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+ <title>The Project Gutenberg eBook of Dictionnaire des calembours, par Le Baron de la Pöinte et le Dr Eugène le Gai.</title>
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+The Project Gutenberg EBook of Dictionnaire des calembours et des jeux de
+mots, lazzis, coqs-à-l'âne, quolibets, quiproquos, amphigouris, etc., by Baron de La Pointe and Eugène Le Gai
+
+This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with
+almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or
+re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included
+with this eBook or online at www.gutenberg.org
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+Title: Dictionnaire des calembours et des jeux de mots, lazzis, coqs-à-l'âne, quolibets, quiproquos, amphigouris, etc.
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+Author: Baron de La Pointe
+ Eugène Le Gai
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+Release Date: June 19, 2009 [EBook #29169]
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+Language: French
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+Character set encoding: ISO-8859-1
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+*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK DICTIONNAIRE DES CALEMBOURS ***
+
+
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+
+Produced by Laurent Vogel, Hugo Voisard, Rénald Lévesque
+and the Online Distributed Proofreading Team at
+http://www.pgdp.net (This file was produced from images
+generously made available by the Bibliothèque Nationale
+de France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr)
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+
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+
+
+
+<br><br>
+
+
+
+
+
+<h4>DICTIONNAIRE</h4>
+
+<h5>DES</h5>
+
+<h1>CALEMBOURS</h1>
+<br><br><br>
+
+<h5>PARIS<br>
+IMPRIMERIE J. CLAYE, RUE SAINT-BENOIT, 7</h5>
+
+<br><br><br>
+
+<h2>DICTIONNAIRE</h2>
+
+<h5>DES</h5>
+
+<h1>CALEMBOURS</h1>
+
+<h5>ET DES</h5>
+
+<h2>JEUX DE MOTS</h2>
+
+<h4>LAZZIS, COQ-À-L'ÂNE, QUOLIBETS, QUIPROQUOS</h4>
+
+<h4>AMPHIGOURIS, ETC.</h4>
+
+<h5>RECUEILLIS</h5>
+
+<h3>PAR LE BARON DE LA POINTE</h3>
+
+<h5>ET</h5>
+
+<h3>LE Dr EUGÈNE LE GAI</h3>
+
+
+<p class="rig">
+Quel genre d'esprit faut-il avoir pour<br>
+deviner un calembour?--Il faut avoir<br>
+l'esprit devin.
+</p>
+<br><br><br><br><br>
+
+<hr class="short">
+
+<br><br><br>
+
+<p class="mid">PARIS<br>
+
+PASSARD, LIBRAIRE-ÉDITEUR<br>
+
+7 RUE DES GRANDS-AUGUSTINS</p>
+<hr class="short">
+<h5>Droits réservés.</h5>
+
+<h4>1860</h4>
+<br><br><br>
+
+
+<h2>DICTIONNAIRE</h2>
+<h5>DES</h5>
+<h1>CALEMBOURS</h1>
+<h5>ET DES</h5>
+<h2>JEUX DE MOTS</h2>
+<h4>LAZZIS, COQ-À-L'ÂNE, POINTES, QUIPROQUOS,</h4>
+<h4>AMPHIGOURIS, ETC.</h4>
+<hr>
+
+<br>
+<h2>A</h2>
+
+<p>On présente en forme d'énigme ce jeu de lettres:--Je
+suis capitaine de vingt-quatre soldats; sans moi
+<i>Paris</i> serait <i>pris</i>.--On comprend que ce capitaine est
+la lettre <i>a</i>.</p>
+
+<p>Quels sont les A les plus respectables?--Ce sont
+les Aloyaux.</p>
+
+<p>Quelles sont les plus vieilles de toutes les lettres?--Les
+lettres A G.</p>
+
+<p>Quelles sont les lettres les plus incommodes?--Les
+lettres A J T.</p>
+
+<h4>ABBÉ</h4>
+
+<p>Il y a, dans le pays wallon, un monsieur l'abbé
+Tise, à qui on conseille de changer de nom.</p>
+
+<p>A B C exprime le sort que doit attendre celui qui
+s'exalte.</p>
+
+<h4>ACCOMPLI</h4>
+
+<p>On critiquait devant un bon curé ses paroissiennes.--Cependant,
+répondit-il, je les vois presque toutes à
+Complies. Voyez <i>Complimenteur</i>.</p>
+
+<h4>ACCOUTUMÉS</h4>
+
+<p>On conduisait un Picard et un Normand à la potence.
+Le Picard pleurait.--Lâche! lui dit le Normand, qui
+ne pleurait pas.--Hélas! répliqua le Picard, nous ne
+sommes pas accoutumés comme vous à être pendus.</p>
+
+<h4>ACROSTICHE</h4>
+
+<p>Celui que nous citons ici offre un gracieux jeu de mots.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16"><b>L</b> ouis est un héros sans peur et sans reproche.</p>
+<p class="i16"><b>O</b> n désire le voir. Aussitôt qu'on l'approche,</p>
+<p class="i16"><b>U</b> n sentiment d'amour enflamme tous les coeurs.</p>
+<p class="i16"><b>I</b> l ne trouve chez nous que des adorateurs.</p>
+<p class="i16"><b>S</b> on image est partout, excepté dans ma poche.</p>
+</div></div>
+
+<p>Le comte de Marcellus, qui était poëte assurément,
+quoique dans les seconds rangs, adressa un jour à
+M. de Bonald un acrostiche dont les premières lettres
+formaient son nom. L'illustre écrivain, sortant de sa
+haute philosophie, lui répondit par un autre acrostiche,
+que voici:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16"><b>M</b> alheur à l'écrivain qui poursuit l'acrostiche!</p>
+<p class="i16"><b>A</b> pollon ne veut pas que ses chers nourrissons,</p>
+<p class="i16"><b>R</b> uminant sans honneur une rime postiche,</p>
+<p class="i16"><b>C</b> ourent avec effort après quelque hémistiche,</p>
+<p class="i16"><b>E</b> t dans ce froid labeur négligent ses leçons.</p>
+<p class="i16"><b>L</b> e dieu du goût, ami, te donna le génie;</p>
+<p class="i16"><b>L</b> e sentiment du beau, la grâce, l'harmonie.</p>
+<p class="i16"><b>U</b> se de ses faveurs, mais n'en abuse pas;</p>
+<p class="i16"><b>S</b> ois Rousseau, sois Horace, et non pas Du Bartas.</p>
+</div></div>
+
+<h4>ADAM</h4>
+
+<p>On a fait à Adam Billaud, plus connu sous le nom
+de maître Adam, menuisier à Nevers, mort en 1662,
+que quelques poésies légères ont rendu célèbre, le petit
+compliment que voici:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Ornement du siècle où nous sommes,</p>
+<p class="i20">Je ne dis rien de vous, sinon</p>
+<p class="i20">Que pour les vers et pour le nom</p>
+<p class="i20">Vous êtes le premier des hommes.</p>
+</div></div>
+
+<p>On appelait aussi maître Adam, <i>le Virgile au rabot</i>.
+Il y avait de son temps, un pâtissier poëte, qui enveloppait
+ses biscuits de ses vers. Ce pâtissier disait que
+si maître Adam travaillait avec plus de bruit, pour lui
+il travaillait avec plus de feu.</p>
+
+<p>Un avocat de Toulouse, nommé Adam, faisait les
+harangues que devait prononcer un président. Cet
+avocat fut obligé de faire un voyage à Paris. Pendant
+son absence le président eut une harangue à faire,
+qu'il composa le mieux qu'il put; comme il la prononçait,
+un conseiller, qui le vit embarrassé, cita ces
+paroles de la Genèse: <i>Adam, ubi es?</i> Où êtes-vous,
+Adam?</p>
+
+<h4>ADORÉS</h4>
+
+<p>En quoi les doreurs sont-ils les plus fortunés des
+humains?</p>
+
+<p>À cette question, lady Stanhope répondit:--Parce
+qu'ils sont toujours <i>à dorer</i>.</p>
+
+<h4>ADMIRATION</h4>
+
+<p>On demandait à des soldats en campagne si on pouvait
+compter sur eux et quel était le thermomètre de
+leur enthousiasme: L'un d'eux répondit:--Nous en
+sommes à <i>la demi-ration</i>.</p>
+
+<h4>ADRESSE</h4>
+
+<p>Un partageux disait en 1848: J'ai envoyé une adresse
+à Caussidière pour l'engager à faire usage de la mienne.--Dans
+quel emploi?--Dans la police politique.--Je
+lui donnerai les adresses de tous les aristos.--Ton
+adresse n'est pas grande. Il fallait t'adresser à
+Sobrier.</p>
+
+<h4>AFFAIRES</h4>
+
+<p>Un homme, souvent gêné, habitait l'entre-sol d'une
+maison dont le rez-de-chaussée était occupé par un
+commissionnaire du Mont-de-Piété. Il y déposait de
+temps en temps ses effets, et disait alors qu'il était au-dessus
+de ses affaires.</p>
+
+<p>Un laboureur demandait un maréchal ferrant. Sa
+femme répondit qu'il était à ferrer.--Affairé, dit le
+bon homme, à quoi donc?--À ferrer les chevaux.</p>
+
+<p>Un fermier général qui, sous l'ancien régime, s'était
+enrichi trop vite, fut chassé de sa place.--On a tort
+de me destituer, dit-il: j'ai fait mes affaires, j'allais
+faire celles de l'État.</p>
+
+<h4>AGITATION</h4>
+
+<p>En 1793, M. Monchenut fut arrêté, dans le faubourg
+Saint-Honoré, comme agitateur.--Il avait quatre-vingts
+ans.--Hélas! dit-il, je ne puis m'agiter moi-même.--Ce
+mot le fit relâcher.</p>
+
+<h4>AIMER</h4>
+
+<p>S'écrit avec deux lettres: ME.</p>
+
+<h4>AÎNÉ</h4>
+
+<p>Quel est de tous les animaux le plus respectable?--C'est
+le mouton, parce qu'il est lainé.</p>
+
+<p>Pourquoi l'aîné d'une famille n'est-il pas ordinairement
+beau?--Parce qu'il est laid-né.</p>
+
+<p>Le mot aîné s'écrit avec deux lettres dans les rébus:
+NE.</p>
+
+<h4>AIR</h4>
+
+<p>Un acteur d'opéra-comique, qui n'avait à paraître
+que dans le dialogue, disait:--C'est singulier, je suis
+là entre deux airs.--Tu t'enrhumeras, lui dit-on.</p>
+
+<p>Dans un moment où l'on venait de siffler une pièce
+intitulée la pièce sans A, Brunet demandait à l'auteur
+de lui faire un vaudeville sans R.</p>
+
+<p>On faisait remarquer à une dame que ses enfants
+avaient l'air tristes et malheureux: «C'est bien vrai,
+répondit-elle; je les fouette toute la journée pour leur
+faire perdre cet air-là, et je ne puis pas y parvenir.»</p>
+
+<p>Deux campagnards se rencontrant dans la rue, l'un
+dit à l'autre qu'il venait d'apercevoir un vent.--Comment!
+apercevoir un vent?--Oui, je l'ai vu, te dis-je.--Et
+quel air avait-il?--Il avait l'air de vouloir
+abattre la cheminée.</p>
+
+<h4>AIRAIN</h4>
+
+<p>Un auteur médiocre et brutal, après avoir donné
+des coups de bâton à un critique qui l'avait maltraité,
+disait:--Il m'a attaqué sur le papier, je lui ai répondu
+sur <i>les reins</i>.</p>
+
+<h4>AIR ÉLÉGANT</h4>
+
+<p>On a <i>l'air et les gants</i>, lorsqu'on porte des gants
+troués.</p>
+
+<h4>ALITÉ</h4>
+
+<p>Un malade étendu sur sa couche disait qu'on négligeait
+un peu trop son <i>individualité</i>.</p>
+
+<h4>ALLER</h4>
+
+<p>On demandait à Fontenelle mourant:--Comment
+cela va-t-il?--Cela ne va pas, répondit-il, cela s'en va.</p>
+
+<p>Le père Bonhours, célèbre grammairien, comme
+on sait, fut attaqué d'une maladie violente qui l'emporta
+en peu de jours. Se trouvant à l'extrémité, il dit aux
+assistants: «Je vas ou je vais bientôt mourir, l'un
+et l'autre se dit ou se disent.»</p>
+
+<h4>ALLIÉS</h4>
+
+<p>Pendant une alliance de l'Angleterre et de l'Autriche,
+on accola deux A dans un cartel, en manière de rébus,
+qui signifiait les A liés.</p>
+
+<h4>ALLUSION</h4>
+
+<p>Un général, qui avait été battu en Allemagne et en
+Italie, aperçut un jour, au-dessus de sa porte, un tambour
+qu'on y avait peint, avec cette devise: «On me
+bat des deux côtés.»</p>
+
+<h4>ALTÉRÉE</h4>
+
+<p>Ma santé est bien altérée, disait un vieux viveur.--Quelqu'un
+lui répondit:--Faites-la boire.</p>
+
+<h4>ALTESSE</h4>
+
+<p>«Je me suis trouvé, disait un quaker, avec une
+excellence et une altesse. On ne saurait être plus bête
+que son excellence, et son altesse n'avait pas quatre
+pieds huit pouces.»</p>
+
+<h4>AMENDE</h4>
+
+<p>Un homme, condamné à une amende qu'il croyait
+injuste, disait:--C'est une amende amère!</p>
+
+<p>Un autre, obligé à réparer un scandale, s'écriait:--Voilà
+une amende honorable qui ne m'honorera guère.</p>
+
+<h4>AMER</h4>
+
+<p>Quel est le fleuve le plus éloigné de la mer?--C'est
+le Doubs.</p>
+
+<h4>AMIS</h4>
+
+<p>On parlait de la rareté des amis et du peu de fond
+qu'on peut faire sur ceux qui usurpent ce titre.--Comment!
+dit un interlocuteur bienveillant,
+n'avez-vous pas tous, dans votre cuisine, un petit tamis
+dont vous êtes sûr?</p>
+
+<p>Madame de Sévigné appelait les amis de ses amis, et
+qui n'étaient pour elle à proprement parler que des
+connaissances, des amis par réverbération.</p>
+
+<p>Un gentilhomme de Morges, passant devant la poste
+aux lettres de ce pays, appela le directeur, et lui dit,
+d'un ton impoli: «L'ami, n'y a-t-il rien pour moi?</p>
+
+<p>--Non, l'ami, il n'y a rien pour toi.</p>
+
+<p>--Et depuis quand, s'il vous plaît, ce ton de familiarité?</p>
+
+<p>--Depuis que nous sommes amis.»</p>
+
+<p>Non-seulement nous avons des amis en foule et
+nous en trouvons partout, mais il n'y a pas même de
+nom plus prodigué, plus prostitué que celui d'ami:
+il devient souvent dans notre langue un terme de familiarité
+ou de mépris.</p>
+
+<p>--Mon ami, dit-on à un postillon, je te donne un
+écu si tu me mènes en une heure à Versailles.</p>
+
+<p>--Mon ami, dit un passant à un polisson, vous
+irez au corps de garde si vous faites du train.</p>
+
+<p>--Mon ami, dit un juge à un fripon, vous êtes acquitté
+cette fois faute de preuves: mais si vous continuez,
+vous serez pendu.</p>
+
+<p>N'entendez-vous pas souvent un homme, pour
+affirmer une nouvelle, dire: «Je la tiens d'un de mes
+amis, <i>que je connais beaucoup</i>.»</p>
+
+<p>Un jour, au Palais-Royal, le chevalier de C*** avait
+gagné 1,500 louis qu'il tenait dans un chapeau. Quelqu'un
+s'approche et lui dit: «Mon cher ami, de grâce
+prêtez-moi 100 louis.--Je le veux bien, mon cher
+ami, répondit le chevalier, pourvu que vous me disiez
+comment je m'appelle.» L'autre demeurant sans réponse
+à cette question: «Vous voyez bien, mon cher
+ami, reprit le chevalier, que vous seriez trop embarrassé
+pour trouver le moyen de me rendre ces 100
+louis, si je vous les prêtais.»</p>
+
+<h4>AMPHIGOURI</h4>
+
+<p>En voici un modèle en vers:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Un jour qu'il faisait nuit, je dormais éveillé,</p>
+<p class="i16">Tout debout dans mon lit, sans avoir sommeillé,</p>
+<p class="i16">Les yeux fermés, je vis le tonnerre en silence</p>
+<p class="i16">Par des éclairs obscurs annoncer sa présence.</p>
+<p class="i16">Tout s'enfuit, nul ne bouge, et ce muet fracas</p>
+<p class="i16">Me fit voir en dormant que je ne dormais pas.</p>
+</div></div>
+
+<p>En prose, on cite celui-ci d'un jeune paysan:</p>
+
+<p>«Il en avait de beaux, mon grand'père, des couteaux,
+quand il vivait, dans une gaîne, Dieu veuille
+avoir son âme, pendue à sa ceinture.»</p>
+
+<h4>AMUSER</h4>
+
+<p>Le fils d'un paysan, qui se mourait, alla chercher
+son curé pour l'assister; il était une heure du matin.
+Le pauvre garçon resta deux grandes heures à la porte,
+l'appelant tout doucement, de peur de l'éveiller brusquement.</p>
+
+<p>Quand le curé se leva et qu'il apprit la chose:--Mais,
+mon enfant, lui dit-il, votre père à présent
+sera mort.--Oh! non, monsieur le curé, Pierrot, notre
+voisin, m'a promis qu'il l'amuserait jusqu'à votre
+arrivée.</p>
+
+<h4>ÂNE</h4>
+
+<p>Il y a eu, à Paris, sous le premier empire, une société
+littéraire qui s'intitulait la Société des ânes.
+Chaque membre était <i>membrâne</i>. Un épicier était l'âne
+à gramme, un bourgeois dont la femme s'appelait
+Lise, l'âne à Lise; un professeur l'âne à thème, un
+compilateur l'ânalecte, un rhéteur l'âne à logique,
+un médecin l'âne à peste, etc.</p>
+
+<p>Ces messieurs tenaient leurs séances à Montmartre.</p>
+
+<p>Un jour, au commencement du consulat, quatre
+officiers généraux occupaient une loge à l'Opéra. C'étaient
+Bonaparte, Kilmène, Le Meunier et Lannes,
+depuis duc de Montebello. Un curieux demandait qui
+étaient ces messieurs, à son voisin qui lui répondit:
+«Lannes, Le Meunier, Kilmène et Bonaparte.»</p>
+
+<p>Napoléon avait un faible pour les calembours. Il
+lui vint un jour une députation nombreuse de la ville
+de Sézane, qui demandait un sous-préfet. Quand on
+la lui annonça, il répondit de sorte qu'on entendît:
+«Laissez entrer ces ânes.»</p>
+
+<p>On sait qu'en organisant l'empire il nomma gouverneur
+des pages le général Gardane.</p>
+
+<p>Beffroy de Reigny a publié la chanson suivante,
+adressée à sa soeur Anne pour sa fête. Elle se chante
+sur l'air des fraises:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Je fus jadis moissonneur</p>
+<p class="i16">Au Parnasse, où je glane;</p>
+<p class="i16">Y trouverai-je une fleur</p>
+<p class="i16">Pour en parer de bon coeur</p>
+<p class="i20"> Une Anne? (<i>ter.</i>)</p>
+<br>
+<p class="i16">Dis-moi pour quelle raison,</p>
+<p class="i16">Ma soeur, tu me condamnes,</p>
+<p class="i16">À cause de ton prénom,</p>
+<p class="i16">À devenir l'Apollon</p>
+<p class="i20"> Des Annes? (<i>ter.</i>)</p>
+<br>
+<p class="i16">Il est vrai qu'en ce pays,</p>
+<p class="i16">Tout peuplé de profanes,</p>
+<p class="i16">J'ai vu cent paniers fleuris,</p>
+<p class="i16">Et j'ai dit: Oh! dans Paris</p>
+<p class="i20"> Que d'Annes! (<i>ter.</i>)</p>
+<br>
+<p class="i16">Mais toi, voulant prévenir</p>
+<p class="i16">Les mauvaises chicanes,</p>
+<p class="i16">Tu pris ce nom à plaisir</p>
+<p class="i16">Pour nous forcer à chérir</p>
+<p class="i20"> Les Annes (<i>ter.</i>)</p>
+</div></div>
+
+<h4>ÂNERIES SIMULÉES</h4>
+
+<p>Il y a longtemps que je cherchais à m'expliquer
+pourquoi on met plutôt un coq qu'une poule au haut
+d'un clocher et je crois l'avoir trouvé, disait un bedeau
+farceur; c'est que si l'on y mettait une poule et qu'elle
+vînt à pondre, les oeufs se casseraient peut-être.</p>
+
+<h4>ÂNONS</h4>
+
+<p>On dénonça, en 1790, le couvent de la place Maubert
+comme détenant cinq canons et vingt-cinq armes.
+Une perquisition fut décrétée; et on trouva dans la
+maison <i>vingt-cinq carmes et cinq ânons</i>.</p>
+
+<h4>ANNÉE</h4>
+
+<p>Des Limousins fort simples, et qui croyaient que
+rien n'était impossible au Saint-Siége, demandaient à
+un pape, qui était de leur nation, qu'il leur accordât
+deux récoltes de blé dans une année.--Je le veux bien,
+répondit le pape, et de plus vos années auront dorénavant
+vingt-quatre mois.</p>
+
+<h4>AOÛT</h4>
+
+<p>Un prince allemand croyait qu'Augustus ne se traduisait
+jamais en français que par Août. En conséquence,
+quand il parlait dans notre langue du roi de
+Pologne Auguste, il ne l'appelait jamais que le roi
+Août.</p>
+
+<h4>APPARTEMENT</h4>
+
+<p>Si vous voulez avoir chaud à peu de frais, en hiver,
+dans votre appartement, achetez une statuette en
+plâtre du premier consul Bonaparte; cassez-lui un
+bras, et vous aurez <i>un Bonaparte manchot</i>.</p>
+
+<h4>APPELER</h4>
+
+<p>Un Européen se promenant sur les bords du Mississipi
+qui, comme on sait, est très-rapide, demanda à
+un passant comment on appelait ce fleuve.--Ma foi,
+Monsieur, lui répondit le rustre, il n'y a pas besoin
+de l'appeler, il vient déjà assez vite.</p>
+
+<h4>APPÉTIT</h4>
+
+<p>Un muet qui mourait de faim exprimait sa détresse
+par deux lettres, un <i>G</i> grand et un <i>a</i> petit.</p>
+
+<h4>APPLICATION</h4>
+
+<p>On a appliqué aux médecins ce passage de l'Écriture
+sainte: <i>Non mortui laudabunt te</i>. Les morts ne chanteront
+pas vos louanges.</p>
+
+<h4>APPRÉCIATION</h4>
+
+<p>Farinelli de musicien était devenu favori du roi
+d'Espagne Ferdinand VI, fils de Philippe V. Cafarelli,
+autre musicien, disait «que Farinelli était ministre et
+le méritait bien, car il était la plus belle voix de l'univers.»</p>
+
+<h4>AQUEUX</h4>
+
+<p>Dans le temps du choléra, on défendait les légumes
+aqueux.--Nous mangeons pourtant de l'oseille, dit
+une dame. Mais ça a des queues si petites!</p>
+
+<h4>ARAIGNÉE</h4>
+
+<p>À cet hémistiche du <i>Siége de Paris</i>, tragédie de
+M. le vicomte d'Arlincourt:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">On m'appelle <i>à régner</i>...</p>
+</div></div>
+
+<p>Une voix du parterre cria: «C'est un vilain nom.»</p>
+
+<h4>ARGOT</h4>
+
+<p>Chaque profession a son argot et chaque métier son
+vocabulaire. Le transport de cette langue spéciale hors
+de sa sphère produit un singulier effet.</p>
+
+<p>Quinault était fils d'un boulanger; ce qui a donné
+lieu à cette tirade de Furetière, qui ne l'aimait pas:
+«Quinault est la meilleure pâte d'homme que Dieu
+ait jamais faite; il oublie généreusement les outrages
+qu'il a soufferts de ses ennemis, et il ne lui en reste
+aucun levain sur le coeur. Il a eu quatre ou cinq cents
+mots de la langue, pour son partage, qu'il blute, qu'il
+sasse et ressasse, et qu'il pétrit le mieux qu'il peut.»</p>
+
+<h4>ARLEQUIN</h4>
+
+<p>Le célèbre médecin Silva, mort à Paris en 1742, fut
+appelé près d'un malade consumé d'une bile noire.
+«Je vous conseille, Monsieur, lui dit-il, d'aller voir
+Arlequin; c'est le meilleur moyen de dissiper votre
+bile.» Malheureusement le malade était le seul homme
+peut-être qui ne pouvait user du remède. C'était Arlequin
+lui-même.</p>
+
+<h4>ARRÊTÉ</h4>
+
+<p>Un jour d'hiver, en 1856, un voyageur attardé arriva
+de nuit dans une auberge de Privas. L'hôte, qui le
+connaissait, lui ayant demandé comment il se faisait
+qu'il arrivât si tard, il répondit qu'il avait été arrêté
+en traversant les montagnes de l'Ardèche. Là-dessus,
+il soupa, se coucha et défendit qu'on le réveillât sous
+aucun prétexte, parce qu'il était fatigué et voulait
+dormir.</p>
+
+<p>Cependant, le bruit de son aventure se répandit
+dans le voisinage: on s'effraya de savoir que les voyageurs
+pouvaient être arrêtés si près de la ville; la
+gendarmerie prit les armes, et alla en patrouille sur
+la route qu'avait suivie le voyageur.</p>
+
+<p>La nuit s'écoula en recherches inutiles; on ne trouva
+pas le moindre brigand. Le lendemain, comme le
+voyageur arrêté se chauffait tranquillement au coin du
+feu de l'auberge, le brigadier de gendarmerie entra:</p>
+
+<p>--Monsieur, lui dit-il, combien étaient-ils?</p>
+
+<p>--Qui?</p>
+
+<p>--Ceux qui vous ont demandé la bourse ou la vie.</p>
+
+<p>--Personne ne m'a demandé la bourse ou la vie.</p>
+
+<p>--Quoi! vous ne vous êtes donc pas plaint d'avoir
+été arrêté dans la journée d'hier?</p>
+
+<p>--J'ai été arrêté en effet.</p>
+
+<p>--Par des voleurs?</p>
+
+<p>--Non, par un ruisseau débordé qui m'a forcé de
+faire un très-long détour.</p>
+
+<p>--Monsieur, il fallait le dire.</p>
+
+<p>--Il fallait me le demander.</p>
+
+<p>ARROGANCE</p>
+
+<p>On en accuse les passementiers. Mais s'ils mettent
+de l'<i>art aux ganses</i>, c'est qu'il le faut.</p>
+
+<h4>ART</h4>
+
+<p>Comment les voleurs et les guerriers sont-ils dans la
+classe des artistes?--C'est que les premiers cultivent
+l'<i>art goth</i> et les seconds l'<i>art mûr</i>.</p>
+
+<h4>ASNIÈRES</h4>
+
+<p>Dans tous les recueils facétieux on ne manque pas
+de citer les expressions singulières et les naïvetés d'un
+personnage probablement composite qu'on appelle le
+baron d'Asnières. Nous ne pouvons nous dispenser de
+rapporter ici ce qu'elles ont de plus saillant.</p>
+
+<p>Il demandait un jour à un jeune homme quel était le
+plus âgé de son aîné ou de lui.</p>
+
+<p>Un de ses fermiers se plaignait de ce que les taupes
+lui gâtaient un beau pré.--Vous êtes bien embarrassé,
+répondit-il; faites-le paver.</p>
+
+<p>En voyage, il fut obligé de s'arrêter dans une
+auberge pour y coucher. On lui donne une chambre
+dont les cloisons étaient presque entr'ouvertes: il s'en
+plaignit à l'hôtesse.--Cela est détestable, dit-il, votre
+chambre est la plus mauvaise du monde; on y voit
+le jour toute la nuit.</p>
+
+<p>Un jour il se coupa le doigt, et s'écria:--On me
+l'avait bien dit que ce couteau coupait tout ce qu'il
+voyait!</p>
+
+<p>On lui contait d'un savant qu'il possédait huit
+langues.--Celui-là, répondit-il, doit parler beaucoup.</p>
+
+<p>Il demanda un jour si les chiens du roi allaient à
+pied à la chasse.</p>
+
+<p>Dans une société il entend annoncer qu'il était arrivé
+deux vaisseaux chargés de Terre-Neuve: il demanda
+si la vieille n'était pas aussi bonne.</p>
+
+<p>Une dame, près d'un feu clair, racontait une histoire.
+Une étincelle vola sur sa robe, et elle ne s'en
+aperçut que lorsque le feu eut fait des progrès.--Je
+le voyais, Madame, dit-il, mais je ne voulais pas
+avoir l'impolitesse d'interrompre votre récit.</p>
+
+<p>Quelqu'un lui contant qu'il avait dîné avec un poëte
+qui l'avait régalé au dessert d'une excellente épigramme,
+il fit venir son cuisinier et lui dit en colère:
+--D'où vient que tu ne m'as pas encore servi une
+épigramme?</p>
+
+<p>Quelqu'un lui ayant annoncé qu'un de ses amis
+était mort, il répondit:--Je n'en crois rien, car si
+cela était, il me l'aurait écrit.</p>
+
+<p>Il dînait, un jour de carême, chez un de ses amis.
+On servit des harengs saurs. Il les trouva si bons, qu'il
+demanda où il pourrait en avoir pour peupler ses
+étangs.</p>
+
+<h4>ASSONANCES</h4>
+
+<p>On en faisait assez du temps de Louis XVI. M. Gozlan
+en a fait d'agréables. En voici un exemple emprunté
+à l'un des spirituels écrivains de la <i>Gazette des Tribunaux</i>:</p>
+
+<p>La femme Dagobert a mis son bonnet à l'envers. Un
+vieux châle vert, placé de travers, un jupon presque
+blanc composent son accoutrement. Le président lui dit:</p>
+
+<p>--Avant-hier, quelqu'un vous vit, marché des Innocents,
+demander l'aumône aux passants.</p>
+
+<p>--Mais...</p>
+
+<p>--C'est un délit; la loi l'interdit.</p>
+
+<p>--Alors que la loi me donne de quoi! Mon coeur
+reconnaissant bénira le gouvernement.</p>
+
+<p>--Avez-vous des enfants?</p>
+
+<p>--J'en ai zévu trois dans le temps.</p>
+
+<p>--Où sont-ils?</p>
+
+<p>--Mais ils sont où tous les défunts s'en vont.</p>
+
+<p>--Et votre mari?</p>
+
+<p>--Le pauvre homme aussi. Je n'ai pour soutien que
+la charité des chrétiens.</p>
+
+<p>Chacun plaint de concert la pauvre femme Dagobert,
+et le tribunal du Code pénal usant sagement dans
+son jugement, applique seulement quatre jours d'emprisonnement.</p>
+
+<p>Il est près de Paris, dans la ville de Saint-Denis, un
+lieu destiné à tous les infortunés. Après sa prison, dans
+cette maison, la vieille aura gratis un lit, la soupe et
+du pain bis.</p>
+
+<h4>ATHÉE</h4>
+
+<p>Un traité des preuves de l'existence de Dieu a paru
+en 1845, avec la signature A. T.</p>
+
+<h4>ATOUT</h4>
+
+<p>Quand faut-il jouer pour être heureux aux cartes?--Quand
+on est enrhumé, parce qu'on a toujours de
+la toux.</p>
+
+<h4>ATTRAPER</h4>
+
+<p>Savez-vous, dit Dasnières, une bonne manière d'attraper
+les pies?</p>
+
+<p>--Il y a plus d'une manière de les attraper: les
+lacets, la glue, les appâts; que sais-je encore!</p>
+
+<p>--Vieux moyens; voici ma méthode: je mets un
+fromage dans mon jardin, un fromage à la pie. L'oiseau
+vient et mange le fromage. Le lendemain, nouveau
+fromage, nouveau régal. La pie s'y habitue. Le troisième
+jour, je ne mets rien; la pie vient, croyant
+trouver un fromage: votre serviteur! Elle est attrapée.</p>
+
+<h4>AUDITEUR</h4>
+
+<p>Un benêt, qui avait acheté une charge d'auditeur à
+la cour des comptes, étant au sermon, se levait et faisait
+une inclination toutes les fois que le prédicateur
+disait: Mon cher auditeur.</p>
+
+<h4>AUTOMATE</h4>
+
+<p>Un plaisant disait que sa cuisinière était aussi habile
+que Vaucanson, puisqu'elle faisait des canards aux
+tomates.</p>
+
+<h4>AVALER</h4>
+
+<p>Un médecin, ayant écrit une ordonnance, la donna
+au malade en disant:--Voilà ce que vous avalerez,
+demain matin.</p>
+
+<p>Le malade prit le papier du médecin, l'avala, et
+guérit.</p>
+
+<h4>AVENT</h4>
+
+<p>Quel est le jour de l'année qui n'en suit pas un
+autre?--L'Avent.</p>
+
+<h4>AVEUGLE</h4>
+
+<p>Il y a quelques mois, la princesse Mathilde avait
+commandé son portrait à l'un de nos peintres les plus
+distingués.</p>
+
+<p>Heureuse d'échapper, pendant quelques instants, au
+cérémonial et à l'étiquette, joyeuse de pouvoir se promener
+librement, comme une simple jolie femme, dans
+les environs des Tuileries, la princesse se rendait chaque
+matin, à pied, dans l'atelier de l'artiste privilégié.
+Un jour en traversant le pont des Arts, elle entendit
+une voix lamentable qui criait:</p>
+
+<p>--Ma belle dame charitable, ayez pitié d'un pauvre
+aveugle, s'il vous plaît.</p>
+
+<p>Un pauvre diable assis sur un banc du pont, tenant
+entre ses jambes un chien qui tendait une sébile,
+implorait la charité publique. La princesse jeta dans
+la sébile une pièce blanche et passa. Le lendemain
+matin, même don;--pendant plusieurs jours, même
+jeu. Mais un matin, la princesse distraite oubliait en
+passant de faire son aumône, lorsqu'une voix connue
+lui dit:--Eh quoi! madame la princesse oublie aujourd'hui
+son pauvre aveugle!...</p>
+
+<p>La princesse étonnée s'arrête et interroge le mendiant,
+qui se tenait debout en la regardant respectueusement.--Vous
+me connaissez donc, mon brave
+homme?--Ah! oui, Madame, vous donnez la pièce
+chaque matin. Et quand on vous a vue une fois, vous
+êtes si belle qu'on ne vous oublie pas.--Mais comment
+pouvez-vous le savoir, puisque vous êtes aveugle?--Oh!
+madame la princesse, ce n'est pas moi qui suis
+aveugle! C'est mon pauvre chien... Je dis: Donnez
+pour le pauvre aveugle!...</p>
+
+<p>On demandait à Aristote pourquoi on avait tant
+d'amour pour la beauté; il répondit: Voilà la question
+d'un aveugle.</p>
+
+<h4>AVIS</h4>
+
+<p>Odry fut arrêté un soir, rue de Richelieu, devant la
+Bibliothèque impériale.--La bourse ou la vie! lui
+demanda le voleur.--Sans se déconcerter, Odry lui
+répondit:--La Bourse, au bout de la première rue à
+droite. Quant à l'avis, le meilleur que je puisse vous
+donner, c'est de prendre un métier moins couru.</p>
+
+<h4>AVOIR</h4>
+
+<p>Un homme d'esprit disait en 1848:--Depuis cinquante
+ans la France fait, défait, refait et redéfait.</p>
+
+<p>Jusqu'à présent nous n'avons pas encore la République,
+c'est la République qui nous a.</p>
+
+<h4>À VUE</h4>
+
+<p>Un fripon se tira des instances qu'on lui faisait pour
+payer une dette dont il ne s'occupait pas, en donnant
+à son créancier une traite à vue sur un de ses amis
+qui le valait.--Or cet ami était aveugle. Quand on
+lui présenta la traite:--Elle est à vue? dit-il; si vous
+voulez que je la paie, faites-moi voir.</p>
+
+<br>
+<h2>B</h2>
+
+<h4>BADAUD</h4>
+
+<p>L'expression de badaud qu'on applique aux Parisiens
+comme une injure, vient, dit-on, d'un mot celtique
+qui signifie batelier, parce que les Parisiens
+faisaient autrefois un grand commerce par eau. La
+ville de Paris porte même un navire pour armoiries.</p>
+
+<p>Journel, qui était l'imprimeur de Ménage, ne voulait
+pas imprimer ce que l'auteur avait écrit sur la badauderie
+des Parisiens, ce qui inspira à Ménage ces quatre
+vers:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20"> De peur d'offenser sa patrie,</p>
+<p class="i16">Journel, mon imprimeur, digne enfant de Paris,</p>
+<p class="i16">Ne veut rien imprimer sur la badauderie.</p>
+<p class="i20"> Journel est bien de son pays.</p>
+</div></div>
+
+<h4>BAL</h4>
+
+<p>Un fournisseur envoyant des caisses de schakos à
+l'armée, disait:--Voilà des coiffures qui vont aux
+balles.</p>
+
+<h4>BANQUEROUTE</h4>
+
+<p>Le nègre du bailli J***, entendant dire à la table de
+son maître que quand on faisait banqueroute, on ne
+donnait tout au plus que la moitié de ce qu'on devait,
+résolut d'en faire son profit; il vola toute la vaisselle,
+qui était considérable, et la renferma dans un coffre
+qu'il descendit dans un vieux puits où il n'y avait pas
+d'eau. On chercha longtemps et l'argenterie et le
+nègre; enfin on le découvrit au fond du puits, assis
+sur le coffre.--Que fais-tu là avec ma vaisselle? lui demanda
+son maître.--Monsieur, je fais banqueroute,
+moitié pour vous, moitié pour moi.</p>
+
+<h4>BARBARISME</h4>
+
+<p>On demandait à une dame comment elle se portait.--Oh!
+répondit-elle, je souffre beaucoup d'un rhumatisse.--En
+ce cas-là, Madame, lui dit-on, faites beaucoup
+d'exercisme.</p>
+
+<h4>BAS</h4>
+
+<p>On dit que les bonnetiers doivent être discrets,
+parce qu'ils ont coutume de parler bas.</p>
+
+<h4>BAS LONGS</h4>
+
+<p>On demandait à quelqu'un à quoi servaient les ballons.
