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+The Project Gutenberg EBook of Petit traité des punitions et des
+récompenses à l'usage des maîtres et des parents, by Félix Hément
+
+This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with
+almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or
+re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included
+with this eBook or online at www.gutenberg.org
+
+
+Title: Petit traité des punitions et des récompenses à l'usage des maîtres et des parents
+
+Author: Félix Hément
+
+Release Date: March 24, 2012 [EBook #39256]
+
+Language: French
+
+Character set encoding: ISO-8859-1
+
+*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK PETIT TRAITÉ DES PUNITIONS ***
+
+
+
+
+Produced by Laurent Vogel, Hélène de Mink, and the Online
+Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This
+file was produced from images generously made available
+by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at
+http://gallica.bnf.fr)
+
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+
+Note sur la transcription: Les erreurs clairement introduites par le
+typographe ont été corrigées. L'orthographe d'origine a été conservée
+et n'a pas été harmonisée.
+
+
+
+
+ PETIT TRAITÉ
+
+ DES
+
+ PUNITIONS & DES RÉCOMPENSES
+
+
+
+
+DU MÊME AUTEUR
+
+
+ Ouvrages couronnés par la Société pour l'instruction
+ élémentaire, adoptés pour les distributions de prix dans les
+ écoles de la ville de Paris, admis par la Commission
+ ministérielle des bibliothèques populaires et scolaires.
+
+Format in-12:
+
+ =Premières notions d'histoire naturelle.= 19e édition,
+ nombreuses figures, cart. 3 fr.
+
+ =Premières notions de cosmographie.= 5e édition, avec
+ figures 1 fr. 50
+
+ =Premières notions de géométrie.= 6e édition, avec
+ figures 1 fr. 50
+
+ =Premières notions de physique et de météorologie.=
+ 4e édition, avec figures 3 fr. 50
+
+ =Menus propos sur les sciences.= 6e édition, avec
+ figures 3 fr. 50
+
+ =Simple discours sur la terre et sur l'homme= (couronné
+ par l'Académie française) 3 fr.
+
+ =De l'instinct et de l'intelligence= (couronné par
+ l'Académie française; prix Montyon), illustré 2 fr.
+
+ =Les étoiles filantes et les bolides= 2 fr. 50
+
+ =La science anecdotique.= 2e édition 1 fr.
+
+Format in-8º:
+
+ =De l'instinct et de l'intelligence= (couronné
+ par l'Académie française; prix Montyon), illustré 3 fr. 50
+
+ =Les infiniment petits=, illustré 1 fr. 50
+
+ =L'origine des êtres vivants=, illustré 2 fr. 50
+
+ =Tableaux géographiques=, avec notice 15 fr. 50
+ La notice seule, illustrée, cartonnée 1 fr. 50
+ (Honoré d'une souscription Ministère de l'Instruction
+ publique.)
+
+ =Tableaux astronomiques=, avec notice. Six tableaux 10 fr.
+ La notice seule, illustrée, cartonnée 1 fr.
+
+
+
+
+ PETIT TRAITÉ
+
+ DES PUNITIONS
+
+ ET DES RÉCOMPENSES
+
+ A L'USAGE DES MAITRES ET DES PARENTS
+
+ Par FÉLIX HÉMENT
+
+ Inspecteur général honoraire de l'Instruction publique
+
+ Lauréat de l'Institut
+
+ AVEC UNE LETTRE DE M. LEGOUVÉ, DE L'ACADÉMIE FRANÇAISE
+
+ PARIS
+
+ GEORGES CARRÉ, ÉDITEUR
+
+ 58, RUE SAINT-ANDRÉ-DES-ARTS
+
+ 1890
+
+
+
+
+A M. FÉLIX HÉMENT
+
+
+MON CHER CONFRÈRE ET AMI,
+
+_Vous me demandez quelques lignes à mettre en tête de votre petit
+Traité. Que voulez-vous que j'y ajoute? il est complet. On y sent
+l'oeuvre d'un homme qui a beaucoup étudié les enfants, beaucoup
+réfléchi sur les enfants, beaucoup pratiqué les enfants, et, de plus,
+ce livre part de la main d'un pédagogue._
+
+_Tout au plus puis-je donc noter ici, quelques petits faits que m'a
+fournis mon expérience personnelle._
+
+_J'ai élevé mes deux enfants, et un peu mes trois petits-enfants,
+jamais je ne leur ai donné une chiquenaude, et pourtant, j'enregistre
+ici comme un titre dont je suis très fier, le mot que m'a dit un jour
+ma fille: «Tu nous aurais fait rentrer dans un trou de souris.»_
+
+_Quelle était donc mon attitude vis-à-vis d'eux? Étais-je donc dur,
+sévère? Nullement. Toutes les occasions d'amusement je les saisissais,
+je les recherchais pour eux; j'étais le_ plus joueur de tous les pères
+avec eux, _mais une fois que le devoir avait parlé, j'étais d'une
+fermeté inflexible_.
+
+_Selon moi, la fermeté paternelle a sa source dans la tendresse. Je ne
+connais rien qui aille si bien ensemble que la familiarité et
+l'autorité. Un axiome célèbre dit_: «Qui aime bien châtie bien.»
+_C'est monstrueux. Bien aimer, c'est bien élever, et bien élever c'est
+corriger, c'est réprimer, c'est contenir, c'est prévenir; c'est punir,
+ce n'est pas châtier._
+
+_Le châtiment corporel a bien plus pour objet de satisfaire la colère
+de celui qui l'applique que de corriger le défaut de celui qui la
+subit. J'ai cependant vu une mère, la plus tendre des mères, faire
+couler le sang de son fils qu'elle adorait, et jamais je n'ai mieux
+compris ce qu'il y avait d'héroïque dans la tendresse, que le jour où
+j'ai vu les lèvres de cette mère toutes rouges du sang de son enfant.
+Elle lui avait mordu le doigt sans hésiter. Pourquoi? Parce qu'il
+avait mordu lui-même, lâchement et cruellement le doigt de son petit
+frère. La figure de cette mère et celle de cet enfant ne sortiront
+jamais de ma mémoire. Le bourreau avait la pâleur d'une martyre, son
+visage exprimait une douleur mille fois plus profonde que celle de son
+fils. Pour lui, il ne dit rien; il la regarda, il comprit et il se
+jeta à son cou._
+
+_En revanche, j'ai connu une jeune fille, à qui son père, dans un
+moment de colère, avait donné un soufflet quand elle avait déjà quinze
+ans, et qui m'a dit, quand elle en avait vingt-cinq_: «Jamais je ne
+lui ai pardonné et je ne lui pardonnerai jamais.»
+
+_Enfin, troisième fait qui rentre directement dans votre théorie:
+L'amiral Jurien de la Gravière m'a dit que la discipline n'avait
+jamais été plus forte dans la marine, que depuis l'abolition des
+châtiments corporels._
+
+_Je m'arrête, mon cher Confrère et Ami, ayant voulu seulement mêler à
+votre solide et excellent ouvrage, quelques faits aussi frappants qui
+s'y rapportent, et surtout saisir l'occasion de témoigner tout haut de
+mes sentiments d'estime et de sympathie pour votre personne._
+
+ E. LEGOUVÉ.
+
+
+
+
+AVANT-PROPOS
+
+
+Personne n'ignore que l'opinion s'est émue, il y a quelque temps, de
+l'excès de travail imposé à nos écoliers de tout ordre et par suite
+duquel ils se trouvaient, comme on dit, surmenés.
+
+Pour donner satisfaction à ce qu'il y avait de légitime dans les
+plaintes des parents et des hygiénistes, les programmes ont été
+remaniés, sinon réduits, et les règlements ont été adoucis de manière
+à mettre les moeurs de l'école en harmonie avec celles de la Société.
+
+Il nous a paru qu'il convenait, à cette occasion, de faire précéder
+les règlements actuels d'un résumé historique et d'une appréciation
+des châtiments et des récompenses scolaires chez les divers peuples,
+aux diverses époques. C'est ce résumé que nous donnons sous le titre
+de _Petit Traité des punitions et des récompenses_, qui sera, nous
+l'espérons, de quelque utilité à la plupart des maîtres et des
+parents.
+
+ F. H.
+
+
+
+
+PETIT TRAITÉ DES PUNITIONS & DES RÉCOMPENSES
+
+
+L'éducation de l'enfant, c'est-à-dire le développement harmonique de
+son âme et de son corps, se fait, soit dans la famille, soit à l'école
+où les enfants se trouvent réunis pour recevoir l'enseignement et les
+soins en commun, soit simultanément à l'école et dans la famille.
+
+Quel que soit le mode adopté, le but auquel on tend est atteint par
+certains moyens dont il importe d'assurer l'efficacité. Par exemple,
+les exercices doivent être convenablement répartis, un temps
+déterminé doit leur être consacré de judicieux intervalles sont
+nécessaires pour les séparer; en un mot il faut établir l'ordre dans
+le travail, puis, veiller à l'exécution de ce travail. Toutes les
+prescriptions, ordres ou défenses, sont renfermées dans un Code nommé
+règlement auquel se conforment maîtres, parents et élèves. C'est la
+loi commune, égale pour tous, protectrice de tous, et que tous ont un
+égal intérêt à respecter et à maintenir. L'autorité du réglement est
+d'autant mieux établie, sur des bases d'autant plus solides, qu'il a
+été inspiré par une préoccupation plus exclusive de la justice. S'il
+est juste, il assure la liberté et l'égalité; l'obéissance qu'on lui
+doit, loin d'être servile et imposée par la force, est au contraire
+une soumission volontaire, recherchée même comme une garantie de
+sécurité, comme une protection que tous invoquent à l'occasion pour
+se défendre contre les injustices dont ils se croient victimes.
+
+Si quelqu'un enfreint la loi, il doit être puni. Il a mal agi, et
+toute action mauvaise entraîne un blâme et un châtiment. De là, les
+peines édictées par la loi. Tandis que dans les lois sociales se
+trouvent inscrits des châtiments contre les coupables, il n'est
+nullement question de récompenses pour les gens de bien. Le
+législateur a pensé, peut-être avec raison, que s'il est inévitable de
+punir le vice, il n'est pas absolument nécessaire de récompenser la
+vertu. La Loi scolaire, elle, punit et récompense; c'est par la
+crainte et l'espérance qu'on gouverne les enfants tout aussi bien que
+les hommes.
+
+L'enfant est un être moral en puissance, la conscience est chez lui en
+germe. Dès lors, nous devons, dès le premier éveil de la conscience,
+nous préoccuper de développer chez lui le sens moral. Ne négligeons
+rien, n'oublions rien de ce qui peut nous faciliter la tâche. «Tout
+est bien, dit Rousseau, sortant des mains de l'Auteur des choses»,
+seulement rien ne sort directement des mains de l'Auteur des choses,
+car tout est bien changé depuis tant de siècles que les hommes
+occupent la terre. L'enfant n'apporte-t-il pas en naissant des
+prédispositions, des aptitudes, des goûts qu'il doit à ses ancêtres
+comme il leur doit les linéaments de son visage? C'est un héritier de
+l'humanité. Tout n'est pas bien mais tout n'est pas mal en lui, et la
+mission de l'éducateur consiste tout à la fois à contrarier les
+mauvaises tendances et à favoriser l'épanouissement des bonnes.
+
+Nous devons nous attacher à lui faire comprendre qu'il y a des choses
+permises et des choses défendues; qu'il doit par suite s'interdire ce
+qui est défendu, et que l'obéissance à la règle, loin d'être pour lui
+un effet de la crainte, doit être l'expression d'un mouvement spontané
+de son âme. Nous contribuerons ensuite à développer et à fortifier
+chez lui le sens moral, à rendre sa conscience de plus en plus
+délicate, en évitant de lui laisser confondre le mérite et le démérite
+avec leurs conséquences, en le pénétrant de cette idée que ce n'est
+pas de la punition mais de la faute qu'il doit être peiné, comme ce
+n'est pas de la récompense mais de la bonne action seule dont il doit
+être satisfait.
+
+
+
+
+I
+
+DES PUNITIONS
+
+
+Il importe bien plus d'ailleurs, en particulier dans nos écoles,
+disons-le tout d'abord, de prévenir que de punir. Il faut tendre, sans
+prétendre y arriver, vers cette classe idéale où l'on ne punit pas. Au
+lieu de se proposer, comme les jeunes maîtres encore inexpérimentés,
+d'obtenir d'abord le silence et l'attention pour donner ensuite
+l'enseignement, c'est le contraire qu'on doit se proposer,
+c'est-à-dire rendre l'enseignement assez attrayant pour intéresser les
+élèves. L'ordre et l'application sont alors des conséquences
+naturelles. Que la leçon soit donnée avec intelligence, mesure et
+goût, on obtiendra par surcroît le silence, l'attention et le travail.
+Ne pas regarder la discipline comme un but à atteindre est un moyen de
+l'obtenir. En général plus l'enseignement est faible, plus la
+discipline est dure.
+
+Bien entendu, cela ne dispense ni de bons règlements, ni de bonnes
+méthodes, ni de bons procédés, en un mot des conditions favorables au
+travail. La tâche du maître sera en outre singulièrement facilitée: 1º
+si la durée des classes est en rapport avec l'âge des enfants; 2º s'il
+existe une judicieuse répartition du travail et du repos; 3º si une
+sage mesure est observée dans la durée et l'intensité des efforts
+exigés des élèves, car nous ne devons pas oublier qu'il faut au
+cerveau, comme à l'estomac, indépendamment de la diversité dans
+l'alimentation, une somme de nourriture qu'il puisse digérer et
+assimiler.
+
+Si rarement qu'on ait à punir, encore faut-il punir quelquefois.
+Occupons-nous donc de la nature des châtiments.
+
+ * * * * *
+
+Depuis l'humanité naissante jusqu'à nos jours, on a surtout fait usage
+des peines corporelles. On a puni l'âme indocile dans le corps qu'elle
+gouverne, au lieu de la châtier directement. On était plus préoccupé
+de l'expiation de la faute que de l'amélioration du coupable. Il a
+fallu, d'une part, l'adoucissement des moeurs, et, d'autre part, une
+idée plus exacte, une appréciation plus saine du châtiment pour
+reconnaître qu'il ne doit être ni une cruauté ni une vengeance, mais
+un moyen offert au coupable de s'amender. Les moeurs scolaires se
+sont ressenties de la transformation des moeurs générales, ainsi qu'on
+voit les grands mouvements de l'Océan gagner les baies les plus
+reculées dans l'intérieur des terres.
+
+Aujourd'hui, dans la plupart des pays civilisés, les châtiments
+corporels sont tombés dans un discrédit sérieux. En Angleterre, où le
+respect de la tradition est excessif, on se relâche cependant des
+rigueurs du fouet traditionnel. Dans un rapport présenté au _Conseil
+d'éducation_ de Londres, le rapporteur s'exprime ainsi: «Nous sommes
+heureux d'annoncer, que le nombre des punitions diminue, spécialement
+en ce qui concerne les punitions corporelles, ce qui tient sans doute
+aux règles établies pour les cas où ces punitions sont permises. Nous
+les verrions même disparaître si les maîtres avaient le droit de
+renvoyer les enfants incorrigibles et intraitables, ce qui est
+impossible dans une école ouverte à tous.»
+
+Par contre, de l'autre côté du Rhin, on semble vouloir en augmenter
+les rigueurs, «en autorisant l'instituteur à infliger des punitions
+corporelles sensibles qui laissent des traces comme les bleus, les
+raies enflées, les ecchymoses». Voici un extrait d'un jugement rendu
+par le tribunal supérieur d'_administration_ de Prusse:
+
+L'instituteur, y est-il dit, est autorisé à infliger des punitions
+corporelles sensibles. Il doit éviter de causer des blessures
+«marquantes», qui mettent en danger la santé de l'élève. Les bleus,
+les raies enflées, les ecchymoses, ne constituent pas de signes
+indiquant des blessures «marquantes»; car chaque correction
+sensible--et l'instituteur est expressément autorisé à infliger une
+correction sensible--laisse des traces pareilles.
+
+L'instituteur n'est pas passible d'une peine s'il châtie un élève
+appartenant à une autre classe que celle qu'il dirige; la punition
+peut être infligée en dehors du local scolaire.
+
+La conduite de l'élève en dehors de l'école est également soumise à la
+discipline scolaire.
+
+L'ecclésiastique de son côté est autorisé quand il donne l'instruction
+religieuse à administrer des punitions sensibles.
+
+La conduite de l'instituteur ne peut devenir l'objet de poursuites que
+lorsqu'il a infligé des blessures marquantes.
+
+Toujours est-il que c'est avec quelque répugnance, et à la dernière
+extrémité qu'on les applique, et en les atténuant, Ceux qui les
+appliquent semblent s'en excuser et les considérer comme un mal
+nécessaire.
+
+ * * * * *
+
+Remarquons en passant qu'un très petit nombre d'animaux mordent ou
+frappent à coups de bec leurs petits qui se conduisent mal. Le plus
+souvent, ils les grondent, et cela suffit ordinairement pour les faire
+rentrer dans le devoir. C'est merveille, par exemple, de voir les
+jeunes poussins obéir à la mère poule.
+
+Elle a un cri pour les rappeler lorsqu'ils s'égarent, un autre cri
+pour les rassurer s'ils ont eu peur à tort; un autre, pour les
+rassembler si un danger se présente. Quel que soit l'ordre donné, ils
+obéissent à la voix maternelle. Comment se fait-il que l'homme, qui
+se qualifie animal raisonnable, ne soit pas conduit uniquement par la
+raison. C'est sans doute parce que de tous les animaux, il est celui
+dont l'éducation première a la plus longue durée et réclame le plus de
+soins. L'éducation des jeunes animaux par leurs parents rentre dans la
+catégorie des actes instinctifs: elle est invariable dans ses moyens
+comme dans sa durée et parfaite quant au but à atteindre. Celle de
+l'enfant, au contraire, se modifie avec le progrès des moeurs et la
+connaissance plus précise de l'hygiène. Les procédés d'éducation
+varient avec le degré de civilisation.
+
+ * * * * *
+
+Le premier châtiment corporel est infligé avec la main. Non moins
+diligente que la parole, la main se lève au moment même où celle-ci
+formule un reproche. Un ébranlement nerveux unique, parti du cerveau,
+se répand dans le corps tout entier et détermine simultanément
+l'ensemble des manifestations de la colère. La main est tout à la fois
+un merveilleux outil au service du corps et un admirable instrument
+aux ordres de l'âme. Ses mouvements ne sont pas moins variés que ses
+usages. Si, d'une part, elle sert à assurer et à guider les pas du
+jeune enfant, elle devient, à l'occasion, envers ce même enfant, un
+instrument de correction.
+
+Nous n'hésitons pas à condamner cette sorte de correction, qu'elle
+qu'en soit la forme: tape, calotte, claque, soufflet, lors même
+qu'elle n'a rien de prémédité ni de suivi, qu'elle résulte d'un
+mouvement de vivacité sans conséquence, parce que, avec une apparence
+anodine, elle présente parfois de graves inconvénients sinon des
+dangers. Les coups sur la tête, le dos ou la face donnés par une main
+brutale, peuvent déterminer des accidents sérieux et le soufflet a de
+plus un caractère dégradant. La face humaine voisine du cerveau,
+centralisant les organes des sens est en rapport direct et intime avec
+l'âme. La personne humaine est empreinte dans le visage plus que dans
+toute autre partie du corps, voilà ce qui rend le visage digne de
+respect. Tout au plus la fessée pourrait être tolérée, et encore pour
+de très jeunes enfants.
+
+Malgré l'aisance de ses mouvements et la vigueur de ses coups, la main
+ne paraît pas toujours suffire à certaines personnes, et tantôt pour
+des motifs de convenance ou de commodité, tantôt pour aggraver la
+souffrance, on l'a armée du bâton, de la baguette, du fouet, de la
+férule ou du martinet.
+
+Ces diverses modifications du châtiment corporel n'étaient pas pour
+lui conquérir des sympathies.
+
+ * * * * *
+
+Chez les Égyptiens, le bâton est l'instrument de correction; comme on
+a pu s'en assurer par les devoirs d'écoliers égyptiens qui se trouvent
+parmi les papyrus du _British Museum_ (Musée de Londres) et qui
+remontent au XVIIe siècle avant notre ère[1]. Parmi les exemples
+d'écriture, on lit: «Celui qui n'écoute pas sera battu;» ailleurs: «Ne
+fais pas un jour de paresse, ou bien on te battra; il y a un dos chez
+le jeune homme, il écoute celui qui le frappe». La menace des coups de
+bâton, revient souvent mais il ne paraît pas que ce soit seulement à
+propos des fautes commises. Il semble que les coups aient eu aussi
+pour but d'encourager l'écolier au travail, d'éveiller son attention
+comme le léger coup de fouet par lequel on excite le cheval et qui est
+comme une caresse stimulante. Les Égyptiens bâtonnent leurs ânes et
+ils ont procédé de même avec les écoliers. Il est même probable que la
+comparaison de l'écolier ignorant à un âne est d'origine égyptienne.
+Le bâton présente peut-être moins de dangers et d'inconvénients que le
+fouet pour un même effort de celui qui frappe.
+
+ [1] _Pédagogie égyptienne_, note de M. Georges Daressy dans la
+ _Revue pédagogique_ (juillet-décembre 1885).
+
+
+ * * * * *
+
+La verge, qui semble avoir été en usage chez les Hébreux, et qui
+pouvait être une baguette ou un bâton, est sans doute empruntée aux
+Égyptiens. Nous disons qu'elle semble avoir été en usage parce que les
+proverbes ou autres passages qui se rapportent aux menaces de la verge
+ne sauraient prouver plus que nos propres proverbes qui ne sont
+d'ailleurs le plus souvent que la répétition des proverbes anciens. Se
+figure-t-on nos descendants, retrouvant des expressions comme
+celles-ci: _donner des verges pour se faire fouetter_, et concluant de
+là qu'on faisait usage de ce mode de punition chez les Français. Or,
+c'est ainsi qu'on raisonne lorsqu'on attribue cet usage aux Hébreux
+parce qu'on lit dans les _proverbes_: _la folie est liée au coeur de
+l'enfant, et la verge de la discipline l'en chassera_, ou bien parce
+que Roboam dit: _mon père vous a battus avec des verges, moi je vous
+châtierai avec des verges de fer_. Quoi qu'il en soit, il est permis
+de croire que les enfants des Hébreux ont reçu le fouet comme ceux des
+autres nations.
+
+ * * * * *
+
+Nous n'avons guère que quelques indications sommaires sur les moyens
+de correction appliqués par les Grecs. Xénophon nous dit, en parlant
+des enfants de Sparte, qu'on les encourage à dérober les fromages sur
+l'autel de Diane Orthie, quitte à les _fouetter_ jusqu'au sang s'ils
+se laissent surprendre. Lycurgue voulait que tout citoyen eût sur
+chaque enfant le droit de correction, et si, _frappé_ par d'autres,
+l'enfant vient se plaindre, etc., c'est le châtiment corporel appliqué
+sans ménagement[2]. Remarquons que les choses se passent ainsi à
+Sparte et qu'on n'en saurait conclure qu'il en ait été de même à
+Athènes; loin de là. Platon ne nous dit rien des corrections, lui qui
+entre pourtant dans de grands détails sur les soins à donner aux
+jeunes enfants et dont les préceptes, disons-le en passant, sont en
+opposition avec les lois les plus élémentaires de l'hygiène[3].
+
+ [2] Xénophon, _Gouvernement de Sparte_.
+
+ [3] Ainsi il préconise le maillot et l'usage du berceau jusqu'à
+ l'excès. Il voudrait que l'enfant fût dans son berceau comme dans
+ un navire constamment balancé par les vagues.
+
+Nous ne trouvons rien non plus dans Aristote: il est vrai que tout ce
+qui se rapporte à l'éducation du premier âge est traité par lui avec
+un évident amour de l'enfance, et que la tendresse du père laisse
+présumer celle de l'éducateur. Avec Plutarque, au contraire, nous
+sommes exactement renseignés sur le point qui nous intéresse. «C'est
+par la douceur, la persuasion, dit-il, qu'il faut porter au bien la
+jeunesse; les mauvais traitements et les coups ne conviennent qu'à des
+esclaves, et dégradent des hommes libres. A ce régime, l'enfant
+devient comme hébêté[4].» Les Grecs n'en sont pas encore, on le voit,
+à fonder une société protectrice des animaux. Toutefois un progrès
+considérable s'est déjà accompli dans les moeurs.
+
+ [4] _Éducation des enfants_, 16.
+
+
+ * * * * *
+
+Chez les Romains, la chose n'est pas douteuse; les renseignements nous
+viennent de divers côtés. Plaute (234-184 av. J.-C.) dans sa comédie
+des _Bacchis_, met dans la bouche d'un des personnages, ces mots:.....
+«Assis auprès de ton précepteur, tu lisais, et s'il t'arrivait de
+manquer d'une syllabe, ta peau était aussitôt bigarrée comme le
+manteau de la nourrice[5].»
+
+Horace (65-8 av. J.-C.) nous a conservé le nom de ce rude soldat qui
+s'était fait grammairien à cinquante ans, et dont il dit: «... Je me
+souviens des vers que me dictait le _fouetteur_ Orbilius, lorsque
+j'étais enfant...[6]»
+
+ [5] Plaute, _les Bacchis_, acte 3, scène 4.
+
+ [6] Ep. I, liv. II.
+
+«Loin de nous, dit Quintilien (42-120) le châtiment ignominieux qu'on
+inflige aux enfants, quoique l'usage l'autorise... D'abord, il est
+indécent et servile puisqu'à tout autre âge, il constituerait un
+outrage cruel, ensuite, l'élève, sourd aux réprimandes, sera bientôt
+insensible aux coups.»
+
+On pourrait multiplier les citations.
+
+ * * * * *
+
+Tandis que les Romains instruits blâment l'usage de corrections
+corporelles, saint Chrysostome, saint Augustin, les moines s'inspirent
+de la Bible, mal interprétée, pour préconiser ces corrections. Les
+moeurs du moyen âge n'étaient pas faites pour apporter quelque
+adoucissement à ce régime. Nous n'avons pas l'intention de réunir ici
+tous les témoignages qui sont fort nombreux[7]. Nous citerons
+seulement les plus intéressants. Les maîtres ne sont pas désignés
+autrement que par l'épithète de _furieux_ (_furiosus preceptor_) que
+leur avait donné déjà saint Jérôme. Ils ne décolèrent pas, ne cessent
+de frapper pour faire pénétrer dans la tête de pauvres enfants des
+connaissances médiocres et médiocrement enseignées. Un évêque,
+Rathérius (ou Rathier, 974), compose une grammaire qu'il intitule
+_pare-dos_. C'est effectivement le dos qui reçoit le plus de coups, ce
+qui n'empêche que la tête, le visage, les fesses n'en aient leur bonne
+part. Les cheveux, les oreilles semblent aussi appeler les
+tiraillements des maîtres bourreaux.
