ibid.</i> (16 octobre -1675), t. IV, p. 160, édit. G.—<i>Ibid.</i> (12 janvier 1676), t. IV, p. 311, -édit. G.—<i>Ibid.</i> (26 août 1676), t. V, p. 90, édit. G.—<i>Ibid.</i> (24 février -1680), t. VI, p. 396, édit G.—<i>Ibid.</i> (22 mai 1674), t. III, -p. 238, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_799" href="#FNanchor_799" class="label">[799]</a> Sur Frontenac, conférez ces <i>Mémoires sur Sévigné</i>, 1<sup>re</sup> partie, -p. 339, 359, 409; 2<sup>e</sup>, p. 29, 441, 454; 4<sup>e</sup>, p. 132.</p> - -<p><a id="Footnote_800" href="#FNanchor_800" class="label">[800]</a> Conférez les <i>Notes et éclaircissements</i>, à la fin de ce volume.</p> - -<p><a id="Footnote_801" href="#FNanchor_801" class="label">[801]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 mars 1696), t. XI, p. 290, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_802" href="#FNanchor_802" class="label">[802]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (22 décembre 1688), t. IX, p. 46 et 47, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_803" href="#FNanchor_803" class="label">[803]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 novembre et 11 décembre 1675), t. IV, -p. 200 et 240, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_804" href="#FNanchor_804" class="label">[804]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 août 1675), t. IV, p. 16.—<i>Ibid.</i> (1<sup>er</sup> janvier -1676), t, IV, p. 184, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_805" href="#FNanchor_805" class="label">[805]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (29 décembre 1675), t. IV, p. 279, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_806" href="#FNanchor_806" class="label">[806]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (4 décembre 1675), t. IV, p. 229, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_807" href="#FNanchor_807" class="label">[807]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> janvier 1676), t. IV, p. 284, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_808" href="#FNanchor_808" class="label">[808]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (29 décembre 1675), t. IV, p. 279, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_809" href="#FNanchor_809" class="label">[809]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (23 octobre 1689), t. IX, p. 172, édit. M.; -t. X, p. 48, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_810" href="#FNanchor_810" class="label">[810]</a> Après la mort de son père, qui eut lieu en 1672, et de son grand-père, -en 1674, le prince de Tarente, majeur, présida les états de -Bretagne à Saint-Brieuc en 1677 (20 août, 9 octobre), à Nantes (1681, -19 août, 18 février), à Dinan (1687, 1<sup>er</sup> août et 23 août), à Saint-Brieuc -(1687, 1<sup>er</sup> et 30 octobre), à Rennes (1689, 20 octobre, 13 novembre), -à Vitré (1697, 16 octobre, 16 novembre), à Nantes (1701, -30 juillet, 23 avril). <i>Registre ms. de la tenue des états de Bretagne, -Bibl.</i> nat., p. 385, 407, 433, 437 et 535.</p> - -<p><a id="Footnote_811" href="#FNanchor_811" class="label">[811]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 mai 1673), t. III, p. 153, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_812" href="#FNanchor_812" class="label">[812]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> janvier 1676), t. IV, p. 286, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_813" href="#FNanchor_813" class="label">[813]</a> Conférez <i>Mémoires sur Sévigné</i>, part. IV, p. 211, 277 et 356; -ch. <span class="smallc">VIII</span> et <span class="smallc">X</span>, et les notes.</p> - -<p><a id="Footnote_814" href="#FNanchor_814" class="label">[814]</a> <i>Mémoires sur Sévigné</i>, 4<sup>e</sup> partie, p. 198.—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> -(17 février 1672), t. II, p. 391, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_815" href="#FNanchor_815" class="label">[815]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (3 et 7 juillet 1677), t. V, p. 269 et 270, -édit. M.—<i>Ibid.</i> (26 juillet 1677), t. V, p. 305, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_816" href="#FNanchor_816" class="label">[816]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (7 et 19 juillet 1677), t. V, p. 270 et 294, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_817" href="#FNanchor_817" class="label">[817]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 juillet 1677), t. V, p. 294, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_818" href="#FNanchor_818" class="label">[818]</a> Conférez ces <i>Mémoires sur Sévigné</i>, I, 3, 86; III, 23; IV, 102.