+Il entendit mal et répondit:--À chausser les
+grandes jambes.</p>
+
+<h4>BASSE-COUR</h4>
+
+<p>Sur le costume prescrit aux magistrats en 1790, on
+fit l'épigramme suivante:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Au lieu de robe et de simarre,</p>
+<p class="i16">Accoutrement lourd et bizarre,</p>
+<p class="i20"> Dont s'affublaient nos anciens sénateurs,</p>
+<p class="i20"> Un décret veut que les nouveaux jugeurs,</p>
+<p class="i20"> En manteaux courts, en pourpoints lestes,</p>
+<p class="i16">Au métier de Cujas soient plus prompts et plus prestes.</p>
+<p class="i16">Puis supprimant encore et bonnets et mortiers,</p>
+<p class="i16">Attributs surannés des Molés, des Séguiers,</p>
+<p class="i16">L'ordonnance prescrit pour moderne costume</p>
+<p class="i16">Que ces dandins auront à la toque une plume.</p>
+<p class="i16">Tels emplumés, je crois, pourront avoir un jour,</p>
+<p class="i16">Aux yeux de bien des gens, un air de basse-cour.</p>
+</div></div>
+
+<h4>BATISTE</h4>
+
+<p>On donnait un jour au Théâtre-Français une pièce
+où jouait la famille Batiste. Un provincial s'informait
+des noms des acteurs:--Eh! quel est celui-là?--Batiste
+aîné, lui répondit-on.--Et celui-là?--Batiste
+cadet.--Et celui-là?--Batiste jeune.--Et cette actrice?--C'est
+Mme Batiste mère.--Et celle-ci?--C'est
+Mme Batiste bru. Ah mon Dieu! s'écria le provincial,
+c'est donc là une pièce de batiste.</p>
+
+<h4>BATTERIE</h4>
+
+<p>Le marquis de Bièvre regardait deux marmitons
+qui se boxaient, et quelqu'un lui ayant demandé ce
+que c'était que ce bruit:--Ce n'est rien, répondit-il,
+c'est une batterie de cuisine.</p>
+
+<h4>BAVAROISE</h4>
+
+<p>Quand le prince Eugène de Beauharnais obtint la
+main d'une princesse de Bavière, un soldat disait:--C'est
+un bel homme et un grand coeur. C'est dommage
+qu'il n'ait plus de dents.--Bah! dit un autre,
+on n'a pas besoin de dents pour prendre une bavaroise.</p>
+
+<h4>BAZIRE ET CHABOT</h4>
+
+<p>Relation d'une aventure de 1791:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Un jour, chez un bourgeois, Bazire</p>
+<p class="i16">S'en fut diner avec Chabot.</p>
+<p class="i16">Chabot recommandait Bazire,</p>
+<p class="i16">Bazire patronait Chabot;</p>
+<p class="i16">On reçut assez bien Bazire;</p>
+<p class="i16">Mais on lui préféra Chabot.</p>
+<p class="i16">Si bien que le brillant Bazire</p>
+<p class="i16">Arracha la barbe à Chabot.</p>
+<p class="i16">Et la crinière de Bazire</p>
+<p class="i16">Resta dans les mains de Chabot.</p>
+<p class="i16">Les coups de poing du sieur Bazire</p>
+<p class="i16">N'empêchaient pas ceux de Chabot.</p>
+<p class="i16">Pour séparer le doux Bazire</p>
+<p class="i16">D'avec le vertueux Chabot,</p>
+<p class="i16">Le maître du lieu prit Bazire,</p>
+<p class="i16">Ses gens empoignèrent Chabot;</p>
+<p class="i16">Par la rampe on jeta Bazire</p>
+<p class="i16">Et par la fenêtre Chabot.</p>
+<p class="i16">Depuis ce temps, Monsieur Bazire</p>
+<p class="i16">Dit du mal de Monsieur Chabot;</p>
+<p class="i16">A son tour de Monsieur Bazire</p>
+<p class="i16">Médit l'ex-capucin Chabot.</p>
+<p class="i16">Mais en voyant Monsieur Bazire,</p>
+<p class="i16">Ainsi que son ami Chabot,</p>
+<p class="i16">On dit que Chabot vaut Bazire</p>
+<p class="i16">Et que Bazire vaut Chabot.</p>
+</div></div>
+
+<h4>BEAU</h4>
+
+<p>Les paysans futés aiment à faire ce compliment:
+Vous êtes <i>beau dès</i> le matin, <i>beau su'</i> le midi, <i>encore
+beau</i> le soir.</p>
+
+<p>Le gendre d'un de nos représentants de 1848, que
+nous ne voulons pas chagriner en le nommant, disait:--J'ai
+une belle-mère qui n'est pas belle et un
+beau-père qui est bien laid.</p>
+
+<h4>BELLE LUNE</h4>
+
+<p>Le maréchal Victor avait débuté en simple soldat
+dans la carrière qu'il a illustrée; et lorsqu'il fit ses
+premières campagnes, ses camarades ne le connaissaient
+que sous le sobriquet de Beausoleil. Quand l'empereur
+Napoléon l'eut nommé maréchal de l'Empire,
+il l'appela et lui dit:--Beausoleil, je te fais duc de
+Bellune.</p>
+
+<h4>BÉTANCOUR</h4>
+
+<p>M. de Bétancour, qui logeait près du Louvre, avait
+beaucoup à se plaindre des blanchisseuses voisines qui,
+avec leurs battoirs sans cesse en mouvement, l'empêchaient
+de dormir. Une fois, outré de colère, il s'écria:--Si
+je ne me retenais pas, j'irais mettre le feu
+à la rivière.</p>
+
+<p>Un jour, voyant un homme qui louchait en lisant:--Cet
+homme-là, dit-il, doit être doublement savant,
+car il lit deux pages à la fois.</p>
+
+<p>Il tomba malade; son médecin lui ayant demandé
+s'il n'avait rien pris dans la journée:--Pardon, répondit-il,
+j'ai pris ce matin une puce.</p>
+
+<h4>BEETHOVEN</h4>
+
+<p>Pourquoi les sangsues passent-elles pour musiciennes?--Parce
+qu'elles font des ouvertures de <i>bête
+aux veines</i>.</p>
+
+<h4>BÊTISES</h4>
+
+<p>On ferait sous ce titre bien des volumes. Une des
+plus grosses, dans le bêtisiana moderne, est le compliment
+que Victor Hugo fit tout haut à Louis-Philippe,
+dans une réception officielle:--Sire, Dieu a
+besoin de vous...</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">On vient de perdre un jeune chien</p>
+<p class="i20">Lequel n'avait ni queue ni tête.</p>
+<p class="i20">Ceux qui l'ont trouvé n'auront rien.</p>
+<p class="i20">C'est une récompense honnête,</p>
+<p class="i20">Sans queue aussi bien que sans tête.</p>
+</div></div>
+
+<h4>BIEN FAIT</h4>
+
+<p>Un prédicateur disait en chaire que tout ce que
+Dieu a fait est bien fait.--Voilà, pensa un bossu, une
+parole hasardée. Il attend le prédicateur à la porte de
+l'église, et lui dit:--Mon père, vous avez prêché
+que Dieu a bien fait toutes choses. Voyez donc comme
+je suis bâti!--Mais, mon ami, répond le prédicateur,
+vous êtes bien fait pour un bossu.</p>
+
+<h4>BIÈRE</h4>
+
+<p>De vieux littérateurs de l'Empire ont appelé le cercueil
+de Napoléon <i>la bière de Mars</i>.</p>
+
+<p>Un brasseur parisien, du temps du calendrier républicain,
+appelait sa bière de Mars <i>bière de Germinal</i>.</p>
+
+<p>On afficha en 1793 la tragédie de <i>Jean-sans-Terre</i>:
+quelques patriotes du faubourg Saint-Antoine, croyant
+qu'on voulait jouer le général Sans-Terre, qui était
+brasseur, arrachèrent toutes les affiches et se portèrent
+en masse au théâtre de la République. On parvint à
+les apaiser en leur donnant les premières places;
+mais l'on ne put en être maître, lorsque Sans-Terre
+dit au tyran:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Tu crois m'intimider en découvrant ma bière.</p>
+</div></div>
+
+<p>--Je l'avais bien dit! s'écria un d'entre eux. A
+bas!... à bas!... à bas les muscadins!... (On baissa la
+toile.)</p>
+
+<p>M. de Bièvre, voyant des hommes qui suaient pour
+mettre au cercueil un homme dont on avait mal pris
+la mesure, leur dit:--C'est <i>en vain</i> que vous vous
+mettrez <i>en eau</i> pour le mettre <i>en bière</i>.</p>
+
+<h4>BIÈVRE</h4>
+
+<p>A propos de M. de Bièvre, qui a fait tant de calembours,
+un amateur demandait quelle différence il y
+avait entre M. de Bièvre et une épingle. On ne devinait
+pas.--C'est, dit-il, qu'une épingle a une tête et
+une pointe, tandis que M. de Bièvre a beaucoup de
+pointes, mais pas de tête.</p>
+
+<p>Le marquis de Bièvre n'est mort qu'en 1789, époque
+où le calembour allait faire place à des jeux plus sinistres.
+Il a publié quelques petits ouvrages assez rares:
+l'<i>Ange Lure</i>, la <i>Fée Lure</i>, la lettre à la comtesse Tation,
+par le sieur (scieur) de Bois-Flotté, étudiant en droit-fil,
+l'<i>Almanach des calembours</i>, et quelques autres
+plaisanteries.</p>
+
+<p>Si le marquis de Bièvre a introduit chez nous la
+manie des calembours, il a quelquefois fourni des armes
+contre lui-même. Il était fils du chirurgien du
+roi, nommé Maréchal. Dédaignant le nom de son
+père, il acheta la terre de Bièvre. Un de ses amis, qui
+l'entendait annoncer sous ce titre, lui dit:--Mais,
+mon ami, tu as mal fait de ne prendre que le titre de
+marquis; il t'en aurait moins coûté de te faire appeler
+le maréchal de Bièvre.</p>
+
+<h4>BIGOT</h4>
+
+<p>Napoléon, qui aimait les jeux de mots, fut charmé
+de nommer ministre des cultes M. Bigot, qui signait:
+Bigot de Préameneu.</p>
+
+<h4>BLANC</h4>
+
+<p>Un procureur avait promis à un homme, accusé d'un
+crime de faux, que, par ses soins, il sortirait de cette
+affaire blanc comme neige. L'accusé, flatté de cette espérance,
+donnait au procureur tout l'argent qu'il lui
+demandait. Cependant, il succomba et fut condamné à
+faire amende honorable en chemise. Il dit alors au
+procureur:</p>
+
+<p>--Vous m'avez trompé par vos promesses.</p>
+
+<p>--Comment donc! répondit le procureur; je vous
+tiens parole: vous voilà en chemise; n'est-ce pas
+sortir de là blanc comme neige?</p>
+
+<h4>BOILEAU</h4>
+
+<p>Le cardinal Janson disait à Boileau:--Pourquoi
+vous appelez-vous Boileau? C'est un nom froid. J'aimerais
+mieux, à votre place, m'appeler Boivin.--Et
+vous, Monseigneur, répondit le poëte, pourquoi vous
+appelez-vous Janson? c'est un nom sec. A votre
+place, j'aimerais mieux m'appeler Janfarine.</p>
+
+<h4>BOIS</h4>
+
+<p>Un gentilhomme breton disait au maréchal de La
+Meilleraye:--Si je ne suis pas maréchal, je suis du
+bois dont on les fait.--Aussi le deviendrez-vous, répondit
+La Meilleraye, quand on les fera de bois.</p>
+
+<h4>BOITER</h4>
+
+<p>Un homme qui venait d'acheter un cheval, à la vue,
+reconnut qu'il était boiteux et voulut résilier son marché.
+Mais le vendeur témoigna qu'il l'avait prévenu de
+ce défaut, en lui disant:--Il <i>boite</i> et mange bien.</p>
+
+<h4>BON</h4>
+
+<p>Les marguilliers d'une paroisse de Paris, ayant
+appelé un orfévre huguenot pour réparer une figure
+de saint Michel, l'orfévre, considérant cette figure,
+leur dit:--Messieurs, votre diable est fort bon, mais
+votre saint Michel ne vaut rien.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Bonnes gens font les bons pays;</p>
+<p class="i20">Bon coeur fait le bon caractère;</p>
+<p class="i20">Bons comptes font les bons amis;</p>
+<p class="i20">Bon fermier fait la bonne terre.</p>
+<p class="i20">Bons livres font les bonnes moeurs,</p>
+<p class="i20">Bons maîtres les bons serviteurs;</p>
+<p class="i20">Bons maris font les bonnes femmes,</p>
+<p class="i20">Bonnes femmes les bons maris,</p>
+<p class="i20">Bonnes actions les bonnes âmes,</p>
+<p class="i20">Bons sentiments les bons esprits.</p>
+<p class="i20">Le bon goût fait les bons écrits;</p>
+<p class="i20">Bonne foi les bonnes affaires,</p>
+<p class="i20">Bonnes lois les bons citoyens;</p>
+<p class="i20">Bons fils encor font les bons pères,</p>
+<p class="i20">Bonnes filles les bonnes mères.</p>
+<p class="i20">Dieu, qui tout est bon, fait tous biens.</p>
+</div></div>
+
+<h4>BONA</h4>
+
+<p>Après la mort du pape Clément IX, beaucoup de
+grands personnages désignaient pour son successeur
+le cardinal Bona, sur quoi se fit cette pasquinade que
+<i>Papa Bona</i> serait un solécisme. Le P. Daugières répondit
+par le jeu de mots suivant:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Grammaticæ leges plerumque Ecclesia spernit:</p>
+<p class="i20">Fors erit ut liceat dicere Papa Bona.</p>
+<p class="i20">Vana solæcismi ne te conturbet imago,</p>
+<p class="i20">Esset Papa bonus, si Bona Papa foret.</p>
+</div></div>
+
+<h4>BONHEUR</h4>
+
+<p>Le moyen d'être heureux en ménage, c'est de se
+marier au point du jour, parce qu'alors on est sûr
+d'avoir fait un mariage de bonne heure.</p>
+
+<p>Une jeune fille, peu formée à l'orthographe, écrivait
+à son fiancé:--Venez de bonne heure, vous ferez
+le mien.</p>
+
+<h4>BONJOUR</h4>
+
+<p>M. Casimir Bonjour, candidat à l'Académie, se présente
+un jour pour faire sa visite à un des quarante.
+Une femme de chambre vient lui ouvrir la porte.--Votre
+nom, Monsieur! dit-elle. Le candidat répond
+avec son plus gracieux sourire:--Bonjour. Flattée de
+cette politesse, la jeune fille répond:--Bonjour, Monsieur;
+voulez-vous me dire votre nom?--Je vous dis
+Bonjour.--Et moi aussi, bonjour, Monsieur; qui
+faut-il que j'annonce?--Eh Bonjour! c'est mon
+nom. La camériste comprit alors qu'au lieu de dire:
+Bonjour, Monsieur, il fallait dire: Monsieur Bonjour.</p>
+
+<h4>BONNET DE NUIT</h4>
+
+<p>--Quels sont les vins qu'il convient de boire avant
+de se coucher pour bien dormir?</p>
+
+<p>Les vins de <i>Beaune et de Nuits</i>.</p>
+
+<h4>BONS MOTS</h4>
+
+<p>Un meunier cheminait avec son âne. Un bel esprit le
+rencontre et se met à crier: «Où allez-vous donc vous
+deux?--Chercher du foin pour nous trois,» répond
+le meunier.</p>
+
+<p>Le président d'Ormesson, qui avait un nez énorme
+et des narines extrêmement larges, causait avec le
+marquis de Villette dans une embrasure et mettait
+beaucoup de chaleur dans cet entretien. Lorsque
+Villette se rapprocha du cercle, il dit à quelqu'un:--Quand
+cet homme me parle de près, j'ai toujours peur
+qu'il ne me renifle.</p>
+
+<h4>BONTÉ</h4>
+
+<p>M. de Kératry, qui avait assez de laideur, avec une
+belle âme, déjeunait habituellement dans un café, et
+son déjeuner consistait toujours en ce qu'on appelle
+une tasse de café à la crème. Pour lui seul, la dame du
+comptoir affectait de dire, en le désignant:--Garçon,
+versez du café au laid.</p>
+
+<p>--Madame, lui dit un jour M. de Kératry, vous
+avez d'excellent café, mais vous n'avez assurément
+pas de <i>bon thé</i>.</p>
+
+<h4>BORGNE</h4>
+
+<p>Un borgne gageait contre un homme qui avait
+bonne vue, qu'il voyait plus que lui. Le pari est accepté.--J'ai
+gagné, dit le borgne, car je vous vois
+deux yeux, et vous ne m'en voyez qu'un. (Voyez <i>Yeux</i>.)</p>
+
+<h4>BOTTES SANS COUTURES</h4>
+
+<p>Dans quelques tombolas où se distribuent des lots
+plaisants, des amateurs ont gagné une paire de bottes
+sans coutures. C'étaient deux bottes d'oignons ou de
+navets.</p>
+
+<h4>BOUFFLERS</h4>
+
+<p>Quel est le poëte qui s'est nourri des aliments les
+plus légers?--Boufflers.</p>
+
+<h4>BOUILLON</h4>
+
+<p>Un historien a dit que, dans les Croisades, Godefroi
+de Bouillon était le général le plus <i>consommé</i>.</p>
+
+<h4>BOURVALAIS</h4>
+
+<p>Ce financier, qui avait amassé des biens immenses
+dans les affaires, sous Louis XIV, ayant trouvé, dans
+un de ses étangs, un brochet d'une grosseur extraordinaire,
+en fit présent à M. le premier président de
+Harlay. Ce magistrat l'invita à en venir manger sa
+part. Comme tous les conviés admiraient l'énormité
+de ce poisson monstre:--Messieurs, leur dit le premier
+président, ne soyez pas surpris, c'est le bourvalais
+des étangs de monsieur.</p>
+
+<h4>BOUT</h4>
+
+<p>Comment faire pour ne pas se crotter dans les rues
+de Paris?--Il faut ne pas aller jusqu'aux boues.</p>
+
+<h4>BRUNET</h4>
+
+<p>Célébrité dans le bazar des calembours et des bêtises
+excentriques. Nous ne citerons que quelques-unes
+de ses expressions singulières:</p>
+
+<p>«Il faisait un froid d'enfer, ce matin. J'en avais
+l'onglée au menton.</p>
+
+<p>«Voilà un événement qui va leur tailler bien des
+croupions.</p>
+
+<p>«Cet homme paraît plus vieux qu'il n'en a l'air.
+C'est peut-être son oeil borgne qui en est cause.</p>
+
+<p>«On dit que Paris va sauter. Je crois qu'il serait
+prudent de fermer les fenêtres.</p>
+
+<p>«Le soleil coule pour tout le monde.</p>
+
+<p>«Ce n'est pas de l'orient que vient cette étoffe de
+Perse; le marchand assure que c'est du levant.</p>
+
+<p>«Si les écrevisses ne devenaient pas rouges en
+cuisant, il faudrait les changer de nom.--Pourquoi?--parce
+qu'on dit: Rouge comme une écrevisse.</p>
+<br>
+<h2>C</h2>
+
+<h4>CACOPHONIE</h4>
+
+<p>Un beau parleur, contant le naufrage d'un vaisseau,
+disait que le navire avait pris le mors aux
+dents.</p>
+
+<p>Le même exprimait la marche rapide d'un ballon,
+en disant qu'il allait ventre à terre.</p>
+
+<p>Il habitait Paris et se plaisait à dire qu'il y a de la
+rue de Tournon à la rue de Richelieu un grand laps
+de temps.</p>
+
+<h4>CALET</h4>
+
+<p>On demandait à un Parisien s'il connaissait le Pas-de-Calais.--Je
+les connais tous, répondit-il; il appliquait
+sa réponse aux pas du danseur Calet.</p>
+
+<h4>CAMARD</h4>
+
+<p>Un homme, dont le nez était fort camard, étant
+venu à éternuer devant un railleur, celui-ci le salua
+et ajouta:--Dieu vous conserve la vue. Celui qui venait
+d'éternuer, surpris de ce voeu, lui demanda pourquoi
+il le faisait.--Parce que, répondit le railleur, votre nez
+n'est pas propre à porter des lunettes.</p>
+
+<h4>CAMUS</h4>
+
+<p>Guy Patin, médecin célèbre, fit un procès à Renaudot,
+célébrité d'un autre genre, qui exerçait la médecine,
+à Paris, sans s'être fait agréer au corps des médecins
+de cette capitale. Renaudot fut condamné.--Vous
+avec perdu et gagné à la fois, lui dit Patin.--Comment
+gagné? répliqua Renaudot.--Mais vous
+êtes entré camus au palais, et vous en sortez avec un
+pied de nez.</p>
+
+<h4>CAMPENON</h4>
+
+<p>Lorsque Ducis mourut, MM. Michaud et Campenon
+se disputèrent son fauteuil à l'Académie française.
+M. Campenon, prenant les devants, fit cette épigramme
+contre son concurrent:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i18">Au fauteuil de Ducis on a porté Michaud,</p>
+<p class="i18">Ma foi pour l'y placer il faut un ami chaud.</p>
+</div></div>
+
+<p>Michaud répliqua:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i18">Au fauteuil de Delisle aspire Campenon;</p>
+<p class="i18">Son talent suffit-il pour qu'il s'y campe? non.</p>
+</div></div>
+
+<h4>CANCAN</h4>
+
+<p>Dans une société où l'on parlait du Général De Caen,
+une personne qui l'avait connu à l'époque où il
+n'était encore qu'aide de camp de son frère, raconta
+ce qui suit:</p>
+
+<p>En se rendant à l'armée, De Caen fut arrêté par la
+gendarmerie.--Comment vous nommez-vous? lui
+demanda le brigadier.--De Caen.--D'où êtes-vous?--De
+Caen.--D'où venez-vous?--De Caen.--Qui
+êtes-vous?--Aide de camp.--De qui?--Du général
+de Caen.--Où allez-vous?--Au camp.--Assez de
+cancans comme cela, dit le gendarme, je vous
+arrête.</p>
+
+<h4>CARTE</h4>
+
+<p>C'est un mot qui a plusieurs sens, nous empruntons
+ce couplet à une chanson de M. Goulard:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Le politique sur la carte</p>
+<p class="i20">Visite le lieu des combats;</p>
+<p class="i20">Le gourmand consulte la carte,</p>
+<p class="i20">Pour faire choix d'un bon repas.</p>
+<p class="i20">Souvent le fou sur une carte</p>
+<p class="i20">Tout son argent voit emporté;</p>
+<p class="i20">Et plus tard, si je perds la carte,</p>
+<p class="i20">Je perds aussi la liberté.</p>
+</div></div>
+
+<p>Les journaux racontaient, il y a trente ans, l'anecdote
+suivante à propos des cartes de visite. Un maître
+de maison était monté en équipage en compagnie
+de sa dame, lorsqu'il s'aperçoit qu'il a oublié ses
+cartes; il dit au laquais nouvellement à son service
+d'aller les prendre sur la cheminée de la salle à manger.
+Ce qui fut dit fut fait, et, fouette cocher, les visites
+vont bon train. Au bout d'un certain temps, le
+maître demande au groom s'il a encore beaucoup de
+cartes.</p>
+
+<p>--Monsieur, répond celui-ci, il me reste encore le
+roi de pique, le dix de coeur et l'as de trèfle! Le
+pauvre garçon avait pris les cartes à jouer au lieu
+des cartes de visite.</p>
+
+<h4>CARTERON</h4>
+
+<p>Un libraire de Lyon, nommé Carteron, avait pour
+enseigne une balance, avec des petits poids d'un côté
+et des livres de l'autre. Ces mots étaient au bas: «Les
+quarterons font les livres.»</p>
+
+<h4>CAUSES</h4>
+
+<p>Un particulier ayant dit à Garrick que l'avocat
+Barell avait laissé fort peu d'<i>effets</i> à sa mort:--Cela
+n'est pas étonnant, reprit ce comédien, il avait fort
+peu de <i>causes</i>.</p>
+
+<h4>CÉDEZ</h4>
+
+<p>S'écrit avec les deux lettres: CD.</p>
+
+<h4>CENSEURS</h4>
+
+<p>Pourquoi faut-il prendre garde à ce qu'on dit devant
+les fils uniques?</p>
+
+<p>--Parce qu'ils sont <i>sans soeurs</i>.</p>
+
+<h4>CENT ANS</h4>
+
+<p>Un farceur disait:--Celui qui arrivera à tuer le
+temps vivra sans temps.</p>
+
+<h4>CERCEAU</h4>
+
+<p>Dans les farces du théâtre italien, Arlequin disait à
+un autre qui le battait avec sa ceinture:--Tu te
+conduis comme un tonnelier; tu me donnes des coups
+de <i>serre sot</i>.</p>
+
+<h4>CERVELLE</h4>
+
+<p>Deux Suisses, le sabre à la main, se battaient à outrance
+dans une place. Un paysan passe par là, et le
+coeur ému de compassion, s'efforce de les séparer; mais
+le pauvre diable, pour toute récompense de son zèle,
+reçoit à la tête un coup de sabre qui le jette à la renverse.
+On appelle un chirurgien qui veut voir si la
+cervelle est atteinte.--Ah! dit le paysan, je n'en
+avais point lorsque je me suis trouvé dans cette querelle.</p>
+
+<p>Le jeu de mots qui suit est dans le même sens:</p>
+
+<p>Au siége de Landrecies, en 1655, M. de La Feuillade
+fut blessé d'un coup de mousquet à la tête. Les chirurgiens
+dirent que la blessure était dangereuse et
+qu'on voyait la cervelle.--Eh bien! Messieurs, dit
+La Feuillade, faites-moi le plaisir d'en prendre un peu
+tout proprement, et, que je vive ou que je meure,
+de l'envoyer au cardinal Mazarin, qui a coutume de
+répéter que je n'en ai pas.</p>
+
+<h4>CÉSAR</h4>
+
+<p>En Italie, comme on sait, les voiturins qui vous
+conduisent à Rome, vous mènent, vous nourrissent et
+vous couchent dans la route, moyennant un prix convenu.
+En France, dans de telles conditions, le voyageur
+qui fait sa convention avec le voiturin lui donnerait
+des arrhes. En Italie, au contraire, le voiturin donne
+des arrhes au voyageur pour se l'assurer. Les voiturins
+sont chers aux artistes et aux gens qui veulent voir.
+Un abbé, qui cherchait à gagner Rome en artiste, rentrait
+joyeusement auprès de ses amis.--Avez-vous
+trouvé? lui dit-on.--Oui, répondit-il; je suis engagé;
+et le voiturin m'a donné un napoléon pour <i>ses arrhes</i>.</p>
+
+<h4>CHACAL</h4>
+
+<p>«Un prêtre espagnol, rencontrant Thomas Campbell
+dont il avait fait la connaissance à la table du général
+Trézel:--Excusez-moi, lui dit-il, si je ne vous ai
+pas rendu visite hier; mais j'étais obligé d'assister à
+la mort d'un chacal.</p>
+
+<p>--À merveille, mon père, répondit Campbell, et
+j'espère que vous vous êtes amusé!</p>
+
+<p>--Comment, amusé? mais j'allais lui porter les
+tristes consolations de notre sainte religion!</p>
+
+<p>--En vérité?</p>
+
+<p>--En vérité! et je vous assure qu'il est mort en
+chrétien repentant, malgré la vie dissolue qu'il avait
+toujours menée.</p>
+
+<p>--Vous aimez à plaisanter, mon père! mais, parbleu,
+les chacals sont des chacals! vous ne pouvez pas
+exiger d'une brute qu'elle règle ses passions comme
+un animal raisonnable. Il n'est pas plus possible au
+chacal d'imiter votre continence, qu'il ne l'eût été au
+compagnon de Saint-Antoine d'imiter la sobriété de
+son patron.</p>
+
+<p>--Il était adonné à la boisson, et, voyant un autre
+chacal mettre de l'argent dans sa poche, il le tua pour
+s'en emparer et acheter de l'eau-de-vie.</p>
+
+<p>--Que diable me racontez-vous là, mon saint père!
+des chacals qui ont des poches, qui boivent de l'eau-de-vie,
+qui meurent en chrétiens! Vous êtes en joyeuse
+humeur, <i>mio padre</i>.»</p>
+
+<p>Ici mon Espagnol éclata de rire: «Quoi! vous ne
+savez pas que tous les soldats d'infanterie légère ont
+reçu le sobriquet de chacal?»</p>
+
+<p>(<span class="sc">Thomas Campbell</span>, <i>Oran et ses environs</i>.)</p>
+
+<h4>CHAIR</h4>
+
+<p>M. Ch. Monselet, après avoir entendu M. Saisset,
+dans son cours de philosophie à la Sorbonne, se retira
+en disant:--L'esprit est fort, mais la <i>chaire</i> est
+faible.</p>
+
+<h4>CHALEUR</h4>
+
+<p>Bautru se promenait le chapeau à la main, par un
+soleil ardent, avec Gaston d'Orléans. Ce prince lui
+ayant dit qu'il aimait ses amis avec chaleur:--Ma
+tête s'en aperçoit, répondit Bautru.</p>
+
+<h4>CHANDELLE</h4>
+
+<p>Les habitants de... présentèrent une adresse pompeuse
+à Jacques Ier, successeur d'Élisabeth. Ils lui souhaitaient
+que son règne pût durer aussi longtemps que
+le soleil, la lune et les étoiles. Il leur répondit que
+«si leurs voeux étaient exaucés, son fils serait obligé
+de régner à la chandelle.»</p>
+
+<h4>CHANGER</h4>
+
+<p>Ce mot a plus d'un sens. Un acteur débutait au
+Théâtre-Français par le rôle de Mithridate, dans la tragédie
+de ce nom. Il n'était pas dépourvu de talent; il
+avait même beaucoup d'intelligence et de feu; mais
+son extérieur n'était rien moins qu'héroïque. Dans la
+scène où Monime dit à Mithridate:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Seigneur, vous changez de visage!</p>
+</div></div>
+
+<p>Un plaisant cria: Laissez-le faire.</p>
+
+<h4>CHANT</h4>
+
+<p>On dit que le rossignol ne chante plus lorsqu'il
+est en cage, parce qu'il a perdu la clef des champs.</p>
+
+<h4>CHARABIA</h4>
+
+<p>Tu sais bien, le voisin qui est si fier, hier il me
+visita, me fit politesse, et je le reconduisa.--Avec
+un I?--Non, avec un bout de chandelle.</p>
+
+<h4>CHARMES</h4>
+
+<p>On devait manger une dinde aux truffes à une table
+où se trouvait Buffon. Avant le dîner, une vieille dame
+demande au Pline moderne où croissent les truffes:</p>
+
+<p>--À vos pieds, Madame.</p>
+
+<p>La vieille ne comprend pas. On lui explique que
+c'est aux pieds des charmes; elle trouve charmant le
+compliment et le complimenteur.</p>
+
+<p>Vers la fin du repas, quelqu'un fit la même question
+au savant naturaliste, qui, ne faisant pas attention
+que la dame d'avant-diner se trouvait là, dit naturellement:</p>
+
+<p>--Aux pieds des vieux charmes.</p>
+
+<p>La dame qui l'entendit ne le trouva plus si charmant.</p>
+
+<h4>CHARRETTE</h4>
+
+<p>Un postulant au théâtre devait prononcer cet hémistiche
+d'un vers:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Arrête lâche, arrête.</p>
+</div></div>
+
+<p>Il prononça si brièvement que tout le monde entendit:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Arrête la charrette.</p>
+</div></div>
+
+<h4>CHASLES</h4>
+
+<p>Tout en rendant justice à M. Chasles, les plaisants
+disent qu'on le porte sur les épaules.</p>
+
+<h4>CHAUDRON</h4>
+
+<p>Brunet disait que le vase qu'on appelle chaudron ne
+s'appelait ainsi que parce qu'il est chaud et rond.</p>
+
+<h4>CHEMIN DE LA PRISON</h4>
+
+<p>Un villageois demandait le chemin de Newgate
+(prison de Londres). Un plaisant qui l'entendit s'offrit
+de le lui montrer.--Traversez le ruisseau, lui dit-il,
+entrez chez le bijoutier en face, prenez deux gobelets
+d'argent; décampez avec, et dans cinq minutes vous
+y serez.</p>
+
+<h4>CHER</h4>
+
+<p>C'est un département où l'on ne peut pas vivre à
+bon marché.</p>
+
+<h4>CHEVAL</h4>
+
+<p>Apprenez-moi, disait un Gascon, où demeure, dans
+cette rue, monsieur Cheval.--Monsieur, lui dit un marchand,
+il n'y a point d'homme de ce nom dans cette
+rue; mais vous êtes devant la porte de M. Poulain.--Eh!
+c'est cela; mais depuis dix ans que je ne l'ai vu,
+il a bien eu le temps de changer de nom, à moins qu'il
+ne fasse encore le jeune.</p>
+
+<h4>CHEVEUX</h4>
+
+<p>Ces jours derniers, un brave homme de la campagne
+fut élu maire dans sa commune.</p>
+
+<p>Voulant, après l'élection, remercier ses futurs administrés
+du choix qu'ils avaient bien voulu faire de lui,
+il rassembla tout le village, et s'exprima ainsi:</p>
+
+<p>«Mes amis, croyez que je n'oublierai jamais le jour
+où vous avez daigné mettre mes cheveux blancs à
+votre tête!...»</p>
+
+<h4>CHICOT</h4>
+
+<p>Deux faiseurs de calembours dînaient ensemble, à
+Paris, chez un restaurateur. À la fin du repas, l'un
+dit à l'autre:--Je te parie que je fais un calembour
+sur le premier mot que tu diras en sortant de table.--Je
+parie que non.--Je parie que si.--Le prix du
+dîner?--Va pour le dîner.</p>
+
+<p>Le parieur attend de pied ferme. L'autre cherche un
+mot sans équivoque; il s'approche de la fenêtre et dit:--Il
+pleut.--Eh bien, chicot.--J'ai perdu.</p>
+
+<p>Un étranger, témoin de cette scène, ne put comprendre
+le jeu de mots qu'après avoir cherché dans son
+dictionnaire; il y trouva la définition du mot chicot,
+<i>reste de dent</i>. «Ah! dit-il,--il pleut, reste dedans.--Voilà
+des gaillards bien spirituels.»</p>
+
+<h4>CHIEN</h4>
+
+<p>Un homme d'esprit vaniteux disait à un homme
+qui le regardait curieusement:--De quel droit me
+toisez-vous ainsi?--Un chien regarde bien un évêque,
+répondit l'indiscret. À quoi l'homme d'esprit
+répliqua:--Qui vous a dit que j'étais un évêque?</p>
+
+<p>Scarron, dans un recueil de ses poésies qu'il fit imprimer,
+ayant adressé un madrigal à la petite chienne
+de sa soeur, mit pour titre: «À la chienne de
+ma soeur.» Depuis, s'étant brouillé avec elle, il fit
+mettre dans l'errata de son livre: «<i>Au lieu de</i> à la
+chienne de ma soeur, <i>lisez</i> à ma chienne de soeur.»</p>
+
+<h4>CI-DEVANT</h4>
+
+<p>Un écrivain fit, en 1793, un livre qui parut sous le
+titre d'Observations sur la chaîne des ci-devant montagnes
+d'Auvergne.</p>
+
+<p>Un nègre, ayant adressé alors une pétition à la
+Convention nationale, signa: «Ziméo, ci-devant
+nègre.»</p>
+
+<h4>CINQ</h4>
+
+<p>Saint Denis est le saint des Français; saint Georges
+est le saint des Anglais; celui des Genevois est le cinq
+pour cent. (À Genève le <i>q</i> ne se fait pas sentir.)</p>
+
+<p>Cinq cordeliers, sains de corps et sains d'esprit,
+étaient ceints d'une corde et portaient sur leur sein
+un petit saint, muni du seing du saint-père.</p>
+
+<h4>CINQ ANS</h4>
+
+<p>On disait à un bon homme qu'Abdel-Kader avait
+cinq camps lorsqu'on l'a pris. Ce bon homme s'écria:--Comment,
+ce fameux guerrier n'est qu'un
+enfant?</p>
+
+<h4>CIVIL</h4>
+
+<p>Le général D.... parlait avec chaleur dans un cercle
+où se trouvait M. de Talleyrand, de diverses personnes
+qu'il qualifiait de pékins.</p>
+
+<p>--S'il vous plaît, général, lui dit le prince, qu'appelez-vous
+pékins?</p>
+
+<p>--Nous autres, répond le général, nous appelons
+pékin tout ce qui n'est pas militaire.</p>
+
+<p>--Ah! fort bien! répond M. de Talleyrand; tout
+comme nous, nous appelons militaire tout ce qui n'est
+pas civil.</p>
+
+<h4>CLAIR DE LUNE</h4>
+
+<p>Un jeune homme à qui on demandait quelle était
+sa position sociale répondit:--Mon père est notaire,
+et mon oncle aussi. Ils ont chacun une étude; je suis
+clerc de l'une.</p>
+
+<h4>CLEF</h4>
+
+<p>Le poëte Longchamps, devenu chambellan de Joachim
+Murat, roi de Naples, regrettait si fort la campagne,
+qu'il demanda sa retraite et vint finir ses jours
+à la campagne, près de Louviers. C'est à ce propos
+qu'il fit le couplet suivant:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Adieu, donc, stérile étiquette,</p>
+<p class="i20">Adieu, petite vanité,</p>
+<p class="i20">Graves riens, noble ennui, toilette,</p>
+<p class="i20">Et grandes fêtes sans gaîté.</p>
+<p class="i20">Adieu, clef d'or qu'ont au derrière</p>
+<p class="i20">Mes collègues les chambellans,</p>
+<p class="i20">Pour vivre enfin à ma manière,</p>
+<p class="i20">Ma foi, j'ai pris la clef des champs.</p>
+</div></div>
+
+<p>Combien les musiciens connaissent-ils de clefs?--Trois,
+la clef de <i>sol</i>, la clef de <i>fa</i> et la clef d'<i>ut</i>.--Il
+y en a une quatrième qu'ils connaissent aussi, c'est la
+clef de la cave.</p>
+
+<h4>CLOCHER</h4>
+
+<p>Dans un écrit que publia M. de Talleyrand, alors
+évêque d'Autun (1790), on prétendit qu'il n'y avait
+de lui que ce qui clochait.--On sait qu'il était boiteux.</p>
+
+<h4>COCHON</h4>
+
+<p>Napoléon fit un jeu de mots en nommant M. Cochon
+préfet de Bayonne, la ville aux jambons renommés.
+M. Cochon signait: Cochon de Lapparent.</p>
+
+<h4>COCO</h4>
+
+<p>Plusieurs Français, à Amsterdam, étaient réunis à
+une table d'hôte. Un Anglais s'y trouvait aussi. Il
+mangeait, mangeait, mangeait, avec une attention
+profonde. Déjà plusieurs fois un convive lui avait
+adressé ces mots:--Monsieur, auriez-vous la bonté
+de me passer ce plat d'épinards? Le sombre habitant
+des bords de la Tamise était incapable de la moindre
+distraction. Alors le Français dit à un de ses amis:--Passe-moi
+donc le plat d'épinards, car ce coco-là ne
+veut pas que j'en goûte. À ce mot, les yeux de l'Anglais
+quittent enfin son assiette, et se portent courroucés
+sur son interlocuteur; il se croit insulté. Un de ces
+rendez-vous qu'on appelle d'honneur va être pris.
