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+*** START OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK 44242 ***
+
+Note de transcription:
+
+À l'exception des erreurs clairement introduites par le typographe,
+et des corrections suivantes, le texte d'origine est inchangé.
+
+ p. 13: «,» remplacée par «;» dans «; à une faible distance»,
+ p. 20: ajout d'un guillemet ouvrant devant la première note de bas
+ de page (numérotée 18 dans cette édition électronique).
+
+
+
+
+ NOTE
+ SUR L'INVASION DES SARRASINS
+ DANS LE LYONNAIS.
+
+
+ Lyon.--Typ. d'A. Vingtrinier.
+
+
+
+
+ NOTE
+ SUR L'INVASION DES SARRASINS
+ DANS LE LYONNAIS
+
+ PAR
+ AIMÉ VINGTRINIER
+
+
+ .... Au surplus, le fait de l'incendie se déduit
+ si naturellement de la présence des Sarrasins, constatée
+ par la nomenclature locale, que l'on pourrait
+ déjà se rendre à cette évidence lors même que la
+ légende latine ne nous y autoriserait pas. Tout
+ le pays est couvert de noms mauresques.
+
+ DÉSIRÉ MONNIER, _Annuaire du Jura_, 1842.
+
+
+ La tradition elle-même n'a recueilli que des
+ contes sur les conquêtes et les talents des Sarrasins.
+
+ CHAMBEYRON, _Recherches historiques
+ sur la ville de Rive-de-Gier_.
+
+
+ [Illustration]
+
+
+ LYON
+ IMPRIMERIE D'AIMÉ VINGTRINIER
+ Rue de la Belle-Cordière, 14.
+
+ 1862
+
+
+
+
+NOTE
+
+SUR L'INVASION DES SARRASINS
+
+DANS LE LYONNAIS.
+
+
+Un des évènements les plus graves de l'histoire de France, dont les
+conséquences ont failli changer non-seulement la face de notre pays,
+mais de la chrétienté tout entière, l'envahissement du pays des
+Visigoths et des Francs par les conquérants arabes a été si peu ou si
+mal décrit qu'on ne sait aujourd'hui où s'enquérir des détails de cette
+épopée, et que tout manque à l'investigation du savant.
+
+Un samedi de la fin d'octobre 732, dit M. Henri Martin, le 3 octobre
+732, disent quelques autres écrivains, Abdérame fut vaincu, dans les
+plaines de Poitiers, par le célèbre chef austrasien Charles-Martel; la
+déroute des Arabes fut affreuse; leur camp, rempli de richesses, fut
+pillé, et eux-mêmes eurent une peine infinie à regagner Narbonne ou à
+traverser les Pyrénées; pour ce premier fait, c'est à peu près tout.
+Arabes et chrétiens gardent sur cette défaite un prudent silence. Et
+cependant la France était sauvée, le christianisme restait possesseur
+du continent européen, et la fortune du Prophète avait reçu un échec
+dont la honte ne devait jamais s'effacer.
+
+On sait encore vaguement que Lyon, Mâcon, Autun furent pris et
+ravagés, que la ville d'Auxerre eut le même sort; que sa citadelle
+résista; enfin que l'archevêque de Sens repoussa et mit en fuite les
+envahisseurs; mais là aussi les dates précises et les détails nous
+font défaut. D'ailleurs le vaillant prélat n'eut-il affaire qu'à
+une troupe de fourrageurs traversant la France par l'Aquitaine et
+l'Orléanais avant le désastre de Poitiers, et venue, par hasard, se
+heurter aux murs de sa petite cité, comme l'avance M. Henri Martin[1],
+ou eut-il à repousser cette armée formidable d'Athim et d'Amorrhée[2],
+venue, quatre ans plus tard, par la vallée du Rhône, pour attaquer
+les Francs au centre de leur puissance, comme le soutiennent nos
+vieux chroniqueurs bourguignons? les Arabes, qui devaient atteindre
+bientôt à une si haute civilisation, vinrent-ils en conquérants ou en
+ravageurs? voulaient-ils piller ou coloniser? détruisirent-ils dès leur
+premier choc toutes les cités qu'ils trouvèrent sur leur passage ou
+ne s'attaquèrent-ils qu'aux biens du clergé? les avis sont partagés,
+ou plutôt l'histoire moderne n'a pas d'avis. Nul écrivain ne paraît
+attacher quelque importance à ces détails. Moins dédaigneux, nous
+allons essayer de nous prononcer, et dès l'abord nous ne cacherons
+point nos sympathies pour nos vieux chroniqueurs, et cela uniquement
+parce qu'ils habitaient le pays où ces terribles événements se sont
+passés.
+
+ [1] _Hist. de France_, tome 2.
+
+ [2] «L'émir Othman, l'_Adthima_ des chroniqueurs.... l'émir Omar,
+ l'_Amor_ de nos chroniqueurs.» (HENRI MARTIN, _Hist. de France_,
+ tom. 2; REINAUD, _Invasions des Sarrazins_).
+
+L'histoire écrite au fond d'une bibliothèque, avec l'aide de copistes
+et de collectionneurs qui cherchent des dates et vous préparent vos
+matériaux, pourra bien briller par un plan vaste, une philosophie
+sévère, un style magique et des qualités d'ensemble qui assurent la
+vogue à votre ouvrage et l'immortalité à votre nom; mais si les grands
+faits sont rapportés d'une manière satisfaisante, combien de détails
+vous échappent! combien d'erreurs vous répétez avec vos devanciers[3]!
+Aujourd'hui la science commence à vouloir visiter elle-même les lieux
+qu'elle décrit. Elle suit pas à pas la marche des armées, cherche le
+gué des rivières, tourne le flanc des montagnes et voit pourquoi telle
+invasion s'est arrêtée. Des hommes spéciaux font l'histoire d'une cité
+ou d'une province et, en face d'un champ de bataille, comprennent le
+choc des bataillons, voient fuir les vaincus, campent ou marchent avec
+les vainqueurs. La chronique du château explique celle de la contrée,
+la tradition vient en aide aux documents écrits; l'histoire provinciale
+se forme, et, sous le contrôle de l'homme du pays qui a vu, l'histoire
+générale se complète ou se rectifie, l'obscurité se dissipe, et le
+savoir patient trouve enfin la vérité.
+
+ [3] «Le P. Berthaud et le P. Perry placent l'irruption des
+ Sarrasins en Bourgogne en 719 et 720. Ces dates sont certainement
+ inexactes.» (FOUQUE, _Hist. de Châlon-sur-Saône_).
+
+ C'est, à son tour, victime d'une profonde erreur que Victor Fouque,
+ dans son _Histoire de Châlon-sur-Saône_, prétend que la Bourgogne
+ fut envahie de toutes parts par les Sarrasins, commandés _par leur
+ roi Abdérame_.
+
+Pour connaître ce qu'a été le séjour des Sarrasins dans nos contrées,
+il faut, non pas consulter les érudits, surtout ceux qui ont écrit
+loin de nous, mais aller de chaumière en chaumière, des marécages
+de la Dombes aux flancs escarpés du Jura. Là, tout vous rappellera
+le passage, les triomphes ou les défaites de ces guerriers que le
+fanatisme amena du fond des déserts de l'Asie, et dont la grande
+histoire a si bien perdu les traces qu'elle ne sait plus où les
+trouver. Une lettre de Leidrade à Charlemagne nous apprend qu'il relève
+les monastères détruits par les Sarrasins; la Chronique de l'abbaye
+d'Ambronay atteste que le monastère, fondé par saint Maur, l'église
+consacrée à la Sainte-Vierge et la statue, objet de la vénération des
+fidèles, ont été renversés par les païens. Ces païens n'étaient pas
+les Hongrois venus deux siècles plus tard, puisque saint Barnard avait
+déjà, en 803, reconstruit la chapelle et le couvent. L'histoire de Lyon
+nous apprend que les recluseries de la Platière et de Saint-Clair, les
+églises de Saint-Georges et de Saint-Paul, les abbayes déjà célèbres
+de Saint-Pierre et de l'Ile-Barbe étaient tombées sous les coups des
+sectateurs du Coran, mais ni M. Henri Martin ni nos autres historiens
+ne nous disent quel fut le sort des armées musulmanes après les
+derniers triomphes de Charles-Martel; M. Reinaud ne croit pas que des
+tribus sarrasines aient pu rester parmi nous, et M. Pilot met au nombre
+des fables la prise de Grenoble par les Maures et la présence de bandes
+sarrasines dans les montagnes du Dauphiné.
+
+Quant à nous qui, au fond de nos vallées, avons vu ces familles au
+teint brun, aux coutumes bizarres, au nom sans contredit oriental, et
+qui se disent elles-mêmes d'origine arabe, nous croyons qu'on pourrait
+compléter ce que l'histoire ne dit pas ou rectifier ce qu'elle avance
+d'erroné. Les tribus arabes n'ont pas regagné l'Espagne, et cependant
+elles n'ont pas été anéanties par les Francs. Poursuivies par un ennemi
+supérieur, elles ont traversé la Saône et se sont réfugiées dans les
+marécages de la Dombes, les forêts de la Bresse ou les gorges escarpées
+du Jura et du Dauphiné; la preuve, c'est qu'elles y sont encore. Si
+l'homme qui écrit l'histoire d'un peuple ne peut approfondir tous les
+faits, si l'écrivain systématique nie, de parti pris, ce qui lui paraît
+singulier ou bizarre, c'est aux esprits moins vastes ou moins entiers à
+descendre dans ces infiniment petits qui auront peut-être aussi un jour
+leur utilité et leur importance.
+
+Battus à Poitiers, qu'ils traversaient en allant s'emparer du trésor
+de Saint-Martin, et bien avant d'avoir atteint cette Neustrie qu'on
+leur avait dite si opulente et si bonne à ravager[4], les Arabes et
+les Bérébères, âpres à la conquête, avides de pillage et ardents à
+se venger, après avoir, pendant quatre ans, réparé les désastres de
+leur défaite, attaquèrent le pays des Francs par la partie orientale,
+plus facile à envahir. D'immenses renforts accourus de l'Afrique
+et de l'Asie avaient couvert l'Espagne, franchi les Pyrénées et
+s'étaient répandus dans cette Septimanie où déjà plus d'une fois les
+Visigoths leur avaient tendu la main[5]. Organisés en vue de toutes
+les prévisions; accompagnés de leurs femmes et de leurs troupeaux comme
+pour coloniser[6], mais surtout fiers d'une cavalerie nombreuse et sans
+égale, les Arabes remontèrent le cours du Rhône sans presque livrer de
+combats[7]. La Bourgogne, écrasée par le despotisme et l'avidité des
+Francs, ouvrit ses portes aux musulmans qu'elle reçut presque comme
+des libérateurs[8]. Le clergé seul protesta contre les propagateurs
+d'une religion nouvelle, et le clergé seul eut à subir les lois de la
+guerre avec une impitoyable rigueur. Les juifs surtout firent cause
+commune avec les musulmans, et leur influence, puissante dans toutes
+les cités, ne contribua pas peu à faciliter l'envahissement du pays[9].
+A Loudun, comme ils appelaient Lyon, les musulmans s'emparèrent des
+biens de l'Église, renversèrent les couvents[10], mais respectèrent la
+population; le culte extérieur fut seul défendu, les moeurs et les lois
+furent conservés[11]. Suivant leur tactique, et pour ne pas affaiblir
+leur armée, les Arabes confièrent la garde de la cité aux juifs et à
+quelques seigneurs bourguignons, et, comme force morale, laissèrent un
+poste de cavaliers autour du drapeau musulman. Ici, particulièrement,
+l'histoire est muette, mais la tradition parle, et grâce à elle on peut
+encore suivre le fil des événements.
+
+ [4] «L'Espagne fut donnée pour la seconde fois à
+ Abdoulrahman-Ben-Abdoullah-el-Gafiki, l'année de l'hégire 113,
+ et la neuvième du califat d'Accham (731)... Dès que cette révolte
+ fut dissipée, Abdoulrahman résolut de porter la guerre au dehors
+ et d'occuper les Arabes... il se jette dans l'Aquitaine, passe
+ la Garonne et s'empare de Bordeaux... Il traverse le Périgord, la
+ Saintonge, le Poitou... Il pénètre jusqu'à Tours... Eudes implore
+ le secours de Charles-Martel. Ce prince, justement alarmé du
+ danger commun, marche contre les Arabes avec toutes les forces de
+ la Germanie, de l'Austrasie, de la Bourgogne et de la Neustrie.»
+ (CARDONNE, _Hist. de l'Afr. et de l'Esp. sous la domination des
+ Arabes_.)
+
+ «Les Barbares essayèrent même de se venger sur les provinces de
+ Charles-Martel de la défaite que ce grand capitaine leur avait fait
+ essuyer quelques années auparavant. Leurs détachements, _occupant
+ de nouveau Lyon_, envahirent la Bourgogne.« (REINAUD, _Invasions
+ des Sarrazins_.)
+
+ On voit que l'envahissement de la Bourgogne suivit la bataille de
+ Poitiers et ne la précéda pas.
+
+ [5] «Entreprenans la guerre d'un grand coeur (les Visigoths)
+ appellerent en leur ayde les Sarrazins, encores ennemys des
+ François, pour raison de la perte qu'ils avoient receu devant
+ Tours. Ainsi tous ensemble viennent passer le Rhône... et tirant
+ outre prindrent quasi toute la Bourgongne.» (Guillaume PARADIN,
+ _Annales de Bourgogne_.)
+
+ «Alhatan... leur avoit commandé... de venger Abdérame et de se
+ souvenir incessamment de la bataille de Tours. Les chefs qu'il
+ leur donna furent Athin et Amorrhée qu'il jugea capables d'un si
+ grand employ..... Nulle esglise ne fut espargnée. Lyon, Mascon,
+ Auxerre et toutes les villes de la Bourgogne, jusqu'à Sens, furent
+ saccagées.» (CHORIER, _Hist. du Dauphiné_.)
+
+ [6] «Le témoignage des plus anciennes chroniques nous assure que
+ les Arabes, en franchissant les Pyrénées, entraînaient après eux
+ leurs femmes et leurs enfants, comme s'ils eussent eu le dessein
+ formé de s'établir sur ce sol nouveau pour eux.» (Noël DESVERGERS,
+ _L'Arabie_, p. 342.)
+
+ «Sarraceni cum uxoribus et parvulis venientes...» (WARNEFRID,
+ _Hist. Longobard_.)
+
+ [7] «Au moment de ce vaste choc, les Arabes, encore dans la
+ première ferveur de l'Islam, avaient plus d'humanité, de moralité,
+ de lumières que les Franks.» (Henri MARTIN, _Hist. de France_, tom.
+ 2.)
+
+ [8] «La Bourgogne paya chèrement sa résistance aux prétentions
+ de Charles; ce royaume fut partagé entre ses partisans les plus
+ dévoués. Les Bourguignons furent exclus de toutes les magistratures
+ et subirent les conséquences d'une invasion étrangère.» (FOUQUE,
+ _Hist. de Châlon-s.-Saôn._)
+
+ «Les bandes teutoniques commirent sans doute, dans cette
+ expédition, de bien grandes violences, et les leudes franks ou
+ germains, qui avaient dépossédé les comtes _romains_ ou burgondes,
+ exercèrent une bien brutale tyrannie, car il s'alluma contre le
+ règne des Franks des haines qui ne tardèrent pas à éclater de la
+ manière la plus étrange.» (H. MARTIN, _Hist. de Fr._, t. 2.)
+
+ «737.--Comme Martel estoit usurpateur, chaque gouverneur croyoit
+ avoir droit de lui désobéir et trenchoit du souverain. Mauronte,
+ gouverneur de Marseille, afin d'establir son indépendance, appella
+ le secours des Sarrazins et leur livra la ville d'Avignon, d'où ils
+ s'espandirent dans le Dauphiné, le Lyonnois et, s'il est croyable,
+ même jusqu'à Sens.» (MEZERAY, _Hist. de France_, t. I, p. 131.)
+
+ «Les chefs des Bourguignons se flattèrent de recouvrer
+ leur indépendance en favorisant l'invasion des Sarrasins.»
+ (LATEYSSONNIÈRE, _Recherches hist. sur le départ. de l'Ain_).
+
+ [9] «Les Juifs étaient très-nombreux, très-riches et très-forts
+ dans les villes septimaniennes, et ils secondaient partout
+ la conquête arabe de leurs intrigues en représailles des lois
+ tyranniques portées contre eux.» (Henri MARTIN, _Hist. de France_,
+ tom. 2.)
+
+ «L'évêque Agobard écrivait à l'archevêque de Narbonne Nibridius:
+ Dieu mercy, il n'y a plus de païens en ce pays, mais il y a
+ quantité de juifs qui demeurent en cette ville et sont répandus
+ dans tous les lieux circonvoisins.» (MENESTRIER, _Hist. cons._, p.
+ 216.)
+
+ [10] «Les Sarrasins, dans leurs invasions, avaient dévasté
+ la plupart des églises et des couvents et avaient aliéné les
+ biens affectés à ces établissements.» (REINAUD, _Invasions des
+ Sarrazins_.)
+
+ «_L'an 732?_ Les Sarrasins entrent en Bourgogne, ruinent Autun
+ jusques dans ses fondements. L'église de Saint-Nazaire fut brûlée
+ avec tous les titres et papiers. Le monastère de Saint-Martin,
+ fondé par la reine Brunehaut et où elle reçut la sépulture, fut
+ pillé et détruit; celui de Saint-Jean-le-Grand eut le même sort.»
+ (Edme THOMAS, _Hist. d'Autun_.)
+
+ [11] «Les villes qui avaient capitulé conservèrent leurs comtes
+ goths ou _romains_, leurs lois nationales et l'exercice de leur
+ culte dans l'intérieur des églises, mais à condition de recevoir
+ des garnisons musulmanes, de payer le _kharad_, tribut annuel qui
+ variait du dixième au cinquième des revenus fonciers, et peut-être
+ de livrer leurs chevaux et leurs armes, ainsi que les trésors de
+ l'Église. Les domaines de la couronne et des citoyens morts en
+ combattant les musulmans furent confisqués, probablement avec la
+ majeure partie des biens de l'Église.» (Henri MARTIN, _Hist. de
+ France_, tom. 2.)
+
+ «L'exercice libre de la religion chrétienne était garanti dans
+ l'intérieur des églises. Toute église existante devait être
+ conservée; mais il n'en pouvait point être bâti de nouvelles
+ sans l'autorisation du chef musulman.--Les lois anciennes du pays
+ étaient maintenues.» (HUGO, _France monument._, p. 232.)
+
+ «Les conditions imposées par les généraux musulmans aux villes
+ conquises n'étaient ni trop onéreuses ni trop humiliantes,
+ comparées au sort qui, à cette époque de barbarie, pesait sur les
+ habitants des villes tombées au pouvoir d'ennemis chrétiens comme
+ eux.» (HUGO, _France monument._, p. 232.)
+
+ «Dans les cérémonies publiques, à Messine, on déployait deux
+ étendards. Le premier, qui appartenait aux Sarrasins, représentait
+ une tour de couleur noire sur un champ vert; le second, qui servait
+ aux Chrétiens, portait une croix d'or brodée sur un champ rouge.»
+ (EBN-KHALDOUN, _Hist. de l'Afrique_...)
+
+ «Abdoulah, conformément à la loi mahométane, et pour éviter
+ l'effusion du sang, offrit la paix à Grégoire en lui donnant à
+ choisir d'embrasser l'islamisme ou de se rendre tributaire du
+ calife.» (CARDONNE, _Hist. de l'Afrique et de l'Espagne sous la
+ domination des Arabes_.)
+
+ «On sait que de tout temps l'islamisme offrait aux vaincus deux
+ partis: embrasser la foi musulmane ou payer tribut aux vainqueurs.»
+ (EBN-KHALDOUN.)
+
+Lyon était déjà une ville puissante qui, en se soulevant, aurait pu
+écraser même une forte garnison. Il n'eût pas été prudent de confier
+à son incertaine amitié la vie ou la liberté des soldats laissés à
+la garde du drapeau; mais Lyon est arrosé par deux larges fleuves;
+des collines l'entourent: sur quel point dut s'établir le poste arabe
+qui devait maintenir la paix de la cité, assez près pour savoir les
+nouvelles, assez loin pour ne pas être envahi par la révolte? les
+livres ne le savent pas, mais les gens de la campagne le savent, et
+c'est d'eux que nous l'avons appris.
+
+Plus haut que la vieille ville gauloise, assise entre le premier
+confluent de ses deux fleuves; plus haut que le faubourg moderne de
+la Croix-Rousse, qui n'existait pas alors, la montagne allongée que le
+Rhône et la Saône entourent perd de sa largeur; on dirait que les deux
+fleuves amoureux, impatients de s'embrasser, ont fait un effort pour
+s'unir avant d'avoir à baigner les murs de la ville; en cet endroit
+fut jadis une villa romaine; aujourd'hui un riche et gracieux village
+y répand ses maisons. Un double chemin descend d'un côté au Rhône, de
+l'autre à la Saône; le Mont-d'Or s'étend vis-à-vis, comme un rideau. On
+a nommé Caluire, c'est là que s'élevait le drapeau du croissant.
+
+Le camp arabe, gourbis ou tentes, était là, en effet, dans une
+admirable position, non loin des rivières, à l'abri de toute insulte,
+dominant l'espace, et prêt à s'envoler au rapide galop de ses coursiers
+si un danger sérieux l'eût menacé. Un conquérant voulant garder
+Lyon avec une poignée de soldats, ne pourrait choisir un meilleur
+emplacement; et, en effet, aujourd'hui même, c'est non loin de Caluire
+que le gouvernement français a établi le camp qui lui répond de
+la cité, sur l'emplacement où jadis Albin avait campé ses légions.
+Romains, Français, Arabes, peuples au génie militaire, ont compris
+que Caluire est la clef de la ville; la topographie n'a pas changé, le
+secret est resté le même; c'est toujours de là qu'on dominera Lyon.
+
+Nous n'avons pas de preuves _écrites_ de ce que nous avançons, mais
+le mamelon escarpé qui domine la campagne des Brosses, au levant de
+Caluire, s'appelle la _butte des Sarrasins_; le chemin qui descend au
+Rhône à travers les Brosses s'appelle la _voie des Sarrasins_; à une
+faible distance de là, au nord-est, se trouve la _ferme des Sarrasins_.
+
+Les Arabes et les Bérébères envahirent la Burgondie, et, avides
+de conquêtes, fidèles à leur mission de convertir le monde, ils se
+dirigèrent vers le nord à la recherche des soldats de Charles-Martel.
+L'armée des Francs vaincue, l'Europe appartenait au croissant, c'en
+était fait de la chrétienté, et le rêve des Musulmans de rentrer
+dans leur patrie par Constantinople s'accomplissait; mais avant de
+rencontrer les fiers soldats de l'Austrasie, les Arabes trouvèrent
+un ennemi bien plus puissant que les Francs, plus terrible que ces
+géants couverts de fer qui les avaient vaincus à Poitiers, ennemi dont
+les historiens n'ont jamais parlé, qui arrêta leur élan, brisa leur
+vigueur, dompta leur courage et méritait cependant d'être signalé pour
+avoir, mieux que la massue de Martel, protégé le sol gaulois contre la
+nuée de ses envahisseurs.
+
+Lorsque le peuple de Dieu prévariquait, lorsqu'il épousait des femmes
+infidèles et encensait les idoles, l'esprit divin se retirait de lui,
+ses chefs étaient frappés d'aveuglement, et il était livré sans pitié
+à la fureur des Amalécites et des Philistins. Lorsque les enfants du
+Prophète eurent prévariqué à leur tour, lorsque la loi la plus formelle
+du livre sacré eut été violée dans les caves profondes de la Bourgogne,
+que le vin eut coulé dans leurs festins, que les tables n'eurent plus
+horreur de se charger des viandes impures et maudites de la Séquanie,
+que les lèvres des vrais croyants eurent savouré la chair immonde
+des porcs du pays des Eduens, c'en fut fait du fanatisme guerrier des
+conquérants; la gloire du croissant s'éclipsa, l'amour du prosélytisme
+s'éteignit. Ne cherchez pas ailleurs la cause de la défaite des Arabes;
+la foi n'y était plus; leur élan incertain ne put emporter la citadelle
+d'Auxerre, et il vint mourir contre les faibles remparts de la ville de
+Sens.