+
+ [7] Voir une spirituelle et intéressante étude de M. Franck
+ D'Arvert dans la _Revue pédagogique_ (juillet 1885). Voir
+ également l'_Histoire des doctrines de l'éducation_, de M.
+ Compayré.
+
+
+Les esprits doux et sensés s'élèvent contre ces brutalités odieuses.
+
+Saint Anselme (1033-1109) rapporte que, causant avec un abbé qui
+dirigeait les études des écoliers d'un cloître, celui-ci se plaignit
+amèrement des enfants: «Ils sont, dit-il, méchants et incorrigibles.
+Nous ne cessons de les frapper jour et nuit et ils deviennent toujours
+pires.--Eh quoi! lui dit saint Anselme, vous ne cessez de les frapper,
+et que deviennent-ils une fois grands?--Idiots et stupides, répond
+l'abbé.--Voilà une belle éducation, reprend le saint, qui de l'homme
+fait une bête.»
+
+Le doux et pieux Gerson (1363-1429) est l'auteur d'un petit livre dans
+lequel il compare les enfants à de frêles plantes pour lesquelles il
+réclame des soins et une vigilance active. Il se plaint de la disette
+de bons maîtres qui aient pour leurs élèves un coeur de père et qui
+n'usent pas de châtiments corporels.
+
+«Il est plus facile, dit-il, de gagner les enfants par la douceur que
+par la crainte; autrement dit: On prend plus de mouches avec une
+cuillerée de miel qu'avec une tonne de vinaigre.»
+
+Un siècle plus tard, Rodolphe Agricola (1442-1485), disait: «Une école
+ressemble à une prison: ce sont des coups, des pleurs et des
+gémissements sans fin.» Après lui Érasme (1467-1536) continue: «C'est
+à la charrue qu'il faut envoyer de pareils maîtres, dignes d'effrayer
+de leur voix tonnante les boeufs et les ânes..... Oses-tu bien,
+stupide bourreau, déchirer à coups de fouet, des jeunes gens d'esprit
+et de bonne famille, que tu es plus capable de tuer que
+d'instruire!...» Érasme et Rabelais (1483-1553) ont cité, avec les
+mêmes sentiments de réprobation, le collège de Montaigu où régnait le
+bourreau Pierre Tempête tenant en guise de sceptre le fameux fouet
+auquel il dut sa détestable renommée[8].
+
+ [8] L. I, ch. 27.
+
+«..... L'éducation se doit conduire avec une fermeté douce, dit
+Montaigne... Otez-moi la violence et la force; il n'est rien, à mon
+avis, qui abâtardisse et étourdisse si fort une nature bien née...
+Entre autres choses, la discipline de la plupart de nos collèges m'a
+toujours déplu... c'est une vrai prison (geaule) de jeunesse
+captive... Arrivez-y au moment du travail, vous n'entendez (oyez) que
+cris et d'enfants suppliciés et de maîtres enivrés dans leur colère.
+Quelle manière pour éveiller l'appétit envers leur leçon, à ces âmes
+tendres et craintives, que de les y engager avec une trogne
+effroyable, les mains armées de fouets... Combien leurs classes
+seraient plus décemment jonchées de fleurs et de feuilles que de
+tronçons d'osier sanglants!...[9]»
+
+ [9] Montaigne (1533-1592), liv. Ier, chap. XXV.
+
+Le disciple de Montaigne, Charron (1543-1603), l'auteur de _la
+Sagesse_, parle dans le même sens que son maître, quelquefois même il
+lui emprunte ses propres écrits. «..... Nous condamnons, dit-il, tout
+à fait la coutume presque universelle de battre, fouetter, injurier et
+crier après les enfants... préjudiciable et toute contraire au dessein
+que l'on a de les rendre amoureux et poursuivant la vertu, sagesse,
+science, honnêteté. Or cette façon impérieuse et rude leur en fait
+venir la haine, l'horreur et le dépit; puis les effarouche et les
+entête, leur abat et ôte le courage tellement que leur esprit n'est
+plus que servile et bas... Les coups sont pour les bêtes qui
+n'entendent pas raison; les injures et crieries sont pour les
+esclaves...»
+
+Rollin (1661-1741), à son tour, réprouve dans son for intérieur les
+châtiments corporels; son coeur paternel, son âme sensible y
+répugnent, et pourtant il hésite par respect pour les textes bibliques
+que nous avons cités plus haut. Nous l'avons dit, le langage de la
+Bible est surtout figuré, et Varet (1632-1676) de Port-Royal[10],
+interprète les textes plus judicieusement que Rollin lorsqu'il dit:
+«J'estime que la rigueur recommandée par l'Écriture-Sainte s'exerce
+bien plus parfaitement et mieux selon l'esprit de Dieu par le refus
+d'un baiser ou des caresses ordinaires que par les verges.»
+
+ [10] (Varet, _De l'éducation chrétienne des enfants_.)
+
+Locke (1632-1704) veut bien tolérer dans certains cas exceptionnels
+les peines corporelles: L'usage du fouet, dit-il, est une discipline
+servile qui rend le caractère servile[11]. Quelques voix s'élèvent
+dans ce concert de réprobation pour parler en faveur du fouet:
+Mélanchton, Johnson, Goldschmidt déclarent qu'ils n'auraient jamais
+rien appris s'ils n'avaient été fouettés. C'est là une simple
+affirmation sans preuves, et dans tous les cas ce ne sont pas des
+personnalités éminentes.
+
+ [11] Locke, _Pensées sur l'éducation_.
+
+Par contre, Luther protestera, lui qui avait été battu jusqu'à quinze
+fois dans une seule matinée.
+
+«Un enfant intimidé, dit-il, par de mauvais traitements, est irrésolu
+dans tout ce qu'il fait. Celui qui a tremblé devant ses parents
+tremblera toute sa vie devant le bruit d'une feuille que le vent
+soulève.»
+
+
+Qui ne voit que le maître qui frappe un élève compromet tout à la fois
+sa dignité et son autorité? S'il ne se possède pas, s'il s'emporte,
+quel déplorable spectacle ne donne-t-il pas à son élève et dès lors
+quel respect, quelle estime, quelle affection peut-il en attendre? Si,
+au contraire, il est calme, comment osera-t-il brutaliser un enfant ou
+assister impassible à l'exécution qu'il aura ordonnée!
+
+Et pourtant les punitions corporelles continuent à être pratiquées.
+Nul n'en est exempt, pas même les enfants des grands et des rois. On
+le comprendrait à la rigueur dans les masses ignorantes et non
+policées; là, les coups sont et seront toujours d'un usage courant: le
+procédé est commode, sommaire, et expéditif, à la portée de tous,
+tandis que les autres moyens de corrections exigent bien des qualités
+que maître et parents possèdent rarement.
+
+Lorsqu'il fut question de l'éducation du Dauphin, fils de Louis XIV,
+le marquis du Châtelet composa un traité dans lequel on lit: «Il n'est
+point ici question de férule, un Dauphin de France doit être conduit
+par la gloire et par la douceur..... On doit ne le détourner du vice
+que par les charmes de la vertu[12]». Mais malgré ces sages avis, sans
+doute aussi, malgré Bossuet dont tous les contemporains ont loué la
+douceur et qui écrivait au pape Innocent: «C'est par la douceur qu'il
+faut former l'esprit des enfants», on donna pour gouverneur au Dauphin
+ce soldat honnête, mais quinteux, violent, brutal, sans pitié pour
+l'enfance, le duc de Montausier, qui se qualifiait gaîment lui-même
+_exécuteur des hautes oeuvres_, et se livrait envers son royal élève à
+un véritable débordement de coups dont rougirait aujourd'hui un
+charretier. Le fidèle valet de chambre Dubois nous a conservé le récit
+ému de ces scènes odieuses[13]. Se figure-t-on Bossuet spectateur
+indifférent de ces honteuses violences!
+
+ [12] _Traité de l'éducation de Monsg. le Dauphin_, par Paul Hay
+ du Châtelet.
+
+ [13] _Journal de Dubois_, 29 juillet 1671. Bibl. de l'école des
+ Chartes, c. 4, 2e série.
+
+ * * * * *
+
+Encore, si la peine corporelle était efficace ou l'était plus que les
+autres punitions! Mais nullement: elle est sans effet. Où la douceur
+n'a rien obtenu, la violence obtient moins encore. On impose par la
+crainte le silence et l'immobilité, non l'attention et le travail
+fécond. Les Jésuites avaient essayé d'un fouet perfectionné, composé
+de petites ficelles qui effleuraient la peau sans atteindre la chair.
+A quoi bon! Si le fouet ne cause aucun mal, il n'est plus qu'une
+grossière et inutile humiliation, d'une pratique pernicieuse au point
+de vue éducatif. Renonçons une fois pour toutes à des procédés qui
+terrifient l'enfant et le rendent incapable d'attention. Locke dit
+avec autant d'esprit que de raison, qu'il est aussi difficile de fixer
+des idées nettes dans une âme agitée que de bien écrire sur un papier
+qui tremble[14].
+
+ [14] Locke, _Quelques pensées sur l'éducation_.
+
+
+Comment veut-on que l'esprit de l'enfant ne soit pas troublé par les
+menaces et les éclats de la colère, prélude ou accompagnement
+ordinaire des brutalités? La crainte rend l'enfant timide et sournois;
+frapper n'est pas corriger. L'unique souci de l'enfant sera d'éviter
+les coups, et, pour s'y soustraire, il dissimulera ses fautes par le
+mensonge. C'est en ce sens surtout que le châtiment corporel est
+anti-éducatif.
+
+Ce châtiment présente en outre des dangers sérieux: un maître irrité
+ne mesure pas ses coups et, parfois il lui arrivera de dépasser une
+limite prudente et de blesser un enfant sans le vouloir. Un mouvement
+instinctif de celui-ci pour éviter ou parer un coup peut occasionner
+un accident grave. Si, à la rigueur, on use des coups envers les
+animaux, c'est qu'il ne nous est pas facile de nous en faire
+comprendre, d'autant que nous exigeons d'eux des services peu en
+rapport avec leurs aptitudes et souvent contre leur gré. On sait
+combien l'abus est voisin de l'usage[15]; de là les mauvais
+traitements que réprime la loi protectrice des animaux. Mais l'enfant
+est un animal raisonnable, il nous comprend. Dès lors pourquoi nous
+priver bénévolement du concours de ses facultés supérieures et, d'un
+animal raisonnable, ne pas utiliser la raison.
+
+ [15] Pour se convaincre de la facilité avec laquelle on glisse de
+ l'usage à l'abus, il suffit de lire dans les règlements des
+ Jésuites, des Frères, de MM. de Port-Royal, etc., les
+ recommandations aux maîtres, les appels à leur patience, à leur
+ modération. Il est si naturel de se servir d'une arme lorsqu'on
+ la tient à la main! Le châtiment corporel a été souvent un
+ acheminement vers la torture.
+
+
+ * * * * *
+
+Jusqu'ici il n'a été question que de coups, parce qu'en général les
+coups seuls, en y comprenant les tirements d'oreilles, de cheveux et
+pincements, sont regardés comme des châtiments corporels. En réalité,
+on doit comprendre sous cette appellation toute privation de nature à
+porter atteinte à la santé: celle d'une nourriture substantielle, par
+exemple. Mettre un jeune enfant au pain sec et à l'eau, c'est lui
+infliger une punition plus sévère qu'une tape ou qu'un coup de
+baguette, et d'une durée plus longue. La retenue, la privation de
+récréation ou de promenade sont également des punitions corporelles et
+des plus pénibles pour un être qui a si grand besoin de mouvement: en
+outre, ces moyens de correction vont contre le but qu'on se propose,
+car s'il s'agit de réprimer la turbulence, l'immobilité qu'on impose à
+l'enfant ne fait qu'exaspérer le besoin de mouvement qu'il a; c'est
+pour lui un supplice. Laissez-le au contraire épuiser son activité
+afin de le calmer; qu'il dépense sa fougue hors de la classe, afin
+qu'il ne la dépense pas au dedans.
+
+Si, de plus, vous lui donnez à faire des pensums, si vous
+l'assujettissez à une besogne fastidieuse et stérile, vous rendez la
+punition plus dure encore. Ajoutons enfin qu'il y a toujours de
+sérieux inconvénients à donner au travail le caractère d'un châtiment.
+On risque ainsi d'inspirer à l'enfant le dégoût de l'étude et
+l'aversion pour le maître, indépendamment des mauvaises habitudes de
+travail qu'entraîne l'accomplissement d'une tâche rebutante.
+
+En résumé, tout châtiment corporel, quelle qu'en soit la nature, est
+_sans effet sérieux, dangereux_ et _anti-éducatif_. C'est plus qu'il
+n'en faut pour le proscrire.
+
+ * * * * *
+
+Que reste-t-il alors comme moyen d'action?
+
+La privation de certains plaisirs; mais surtout les exhortations et
+les réprimandes.
+
+C'est peu, pensera-t-on peut-être. C'est suffisant, dirons-nous, pour
+qui saura en user avec tact, mesure et convenance, en tenant compte de
+la gravité plus ou moins grande de la faute, de la sensibilité plus ou
+moins vive de l'enfant.
+
+Swift (1667-1745), dans son ingénieux roman de _Gulliver_, fait ainsi
+finement la critique de la discipline scolaire de son temps.
+
+«Il est défendu aux maîtres, dit-il, de châtier les enfants par la
+douleur, ils le font par le retranchement de quelque douceur sensible,
+par la honte, et surtout par la privation de deux ou trois leçons, ce
+qui les mortifie extrêmement, parce qu'alors on les abandonne à
+eux-mêmes, et qu'on fait semblant de ne les pas juger dignes
+d'instruction. La douleur, selon eux, ne sert qu'à les rendre timides,
+défaut très préjudiciable, et dont on ne guérit jamais.»
+
+Gardons-nous en effet de croire que la sévérité des peines en assure
+l'efficacité: la sensibilité physique ou morale s'émousse par l'effet
+de l'habitude. Défions-nous de cette soumission silencieuse obtenue
+par un mot dur ou par la menace d'un châtiment et qui dissimule mal la
+révolte intérieure et le coeur ulcéré.
+
+«On obtient plus, dit Plutarque, par les éloges et les réprimandes que
+par les rigueurs si l'on a soin de les employer tour à tour, celles-ci
+pour détourner du mal, ceux-là, pour encourager au bien.» «Je veux,
+dit à son tour Quintilien, qu'on me donne un enfant qui soit sensible
+à la louange, que la gloire enflamme, à qui une défaite arrache des
+larmes..... Un reproche, une réprimande le touchera au vif, le
+sentiment de l'honneur l'aiguillonnera»[16].
+
+ [16] Quintilien, _Institution oratoire_, l. I.
+
+Un reproche adressé sans amertume, sinon sans gravité et sans
+tristesse, produit une vive impression sur l'enfant surtout si en lui
+adressant on s'attache à lui faire reconnaître sa faute et qu'on lui
+inspire le désir de s'amender. Le châtiment doit être pour celui qui a
+commis une faute un moyen de se relever. En éducation, tout doit
+servir à l'éducation.
+
+Malheureusement peu de gens savent adresser des reproches, les
+formuler, les graduer, prendre le ton nécessaire, choisir le moment
+convenable, l'occasion propice, les circonstances favorables. Il y a
+un art de punir. N'ajoutez pas l'insulte au reproche, comme on le fait
+d'ordinaire, car vous aggravez ainsi la punition, et vous en épuisez
+bientôt l'effet, si bien que vous serez désarmé pour l'avenir; surtout
+n'y revenez pas à plusieurs reprises comme ces parents qui, à toute
+occasion, renouvellent leurs plaintes, invitent les parents, les amis,
+les étrangers même à s'associer à eux pour accabler l'enfant. C'est
+comme une blessure que vous rouvrez, c'est un supplice incessamment
+renouvelé, ce n'est plus un reproche, mais une succession de
+reproches, une série d'humiliations, A l'entrée de chaque visiteur, on
+entend: savez-vous ce qu'a fait Jules?--Il a fait telle
+chose.--Grondez-le donc. Puis, on compare Jules à Paul qui est bien
+autrement sage, qui donne à ses parents de si vives satisfactions,
+etc. Heureusement que les enfants, moins soucieux que leurs parents de
+la prétendue sagesse qu'on leur accorde, ne s'en aiment pas moins, car
+les parents font tout ce qui est nécessaire pour éveiller chez leurs
+enfants des sentiments de haine, d'envie et de jalousie.
+
+
+_Conditions auxquelles doivent satisfaire les punitions._
+
+Avant de donner quelques indications sur la manière dont on doit
+procéder dans l'application, il nous semble indispensable d'énumérer
+les conditions auxquelles doivent satisfaire les punitions en général.
+Ces conditions sont au moins aussi essentielles que les punitions
+mêmes et il est absolument nécessaire de s'y conformer si l'on veut
+assurer l'efficacité de ces dernières.
+
+Nous ne dirons pas qu'une punition doit être juste; cela va de soi.
+Quand elle est injuste, c'est que parents ou maîtres se sont trompés;
+nous ne saurions admettre un instant que de propos délibéré ils
+veuillent commettre une injustice. «C'est perdre toute confiance dans
+l'esprit des enfants, dit La Bruyère, et leur devenir inutile, que de
+les punir des fautes qu'ils n'ont point faites ou même sévèrement de
+celles qui sont légères. Ils savent précisément et mieux que personne
+ce qu'ils méritent, et ils ne méritent guère que ce qu'ils craignent:
+ils connaissent si c'est à tort ou avec raison qu'on les châtie et ne
+se gâtent pas moins des peines mal ordonnées que de l'impunité[17].»
+
+ [17] La Bruyère, _De l'homme_, XI.
+
+
+Point de punitions générales dans les classes; mieux vaut laisser un
+coupable impuni que punir des innocents afin de pouvoir l'atteindre.
+Ajoutons que le plus souvent la punition sera beaucoup plus dure pour
+ceux-ci qu'elle ne sera efficace pour celui-là.
+
+
+1º.--_Les punitions doivent être rares._
+
+La fréquence des punitions en diminue l'effet. L'élève s'y accoutume:
+or comme nous voulons faire appel aux sentiments délicats et élevés,
+nous ne devons le faire qu'avec de grands ménagements, afin de
+conserver à l'enfant toute sa fraîcheur d'impression et toute sa
+sensibilité.
+
+«..... Si vous avez envie, dit excellemment Montaigne, qu'il craigne
+la honte et le châtiment, ne l'y endurcissez pas: endurcissez-le à la
+sueur et au froid, au vent, au soleil, et aux hasards qu'il lui faut
+mépriser...[18]»
+
+ [18] Montaigne, l. I, ch. XXV.
+
+
+2º.--_Toute punition infligée doit être exactement subie._
+
+Pas d'indécision à cet égard. La certitude de la punition importe bien
+plus que la rigueur. Réfléchissez mûrement avant d'infliger un
+châtiment, mais, la décision prise, ne cédez ni aux cris, ni aux
+supplications, car si vous manquez de fermeté une seule fois, votre
+autorité est perdue. Dès que l'enfant se sera aperçu qu'il peut vous
+fléchir en vous lassant, vous n'aurez plus d'action sur lui, tandis
+que s'il est convaincu de son impuissance, s'il désespère de vaincre
+votre résistance, il n'essaiera plus de lutter, il se résignera.
+
+Que de fois nous avons entendu des mères trop vives et trop tendres,
+s'écrier: Gaston, si tu fais cela, tu seras privé de dessert; mais le
+moment d'après, la peine était levée et à partir de ce moment l'enfant
+savait qu'il n'avait plus à redouter l'exécution des menaces. Sans le
+vouloir, inconsciemment, la mère lui avait laissé voir sa faiblesse.
+
+«Que tous vos refus soient irrévocables, dit Rousseau, que le _non_
+prononcé soit un mur d'airain, contre lequel l'enfant n'aura pas
+épuisé cinq ou six fois ses forces qu'il ne tentera plus de
+renverser[19]».
+
+ [19] Rousseau (1712-1778), _Émile_, livre II.
+
+Nous donnons des instructions générales qui souffrent des exceptions.
+La justice n'exclut pas la miséricorde. Il faut rester inflexible tant
+qu'on ne voit chez l'enfant qu'un désir d'échapper à une punition
+comme on évite ce qui est désagréable, mais on peut céder devant les
+signes d'un repentir évident, d'un regret sincère de la faute commise
+et d'une douleur vraie.
+
+
+3º.--_La punition doit suivre de très près la faute._
+
+L'enfant agit et pense rapidement. La faute qu'il a commise, il
+l'oublie l'instant d'après. Tout est pour lui à courte échéance: le
+passé et l'avenir. Il vit surtout dans le présent. Que tout châtiment
+suive donc de très près la faute et même s'il se peut, qu'il la suive
+immédiatement et comme une conséquence. L'efficacité en sera d'autant
+plus certaine. Un enfant qui ressent une douleur parce qu'il a touché
+à un objet malgré la défense qui lui en a été faite, associe plus
+étroitement dans son esprit la faute et le châtiment, comme la cause
+et l'effet. Il ne désobéira pas de si tôt; le voilà doublement averti
+et qui se tient mieux sur ses gardes: _chat échaudé craint l'eau
+froide_, dit le proverbe. Malheureusement on ne peut que bien rarement
+tirer parti de ce que nous appelons les _punitions-conséquences_,
+d'abord parce que toute faute n'en comporte pas nécessairement, puis,
+à cause des dangers qu'elles présentent souvent. Laisser, par exemple,
+un enfant se brûler pour qu'il ne touche pas au feu, c'est courir un
+trop grand risque pour un trop faible résultat. Avec un pareil mode de
+correction, l'enfant aurait le temps de mourir avant d'avoir appris à
+vivre.
+
+«Faire la part de l'expérience personnelle, dit M. Gréard, rien de
+mieux; elle est la rançon de la liberté. Mais attendre que le jeune
+homme s'instruise exclusivement par ses propres fautes, n'est-ce pas
+la plus dangereuse des chimères?[20]» Qui donc a pu se passer de
+l'expérience d'autrui? Notre expérience se compose de celle de
+l'humanité et de la nôtre; les deux sont nécessaires. Attendre que
+l'expérience résulte du jeu des événements, c'est réduire l'enfant à
+n'être qu'une chose ou qu'un être inconscient; c'est le priver
+bénévolement du facteur le plus important, la pensée, ou ne la faire
+intervenir que par la réflexion après coup. «C'est le résultat d'un
+acte, dit M. Gréard, qui en détermine la nature et la valeur..... Il
+s'agit non de bien faire, mais d'être adroit[21].» Cela rappelle le
+cas des enfants de Sparte punis non du larcin mais de leur
+maladresse. Où est l'idée de responsabilité du moment que je ne compte
+que pour une chose. S'il y avait en cela une idée morale on pourrait
+la désigner sous le nom de morale de l'habileté; ce serait une variété
+de la morale de l'intérêt.
+
+ [20] Gréard, _de l'esprit de discipline_.
+
+ [21] Id.
+
+Remarquons d'autre part que l'enfant victime des choses, s'irrite mais
+ne s'éclaire pas; s'il se heurte contre un meuble, il frappera
+volontiers le meuble et ne s'en prendra pas à lui-même. A proprement
+parler, il ne s'agit pas ici de l'expérience telle qu'on l'entend
+d'ordinaire et qu'on pourrait appeler générale, mais d'une expérience
+particulière. La nécessité n'en est pas douteuse mais elle ne comporte
+pas l'idée de devoir, la notion du mérite et du démérite. C'est une
+expérience d'ordre inférieur.
+
+
+4º.--_La punition doit être proportionnée à la faute._
+
+Gardons-nous de donner aux fautes une valeur fictive qui résulte de ce
+que l'enfant et nous ne l'envisageons pas de la même manière. Tâchons
+de voir les choses du même oeil, non à notre point de vue, mais au
+sien, afin qu'il ne se croie pas victime d'un excès de sévérité.
+
+«L'enfant, dit Rousseau, a des manières de voir, de penser, de sentir,
+qui lui sont propres; rien n'est moins sensé que d'y vouloir
+substituer les nôtres; et j'aimerais autant exiger qu'un enfant eût
+cinq pieds de haut, que du jugement, à dix ans[22].» La proportion
+dont nous parlons est assez difficile à garder parce qu'il faut
+l'entendre comme l'enfant lui-même. Il ne s'agit pas de juger la
+faute avec notre jugement et notre expérience mais comme l'enfant la
+juge avec son défaut ou son rudiment de jugement et d'expérience. Il
+sait fort bien, par exemple, que la préméditation ou la récidive
+constituent des aggravations de la faute; il comprendra moins la
+gravité d'une faute due à la paresse ou au défaut d'attention. Nous
+devons attacher plus d'importance à lui faire sentir les inconvénients
+de la paresse qu'à le punir d'avoir été paresseux. De même le besoin
+d'activité physique qu'il éprouve le rend très indulgent pour sa
+turbulence et lui fait éprouver des mouvements d'humeur lorsqu'on l'en
+punit. Il se sent incapable de se contraindre et de gouverner son
+corps.
+
+ [22] Rousseau, _Émile_, livre second.
+
+
+5º.--_La punition doit être proportionnée à la sensibilité de
+l'enfant; elle doit varier avec l'âge._
+
+Le tempérament, la complexion, la sensibilité des enfants sont choses
+très variables; la même punition est plus ou moins rigoureuse selon
+que celui qui la subit est plus ou moins délicat. Une étude attentive
+de chaque enfant nous permettra de distribuer équitablement les
+peines. Quand cette étude devrait nous coûter beaucoup, il n'y a pas à
+hésiter; cela fait partie de la mission de l'éducateur. D'ailleurs
+nous trouverons dans les résultats la compensation de nos efforts et
+de nos peines. Une punition de même nature peut être variée dans le
+degré et la forme, il sera donc facile de dresser une échelle pour
+chaque sorte de punition. Toutefois, hâtons-nous d'ajouter que tout
+ne sera pas résolu par un tarif; n'attribuons pas aux procédés une
+action plus efficace que celle qu'ils comportent, et ne perdons pas de
+vue un seul instant que notre mission est d'éveiller d'abord, de
+cultiver ensuite le sens moral. Nous devons pour ainsi dire couver
+l'enfant, le maintenir dans une atmosphère morale qui est pour son âme
+ce que sont pour son corps les soins tendres, empressés, attentifs de
+sa mère. A peine sera-t-il abattu qu'il faudra se hâter de le relever,
+car rien ne doit durer pour l'enfant, surtout si les fautes qu'il
+commet sont la conséquence de la légéreté naturelle à son âge.
+
+ * * * * *
+
+Ces principes admis, passons à l'application.