+Mais l'Anglais se ravise; il ouvre son pocket-dictionnaire;
+ses yeux brillent. Il appelle un domestique,
+demande du champagne, et invite son adversaire à
+trinquer avec lui.</p>
+
+<p>--Monsieur le Français, dit-il, je étais dans le dérèglement
+(erreur). Vous faites politesse à moi. Vous
+appelez moi coco. Lisez: «Coco, fruit des Indes, doux
+et agréable.» Chacun partit d'un éclat de rire, et l'on
+but le champagne à la santé des deux nations.</p>
+
+<h4>COEUR</h4>
+
+<p>Un banquier poursuivait de ses assiduités une jeune
+et riche héritière dont il sollicitait la main. Le jour
+de la Toussaint il se rendit à Saint-Roch, et là, placé
+à côté du bénitier, il attendait l'inhumaine, à laquelle
+il offrit de l'eau bénite, en lui disant tout bas:--Mademoiselle,
+que dois-je espérer?--Monsieur, lui répond
+la jeune personne, vous êtes dans mon esprit
+comme le bénitier dans l'église; près de la porte et
+loin du choeur.</p>
+
+<h4>COMBLÉ</h4>
+
+<p>Un très-gros homme, arrêté au bord d'un fossé,
+disait:--Je le sauterais bien, mais j'aurais peur de
+tomber dedans.--Monsieur, lui dit une dame, il
+serait comblé de vous recevoir.</p>
+
+<h4>COMMUN</h4>
+
+<p>Un jeune homme, voyant une belle dame qui avait
+une grande bouche, disait:--Quel dommage qu'une
+si belle femme ait la bouche commune! Son voisin
+lui répondit:--Si tu disais: comme deux!</p>
+
+<h4>COMPARAISON</h4>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">L'existence est une pendule</p>
+<p class="i20">Que par soi-même il faut guider.</p>
+<p class="i20">Malheur à l'homme trop crédule</p>
+<p class="i20">Qui la donne à raccommoder!</p>
+<p class="i20">On croit qu'Esculape calcule,</p>
+<p class="i20">Lorsqu'il s'agit d'y regarder,</p>
+<p class="i20">Mais il l'avance sans scrupule</p>
+<p class="i20">Ne pouvant pas la retarder!</p>
+</div></div>
+
+<p>Cette autre comparaison est de M. Boniface.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">La chenille rampante,</p>
+<p class="i20">Dans son premier état,</p>
+<p class="i20">Végète sur la plante:</p>
+<p class="i20">Voilà le candidat.</p>
+<p class="i20">Sorti de la chenille,</p>
+<p class="i20">Sur des ailes porté,</p>
+<p class="i20">Un beau papillon brille:</p>
+<p class="i20">Voilà le député.</p>
+</div></div>
+
+<p>Un proverbe dit: Comparaison n'est pas raison. Un
+axiome dit aussi: Toute comparaison cloche.</p>
+
+<h4>COMPLAISANTES</h4>
+
+<p>Odry disait un jour à Brunet:--Sais-tu pourquoi
+l'on se moque plutôt des bons que des méchants?</p>
+
+<p>--Je ne sais pas.</p>
+
+<p>--Parce que les bonnes gens sont presque toujours
+des personnes qu'on plaisante.</p>
+
+<h4>COMPLET</h4>
+
+<p>Un jeune soldat, originaire de Lyon, a adressé à sa
+famille, après la bataille de Solferino, la lettre laconique
+suivante. C'est à la fois la lettre d'un brave soldat
+et d'un bon fils:</p>
+
+<p>«Castiglione, 25 juin.</p>
+
+<p>«Chère mère,</p>
+
+<p>«Je suis encore vivant, très-vivant et bon vivant.</p>
+
+<p>«Seulement, je ne suis plus complet, comme un
+omnibus les jours de pluie.</p>
+
+<p>«Le chirurgien du régiment vient de me couper la
+jambe.</p>
+
+<p>«Je m'étais habitué à l'avoir, et la séparation a été
+cruelle.</p>
+
+<p>«Mon sergent-major me dit, pour me consoler, que
+j'aurai maintenant une jambe faite au tour.</p>
+
+<p>«Allons! bonne mère, ne pleure pas, songe que
+j'aurais pu être tué comme une foule de mes braves
+camarades. C'est ceux-là ou plutôt la famille de ces
+pauvres amis qu'il faut plaindre.</p>
+
+<p>«Réjouis-toi donc, au contraire, bonne mère, tout
+est profit pour toi: je vais bientôt aller te rejoindre
+pour ne plus te quitter, ma jambe de bois me forçant
+à rester près de toi; je ferai tout ce qu'il te plaira: la
+chère partie de piquet.</p>
+
+<p>«Tiens, voilà une larme qui tombe sur ce papier;
+ce n'est point une larme de regret, mais de bonheur,
+car je vais bientôt t'embrasser.»</p>
+
+<h4>COMPLIMENTEUR</h4>
+
+<p>On dit qu'un complimenteur est un accompli menteur.</p>
+
+<h4>COMPTE</h4>
+
+<p>Le prince de Ligne connaissait deux frères du nom
+de Montailleur, l'un le marquis, et l'autre le comte. Le
+premier était aussi aimable et spirituel que son frère
+était ennuyeux. Aussi le prince, quand son valet de
+chambre lui annonçait M. de Montailleur, avait-il
+coutume de dire:--Si c'est le marquis de Montailleur,
+à la bonne heure; mais si c'est le compte de mon
+tailleur, je sais ce que c'est et je n'en veux pas.</p>
+
+<h4>CONFIDENT</h4>
+
+<p>Qui peut nous expliquer les propriétés du liquide
+qu'on joint à l'huile dans la salade?--Le cornichon,
+parce qu'il est <i>confit dans</i> du vinaigre.</p>
+
+<h4>CONFIRE</h4>
+
+<p>La différence qu'il y a entre un mari et un cornichon,
+c'est que le premier se confie en sa moitié, et
+l'autre se confit en son entier.</p>
+
+<h4>CONFRÈRE</h4>
+
+<p>Un médecin, ayant un cheval malade, fit appeler
+un maréchal. Celui-ci ayant guéri le cheval, le médecin
+lui dit:--Mon ami, qu'est-ce que je vous dois?--Rien,
+répondit le maréchal: je ne prends jamais rien
+à mes confrères.</p>
+
+<h4>CONNAÎTRE</h4>
+
+<p>L'évêque de Québec, au commencement de sa mission,
+s'était perdu au Canada. Ceux qui étaient à sa
+recherche rencontrèrent une troupe de sauvages auxquels
+ils demandèrent s'ils connaissaient cet évêque.--Si
+je le connais! répondit l'un d'eux, j'en ai
+mangé.</p>
+
+<p>On disait d'une femme qui s'évanouissait:--Elle
+se trouve mal. Un farceur répondit:--C'est qu'elle se
+connaît.</p>
+
+<h4>CONSEIL</h4>
+
+<p>Louis XI disait ordinairement que tout son conseil
+était dans sa tête, parce qu'il ne consultait personne.
+L'amiral de Brézé, le voyant monter sur un bidet très-faible,
+dit:--Il faut que ce cheval soit plus fort qu'il
+ne paraît, puisqu'il porte le roi et son conseil.</p>
+
+<p>Quand on eut posé la statue de Louis XV sur des
+grues, afin de l'élever à la place dite aujourd'hui de la
+Concorde, un mauvais plaisant dit:--Le voilà au
+milieu de son conseil!</p>
+
+<h4>CONSIDÉRER</h4>
+
+<p>On donne souvent à ce mot des sens qu'il n'a pas
+trop. Une dame de moeurs légères, sur qui un étranger
+arrêtait ses regards avec persistance, lui dit:--Pourquoi,
+Monsieur, me considérez-vous ainsi?--Madame,
+répondit l'autre, assez peu galamment, je vous regarde,
+mais je ne vous considère pas.</p>
+
+<p>Voyez <span class="sc">Regarder</span>.</p>
+
+<h4>CONVENTION</h4>
+
+<p>Un savant disait qu'il n'aimait pas qu'on l'appelât
+citoyen, parce que c'est un style de convention qui
+ne convient pas à tout le monde.</p>
+
+<h4>CONVOIS</h4>
+
+<p>On présentait comme un parti convenable à une
+demoiselle un jeune employé d'administration militaire.
+Il ne plut pas. La demoiselle lui demanda ce
+qu'il faisait.--Je suis dans les convois, Mademoiselle.--Oh!
+l'horreur!--Militaires, Mademoiselle!--Ou
+civils, peu importe! repassez quand je serai morte.</p>
+
+<h4>COQ-À-L'ÂNE</h4>
+
+<p>Ménage dit que Marot a inventé l'expression coq-à-l'âne,
+en donnant ce titre à une de ses épîtres. D'autres
+prétendent que ce mot vient d'une vieille fable où l'on
+introduisait un coq raisonnant avec un âne. Comme
+cette fiction n'avait pas le sens commun, on a donné
+le nom de coq-à-l'âne à tous les raisonnements aussi
+absurdes.</p>
+
+<p>Une personne regardant le portail des Feuillants de
+la rue Saint-Honoré, à Paris, et entendant dire qu'il
+était de l'ordre corinthien: «Je croyais, dit-elle, qu'il
+était de l'ordre de Saint-Bernard.»</p>
+
+<p>Un homme très-crédule disait qu'il n'avait pas de
+confiance dans la vaccine. «À quoi sert-elle, ajoute-t-il,
+je connais un enfant, beau comme le jour, que
+sa famille avait fait vacciner... eh bien! il est mort
+deux jours après...--Comment! deux jours après?...--Oui...
+il est tombé du haut d'un arbre, et s'est tué
+roide... Faites donc vacciner vos enfants, après cela!»</p>
+
+<p>On a dit que le char funèbre, genre antique, qui
+avait transporté Louis XVIII à Saint-Denis, était le
+même qui avait traîné la liberté au Champ de Mars,
+la déesse Raison à Notre-Dame et Voltaire au Panthéon;
+mais les draperies, selon la circonstance, en
+déguisaient la carcasse. Quoi qu'il en soit, lorsque le
+char, qui avait emporté le cercueil royal, revint à sa
+remise rue Bergère, chargé de toutes les décorations
+mortuaires entassées pèle-mêle, on lisait dessus, en
+grosses lettres: <i>Service des menus plaisirs du roi</i>.</p>
+
+<p>Louis XV allant à Choisy, M. de Nédonchelles, officier
+des gardes du corps, anglomane décidé, galopait
+à l'une des portières de la voiture; et, comme il avait
+plu beaucoup, à tout moment il éclaboussait le roi,
+qui avait baissé la glace.--Nédonchelles, lui cria le
+roi, vous me crottez!--Oui, Sire, répondit l'officier,
+à l'anglaise. On devine que Nédonchelles avait entendu:
+Vous trottez. Louis XV, ne saisissant pas la
+méprise, leva la glace de mauvaise humeur, et dit à
+ceux qui l'accompagnaient: «Parbleu! voilà un trait
+d'anglomanie qui est un peu fort!»</p>
+
+<p>Frédéric le Grand avait coutume, toutes les fois
+qu'un nouveau soldat paraissait au nombre de ses
+gardes, de lui faire ces trois questions: «Quel âge
+avez-vous? Depuis combien de temps êtes-vous à mon
+service? Recevez-vous votre paye et votre habillement
+comme vous le désirez?»</p>
+
+<p>Un jeune Français désira entrer dans la compagnie
+des gardes. Sa figure le fit accepter sur-le-champ;
+mais il n'entendait pas l'allemand. Son capitaine le
+prévint que le roi le questionnerait dès qu'il le verrait,
+et lui recommanda d'apprendre par coeur, dans cette
+langue, les trois réponses qu'il aurait à faire. Il les
+sut bientôt, et le lendemain Frédéric vint à lui pour
+l'interroger; mais il commença par la seconde question
+et lui demanda: «Combien y a-t-il que vous
+êtes à mon service?--Vingt-un ans, répondit le soldat.»
+Le roi, frappé de sa jeunesse qui ne laissait pas
+présumer qu'il eût porté le mousquet si longtemps,
+lui dit d'un air de surprise: «Quel âge avez-vous?--Un
+an, sous le bon plaisir de Votre Majesté.» Frédéric,
+encore plus étonné, s'écria: «Vous ou moi avons
+perdu l'esprit.» Le soldat, qui prit ces mots pour la
+dernière question, répliqua avec fermeté: «L'un et
+l'autre, n'en déplaise à Votre Majesté.--Voilà, dit
+Frédéric, la première fois que je me suis vu traiter
+de fou à la tête de mon armée.»</p>
+
+<p>Le soldat, qui avait épuisé sa provision d'allemand,
+garda pour lors le silence; et quand le roi, se retournant
+vers lui, le questionna de nouveau pour pénétrer
+ce mystère, il lui dit en français qu'il ne comprenait
+pas un mot d'allemand. Frédéric, s'étant mis à rire,
+lui conseilla d'apprendre la langue qu'on parlait dans
+ses États, et l'exhorta d'un air de bonté à bien faire
+son devoir.</p>
+
+<p>Pièce copiée sur l'original affiché à Pontarlier.</p>
+
+<p>1º Il est défendu d'extraire de la pierre, du sable,
+des carrières du territoire de la commune sans avoir
+prévenu les autorités, surtout de la marne, les étrangers
+n'y sont pas admis.</p>
+
+<p>2º Les cabaretiers qui donneront à boire le dimanche
+sont prévenus qu'on leur dressera procès-verbal
+pendant les offices, surtout de la messe, qu'il
+est défendu d'y aller.</p>
+
+<p>3º Il est défendu de conduire le bétail sur le communal
+joignant le pic des avoines, ni avec des brebis,
+chèvres ou autres, malgré qu'ils seraient conduits
+par des personnes raisonnables, qui ne doivent pas
+être pâturés.</p>
+
+<p>4º Dimanche, à l'issue de vêpres, il sera procédé à
+l'adjudication au plus offrant et dernier enchérisseur
+des boues du village, en présence du maire, qu'on devra
+racler proprement, assisté de deux membres du conseil,
+provenant des égouts de la ville. Les articles sus-dits,
+regardent aussi tous les habitants de tous les
+sexes, qui devront être exécutés.</p>
+
+<p>Les habitants sont prévenus que, lundi prochain,
+on échenillera deux personnes par maison, le curé
+excepté.</p>
+
+<p><i>Le maire</i> <span class="sc">Colas</span>.</p>
+
+<p>Le 5 mars 1846.</p>
+
+<p>L'abbé Cherrier, censeur royal au commencement de
+la régence, publia un volume de plaisanteries, qu'on
+retrouve pour la plupart dans diverses compilations
+connues. Nous en extrairons ici le seul morceau qui
+soit un peu rare. C'est un singulier faisceau d'équivoques.</p>
+
+<p class="mid">HISTOIRE DE L'HOMME INCONNU</p>
+
+<p>Je prie qu'on ne juge pas mon style avec la rigueur
+(<i>du grand hiver</i>). S'il est un peu plat (<i>de terre</i>) et simple
+(<i>du jardin du roi</i>), vous n'en apprendrez pas moins
+que mon héros avait un corps (<i>de garde</i>), une tête
+(<i>d'épingle</i>), un cou (<i>de tonnerre</i>), des bras (<i>de mer</i>), un
+cul (<i>de sac</i>), une haleine (<i>de savetier</i>), une âme (<i>de
+soufflet</i>). On lui acheta une charge (<i>de cotterets</i>) qui
+le mit dans belle passe (<i>de billard</i>). Il parlait en fort
+bons termes (<i>de Pâques ou de la Saint-Jean</i>); il était
+fort bien vêtu, ayant de belles chemises de toile (<i>d'araignée</i>),
+un magnifique rabat (<i>joie</i>) de point (<i>du jour</i>),
+une jolie culotte (<i>de boeuf</i>). Sa maison était bâtie de
+pierres (<i>philosophales</i>), soutenue de piliers (<i>de cabaret</i>);
+on y entrait par deux cours (<i>de chimie</i>), d'où en
+montant vingt-cinq degrés (<i>de chaleur</i>) on se trouvait
+dans une grande chambre (<i>de justice</i>), qui donnait
+entrée dans douze pièces (<i>de Molière</i>), toutes ornées de
+colonnes (<i>de chiffres</i>).</p>
+
+<p>L'homme inconnu se faisait servir dans chacune (<i>à
+spectacle</i>) tour à tour une fricassée de coq-(<i>à-l'âne</i>),
+avec deux entrées (<i>de ballets</i>) et deux poulets (<i>d'amants</i>).
+Son dessert était composé d'une compote de
+coins (<i>de rue</i>), d'un pot de gelée (<i>de novembre</i>), de
+marrons (<i>d'artifice</i>) et d'amendes (<i>honorables</i>).</p>
+
+<p>Après le repas, il courait à la chasse, suivi d'une
+meute de chiens (<i>dent</i>), de quatre valets (<i>de pique</i>), et
+de deux pages (<i>de livre</i>), montés sur des chevaux (<i>de
+frise</i>), portant des lacs (<i>d'amour</i>) et des filets (<i>de canard</i>).</p>
+
+<p>Comme ce rare personnage avait souvent des tranchées
+(<i>de ville assiégée</i>), on lui ordonna la diète (<i>de
+Ratisbonne</i>).</p>
+
+<p>Ayant perdu sa femme, il voyagea et mourut d'une
+chute (<i>d'eau</i>).</p>
+
+<p>Voici une autre plaisanterie de même genre:</p>
+
+<p>Mademoiselle Esprit d'Alambic avait une très-belle
+tête à papillotes, une de ces figures de géométrie qui
+promettent; quoique demoiselle, elle avait un superbe
+port de mer (<i>mère</i>); elle portait le fronteau (<i>front
+haut</i>); elle avait un oeil de boeuf, un oeil de bouillon
+gras, un négrillon (<i>nez grillon</i>) charmant, une bouche
+de canon dans laquelle étaient des dents de loup et
+une langue de vipère, la laine (<i>l'haleine</i>) d'un mérinos,
+une oreille de veau frite au sec, une oreille de
+Midas, un couvert (<i>cou vert</i>), mais il était d'étain (<i>dé</i><i>teint</i>),
+les pôles (<i>l'épaule</i>) du monde, un bras de fauteuil,
+un bras dessus bras dessous, une main morte,
+un doigt de gaieté, un pouce de terre, un point
+(<i>poing</i>) d'Angleterre, un poignet à jour, un cou-de-pied,
+des côtes de fer, une anche (<i>hanche</i>) de basson,
+une anche oie: on voyait toujours avec un plaisir nouveau
+sa jambe de cerf, sa cheville ouvrière, son pied
+de table, son pied de grue, son talon de passe-port;
+elle joignait à tous ces avantages celui d'une éloquence
+rare, et l'on ne pouvait résister aux coups que portait
+sa patte étique (<i>pathétique</i>); quoique d'une chair
+fraîche, elle avait une teinte violette qui lui rendait la
+polaque (<i>peau laque</i>); c'était cependant une police
+(<i>peau lisse</i>), car elle n'avait pas de chagrin, et elle pouvait
+se vanter en tout temps d'avoir le cornet (<i>corps
+net</i>).</p>
+
+<p>Ce qui suit est encore dans le même genre:</p>
+
+<p class="mid">LES AVENTURES DU COURTISAN GROTESQUE.</p>
+
+<p>Le courtisan sortit un jour d'un palais (<i>de boeuf</i>)
+habillé de vert (<i>de gris</i>), parfumé (<i>comme un jambon</i>)
+d'odeur (<i>de sainteté</i>), et enveloppé d'un manteau (<i>de
+cheminée</i>). Il rencontre une dame (<i>d'échecs</i>) parée d'une
+belle robe (<i>d'avocat</i>), d'une fine fraise (<i>de veau</i>) et
+d'une riche côte (<i>de melon</i>), bordée d'un filet (<i>de vinaigre</i>).</p>
+
+<p>Ah! ma reine, s'écria-t-il, jetez les yeux sur mon
+coeur (<i>d'opéra</i>). Voyez les mille morts (<i>de bride</i>) que
+vos dédains me font souffrir. Par pitié, accordez-moi
+(<i>comme une guitare</i>) un don (<i>prieur</i>). Laissez-moi
+jouir à vos pieds (<i>destal</i>) de mon ravissement (<i>de Proserpine</i>).
+Vous balancez (<i>sur la corde</i>). Ah! belle dame,
+ne craignez pas que je change jamais (<i>mon argent
+blanc</i>). Je suis à vous pour la vie (<i>de parents</i>), j'en
+fais à l'amour le plus doux des voeux (<i>de chasteté</i>).</p>
+
+<p>La dame (<i>d'échecs</i>), flattée des transports (<i>de marchandises</i>)
+du courtisan, ne put retenir quelques souris
+(<i>de mon grenier</i>), et quelques coups d'oeil en dessous
+(<i>main</i>). Celui-ci, enhardi par cette faveur (<i>de filoselle
+blanche</i>) appelle la dame sa lumière (<i>de canon</i>), son âme
+(<i>de violon</i>), l'attire sur un banc (<i>de mariage</i>), et la
+conjure d'apaiser la violence du feu (<i>son père</i>) qui le
+consume. La bonne dame (<i>d'échecs</i>) se laisse émouvoir
+par ses larmes (<i>de sapin</i>), et le suit dans un lieu
+(<i>privé</i>) où l'on voyait de longues allées d'arbres
+(<i>généalogiques</i>), qui, enlaçant leurs branches (<i>collatérales</i>),
+donnaient beaucoup d'ombre (<i>des Champs-Élysées</i>).
+Les parterres étaient émaillés de fleurs (<i>de
+rhétorique</i>). On y respirait un air doux (<i>de clavecin</i>),
+et l'on se reposait sous de riants berceaux (<i>d'enfants</i>),
+impénétrables aux chaleurs (<i>de poitrine</i>) et rafraîchis
+par plusieurs bassins (<i>de barbiers</i>).</p>
+
+<p>Ce lieu charmant aiguisait l'appétit le plus malade.
+Le courtisan y fit dresser une table (<i>de la loi</i>) et servir
+un coq (<i>de clocher</i>), entre deux entrées (<i>aux barrières</i>)
+suivi d'un friand dessert, où l'on remarquait de belles
+poires (<i>d'angoisses</i>) et d'excellentes pêches (<i>de marée</i>).
+La dame fit honneur à cette collation (<i>de bénéfice</i>).
+Pour le courtisan, il mangea peu, babilla beaucoup,
+conta (<i>par livres, sous et deniers</i>) toutes ses bonnes
+fortunes (<i>du pot</i>), reconduisit ensuite chez elle sa
+nouvelle conquête (<i>de l'Amérique</i>), et se retira (<i>comme
+un parchemin</i>).</p>
+
+<p>Le lendemain, il prend un peu d'encre (<i>de navire</i>),
+taille quelques plumes (<i>d'oreiller</i>), fait des vers (<i>à
+soie</i>) les plus galants du monde, et vite en charge un
+courrier (<i>de Rome</i>), qui met ses bottes (<i>de foin</i>), monte
+sur le cheval (<i>de Troie</i>), galope, ou plutôt vole (<i>une
+tabatière</i>) chez la dame (<i>d'échecs</i>) et rapporte aussitôt
+à l'amoureux sa réponse (<i>en salade</i>).</p>
+
+<p>Il le trouve couché dans un lit (<i>de rivière</i>), suant, se
+débattant et ravi en extaxe jusqu'au ciel (<i>du lit</i>). Un
+bel esprit (<i>du cimetière</i>) cherchait en vain à le distraire
+de ses pensées (<i>odoriférantes</i>). Notre amoureux n'écouta
+point (<i>et virgule</i>) ce qu'il disait. Il lut la lettre
+(<i>dominicale</i>) que venait de lui remettre le courrier; et
+enchanté il prend les plus beaux habits de son coffre
+(<i>fort</i>) et va tout droit (<i>romain</i>) chez sa mie (<i>de pain
+mollet</i>).</p>
+
+<p>Cependant, un ancien amoureux de la belle se livre
+à la jalousie (<i>d'une fenêtre</i>), et ne pouvant souffrir
+que la dame (<i>d'échecs</i>) soit possédée (<i>du démon</i>) par
+un autre que lui, il envoie au courtisan un appel
+(<i>comme d'abus</i>). Les deux rivaux se trouvent sur le
+champ (<i>des rossignols</i>), viennent aux prises (<i>de rhubarbe</i>),
+se portent tour à tour plusieurs coups (<i>de vin</i>),
+frappent de pointe (<i>des cheveux</i>), de revers (<i>de médaille</i>),
+enfin, après un long combat (<i>des passions</i>), le
+courtisan allonge à son rival une terrible botte (<i>molle</i>);
+il le blesse; le fait porter chez un esculape pour le faire
+panser (<i>à ses affaires</i>), revient triomphant sur un
+char (<i>de fumier</i>) et se jette aux genoux de sa bonne
+dame (<i>d'échecs</i>) qui le reçoit à bras ouverts (<i>par trois
+cautères</i>) et lui accorde sa main (<i>de papier</i>), après lui
+avoir donné quelques jours (<i>de vigile et jeûne</i>) pour
+se remettre.</p>
+
+<p>Quand les noces furent faites, on mit l'épousée dans
+une couche (<i>de citrouilles</i>) bien mollement garnie de
+plumes (<i>d'écritoire</i>), puis l'on dansa autour (<i>d'un couvent
+grillé</i>) au son (<i>de la farine</i>) que rendaient mille
+instruments (<i>de mathématiques</i>).</p>
+
+<p>Nos époux donnèrent de grandes fêtes (<i>mobiles</i>), se
+divertirent pendant quelques mois avec leurs connaissances
+(<i>littéraires</i>), visitèrent ensuite leur château
+(<i>en Espagne</i>), leurs terres (<i>australes</i>), leurs champs
+(<i>de bataille</i>), et ayant tiré de leurs fermiers différentes
+sommes (<i>de saint Thomas</i>), ils parurent à la
+cour (<i>tille</i>). Le mari acheta un office (<i>des morts</i>), devint
+officier (<i>d'office</i>), et par ses grands talents (<i>d'or</i>),
+fut bientôt général (<i>des capucins</i>); il fit alors de
+fameux exploits (<i>de sergent</i>), de belles actions (<i>de
+grâces</i>) dont il fut loué (<i>à dix sous par jour</i>) et eut la
+gloire de mourir dans une grande journée (<i>d'été</i>),
+laissant toute la terre dans la douleur (<i>de l'enfantement</i>).</p>
+
+<p>On lui fit cet épitaphe:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Ci-gît un courtisan grotesque</p>
+<p class="i20">Un fantôme godeluresque;</p>
+<p class="i20">Fils du mensonge décevant:</p>
+<p class="i20">Il vécut sans corps et sans âme.</p>
+<p class="i20">Passant, regarde sous sa lame,</p>
+<p class="i20">Tu n'y trouveras que du vent.</p>
+</div></div>
+
+<h4>COQUELICOT</h4>
+
+<p>Le mot coq doit se prononcer coque et non pas co,
+excepté dans coq d'Inde, qui se prononce codinde.
+Cependant, un provincial, tenant à l'usage de sa province,
+enseignait la prononciation de cette manière à
+son fils qui le consultait:</p>
+
+<p>Écris <i>coq, lis co</i>.</p>
+
+<h4>CORBEAU</h4>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Tout alla bien, quand Talma prit Racine</p>
+<p class="i20">Et dans Corneille il était encor beau.</p>
+<p class="i20">Mais Manlius prépara sa ruine;</p>
+<p class="i20">Et dans La Fosse il trouva son tombeau.</p>
+</div></div>
+
+<h4>CORDE</h4>
+
+<p>Tout va bien, disait un représentant sous Louis-Philippe;
+j'ai mérité la croix et les ministres <i>l'accordent</i>.</p>
+
+<h4>CORPS</h4>
+
+<p>Un musicien, qui jouait des fanfares à la Moskowa,
+fut attaqué par un Russe, qui lui passa son sabre dans
+le cor, sans lui faire aucun mal.</p>
+
+<h4>COSSES</h4>
+
+<p>Les faiseurs de calembours disent que la patrie des
+poids, c'est l'Écosse.</p>
+
+<h4>COTON</h4>
+
+<p>Le Père Cotton, jésuite, était le confesseur de
+Henri IV; il avait, par son dévouement, pris un certain
+ascendant sur ce monarque, ce qui donna lieu à cette
+pointe des protestants: Henri est assez bon prince,
+c'est dommage qu'il ait du <i>coton</i> dans les oreilles.</p>
+
+<h4>COU</h4>
+
+<p>On s'étonnait de l'effronterie d'un filou en guenilles,
+portant une magnifique cravate, qu'il venait de voler.--Quelqu'un
+dit: il l'a mise pour cacher son <i>coup</i>.</p>
+
+<h4>COUCHE</h4>
+
+<p>Le marquis de Bièvre dînant chez le financier Beaujon,
+on servit un melon auquel les convives reprochèrent
+ses pâles couleurs: «C'est qu'il relève de
+couche,» dit le marquis.</p>
+
+<h4>COUPS</h4>
+
+<p>Ce mot a beaucoup de sens, qui sont ingénieusement
+passés en revue dans cette chanson de Désaugiers:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Tout homme ici bas a sa part</p>
+<p class="i20">Des coups qui menacent la vie;</p>
+<p class="i20">Le joueur craint ceux du hasard,</p>
+<p class="i20">Le riche craint ceux de l'envie.</p>
+<p class="i20">L'ennemi craint ceux du canon,</p>
+<p class="i20">Le poltron craint les coups de canne;</p>
+<p class="i20">Et l'homme à talents est, dit-on,</p>
+<p class="i20">Sujet au coup de pied de l'âne.</p>
+<br>
+<p class="i20">Un coup de tête, bien souvent,</p>
+<p class="i20">Aux jeunes gens devient funeste.</p>
+<p class="i20">Un coup de langue est du méchant</p>
+<p class="i20">L'arme qu'à bon droit on déteste.</p>
+<p class="i20">L'espérance du laboureur</p>
+<p class="i20">Par un coup de vent est trompée.</p>
+<p class="i20">Un coup de patte à son auteur</p>
+<p class="i20">Par fois attire un coup d'épée.</p>
+<br>
+<p class="i20">Tous fiers de leurs nouveaux succès,</p>
+<p class="i20">Nos riches, étonnés de l'être,</p>
+<p class="i20">Se vantent que leurs coups d'essais</p>
+<p class="i20">Ont été de vrais coups de maître.</p>
+<p class="i20">Un coup de théâtre mal fait</p>
+<p class="i20">Indispose tout un parterre,</p>
+<p class="i20">Et l'auteur, au coup de sifflet,</p>
+<p class="i20">Est frappé d'un coup de tonnerre.</p>
+<br>
+<p class="i20">Chers amis, comme en vous chantant</p>
+<p class="i20">Coup sur coup trois couplets, je tremble</p>
+<p class="i20">D'avoir perdu les coups de dents,</p>
+<p class="i20">Buvons au moins un coup ensemble.</p>
+<p class="i20">Si de ma chanson sur les coups</p>
+<p class="i20">L'assommante longueur vous lasse,</p>
+<p class="i20">Je consens, par pitié pour vous,</p>
+<p class="i20">A vous donner le coup de grâce.</p>
+</div></div>
+
+<h4>COURBE</h4>
+
+<p>À propos des fêtes que l'on fit à Lons-le-Saulnier
+pour l'inauguration de la statue du général Lecourbe,
+la <i>Sentinelle du Jura</i> a remis en lumière un quatrain
+composé à l'époque où, avec 9,000 hommes, ce général
+parvint à faire 35,000 prisonniers et à arrêter court
+au pied des Alpes les armées russes qui s'avançaient
+à grands pas pour envahir le territoire de la République.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Par trop d'emportement sujet à se méprendre,</p>
+<p class="i16">Suwarow vers Paris prenait son chemin droit,</p>
+<p class="i16">Quand, battu près Glaris, chacun dans cet endroit</p>
+<p class="i16">Lui dit: C'était <i>le courbe</i>, ami, qu'il fallait prendre.</p>
+</div></div>
+
+<h4>COURTE-POINTE</h4>
+
+<p>On prétendit, en 1780, que le marquis de Bièvre
+étant entré un jour d'été chez le roi, le prince lui dit:
+«Marquis de Bièvre, faites-nous une pointe qui soit
+bonne et courte.» Le marquis répondit: «Sire, il
+fait trop chaud pour se charger de courtes-pointes.»</p>
+
+<h4>COUVERT DE BOIS</h4>
+
+<p>Quand est-ce que le dos d'un bûcheron est propre
+à retourner la salade?</p>
+
+<p>--Quand il est <i>couvert de bois</i>.</p>
+
+<h4>COUVERTS D'ÉTAIN</h4>
+
+<p>M. F. disait l'autre jour à M. G. S.-H.: Quels sont
+les animaux qui savent se procurer des fourchettes et
+des cuillers?</p>
+
+<p>--Ni vu ni connu.</p>
+
+<p>--Ce sont les lapins quand ils sont à jeun, parce
+qu'ils cherchent partout jusqu'à ce qu'ils aient <i>découvert
+des thyms</i>.</p>
+
+<h4>COUVERTURES</h4>
+
+<p>On a donné ce conseil à un frileux: «Vous louez
+un appartement dans lequel se trouve une pièce ayant
+deux fenêtres et trois portes; vous les ouvrez toutes
+et vous avez cinq ouvertures.»</p>
+
+<h4>CRACHAT</h4>
+
+<p>Ce mot a de très-singulières applications. Elles sont
+employées dans un quatrain publié à l'entrée de 1789,
+sous le titre de <i>prophétie de Nostradamus</i>:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20"> En quatre-vingt-neuf, grand combat.</p>
+<p class="i16">Les Gaulois s'armeront les uns contre les autres.</p>
+<p class="i16">Le seigneur d'Orléans y perdra son crachat;</p>
+<p class="i20"> Mais il sera couvert des nôtres.</p>
+</div></div>
+
+<h4>CROIRE</h4>
+
+<p>Un demi-savant disait, dans un salon:--Je ne
+crois que ce que je comprends.--Comprenez-vous, lui
+objecta le père Lacordaire, comment le feu fait fondre
+le beurre et durcir les oeufs?--Non, je ne le comprends
+pas.--Cependant, vous croyez à l'omelette.</p>
+
+<h4>CROISÉS</h4>
+
+<p>Un jeune homme cherchait à établir qu'un de ses
+aïeux s'était croisé du temps de saint Louis.--C'est
+vrai, dit un de ses amis; il s'est même croisé deux
+fois. La première fois, il s'est croisé les bras; la seconde
+fois il s'est croisé les jambes.</p>
+
+<p>Un farceur demandait à quoi auraient ressemblé
+Tancrède et Godefroid de Bouillon s'ils eussent pris
+du tabac. On lui répondit:--à des croisés à tabatières.</p>
+
+<h4>CROIX</h4>
+
+<p>On avait donné à deux enfants un biscuit. C'était
+au seizième siècle.</p>
+
+<p>--Jouons-le à croix ou pile, dit le premier. Il tira
+un doublon et le jeta en disant:--Moi, je prends la
+croix.--Et moi, dit le second, je prends le biscuit,--et
+il le mangea.</p>
+
+<h4>CRUCHES</h4>
+
+<p>Rien de plus singulier, disait M. de Maurepas, alors
+ministre, que la manière dont se tient le conseil chez
+quelques nations nègres; représentez-vous une salle
+d'assemblée où sont placées une douzaine de grandes
+cruches remplies d'eau: c'est là que, nus, et d'un pas
+grave, se rendent une douzaine de conseillers d'État.
+Arrivés dans cette chambre chacun saute dans sa
+cruche, s'y enfonce jusqu'au cou, et c'est dans cette
+posture qu'on délibère sur les affaires d'État.</p>
+
+<p>Mais quoi! vous ne riez pas, ajouta Maurepas en se
+tournant vers le prince de Ligne, son voisin.</p>
+
+<p>--C'est, répondit-il, que j'ai vu quelquefois une
+chose plus plaisante encore.</p>
+
+<p>--Et quoi donc, s'il vous plaît?</p>
+
+<p>--C'est un pays où les cruches seules tiennent conseil.</p>
+
+<p>Dans les farces qu'il faisait, F... n'était pas toujours
+heureux. Il se présenta un jour plus que gris
+à la barrière, et dit au commis de l'octroi:--Je passe
+du vin que vous ne me ferez pas payer.</p>
+
+<p>--Monsieur, répondit un des employés, le vin en
+cruche ne paye pas.</p>
+
+<h4>CUBES</h4>
+
+<p>M. Pouillet disait l'autre jour à M. Cauchy: Quel
+est le personnage grec qui aimait le mieux la géométrie?</p>
+
+<p>--Je ne sais pas, répondit M. Cauchy, et pourtant
+je voudrais bien le savoir.</p>
+
+<p>--Eh bien... c'est Priam!</p>
+
+<p>--Et pourquoi.</p>
+
+<p>--Parce qu'il était amoureux d'Hécube (<i>des cubes</i>).</p>
+
+<h4>CUIR</h4>
+
+<p>Comment feriez-vous des bottes avec une pomme?
+Je la ferais cuire.</p>
+
+<h4>CYRUS</h4>
+
+<p>On annonçait chez un libraire les voyages de Cyrus;
+tous les Russes qui en entendaient parler achetaient
+ce livre, croyant que c'étaient les voyages de
+six de leurs compatriotes.</p>
+<br>
+<h2>D</h2>
+
+<h4>DATTES</h4>
+
+<p>Un Anglais, qui aimait beaucoup les dattes, grognait
+contre les épiciers qui les lui vendaient souvent avariées.
+En passant sur le quai des Augustins, il lut à la
+fenêtre d'un libraire l'étiquette d'un in-folio. C'était
+le savant travail des Bénédictins intitulé: l'<i>Art de
+vérifier les dates</i>.--Voilà mon affaire, dit-il. Il acheta
+le livre, l'emporta, et grogna de nouveau en n'y trouvant
+que les dates historiques qui l'occupaient moins
+que les dattes du dattier.</p>
+
+<h4>DÉCRET</h4>
+
+<p>Un savant prétend que les mots décret et décréter ont
+été inventés par Minos roi et législateur de la Crète.</p>
+
+<h4>DEDANS</h4>
+
+<p>On disait d'un merveilleux, qui avait perdu ses
+dents et qui se pavanait comme un autre, que quand
+il se présentait devant un miroir, il ne se voyait
+jamais <i>de dents</i>.</p>
+
+<p>Un autre se plaignait d'avoir un mal de dents qu'il
+ne pouvait pas mettre dehors.</p>
+
+<h4>DÉGOÛTER</h4>
+
+<p>Pourquoi se plaint-on des jours pluvieux?--Parce
+qu'on <i>sent des gouttes</i>.</p>
+
+<h4>DÉMOCRATE</h4>
+
+<p>Épigramme.--Anagramme. 1799.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Ces jours passés, un fougueux démocrate,</p>
+<p class="i16">Que l'anagramme en tout temps transporta.</p>
+<p class="i20"> Du vilain mot aristocrate</p>
+<p class="i20"> Avec labeur <i>iscariote</i> ôta.</p>
+<p class="i16">Un gros monsieur, habillé d'écarlate,</p>
+<p class="i16">Dit en courroux: Quel butor est-ce là?</p>
+<p class="i16">J'ai trouvé bien mieux que cela;</p>
+<p class="i16">On en conviendra, je m'en flatte;</p>
+<p class="i20"> Car sans tricher d'un iota,</p>
+<p class="i20"> Démocrate <i>me décrota</i>.</p>
+</div></div>
+
+<h4>DÉROBÉ</h4>
+
+<p>Le financier La Noue montrait une magnifique
+maison qu'il venait de faire bâtir, à un seigneur qui
+savait bien qu'en penser. Après lui avoir fait parcourir
+plusieurs beaux appartements:--Admirez, lui dit-il
+cet escalier dérobé.--Le visiteur repartit:--Il est
+comme le reste de la maison.</p>
+
+<h4>DÉSASTRE</h4>
+
+<p>Dans les derniers jours du Directoire, on trouva un
+matin, sur la porte du Luxembourg, un magnifique
+soleil fraîchement peint, et portant au milieu de ses
+rayons ce seul mot: <i>la République</i>. Les Parisiens
+comprirent le rébus, et tout le monde le lisait. (La
+République dans le plus grand des astres.)</p>
+
+<h4>DESCARTES</h4>
+
+<p>Le marquis de Saint-Aulaire, qui, à la fin du
+XVIIe siècle, fit les délices de la cour de la duchesse
+du Maine, fut prié un jour par cette princesse de lui
+expliquer le système de Newton. La sachant zélée
+cartésienne, le spirituel marquis éluda la question en
+improvisant ce petit couplet sur l'air <i>des fraises</i>:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i14">Princesse, détachons-nous</p>
+<p class="i14">De Newton, de Descartes;</p>
+<p class="i14">Ces deux espèces de fous</p>
+<p class="i14">N'ont jamais vu le dessous</p>
+<p class="i20"> Des cartes,</p>
+<p class="i20"> Des cartes,</p>
+<p class="i20"> Des cartes.</p>
+</div></div>
+
+<h4>DÉTESTABLE</h4>
+
+<p>On s'est réjoui beaucoup en 1858 d'avoir une si
+grande suite de jours d'été stables.</p>
+
+<h4>DÉTRESSE</h4>
+
+<p>Plaignez les coiffeurs parce qu'ils vivent souvent
+avec <i>des tresses</i>.</p>
+
+<h4>DEUX</h4>
+
+<p>L'abbé Morellet disait: «Il faut être deux pour
+manger une dinde truffée; je ne fais jamais autrement.