+
+Alors, des bruits sinistres circulèrent au milieu des tribus. La
+jalousie qui avait toujours régné entre les Asiatiques et les Africains
+se réveilla plus active et plus ardente que jamais. Les Bérébères, les
+premiers, déclarèrent qu'ils se contentaient des biens de la terre, et
+que d'autres pouvaient porter la semence de la parole jusque dans les
+neiges d'Upsal, dans ces lieux reculés et inconnus où Odin était encore
+adoré comme un dieu[12]. Alors l'archevêque Ebbon n'eut qu'à se montrer
+à la tête de ses guerriers; l'effroi des grandes forêts de la Gaule du
+nord, le souvenir des frais coteaux de Dijon et de Nuits firent tourner
+la tête en arrière aux cavaliers qui avaient bravé le simoun, traversé
+l'Afrique brûlante, et qui devaient au départ conquérir le monde[13].
+Leurs escadrons légers se répandirent sur les bords de la Saône, et,
+quand Childebrand vint à marches forcées, par le centre de la France,
+couper les renforts qui remontaient le Rhône, il y avait longtemps
+que l'armée d'Athim et d'Amorrhée n'était plus un danger pour les
+chrétiens.
+
+ [12] «Il s'éleva des disputes entre les Arabes de Damas et ceux de
+ l'Arabie-Heureuse, entre les Bérébères et les Modarites, et ils se
+ firent une guerre cruelle.» (HIDJAZI, _Mesheb_.)
+
+ «La vérité est que les Berbers sont un peuple bien différent des
+ Arabes, excepté peut-être les tribus des Sanhadjah et des Ketamah,
+ qui, selon moi, doivent être regardées comme parentes et alliées
+ des Arabes. Mais Dieu le sait.» (_Histoire de l'Afrique sous la
+ dynastie des Aghlabites_, par EBN-KHALDOUN.)
+
+ [13] «Se sentans estre entrés trop avant en France et craignans
+ d'estre enclos, retournèrent en mesme hastiveté qu'ils estoient
+ venus et retournant en arrière achevoyent de brusler et détruire ce
+ qui estoit demouré entier, à ce que Charles-Martel ne trouvast rien
+ d'entier après eux... Ainsi fut toute la Bourgongne mise en ruine
+ par les Visigoths et par les Sarrazins.» (G. PARADIN, _Annales de
+ Bourgogne_.)
+
+Mais que faire de ces hordes souillées? de ces tribus qui n'avaient
+plus de musulman que le nom? Les ramener en Espagne, en Afrique,
+en Arabie, peut-être? Montrer aux croyants de Médine et de Damas
+l'épouvantable spectacle de musulmans ivres de vin ou gorgés des
+graisses impures des troupeaux de la Séquanie! Un sacrifice était
+nécessaire, il fut ordonné. L'influence occulte, mais toute-puissante
+des marabouts et des imans, profita des divisions qui régnaient entre
+les Arabes et les Bérébères; l'armée fut condamnée à périr, et chaque
+scheik, chaque émir dispersa ses cavaliers dans les forêts de la haute
+Bourgogne, les marécages de la Dombes, les rochers du Bugey et du
+Dauphiné[14], au milieu desquels, trois cents ans plus tard, les exilés
+vivaient encore à l'état de nation à part, de peuple séparé et maudit,
+avec ses lois, sa religion, ses moeurs, et où, aujourd'hui même, on
+les retrouve avec étonnement soit organisés en villages, soit, plus
+souvent, comme familles maintenues intactes, sans mélanges avec leurs
+voisins et ayant conservé sinon le culte, du moins le type physique et
+moral de la race à laquelle appartenaient leurs pères.
+
+ [14] «Ravagée par les Huns, les Ostrogoths, les Bourguignons,
+ les Lombards et les Sarrasins... la Maurienne est peut-être de
+ toutes nos provinces celle dont l'histoire présente le plus de
+ péripéties.» (_Travaux de la Soc. d'hist. et d'archéologie de la
+ province de Maurienne_, Ier Bulletin, p. III.)
+
+ «Ce ne fut qu'au Xe siècle que les Sarrasins coupèrent le rocher
+ sur lequel s'élève la chapelle de sainte Thècle et desséchèrent
+ la plaine.» (L'abbé TRUCHET, _Notice historique sur la commune de
+ Valloires_).
+
+ «Les Sarrasins avaient poussé leurs incursions jusque dans nos
+ montagnes (942). Hugues de Provence, roi d'Italie, les chargea
+ de garder les principaux passages des Alpes du nord contre son
+ compétiteur Bérenger.» (DUCIS, _Voies romaines_, Revue Savoisienne,
+ 15 avril 1861.)
+
+ «Nous citerons ensuite ces colons, d'origine évidemment étrangère,
+ qui vivent depuis des siècles isolés dans les marais desséchés de
+ la Bresse.» (ROGET DE BELLOGUET, _Ethnogénie gauloise_.)
+
+Lorsque Childebrand eut accompli sa mission et campé avec l'avant-garde
+des Francs sur les bords du Rhône, que l'approche de Charles-Martel
+eut été signalée par toutes les voix de la renommée, la fureur des
+musulmans se réveilla, et ils brûlèrent toutes les cités au milieu
+desquelles ils purent promener leur vengeance. Alors eurent lieu
+ces atrocités qui remplirent d'effroi les populations, alors on vit
+ces dévastations dont les siècles ont eu de la peine à guérir les
+blessures, mais dont ils n'ont pu effacer le souvenir.
+
+Parmi les lieux où on peut retrouver des traces de la fuite
+des musulmans, lorsqu'ils traversèrent la Saône, nous citerons
+particulièrement Châlon[15], Tournus, Boz, Uchizy, Sermoyer,
+Fleurville, Ozan, Arbigny, Mâcon, Lyon. Plusieurs tribus s'arrêtèrent
+dès qu'elles eurent mis la rivière entre elles et leurs ennemis;
+à Pont-de-Veyle, à Louhans, en d'autres lieux encore, on montre la
+_chaussée_ ou la digue des Sarrasins, dénomination qui, si elle ne
+prouve pas que ces ouvrages leur appartiennent, indique du moins
+combien leur nom est encore vivant dans le pays. Dans le Bugey,
+trois villes importantes furent détruites, et deux d'entre elles si
+complètement, qu'on ne sait où trouver le lieu où elles existaient.
+Isernore, à la douce appellation, a conservé les ruines d'un temple
+célèbre; Orindinse a dû s'élever au confluent de l'Ange et de l'Oignin;
+la ville des Tattes devait être sur les bords de la Valserine, non
+loin de Châtillon-de-Michaille. La _Chronique de Saint-Amand_, un des
+plus anciens documents de l'histoire du Bugey, ne donne que des détails
+incomplets à cet égard.
+
+ [15] Vers 645, le siége épiscopal de Châlon-sur-Saône était
+ occupé par un homme de bien nommé Gratus qui habitait le faubourg
+ Saint-Laurent: déjà à cette époque le faubourg communiquait avec
+ la ville par un pont. Comme à Tournus et à Mâcon, le pont de Châlon
+ servit de passage aux Sarrasins et fut détruit derrière eux.
+
+Les monastères de Nantua, d'Ambronay et de Saint-Rambert-de-Joux, dans
+la gorge de l'Albarine, furent renversés. La Franche-Comté, la Savoie,
+le Dauphiné se couvrirent de ruines. Les histoires de ces provinces
+donnent de douloureux détails sur les ravages que commirent les
+Orientaux.
+
+Les tribus qui occupaient Lyon n'épargnèrent pas notre cité. Les
+troupes en marche et qui avaient dépassé Valence, vinrent se réfugier
+dans nos murs. Quand elles virent que la fortune devenait contraire et
+que la cause de l'islam ne se relèverait pas, le pillage, l'incendie
+et la dévastation assouvirent le besoin de vengeance de ces coeurs
+ulcérés; Romains, Gaulois, Francs, Visigoths, tous devinrent égaux
+devant les terribles musulmans, qui n'étaient plus des convertisseurs
+zélés, mais de farouches ennemis. Ce fut un massacre général, une ruine
+universelle, et dès lors le peuple de la cité ne prononça plus qu'avec
+une superstitieuse terreur le nom de cette race maudite de Dieu.
+
+La ville détruite, les hordes musulmanes se retirèrent vers les
+montagnes à l'orient de Lyon[16], où elles rejoignirent les autres
+tribus fugitives; mais désormais indépendantes, elles ne réunirent
+leurs drapeaux que pour lutter contre les difficultés du moment et
+pour se frayer un passage à travers les populations belliqueuses
+de ces contrées. La plaine d'Ambérieu conserve encore plusieurs
+castramétations qu'on leur attribue[17]; les montagnes sont pleines
+de leurs noms; les flots de l'Albarine, comme ceux du Haut-Rhône,
+baignent la grotte des Sarrasins, la balme des Sarrasins, la chambre,
+les crèches, les forts, la maison des Sarrasins, et même cette grotte
+de Roland où fut trouvé, il y a cinq siècles, un cor arabe de la plus
+magnifique beauté; Seillonas, Ordonnas, Benonce reçurent les colonies
+africaines; la vallée d'Amby, de l'autre côté du Rhône, vit se dresser
+un camp formidable que les voyageurs vont encore visiter. La tradition
+raconte de longs et sanglants combats livrés entre les Séquanes, les
+Ambarres, les Allobroges et les légers cavaliers de l'Arabie. Ces
+derniers furent probablement vainqueurs, puisque partout ils parvinrent
+à se maintenir dans les vallées qu'ils avaient choisies et où sont
+encore leurs descendants.
+
+ [16] «Les Sarrasins qui ne purent opérer leur retraite en Provence
+ ou en Septimanie, se réfugièrent dans les montagnes (du Jura et du
+ Dauphiné) et s'y retranchèrent dans des positions inexpugnables.
+ Notre province (Bresse et Bugey) est au nombre de celles qui
+ furent envahies; elle leur servit de refuge en leur présentant des
+ positions naturellement fortifiées.» (Paul GUILLEMOT, _Monog. hist.
+ du Bugey_).
+
+ [17] «Parcourons, dans le Bugey, les diverses contrées qui les
+ recèlent, à commencer cette investigation dans la plaine qui
+ s'étend des rivages du Rhône et de l'Ain jusqu'à la chaîne non
+ interrompue des premières montagnes. C'est là que les Sarrasins
+ sont arrivés après avoir saccagé Lyon.» (Paul GUILLEMOT, _Monog.
+ hist. du Bugey_.)
+
+Si le paysan qui passe sur la montagne est brun, maigre, avec le
+regard ardent, un nez aquilin, l'oeil enfoncé sous l'orbite; si ses
+cheveux d'un noir de corbeau ont des reflets bleus au soleil; s'il
+répond au nom de Babolah, Kaffon, Tabardet, Ciza-Cartet, Ciza-Buiron,
+Alamercery, ou Galaffre comme un héros de l'Arioste, demandez-lui
+s'il n'appartient pas à une famille sarrasine, et, l'oeil attaché sur
+vous pour approfondir votre pensée, soyez certain qu'il vous répondra
+affirmativement.
+
+Messieurs Monnier, Riboud, Guillemot, Lapierre, Fauché-Prunelle, ont
+réuni de curieux et précieux documents sur le séjour des Arabes dans
+la Franche-Comté, la Bresse, le Bugey, la Savoie et le Dauphiné; mais
+ces savants modestes ont fait des chapitres, des monographies, non un
+livre; les historiens de longue haleine n'ont pas encore utilisé leurs
+travaux, et, malgré l'ouvrage de M. Reinaud, l'histoire de l'invasion
+des Sarrasins est encore à faire, surtout au point de vue de nos pays.
+
+L'influence de cette invasion fut grande sur la civilisation de
+nos contrées. Outre les connaissances pratiques dont la médecine,
+l'agriculture[18] et l'industrie profitèrent; outre la bougie, le
+papier, l'ouate, la bourrache, le tambour qu'ils firent connaître à la
+Gaule, les Arabes dotèrent la Bresse de cette race admirable de chevaux
+que les mauvais soins n'ont pu faire dégénérer; de ces volailles que
+les gourmets ont rendues célèbres[19]; de ce blé noir, fortune du
+pauvre, que le Dombiste mange, en pâte légère délayée dans de l'eau
+ou du lait et cuite légèrement entre deux plaques brûlantes, comme le
+voyageur du désert; le commerce s'est enrichi de ces chiffres simples
+et commodes qui ont fait presque oublier la numération embarrassée
+des Romains; la langue s'est emparée d'une foule de mots dont elle ne
+pourrait plus se passer, depuis _alambic_ jusqu'à _taffetas_[20]; mais,
+surtout, il est un nom qui mérite l'attention de l'historien et qui
+serait une révélation, si l'histoire ne devait accepter qu'avec réserve
+ce qui lui est appris par les poètes. Voilà ce que dit M. de Lamartine,
+dans cette prose magique dont lui seul a l'usage et qui est une poésie
+comme tout ce qui jaillit de sa puissante imagination:
+
+«Quand on chemine à pied de Mâcon à Saint-Claude, on trouve d'abord la
+Bresse, bocagère et plane comme la grasse Attique, ruisselant d'huile,
+entre le Pyrée et Athènes.
+
+ [18] «L'agriculture, en Sicile, dut aux Arabes ses plus grands
+ progrès: le coton apporté par eux des champs syriens, la canne à
+ sucre, le frêne qui produit la manne, le pistachier, etc., etc.»
+ (EBN-KHALDOUN, _Histoire de l'Afrique_.)
+
+ [19] _Courrier de l'Ain_, la _Presse_.
+
+ [20] Nous pouvons citer: alcali, alchimie, alcool, algarade,
+ algèbre, almanach, ambre, amiral, mesquin.
+
+«L'olivier de la Bresse, c'est le pâle saule qui ne verse que l'ombre
+légère aux vaches blanches des prairies et qui, tondu tous les trois
+ans par la serpette de l'émondeur, penche son tronc chauve sur les
+mares ou sur les étangs. On croit lire une églogue de Virgile: «_O
+utinam!_ et plût aux dieux que je n'eusse été qu'un pauvre émondeur
+de saules sur les rives du lac ou du Mincio, dans cette laiteuse
+Lombardie, Bresse de l'Italie!»
+
+«A l'extrémité de cette plaine virgilienne de la Bresse, on rencontre
+tout à coup, au lieu de l'eau stagnante et fiévreuse des prairies de la
+Dombes, une rivière bleue comme le firmament de la Suisse italienne,
+joueuse comme des enfants sur des cailloux, écumante comme l'eau de
+savon battue par le battoir de la lessiveuse, gazouillante comme une
+volée de tourterelles bleues et blanches abattues sur un champ de
+lin en fleurs, jetant ses petits flocons d'écume çà et là, sur son
+cours, comme ces oiseaux éparpillant leurs plumes en se peignant du
+bec sur les touffes du lin; on s'arrête, tout étonné, sur la grève des
+cailloux arrondis par le roulis éternel de cette rivière de montagne,
+débouchant, tout étonnée elle-même, dans la plaine. On demande son nom
+au premier batelier qui passe et qui rattache son petit bateau de pêche
+à un tronc de saule pour verser son filet, frétillant de truites, sur
+le sable.--C'est la rivière d'Ain, vous dit-il avec un air de fierté
+locale, la rivière qui descend du Jura et qui donne son nom à toutes
+ces plaines.
+
+«Si, comme moi, vous avez chevauché dans les déserts et dans les
+vallées des deux Arabies, vous reconnaîtrez bien vite que les hommes,
+descendus de Tartarie en Arabie, d'Arabie en Scythie, de Scythie
+en Hongrie, de Hongrie en Franche-Comté et en Bresse, ont passé par
+là, ont colonisé ces contrées, et ont imposé, au plus beau fleuve du
+pays, ce nom arabe et générique d'Ain (l'eau par excellence) dont, en
+perdant l'accent Aïn, nos pères, moins euphoniques que les Arabes,
+ont fait Ain, nom rendu guttural et trivial comme le balbutiement à
+bouche ouverte d'un enfant hébêté. C'est le progrès selon la doctrine
+des _progressistes indéfinis_, ces adorateurs obstinés du temps, qui
+les dément dans les langues comme dans les choses; ces adorateurs
+du présent, qui les dévore eux-mêmes, et qui anéantit tout autant de
+choses humaines qu'il en crée.
+
+«Mais pardon de cette digression déplacée à propos de la rivière d'Ain,
+à laquelle les Arabes avaient donné un nom sonore comme l'écho des
+rochers d'où il tombe en cascades de saphir, et que les Gaulois ont
+rendu muet comme leur langue de corne et de caoutchouc.
+
+«Après s'être rafraîchie et enivrée comme l'Arabe lui-même au vent,
+cette rivière, femelle du Rhône, se précipite vers lui en face des
+plaines du Dauphiné.»
+
+Ainsi donc, croyance poétique et gracieuse, ce serait aux Musulmans que
+ce torrent bleu, que nos paysans appellent la _grand'rivière_, doit
+son nom? Ce mot est, dans le désert, le nom de l'eau par excellence;
+c'est aussi le cristal de l'oeil, limpide et pur comme l'eau des
+fontaines; c'est l'onde, pour nos populations qui n'ont jamais à
+souffrir de sa privation, Aïn pour la caravane altérée qui voit devant
+elle la délivrance et la vie. D'après M. de Lamartine, les tribus
+poursuivies par l'épée de Charles-Martel ont salué ces flots d'un cri
+de joie; ce cristal si pur, ce miroir étincelant, c'était la barrière
+infranchissable pour leurs ennemis; c'était la fin de leurs angoisses
+et de leur terreur; c'était, comme au désert, la délivrance, Aïn,
+la rivière! Pardonnons la distraction du poète, qui a fait venir nos
+parrains par la Hongrie et l'Allemagne; acceptons ce baptême dont se
+porte garant un homme de génie, et voyons-y une preuve de plus du rôle
+immense que les guerriers de l'Yemen et du Nedjd ont joué dans nos
+pays.
+
+Mais, diront à leur tour les hommes graves, oubliez-vous le vieux
+nom, l'antique nom de notre poétique rivière, le Danus des chartes
+et des cartulaires, le Dain de notre ancien langage, dont la racine
+paraît être la même que celle du Danube, nom autochthone, imposé,
+avant les Arabes, par nos pères les Gaulois[21]? Eh puis! ajouteront
+les personnes délicates, est-il convenable de s'enorgueillir d'une
+appellation qui rappellerait un peuple mécréant, souillé de sang,
+ennemi de notre culte, destructeur de nos lieux saints, enrichi des
+dépouilles de notre patrie, chargé de la malédiction de nos pères? La
+première observation seule a du poids, la seconde nous paraît futile.
+
+ [21] «Mots qui se rapportent également au kymrique et au gaëlique:
+ _dan_, audacieux, violent.» (ROGET, baron de BELLOGUET, _Ethnogén.
+ gaul._)
+
+ «Si le nom originaire est Ain, c'est un vieux mot celtique qui
+ signifie _source_, _fontaine_, et qui même a cette signification
+ dans les langues orientales.» (BACON-TACON, _Recherches sur les
+ origines celtiques_, t. I, p. 192).
+
+On n'a point horreur du souvenir des Romains; leurs monuments ont
+couvert notre sol, et cependant qu'étaient les compagnons de Romulus?
+d'infames bandits. Qu'étaient les guerriers de César? d'avides et
+rapaces conquérants. Qu'étaient nos gouverneurs? des proconsuls, dont
+le nom est resté comme une tache et une injure. Si, au lieu de maudire
+chaque trace de leurs pas sur le sol sacré de la Gaule, on se pare et
+on se vante des stygmates que nous ont laissés ces cruels dominateurs,
+toute vérité historique mise à part, toute étymologie réservée, que
+notre rivière s'appelle Aïn ou Dain, nous ne voyons pas qu'on ait à
+rougir de ce qui peut rappeler dans nos contrées les compatriotes de
+Job, d'Avicennes et d'Antar[22].
+
+ [22] Voyez Paradin, Chorier, J.-Cl. Martin, Jean Brunet, Lapierre,
+ Thomas Riboud, Lateyssonnière, MM. Paul Guillemot, Chaix, Borel
+ d'Hauterive, Fauché-Prunelle, D. Monnier, etc.
+
+
+
+
+
+End of the Project Gutenberg EBook of Note sur l'invasion des Sarrasins dans
+le Lyonnais, by Aimé Vingtrinier
+
+*** END OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK 44242 ***
diff --git a/44242-h/44242-h.htm b/44242-h/44242-h.htm
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+ par Aimé Vingtrinier
+ — Un livre du Project Gutenberg.
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+<div>*** START OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK 44242 ***</div>
+
+<div class="tnote newpage">
+<p class="center noindent">— Note de transcription —</p>
+
+<p>
+À l’exception des erreurs clairement introduites par le typographe,
+et des corrections suivantes, le texte d’origine est inchangé.
+</p>
+
+<ul>
+ <li>p. 13: «,» remplacée par «;» dans «; à une faible distance»,</li>
+ <li>p. 20: ajout d’un guillemet ouvrant devant la première note de bas
+ de page (numérotée 18 dans cette édition électronique).</li>
+</ul>
+</div>
+
+<h1 class="sep4">
+<span class="large">NOTE</span><br />
+<span class="xlarge">SUR L’INVASION DES SARRASINS</span><br />
+<span class="large">DANS LE LYONNAIS.</span>
+</h1>
+
+<p class="sep4 small center noindent">
+Lyon. — Typ. d’A. Vingtrinier.
+</p>
+
+<div class="center newpage">
+<div class="bbox">
+
+<p class="center noindent lh">
+<span class="xlarge">NOTE</span><br />
+<span class="xxlarge">SUR L’INVASION DES SARRASINS</span><br />
+<span class="xlarge">DANS LE LYONNAIS</span>
+</p>
+
+<p class="center noindent sep3">
+<span class="small">PAR</span><br />
+AIMÉ VINGTRINIER
+</p>
+
+<p class="t45 sep3">
+.... Au surplus, le fait de l’incendie se déduit
+si naturellement de la présence des Sarrasins, constatée
+par la nomenclature locale, que l’on pourrait
+déjà se rendre à cette évidence lors même que la
+légende latine ne nous y autoriserait pas. Tout
+le pays est couvert de noms mauresques.
+</p>
+
+<p class="t50">
+<span class='smcap'>Désiré Monnier</span>, <cite>Annuaire du Jura</cite>, 1842.
+</p>
+
+<p class="t45 sep2">
+La tradition elle-même n’a recueilli que des
+contes sur les conquêtes et les talents des Sarrasins.
+</p>
+
+<p class="t50">
+<span class='smcap'>Chambeyron</span>, <cite>Recherches historiques
+sur la ville de Rive-de-Gier</cite>.
+</p>
+
+<div class='figcenter'>
+ <img src='images/decoration.png' alt='' />
+</div>
+
+<p class="center noindent">
+<span class="large">LYON</span><br />
+IMPRIMERIE D’AIMÉ VINGTRINIER<br />
+Rue de la Belle-Cordière, 14.
+</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p class="center noindent">
+1862
+</p>
+
+</div>
+</div>
+
+<p class="center noindent newpage">
+<span class="large">NOTE</span><br />
+<span class="xlarge">SUR L’INVASION DES SARRASINS</span><br />
+<span class="large">DANS LE LYONNAIS.</span>
+</p>
+
+<hr class="c25 sep2" />
+
+<p class="sep3">
+Un des évènements les plus graves de l’histoire de France,
+dont les conséquences ont failli changer non-seulement la
+face de notre pays, mais de la chrétienté tout entière,
+l’envahissement du pays des Visigoths et des Francs par les
+conquérants arabes a été si peu ou si mal décrit qu’on ne
+sait aujourd’hui où s’enquérir des détails de cette épopée, et
+que tout manque à l’investigation du savant.
+</p>
+
+<p>
+Un samedi de la fin d’octobre 732, dit M. Henri Martin,
+le 3 octobre 732, disent quelques autres écrivains, Abdérame
+fut vaincu, dans les plaines de Poitiers, par le
+célèbre chef austrasien Charles-Martel; la déroute des
+Arabes fut affreuse; leur camp, rempli de richesses, fut pillé,
+et eux-mêmes eurent une peine infinie à regagner Narbonne
+ou à traverser les Pyrénées; pour ce premier fait, c’est à
+peu près tout. Arabes et chrétiens gardent sur cette défaite
+<span class='pagenum'><a id='Page_6' name='Page_6'>[6]</a></span>
+un prudent silence. Et cependant la France était sauvée, le
+christianisme restait possesseur du continent européen, et la
+fortune du Prophète avait reçu un échec dont la honte ne
+devait jamais s’effacer.