+
+L'enfant commet-il des étourderies légères, nous feindrons de ne pas
+voir ou de ne pas entendre une première fois, nous tolérerons
+beaucoup, surtout si l'enfant est jeune, d'un tempérament ardent,
+d'une santé robuste.
+
+«N'oublions pas, comme dit Plutarque avec sa bonté accoutumée, que
+nous avons été jeunes et sachons pardonner aux enfants les fautes qui
+échappent à la faiblesse de leur âge.» Il va même jusqu'à conseiller
+certaines ruses: «L'âge, dit-il, rend notre vue plus faible et notre
+ouïe plus dure; n'est-ce-pas une occasion de tirer parti de nos
+infirmités pour ne voir et n'entendre qu'à demi.»
+
+ * * * * *
+
+Les étourderies se multiplient-elles par trop, le maître donne un
+avertissement. S'il aime les enfants, s'il est bon et juste, doux et
+ferme, s'il se plaint sans humeur, gronde sans dureté, corrige sans
+emportement, il sera aimé et respecté de ses élèves et l'avertissement
+suffira.
+
+«A Port-Royal, on recommandait aux maîtres de supporter patiemment les
+fautes et les faiblesses des enfants, de ne pas se montrer trop exacts
+avec eux, ni s'inquiéter trop, de se contenter de les préserver des
+fautes principales et de fermer les yeux sur leurs petits
+manquements»[23]. De son côté, le P. Lamy, ajoute: «Pour ramener les
+enfants à leurs devoirs, une caresse, une menace, l'espérance d'une
+récompense ou la crainte d'une humiliation font plus d'effet que les
+verges[24].»
+
+ [23] Carré, _Les pédagogues de Port-Royal_.
+
+ [24] Le P. Lamy, de l'Oratoire: _Entretien sur les sciences_.
+
+J'ai souvent regretté que, dans les établissements scolaires et dans
+la famille, on ne permît pas aux enfants de converser sans faire trop
+de bruit pendant les repas. Le silence est dans ce cas un châtiment,
+en même temps qu'une contravention à l'hygiène.
+
+Les nouveaux règlements tout à la fois sensés et paternels permettent
+la conversation à voix basse pendant les repas. Bien des punitions
+seront ainsi évitées. On ne doit pas craindre d'autoriser ce qui est
+juste; s'il en résulte des inconvénients, ils seront toujours
+inférieurs aux avantages. En supprimant les prétextes et les occasions
+d'infraction, non seulement on a plus rarement à donner des
+punitions, mais le règlement acquiert plus d'autorité parce qu'il est
+plus juste.
+
+Certaines punitions, ridicules ou inconvenantes, doivent être
+proscrites à l'égal des punitions corporelles. Ainsi, dans certaines
+maisons, les enfants sont condamnés à baiser la terre, ou à se couvrir
+le visage avec leur tablier ou prendre une attitude génante. A
+Port-Royal-des-Champs, certaines punitions étaient entourées d'un
+appareil d'une solennité puérile. Il faut éviter tout ce qui ôte de la
+gravité à un châtiment.
+
+ * * * * *
+
+Résumons ce qui précède en formulant un code de punitions:
+
+En premier lieu, la réprimande dont on variera la forme de manière à
+la rendre plus ou moins sévère. Elle ne sera publique que dans des
+cas très exceptionnels par la gravité.
+
+Puis, le pensum consistant en un certain nombre de lignes d'une
+écriture _appliquée_.
+
+Enfin, la privation d'un plaisir tel que promenade, jeu, friandises,
+spectacles, objets divers de toilette ou d'agrément.
+
+Si simple que soit ce code, il peut être simplifié. Nous avons à
+l'école Turgot un mode de punitions et de récompenses qui consiste
+uniquement en une inscription sur le cahier de notes de l'enfant. Tel
+élève a mérité une punition ou une récompense; on écrit sur son livret
+_une punition_ ou _une récompense_. C'est la punition sans châtiment,
+la récompense sans avantage matériel. Un grand nombre d'élèves
+préféreraient un châtiment à la simple inscription de la punition,
+tant il est vrai que ce n'est pas la rigueur de la peine qui en fait
+l'efficacité et «qu'il n'y a de pénétrant, de durable et de salutaire,
+comme le dit M. Gréard avec sa netteté et sa précision accoutumées,
+que le sentiment de la faute attaché d'une main sûre à la conscience
+du coupable». C'est bien là la vraie punition: si l'enfant n'éprouve
+pas de honte à la subir, elle a beau être dure, l'enfant redoutera la
+douleur, l'ennui, les privations, mais la peine sera sans effet moral.
+
+Pour un devoir mal écrit faute de soin et sans mauvaise intention,
+n'infligeons pas de punition, mais donnons simplement le devoir à
+recommencer.
+
+Quant aux leçons à apprendre ou aux exercices de mémoire que l'enfant
+ne saurait pas par coeur, nous devons nous assurer s'il a fait des
+efforts suffisants et s'il a une mémoire ingrate; dans ce cas, il
+faut venir à son aide, en divisant la tâche, en la diminuant, en lui
+indiquant certains procédés qui la facilitent. Dans le cas contraire,
+s'il y a paresse évidente, l'enfant sera puni sans être dispensé pour
+cela de remplir sa tâche.
+
+Dans la graduation des punitions, nous devons tenir compte des goûts
+particuliers des enfants, car il se peut qu'un enfant accepte
+volontiers ce qu'un autre regarde comme une aggravation de la peine.
+Tel enfant attachera plus d'importance à une promenade qu'à la
+possession d'un objet, tandis que tel autre préfèrera l'objet à la
+promenade.
+
+ * * * * *
+
+Supposons maintenant que l'enfant ait commis une faute grave, qu'il se
+soit attiré une remontrance exceptionnelle, voici comment nous
+procédons: nous le conduisons dans un endroit dont il n'a pas
+habituellement l'accès et qui, en conséquence, ne lui est pas
+familier, c'est une pièce éclairée d'un demi-jour et située dans un
+lieu retiré. Nous voulons exercer sur lui une première impression par
+le milieu. Nous prenons un air grave et résigné. Nous le faisons
+asseoir en face de nous, nous lui prenons les mains, en le fixant avec
+insistance dans les yeux, nous lui parlons avec douceur, lentement,
+d'une manière un peu monotone afin de l'assoupir peu à peu. Dans ce
+demi-sommeil, la volonté de l'enfant s'affaiblit. Nous lui parlons
+alors de la faute qu'il a commise, nous lui en faisons comprendre la
+gravité, nous lui en montrons les conséquences, en lui faisant
+craindre que la tendresse de ses parents, la confiance, l'estime, la
+sympathie de ses amis et de ses maîtres ne s'en trouve diminuée. Nous
+lui inspirons le regret de l'avoir commise, le désir de se faire
+pardonner et la résolution de se corriger.
+
+L'enfant est somnolent; dans son corps inerte, son esprit vacille pour
+ainsi dire, il sent sa volonté lui échapper, en quelque sorte; c'est
+alors que, mis dans l'impossibilité de nous résister, il se trouve
+tout à fait préparé à recevoir nos avis et à suivre nos conseils. Loin
+de nous la pensée de substituer notre volonté à la sienne, d'affaiblir
+en lui le sentiment de la responsabilité: nous le désarmons mais
+seulement pour qu'il ne résiste pas, nous le subjuguons sans
+l'anéantir. Il comprend nos raisonnements, il les suit, il se les
+approprie; nous sommes parvenu à pénétrer dans une place qui n'est
+plus défendue. Puis, lorsque l'impression est faite dans son esprit,
+les entraves sont enlevées, il s'éveille, il est libre, il est
+meilleur.
+
+Nous n'agissons pas autrement pour détruire des habitudes vicieuses,
+des défauts de caractère, des affections maladives[25]. L'enfant est
+pour nous, dans tous ces divers cas, un malade au moral ou au
+physique, par cela seul que maladies ou vices tiennent d'une
+organisation défectueuse par quelque côté, qu'il doit souvent, il faut
+bien le dire, à la négligence, à l'incurie ou aux vices de ses
+parents. A l'éducateur de rétablir l'équilibre de ce corps et de cet
+esprit, mais bien entendu, avec le concours du malade. Lentement et
+progressivement, nous amenons l'enfant à sentir les inconvénients ou
+les dangers de son état et la nécessité d'y porter remède. Nous
+insistons, nous martelons nos enseignements dans son esprit. Il nous
+écoute, il nous comprend, il se laisse persuader dans son
+demi-sommeil, et, revenu à la réalité, il se trouve dans la situation
+de ceux qu'un rêve a obsédés. Une première amélioration s'est
+produite, le mauvais pli a été défait, comme par un effort mécanique
+un bâton tordu se trouve rectifié.
+
+ [25] M. le docteur Aug. Voisin, médecin à la Salpétrière, à
+ Paris, M. le professeur Bernheim, et M. le docteur Liébault, de
+ Nancy, ont combattu avec succès, chez plusieurs enfants, des
+ habitudes vicieuses, la chorée, l'incontinence nocturne d'urine,
+ des tics, la grossièreté des manières et du langage, la paresse
+ invétérée, l'incapacité d'attention, etc.
+
+
+Nous revenons à la charge à plusieurs reprises, et, chaque fois,
+l'amélioration s'accentue. Des enfants grossiers, turbulents,
+indociles, paresseux, sont ainsi transformés: on a raison de leur trop
+grande vivacité, de leur nature emportée, ou de leur apathie. C'est là
+un traitement, qu'on pourrait désigner sous le nom d'_orthopédie
+morale_.
+
+Parfois il faut beaucoup de temps et encore plus de patience mais la
+guérison vient à la fin. Si elle est incomplète, si l'enfant retombe
+dans sa faute, on recommence le traitement jusqu'à ce qu'on ait
+triomphé de la cause du mal. Toutefois les cas de récidive sont rares,
+car une première amélioration obtenue rend plus facile une
+amélioration plus grande, comme les exercices répétés d'une
+gymnastique méthodique superposent leurs effets et accroissent les
+forces d'une manière continue. Il se produit dans l'ordre moral
+quelque chose d'analogue aux intérêts composés; chaque progrès dans le
+bien est la source d'un progrès nouveau, et la nature humaine continue
+ainsi son redressement d'elle-même, par sa propre puissance, quand la
+première impulsion a été donnée. L'homme devient le collaborateur
+conscient ou non de ceux qui suscitent en lui de bons sentiments. De
+même que le grain mis en terre donne naissance à un épi, de même une
+bonne pensée déposée dans un esprit convenablement préparé y devient
+le germe d'autres pensées bienfaisantes. L'esprit, comme le corps, a
+des ressources propres qui ne lui viennent pas du dehors et lui
+permettent de lutter contre le mal ainsi que le corps lutte contre la
+maladie. Nos conseils, nos remèdes, ne font qu'aider cette action qui
+se poursuit naturellement[26].
+
+ [26] Nous lisons dans le rapport cité plus haut, page 16:
+
+ «Nous avons cependant fait un pas dans cette voie par la création
+ d'une école pour les vagabonds incorrigibles et les enfants
+ indisciplinables. Nous espérons beaucoup de ce nouvel
+ établissement. Nous croyons que quelques semaines de séjour, par
+ ordre d'un magistrat, et avec le consentement des parents,
+ triompheront presque toujours de l'esprit de désordre et
+ prépareront l'enfant à suivre les travaux de l'école. On évitera
+ ainsi les frais d'un long internat dans une école industrielle de
+ répression.» C'est précisément à ces enfants, dits incorrigibles,
+ et qui ne sont _qu'incorrigés_, que convient le traitement dont
+ nous parlons. Nous le croyons préférable au séjour détestable dans
+ la plupart des maisons de correction, où on ne corrige pas, au
+ contraire.
+
+
+
+
+II
+
+LES RÉCOMPENSES
+
+
+Nous avons réduit les punitions à la privation de certains plaisirs et
+aux réprimandes, et même à moins que cela. Nous ne serons pas moins
+sobre de récompenses. Il suffit de prendre la contre-partie, de borner
+les récompenses à certains plaisirs et à des approbations ou des
+éloges. Ne soyons pas surpris de cette pénurie de moyens; l'abondance
+ni la variété ne sont des signes de puissance, et, de même que la
+rigueur des peines n'en assure pas l'efficacité, l'exagération des
+marques d'approbation ou la valeur des objets et des avantages
+accordés ne donne pas plus de prix aux récompenses.
+
+ * * * * *
+
+L'idéal à réaliser consisterait en un mode de récompense sans valeur
+vénale ou matérielle et dont l'effet concourrait à l'éducation de
+l'enfant, c'est-à-dire à son amélioration morale, car en matière
+d'éducation, nous ne saurions trop le répéter, tout doit servir à
+l'éducation. Le bien devrait être fait pour l'amour du bien et non
+pour les avantages qu'on en peut retirer, lesquels viennent par
+surcroît. Nous savons que c'est là un idéal mais lors même qu'un but
+ne peut être tout à fait atteint, l'effort n'est pas inutile; nous
+devenons meilleur rien qu'en cherchant à le devenir. Si donc nous
+voulons améliorer l'enfant, la première condition pour obtenir ce
+résultat, c'est de le croire capable de désintéressement, de
+dévouement, d'élévation, etc. Comment entreprendre une tâche si l'on
+n'a la certitude ou au moins l'espérance de l'accomplir; quelle plus
+déplorable disposition que le scepticisme chez un éducateur; quelle
+peut être son action s'il n'a la conviction.
+
+On croit généralement que l'enfant a des défauts qui lui sont propres;
+on s'en va répétant après La Fontaine que «cet âge est sans pitié».
+Persuadons-nous bien au contraire que leurs défauts sont les nôtres,
+que nous sommes une même personne à tous les moments de notre
+existence, seulement l'enfant donne un libre cours à ses pensées comme
+à ses mouvements; il ne sait pas encore pratiquer la réserve ni la
+modestie, et manifeste spontanément ses désirs. Ses défauts sont plus
+évidents parce qu'il n'a pas encore appris à les combattre ou à les
+dissimuler. Dans les reproches que nous leur adressons combien
+pourraient être justement retournés contre nous. Avons-nous toujours
+eu soin d'éveiller leur conscience et de la développer une fois
+éveillée? Loin de là, il arrive souvent qu'on la fait dévier comme on
+fait dévier leur intelligence par les préjugés; comme on fait dévier
+leurs jambes par le maillot et la marche hâtive. Que de bien n'y
+aurait-il pas à faire rien qu'en évitant le mal que l'on cause
+inconsciemment lorsqu'on altère le sens naturellement droit de
+l'enfant!
+
+Au lieu, par exemple, de nous borner à le louer de ce qu'il a fait de
+bien, nous ajoutons un avantage matériel qui diminue la valeur morale
+de l'éloge et lui ôte une part de son action éducatrice. «Ne
+promettez jamais aux enfants, dit Fénelon, pour récompenses des
+ajustements et des friandises; c'est faire deux maux: le premier de
+leur inspirer l'estime de ce qu'ils doivent mépriser et le second de
+nous ôter le moyen d'établir d'autres récompenses qui facilitaient
+votre travail[27].» Lorsque nous disons à l'enfant: si tu fais bien
+ton devoir, tu auras des fruits, des gâteaux, des jouets, des bijoux,
+il travaille non pour le plaisir de l'étude, mais en vue de l'avantage
+promis. «Toute idée de devoir disparaît, dit Madame Guizot, un calcul
+intéressé en prend la place, occupe seul son esprit, la tâche pourra
+bien être faite, mais l'enfant n'aura point appris à bien faire[28].»
+«Il faut éviter, dit Locke, de cajoler les enfants en leur donnant
+comme récompenses certaines choses qui leur plaisent pour les engager
+à s'acquitter de leur devoir... on ne fait qu'autoriser par là leur
+amour pour le plaisir et entretenir une dangereuse inclination[29].»
+
+ [27] _Éducation des filles_, chapitre V.
+
+ [28] Mme Guizot, _Éducation domestique_, lettre XVIII.
+
+ [29] Locke, _Conseils sur l'Éducation_, ch. III, § 1.
+
+Certains pensent que l'enfant prend ainsi l'habitude du bien et que
+l'habitude une fois prise, il fait par goût ce qu'il a d'abord fait
+par intérêt. Or, l'habitude nous dispense précisément d'agir
+consciemment et volontairement; c'est en quelque sorte un instinct
+acquis. Où donc est alors le profit moral? L'habitude succède à des
+actes volontaires répétés, elle en est la conséquence mais le
+contraire n'est pas vrai. On ne fait pas l'apprentissage d'une qualité
+en pratiquant le défaut opposé. Agir souvent dans un but intéressé
+mènera à prendre l'habitude d'agir toujours par intérêt.
+
+ * * * * *
+
+Il est vrai que la plus simple approbation, l'éloge le plus discret ne
+va pas sans flatter la vanité de celui qui le reçoit, que, dès lors,
+un intérêt s'y trouve attaché. La seule récompense idéale pure
+consiste dans la satisfaction du for intérieur. Celui qui s'en
+contente n'en connaît pas de plus haute et qui lui cause une joie
+aussi complète. C'est la jouissance exquise des natures délicates et
+élevées. Aussi, devons-nous nous efforcer de développer chez l'enfant
+le sentiment de l'honneur, le respect de soi, la sensibilité de la
+conscience. L'estime de soi-même, le souci de sa réputation ne doivent
+pas être confondus avec la vanité ou l'orgueil, c'est le fondement de
+la dignité humaine. «De tous les motifs propres à toucher une âme
+raisonnable, dit Locke, il n'y en a pas de plus puissants que
+l'honneur et la honte..... Si donc vous pouvez inspirer aux enfants
+l'amour de la réputation et les rendre sensibles à la honte, vous
+aurez mis dans leur âme un principe qui les portera continuellement au
+bien[30].»
+
+ [30] Locke, _Pensées sur l'éducation_, chap. III, § 1.
+
+Toute récompense autre que la satisfaction du devoir accompli entraîne
+avec elle un avantage ou un profit; elle excitera donc chez l'enfant
+des appétits malsains ou la gourmandise ou la vanité ou la cupidité
+ou l'amour du plaisir. Donner à l'enfant des mets qu'il aime, des
+gâteaux, des sucreries, des fruits comme récompense d'un travail bien
+fait, d'une leçon bien sue, c'est le rendre gourmand; lui accorder un
+bijou, une parure, un vêtement nouveau, c'est le rendre vain; lui
+donner de l'argent est bien autrement grave; aussi nous sommes d'avis
+qu'il n'en faut jamais donner aux enfants. Ils n'en connaissent pas la
+valeur, ne l'ayant pas gagné; l'argent devient pour eux un complice
+docile de leurs fantaisies: il leur permet de satisfaire des caprices,
+de vaincre des résistances et les prépare ainsi à la vie facile; voilà
+le danger. L'argent qui n'est pas sanctifié, en quelque sorte, par le
+travail, est essentiellement corrupteur. «Mon fils, disait, avec une
+singulière force d'expression, un homme du siècle dernier, l'argent,
+ça pue.»
+
+Restent les plaisirs en général, tels que la promenade, les
+spectacles, les jeux, mais n'est-ce pas inspirer l'amour du plaisir
+que d'accorder un plaisir comme récompense? Quoi qu'on fasse, la
+récompense ne va pas sans un salaire; ainsi l'exige la bête qui habite
+en chacun de nous et qui chez l'enfant est particulièrement exigeante.
+Le seul parti à prendre c'est de réduire le salaire le plus possible,
+et, d'autant plus, que l'enfant est plus âgé.
+
+ * * * * *
+
+N'exagérons pas, examinons les choses avec calme: les motifs qui
+déterminent nos actions sont toujours complexes comme notre nature;
+il n'en saurait être autrement; l'homme ne peut être moral d'une
+manière absolue. Lorsque le sauveteur arrache une personne en danger
+de se noyer, il éprouve certainement une joie très vive de sa bonne
+action, mais à cette joie pour ainsi dire instinctive, se mêle bientôt
+la pensée de la récompense qu'il pourra recevoir et le plaisir de
+recueillir les applaudissements de la foule; le soldat marche au
+combat par obéissance, par amour de la gloire, par amour de la patrie,
+par désir de vaincre et avec l'espoir d'un grade ou de la croix. Tous
+ces mobiles coexistent et agissent simultanément avec des intensités
+différentes et variables; même la soeur de charité et le martyr ne
+sont pas exempts, nous ne dirons pas de ces faiblesses, mais de ces
+sentiments, de ces impulsions diverses de notre nature complexe, car
+ils ont l'espoir de gagner le ciel, qui est une récompense d'une
+valeur infinie.
+
+Ainsi, toute bonne action n'est pas absolument bonne, il y a toujours
+un motif intéressé auquel donne satisfaction la récompense concrète.
+
+ * * * * *
+
+Ces préliminaires établis, nous allons chercher les conditions
+auxquelles doivent satisfaire les récompenses.[31]
+
+ [31] Nous ne dirons pas quelles doivent être justes pas plus que
+ nous ne l'avons dit à propos des châtiments, parce que cela va de
+ soi.
+
+
+1º _Elles doivent être rares._
+
+Chacun sait que la facilité avec laquelle on obtient ce qu'on désire
+en diminue le prix et détermine bientôt la satiété. Même lorsque les
+choses n'ont pas de valeur intrinsèque, la difficulté de les obtenir
+leur en donne une fictive, et si elles en ont une, elle se trouvera
+rehaussée. Le désir s'accroît en même temps que les difficultés. Si
+l'on se montre trop prodigue de récompenses, non seulement les enfants
+y deviennent indifférents, mais ce qui est plus grave, ils prennent de
+la suffisance et un sentiment de sécurité qui affaiblissent en eux
+tout ressort et les rendent impertinents et paresseux.
+
+
+2º.--_Les récompenses doivent être graduées._
+
+L'éloge pur et simple, tout en conservant sa valeur relative, doit
+être mesuré. Les nuances seront indiquées surtout par la force et la
+précision des termes, depuis la plus faible marque d'approbation
+jusqu'à la plus flatteuse. N'ajoutez pas de développement; ne dites
+que ce qui est nécessaire pour justifier l'éloge. Rien de trop.
+
+Si, par exception, l'éloge est rendu public, ce doit être parce qu'il
+est de nature à produire une excitation salutaire sur l'ensemble des
+écoliers plutôt que pour causer à celui qui l'aura mérité une
+satisfaction plus vive.
+
+«En louant les compositions de ses élèves le maître ne doit être ni
+avare ni prodigue de compliments, de peur de leur inspirer ou le
+dégoût du travail ou trop de sécurité[32]».
+
+ [32] Quintilien, l. II, ch. II.
+
+«Quoiqu'il soit fort bon d'augmenter l'ardeur que les enfants ont pour
+l'étude par les justes louanges qu'on leur donne, il le faut
+néanmoins faire sobrement, de peur de leur donner de la vanité et de
+les remplir d'une secrète et dangereuse opinion de leur prétendue
+suffisance[33].»
+
+ [33] Coustel, _Éducation des enfants_, chap. IV.
+
+L'amour-propre ou, si l'on veut, l'estime de soi-même est un mobile
+excellent dont l'excès seul, c'est-à-dire la présomption ou l'orgueil
+est à redouter. L'éloge public est par lui-même excessif; ceux qui
+l'entendent en aggravent les effets en renchérissant sur l'éloge, en y
+ajoutant leur propre approbation. Rien de plus fréquent que cette
+complaisance inconsciente des hommes par laquelle ils conspirent à
+élever davantage celui qui a déjà été élevé. Nous appuyons sur l'éloge
+comme sur le blâme. En outre, l'éloge public excite l'envie, la
+jalousie des émules ou des rivaux. «En tâchant de leur donner de
+l'émulation, disent MM. de Port-Royal, il faut bien prendre garde de
+ne pas faire naître de l'envie pour les bonnes qualités qu'ils
+remarquent dans leurs compagnons, et qui leur manquent[34].»
+
+ [34] Coustel, _Éducation des enfants_, chap. IV.
+
+ * * * * *
+
+Puisque nous parlons d'émulation, distinguons celle entre les
+personnes de celle qui est relative aux choses. Dire à l'écolier, un
+tel a mieux fait que vous, il aura tels avantages, voilà qui lui
+inspirera de mauvais sentiments, et qui embarrassera son camarade plus
+intelligent ou plus heureux. L'élève est-il paresseux? on ne
+l'excitera pas au travail par ce moyen, et s'il pèche par le défaut
+d'intelligence, ou par l'incapacité d'attention, on ne parviendra
+ainsi qu'à lui inspirer le dégoût de l'étude, comme il arrive qu'on se
+désintéresse d'un travail auquel on s'est appliqué et où l'on n'a pas
+réussi malgré ses efforts. Il n'y a aucun inconvénient au contraire, à
+dire à l'enfant: tu as mieux fait ton devoir, tu peux le mieux faire
+encore. Ce mode d'émulation est même le seul qui puisse être employé
+lorsque l'enfant est élevé dans la famille.
+
+Malgré les inconvénients que présente l'éloge, c'est un levier trop
+puissant pour renoncer à s'en servir. Nous ne tenons à rien tant qu'à
+l'approbation de nos semblables; elle nous est tellement précieuse que
+nous sommes sensibles même à celle des hommes que nous ne connaissons
+pas ou, qui pis est, que nous n'estimons pas.
+
+
+3º.--_Il faut être très réservé dans le nombre et très scrupuleux dans
+le choix des avantages attachés aux récompenses._
+
+Nous avons indiqué déjà les écueils qu'il faut craindre en accordant
+des récompenses vénales. Il importe d'en user avec beaucoup de
+discrétion, de faire en sorte que l'avantage soit plutôt une
+conséquence naturelle qu'un appoint ou un salaire. L'effet nuisible en
+sera atténué si l'on donne à l'enfant des objets plutôt utiles
+qu'agréables, tels que des livres ou des vêtements, toutefois on
+choisira des livres de lecture plutôt que d'étude, des vêtements plus
+agréables que nécessaires et on aura soin d'éviter, dans ces divers
+objets, la fausse élégance et le luxe de mauvais aloi; par là encore,
+on contribuera a l'éducation des enfants, en développant le goût.
+
+ * * * * *
+
+Parmi les plaisirs, il y a un choix à faire: non seulement il faut
+tenir compte de l'âge, du sexe, du goût, du degré de sensibilité de
+l'enfant, mais d'une manière générale, il faut lui épargner tout
+spectacle qui est de nature à causer des émotions trop fortes ou à
+fausser son jugement. Les impressions reçues dans l'enfance, sont
+toujours très vives, et si elles sont violentes, elles exercent sur
+l'esprit une influence funeste qui persiste jusque dans l'âge mûr, et
+peuvent occasionner des troubles sérieux. Ce que nous disons des
+spectacles s'applique également aux livres; l'enfant s'attache
+fortement au livre qu'il aime, il y revient sans éprouver de
+lassitude ni d'ennui, il relit les passages qui lui ont plu, aussi
+importe-t-il de mesurer l'émotion à son jeune et tendre coeur. Les
+vibrations violentes brisent la corde sonore délicate.