</p> - -<p><a id="Footnote_819" href="#FNanchor_819" class="label">[819]</a> Sur Marie de Hautefort, conférez ces <i>Mémoires sur Sévigné</i>, -I, 229, 471; III, 134.</p> - -<p><a id="Footnote_820" href="#FNanchor_820" class="label">[820]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (21 et 23 juillet 1677), t. V, p. 293 et 303, éd. G.</p> - -<p><a id="Footnote_821" href="#FNanchor_821" class="label">[821]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 octobre 1679), t. VI, p. 151, édit. G.; et <span class="smallc">Maintenon</span>, -<i>Lettres</i>, 28 février (1678), t. I, p. 154, édit. 1756, in-8<sup>o</sup>.</p> - -<p><a id="Footnote_822" href="#FNanchor_822" class="label">[822]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 août 1675), t. IV, p. 16, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_823" href="#FNanchor_823" class="label">[823]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (21 juillet 1677), t. V, p. 297, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_824" href="#FNanchor_824" class="label">[824]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 juillet 1677), t. V, p. 139, édit. M.; t. V, p. 295, -édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_825" href="#FNanchor_825" class="label">[825]</a> Conférez <i>Mémoires sur Sévigné</i>, t. IV, p. 349, dans les notes et -éclaircissements du chap. <span class="smallc">VII</span>, et p. 190 du texte.</p> - -<p><a id="Footnote_826" href="#FNanchor_826" class="label">[826]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (26 juillet 1677), t. V, p. 304-306, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_827" href="#FNanchor_827" class="label">[827]</a> Conférer ces <i>Mém. sur Sévigné</i>, t. I, p. 3, 86; t. III, p. 23, 250, -395, 473; t. IV, 8, 198, 266, 286.</p> - -<p><a id="Footnote_828" href="#FNanchor_828" class="label">[828]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (26 juillet 1677), t. V, p. 306, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_829" href="#FNanchor_829" class="label">[829]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (13 août 1677), t. V, p. 346, édit. G.; t. V, -p. 185, édit. M.—<i>Ibid.</i> (6 octobre 1679), t. VI, p. 151-152, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_830" href="#FNanchor_830" class="label">[830]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (3 et 24 juillet 1680), t. VII, p. 95-129, édit. G. -Conférez ces <i>Mém. sur Sévigné</i>, t. IV, p. 127.</p> - -<p><a id="Footnote_831" href="#FNanchor_831" class="label">[831]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (18 août 1680), t. VII, p. 168, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_832" href="#FNanchor_832" class="label">[832]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (18 octobre 1679), t. VI, p. 160, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_833" href="#FNanchor_833" class="label">[833]</a> Voyez la Lettre inédite de <span class="smallc">Sévigné</span> <i>à madame de Grignan, sa -sœur, sur les affaires de leur maison</i>, publiée par M. Monmerqué; -Paris, Dondey-Dupré, 1847, in-8<sup>o</sup> (24 pages).</p> - -<p><a id="Footnote_834" href="#FNanchor_834" class="label">[834]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 décembre 1675), t. IV, p. 242, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_835" href="#FNanchor_835" class="label">[835]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 novembre et 11 décembre 1675), t. IV, -p. 216, 239, 242, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_836" href="#FNanchor_836" class="label">[836]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (29 décembre 1675), t. IV, p. 278, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_837" href="#FNanchor_837" class="label">[837]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (11 décembre 1675), t. IV, p. 245, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_838" href="#FNanchor_838" class="label">[838]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 novembre 1675), t. IV, p. 215, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_839" href="#FNanchor_839" class="label">[839]</a></p> - -<p>/* -Car que faire en un gîte, à moins que l'on ne songe?