+</p>
+
+<p>
+On sait encore vaguement que Lyon, Mâcon, Autun furent
+pris et ravagés, que la ville d’Auxerre eut le même sort; que
+sa citadelle résista; enfin que l’archevêque de Sens repoussa et
+mit en fuite les envahisseurs; mais là aussi les dates précises
+et les détails nous font défaut. D’ailleurs le vaillant prélat
+n’eut-il affaire qu’à une troupe de fourrageurs traversant la
+France par l’Aquitaine et l’Orléanais avant le désastre de
+Poitiers, et venue, par hasard, se heurter aux murs de sa
+petite cité, comme l’avance M. Henri Martin<a name='FA_1' id='FA_1' href='#FN_1' class='fnanchor'>[1]</a>, ou eut-il à
+repousser cette armée formidable d’Athim et d’Amorrhée<a name='FA_2' id='FA_2' href='#FN_2' class='fnanchor'>[2]</a>,
+venue, quatre ans plus tard, par la vallée du Rhône, pour
+attaquer les Francs au centre de leur puissance, comme le
+soutiennent nos vieux chroniqueurs bourguignons? les
+Arabes, qui devaient atteindre bientôt à une si haute civilisation,
+vinrent-ils en conquérants ou en ravageurs? voulaient-ils
+piller ou coloniser? détruisirent-ils dès leur premier
+choc toutes les cités qu’ils trouvèrent sur leur passage
+ou ne s’attaquèrent-ils qu’aux biens du clergé? les avis
+sont partagés, ou plutôt l’histoire moderne n’a pas d’avis. Nul
+écrivain ne paraît attacher quelque importance à ces détails.
+Moins dédaigneux, nous allons essayer de nous prononcer,
+et dès l’abord nous ne cacherons point nos sympathies pour
+nos vieux chroniqueurs, et cela uniquement parce qu’ils
+habitaient le pays où ces terribles événements se sont passés.
+<span class='pagenum'><a id='Page_7' name='Page_7'>[7]</a></span>
+</p>
+
+<p>
+L’histoire écrite au fond d’une bibliothèque, avec l’aide de
+copistes et de collectionneurs qui cherchent des dates et
+vous préparent vos matériaux, pourra bien briller par un
+plan vaste, une philosophie sévère, un style magique et des
+qualités d’ensemble qui assurent la vogue à votre ouvrage et
+l’immortalité à votre nom; mais si les grands faits sont
+rapportés d’une manière satisfaisante, combien de détails
+vous échappent! combien d’erreurs vous répétez avec vos
+devanciers<a name='FA_3' id='FA_3' href='#FN_3' class='fnanchor'>[3]</a>! Aujourd’hui la science commence à vouloir
+visiter elle-même les lieux qu’elle décrit. Elle suit pas à pas la
+marche des armées, cherche le gué des rivières, tourne le
+flanc des montagnes et voit pourquoi telle invasion s’est
+arrêtée. Des hommes spéciaux font l’histoire d’une cité ou
+d’une province et, en face d’un champ de bataille, comprennent
+le choc des bataillons, voient fuir les vaincus, campent ou
+marchent avec les vainqueurs. La chronique du château
+explique celle de la contrée, la tradition vient en aide aux
+documents écrits; l’histoire provinciale se forme, et, sous le
+contrôle de l’homme du pays qui a vu, l’histoire générale se
+complète ou se rectifie, l’obscurité se dissipe, et le savoir
+patient trouve enfin la vérité.
+</p>
+
+<p>
+Pour connaître ce qu’a été le séjour des Sarrasins dans nos
+contrées, il faut, non pas consulter les érudits, surtout ceux
+qui ont écrit loin de nous, mais aller de chaumière en chaumière,
+des marécages de la Dombes aux flancs escarpés du
+Jura. Là, tout vous rappellera le passage, les triomphes ou
+les défaites de ces guerriers que le fanatisme amena du fond
+<span class='pagenum'><a id='Page_8' name='Page_8'>[8]</a></span>
+des déserts de l’Asie, et dont la grande histoire a si bien perdu
+les traces qu’elle ne sait plus où les trouver. Une lettre de
+Leidrade à Charlemagne nous apprend qu’il relève les monastères
+détruits par les Sarrasins; la Chronique de l’abbaye
+d’Ambronay atteste que le monastère, fondé par saint Maur,
+l’église consacrée à la Sainte-Vierge et la statue, objet de la
+vénération des fidèles, ont été renversés par les païens. Ces
+païens n’étaient pas les Hongrois venus deux siècles plus
+tard, puisque saint Barnard avait déjà, en 803, reconstruit
+la chapelle et le couvent. L’histoire de Lyon nous apprend
+que les recluseries de la Platière et de Saint-Clair, les églises
+de Saint-Georges et de Saint-Paul, les abbayes déjà célèbres
+de Saint-Pierre et de l’Ile-Barbe étaient tombées sous les
+coups des sectateurs du Coran, mais ni M. Henri Martin ni
+nos autres historiens ne nous disent quel fut le sort des
+armées musulmanes après les derniers triomphes de Charles-Martel;
+M. Reinaud ne croit pas que des tribus sarrasines
+aient pu rester parmi nous, et M. Pilot met au nombre des
+fables la prise de Grenoble par les Maures et la présence de
+bandes sarrasines dans les montagnes du Dauphiné.
+</p>
+
+<p>
+Quant à nous qui, au fond de nos vallées, avons vu ces
+familles au teint brun, aux coutumes bizarres, au nom sans
+contredit oriental, et qui se disent elles-mêmes d’origine
+arabe, nous croyons qu’on pourrait compléter ce que l’histoire
+ne dit pas ou rectifier ce qu’elle avance d’erroné. Les tribus
+arabes n’ont pas regagné l’Espagne, et cependant elles n’ont
+pas été anéanties par les Francs. Poursuivies par un ennemi
+supérieur, elles ont traversé la Saône et se sont réfugiées
+dans les marécages de la Dombes, les forêts de la Bresse ou
+les gorges escarpées du Jura et du Dauphiné; la preuve, c’est
+qu’elles y sont encore. Si l’homme qui écrit l’histoire d’un
+peuple ne peut approfondir tous les faits, si l’écrivain systématique
+nie, de parti pris, ce qui lui paraît singulier ou
+<span class='pagenum'><a id='Page_9' name='Page_9'>[9]</a></span>
+bizarre, c’est aux esprits moins vastes ou moins entiers à
+descendre dans ces infiniment petits qui auront peut-être
+aussi un jour leur utilité et leur importance.
+</p>
+
+<p>
+Battus à Poitiers, qu’ils traversaient en allant s’emparer
+du trésor de Saint-Martin, et bien avant d’avoir atteint cette
+Neustrie qu’on leur avait dite si opulente et si bonne à
+ravager<a name='FA_4' id='FA_4' href='#FN_4' class='fnanchor'>[4]</a>, les Arabes et les Bérébères, âpres à la conquête,
+avides de pillage et ardents à se venger, après avoir, pendant
+quatre ans, réparé les désastres de leur défaite, attaquèrent
+le pays des Francs par la partie orientale, plus facile à envahir.
+D’immenses renforts accourus de l’Afrique et de l’Asie avaient
+couvert l’Espagne, franchi les Pyrénées et s’étaient répandus
+dans cette Septimanie où déjà plus d’une fois les Visigoths leur
+avaient tendu la main<a name='FA_5' id='FA_5' href='#FN_5' class='fnanchor'>[5]</a>. Organisés en vue de toutes les prévisions;
+<span class='pagenum'><a id='Page_10' name='Page_10'>[10]</a></span>
+accompagnés de leurs femmes et de leurs troupeaux
+comme pour coloniser<a name='FA_6' id='FA_6' href='#FN_6' class='fnanchor'>[6]</a>, mais surtout fiers d’une cavalerie
+nombreuse et sans égale, les Arabes remontèrent le cours du
+Rhône sans presque livrer de combats<a name='FA_7' id='FA_7' href='#FN_7' class='fnanchor'>[7]</a>. La Bourgogne, écrasée
+par le despotisme et l’avidité des Francs, ouvrit ses portes aux
+musulmans qu’elle reçut presque comme des libérateurs<a name='FA_8' id='FA_8' href='#FN_8' class='fnanchor'>[8]</a>.
+<span class='pagenum'><a id='Page_11' name='Page_11'>[11]</a></span>
+Le clergé seul protesta contre les propagateurs d’une religion
+nouvelle, et le clergé seul eut à subir les lois de la guerre
+avec une impitoyable rigueur. Les juifs surtout firent cause
+commune avec les musulmans, et leur influence, puissante dans
+toutes les cités, ne contribua pas peu à faciliter l’envahissement
+du pays<a name='FA_9' id='FA_9' href='#FN_9' class='fnanchor'>[9]</a>. A Loudun, comme ils appelaient Lyon, les
+musulmans s’emparèrent des biens de l’Église, renversèrent les
+couvents<a name='FA_10' id='FA_10' href='#FN_10' class='fnanchor'>[10]</a>, mais respectèrent la population; le culte extérieur
+fut seul défendu, les mœurs et les lois furent conservés<a name='FA_11' id='FA_11' href='#FN_11' class='fnanchor'>[11]</a>.
+<span class='pagenum'><a id='Page_12' name='Page_12'>[12]</a></span>
+Suivant leur tactique, et pour ne pas affaiblir leur armée, les
+Arabes confièrent la garde de la cité aux juifs et à quelques
+seigneurs bourguignons, et, comme force morale, laissèrent
+un poste de cavaliers autour du drapeau musulman. Ici, particulièrement,
+l’histoire est muette, mais la tradition parle, et
+grâce à elle on peut encore suivre le fil des événements.
+</p>
+
+<p>
+Lyon était déjà une ville puissante qui, en se soulevant,
+aurait pu écraser même une forte garnison. Il n’eût pas été
+prudent de confier à son incertaine amitié la vie ou la liberté
+des soldats laissés à la garde du drapeau; mais Lyon est
+arrosé par deux larges fleuves; des collines l’entourent: sur
+quel point dut s’établir le poste arabe qui devait maintenir
+la paix de la cité, assez près pour savoir les nouvelles, assez
+loin pour ne pas être envahi par la révolte? les livres ne le
+<span class='pagenum'><a id='Page_13' name='Page_13'>[13]</a></span>
+savent pas, mais les gens de la campagne le savent, et c’est
+d’eux que nous l’avons appris.
+</p>
+
+<p>
+Plus haut que la vieille ville gauloise, assise entre le
+premier confluent de ses deux fleuves; plus haut que le
+faubourg moderne de la Croix-Rousse, qui n’existait pas
+alors, la montagne allongée que le Rhône et la Saône
+entourent perd de sa largeur; on dirait que les deux fleuves
+amoureux, impatients de s’embrasser, ont fait un effort pour
+s’unir avant d’avoir à baigner les murs de la ville; en cet
+endroit fut jadis une villa romaine; aujourd’hui un riche
+et gracieux village y répand ses maisons. Un double chemin
+descend d’un côté au Rhône, de l’autre à la Saône; le Mont-d’Or
+s’étend vis-à-vis, comme un rideau. On a nommé
+Caluire, c’est là que s’élevait le drapeau du croissant.
+</p>
+
+<p>
+Le camp arabe, gourbis ou tentes, était là, en effet, dans
+une admirable position, non loin des rivières, à l’abri de
+toute insulte, dominant l’espace, et prêt à s’envoler au rapide
+galop de ses coursiers si un danger sérieux l’eût menacé. Un
+conquérant voulant garder Lyon avec une poignée de soldats,
+ne pourrait choisir un meilleur emplacement; et, en effet,
+aujourd’hui même, c’est non loin de Caluire que le gouvernement
+français a établi le camp qui lui répond de la cité,
+sur l’emplacement où jadis Albin avait campé ses légions.
+Romains, Français, Arabes, peuples au génie militaire,
+ont compris que Caluire est la clef de la ville; la topographie
+n’a pas changé, le secret est resté le même; c’est toujours
+de là qu’on dominera Lyon.
+</p>
+
+<p>
+Nous n’avons pas de preuves <i>écrites</i> de ce que nous
+avançons, mais le mamelon escarpé qui domine la campagne
+des Brosses, au levant de Caluire, s’appelle la <i>butte des
+Sarrasins</i>; le chemin qui descend au Rhône à travers les
+Brosses s’appelle la <i>voie des Sarrasins</i>; à une faible distance
+de là, au nord-est, se trouve la <i>ferme des Sarrasins</i>.
+<span class='pagenum'><a id='Page_14' name='Page_14'>[14]</a></span>
+</p>
+
+<p>
+Les Arabes et les Bérébères envahirent la Burgondie, et,
+avides de conquêtes, fidèles à leur mission de convertir le
+monde, ils se dirigèrent vers le nord à la recherche des
+soldats de Charles-Martel. L’armée des Francs vaincue,
+l’Europe appartenait au croissant, c’en était fait de la chrétienté,
+et le rêve des Musulmans de rentrer dans leur patrie
+par Constantinople s’accomplissait; mais avant de rencontrer
+les fiers soldats de l’Austrasie, les Arabes trouvèrent un
+ennemi bien plus puissant que les Francs, plus terrible que
+ces géants couverts de fer qui les avaient vaincus à Poitiers,
+ennemi dont les historiens n’ont jamais parlé, qui arrêta leur
+élan, brisa leur vigueur, dompta leur courage et méritait
+cependant d’être signalé pour avoir, mieux que la massue de
+Martel, protégé le sol gaulois contre la nuée de ses envahisseurs.
+</p>
+
+<p>
+Lorsque le peuple de Dieu prévariquait, lorsqu’il épousait
+des femmes infidèles et encensait les idoles, l’esprit divin
+se retirait de lui, ses chefs étaient frappés d’aveuglement, et
+il était livré sans pitié à la fureur des Amalécites et des Philistins.
+Lorsque les enfants du Prophète eurent prévariqué à
+leur tour, lorsque la loi la plus formelle du livre sacré eut été
+violée dans les caves profondes de la Bourgogne, que le vin
+eut coulé dans leurs festins, que les tables n’eurent plus
+horreur de se charger des viandes impures et maudites de la
+Séquanie, que les lèvres des vrais croyants eurent savouré la
+chair immonde des porcs du pays des Eduens, c’en fut fait
+du fanatisme guerrier des conquérants; la gloire du croissant
+s’éclipsa, l’amour du prosélytisme s’éteignit. Ne cherchez pas
+ailleurs la cause de la défaite des Arabes; la foi n’y était plus;
+leur élan incertain ne put emporter la citadelle d’Auxerre,
+et il vint mourir contre les faibles remparts de la ville de Sens.
+</p>
+
+<p>
+Alors, des bruits sinistres circulèrent au milieu des tribus.
+La jalousie qui avait toujours régné entre les Asiatiques et les
+<span class='pagenum'><a id='Page_15' name='Page_15'>[15]</a></span>
+Africains se réveilla plus active et plus ardente que jamais.
+Les Bérébères, les premiers, déclarèrent qu’ils se contentaient
+des biens de la terre, et que d’autres pouvaient porter la
+semence de la parole jusque dans les neiges d’Upsal, dans
+ces lieux reculés et inconnus où Odin était encore adoré
+comme un dieu<a name='FA_12' id='FA_12' href='#FN_12' class='fnanchor'>[12]</a>. Alors l’archevêque Ebbon n’eut qu’à se
+montrer à la tête de ses guerriers; l’effroi des grandes forêts
+de la Gaule du nord, le souvenir des frais coteaux de Dijon
+et de Nuits firent tourner la tête en arrière aux cavaliers qui
+avaient bravé le simoun, traversé l’Afrique brûlante, et qui
+devaient au départ conquérir le monde<a name='FA_13' id='FA_13' href='#FN_13' class='fnanchor'>[13]</a>. Leurs escadrons
+légers se répandirent sur les bords de la Saône, et, quand
+Childebrand vint à marches forcées, par le centre de la France,
+couper les renforts qui remontaient le Rhône, il y avait
+longtemps que l’armée d’Athim et d’Amorrhée n’était plus
+un danger pour les chrétiens.
+</p>
+
+<p>
+Mais que faire de ces hordes souillées? de ces tribus qui
+n’avaient plus de musulman que le nom? Les ramener en
+Espagne, en Afrique, en Arabie, peut-être? Montrer aux
+croyants de Médine et de Damas l’épouvantable spectacle
+<span class='pagenum'><a id='Page_16' name='Page_16'>[16]</a></span>
+de musulmans ivres de vin ou gorgés des graisses impures
+des troupeaux de la Séquanie! Un sacrifice était nécessaire,
+il fut ordonné. L’influence occulte, mais toute-puissante des
+marabouts et des imans, profita des divisions qui régnaient
+entre les Arabes et les Bérébères; l’armée fut condamnée à
+périr, et chaque scheik, chaque émir dispersa ses cavaliers
+dans les forêts de la haute Bourgogne, les marécages de la
+Dombes, les rochers du Bugey et du Dauphiné<a name='FA_14' id='FA_14' href='#FN_14' class='fnanchor'>[14]</a>, au milieu
+desquels, trois cents ans plus tard, les exilés vivaient encore
+à l’état de nation à part, de peuple séparé et maudit, avec
+ses lois, sa religion, ses mœurs, et où, aujourd’hui même, on
+les retrouve avec étonnement soit organisés en villages, soit,
+plus souvent, comme familles maintenues intactes, sans mélanges
+avec leurs voisins et ayant conservé sinon le culte,
+du moins le type physique et moral de la race à laquelle
+appartenaient leurs pères.
+</p>
+
+<p>
+Lorsque Childebrand eut accompli sa mission et campé
+avec l’avant-garde des Francs sur les bords du Rhône, que
+l’approche de Charles-Martel eut été signalée par toutes les
+voix de la renommée, la fureur des musulmans se réveilla,
+et ils brûlèrent toutes les cités au milieu desquelles ils purent
+<span class='pagenum'><a id='Page_17' name='Page_17'>[17]</a></span>
+promener leur vengeance. Alors eurent lieu ces atrocités qui
+remplirent d’effroi les populations, alors on vit ces dévastations
+dont les siècles ont eu de la peine à guérir les blessures,
+mais dont ils n’ont pu effacer le souvenir.
+</p>
+
+<p>
+Parmi les lieux où on peut retrouver des traces de la fuite
+des musulmans, lorsqu’ils traversèrent la Saône, nous citerons
+particulièrement Châlon<a name='FA_15' id='FA_15' href='#FN_15' class='fnanchor'>[15]</a>, Tournus, Boz, Uchizy, Sermoyer,
+Fleurville, Ozan, Arbigny, Mâcon, Lyon. Plusieurs
+tribus s’arrêtèrent dès qu’elles eurent mis la rivière entre
+elles et leurs ennemis; à Pont-de-Veyle, à Louhans, en
+d’autres lieux encore, on montre la <i>chaussée</i> ou la digue des
+Sarrasins, dénomination qui, si elle ne prouve pas que ces
+ouvrages leur appartiennent, indique du moins combien leur
+nom est encore vivant dans le pays. Dans le Bugey, trois
+villes importantes furent détruites, et deux d’entre elles si
+complètement, qu’on ne sait où trouver le lieu où elles
+existaient. Isernore, à la douce appellation, a conservé les
+ruines d’un temple célèbre; Orindinse a dû s’élever au
+confluent de l’Ange et de l’Oignin; la ville des Tattes devait
+être sur les bords de la Valserine, non loin de Châtillon-de-Michaille.
+La <cite>Chronique de Saint-Amand</cite>, un des plus
+anciens documents de l’histoire du Bugey, ne donne que des
+détails incomplets à cet égard.
+</p>
+
+<p>
+Les monastères de Nantua, d’Ambronay et de Saint-Rambert-de-Joux,
+dans la gorge de l’Albarine, furent renversés.
+La Franche-Comté, la Savoie, le Dauphiné se couvrirent
+de ruines. Les histoires de ces provinces donnent de
+<span class='pagenum'><a id='Page_18' name='Page_18'>[18]</a></span>
+douloureux détails sur les ravages que commirent les
+Orientaux.
+</p>
+
+<p>
+Les tribus qui occupaient Lyon n’épargnèrent pas notre
+cité. Les troupes en marche et qui avaient dépassé Valence,
+vinrent se réfugier dans nos murs. Quand elles virent que la
+fortune devenait contraire et que la cause de l’islam ne se
+relèverait pas, le pillage, l’incendie et la dévastation assouvirent
+le besoin de vengeance de ces cœurs ulcérés; Romains,
+Gaulois, Francs, Visigoths, tous devinrent égaux devant les
+terribles musulmans, qui n’étaient plus des convertisseurs
+zélés, mais de farouches ennemis. Ce fut un massacre général,
+une ruine universelle, et dès lors le peuple de la cité ne
+prononça plus qu’avec une superstitieuse terreur le nom de
+cette race maudite de Dieu.
+</p>
+
+<p>
+La ville détruite, les hordes musulmanes se retirèrent vers
+les montagnes à l’orient de Lyon<a name='FA_16' id='FA_16' href='#FN_16' class='fnanchor'>[16]</a>, où elles rejoignirent les
+autres tribus fugitives; mais désormais indépendantes, elles
+ne réunirent leurs drapeaux que pour lutter contre les difficultés
+du moment et pour se frayer un passage à travers
+les populations belliqueuses de ces contrées. La plaine
+d’Ambérieu conserve encore plusieurs castramétations qu’on
+leur attribue<a name='FA_17' id='FA_17' href='#FN_17' class='fnanchor'>[17]</a>; les montagnes sont pleines de leurs noms; les
+<span class='pagenum'><a id='Page_19' name='Page_19'>[19]</a></span>
+flots de l’Albarine, comme ceux du Haut-Rhône, baignent la
+grotte des Sarrasins, la balme des Sarrasins, la chambre, les
+crèches, les forts, la maison des Sarrasins, et même cette
+grotte de Roland où fut trouvé, il y a cinq siècles, un cor
+arabe de la plus magnifique beauté; Seillonas, Ordonnas,
+Benonce reçurent les colonies africaines; la vallée d’Amby,
+de l’autre côté du Rhône, vit se dresser un camp formidable
+que les voyageurs vont encore visiter. La tradition raconte
+de longs et sanglants combats livrés entre les Séquanes, les
+Ambarres, les Allobroges et les légers cavaliers de l’Arabie.
+Ces derniers furent probablement vainqueurs, puisque partout
+ils parvinrent à se maintenir dans les vallées qu’ils avaient
+choisies et où sont encore leurs descendants.
+</p>
+
+<p>
+Si le paysan qui passe sur la montagne est brun, maigre,
+avec le regard ardent, un nez aquilin, l’œil enfoncé sous
+l’orbite; si ses cheveux d’un noir de corbeau ont des reflets
+bleus au soleil; s’il répond au nom de Babolah, Kaffon,
+Tabardet, Ciza-Cartet, Ciza-Buiron, Alamercery, ou Galaffre
+comme un héros de l’Arioste, demandez-lui s’il n’appartient
+pas à une famille sarrasine, et, l’œil attaché sur vous pour
+approfondir votre pensée, soyez certain qu’il vous répondra
+affirmativement.
+</p>
+
+<p>
+Messieurs Monnier, Riboud, Guillemot, Lapierre, Fauché-Prunelle,
+ont réuni de curieux et précieux documents sur le
+séjour des Arabes dans la Franche-Comté, la Bresse, le
+Bugey, la Savoie et le Dauphiné; mais ces savants modestes
+ont fait des chapitres, des monographies, non un livre; les
+historiens de longue haleine n’ont pas encore utilisé leurs
+travaux, et, malgré l’ouvrage de M. Reinaud, l’histoire de
+l’invasion des Sarrasins est encore à faire, surtout au point
+de vue de nos pays.
+</p>
+
+<p>
+L’influence de cette invasion fut grande sur la civilisation
+de nos contrées. Outre les connaissances pratiques dont
+<span class='pagenum'><a id='Page_20' name='Page_20'>[20]</a></span>
+la médecine, l’agriculture<a name='FA_18' id='FA_18' href='#FN_18' class='fnanchor'>[18]</a> et l’industrie profitèrent; outre
+la bougie, le papier, l’ouate, la bourrache, le tambour qu’ils
+firent connaître à la Gaule, les Arabes dotèrent la Bresse de
+cette race admirable de chevaux que les mauvais soins n’ont
+pu faire dégénérer; de ces volailles que les gourmets ont rendues
+célèbres<a name='FA_19' id='FA_19' href='#FN_19' class='fnanchor'>[19]</a>; de ce blé noir, fortune du pauvre, que le
+Dombiste mange, en pâte légère délayée dans de l’eau ou du
+lait et cuite légèrement entre deux plaques brûlantes, comme
+le voyageur du désert; le commerce s’est enrichi de ces chiffres
+simples et commodes qui ont fait presque oublier la numération
+embarrassée des Romains; la langue s’est emparée
+d’une foule de mots dont elle ne pourrait plus se passer, depuis
+<i>alambic</i> jusqu’à <i>taffetas</i><a name='FA_20' id='FA_20' href='#FN_20' class='fnanchor'>[20]</a>; mais, surtout, il est un nom
+qui mérite l’attention de l’historien et qui serait une révélation,
+si l’histoire ne devait accepter qu’avec réserve ce qui lui
+est appris par les poètes. Voilà ce que dit M. de Lamartine,
+dans cette prose magique dont lui seul a l’usage et qui est une
+poésie comme tout ce qui jaillit de sa puissante imagination:
+</p>
+
+<p>
+«Quand on chemine à pied de Mâcon à Saint-Claude, on
+trouve d’abord la Bresse, bocagère et plane comme la grasse
+Attique, ruisselant d’huile, entre le Pyrée et Athènes.