+
+ * * * * *
+
+Les promenades sont d'excellentes récompenses; elles satisfont au
+besoin d'exercice; elles peuvent être associées à des jeux. C'est un
+plaisir simple, naturel, hygiénique qui ne laisse aucune amertume
+après lui, qui apaise, qui calme les excitations maladives causées par
+la vie sédentaire et le surmenage.
+
+ * * * * *
+
+Dans ces derniers temps, l'usage s'est répandu d'accorder en
+récompense des livrets de caisse d'épargne, dans l'espoir de créer
+des habitudes d'ordre et d'économie dans des familles peu aisées où
+ces qualités sont plus particulièrement nécessaires et où elles font
+généralement défaut. Le but est louable mais ne doit-on pas craindre
+de paralyser ainsi les élans généreux de l'enfant et de l'accoutumer
+prématurément à une économie qui peut dégénérer en avarice. L'esprit
+d'économie ne se crée pas avec de l'argent donné et n'est pas une
+qualité qui se développe dans l'enfance. Nous n'attachons de valeur à
+l'argent que s'il représente un salaire, le prix d'un travail, s'il
+nous a coûté quelque peine à acquérir; alors seulement nous ne le
+gaspillons pas. On ne suscite pas plus dans l'esprit d'un enfant les
+goûts ou les idées de l'âge mûr qu'on ne peut lui donner la taille
+qu'il atteindra à cet âge, et il y a beaucoup à parier qu'on produira
+chez lui des déviations morales comme on lui tord les jambes en
+voulant le faire marcher trop tôt.
+
+ * * * * *
+
+Le _bon point_ est une des récompenses fort en usage dans nos
+établissements scolaires. Il y en a de diverses sortes et de valeur
+différentes qui composent un système analogue à celui de notre
+monnaie. Récemment ils ont été illustrés et représentent soit des
+personnages illustres, soit des animaux, des plantes ou des faits
+historiques. D'un côté se trouve l'image, de l'autre une biographie ou
+une explication. Cette innovation est bonne. Les dessins sont en
+général convenablement exécutés et les notes suffisamment exactes; le
+seul point défectueux est le défaut d'appropriation à l'âge et au
+degré de culture de l'enfant; notes et dessins ne sont pas, en
+général, assez simples.
+
+ * * * * *
+
+Nous n'avons pas de goût pour les _croix_ et en général pour les
+distinctions honorifiques; ce mode de récompense ne convient pas à des
+enfants; il n'est pas bon de leur faire singer les hommes, de les
+familiariser avec ce que les hommes respectent, car on peut craindre
+d'émousser ainsi le sentiment de l'honneur. Si ce sont des
+récompenses, la durée en est trop longue et persiste après que la
+cause de la récompense a cessé d'exister; si ce sont des insignes qui
+donnent à l'enfant, parmi ses camarades, un rang mérité par le travail
+ou la conduite, nous leur préférons ceux qui sont en usage dans
+l'armée, les galons.
+
+ * * * * *
+
+Les bons points servent, dans certains cas, _d'exemptions_,
+c'est-à-dire de moyen de s'exempter des punitions. Dans la balance de
+la justice, la récompense et la punition sont choses de nature
+différente et qui ne se peuvent faire équilibre. Ce qui ne s'ajoute
+pas ne saurait non plus se retrancher. L'exemption a été conquise par
+le travail tandis que la punition est la conséquence de la légèreté,
+de la paresse, etc. Il n'y a pas là de parité et par conséquent
+d'échange possible, sans blesser le sens moral. Toute punition doit
+être subie. Il est permis de regretter qu'un bon élève ait eu un
+moment de faiblesse, mais alors il eût mieux valu ne pas le punir.
+
+ * * * * *
+
+L'inscription au _tableau d'honneur_ est une forme de l'éloge public;
+il en présente les inconvénients et nous semble devoir être écarté
+comme moyen de récompenser. A plus forte raison devons-nous redouter
+les _distributions solennelles de prix_. Le plus souvent on voit
+l'intelligence, le travail facile récompensés au détriment des efforts
+sérieux. Ajoutons que la présence des parents, leurs exigences
+illégitimes ont complétement faussé le caractère de ces cérémonies; ce
+ne sont plus des distributions de prix mais des distributions de
+livres. La coutume a passé des établissements privés aux
+établissements publics. Les parents se sentent, avec raison
+d'ailleurs, solidaires de leurs enfants, ils sont fiers des succès que
+ceux-ci remportent, ils s'en attribuent une part, et, par contre, ils
+se sentent atteints par les insuccès et accusent volontiers les
+maîtres de partialité. Dans les réprimandes qu'ils adressent à cette
+occasion aux enfants, on sent la révolte de l'amour propre blessé,
+plus encore que tout autre sentiment. Ils veulent le succès avant
+tout, et l'enfant est blâmé pour n'avoir pas réussi, lors même que sa
+conduite et son travail n'ont rien laissé à désirer. Les maîtres ont
+la faiblesse de sacrifier à ces vues étroites: ils multiplient les
+récompenses, et chaque élève, à fort peu près, emporte un témoignage
+sinon de satisfaction du maître, au moins de contentement pour les
+parents.
+
+ * * * * *
+
+Un établissement qui jouit d'une réputation méritée[35] a voulu réagir
+contre cette détestable coutume. Nous avons dit plus haut qu'à
+_l'École Turgot_ on a mis en pratique le mode des récompenses sans
+avantages matériels et des punitions sans châtiments. Les unes et les
+autres se bornent à des inscriptions sur le livret de l'écolier. Voilà
+des améliorations notables, mais dont il ne faut pas pourtant exagérer
+l'importance.
+
+ [35] _L'école Alsacienne._
+
+ * * * * *
+
+Dans l'application, nous procéderons de la manière suivante:
+
+Pour les simples encouragements, les notes habituelles suffisent:
+_passable_, _assez bien_, _bien_, _très bien_, écrites ou énoncées.
+L'accent y ajoutera beaucoup; un sourire approbateur suffira à
+l'enfant doux et sensible.
+
+Ces notes pourront être données à l'enfant seul ou en présence de
+toute la classe.
+
+Une action très méritoire sera portée à l'ordre du jour de l'école, et
+l'éloge en sera fait publiquement devant le personnel scolaire tout
+entier.
+
+Une classe tout entière pourra être récompensée dans certains cas
+exceptionnels.
+
+Dans la famille, l'enfant pourra obtenir non à cause de son travail
+mais pour la satisfaction qu'il aura donnée à ses parents, soit des
+objets, soit une partie de plaisir.
+
+
+
+
+APPENDICE
+
+
+
+
+EXTRAIT DU RÈGLEMENT DES ÉCOLES PRIMAIRES DE LA SEINE
+
+
+ARTICLE 18
+
+Les punitions admises dans les écoles publiques sont:
+
+1º Les mauvais points;
+
+2º La réprimande;
+
+3º La privation partielle de la récréation;
+
+4º La retenue après la classe;
+
+5º L'imposition d'un court devoir supplémentaire dans la famille;
+
+6º L'exclusion d'un ou deux jours sous la seule responsabilité du
+directeur de l'école. Avis en sera donné à la famille, à l'inspecteur
+primaire et à la mairie.
+
+Dans le cas d'inconduite notoire cette peine pourra être portée de
+deux à huit jours avec l'assentiment de l'inspecteur primaire. Avis en
+sera donné à la mairie et aux parents.
+
+Cette punition pourra entraîner d'urgence pour l'élève le changement
+d'école.
+
+Une exclusion de plus longue durée ne pourra être prononcée que par
+l'inspecteur d'Académie.
+
+ * * * * *
+
+Les récompenses sont de deux sortes:
+
+1º Les récompenses permanentes qui sont mises pendant toute l'année à
+la disposition de l'instituteur:
+
+2º Les prix et livrets de la Caisse d'épargne, qui sont attribués à la
+fin de l'année scolaire, en distribution solennelle.
+
+Les récompenses permanentes appelées communément «récompenses
+scolaires», consistent en bons points de diverses valeurs, images,
+objets de papeterie, etc.
+
+Ces images et objets divers sont distribués chaque mois aux élèves en
+échange de bons points qu'ils ont obtenus.
+
+Un règlement du 14 juin 1884 détermine les conditions dans lesquelles
+s'opère cet échange.
+
+
+Les prix donnés en distribution solennelle sont choisis de manière à
+intéresser et amuser l'élève tout en concourant à son instruction et à
+son éducation morale.
+
+En moyenne, le nombre attribué à chaque école est calculé à raison de
+un pour trois élèves; ces prix sont de valeurs différentes.
+
+
+
+
+EXTRAIT DU PROJET DE RÈGLEMENT
+
+Délibéré en Conseil supérieur
+
+POUR LES LYCÉES ET COLLÈGES
+
+
+Les élèves sont autorisés à causer entre eux pendant les repas, dans
+les mouvements et pendant les exercices gymnastiques. Le bruit ne sera
+pas toléré;
+
+Les punitions auront toujours un caractère moral et réparateur. Le
+piquet, les pensums, les privations de récréation, sauf l'exception
+des retenues du jeudi et du dimanche prévues à l'article suivant, la
+retenue de promenade sont formellement interdits. La mise à l'ordre du
+jour, comme peine disciplinaire, est supprimée;
+
+3º Les seules punitions autorisées sont les suivantes:
+
+ _a._ La mauvaise note;
+
+ _b._ La leçon à rapprendre en totalité ou en partie;
+
+ _c._ Le devoir à refaire en totalité ou en partie;
+
+ _d._ Le devoir extraordinaire;
+
+ _e._ La retenue du jeudi et du dimanche;
+
+ _f._ La privation de sortie;
+
+ _g._ L'exclusion de la classe ou de l'étude;
+
+ _h._ L'exclusion temporaire ou définitive de l'établissement.
+
+. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
+Les prix et accessits seront décernés d'après le total des notes
+obtenues par tous les élèves dans les compositions, les compositions
+finales ayant un coefficient double.
+
+Selon le travail des élèves et la valeur des compositions, il pourra
+n'être attribué aucun prix, ou, au contraire, en être attribué plus
+de deux dans une faculté donnée.
+
+Tous les élèves ayant bien travaillé et convenablement réussi pourront
+être nommés à la distribution des prix, à condition d'avoir atteint
+une moyenne déterminée.
+
+Le nom de _prix d'excellence_ est réservé à des prix d'ensemble
+décernés aux élèves qui, dans chaque classe et chaque division, auront
+le mieux satisfait à tous leurs devoirs.
+
+Le prix d'excellence sera décerné par un vote de l'ensemble des
+maîtres de chaque classe et de chaque division. Il pourra y avoir un
+prix distinct pour les externes.
+
+Les notes obtenues dans les exercices physiques entrent en ligne de
+compte pour le prix d'excellence.
+
+
+Tours, imp. Deslis Frères, 6, rue Gambetta.
+
+
+
+
+
+End of the Project Gutenberg EBook of Petit traité des punitions et des
+récompenses à l'usage des maîtres et des parents, by Félix Hément
+
+*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK PETIT TRAITÉ DES PUNITIONS ***
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+Produced by Laurent Vogel, Hélène de Mink, and the Online
+Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This
+file was produced from images generously made available
+by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at
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+works. See paragraph 1.E below.
+
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+ money paid for a work or a replacement copy, if a defect in the
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+in paragraph 1.F.3, this work is provided to you 'AS-IS' WITH NO OTHER
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+or cause to occur: (a) distribution of this or any Project Gutenberg-tm
+work, (b) alteration, modification, or additions or deletions to any
+Project Gutenberg-tm work, and (c) any Defect you cause.
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+
+Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm
+
+Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of
+electronic works in formats readable by the widest variety of computers
+including obsolete, old, middle-aged and new computers. It exists
+because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from
+people in all walks of life.
+
+Volunteers and financial support to provide volunteers with the
+assistance they need are critical to reaching Project Gutenberg-tm's
+goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will
+remain freely available for generations to come. In 2001, the Project
+Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure
+and permanent future for Project Gutenberg-tm and future generations.
+To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation
+and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4
+and the Foundation web page at http://www.pglaf.org.
+
+
+Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive
+Foundation
+
+The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit
+501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the
+state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal
+Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification
+number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at
+http://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg
+Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent
+permitted by U.S. federal laws and your state's laws.
+
+The Foundation's principal office is located at 4557 Melan Dr. S.
+Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered
+throughout numerous locations. Its business office is located at
+809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887, email
+business@pglaf.org. Email contact links and up to date contact
+information can be found at the Foundation's web site and official
+page at http://pglaf.org
+
+For additional contact information:
+ Dr. Gregory B. Newby
+ Chief Executive and Director
+ gbnewby@pglaf.org
+
+
+Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg
+Literary Archive Foundation
+
+Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide
+spread public support and donations to carry out its mission of
+increasing the number of public domain and licensed works that can be
+freely distributed in machine readable form accessible by the widest
+array of equipment including outdated equipment. Many small donations
+($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt
+status with the IRS.
+
+The Foundation is committed to complying with the laws regulating
+charities and charitable donations in all 50 states of the United
+States. Compliance requirements are not uniform and it takes a
+considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up
+with these requirements. We do not solicit donations in locations
+where we have not received written confirmation of compliance. To
+SEND DONATIONS or determine the status of compliance for any
+particular state visit http://pglaf.org
+
+While we cannot and do not solicit contributions from states where we
+have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition
+against accepting unsolicited donations from donors in such states who
+approach us with offers to donate.
+
+International donations are gratefully accepted, but we cannot make
+any statements concerning tax treatment of donations received from
+outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff.
+
+Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation
+methods and addresses. Donations are accepted in a number of other
+ways including checks, online payments and credit card donations.
+To donate, please visit: http://pglaf.org/donate
+
+
+Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic
+works.
+
+Professor Michael S. Hart is the originator of the Project Gutenberg-tm
+concept of a library of electronic works that could be freely shared
+with anyone. For thirty years, he produced and distributed Project
+Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of volunteer support.
+
+
+Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed
+editions, all of which are confirmed as Public Domain in the U.S.
+unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily
+keep eBooks in compliance with any particular paper edition.
+
+
+Most people start at our Web site which has the main PG search facility:
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+
+This Web site includes information about Project Gutenberg-tm,
+including how to make donations to the Project Gutenberg Literary
+Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to
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+ The Project Gutenberg's eBook of Petit Traité des Punitions &amp; des Récompenses, by Félix Hément</title>
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+<pre>
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+The Project Gutenberg EBook of Petit traité des punitions et des
+récompenses à l'usage des maîtres et des parents, by Félix Hément
+
+This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with
+almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or
+re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included
+with this eBook or online at www.gutenberg.org
+
+
+Title: Petit traité des punitions et des récompenses à l'usage des maîtres et des parents
+
+Author: Félix Hément
+
+Release Date: March 24, 2012 [EBook #39256]
+
+Language: French
+
+Character set encoding: ISO-8859-1
+
+*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK PETIT TRAITÉ DES PUNITIONS ***
+
+
+
+
+Produced by Laurent Vogel, Hélène de Mink, and the Online
+Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This
+file was produced from images generously made available
+by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at
+http://gallica.bnf.fr)
+
+
+
+
+
+
+</pre>
+
+
+<div class="p2 box">
+<p>Note sur la transcription: Les erreurs clairement introduites par le typographe ont été corrigées.
+L'orthographe d'origine a été conservée et n'a pas été harmonisée.
+Les numéros des pages blanches n'ont pas été repris.</p></div>
+
+<p><a id="Page_I"></a></p>
+
+<h1 class="p4 large">PETIT TRAITÉ<br />
+<span class="small">DES</span><br />
+PUNITIONS &amp; DES RÉCOMPENSES</h1>
+
+<p><a id="Page_II"></a></p>
+
+<p class="p4 center large">DU MÊME AUTEUR</p>
+
+<p class="hanging indent">Ouvrages couronnés par la Société pour l'instruction
+élémentaire, adoptés pour les distributions de prix
+dans les écoles de la ville de Paris, admis par la Commission
+ministérielle des bibliothèques populaires et
+scolaires.</p>
+
+<p class="center"><b>Format in-12:</b></p>
+
+<table border="0" cellpadding="5" cellspacing="5" summary="ad">
+<tr>
+ <td><b>Premières notions d'histoire naturelle.</b> 19<sup>e</sup> édition,
+ nombreuses figures, cart.</td>
+ <td class="tdr">3 fr. 00</td>
+</tr>
+<tr>
+ <td><b>Premières notions de cosmographie.</b> 5<sup>e</sup> édition,
+ avec figures</td>
+ <td class="tdr">1 fr. 50</td>
+</tr>
+<tr>
+ <td><b>Premières notions de géométrie.</b> 6<sup>e</sup>édition, avec
+ figures</td>
+ <td class="tdr">1 fr. 50</td>
+</tr>
+<tr>
+ <td><b>Premières notions de physique et de météorologie.</b>
+ 4<sup>e</sup> édition, avec figures</td>
+ <td class="tdr">3 fr. 50</td>
+</tr>
+<tr>
+ <td><b>Menus propos sur les sciences.</b> 6<sup>e</sup> édition, avec
+ figures</td>
+<td class="tdr">3 fr. 50</td>
+</tr>
+<tr>
+ <td><b>Simple discours sur la terre et sur l'homme</b> (couronné
+ par l'Académie française)</td>
+<td class="tdr">3 fr. 00</td>
+</tr>
+<tr>
+ <td><b>De l'instinct et de l'intelligence</b> (couronné par
+ l'Académie française; prix Montyon), illustré</td>
+ <td class="tdr">2 fr. 00</td>
+</tr>
+<tr>
+ <td><b>Les étoiles filantes et les bolides</b></td>
+ <td class="tdr">2 fr. 50</td>
+</tr>
+<tr>
+ <td><b>La science anecdotique.</b> 2<sup>e</sup> édition</td>
+ <td class="tdr">1 fr. 00</td>
+</tr>
+<tr>
+ <td colspan="2"><p class="center"><b>Format in-8<sup>o</sup>:</b></p></td>
+</tr>
+<tr>
+ <td><b>De l'instinct et de l'intelligence</b> (couronné par l'Académie
+ française; prix Montyon), illustré</td>
+ <td class="tdr">3 fr. 50</td>
+</tr>
+<tr>
+ <td><b>Les infiniment petits</b>, illustré</td>
+ <td class="tdr">1 fr. 50</td>
+</tr>
+<tr>
+ <td><b>L'origine des êtres vivants</b>, illustré</td>
+ <td class="tdr">2 fr. 50</td>
+</tr>
+<tr>
+ <td><b>Tableaux géographiques</b>, avec notice<br />
+ (Honoré d'une souscription du Ministère de l'Instruction publique.)</td>
+ <td class="tdr">15&nbsp;fr.&nbsp;50</td>
+</tr>
+<tr>
+ <td>La notice seule, illustrée, cartonnée</td>
+ <td class="tdr">1 fr. 50</td>
+</tr>
+<tr>
+<td><b>Tableaux astronomiques</b>, avec notice. Six tableaux</td>
+<td class="tdr">10&nbsp;fr.&nbsp;00</td>
+</tr>
+<tr>
+<td>La notice seule, illustrée, cartonnée</td>
+<td class="tdr">1 fr. 00</td>
+</tr>
+</table>
+
+
+<p><a id="Page_III"></a></p>
+
+<p class="p4 center"><span class="large">PETIT TRAITÉ</span><br />
+<span class="xlarge">DES PUNITIONS</span><br />
+<span class="large">ET DES RÉCOMPENSES</span><br />
+A L'USAGE DES MAITRES ET DES PARENTS</p>
+
+<p class="p2 center">Par FÉLIX HÉMENT</p>
+
+<p class="center small">Inspecteur général honoraire de l'Instruction publique<br />
+Lauréat de l'Institut</p>
+
+<p class="p2 center small">AVEC UNE LETTRE DE M. LEGOUVÉ, DE L'ACADÉMIE FRANÇAISE</p>
+
+<p class="p4 center">PARIS<br />
+GEORGES CARRÉ, ÉDITEUR<br />
+<span class="small">58, RUE SAINT-ANDRÉ-DES-ARTS</span></p>
+<hr class="c5" />
+<p class="center small">1890</p>
+
+<p><a id="Page_IV"></a>
+<span class="pagenum"><a id="Page_V">V</a></span></p>
+
+<p class="p4 center smcap">A M. Félix HÉMENT</p>
+
+<p class="left5 smcap">Mon cher Confrère et Ami,</p>
+
+<p><i>Vous me demandez quelques lignes
+à mettre en tête de votre petit Traité.
+Que voulez-vous que j'y ajoute? il est
+complet. On y sent l'&oelig;uvre d'un homme
+qui a beaucoup étudié les enfants, beaucoup
+réfléchi sur les enfants, beaucoup
+pratiqué les enfants, et, de plus, ce
+livre part de la main d'un pédagogue.</i></p>
+
+<p><i>Tout au plus puis-je donc noter ici,
+quelques petits faits que m'a fournis
+mon expérience personnelle.</i></p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_VI"> VI</a></span>
+<i>J'ai élevé mes deux enfants, et un
+peu mes trois petits-enfants, jamais je
+ne leur ai donné une chiquenaude, et
+pourtant, j'enregistre ici comme un
+titre dont je suis très fier, le mot que
+m'a dit un jour ma fille: «Tu nous
+aurais fait rentrer dans un trou de
+souris.»</i></p>
+
+<p><i>Quelle était donc mon attitude vis-à-vis
+d'eux? Étais-je donc dur, sévère?
+Nullement. Toutes les occasions d'amusement
+je les saisissais, je les recherchais
+pour eux; j'étais le</i> plus joueur
+de tous les pères avec eux, <i>mais une
+fois que le devoir avait parlé, j'étais
+d'une fermeté inflexible</i>.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_VII"> VII</a></span>
+<i>Selon moi, la fermeté paternelle a
+sa source dans la tendresse. Je ne connais
+rien qui aille si bien ensemble que
+la familiarité et l'autorité. Un axiome
+célèbre dit</i>: «Qui aime bien châtie
+bien.» <i>C'est monstrueux. Bien aimer,
+c'est bien élever, et bien élever c'est
+corriger, c'est réprimer, c'est contenir,
+c'est prévenir; c'est punir, ce n'est pas
+châtier.</i></p>
+
+<p><i>Le châtiment corporel a bien plus
+pour objet de satisfaire la colère de
+celui qui l'applique que de corriger le
+défaut de celui qui la subit. J'ai cependant
+vu une mère, la plus tendre des
+mères, faire couler le sang de son fils
+<span class="pagenum"><a id="Page_VIII"> VIII</a></span>
+qu'elle adorait, et jamais je n'ai mieux
+compris ce qu'il y avait d'héroïque
+dans la tendresse, que le jour où j'ai
+vu les lèvres de cette mère toutes rouges
+du sang de son enfant. Elle lui avait
+mordu le doigt sans hésiter. Pourquoi?
+Parce qu'il avait mordu lui-même,
+lâchement et cruellement le doigt de
+son petit frère. La figure de cette mère
+et celle de cet enfant ne sortiront jamais
+de ma mémoire. Le bourreau
+avait la pâleur d'une martyre, son visage
+exprimait une douleur mille fois
+plus profonde que celle de son fils.
+Pour lui, il ne dit rien; il la regarda,
+il comprit et il se jeta à son cou.</i></p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_IX"> IX</a></span>
+<i>En revanche, j'ai connu une jeune
+fille, à qui son père, dans un moment
+de colère, avait donné un soufflet quand
+elle avait déjà quinze ans, et qui m'a
+dit, quand elle en avait vingt-cinq</i>:
+«Jamais je ne lui ai pardonné et je
+ne lui pardonnerai jamais.»</p>
+
+<p><i>Enfin, troisième fait qui rentre directement
+dans votre théorie: L'amiral
+Jurien de la Gravière m'a dit que la
+discipline n'avait jamais été plus forte
+dans la marine, que depuis l'abolition
+des châtiments corporels.</i></p>
+
+<p><i>Je m'arrête, mon cher Confrère et
+Ami, ayant voulu seulement mêler à
+votre solide et excellent ouvrage, quelques
+<span class="pagenum"><a id="Page_X"> X</a></span>
+faits aussi frappants qui s'y rapportent,
+et surtout saisir l'occasion de
+témoigner tout haut de mes sentiments
+d'estime et de sympathie pour votre
+personne.</i></p>
+
+<p class="right smcap">E. Legouvé.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_11"> 11</a></span></p>
+
+<h2 class="p4">AVANT-PROPOS</h2>
+
+<p class="p2">Personne n'ignore que l'opinion
+s'est émue, il y a quelque temps,
+de l'excès de travail imposé à nos
+écoliers de tout ordre et par suite
+duquel ils se trouvaient, comme
+on dit, surmenés.</p>
+
+<p>Pour donner satisfaction à ce
+qu'il y avait de légitime dans les
+plaintes des parents et des hygiénistes,
+les programmes ont été
+remaniés, sinon réduits, et les
+règlements ont été adoucis de
+<span class="pagenum"><a id="Page_12"> 12</a></span>
+manière à mettre les m&oelig;urs de
+l'école en harmonie avec celles
+de la Société.</p>
+
+<p>Il nous a paru qu'il convenait,
+à cette occasion, de faire précéder
+les règlements actuels d'un résumé
+historique et d'une appréciation
+des châtiments et des récompenses
+scolaires chez les divers peuples,
+aux diverses époques. C'est ce
+résumé que nous donnons sous le
+titre de <em>Petit Traité des punitions
+et des récompenses</em>, qui sera, nous
+l'espérons, de quelque utilité à la
+plupart des maîtres et des parents.</p>
+
+<p class="right">F. H.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_13"> 13</a></span></p>
+
+<h2 class="p4"><span class="medium">PETIT TRAITÉ</span><br />
+<span class="xs">DES</span><br />
+PUNITIONS &amp; DES RÉCOMPENSES</h2>
+
+<p class="p2">L'éducation de l'enfant, c'est-à-dire
+le développement harmonique de son
+âme et de son corps, se fait, soit dans
+la famille, soit à l'école où les enfants
+se trouvent réunis pour recevoir l'enseignement
+et les soins en commun,
+soit simultanément à l'école et dans la
+famille.</p>
+
+<p>Quel que soit le mode adopté, le but
+auquel on tend est atteint par certains
+moyens dont il importe d'assurer l'efficacité.