</p> - -<p><span class="smallc">La Fontaine</span>, <i>le Lièvre et les Grenouilles</i>, II, 14. -*/ -</p> - -<p><a id="Footnote_840" href="#FNanchor_840" class="label">[840]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (12 janvier 1676), t. IV, p. 308 et 309, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_841" href="#FNanchor_841" class="label">[841]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (15 décembre 1675), t. IV, p. 250, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_842" href="#FNanchor_842" class="label">[842]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (17 novembre 1675), t. IV, p. 299-10, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_843" href="#FNanchor_843" class="label">[843]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (1<sup>er</sup> décembre 1675), t. IV, p. 225, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_844" href="#FNanchor_844" class="label">[844]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (12 janvier 1676), t. IV, p. 309, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_845" href="#FNanchor_845" class="label">[845]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (7 août 1675), t. III, p. 503, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_846" href="#FNanchor_846" class="label">[846]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (21 janvier 1676), t. IV, p. 321, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_847" href="#FNanchor_847" class="label">[847]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (14 décembre 1675), t. IV, p. 248, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_848" href="#FNanchor_848" class="label">[848]</a> <i>Suite des Mémoires du comte</i> <span class="smallc">de Bussy-Rabutin</span>, ms. de l'Institut, -p. 157.—<span class="smallc">Pellisson</span>, <i>Lettres historiques</i> (8 et 10 octobre 1675), -t. II, p. 423, 424.</p> - -<p><a id="Footnote_849" href="#FNanchor_849" class="label">[849]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettr.</i> (21, 27, 29 janv. 1676), t. IV, p. 321, 323, 326, éd. G.</p> - -<p><a id="Footnote_850" href="#FNanchor_850" class="label">[850]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (20 février, 14 et 15 mars 1675), t. IV, p. 351, -367, 370, édit. G. Conférez aussi la <i>Vie de la Fontaine</i>, et <span class="smallc">Sévigné</span>, -<i>Lettres</i> (18 mars 1676), t. IV, p. 371, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_851" href="#FNanchor_851" class="label">[851]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (27 janvier 1676), t. IV, p. 323, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_852" href="#FNanchor_852" class="label">[852]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i>, (8, 11, 14 et 18 mars 1676), t. IV, p. 359, 363, 365.</p> - -<p><a id="Footnote_853" href="#FNanchor_853" class="label">[853]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (18 mars 1676), t. IV, p. 310-11; et conférez t. I, -p. 184-187; t. III, p. 195, édit. G.—<span class="smallc">Choisy</span>, <i>Mémoires</i>, t. LXIII, p. 418.</p> - -<p><a id="Footnote_854" href="#FNanchor_854" class="label">[854]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 mars 1676), t. IV, p. 379, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_855" href="#FNanchor_855" class="label">[855]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (22 mars 1676), t. IV, p. 373, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_856" href="#FNanchor_856" class="label">[856]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (24 mars 1676), t. IV, p. 377, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_857" href="#FNanchor_857" class="label">[857]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 avril 1676), t. IV, p. 383, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_858" href="#FNanchor_858" class="label">[858]</a> Conférez <i>Mém. sur madame</i> <span class="smallc">de Sévigné</span>, IV<sup>e</sup> part., p. 3, ch. <span class="smallc">I</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_859" href="#FNanchor_859" class="label">[859]</a> <span class="smallc">De Coulanges</span>, <i>Chansons</i>, ms. aut. de la Bibl. nat., p. 66 verso. -Dans la protestation contre le pape Innocent XI (Paris, 1688, in-18, -p. 3), Lavardin se nomme lui-même Henri-Charles, sire de Beaumanoir, -marquis de Lavardin.</p> - -<p><a id="Footnote_860" href="#FNanchor_860" class="label">[860]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 et 10 novembre 1675), t. IV, p. 194-196.—<i>Ibid.</i> -(1<sup>er</sup> janvier 1676), t. IV, p. 285, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_861" href="#FNanchor_861" class="label">[861]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 mars 1676), t. IV, p. 378 et 380, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_862" href="#FNanchor_862" class="label">[862]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (9 septembre 1675), t. IV, p. 87.—<i>Ibid.