+</p>
+
+<p>
+«L’olivier de la Bresse, c’est le pâle saule qui ne verse
+que l’ombre légère aux vaches blanches des prairies et qui,
+tondu tous les trois ans par la serpette de l’émondeur, penche
+son tronc chauve sur les mares ou sur les étangs. On croit
+lire une églogue de Virgile: «<i lang="la" xml:lang="la">O utinam!</i> et plût aux dieux
+<span class='pagenum'><a id='Page_21' name='Page_21'>[21]</a></span>
+que je n’eusse été qu’un pauvre émondeur de saules sur
+les rives du lac ou du Mincio, dans cette laiteuse Lombardie,
+Bresse de l’Italie!»
+</p>
+
+<p>
+«A l’extrémité de cette plaine virgilienne de la Bresse,
+on rencontre tout à coup, au lieu de l’eau stagnante et fiévreuse
+des prairies de la Dombes, une rivière bleue comme
+le firmament de la Suisse italienne, joueuse comme des enfants
+sur des cailloux, écumante comme l’eau de savon battue
+par le battoir de la lessiveuse, gazouillante comme une volée
+de tourterelles bleues et blanches abattues sur un champ de
+lin en fleurs, jetant ses petits flocons d’écume çà et là, sur
+son cours, comme ces oiseaux éparpillant leurs plumes en se
+peignant du bec sur les touffes du lin; on s’arrête, tout étonné,
+sur la grève des cailloux arrondis par le roulis éternel de
+cette rivière de montagne, débouchant, tout étonnée elle-même,
+dans la plaine. On demande son nom au premier batelier qui
+passe et qui rattache son petit bateau de pêche à un tronc de
+saule pour verser son filet, frétillant de truites, sur le sable.—C’est
+la rivière d’Ain, vous dit-il avec un air de fierté locale,
+la rivière qui descend du Jura et qui donne son nom à toutes
+ces plaines.
+</p>
+
+<p>
+«Si, comme moi, vous avez chevauché dans les déserts et
+dans les vallées des deux Arabies, vous reconnaîtrez bien vite
+que les hommes, descendus de Tartarie en Arabie, d’Arabie
+en Scythie, de Scythie en Hongrie, de Hongrie en Franche-Comté
+et en Bresse, ont passé par là, ont colonisé ces contrées,
+et ont imposé, au plus beau fleuve du pays, ce nom
+arabe et générique d’Ain (l’eau par excellence) dont, en perdant
+l’accent Aïn, nos pères, moins euphoniques que les
+Arabes, ont fait Ain, nom rendu guttural et trivial comme
+le balbutiement à bouche ouverte d’un enfant hébêté. C’est
+le progrès selon la doctrine des <i>progressistes indéfinis</i>, ces
+adorateurs obstinés du temps, qui les dément dans les langues
+<span class='pagenum'><a id='Page_22' name='Page_22'>[22]</a></span>
+comme dans les choses; ces adorateurs du présent, qui les dévore
+eux-mêmes, et qui anéantit tout autant de choses humaines
+qu’il en crée.
+</p>
+
+<p>
+«Mais pardon de cette digression déplacée à propos de la
+rivière d’Ain, à laquelle les Arabes avaient donné un nom
+sonore comme l’écho des rochers d’où il tombe en cascades
+de saphir, et que les Gaulois ont rendu muet comme leur
+langue de corne et de caoutchouc.
+</p>
+
+<p>
+«Après s’être rafraîchie et enivrée comme l’Arabe lui-même
+au vent, cette rivière, femelle du Rhône, se précipite
+vers lui en face des plaines du Dauphiné.»
+</p>
+
+<p>
+Ainsi donc, croyance poétique et gracieuse, ce serait aux
+Musulmans que ce torrent bleu, que nos paysans appellent la
+<i>grand’rivière</i>, doit son nom? Ce mot est, dans le désert, le
+nom de l’eau par excellence; c’est aussi le cristal de l’œil,
+limpide et pur comme l’eau des fontaines; c’est l’onde, pour
+nos populations qui n’ont jamais à souffrir de sa privation,
+Aïn pour la caravane altérée qui voit devant elle la délivrance
+et la vie. D’après M. de Lamartine, les tribus poursuivies
+par l’épée de Charles-Martel ont salué ces flots d’un cri de
+joie; ce cristal si pur, ce miroir étincelant, c’était la barrière
+infranchissable pour leurs ennemis; c’était la fin de leurs
+angoisses et de leur terreur; c’était, comme au désert, la
+délivrance, Aïn, la rivière! Pardonnons la distraction du
+poète, qui a fait venir nos parrains par la Hongrie et l’Allemagne;
+acceptons ce baptême dont se porte garant un homme
+de génie, et voyons-y une preuve de plus du rôle immense que
+les guerriers de l’Yemen et du Nedjd ont joué dans nos
+pays.
+</p>
+
+<p>
+Mais, diront à leur tour les hommes graves, oubliez-vous
+le vieux nom, l’antique nom de notre poétique rivière, le
+Danus des chartes et des cartulaires, le Dain de notre ancien
+langage, dont la racine paraît être la même que celle du
+<span class='pagenum'><a id='Page_23' name='Page_23'>[23]</a></span>
+Danube, nom autochthone, imposé, avant les Arabes, par
+nos pères les Gaulois<a name='FA_21' id='FA_21' href='#FN_21' class='fnanchor'>[21]</a>? Eh puis! ajouteront les personnes
+délicates, est-il convenable de s’enorgueillir d’une appellation
+qui rappellerait un peuple mécréant, souillé de sang, ennemi
+de notre culte, destructeur de nos lieux saints, enrichi des
+dépouilles de notre patrie, chargé de la malédiction de nos
+pères? La première observation seule a du poids, la seconde
+nous paraît futile.
+</p>
+
+<p>
+On n’a point horreur du souvenir des Romains; leurs monuments
+ont couvert notre sol, et cependant qu’étaient les
+compagnons de Romulus? d’infames bandits. Qu’étaient les
+guerriers de César? d’avides et rapaces conquérants. Qu’étaient
+nos gouverneurs? des proconsuls, dont le nom est resté
+comme une tache et une injure. Si, au lieu de maudire chaque
+trace de leurs pas sur le sol sacré de la Gaule, on se pare et
+on se vante des stygmates que nous ont laissés ces cruels
+dominateurs, toute vérité historique mise à part, toute étymologie
+réservée, que notre rivière s’appelle Aïn ou Dain, nous
+ne voyons pas qu’on ait à rougir de ce qui peut rappeler
+dans nos contrées les compatriotes de Job, d’Avicennes et
+d’Antar<a name='FA_22' id='FA_22' href='#FN_22' class='fnanchor'>[22]</a>.
+</p>
+
+<div class='footnotes sep4'>
+
+<h2>Notes de bas de page</h2>
+
+<div class='footnote' id='FN_1'>
+<p>
+<a href='#FA_1'>[1]</a> <cite>Hist. de France</cite>, tome 2.
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_2'>
+<p>
+<a href='#FA_2'>[2]</a> «L’émir Othman, l’<i>Adthima</i> des chroniqueurs.... l’émir Omar,
+l’<i>Amor</i> de nos chroniqueurs.» (<span class='smcap'>Henri Martin</span>, <cite>Hist. de France</cite>, tom. 2;
+<span class='smcap'>Reinaud</span>, <cite>Invasions des Sarrazins</cite>).
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_3'>
+<p>
+<a href='#FA_3'>[3]</a> «Le P. Berthaud et le P. Perry placent l’irruption des Sarrasins en
+Bourgogne en 719 et 720. Ces dates sont certainement inexactes.» (<span class='smcap'>Fouque</span>,
+<cite>Hist. de Châlon-sur-Saône</cite>).
+</p>
+
+<p>
+C’est, à son tour, victime d’une profonde erreur que Victor Fouque, dans
+son <cite>Histoire de Châlon-sur-Saône</cite>, prétend que la Bourgogne fut envahie
+de toutes parts par les Sarrasins, commandés <i>par leur roi Abdérame</i>.
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_4'>
+<p>
+<a href='#FA_4'>[4]</a> «L’Espagne fut donnée pour la seconde fois à Abdoulrahman-Ben-Abdoullah-el-Gafiki,
+l’année de l’hégire 113, et la neuvième du califat
+d’Accham (731)... Dès que cette révolte fut dissipée, Abdoulrahman résolut
+de porter la guerre au dehors et d’occuper les Arabes... il se jette dans
+l’Aquitaine, passe la Garonne et s’empare de Bordeaux... Il traverse le
+Périgord, la Saintonge, le Poitou... Il pénètre jusqu’à Tours... Eudes implore
+le secours de Charles-Martel. Ce prince, justement alarmé du danger
+commun, marche contre les Arabes avec toutes les forces de la Germanie,
+de l’Austrasie, de la Bourgogne et de la Neustrie.» (<span class='smcap'>Cardonne</span>, <cite>Hist. de
+l’Afr. et de l’Esp. sous la domination des Arabes</cite>.)
+</p>
+
+<p>
+«Les Barbares essayèrent même de se venger sur les provinces de
+Charles-Martel de la défaite que ce grand capitaine leur avait fait essuyer
+quelques années auparavant. Leurs détachements, <i>occupant de nouveau
+Lyon</i>, envahirent la Bourgogne.« (<span class='smcap'>Reinaud</span>, <cite>Invasions des Sarrazins</cite>.)
+</p>
+
+<p>
+On voit que l’envahissement de la Bourgogne suivit la bataille de Poitiers
+et ne la précéda pas.
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_5'>
+<p>
+<a href='#FA_5'>[5]</a> «Entreprenans la guerre d’un grand cœur (les Visigoths) appellerent
+en leur ayde les Sarrazins, encores ennemys des François, pour raison de
+la perte qu’ils avoient receu devant Tours. Ainsi tous ensemble viennent
+passer le Rhône... et tirant outre prindrent quasi toute la Bourgongne.»
+(Guillaume <span class='smcap'>Paradin</span>, <cite>Annales de Bourgogne</cite>.)
+</p>
+
+<p>
+«Alhatan... leur avoit commandé... de venger Abdérame et de se souvenir
+incessamment de la bataille de Tours. Les chefs qu’il leur donna
+furent Athin et Amorrhée qu’il jugea capables d’un si grand employ.....
+Nulle esglise ne fut espargnée. Lyon, Mascon, Auxerre et toutes les villes de
+la Bourgogne, jusqu’à Sens, furent saccagées.» (<span class='smcap'>Chorier</span>, <cite>Hist. du Dauphiné</cite>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_6'>
+<p>
+<a href='#FA_6'>[6]</a> «Le témoignage des plus anciennes chroniques nous assure que les
+Arabes, en franchissant les Pyrénées, entraînaient après eux leurs femmes
+et leurs enfants, comme s’ils eussent eu le dessein formé de s’établir sur ce
+sol nouveau pour eux.» (Noël <span class='smcap'>Desvergers</span>, <cite>L’Arabie</cite>, p. 342.)
+</p>
+
+<p>
+«<span lang="la" xml:lang="la">Sarraceni cum uxoribus et parvulis venientes...</span>» (<span class='smcap'>Warnefrid</span>, <cite>Hist.
+Longobard</cite>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_7'>
+<p>
+<a href='#FA_7'>[7]</a> «Au moment de ce vaste choc, les Arabes, encore dans la première
+ferveur de l’Islam, avaient plus d’humanité, de moralité, de lumières que
+les Franks.» (Henri <span class='smcap'>Martin</span>, <cite>Hist. de France</cite>, tom. 2.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_8'>
+<p>
+<a href='#FA_8'>[8]</a> «La Bourgogne paya chèrement sa résistance aux prétentions de
+Charles; ce royaume fut partagé entre ses partisans les plus dévoués. Les
+Bourguignons furent exclus de toutes les magistratures et subirent les
+conséquences d’une invasion étrangère.» (<span class='smcap'>Fouque</span>, <cite>Hist. de Châlon-s.-Saôn.</cite>)
+</p>
+
+<p>
+«Les bandes teutoniques commirent sans doute, dans cette expédition,
+de bien grandes violences, et les leudes franks ou germains, qui avaient
+dépossédé les comtes <i>romains</i> ou burgondes, exercèrent une bien brutale
+tyrannie, car il s’alluma contre le règne des Franks des haines qui ne tardèrent
+pas à éclater de la manière la plus étrange.» (<span class='smcap'>H. Martin</span>, <cite>Hist. de Fr.</cite>, t. 2.)
+</p>
+
+<p>
+«737.—Comme Martel estoit usurpateur, chaque gouverneur croyoit
+avoir droit de lui désobéir et trenchoit du souverain. Mauronte, gouverneur
+de Marseille, afin d’establir son indépendance, appella le secours des Sarrazins
+et leur livra la ville d’Avignon, d’où ils s’espandirent dans le Dauphiné,
+le Lyonnois et, s’il est croyable, même jusqu’à Sens.» (<span class='smcap'>Mezeray</span>,
+<cite>Hist. de France</cite>, t. <span class='smcap'>I</span>, p. 131.)
+</p>
+
+<p>
+«Les chefs des Bourguignons se flattèrent de recouvrer leur indépendance
+en favorisant l’invasion des Sarrasins.» (<span class='smcap'>Lateyssonnière</span>, <cite>Recherches
+hist. sur le départ. de l’Ain</cite>).
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_9'>
+<p>
+<a href='#FA_9'>[9]</a> «Les Juifs étaient très-nombreux, très-riches et très-forts dans les
+villes septimaniennes, et ils secondaient partout la conquête arabe de leurs
+intrigues en représailles des lois tyranniques portées contre eux.» (Henri
+<span class='smcap'>Martin</span>, <cite>Hist. de France</cite>, tom. 2.)
+</p>
+
+<p>
+«L’évêque Agobard écrivait à l’archevêque de Narbonne Nibridius:
+Dieu mercy, il n’y a plus de païens en ce pays, mais il y a quantité de
+juifs qui demeurent en cette ville et sont répandus dans tous les lieux
+circonvoisins.» (<span class='smcap'>Menestrier</span>, <cite>Hist. cons.</cite>, p. 216.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_10'>
+<p>
+<a href='#FA_10'>[10]</a> «Les Sarrasins, dans leurs invasions, avaient dévasté la plupart des
+églises et des couvents et avaient aliéné les biens affectés à ces établissements.»
+(<span class='smcap'>Reinaud</span>, <cite>Invasions des Sarrazins</cite>.)
+</p>
+
+<p>
+«<i>L’an 732?</i> Les Sarrasins entrent en Bourgogne, ruinent Autun jusques
+dans ses fondements. L’église de Saint-Nazaire fut brûlée avec tous les
+titres et papiers. Le monastère de Saint-Martin, fondé par la reine Brunehaut
+et où elle reçut la sépulture, fut pillé et détruit; celui de Saint-Jean-le-Grand
+eut le même sort.» (Edme <span class='smcap'>Thomas</span>, <cite>Hist. d’Autun</cite>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_11'>
+<p>
+<a href='#FA_11'>[11]</a> «Les villes qui avaient capitulé conservèrent leurs comtes goths ou
+<i>romains</i>, leurs lois nationales et l’exercice de leur culte dans l’intérieur
+des églises, mais à condition de recevoir des garnisons musulmanes, de
+payer le <i>kharad</i>, tribut annuel qui variait du dixième au cinquième des
+revenus fonciers, et peut-être de livrer leurs chevaux et leurs armes, ainsi
+que les trésors de l’Église. Les domaines de la couronne et des citoyens
+morts en combattant les musulmans furent confisqués, probablement avec
+la majeure partie des biens de l’Église.» (Henri <span class='smcap'>Martin</span>, <cite>Hist. de France</cite>,
+tom. 2.)
+</p>
+
+<p>
+«L’exercice libre de la religion chrétienne était garanti dans l’intérieur
+des églises. Toute église existante devait être conservée; mais il n’en pouvait
+point être bâti de nouvelles sans l’autorisation du chef musulman.—Les
+lois anciennes du pays étaient maintenues.» (<span class='smcap'>Hugo</span>, <cite>France monument.</cite>,
+p. 232.)
+</p>
+
+<p>
+«Les conditions imposées par les généraux musulmans aux villes conquises
+n’étaient ni trop onéreuses ni trop humiliantes, comparées au sort
+qui, à cette époque de barbarie, pesait sur les habitants des villes tombées
+au pouvoir d’ennemis chrétiens comme eux.» (<span class='smcap'>Hugo</span>, <cite>France monument.</cite>,
+p. 232.)
+</p>
+
+<p>
+«Dans les cérémonies publiques, à Messine, on déployait deux étendards.
+Le premier, qui appartenait aux Sarrasins, représentait une tour de
+couleur noire sur un champ vert; le second, qui servait aux Chrétiens,
+portait une croix d’or brodée sur un champ rouge.» (<span class='smcap'>Ebn-Khaldoun</span>,
+<cite>Hist. de l’Afrique</cite>...)
+</p>
+
+<p>
+«Abdoulah, conformément à la loi mahométane, et pour éviter l’effusion
+du sang, offrit la paix à Grégoire en lui donnant à choisir d’embrasser
+l’islamisme ou de se rendre tributaire du calife.» (<span class='smcap'>Cardonne</span>, <cite>Hist. de
+l’Afrique et de l’Espagne sous la domination des Arabes</cite>.)
+</p>
+
+<p>
+«On sait que de tout temps l’islamisme offrait aux vaincus deux partis:
+embrasser la foi musulmane ou payer tribut aux vainqueurs.» (<span class='smcap'>Ebn-Khaldoun.</span>)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_12'>
+<p>
+<a href='#FA_12'>[12]</a> «Il s’éleva des disputes entre les Arabes de Damas et ceux de
+l’Arabie-Heureuse, entre les Bérébères et les Modarites, et ils se firent une
+guerre cruelle.» (<span class='smcap'>Hidjazi</span>, <cite>Mesheb</cite>.)
+</p>
+
+<p>
+«La vérité est que les Berbers sont un peuple bien différent des
+Arabes, excepté peut-être les tribus des Sanhadjah et des Ketamah, qui,
+selon moi, doivent être regardées comme parentes et alliées des Arabes.
+Mais Dieu le sait.» (<cite>Histoire de l’Afrique sous la dynastie des Aghlabites</cite>,
+par <span class='smcap'>Ebn-Khaldoun</span>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_13'>
+<p>
+<a href='#FA_13'>[13]</a> «Se sentans estre entrés trop avant en France et craignans d’estre
+enclos, retournèrent en mesme hastiveté qu’ils estoient venus et retournant
+en arrière achevoyent de brusler et détruire ce qui estoit demouré entier,
+à ce que Charles-Martel ne trouvast rien d’entier après eux... Ainsi fut
+toute la Bourgongne mise en ruine par les Visigoths et par les Sarrazins.»
+(<span class='smcap'>G. Paradin</span>, <cite>Annales de Bourgogne</cite>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_14'>
+<p>
+<a href='#FA_14'>[14]</a> «Ravagée par les Huns, les Ostrogoths, les Bourguignons, les Lombards
+et les Sarrasins... la Maurienne est peut-être de toutes nos provinces
+celle dont l’histoire présente le plus de péripéties.» (<cite>Travaux de la
+Soc. d’hist. et d’archéologie de la province de Maurienne</cite>, I<sup>er</sup> Bulletin, p. <span class='smcap'>III</span>.)
+</p>
+
+<p>
+«Ce ne fut qu’au X<sup>e</sup> siècle que les Sarrasins coupèrent le rocher sur
+lequel s’élève la chapelle de sainte Thècle et desséchèrent la plaine.»
+(L’abbé <span class='smcap'>Truchet</span>, <cite>Notice historique sur la commune de Valloires</cite>).
+</p>
+
+<p>
+«Les Sarrasins avaient poussé leurs incursions jusque dans nos montagnes
+(942). Hugues de Provence, roi d’Italie, les chargea de garder les
+principaux passages des Alpes du nord contre son compétiteur Bérenger.»
+(<span class='smcap'>Ducis</span>, <cite>Voies romaines</cite>, Revue Savoisienne, 15 avril 1861.)
+</p>
+
+<p>
+«Nous citerons ensuite ces colons, d’origine évidemment étrangère,
+qui vivent depuis des siècles isolés dans les marais desséchés de la Bresse.»
+(<span class='smcap'>Roget de Belloguet</span>, <cite>Ethnogénie gauloise</cite>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_15'>
+<p>
+<a href='#FA_15'>[15]</a> Vers 645, le siége épiscopal de Châlon-sur-Saône était occupé par
+un homme de bien nommé Gratus qui habitait le faubourg Saint-Laurent:
+déjà à cette époque le faubourg communiquait avec la ville par un pont.
+Comme à Tournus et à Mâcon, le pont de Châlon servit de passage aux
+Sarrasins et fut détruit derrière eux.
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_16'>
+<p>
+<a href='#FA_16'>[16]</a> «Les Sarrasins qui ne purent opérer leur retraite en Provence ou
+en Septimanie, se réfugièrent dans les montagnes (du Jura et du Dauphiné)
+et s’y retranchèrent dans des positions inexpugnables. Notre province
+(Bresse et Bugey) est au nombre de celles qui furent envahies; elle leur
+servit de refuge en leur présentant des positions naturellement fortifiées.»
+(Paul <span class='smcap'>Guillemot</span>, <cite>Monog. hist. du Bugey</cite>).
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_17'>
+<p>
+<a href='#FA_17'>[17]</a> «Parcourons, dans le Bugey, les diverses contrées qui les recèlent,
+à commencer cette investigation dans la plaine qui s’étend des rivages du
+Rhône et de l’Ain jusqu’à la chaîne non interrompue des premières montagnes.
+C’est là que les Sarrasins sont arrivés après avoir saccagé Lyon.»
+(Paul <span class='smcap'>Guillemot</span>, <cite>Monog. hist. du Bugey</cite>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_18'>
+<p>
+<a href='#FA_18'>[18]</a> «L’agriculture, en Sicile, dut aux Arabes ses plus grands progrès: le
+coton apporté par eux des champs syriens, la canne à sucre, le frêne qui
+produit la manne, le pistachier, etc., etc.» (<span class='smcap'>Ebn-Khaldoun</span>, <cite>Histoire de
+l’Afrique</cite>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_19'>
+<p>
+<a href='#FA_19'>[19]</a> <cite>Courrier de l’Ain</cite>, la <i>Presse</i>.
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_20'>
+<p>
+<a href='#FA_20'>[20]</a> Nous pouvons citer: alcali, alchimie, alcool, algarade, algèbre, almanach,
+ambre, amiral, mesquin.
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_21'>
+<p>
+<a href='#FA_21'>[21]</a> «Mots qui se rapportent également au kymrique et au gaëlique:
+<i>dan</i>, audacieux, violent.» (<span class='smcap'>Roget</span>, baron de <span class='smcap'>Belloguet</span>, <cite>Ethnogén. gaul.</cite>)
+</p>
+
+<p>
+«Si le nom originaire est Ain, c’est un vieux mot celtique qui signifie
+<i>source</i>, <i>fontaine</i>, et qui même a cette signification dans les langues orientales.»
+(<span class='smcap'>Bacon-Tacon</span>, <cite>Recherches sur les origines celtiques</cite>, t. <span class='smcap'>I</span>, p. 192).
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_22'>
+<p>
+<a href='#FA_22'>[22]</a> Voyez Paradin, Chorier, J.-Cl. Martin, Jean Brunet, Lapierre,
+Thomas Riboud, Lateyssonnière, MM. Paul Guillemot, Chaix, Borel
+d’Hauterive, Fauché-Prunelle, D. Monnier, etc.
+</p>
+</div>
+</div>
+
+<div>*** END OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK 44242 ***</div>
+</body>
+</html>
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+The Project Gutenberg EBook of Note sur l'invasion des Sarrasins dans le
+Lyonnais, by Aimé Vingtrinier
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+Title: Note sur l'invasion des Sarrasins dans le Lyonnais
+
+Author: Aimé Vingtrinier
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+Release Date: November 21, 2013 [EBook #44242]
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+Language: French
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+
+
+
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+
+À l'exception des erreurs clairement introduites par le typographe,
+et des corrections suivantes, le texte d'origine est inchangé.
+
+ p. 13: «,» remplacée par «;» dans «; à une faible distance»,
+ p. 20: ajout d'un guillemet ouvrant devant la première note de bas
+ de page (numérotée 18 dans cette édition électronique).