+Par exemple, les exercices
+doivent être convenablement répartis,
+<span class="pagenum"><a id="Page_14"> 14</a></span>
+un temps déterminé doit leur être
+consacré de judicieux intervalles sont
+nécessaires pour les séparer; en un
+mot il faut établir l'ordre dans le travail,
+puis, veiller à l'exécution de ce
+travail. Toutes les prescriptions, ordres
+ou défenses, sont renfermées dans un
+Code nommé règlement auquel se
+conforment maîtres, parents et élèves.
+C'est la loi commune, égale pour
+tous, protectrice de tous, et que tous
+ont un égal intérêt à respecter et à
+maintenir. L'autorité du réglement est
+d'autant mieux établie, sur des bases
+d'autant plus solides, qu'il a été inspiré
+par une préoccupation plus exclusive
+de la justice. S'il est juste, il assure la
+liberté et l'égalité; l'obéissance qu'on
+lui doit, loin d'être servile et imposée
+par la force, est au contraire une soumission
+volontaire, recherchée même
+comme une garantie de sécurité,
+<span class="pagenum"><a id="Page_15"> 15</a></span>
+comme une protection que tous invoquent
+à l'occasion pour se défendre
+contre les injustices dont ils se croient
+victimes.</p>
+
+<p>Si quelqu'un enfreint la loi, il doit
+être puni. Il a mal agi, et toute action
+mauvaise entraîne un blâme et un châtiment.
+De là, les peines édictées par
+la loi. Tandis que dans les lois sociales
+se trouvent inscrits des châtiments
+contre les coupables, il n'est nullement
+question de récompenses pour les
+gens de bien. Le législateur a pensé,
+peut-être avec raison, que s'il est inévitable
+de punir le vice, il n'est pas
+absolument nécessaire de récompenser
+la vertu. La Loi scolaire, elle, punit
+et récompense; c'est par la crainte et
+l'espérance qu'on gouverne les enfants
+tout aussi bien que les hommes.</p>
+
+<p>L'enfant est un être moral en puissance,
+la conscience est chez lui en
+<span class="pagenum"><a id="Page_16"> 16</a></span>
+germe. Dès lors, nous devons, dès le
+premier éveil de la conscience, nous
+préoccuper de développer chez lui le
+sens moral. Ne négligeons rien, n'oublions
+rien de ce qui peut nous faciliter
+la tâche. «Tout est bien, dit Rousseau,
+sortant des mains de l'Auteur des
+choses», seulement rien ne sort directement
+des mains de l'Auteur des
+choses, car tout est bien changé depuis
+tant de siècles que les hommes
+occupent la terre. L'enfant n'apporte-t-il
+pas en naissant des prédispositions,
+des aptitudes, des goûts qu'il doit à ses
+ancêtres comme il leur doit les linéaments
+de son visage? C'est un héritier
+de l'humanité. Tout n'est pas bien mais
+tout n'est pas mal en lui, et la mission
+de l'éducateur consiste tout à la fois
+à contrarier les mauvaises tendances
+et à favoriser l'épanouissement des
+bonnes.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_17"> 17</a></span>
+Nous devons nous attacher à lui
+faire comprendre qu'il y a des choses
+permises et des choses défendues;
+qu'il doit par suite s'interdire ce qui
+est défendu, et que l'obéissance à la
+règle, loin d'être pour lui un effet de
+la crainte, doit être l'expression d'un
+mouvement spontané de son âme.
+Nous contribuerons ensuite à développer
+et à fortifier chez lui le sens moral,
+à rendre sa conscience de plus en plus
+délicate, en évitant de lui laisser confondre
+le mérite et le démérite avec
+leurs conséquences, en le pénétrant
+de cette idée que ce n'est pas de la
+punition mais de la faute qu'il doit être
+peiné, comme ce n'est pas de la récompense
+mais de la bonne action
+seule dont il doit être satisfait.
+<span class="pagenum"><a id="Page_18"> 18</a></span></p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_19"> 19</a></span></p>
+
+<h2 class="p4">I</h2>
+
+<h3>DES PUNITIONS</h3>
+
+<p class="p2">Il importe bien plus d'ailleurs, en
+particulier dans nos écoles, disons-le
+tout d'abord, de prévenir que de punir.
+Il faut tendre, sans prétendre y arriver,
+vers cette classe idéale où l'on ne
+punit pas. Au lieu de se proposer,
+comme les jeunes maîtres encore inexpérimentés,
+d'obtenir d'abord le silence
+et l'attention pour donner ensuite
+l'enseignement, c'est le contraire
+qu'on doit se proposer, c'est-à-dire
+rendre l'enseignement assez attrayant
+pour intéresser les élèves. L'ordre et
+l'application sont alors des conséquences
+naturelles. Que la leçon soit
+<span class="pagenum"><a id="Page_20"> 20</a></span>
+donnée avec intelligence, mesure et
+goût, on obtiendra par surcroît le silence,
+l'attention et le travail. Ne pas
+regarder la discipline comme un but
+à atteindre est un moyen de l'obtenir.
+En général plus l'enseignement est
+faible, plus la discipline est dure.</p>
+
+<p>Bien entendu, cela ne dispense ni
+de bons règlements, ni de bonnes méthodes,
+ni de bons procédés, en un
+mot des conditions favorables au travail.
+La tâche du maître sera en outre
+singulièrement facilitée: 1<sup>o</sup> si la durée
+des classes est en rapport avec l'âge
+des enfants; 2<sup>o</sup> s'il existe une judicieuse
+répartition du travail et du repos; 3<sup>o</sup> si
+une sage mesure est observée dans la
+durée et l'intensité des efforts exigés des
+élèves, car nous ne devons pas oublier
+qu'il faut au cerveau, comme à l'estomac,
+indépendamment de la diversité
+dans l'alimentation, une somme
+<span class="pagenum"><a id="Page_21"> 21</a></span>
+de nourriture qu'il puisse digérer et
+assimiler.</p>
+
+<p>Si rarement qu'on ait à punir, encore
+faut-il punir quelquefois. Occupons-nous
+donc de la nature des châtiments.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Depuis l'humanité naissante jusqu'à
+nos jours, on a surtout fait usage des
+peines corporelles. On a puni l'âme
+indocile dans le corps qu'elle gouverne,
+au lieu de la châtier directement.
+On était plus préoccupé de l'expiation
+de la faute que de l'amélioration
+du coupable. Il a fallu, d'une
+part, l'adoucissement des m&oelig;urs, et,
+d'autre part, une idée plus exacte, une
+appréciation plus saine du châtiment
+pour reconnaître qu'il ne doit être ni
+une cruauté ni une vengeance, mais
+un moyen offert au coupable de s'amender.
+<span class="pagenum"><a id="Page_22"> 22</a></span>
+Les m&oelig;urs scolaires se sont
+ressenties de la transformation des
+m&oelig;urs générales, ainsi qu'on voit les
+grands mouvements de l'Océan gagner
+les baies les plus reculées dans l'intérieur
+des terres.</p>
+
+<p>Aujourd'hui, dans la plupart des
+pays civilisés, les châtiments corporels
+sont tombés dans un discrédit sérieux.
+En Angleterre, où le respect de la tradition
+est excessif, on se relâche cependant
+des rigueurs du fouet traditionnel.
+Dans un rapport présenté au
+<em>Conseil d'éducation</em> de Londres, le
+rapporteur s'exprime ainsi: «Nous
+sommes heureux d'annoncer, que le
+nombre des punitions diminue, spécialement
+en ce qui concerne les punitions
+corporelles, ce qui tient sans
+doute aux règles établies pour les cas
+où ces punitions sont permises. Nous
+les verrions même disparaître si les
+<span class="pagenum"><a id="Page_23"> 23</a></span>
+maîtres avaient le droit de renvoyer
+les enfants incorrigibles et intraitables,
+ce qui est impossible dans une
+école ouverte à tous.»</p>
+
+<p>Par contre, de l'autre côté du Rhin,
+on semble vouloir en augmenter les
+rigueurs, «en autorisant l'instituteur
+à infliger des punitions corporelles
+sensibles qui laissent des traces comme
+les bleus, les raies enflées, les ecchymoses».
+Voici un extrait d'un jugement
+rendu par le tribunal supérieur
+d'<em>administration</em> de Prusse:</p>
+
+<p>L'instituteur, y est-il dit, est autorisé
+à infliger des punitions corporelles
+sensibles. Il doit éviter de causer des
+blessures «marquantes», qui mettent
+en danger la santé de l'élève. Les bleus,
+les raies enflées, les ecchymoses, ne
+constituent pas de signes indiquant
+des blessures «marquantes»; car
+chaque correction sensible&mdash;et l'instituteur
+<span class="pagenum"><a id="Page_24"> 24</a></span>
+est expressément autorisé à
+infliger une correction sensible&mdash;laisse
+des traces pareilles.</p>
+
+<p>L'instituteur n'est pas passible d'une
+peine s'il châtie un élève appartenant
+à une autre classe que celle qu'il dirige;
+la punition peut être infligée en
+dehors du local scolaire.</p>
+
+<p>La conduite de l'élève en dehors de
+l'école est également soumise à la
+discipline scolaire.</p>
+
+<p>L'ecclésiastique de son côté est autorisé
+quand il donne l'instruction religieuse
+à administrer des punitions
+sensibles.</p>
+
+<p>La conduite de l'instituteur ne peut
+devenir l'objet de poursuites que lorsqu'il
+a infligé des blessures marquantes.</p>
+
+<p>Toujours est-il que c'est avec quelque
+répugnance, et à la dernière extrémité
+qu'on les applique, et en les
+<span class="pagenum"><a id="Page_25"> 25</a></span>
+atténuant, Ceux qui les appliquent
+semblent s'en excuser et les considérer
+comme un mal nécessaire.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Remarquons en passant qu'un très
+petit nombre d'animaux mordent ou
+frappent à coups de bec leurs petits
+qui se conduisent mal. Le plus souvent,
+ils les grondent, et cela suffit
+ordinairement pour les faire rentrer
+dans le devoir. C'est merveille, par
+exemple, de voir les jeunes poussins
+obéir à la mère poule.</p>
+
+<p>Elle a un cri pour les rappeler lorsqu'ils
+s'égarent, un autre cri pour
+les rassurer s'ils ont eu peur à tort;
+un autre, pour les rassembler si un
+danger se présente. Quel que soit
+l'ordre donné, ils obéissent à la voix
+maternelle. Comment se fait-il que
+<span class="pagenum"><a id="Page_26"> 26</a></span>
+l'homme, qui se qualifie animal raisonnable,
+ne soit pas conduit uniquement
+par la raison. C'est sans doute
+parce que de tous les animaux, il est
+celui dont l'éducation première a la
+plus longue durée et réclame le plus de
+soins. L'éducation des jeunes animaux
+par leurs parents rentre dans la catégorie
+des actes instinctifs: elle est invariable
+dans ses moyens comme dans
+sa durée et parfaite quant au but à atteindre.
+Celle de l'enfant, au contraire,
+se modifie avec le progrès des m&oelig;urs
+et la connaissance plus précise de l'hygiène.
+Les procédés d'éducation varient
+avec le degré de civilisation.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Le premier châtiment corporel est
+infligé avec la main. Non moins diligente
+que la parole, la main se lève
+<span class="pagenum"><a id="Page_27"> 27</a></span>
+au moment même où celle-ci formule
+un reproche. Un ébranlement nerveux
+unique, parti du cerveau, se répand
+dans le corps tout entier et détermine
+simultanément l'ensemble des manifestations
+de la colère. La main est
+tout à la fois un merveilleux outil au
+service du corps et un admirable instrument
+aux ordres de l'âme. Ses mouvements
+ne sont pas moins variés que
+ses usages. Si, d'une part, elle sert à
+assurer et à guider les pas du jeune
+enfant, elle devient, à l'occasion, envers
+ce même enfant, un instrument de
+correction.</p>
+
+<p>Nous n'hésitons pas à condamner
+cette sorte de correction, qu'elle qu'en
+soit la forme: tape, calotte, claque,
+soufflet, lors même qu'elle n'a rien de
+prémédité ni de suivi, qu'elle résulte
+d'un mouvement de vivacité sans conséquence,
+parce que, avec une apparence
+<span class="pagenum"><a id="Page_28"> 28</a></span>
+anodine, elle présente parfois
+de graves inconvénients sinon des
+dangers. Les coups sur la tête, le dos
+ou la face donnés par une main brutale,
+peuvent déterminer des accidents
+sérieux et le soufflet a de plus
+un caractère dégradant. La face humaine
+voisine du cerveau, centralisant
+les organes des sens est en rapport
+direct et intime avec l'âme. La personne
+humaine est empreinte dans le
+visage plus que dans toute autre partie
+du corps, voilà ce qui rend le visage
+digne de respect. Tout au plus la fessée
+pourrait être tolérée, et encore
+pour de très jeunes enfants.</p>
+
+<p>Malgré l'aisance de ses mouvements
+et la vigueur de ses coups, la main ne
+paraît pas toujours suffire à certaines
+personnes, et tantôt pour des motifs de
+convenance ou de commodité, tantôt
+pour aggraver la souffrance, on l'a
+<span class="pagenum"><a id="Page_29"> 29</a></span>
+armée du bâton, de la baguette, du
+fouet, de la férule ou du martinet.</p>
+
+<p>Ces diverses modifications du châtiment
+corporel n'étaient pas pour lui
+conquérir des sympathies.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Chez les Égyptiens, le bâton est
+l'instrument de correction; comme
+on a pu s'en assurer par les devoirs
+d'écoliers égyptiens qui se trouvent
+parmi les papyrus du <em>British Museum</em>
+(Musée de Londres) et qui remontent
+au <span class="smcap">XVII</span><sup>e</sup> siècle avant notre ère<a name="FNanchor_1" id="FNanchor_1" href="#Footnote_1" class="fnanchor">[1]</a>.
+Parmi les exemples d'écriture, on lit:
+«Celui qui n'écoute pas sera battu;»
+ailleurs: «Ne fais pas un jour de paresse,
+<span class="pagenum"><a id="Page_30"> 30</a></span>
+ou bien on te battra; il y a un dos
+chez le jeune homme, il écoute celui
+qui le frappe». La menace des coups
+de bâton, revient souvent mais il ne
+paraît pas que ce soit seulement à
+propos des fautes commises. Il semble
+que les coups aient eu aussi pour
+but d'encourager l'écolier au travail,
+d'éveiller son attention comme le léger
+coup de fouet par lequel on excite
+le cheval et qui est comme une caresse
+stimulante. Les Égyptiens bâtonnent
+leurs ânes et ils ont procédé de même
+avec les écoliers. Il est même probable
+que la comparaison de l'écolier ignorant
+à un âne est d'origine égyptienne.
+Le bâton présente peut-être moins de
+dangers et d'inconvénients que le
+fouet pour un même effort de celui
+qui frappe.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_31"> 31</a></span></p>
+<hr class="c5" />
+
+<p>La verge, qui semble avoir été en
+usage chez les Hébreux, et qui pouvait
+être une baguette ou un bâton,
+est sans doute empruntée aux Égyptiens.
+Nous disons qu'elle semble
+avoir été en usage parce que les proverbes
+ou autres passages qui se rapportent
+aux menaces de la verge ne
+sauraient prouver plus que nos propres
+proverbes qui ne sont d'ailleurs le
+plus souvent que la répétition des
+proverbes anciens. Se figure-t-on nos
+descendants, retrouvant des expressions
+comme celles-ci: <em>donner des
+verges pour se faire fouetter</em>, et concluant
+de là qu'on faisait usage de ce
+mode de punition chez les Français.
+Or, c'est ainsi qu'on raisonne lorsqu'on
+attribue cet usage aux Hébreux
+<span class="pagenum"><a id="Page_32"> 32</a></span>
+parce qu'on lit dans les <em>proverbes: la
+folie est liée au c&oelig;ur de l'enfant, et la
+verge de la discipline l'en chassera</em>,
+ou bien parce que Roboam dit: <em>mon
+père vous a battus avec des verges, moi
+je vous châtierai avec des verges de fer</em>.
+Quoi qu'il en soit, il est permis de
+croire que les enfants des Hébreux
+ont reçu le fouet comme ceux des
+autres nations.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Nous n'avons guère que quelques
+indications sommaires sur les moyens
+de correction appliqués par les Grecs.
+Xénophon nous dit, en parlant des
+enfants de Sparte, qu'on les encourage
+à dérober les fromages sur l'autel
+de Diane Orthie, quitte à les
+<em>fouetter</em> jusqu'au sang s'ils se laissent
+<span class="pagenum"><a id="Page_33"> 33</a></span>
+surprendre. Lycurgue voulait que tout
+citoyen eût sur chaque enfant le droit
+de correction, et si, <em>frappé</em> par d'autres,
+l'enfant vient se plaindre, etc.,
+c'est le châtiment corporel appliqué
+sans ménagement<a name="FNanchor_2" id="FNanchor_2" href="#Footnote_2" class="fnanchor">[2]</a>. Remarquons
+que les choses se passent ainsi à
+Sparte et qu'on n'en saurait conclure
+qu'il en ait été de même à Athènes;
+loin de là. Platon ne nous dit rien
+des corrections, lui qui entre pourtant
+dans de grands détails sur les
+soins à donner aux jeunes enfants et
+dont les préceptes, disons-le en passant,
+sont en opposition avec les lois
+les plus élémentaires de l'hygiène<a name="FNanchor_3" id="FNanchor_3" href="#Footnote_3" class="fnanchor">[3]</a>.</p>
+
+<p>Nous ne trouvons rien non plus
+<span class="pagenum"><a id="Page_34"> 34</a></span>
+dans Aristote: il est vrai que tout ce
+qui se rapporte à l'éducation du premier
+âge est traité par lui avec un
+évident amour de l'enfance, et que la
+tendresse du père laisse présumer
+celle de l'éducateur. Avec Plutarque,
+au contraire, nous sommes exactement
+renseignés sur le point qui nous
+intéresse. «C'est par la douceur, la
+persuasion, dit-il, qu'il faut porter au
+bien la jeunesse; les mauvais traitements
+et les coups ne conviennent
+qu'à des esclaves, et dégradent des
+hommes libres. A ce régime, l'enfant
+devient comme hébêté<a name="FNanchor_4" id="FNanchor_4" href="#Footnote_4" class="fnanchor">[4]</a>.» Les
+Grecs n'en sont pas encore, on le voit,
+à fonder une société protectrice des
+animaux. Toutefois un progrès considérable
+s'est déjà accompli dans les
+m&oelig;urs.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_35"> 35</a></span></p>
+<hr class="c5" />
+
+<p>Chez les Romains, la chose n'est
+pas douteuse; les renseignements nous
+viennent de divers côtés. Plaute (234-184
+av. J.-C.) dans sa comédie des <em>Bacchis</em>,
+met dans la bouche d'un des
+personnages, ces mots:..... «Assis auprès
+de ton précepteur, tu lisais, et s'il
+t'arrivait de manquer d'une syllabe,
+ta peau était aussitôt bigarrée comme
+le manteau de la nourrice<a name="FNanchor_5" id="FNanchor_5" href="#Footnote_5" class="fnanchor">[5]</a>.»</p>
+
+<p>Horace (65-8 av. J.-C.) nous a conservé
+le nom de ce rude soldat qui
+s'était fait grammairien à cinquante
+ans, et dont il dit: «... Je me souviens
+des vers que me dictait le <em>fouetteur</em>
+Orbilius, lorsque j'étais enfant...<a name="FNanchor_6" id="FNanchor_6" href="#Footnote_6" class="fnanchor">[6]</a>»</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_36"> 36</a></span>
+«Loin de nous, dit Quintilien (42-120)
+le châtiment ignominieux qu'on inflige
+aux enfants, quoique l'usage l'autorise...
+D'abord, il est indécent et
+servile puisqu'à tout autre âge, il constituerait
+un outrage cruel, ensuite,
+l'élève, sourd aux réprimandes, sera
+bientôt insensible aux coups.»</p>
+
+<p>On pourrait multiplier les citations.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Tandis que les Romains instruits
+blâment l'usage de corrections corporelles,
+saint Chrysostome, saint Augustin,
+les moines s'inspirent de la
+Bible, mal interprétée, pour préconiser
+ces corrections. Les m&oelig;urs du moyen
+âge n'étaient pas faites pour apporter
+quelque adoucissement à ce régime.
+Nous n'avons pas l'intention de réunir
+ici tous les témoignages qui sont fort
+<span class="pagenum"><a id="Page_37"> 37</a></span>
+nombreux<a name="FNanchor_7" id="FNanchor_7" href="#Footnote_7" class="fnanchor">[7]</a>. Nous citerons seulement
+les plus intéressants. Les maîtres ne
+sont pas désignés autrement que par
+l'épithète de <em>furieux</em> (<em>furiosus preceptor</em>)
+que leur avait donné déjà
+saint Jérôme. Ils ne décolèrent pas, ne
+cessent de frapper pour faire pénétrer
+dans la tête de pauvres enfants des
+connaissances médiocres et médiocrement
+enseignées. Un évêque, Rathérius
+(ou Rathier, 974), compose
+une grammaire qu'il intitule <em>pare-dos</em>.
+C'est effectivement le dos qui reçoit le
+plus de coups, ce qui n'empêche que la
+tête, le visage, les fesses n'en aient leur
+bonne part. Les cheveux, les oreilles
+semblent aussi appeler les tiraillements
+des maîtres bourreaux.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_38"> 38</a></span>
+Les esprits doux et sensés s'élèvent
+contre ces brutalités odieuses.</p>
+
+<p>Saint Anselme (1033-1109) rapporte
+que, causant avec un abbé qui dirigeait
+les études des écoliers d'un cloître,
+celui-ci se plaignit amèrement des
+enfants: «Ils sont, dit-il, méchants et
+incorrigibles. Nous ne cessons de les
+frapper jour et nuit et ils deviennent
+toujours pires.&mdash;Eh quoi! lui dit saint
+Anselme, vous ne cessez de les frapper,
+et que deviennent-ils une fois grands?&mdash;Idiots
+et stupides, répond l'abbé.&mdash;Voilà
+une belle éducation, reprend le
+saint, qui de l'homme fait une bête.»</p>
+
+<p>Le doux et pieux Gerson (1363-1429)
+est l'auteur d'un petit livre dans lequel
+il compare les enfants à de frêles
+plantes pour lesquelles il réclame
+des soins et une vigilance active. Il se
+plaint de la disette de bons maîtres
+qui aient pour leurs élèves un c&oelig;ur
+<span class="pagenum"><a id="Page_39"> 39</a></span>
+de père et qui n'usent pas de châtiments
+corporels.</p>
+
+<p>«Il est plus facile, dit-il, de gagner
+les enfants par la douceur que par la
+crainte; autrement dit: On prend
+plus de mouches avec une cuillerée
+de miel qu'avec une tonne de vinaigre.»</p>
+
+<p>Un siècle plus tard, Rodolphe Agricola
+(1442-1485), disait: «Une école
+ressemble à une prison: ce sont des
+coups, des pleurs et des gémissements
+sans fin.» Après lui Érasme (1467-1536)
+continue: «C'est à la charrue
+qu'il faut envoyer de pareils maîtres,
+dignes d'effrayer de leur voix tonnante
+les b&oelig;ufs et les ânes..... Oses-tu bien,
+stupide bourreau, déchirer à coups de
+fouet, des jeunes gens d'esprit et de
+bonne famille, que tu es plus capable
+de tuer que d'instruire!...» Érasme et
+Rabelais (1483-1553) ont cité, avec les
+<span class="pagenum"><a id="Page_40"> 40</a></span>
+mêmes sentiments de réprobation, le
+collège de Montaigu où régnait le bourreau
+Pierre Tempête tenant en guise
+de sceptre le fameux fouet auquel il
+dut sa détestable renommée<a name="FNanchor_8" id="FNanchor_8" href="#Footnote_8" class="fnanchor">[8]</a>.</p>
+
+<p>«..... L'éducation se doit conduire
+avec une fermeté douce, dit Montaigne...
+Otez-moi la violence et la force;
+il n'est rien, à mon avis, qui abâtardisse
+et étourdisse si fort une nature
+bien née... Entre autres choses, la discipline
+de la plupart de nos collèges
+m'a toujours déplu... c'est une vrai
+prison (geaule) de jeunesse captive...
+Arrivez-y au moment du travail, vous
+n'entendez (oyez) que cris et d'enfants
+suppliciés et de maîtres enivrés dans
+leur colère. Quelle manière pour éveiller
+l'appétit envers leur leçon, à ces
+âmes tendres et craintives, que de les
+<span class="pagenum"><a id="Page_41"> 41</a></span>
+y engager avec une trogne effroyable,
+les mains armées de fouets... Combien
+leurs classes seraient plus décemment
+jonchées de fleurs et de feuilles que de
+tronçons d'osier sanglants!...<a name="FNanchor_9" id="FNanchor_9" href="#Footnote_9" class="fnanchor">[9]</a>»</p>
+
+<p>Le disciple de Montaigne, Charron
+(1543-1603), l'auteur de <em>la Sagesse</em>,
+parle dans le même sens que son
+maître, quelquefois même il lui emprunte
+ses propres écrits. «..... Nous
+condamnons, dit-il, tout à fait la coutume
+presque universelle de battre,
+fouetter, injurier et crier après les
+enfants... préjudiciable et toute contraire
+au dessein que l'on a de les
+rendre amoureux et poursuivant la
+vertu, sagesse, science, honnêteté. Or
+cette façon impérieuse et rude leur
+en fait venir la haine, l'horreur et le
+dépit; puis les effarouche et les entête,
+<span class="pagenum"><a id="Page_42"> 42</a></span>
+leur abat et ôte le courage tellement
+que leur esprit n'est plus que
+servile et bas... Les coups sont pour
+les bêtes qui n'entendent pas raison;
+les injures et crieries sont pour les
+esclaves...»</p>
+
+<p>Rollin (1661-1741), à son tour, réprouve
+dans son for intérieur les châtiments
+corporels; son c&oelig;ur paternel,
+son âme sensible y répugnent, et pourtant
+il hésite par respect pour les textes
+bibliques que nous avons cités plus
+haut. Nous l'avons dit, le langage de la
+Bible est surtout figuré, et Varet (1632-1676)
+de Port-Royal<a name="FNanchor_10" id="FNanchor_10" href="#Footnote_10" class="fnanchor">[10]</a>, interprète les
+textes plus judicieusement que Rollin
+lorsqu'il dit: «J'estime que la rigueur
+recommandée par l'Écriture-Sainte
+s'exerce bien plus parfaitement et
+<span class="pagenum"><a id="Page_43"> 43</a></span>
+mieux selon l'esprit de Dieu par le
+refus d'un baiser ou des caresses ordinaires
+que par les verges.»</p>
+
+<p>Locke (1632-1704) veut bien tolérer
+dans certains cas exceptionnels les peines
+corporelles: L'usage du fouet, dit-il,
+est une discipline servile qui rend
+le caractère servile<a name="FNanchor_11" id="FNanchor_11" href="#Footnote_11" class="fnanchor">[11]</a>. Quelques voix
+s'élèvent dans ce concert de réprobation
+pour parler en faveur du fouet:
+Mélanchton, Johnson, Goldschmidt
+déclarent qu'ils n'auraient jamais rien
+appris s'ils n'avaient été fouettés. C'est
+là une simple affirmation sans preuves,
+et dans tous les cas ce ne sont pas des
+personnalités éminentes.</p>
+
+<p>Par contre, Luther protestera, lui
+qui avait été battu jusqu'à quinze fois
+dans une seule matinée.</p>
+
+<p>«Un enfant intimidé, dit-il, par de
+<span class="pagenum"><a id="Page_44"> 44</a></span>
+mauvais traitements, est irrésolu dans
+tout ce qu'il fait. Celui qui a tremblé
+devant ses parents tremblera toute sa
+vie devant le bruit d'une feuille que le
+vent soulève.»</p>
+
+<p class="p2">Qui ne voit que le maître qui frappe
+un élève compromet tout à la fois sa
+dignité et son autorité? S'il ne se possède
+pas, s'il s'emporte, quel déplorable
+spectacle ne donne-t-il pas à son
+élève et dès lors quel respect, quelle
+estime, quelle affection peut-il en attendre?