</i> -(8 avril 1676), t. IV, p. 383, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_863" href="#FNanchor_863" class="label">[863]</a> Sur le duc de Lorraine, conférez les <i>Mémoires sur Sévigné</i>, -1<sup>re</sup> part., p. 347, 359, 401, 404, 405, 413, 418, 432, 441; 2<sup>e</sup> part., -p. 191, 394, 440, 441; 3<sup>e</sup> part., p. 200.</p> - -<p><a id="Footnote_864" href="#FNanchor_864" class="label">[864]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (28 mars 1676), t. IV, p. 380, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_865" href="#FNanchor_865" class="label">[865]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (6 novembre 1675), t. IV, p. 190, édit. G.—<span class="smallc">Boileau</span>, -<i>Œuvres</i>, lettre au maréchal de Vivonne, t. IV, p. 17-21.</p> - -<p><a id="Footnote_866" href="#FNanchor_866" class="label">[866]</a> <span class="smallc">Pellisson</span>, <i>Lettres historiques</i> (22, 23, 24 et 27 avril 1676, au -camp devant Condé), t. III, p. 2-28.</p> - -<p><a id="Footnote_867" href="#FNanchor_867" class="label">[867]</a> <span class="smallc">Pellisson</span>, <i>Lettres historiques</i> (23 septembre 1675), p. 415.—<span class="smallc">Sévigné</span>, -<i>Lettres</i> (29 septembre 1675), t. IV, p. 118, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_868" href="#FNanchor_868" class="label">[868]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (15 octobre 1675), t. IV, p. 151, édit. G.—<span class="smallc">Pavillon</span>, -<i>Œuvres</i>, 1715 et 1720, in-12.</p> - -<p><a id="Footnote_869" href="#FNanchor_869" class="label">[869]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (4 septembre 1675), t. IV, p. 77, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_870" href="#FNanchor_870" class="label">[870]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (29 septembre 1675), t. IV, p. 119, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_871" href="#FNanchor_871" class="label">[871]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 février 1672), t. II, p. 394.—<i>Ibid.</i> (6 avril -1672), t. II, p. 451, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_872" href="#FNanchor_872" class="label">[872]</a> <span class="smallc">De Coulanges</span>, <i>Mémoires</i> (1820, édit. in-12).—<span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> -(15 mai 1691), t. X, p. 378, 379, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_873" href="#FNanchor_873" class="label">[873]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 avril 1676), t. IV, p. 382.—<i>Ibid.</i> (1<sup>er</sup> novembre -1671), t. II, p. 2-8.—<i>Ibid.</i> (7 août 1675), t. III, p. 500, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_874" href="#FNanchor_874" class="label">[874]</a> Conférez 3<sup>e</sup> part. de ces <i>Mémoires</i>, p. 291, chap. <span class="smallc">I</span>, 1<sup>re</sup> part.; -p. 249, chap. <span class="smallc">IX</span>.</p> - -<p><a id="Footnote_875" href="#FNanchor_875" class="label">[875]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 avril 1676), t. IV, p. 382, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_876" href="#FNanchor_876" class="label">[876]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (8 avril 1676), t. IV, p. 388, édit. G.</p> - -<p><a id="Footnote_877" href="#FNanchor_877" class="label">[877]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (19 juillet 1677), t. V, p. 291.—<i>Ibid.</i> (18 août -1680), t. VII, p. 164, 165, édit G.</p> - -<p><a id="Footnote_878" href="#FNanchor_878" class="label">[878]</a> <i>Mauvaise foy ou violences de la France</i>, avec une exhortation -sincère au peuple des Pays-Bas sur leur constance; Villefranche, -Jean Petit, 1677, in-18 (29 pages), pages 35, 37, 39, 41, 46, 47.</p> - -<p><a id="Footnote_879" href="#FNanchor_879" class="label">[879]</a> Conférez la 1<sup>re</sup> partie de ces <i>Mémoires sur Sévigné</i>, 2<sup>e</sup> édit., -p. 236, 249.—<i>Hist. de la vie et des ouvrages (de) la Fontaine</i>, -3<sup>e</sup> édit., p. 440.</p> - -<p><a id="Footnote_880" href="#FNanchor_880" class="label">[880]</a> T. II, p. 10.</p> - -<p><a id="Footnote_881" href="#FNanchor_881" class="label">[881]</a> En 1652.</p> - -<p><a id="Footnote_882" href="#FNanchor_882" class="label">[882]</a> <span class="smallc">Pellisson</span>, <i>Histoire de l'Académie française</i>, 1729, in-4<sup>o</sup>, p. 176 et 276.</p> - -<p><a id="Footnote_883" href="#FNanchor_883" class="label">[883]</a> <i>Ménagiana</i>, t. I, p. 2.</p> - -<p><a id="Footnote_884" href="#FNanchor_884" class="label">[884]</a> <span class="smallc">Huetii</span>,<i>Commentarius de rebus ad eum pertinentibus</i>, p. 186.