+
+
+
+
+ NOTE
+ SUR L'INVASION DES SARRASINS
+ DANS LE LYONNAIS.
+
+
+ Lyon.--Typ. d'A. Vingtrinier.
+
+
+
+
+ NOTE
+ SUR L'INVASION DES SARRASINS
+ DANS LE LYONNAIS
+
+ PAR
+ AIMÉ VINGTRINIER
+
+
+ .... Au surplus, le fait de l'incendie se déduit
+ si naturellement de la présence des Sarrasins, constatée
+ par la nomenclature locale, que l'on pourrait
+ déjà se rendre à cette évidence lors même que la
+ légende latine ne nous y autoriserait pas. Tout
+ le pays est couvert de noms mauresques.
+
+ DÉSIRÉ MONNIER, _Annuaire du Jura_, 1842.
+
+
+ La tradition elle-même n'a recueilli que des
+ contes sur les conquêtes et les talents des Sarrasins.
+
+ CHAMBEYRON, _Recherches historiques
+ sur la ville de Rive-de-Gier_.
+
+
+ [Illustration]
+
+
+ LYON
+ IMPRIMERIE D'AIMÉ VINGTRINIER
+ Rue de la Belle-Cordière, 14.
+
+ 1862
+
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+
+
+NOTE
+
+SUR L'INVASION DES SARRASINS
+
+DANS LE LYONNAIS.
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+
+Un des évènements les plus graves de l'histoire de France, dont les
+conséquences ont failli changer non-seulement la face de notre pays,
+mais de la chrétienté tout entière, l'envahissement du pays des
+Visigoths et des Francs par les conquérants arabes a été si peu ou si
+mal décrit qu'on ne sait aujourd'hui où s'enquérir des détails de cette
+épopée, et que tout manque à l'investigation du savant.
+
+Un samedi de la fin d'octobre 732, dit M. Henri Martin, le 3 octobre
+732, disent quelques autres écrivains, Abdérame fut vaincu, dans les
+plaines de Poitiers, par le célèbre chef austrasien Charles-Martel; la
+déroute des Arabes fut affreuse; leur camp, rempli de richesses, fut
+pillé, et eux-mêmes eurent une peine infinie à regagner Narbonne ou à
+traverser les Pyrénées; pour ce premier fait, c'est à peu près tout.
+Arabes et chrétiens gardent sur cette défaite un prudent silence. Et
+cependant la France était sauvée, le christianisme restait possesseur
+du continent européen, et la fortune du Prophète avait reçu un échec
+dont la honte ne devait jamais s'effacer.
+
+On sait encore vaguement que Lyon, Mâcon, Autun furent pris et
+ravagés, que la ville d'Auxerre eut le même sort; que sa citadelle
+résista; enfin que l'archevêque de Sens repoussa et mit en fuite les
+envahisseurs; mais là aussi les dates précises et les détails nous
+font défaut. D'ailleurs le vaillant prélat n'eut-il affaire qu'à
+une troupe de fourrageurs traversant la France par l'Aquitaine et
+l'Orléanais avant le désastre de Poitiers, et venue, par hasard, se
+heurter aux murs de sa petite cité, comme l'avance M. Henri Martin[1],
+ou eut-il à repousser cette armée formidable d'Athim et d'Amorrhée[2],
+venue, quatre ans plus tard, par la vallée du Rhône, pour attaquer
+les Francs au centre de leur puissance, comme le soutiennent nos
+vieux chroniqueurs bourguignons? les Arabes, qui devaient atteindre
+bientôt à une si haute civilisation, vinrent-ils en conquérants ou en
+ravageurs? voulaient-ils piller ou coloniser? détruisirent-ils dès leur
+premier choc toutes les cités qu'ils trouvèrent sur leur passage ou
+ne s'attaquèrent-ils qu'aux biens du clergé? les avis sont partagés,
+ou plutôt l'histoire moderne n'a pas d'avis. Nul écrivain ne paraît
+attacher quelque importance à ces détails. Moins dédaigneux, nous
+allons essayer de nous prononcer, et dès l'abord nous ne cacherons
+point nos sympathies pour nos vieux chroniqueurs, et cela uniquement
+parce qu'ils habitaient le pays où ces terribles événements se sont
+passés.
+
+ [1] _Hist. de France_, tome 2.
+
+ [2] «L'émir Othman, l'_Adthima_ des chroniqueurs.... l'émir Omar,
+ l'_Amor_ de nos chroniqueurs.» (HENRI MARTIN, _Hist. de France_,
+ tom. 2; REINAUD, _Invasions des Sarrazins_).
+
+L'histoire écrite au fond d'une bibliothèque, avec l'aide de copistes
+et de collectionneurs qui cherchent des dates et vous préparent vos
+matériaux, pourra bien briller par un plan vaste, une philosophie
+sévère, un style magique et des qualités d'ensemble qui assurent la
+vogue à votre ouvrage et l'immortalité à votre nom; mais si les grands
+faits sont rapportés d'une manière satisfaisante, combien de détails
+vous échappent! combien d'erreurs vous répétez avec vos devanciers[3]!
+Aujourd'hui la science commence à vouloir visiter elle-même les lieux
+qu'elle décrit. Elle suit pas à pas la marche des armées, cherche le
+gué des rivières, tourne le flanc des montagnes et voit pourquoi telle
+invasion s'est arrêtée. Des hommes spéciaux font l'histoire d'une cité
+ou d'une province et, en face d'un champ de bataille, comprennent le
+choc des bataillons, voient fuir les vaincus, campent ou marchent avec
+les vainqueurs. La chronique du château explique celle de la contrée,
+la tradition vient en aide aux documents écrits; l'histoire provinciale
+se forme, et, sous le contrôle de l'homme du pays qui a vu, l'histoire
+générale se complète ou se rectifie, l'obscurité se dissipe, et le
+savoir patient trouve enfin la vérité.
+
+ [3] «Le P. Berthaud et le P. Perry placent l'irruption des
+ Sarrasins en Bourgogne en 719 et 720. Ces dates sont certainement
+ inexactes.» (FOUQUE, _Hist. de Châlon-sur-Saône_).
+
+ C'est, à son tour, victime d'une profonde erreur que Victor Fouque,
+ dans son _Histoire de Châlon-sur-Saône_, prétend que la Bourgogne
+ fut envahie de toutes parts par les Sarrasins, commandés _par leur
+ roi Abdérame_.
+
+Pour connaître ce qu'a été le séjour des Sarrasins dans nos contrées,
+il faut, non pas consulter les érudits, surtout ceux qui ont écrit
+loin de nous, mais aller de chaumière en chaumière, des marécages
+de la Dombes aux flancs escarpés du Jura. Là, tout vous rappellera
+le passage, les triomphes ou les défaites de ces guerriers que le
+fanatisme amena du fond des déserts de l'Asie, et dont la grande
+histoire a si bien perdu les traces qu'elle ne sait plus où les
+trouver. Une lettre de Leidrade à Charlemagne nous apprend qu'il relève
+les monastères détruits par les Sarrasins; la Chronique de l'abbaye
+d'Ambronay atteste que le monastère, fondé par saint Maur, l'église
+consacrée à la Sainte-Vierge et la statue, objet de la vénération des
+fidèles, ont été renversés par les païens. Ces païens n'étaient pas
+les Hongrois venus deux siècles plus tard, puisque saint Barnard avait
+déjà, en 803, reconstruit la chapelle et le couvent. L'histoire de Lyon
+nous apprend que les recluseries de la Platière et de Saint-Clair, les
+églises de Saint-Georges et de Saint-Paul, les abbayes déjà célèbres
+de Saint-Pierre et de l'Ile-Barbe étaient tombées sous les coups des
+sectateurs du Coran, mais ni M. Henri Martin ni nos autres historiens
+ne nous disent quel fut le sort des armées musulmanes après les
+derniers triomphes de Charles-Martel; M. Reinaud ne croit pas que des
+tribus sarrasines aient pu rester parmi nous, et M. Pilot met au nombre
+des fables la prise de Grenoble par les Maures et la présence de bandes
+sarrasines dans les montagnes du Dauphiné.
+
+Quant à nous qui, au fond de nos vallées, avons vu ces familles au
+teint brun, aux coutumes bizarres, au nom sans contredit oriental, et
+qui se disent elles-mêmes d'origine arabe, nous croyons qu'on pourrait
+compléter ce que l'histoire ne dit pas ou rectifier ce qu'elle avance
+d'erroné. Les tribus arabes n'ont pas regagné l'Espagne, et cependant
+elles n'ont pas été anéanties par les Francs. Poursuivies par un ennemi
+supérieur, elles ont traversé la Saône et se sont réfugiées dans les
+marécages de la Dombes, les forêts de la Bresse ou les gorges escarpées
+du Jura et du Dauphiné; la preuve, c'est qu'elles y sont encore. Si
+l'homme qui écrit l'histoire d'un peuple ne peut approfondir tous les
+faits, si l'écrivain systématique nie, de parti pris, ce qui lui paraît
+singulier ou bizarre, c'est aux esprits moins vastes ou moins entiers à
+descendre dans ces infiniment petits qui auront peut-être aussi un jour
+leur utilité et leur importance.
+
+Battus à Poitiers, qu'ils traversaient en allant s'emparer du trésor
+de Saint-Martin, et bien avant d'avoir atteint cette Neustrie qu'on
+leur avait dite si opulente et si bonne à ravager[4], les Arabes et
+les Bérébères, âpres à la conquête, avides de pillage et ardents à
+se venger, après avoir, pendant quatre ans, réparé les désastres de
+leur défaite, attaquèrent le pays des Francs par la partie orientale,
+plus facile à envahir. D'immenses renforts accourus de l'Afrique
+et de l'Asie avaient couvert l'Espagne, franchi les Pyrénées et
+s'étaient répandus dans cette Septimanie où déjà plus d'une fois les
+Visigoths leur avaient tendu la main[5]. Organisés en vue de toutes
+les prévisions; accompagnés de leurs femmes et de leurs troupeaux comme
+pour coloniser[6], mais surtout fiers d'une cavalerie nombreuse et sans
+égale, les Arabes remontèrent le cours du Rhône sans presque livrer de
+combats[7]. La Bourgogne, écrasée par le despotisme et l'avidité des
+Francs, ouvrit ses portes aux musulmans qu'elle reçut presque comme
+des libérateurs[8]. Le clergé seul protesta contre les propagateurs
+d'une religion nouvelle, et le clergé seul eut à subir les lois de la
+guerre avec une impitoyable rigueur. Les juifs surtout firent cause
+commune avec les musulmans, et leur influence, puissante dans toutes
+les cités, ne contribua pas peu à faciliter l'envahissement du pays[9].
+A Loudun, comme ils appelaient Lyon, les musulmans s'emparèrent des
+biens de l'Église, renversèrent les couvents[10], mais respectèrent la
+population; le culte extérieur fut seul défendu, les moeurs et les lois
+furent conservés[11]. Suivant leur tactique, et pour ne pas affaiblir
+leur armée, les Arabes confièrent la garde de la cité aux juifs et à
+quelques seigneurs bourguignons, et, comme force morale, laissèrent un
+poste de cavaliers autour du drapeau musulman. Ici, particulièrement,
+l'histoire est muette, mais la tradition parle, et grâce à elle on peut
+encore suivre le fil des événements.
+
+ [4] «L'Espagne fut donnée pour la seconde fois à
+ Abdoulrahman-Ben-Abdoullah-el-Gafiki, l'année de l'hégire 113,
+ et la neuvième du califat d'Accham (731)... Dès que cette révolte
+ fut dissipée, Abdoulrahman résolut de porter la guerre au dehors
+ et d'occuper les Arabes... il se jette dans l'Aquitaine, passe
+ la Garonne et s'empare de Bordeaux... Il traverse le Périgord, la
+ Saintonge, le Poitou... Il pénètre jusqu'à Tours... Eudes implore
+ le secours de Charles-Martel. Ce prince, justement alarmé du
+ danger commun, marche contre les Arabes avec toutes les forces de
+ la Germanie, de l'Austrasie, de la Bourgogne et de la Neustrie.»
+ (CARDONNE, _Hist. de l'Afr. et de l'Esp. sous la domination des
+ Arabes_.)
+
+ «Les Barbares essayèrent même de se venger sur les provinces de
+ Charles-Martel de la défaite que ce grand capitaine leur avait fait
+ essuyer quelques années auparavant. Leurs détachements, _occupant
+ de nouveau Lyon_, envahirent la Bourgogne.« (REINAUD, _Invasions
+ des Sarrazins_.)
+
+ On voit que l'envahissement de la Bourgogne suivit la bataille de
+ Poitiers et ne la précéda pas.
+
+ [5] «Entreprenans la guerre d'un grand coeur (les Visigoths)
+ appellerent en leur ayde les Sarrazins, encores ennemys des
+ François, pour raison de la perte qu'ils avoient receu devant
+ Tours. Ainsi tous ensemble viennent passer le Rhône... et tirant
+ outre prindrent quasi toute la Bourgongne.» (Guillaume PARADIN,
+ _Annales de Bourgogne_.)
+
+ «Alhatan... leur avoit commandé... de venger Abdérame et de se
+ souvenir incessamment de la bataille de Tours. Les chefs qu'il
+ leur donna furent Athin et Amorrhée qu'il jugea capables d'un si
+ grand employ..... Nulle esglise ne fut espargnée. Lyon, Mascon,
+ Auxerre et toutes les villes de la Bourgogne, jusqu'à Sens, furent
+ saccagées.» (CHORIER, _Hist. du Dauphiné_.)
+
+ [6] «Le témoignage des plus anciennes chroniques nous assure que
+ les Arabes, en franchissant les Pyrénées, entraînaient après eux
+ leurs femmes et leurs enfants, comme s'ils eussent eu le dessein
+ formé de s'établir sur ce sol nouveau pour eux.» (Noël DESVERGERS,
+ _L'Arabie_, p. 342.)
+
+ «Sarraceni cum uxoribus et parvulis venientes...» (WARNEFRID,
+ _Hist. Longobard_.)
+
+ [7] «Au moment de ce vaste choc, les Arabes, encore dans la
+ première ferveur de l'Islam, avaient plus d'humanité, de moralité,
+ de lumières que les Franks.» (Henri MARTIN, _Hist. de France_, tom.
+ 2.)
+
+ [8] «La Bourgogne paya chèrement sa résistance aux prétentions
+ de Charles; ce royaume fut partagé entre ses partisans les plus
+ dévoués. Les Bourguignons furent exclus de toutes les magistratures
+ et subirent les conséquences d'une invasion étrangère.» (FOUQUE,
+ _Hist. de Châlon-s.-Saôn._)
+
+ «Les bandes teutoniques commirent sans doute, dans cette
+ expédition, de bien grandes violences, et les leudes franks ou
+ germains, qui avaient dépossédé les comtes _romains_ ou burgondes,
+ exercèrent une bien brutale tyrannie, car il s'alluma contre le
+ règne des Franks des haines qui ne tardèrent pas à éclater de la
+ manière la plus étrange.» (H. MARTIN, _Hist. de Fr._, t. 2.)
+
+ «737.--Comme Martel estoit usurpateur, chaque gouverneur croyoit
+ avoir droit de lui désobéir et trenchoit du souverain. Mauronte,
+ gouverneur de Marseille, afin d'establir son indépendance, appella
+ le secours des Sarrazins et leur livra la ville d'Avignon, d'où ils
+ s'espandirent dans le Dauphiné, le Lyonnois et, s'il est croyable,
+ même jusqu'à Sens.» (MEZERAY, _Hist. de France_, t. I, p. 131.)
+
+ «Les chefs des Bourguignons se flattèrent de recouvrer
+ leur indépendance en favorisant l'invasion des Sarrasins.»
+ (LATEYSSONNIÈRE, _Recherches hist. sur le départ. de l'Ain_).
+
+ [9] «Les Juifs étaient très-nombreux, très-riches et très-forts
+ dans les villes septimaniennes, et ils secondaient partout
+ la conquête arabe de leurs intrigues en représailles des lois
+ tyranniques portées contre eux.» (Henri MARTIN, _Hist. de France_,
+ tom. 2.)
+
+ «L'évêque Agobard écrivait à l'archevêque de Narbonne Nibridius:
+ Dieu mercy, il n'y a plus de païens en ce pays, mais il y a
+ quantité de juifs qui demeurent en cette ville et sont répandus
+ dans tous les lieux circonvoisins.» (MENESTRIER, _Hist. cons._, p.
+ 216.)
+
+ [10] «Les Sarrasins, dans leurs invasions, avaient dévasté
+ la plupart des églises et des couvents et avaient aliéné les
+ biens affectés à ces établissements.» (REINAUD, _Invasions des
+ Sarrazins_.)
+
+ «_L'an 732?_ Les Sarrasins entrent en Bourgogne, ruinent Autun
+ jusques dans ses fondements. L'église de Saint-Nazaire fut brûlée
+ avec tous les titres et papiers. Le monastère de Saint-Martin,
+ fondé par la reine Brunehaut et où elle reçut la sépulture, fut
+ pillé et détruit; celui de Saint-Jean-le-Grand eut le même sort.»
+ (Edme THOMAS, _Hist. d'Autun_.)
+
+ [11] «Les villes qui avaient capitulé conservèrent leurs comtes
+ goths ou _romains_, leurs lois nationales et l'exercice de leur
+ culte dans l'intérieur des églises, mais à condition de recevoir
+ des garnisons musulmanes, de payer le _kharad_, tribut annuel qui
+ variait du dixième au cinquième des revenus fonciers, et peut-être
+ de livrer leurs chevaux et leurs armes, ainsi que les trésors de
+ l'Église. Les domaines de la couronne et des citoyens morts en
+ combattant les musulmans furent confisqués, probablement avec la
+ majeure partie des biens de l'Église.» (Henri MARTIN, _Hist. de
+ France_, tom. 2.)
+
+ «L'exercice libre de la religion chrétienne était garanti dans
+ l'intérieur des églises. Toute église existante devait être
+ conservée; mais il n'en pouvait point être bâti de nouvelles
+ sans l'autorisation du chef musulman.--Les lois anciennes du pays
+ étaient maintenues.» (HUGO, _France monument._, p. 232.)
+
+ «Les conditions imposées par les généraux musulmans aux villes
+ conquises n'étaient ni trop onéreuses ni trop humiliantes,
+ comparées au sort qui, à cette époque de barbarie, pesait sur les
+ habitants des villes tombées au pouvoir d'ennemis chrétiens comme
+ eux.» (HUGO, _France monument._, p. 232.)
+
+ «Dans les cérémonies publiques, à Messine, on déployait deux
+ étendards. Le premier, qui appartenait aux Sarrasins, représentait
+ une tour de couleur noire sur un champ vert; le second, qui servait
+ aux Chrétiens, portait une croix d'or brodée sur un champ rouge.»
+ (EBN-KHALDOUN, _Hist. de l'Afrique_...)
+
+ «Abdoulah, conformément à la loi mahométane, et pour éviter
+ l'effusion du sang, offrit la paix à Grégoire en lui donnant à
+ choisir d'embrasser l'islamisme ou de se rendre tributaire du
+ calife.» (CARDONNE, _Hist. de l'Afrique et de l'Espagne sous la
+ domination des Arabes_.)
+
+ «On sait que de tout temps l'islamisme offrait aux vaincus deux
+ partis: embrasser la foi musulmane ou payer tribut aux vainqueurs.»
+ (EBN-KHALDOUN.)
+
+Lyon était déjà une ville puissante qui, en se soulevant, aurait pu
+écraser même une forte garnison. Il n'eût pas été prudent de confier
+à son incertaine amitié la vie ou la liberté des soldats laissés à
+la garde du drapeau; mais Lyon est arrosé par deux larges fleuves;
+des collines l'entourent: sur quel point dut s'établir le poste arabe
+qui devait maintenir la paix de la cité, assez près pour savoir les
+nouvelles, assez loin pour ne pas être envahi par la révolte? les
+livres ne le savent pas, mais les gens de la campagne le savent, et
+c'est d'eux que nous l'avons appris.
+
+Plus haut que la vieille ville gauloise, assise entre le premier
+confluent de ses deux fleuves; plus haut que le faubourg moderne de
+la Croix-Rousse, qui n'existait pas alors, la montagne allongée que le
+Rhône et la Saône entourent perd de sa largeur; on dirait que les deux
+fleuves amoureux, impatients de s'embrasser, ont fait un effort pour
+s'unir avant d'avoir à baigner les murs de la ville; en cet endroit
+fut jadis une villa romaine; aujourd'hui un riche et gracieux village
+y répand ses maisons. Un double chemin descend d'un côté au Rhône, de
+l'autre à la Saône; le Mont-d'Or s'étend vis-à-vis, comme un rideau. On
+a nommé Caluire, c'est là que s'élevait le drapeau du croissant.
+
+Le camp arabe, gourbis ou tentes, était là, en effet, dans une
+admirable position, non loin des rivières, à l'abri de toute insulte,
+dominant l'espace, et prêt à s'envoler au rapide galop de ses coursiers
+si un danger sérieux l'eût menacé. Un conquérant voulant garder
+Lyon avec une poignée de soldats, ne pourrait choisir un meilleur
+emplacement; et, en effet, aujourd'hui même, c'est non loin de Caluire
+que le gouvernement français a établi le camp qui lui répond de
+la cité, sur l'emplacement où jadis Albin avait campé ses légions.
+Romains, Français, Arabes, peuples au génie militaire, ont compris
+que Caluire est la clef de la ville; la topographie n'a pas changé, le
+secret est resté le même; c'est toujours de là qu'on dominera Lyon.
+
+Nous n'avons pas de preuves _écrites_ de ce que nous avançons, mais
+le mamelon escarpé qui domine la campagne des Brosses, au levant de
+Caluire, s'appelle la _butte des Sarrasins_; le chemin qui descend au
+Rhône à travers les Brosses s'appelle la _voie des Sarrasins_; à une
+faible distance de là, au nord-est, se trouve la _ferme des Sarrasins_.
+
+Les Arabes et les Bérébères envahirent la Burgondie, et, avides
+de conquêtes, fidèles à leur mission de convertir le monde, ils se
+dirigèrent vers le nord à la recherche des soldats de Charles-Martel.
+L'armée des Francs vaincue, l'Europe appartenait au croissant, c'en
+était fait de la chrétienté, et le rêve des Musulmans de rentrer
+dans leur patrie par Constantinople s'accomplissait; mais avant de
+rencontrer les fiers soldats de l'Austrasie, les Arabes trouvèrent
+un ennemi bien plus puissant que les Francs, plus terrible que ces
+géants couverts de fer qui les avaient vaincus à Poitiers, ennemi dont
+les historiens n'ont jamais parlé, qui arrêta leur élan, brisa leur
+vigueur, dompta leur courage et méritait cependant d'être signalé pour
+avoir, mieux que la massue de Martel, protégé le sol gaulois contre la
+nuée de ses envahisseurs.
+
+Lorsque le peuple de Dieu prévariquait, lorsqu'il épousait des femmes
+infidèles et encensait les idoles, l'esprit divin se retirait de lui,
+ses chefs étaient frappés d'aveuglement, et il était livré sans pitié
+à la fureur des Amalécites et des Philistins. Lorsque les enfants du
+Prophète eurent prévariqué à leur tour, lorsque la loi la plus formelle
+du livre sacré eut été violée dans les caves profondes de la Bourgogne,
+que le vin eut coulé dans leurs festins, que les tables n'eurent plus
+horreur de se charger des viandes impures et maudites de la Séquanie,
+que les lèvres des vrais croyants eurent savouré la chair immonde
+des porcs du pays des Eduens, c'en fut fait du fanatisme guerrier des
+conquérants; la gloire du croissant s'éclipsa, l'amour du prosélytisme
+s'éteignit. Ne cherchez pas ailleurs la cause de la défaite des Arabes;
+la foi n'y était plus; leur élan incertain ne put emporter la citadelle
+d'Auxerre, et il vint mourir contre les faibles remparts de la ville de
+Sens.
+
+Alors, des bruits sinistres circulèrent au milieu des tribus. La
+jalousie qui avait toujours régné entre les Asiatiques et les Africains
+se réveilla plus active et plus ardente que jamais. Les Bérébères, les
+premiers, déclarèrent qu'ils se contentaient des biens de la terre, et
+que d'autres pouvaient porter la semence de la parole jusque dans les
+neiges d'Upsal, dans ces lieux reculés et inconnus où Odin était encore
+adoré comme un dieu[12]. Alors l'archevêque Ebbon n'eut qu'à se montrer
+à la tête de ses guerriers; l'effroi des grandes forêts de la Gaule du
+nord, le souvenir des frais coteaux de Dijon et de Nuits firent tourner
+la tête en arrière aux cavaliers qui avaient bravé le simoun, traversé
+l'Afrique brûlante, et qui devaient au départ conquérir le monde[13].