+Si, au contraire, il est calme,
+comment osera-t-il brutaliser un enfant
+ou assister impassible à l'exécution
+qu'il aura ordonnée!</p>
+
+<p>Et pourtant les punitions corporelles
+continuent à être pratiquées. Nul n'en
+est exempt, pas même les enfants des
+grands et des rois. On le comprendrait
+à la rigueur dans les masses ignorantes
+<span class="pagenum"><a id="Page_45"> 45</a></span>
+et non policées; là, les coups sont et
+seront toujours d'un usage courant:
+le procédé est commode, sommaire,
+et expéditif, à la portée de tous, tandis
+que les autres moyens de corrections
+exigent bien des qualités que
+maître et parents possèdent rarement.</p>
+
+<p>Lorsqu'il fut question de l'éducation
+du Dauphin, fils de Louis XIV, le marquis
+du Châtelet composa un traité
+dans lequel on lit: «Il n'est point ici
+question de férule, un Dauphin de
+France doit être conduit par la gloire
+et par la douceur..... On doit ne le
+détourner du vice que par les charmes
+de la vertu<a name="FNanchor_12" id="FNanchor_12" href="#Footnote_12" class="fnanchor">[12]</a>». Mais malgré ces
+sages avis, sans doute aussi, malgré
+Bossuet dont tous les contemporains
+ont loué la douceur et qui écrivait au
+<span class="pagenum"><a id="Page_46"> 46</a></span>
+pape Innocent: «C'est par la douceur
+qu'il faut former l'esprit des enfants»,
+on donna pour gouverneur au Dauphin
+ce soldat honnête, mais quinteux,
+violent, brutal, sans pitié pour
+l'enfance, le duc de Montausier, qui
+se qualifiait gaîment lui-même <em>exécuteur
+des hautes &oelig;uvres</em>, et se livrait
+envers son royal élève à un véritable
+débordement de coups dont rougirait
+aujourd'hui un charretier. Le fidèle
+valet de chambre Dubois nous a conservé
+le récit ému de ces scènes
+odieuses<a name="FNanchor_13" id="FNanchor_13" href="#Footnote_13" class="fnanchor">[13]</a>. Se figure-t-on Bossuet
+spectateur indifférent de ces honteuses
+violences!</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Encore, si la peine corporelle était
+efficace ou l'était plus que les autres
+<span class="pagenum"><a id="Page_47"> 47</a></span>
+punitions! Mais nullement: elle est
+sans effet. Où la douceur n'a rien obtenu,
+la violence obtient moins encore.
+On impose par la crainte le silence et
+l'immobilité, non l'attention et le travail
+fécond. Les Jésuites avaient essayé
+d'un fouet perfectionné, composé
+de petites ficelles qui effleuraient la
+peau sans atteindre la chair. A quoi
+bon! Si le fouet ne cause aucun mal,
+il n'est plus qu'une grossière et inutile
+humiliation, d'une pratique pernicieuse
+au point de vue éducatif. Renonçons
+une fois pour toutes à des
+procédés qui terrifient l'enfant et le
+rendent incapable d'attention. Locke
+dit avec autant d'esprit que de raison,
+qu'il est aussi difficile de fixer des idées
+nettes dans une âme agitée que de bien
+écrire sur un papier qui tremble<a name="FNanchor_14" id="FNanchor_14" href="#Footnote_14" class="fnanchor">[14]</a>.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_48"> 48</a></span>
+Comment veut-on que l'esprit
+de l'enfant ne soit pas troublé par les
+menaces et les éclats de la colère,
+prélude ou accompagnement ordinaire
+des brutalités? La crainte rend
+l'enfant timide et sournois; frapper
+n'est pas corriger. L'unique souci de
+l'enfant sera d'éviter les coups, et,
+pour s'y soustraire, il dissimulera ses
+fautes par le mensonge. C'est en ce
+sens surtout que le châtiment corporel
+est anti-éducatif.</p>
+
+<p>Ce châtiment présente en outre
+des dangers sérieux: un maître irrité
+ne mesure pas ses coups et, parfois il
+lui arrivera de dépasser une limite prudente
+et de blesser un enfant sans le
+vouloir. Un mouvement instinctif de
+celui-ci pour éviter ou parer un coup
+peut occasionner un accident grave.
+Si, à la rigueur, on use des coups envers
+les animaux, c'est qu'il ne nous est
+<span class="pagenum"><a id="Page_49"> 49</a></span>
+pas facile de nous en faire comprendre,
+d'autant que nous exigeons d'eux des
+services peu en rapport avec leurs aptitudes
+et souvent contre leur gré. On
+sait combien l'abus est voisin de l'usage<a name="FNanchor_15" id="FNanchor_15" href="#Footnote_15" class="fnanchor">[15]</a>;
+de là les mauvais traitements
+que réprime la loi protectrice des
+animaux. Mais l'enfant est un animal
+raisonnable, il nous comprend. Dès
+lors pourquoi nous priver bénévolement
+du concours de ses facultés supérieures
+et, d'un animal raisonnable,
+ne pas utiliser la raison.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_50"> 50</a></span></p>
+<hr class="c5" />
+
+<p>Jusqu'ici il n'a été question que de
+coups, parce qu'en général les coups
+seuls, en y comprenant les tirements
+d'oreilles, de cheveux et pincements,
+sont regardés comme des châtiments
+corporels. En réalité, on doit comprendre
+sous cette appellation toute privation
+de nature à porter atteinte à la
+santé: celle d'une nourriture substantielle,
+par exemple. Mettre un jeune
+enfant au pain sec et à l'eau, c'est
+lui infliger une punition plus sévère
+qu'une tape ou qu'un coup de baguette,
+et d'une durée plus longue. La
+retenue, la privation de récréation ou
+de promenade sont également des punitions
+corporelles et des plus pénibles
+pour un être qui a si grand besoin
+<span class="pagenum"><a id="Page_51"> 51</a></span>
+de mouvement: en outre, ces moyens
+de correction vont contre le but qu'on
+se propose, car s'il s'agit de réprimer
+la turbulence, l'immobilité qu'on impose
+à l'enfant ne fait qu'exaspérer
+le besoin de mouvement qu'il a; c'est
+pour lui un supplice. Laissez-le au
+contraire épuiser son activité afin de
+le calmer; qu'il dépense sa fougue
+hors de la classe, afin qu'il ne la dépense
+pas au dedans.</p>
+
+<p>Si, de plus, vous lui donnez à faire
+des pensums, si vous l'assujettissez à
+une besogne fastidieuse et stérile, vous
+rendez la punition plus dure encore.
+Ajoutons enfin qu'il y a toujours de
+sérieux inconvénients à donner au
+travail le caractère d'un châtiment.
+On risque ainsi d'inspirer à l'enfant
+le dégoût de l'étude et l'aversion pour
+le maître, indépendamment des mauvaises
+habitudes de travail qu'entraîne
+<span class="pagenum"><a id="Page_52"> 52</a></span>
+l'accomplissement d'une tâche rebutante.</p>
+
+<p>En résumé, tout châtiment corporel,
+quelle qu'en soit la nature, est
+<em>sans effet sérieux, dangereux</em> et <em>anti-éducatif</em>.
+C'est plus qu'il n'en faut
+pour le proscrire.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Que reste-t-il alors comme moyen
+d'action?</p>
+
+<p>La privation de certains plaisirs;
+mais surtout les exhortations et les
+réprimandes.</p>
+
+<p>C'est peu, pensera-t-on peut-être.
+C'est suffisant, dirons-nous, pour qui
+saura en user avec tact, mesure et convenance,
+en tenant compte de la gravité
+plus ou moins grande de la faute,
+de la sensibilité plus ou moins vive
+de l'enfant.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_53"> 53</a></span>
+Swift (1667-1745), dans son ingénieux
+roman de <em>Gulliver</em>, fait ainsi finement
+la critique de la discipline scolaire de
+son temps.</p>
+
+<p>«Il est défendu aux maîtres, dit-il,
+de châtier les enfants par la douleur, ils
+le font par le retranchement de quelque
+douceur sensible, par la honte, et
+surtout par la privation de deux ou
+trois leçons, ce qui les mortifie extrêmement,
+parce qu'alors on les abandonne
+à eux-mêmes, et qu'on fait semblant
+de ne les pas juger dignes d'instruction.
+La douleur, selon eux, ne sert
+qu'à les rendre timides, défaut très préjudiciable,
+et dont on ne guérit jamais.»</p>
+
+<p>Gardons-nous en effet de croire que
+la sévérité des peines en assure l'efficacité:
+la sensibilité physique ou morale
+s'émousse par l'effet de l'habitude.
+Défions-nous de cette soumission
+<span class="pagenum"><a id="Page_54"> 54</a></span>
+silencieuse obtenue par un mot dur
+ou par la menace d'un châtiment et
+qui dissimule mal la révolte intérieure
+et le c&oelig;ur ulcéré.</p>
+
+<p>«On obtient plus, dit Plutarque,
+par les éloges et les réprimandes que
+par les rigueurs si l'on a soin de les
+employer tour à tour, celles-ci pour
+détourner du mal, ceux-là, pour encourager
+au bien.» «Je veux, dit à
+son tour Quintilien, qu'on me donne
+un enfant qui soit sensible à la louange,
+que la gloire enflamme, à qui
+une défaite arrache des larmes..... Un
+reproche, une réprimande le touchera
+au vif, le sentiment de l'honneur l'aiguillonnera»<a name="FNanchor_16" id="FNanchor_16" href="#Footnote_16" class="fnanchor">[16]</a>.</p>
+
+<p>Un reproche adressé sans amertume,
+sinon sans gravité et sans tristesse,
+produit une vive impression sur l'enfant
+<span class="pagenum"><a id="Page_55"> 55</a></span>
+surtout si en lui adressant on s'attache
+à lui faire reconnaître sa faute
+et qu'on lui inspire le désir de s'amender.
+Le châtiment doit être pour celui
+qui a commis une faute un moyen de
+se relever. En éducation, tout doit
+servir à l'éducation.</p>
+
+<p>Malheureusement peu de gens savent
+adresser des reproches, les formuler,
+les graduer, prendre le ton nécessaire,
+choisir le moment convenable,
+l'occasion propice, les circonstances
+favorables. Il y a un art de punir.
+N'ajoutez pas l'insulte au reproche,
+comme on le fait d'ordinaire, car vous
+aggravez ainsi la punition, et vous
+en épuisez bientôt l'effet, si bien que
+vous serez désarmé pour l'avenir; surtout
+n'y revenez pas à plusieurs reprises
+comme ces parents qui, à toute
+occasion, renouvellent leurs plaintes,
+invitent les parents, les amis, les étrangers
+<span class="pagenum"><a id="Page_56"> 56</a></span>
+même à s'associer à eux pour
+accabler l'enfant. C'est comme une
+blessure que vous rouvrez, c'est un
+supplice incessamment renouvelé, ce
+n'est plus un reproche, mais une succession
+de reproches, une série d'humiliations,
+A l'entrée de chaque visiteur,
+on entend: savez-vous ce qu'a
+fait Jules?&mdash;Il a fait telle chose.&mdash;Grondez-le
+donc. Puis, on compare
+Jules à Paul qui est bien autrement
+sage, qui donne à ses parents de si
+vives satisfactions, etc. Heureusement
+que les enfants, moins soucieux que
+leurs parents de la prétendue sagesse
+qu'on leur accorde, ne s'en aiment
+pas moins, car les parents font tout
+ce qui est nécessaire pour éveiller
+chez leurs enfants des sentiments de
+haine, d'envie et de jalousie.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_57"> 57</a></span></p>
+
+<p class="p2 center"><i>Conditions auxquelles doivent satisfaire
+les punitions.</i></p>
+
+<p>Avant de donner quelques indications
+sur la manière dont on doit
+procéder dans l'application, il nous
+semble indispensable d'énumérer les
+conditions auxquelles doivent satisfaire
+les punitions en général. Ces
+conditions sont au moins aussi essentielles
+que les punitions mêmes et il
+est absolument nécessaire de s'y conformer
+si l'on veut assurer l'efficacité
+de ces dernières.</p>
+
+<p>Nous ne dirons pas qu'une punition
+doit être juste; cela va de soi. Quand
+elle est injuste, c'est que parents ou
+maîtres se sont trompés; nous ne saurions
+admettre un instant que de propos
+délibéré ils veuillent commettre
+<span class="pagenum"><a id="Page_58"> 58</a></span>
+une injustice. «C'est perdre toute
+confiance dans l'esprit des enfants, dit
+La Bruyère, et leur devenir inutile,
+que de les punir des fautes qu'ils n'ont
+point faites ou même sévèrement de
+celles qui sont légères. Ils savent précisément
+et mieux que personne ce
+qu'ils méritent, et ils ne méritent
+guère que ce qu'ils craignent: ils connaissent
+si c'est à tort ou avec raison
+qu'on les châtie et ne se gâtent pas
+moins des peines mal ordonnées que
+de l'impunité<a name="FNanchor_17" id="FNanchor_17" href="#Footnote_17" class="fnanchor">[17]</a>.»</p>
+
+<p class="p2">Point de punitions générales dans
+les classes; mieux vaut laisser un coupable
+impuni que punir des innocents
+afin de pouvoir l'atteindre. Ajoutons
+que le plus souvent la punition sera
+<span class="pagenum"><a id="Page_59"> 59</a></span>
+beaucoup plus dure pour ceux-ci
+qu'elle ne sera efficace pour celui-là.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>1<sup>o</sup>.&mdash;<i>Les punitions doivent être rares.</i></p>
+
+<p>La fréquence des punitions en diminue
+l'effet. L'élève s'y accoutume:
+or comme nous voulons faire appel
+aux sentiments délicats et élevés, nous
+ne devons le faire qu'avec de grands
+ménagements, afin de conserver à
+l'enfant toute sa fraîcheur d'impression
+et toute sa sensibilité.</p>
+
+<p>«..... Si vous avez envie, dit excellemment
+Montaigne, qu'il craigne la
+honte et le châtiment, ne l'y endurcissez
+pas: endurcissez-le à la sueur
+et au froid, au vent, au soleil, et aux
+hasards qu'il lui faut mépriser...<a name="FNanchor_18" id="FNanchor_18" href="#Footnote_18" class="fnanchor">[18]</a>»</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_60"> 60</a></span></p>
+
+<p class="p2">2<sup>o</sup>.&mdash;<i>Toute punition infligée doit
+être exactement subie.</i></p>
+
+<p>Pas d'indécision à cet égard. La
+certitude de la punition importe bien
+plus que la rigueur. Réfléchissez mûrement
+avant d'infliger un châtiment,
+mais, la décision prise, ne cédez ni
+aux cris, ni aux supplications, car si
+vous manquez de fermeté une seule
+fois, votre autorité est perdue. Dès
+que l'enfant se sera aperçu qu'il peut
+vous fléchir en vous lassant, vous
+n'aurez plus d'action sur lui, tandis
+que s'il est convaincu de son impuissance,
+s'il désespère de vaincre votre
+résistance, il n'essaiera plus de lutter,
+il se résignera.</p>
+
+<p>Que de fois nous avons entendu des
+mères trop vives et trop tendres, s'écrier:
+<span class="pagenum"><a id="Page_61"> 61</a></span>
+Gaston, si tu fais cela, tu seras
+privé de dessert; mais le moment d'après,
+la peine était levée et à partir de
+ce moment l'enfant savait qu'il n'avait
+plus à redouter l'exécution des menaces.
+Sans le vouloir, inconsciemment,
+la mère lui avait laissé voir sa faiblesse.</p>
+
+<p>«Que tous vos refus soient irrévocables,
+dit Rousseau, que le <em>non</em> prononcé
+soit un mur d'airain, contre
+lequel l'enfant n'aura pas épuisé cinq
+ou six fois ses forces qu'il ne tentera
+plus de renverser<a name="FNanchor_19" id="FNanchor_19" href="#Footnote_19" class="fnanchor">[19]</a>».</p>
+
+<p>Nous donnons des instructions générales
+qui souffrent des exceptions.
+La justice n'exclut pas la miséricorde.
+Il faut rester inflexible tant qu'on ne
+voit chez l'enfant qu'un désir d'échapper
+à une punition comme on évite ce
+qui est désagréable, mais on peut
+<span class="pagenum"><a id="Page_62"> 62</a></span>
+céder devant les signes d'un repentir
+évident, d'un regret sincère de la faute
+commise et d'une douleur vraie.</p>
+
+<p class="p2">3<sup>o</sup>.&mdash;<i>La punition doit suivre de très
+près la faute.</i></p>
+
+<p>L'enfant agit et pense rapidement.
+La faute qu'il a commise, il l'oublie
+l'instant d'après. Tout est pour lui à
+courte échéance: le passé et l'avenir.
+Il vit surtout dans le présent. Que
+tout châtiment suive donc de très près la
+faute et même s'il se peut, qu'il la
+suive immédiatement et comme une
+conséquence. L'efficacité en sera d'autant
+plus certaine. Un enfant qui
+ressent une douleur parce qu'il a touché
+à un objet malgré la défense qui
+lui en a été faite, associe plus étroitement
+dans son esprit la faute et le
+<span class="pagenum"><a id="Page_63"> 63</a></span>
+châtiment, comme la cause et l'effet.
+Il ne désobéira pas de si tôt; le voilà
+doublement averti et qui se tient
+mieux sur ses gardes: <em>chat échaudé
+craint l'eau froide</em>, dit le proverbe.
+Malheureusement on ne peut que
+bien rarement tirer parti de ce que
+nous appelons les <em>punitions-conséquences</em>,
+d'abord parce que toute
+faute n'en comporte pas nécessairement,
+puis, à cause des dangers
+qu'elles présentent souvent. Laisser,
+par exemple, un enfant se brûler pour
+qu'il ne touche pas au feu, c'est courir
+un trop grand risque pour un trop
+faible résultat. Avec un pareil mode
+de correction, l'enfant aurait le temps
+de mourir avant d'avoir appris à vivre.</p>
+
+<p>«Faire la part de l'expérience personnelle,
+dit M. Gréard, rien de
+mieux; elle est la rançon de la
+liberté. Mais attendre que le jeune
+<span class="pagenum"><a id="Page_64"> 64</a></span>
+homme s'instruise exclusivement par
+ses propres fautes, n'est-ce pas la plus
+dangereuse des chimères?<a name="FNanchor_20" id="FNanchor_20" href="#Footnote_20" class="fnanchor">[20]</a>» Qui
+donc a pu se passer de l'expérience
+d'autrui? Notre expérience se compose
+de celle de l'humanité et de la
+nôtre; les deux sont nécessaires.
+Attendre que l'expérience résulte du
+jeu des événements, c'est réduire l'enfant
+à n'être qu'une chose ou qu'un
+être inconscient; c'est le priver bénévolement
+du facteur le plus important,
+la pensée, ou ne la faire intervenir
+que par la réflexion après coup. «C'est
+le résultat d'un acte, dit M. Gréard,
+qui en détermine la nature et la valeur.....
+Il s'agit non de bien faire,
+mais d'être adroit<a name="FNanchor_21" id="FNanchor_21" href="#Footnote_21" class="fnanchor">[21]</a>.» Cela rappelle
+le cas des enfants de Sparte punis non
+<span class="pagenum"><a id="Page_65"> 65</a></span>
+du larcin mais de leur maladresse. Où
+est l'idée de responsabilité du moment
+que je ne compte que pour une chose.
+S'il y avait en cela une idée morale
+on pourrait la désigner sous le nom
+de morale de l'habileté; ce serait une
+variété de la morale de l'intérêt.</p>
+
+<p>Remarquons d'autre part que l'enfant
+victime des choses, s'irrite mais ne
+s'éclaire pas; s'il se heurte contre un
+meuble, il frappera volontiers le meuble
+et ne s'en prendra pas à lui-même.
+A proprement parler, il ne s'agit pas
+ici de l'expérience telle qu'on l'entend
+d'ordinaire et qu'on pourrait appeler
+générale, mais d'une expérience
+particulière. La nécessité n'en est pas
+douteuse mais elle ne comporte pas
+l'idée de devoir, la notion du mérite
+et du démérite. C'est une expérience
+d'ordre inférieur.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_66"> 66</a></span></p>
+<p class="p2">4<sup>o</sup>.&mdash;<i>La punition doit être proportionnée
+à la faute.</i></p>
+
+<p>Gardons-nous de donner aux fautes
+une valeur fictive qui résulte de ce
+que l'enfant et nous ne l'envisageons
+pas de la même manière. Tâchons de
+voir les choses du même &oelig;il, non à
+notre point de vue, mais au sien, afin
+qu'il ne se croie pas victime d'un excès
+de sévérité.</p>
+
+<p>«L'enfant, dit Rousseau, a des manières
+de voir, de penser, de sentir,
+qui lui sont propres; rien n'est moins
+sensé que d'y vouloir substituer les
+nôtres; et j'aimerais autant exiger
+qu'un enfant eût cinq pieds de haut,
+que du jugement, à dix ans<a name="FNanchor_22" id="FNanchor_22" href="#Footnote_22" class="fnanchor">[22]</a>.» La
+proportion dont nous parlons est
+assez difficile à garder parce qu'il faut
+<span class="pagenum"><a id="Page_67"> 67</a></span>
+l'entendre comme l'enfant lui-même.
+Il ne s'agit pas de juger la faute avec
+notre jugement et notre expérience
+mais comme l'enfant la juge avec
+son défaut ou son rudiment de jugement
+et d'expérience. Il sait fort bien,
+par exemple, que la préméditation ou
+la récidive constituent des aggravations
+de la faute; il comprendra moins
+la gravité d'une faute due à la paresse
+ou au défaut d'attention. Nous devons
+attacher plus d'importance à lui faire
+sentir les inconvénients de la paresse
+qu'à le punir d'avoir été paresseux.
+De même le besoin d'activité physique
+qu'il éprouve le rend très indulgent
+pour sa turbulence et lui fait éprouver
+des mouvements d'humeur lorsqu'on
+l'en punit. Il se sent incapable
+de se contraindre et de gouverner son
+corps.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_68"> 68</a></span></p>
+<p class="p2">5<sup>o</sup>.&mdash;<i>La punition doit être proportionnée
+à la sensibilité de l'enfant; elle
+doit varier avec l'âge.</i></p>
+
+<p>Le tempérament, la complexion, la
+sensibilité des enfants sont choses très
+variables; la même punition est plus
+ou moins rigoureuse selon que celui
+qui la subit est plus ou moins délicat.
+Une étude attentive de chaque enfant
+nous permettra de distribuer équitablement
+les peines. Quand cette étude
+devrait nous coûter beaucoup, il n'y
+a pas à hésiter; cela fait partie de la
+mission de l'éducateur. D'ailleurs nous
+trouverons dans les résultats la compensation
+de nos efforts et de nos
+peines. Une punition de même nature
+peut être variée dans le degré et la
+forme, il sera donc facile de dresser
+une échelle pour chaque sorte de punition.
+Toutefois, hâtons-nous d'ajouter
+<span class="pagenum"><a id="Page_69"> 69</a></span>
+que tout ne sera pas résolu par un tarif;
+n'attribuons pas aux procédés une
+action plus efficace que celle qu'ils
+comportent, et ne perdons pas de vue
+un seul instant que notre mission est
+d'éveiller d'abord, de cultiver ensuite
+le sens moral. Nous devons pour ainsi
+dire couver l'enfant, le maintenir dans
+une atmosphère morale qui est pour
+son âme ce que sont pour son corps les
+soins tendres, empressés, attentifs de
+sa mère. A peine sera-t-il abattu qu'il
+faudra se hâter de le relever, car rien
+ne doit durer pour l'enfant, surtout si
+les fautes qu'il commet sont la conséquence
+de la légéreté naturelle à son
+âge.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Ces principes admis, passons à l'application.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_70"> 70</a></span>
+L'enfant commet-il des étourderies
+légères, nous feindrons de ne pas voir
+ou de ne pas entendre une première
+fois, nous tolérerons beaucoup, surtout
+si l'enfant est jeune, d'un tempérament
+ardent, d'une santé robuste.</p>
+
+<p>«N'oublions pas, comme dit Plutarque
+avec sa bonté accoutumée, que
+nous avons été jeunes et sachons pardonner
+aux enfants les fautes qui
+échappent à la faiblesse de leur âge.»
+Il va même jusqu'à conseiller certaines
+ruses: «L'âge, dit-il, rend notre vue
+plus faible et notre ouïe plus dure;
+n'est-ce-pas une occasion de tirer
+parti de nos infirmités pour ne voir et
+n'entendre qu'à demi.»</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Les étourderies se multiplient-elles
+par trop, le maître donne un avertissement.