+J'en ai une aujourd'hui, nous serons deux,--la
+dinde et moi.»</p>
+
+<p>Madame Denys était fort laide. Comme elle était
+encore au lit avec son mari, qu'elle avait épousé après
+la mort de Voltaire, on introduisit dans sa chambre
+un paysan qui lui apportait de l'argent.</p>
+
+<p>À la vue de ces deux têtes il ne sut à qui s'adresser.--Messieurs,
+leur dit-il, lequel de vous deux est madame?»</p>
+
+<h4>DEVANT</h4>
+
+<p>Le comte de Lauraguais, ruiné, n'avait plus que
+mille écus de rente, et il donnait trois mille livres
+à son coureur.--J'ai trouvé le moyen, disait-il,
+d'avoir toujours une année de mes revenus devant
+moi.</p>
+
+<p>On raconte autrement la même chose:</p>
+
+<p>Bien jeune, le vicomte de Choiseul s'était fait remarquer
+par une réponse à Louis XV. Ce monarque lui
+reprochant un jour des prodigalités qui le menaçaient
+d'une ruine certaine, il lui répondit: «Sire, on m'a
+calomnié auprès de votre Majesté, car j'ai toujours une
+année de mon revenu devant moi.» Le vicomte disait
+vrai, il ne lui restait plus que douze mille livres de
+rente, et la riche livrée de son coureur coûtait douze
+mille francs.</p>
+
+<h4>DEVIN</h4>
+
+<p>Le marquis de Bièvre disait que l'esprit-de-vin était
+nécessaire pour deviner un calembour.</p>
+
+<h4>DEVOIR</h4>
+
+<p>Une ville assez pauvre fit une dépense considérable
+en fêtes et en illuminations au passage de son prince.
+Il en parut lui-même étonné.--Elle n'a fait, dit un
+courtisan flatteur, que ce qu'elle devait.--Cela est
+vrai, répliqua un seigneur mieux intentionné, mais
+elle doit tout ce qu'elle a fait.</p>
+
+<p>Un Florentin connu de Pogge avait besoin d'un cheval.
+Il en trouva un qu'on voulut lui vendre vingt-cinq
+ducats.--Je vous en donnerais quinze comptant, dit-il
+au maquignon, et je serai votre débiteur du reste.
+Le maquignon y consentit. Quelques jours après il
+alla demander ses dix ducats.--Il faut, dit l'acheteur,
+vous en tenir à nos conventions. Je vous ai dit que je
+vous devrais le reste, et je ne vous le devrais plus si je
+vous le payais.</p>
+
+<p>Un oncle gourmandant son neveu sur ses folles dépenses,
+lui dit: «Tu fais des dettes partout, tu dois à
+Dieu et à diable.--Précisément, mon oncle, reprit
+le neveu, vous venez de citer les deux seuls êtres
+auxquels je ne doive rien.»</p>
+
+<h4>DIFFÉRENCES</h4>
+
+<p>Madame la duchesse du Maine demanda un jour à
+quelques gens de beaucoup d'esprit qui s'assemblaient
+chez elle: «Quelle différence y a-t-il entre moi et une
+pendule?» Ces messieurs se trouvaient fort embarrassés
+pour la réponse, lorsque M. de Fontenelle entra.
+La même question lui fut faite par la princesse. Il
+répondit sur-le-champ: «La pendule marque les
+heures, et votre altesse les fait oublier.»</p>
+
+<p>Sous ce titre de différences, les bonnes gens ont une
+série d'énigmes, où le calembour et le jeu de mots se
+présentent quelquefois:</p>
+
+<p>Quelle différence y a-t-il entre une femme et une
+serrure?</p>
+
+<p>--Celle-ci, qu'une serrure est pleine de vis et une
+femme pleine de vertus.</p>
+
+<p>Quelle différence y a-t-il entre un juge et une
+échelle?</p>
+
+<p>--C'est qu'un juge fait lever la main et qu'une
+échelle fait lever le pied.</p>
+
+<p>Quelle différence y a-t-il entre Alexandre le Grand
+et un tonnelier?</p>
+
+<p>--C'est qu'Alexandre mit les Perses en pièces et
+qu'un tonnelier met les pièces en perce.</p>
+
+<p>Quelle différence y a-t-il entre Louis XIV et un cuisinier?</p>
+
+<p>--Celle-ci, que Louis XIV était un potentat et qu'un
+cuisinier est un tâte en pot.</p>
+
+<p>Quelle différence y a-t-il entre Frédéric II et son
+meunier de Sans-Souci?</p>
+
+<p>--C'est que Frédéric II connaissait la tactique et
+son meunier le tictac.</p>
+
+<h4>DIFFICULTÉS</h4>
+
+<p>Avant le 31 mai 1794, T... demandait à B... s'il n'y
+avait aucuns moyens de rapprochement entre la Montagne
+et les Girondins.--Aucun répond celui-ci; ces
+gens-là ont des têtes trop difficiles.--Difficiles, répliqua
+T... Eh bien! on tranchera les difficultés.</p>
+
+<h4>DIGÉRER</h4>
+
+<p>Montmaur, le célèbre parasite, disait d'un financier
+chez qui tout le monde allait pour sa table et que l'on
+trouvait très-ennuyeux: «On le mange, mais on ne
+digère pas.»</p>
+
+<h4>DIMINUER</h4>
+
+<p>Que dit la miche quand on la coupe?--Elle diminue.</p>
+
+<h4>DINDON</h4>
+
+<p>Rossini avait fait un pari; je ne sais quel était le sujet
+du pari; mais l'enjeu était une dinde truffée. Son adversaire
+le perdit, et comme il ne se pressait pas de s'exécuter,
+Rossini lui dit un jour: «Eh bien! mon cher,
+à quand donc la dinde?» L'autre: «Les truffes ne
+sont pas encore bonnes.--Allons donc, dit le maestro,
+ce sont les dindons qui font courir ce bruit-là.»</p>
+
+<h4>DÎNER</h4>
+
+<p>Quand est-ce qu'un priseur prend le plus de tabac?--Quand
+il a dix nez.</p>
+
+<h4>DONNER</h4>
+
+<p>Montesquieu disputait sur un fait avec un conseiller
+du parlement de Bordeaux, qui avait de l'esprit, mais
+la tête un peu chaude. Celui-ci, à la suite de plusieurs
+raisonnements débités avec fougue, dit: M. le président,
+si cela n'est pas comme je vous le dis, je vous
+donne ma tête.--Je l'accepte, répondit froidement
+Montesquieu, les petits présents entretiennent l'amitié.</p>
+
+<p>Le mot <i>donner</i> a beaucoup d'expressions singulières.
+Un fossoyeur disait un jour:--Ça va mal; le mort ne
+donne pas.</p>
+
+<p>Une vieille dame demandait à son voisin, dans un
+salon:</p>
+
+<p>--Combien me donnez-vous d'années?</p>
+
+<p>--Vous en avez assez, Madame, répondit le voisin,
+sans que je vous en donne encore.</p>
+
+<h4>DOS</h4>
+
+<p>Quelle différence y avait-il, avant la révolution,
+entre la reine de France et son chat:--C'est que le
+chat faisait le gros dos, et la reine le Dauphin.</p>
+
+<h4>DOUBLE SENS</h4>
+
+<p>On a fait plusieurs fois des vers qui ont un double
+sens, lorsqu'on les lit dans l'idée de l'auteur. Nous n'en
+citerons qu'un exemple. C'est le serment civique <i>à
+double face</i> de 1792. Si on lit ces vers à pleine ligne
+ils ont un sens, qui est démenti lorsqu'on les relit
+à deux colonnes:</p>
+
+<pre>
+ À la nouvelle loi je veux être fidèle
+ Je renonce dans l'âme. au régime ancien.
+ Comme article de foi je crois la loi nouvelle
+ Je crois celle qu'on blâme. opposée à tout bien.
+ Dieu vous donne la paix messieurs les démocrates,
+ Noblesse désolée, au diable allez-vous-en,
+ Qu'il confonde à jamais tous les aristocrates
+ Messieurs de l'assemblée ont seuls le vrai bon sens.
+</pre>
+
+<h4>DOUCEUR</h4>
+
+<p>Un complimenteur disait au salon de M. Thiers:--Une
+heure passée ici est une douce heure.</p>
+
+<h4>DROIT</h4>
+
+<p>Quelqu'un ayant demandé à un homme qui avait
+les jambes crochues, quel chemin il avait pris pour
+venir de Londres.--Je suis venu tout droit, lui répondit-il.--En
+ce cas, Monsieur, reprit l'autre, vous
+avez furieusement changé dans la route.</p>
+
+<h4>DROMADAIRE</h4>
+
+<p>Il est mâle et femelle. Lorsque la République de 1848
+sollicita les assentiments de la province, les notables
+républicains de Valence envoyèrent au gouvernement
+provisoire cette adresse laconique: <i>la Drôme adhère</i>.</p>
+
+<h4>DUCIS</h4>
+
+<p>Deux bibliomanes jouant aux dominos, l'un demanda:
+«As-tu du six?...--Ducis? répondit l'autre.
+Non, mais mon libraire me l'apportera demain.</p>
+
+<p>Il se préoccupait de Ducis, le poëte.</p>
+<br>
+<h2>E</h2>
+
+<p>Les lettres les moins sémillantes sont les lettres
+E B T. Un E est aussi la lettre qui porte le mieux les
+lunettes.</p>
+
+<h4>EAU FINE</h4>
+
+<p>Quelle est la fontaine de Paris qui fournit l'eau la
+plus délicate?</p>
+
+<p>--C'est la fontaine Dauphine.</p>
+
+<h4>ÉCHELLES</h4>
+
+<p>Un nouvelliste disait, dans un café de Paris, qu'il y
+avait une arche du Pont-Euxin de tombée.--Cela est
+si vrai, reprit un autre, que le Grand Seigneur a
+ordonné qu'on prît les échelles du Levant pour la
+rétablir.</p>
+
+<h4>ÉCHO</h4>
+
+<p>Quelques jeunes gens s'entretenaient d'un écho qui
+avait fait plaisir dans la musique d'une pièce nouvelle.
+A cette occasion, on se mit à parler d'échos qui rendaient
+deux, trois, quatre et cinq syllabes. Chacun
+citait, exagérait même, lorsqu'un Gascon qui n'avait
+encore rien dit, s'écria:--Qué mé dites-vous là, mes
+amis? Vive celui de mon pays! On lui dit:--Écho,
+comment te portes-tu? Il répondit:--Jé mé porté bien.
+Voilà un écho, céla.</p>
+
+<p class="mid">DIALOGUE ENTRE UN REPRÉSENTANT ET L'ÉCHO.</p>
+
+<pre>
+Si je te parle, Écho, de toi serai-je ouï? Oui.
+Qu'a-t-on dit que j'étais dans l'emploi de Solon? Long.
+Eh! comment voulait-on que fussent mes discours? Courts.
+On m'assure pourtant que je fus éloquent. Quand?
+Que dit-on du <i>quantum</i> que l'on me fait toucher? Cher.
+Penses-tu que je sois regretté du vulgaire? Guère.
+Renaîtrai-je de l'urne ainsi que le phénix? Nix.
+L'électeur, que dit-il? Je suis sur mon départ. Pars.
+Je vais donc te quitter, ô nation française? Aise.
+Voilà de mon mandat un bien triste examen! <i>Amen.</i>
+</pre>
+
+<p class="mid">L'ÉCHO À UN MINISTRE DE LA DYNASTIE DE JUILLET.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i12">On dit que vous aimez la guerre;</p>
+<p class="i20"> --Guère!</p>
+<p class="i12">Que vous raffolez du canon;</p>
+<p class="i20"> --Non!</p>
+<p class="i12">Que, nuit et jour, et sans relâche,</p>
+<p class="i20"> --Lâche,</p>
+<p class="i12">À l'Anglais vous montrez le poing:</p>
+<p class="i20"> --Point!</p>
+<p class="i12">Que, ne voulant ni paix ni trêve,</p>
+<p class="i20"> --Rêve!</p>
+<p class="i12">Vous n'aspirez que le combat.</p>
+<p class="i20"> --Bah!...</p>
+<p class="i12">Pritchard, qui vous trouve admirable</p>
+<p class="i20"> --Hable,</p>
+<p class="i12">Et qui vous proclame charmant,</p>
+<p class="i20"> --Ment,</p>
+<p class="i12">Prétend que votre coeur escompte</p>
+<p class="i20"> --Honte</p>
+<p class="i12">Jusqu'à l'honneur évanoui;</p>
+<p class="i20"> --Oui;</p>
+<p class="i12">Que votre gloire est colossale</p>
+<p class="i20"> --Sale,</p>
+<p class="i12">Et qu'on bénira votre nom.</p>
+<p class="i20"> --Non!!</p>
+<br>
+<p class="i20"><i>Capitaine</i> <span class="sc">Cléveland</span>.</p>
+</div></div>
+
+<p class="mid">LES ÉCHOS DE LA MONTAGNE (1848).</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i14">Vous parlez ab hoc et ab hâc</p>
+<p class="i20"> --Bac.</p>
+<p class="i14">Vous ferez bien souvent, Chauffour,</p>
+<p class="i20"> --Four.</p>
+<p class="i14">Votre parole est, Laclodure,</p>
+<p class="i20"> --Dure;</p>
+<p class="i14">La vôtre n'est pas, Madesclaire,</p>
+<p class="i20"> --Claire;</p>
+<p class="i14">Que vos discours sont donc, Charras,</p>
+<p class="i20"> --Ras;</p>
+<p class="i14">Votre débit n'est pas, Cambon,</p>
+<p class="i20"> --Bon:</p>
+<p class="i14">Économisez notre argent,</p>
+<p class="i20"> --Gent;</p>
+<p class="i14">Parlez donc et votez, Crémieux,</p>
+<p class="i20"> --Mieux.</p>
+<p class="i14">Enfin, pour paraître moins gauche,</p>
+<p class="i20"> --<i>Gauche</i>,</p>
+<p class="i14">Faites surtout tous vos discours,</p>
+<p class="i20"> --Courts.</p>
+</div></div>
+
+<h4>ÉCLAIRER</h4>
+
+<p>Un ferblantier de Besançon, s'étant passionné pour
+Voltaire à la lecture de ses ouvrages, désira ardemment
+de le voir; il arrive à Ferney et demande à être
+présenté au maître du château; les gens le refusent
+durement; il insistait, lorsque le patriarche des philosophes,
+qui avait vu arriver celui-ci à pied, mal vêtu,
+enfin dans un équipage par trop philosophique, ouvre
+sa fenêtre et lui demande brusquement:--Qui êtes-vous?
+Que faites-vous? Le ferblantier répond fièrement:--Je
+fais comme vous, j'éclaire le monde...,
+je fais des lanternes.</p>
+
+<p>Cette plaisanterie lui valut, dit-on, un accueil favorable.</p>
+
+<h4>ÉCRIRE</h4>
+
+<p>Un savant, connu par un nasillement extraordinaire,
+assistait à la lecture d'un ouvrage historique.--Cet
+ouvrage est mal écrit, s'écria-t-il, un style prétentieux,
+plein d'affectation! Il faut avant tout écrire comme
+on parle.--C'est fort bien, dit un ami de l'auteur,
+mais alors, vous qui parlez du nez, vous devez écrire
+de même.</p>
+
+<p>L'abbé Alary fut reçu parmi les Quarante, quoiqu'il
+n'eût publié aucun ouvrage. Lorsqu'il alla faire ses
+visites, il laissa son billet chez un académicien de
+qualité, qui était sorti et qui n'avait jamais entendu
+parler de lui. En rentrant avec un de ses amis, l'académicien
+trouva le billet, le lut, et dit, avec le ton de
+la surprise:</p>
+
+<p>--L'abbé Alary! je ne le connais pas; qu'a-t-il
+écrit?--Son nom, reprit l'autre.</p>
+
+<h4>EFFORT</h4>
+
+<p>Voyant un homme qui avait le nez très-gros, Odry
+disait:--En faisant cet homme-là la nature a fait
+<i>un nez fort</i>.</p>
+
+<h4>ÉGALITÉ</h4>
+
+<p>Il y a sur ce mot quelques couplets dans la chanson
+du communisme, qui se chante sur l'air: <i>Ah! le bel
+oiseau, maman.</i> Nous ne copions pas le refrain:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Pour être vraiment égaux,</p>
+<p class="i20">Tous devront naître de même,</p>
+<p class="i20">Ni plus forts, ni moins nigauds</p>
+<p class="i20">Que les rêveurs du système.</p>
+<br>
+<p class="i20">L'esprit n'est plus bon à rien;</p>
+<p class="i20">Nous l'abolissons d'avance!</p>
+<p class="i20">Nous savons, on le voit bien,</p>
+<p class="i20">Nous passer d'intelligence.</p>
+<br>
+<p class="i20">À quoi servent, ici-bas,</p>
+<p class="i20">Les peintres et les poëtes?</p>
+<p class="i20">Raphaël fera des bas</p>
+<p class="i20">Et Corneille des chaussettes.</p>
+</div></div>
+
+<h4>EMPLOI</h4>
+
+<p>Un capitaine qui avait été barbier, partant pour
+aller au siége d'une ville, on lui dit:--Si l'on rase
+cette ville, vous pourrez bien y avoir de l'emploi.</p>
+
+<h4>EMPORTER</h4>
+
+<p>Voici un proverbe:</p>
+
+<p>«Ne nous emportons pas, nous ne nous en porterons
+que mieux.»</p>
+
+<h4>EN</h4>
+
+<p>Prête au calembour dans plusieurs circonstances. Un
+riche bourgeois disait, dans une réunion:--On doit
+du respect et des honneurs aux <i>gens en place</i>.--Je
+suis dans ce cas-là, dit un jeune homme qu'on ne remarquait
+pas, et je me contenterai d'un peu d'aide.</p>
+
+<p>--Dans quel cas êtes-vous?</p>
+
+<p>--Dans le cas assez triste des <i>gens sans place</i>.</p>
+
+<p>On a fait ce quatrain sans rime sur les bonnets de
+juge:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">L'huissier s'en glorifie;</p>
+<p class="i20">Le procureur s'en pare;</p>
+<p class="i20">L'avocat s'en joue;</p>
+<p class="i20">Tandis que le juge s'endort.</p>
+</div></div>
+
+<h4>ENCORNÉ</h4>
+
+<p>Un farceur se vantait d'avoir mangé d'un veau qui
+n'était pas <i>encorné</i>.</p>
+
+<h4>ENCRE</h4>
+
+<p>Un voyageur revenant d'Angleterre s'excusait auprès
+de sa femme de ne lui avoir pas écrit.--C'était
+mon intention, disait-il, mais je ne l'ai pas pu, parce
+qu'en arrivant à Douvres on a jeté l'ancre.</p>
+
+<h4>ÉNIGME</h4>
+
+<p class="mid">CONTENANT QUELQUES CALEMBOURS</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Il faut qu'ici chacun devine</p>
+<p class="i20">Qui je suis et quel est mon nom;</p>
+<p class="i20">Sans moi, vous n'auriez pas Racine,</p>
+<p class="i20">Sans moi, vous n'auriez pas Pradon.</p>
+<p class="i20">C'est toujours par moi qu'on hérite;</p>
+<p class="i20">Je renferme et sucre et poison;</p>
+<p class="i20">Et je boirai cent ans de suite,</p>
+<p class="i20">Sans jamais perdre la raison.</p>
+<br>
+<p class="i20">Plus d'un critique impitoyable</p>
+<p class="i20">M'emploie en son malin esprit;</p>
+<p class="i20">Sans que je puisse être coupable,</p>
+<p class="i20">On me déchire, on me noircit.</p>
+<p class="i20">En France, en Russie, en Espagne,</p>
+<p class="i20">J'ai des succès, j'ai des revers;</p>
+<p class="i20">Si les uns perdent quand je gagne,</p>
+<p class="i20">Les autres gagnent quand je perds.</p>
+<br>
+<p class="i20">Quoiqu'assez gênant par ma forme,</p>
+<p class="i20">Chacun m'emporte quand il sort:</p>
+<p class="i20">Je suis mince; je suis énorme;</p>
+<p class="i20">Je suis délicat; je suis fort.</p>
+<p class="i20">Petit, je sers beaucoup aux dames.</p>
+<p class="i20">Je suis Français, Grec, ou Romain;</p>
+<p class="i20">Je fais des bateaux; j'ai des rames;</p>
+<p class="i20">Et sans bras j'ai beaucoup de mains<a id="footnotetag1" name="footnotetag1"></a>
+<a href="#footnote1"><sup class="sml">1</sup></a>.</p>
+</div></div>
+
+<blockquote class="footnote"><a id="footnote1"
+name="footnote1"><b>Note 1: </b></a><a href="#footnotetag1">
+(retour) </a>
+ Le mot est le <i>papier</i>.</blockquote>
+
+<h4>ENNEMIS</h4>
+
+<p>Lorsque les Bourbons revinrent, ils firent ce calembour
+que Napoléon avait des <i>N mis</i> partout. On
+détruisit les N sur les monuments. Un inspecteur,
+voyant un N sur la porte Saint-Denis, s'écria:--J'aperçois
+là un N qu'il faut enlever.--Mais, lui dit-on,
+elle fait partie de l'inscription <i>Ludovico Magno</i>:
+si vous l'ôtez, on lira <i>Ludovico mago</i>, ce qui ne
+plaira peut-être pas à Louis XVIII.</p>
+
+<p>On remplaça les N par les L; et les plaisants dirent:
+Les chiffres maintenant sont tous L. Mais quand vinrent
+les C de Charles X, on se récria sur ce qu'on ne
+faisait plus que tous C.</p>
+
+<h4>ENSEIGNES</h4>
+
+<p>On remarquait, il y a quelque temps, rue des Petits-Champs,
+une pension de jeunes filles et un charcutier
+dont les deux enseignes n'en faisaient qu'une, si bien
+qu'on lisait sur la même ligne: Pension de jeunes
+demoiselles. <i>À la Renommée des bonnes langues.</i></p>
+
+<p>Une enseigne de marchand de ferrailles, au passage
+du Dragon portait: <i>Au Juste pris</i>. Le tableau représentait
+un saint attaqué et pris par d'affreux bandits.</p>
+
+<p>Le Chat qui <i>pèche</i>, est un chat qui fait la faute de
+ronger un fromage.</p>
+
+<p>Le Vert galant; ce n'est pas Henri IV, c'est un gobelet,
+un verre orné de guirlandes de fleurs.</p>
+
+<p>Les Deux Amis sont deux A rangés sur la même
+ligne.</p>
+
+<p>Les Trois Forbans, qui vous annoncent la mer et des
+pirates, sont trois escabeaux de bois solidement construits.
+Trois forts bancs.</p>
+
+<p><i>Au Bon Coing</i> est l'enseigne d'un marchand de vin,
+au coin d'une rue.</p>
+
+<p>On a remarqué dans Paris une enseigne ainsi conçue:
+T....., culottier de la reine.</p>
+
+<p>On lisait sur une autre, en 1811; B....., chirurgien-accoucheur
+de la grande armée.</p>
+
+<p>Et sur une autre, rue Dauphine: Grégoire, tailleur
+d'hommes.</p>
+
+<p>Dans la rue Chartière, près du Collége de France,
+on lisait sur la porte d'une maîtresse d'école qui venait
+de déménager: Madame Prudent est maintenant
+enceinte du Panthéon.</p>
+
+<p>Aux <i>Trois sans hommes</i>, à Arras, est un rébus au-dessous
+d'un tableau où sont trois femmes seules.</p>
+
+<p>On disait, dans le même sens, que l'église de Saint-Denis,
+qui avait cinq clochers, avait cinq clochers et
+quatre sans cloches.</p>
+
+<h4>ENSEIGNER</h4>
+
+<p>Un homme s'était piqué jusqu'au sang de la pointe
+d'une grosse alêne. C'était un cordonnier.--Le voilà
+devenu professeur, dit un plaisant.--Et comment
+cela? s'écria un témoin intrigué.--Mais, riposta le
+farceur, il s'est piqué et il <i>en saigne</i>.</p>
+
+<h4>ENTENDRE</h4>
+
+<p>Dans une audience où l'on faisait beaucoup de
+bruit, le juge dit:</p>
+
+<p>--Huissier, imposez silence; il est étrange qu'on
+fasse tant de bruit. Nous avons jugé je ne sais combien
+de causes sans les entendre.</p>
+
+<h4>ENTERRER</h4>
+
+<p>L'ancien usage de l'Académie était que le directeur
+fît les frais d'enterrement de ceux de ses confrères qui
+décédaient sous son directorat. Corneille mourut dans
+la nuit du jour où Racine devait succéder au directeur
+Lavaux. Il y eut entre eux un combat de générosité.
+Lavaux prétendait qu'étant encore directeur au moment
+où Corneille avait expiré, il devait payer les
+frais d'inhumation; Racine soutenait que cet honneur
+lui était dévolu, puisque l'inhumation n'avait eu lieu
+que le jour qu'il avait été installé directeur. Lavaux
+l'emporta; ce qui fit dire à Benserade:--Lavaux a
+enterré Corneille; mais personne plus que Racine n'était
+fait pour l'enterrer.</p>
+
+<h4>ENTRE DEUX</h4>
+
+<p>Un bon maire de campagne se trouvait à table, à
+Paris, entre deux jeunes étourdis qui cherchaient à le
+persifler.--Je vois bien, Messieurs, dit-il, que vous
+voulez vous moquer de moi; je ne suis pourtant pas
+tout à fait un sot ni un fat, je suis entre les deux.</p>
+
+<h4>ENTRER</h4>
+
+<p>Un vétéran de l'armée de Condé montrait un jour à
+Martainville un sonnet commençant par ce prétendu
+vers:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">«Marie-Thérèse dont les vertus...»</p>
+</div></div>
+
+<p>--Le début est heureux, dit Martainville; mais
+malheureusement Marie-Thérèse ne peut pas entrer
+dans un vers.--Monsieur, répartit le vétéran, je
+vous croyais bon royaliste, mais je me suis trompé.
+Vous saurez, pour votre gouverne, que Marie-Thérèse
+peut entrer partout.</p>
+
+<p>Le comte de C., qui connaît beaucoup Vienne, racontait
+un fait qui prouverait la bonhomie des soldats
+de police de la capitale de l'Autriche.</p>
+
+<p>La consigne leur avait été donnée d'arrêter tous
+ceux qui, après une certaine heure, feraient du tapage
+ou chanteraient trop bruyamment <i>en rentrant chez
+eux</i>. Le comte revenait de l'Opéra; il fredonnait assez
+haut un des airs qui lui avaient plu. Une patrouille le
+rencontre, lui défend de chanter ainsi, et lui rappelle
+qu'il faut <i>rentrer</i> chez soi paisiblement et sans bruit.--C'est
+juste, dit le comte: mais je <i>ne rentre pas</i>.--Oh!
+alors, c'est différent, dit le chef; et votre excellence
+peut faire ce qu'elle voudra.</p>
+
+<p>Ce trait, que nous empruntons au <i>Journal des anecdotes</i>,
+qui ne paraît plus, ne vous rappelle-t-il pas la
+naïveté de ce bon Suisse, à qui on avait donné en
+garde une porte du palais de Versailles, avec défense
+de laisser personne <i>entrer dedans</i>. Un grand seigneur,
+qui ne devait pas être compris dans l'exclusion générale,
+et qu'on attendait, se présente. Le Suisse barre
+le chemin.--Mais j'ai droit d'entrer.--Point, mon
+sir.--Mais je suis le prince de Poix.--Quand vous
+seriez le roi des haricots, vous point entrer dedans.--Mais
+qui vous parle de cela? dit le gentilhomme
+intelligent. Je ne veux pas entrer, je veux sortir dedans.--Sortir
+dedans? mon sir; ah! c'est autre chose.
+Allez.</p>
+
+<p>Et le grand seigneur sortit dedans.</p>
+
+<p>--Quand est-ce que les chiens entrent dans l'église?--Quand
+la porte est ouverte.</p>
+
+<h4>ENVIEUX</h4>
+
+<p>Il y a des marchands en vieux qu'on n'évite pourtant
+pas et qui ne se confessent pas du péché d'envie;
+ce sont les fripiers.</p>
+
+<h4>ENVOYER</h4>
+
+<p>Un paysan fin matois, qui avait reçu d'un avoué
+quelque bon conseil, avait promis de lui envoyer un
+lièvre. L'homme de loi, ne voyant rien venir, va chez
+le paysan, et lui demande quand il compte tenir sa
+promesse.--Comment! monsieur, le lièvre n'est pas
+encore arrivé?--Non.--C'est étonnant! je vous l'ai
+pourtant envoyé hier. Je l'ai aperçu au bout de mon
+champ, et je lui ai crié: Va-t-en vite chez mon
+avoué.</p>
+
+<h4>ÉPICIERS</h4>
+
+<p>En temps de moisson, on voit en campagne des
+masses d'épis sciés, dont beaucoup sont en bottes.</p>
+
+<p>Nos pères avaient mis l'esprit pointu dans leurs enseignes.
+On voyait encore, il y a quelques années,
+au boulevard du Temple, à Paris, au-dessus d'un magasin
+d'épicerie, une enseigne qui représentait un
+champ de blé où un homme sciait un épi; au-dessous
+on lisait: <i>À l'Épi scié.</i></p>
+
+<h4>ÉPICTÈTE, ÉPICURE</h4>
+
+<p>Louis XV demandait, dit-on, au marquis de Bièvre
+de quelle secte de philosophes étaient les puces? Il
+répondit:--De celle des piqûres.--Et les poux?--De
+celle des pique-têtes.</p>
+
+<h4>ÉPIGRAMME</h4>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Certain ministre avait la pierre,</p>
+<p class="i20">On résolut de le tailler;</p>
+<p class="i20">Chacun se permit de parler,</p>
+<p class="i20">Et l'on égaya la matière.</p>
+<p class="i20">--Mais comment, se demandait-on,</p>
+<p class="i20">A-t-il pareille maladie?</p>
+<p class="i20">--C'est que son coeur, dit Florimon,</p>
+<p class="i20">Sera tombé dans sa vessie.</p>
+</div></div>
+
+<h4>ÉPOUVANTABLE</h4>
+
+<p>On complimentait la femme d'un homme de lettres
+en disant qu'elle avait un époux vanté.</p>
+
+<p>--Ce n'est que justice, répondit-elle; car il est
+époux vantable.</p>
+
+<h4>ÉPOUVANTÉ</h4>
+
+<p>Un jeune homme allait épouser une beauté. On lui
+dit:--Vous épousez une femme charmante, dont
+vous serez bientôt époux vanté.</p>
+
+<h4>ÉPOUX LAID</h4>
+
+<p>Un mari, peu favorisé des dons de la nature, crut
+voir un calembour insultant dans une parole de sa
+femme, qui disait qu'elle n'aimait pas les poulets.</p>
+
+<h4>ESPRIT</h4>
+
+<p>--C'est agréable d'avoir de l'esprit, dit Alcide Tousez,
+on a toujours quelques bêtises à dire.</p>
+
+<h4>ESTROPIÉ</h4>
+
+<p>Un homme était blessé à la main.--Vous êtes estropié,
+lui dit-on.--Non pas, répondit-il, je suis estro-main.</p>
+
+<h4>ÉTAIN</h4>
+
+<p>Les Parisiens, en apprenant la mort de Pothier, ont
+fait cette exclamation ingénieuse:--Voilà un potier
+d'éteint!</p>
+
+<h4>ÉTAMAGE</h4>
+
+<p>--Quelle est la place de Paris où les chaudronniers
+ne peuvent pas étamer?</p>
+
+<p>--C'est la place Vendôme. On y lit en effet en
+grandes lettres: <i>État-major de la place.</i></p>
+
+<h4>ÉTATS</h4>
+
+<p>Louis XIV disait au duc de Vivonne:--Ne trouvez-vous
+pas surprenant que M. de Schomberg, qui est né
+Allemand, se soit fait naturaliser Hollandais, Anglais,
+Portugais et Français?--Sire, répondit le duc, c'est
+tout simplement un homme qui essaie de tous les
+États pour vivre.</p>
+
+<h4>ÉTÉ</h4>
+
+<p>On boit tant de thé en hiver dans les soirées de Londres,
+qu'on a dit que les Anglais faisaient de l'hiver
+la saison des thés.</p>
+
+<h4>ÉTENDRE</h4>
+
+<p>--Quel rapport y a-t-il entre un morceau de beurre
+frais, un avocat et un paresseux?</p>
+
+<p>--C'est que le premier s'étend sur du pain, le second
+sur son sujet et le troisième sur son lit.</p>
+
+<h4>ÉTRILLE</h4>
+
+<p>Un palefrenier se présentait comme choriste à
+l'Opéra, parce qu'on lui avait dit qu'il était fort dans
+<i>les trilles</i>.</p>
+
+<h4>EU</h4>
+
+<p>On prétend que cette ville est celle où l'on fait le
+plus d'omelettes.</p>
+
+<p>On dit que son maire rougit toutes les fois qu'il est
+obligé d'exprimer sa fonction.</p>
+
+<h4>EUX</h4>
+
+<p>Les cuisiniers font acte d'orgueil quand ils prétendent
+qu'on ne peut pas faire d'omelettes sans <i>oeufs</i>.</p>
+
+<h4>EXÉCUTIF</h4>
+
+<p>Quand l'Assemblée constituante eut restreint, comme
+on sait, l'autorité royale de Louis XVI, on fit cette épigramme:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Entre savants, quelquefois on dispute.</p>
+<p class="i16">D'où vient ce nom: <i>pouvoir exécutif</i></p>
+<p class="i16">Que donne au roi le corps législatif?</p>
+<p class="i16">Eh! le voici: trop faible pour la lutte,</p>
+<p class="i16">C'est un pouvoir, hélas! qui s'exécute.</p>
+</div></div>
+
+<h4>EXERCICE</h4>
+
+<p>Louis XIV raillait le duc de Vivonne sur son embonpoint
+excessif, en présence du duc d'Aumont qui
+n'était pas moins gros, et lui reprochait de ne point
+faire assez d'exercice.--Sire, répondit Vivonne, c'est
+une médisance; il n'y a point de jour que je ne fasse
+au moins trois fois le tour de mon cousin d'Aumont.</p>
+
+<h4>EXPOSITION</h4>
+
+<p>On a dit, à propos de l'exposition universelle de
+Londres, que ce qu'il y avait de plus exposé au Palais
+de Cristal, c'étaient les poches des visiteurs.</p>
+
+<h4>EXPRESSIONS</h4>
+
+<p>Fontenelle se trouvant à table avec deux jeunes
+poëtes avantageux, il fut beaucoup question au dessert
+des différentes manières d'exprimer la même
+chose en français. Nos deux étourdis lui demandèrent,
+sur le ton badin, s'il était mieux de dire: Donnez-nous
+à boire, qu'apportez-nous à boire. Fontenelle
+leur répondit en souriant:--Vous devez dire: menez-nous
+boire.</p>
+<br>
+
+<h2>F</h2>
+
+<p>Les lettres les plus embarrassantes sont les lettres
+F A C.</p>
+
+<h4>FACÉTIES</h4>
+
+<p>Un huissier qui voulait faire une chanson n'accoucha
+que du premier vers, et il demandait si la rime
+était bonne.</p>
+
+<p>On voulait marier un épicier avec sa jeune tante.--Je
+ne le veux pas, dit-il; car si j'épousais ma tante,
+je serais mon oncle.</p>
+
+<p>--Le pavé est bien fier, disait un bonhomme qui,
+par le verglas, s'était laissé tomber.--Je ne le trouve
+pas fier du tout, dit un autre, car voilà trois fois déjà
+qu'il me baise le derrière.</p>
+
+<p>On demandait à un homme un peu distrait:--Quel
+jour est-ce demain?...--Ma foi, je ne vous dirais
+pas trop; tout ce que je sais, c'est que c'est aujourd'hui
+samedi.</p>
+
+<p>Un homme riche, qui s'était marié trois fois, ayant
+perdu sa troisième femme, répondit à quelqu'un qui
+lui proposait une fort aimable demoiselle en quatrième
+noce:--J'accepte volontiers la demoiselle, même sans
+dot, pourvu que vous fassiez stipuler dans le contrat
+qu'elle ne mourra pas; car je suis las d'épouser des
+femmes qui meurent.</p>
+
+<p>On présenta à un maire de village, dans les premiers
+temps où l'état civil fut confié à ces officiers ministériels,
+un enfant de trois ans, qu'on avait négligé de
+faire inscrire sur le registre communal. Le maire écrivit:
+«Aujourd'hui est né de légitime mariage un enfant
+âgé de trois ans....»</p>
+
+<p>Une dame marchandant une chaise percée en offrait
+trop peu. Le bahutier, pour l'engager davantage, la
+priait de considérer la bonté de la serrure et de la
+clef.--Pour ce qui est de cela, dit la dame, je n'en
+fais pas grand cas, car je n'ai pas peur qu'on me dérobe
+ce que j'ai dessein d'y mettre.</p>
+
+<p><span class="sc">Gyblotte</span>.--Si j'ai été obligé de quitter le poste, ce
+n'est pas ma faute, je ne pouvais plus y revenir.</p>
+
+<p><span class="sc">Le président</span>.--Pourquoi?</p>
+
+<p><span class="sc">Gyblotte</span>.--J'étais cuit. (Rires.) J'étais rôti à point
+comme un jeune dindonneau au sortir de la broche.
+(Rire général.)</p>
+
+<p><span class="sc">Le président</span>.--Comment cela?</p>
+
+<p><span class="sc">Gyblotte</span>.--Imaginez-vous que j'avais appris que
+l'on faisait des portraits à la minute au daguerréotype.
+Comme j'éprouvais le désir de me faire dessiner
+en garde national, je profitai de l'occasion de ma garde
+pour me rendre chez l'artiste, je m'esquivai du poste.</p>
+
+<p><span class="sc">Le président</span>.--Vous avez eu tort.</p>
+
+<p><span class="sc">Gyblotte</span>.--J'en suis bien puni.--Monsieur, lui
+dis-je, faites-moi mon portrait.</p>
+
+<p>--Voilà! Monsieur, me répond l'artiste. Mettez-vous
+le nez au soleil et ne bougez pas. (Rire général.)
+Je me plaçai au vis-à-vis de cet astre, et je le regardai
+en face... ce qui du reste ne laisse pas d'être fort gênant.
+(Nouveaux rires.) Lorsque j'eus demeuré dix
+minutes dans cette attitude, que je prendrai sur moi
+de nommer incommode, je sentis que ma peau se
+gonflait par la chaleur... Je devenais croustillant.
+(Rire général.)</p>
+
+<p>--Monsieur, dis-je à l'artiste, est-ce fini?--Pour
+l'amour de Dieu, ne tournez pas la tête, me répondit-il;
+votre portrait sera ressemblant comme deux
+gouttes d'eau. Des gouttes d'eau, il ne m'en manquait
+pas sur le visage... Je demeure encore un quart d'heure
+au soleil; je roussissais à vue d'oeil, je sentais mes
+sourcils qui grillaient comme les plumes d'un poulet
+flambé.--Monsieur, dis-je alors au peintre par le daguerréotype,
+je renonce à votre procédé; je ne veux
+pas être peint dans l'attitude d'un rôti. (Hilarité générale.)
+Veuillez me rendre mon chapeau.--Monsieur,
+dit cet homme, si vous vouliez rester encore
+une petite minute, vous seriez frappant...--Frappant!
+m'écriai-je, c'est-à-dire que je serais à l'étuvée: je sors
+d'en prendre. Et, en disant cela, je me traînai à mon
+domicile, où je me couchai.</p>
+
+<p><span class="sc">Le président</span>.--Pourquoi ne pas revenir au
+poste?</p>
+
+<p><span class="sc">Gyblotte</span>.--Parce que je serais tombé en ruine.
+Je parie que l'on m'aurait enlevé un bras ou une
+jambe rien qu'en me posant la fourchette dans le dos.</p>
+
+<p>Le président condamne le délinquant à une garde
+hors de tour, et lui recommande de se méfier à l'avenir
+des portraits à la minute.</p>
+
+<p><span class="sc">Gyblotte</span>.--Quand j'y retournerai, il fera ch...