</p> - -<p><a id="Footnote_885" href="#FNanchor_885" class="label">[885]</a> <i>Ménagiana</i>, t. I, p. 144.</p> - -<p><a id="Footnote_886" href="#FNanchor_886" class="label">[886]</a> <i>Ménagiana</i>, t. II, p. 8.</p> - -<p><a id="Footnote_887" href="#FNanchor_887" class="label">[887]</a> Les <i>Historiettes</i> de <span class="smallc">Tallemant des Réaux</span>, t. X, p. 70, édit. in-12; t. V, -p. 374-376, Juillet.—<i>Recherches sur Paris, quartier Saint-Antoine</i>, p. 35.</p> - -<p><a id="Footnote_888" href="#FNanchor_888" class="label">[888]</a> <span class="smallc">Félibien</span>, <i>Divertissements donnés par le roi à toute sa cour, au retour de -la conquête de Franche-Comté en l'année 1674</i>, Paris, in-12 (114 pages).</p> - -<p><a id="Footnote_889" href="#FNanchor_889" class="label">[889]</a> <span class="smallc">Félibien</span>, <i>Description du château de Versailles</i>, 1674, in-12 (102 pages). -Ce volume est accompagné d'un petit plan du parc et du château de Versailles, -qui, par son échelle, offre une comparaison facile avec le joli plan gravé, un -siècle après, pour l'almanach de Versailles, in-8<sup>o</sup>, 1789.</p> - -<p><a id="Footnote_890" href="#FNanchor_890" class="label">[890]</a> <span class="smallc">Félibien</span>, <i>Description de la grotte de Versailles</i>, 1674, in-12 (80 pages).</p> - -<p><a id="Footnote_891" href="#FNanchor_891" class="label">[891]</a> <i>Vie de Quinault</i>, dans l'édition de son <i>Théâtre</i>, 1715, t. I, p. 34.</p> - -<p><a id="Footnote_892" href="#FNanchor_892" class="label">[892]</a> Les frères <span class="smallc">Parfaict</span>, <i>Histoire du théâtre françois</i>, t. XI, p. 339.</p> - -<p><a id="Footnote_893" href="#FNanchor_893" class="label">[893]</a> <i>Iphigénie</i> de M. <span class="smallc">Racine</span>: Paris, 1674, in-12 (73 pages).</p> - -<p><a id="Footnote_894" href="#FNanchor_894" class="label">[894]</a> <i>Suréna, général des Parthes</i>, tragédie, Paris, Guillaume de Luynes, 1675, -in-12, acte III, scène <span class="smallc">I</span>, p. 31.</p> - -<p class="quote">Qu'un monarque est heureux, etc.</p> - -<p><a id="Footnote_895" href="#FNanchor_895" class="label">[895]</a> <i>Lettres de</i> <span class="smallc">Maintenon</span>; Nancy (Francfort), 1752, in-12, t. I, p. 76, 92, 123, -143, 145, 147, 150, 152, 156, 160, 163, 242, 249; t. II, p. 13, 110, 113, 118.—<i>Ibid.</i>, -édit. de Dresde, 1753, p. 81, 113, 128, 136, 153, etc.; édit. d'Amsterdam, 1755, p. 48-68; -édit. de Paris, 1806, p. 108 à 114.</p> - -<p><a id="Footnote_896" href="#FNanchor_896" class="label">[896]</a> Voyez l'Avertissement qui est en tête de l'édit. d'Amsterdam, 1755, grand -in-12, sorte de prospectus des quinze volumes de mémoires et lettres, qui ne se -trouve, je crois, que dans cette édition.</p> - -<p><a id="Footnote_897" href="#FNanchor_897" class="label">[897]</a> Voyez les dernières édit. des <i>Lettres</i> de Maintenon, de Léopold Collin.</p> - -<p><a id="Footnote_898" href="#FNanchor_898" class="label">[898]</a> <i>Lettres manuscrites de madame</i> <span class="smallc">de la Sablière</span> <i>à l'abbé de Rancé</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_899" href="#FNanchor_899" class="label">[899]</a> <i>Lettres de messire</i> <span class="smallc">Godetz</span>; Bruxelles, 1755.—<i>Lettres de Maintenon</i>, t. II.</p> - -<p><a id="Footnote_900" href="#FNanchor_900" class="label">[900]</a> <span class="smallc">Caylus</span>, <i>Souvenirs</i>, coll. des Mém. sur l'hist. de France, édit. 1828, t. LXVI, -p. 387, in-8<sup>o</sup>.—<i>Ibid.</i>, édit. de Renouard, 1806, in-12, p. 95. Mais dans ces deux -éditions, au lieu de <i>madame de Montausier</i>, il faut lire <i>M. de Montausier</i>. -Madame de Montausier était morte depuis longtemps.</p> - -<p><a id="Footnote_901" href="#FNanchor_901" class="label">[901]</a> Ou plutôt: <i>à de petits poissons qui regrettent leur bourbe</i>.</p> - -<p><a id="Footnote_902" href="#FNanchor_902" class="label">[902]</a> Ce long titre indique une réimpression. Un exemplaire de l'édition originale, -imprimé sur vélin, relié en maroquin rouge aux armes de Mortemart, et inscrit -sous le n<sup>o</sup> 1435 dans un catalogue de vente des bibliothèques du feu roi -Louis-Philippe, Paris, Potier, 1852, porte seulement pour titre <i>Œuvres diverses -d'un auteur de sept ans</i>. Cet exemplaire a été adjugé à la somme de 700 francs.</p> - -<p><a id="Footnote_903" href="#FNanchor_903" class="label">[903]</a> <i>Lettres de</i> <span class="smallc">Maintenon</span>, édit. 1756, in-12, t. III, p. 221: «Au reste, il faut tellement -sacrifier à Dieu le <i>moi</i>, qu'on ne le recherche plus, ni pour la réputation, -ni pour la consolation du témoignage qu'on se rend à soi-même sur ses bonnes -qualités ou sur ses bons sentiments. <i>Il faut mourir à tout sans réserve, et ne -posséder pas même sa vertu par rapport à soi.