+<span class="pagenum"><a id="Page_71"> 71</a></span>
+S'il aime les enfants, s'il est
+bon et juste, doux et ferme, s'il se
+plaint sans humeur, gronde sans dureté,
+corrige sans emportement, il sera
+aimé et respecté de ses élèves et l'avertissement
+suffira.</p>
+
+<p>«A Port-Royal, on recommandait
+aux maîtres de supporter patiemment
+les fautes et les faiblesses des enfants,
+de ne pas se montrer trop exacts avec
+eux, ni s'inquiéter trop, de se contenter
+de les préserver des fautes
+principales et de fermer les yeux sur
+leurs petits manquements»<a name="FNanchor_23" id="FNanchor_23" href="#Footnote_23" class="fnanchor">[23]</a>. De son
+côté, le P. Lamy, ajoute: «Pour ramener
+les enfants à leurs devoirs, une
+caresse, une menace, l'espérance d'une
+récompense ou la crainte d'une humiliation
+<span class="pagenum"><a id="Page_72"> 72</a></span>
+font plus d'effet que les verges<a name="FNanchor_24" id="FNanchor_24" href="#Footnote_24" class="fnanchor">[24]</a>.»</p>
+
+<p>J'ai souvent regretté que, dans les
+établissements scolaires et dans la
+famille, on ne permît pas aux enfants
+de converser sans faire trop de bruit
+pendant les repas. Le silence est dans
+ce cas un châtiment, en même temps
+qu'une contravention à l'hygiène.</p>
+
+<p>Les nouveaux règlements tout à la
+fois sensés et paternels permettent la
+conversation à voix basse pendant les
+repas. Bien des punitions seront ainsi
+évitées. On ne doit pas craindre d'autoriser
+ce qui est juste; s'il en résulte
+des inconvénients, ils seront toujours
+inférieurs aux avantages. En supprimant
+les prétextes et les occasions
+d'infraction, non seulement on a plus</p>
+
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_73"> 73</a></span>
+rarement à donner des punitions, mais
+le règlement acquiert plus d'autorité
+parce qu'il est plus juste.</p>
+
+<p>Certaines punitions, ridicules ou inconvenantes,
+doivent être proscrites
+à l'égal des punitions corporelles.
+Ainsi, dans certaines maisons, les enfants
+sont condamnés à baiser la terre,
+ou à se couvrir le visage avec leur tablier
+ou prendre une attitude génante.
+A Port-Royal-des-Champs, certaines
+punitions étaient entourées d'un appareil
+d'une solennité puérile. Il faut
+éviter tout ce qui ôte de la gravité à
+un châtiment.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Résumons ce qui précède en formulant
+un code de punitions:</p>
+
+<p>En premier lieu, la réprimande dont
+on variera la forme de manière à la
+<span class="pagenum"><a id="Page_74"> 74</a></span>
+rendre plus ou moins sévère. Elle ne
+sera publique que dans des cas très exceptionnels
+par la gravité.</p>
+
+<p>Puis, le pensum consistant en un
+certain nombre de lignes d'une écriture
+<em>appliquée</em>.</p>
+
+<p>Enfin, la privation d'un plaisir tel
+que promenade, jeu, friandises, spectacles,
+objets divers de toilette ou
+d'agrément.</p>
+
+<p>Si simple que soit ce code, il peut
+être simplifié. Nous avons à l'école
+Turgot un mode de punitions et de récompenses
+qui consiste uniquement
+en une inscription sur le cahier de
+notes de l'enfant. Tel élève a mérité
+une punition ou une récompense; on
+écrit sur son livret <em>une punition</em> ou
+<em>une récompense</em>. C'est la punition sans
+châtiment, la récompense sans avantage
+matériel. Un grand nombre d'élèves
+préféreraient un châtiment à la
+<span class="pagenum"><a id="Page_75"> 75</a></span>
+simple inscription de la punition,
+tant il est vrai que ce n'est pas la
+rigueur de la peine qui en fait l'efficacité
+et «qu'il n'y a de pénétrant, de
+durable et de salutaire, comme le dit
+M. Gréard avec sa netteté et sa précision
+accoutumées, que le sentiment
+de la faute attaché d'une main sûre
+à la conscience du coupable». C'est
+bien là la vraie punition: si l'enfant
+n'éprouve pas de honte à la subir, elle
+a beau être dure, l'enfant redoutera
+la douleur, l'ennui, les privations,
+mais la peine sera sans effet moral.</p>
+
+<p>Pour un devoir mal écrit faute de
+soin et sans mauvaise intention, n'infligeons
+pas de punition, mais donnons
+simplement le devoir à recommencer.</p>
+
+<p>Quant aux leçons à apprendre ou
+aux exercices de mémoire que l'enfant
+ne saurait pas par c&oelig;ur, nous devons
+nous assurer s'il a fait des efforts suffisants
+<span class="pagenum"><a id="Page_76"> 76</a></span>
+et s'il a une mémoire ingrate;
+dans ce cas, il faut venir à son aide,
+en divisant la tâche, en la diminuant,
+en lui indiquant certains procédés qui
+la facilitent. Dans le cas contraire, s'il
+y a paresse évidente, l'enfant sera puni
+sans être dispensé pour cela de remplir
+sa tâche.</p>
+
+<p>Dans la graduation des punitions,
+nous devons tenir compte des goûts
+particuliers des enfants, car il se peut
+qu'un enfant accepte volontiers ce
+qu'un autre regarde comme une aggravation
+de la peine. Tel enfant attachera
+plus d'importance à une promenade
+qu'à la possession d'un objet,
+tandis que tel autre préfèrera l'objet
+à la promenade.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_77"> 77</a></span>
+Supposons maintenant que l'enfant
+ait commis une faute grave, qu'il se
+soit attiré une remontrance exceptionnelle,
+voici comment nous procédons:
+nous le conduisons dans un endroit
+dont il n'a pas habituellement l'accès
+et qui, en conséquence, ne lui est pas
+familier, c'est une pièce éclairée d'un
+demi-jour et située dans un lieu retiré.
+Nous voulons exercer sur lui une première
+impression par le milieu. Nous
+prenons un air grave et résigné. Nous
+le faisons asseoir en face de nous,
+nous lui prenons les mains, en le
+fixant avec insistance dans les yeux,
+nous lui parlons avec douceur, lentement,
+d'une manière un peu monotone
+afin de l'assoupir peu à peu.
+Dans ce demi-sommeil, la volonté de
+l'enfant s'affaiblit. Nous lui parlons
+alors de la faute qu'il a commise,
+nous lui en faisons comprendre la
+<span class="pagenum"><a id="Page_78"> 78</a></span>
+gravité, nous lui en montrons les
+conséquences, en lui faisant craindre
+que la tendresse de ses parents, la
+confiance, l'estime, la sympathie de
+ses amis et de ses maîtres ne s'en
+trouve diminuée. Nous lui inspirons
+le regret de l'avoir commise, le désir
+de se faire pardonner et la résolution
+de se corriger.</p>
+
+<p>L'enfant est somnolent; dans son
+corps inerte, son esprit vacille pour
+ainsi dire, il sent sa volonté lui échapper,
+en quelque sorte; c'est alors
+que, mis dans l'impossibilité de nous
+résister, il se trouve tout à fait préparé
+à recevoir nos avis et à suivre nos
+conseils. Loin de nous la pensée de
+substituer notre volonté à la sienne,
+d'affaiblir en lui le sentiment de la
+responsabilité: nous le désarmons
+mais seulement pour qu'il ne résiste
+pas, nous le subjuguons sans l'anéantir.
+<span class="pagenum"><a id="Page_79"> 79</a></span>
+Il comprend nos raisonnements,
+il les suit, il se les approprie; nous
+sommes parvenu à pénétrer dans une
+place qui n'est plus défendue. Puis,
+lorsque l'impression est faite dans
+son esprit, les entraves sont enlevées,
+il s'éveille, il est libre, il est meilleur.</p>
+
+<p>Nous n'agissons pas autrement pour
+détruire des habitudes vicieuses, des
+défauts de caractère, des affections
+maladives<a name="FNanchor_25" id="FNanchor_25" href="#Footnote_25" class="fnanchor">[25]</a>. L'enfant est pour nous,
+dans tous ces divers cas, un malade
+au moral ou au physique, par cela
+seul que maladies ou vices tiennent
+<span class="pagenum"><a id="Page_80"> 80</a></span>
+d'une organisation défectueuse par
+quelque côté, qu'il doit souvent, il
+faut bien le dire, à la négligence, à
+l'incurie ou aux vices de ses parents.
+A l'éducateur de rétablir l'équilibre
+de ce corps et de cet esprit, mais
+bien entendu, avec le concours du
+malade. Lentement et progressivement,
+nous amenons l'enfant à sentir
+les inconvénients ou les dangers de
+son état et la nécessité d'y porter
+remède. Nous insistons, nous martelons
+nos enseignements dans son esprit.
+Il nous écoute, il nous comprend,
+il se laisse persuader dans son demi-sommeil,
+et, revenu à la réalité, il se
+trouve dans la situation de ceux qu'un
+rêve a obsédés. Une première amélioration
+s'est produite, le mauvais
+pli a été défait, comme par un effort
+mécanique un bâton tordu se trouve
+rectifié.</p>
+
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_81"> 81</a></span>
+Nous revenons à la charge à plusieurs
+reprises, et, chaque fois, l'amélioration
+s'accentue. Des enfants grossiers,
+turbulents, indociles, paresseux,
+sont ainsi transformés: on a raison de
+leur trop grande vivacité, de leur nature
+emportée, ou de leur apathie. C'est
+là un traitement, qu'on pourrait désigner
+sous le nom d'<em>orthopédie morale</em>.</p>
+
+<p>Parfois il faut beaucoup de temps
+et encore plus de patience mais la guérison
+vient à la fin. Si elle est incomplète,
+si l'enfant retombe dans sa faute,
+on recommence le traitement jusqu'à
+ce qu'on ait triomphé de la cause du
+mal. Toutefois les cas de récidive
+sont rares, car une première amélioration
+obtenue rend plus facile une
+amélioration plus grande, comme les
+exercices répétés d'une gymnastique
+méthodique superposent leurs effets et
+accroissent les forces d'une manière
+<span class="pagenum"><a id="Page_82"> 82</a></span>
+continue. Il se produit dans l'ordre
+moral quelque chose d'analogue aux
+intérêts composés; chaque progrès
+dans le bien est la source d'un progrès
+nouveau, et la nature humaine continue
+ainsi son redressement d'elle-même,
+par sa propre puissance, quand
+la première impulsion a été donnée.
+L'homme devient le collaborateur
+conscient ou non de ceux qui suscitent
+en lui de bons sentiments. De
+même que le grain mis en terre donne
+naissance à un épi, de même une
+bonne pensée déposée dans un esprit
+convenablement préparé y devient le
+germe d'autres pensées bienfaisantes.
+L'esprit, comme le corps, a des ressources
+propres qui ne lui viennent
+pas du dehors et lui permettent de
+lutter contre le mal ainsi que le corps
+lutte contre la maladie. Nos conseils,
+nos remèdes, ne font qu'aider cette
+<span class="pagenum"><a id="Page_83"> 83</a></span>
+action qui se poursuit naturellement<a name="FNanchor_26" id="FNanchor_26" href="#Footnote_26" class="fnanchor">[26]</a>.</p>
+
+<p><a id="Page_84"></a>
+<span class="pagenum"><a id="Page_85"> 85</a></span></p>
+
+<h2 class="p4">II</h2>
+
+<h3>LES RÉCOMPENSES</h3>
+
+<p class="p2">Nous avons réduit les punitions à
+la privation de certains plaisirs et aux
+réprimandes, et même à moins que
+cela. Nous ne serons pas moins sobre
+de récompenses. Il suffit de prendre
+la contre-partie, de borner les récompenses
+à certains plaisirs et à des approbations
+ou des éloges. Ne soyons pas
+surpris de cette pénurie de moyens;
+l'abondance ni la variété ne sont des
+signes de puissance, et, de même que
+la rigueur des peines n'en assure pas
+l'efficacité, l'exagération des marques
+d'approbation ou la valeur des objets
+<span class="pagenum"><a id="Page_86"> 86</a></span>
+et des avantages accordés ne donne
+pas plus de prix aux récompenses.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>L'idéal à réaliser consisterait en un
+mode de récompense sans valeur vénale
+ou matérielle et dont l'effet concourrait
+à l'éducation de l'enfant, c'est-à-dire
+à son amélioration morale, car
+en matière d'éducation, nous ne saurions
+trop le répéter, tout doit servir
+à l'éducation. Le bien devrait être
+fait pour l'amour du bien et non pour
+les avantages qu'on en peut retirer,
+lesquels viennent par surcroît. Nous
+savons que c'est là un idéal mais lors
+même qu'un but ne peut être tout à fait
+atteint, l'effort n'est pas inutile; nous
+devenons meilleur rien qu'en cherchant
+à le devenir. Si donc nous voulons
+améliorer l'enfant, la première
+<span class="pagenum"><a id="Page_87"> 87</a></span>
+condition pour obtenir ce résultat,
+c'est de le croire capable de désintéressement,
+de dévouement, d'élévation,
+etc. Comment entreprendre une tâche
+si l'on n'a la certitude ou au moins
+l'espérance de l'accomplir; quelle
+plus déplorable disposition que le
+scepticisme chez un éducateur; quelle
+peut être son action s'il n'a la conviction.</p>
+
+<p>On croit généralement que l'enfant
+a des défauts qui lui sont propres; on
+s'en va répétant après La Fontaine
+que «cet âge est sans pitié». Persuadons-nous
+bien au contraire que leurs
+défauts sont les nôtres, que nous
+sommes une même personne à tous
+les moments de notre existence, seulement
+l'enfant donne un libre cours
+à ses pensées comme à ses mouvements;
+il ne sait pas encore pratiquer
+la réserve ni la modestie, et manifeste
+<span class="pagenum"><a id="Page_88"> 88</a></span>
+spontanément ses désirs. Ses défauts
+sont plus évidents parce qu'il
+n'a pas encore appris à les combattre
+ou à les dissimuler. Dans les reproches
+que nous leur adressons combien
+pourraient être justement retournés
+contre nous. Avons-nous toujours eu
+soin d'éveiller leur conscience et de
+la développer une fois éveillée? Loin
+de là, il arrive souvent qu'on la fait
+dévier comme on fait dévier leur intelligence
+par les préjugés; comme
+on fait dévier leurs jambes par le
+maillot et la marche hâtive. Que de
+bien n'y aurait-il pas à faire rien qu'en
+évitant le mal que l'on cause inconsciemment
+lorsqu'on altère le sens naturellement
+droit de l'enfant!</p>
+
+<p>Au lieu, par exemple, de nous borner
+à le louer de ce qu'il a fait de
+bien, nous ajoutons un avantage matériel
+qui diminue la valeur morale
+<span class="pagenum"><a id="Page_89"> 89</a></span>
+de l'éloge et lui ôte une part de son
+action éducatrice. «Ne promettez
+jamais aux enfants, dit Fénelon, pour
+récompenses des ajustements et des
+friandises; c'est faire deux maux: le
+premier de leur inspirer l'estime de
+ce qu'ils doivent mépriser et le second
+de nous ôter le moyen d'établir
+d'autres récompenses qui facilitaient
+votre travail<a name="FNanchor_27" id="FNanchor_27" href="#Footnote_27" class="fnanchor">[27]</a>.» Lorsque nous disons
+à l'enfant: si tu fais bien ton devoir,
+tu auras des fruits, des gâteaux,
+des jouets, des bijoux, il travaille non
+pour le plaisir de l'étude, mais en
+vue de l'avantage promis. «Toute
+idée de devoir disparaît, dit Madame
+Guizot, un calcul intéressé en prend
+la place, occupe seul son esprit, la
+tâche pourra bien être faite, mais
+l'enfant n'aura point appris à bien
+<span class="pagenum"><a id="Page_90"> 90</a></span>
+faire<a name="FNanchor_28" id="FNanchor_28" href="#Footnote_28" class="fnanchor">[28]</a>.» «Il faut éviter, dit Locke,
+de cajoler les enfants en leur donnant
+comme récompenses certaines choses
+qui leur plaisent pour les engager à
+s'acquitter de leur devoir... on ne fait
+qu'autoriser par là leur amour pour
+le plaisir et entretenir une dangereuse
+inclination<a name="FNanchor_29" id="FNanchor_29" href="#Footnote_29" class="fnanchor">[29]</a>.»</p>
+
+<p>Certains pensent que l'enfant prend
+ainsi l'habitude du bien et que l'habitude
+une fois prise, il fait par goût
+ce qu'il a d'abord fait par intérêt.
+Or, l'habitude nous dispense précisément
+d'agir consciemment et volontairement;
+c'est en quelque sorte
+un instinct acquis. Où donc est alors
+le profit moral? L'habitude succède à
+des actes volontaires répétés, elle en
+<span class="pagenum"><a id="Page_91"> 91</a></span>
+est la conséquence mais le contraire
+n'est pas vrai. On ne fait pas l'apprentissage
+d'une qualité en pratiquant le
+défaut opposé. Agir souvent dans un
+but intéressé mènera à prendre l'habitude
+d'agir toujours par intérêt.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Il est vrai que la plus simple approbation,
+l'éloge le plus discret ne va
+pas sans flatter la vanité de celui qui
+le reçoit, que, dès lors, un intérêt s'y
+trouve attaché. La seule récompense
+idéale pure consiste dans la satisfaction
+du for intérieur. Celui qui s'en contente
+n'en connaît pas de plus haute
+et qui lui cause une joie aussi complète.
+C'est la jouissance exquise des
+natures délicates et élevées. Aussi,
+devons-nous nous efforcer de développer
+chez l'enfant le sentiment de
+<span class="pagenum"><a id="Page_92"> 92</a></span>
+l'honneur, le respect de soi, la sensibilité
+de la conscience. L'estime de
+soi-même, le souci de sa réputation
+ne doivent pas être confondus avec la
+vanité ou l'orgueil, c'est le fondement
+de la dignité humaine. «De tous les
+motifs propres à toucher une âme
+raisonnable, dit Locke, il n'y en a pas
+de plus puissants que l'honneur et la
+honte..... Si donc vous pouvez inspirer
+aux enfants l'amour de la réputation
+et les rendre sensibles à la honte, vous
+aurez mis dans leur âme un principe
+qui les portera continuellement au
+bien<a name="FNanchor_30" id="FNanchor_30" href="#Footnote_30" class="fnanchor">[30]</a>.»</p>
+
+<p>Toute récompense autre que la satisfaction
+du devoir accompli entraîne
+avec elle un avantage ou un profit;
+elle excitera donc chez l'enfant des
+<span class="pagenum"><a id="Page_93"> 93</a></span>
+appétits malsains ou la gourmandise
+ou la vanité ou la cupidité ou l'amour
+du plaisir. Donner à l'enfant des mets
+qu'il aime, des gâteaux, des sucreries,
+des fruits comme récompense
+d'un travail bien fait, d'une leçon bien
+sue, c'est le rendre gourmand; lui
+accorder un bijou, une parure, un
+vêtement nouveau, c'est le rendre
+vain; lui donner de l'argent est bien
+autrement grave; aussi nous sommes
+d'avis qu'il n'en faut jamais donner
+aux enfants. Ils n'en connaissent pas
+la valeur, ne l'ayant pas gagné; l'argent
+devient pour eux un complice
+docile de leurs fantaisies: il leur
+permet de satisfaire des caprices, de
+vaincre des résistances et les prépare
+ainsi à la vie facile; voilà le danger.
+L'argent qui n'est pas sanctifié, en
+quelque sorte, par le travail, est essentiellement
+corrupteur. «Mon fils,
+<span class="pagenum"><a id="Page_94"> 94</a></span>
+disait, avec une singulière force d'expression,
+un homme du siècle dernier,
+l'argent, ça pue.»</p>
+
+<p>Restent les plaisirs en général, tels
+que la promenade, les spectacles, les
+jeux, mais n'est-ce pas inspirer l'amour
+du plaisir que d'accorder un plaisir
+comme récompense? Quoi qu'on fasse,
+la récompense ne va pas sans un salaire;
+ainsi l'exige la bête qui habite
+en chacun de nous et qui chez l'enfant
+est particulièrement exigeante. Le seul
+parti à prendre c'est de réduire le salaire
+le plus possible, et, d'autant plus,
+que l'enfant est plus âgé.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>N'exagérons pas, examinons les
+choses avec calme: les motifs qui déterminent
+nos actions sont toujours complexes
+<span class="pagenum"><a id="Page_95"> 95</a></span>
+comme notre nature; il n'en
+saurait être autrement; l'homme ne
+peut être moral d'une manière absolue.
+Lorsque le sauveteur arrache une personne
+en danger de se noyer, il éprouve
+certainement une joie très vive de sa
+bonne action, mais à cette joie pour
+ainsi dire instinctive, se mêle bientôt
+la pensée de la récompense qu'il pourra
+recevoir et le plaisir de recueillir les
+applaudissements de la foule; le soldat
+marche au combat par obéissance,
+par amour de la gloire, par amour de
+la patrie, par désir de vaincre et avec
+l'espoir d'un grade ou de la croix. Tous
+ces mobiles coexistent et agissent simultanément
+avec des intensités différentes
+et variables; même la s&oelig;ur
+de charité et le martyr ne sont pas
+exempts, nous ne dirons pas de ces
+faiblesses, mais de ces sentiments, de
+ces impulsions diverses de notre nature
+<span class="pagenum"><a id="Page_96"> 96</a></span>
+complexe, car ils ont l'espoir de
+gagner le ciel, qui est une récompense
+d'une valeur infinie.</p>
+
+<p>Ainsi, toute bonne action n'est pas
+absolument bonne, il y a toujours un
+motif intéressé auquel donne satisfaction
+la récompense concrète.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Ces préliminaires établis, nous
+allons chercher les conditions auxquelles
+doivent satisfaire les récompenses.<a name="FNanchor_31" id="FNanchor_31" href="#Footnote_31" class="fnanchor">[31]</a></p>
+
+<p class="p2">1<sup>o</sup> <i>Elles doivent être rares.</i></p>
+
+<p>Chacun sait que la facilité avec
+<span class="pagenum"><a id="Page_97"> 97</a></span>
+laquelle on obtient ce qu'on désire en
+diminue le prix et détermine bientôt
+la satiété. Même lorsque les choses
+n'ont pas de valeur intrinsèque, la
+difficulté de les obtenir leur en donne
+une fictive, et si elles en ont une, elle
+se trouvera rehaussée. Le désir s'accroît
+en même temps que les difficultés.
+Si l'on se montre trop prodigue
+de récompenses, non seulement les
+enfants y deviennent indifférents, mais
+ce qui est plus grave, ils prennent de
+la suffisance et un sentiment de sécurité
+qui affaiblissent en eux tout ressort
+et les rendent impertinents et paresseux.</p>
+
+<p class="p2">2<sup>o</sup>.&mdash;<i>Les récompenses doivent être
+graduées.</i></p>
+
+<p>L'éloge pur et simple, tout en conservant
+sa valeur relative, doit être
+mesuré. Les nuances seront indiquées
+<span class="pagenum"><a id="Page_98"> 98</a></span>
+surtout par la force et la précision des
+termes, depuis la plus faible marque
+d'approbation jusqu'à la plus flatteuse.
+N'ajoutez pas de développement; ne
+dites que ce qui est nécessaire pour
+justifier l'éloge. Rien de trop.</p>
+
+<p>Si, par exception, l'éloge est rendu
+public, ce doit être parce qu'il est de
+nature à produire une excitation salutaire
+sur l'ensemble des écoliers plutôt
+que pour causer à celui qui l'aura
+mérité une satisfaction plus vive.</p>
+
+<p>«En louant les compositions de ses
+élèves le maître ne doit être ni avare
+ni prodigue de compliments, de peur
+de leur inspirer ou le dégoût du travail
+ou trop de sécurité<a name="FNanchor_32" id="FNanchor_32" href="#Footnote_32" class="fnanchor">[32]</a>».</p>
+
+<p>«Quoiqu'il soit fort bon d'augmenter
+l'ardeur que les enfants ont
+pour l'étude par les justes louanges
+<span class="pagenum"><a id="Page_99"> 99</a></span>
+qu'on leur donne, il le faut néanmoins
+faire sobrement, de peur de leur
+donner de la vanité et de les remplir
+d'une secrète et dangereuse opinion
+de leur prétendue suffisance<a name="FNanchor_33" id="FNanchor_33" href="#Footnote_33" class="fnanchor">[33]</a>.»</p>
+
+<p>L'amour-propre ou, si l'on veut, l'estime
+de soi-même est un mobile excellent
+dont l'excès seul, c'est-à-dire la
+présomption ou l'orgueil est à redouter.
+L'éloge public est par lui-même
+excessif; ceux qui l'entendent en aggravent
+les effets en renchérissant sur
+l'éloge, en y ajoutant leur propre approbation.
+Rien de plus fréquent que
+cette complaisance inconsciente des
+hommes par laquelle ils conspirent à
+élever davantage celui qui a déjà été
+élevé. Nous appuyons sur l'éloge
+comme sur le blâme. En outre, l'éloge
+public excite l'envie, la jalousie des
+<span class="pagenum"><a id="Page_100"> 100</a></span>
+émules ou des rivaux. «En tâchant de
+leur donner de l'émulation, disent
+MM. de Port-Royal, il faut bien
+prendre garde de ne pas faire naître
+de l'envie pour les bonnes qualités
+qu'ils remarquent dans leurs compagnons,
+et qui leur manquent<a name="FNanchor_34" id="FNanchor_34" href="#Footnote_34" class="fnanchor">[34]</a>.»</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Puisque nous parlons d'émulation,
+distinguons celle entre les personnes
+de celle qui est relative aux choses.