+non, il fera froid. (Rire général.)</p>
+
+<p>--Un diseur d'anecdotes raconte les facéties suivantes:</p>
+
+<p>«J'ai lu autrefois, dans les Mémoires de M. le maréchal
+de ***, qu'il examinait toujours le soir ce qu'il
+avait dépensé le jour; et comme il avait donné cent
+écus au maître d'hôtel qui le servait, pour faire la plus
+grande chère qu'il pourrait à sept ou huit personnes
+de l'un et de l'autre sexe, et de qualité, ce maître
+d'hôtel lui porta ses comptes, lorsqu'il était près de se
+coucher. Dans son mémoire, il ne trouva que quatre-vingt-dix
+écus pour la dépense du repas, et M. le maréchal
+lui dit après l'avoir lu: «Faites que le compte
+soit juste, si vous voulez que je l'arrête.» Le maître
+d'hôtel descendit au même instant, rapporta le compte
+après avoir ajouté au bas: «<i>Item</i>, dix écus pour faire
+les cent écus.»</p>
+
+<p>Le savant Bouilleau, que son père, procureur, envoyait
+étudier à Paris, fit un mémoire pour rendre
+compte des dépenses qui avaient employé l'argent
+qu'il avait reçu. Il exagéra par plus de soixante <i>item</i>
+jusqu'aux moindres minuties, et, comme il n'y trouvait
+pas encore son compte, il mit au bas d'un article:
+<i>Item, mon père, il faut vivre</i>.»</p>
+
+<p>--«Je suis si malheureux, disait Saint-Péraire, que
+si je me faisais chapelier, personne n'aurait plus de
+tête.»</p>
+
+<p>--«Au 15 septembre 1848, <i>je paierais</i> à M. Coquardeau
+la somme de trois cents francs.»</p>
+
+<p>--Après?</p>
+
+<p>--Eh bien! payez-moi, c'est aujourd'hui le 15.</p>
+
+<p>--Impossible, je n'ai pas d'argent.</p>
+
+<p>--Que m'importe! vous m'avez souscrit un billet.</p>
+
+<p>--C'est vrai; mais il y a un <i>s</i> à <i>je paierais</i>.</p>
+
+<p>--Après, Monsieur?</p>
+
+<p>--Après?... vous n'êtes pas fort: l'<i>s</i> indique le conditionnel,
+par conséquent, je ne vous paie pas, puisque
+c'était à condition... que j'aurais de l'argent.</p>
+
+<p>--Quelqu'un, à Paris, pour se moquer d'un provincial,
+cherchait à lui faire des questions singulières.
+Il lui demanda, un jour, en compagnie: «Qu'est-ce
+qu'une obole, une faribole et une parabole?» Le provincial,
+sans se déconcerter, lui répondit: «Une parabole
+est ce que vous n'entendez pas; une faribole,
+ce que vous dites; une obole, ce que vous valez.»</p>
+
+<p>LE PÈRE COUPE-TOUJOURS.</p>
+
+<p><span class="sc">Le juge</span>, au marchand de galette.--Vous avez fait
+assigner le sieur Bazoteau. Qu'avez-vous à dire?</p>
+
+<p><span class="sc">Le marchand de galette</span>.--J'ai à dire de lui que
+c'est indigne. Voilà ce que j'ai à dire.</p>
+
+<p><span class="sc">Le juge</span>.--Mais, encore, expliquez-vous.</p>
+
+<p><span class="sc">Le marchand de galette</span>.--Ah! mon Dieu! c'est
+tout expliqué; monsieur est cause que j'ai perdu toutes
+mes pratiques... Voilà tout... Il me semble que c'est
+bien assez, cristi!</p>
+
+<p><span class="sc">Bazoteau</span>.--Allons donc! vous voulez rire.</p>
+
+<p><span class="sc">Le marchand</span>.--Du tout, du tout... Moi, un des
+principaux marchands de galette du boulevard... vous
+m'avez mis dans le pétrin. (Rire général.)</p>
+
+<p><span class="sc">Le juge</span>.--Comment cela?</p>
+
+<p><span class="sc">Le marchand</span>.--Monsieur est fabricant de lunettes...
+J'avais perdu les miennes, il m'en fournit... Et v'lan!
+comme par enchantement, voilà toutes mes pratiques
+qui filent chez le marchand d'à côté.</p>
+
+<p><span class="sc">Le juge</span>.--Mais, enfin, pourquoi?</p>
+
+<p><span class="sc">Le marchand</span>.--Pourquoi! Parce que depuis ce
+moment je suis là à me croiser les bras et les jambes
+comme un commissionnaire; je chauffe mon four, je
+mets la main à la pâte, j'aiguise mes couteaux, et moi,
+<i>père Coupe-Toujours</i>, je ne coupe plus rien du tout.
+Voilà pourquoi. (Longue hilarité.) Du reste, en voici
+la raison.</p>
+
+<p><span class="sc">Le juge</span>.--Ah! c'est bien heureux.</p>
+
+<p><span class="sc">Le marchand</span>.--Monsieur, que voilà, au lieu de
+me fournir du petit zéro, qui est mon numéro, m'a
+mis des verres grossissants, oh! mais grossissant au
+point que je trouvais les plus petits morceaux toujours
+trop gros, et que je finissais par ne plus rien
+donner du tout de pâte ferme pour deux sous... (Rire
+général.)</p>
+
+<p><span class="sc">Bazoteau</span>.--Ah! c'est pour ça?</p>
+
+<p><span class="sc">Le marchand</span>.--Vous pensez bien que ce n'est pas
+le moyen de faire son beurre; aussi je suis bientôt resté
+sur le flanc. (Rire.) On ne m'appelait plus que le <i>père
+Coupe-Trop-Court</i>. (Rire général.)</p>
+
+<p><span class="sc">Bazoteau</span>.--Ça ne me regarde pas, c'est votre
+femme qui m'a demandé les verres que j'ai mis. Elle
+trouvait que vous serviez trop largement la pratique.</p>
+
+<p><span class="sc">Le marchand</span>.--Elle est bien avancée, à présent
+que je ne la sers plus du tout. (Nouveaux rires.)</p>
+
+<p>Pour comble de malheur, Bazoteau est renvoyé de
+la plainte, et le marchand de galette est condamné
+aux dépens.</p>
+
+<p><span class="sc">Le père Coupe-Toujours à sa femme</span>.--Chaud!
+chaud! là, j'espère que vous m'en faites avaler... des
+brioches... Pour une marchande de galette, madame
+mon épouse, vous êtes une fameuse galette. (Longue
+et vive hilarité.)</p>
+
+<p>--En creusant des fondations à Écouis (Eure), on a
+trouvé un squelette et deux crânes dans un même
+tombeau. Les archéologues ont prétendu que le squelette
+était celui de Pierre III de Roucherolles, seigneur
+d'Écouis; mais comment expliquer les deux crânes?
+Le sieur P. a découvert une solution; il a mis les deux
+crânes sur un rayon de sa bibliothèque, et il explique
+gravement aux curieux «que le petit crâne appartenait
+à Pierre de Roucherolles encore enfant, tandis que
+le plus gros était sa tête lorsqu'il fut devenu homme!»</p>
+
+<p>--Un fermier écossais, qui ne savait ni lire ni
+écrire, et qui avait quelques épargnes, voulut faire donner
+de l'instruction à son fils, et l'envoya dans un pensionnat
+d'Édimbourg. Après y avoir passé deux années,
+le jeune homme revint chez ses parents, et rentra dans
+la ferme au moment où son père et sa mère se mettaient
+à table devant un plat de viande et un plat de
+légumes.</p>
+
+<p>Après les embrassements d'usage, le fermier dit à
+son fils, tandis que la mère préparait un troisième
+couvert:--Eh bien! garçon, as-tu bien employé ton
+temps?--Es-tu devenu savant là-bas?--Oh! que
+oui, père, répondit l'écolier avec suffisance.--Sais-tu
+compter, surtout, garçon?--J'étais le plus fort en
+arithmétique, répondit encore le jeune drôle, et je
+puis vous donner la preuve que je sais faire des
+comptes que ne feriez pas vous-même.--Je ne dis pas
+non... Mais voyons la preuve de ton savoir.--Voilà:
+Combien croyez-vous avoir de plats sur votre table?--Deux,
+répondit le père: un plat de mouton, un
+autre de pommes de terre.--Eh bien! vous vous
+trompez... Il y a trois plats sur votre table.--Pardi
+je serais aise d'entendre ton raisonnement à l'appui
+de ce compte-là.--Rien de plus facile; nous disons:
+plat de mouton, ça nous fait un; plat de pommes de
+terre, ça nous fait deux; j'additionne, et je dis: un
+et deux font trois.--C'est juste, dit le fermier. Pour
+lors, je vais manger un plat, ta mère mangera le second,
+et toi tu mangeras le troisième en récompense
+de ton savoir.</p>
+
+<p>--On lisait dans un journal de 1848:</p>
+
+<p>«En entendant les crieurs hurler sur le boulevard:
+<i>Le Journal</i>, par Alphonse Karr et son supplément, on
+se demandait naturellement si ce supplément était
+l'associé de M. Alphonse Karr, ou tout simplement une
+double feuille de papier. Cette tournure de phrase
+nous rappelle l'embarras de ce brave homme, propriétaire
+d'un bain sur la Seine, qui passa toute sa
+vie à rédiger l'enseigne de son établissement et n'y
+put jamais parvenir. Il avait d'abord trouvé <i>Bains à
+quatre sols pour les femmes à fond de bois</i>. Mais il
+vit qu'on riait: il changea en <i>Bains à fond de bois
+pour les femmes à quatre sous</i>. On rit encore plus, et
+sa clientèle, se trouvant insultée, l'abandonna; il
+mourut de désespoir de n'avoir pas pu rédiger son
+enseigne convenablement.»</p>
+
+<p>--J'ai lu autrefois, dans une publication périodique,
+intitulée avec un peu de vanité <i>Recueil encyclopédique
+belge</i>, une page singulière, intitulée <i>Pensées sur
+l'homme</i>. Il m'a semblé tout d'un coup que ces pensées
+avaient été écrites par un homme marin. Vous allez
+juger comme c'est liquide:</p>
+
+<p>Première pensée: «Vois le <i>ruisseau</i>; il fuit...; enfin
+il va se perdre dans la <i>mer</i>.» N'est-il pas vrai que c'est
+là un début très-mouillé?</p>
+
+<p>Deuxième pensée: «Un <i>océan</i> d'amertume environne
+l'esprit de l'homme, comme l'immensité des
+<i>eaux</i> enveloppe la terre.» C'est encore de l'humidité.</p>
+
+<p>Quatrième pensée: «L'oubli passe l'<i>éponge</i> sur le
+nom de l'égoïste.» On voit que l'auteur est un homme
+qui se débarbouille.</p>
+
+<p>Cinquième pensée: «Le présomptueux s'embarrasse
+dans ses paroles, comme le <i>poisson</i> dans les filets; ils
+se prennent l'un et l'autre à l'<i>hameçon</i>.» Le penseur,
+à coup sûr, vit dans l'eau.</p>
+
+<p>Dans la sixième pensée, il compare l'espérance aux
+feux follets qui naissent dans les marécages; et il n'y
+a que huit pensées.</p>
+
+<p>Quand je vous disais que l'auteur est un homme
+marin! Il a signé; et il s'appelle <i>De la Flotte</i>.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Non loin du camp, la nuit, après certaine attaque,</p>
+<p class="i18"> Un soldat se mit à crier:</p>
+<p class="i18"> --Amis, j'ai fait un prisonnier,</p>
+<p class="i18"> Et je le tiens; c'est un Cosaque</p>
+<p class="i16">Qui de son régiment vient de se détacher.</p>
+<p class="i16">--Amène-le vers nous.--Mais il fait résistance.</p>
+<p class="i16">--En ce cas, viens sans lui.--C'est bien à quoi je pense,</p>
+<p class="i16"> Mais il ne veut pas me lâcher.</p>
+<br>
+<p class="i30"><span class="sc">E. Arnal.</span></p>
+</div></div>
+
+<p>Aux élections de 1848, deux candidats étaient en
+présence à Pithiviers: MM. Lejeune et Deloines.</p>
+
+<p>Deux auberges se disputaient les électeurs partagés
+entre ces deux candidatures.</p>
+
+<p>Sur la porte de l'une d'elles on avait écrit ces vers:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Votez tous pour monsieur Deloines.</p>
+<p class="i20">Vous serez gras comme des moines.</p>
+</div></div>
+
+<p>Et sur l'autre:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Ceux qui voteront pour Lejeune.</p>
+<p class="i20">Ne connaîtront jamais le jeûne.</p>
+</div></div>
+
+<p>--Boulvot, originaire d'Éclavolle (Marne), ayant pour
+le quart d'heure son domicile à Romilly-sur-Seine, est
+arrêté par la gendarmerie de Saint-Aubin en flagrant
+délit de mendicité. Conduit devant M. le procureur du
+roi de Nogent-sur-Seine. Boulvot prétend que, loin de
+l'inquiéter, on devrait lui décerner une médaille.--Depuis
+plus de dix ans, dit-il, je ne suis occupé qu'à
+poursuivre l'extinction de la mendicité.--Comment,
+en mendiant?...--Eh! sans doute, mon procureur:
+on m'arrête; n'est-ce pas un mendiant de moins?...</p>
+
+<p>--Un riche bourgeois marchandait dernièrement,
+avec son fils, une carte de France dans la boutique d'un
+libraire. Le fils, voulant s'assurer de l'exactitude de
+cette carte, y cherchait Moscou, et témoignait à son
+père son étonnement de ne pas l'y trouver. «Comment,
+lui répondit celui-ci, peux-tu chercher cette ville
+sur la carte! Tu devrais bien savoir qu'elle a été
+brûlée.»</p>
+
+<p>--Le duc de Pembroke nourrissait un nombre considérable
+de porcs à la terre de Wilthsire. Traversant sa
+basse-cour, il fut surpris de les voir rassemblés autour
+d'une auge et faisant un bruit affreux. La curiosité
+le porte à examiner quelle peut en être la cause; il
+s'approche et aperçoit dans l'auge une cuiller d'argent.
+Dans ce moment arrive la cuisinière, fort étonnée
+de tout ce bruit: «Sotte que vous êtes, lui dit Sa Seigneurie,
+ils ont raison de grogner, les pauvres animaux!
+vous ne leur avez donné qu'une cuiller pour
+eux tous.»</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Indécis autant qu'incertain,</p>
+<p class="i20">Entre vos attraits et vos charmes,</p>
+<p class="i20">Du sort je brave le destin</p>
+<p class="i20">Et mêle mes pleurs à mes larmes.</p>
+<p class="i20">Mon coeur ne saurait être heureux</p>
+<p class="i20">Dans le veuvage de mon âme,</p>
+<p class="i20">Et je ne connais que mes feux</p>
+<p class="i20">Qui puissent égaler ma flamme.</p>
+</div></div>
+
+<p>Dans un des arrondissements du Havre, un candidat
+ministériel venait d'être repoussé avec perte du collége
+électoral. Son perruquier, appelé pour lui faire la
+barbe, s'arrête tout à coup, l'examine avec attention,
+et lui déclare qu'il ne veut plus dorénavant le raser au
+même prix, attendu qu'il lui trouve la figure beaucoup
+plus longue que par le passé. Ce fonctionnaire allait
+se fâcher, lorsqu'il sentit qu'il valait mieux prendre
+du bon côté la plaisanterie du facétieux barbier:
+«Vous pouvez, lui répondit-il, me raser à bon marché,
+car on vient de me faire la queue pour rien.»</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20"> Un jour qu'il était nuit,</p>
+<p class="i16">Tout debout éveillé, je dormais dans mon lit,</p>
+<p class="i20"> Quand la foudre en silence</p>
+<p class="i16">Par un éclair obscur m'annonça sa présence.</p>
+<p class="i20"> Nul ne bouge, tout fuit;</p>
+<p class="i16">Le marbre épouvanté reste froid comme glace;</p>
+<p class="i16">Le muet ne dit mot, le sourd n'entend plus rien;</p>
+<p class="i16">Soudain la terre tourne, on n'en sent pas la trace;</p>
+<p class="i16">Le cerf devient craintif, et devançant le chien</p>
+<p class="i16">Il s'élance et bondit; quoiqu'il change de place,</p>
+<p class="i16">Bientôt il est le prix de celui qui le chasse.</p>
+<p class="i20"> Mais ce muet fracas</p>
+<p class="i16">Me fit voir, en dormant, que je ne dormais pas.</p>
+</div></div>
+
+<p>Un Parisien qui se trouvait avec sa femme dans le
+convoi du chemin de fer, lors de l'épouvantable catastrophe
+du 8 mai 1842, se sauva par miracle; sa femme
+y resta et périt. Notre homme revint chez lui, mais
+il s'aperçut en rentrant qu'il avait perdu son parapluie;
+il alla sur-le-champ le réclamer à la préfecture
+de police.--On ne l'avait point retrouvé.--Quand
+il raconte cette histoire, il ne manque jamais de dire:
+«J'y ai perdu ma femme et mon parapluie; un parapluie
+tout neuf.»</p>
+
+<p>--Un directeur de spectacle de province écrivait à
+son correspondant à Paris: «J'ai reçu par le bateau à
+vapeur la neige et la gelée que vous avez chargées pour
+moi. Elles sont très-fraîches; mais il manquait une aile
+à Zéphire, et le tonnerre ayant crevé en route, j'ai été
+forcé de le faire ressouder: les éclairs, les deux fleuves
+et la mer qu'on avait mis dans le panier de derrière la
+diligence, ont souffert de la chaleur. Notre père noble
+ayant fait un trou à la lune, je n'ai pu m'en servir.
+Envoyez-moi un torrent, car le mien a été brûlé: joignez,
+je vous prie, à l'envoi que vous me ferez, mon
+manteau et une forteresse. Je ne pourrai pas ouvrir
+avant huit jours, car mon petit amour a la coqueluche,
+mon jeune premier a la goutte, et ma duègne
+vient d'être vaccinée.»</p>
+
+<h4>FAÇON</h4>
+
+<p>Je vais vous dire ma façon de penser.--Dites-moi
+simplement votre pensée; je ne tiens pas à la façon.</p>
+
+<h4>FAGOTS</h4>
+
+<p>Des économistes du dernier siècle vantaient dans
+une société la moderne philosophie.</p>
+
+<p>--Quel bien a-t-elle donc fait?... demanda une
+dame.</p>
+
+<p>--Les philosophes, Madame, répondit d'Alembert,
+ont abattu la forêt des préjugés.</p>
+
+<p>--Je ne suis plus surprise, répliqua cette dame en
+riant, que vous nous débitiez tant de fagots.</p>
+
+<h4>FAIM</h4>
+
+<p>Quelle est l'occupation qui commence par la fin?--Un
+repas.</p>
+
+<p>Au commencement d'un grand festin, où tout le
+monde dévorait sans rien dire, un convive s'écria:--Que
+signifie ce silence?--Il annonce la faim du
+monde, répondit un autre.</p>
+
+<h4>FAIRE</h4>
+
+<p>Un musicien assez mal vêtu disait en parlant de sa
+voix, dont quelqu'un faisait l'éloge:--Il est vrai que
+j'en fais ce que je veux.--Ma foi, Monsieur, lui dit
+un plaisant, vous devriez bien vous en faire une
+culotte.</p>
+
+<p>Un médecin anglais, se promenant un jour dans un
+jardin de M. Hamilton à Cobham, lui exprima son
+étonnement de la crue prodigieuse de ses arbres.--«Monsieur
+le docteur, reprit Hamilton, songez donc qu'ils
+n'ont pas autre chose à faire.»</p>
+
+<p>Le Mariage du Poussin est le moins bon tableau des
+sept sacrements de ce peintre: Tant, il est vrai, disait
+l'abbé Desaleurs, qu'il est difficile de faire un bon mariage,
+même en peinture.</p>
+
+<p>Un observateur froid demandait, à propos de la révolution
+de 1789: Qu'a-t-elle donc fait? Un autre lui
+répondit: Elle a beaucoup défait.</p>
+
+<p>Un Gascon sur une rosse tremblante rencontra, près
+le Pont-Neuf, un seigneur qui montait un cheval magnifique:--Cadédis,
+lui dit-il, jé gage dix louis qué
+jé fais faire à mon bidet cé qué lé votre né féra pas.--Oui,
+je gage, dit le seigneur, en regardant d'un air
+de mépris le rossinante. Aussitôt le Gascon prend son
+cheval dans ses bras, et le jette dans la Seine; le gentilhomme
+fort étonné paya la gageure.</p>
+
+<p>Un garçon boucher écrivait à son père: «Je profite
+avec empressement de l'occasion de la poste pour vous
+apprendre que j'ai un état. Dans un mois il y aura
+six semaines que je suis garçon boucher. Mon maître
+est très-content de moi; il m'a déjà fait tuer deux ou
+trois fois, et il me fera écorcher à Pâques.»</p>
+
+<p>Pétition de Sans-Culottes du faubourg Saint-Antoine
+à l'Assemblée nationale:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i18">Ah! que nous serions satisfaits,</p>
+<p class="i20"> Si, toujours patriotes,</p>
+<p class="i18">Au lieu de faire des décrets,</p>
+<p class="i20"> Vous faisiez des culottes.</p>
+</div></div>
+
+<p>(<i>Suivent les signatures.</i>)</p>
+
+<p>Un acteur des boulevards voyant, au Musée de l'artillerie,
+l'armure du roi François Ier, demanda à l'employé
+sous quel règne ce conquérant faisait ses exploits.</p>
+
+<p>--Il faisait sous lui, répondit l'employé.</p>
+
+<p>Le maréchal de... menait des dames à l'Opéra; mais
+toutes les loges avaient été retenues. Comme il en vit
+une remplie par un domestique qui la gardait pour
+un bourgeois, il obligea le domestique de sortir et fit
+entrer sa compagnie dans la loge. Le bourgeois arriva
+peu de temps après avec des dames, et fut piqué, comme
+on le pense bien, de cette violence. Force lui fut néanmoins
+de céder pour le moment; mais le lendemain,
+il fit assigner son rival devant le tribunal des maréchaux
+de France, et plaidant lui-même sa cause, dit:
+«Qu'il était bien malheureux d'être obligé de se
+plaindre de l'un d'entre eux, qui de sa vie n'avait pris
+que sa loge;» et demanda justice. Le président lui
+répondit: «Vous venez de vous la <i>faire</i>.»</p>
+
+<p>A une partie de thé chez mistress Thrale, au moment
+où la compagnie était engagée dans une conversation
+très-animée, la belle hôtesse, qui avait été faire son
+thé à l'office, oublia de mettre dans la théière la chose
+principale, c'est-à-dire du thé. Le docteur Johnson en
+fit l'observation le premier, et lui dit:--Mistress Thrale,
+il est possible que dans votre imagination vous croyez
+avoir été faire du thé, mais l'opinion de vos amis est
+que vous avez été faire de l'eau.</p>
+
+<h4>FAIRE VOIR</h4>
+
+<p>Un maquignon, vendant un cheval, dit à l'acheteur:--Monsieur,
+faites-le voir; je le garantis sans
+défaut.</p>
+
+<p>Ce cheval se trouvant aveugle, l'acheteur voulut
+obliger le maquignon à le reprendre. Mais celui-ci soutint
+qu'il ne pouvait pas l'y contraindre, puisqu'il
+l'avait averti de son infirmité, en disant:--Faites-le
+voir; je le garantis sans défaut.</p>
+
+<h4>FAIRE PARLER DE SOI</h4>
+
+<p>Un membre de l'Académie de Soissons en racontait
+un jour toutes les prérogatives; il finit par dire qu'elle
+était la fille aînée de l'Académie française. Voltaire,
+qui l'écoutait, lui dit:--Assurément, c'est une bonne
+fille; car elle n'a jamais fait parler d'elle.</p>
+
+<h4>FAIT AU MOULE</h4>
+
+<p>C'est une scène du conseil de discipline de la ci-devant
+garde nationale.</p>
+
+<p><span class="sc">Le président</span>.--Voici un rapport qui annonce que
+vous avez manqué pour la troisième fois votre faction.
+Très-exact du reste, vous passez régulièrement une
+partie de la journée au poste; mais quand vient l'heure
+du dîner, vous disparaissez pour ne plus revenir.
+Avant-hier encore, cela vous est arrivé. Vous passez
+donc tout votre temps à table?</p>
+
+<p><span class="sc">Jupin</span>.--C'est vrai, mais en voici la raison. Avant-hier
+je suis allé dîner avec un ami, nous avons mangé
+des moules, et ça nous a fait enfler (rire). Dame! que
+voulez-vous, je ne suis pas fait <i>aux moules</i> (longue
+hilarité).</p>
+
+<p><span class="sc">Le président</span>.--Et l'avant-dernière fois, faut-il
+encore accuser les moules? Non, je crois qu'il faut accuser
+le vin de Champagne. Il paraît que vous l'aimez
+beaucoup, et en voici la preuve. C'est une lettre de
+vous adressée à votre commandant, que je vais soumettre
+à l'approbation du conseil. On verra qu'une
+lettre semblable n'est pas faite de sang-froid. Le sans-gêne
+de cette dépêche explique l'excuse maladroite
+d'un convive plus que joyeux qui déserte plutôt le
+poste que la salle du festin. (Ici M. le président fait
+passer sous les yeux du conseil la lettre adressée par
+le sieur Jupin. Nous transcrivons cette lettre qui, probablement
+à défaut d'autre papier, se trouve tracée
+sur un feuillet détaché de la carte du restaurant):</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">«Mon cher camarade et commandant du</p>
+<p class="i20"> <i>Fricandeau à l'oseille.</i></p>
+<p class="i16">poste. Je suis retenu à dîner par un brave</p>
+<p class="i20"> <i>Dindon aux truffes.</i></p>
+<p class="i16">de mes amis, et je vous prie de ne pas compter sur une</p>
+<p class="i20"> <i>Mauviette</i>.</p>
+<p class="i16">faction que je dois, d'après l'ordre, monter ce soir au</p>
+<p class="i20"> <i>Vol-au-vent.</i></p>
+<p class="i16">drapeau. Du reste je vous dirai que je me</p>
+<p class="i20"> <i>Riz de veau sauce tomate.</i></p>
+<p class="i16">corrigerai. Et buvant du Champagne à votre santé,</p>
+<p class="i16">je suis, mon cher,</p>
+<p class="i20"> <i>Turbot.</i></p>
+<p class="i16">votre fidèle camarade qui dépose à vos</p>
+<p class="i20"> <i>Pieds de veau.</i></p>
+<p class="i16">genoux sa position de récalcitrant, tout en vous priant</p>
+<p class="i16">de compter sur une</p>
+<p class="i20"> <i>Morue hollandaise.</i></p>
+<p class="i16">amélioration dans le service que je dois à la</p>
+<p class="i20"> <i>Limande.</i></p>
+<p class="i16">patrie.</p>
+<br>
+<p>Signé: <span class="sc">Jupin</span>.»</p>
+<p> <i>Merlan au gratin.</i></p>
+</div></div>
+
+<p>Jupin est condamné à une garde hors de tour.</p>
+
+<h4>FARDEAU</h4>
+
+<p>Mme de Pompadour avait un pied-à-terre près de
+Ménars-le-Château, où l'architecte Hupeau lui rendit
+visite un jour. Il était triste; il venait de terminer le
+pont d'Orléans, et mille bruits défavorables couraient
+sur la solidité de son oeuvre. Pour fermer la bouche
+aux médisances, il osa proposer à la favorite de traverser
+son pont dans son carrosse à six chevaux.
+Mme de Pompadour accepta, et, l'épreuve ayant réussi,
+on dut se taire; mais les bavards, ne pouvant plus
+parler, rimèrent l'épigramme que voici:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Censeurs de notre pont, vous dont l'impertinence</p>
+<p class="i18"> Va jusqu'à la témérité,</p>
+<p class="i16">Hupeau, par un seul fait, vous réduit au silence.</p>
+<p class="i16">Bien solide est son pont; ce jour il a porté</p>
+<p class="i18">Le plus lourd fardeau de la France.</p>
+</div></div>
+
+<p>Mme de Pompadour lut l'épigramme; et, afin de ne
+plus repasser sur ce pont, elle fit changer la direction
+de la route.</p>
+
+<h4>FATALITÉ</h4>
+
+<p>On attribue à Boileau ce faible calembour. On lui
+disait qu'un homme dont il méprisait la fatuité était
+tombé malade.--Quelle fat alité! se serait écrié l'auteur
+de la satire contre l'équivoque.--Mais nous ne
+le croyons pas.</p>
+
+<h4>FAUTES CONTRE LA LANGUE</h4>
+
+<p>Un incendie dévora, en 1763, la salle de l'Opéra.
+Quelques heures après l'événement, une grande dame,
+rencontrant Sophie Arnould, lui dit d'un air effrayé:
+«Mademoiselle, racontez-moi ce qui s'est passé à <i>cette</i>
+terrible incendie.--Madame, lui répondit l'actrice,
+tout ce que je puis vous dire, c'est qu'incendie est du
+masculin.»</p>
+
+<h4>FAUTES D'IMPRESSION</h4>
+
+<p>On lisait un matin, dans le <i>Journal du Havre</i>, à
+l'article <i>Angleterre</i>:</p>
+
+<p>«A un repas diplomatique donné par lord Aberdeen,
+on distinguait entre autres mets, sur la table
+de l'illustre amphitryon, plusieurs plats de <i>seringues</i>
+à la crème.»</p>
+
+<p>La lecture de cet article nous laisse vraiment dans
+une affligeante incertitude.</p>
+
+<p>Est-ce une excentricité gastronomique, ou bien une
+distraction typographique?</p>
+
+<p>Dans tous les cas, le mal est maintenant sans <i>remède</i>.</p>
+
+<p>Dans un livre où on louait les vertus d'une femme,
+l'auteur disait qu'elle occupait activement ses moments
+de loisir à tricoter. Le typographe mit une <i>f</i> à la place
+du premier <i>t</i>. Et comme à la nouvelle édition on voulut
+corriger la faute, cette fois on écrivit tripoter.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20"> Si vous lisez dans l'épitaphe</p>
+<p class="i16">De Fabrice qu'il fut toujours homme de bien,</p>
+<p class="i20"> C'est une faute d'orthographe;</p>
+<p class="i20"> Passant, lisez homme de rien.</p>
+<p class="i16">Si vous lisez qu'il aima la justice,</p>
+<p class="i20"> Qu'à tout le monde il l'a rendit,</p>
+<p class="i16">C'est une faute encor, je connaissais Fabrice:</p>
+<p class="i20"> Passants, lisez qu'il l'a vendit.</p>
+<br>
+<p class="i30"><span class="sc">Lebrun.</span></p>
+</div></div>
+
+<h4>FAUX</h4>
+
+<p>Rameau, rendant visite à une belle dame, se lève
+tout à coup de sa chaise, prend un petit chien qu'elle
+avait sur ses genoux et le jette par la fenêtre. La dame
+épouvantée s'écrie:--Eh! que faites-vous, Monsieur!--Il
+aboie faux, répondit Rameau avec l'indignation
+d'un grand musicien dont l'oreille avait été déchirée.</p>
+
+<h4>FAUX PAS</h4>
+
+<p>Le marquis de Bièvre disait d'une dame boiteuse:
+«Voilà une femme qui a fait bien des faux pas.»</p>
+
+<h4>FÉDÉRATION</h4>
+
+<p>Le jour de la première fédération, 14 juillet 1790, il
+faisait très-chaud au Champ de Mars.--Ah! disait
+une dame, si une bonne fée pouvait nous envoyer des
+rafraîchissements.--Adressez-vous, lui dit quelqu'un,
+à la fée des rations.</p>
+
+<h4>FENÊTRE</h4>
+
+<p>Danières disait qu'une croisée s'appelle une fenêtre,
+parce que c'est elle qui dans une chambre le jour <i>fait
+naître</i>...</p>
+
+<h4>FERRAILLEUR</h4>
+
+<p>Lorsqu'on expulsa les étalages de vieilles ferrailles
+du quai de la Mégisserie, à Paris, on afficha ce distique:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Allez donc tous, vieux ferrailleurs,</p>
+<p class="i20">Vendre votre vieux fer ailleurs.</p>
+</div></div>
+
+<h4>FÊTE</h4>
+
+<p>Une dame disait qu'il n'y a pas de fêtes sans lendemain.--Pardon,
+lui dit quelqu'un, le faîte des
+grandeurs peut en avoir, mais le faîte d'une maison
+n'en a pas.</p>
+
+<h4>FEUILLETÉ</h4>
+
+<p>En quoi les bons livres ressemblent-ils à la galette?--En
+ce qu'ils sont feuilletés.</p>
+
+<h4>FIÈVRE</h4>
+
+<p>Dans une chanson de madame Constance Pipelet, il
+y a un couplet qui exprime élégamment les divers
+emplois du mot <i>fièvre</i>.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Ah! qu'il est beau pour un grand coeur</p>
+<p class="i20">D'avoir la fièvre de la gloire!</p>
+<p class="i20">C'est par sa fièvre qu'un auteur</p>
+<p class="i20">S'inscrit au temple de Mémoire,</p>
+<p class="i20">On voit peu d'hommes ici bas</p>
+<p class="i20">Avoir la fièvre du génie;</p>
+<p class="i20">Mais on en voit beaucoup, hélas!</p>
+<p class="i20">Nourrir la fièvre de l'envie.</p>
+</div></div>
+
+<h4>FIL</h4>
+
+<p class="mid">A UNE JEUNE MERCIÈRE.</p>
+
+<p class="mid">Air: <i>J'ai vu partout dans mes voyages.</i></p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">On vante de votre boutique</p>
+<p class="i20">L'ordre, la grâce et le bon goût;</p>
+<p class="i20">Pour attirer une pratique,</p>
+<p class="i20">Avec art vous parlez de tout.</p>
+<p class="i20">Vos manières sont si gentilles,</p>
+<p class="i20">Vous avez un si doux babil,</p>
+<p class="i20">Que pour bien vendre vos aiguilles,</p>
+<p class="i20">On dit que vous avez le fil.</p>
+</div></div>
+
+<h4>FLEURS (LANGAGE DES)</h4>
+
+<p>Nous empruntons aux journaux qui s'occupent des
+tribunaux la facétie qui suit; c'est une scène de la
+garde nationale, quand elle jouait au soldat:</p>
+
+<p><span class="sc">Le capitaine rapporteur.</span>--M. Troupeau!</p>
+
+<p>Une femme se présente et dépose un énorme bouquet
+sur le bureau du président. (Surprise générale.)</p>
+
+<p><span class="sc">Le président.</span>--Qu'est-ce que cela signifie?</p>
+
+<p><span class="sc">La femme.</span>--Ça signifie, monsieur le président, que
+je suis la femme Troupeau, que mon mari m'a ordonné
+de vous apporter ça... il a dit que vous saviez
+bien ce que ça voulait dire.</p>
+
+<p><span class="sc">Le président.</span>--Mais pas le moins du monde. Il est
+fou, votre mari.</p>
+
+<p><span class="sc">La femme Troupeau.</span>--Ah! mon Dieu! c'est tout
+comme depuis qu'il a eu la bête d'idée de se fourrer
+dans une société d'horticulture... il ne parle plus
+qu'avec des fleurs... C'est stupide... mais en bonne
+épouse je dois flatter sa manie.</p>
+
+<p><span class="sc">Le président</span>, souriant.--Mais qu'est-ce que vous voulez
+que le tribunal comprenne...</p>
+
+<p><span class="sc">La femme Troupeau.</span>--Oh! je vas vous expliquer
+ça, moi. Depuis un an il ne cause pas autrement avec
+moi; j'ai bien été forcée de comprendre; voilà ce qu'il
+vous dit: <i>La mauve</i> qu'est dans le bouquet signifie
+qu'il vous parle avec <i>sincérité</i>..... et l'<i>immortelle</i>, l'<i>estime</i>
+qu'il a pour vous... Le <i>seringa</i> veut dire <i>le regret</i>
+qu'il a d'être, par <i>la fleur de sureau</i>, malade;
+les sept branches de <i>réséda</i>, depuis le 7 du mois...
+ce qui a mis (<i>églantier</i>) obstacle à son (<i>mouron</i>) exactitude;
+(<i>guimauve</i>) cela soit dit sans (<i>pissenlit</i>) outrage,
+(<i>oeillet d'Inde</i>) déguisement et avec (<i>giroflée</i>) vérité...
+(Ici le rire qui s'est répandu dans la salle gagne le
+tribunal.)</p>
+
+<p><span class="sc">Le président</span>, souriant.--Qu'est-ce que vous venez
+nous raconter là... vous abusez des moments du conseil.</p>
+
+<p><span class="sc">La femme Troupeau.</span>--Dame! je vous explique son
+emblème à c't homme (nouveaux rires). Mon Dieu, il
+n'est pas malade du tout! c'est pour rester chez lui à
+cultiver ses fleurs. Qu'est-ce qui pourra donc le guérir
+de ça... j'y donnerais une fameuse récompense à
+celui-là... Figurez-vous, monsieur le président, que
+Troupeau me parle toujours ainsi. Tenez, par exemple:
+quand il veut que j'aille chercher le dîner, il
+m'envoie par la bonne une branche de cerfeuil, une
+gousse d'ail et une botte d'échalottes (rires bruyants.)</p>
+
+<p>Au milieu de l'hilarité générale, le conseil de discipline
+passe outre et condamne Troupeau, garde national,
+à six heures de prison...</p>
+
+<p><span class="sc">La femme Troupeau.</span>--Vous ne pourriez pas lui
+en mettre vingt-quatre heures; ça m'obligerait bien.
+(Rires.)</p>
+
+<p><span class="sc">Le président.</span>--Dans quel but?</p>
+
+<p><span class="sc">La femme Troupeau.</span>--Eh! c'est que, voyez-vous,
+vingt-quatre de haricots ça pourrait bien le guérir un
+peu; dans tous les cas ça ne pourrait pas lui faire de
+mal.</p>
+
+<p>Le président maintient la condamnation.</p>
+
+<p><span class="sc">La femme Troupeau.</span>--Allons, va pour six heures,
+ça lui fera peut-être du bien. Voilà cependant où conduit
+le fanatisme de l'horticulture. Tenez, monsieur le
+greffier, vous qui mettez en note les condamnations à
+la prison, acceptez cette fois, de ma part, cette branche
+de myosotis; ça veut dire: <i>ne l'oubliez pas</i> (longue
+hilarité.)</p>
+
+<h4>FOI</h4>
+
+<p>Un homme, se plaignant de la trahison d'un de ses
+amis, disait: «il manque à ce qu'il m'a cent fois promis.</p>
+
+<p>--C'est justement, lui dit-on, parce qu'il vous l'a
+promis sans foi.»</p>
+
+<h4>FOLIE</h4>
+
+<p>Nathaniel Lee, auteur de plusieurs drames, et dont
+la nation anglaise n'a pas assez honoré la mémoire,
+finit ses jours à l'hôpital des fous, à Londres. Ce fut
+là qu'il composa, quoiqu'en démence, sa tragédie des
+<i>Reines rivales</i>. Il y travaillait, une nuit, au clair de
+la lune. Un nuage léger en ayant tout à coup intercepté
+la lumière, il prononça d'un ton impérieux:
+«Jupiter! lève-toi et mouche la lune.» Le nuage
+s'épaississant, la lune disparut entièrement; alors il
+s'écria en éclatant de rire: «L'étourdi! je lui dis de la
+moucher et il l'éteint.»</p>
+
+<h4>FONDRE LA CLOCHE</h4>
+
+<p>A propos d'un décret de la révolution, qui supprimait
+les cloches pour en faire des sous:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Rendons grâce au puissant génie</p>
+<p class="i20">Qui, voyant notre pénurie,</p>
+<p class="i20">Veut que l'on réduise en billon</p>
+<p class="i20">Toute espèce de carillon:</p>
+<p class="i20">Dès longtemps en effet tout cloche,</p>
+<p class="i20">Les paiements vont cahin-caha;</p>
+<p class="i20">Sitôt qu'on en est réduit là,</p>
+<p class="i20">C'est le cas de fondre la cloche.</p>
+</div></div>
+
+<h4>FORT</h4>
+
+<p>Deux prédicateurs prêchaient dans la même église;
+celui qui prêchait le soir avait une voix très-forte.