</i>»</p> - -<p><a id="Footnote_904" href="#FNanchor_904" class="label">[904]</a> Voyez la 1<sup>re</sup> partie de ces <i>Mémoires sur madame</i> <span class="smallc">de Sévigné</span>, 2<sup>e</sup> édit., -1843, p. 20 et 21. Dans l'édition de 1842, il y avait, par faute d'impression, <i>le</i> -1<sup>er</sup> <i>août</i>. Un auteur qui a écrit en 1849 un très-bon opuscule sur l'administration -de Louis XIV nous accuse, d'après cette erreur typographique depuis longtemps -corrigée lorsqu'il écrivait, d'avoir confondu les fiançailles avec les noces. -Il y a, ce nous semble, dans cette critique, plus que de la rigueur.</p> - -<p><a id="Footnote_905" href="#FNanchor_905" class="label">[905]</a> <span class="smallc">Sévigné</span>, <i>Lettres</i> (26 juillet 1668 et 27 février 1671), tome I, pag. 129 et 268, -édit. M.</p> - - </div> - </div> -</div> - - - - - - - - - -<pre> - - - - - -End of the Project Gutenberg EBook of Mémoires touchant la vie et les écrits -de Marie de Rabutin-Chantal, Volume 5 of 6, by Charles Athanase Walckenaer - -*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK MARIE DE RABUTIN-CHANTAL *** - -***** This file should be named 52428-h.htm or 52428-h.zip ***** -This and all associated files of various formats will be found in: - http://www.gutenberg.org/5/2/4/2/52428/ - -Produced by Clarity, Hélène de Mink, and the Online -Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This -file was produced from images generously made available -by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at -http://gallica.bnf.fr) - - -Updated editions will replace the previous one--the old editions will -be renamed. - -Creating the works from print editions not protected by U.S. copyright -law means that no one owns a United States copyright in these works, -so the Foundation (and you!) can copy and distribute it in the United -States without permission and without paying copyright -royalties. 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It -exists because of the efforts of hundreds of volunteers and donations -from people in all walks of life. - -Volunteers and financial support to provide volunteers with the -assistance they need are critical to reaching Project Gutenberg-tm's -goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will -remain freely available for generations to come. In 2001, the Project -Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure -and permanent future for Project Gutenberg-tm and future -generations. To learn more about the Project Gutenberg Literary -Archive Foundation and how your efforts and donations can help, see -Sections 3 and 4 and the Foundation information page at -www.gutenberg.org Section 3. Information about the Project Gutenberg -Literary Archive Foundation - -The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit -501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the -state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal -Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification -number is 64-6221541. Contributions to the Project Gutenberg Literary -Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by -U.S. federal laws and your state's laws. - -The Foundation's principal office is in Fairbanks, Alaska, with the -mailing address: PO Box 750175, Fairbanks, AK 99775, but its -volunteers and employees are scattered throughout numerous -locations. Its business office is located at 809 North 1500 West, Salt -Lake City, UT 84116, (801) 596-1887. Email contact links and up to -date contact information can be found at the Foundation's web site and -official page at www.gutenberg.org/contact - -For additional contact information: - - Dr. Gregory B. Newby - Chief Executive and Director - gbnewby@pglaf.org - -Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg -Literary Archive Foundation - -Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide -spread public support and donations to carry out its mission of -increasing the number of public domain and licensed works that can be -freely distributed in machine readable form accessible by the widest -array of equipment including outdated equipment. Many small donations -($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt -status with the IRS. - -The Foundation is committed to complying with the laws regulating -charities and charitable donations in all 50 states of the United -States. 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