+Dire à l'écolier, un tel a mieux fait que
+vous, il aura tels avantages, voilà qui
+lui inspirera de mauvais sentiments, et
+qui embarrassera son camarade plus
+intelligent ou plus heureux. L'élève
+est-il paresseux? on ne l'excitera pas
+au travail par ce moyen, et s'il pèche
+<span class="pagenum"><a id="Page_101"> 101</a></span>
+par le défaut d'intelligence, ou par l'incapacité
+d'attention, on ne parviendra
+ainsi qu'à lui inspirer le dégoût de
+l'étude, comme il arrive qu'on se désintéresse
+d'un travail auquel on s'est
+appliqué et où l'on n'a pas réussi malgré
+ses efforts. Il n'y a aucun inconvénient
+au contraire, à dire à l'enfant:
+tu as mieux fait ton devoir, tu peux
+le mieux faire encore. Ce mode d'émulation
+est même le seul qui puisse être
+employé lorsque l'enfant est élevé
+dans la famille.</p>
+
+<p>Malgré les inconvénients que présente
+l'éloge, c'est un levier trop puissant
+pour renoncer à s'en servir. Nous
+ne tenons à rien tant qu'à l'approbation
+de nos semblables; elle nous est
+tellement précieuse que nous sommes
+sensibles même à celle des hommes
+que nous ne connaissons pas ou, qui
+pis est, que nous n'estimons pas.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_102"> 102</a></span></p>
+
+<p class="p2">3<sup>o</sup>.&mdash;<i>Il faut être très réservé dans
+le nombre et très scrupuleux dans le
+choix des avantages attachés aux récompenses.</i></p>
+
+<p>Nous avons indiqué déjà les écueils
+qu'il faut craindre en accordant des
+récompenses vénales. Il importe d'en
+user avec beaucoup de discrétion, de
+faire en sorte que l'avantage soit plutôt
+une conséquence naturelle qu'un
+appoint ou un salaire. L'effet nuisible
+en sera atténué si l'on donne à l'enfant
+des objets plutôt utiles qu'agréables,
+tels que des livres ou des vêtements,
+toutefois on choisira des livres
+de lecture plutôt que d'étude, des
+vêtements plus agréables que nécessaires
+et on aura soin d'éviter, dans
+ces divers objets, la fausse élégance
+et le luxe de mauvais aloi; par là
+<span class="pagenum"><a id="Page_103"> 103</a></span>
+encore, on contribuera a l'éducation
+des enfants, en développant le goût.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Parmi les plaisirs, il y a un choix à
+faire: non seulement il faut tenir
+compte de l'âge, du sexe, du goût, du
+degré de sensibilité de l'enfant, mais
+d'une manière générale, il faut lui épargner
+tout spectacle qui est de nature
+à causer des émotions trop fortes ou à
+fausser son jugement. Les impressions
+reçues dans l'enfance, sont toujours
+très vives, et si elles sont violentes,
+elles exercent sur l'esprit une influence
+funeste qui persiste jusque dans l'âge
+mûr, et peuvent occasionner des troubles
+sérieux. Ce que nous disons des
+spectacles s'applique également aux
+livres; l'enfant s'attache fortement au
+livre qu'il aime, il y revient sans
+<span class="pagenum"><a id="Page_104"> 104</a></span>
+éprouver de lassitude ni d'ennui, il
+relit les passages qui lui ont plu, aussi
+importe-t-il de mesurer l'émotion à
+son jeune et tendre c&oelig;ur. Les vibrations
+violentes brisent la corde sonore
+délicate.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Les promenades sont d'excellentes
+récompenses; elles satisfont au besoin
+d'exercice; elles peuvent être associées
+à des jeux. C'est un plaisir simple,
+naturel, hygiénique qui ne laisse aucune
+amertume après lui, qui apaise,
+qui calme les excitations maladives
+causées par la vie sédentaire et le
+surmenage.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Dans ces derniers temps, l'usage
+s'est répandu d'accorder en récompense
+<span class="pagenum"><a id="Page_105"> 105</a></span>
+des livrets de caisse d'épargne,
+dans l'espoir de créer des habitudes
+d'ordre et d'économie dans des familles
+peu aisées où ces qualités sont
+plus particulièrement nécessaires et
+où elles font généralement défaut. Le
+but est louable mais ne doit-on pas
+craindre de paralyser ainsi les élans
+généreux de l'enfant et de l'accoutumer
+prématurément à une économie
+qui peut dégénérer en avarice. L'esprit
+d'économie ne se crée pas avec de
+l'argent donné et n'est pas une qualité
+qui se développe dans l'enfance. Nous
+n'attachons de valeur à l'argent que
+s'il représente un salaire, le prix d'un
+travail, s'il nous a coûté quelque peine
+à acquérir; alors seulement nous ne
+le gaspillons pas. On ne suscite pas
+plus dans l'esprit d'un enfant les
+goûts ou les idées de l'âge mûr qu'on
+ne peut lui donner la taille qu'il
+<span class="pagenum"><a id="Page_106"> 106</a></span>
+atteindra à cet âge, et il y a beaucoup
+à parier qu'on produira chez lui des
+déviations morales comme on lui
+tord les jambes en voulant le faire
+marcher trop tôt.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Le <em>bon point</em> est une des récompenses
+fort en usage dans nos établissements
+scolaires. Il y en a de diverses
+sortes et de valeur différentes
+qui composent un système analogue
+à celui de notre monnaie. Récemment
+ils ont été illustrés et représentent
+soit des personnages illustres, soit des
+animaux, des plantes ou des faits historiques.
+D'un côté se trouve l'image,
+de l'autre une biographie ou une explication.
+Cette innovation est bonne.
+Les dessins sont en général convenablement
+exécutés et les notes suffisamment
+<span class="pagenum"><a id="Page_107"> 107</a></span>
+exactes; le seul point
+défectueux est le défaut d'appropriation
+à l'âge et au degré de culture de
+l'enfant; notes et dessins ne sont pas,
+en général, assez simples.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Nous n'avons pas de goût pour les
+<em>croix</em> et en général pour les distinctions
+honorifiques; ce mode de récompense
+ne convient pas à des enfants; il n'est
+pas bon de leur faire singer les hommes,
+de les familiariser avec ce que les
+hommes respectent, car on peut craindre
+d'émousser ainsi le sentiment de
+l'honneur. Si ce sont des récompenses,
+la durée en est trop longue et persiste
+après que la cause de la récompense a
+cessé d'exister; si ce sont des insignes
+qui donnent à l'enfant, parmi ses camarades,
+un rang mérité par le travail
+<span class="pagenum"><a id="Page_108"> 108</a></span>
+ou la conduite, nous leur préférons
+ceux qui sont en usage dans l'armée,
+les galons.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Les bons points servent, dans certains
+cas, <em>d'exemptions</em>, c'est-à-dire de
+moyen de s'exempter des punitions.
+Dans la balance de la justice, la récompense
+et la punition sont choses
+de nature différente et qui ne se
+peuvent faire équilibre. Ce qui ne
+s'ajoute pas ne saurait non plus se
+retrancher. L'exemption a été conquise
+par le travail tandis que la punition
+est la conséquence de la légèreté,
+de la paresse, etc. Il n'y a pas
+là de parité et par conséquent d'échange
+possible, sans blesser le sens
+moral. Toute punition doit être subie.
+Il est permis de regretter qu'un bon
+<span class="pagenum"><a id="Page_109"> 109</a></span>
+élève ait eu un moment de faiblesse,
+mais alors il eût mieux valu ne pas le
+punir.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>L'inscription au <em>tableau d'honneur</em>
+est une forme de l'éloge public; il en
+présente les inconvénients et nous
+semble devoir être écarté comme
+moyen de récompenser. A plus forte
+raison devons-nous redouter les <em>distributions
+solennelles de prix</em>. Le plus
+souvent on voit l'intelligence, le travail
+facile récompensés au détriment
+des efforts sérieux. Ajoutons que la
+présence des parents, leurs exigences
+illégitimes ont complétement faussé le
+caractère de ces cérémonies; ce ne
+sont plus des distributions de prix
+mais des distributions de livres. La
+coutume a passé des établissements
+<span class="pagenum"><a id="Page_110"> 110</a></span>
+privés aux établissements publics. Les
+parents se sentent, avec raison d'ailleurs,
+solidaires de leurs enfants, ils
+sont fiers des succès que ceux-ci remportent,
+ils s'en attribuent une part, et,
+par contre, ils se sentent atteints par
+les insuccès et accusent volontiers les
+maîtres de partialité. Dans les réprimandes
+qu'ils adressent à cette occasion
+aux enfants, on sent la révolte
+de l'amour propre blessé, plus encore
+que tout autre sentiment. Ils veulent
+le succès avant tout, et l'enfant est
+blâmé pour n'avoir pas réussi, lors
+même que sa conduite et son travail
+n'ont rien laissé à désirer. Les maîtres
+ont la faiblesse de sacrifier à ces vues
+étroites: ils multiplient les récompenses,
+et chaque élève, à fort peu
+près, emporte un témoignage sinon de
+satisfaction du maître, au moins de
+contentement pour les parents.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_111"> 111</a></span></p>
+<hr class="c5" />
+
+<p>Un établissement qui jouit d'une
+réputation méritée<a name="FNanchor_35" id="FNanchor_35" href="#Footnote_35" class="fnanchor">[35]</a> a voulu réagir
+contre cette détestable coutume. Nous
+avons dit plus haut qu'à <em>l'École Turgot</em>
+on a mis en pratique le mode
+des récompenses sans avantages matériels
+et des punitions sans châtiments.
+Les unes et les autres se
+bornent à des inscriptions sur le livret
+de l'écolier. Voilà des améliorations
+notables, mais dont il ne faut pas
+pourtant exagérer l'importance.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Dans l'application, nous procéderons
+de la manière suivante:</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_112"> 112</a></span>
+Pour les simples encouragements,
+les notes habituelles suffisent: <em>passable</em>,
+<em>assez bien</em>, <em>bien</em>, <em>très bien</em>,
+écrites ou énoncées. L'accent y ajoutera
+beaucoup; un sourire approbateur
+suffira à l'enfant doux et sensible.</p>
+
+<p>Ces notes pourront être données à
+l'enfant seul ou en présence de toute
+la classe.</p>
+
+<p>Une action très méritoire sera portée
+à l'ordre du jour de l'école, et
+l'éloge en sera fait publiquement
+devant le personnel scolaire tout
+entier.</p>
+
+<p>Une classe tout entière pourra être
+récompensée dans certains cas exceptionnels.</p>
+
+<p>Dans la famille, l'enfant pourra obtenir
+non à cause de son travail mais
+pour la satisfaction qu'il aura donnée
+à ses parents, soit des objets, soit une
+partie de plaisir.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_113"> 113</a></span></p>
+
+<h2 class="p4">APPENDICE</h2>
+<p><a id="Page_114"></a>
+<span class="pagenum"><a id="Page_115"> 115</a></span></p>
+
+<h3><span class="medium">EXTRAIT DU</span><br />
+RÈGLEMENT DES ÉCOLES PRIMAIRES<br />
+<span class="medium">DE LA SEINE</span></h3>
+
+<p class="p2 center">ARTICLE 18</p>
+
+<p>Les punitions admises dans les
+écoles publiques sont:</p>
+
+<p>1<sup>o</sup> Les mauvais points;</p>
+
+<p>2<sup>o</sup> La réprimande;</p>
+
+<p>3<sup>o</sup> La privation partielle de la récréation;</p>
+
+<p>4<sup>o</sup> La retenue après la classe;</p>
+
+<p>5<sup>o</sup> L'imposition d'un court devoir
+supplémentaire dans la famille;</p>
+
+<p>6<sup>o</sup> L'exclusion d'un ou deux jours
+sous la seule responsabilité du directeur
+de l'école. Avis en sera donné à
+<span class="pagenum"><a id="Page_116"> 116</a></span>
+la famille, à l'inspecteur primaire et à
+la mairie.</p>
+
+<p>Dans le cas d'inconduite notoire
+cette peine pourra être portée de deux
+à huit jours avec l'assentiment de l'inspecteur
+primaire. Avis en sera donné
+à la mairie et aux parents.</p>
+
+<p>Cette punition pourra entraîner
+d'urgence pour l'élève le changement
+d'école.</p>
+
+<p>Une exclusion de plus longue durée
+ne pourra être prononcée que par
+l'inspecteur d'Académie.</p>
+
+<hr class="c5" />
+
+<p>Les récompenses sont de deux sortes:</p>
+
+<p>1<sup>o</sup> Les récompenses permanentes
+qui sont mises pendant toute l'année
+à la disposition de l'instituteur:</p>
+
+<p>2<sup>o</sup> Les prix et livrets de la Caisse d'épargne,
+qui sont attribués à la fin de
+l'année scolaire, en distribution solennelle.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_117"> 117</a></span>
+Les récompenses permanentes appelées
+communément «récompenses
+scolaires», consistent en bons points
+de diverses valeurs, images, objets de
+papeterie, etc.</p>
+
+<p>Ces images et objets divers sont
+distribués chaque mois aux élèves en
+échange de bons points qu'ils ont
+obtenus.</p>
+
+<p>Un règlement du 14 juin 1884 détermine
+les conditions dans lesquelles
+s'opère cet échange.</p>
+
+<p class="p2">Les prix donnés en distribution
+solennelle sont choisis de manière à
+intéresser et amuser l'élève tout en
+concourant à son instruction et à son
+éducation morale.</p>
+
+<p>En moyenne, le nombre attribué à
+chaque école est calculé à raison de
+un pour trois élèves; ces prix sont de
+valeurs différentes.</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_118"> 118</a></span></p>
+
+<p class="p2 center">EXTRAIT DU<br />
+<span class="xlarge">PROJET DE RÈGLEMENT</span><br />
+<span class="small">Délibéré en Conseil supérieur</span><br />
+POUR LES LYCÉES ET COLLÈGES</p>
+
+<p class="p2">Les élèves sont autorisés à causer
+entre eux pendant les repas, dans les
+mouvements et pendant les exercices
+gymnastiques. Le bruit ne sera pas
+toléré;</p>
+
+<p>Les punitions auront toujours un
+caractère moral et réparateur. Le piquet,
+les pensums, les privations de
+récréation, sauf l'exception des retenues
+du jeudi et du dimanche prévues
+à l'article suivant, la retenue de promenade
+sont formellement interdits.
+La mise à l'ordre du jour, comme
+peine disciplinaire, est supprimée;</p>
+
+<p>3<sup>o</sup> Les seules punitions autorisées
+sont les suivantes:</p>
+
+<p><span class="pagenum"><a id="Page_119"> 119</a></span>
+<i>a.</i> La mauvaise note;</p>
+
+<p><i>b.</i> La leçon à rapprendre en totalité
+ou en partie;</p>
+
+<p><i>c.</i> Le devoir à refaire en totalité ou
+en partie;</p>
+
+<p><i>d.</i> Le devoir extraordinaire;</p>
+
+<p><i>e.</i> La retenue du jeudi et du dimanche;</p>
+
+<p><i>f.</i> La privation de sortie;</p>
+
+<p><i>g.</i> L'exclusion de la classe ou de
+l'étude;</p>
+
+<p><i>h.</i> L'exclusion temporaire ou définitive
+de l'établissement.</p>
+
+<p><b>. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .</b>
+Les prix et accessits seront décernés
+d'après le total des notes obtenues
+par tous les élèves dans les compositions,
+les compositions finales
+ayant un coefficient double.</p>
+
+<p>Selon le travail des élèves et la
+valeur des compositions, il pourra
+n'être attribué aucun prix, ou, au contraire,
+<span class="pagenum"><a id="Page_120"> 120</a></span>
+en être attribué plus de deux
+dans une faculté donnée.</p>
+
+<p>Tous les élèves ayant bien travaillé
+et convenablement réussi pourront
+être nommés à la distribution des
+prix, à condition d'avoir atteint une
+moyenne déterminée.</p>
+
+<p>Le nom de <em>prix d'excellence</em> est réservé
+à des prix d'ensemble décernés
+aux élèves qui, dans chaque classe
+et chaque division, auront le mieux
+satisfait à tous leurs devoirs.</p>
+
+<p>Le prix d'excellence sera décerné
+par un vote de l'ensemble des maîtres
+de chaque classe et de chaque division.
+Il pourra y avoir un prix distinct
+pour les externes.</p>
+
+<p>Les notes obtenues dans les exercices
+physiques entrent en ligne de
+compte pour le prix d'excellence.</p>
+
+<p class="p2 center small">Tours, imp. Deslis Frères, 6, rue Gambetta.</p>
+
+<hr class="c15 p4" />
+<div class="footnotes"><h2>NOTES:</h2>
+<div class="footnote">
+
+<p><a name="Footnote_1" id="Footnote_1" href="#FNanchor_1"><span class="label">[1]</span></a> <i>Pédagogie égyptienne</i>, note de M. Georges
+Daressy dans la <i>Revue pédagogique</i> (juillet-décembre
+1885).</p>
+
+<p><a name="Footnote_2" id="Footnote_2" href="#FNanchor_2"><span class="label">[2]</span></a> Xénophon, <i>Gouvernement de Sparte</i>.</p>
+
+<p><a name="Footnote_3" id="Footnote_3" href="#FNanchor_3"><span class="label">[3]</span></a> Ainsi il préconise le maillot et l'usage du
+berceau jusqu'à l'excès. Il voudrait que l'enfant
+fût dans son berceau comme dans un navire
+constamment balancé par les vagues.</p>
+
+<p><a name="Footnote_4" id="Footnote_4" href="#FNanchor_4"><span class="label">[4]</span></a> <i>Éducation des enfants</i>, 16.</p>
+
+<p><a name="Footnote_5" id="Footnote_5" href="#FNanchor_5"><span class="label">[5]</span></a> Plaute, <i>les Bacchis</i>, acte 3, scène 4.</p>
+
+<p><a name="Footnote_6" id="Footnote_6" href="#FNanchor_6"><span class="label">[6]</span></a> Ep. I, liv. II.</p>
+
+<p><a name="Footnote_7" id="Footnote_7" href="#FNanchor_7"><span class="label">[7]</span></a> Voir une spirituelle et intéressante étude
+de M. Franck D'Arvert dans la <i>Revue pédagogique</i>
+(juillet 1885). Voir également l'<i>Histoire
+des doctrines de l'éducation</i>, de M. Compayré.</p>
+
+<p><a name="Footnote_8" id="Footnote_8" href="#FNanchor_8"><span class="label">[8]</span></a> L. I, ch. 27.</p>
+
+<p><a name="Footnote_9" id="Footnote_9" href="#FNanchor_9"><span class="label">[9]</span></a> Montaigne (1533-1592), liv. I<sup>er</sup>, chap. <span class="smcap">XXV</span>.</p>
+
+<p><a name="Footnote_10" id="Footnote_10" href="#FNanchor_10"><span class="label">[10]</span></a> (Varet, <i>De l'éducation chrétienne des enfants</i>.)</p>
+
+<p><a name="Footnote_11" id="Footnote_11" href="#FNanchor_11"><span class="label">[11]</span></a> Locke, <i>Pensées sur l'éducation</i>.</p>
+
+<p><a name="Footnote_12" id="Footnote_12" href="#FNanchor_12"><span class="label">[12]</span></a> <i>Traité de l'éducation de Monsg. le Dauphin</i>,
+par Paul Hay du Châtelet.</p>
+
+<p><a name="Footnote_13" id="Footnote_13" href="#FNanchor_13"><span class="label">[13]</span></a> <i>Journal de Dubois</i>, 29 juillet 1671. Bibl.
+de l'école des Chartes, c. 4, 2<sup>e</sup> série.</p>
+
+<p><a name="Footnote_14" id="Footnote_14" href="#FNanchor_14"><span class="label">[14]</span></a> Locke, <i>Quelques pensées sur l'éducation</i>.</p>
+
+<p><a name="Footnote_15" id="Footnote_15" href="#FNanchor_15"><span class="label">[15]</span></a> Pour se convaincre de la facilité avec laquelle
+on glisse de l'usage à l'abus, il suffit de
+lire dans les règlements des Jésuites, des
+Frères, de MM. de Port-Royal, etc., les recommandations
+aux maîtres, les appels à leur
+patience, à leur modération. Il est si naturel
+de se servir d'une arme lorsqu'on la tient à la
+main! Le châtiment corporel a été souvent un
+acheminement vers la torture.</p>
+
+<p><a name="Footnote_16" id="Footnote_16" href="#FNanchor_16"><span class="label">[16]</span></a> Quintilien, <i>Institution oratoire</i>, l. I.</p>
+
+<p><a name="Footnote_17" id="Footnote_17" href="#FNanchor_17"><span class="label">[17]</span></a> La Bruyère, <i>De l'homme</i>, XI.</p>
+
+<p><a name="Footnote_18" id="Footnote_18" href="#FNanchor_18"><span class="label">[18]</span></a> Montaigne, l. I, ch. <span class="smcap">XXV</span>.</p>
+
+<p><a name="Footnote_19" id="Footnote_19" href="#FNanchor_19"><span class="label">[19]</span></a> Rousseau (1712-1778), <i>Émile</i>, livre II.</p>
+
+<p><a name="Footnote_20" id="Footnote_20" href="#FNanchor_20"><span class="label">[20]</span></a> Gréard, <i>de l'esprit de discipline</i>.</p>
+
+<p><a name="Footnote_21" id="Footnote_21" href="#FNanchor_21"><span class="label">[21]</span></a> Id.</p>
+
+<p><a name="Footnote_22" id="Footnote_22" href="#FNanchor_22"><span class="label">[22]</span></a> Rousseau, <i>Émile</i>, livre second.</p>
+
+<p><a name="Footnote_23" id="Footnote_23" href="#FNanchor_23"><span class="label">[23]</span></a> Carré, <i>Les pédagogues de Port-Royal</i>.</p>
+
+<p><a name="Footnote_24" id="Footnote_24" href="#FNanchor_24"><span class="label">[24]</span></a> Le P. Lamy, de l'Oratoire: <i>Entretien sur
+les sciences</i>.</p>
+
+<p><a name="Footnote_25" id="Footnote_25" href="#FNanchor_25"><span class="label">[25]</span></a> M. le docteur Aug. Voisin, médecin à la
+Salpétrière, à Paris, M. le professeur Bernheim,
+et M. le docteur Liébault, de Nancy, ont
+combattu avec succès, chez plusieurs enfants,
+des habitudes vicieuses, la chorée, l'incontinence
+nocturne d'urine, des tics, la grossièreté des
+manières et du langage, la paresse invétérée,
+l'incapacité d'attention, etc.</p>
+
+<p><a name="Footnote_26" id="Footnote_26" href="#FNanchor_26"><span class="label">[26]</span></a> Nous lisons dans le rapport cité plus haut,
+page 16:</p>
+
+<p>«Nous avons cependant fait un pas dans cette
+voie par la création d'une école pour les vagabonds
+incorrigibles et les enfants indisciplinables.
+Nous espérons beaucoup de ce nouvel
+établissement. Nous croyons que quelques semaines
+de séjour, par ordre d'un magistrat, et
+avec le consentement des parents, triompheront
+presque toujours de l'esprit de désordre et prépareront
+l'enfant à suivre les travaux de l'école.
+On évitera ainsi les frais d'un long internat dans
+une école industrielle de répression.» C'est
+précisément à ces enfants, dits incorrigibles,
+et qui ne sont <em>qu'incorrigés</em>, que convient le
+traitement dont nous parlons. Nous le croyons
+préférable au séjour détestable dans la plupart
+des maisons de correction, où on ne corrige
+pas, au contraire.</p>
+
+<p><a name="Footnote_27" id="Footnote_27" href="#FNanchor_27"><span class="label">[27]</span></a> <i>Éducation des filles</i>, chapitre V.</p>
+
+<p><a name="Footnote_28" id="Footnote_28" href="#FNanchor_28"><span class="label">[28]</span></a> M<sup>me</sup> Guizot, <i>Éducation domestique</i>, lettre
+XVIII.</p>
+
+<p><a name="Footnote_29" id="Footnote_29" href="#FNanchor_29"><span class="label">[29]</span></a> Locke, <i>Conseils sur l'Éducation</i>, ch. III,
+§ 1.</p>
+
+<p><a name="Footnote_30" id="Footnote_30" href="#FNanchor_30"><span class="label">[30]</span></a> Locke, <i>Pensées sur l'éducation</i>, chap. III,
+§ 1.</p>
+
+<p><a name="Footnote_31" id="Footnote_31" href="#FNanchor_31"><span class="label">[31]</span></a> Nous ne dirons pas quelles doivent être
+justes pas plus que nous ne l'avons dit à propos
+des châtiments, parce que cela va de soi.</p>
+
+<p><a name="Footnote_32" id="Footnote_32" href="#FNanchor_32"><span class="label">[32]</span></a> Quintilien, l. II, ch. <span class="smcap">II</span>.</p>
+
+<p><a name="Footnote_33" id="Footnote_33" href="#FNanchor_33"><span class="label">[33]</span></a> Coustel, <i>Éducation des enfants</i>, chap. <span class="smcap">IV</span>.</p>
+
+<p><a name="Footnote_34" id="Footnote_34" href="#FNanchor_34"><span class="label">[34]</span></a> Coustel, <i>Éducation des enfants</i>, chap. IV.</p>
+
+<p><a name="Footnote_35" id="Footnote_35" href="#FNanchor_35"><span class="label">[35]</span></a> <i>L'école Alsacienne.</i></p>
+
+<hr class="c15" />
+
+ </div>
+</div>
+
+
+
+
+
+
+
+
+<pre>
+
+
+
+
+
+End of the Project Gutenberg EBook of Petit traité des punitions et des
+récompenses à l'usage des maîtres et des parents, by Félix Hément
+
+*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK PETIT TRAITÉ DES PUNITIONS ***
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+Gutenberg-tm electronic works if you follow the terms of this agreement
+and help preserve free future access to Project Gutenberg-tm electronic
+works. See paragraph 1.E below.
+
+1.C. The Project Gutenberg Literary Archive Foundation ("the Foundation"
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+1.E.8. You may charge a reasonable fee for copies of or providing
+access to or distributing Project Gutenberg-tm electronic works provided
+that
+
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+Project Gutenberg-tm work, and (c) any Defect you cause.
+
+
+Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm
+
+Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of
+electronic works in formats readable by the widest variety of computers
+including obsolete, old, middle-aged and new computers. It exists
+because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from
+people in all walks of life.
+
+Volunteers and financial support to provide volunteers with the
+assistance they need are critical to reaching Project Gutenberg-tm's
+goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will
+remain freely available for generations to come. In 2001, the Project
+Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure
+and permanent future for Project Gutenberg-tm and future generations.
+To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation
+and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4
+and the Foundation web page at http://www.pglaf.org.
+
+
+Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive
+Foundation
+
+The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit
+501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the
+state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal
+Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification
+number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at
+http://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg
+Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent
+permitted by U.S. federal laws and your state's laws.
+
+The Foundation's principal office is located at 4557 Melan Dr. S.
+Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered
+throughout numerous locations. Its business office is located at
+809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887, email
+business@pglaf.org. Email contact links and up to date contact
+information can be found at the Foundation's web site and official
+page at http://pglaf.org
+
+For additional contact information:
+ Dr. Gregory B. Newby
+ Chief Executive and Director
+ gbnewby@pglaf.org
+
+
+Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg
+Literary Archive Foundation
+
+Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide
+spread public support and donations to carry out its mission of
+increasing the number of public domain and licensed works that can be
+freely distributed in machine readable form accessible by the widest
+array of equipment including outdated equipment. Many small donations
+($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt
+status with the IRS.
+
+The Foundation is committed to complying with the laws regulating
+charities and charitable donations in all 50 states of the United
+States. Compliance requirements are not uniform and it takes a
+considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up
+with these requirements. We do not solicit donations in locations
+where we have not received written confirmation of compliance. To
+SEND DONATIONS or determine the status of compliance for any
+particular state visit http://pglaf.org
+
+While we cannot and do not solicit contributions from states where we
+have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition
+against accepting unsolicited donations from donors in such states who
+approach us with offers to donate.
+
+International donations are gratefully accepted, but we cannot make
+any statements concerning tax treatment of donations received from
+outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff.
+
+Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation
+methods and addresses. Donations are accepted in a number of other
+ways including checks, online payments and credit card donations.
+To donate, please visit: http://pglaf.org/donate
+
+
+Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic
+works.
+
+Professor Michael S. Hart is the originator of the Project Gutenberg-tm
+concept of a library of electronic works that could be freely shared
+with anyone. For thirty years, he produced and distributed Project
+Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of volunteer support.
+
+
+Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed
+editions, all of which are confirmed as Public Domain in the U.S.
+unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily
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+
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