+Quelqu'un dit que la différence entre le prédicateur du
+matin et celui du soir, c'était que le premier prêchait
+fort bien, et le second bien fort.</p>
+
+<h4>FOSSE</h4>
+
+<p>Potier est mort, disait un vaudevilliste, dans le café
+des Variétés; j'ai vu les tentures à sa porte; et voici
+Odry qui prétend que c'est une fausse nouvelle.--L'enterrera-t-on?
+dit Odry.--Assurément.--Eh bien!
+n'est-ce pas, comme je l'ai dit, une fosse nouvelle?</p>
+
+<h4>FOURMI</h4>
+
+<p>Lorsque les fous, ayant recouvré leur raison, quittent
+Bicêtre, qu'est-ce qu'ils sont!--Guéris.--Non, ce
+sont des <i>fous remis</i>.</p>
+
+<h4>FRANC</h4>
+
+<p>A présent pièce de vingt sous (vieux style), autrefois
+nom de peuple porté par les conquérants des Gaules.
+Dans le <i>Siége de Paris</i> de M. le vicomte d'Arlincourt,
+ces deux vers furent mal compris:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Pour chasser de ces murs les farouches Normands</p>
+<p class="i16">Le roi Charles s'avance avec <i>vingt mille francs</i>.</p>
+</div></div>
+
+<p>Un spectateur s'écria: «Ce n'est guère.»</p>
+
+<h4>FRAPPÉ</h4>
+
+<p>Un duel, dont les conséquences ont pensé être funestes
+à l'un des combattants, prit dernièrement naissance
+dans la réplique suivante, à une question fort
+simple.</p>
+
+<p>--Monsieur, en lisant le premier article du journal,
+n'avez-vous pas été frappé?...--Frappé, monsieur?
+que voulez-vous dire? Croyez-vous que je sois
+homme à me laisser frapper?</p>
+
+<h4>FRISER</h4>
+
+<p>Comment les cochers sont-ils plus coiffeurs que les
+coiffeurs eux-mêmes?</p>
+
+<p>--Parce qu'ils savent friser les bornes et raser les
+boutiques.</p>
+
+<h4>FRIT</h4>
+
+<p>Un plaisant nommé Turbot, étant près de mourir de
+violentes coliques, son médecin demanda de l'huile
+et voulut lui en faire prendre pour calmer ses douleurs.</p>
+
+<p>--Ah! docteur, lui dit le malade, remportez votre
+huile, car le pauvre Turbot est frit.</p>
+
+<h4>FRUITS</h4>
+
+<p>Des ambassadeurs hollandais à la cour de France
+étaient invités à dîner chez le ministre des finances.
+On servit, au dessert, du fromage de Hollande. Le ministre,
+en l'apercevant, dit à l'un des envoyés:
+«Voilà du fruit de votre pays.» L'ambassadeur tire de
+sa poche une poignée de ducats, les jette au milieu de
+la salle et dit: «Ces fruits-là en sont aussi.»</p>
+
+<p>En 1789 les désordres dans les spectacles commençaient
+déjà à devenir habituels. Il arriva un soir, au
+Théâtre-Français, que le parti dit patriote se battit à
+coups de poings dans le parterre contre le parti aristocrate,
+à une représentation d'<i>Iphigénie</i>; et comme
+on supposait que les loges étaient remplies principalement
+de ces aristocrates, on jeta des pommes contre
+plusieurs. La duchesse de Biron, qui en reçut une sur
+la tête, l'envoya le lendemain à M. de La Fayette en
+lui écrivant: «Permettez, Monsieur, que je vous offre
+le premier fruit de la révolution qui soit venu jusqu'à
+moi.»</p>
+
+<h4>FUIR</h4>
+
+<p>Une dame en visite disait à la dame du logis: «Prenez
+garde à votre robe, votre petite chienne <i>fuit</i>.</p>
+
+<h4>FUSILIER</h4>
+
+<p>Pendant la guerre d'Orient, les journaux ont raconté
+l'anecdote que voici:</p>
+
+<p>«Il y a quelques jours, à Valenciennes, une vieille
+femme demanda à un jeune homme qu'elle rencontra
+dans la rue où elle pourrait escompter un bon de 100 fr.
+sur le Trésor, que lui envoyait son fils, militaire en
+Crimée. A la lecture du billet, le monsieur pâlit légèrement.
+Cependant, il conduisit la dame au comptoir de
+MM. L. Dupont, Deparis et Cie. Tandis que le caissier
+payait la somme souscrite, M. S... donnait les marques
+de la plus vive émotion. Enfin, profitant du moment
+où la bonne dame, tout heureuse, serrait dans son
+sac les 100 fr. de son excellent fils, le jeune homme
+s'approche du caissier et lui dit, avec des larmes dans
+la voix (car il pleurait, le bon jeune homme):--La
+joie de cette femme ne vous fait-elle pas mal comme
+à moi, monsieur? Son fils vient d'être fusillé, et je ne
+sais comment apprendre cette nouvelle à la pauvre
+mère. Dites-la-lui, vous! Le caissier se récrie et refuse
+en faisant entendre quelques mots d'étonnement; puis
+se ravisant, il demande au jeune homme d'où il tient
+ce terrible malheur. Pour toute réponse, M. S... retourne
+le billet escompté, et montrant du doigt le nom
+du dernier endosseur, il dit:--Lisez, monsieur,
+lisez? Le caissier lut: Jean-Baptiste Gillot, fusilier au
+27e de ligne.--Vous le voyez, monsieur: Jean-Baptiste
+Gillot, <i>fusilier</i>! Le pauvre garçon est bien mort!--Qu'on
+se figure, si l'on peut, le fou rire qui s'empara
+à ces mots et du caissier et de la caisse et de la
+banque. Les écus restèrent seuls insensibles.»</p>
+<br>
+
+<h2>G</h2>
+
+<h4>GAGNER</h4>
+
+<p>Deux vieux charpentiers, grands observateurs du
+saint Lundi s'étaient rendus, comme de coutume, à la
+barrière et se livraient à d'abondantes libations. Ils
+devisaient tous deux sur le moyen d'avoir de grands
+profits:--Y a toujours moyen de gagner de l'argent,
+père Flottard!... Un litre à la barrière, c'est six sous,
+au lieu de douze qu'on le paie à Paris.--C'est vrai,
+père Bisaiguë, j'ai gagné comme ça trois francs lundi
+dernier, et j'en gagnerai bien encore autant aujourd'hui!</p>
+
+<h4>GALIMATHIAS</h4>
+
+<p>Un boucher, maigre de corps comme d'esprit, étant
+entré un jour dans le magasin d'un libraire où était
+l'abbé Maury, prit un volume de J. J., et se mit à
+répéter, comme par affectation, et pour faire preuve
+de goût, le passage suivant:</p>
+
+<p>«Qui commande à des hommes libres doit-être libre
+lui-même.»</p>
+
+<p>Puis, se tournant vers l'abbé: Que pensez-vous de
+cet adage, monsieur, lui dit-il?--Il n'a pas le sens
+commun, reprit Maury, c'est comme si l'on disait:</p>
+
+<p>Quiconque tue des boeufs gras doit-être gras lui-même.</p>
+
+<h4>GAMME</h4>
+
+<p>Chantée à Genève au citoyen Proudhon:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16"><i>Ut</i>-opiste infernal, sans Dieu comme sans âme,</p>
+<p class="i16"><i>Ré</i>-trograde prôneur d'un vieux système usé,</p>
+<p class="i16"><i>Mi</i>-racle d'impudence en ce siècle abusé,</p>
+<p class="i16"><i>Fa</i>-vorable aux fripons, dont tu fais la réclame,</p>
+<p class="i16"><i>Sol</i>-eil dont la lumière est propice au voleur,</p>
+<p class="i16"><i>La</i> terre connaîtrait ta funeste valeur,</p>
+<p class="i16"><i>Si</i> tout homme de sens te chantait cette gamme,</p>
+<p class="i16"><i>Ut</i>-opiste infernal, sans Dieu comme sans âme.</p>
+</div></div>
+
+<h4>GANACHE</h4>
+
+<p>Un jour, Napoléon, fort mécontent à la lecture d'une
+dépêche de Vienne, dit à Marie-Louise: Votre père est
+une ganache. L'impératrice, qui ignorait beaucoup de
+termes français, s'adresse à un conseiller d'État et lui
+demande la signification du mot ganache, en lui disant
+dans quelle circonstance l'Empereur l'a employée.--À
+cette demande inattendue, le courtisan balbutie que
+cela veut dire un homme sage, un homme de poids,
+un homme de bon conseil.</p>
+
+<p>Quelques jours après, la mémoire encore fraîche de
+sa nouvelle acquisition, Marie-Louise, présidant le conseil
+d'État et voyant la discussion plus animée qu'elle
+ne voulait, interpelle, pour y mettre fin, Cambacérès,
+qui, à ses côtés, bayait tant soit peu aux corneilles:
+C'est à vous à nous mettre d'accord dans cette occasion
+importante, dit-elle, vous serez notre oracle, car
+je vous tiens pour la première et la meilleure ganache
+de l'Empire.</p>
+
+<p>Mais cette plaisanterie est, dit-on, un conte du faubourg
+Saint-Germain.</p>
+
+<h4>GAND</h4>
+
+<p>Charles-Quint, né dans cette ville, jouait avec son
+nom. Un jour qu'à la suite d'une révolte, le duc d'Albe
+lui conseillait de détruire cette fourmilière de séditieux,
+il le fit monter sur la tour du beffroi, et lui
+faisant embrasser l'immense étendue de la ville:--Toutes
+vos peaux d'Espagne, dit-il, ne suffiraient pas
+à refaire un gant de cette grandeur.</p>
+
+<p>Lorsqu'il visita Paris, qui était plus resserré, il se
+plut à dire encore:--Je mettrais Paris dans mon
+gant.</p>
+
+<h4>GARÇON</h4>
+
+<p>Frédéric Soulié disait à un garçon de café qui le
+servait mal:</p>
+
+<p>--Il faut vous marier.--Pourquoi cela?--Parce
+que vous n'êtes pas fait pour rester garçon.</p>
+
+<p>La Bruyère appelle ceux qui briguent le nom de bel
+esprit «garçons bel esprit,» comme qui dirait garçon
+tailleur.</p>
+
+<h4>GARDE</h4>
+
+<p>On lisait en décembre 1857, dans le <i>Moniteur du
+Calvados</i>:</p>
+
+<p>«Voici une interprétation originale de la loi portant
+taxe sur les chiens. Un propriétaire d'une commune
+voisine aurait écrit au maire de son endroit à peu près
+en ces termes:</p>
+
+<p>«Monsieur le Maire,</p>
+
+<p>«La loi divise les chiens en deux catégories: chiens
+de luxe ou d'agrément, et chiens de garde; les premiers
+payant la taxe la plus élevée, et les derniers la
+moindre.</p>
+
+<p>«J'ai l'honneur de vous informer que les deux
+chiens que j'ai dans ma propriété appartiennent à
+mon garde. Je vous prie donc les inscrire, comme
+chiens <i>de garde</i>, dans la deuxième catégorie.»</p>
+
+<p>«Or, il paraît que ces chiens sont deux magnifiques
+chiens de chasse.»</p>
+
+<h4>GAUCHE</h4>
+
+<p>Quatrain de Rivarol sur l'Assemblée nationale de
+1789:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Dans cette assemblée, où l'on fauche</p>
+<p class="i20">Et le bons sens et le bon droit,</p>
+<p class="i20">Le côté droit est toujours gauche,</p>
+<p class="i20">Et le gauche n'est jamais droit.</p>
+</div></div>
+
+<h4>GAULES</h4>
+
+<p>Quel profit remarquable eurent les Romains à prendre
+les Gaules?--La facilité d'abattre les noix.</p>
+
+<h4>GENDARMERIE</h4>
+
+<p>Une chanson, populaire à Paris, commence ainsi:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">De la gendarmerie,</p>
+<p class="i20">Lorsqu'un gendarme rit,</p>
+<p class="i20">Dans la gendarmerie</p>
+<p class="i20">Chaque gendarme rit.</p>
+</div></div>
+
+<h4>GENDEBIEN</h4>
+
+<p>Ex-représentant de Belgique, dont le nom fit faire
+un calembour.--Avez-vous beaucoup de <i>gens de
+bien</i> à la Chambre? demandait-on à une dame de
+Bruxelles.--Non, monsieur, répondit-elle. Nous n'en
+avons qu'un.</p>
+
+<h4>GÊNE</h4>
+
+<p>Quel est le peuple le moins bien dans ses affaires?--Ce
+sont les Gênois, qui vivent constamment dans
+l'État de <i>Gênes</i>.</p>
+
+<h4>GÉNÉRALE</h4>
+
+<p>On sait le mot de ce soldat de la République sur un
+de ses chefs qui faisait mauvais ménage:</p>
+
+<p>--Notre général n'est qu'un tambour.</p>
+
+<p>--Pourquoi?</p>
+
+<p>--Parce qu'il bat la générale.</p>
+
+<h4>GENTILHOMME</h4>
+
+<p>Franklin prenait plaisir à répéter une observation
+de son nègre, auquel il avait défini ce que c'était qu'un
+gentilhomme.</p>
+
+<p>--Massa, lui disait l'Africain, tout travaille dans
+ce pays: l'eau travaille, le vent travaille, le feu travaille,
+la fumée travaille, les chiens travaillent, le
+boeuf travaille, le cheval travaille, l'homme travaille,
+tout travaille, excepté le cochon; il mange, il boit,
+il dort, et ne fait rien de la journée. Le cochon est donc
+le seul gentilhomme de l'Angleterre.</p>
+
+<h4>GILET</h4>
+
+<p>Un fermier de Saint-Julien-du-Sault étant très-malade,
+ses amis lui conseillèrent de faire venir le médecin
+de l'endroit, qui se nommait Gilet. «Ah bah! leur
+dit-il, je suis venu tout nu au monde, je m'en retournerai
+bien sans gilet.»</p>
+
+<h4>GLACÉS</h4>
+
+<p>Un galant, présentant à une dame une paire de
+gants <i>glacés</i>, lui disait:--C'est ce que j'ai trouvé de
+plus <i>frais</i>.</p>
+
+<h4>GRAINS</h4>
+
+<p>Donnons sur ce mot quelques jolis couplets de
+M. Jacinthe Leclère:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Déjà maint critique s'avance</p>
+<p class="i20">Impatient de me juger</p>
+<p class="i20">Pour faire pencher la balance</p>
+<p class="i20">Un grain est un sujet léger.</p>
+<p class="i20">Mais à son jugement suprême</p>
+<p class="i20">Je m'abandonne sans appel;</p>
+<p class="i20">Heureux, si des grains que je sème,</p>
+<p class="i20">Je recueille un seul grain de sel.</p>
+<br>
+<p class="i20">Ce riche gourmand qui m'écoute,</p>
+<p class="i20">Et déjà méprise mes grains,</p>
+<p class="i20">Sait-il ce qu'un grain de blé coûte</p>
+<p class="i20">Et de sueurs et de chagrins?</p>
+<p class="i20">Ce chapon fin dont il se gorge</p>
+<p class="i20">De grains dépeupla nos guérets;</p>
+<p class="i20">Et de sa serviette à grains d'orge</p>
+<p class="i20">Un grain de chanvre a fait les frais.</p>
+<br>
+<p class="i20">Un grain de vent porte la foudre</p>
+<p class="i20">Et des mers trouble le repos;</p>
+<p class="i20">Et plus loin, quelques grains de poudre</p>
+<p class="i20">Tranchent la trame des héros.</p>
+<p class="i20">Un grain d'esprit rend plus jolie;</p>
+<p class="i20">Un grain d'amour trouble les sens;</p>
+<p class="i20">Et souvent un grain de folie</p>
+<p class="i20">Fait passer un grain de bon sens.</p>
+<br>
+<p class="i20">De mes grains j'ouvre une boutique,</p>
+<p class="i20">Et j'en donne à tous mes voisins:</p>
+<p class="i20">Aux parvenus, grains d'émétique,</p>
+<p class="i20">Aux ivrognes grains de raisins,</p>
+<p class="i20">Quelques grains d'or à l'alchimiste</p>
+<p class="i20">Au malade, grains de santé,</p>
+<p class="i20">Grains d'ellébore au journaliste,</p>
+<p class="i20">Et grains d'encens à la beauté.</p>
+</div></div>
+
+<h4>GRAMMAIRE</h4>
+
+<p>Un professeur de mathématiques, bon homme et
+vieux savant, que les préoccupations de la science
+poursuivaient souvent jusque dans ses fonctions les
+plus pieuses, avait l'habitude, lorsque les élèves égaraient
+un livre ou quelque objet d'étude, d'en faire
+l'annonce à la prière du soir. Un jour qu'il venait de
+réciter les oraisons communes, un élève s'approchant
+lui dit à l'oreille:--Monsieur, voulez-vous annoncer,
+s'il vous plaît, que j'ai perdu ma grammaire.</p>
+
+<p>Préoccupé sans doute par quelque problème, le savant,
+s'égarant sur le mot, s'empressa de répéter tout
+haut: Un tel me prie de vous annoncer qu'il a eu la
+douleur de perdre sa grand'mère. Nous la recommandons
+à vos prières.</p>
+
+<p>Mais c'est ma grammaire grecque que j'ai perdue,
+répond le jeune homme en riant du quiproquo.</p>
+
+<p>Messieurs, la pauvre femme était Grecque, ajoute
+aussitôt le professeur avec émotion; Dieu veuille avoir
+son âme.</p>
+
+<h4>GRAND</h4>
+
+<p>Ce mot change de sens quelquefois en changeant de
+place: un grand homme n'est pas toujours un homme
+grand, et souvent un homme grand n'est qu'un petit
+homme. La grandeur mise en avant est la mesure de
+l'âme, mise en arrière elle n'est que la taille du corps.</p>
+
+<p>La musique du <i>Jugement de Midas</i>, de Grétry, fut
+sifflée à la cour et applaudie à Paris. C'est à ce sujet
+que Voltaire adressa au célèbre compositeur le quatrain
+suivant:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">«La cour a dénigré tes chants</p>
+<p class="i20">Dont Paris nous dit des merveilles,</p>
+<p class="i20">Grétry, les oreilles des grands</p>
+<p class="i20">Sont souvent de grandes oreilles.»</p>
+</div></div>
+
+<p>Le chancelier Bacon disait: «Les gens de haute stature
+ressemblent quelquefois aux maisons de quatre
+ou cinq étages, dont le plus haut appartement est
+d'ordinaire le plus mal meublé.»</p>
+
+<p>Un des derniers rois d'Espagne, auquel le sort des
+armes avait enlevé plusieurs places considérables
+recevait cependant, de la plupart de ses courtisans, le
+titre de grand: «Sa Grandeur, dit un Espagnol, ressemble
+à celle des fossés, qui deviennent grands à proportion
+des terres qu'on leur ôte.»</p>
+
+<h4>GRANDESSE</h4>
+
+<p>Quelle est la lettre la plus estimée en Espagne?--La
+grande <i>S</i>.</p>
+
+<h4>GRAND-LIVRE</h4>
+
+<p>On lisait, chez la femme d'un banquier, l'Invocation
+de Milton à la lumière. Un homme d'affaire, qui n'avait
+jusqu'alors donné qu'une faible attention à cette
+lecture, se réveilla tout à coup à ce vers:</p>
+
+<p class="mid">Et pour moi le grand livre est fermé pour jamais!</p>
+
+<p>(Il s'agit là du grand livre de la nature.)</p>
+
+<p>--Eh quoi! s'écria le banquier, est-ce qu'on ne lui
+a pas payé ses rentes?</p>
+
+<h4>GREDIN</h4>
+
+<p>Une épigramme de l'<i>Almanach des Aristocrates</i>
+pour 1791:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Certaine Anglaise, à certaine séance,</p>
+<p class="i16">D'un certain club qui dirige la France,</p>
+<p class="i16">Un certain soir, se trouvait par hasard.</p>
+<p class="i16">--Oh! s'il vous plaît, dit-elle à sa voisine,</p>
+<p class="i16">Sur cet fauteuil qu'est cet monsieur camard,</p>
+<p class="i16">Qu'à droite, à gauche, ici chacun lutine?</p>
+<p class="i16">--Milady, c'est monsieur le président,</p>
+<p class="i16">Ce que chez vous l'orateur on appelle.</p>
+<p class="i16">--Oh! l'orateur, fort bien cet mot s'entend.</p>
+<p class="i16">Mais, s'il vous plaît, quel est, ajouta-t-elle,</p>
+<p class="i16">Cet instrument que dans ses mains je vois?</p>
+<p class="i16">--C'est de son rang l'éclatant interprète;</p>
+<p class="i16">C'est là son sceptre, et nos augustes lois</p>
+<p class="i16">Ne se font plus qu'à grands coups de sonnette.</p>
+<p class="i16">--Oh! et que dit ce bruit original:</p>
+<p class="i16"><i>Gredin! Gredin!</i> dont toute l'assemblée</p>
+<p class="i16">A, comme moi, la cervelle fêlée?</p>
+<p class="i16">--Mais, Milady, c'est l'appel nominal.</p>
+</div></div>
+
+<h4>GUET-APENS</h4>
+
+<p>Le roi des Turlupins était M. d'Armagnac. Ce seigneur
+se trouvant un jour avec le duc (Henri-Jules),
+depuis prince de Condé, il lui demanda pourquoi on
+disait guet-à-paon et non pas guet-à-dinde?--Par la
+même raison, répondit le prince, qu'on ne dit pas,
+Monsieur d'Armagnac est un <i>turluchêne</i>, mais un <i>turlupin</i>.</p>
+<br>
+
+<h2>H</h2>
+
+<p>Quelles sont les lettres les plus menues?--Les
+lettres H E.</p>
+
+<h4>HABILLER</h4>
+
+<p>Une maîtresse de maison avait besoin d'un domestique;
+on lui envoya un brave garçon qui arrivait en
+droite ligne de Limoges, en Limousin.--Victor (c'était
+son nom) était muni des meilleurs renseignements.</p>
+
+<p>--C'est bien, Victor, lui dit-elle, je vous prends à
+mon service; vous aurez cent écus de gages, vous
+serez nourri, blanchi et je vous habillerai.</p>
+
+<p>--Ainsi, madame m'habillera?</p>
+
+<p>--Oui. Faites porter vos effets et restez.</p>
+
+<p>Victor sortit, revint et fit son service.</p>
+
+<p>Le lendemain on attend Victor; point de Victor. On
+sonne, personne; on resonne, personne encore. Deux
+heures se passent et Victor ne paraît pas.</p>
+
+<p>Impatientée, la maîtresse du logis monte chez
+Victor.</p>
+
+<p>Il était pacifiquement couché, les yeux ouverts.</p>
+
+<p>--Mais, Victor, dit la dame, il est onze heures.</p>
+
+<p>--Je le sais, madame, répond Victor d'un air tranquille.</p>
+
+<p>--Vous n'avez donc pas entendu qu'on vous a
+sonné?</p>
+
+<p>--Au contraire.</p>
+
+<p>--Alors, pourquoi ne descendiez-vous pas?</p>
+
+<p>--Mais, madame m'avait dit hier qu'elle m'habillerait;
+j'attendais qu'elle vint m'habiller.</p>
+
+<h4>HACHÉES</h4>
+
+<p>Quelles sont les lettres les plus maltraitées?--Les
+lettres H E.</p>
+
+<h4>HACHER</h4>
+
+<p>Madame de Sévigné disait des pendules à secondes,
+qu'elle ne les aimait pas, parce qu'elles hachent la vie
+trop menu.</p>
+
+<h4>HAINE AU BEURRE</h4>
+
+<p>Quels sont les départements où l'on fait la cuisine à
+l'huile?</p>
+
+<p>Les voici: Aisne, Aube, Eure.</p>
+
+<h4>HAINE AU HACHIS</h4>
+
+<p>S'écrit en quatre lettres délicates, <i>n</i>, <i>o</i>, <i>h</i>, <i>i</i>.</p>
+
+<h4>HALEINE</h4>
+
+<p>Un cordonnier, président de section en 1793, prononçait
+un discours de circonstance; une période,
+entre autres, se trouva si étendue que, malgré la force
+de ses poumons, les derniers mots expiraient sur ses
+lèvres. Un plaisant lui cria:--Citoyen, reprenez
+votre alène.»</p>
+
+<h4>HARENG SAUR</h4>
+
+<p>Cadet-Roussel, professeur de déclamation, remplit
+le rôle d'un tyran qui a pour confident Aran; il le
+chasse en lui disant:--«<i>Aran, sors.</i>»</p>
+
+<p>Citons aussi ce vers, du récit de la mort d'un vieillard,
+dans une tragédie moderne:</p>
+
+<p class="mid">Il sortit d'ici-bas comme <i>un vieillard en sort</i>.</p>
+
+<h4>HARMONIE</h4>
+
+<p>Malherbe est auteur de ce vers:</p>
+
+<p class="mid">Enfin cette beauté m'a la place rendue.</p>
+
+<p>On dit un jour à ce poëte que Des Yveteaux l'appelait
+le poëte Malapla, faisant allusion à ce dernier hémistiche:
+<i>m'a la place rendue</i>, qui, à la vérité ne
+désigne pas une oreille sévère pour la cadence.</p>
+
+<p>--C'est bien à M. Des Yveteaux à trouver mauvais
+ce <i>m'a la pla</i>, dit Malherhe, lui qui a fait <i>parabla
+ma fla</i>.</p>
+
+<p>Des Yveteaux, en effet, finit un vers par ces mots:</p>
+
+<p class="mid">Comparable à ma flamme.</p>
+
+<p>Le comte de Caylus avait demandé, en mourant,
+que son tombeau fût surmonté d'une urne étrusque
+dans laquelle on renfermerait son coeur. Il n'y avait
+que lui qui pût se faire cette épitaphe:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Ci-gît un antiquaire, acariâtre et brusque.</p>
+<p class="i16">Ah! qu'il est bien placé dans cette cruche étrusque.</p>
+</div></div>
+
+<p>La Motte-Le-Vayer cite un homme qui fut vingt-quatre
+heures à rêver comment il éviterait de dire <i>ce
+serait</i>, à cause de la ressemblance des deux premières
+syllabes: ce n'est pas ce que nous conseillons ici.</p>
+
+<p>--Les vers suivants sont faits exprès:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Quand un cordier cordant veut accorder sa corde,</p>
+<p class="i16">Pour sa corde accorder trois cordons il accorde;</p>
+<p class="i16">Mais si l'un des cordons de la corde décorde,</p>
+<p class="i16">Le cordon décordant fait décorder la corde.</p>
+</div></div>
+
+<h4>HARNAIS</h4>
+
+<p>L'industrie est une fort belle chose assurément; mais
+elle a une manie d'envahissement parfois déplorable.
+Que lui ont fait les grands noms de Condé, Turenne,
+Bayard, Montesquieu, pour qu'elle en fasse une enseigne?
+N'a-t-elle pas des patrons plus naturels? Voici de
+quoi nous menace un sellier. Il se propose d'écrire sur
+sa boutique:</p>
+
+<p class="mid">Au prince Eugène--Beaux-harnais.</p>
+
+<p>Qui oserait dire que la société n'est pas malade,
+lorsqu'il se produit des cas aussi graves de calembour!</p>
+
+<h4>HAUT ET VAIN</h4>
+
+<p>On disait à un homme orgueilleux: vous avez bu
+de l'abondance, car vous êtes <i>eau et vin</i>...</p>
+
+<h4>HÉBÉTÉES</h4>
+
+<p>Quelles sont les lettres les moins spirituelles?--Les
+lettres <i>e</i>, <i>b</i>, <i>t</i>.</p>
+
+<h4>HEURE</h4>
+
+<p>Dans quel département peut-on le mieux se passer
+de montre?--Dans le département de l'Eure.</p>
+
+<h4>HISTORIOGRAPHE</h4>
+
+<p>Moncrif avait fait une histoire des chats, sous le
+nom desquels il avait plaisanté plusieurs personnages
+de la cour. Il était fort aimé du comte d'Argenson. Il
+dit un jour au ministre:--Monseigneur, vous êtes
+le maître de me faire donner le brevet d'historiographe
+de France.</p>
+
+<p>Malheureusement, M. d'Argenson se ressouvenait
+encore de l'histoire des chats.--Historiographe? lui-dit-il,
+cela n'est pas possible; mais pour historiogriffe,
+cela se pourrait faire.</p>
+
+<h4>HOMARD</h4>
+
+<p>Un des spirituels écrivains de ce temps-ci a dit, en
+parlant d'un crustacé qu'il aime, à ce qu'il paraît:
+«Le homard, ce cardinal de la mer.» Cet écrivain
+gastronome croit que le homard est rouge avant
+d'être cuit.</p>
+
+<h4>HOMME</h4>
+
+<p>Un soldat ivre, disait à son caporal:--Tais-toi, tu
+n'es pas un homme.--Je te prouverai le contraire,
+lui dit le caporal.--Jamais, reprend le soldat, et
+c'est impossible: écoute le major, quand il commande
+la garde, le matin à la parade. Ne dit-il pas toujours:
+pour tel poste, six hommes et un caporal! Tu vois
+donc bien que les caporaux ne sont pas des hommes.</p>
+
+<h4>HONNÊTE</h4>
+
+<p>Ce mot change de sens, comme grand, en changeant
+de place. Les gens honnêtes n'annoncent pas toujours
+les honnêtes gens; et les démocrates ne se lassaient
+pas de dire, sous la restauration, avec moins de raison
+que d'envie peut-être: ceux qu'on appelle les honnêtes
+gens ne sont pas ceux que nous appelons les
+gens honnêtes.</p>
+
+<h4>HOSTILES</h4>
+
+<p>Voilà un homme qui a des prétentions au style.--Comment
+hostiles! mais c'est un homme très-doux.</p>
+
+<h4>HOTEL</h4>
+
+<p>Un Gascon, qui n'avait que ses bons mots pour vivre,
+étant tombé malade à Paris, fut contraint de se faire
+porter à l'Hôtel-Dieu. Un de ses anciens camarades
+vint le voir:</p>
+
+<p>--Eh! donc, mon cher enfant, lui dit-il, en quel
+état je te trouve! Courage, mon ami, courage!</p>
+
+<p>--Pour du courage, lui répondit-il, les gens de
+notre pays n'en manquent point.</p>
+
+<p>--Eh! qui le sait mieux que moi? lui dit celui qui
+le visitait. Au reste, mon cher enfant, ajouta-t-il, tu
+me permets de te demander si tu es bien avec Dieu?</p>
+
+<p>--Apparemment, lui répliqua le Gascon malade, je
+ne dois pas y être mal, puisqu'il me donne un appartement
+dans son hôtel.</p>
+
+<h4>HUMIDE</h4>
+
+<p>Un médecin demanda à un malade comment il avait
+trouvé le bain qu'il lui avait ordonné.--Un peu humide,
+répondit l'autre.</p>
+
+<p>Malherbe était affecté d'un bégaiement continuel,
+et de plus il crachait très-fréquemment, cinq ou six
+fois au moins, en lisant une stance de quatre vers. Cela
+fit dire très-plaisamment au cavalier Marini: «Je n'ai
+jamais vu d'homme plus humide, ni de poëte plus
+sec.»</p>
+
+<h4>HUPPÉES</h4>
+
+<p>Quelles sont les lettres les plus fières?--Les lettres
+<i>u</i>, <i>p</i>.</p>
+<br>
+
+<h2>I</h2>
+
+<p>Quel est le plus ancien des I.--L'I mage.--Et
+quel est le plus froid?--L'I vert.</p>
+
+<h4>I FIT GÉNIE</h4>
+
+<p>De qui le génie a-t-il reçu le jour?--De la lettre I,
+car les anciens ont écrit <i>Iphigénie</i>.</p>
+
+<h4>IMITATION</h4>
+
+<p>M. O. Leroy a raconté la petite anecdote que voici,
+dans les journaux de septembre 1855.</p>
+
+<p>«Un bon vieux curé de campagne, qui avait entendu
+parler magnifiquement des <i>Imitations</i>, l'une en latin,
+l'autre en vers français de Corneille, réimprimées
+pour l'Exposition universelle, y était arrivé, uniquement
+pour voir son livre de prédilection, bien décidé
+à repartir dès qu'il l'aurait examiné sous ses nouvelles
+formes. Il ne doutait pas que ce livre, qui remplit
+le monde de sa gloire, mais qui tient une si petite
+place à l'Exposition universelle, ne fût là tout entier
+dans la tête de chaque employé, ainsi qu'il était dans
+la sienne. Il s'adresse en entrant à l'un d'eux:</p>
+
+<p>--Monsieur, voudriez-vous me dire ou sont les
+<i>Imitations</i>?</p>
+
+<p>--Les imitations en verre?</p>
+
+<p>--En vers, mon ami! Il y en a une en vers de
+Boisville, une autre de Corneille à laquelle on a mis,
+dit-on, des peintures superbes et dignes de l'auteur.</p>
+
+<p>--Ah! très-bien! je vois cela d'ici... Ça doit être
+dans les cristaux, ou bien dans les émaux, se dit-il
+en lui-même... Monsieur l'abbé, vous ferez du chemin,
+mais ne soyez pas rebuté, vous finirez par arriver, et
+rien de si facile que de vous indiquer ce que vous
+demandez: vous allez monter cet escalier.</p>
+
+<p>--Très-bien, mon ami.</p>
+
+<p>--Vous descendrez ensuite.</p>
+
+<p>--À merveille, mon cher.</p>
+
+<p>--Et vous irez toujours tout droit. Vous n'aurez
+pas fait une demi-lieue que vous demanderez où sont
+les <i>Imitations en verre</i>; c'est connu de tout le monde.</p>
+
+<p>--De tout le monde! dit avec joie le bon curé. Et
+l'on dit le siècle prosaïque!... Je suis édifié, mon ami,
+et très-reconnaissant de vos excellentes indications.</p>
+
+<p>--Il n'y a pas de quoi, Monsieur l'abbé.</p>
+
+<p>Voilà le pauvre prêtre qui se met en route, monte,
+descend, traverse les longues galeries au milieu de la
+foule et de toutes les industries; il ne voit rien que le
+but où il tend, et répète en lui-même les premiers
+mots de son livre chéri: «Celui qui vous cherche,
+Seigneur, ne marche point dans les ténèbres, <i>non ambulat
+in tenebris</i>.» Enfin, il s'arrête et demande à
+quelques étourdis qui se trouvent sur son passage où
+sont les <i>Imitations</i>.</p>
+
+<p>--Est-ce du plaqué que vous cherchez, monsieur
+l'abbé? répond l'un d'eux.</p>
+
+<p>--Non, monsieur, c'est de l'A-kempis ou du Gerson,
+dont le grand Corneille a traduit en vers l'<i>Imitation
+de Jésus-Christ</i>.</p>
+
+<p>--Ah! ce curé est adorable et à mettre sous verre!
+dit tout bas l'étourdi, qui ajouta plus haut: Monsieur
+l'abbé, ces choses-là ne sont pas de notre connaissance.</p>
+
+<p>--Tant pis, Messieurs! Quelqu'un a dit: Il est venu
+parmi les siens, ils ne l'ont pas connu.</p>
+
+<p>Le prêtre attristé s'en allait, quand un jeune exposant,
+qui l'avait entendu de son magasin où il était
+avec son père, vint lui dire: Monsieur l'abbé, permettez-moi
+de vous conduire vers ce beau livre que mon
+père a aussi dans sa bibliothèque et dont souvent il
+nous cite les vers.</p>
+
+<p>Et le bon prêtre consolé, après avoir serré la main
+du père qui l'était venu saluer, fut conduit par le fils
+au but de son voyage, à ses chères <i>Imitations</i>, dont il
+lut avec âme quelques vers sublimes à son guide, le
+remercia affectueusement, le bénit, et en s'en allant
+répéta ces vers qu'il avait lus:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Vous pouvez maintenant, Seigneur,</p>
+<p class="i20">Rappeler votre serviteur.</p>
+</div></div>
+
+<h4>IMPÔTS</h4>
+
+<p>On a renouvelé, à l'aspect de l'Assemblée constituante
+de 1848, ces petits vers faits en 1790 pour sa
+devancière.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Quel coup d'oeil ravissant!</p>
+<p class="i20">Quel spectacle <i>imposant</i>!</p>
+<p class="i20">Disait un démocrate.</p>
+<p class="i20">Oui, réplique aussitôt</p>
+<p class="i20">Un brave aristocrate:</p>
+<p class="i20">Il va doubler l'<i>impôt</i>.</p>
+</div></div>
+
+<h4>INCUIT</h4>
+
+<p>Ce gigot est incuit, disait à son hôte un homme
+qui faisait le beau parleur.--Monsieur, répondit
+l'hôte, c'est par l'insoin de la cuisinière.</p>
+
+<h4>INRI</h4>
+
+<p>Le marquis de Gèvres était vain et ignorant; du
+moins, on le dit. On ajoute qu'il se compromettait
+souvent par là. Causant un jour dans les cabinets du
+roi, et admirant plusieurs tableaux, entre autres des
+crucifiements de différents maîtres, il décida que le
+même en avait fait un grand nombre, entre autres
+tous ceux qui se trouvaient là. On se moqua de lui, et
+on lui nomma les peintres, dont on reconnaissait la
+manière.--Point du tout, s'écria-t-il, ce peintre
+s'appelait INRI.</p>
+
+<p>Ne voyez vous pas son nom sur tous ces tableaux?...</p>
+
+<p>Est-ce possible?</p>
+
+<h4>INVENTER</h4>
+
+<p>Quelqu'un disait devant madame Du Deffant, qui
+s'était brouillée avec Voltaire, que ce dernier n'avait
+pas beaucoup inventé:--Que voulez-vous de plus?
+dit-elle finement, il a inventé l'histoire!</p>
+<br>
+<h2>J</h2>
+
+<h4>JABOT</h4>
+
+<p>Un élève en médecine se présente à l'examen de la
+Faculté, avec une chemise à jabot qui faisait honneur
+à sa blanchisseuse. Cela sortait de son gilet avec un
+éclat à faire loucher le professeur qui l'interrogeait.</p>
+
+<p>Dans le fait, le vieux docteur en était tout offusqué,
+et il prononça sur-le-champ, qu'un si beau jabot
+ne devait pas appartenir à un récipiendaire bien
+savant.</p>
+
+<p>Monsieur, dit-il, pourriez-vous me dire ce que vous
+entendez par jabot?</p>
+
+<p>Le candidat troublé ouvre de grands yeux, les
+abaisse sur sa poitrine, regarde le professeur et
+rougit.</p>
+
+<p>--Allons, vous ne savez pas ce que c'est qu'un
+jabot; c'est le troisième estomac d'un dindon.</p>
+
+<h4>J'AI FROID</h4>
+
+<p>Quel est l'homme dont on prononce le plus souvent
+le nom en hiver?--L'acteur <i>Geffroy</i>.</p>
+
+<h4>JAMBON</h4>
+
+<p>On disait à un touriste qu'il fallait se défier des
+Allemands, surtout dans les provinces rhénanes.--Cela
+m'étonne, dit-il, car à mon dernier voyage à
+Mayence, j'y ai vu beaucoup de <i>gens bons</i>.</p>
+
+<h4>JÉRICHO</h4>
+
+<p>Un marchand de tableaux présentait à un certain
+prince qu'on ne nomme pas, un petit tableau précieux,
+en lui disant qu'il venait de Géricault.--C'est
+prodigieux, dit le prince, que le tableau se soit si bien
+conservé depuis l'écroulement de cette ville!</p>
+
+<h4>JEUNESSE</h4>
+
+<p>Dasnières disait que la jeunesse s'appelle ainsi
+parce qu'elle est l'âge où les jeux naissent.</p>
+
+<h4>JEUX DE MOTS</h4>
+
+<p>À la fin de la campagne de 1761, où MM. les comtes
+de Fougère et de La Luzerne commandaient la maison
+du roi, un garde du corps, que des affaires instantes
+appelaient dans sa province, vint leur présenter
+sa démission, et les prier de lui accorder son
+congé.</p>
+
+<p>Quoi! Monsieur, lui dirent d'un ton ironique ces
+deux généraux, vous quittez le service pour aller
+planter vos choux!</p>
+
+<p>--Oui, Messieurs, répondit froidement l'honnête
+militaire; je vais bêcher mon jardin, et je le cultiverai
+de manière qu'il n'y vienne ni luzerne ni fougère.</p>
+
+<p>Un poëte médiocre croyait mettre ses vers à l'abri
+de la censure en disant qu'ils étaient passables:</p>
+
+<p>--Oui, lui dit-on, il sont passables en tous sens:
+vous vous seriez bien passé de les faire, nous nous
+serions bien passé de les lire, et la mémoire en passera
+bien vite.</p>
+
+<p>Quelqu'un ayant dit à une femme que le suif était
+augmenté à cause de la guerre:--Ah! dit-elle,
+apparemment que les armées se sont battues à la
+chandelle.</p>
+
+<p>Le marquis de St*** ayant offensé un M. De Chambre,
+fut engagé par ses amis à lui faire quelques excuses.