+Leurs escadrons légers se répandirent sur les bords de la Saône, et,
+quand Childebrand vint à marches forcées, par le centre de la France,
+couper les renforts qui remontaient le Rhône, il y avait longtemps
+que l'armée d'Athim et d'Amorrhée n'était plus un danger pour les
+chrétiens.
+
+ [12] «Il s'éleva des disputes entre les Arabes de Damas et ceux de
+ l'Arabie-Heureuse, entre les Bérébères et les Modarites, et ils se
+ firent une guerre cruelle.» (HIDJAZI, _Mesheb_.)
+
+ «La vérité est que les Berbers sont un peuple bien différent des
+ Arabes, excepté peut-être les tribus des Sanhadjah et des Ketamah,
+ qui, selon moi, doivent être regardées comme parentes et alliées
+ des Arabes. Mais Dieu le sait.» (_Histoire de l'Afrique sous la
+ dynastie des Aghlabites_, par EBN-KHALDOUN.)
+
+ [13] «Se sentans estre entrés trop avant en France et craignans
+ d'estre enclos, retournèrent en mesme hastiveté qu'ils estoient
+ venus et retournant en arrière achevoyent de brusler et détruire ce
+ qui estoit demouré entier, à ce que Charles-Martel ne trouvast rien
+ d'entier après eux... Ainsi fut toute la Bourgongne mise en ruine
+ par les Visigoths et par les Sarrazins.» (G. PARADIN, _Annales de
+ Bourgogne_.)
+
+Mais que faire de ces hordes souillées? de ces tribus qui n'avaient
+plus de musulman que le nom? Les ramener en Espagne, en Afrique,
+en Arabie, peut-être? Montrer aux croyants de Médine et de Damas
+l'épouvantable spectacle de musulmans ivres de vin ou gorgés des
+graisses impures des troupeaux de la Séquanie! Un sacrifice était
+nécessaire, il fut ordonné. L'influence occulte, mais toute-puissante
+des marabouts et des imans, profita des divisions qui régnaient entre
+les Arabes et les Bérébères; l'armée fut condamnée à périr, et chaque
+scheik, chaque émir dispersa ses cavaliers dans les forêts de la haute
+Bourgogne, les marécages de la Dombes, les rochers du Bugey et du
+Dauphiné[14], au milieu desquels, trois cents ans plus tard, les exilés
+vivaient encore à l'état de nation à part, de peuple séparé et maudit,
+avec ses lois, sa religion, ses moeurs, et où, aujourd'hui même, on
+les retrouve avec étonnement soit organisés en villages, soit, plus
+souvent, comme familles maintenues intactes, sans mélanges avec leurs
+voisins et ayant conservé sinon le culte, du moins le type physique et
+moral de la race à laquelle appartenaient leurs pères.
+
+ [14] «Ravagée par les Huns, les Ostrogoths, les Bourguignons,
+ les Lombards et les Sarrasins... la Maurienne est peut-être de
+ toutes nos provinces celle dont l'histoire présente le plus de
+ péripéties.» (_Travaux de la Soc. d'hist. et d'archéologie de la
+ province de Maurienne_, Ier Bulletin, p. III.)
+
+ «Ce ne fut qu'au Xe siècle que les Sarrasins coupèrent le rocher
+ sur lequel s'élève la chapelle de sainte Thècle et desséchèrent
+ la plaine.» (L'abbé TRUCHET, _Notice historique sur la commune de
+ Valloires_).
+
+ «Les Sarrasins avaient poussé leurs incursions jusque dans nos
+ montagnes (942). Hugues de Provence, roi d'Italie, les chargea
+ de garder les principaux passages des Alpes du nord contre son
+ compétiteur Bérenger.» (DUCIS, _Voies romaines_, Revue Savoisienne,
+ 15 avril 1861.)
+
+ «Nous citerons ensuite ces colons, d'origine évidemment étrangère,
+ qui vivent depuis des siècles isolés dans les marais desséchés de
+ la Bresse.» (ROGET DE BELLOGUET, _Ethnogénie gauloise_.)
+
+Lorsque Childebrand eut accompli sa mission et campé avec l'avant-garde
+des Francs sur les bords du Rhône, que l'approche de Charles-Martel
+eut été signalée par toutes les voix de la renommée, la fureur des
+musulmans se réveilla, et ils brûlèrent toutes les cités au milieu
+desquelles ils purent promener leur vengeance. Alors eurent lieu
+ces atrocités qui remplirent d'effroi les populations, alors on vit
+ces dévastations dont les siècles ont eu de la peine à guérir les
+blessures, mais dont ils n'ont pu effacer le souvenir.
+
+Parmi les lieux où on peut retrouver des traces de la fuite
+des musulmans, lorsqu'ils traversèrent la Saône, nous citerons
+particulièrement Châlon[15], Tournus, Boz, Uchizy, Sermoyer,
+Fleurville, Ozan, Arbigny, Mâcon, Lyon. Plusieurs tribus s'arrêtèrent
+dès qu'elles eurent mis la rivière entre elles et leurs ennemis;
+à Pont-de-Veyle, à Louhans, en d'autres lieux encore, on montre la
+_chaussée_ ou la digue des Sarrasins, dénomination qui, si elle ne
+prouve pas que ces ouvrages leur appartiennent, indique du moins
+combien leur nom est encore vivant dans le pays. Dans le Bugey,
+trois villes importantes furent détruites, et deux d'entre elles si
+complètement, qu'on ne sait où trouver le lieu où elles existaient.
+Isernore, à la douce appellation, a conservé les ruines d'un temple
+célèbre; Orindinse a dû s'élever au confluent de l'Ange et de l'Oignin;
+la ville des Tattes devait être sur les bords de la Valserine, non
+loin de Châtillon-de-Michaille. La _Chronique de Saint-Amand_, un des
+plus anciens documents de l'histoire du Bugey, ne donne que des détails
+incomplets à cet égard.
+
+ [15] Vers 645, le siége épiscopal de Châlon-sur-Saône était
+ occupé par un homme de bien nommé Gratus qui habitait le faubourg
+ Saint-Laurent: déjà à cette époque le faubourg communiquait avec
+ la ville par un pont. Comme à Tournus et à Mâcon, le pont de Châlon
+ servit de passage aux Sarrasins et fut détruit derrière eux.
+
+Les monastères de Nantua, d'Ambronay et de Saint-Rambert-de-Joux, dans
+la gorge de l'Albarine, furent renversés. La Franche-Comté, la Savoie,
+le Dauphiné se couvrirent de ruines. Les histoires de ces provinces
+donnent de douloureux détails sur les ravages que commirent les
+Orientaux.
+
+Les tribus qui occupaient Lyon n'épargnèrent pas notre cité. Les
+troupes en marche et qui avaient dépassé Valence, vinrent se réfugier
+dans nos murs. Quand elles virent que la fortune devenait contraire et
+que la cause de l'islam ne se relèverait pas, le pillage, l'incendie
+et la dévastation assouvirent le besoin de vengeance de ces coeurs
+ulcérés; Romains, Gaulois, Francs, Visigoths, tous devinrent égaux
+devant les terribles musulmans, qui n'étaient plus des convertisseurs
+zélés, mais de farouches ennemis. Ce fut un massacre général, une ruine
+universelle, et dès lors le peuple de la cité ne prononça plus qu'avec
+une superstitieuse terreur le nom de cette race maudite de Dieu.
+
+La ville détruite, les hordes musulmanes se retirèrent vers les
+montagnes à l'orient de Lyon[16], où elles rejoignirent les autres
+tribus fugitives; mais désormais indépendantes, elles ne réunirent
+leurs drapeaux que pour lutter contre les difficultés du moment et
+pour se frayer un passage à travers les populations belliqueuses
+de ces contrées. La plaine d'Ambérieu conserve encore plusieurs
+castramétations qu'on leur attribue[17]; les montagnes sont pleines
+de leurs noms; les flots de l'Albarine, comme ceux du Haut-Rhône,
+baignent la grotte des Sarrasins, la balme des Sarrasins, la chambre,
+les crèches, les forts, la maison des Sarrasins, et même cette grotte
+de Roland où fut trouvé, il y a cinq siècles, un cor arabe de la plus
+magnifique beauté; Seillonas, Ordonnas, Benonce reçurent les colonies
+africaines; la vallée d'Amby, de l'autre côté du Rhône, vit se dresser
+un camp formidable que les voyageurs vont encore visiter. La tradition
+raconte de longs et sanglants combats livrés entre les Séquanes, les
+Ambarres, les Allobroges et les légers cavaliers de l'Arabie. Ces
+derniers furent probablement vainqueurs, puisque partout ils parvinrent
+à se maintenir dans les vallées qu'ils avaient choisies et où sont
+encore leurs descendants.
+
+ [16] «Les Sarrasins qui ne purent opérer leur retraite en Provence
+ ou en Septimanie, se réfugièrent dans les montagnes (du Jura et du
+ Dauphiné) et s'y retranchèrent dans des positions inexpugnables.
+ Notre province (Bresse et Bugey) est au nombre de celles qui
+ furent envahies; elle leur servit de refuge en leur présentant des
+ positions naturellement fortifiées.» (Paul GUILLEMOT, _Monog. hist.
+ du Bugey_).
+
+ [17] «Parcourons, dans le Bugey, les diverses contrées qui les
+ recèlent, à commencer cette investigation dans la plaine qui
+ s'étend des rivages du Rhône et de l'Ain jusqu'à la chaîne non
+ interrompue des premières montagnes. C'est là que les Sarrasins
+ sont arrivés après avoir saccagé Lyon.» (Paul GUILLEMOT, _Monog.
+ hist. du Bugey_.)
+
+Si le paysan qui passe sur la montagne est brun, maigre, avec le
+regard ardent, un nez aquilin, l'oeil enfoncé sous l'orbite; si ses
+cheveux d'un noir de corbeau ont des reflets bleus au soleil; s'il
+répond au nom de Babolah, Kaffon, Tabardet, Ciza-Cartet, Ciza-Buiron,
+Alamercery, ou Galaffre comme un héros de l'Arioste, demandez-lui
+s'il n'appartient pas à une famille sarrasine, et, l'oeil attaché sur
+vous pour approfondir votre pensée, soyez certain qu'il vous répondra
+affirmativement.
+
+Messieurs Monnier, Riboud, Guillemot, Lapierre, Fauché-Prunelle, ont
+réuni de curieux et précieux documents sur le séjour des Arabes dans
+la Franche-Comté, la Bresse, le Bugey, la Savoie et le Dauphiné; mais
+ces savants modestes ont fait des chapitres, des monographies, non un
+livre; les historiens de longue haleine n'ont pas encore utilisé leurs
+travaux, et, malgré l'ouvrage de M. Reinaud, l'histoire de l'invasion
+des Sarrasins est encore à faire, surtout au point de vue de nos pays.
+
+L'influence de cette invasion fut grande sur la civilisation de
+nos contrées. Outre les connaissances pratiques dont la médecine,
+l'agriculture[18] et l'industrie profitèrent; outre la bougie, le
+papier, l'ouate, la bourrache, le tambour qu'ils firent connaître à la
+Gaule, les Arabes dotèrent la Bresse de cette race admirable de chevaux
+que les mauvais soins n'ont pu faire dégénérer; de ces volailles que
+les gourmets ont rendues célèbres[19]; de ce blé noir, fortune du
+pauvre, que le Dombiste mange, en pâte légère délayée dans de l'eau
+ou du lait et cuite légèrement entre deux plaques brûlantes, comme le
+voyageur du désert; le commerce s'est enrichi de ces chiffres simples
+et commodes qui ont fait presque oublier la numération embarrassée
+des Romains; la langue s'est emparée d'une foule de mots dont elle ne
+pourrait plus se passer, depuis _alambic_ jusqu'à _taffetas_[20]; mais,
+surtout, il est un nom qui mérite l'attention de l'historien et qui
+serait une révélation, si l'histoire ne devait accepter qu'avec réserve
+ce qui lui est appris par les poètes. Voilà ce que dit M. de Lamartine,
+dans cette prose magique dont lui seul a l'usage et qui est une poésie
+comme tout ce qui jaillit de sa puissante imagination:
+
+«Quand on chemine à pied de Mâcon à Saint-Claude, on trouve d'abord la
+Bresse, bocagère et plane comme la grasse Attique, ruisselant d'huile,
+entre le Pyrée et Athènes.
+
+ [18] «L'agriculture, en Sicile, dut aux Arabes ses plus grands
+ progrès: le coton apporté par eux des champs syriens, la canne à
+ sucre, le frêne qui produit la manne, le pistachier, etc., etc.»
+ (EBN-KHALDOUN, _Histoire de l'Afrique_.)
+
+ [19] _Courrier de l'Ain_, la _Presse_.
+
+ [20] Nous pouvons citer: alcali, alchimie, alcool, algarade,
+ algèbre, almanach, ambre, amiral, mesquin.
+
+«L'olivier de la Bresse, c'est le pâle saule qui ne verse que l'ombre
+légère aux vaches blanches des prairies et qui, tondu tous les trois
+ans par la serpette de l'émondeur, penche son tronc chauve sur les
+mares ou sur les étangs. On croit lire une églogue de Virgile: «_O
+utinam!_ et plût aux dieux que je n'eusse été qu'un pauvre émondeur
+de saules sur les rives du lac ou du Mincio, dans cette laiteuse
+Lombardie, Bresse de l'Italie!»
+
+«A l'extrémité de cette plaine virgilienne de la Bresse, on rencontre
+tout à coup, au lieu de l'eau stagnante et fiévreuse des prairies de la
+Dombes, une rivière bleue comme le firmament de la Suisse italienne,
+joueuse comme des enfants sur des cailloux, écumante comme l'eau de
+savon battue par le battoir de la lessiveuse, gazouillante comme une
+volée de tourterelles bleues et blanches abattues sur un champ de
+lin en fleurs, jetant ses petits flocons d'écume çà et là, sur son
+cours, comme ces oiseaux éparpillant leurs plumes en se peignant du
+bec sur les touffes du lin; on s'arrête, tout étonné, sur la grève des
+cailloux arrondis par le roulis éternel de cette rivière de montagne,
+débouchant, tout étonnée elle-même, dans la plaine. On demande son nom
+au premier batelier qui passe et qui rattache son petit bateau de pêche
+à un tronc de saule pour verser son filet, frétillant de truites, sur
+le sable.--C'est la rivière d'Ain, vous dit-il avec un air de fierté
+locale, la rivière qui descend du Jura et qui donne son nom à toutes
+ces plaines.
+
+«Si, comme moi, vous avez chevauché dans les déserts et dans les
+vallées des deux Arabies, vous reconnaîtrez bien vite que les hommes,
+descendus de Tartarie en Arabie, d'Arabie en Scythie, de Scythie
+en Hongrie, de Hongrie en Franche-Comté et en Bresse, ont passé par
+là, ont colonisé ces contrées, et ont imposé, au plus beau fleuve du
+pays, ce nom arabe et générique d'Ain (l'eau par excellence) dont, en
+perdant l'accent Aïn, nos pères, moins euphoniques que les Arabes,
+ont fait Ain, nom rendu guttural et trivial comme le balbutiement à
+bouche ouverte d'un enfant hébêté. C'est le progrès selon la doctrine
+des _progressistes indéfinis_, ces adorateurs obstinés du temps, qui
+les dément dans les langues comme dans les choses; ces adorateurs
+du présent, qui les dévore eux-mêmes, et qui anéantit tout autant de
+choses humaines qu'il en crée.
+
+«Mais pardon de cette digression déplacée à propos de la rivière d'Ain,
+à laquelle les Arabes avaient donné un nom sonore comme l'écho des
+rochers d'où il tombe en cascades de saphir, et que les Gaulois ont
+rendu muet comme leur langue de corne et de caoutchouc.
+
+«Après s'être rafraîchie et enivrée comme l'Arabe lui-même au vent,
+cette rivière, femelle du Rhône, se précipite vers lui en face des
+plaines du Dauphiné.»
+
+Ainsi donc, croyance poétique et gracieuse, ce serait aux Musulmans que
+ce torrent bleu, que nos paysans appellent la _grand'rivière_, doit
+son nom? Ce mot est, dans le désert, le nom de l'eau par excellence;
+c'est aussi le cristal de l'oeil, limpide et pur comme l'eau des
+fontaines; c'est l'onde, pour nos populations qui n'ont jamais à
+souffrir de sa privation, Aïn pour la caravane altérée qui voit devant
+elle la délivrance et la vie. D'après M. de Lamartine, les tribus
+poursuivies par l'épée de Charles-Martel ont salué ces flots d'un cri
+de joie; ce cristal si pur, ce miroir étincelant, c'était la barrière
+infranchissable pour leurs ennemis; c'était la fin de leurs angoisses
+et de leur terreur; c'était, comme au désert, la délivrance, Aïn,
+la rivière! Pardonnons la distraction du poète, qui a fait venir nos
+parrains par la Hongrie et l'Allemagne; acceptons ce baptême dont se
+porte garant un homme de génie, et voyons-y une preuve de plus du rôle
+immense que les guerriers de l'Yemen et du Nedjd ont joué dans nos
+pays.
+
+Mais, diront à leur tour les hommes graves, oubliez-vous le vieux
+nom, l'antique nom de notre poétique rivière, le Danus des chartes
+et des cartulaires, le Dain de notre ancien langage, dont la racine
+paraît être la même que celle du Danube, nom autochthone, imposé,
+avant les Arabes, par nos pères les Gaulois[21]? Eh puis! ajouteront
+les personnes délicates, est-il convenable de s'enorgueillir d'une
+appellation qui rappellerait un peuple mécréant, souillé de sang,
+ennemi de notre culte, destructeur de nos lieux saints, enrichi des
+dépouilles de notre patrie, chargé de la malédiction de nos pères? La
+première observation seule a du poids, la seconde nous paraît futile.
+
+ [21] «Mots qui se rapportent également au kymrique et au gaëlique:
+ _dan_, audacieux, violent.» (ROGET, baron de BELLOGUET, _Ethnogén.
+ gaul._)
+
+ «Si le nom originaire est Ain, c'est un vieux mot celtique qui
+ signifie _source_, _fontaine_, et qui même a cette signification
+ dans les langues orientales.» (BACON-TACON, _Recherches sur les
+ origines celtiques_, t. I, p. 192).
+
+On n'a point horreur du souvenir des Romains; leurs monuments ont
+couvert notre sol, et cependant qu'étaient les compagnons de Romulus?
+d'infames bandits. Qu'étaient les guerriers de César? d'avides et
+rapaces conquérants. Qu'étaient nos gouverneurs? des proconsuls, dont
+le nom est resté comme une tache et une injure. Si, au lieu de maudire
+chaque trace de leurs pas sur le sol sacré de la Gaule, on se pare et
+on se vante des stygmates que nous ont laissés ces cruels dominateurs,
+toute vérité historique mise à part, toute étymologie réservée, que
+notre rivière s'appelle Aïn ou Dain, nous ne voyons pas qu'on ait à
+rougir de ce qui peut rappeler dans nos contrées les compatriotes de
+Job, d'Avicennes et d'Antar[22].
+
+ [22] Voyez Paradin, Chorier, J.-Cl. Martin, Jean Brunet, Lapierre,
+ Thomas Riboud, Lateyssonnière, MM. Paul Guillemot, Chaix, Borel
+ d'Hauterive, Fauché-Prunelle, D. Monnier, etc.
+
+
+
+
+
+End of the Project Gutenberg EBook of Note sur l'invasion des Sarrasins dans
+le Lyonnais, by Aimé Vingtrinier
+
+*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK NOTE SUR L'INVASION DES SARRAZINS ***
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+works. See paragraph 1.E below.
+
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+ <title>Note sur l’invasion des sarrasins dans le Lyonnais,
+ par Aimé Vingtrinier
+ — Un livre du Project Gutenberg.
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+<pre>
+
+The Project Gutenberg EBook of Note sur l'invasion des Sarrasins dans le
+Lyonnais, by Aimé Vingtrinier
+
+This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with
+almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or
+re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included
+with this eBook or online at www.gutenberg.org
+
+
+Title: Note sur l'invasion des Sarrasins dans le Lyonnais
+
+Author: Aimé Vingtrinier
+
+Release Date: November 21, 2013 [EBook #44242]
+
+Language: French
+
+Character set encoding: UTF-8
+
+*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK NOTE SUR L'INVASION DES SARRAZINS ***
+
+
+
+
+Produced by Laurent Vogel, Bibimbop and the Online
+Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This
+book was produced from scanned images of public domain
+material from the Google Print project.)
+
+
+
+
+
+
+</pre>
+
+
+<div class="tnote newpage">
+<p class="center noindent">— Note de transcription —</p>
+
+<p>
+À l’exception des erreurs clairement introduites par le typographe,
+et des corrections suivantes, le texte d’origine est inchangé.
+</p>
+
+<ul>
+ <li>p. 13: «,» remplacée par «;» dans «; à une faible distance»,</li>
+ <li>p. 20: ajout d’un guillemet ouvrant devant la première note de bas
+ de page (numérotée 18 dans cette édition électronique).</li>
+</ul>
+</div>
+
+<h1 class="sep4">
+<span class="large">NOTE</span><br />
+<span class="xlarge">SUR L’INVASION DES SARRASINS</span><br />
+<span class="large">DANS LE LYONNAIS.</span>
+</h1>
+
+<p class="sep4 small center noindent">
+Lyon. — Typ. d’A. Vingtrinier.
+</p>
+
+<div class="center newpage">
+<div class="bbox">
+
+<p class="center noindent lh">
+<span class="xlarge">NOTE</span><br />
+<span class="xxlarge">SUR L’INVASION DES SARRASINS</span><br />
+<span class="xlarge">DANS LE LYONNAIS</span>
+</p>
+
+<p class="center noindent sep3">
+<span class="small">PAR</span><br />
+AIMÉ VINGTRINIER
+</p>
+
+<p class="t45 sep3">
+.... Au surplus, le fait de l’incendie se déduit
+si naturellement de la présence des Sarrasins, constatée
+par la nomenclature locale, que l’on pourrait
+déjà se rendre à cette évidence lors même que la
+légende latine ne nous y autoriserait pas. Tout
+le pays est couvert de noms mauresques.
+</p>
+
+<p class="t50">
+<span class='smcap'>Désiré Monnier</span>, <cite>Annuaire du Jura</cite>, 1842.
+</p>
+
+<p class="t45 sep2">
+La tradition elle-même n’a recueilli que des
+contes sur les conquêtes et les talents des Sarrasins.
+</p>
+
+<p class="t50">
+<span class='smcap'>Chambeyron</span>, <cite>Recherches historiques
+sur la ville de Rive-de-Gier</cite>.
+</p>
+
+<div class='figcenter'>
+ <img src='images/decoration.png' alt='' />
+</div>
+
+<p class="center noindent">
+<span class="large">LYON</span><br />
+IMPRIMERIE D’AIMÉ VINGTRINIER<br />
+Rue de la Belle-Cordière, 14.
+</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p class="center noindent">
+1862
+</p>
+
+</div>
+</div>
+
+<p class="center noindent newpage">
+<span class="large">NOTE</span><br />
+<span class="xlarge">SUR L’INVASION DES SARRASINS</span><br />
+<span class="large">DANS LE LYONNAIS.</span>
+</p>
+
+<hr class="c25 sep2" />
+
+<p class="sep3">
+Un des évènements les plus graves de l’histoire de France,
+dont les conséquences ont failli changer non-seulement la
+face de notre pays, mais de la chrétienté tout entière,
+l’envahissement du pays des Visigoths et des Francs par les
+conquérants arabes a été si peu ou si mal décrit qu’on ne
+sait aujourd’hui où s’enquérir des détails de cette épopée, et
+que tout manque à l’investigation du savant.
+</p>
+
+<p>
+Un samedi de la fin d’octobre 732, dit M. Henri Martin,
+le 3 octobre 732, disent quelques autres écrivains, Abdérame
+fut vaincu, dans les plaines de Poitiers, par le
+célèbre chef austrasien Charles-Martel; la déroute des
+Arabes fut affreuse; leur camp, rempli de richesses, fut pillé,
+et eux-mêmes eurent une peine infinie à regagner Narbonne
+ou à traverser les Pyrénées; pour ce premier fait, c’est à
+peu près tout. Arabes et chrétiens gardent sur cette défaite
+<span class='pagenum'><a id='Page_6' name='Page_6'>[6]</a></span>
+un prudent silence. Et cependant la France était sauvée, le
+christianisme restait possesseur du continent européen, et la
+fortune du Prophète avait reçu un échec dont la honte ne
+devait jamais s’effacer.