+Le marquis lui écrivit à peu près en ces termes.</p>
+
+<p>«Ce que je me suis permis de dire à votre sujet est
+absolument sans conséquence. La meilleure preuve
+que je puisse vous donner de mon estime, c'est de
+vous demander à dîner pour le jour qu'il vous plaira
+de m'assigner. Tout à vous.</p>
+
+<p>«<span class="sc">Le marquis de St***.</span>»</p>
+
+<p>M. De Chambre répondit:</p>
+
+<p>«Vous m'avez laissé le choix du jour. Empressé
+de vous recevoir, je vous invite pour mercredi, et
+vous prie de vouloir bien accepter la fortune du
+pot.</p>
+
+<p>«<span class="sc">De Chambre.</span>»</p>
+
+<p>M. de Puymaurin, député de Toulouse pendant la
+restauration, se plaisait à faire des jeux de mots. Un
+jour, M. Petou, député de la Còte-d'Or, monta trois
+fois à la tribune dans la même séance.--Ah ça! dit
+M. de Puymaurin, il faut donc toujours que M. Petou
+parle?</p>
+
+<p>--Je voudrais que mon fils sût un peu de tout, qu'il
+eût une teinture des langues latine et grecque, une
+teinture d'histoire et de géographie, une teinture des
+mathématiques, une teinture de dessin, etc.; mais je
+ne sais pas pour cela quel maître lui donner.</p>
+
+<p>--Donnez-lui, madame, un maître teinturier.</p>
+
+<p>La présente liste a été trouvée, en 1848, à l'Assemblée
+nationale sous le pupitre d'un montagnard facétieux,
+non moins connu par ses calembredaines que
+par ses quinze perruques. Les noms qui y sont inscrits
+étaient-ils destinés à <i>l'épuration</i>? Forment-ils au contraire
+une liste de conciliation? Nos lecteurs jugeront
+sur la copie textuelle que nous mettons sous leurs
+yeux:</p>
+
+<p>Armand Marrast, Mauvais, Marquis.</p>
+
+<p>Sénard, Mulé, Normand.</p>
+
+<p>Bastide, Canul, Rouillé.</p>
+
+<p>Porypapy, Noirot, Crépu.</p>
+
+<p>Buvignier, Casse-Carreau.</p>
+
+<p>Ledru-Rollin, Levet, Laissac, Dargent, Crémieux,
+Laydet, Découvrant, Cécile, Lacroix, Lorette.</p>
+
+<p>Leyraud de Puyraveau, Daix, Gouttay, Lamartine.</p>
+
+<p>Leblanc, Mouton, Beslay, Considérant, Lherbette,
+Faucher.</p>
+
+<p>Joly père, Savy, A. Payer, Lebleu, Dargenteuil.</p>
+
+<p>Sallandrouze, Tendret, Lestapis.</p>
+
+<p>Pierre Leroux, Person, Toupet.</p>
+
+<p>Boulanger, Pézerat, Dupin.</p>
+
+<p>Labbé, de Lamenais, Vieillard, Boussingault.</p>
+
+<p>On lisait alors dans le <i>Corsaire</i> cet autre amas de
+jeux de mots sur la même Assemblée:</p>
+
+<p>«On a vu tous nos législateurs éclater de rire à l'aspect
+du bon M. <i>Leboeuf</i>, montant à la tribune à propos
+d'une question de boucherie: rien de mieux! Le coq-à-l'âne
+y était; mais dès lors il devient fort difficile d'aborder
+les rostres pour peu qu'on ait un nom... Voyez
+plutôt:--D'ici à peu de temps, on doit présenter un
+projet de loi sur la boulangerie. Voilà donc la discussion
+interdite à la famille <i>Dupin</i> et à M. <i>Dufour</i>!
+Vienne le rapport de la commission des pâturages, et
+M. <i>Lherbette</i> est obligé de rester chez lui. S'agit-il du
+droit des vins, le pauvre M. <i>Baune</i> est réduit au silence,
+et M. <i>Lacave</i> est bien forcé de l'imiter. La discussion
+sur les ordonnances de chasse, entamée par
+M. <i>Chasseloup</i>, va faire fuir M. <i>Dain</i>, qui sera fort
+heureux de se cacher entre <i>Duparc</i> et <i>Dubois</i>. Si l'on
+s'avise de réglementer les perruquiers français, que
+diront MM. <i>Crépu</i> et <i>Toupet-des-Vignes</i>; MM. <i>Rateau</i>
+et <i>Bineau</i> auront-ils le droit de voter dans une question
+de jardinage, et M. <i>Buffet</i> dans une affaire de
+comestibles? Voyez-vous M. <i>Pigeon</i> prenant la parole
+contre <i>Lagrange</i>, dans une explication sur les grains,
+défendus par M. <i>Moulin</i>?... Quand il s'agira de la
+fixation de l'âge pour les listes électorales, est-ce
+M. <i>Vieillard</i> qui osera se déclarer incompétent? A
+propos du droit d'aînesse, que ferait l'amiral <i>Lainé</i>?
+Et si jamais (cela peut arriver) <i>Hyacinthe</i> comparaissait
+à la barre de la Législative, pour crime politique,
+qui le jugerait, de M. <i>Ney</i> ou de M. <i>Camus</i>?... Il n'y
+aurait guère que M. <i>Troplong</i> qui pourrait hasarder
+son bulletin. MM. <i>Le Flô</i> et <i>de Flotte</i> seraient bien vagues
+à propos de marine; M. <i>Failly</i>, fort suspect dans
+les questions commerciales; M. <i>Lélut</i> au moins superflu
+dans un projet électoral, et M. <i>Bigot</i> très-récusable
+dans l'examen du budget des cultes, appuyés par
+M. <i>Legros-Dévot</i>... Est-ce que M. <i>Lemaire</i> oserait dire
+son mot sur les franchises municipales? S'il s'agissait
+des monuments nationaux, M. <i>Conté</i> se croirait-il appelé
+à faire de l'histoire? En matière religieuse, <i>Pascal
+(Frédéric)</i> combattrait-il M. <i>Arnaud (de l'Ariège)</i>,
+sans craindre les allusions à <i>Port-Royal</i>?</p>
+
+<p>Un autre journal du même temps (<i>la Providence</i>)
+publia aussi une charmante et spirituelle critique, qui
+a droit à figurer ici.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">On vous a raconté l'idée assez comique</p>
+<p class="i16">De ce monsieur <i>Leroy</i> qui, plein d'ardeur civique,</p>
+<p class="i16">Prétendait l'autre jour, répudiant son nom,</p>
+<p class="i16">Qu'on l'appelât: <i>le Peuple</i>... et cela tout de boni</p>
+<p class="i16">C'était peut-être un comte... (ah! pardon, une histoire:</p>
+<p class="i16">Le mot <i>comte</i>, je crois, est banni du grimoire.)</p>
+<p class="i16">J'y pense, il est de fait que cela désormais,</p>
+<p class="i16">Va changer diablement le langage français;</p>
+<p class="i16">Voyez combien de mots le décret nous enlève:</p>
+<p class="i16">Il supprime d'un coup l'ancien <i>roi</i> de la fève,</p>
+<p class="i16">Les <i>rênes</i> de voiture et la <i>reine</i> du bal;</p>
+<p class="i16">Quant à la <i>reine Claude</i>, un arrêté légal</p>
+<p class="i16">N'admet, dans ses rigueurs, d'exceptions aucunes,</p>
+<p class="i16">Et la loi promulgée est faite pour les prunes.</p>
+<p class="i16">Le <i>Grand-Duc</i>, ce rival du rapide faucon,</p>
+<p class="i16">N'a qu'à bien se garder et qu'à changer de nom,</p>
+<p class="i16">Et le <i>tigre royal</i>, s'il tient à sa peau lisse,</p>
+<p class="i16">Doit cacher l'épithète à l'oeil de la police...</p>
+<p class="i16">Et l'oiseau de passage, appelé <i>Chevalier</i>,</p>
+<p class="i16">Quoi qu'en ait dit Buffon, n'est plus qu'un roturier;</p>
+<p class="i16">Quant à Jules Janin que notre République</p>
+<p class="i16">Proclama, dès longtemps, <i>prince</i> de la critique,</p>
+<p class="i16">Son esprit, son talent ne lui servent de rien:</p>
+<p class="i16">C'est presqu'un <i>Vacquerie</i>... un simple citoyen...</p>
+<p class="i16">Plus de distinctions, d'ordres, de privilèges!</p>
+<p class="i16">Les <i>croix</i>... même d'honneur, sont choses sacriléges:</p>
+<p class="i16">On les supprimera sur les dos des ânons:</p>
+<p class="i16">Les souliers désormais n'auront plus de <i>cordons</i>,</p>
+<p class="i16">Et l'on ne pourra plus mettre aux foyers de <i>plaques</i>.</p>
+<p class="i16">On défend les <i>rubans</i> aux bonnets comme aux claques;</p>
+<p class="i16">Les théâtres sont pris dans ces proscriptions,</p>
+<p class="i16">On joûra tout Chénier... sans <i>décorations</i>;</p>
+<p class="i16">Et quand madame Hamel rôtira des mauviettes,</p>
+<p class="i16">Défense à ses garçons d'en servir en <i>brochettes</i>:</p>
+<p class="i16">Inutile de dire aux lecteurs pénétrants</p>
+<p class="i16">Que les bottes, parbleu! n'auront pas de <i>tirans</i>;</p>
+<p class="i16">Que les livres, ces rois assemblés en chapitres,</p>
+<p class="i16">Paraîtront en public sans <i>pages</i> et sans <i>titres</i>;</p>
+<p class="i16">La lettre majuscule est proscrite à jamais:</p>
+<p class="i16">L'égalité pour tous! Aux termes des décrets</p>
+<p class="i16">Défense d'imprimer sur du papier <i>couronne</i>;</p>
+<p class="i16">Ordre de démolir la barrière du <i>Trône</i>:</p>
+<p class="i16">Le <i>sceptre</i> de Neptune est brisé pour toujours;</p>
+<p class="i16">Les fleuves couleront... comme ils pourront... sans <i>cours</i>.</p>
+<p class="i16">. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .</p>
+<p class="i16">On prétend que <i>Marquis</i>, l'homme des chocolats,</p>
+<p class="i16">Le <i>Marquis</i> praliné près des Panoramas.</p>
+<p class="i16">Fait peindre, en ce moment, un panneau magnifique</p>
+<p class="i16">Où l'on verra décrit en pastille gothique</p>
+<p class="i16">Ce seul mot: <i>Ci-devant</i>... Et que monsieur Boissy</p>
+<p class="i16">A, dit-on, résolu de l'adopter aussi.</p>
+<p class="i16"><i>Leduc</i>, marchand de bois au boulevard du Temple,</p>
+<p class="i16">Se range noblement à ce sublime exemple:</p>
+<p class="i16"><i>Leprince</i>, cordonnier près de la rue aux Ours,</p>
+<p class="i16">S'est citoyennisé déjà, depuis trois jours:</p>
+<p class="i16"><i>Baron</i>, le bandagiste, adhère pour son compte;</p>
+<p class="i16">Le passage Choiseul expulse monsieur <i>Comte</i>;</p>
+<p class="i16">Honteuse avec raison, la maison <i>Chambellan</i></p>
+<p class="i16">Biffe de son enseigne un nom de courtisan.</p>
+<p class="i16">Au quartier Montorgueil, par le même principe,</p>
+<p class="i16">On va voir effacer l'enseigne de <i>Philippe</i>;</p>
+<p class="i16">Le nom vilipendé qu'il tient de son parrain</p>
+<p class="i16">Disparaît..., et Philippe a nom <i>Ledru-Rollin</i>.</p>
+<p class="i16">Quant à l'homme d'État, ce Solon... provisoire,</p>
+<p class="i16">Attendu que <i>Rollin</i> fut professeur d'histoire,</p>
+<p class="i16">Et que, dans ses écrits, il flatta maintes fois</p>
+<p class="i16">Les despotes de Rome et le pouvoir des rois,</p>
+<p class="i16">Il abdique le nom d'un écrivain servile</p>
+<p class="i16">Et l'immole à l'autel de son hôtel-de-ville;</p>
+<p class="i16">Il reste désormais Ledru... Ledru tout court!...</p>
+<p class="i16">Mais pourtant attendu qu'autrefois, à la cour,</p>
+<p class="i16">Un sieur <i>Ledru-Comus</i> professa la physique,</p>
+<p class="i16">Et fut de Louis-Quinze un rampant domestique</p>
+<p class="i16">Défense aux citoyens de parler des Ledrus,</p>
+<p class="i16">Le ministre est ministre et ne s'appelle plus!</p>
+<p class="i16">L'illustre <i>Louis Blanc</i>, l'écrivain populaire,</p>
+<p class="i16">Ce Tacite français, cet orateur sincère,</p>
+<p class="i16">Veut de son double nom s'affranchir à la fois.</p>
+<p class="i16">Les <i>Louis</i> trop longtemps nous ont servi de rois,</p>
+<p class="i16">Le <i>blanc</i> fut la couleur d'un drapeau qu'il abhorre.</p>
+<p class="i16">Il va prendre le nom de <i>Vingt-Francs-Tricolore</i>.</p>
+</div></div>
+
+<p>Un ancien philosophe avait coutume de dire que
+peu de chose donnait la perfection, mais que la perfection
+n'était pas peu de chose.</p>
+
+<p>Un Gascon disait:--La boue de Paris a deux grands
+inconvénients: le premier est de faire des taches
+noires sur les bas blancs; le second, de faire des taches
+blanches sur les bas noirs.</p>
+
+<p>Un ami de Bautru étant allé le voir dans le temps
+qu'il avait la goutte, le trouva mangeant du jambon:--Que
+faites-vous là? lui dit-il; ne savez-vous pas que
+le jambon est contraire à la goutte?--Cela est vrai,
+lui répondit froidement Bautru; il est contraire à la
+goutte, mais il est bon pour le goutteux.</p>
+
+<p>Un procureur, en recevant d'un chapelier, sa partie,
+un chapeau, lui dit:--Ne vous inquiétez point, allez;
+j'ai votre affaire en tête, j'en aurai soin.</p>
+
+<p>Nous ne voulons pas oublier une petite pièce de
+vers de maître André le perruquier:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Les poëtes, les perruquiers</p>
+<p class="i20">Ont entre eux quelque ressemblance;</p>
+<p class="i20">Et vraiment, dans ces deux métiers</p>
+<p class="i20">Je vois bien peu de différence</p>
+<p class="i20">Pour réussir, à chacun d'eux,</p>
+<p class="i20">Certe il ne faut pas être bête...</p>
+<p class="i20">Compter des vers ou des cheveux,</p>
+<p class="i20">C'est toujours un travail de tête.</p>
+</div></div>
+
+<p>Nous ne pouvons omettre la harangue faite, à la
+porte d'une ville, à l'un des généraux de Louis XIV,
+quoiqu'elle ait été souvent reproduite.</p>
+
+<p>«Monseigneur, tandis que Louis le Grand gêne les
+Gênois, berne les Bernois et fait cantonner le reste des
+cantons: tandis qu'il fait aller l'Empire de mal en pire,
+damner le Danemarck et suer la Suède; tandis que
+son digne rejeton fait baver les Bavarois et rend les
+troupes de Zelle sans zèle; tandis que Luxembourg
+fait fleurir la France à Fleurus, met en flamme les Flamands,
+lie les Liégeois et fait danser Castana sans
+castagnette; tandis que le Turc fait esclaves les Esclavons
+et réduit en servitude la Servie; enfin, tandis
+que Catinat démonte les Piémontais, que Saint-Ruch
+se rue sur les Savoyards et que Larré les arrête, vous,
+Monseigneur, non content de faire sentir la pesanteur
+de vos doigts aux Vaudois, vous faites encore la barbe
+aux Barbets, ce qui nous oblige d'être, avec un profond
+respect, etc.»</p>
+
+<p>Remarquons que le mot <i>Barbets</i> ne s'applique pas
+aux intéressants quadrupèdes connus sous ce nom,
+mais bien aux habitants de diverses vallées du Piémont
+et de la Suisse.</p>
+
+<h4>JOCRISSE</h4>
+
+<p>Personnage des farces modernes, dont les bêtises
+ont un cachet particulier. Il aime beaucoup sa soeur et
+veut l'épouser.--Mais je ne peux pas t'épouser, lui
+dit-elle: je suis ta soeur. Nous sommes trop proches
+parents.--Quelle bêtise, dit Jocrisse, trop proches
+parents! Mon père a bien épousé ma mère.</p>
+
+<p>Sa soeur en épouse donc un autre quelque temps
+après.--Ma soeur est enceinte, dit-il, quel ennui! J'en
+ai pour neuf mois avant de savoir si je serai un oncle
+ou une tante. Il veut dire: Si j'aurai un neveu ou une
+nièce. C'est digne du commentaire sur la parenté.</p>
+
+<h4>JOUER</h4>
+
+<p>Un seigneur allemand, connu par les grâces et la finesse
+de son esprit, alla un jour chez un prince de
+l'Empire: il y trouva nombreuse compagnie, et s'amusa
+beaucoup de l'extrême vivacité avec laquelle
+quelques petits princes, qui y étaient, se traitaient
+mutuellement d'<i>altesse</i>.</p>
+
+<p>Sortant de là, il fut faire une autre visite, et revint
+chez lui. On lui demanda comment il avait passé la
+soirée.--J'ai été dans deux maisons, répondit-il:
+dans l'une, on jouait à l'<i>altesse</i>, et dans l'autre, au
+<i>loto</i>.</p>
+
+<h4>JOUEUR</h4>
+
+<p>--Quatre joueurs ont joué toute une nuit dans une
+société, disait-on à une dame, et le matin chaque
+joueur avait gagné dix francs. La dame ne pouvait
+comprendre un tel fait pourtant bien simple; les
+quatre joueurs étaient quatre joueurs de violon.</p>
+
+<h4>JUSTE</h4>
+
+<p>Un Allemand, dit-on, apprenant le français, vit dans
+un dictionnaire que juste et équitable étaient synonymes.
+Il essaya des bottes qui le gênaient:--Vous
+m'avez fait, dit-il à son cordonnier, des bottes qui
+sont par trop équitables.</p>
+<br>
+<h2>K</h2>
+
+<p>Les lettres K C et les lettres K O T sont désagréables
+au lecteur.</p>
+
+<h4>K</h4>
+
+<p>Un homme qui s'appelait Franqlin songea qu'il pourrait
+bien être le parent de ce fameux Américain, que
+les philosophes ont si bien fait mousser. Il alla donc
+trouver à Paris le neveu de Franklin et lui présenta
+ses papiers.--Monsieur, lui répondit le jeune homme,
+faites un K de votre Q, et vos papiers pourront alors
+vous servir.</p>
+
+<h4>KARR</h4>
+
+<p>On s'est amusé à chercher les aptitudes et les qualificatifs
+de M. Alphonse Karr, qui a un esprit si original,
+et on a fait ces médiocres calembours:</p>
+
+<p>Karr abat (<i>Carabas</i>), Karr casse (<i>carcasse</i>), Karr
+touche (<i>Cartouche</i>), Karr aime (<i>carême</i>), Karr nage
+(<i>carnage</i>), etc.</p>
+
+<h4>KANIFERSTANE</h4>
+
+<p>Un Parisien, allant de La Haye à Amsterdam, remarqua
+une de ces riantes maisons de campagne qui
+bordent la route (on allait encore alors en diligences),
+et demanda en français à un Hollandais, son
+voisin:</p>
+
+<p>--A qui appartient ce délicieux château? Le Hollandais
+lui répondit: <i>Ik kan niet verstaan</i> (je ne comprends
+pas). Le Parisien traduisant cette phrase comme
+il l'entendait prononcer, reprit:--Ah! cette belle demeure
+appartient à M. Kaniferstane. C'est un mortel
+bien heureux.</p>
+
+<p>En entrant à Amsterdam, il vit passer trois charmantes
+jeunes filles et demanda à un passant: Quelles
+sont ces demoiselles si brillantes? il ne reçut pour
+réponse que la phrase de la route.--Ce sont les demoiselles
+Kaniferstane, se dit-il. Cet homme est bien
+privilégié!</p>
+
+<p>Un des palais d'Amsterdam donna lieu à de nouvelles
+admirations.--Cet homme, dit le Parisien, est
+vraiment le marquis de Carabas.</p>
+
+<p>En passant devant la loterie, il entendit sonner des
+fanfares, qui annonçaient que le gros lot venait de
+sortir. Il voulut savoir qui l'avait gagné; et comme
+on lui jeta encore l'<i>ik kan niet verstaan</i>, il se récria
+de nouveau sur le bonheur-monstre de ce M. Kaniferstane.</p>
+
+<p>Un peu plus loin il rencontra un enterrement pompeux;
+il salua le convoi et demanda qui était le défunt.
+Sur la réponse habituelle des Hollandais qui n'entendent
+pas le français, il pensa que M. Kaniferstane
+avait ici-bas une félicité trop grande pour qu'elle fût
+durable; et il gagna son hôtel, en faisant de sages
+réflexions sur la fragilité des choses d'ici-bas.</p>
+<br>
+<h2>L</h2>
+
+<p>Quelles sont les lettres les plus agiles?--Les lettres
+L E.</p>
+
+<p>On a fait cette petite espièglerie pour la lettre L:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Saint Louis l'a par devant,</p>
+<p class="i20">Saint Michel l'a par derrière,</p>
+<p class="i20">Les demoiselles l'ont deux fois,</p>
+<p class="i20">Les dames l'ont perdue,</p>
+<p class="i20">Les hommes ne l'ont pas.</p>
+</div></div>
+
+<p>On dit proverbialement qu'un homme en a dans
+l'aile pour signifier qu'il passe la cinquantaine, par
+une mauvaise allusion à la lettre L qui, dans le chiffre
+romain, exprime cinquante.</p>
+
+<h4>LA</h4>
+
+<p>Une dame, gui chantait médiocrement dans une
+société, ne pouvant achever son air, dit à un homme
+d'esprit qui se trouvait à côté d'elle:--Je vais le reprendre
+en <i>mi</i>.--Non, Madame, répondit-il, restez-en
+<i>la</i>.</p>
+
+<h4>LACHE</h4>
+
+<p>Un Gascon se fit faire un bel habit, et il demanda
+à ses amis ce qu'il leur en semblait. Un d'eux en
+mania le drap, qu'il trouva un peu lâche.</p>
+
+<p>--Comment lâche! reprit le Gascon, que l'on m'en
+cherche d'autre; je ne veux rien de lâche autour
+de moi.</p>
+
+<p>Le cardinal de Richelieu ayant eu la patience d'entendre
+lire une tragédie de La Calprenède, dit: «La
+pièce n'est pas mauvaise, mais les vers sont lâches.--Comment,
+lâches, s'écria le rimeur gascon! cadédis!
+il n'y a rien de lâche dans la maison de Calprenède.»</p>
+
+<h4>LA-HAUT</h4>
+
+<p>Dans les embarras de la république qui surgit en
+1848, la femme de l'un des utopistes d'alors reçut la
+visite d'une amie.--Bonjour, chère citoyenne, je vois
+que tu es prospère, et ton mari?--Il travaille, ma
+chère, dit la dame du logis en indiquant du doigt
+l'étage supérieur, où son mari s'enfermait pour ses
+élucubrations.--Mais, reprit la visiteuse, ne vois-tu
+pas comme tout va mal?--Je le vois trop. Tout le
+monde veut gouverner.--Nous sommes en vérité dans
+un gâchis tel, qu'il n'y a que celui qui est là-haut qui
+puisse nous en tirer.--Tu as bien raison, ma chère;
+aussi je te dis qu'il y travaille.--Elle appliquait à
+son mari ce que l'autre disait du bon Dieu.</p>
+
+<h4>LAIDS</h4>
+
+<p>Après qu'on eut nommé le département des Deux-Sèvres
+(pays de Niort), on voulut nommer le pays de
+Fontenay département des Deux-Lays (de ses principales
+rivières, le grand Lay et le petit Lay).</p>
+
+<p>MM. Buron et Mercier, deux députés de ce département,
+tous deux les plus laids de l'assemblée, firent
+observer que si on adoptait ce nom pour leur département,
+on en ferait contre eux un affreux calembour
+et qu'on l'appellerait le département des deux laids.
+Ce qui fit qu'on l'appela département de la Vendée,
+du nom d'une petite rivière qui est à sec la moitié de
+l'année.</p>
+
+<h4>LAINE</h4>
+
+<p>Quelqu'un disait à un berger:--Ne faites jamais
+tondre vos moutons.--Et pourquoi donc?--Parce
+qu'on devient poussif, lorsqu'on a perdu l'haleine.</p>
+
+<p>On disait d'un homme qui avait la bouche malsaine:--Il
+est bon à tondre, car il a l'haleine forte.</p>
+
+<p>Quel événement a fait renchérir les draps?--L'enlèvement
+d'Hélène.</p>
+
+<h4>LAMICHODIÈRE</h4>
+
+<p>Un étranger dînant chez M. de La Michodière, président
+de la cour royale de Paris, et l'entendant appeler
+par ses familiers Lamichodière tout court, ne crut pas
+pouvoir se permettre cette liberté et ne l'appela pendant
+tout le repas que M. Chaudière. Ce qui divertit
+un peu les amis conviés.</p>
+
+<h4>LANGUES</h4>
+
+<p>Madame Denis, la nièce de Voltaire, prenant une
+leçon d'anglais, disait à son maître, fatiguée qu'elle
+était de la prononciation de cette rude langue: «Vous
+écrivez <i>bread</i>, pourquoi prononcer <i>bred</i>? Ne serait-il
+pas plus simple de dire tout bonnement <i>du pain</i>?»</p>
+
+<h4>LAPIN</h4>
+
+<p>Un farceur disait que la dynastie des lapins allait
+vite, que peu après <i>la pincette</i>, on en était déjà à
+<i>l'appendix</i>.</p>
+
+<h4>LARCIN</h4>
+
+<p>Les naturalistes nous apprennent que les rats sont
+joyeux quand ils peuvent vivre de lard sain.</p>
+
+<h4>LAVER</h4>
+
+<p>Un farceur demandant quelque chose à une femme
+lui disait:--Je crois, Madame, que vous l'avez.--Non,
+Monsieur, répondit-elle, je ne lave pas.</p>
+
+<h4>LÉPREUX</h4>
+
+<p>Le public vit un calembour involontaire dans ce
+vers du <i>Siége de Paris</i>, de M. le vicomte d'Arlincourt.</p>
+
+<p class="mid">Ce sont ces chevaliers que l'on nomme <i>les preux</i>.</p>
+
+<h4>LETTRES</h4>
+
+<p>On fait beaucoup de jeux de mots avec les lettres
+de l'alphabet. On a publié celui-ci sous Louis XVIII:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">La liberté D. C. D.</p>
+<p class="i20">Les doctrinaires A. I.</p>
+<p class="i20">Les pairs E. B. T.</p>
+<p class="i20">Deux cents députés H. T.</p>
+<p class="i20">La gloire A. B. C</p>
+<p class="i20">La dette O. C.</p>
+<p class="i20">La liberté de la presse O.T.</p>
+<p class="i20">Le crédit B. C.</p>
+<p class="i20">La charte L. U. D.</p>
+</div></div>
+
+<h4>HISTOIRE D'HÉLÈNE.</h4>
+
+<pre>
+ <i>L. n. n. e. o. p. y. L. i.a. t.t. l.</i>
+Hélène est née au pays grec. Elle y a tété; elle
+
+<i>i.a.v.q. l. i.a.e.t. l.v. l. i.a.e.t.o.q.p.</i>
+y a vécu. Elle y a été élevée; elle y a été occupée;
+
+<i> l. i.a.e.t. e.d. l. i.a. m.e. l. i.a.</i>
+elle y a été aidée; elle y a aimé; elle y a
+
+<i>e.t. m.e. e. a.i. l. i.a.e.t. d. s. e. d.i.t. l.</i>
+été aimée et haïe; elle y a été déesse et déité; elle
+
+<i>i.a. c.d. l. i.a.o.b.i. l. i.a.e.t. h.t. l.</i>
+y a cédé; elle y a obéi; elle y a été achetée; elle
+
+<i>i.a.e.t.a.j.t. a. b. c. k. o. t. l. i.a. v.g.t.</i>
+y a été agitée, abaissée, cahotée; elle y a végété.
+
+<i> l. i.a. r.i.t. e. l. i. e. d.c.d. a.g. e. k. c.</i>
+Elle y a hérité, et elle y est décédée, âgée et cassée.
+</pre>
+
+<h4>LÉZARD</h4>
+
+<p>Une vieille, voyant au-dessus de la porte d'un lycée
+de Paris:</p>
+
+<p class="mid">Les arts nourrissent l'homme et le consolent,</p>
+
+<p>s'écria:--Que ces gens-là mangent des lézards tant
+qu'ils voudront; je ne ferai pas de tort à leur dîner.</p>
+
+<h4>LIBERTÉ</h4>
+
+<p>Dans le temps où les mots liberté, égalité, fraternité,
+cocarde nationale, faisaient tourner la tête à tout le
+monde, les habitants d'un village du Périgord obligèrent
+leur curé, non-seulement à mettre une cocarde
+au Saint-Sacrement, mais encore à tenir le tabernacle
+ouvert jour et nuit, par la raison que tout le monde
+étant, libre en France, leur bon Dieu ne devait pas,
+plus que tout autre, demeurer enfermé.</p>
+
+<h4>LIÉGE</h4>
+
+<p>Quelles sont les femmes les plus légères?--Ce sont
+les femmes de Liége et les femmes de Tulle.</p>
+
+<h4>LIGNE</h4>
+
+<p>Comment feriez-vous pour pêcher tous les poissons
+de la Seine?</p>
+
+<p>--Je prendrais un régiment de lignes.</p>
+
+<h4>LISIÈRE</h4>
+
+<p>Pourquoi ne mène-t-on pas les petits enfants dans
+les bois?--Parce qu'on ne les mène alors qu'à la
+lisière.</p>
+
+<h4>LOCUTIONS</h4>
+
+<p>Lorsque le projet de loi de la translation des cendres
+de Napoléon fut porté aux Chambres, un de nos honorables
+s'écria:--Les cendres! Est-ce que ces gueux
+d'Anglais auraient eu l'infamie de brûler le grand
+homme?</p>
+
+<p>Des soldats de l'expédition d'Égypte disaient dans
+les sables:--Il fait bien soif par ici.</p>
+
+<p>Le poëte Méry est très-frileux. Dans les grands froids,
+enveloppé de couvertures, il s'enferme auprès d'un
+grand feu, ne sort plus, et fait dire à ses amis qu'il
+est malade. Quand on vient le voir et qu'on lui demande
+quel est son mal, il répond:--Hélas! j'ai
+l'hiver! (Voyez <i>Mots</i>.)</p>
+
+<h4>LOIN</h4>
+
+<p>On disait à un enfant de Pontoise qui montrait
+d'heureuses dispositions:--Mon enfant, vous irez
+loin.--Pas de sitôt, répondit-il; maman ne veut pas
+même que j'aille jusqu'à Paris.</p>
+
+<h4>LONDRES</h4>
+
+<p>La ville des brouillards. Pendant un séjour que fit
+à Londres madame de Staël, une de ses amies qui revenait
+en France lui demanda si elle avait quelque
+commission à lui donner.--Aucune autre, répondit-elle,
+que de faire mes compliments au soleil, quand
+vous le reverrez.</p>
+
+<h4>LOUER</h4>
+
+<p>Lorsque le duc d'Orléans, Philippe-Égalité, convertit
+son jardin en un vaste bazar, et le couvrit de boutiques,
+il tomba sur lui un déluge de quolibets et d'épigrammes.
+Son propre père s'en mêla, et il dit:--Je
+ne sais pas d'où vient l'acharnement du public contre
+mon fils; j'y vois de plus près que les autres, et je
+puis assurer que tout est à <i>louer</i> chez lui.</p>
+
+<h4>LUMIÈRES</h4>
+
+<p>Dans un repas donné par un nouveau parvenu, l'un
+des convives porta un toast à la propagation des lumières.
+Les gens qui servaient à table s'empressèrent
+de moucher les chandelles.</p>
+
+<h4>LUSTRE</h4>
+
+<p>Un plaisant, voyant deux hommes qui portaient un
+lustre, dit à ses voisins:--Voilà cinq ans qui passent.</p>
+<br>
+
+<h2>M</h2>
+
+<h4>MAÇONNERIE</h4>
+
+<p>Un charpentier critiquait un carillonneur sur sa
+manière:--Allez à vos bûches, dit celui-ci, et ne vous
+mêlez pas de ma sonnerie.</p>
+
+<h4>MADELEINE</h4>
+
+<p>--Que faudrait-il pour bouleverser l'<i>amas de laine</i>?</p>
+
+<p>--Un <i>cardeur</i>.</p>
+
+<h4>MAINTENON</h4>
+
+<p>Sur la fin du règne de Louis XIV, le grand dauphin
+parut surpris de la détresse qui semblait menacer le
+royaume:--Mon fils, dit le roi, nous maintiendrons
+notre couronne.--Sire, répondit le dauphin, Maintenon
+l'a.</p>
+
+<h4>MAIRE</h4>
+
+<p>Le maire de Saintes écrivait à son fils, qui se conduisait
+mal:--Respectez votre père et maire.</p>
+
+<p>Un bon cultivateur, maire de sa commune, se trouva
+dernièrement dans un grand embarras, dont il se tira
+fort adroitement. Sa femme était accouchée depuis
+trois jours, et l'adjoint de la commune venait de partir
+pour un village assez éloigné. Il fallait cependant
+dresser l'acte de naissance sur-le-champ. Le maire-père,
+après avoir mûrement réfléchi, s'en acquitta de
+la manière suivante:</p>
+
+<p>«Ce jourd'hui, etc., étant accompagné de tels et
+tels, mes témoins, je suis comparu devant moi, maire
+de la commune de..., à l'effet de me déclarer que ma
+femme vient d'accoucher d'un enfant vivant et bien
+constitué.</p>
+
+<p>«Sur la demande de quel sexe est l'enfant et quels
+étaient ses père et mère, je me suis répondu qu'il est
+du sexe masculin et fils de moi, François Piot, et de
+Madeleine Bidou, mon épouse; en foi de quoi, j'ai signé
+le présent, avec moi, maire, et lesdits témoins.</p>
+
+<p>«<i>Signé</i>: François Piot, père,<br>
+«et François Piot, <i>maire</i>.»</p>
+
+<h4>MAL</h4>
+
+<p>Un dentiste disait à son fils qui voulait donner dans
+les grandeurs:--Eh! Monsieur, ne cherchez pas à
+vous élever; faites comme votre père: arrachez-moi
+de bonnes dents; j'en arrache; mon père en arrachait,
+mon grand-père en a arraché, et nous n'avons jamais
+fait de mal à personne.</p>
+
+<h4>MALADE</h4>
+
+<p>Henri IV, ayant appris que deux médecins avaient
+fait abjuration, dit à Duplessis-Mornay:--Ventre
+Saint-Gris! monsieur Duplessis, votre religion est
+bien malade; les médecins l'abandonnent.</p>
+
+<h4>MANCHE</h4>
+
+<p>On appelle ainsi le détroit qui sépare la France de
+l'Angleterre. Lorsqu'on imprima, il y a quelques
+années, des cartes géographiques sur foulard:--Je
+ne vois pas l'utilité de cette invention, dit un bonhomme,
+si ce n'est que chacun peut avec cela se moucher
+proprement sur la Manche.</p>
+
+<p>À propos de l'alliance conclue avec l'Angleterre pour
+la guerre d'Orient, on a dit que les Anglais et les Français
+se tenaient par la Manche.</p>
+
+<h4>MANGER</h4>
+
+<p>Un huissier ayant été signifier un exploit dans une
+ferme, on lâcha après lui deux énormes chiens, qui
+lui firent prendre aisément la fuite; et comme à son
+retour on lui demandait s'il avait été bien reçu:--Parfaitement,
+dit-il; et la preuve, c'est qu'on a voulu me
+faire manger.</p>
+
+<p>L'abbé de Choisy, passant devant le château de Balleroy,
+qu'il avait été obligé de vendre, s'écria:--Ah!
+que je te mangerais bien encore!</p>
+
+<p>Montmaur étant un jour à table avec grande compagnie
+de ses amis, qui parlaient, chantaient et riaient
+tout ensemble:--Eh! Messieurs, s'écria-t-il, un peu
+de silence; on ne sait ce qu'on mange.</p>
+
+<h4>MANQUER</h4>
+
+<p>Gourville, rencontrant au bois de Boulogne un médecin
+de ses amis qui avait un fusil, lui dit:--Où
+allez-vous donc?--Voir un malade à Auteuil.--Il
+paraît, répliqua Gourville, que vous avez peur de le
+manquer.</p>
+
+<h4>MANTEAU</h4>
+
+<p>On demandait à Londres à un ambassadeur belge:--Quel
+est le manteau le plus chaud? Il répondit:--C'est
+le manteau de la cheminée.</p>
+
+<h4>MARCA</h4>
+
+<p>Pierre de Marca fut nommé à l'archevêché de Paris,
+et mourut en 1662, le jour même que ses bulles arrivèrent.