+</p>
+
+<p>
+On sait encore vaguement que Lyon, Mâcon, Autun furent
+pris et ravagés, que la ville d’Auxerre eut le même sort; que
+sa citadelle résista; enfin que l’archevêque de Sens repoussa et
+mit en fuite les envahisseurs; mais là aussi les dates précises
+et les détails nous font défaut. D’ailleurs le vaillant prélat
+n’eut-il affaire qu’à une troupe de fourrageurs traversant la
+France par l’Aquitaine et l’Orléanais avant le désastre de
+Poitiers, et venue, par hasard, se heurter aux murs de sa
+petite cité, comme l’avance M. Henri Martin<a name='FA_1' id='FA_1' href='#FN_1' class='fnanchor'>[1]</a>, ou eut-il à
+repousser cette armée formidable d’Athim et d’Amorrhée<a name='FA_2' id='FA_2' href='#FN_2' class='fnanchor'>[2]</a>,
+venue, quatre ans plus tard, par la vallée du Rhône, pour
+attaquer les Francs au centre de leur puissance, comme le
+soutiennent nos vieux chroniqueurs bourguignons? les
+Arabes, qui devaient atteindre bientôt à une si haute civilisation,
+vinrent-ils en conquérants ou en ravageurs? voulaient-ils
+piller ou coloniser? détruisirent-ils dès leur premier
+choc toutes les cités qu’ils trouvèrent sur leur passage
+ou ne s’attaquèrent-ils qu’aux biens du clergé? les avis
+sont partagés, ou plutôt l’histoire moderne n’a pas d’avis. Nul
+écrivain ne paraît attacher quelque importance à ces détails.
+Moins dédaigneux, nous allons essayer de nous prononcer,
+et dès l’abord nous ne cacherons point nos sympathies pour
+nos vieux chroniqueurs, et cela uniquement parce qu’ils
+habitaient le pays où ces terribles événements se sont passés.
+<span class='pagenum'><a id='Page_7' name='Page_7'>[7]</a></span>
+</p>
+
+<p>
+L’histoire écrite au fond d’une bibliothèque, avec l’aide de
+copistes et de collectionneurs qui cherchent des dates et
+vous préparent vos matériaux, pourra bien briller par un
+plan vaste, une philosophie sévère, un style magique et des
+qualités d’ensemble qui assurent la vogue à votre ouvrage et
+l’immortalité à votre nom; mais si les grands faits sont
+rapportés d’une manière satisfaisante, combien de détails
+vous échappent! combien d’erreurs vous répétez avec vos
+devanciers<a name='FA_3' id='FA_3' href='#FN_3' class='fnanchor'>[3]</a>! Aujourd’hui la science commence à vouloir
+visiter elle-même les lieux qu’elle décrit. Elle suit pas à pas la
+marche des armées, cherche le gué des rivières, tourne le
+flanc des montagnes et voit pourquoi telle invasion s’est
+arrêtée. Des hommes spéciaux font l’histoire d’une cité ou
+d’une province et, en face d’un champ de bataille, comprennent
+le choc des bataillons, voient fuir les vaincus, campent ou
+marchent avec les vainqueurs. La chronique du château
+explique celle de la contrée, la tradition vient en aide aux
+documents écrits; l’histoire provinciale se forme, et, sous le
+contrôle de l’homme du pays qui a vu, l’histoire générale se
+complète ou se rectifie, l’obscurité se dissipe, et le savoir
+patient trouve enfin la vérité.
+</p>
+
+<p>
+Pour connaître ce qu’a été le séjour des Sarrasins dans nos
+contrées, il faut, non pas consulter les érudits, surtout ceux
+qui ont écrit loin de nous, mais aller de chaumière en chaumière,
+des marécages de la Dombes aux flancs escarpés du
+Jura. Là, tout vous rappellera le passage, les triomphes ou
+les défaites de ces guerriers que le fanatisme amena du fond
+<span class='pagenum'><a id='Page_8' name='Page_8'>[8]</a></span>
+des déserts de l’Asie, et dont la grande histoire a si bien perdu
+les traces qu’elle ne sait plus où les trouver. Une lettre de
+Leidrade à Charlemagne nous apprend qu’il relève les monastères
+détruits par les Sarrasins; la Chronique de l’abbaye
+d’Ambronay atteste que le monastère, fondé par saint Maur,
+l’église consacrée à la Sainte-Vierge et la statue, objet de la
+vénération des fidèles, ont été renversés par les païens. Ces
+païens n’étaient pas les Hongrois venus deux siècles plus
+tard, puisque saint Barnard avait déjà, en 803, reconstruit
+la chapelle et le couvent. L’histoire de Lyon nous apprend
+que les recluseries de la Platière et de Saint-Clair, les églises
+de Saint-Georges et de Saint-Paul, les abbayes déjà célèbres
+de Saint-Pierre et de l’Ile-Barbe étaient tombées sous les
+coups des sectateurs du Coran, mais ni M. Henri Martin ni
+nos autres historiens ne nous disent quel fut le sort des
+armées musulmanes après les derniers triomphes de Charles-Martel;
+M. Reinaud ne croit pas que des tribus sarrasines
+aient pu rester parmi nous, et M. Pilot met au nombre des
+fables la prise de Grenoble par les Maures et la présence de
+bandes sarrasines dans les montagnes du Dauphiné.
+</p>
+
+<p>
+Quant à nous qui, au fond de nos vallées, avons vu ces
+familles au teint brun, aux coutumes bizarres, au nom sans
+contredit oriental, et qui se disent elles-mêmes d’origine
+arabe, nous croyons qu’on pourrait compléter ce que l’histoire
+ne dit pas ou rectifier ce qu’elle avance d’erroné. Les tribus
+arabes n’ont pas regagné l’Espagne, et cependant elles n’ont
+pas été anéanties par les Francs. Poursuivies par un ennemi
+supérieur, elles ont traversé la Saône et se sont réfugiées
+dans les marécages de la Dombes, les forêts de la Bresse ou
+les gorges escarpées du Jura et du Dauphiné; la preuve, c’est
+qu’elles y sont encore. Si l’homme qui écrit l’histoire d’un
+peuple ne peut approfondir tous les faits, si l’écrivain systématique
+nie, de parti pris, ce qui lui paraît singulier ou
+<span class='pagenum'><a id='Page_9' name='Page_9'>[9]</a></span>
+bizarre, c’est aux esprits moins vastes ou moins entiers à
+descendre dans ces infiniment petits qui auront peut-être
+aussi un jour leur utilité et leur importance.
+</p>
+
+<p>
+Battus à Poitiers, qu’ils traversaient en allant s’emparer
+du trésor de Saint-Martin, et bien avant d’avoir atteint cette
+Neustrie qu’on leur avait dite si opulente et si bonne à
+ravager<a name='FA_4' id='FA_4' href='#FN_4' class='fnanchor'>[4]</a>, les Arabes et les Bérébères, âpres à la conquête,
+avides de pillage et ardents à se venger, après avoir, pendant
+quatre ans, réparé les désastres de leur défaite, attaquèrent
+le pays des Francs par la partie orientale, plus facile à envahir.
+D’immenses renforts accourus de l’Afrique et de l’Asie avaient
+couvert l’Espagne, franchi les Pyrénées et s’étaient répandus
+dans cette Septimanie où déjà plus d’une fois les Visigoths leur
+avaient tendu la main<a name='FA_5' id='FA_5' href='#FN_5' class='fnanchor'>[5]</a>. Organisés en vue de toutes les prévisions;
+<span class='pagenum'><a id='Page_10' name='Page_10'>[10]</a></span>
+accompagnés de leurs femmes et de leurs troupeaux
+comme pour coloniser<a name='FA_6' id='FA_6' href='#FN_6' class='fnanchor'>[6]</a>, mais surtout fiers d’une cavalerie
+nombreuse et sans égale, les Arabes remontèrent le cours du
+Rhône sans presque livrer de combats<a name='FA_7' id='FA_7' href='#FN_7' class='fnanchor'>[7]</a>. La Bourgogne, écrasée
+par le despotisme et l’avidité des Francs, ouvrit ses portes aux
+musulmans qu’elle reçut presque comme des libérateurs<a name='FA_8' id='FA_8' href='#FN_8' class='fnanchor'>[8]</a>.
+<span class='pagenum'><a id='Page_11' name='Page_11'>[11]</a></span>
+Le clergé seul protesta contre les propagateurs d’une religion
+nouvelle, et le clergé seul eut à subir les lois de la guerre
+avec une impitoyable rigueur. Les juifs surtout firent cause
+commune avec les musulmans, et leur influence, puissante dans
+toutes les cités, ne contribua pas peu à faciliter l’envahissement
+du pays<a name='FA_9' id='FA_9' href='#FN_9' class='fnanchor'>[9]</a>. A Loudun, comme ils appelaient Lyon, les
+musulmans s’emparèrent des biens de l’Église, renversèrent les
+couvents<a name='FA_10' id='FA_10' href='#FN_10' class='fnanchor'>[10]</a>, mais respectèrent la population; le culte extérieur
+fut seul défendu, les mœurs et les lois furent conservés<a name='FA_11' id='FA_11' href='#FN_11' class='fnanchor'>[11]</a>.
+<span class='pagenum'><a id='Page_12' name='Page_12'>[12]</a></span>
+Suivant leur tactique, et pour ne pas affaiblir leur armée, les
+Arabes confièrent la garde de la cité aux juifs et à quelques
+seigneurs bourguignons, et, comme force morale, laissèrent
+un poste de cavaliers autour du drapeau musulman. Ici, particulièrement,
+l’histoire est muette, mais la tradition parle, et
+grâce à elle on peut encore suivre le fil des événements.
+</p>
+
+<p>
+Lyon était déjà une ville puissante qui, en se soulevant,
+aurait pu écraser même une forte garnison. Il n’eût pas été
+prudent de confier à son incertaine amitié la vie ou la liberté
+des soldats laissés à la garde du drapeau; mais Lyon est
+arrosé par deux larges fleuves; des collines l’entourent: sur
+quel point dut s’établir le poste arabe qui devait maintenir
+la paix de la cité, assez près pour savoir les nouvelles, assez
+loin pour ne pas être envahi par la révolte? les livres ne le
+<span class='pagenum'><a id='Page_13' name='Page_13'>[13]</a></span>
+savent pas, mais les gens de la campagne le savent, et c’est
+d’eux que nous l’avons appris.
+</p>
+
+<p>
+Plus haut que la vieille ville gauloise, assise entre le
+premier confluent de ses deux fleuves; plus haut que le
+faubourg moderne de la Croix-Rousse, qui n’existait pas
+alors, la montagne allongée que le Rhône et la Saône
+entourent perd de sa largeur; on dirait que les deux fleuves
+amoureux, impatients de s’embrasser, ont fait un effort pour
+s’unir avant d’avoir à baigner les murs de la ville; en cet
+endroit fut jadis une villa romaine; aujourd’hui un riche
+et gracieux village y répand ses maisons. Un double chemin
+descend d’un côté au Rhône, de l’autre à la Saône; le Mont-d’Or
+s’étend vis-à-vis, comme un rideau. On a nommé
+Caluire, c’est là que s’élevait le drapeau du croissant.
+</p>
+
+<p>
+Le camp arabe, gourbis ou tentes, était là, en effet, dans
+une admirable position, non loin des rivières, à l’abri de
+toute insulte, dominant l’espace, et prêt à s’envoler au rapide
+galop de ses coursiers si un danger sérieux l’eût menacé. Un
+conquérant voulant garder Lyon avec une poignée de soldats,
+ne pourrait choisir un meilleur emplacement; et, en effet,
+aujourd’hui même, c’est non loin de Caluire que le gouvernement
+français a établi le camp qui lui répond de la cité,
+sur l’emplacement où jadis Albin avait campé ses légions.
+Romains, Français, Arabes, peuples au génie militaire,
+ont compris que Caluire est la clef de la ville; la topographie
+n’a pas changé, le secret est resté le même; c’est toujours
+de là qu’on dominera Lyon.
+</p>
+
+<p>
+Nous n’avons pas de preuves <i>écrites</i> de ce que nous
+avançons, mais le mamelon escarpé qui domine la campagne
+des Brosses, au levant de Caluire, s’appelle la <i>butte des
+Sarrasins</i>; le chemin qui descend au Rhône à travers les
+Brosses s’appelle la <i>voie des Sarrasins</i>; à une faible distance
+de là, au nord-est, se trouve la <i>ferme des Sarrasins</i>.
+<span class='pagenum'><a id='Page_14' name='Page_14'>[14]</a></span>
+</p>
+
+<p>
+Les Arabes et les Bérébères envahirent la Burgondie, et,
+avides de conquêtes, fidèles à leur mission de convertir le
+monde, ils se dirigèrent vers le nord à la recherche des
+soldats de Charles-Martel. L’armée des Francs vaincue,
+l’Europe appartenait au croissant, c’en était fait de la chrétienté,
+et le rêve des Musulmans de rentrer dans leur patrie
+par Constantinople s’accomplissait; mais avant de rencontrer
+les fiers soldats de l’Austrasie, les Arabes trouvèrent un
+ennemi bien plus puissant que les Francs, plus terrible que
+ces géants couverts de fer qui les avaient vaincus à Poitiers,
+ennemi dont les historiens n’ont jamais parlé, qui arrêta leur
+élan, brisa leur vigueur, dompta leur courage et méritait
+cependant d’être signalé pour avoir, mieux que la massue de
+Martel, protégé le sol gaulois contre la nuée de ses envahisseurs.
+</p>
+
+<p>
+Lorsque le peuple de Dieu prévariquait, lorsqu’il épousait
+des femmes infidèles et encensait les idoles, l’esprit divin
+se retirait de lui, ses chefs étaient frappés d’aveuglement, et
+il était livré sans pitié à la fureur des Amalécites et des Philistins.
+Lorsque les enfants du Prophète eurent prévariqué à
+leur tour, lorsque la loi la plus formelle du livre sacré eut été
+violée dans les caves profondes de la Bourgogne, que le vin
+eut coulé dans leurs festins, que les tables n’eurent plus
+horreur de se charger des viandes impures et maudites de la
+Séquanie, que les lèvres des vrais croyants eurent savouré la
+chair immonde des porcs du pays des Eduens, c’en fut fait
+du fanatisme guerrier des conquérants; la gloire du croissant
+s’éclipsa, l’amour du prosélytisme s’éteignit. Ne cherchez pas
+ailleurs la cause de la défaite des Arabes; la foi n’y était plus;
+leur élan incertain ne put emporter la citadelle d’Auxerre,
+et il vint mourir contre les faibles remparts de la ville de Sens.
+</p>
+
+<p>
+Alors, des bruits sinistres circulèrent au milieu des tribus.
+La jalousie qui avait toujours régné entre les Asiatiques et les
+<span class='pagenum'><a id='Page_15' name='Page_15'>[15]</a></span>
+Africains se réveilla plus active et plus ardente que jamais.
+Les Bérébères, les premiers, déclarèrent qu’ils se contentaient
+des biens de la terre, et que d’autres pouvaient porter la
+semence de la parole jusque dans les neiges d’Upsal, dans
+ces lieux reculés et inconnus où Odin était encore adoré
+comme un dieu<a name='FA_12' id='FA_12' href='#FN_12' class='fnanchor'>[12]</a>. Alors l’archevêque Ebbon n’eut qu’à se
+montrer à la tête de ses guerriers; l’effroi des grandes forêts
+de la Gaule du nord, le souvenir des frais coteaux de Dijon
+et de Nuits firent tourner la tête en arrière aux cavaliers qui
+avaient bravé le simoun, traversé l’Afrique brûlante, et qui
+devaient au départ conquérir le monde<a name='FA_13' id='FA_13' href='#FN_13' class='fnanchor'>[13]</a>. Leurs escadrons
+légers se répandirent sur les bords de la Saône, et, quand
+Childebrand vint à marches forcées, par le centre de la France,
+couper les renforts qui remontaient le Rhône, il y avait
+longtemps que l’armée d’Athim et d’Amorrhée n’était plus
+un danger pour les chrétiens.
+</p>
+
+<p>
+Mais que faire de ces hordes souillées? de ces tribus qui
+n’avaient plus de musulman que le nom? Les ramener en
+Espagne, en Afrique, en Arabie, peut-être? Montrer aux
+croyants de Médine et de Damas l’épouvantable spectacle
+<span class='pagenum'><a id='Page_16' name='Page_16'>[16]</a></span>
+de musulmans ivres de vin ou gorgés des graisses impures
+des troupeaux de la Séquanie! Un sacrifice était nécessaire,
+il fut ordonné. L’influence occulte, mais toute-puissante des
+marabouts et des imans, profita des divisions qui régnaient
+entre les Arabes et les Bérébères; l’armée fut condamnée à
+périr, et chaque scheik, chaque émir dispersa ses cavaliers
+dans les forêts de la haute Bourgogne, les marécages de la
+Dombes, les rochers du Bugey et du Dauphiné<a name='FA_14' id='FA_14' href='#FN_14' class='fnanchor'>[14]</a>, au milieu
+desquels, trois cents ans plus tard, les exilés vivaient encore
+à l’état de nation à part, de peuple séparé et maudit, avec
+ses lois, sa religion, ses mœurs, et où, aujourd’hui même, on
+les retrouve avec étonnement soit organisés en villages, soit,
+plus souvent, comme familles maintenues intactes, sans mélanges
+avec leurs voisins et ayant conservé sinon le culte,
+du moins le type physique et moral de la race à laquelle
+appartenaient leurs pères.
+</p>
+
+<p>
+Lorsque Childebrand eut accompli sa mission et campé
+avec l’avant-garde des Francs sur les bords du Rhône, que
+l’approche de Charles-Martel eut été signalée par toutes les
+voix de la renommée, la fureur des musulmans se réveilla,
+et ils brûlèrent toutes les cités au milieu desquelles ils purent
+<span class='pagenum'><a id='Page_17' name='Page_17'>[17]</a></span>
+promener leur vengeance. Alors eurent lieu ces atrocités qui
+remplirent d’effroi les populations, alors on vit ces dévastations
+dont les siècles ont eu de la peine à guérir les blessures,
+mais dont ils n’ont pu effacer le souvenir.
+</p>
+
+<p>
+Parmi les lieux où on peut retrouver des traces de la fuite
+des musulmans, lorsqu’ils traversèrent la Saône, nous citerons
+particulièrement Châlon<a name='FA_15' id='FA_15' href='#FN_15' class='fnanchor'>[15]</a>, Tournus, Boz, Uchizy, Sermoyer,
+Fleurville, Ozan, Arbigny, Mâcon, Lyon. Plusieurs
+tribus s’arrêtèrent dès qu’elles eurent mis la rivière entre
+elles et leurs ennemis; à Pont-de-Veyle, à Louhans, en
+d’autres lieux encore, on montre la <i>chaussée</i> ou la digue des
+Sarrasins, dénomination qui, si elle ne prouve pas que ces
+ouvrages leur appartiennent, indique du moins combien leur
+nom est encore vivant dans le pays. Dans le Bugey, trois
+villes importantes furent détruites, et deux d’entre elles si
+complètement, qu’on ne sait où trouver le lieu où elles
+existaient. Isernore, à la douce appellation, a conservé les
+ruines d’un temple célèbre; Orindinse a dû s’élever au
+confluent de l’Ange et de l’Oignin; la ville des Tattes devait
+être sur les bords de la Valserine, non loin de Châtillon-de-Michaille.
+La <cite>Chronique de Saint-Amand</cite>, un des plus
+anciens documents de l’histoire du Bugey, ne donne que des
+détails incomplets à cet égard.
+</p>
+
+<p>
+Les monastères de Nantua, d’Ambronay et de Saint-Rambert-de-Joux,
+dans la gorge de l’Albarine, furent renversés.
+La Franche-Comté, la Savoie, le Dauphiné se couvrirent
+de ruines. Les histoires de ces provinces donnent de
+<span class='pagenum'><a id='Page_18' name='Page_18'>[18]</a></span>
+douloureux détails sur les ravages que commirent les
+Orientaux.
+</p>
+
+<p>
+Les tribus qui occupaient Lyon n’épargnèrent pas notre
+cité. Les troupes en marche et qui avaient dépassé Valence,
+vinrent se réfugier dans nos murs. Quand elles virent que la
+fortune devenait contraire et que la cause de l’islam ne se
+relèverait pas, le pillage, l’incendie et la dévastation assouvirent
+le besoin de vengeance de ces cœurs ulcérés; Romains,
+Gaulois, Francs, Visigoths, tous devinrent égaux devant les
+terribles musulmans, qui n’étaient plus des convertisseurs
+zélés, mais de farouches ennemis. Ce fut un massacre général,
+une ruine universelle, et dès lors le peuple de la cité ne
+prononça plus qu’avec une superstitieuse terreur le nom de
+cette race maudite de Dieu.
+</p>
+
+<p>
+La ville détruite, les hordes musulmanes se retirèrent vers
+les montagnes à l’orient de Lyon<a name='FA_16' id='FA_16' href='#FN_16' class='fnanchor'>[16]</a>, où elles rejoignirent les
+autres tribus fugitives; mais désormais indépendantes, elles
+ne réunirent leurs drapeaux que pour lutter contre les difficultés
+du moment et pour se frayer un passage à travers
+les populations belliqueuses de ces contrées. La plaine
+d’Ambérieu conserve encore plusieurs castramétations qu’on
+leur attribue<a name='FA_17' id='FA_17' href='#FN_17' class='fnanchor'>[17]</a>; les montagnes sont pleines de leurs noms; les
+<span class='pagenum'><a id='Page_19' name='Page_19'>[19]</a></span>
+flots de l’Albarine, comme ceux du Haut-Rhône, baignent la
+grotte des Sarrasins, la balme des Sarrasins, la chambre, les
+crèches, les forts, la maison des Sarrasins, et même cette
+grotte de Roland où fut trouvé, il y a cinq siècles, un cor
+arabe de la plus magnifique beauté; Seillonas, Ordonnas,
+Benonce reçurent les colonies africaines; la vallée d’Amby,
+de l’autre côté du Rhône, vit se dresser un camp formidable
+que les voyageurs vont encore visiter. La tradition raconte
+de longs et sanglants combats livrés entre les Séquanes, les
+Ambarres, les Allobroges et les légers cavaliers de l’Arabie.
+Ces derniers furent probablement vainqueurs, puisque partout
+ils parvinrent à se maintenir dans les vallées qu’ils avaient
+choisies et où sont encore leurs descendants.
+</p>
+
+<p>
+Si le paysan qui passe sur la montagne est brun, maigre,
+avec le regard ardent, un nez aquilin, l’œil enfoncé sous
+l’orbite; si ses cheveux d’un noir de corbeau ont des reflets
+bleus au soleil; s’il répond au nom de Babolah, Kaffon,
+Tabardet, Ciza-Cartet, Ciza-Buiron, Alamercery, ou Galaffre
+comme un héros de l’Arioste, demandez-lui s’il n’appartient
+pas à une famille sarrasine, et, l’œil attaché sur vous pour
+approfondir votre pensée, soyez certain qu’il vous répondra
+affirmativement.
+</p>
+
+<p>
+Messieurs Monnier, Riboud, Guillemot, Lapierre, Fauché-Prunelle,
+ont réuni de curieux et précieux documents sur le
+séjour des Arabes dans la Franche-Comté, la Bresse, le
+Bugey, la Savoie et le Dauphiné; mais ces savants modestes
+ont fait des chapitres, des monographies, non un livre; les
+historiens de longue haleine n’ont pas encore utilisé leurs
+travaux, et, malgré l’ouvrage de M. Reinaud, l’histoire de
+l’invasion des Sarrasins est encore à faire, surtout au point
+de vue de nos pays.
+</p>
+
+<p>
+L’influence de cette invasion fut grande sur la civilisation
+de nos contrées. Outre les connaissances pratiques dont
+<span class='pagenum'><a id='Page_20' name='Page_20'>[20]</a></span>
+la médecine, l’agriculture<a name='FA_18' id='FA_18' href='#FN_18' class='fnanchor'>[18]</a> et l’industrie profitèrent; outre
+la bougie, le papier, l’ouate, la bourrache, le tambour qu’ils
+firent connaître à la Gaule, les Arabes dotèrent la Bresse de
+cette race admirable de chevaux que les mauvais soins n’ont
+pu faire dégénérer; de ces volailles que les gourmets ont rendues
+célèbres<a name='FA_19' id='FA_19' href='#FN_19' class='fnanchor'>[19]</a>; de ce blé noir, fortune du pauvre, que le
+Dombiste mange, en pâte légère délayée dans de l’eau ou du
+lait et cuite légèrement entre deux plaques brûlantes, comme
+le voyageur du désert; le commerce s’est enrichi de ces chiffres
+simples et commodes qui ont fait presque oublier la numération
+embarrassée des Romains; la langue s’est emparée
+d’une foule de mots dont elle ne pourrait plus se passer, depuis
+<i>alambic</i> jusqu’à <i>taffetas</i><a name='FA_20' id='FA_20' href='#FN_20' class='fnanchor'>[20]</a>; mais, surtout, il est un nom
+qui mérite l’attention de l’historien et qui serait une révélation,
+si l’histoire ne devait accepter qu’avec réserve ce qui lui
+est appris par les poètes. Voilà ce que dit M. de Lamartine,
+dans cette prose magique dont lui seul a l’usage et qui est une
+poésie comme tout ce qui jaillit de sa puissante imagination:
+</p>
+
+<p>
+«Quand on chemine à pied de Mâcon à Saint-Claude, on
+trouve d’abord la Bresse, bocagère et plane comme la grasse
+Attique, ruisselant d’huile, entre le Pyrée et Athènes.
+</p>
+
+<p>
+«L’olivier de la Bresse, c’est le pâle saule qui ne verse
+que l’ombre légère aux vaches blanches des prairies et qui,
+tondu tous les trois ans par la serpette de l’émondeur, penche
+son tronc chauve sur les mares ou sur les étangs. On croit
+lire une églogue de Virgile: «<i lang="la" xml:lang="la">O utinam!</i> et plût aux dieux
+<span class='pagenum'><a id='Page_21' name='Page_21'>[21]</a></span>
+que je n’eusse été qu’un pauvre émondeur de saules sur
+les rives du lac ou du Mincio, dans cette laiteuse Lombardie,
+Bresse de l’Italie!»
+</p>
+
+<p>
+«A l’extrémité de cette plaine virgilienne de la Bresse,
+on rencontre tout à coup, au lieu de l’eau stagnante et fiévreuse
+des prairies de la Dombes, une rivière bleue comme
+le firmament de la Suisse italienne, joueuse comme des enfants
+sur des cailloux, écumante comme l’eau de savon battue
+par le battoir de la lessiveuse, gazouillante comme une volée
+de tourterelles bleues et blanches abattues sur un champ de
+lin en fleurs, jetant ses petits flocons d’écume çà et là, sur
+son cours, comme ces oiseaux éparpillant leurs plumes en se
+peignant du bec sur les touffes du lin; on s’arrête, tout étonné,
+sur la grève des cailloux arrondis par le roulis éternel de
+cette rivière de montagne, débouchant, tout étonnée elle-même,
+dans la plaine. On demande son nom au premier batelier qui
+passe et qui rattache son petit bateau de pêche à un tronc de
+saule pour verser son filet, frétillant de truites, sur le sable.—C’est
+la rivière d’Ain, vous dit-il avec un air de fierté locale,
+la rivière qui descend du Jura et qui donne son nom à toutes
+ces plaines.
+</p>
+
+<p>
+«Si, comme moi, vous avez chevauché dans les déserts et
+dans les vallées des deux Arabies, vous reconnaîtrez bien vite
+que les hommes, descendus de Tartarie en Arabie, d’Arabie
+en Scythie, de Scythie en Hongrie, de Hongrie en Franche-Comté
+et en Bresse, ont passé par là, ont colonisé ces contrées,
+et ont imposé, au plus beau fleuve du pays, ce nom
+arabe et générique d’Ain (l’eau par excellence) dont, en perdant
+l’accent Aïn, nos pères, moins euphoniques que les
+Arabes, ont fait Ain, nom rendu guttural et trivial comme
+le balbutiement à bouche ouverte d’un enfant hébêté. C’est
+le progrès selon la doctrine des <i>progressistes indéfinis</i>, ces
+adorateurs obstinés du temps, qui les dément dans les langues
+<span class='pagenum'><a id='Page_22' name='Page_22'>[22]</a></span>
+comme dans les choses; ces adorateurs du présent, qui les dévore
+eux-mêmes, et qui anéantit tout autant de choses humaines
+qu’il en crée.
+</p>
+
+<p>
+«Mais pardon de cette digression déplacée à propos de la
+rivière d’Ain, à laquelle les Arabes avaient donné un nom
+sonore comme l’écho des rochers d’où il tombe en cascades
+de saphir, et que les Gaulois ont rendu muet comme leur
+langue de corne et de caoutchouc.
+</p>
+
+<p>
+«Après s’être rafraîchie et enivrée comme l’Arabe lui-même
+au vent, cette rivière, femelle du Rhône, se précipite
+vers lui en face des plaines du Dauphiné.»
+</p>
+
+<p>
+Ainsi donc, croyance poétique et gracieuse, ce serait aux
+Musulmans que ce torrent bleu, que nos paysans appellent la
+<i>grand’rivière</i>, doit son nom? Ce mot est, dans le désert, le
+nom de l’eau par excellence; c’est aussi le cristal de l’œil,
+limpide et pur comme l’eau des fontaines; c’est l’onde, pour
+nos populations qui n’ont jamais à souffrir de sa privation,
+Aïn pour la caravane altérée qui voit devant elle la délivrance
+et la vie. D’après M. de Lamartine, les tribus poursuivies
+par l’épée de Charles-Martel ont salué ces flots d’un cri de
+joie; ce cristal si pur, ce miroir étincelant, c’était la barrière
+infranchissable pour leurs ennemis; c’était la fin de leurs
+angoisses et de leur terreur; c’était, comme au désert, la
+délivrance, Aïn, la rivière! Pardonnons la distraction du
+poète, qui a fait venir nos parrains par la Hongrie et l’Allemagne;
+acceptons ce baptême dont se porte garant un homme
+de génie, et voyons-y une preuve de plus du rôle immense que
+les guerriers de l’Yemen et du Nedjd ont joué dans nos
+pays.
+</p>
+
+<p>
+Mais, diront à leur tour les hommes graves, oubliez-vous
+le vieux nom, l’antique nom de notre poétique rivière, le
+Danus des chartes et des cartulaires, le Dain de notre ancien
+langage, dont la racine paraît être la même que celle du
+<span class='pagenum'><a id='Page_23' name='Page_23'>[23]</a></span>
+Danube, nom autochthone, imposé, avant les Arabes, par
+nos pères les Gaulois<a name='FA_21' id='FA_21' href='#FN_21' class='fnanchor'>[21]</a>? Eh puis! ajouteront les personnes
+délicates, est-il convenable de s’enorgueillir d’une appellation
+qui rappellerait un peuple mécréant, souillé de sang, ennemi
+de notre culte, destructeur de nos lieux saints, enrichi des
+dépouilles de notre patrie, chargé de la malédiction de nos
+pères? La première observation seule a du poids, la seconde
+nous paraît futile.
+</p>
+
+<p>
+On n’a point horreur du souvenir des Romains; leurs monuments
+ont couvert notre sol, et cependant qu’étaient les
+compagnons de Romulus? d’infames bandits. Qu’étaient les
+guerriers de César? d’avides et rapaces conquérants. Qu’étaient
+nos gouverneurs? des proconsuls, dont le nom est resté
+comme une tache et une injure. Si, au lieu de maudire chaque
+trace de leurs pas sur le sol sacré de la Gaule, on se pare et
+on se vante des stygmates que nous ont laissés ces cruels
+dominateurs, toute vérité historique mise à part, toute étymologie
+réservée, que notre rivière s’appelle Aïn ou Dain, nous
+ne voyons pas qu’on ait à rougir de ce qui peut rappeler
+dans nos contrées les compatriotes de Job, d’Avicennes et
+d’Antar<a name='FA_22' id='FA_22' href='#FN_22' class='fnanchor'>[22]</a>.
+</p>
+
+<div class='footnotes sep4'>
+
+<h2>Notes de bas de page</h2>
+
+<div class='footnote' id='FN_1'>
+<p>
+<a href='#FA_1'>[1]</a> <cite>Hist. de France</cite>, tome 2.
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_2'>
+<p>
+<a href='#FA_2'>[2]</a> «L’émir Othman, l’<i>Adthima</i> des chroniqueurs.... l’émir Omar,
+l’<i>Amor</i> de nos chroniqueurs.» (<span class='smcap'>Henri Martin</span>, <cite>Hist. de France</cite>, tom. 2;
+<span class='smcap'>Reinaud</span>, <cite>Invasions des Sarrazins</cite>).
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_3'>
+<p>
+<a href='#FA_3'>[3]</a> «Le P. Berthaud et le P. Perry placent l’irruption des Sarrasins en
+Bourgogne en 719 et 720. Ces dates sont certainement inexactes.» (<span class='smcap'>Fouque</span>,
+<cite>Hist. de Châlon-sur-Saône</cite>).
+</p>
+
+<p>
+C’est, à son tour, victime d’une profonde erreur que Victor Fouque, dans
+son <cite>Histoire de Châlon-sur-Saône</cite>, prétend que la Bourgogne fut envahie
+de toutes parts par les Sarrasins, commandés <i>par leur roi Abdérame</i>.
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_4'>
+<p>
+<a href='#FA_4'>[4]</a> «L’Espagne fut donnée pour la seconde fois à Abdoulrahman-Ben-Abdoullah-el-Gafiki,
+l’année de l’hégire 113, et la neuvième du califat
+d’Accham (731)... Dès que cette révolte fut dissipée, Abdoulrahman résolut
+de porter la guerre au dehors et d’occuper les Arabes... il se jette dans
+l’Aquitaine, passe la Garonne et s’empare de Bordeaux... Il traverse le
+Périgord, la Saintonge, le Poitou... Il pénètre jusqu’à Tours... Eudes implore
+le secours de Charles-Martel. Ce prince, justement alarmé du danger
+commun, marche contre les Arabes avec toutes les forces de la Germanie,
+de l’Austrasie, de la Bourgogne et de la Neustrie.» (<span class='smcap'>Cardonne</span>, <cite>Hist. de
+l’Afr. et de l’Esp. sous la domination des Arabes</cite>.)
+</p>
+
+<p>
+«Les Barbares essayèrent même de se venger sur les provinces de
+Charles-Martel de la défaite que ce grand capitaine leur avait fait essuyer
+quelques années auparavant. Leurs détachements, <i>occupant de nouveau
+Lyon</i>, envahirent la Bourgogne.« (<span class='smcap'>Reinaud</span>, <cite>Invasions des Sarrazins</cite>.)
+</p>
+
+<p>
+On voit que l’envahissement de la Bourgogne suivit la bataille de Poitiers
+et ne la précéda pas.
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_5'>
+<p>
+<a href='#FA_5'>[5]</a> «Entreprenans la guerre d’un grand cœur (les Visigoths) appellerent
+en leur ayde les Sarrazins, encores ennemys des François, pour raison de
+la perte qu’ils avoient receu devant Tours. Ainsi tous ensemble viennent
+passer le Rhône... et tirant outre prindrent quasi toute la Bourgongne.»
+(Guillaume <span class='smcap'>Paradin</span>, <cite>Annales de Bourgogne</cite>.)
+</p>
+
+<p>
+«Alhatan... leur avoit commandé... de venger Abdérame et de se souvenir
+incessamment de la bataille de Tours. Les chefs qu’il leur donna
+furent Athin et Amorrhée qu’il jugea capables d’un si grand employ.....
+Nulle esglise ne fut espargnée. Lyon, Mascon, Auxerre et toutes les villes de
+la Bourgogne, jusqu’à Sens, furent saccagées.» (<span class='smcap'>Chorier</span>, <cite>Hist. du Dauphiné</cite>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_6'>
+<p>
+<a href='#FA_6'>[6]</a> «Le témoignage des plus anciennes chroniques nous assure que les
+Arabes, en franchissant les Pyrénées, entraînaient après eux leurs femmes
+et leurs enfants, comme s’ils eussent eu le dessein formé de s’établir sur ce
+sol nouveau pour eux.» (Noël <span class='smcap'>Desvergers</span>, <cite>L’Arabie</cite>, p. 342.)
+</p>
+
+<p>
+«<span lang="la" xml:lang="la">Sarraceni cum uxoribus et parvulis venientes...</span>» (<span class='smcap'>Warnefrid</span>, <cite>Hist.
+Longobard</cite>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_7'>
+<p>
+<a href='#FA_7'>[7]</a> «Au moment de ce vaste choc, les Arabes, encore dans la première
+ferveur de l’Islam, avaient plus d’humanité, de moralité, de lumières que
+les Franks.» (Henri <span class='smcap'>Martin</span>, <cite>Hist. de France</cite>, tom. 2.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_8'>
+<p>
+<a href='#FA_8'>[8]</a> «La Bourgogne paya chèrement sa résistance aux prétentions de
+Charles; ce royaume fut partagé entre ses partisans les plus dévoués. Les
+Bourguignons furent exclus de toutes les magistratures et subirent les
+conséquences d’une invasion étrangère.» (<span class='smcap'>Fouque</span>, <cite>Hist. de Châlon-s.-Saôn.</cite>)
+</p>
+
+<p>
+«Les bandes teutoniques commirent sans doute, dans cette expédition,
+de bien grandes violences, et les leudes franks ou germains, qui avaient
+dépossédé les comtes <i>romains</i> ou burgondes, exercèrent une bien brutale
+tyrannie, car il s’alluma contre le règne des Franks des haines qui ne tardèrent
+pas à éclater de la manière la plus étrange.» (<span class='smcap'>H. Martin</span>, <cite>Hist. de Fr.</cite>, t. 2.)
+</p>
+
+<p>
+«737.—Comme Martel estoit usurpateur, chaque gouverneur croyoit
+avoir droit de lui désobéir et trenchoit du souverain. Mauronte, gouverneur
+de Marseille, afin d’establir son indépendance, appella le secours des Sarrazins
+et leur livra la ville d’Avignon, d’où ils s’espandirent dans le Dauphiné,
+le Lyonnois et, s’il est croyable, même jusqu’à Sens.» (<span class='smcap'>Mezeray</span>,
+<cite>Hist. de France</cite>, t. <span class='smcap'>I</span>, p. 131.)
+</p>
+
+<p>
+«Les chefs des Bourguignons se flattèrent de recouvrer leur indépendance
+en favorisant l’invasion des Sarrasins.» (<span class='smcap'>Lateyssonnière</span>, <cite>Recherches
+hist. sur le départ. de l’Ain</cite>).
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_9'>
+<p>
+<a href='#FA_9'>[9]</a> «Les Juifs étaient très-nombreux, très-riches et très-forts dans les
+villes septimaniennes, et ils secondaient partout la conquête arabe de leurs
+intrigues en représailles des lois tyranniques portées contre eux.» (Henri
+<span class='smcap'>Martin</span>, <cite>Hist. de France</cite>, tom. 2.)
+</p>
+
+<p>
+«L’évêque Agobard écrivait à l’archevêque de Narbonne Nibridius:
+Dieu mercy, il n’y a plus de païens en ce pays, mais il y a quantité de
+juifs qui demeurent en cette ville et sont répandus dans tous les lieux
+circonvoisins.» (<span class='smcap'>Menestrier</span>, <cite>Hist. cons.</cite>, p. 216.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_10'>
+<p>
+<a href='#FA_10'>[10]</a> «Les Sarrasins, dans leurs invasions, avaient dévasté la plupart des
+églises et des couvents et avaient aliéné les biens affectés à ces établissements.»
+(<span class='smcap'>Reinaud</span>, <cite>Invasions des Sarrazins</cite>.)
+</p>
+
+<p>
+«<i>L’an 732?</i> Les Sarrasins entrent en Bourgogne, ruinent Autun jusques
+dans ses fondements. L’église de Saint-Nazaire fut brûlée avec tous les
+titres et papiers. Le monastère de Saint-Martin, fondé par la reine Brunehaut
+et où elle reçut la sépulture, fut pillé et détruit; celui de Saint-Jean-le-Grand
+eut le même sort.» (Edme <span class='smcap'>Thomas</span>, <cite>Hist. d’Autun</cite>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_11'>
+<p>
+<a href='#FA_11'>[11]</a> «Les villes qui avaient capitulé conservèrent leurs comtes goths ou
+<i>romains</i>, leurs lois nationales et l’exercice de leur culte dans l’intérieur
+des églises, mais à condition de recevoir des garnisons musulmanes, de
+payer le <i>kharad</i>, tribut annuel qui variait du dixième au cinquième des
+revenus fonciers, et peut-être de livrer leurs chevaux et leurs armes, ainsi
+que les trésors de l’Église. Les domaines de la couronne et des citoyens
+morts en combattant les musulmans furent confisqués, probablement avec
+la majeure partie des biens de l’Église.» (Henri <span class='smcap'>Martin</span>, <cite>Hist. de France</cite>,
+tom. 2.)
+</p>
+
+<p>
+«L’exercice libre de la religion chrétienne était garanti dans l’intérieur
+des églises. Toute église existante devait être conservée; mais il n’en pouvait
+point être bâti de nouvelles sans l’autorisation du chef musulman.—Les
+lois anciennes du pays étaient maintenues.» (<span class='smcap'>Hugo</span>, <cite>France monument.</cite>,
+p. 232.)
+</p>
+
+<p>
+«Les conditions imposées par les généraux musulmans aux villes conquises
+n’étaient ni trop onéreuses ni trop humiliantes, comparées au sort
+qui, à cette époque de barbarie, pesait sur les habitants des villes tombées
+au pouvoir d’ennemis chrétiens comme eux.» (<span class='smcap'>Hugo</span>, <cite>France monument.</cite>,
+p. 232.)
+</p>
+
+<p>
+«Dans les cérémonies publiques, à Messine, on déployait deux étendards.
+Le premier, qui appartenait aux Sarrasins, représentait une tour de
+couleur noire sur un champ vert; le second, qui servait aux Chrétiens,
+portait une croix d’or brodée sur un champ rouge.» (<span class='smcap'>Ebn-Khaldoun</span>,
+<cite>Hist. de l’Afrique</cite>...)
+</p>
+
+<p>
+«Abdoulah, conformément à la loi mahométane, et pour éviter l’effusion
+du sang, offrit la paix à Grégoire en lui donnant à choisir d’embrasser
+l’islamisme ou de se rendre tributaire du calife.» (<span class='smcap'>Cardonne</span>, <cite>Hist. de
+l’Afrique et de l’Espagne sous la domination des Arabes</cite>.)
+</p>
+
+<p>
+«On sait que de tout temps l’islamisme offrait aux vaincus deux partis:
+embrasser la foi musulmane ou payer tribut aux vainqueurs.» (<span class='smcap'>Ebn-Khaldoun.</span>)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_12'>
+<p>
+<a href='#FA_12'>[12]</a> «Il s’éleva des disputes entre les Arabes de Damas et ceux de
+l’Arabie-Heureuse, entre les Bérébères et les Modarites, et ils se firent une
+guerre cruelle.» (<span class='smcap'>Hidjazi</span>, <cite>Mesheb</cite>.)
+</p>
+
+<p>
+«La vérité est que les Berbers sont un peuple bien différent des
+Arabes, excepté peut-être les tribus des Sanhadjah et des Ketamah, qui,
+selon moi, doivent être regardées comme parentes et alliées des Arabes.
+Mais Dieu le sait.» (<cite>Histoire de l’Afrique sous la dynastie des Aghlabites</cite>,
+par <span class='smcap'>Ebn-Khaldoun</span>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_13'>
+<p>
+<a href='#FA_13'>[13]</a> «Se sentans estre entrés trop avant en France et craignans d’estre
+enclos, retournèrent en mesme hastiveté qu’ils estoient venus et retournant
+en arrière achevoyent de brusler et détruire ce qui estoit demouré entier,
+à ce que Charles-Martel ne trouvast rien d’entier après eux... Ainsi fut
+toute la Bourgongne mise en ruine par les Visigoths et par les Sarrazins.»
+(<span class='smcap'>G. Paradin</span>, <cite>Annales de Bourgogne</cite>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_14'>
+<p>
+<a href='#FA_14'>[14]</a> «Ravagée par les Huns, les Ostrogoths, les Bourguignons, les Lombards
+et les Sarrasins... la Maurienne est peut-être de toutes nos provinces
+celle dont l’histoire présente le plus de péripéties.» (<cite>Travaux de la
+Soc. d’hist. et d’archéologie de la province de Maurienne</cite>, I<sup>er</sup> Bulletin, p. <span class='smcap'>III</span>.)
+</p>
+
+<p>
+«Ce ne fut qu’au X<sup>e</sup> siècle que les Sarrasins coupèrent le rocher sur
+lequel s’élève la chapelle de sainte Thècle et desséchèrent la plaine.»
+(L’abbé <span class='smcap'>Truchet</span>, <cite>Notice historique sur la commune de Valloires</cite>).
+</p>
+
+<p>
+«Les Sarrasins avaient poussé leurs incursions jusque dans nos montagnes
+(942). Hugues de Provence, roi d’Italie, les chargea de garder les
+principaux passages des Alpes du nord contre son compétiteur Bérenger.»
+(<span class='smcap'>Ducis</span>, <cite>Voies romaines</cite>, Revue Savoisienne, 15 avril 1861.)
+</p>
+
+<p>
+«Nous citerons ensuite ces colons, d’origine évidemment étrangère,
+qui vivent depuis des siècles isolés dans les marais desséchés de la Bresse.»
+(<span class='smcap'>Roget de Belloguet</span>, <cite>Ethnogénie gauloise</cite>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_15'>
+<p>
+<a href='#FA_15'>[15]</a> Vers 645, le siége épiscopal de Châlon-sur-Saône était occupé par
+un homme de bien nommé Gratus qui habitait le faubourg Saint-Laurent:
+déjà à cette époque le faubourg communiquait avec la ville par un pont.
+Comme à Tournus et à Mâcon, le pont de Châlon servit de passage aux
+Sarrasins et fut détruit derrière eux.
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_16'>
+<p>
+<a href='#FA_16'>[16]</a> «Les Sarrasins qui ne purent opérer leur retraite en Provence ou
+en Septimanie, se réfugièrent dans les montagnes (du Jura et du Dauphiné)
+et s’y retranchèrent dans des positions inexpugnables. Notre province
+(Bresse et Bugey) est au nombre de celles qui furent envahies; elle leur
+servit de refuge en leur présentant des positions naturellement fortifiées.»
+(Paul <span class='smcap'>Guillemot</span>, <cite>Monog. hist. du Bugey</cite>).
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_17'>
+<p>
+<a href='#FA_17'>[17]</a> «Parcourons, dans le Bugey, les diverses contrées qui les recèlent,
+à commencer cette investigation dans la plaine qui s’étend des rivages du
+Rhône et de l’Ain jusqu’à la chaîne non interrompue des premières montagnes.
+C’est là que les Sarrasins sont arrivés après avoir saccagé Lyon.»
+(Paul <span class='smcap'>Guillemot</span>, <cite>Monog. hist. du Bugey</cite>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_18'>
+<p>
+<a href='#FA_18'>[18]</a> «L’agriculture, en Sicile, dut aux Arabes ses plus grands progrès: le
+coton apporté par eux des champs syriens, la canne à sucre, le frêne qui
+produit la manne, le pistachier, etc., etc.» (<span class='smcap'>Ebn-Khaldoun</span>, <cite>Histoire de
+l’Afrique</cite>.)
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_19'>
+<p>
+<a href='#FA_19'>[19]</a> <cite>Courrier de l’Ain</cite>, la <i>Presse</i>.
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_20'>
+<p>
+<a href='#FA_20'>[20]</a> Nous pouvons citer: alcali, alchimie, alcool, algarade, algèbre, almanach,
+ambre, amiral, mesquin.
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_21'>
+<p>
+<a href='#FA_21'>[21]</a> «Mots qui se rapportent également au kymrique et au gaëlique:
+<i>dan</i>, audacieux, violent.» (<span class='smcap'>Roget</span>, baron de <span class='smcap'>Belloguet</span>, <cite>Ethnogén. gaul.</cite>)
+</p>
+
+<p>
+«Si le nom originaire est Ain, c’est un vieux mot celtique qui signifie
+<i>source</i>, <i>fontaine</i>, et qui même a cette signification dans les langues orientales.»
+(<span class='smcap'>Bacon-Tacon</span>, <cite>Recherches sur les origines celtiques</cite>, t. <span class='smcap'>I</span>, p. 192).
+</p>
+</div>
+
+<div class='footnote' id='FN_22'>
+<p>
+<a href='#FA_22'>[22]</a> Voyez Paradin, Chorier, J.-Cl. Martin, Jean Brunet, Lapierre,
+Thomas Riboud, Lateyssonnière, MM. Paul Guillemot, Chaix, Borel
+d’Hauterive, Fauché-Prunelle, D. Monnier, etc.
+</p>
+</div>
+</div>
+
+
+
+
+
+
+
+
+<pre>
+
+
+
+
+
+End of the Project Gutenberg EBook of Note sur l'invasion des Sarrasins dans
+le Lyonnais, by Aimé Vingtrinier
+
+*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK NOTE SUR L'INVASION DES SARRAZINS ***
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+works. See paragraph 1.E below.
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+Foundation
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