+Colletet lui fit cette épitaphe:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Ci-gît monseigneur de Marca,</p>
+<p class="i20">Que le roi sagement marqua</p>
+<p class="i20">Pour le prélat de son Église;</p>
+<p class="i20">Mais la mort qui le remarqua,</p>
+<p class="i20">Et qui se plaît à la surprise,</p>
+<p class="i20">Tout aussitôt le démarqua.</p>
+</div></div>
+
+<h4>MARCHAND</h4>
+
+<p>Un vagabond, à qui le tribunal demandait quel était
+son état, répondit qu'il était marchant, attendu qu'il
+ne voyageait qu'à pied.</p>
+
+<h4>MARÉCHAL</h4>
+
+<p>Un maréchal ferrait un des chevaux d'un maréchal
+de France qui passait sur la route. Pendant l'opération,
+il entendit les domestiques qui appelaient l'illustre
+voyageur monsieur le maréchal; et, quand on fut
+pour le payer, il refusa, en faisant observer qu'il ne
+prenait rien d'un confrère.</p>
+
+<h4>MARÉCHAUSSÉE</h4>
+
+<p>Une poissarde de la rue Montorgueil, à Paris, avait
+pour enseigne un merlan dans une botte, avec la légende:
+<i>A la marée chaussée</i>.</p>
+
+<h4>MATIGNON</h4>
+
+<p>On a beaucoup dit sur la simplicité d'un certain
+M. de Matignon. On a dit qu'il avait fait paver son pré
+pour empêcher les taupes d'y fouiller; qu'il avait fait
+reculer la cheminée, parce que de l'endroit où il se
+plaçait, le feu lui brûlait les jambes; qu'un mouton
+étant trop gros pour régaler ses amis, il n'en avait fait
+tuer que la moitié, etc.</p>
+
+<p>Un autre ingénu avait pris un pot de terre en guise
+d'oreiller, et, le trouvant trop dur, il le rembourra de
+paille.</p>
+
+<h4>MÉDECINE</h4>
+
+<p>--Qu'est-ce que la médecine? demande Bobèche à
+l'un de ses amis.</p>
+
+<p>--La médecine, répond celui-ci, c'est l'art de guérir
+les maladies; c'est une science...</p>
+
+<p>--Du tout, tu n'y es pas, répond Bobèche: la <i>médecine,
+c'est la femme du médecin</i>.</p>
+
+<h4>MÉGARDE</h4>
+
+<p>Un colonel, défendant son fils accusé, disait aux
+juges:--Je puis vous prouver que le délit dont mon
+fils est accusé a été commis par <i>mégarde</i>.--C'est
+différent, dit le juge; alors nous allons assigner vos
+gardes.</p>
+
+<h4>MELON</h4>
+
+<p>Un incident singulier a égayé un jour l'audience de
+la justice de paix du sixième arrondissement. M. L...,
+marchand grainetier et sergent-major de la garde
+nationale, accusait M. B..., professeur suppléant
+d'histoire dans un collége de Paris, de l'avoir appelé
+<i>melon</i> à la suite d'un coup mal joué dans une partie
+de dominos à quatre. Le plaignant exigeait une rétractation
+formelle et des dommages-intérêts considérables.</p>
+
+<p>L'accusé présenta ainsi sa défense:</p>
+
+<p>Sous le règne de Constantin le Grand...</p>
+
+<p>--Au fait, Monsieur, au fait, dit le magistrat qui
+voit poindre une harangue interminable.</p>
+
+<p>--J'y arrive. Sous le règne, dis-je, de Constantin le
+Grand, vivait à Lugdunum Horatius Melo, illustre
+praticien qui, après s'être couvert de gloire en introduisant
+dans la Gaule le savoureux tubercule auquel il
+a donné son nom...</p>
+
+<p>Le juge sourit et le front du plaignant se dérida à
+vue d'oeil.</p>
+
+<p>--Mon honorable ami L..., continue l'orateur avec
+feu, a donc grand tort de s'offenser d'une épithète qui
+prouve au contraire le grand cas que je fais de ses
+vertus civiles et militaires.</p>
+
+<p>Le grainetier, quittant précipitamment son siége,
+serre avec effusion la main du professeur, et, abjurant
+toute rancune, lui promet de donner à son premier
+enfant les glorieux surnoms d'Horatius Melo.</p>
+
+<p>Il suffira de quelques procès de cette nature pour
+réhabiliter dans l'opinion publique le cornichon, le
+concombre, et tous les membres de la grande famille
+des citrouilles.</p>
+
+<h4>MÉMOIRE</h4>
+
+<p>C'est encore ici une scène de tribunal; et celle-ci à
+propos d'une distribution de prix.</p>
+
+<p>LE JUGE.--Monsieur Blondel, vous avez payé
+d'avance et pour un an la pension de votre fils?</p>
+
+<p>BLONDEL.--C'est vrai, mais il n'en est pas moins
+bête comme un âne.</p>
+
+<p>LE JUGE.--Et maintenant vous voulez qu'on vous
+rende votre argent?</p>
+
+<p>LE MAÎTRE D'ÉCOLE.--C'est contraire à l'usage, on
+ne rend jamais l'argent chez moi.</p>
+
+<p>BLONDEL.--Cependant je veux le mien, je ne veux
+pas laisser mon fils en pension chez vous.</p>
+
+<p>LE JUGE.--Pourquoi donc?</p>
+
+<p>BLONDEL.--À cause de la distribution des prix.</p>
+
+<p>LE JUGE.--Expliquez-vous.</p>
+
+<p>BLONDEL.--Imaginez-vous, mon juge, que mon
+enfant, qui aura onze ans à la Saint-Nicaise, allait en
+classe chez cet homme contre lequel je plaide. Il y
+apprenait à ravir... la manière d'arracher sa culotte
+et de se fourrer des barbes de plumes dans les narines.
+(Rire général.) Bref, je croyais qu'à part ces connaissances
+spéciales, mon enfant aurait fait quelques progrès
+dans les sciences... le maître d'école que je consultais
+à ce sujet, la veille de la distribution des prix,
+me répétait qu'il serait récompensé selon son mérite.</p>
+
+<p>LE MAITRE D'ÉCOLE.--Il a eu un prix, il l'a été,
+récompensé; donc pas de reproche à me faire.</p>
+
+<p>BLONDEL.--Joliment ma foi. Vous saurez que,
+n'ayant pas eu le temps d'aller voir couronner mon
+fils, je l'envoyai le jour de la distribution des prix se
+faire couronner tout seul. Mon petit bonhomme revient
+avec une couronne atroce (rire), grosse comme le bras,
+de quoi orner le front d'un géant; quand il la mettait
+sur sa tête, elle lui tombait sur le ventre. (Rire
+général.) «Quel prix as-tu eu? lui dis-je.--Ah! papa,
+j'ai oublié mon prix.--Mais enfin quel prix était-ce?--J'sais
+pas, papa.--Diable d'enfant! ne pas savoir
+le prix qu'on a remporté... Est-ce d'orthographe?--Non,
+p'pa.--C'est peut-être d'écriture?--Non, p'pa.--De
+calcul?-Non p'pa.--Quelle pauvre tête!... ne
+pas se souvenir de son prix!... Je vais à la pension
+moi-même pour le chercher... Savez-vous quel prix
+mon fils avait remporté?</p>
+
+<p>LE JUGE.--Lequel donc?</p>
+
+<p>BLONDEL.--Le prix de mémoire. (Longue et bruyante
+hilarité.)</p>
+
+<p>Le maître d'école, pendant le rire général, rend à
+M. Blondel le montant de la pension de son fils, et
+sort furieux du prétoire.</p>
+
+<h4>MENER</h4>
+
+<p>François II, empereur d'Allemagne se rendait à
+Luxembourg, forteresse curieuse élevée au milieu d'un
+lac. Sans suite et sans gardes, il s'amusait à conduire
+lui-même une barque. Il y en a beaucoup sur ses
+rives. Un villageois s'approche et l'appelle; il le prend
+pour un batelier. «Ohé! passez-moi! lui crie-t-il.--Volontiers,»
+répond le monarque.</p>
+
+<p>Le paysan s'assied tranquillement dans la nacelle;
+et le souverain la dirige. «Combien vous faut-il maintenant?
+dit le rustre arrivé au but, et tirant sa bourse.--Rien,
+mon ami, répond l'empereur...--Vous ne
+menez donc pas par état?--Si fait, je mène... mon
+empire.»</p>
+
+<h4>MENTON</h4>
+
+<p>Un Anglais et un Français se battaient au pistolet.
+Le premier, au moment de tirer, n'étant pas encore
+bien décidé à se battre, dit: «Parlementons.--Soit,»
+dit l'autre. Et la balle vint traverser la mâchoire
+inférieure de son adversaire.</p>
+
+<h4>MERLAN</h4>
+
+<p>Un chercheur d'esprit disait, en passant devant une
+mairie où les affaires n'allaient pas vite: «On peut
+faire maigre là tous les jours, car on y trouve à tout
+heure un maire lent.»</p>
+
+<h4>MERVEILLE</h4>
+
+<p>En 1812, il y avait dans la rue Saint-Honoré un
+confiseur qui s'appelait Veille. Dès qu'il eut un fils,
+il fit savoir au public qu'on pouvait venir chez lui
+admirer la mère Veille.</p>
+
+<h4>MESSIDOR</h4>
+
+<p>Quel est le mois que les juifs aiment le mieux?--Le
+mois de juillet, qui dans la république leur amenait
+un <i>Messie d'or</i>.</p>
+
+<h4>MESURE</h4>
+
+<p>On dit des musiciens que quand il s'agit de payer,
+ils sont rarement en mesure.</p>
+
+<h4>MILLE ANS</h4>
+
+<p>Napoléon Ier aimait assez les calembours.</p>
+
+<p>En 1796, lorsqu'il sollicitait le commandement en
+chef de l'armée d'Italie, il n'avait que vingt-sept ans;
+et, lui opposant son âge, on balançait à le nommer.
+«Vous me trouvez trop jeune, dit-il, pour commander
+en chef; eh bien, accordez-moi ma demande, et je
+vous réponds que dans six mois j'aurai Milan.»</p>
+
+<h4>MINE</h4>
+
+<p>Guillot-Gorjus disait à Turlupin:--Tu m'as fait la
+mine.--Non, répondit Turlupin, si je te l'avais faite,
+tu l'aurais plus belle.</p>
+
+<h4>MOITIÉ</h4>
+
+<p>Deux villageois avaient acheté un cochon en commun;
+au bout de six mois, l'un voulait le tuer,
+l'autre ne voulait pas. «Si vous ne voulez pas tuer
+votre moitié, dit le premier, laissez moi tuer la
+mienne.»</p>
+
+<h4>MONARCHIEN</h4>
+
+<p>Les dictionnaires nous apprennent que monarchien
+signifie, comme monarchiste, partisan de la monarchie.
+En 1793, un boucher, nommé Monar, était dur
+aux pauvres gens, auxquels, dans la détresse générale,
+il refusait tout crédit. Un pauvre homme, fâché,
+écrivit sur sa porte <i>monar chien</i>. C'était une dénonciation.
+Il fut arrêté comme suspect, et sans son ami
+Henri, le boucher historique, il eût pu y passer.</p>
+
+<h4>MONDE</h4>
+
+<p>Un bonhomme disait: «Je ne connais pas d'endroit
+où il se passe plus de choses que dans le monde.»</p>
+
+<h4>MONORIMES</h4>
+
+<p>Un des plus curieux tours de force en monorimes,
+employant les cinq voyelles dans leur plus rare situation,
+a été fait par l'abbé de Latteignant; on le chantait
+jadis sur l'air: «<i>En quatre mots je vais vous
+dire ça.</i>»</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+
+<p class="mid">I</p>
+<br>
+<p class="i16">Je hais les dés, les cartes, le trictrac;</p>
+<p class="i18"> Je ne bois jamais de scubac</p>
+<p class="i20"> Ni de punch, ni de rack.</p>
+<p class="i18"> Par peur de la moindre claque,</p>
+<p class="i18"> Je fuis sitôt qu'on m'attaque</p>
+<p class="i20"> Plus vite qu'un brac.</p>
+<p class="i16">Je ne vais pas courtiser Bergerac;</p>
+<p class="i20"> Et pour grossir mon sac</p>
+<p class="i20"> Je ne fais nul micmac.</p>
+<p class="i18"> Je n'ai d'horloge et d'almanach</p>
+<p class="i20"> Que mon seul estomac.</p>
+<br>
+<p class="mid">II</p>
+<br>
+<p class="i16">Je suis ravi du bon vieillard Issec.</p>
+<p class="i18"> Son langage est un vrai sorbec.</p>
+<p class="i20">Malgré son vilain bec</p>
+<p class="i18"> J'irais le voir à la Mecque</p>
+<p class="i18"> Et rendre à ce vrai Sénèque</p>
+<p class="i20"> Un salamalec.</p>
+<p class="i16">Près de lui j'aime autant un hareng pec</p>
+<p class="i20"> Blême du pain tout sec,</p>
+<p class="i20"> Que perdrix et vin grec.</p>
+<p class="i18"> O mort, si tu le fais échec,</p>
+<p class="i20"> Viens m'enlever avec</p>
+<br>
+<p class="mid">III</p>
+<br>
+<p class="i16">Je suis charmé, quand je suis en pic-nic.</p>
+<p class="i18"> On est libre; c'est là le hic,</p>
+<p class="i20"> En payant ric à ric.</p>
+<p class="i18"> Je fais quelques vers lyriques,</p>
+<p class="i18"> Mais jamais de satiriques;</p>
+<p class="i20"> Ce n'est pas là mon tic.</p>
+<p class="i16">Je crains bien moins la langue d'un aspic,</p>
+<p class="i20"> Les yeux d'un basilic,</p>
+<p class="i20"> Que le blâme public.</p>
+<p class="i18"> Je ne fais nul honteux trafic;</p>
+<p class="i20"> Je suis dans mon district</p>
+<br>
+<p class="mid">IV</p>
+<br>
+<p class="i16">Je ne voudrais, pour l'or du monde en bloc,</p>
+<p class="i18"> Le sort m'eût-il remis au soc,</p>
+<p class="i20"> D'aucun bien être escroc.</p>
+<p class="i18"> D'un ami rien ne me choque;</p>
+<p class="i18"> S'il me raille, je m'en moque,</p>
+<p class="i20"> Sans livrer le choc.</p>
+<p class="i16">Et j'aime autant un forban de Maroc</p>
+<p class="i20"> Que le grand monsieur Roch,</p>
+<p class="i20"> Tant il a l'air d'un croc;</p>
+<p class="i18"> Contre un turban ferais-je troc?</p>
+<p class="i20"> Non, plutôt contre un froc</p>
+<br>
+<p class="mid">V</p>
+<br>
+<p class="i16">Je hais les eaux de Forge et Balaruc.</p>
+<p class="i18"> Je ne porte point chez Colduc</p>
+<p class="i20"> D'ordonnance d'Astruc.</p>
+<p class="i18"> Je ne veux, sous ma perruque,</p>
+<p class="i18"> Porter cautère à la nuque,</p>
+<p class="i20"> Dussé-je être duc.</p>
+<p class="i16">Car de son corps qui fait un aqueduc</p>
+<p class="i20"> Devient bientôt caduc,</p>
+<p class="i20"> Fût-il un gros heiduc.</p>
+<p class="i18"> Mais le vin est, si j'en crois Luc,</p>
+<p class="i20"> De tous le meilleur suc.</p>
+</div></div>
+
+<p>On a fait aussi sur ces mêmes rimes isolées cinq
+adages que voici:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Le thésauriseur cherche le sac.</p>
+<p class="i20">Le promeneur cherche le sec.</p>
+<p class="i20">Le biographe cherche le sic.</p>
+<p class="i20">Le laboureur cherche le soc.</p>
+<p class="i20">Le gourmand cherche le suc.</p>
+</div></div>
+
+<p>On a publié, en février 1849, sur les désordres de
+l'Assemblée nationale constituante, les vers monorimes
+suivants:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">En voyant cet affreux micmac,</p>
+<p class="i20">On dit partout, même à Cognac,</p>
+<p class="i20">À Bergerac, à Ribérac,</p>
+<p class="i20">Que la république, au bissac,</p>
+<p class="i20">Fait un déplorable tic-tac,</p>
+<p class="i20">Qui peut finir par un cric-crac,</p>
+<p class="i20">Comme en a produit Polignac.</p>
+<p class="i20">Que voulez-vous? Proudhon et Bac,</p>
+<p class="i20">Ledru-Rollin et Cavaignac</p>
+<p class="i20">La poussent dans un cul-de-sac,</p>
+<p class="i20">Où, par quelque coup de Jarnac,</p>
+<p class="i20">On renversera son hamac.</p>
+<p class="i20">ue Dieu conserve son cornac!</p>
+</div></div>
+
+<h4>MONSIEUR</h4>
+
+<p>Ce nom autrefois indiquait une seigneurie. On disait:
+M. de Mayence, pour l'électeur de Mayence.
+M. de Paris, pour l'archevêque de Paris. On appelait
+Bossuet M. de Meaux, et, ce qui est assez singulier,
+Mme de Sévigné, en parlant du pape, disait: M. de
+Rome.</p>
+
+<p>Un officier gascon, étant à l'armée, quitte un de ses
+camarades, et lui dit assez haut et d'un ton important:--Je
+vais dîner chez Villars. Le maréchal, qui se
+trouvait derrière cet officier, lui dit avec honte:--À
+cause de mon rang et non à cause de mon mérite
+dites: Monsieur de Villars.--Cadédis! répond le
+Gascon sans s'émouvoir, on ne dit pas monsieur
+de César.</p>
+
+<p>Le grand Condé, ennuyé d'entendre un fat parler
+sans cesse de monsieur son père et de madame sa
+mère, appela un de ses gens, et lui dit:--Monsieur
+mon laquais, dites à monsieur mon cocher de mettre
+messieurs mes chevaux à monsieur mon carrosse.</p>
+
+<h4>MONTER</h4>
+
+<p>Une servante apporte le mémoire du mois à son
+maître; il y remarque pour trente francs de lait.--Comment!
+dit-il, je dois tant que ça à la laitière?--Mon
+Dieu oui, Monsieur; c'est qu'il n'y a rien qui
+monte comme le lait.</p>
+
+<h4>MONTRER</h4>
+
+<p>Une princesse passait tous les matins à apprendre
+l'hébreu. Un jour que son maître de langue était entré
+chez elle avec une culotte déchirée, le prince son
+mari lui demanda ce que cet homme venait faire dans
+sa chambre. La princesse lui dit:--Il me montre
+l'hébreu.</p>
+
+<p>--Madame, répondit le prince, il vous montrera
+bientôt le derrière.</p>
+
+<h4>MORCEAUX D'ENCENS</h4>
+
+<p>On demandait à M. Castil-Blaze quels étaient les
+morceaux de musique qui avaient la meilleure odeur.
+Il répondit:--Ce sont les morceaux dansants.</p>
+
+<h4>MORDANT</h4>
+
+<p>On demande pourquoi les gens décédés mangent du
+bois.--Parce qu'on les trouve <i>morts dans</i> leurs
+bières.</p>
+
+<h4>MORT</h4>
+
+<p>Trois députés des États de Bretagne étant venus pour
+haranguer le roi, l'évêque, qui était le premier, oublia
+sa harangue, et ne put dire un seul mot. Le gentilhomme
+qui le suivait, se croyant obligé de prendre la
+parole, s'écria:--Sire, mon grand-père, mon père et
+moi sommes tous morts à votre service.</p>
+
+<p>Un plaisant en fiacre, voyant passer un convoi funèbre
+qui s'en allait au cimetière du Père-Lachaise,
+dit au cocher:--Retenez vos chevaux et empêchez-les
+de prendre le <i>mort aux dents</i>.</p>
+
+<p>De tous les genres de mort dont on avait donné le
+choix à Arlequin, il préféra celui de mourir de vieillesse
+ou d'indigestion.</p>
+
+<h4>MOTS</h4>
+
+<p>Un célibataire venait d'acheter une paire de mouchettes;
+sa gouvernante lui ayant fait observer qu'elles
+étaient bien petites, il répondit qu'elles étaient bien
+assez grandes pour une personne seule.</p>
+
+<p>Une ronde arriva près d'un poste. Un seul homme
+se trouvait présent à ce moment, c'était le factionnaire.
+Le capitaine de la ronde, furieux, s'avance sur
+lui en disant:--Comment, tas de coquins, vous
+n'êtes qu'un?</p>
+
+<p>Une femme d'esprit disait d'un orateur boursouflé
+qui avait une certaine réputation d'éloquence:--Il
+est vrai qu'il trouve facilement ses phrases; mais
+quand il les a trouvées, il est obligé de chercher ce
+qu'il mettra dedans.</p>
+
+<p>Un Américain, ayant vu six Anglais séparés de leur
+troupe, eut l'audace de leur courir sus, d'en blesser
+deux, de désarmer les autres et de les amener au général
+Washington. Le général lui demanda comment
+il avait pu faire pour se rendre maître de six hommes.--Aussitôt
+que je les ai vus, répondit-il, j'ai couru sur
+eux et je les ai enveloppés.</p>
+
+<p>Un bourreau, conduisant au gibet un pauvre diable,
+lui dit:--Écoutez, je ferai de mon mieux; mais je
+dois vous prévenir que je n'ai jamais pendu.--Ma
+foi, répond le patient, je vous avouerai également que
+je n'ai jamais été pendu non plus; mais, que voulez-vous!
+nous y mettrons chacun du nôtre. Il faut espérer
+que nous nous en tirerons.</p>
+
+<p>Le deuxième consul, Cambacérès, donnait une fête
+à laquelle se trouvaient beaucoup d'artistes. Elle touchait
+à sa fin, lorsque Cambacérès invita Garat à
+chanter. Celui-ci, piqué de ce que l'on ne se fût pas
+adressé plutôt à lui, tire sa montre et répond:--Impossible,
+citoyen consul; il est minuit: ma voix est
+couchée.</p>
+
+<p>L'expression «à faire trembler» est si familière aux
+Gascons, qu'ils l'emploient à tout propos. Quelqu'un
+faisait observer ce gasconisme à un officier gascon,
+qui répondit par cette gasconnade:--Que l'expression
+«cela fait trembler» est la plus forte qu'un Gascon
+puisse employer en quelque circonstance que ce
+soit, parce qu'il n'y a rien dans la nature qui soit au-dessus
+de ce qui fait trembler un Gascon.</p>
+
+<p>Le mot «au contraire» pour <i>non</i> est encore très-usité
+par les Gascons. Les députés des États du Languedoc
+étant à Versailles à l'audience du roi, un Gascon du cortège
+trébucha et tomba. Comme tout le monde lui demandait
+s'il s'était fait mal en tombant, il dit gaiement
+en se relevant:--<i>Au contraire.</i> Cette manière de parler
+fit rire ceux qui étaient présents. Les uns prétendaient
+que c'étaient un gasconisme, les autres une gasconnade.
+C'était l'un et l'autre.</p>
+
+<p>Dans un grand dîner que donnait Louis XVIII, le
+vieux roi, s'adressant à un seigneur, vieux aussi, lui
+demanda si un certain mets qu'il lui désignait, et que
+le roi aimait fort, était de son goût.--Sire, lui répondit
+le courtisan, je ne fais jamais attention à ce
+que je mange.--C'est un tort que vous avez, reprit
+le roi; à tout âge il faut faire attention à ce qu'on
+mange, et au vôtre à ce qu'on dit.</p>
+
+<p>M. le comte de Mailly de Beaupré portait toujours à
+l'armée son chapeau à la tapageuse, en sorte que la
+cocarde se trouvait derrière.--Voilà, disait un de ses
+officiers, une cocarde qui a bien souvent vu l'ennemi.</p>
+
+<p>Un conseiller borgne, voulant décider seul une
+contestation épineuse, une autre espèce de turlupin
+lui dit:--Croyez-moi, empruntez les lumières d'un
+de vos confrères; deux yeux valent mieux qu'un.</p>
+
+<p>Un célèbre buveur, étant à l'article de la mort, pria
+un de ses amis, qui était à côté de son lit, d'y faire
+apporter un verre d'eau, en disant:--A la mort,
+il faut se réconcilier avec ses ennemis.</p>
+
+<p>Le poëte Bret, qui a fait sur Molière des commentaires
+assez estimés, alla voir, dans sa jeunesse, un
+seigneur bourguignon, qui, enflé de sa fortune et de
+ses titres, lui dit que ses vassaux ne s'asseyaient et ne
+se couvraient jamais devant lui.--Corbleu! réplique
+Bret en enfonçant son chapeau sur ses oreilles et se
+jetant dans un grand fauteuil, ces gens-là n'ont donc
+ni cul ni tête?</p>
+
+<p>La basse bohème, à Paris, emploie une langue à
+part. Après s'être traités, dans une dispute, de polichinelle
+et de caricature empaillée, les deux casseurs
+d'assiettes se retroussent les manches pour se donner
+ce qu'ils appellent une raclée, une peignée, une rincée,
+et le plus rageur dit à l'autre:--Numérote tes
+os, que je te démolisse! On arrive alors, et on les sépare,
+à moins que ce ne soient des Auvergnats.</p>
+
+<h4>MOURIR</h4>
+
+<p>Un malade interrogé pourquoi il n'appelait pas un
+médecin: «C'est, répondit-il, parce que je n'ai pas
+encore envie de mourir.»</p>
+
+<h4>MOUSSES</h4>
+
+<p>On demande pourquoi les marins font tant de cas du
+vin de Champagne.--C'est pourtant bien clair. Leur
+raison est que c'est le vin qui produit le plus de
+mousse.</p>
+
+<h4>MULE</h4>
+
+<p>Voici un exemple de la tolérance et des lumières des
+ennemis systématiques de Rome. Un journal anglais a
+donné, il y a dix ans, à ses lecteurs un récit tronqué du
+voyage de S. S. Grégoire XVI à Ancône. L'auteur de ce
+récit, copié d'après les feuilles françaises, a traduit la
+mule du pape par <i>mule</i>, animal. Mais, non content
+de commettre cette grossière méprise, il y ajoute quelque
+chose de sa façon. Ainsi, il raconte que «Sa Sainteté
+était assise sur un trône, un de ses pieds reposait
+sur un tabouret recouvert de velours rouge; la mule,
+RICHEMENT CAPARAÇONNÉE DE MÊME COULEUR, se
+trouvait à ses côtés. Toutes les personnes, ajoute-t-il,
+qui étaient admises dans le salon, s'agenouillèrent
+trois fois et allèrent baiser la mule.»</p>
+
+<p>L'écrivain accompagne ce récit des commentaires les
+plus ridicules; il s'élève contre la superstition des catholiques
+qui s'avilissent au point de baiser de vils
+animaux. C'est là de l'idolâtrie, du fétichisme, etc. Il
+conclut en faisant l'éloge de la réforme, qui a aboli le
+culte des mules, etc.</p>
+
+<p>Si des journalistes se trompent à ce point sur ce qui
+concerne le chef visible de l'Église, est-il étonnant que
+tant de réformés, en Angleterre comme en Allemagne,
+nourrissent des préjugés absurdes contre le catholicisme?</p>
+
+<h4>MUR</h4>
+
+<p>Lorsque les fermiers généraux enfermèrent Paris
+d'un mur d'enceinte en 1785, cette innovation triste
+souleva presque autant de clameurs que l'enceinte
+continue en 1840. On fit là-dessus le vers qui suit:</p>
+
+<p class="mid">Le mur murant Paris rend Paris murmurant.</p>
+
+<br>
+
+<h2>N</h2>
+
+<h4>NACELLE</h4>
+
+<p>Quel est l'âne qui va le mieux à l'eau?--C'est <i>l'âne
+à selle</i>.</p>
+
+<h4>NAIN</h4>
+
+<p>La vie que menait, au dernier siècle, le prince d'Hénin,
+lui attira cette épigramme de Champcenetz:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Prince, à te juger par ton train,</p>
+<p class="i16">Tu fais un rôle des plus minces;</p>
+<p class="i16">Tu n'es plus le prince d'<i>Hénin</i>,</p>
+<p class="i16">Mais seulement le nain des princes.</p>
+</div></div>
+
+<h4>NAIVETÉ</h4>
+
+<p>On recommandait à une dame malade de boire de
+l'eau de sedlitz, et on lui disait: «Il n'y a que le premier
+verre qui coûte à boire.--Eh bien! dit la malade,
+je ne prendrai que le second.»</p>
+
+<p>M. de D*** recommanda très-instamment qu'on
+l'ouvrît, et en donna la raison suivante: «Les médecins
+n'ayant pu s'accorder entre eux sur le genre de ma
+maladie, je ne serais pas fâché de savoir à quoi m'en
+tenir sur la cause de ma mort.»</p>
+
+<p>Un conseiller disait à un ami: «Si j'avais quelque
+chose de bon, je vous dirais de dîner avec moi.» Le
+domestique qui le suivait lui dit à demi-voix: «Monsieur,
+vous avez une tête de veau.»</p>
+
+<p>Un banquier anglais, nommé Fer ou Fair, fut accusé
+d'avoir fait une conspiration pour enlever le roi
+(George III), et le transporter à Philadelphie. Amené
+devant ses juges, il leur dit: «Je sais très-bien ce
+qu'un roi peut faire d'un banquier, mais j'ignore ce
+qu'un banquier peut faire d'un roi.»</p>
+
+<p>Un dame de la cour dit un jour: «C'est bien dommage
+que l'aventure de la Tour de Babel ait produit
+la confusion des langues; sans cela, tout le monde
+aurait toujours parlé français.»</p>
+
+<p>On pressait une femme lancée dans l'esprit et dans
+les sciences, et qui devait aller à l'Observatoire voir
+une éclipse de lune. «Ne vous inquiétez pas, dit-elle,
+M. de Lalande a beaucoup de bontés pour moi; si c'est
+fini quand nous arriverons, il fera recommencer.»</p>
+
+<p>Un provincial, étant à Saint-Cloud, vit Napoléon
+dans ses jardins:</p>
+
+<p>«Je l'ai vu, dit-il, ce grand empereur, qui se promenait
+lui-même.»</p>
+
+<h4>NERF DE BOEUF</h4>
+
+<p>On disait d'un homme colère qu'il ne s'expliquait
+jamais qu'avec un air de boeuf.</p>
+
+<h4>NÉRON</h4>
+
+<p>Dans le temps où quelques hommes changeaient de
+nom pour prendre les noms de Brutus, de Scévola, de
+Fabricius, Publicola, etc., un membre de la section
+des Tuileries disait à la tribune: «Et moi aussi je
+veux prendre un nom romain, afin que l'on ne doute
+plus de mon patriotisme; je veux m'appeler comme
+celui qui mit le feu dans la commune de Rome pour
+faire brûler les aristocrates, et qui manqua d'être la
+victime d'Épicharis et de Séjan... celui... Parbleu!...
+Aidez-moi donc... celui... qui... pardienne, vous n'en
+connaissez pas d'autre, celui qui n'avait pas comme
+gui dirait un nez pointu...</p>
+
+<p>--Que t'es bête, lui dit un collègue, c'est <i>nez rond</i>.</p>
+
+<p>--Oui, c'est ça, je me baptise Nez rond.</p>
+
+<h4>NEUF</h4>
+
+<p>Ah! mon cher ami, que je suis aise de vous rencontrer.
+Savez-vous ce qu'on dit de neuf?</p>
+
+<p>--Non, eh bien?</p>
+
+<p>--Eh bien, on dit que c'est la moitié de dix-huit.</p>
+
+<h4>NEZ</h4>
+
+<p>Un camus annonçait à ses amis que sa femme venait
+d'accoucher.--Ah! tant mieux, lui répondit-on, tu
+auras un <i>nouveau-né</i>.</p>
+
+<p>Quel événement a ruiné les marchands de tabac?</p>
+
+<p>--La descente d'Énée aux enfers. (Voyez <i>Diné</i>.)</p>
+
+<p>M. Fouquier-Long, n'ayant pas été réélu par le département
+de la Seine-Inférieure, son épouse signa
+depuis ses lettres et billets: Femme Fouquier, <i>née
+Long</i>.</p>
+
+<p>Dans la petite pièce intitulée: <i>le Sourd</i>, le papa Doliban
+donne ainsi le signalement de son gendre futur:
+«Front large, cheveux châtains, nez aquilin...»</p>
+
+<p>--Comment, né à Quilin! papa, vous vous trompez;
+vous savez bien que je suis né à Châlons-sur-Marne.</p>
+
+<p>M. Renaudot, médecin à Montpellier, avait le nez
+camus. Il perdit contre Guy-Patin, médecin de Paris,
+un procès et s'en plaignait fort en sortant de l'audience.
+Guy-Patin lui dit: «Si vous avez perdu d'un
+côté, vous avez gagné de l'autre; car vous étiez entré
+ici avec le nez camus, et maintenant vous avez <i>un
+pied de nez</i>.»</p>
+
+<p>On doit à Désaugiers le joyeux pot-pourri de la
+bouche et du nez, qui est farci de quelques jeux de
+mots. Nous le donnons ici:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="mid">POT-POURRI DE LA BOUCHE ET DU NEZ</p>
+
+<p class="mid">Air: <i>Mon père était pot.</i></p>
+<br>
+<p class="i16">Jugez si je fus étonné</p>
+<p class="i18"> Lorsque, la nuit dernière,</p>
+<p class="i16">Je sentis ma bouche et mon nez</p>
+<p class="i18"> S'agiter en colère.</p>
+<p class="i20"> Qui donc en sursaut,</p>
+<p class="i20"> Me dis-je aussitôt,</p>
+<p class="i18"> Si matin me réveille?</p>
+<p class="i20"> Le nez se moucha,</p>
+<p class="i20"> La bouche cracha,</p>
+<p class="i18"> Et je prêtais l'oreille.</p>
+<br>
+<p class="mid"> BOUCHE, bâillant.</p>
+
+<p class="mid">Air: <i>Je suis né natif de Ferrare.</i></p>
+<br>
+<p class="i18">Maudit nez! Le diable t'emporte</p>
+<p class="i18">Ronfla-t-on jamais de la sorte!</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ.</p>
+<br>
+<p class="i18">Morbleu! quel démon m'installa</p>
+<p class="i18">Près de cette bavarde-là?</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE.</p>
+<br>
+<p class="i18">Et c'est au milieu du visage</p>
+<p class="i18">Qu'on loge un si sot personnage!</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ.</p>
+<br>
+<p class="i18">Tout sot que je suis, je me croi</p>
+<p class="i18">Encor moins mâchoire que toi.</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE, piquée.</p>
+<p class="mid">Air de <i>la Fanfare de Saint-Cloud</i>.</p>
+<br>
+<p class="i18">Que m'importent ta colère</p>
+<p class="i18">Et tes sarcasmes mordants!</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ.</p>
+<br>
+<p class="i18">Est-ce pour me faire taire</p>
+<p class="i18">Que tu me montres les dents?</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE.</p>
+<br>
+<p class="i18">Va, je ris de tes sottises;</p>
+<p class="i18">Entends-tu, vilain camus?</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ.</p>
+<br>
+<p class="i18">Quelque chose que tu dises,</p>
+<p class="i18">J'aurai toujours le dessus.</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE.</p>
+
+<p class="mid">Air: <i>Réveillez-vous, belle endormie.</i></p>
+<br>
+<p class="i18">Nécessaire autant qu'agréable,</p>
+<p class="i18">Je sers l'enfant et le barbon;</p>
+<p class="i18">Et de toi, qui fais le capable,</p>
+<p class="i18">On ne peut rien tirer de bon.</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ.</p>
+<p class="mid">Air: <i>La bonne aventure au gué!</i></p>
+<br>
+<p class="i18">De quelque titre plâtré</p>
+<p class="i20"> Que tu t'autorises.</p>
+<p class="i18">Jamais je ne souffrirai</p>
+<p class="i20"> Que tu me maîtrises.</p>
+<p class="i18">Si tu le veux, fâche-toi,</p>
+<p class="i18">Je n'ai jamais craint, ma foi,</p>
+<p class="i18">D'en venir aux prises,</p>
+<p class="i20"> Moi...</p>
+<p class="i18">D'en venir aux prises.</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE.</p>
+
+<p class="mid">Air: <i>Si Dorilas.</i></p>
+<br>
+<p class="i18">Je suis utile à mille choses.</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ.</p>
+<br>
+<p class="i18">De ses dons le ciel m'a comblé.</p>
+<p class="i18">C'est pour moi qu'on plante les roses.</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE.</p>
+<br>
+<p class="i18">C'est pour moi qu'on sème le blé. (<i>bis.</i>)</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ.</p>
+<br>
+<p class="i18">Par moi l'on respire sur terre.</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE.</p>
+<br>
+<p class="i18">C'est moi qui préside aux repas.</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ.</p>
+<br>
+<p class="i18">L'homme, sans moi, ne vivrait guère.</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE.</p>
+<br>
+<p class="i18">L'homme, sans moi, ne vivrait pas (<i>bis.</i>)</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ.</p>
+
+<p class="mid">Air de <i>l'Avare et son ami</i>.</p>
+<br>
+<p class="i18">Dans une maison, lorsqu'on entre,</p>
+<p class="i18">À l'instant même du dîner,</p>
+<p class="i18">Ne dit-on pas, frappant son ventre:</p>
+<p class="i18">Ma foi! je vois que j'ai bon nez?</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE.</p>
+<br>
+<p class="i18">De tous les mets auxquels on touche,</p>
+<p class="i18">Celui qu'on croit de meilleur goût</p>
+<p class="i18">N'est-il pas celui que partout</p>
+<p class="i18">On garde pour la bonne bouche? (<i>bis.</i>)</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ.</p>
+
+<p class="mid">Air: <i>Jeunes filles, jeunes garçons</i>.</p>
+<br>
+<p class="i18">Tu conviens pourtant que jamais</p>
+<p class="i18">Tu ne cessas d'être gourmande? (<i>bis.</i>)</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE.</p>
+<br>
+<p class="i18">C'est bien toi que tout affriande,</p>
+<p class="i18">Jusqu'à la seule odeur des mets.</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ.</p>
+<br>
+<p class="i18">Oui, leur parfum me touche;</p>
+<p class="i18">J'en dois faire l'aveu;</p>
+<p class="i18">En tout temps, en tout lieu,</p>
+<p class="i18">Je fus toujours un peu</p>
+<p class="i18">Sur la bouche (<i>bis.</i>)</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE.</p>
+
+<p class="mid">Air: <i>Dans la vigne à Claudine</i>.</p>
+<br>
+<p class="i18">As-tu juré de mettre</p>
+<p class="i18">Ma patience à bout?</p>
+<p class="i18">C'est trop me compromettre</p>
+<p class="i18">Avec ce marabout.</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ.</p>
+<br>
+<p class="i18">En vain tu voudrais feindre;</p>
+<p class="i18">J'ai su te battre...</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE.</p>
+<br>
+<p class="i30"> Moi!</p>
+<p class="i18">Que puis-je avoir à craindre</p>
+<p class="i18">D'un morveux comme toi? (<i>trois fois.</i>)</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ, rouge de fureur.</p>
+<p class="mid">Air: <i>Tenez, moi, je suis un bon homme</i>.</p>
+<br>
+<p class="i18">Qui? moi, morveux! dans ma colère,</p>
+<p class="i18">Je vais te prouver sans pitié,</p>
+<p class="i18">Que le nez est un adversaire</p>
+<p class="i18">Qui ne se mouche pas du pied.</p>
+<p class="mid"> (Après un moment de réflexion.)</p>
+<p class="i18">Je me salis, si je te touche...</p>
+<p class="i18">Il vaut bien mieux nous séparer...</p>
+<p class="i18">Et, d'ailleurs, le nez et la bouche</p>
+<p class="i18">Sont-ils faits pour se mesurer?</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE.</p>
+
+<p class="mid">Air: <i>Bon voyage, cher Dumollet.</i></p>
+<br>
+<p class="i18">Bon voyage,</p>
+<p class="i18">Mon cher voisin!</p>
+<p class="i18">Nous en ferons tous deux meilleur ménage.</p>
+<p class="i18">Bon voyage,</p>
+<p class="i18">Mon cher voisin!</p>
+<p class="i18">Loin l'un de l'autre, on est toujours cousin.</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ, se détachant et lui tournant les talons.</p>
+<br>
+<p class="i18">Tu vas savoir si du nez l'on se passe.</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE.</p>
+<br>
+<p class="i18">Dans quel quartier vas-tu donc demeurer?</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ.</p>
+<br>
+<p class="i18">Je ne tiens pas une si grande place</p>
+<p class="i18">Que je ne trouve enfin où me fourrer.</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE.</p>
+<br>
+<p class="i18">Bon voyage,</p>
+<p class="i18">Mon cher voisin!</p>
+<p class="i18">Nous en ferons tous deux meilleur ménage.</p>
+<p class="i18">Bon voyage,</p>
+<p class="i18">Mon cher voisin!</p>
+<p class="i18">Loin l'un de l'autre, on est toujours cousin.</p>
+<p class="mid"> (Le nez sort par une vitre cassée.)</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE, se regardant au miroir.</p>
+<br>
+<p class="i18">Oh! grand Dieu! sans nez que je suis laide!</p>
+<p class="i18">J'ai tort, j'en conviens.</p>
+<p class="i20"> Cher nez, reviens</p>
+<p class="i20"> Vite à mon aide.</p>
+<p class="i18">Oh! grand Dieu! sans nez que je suis laide!</p>
+<p class="i20"> Je sens qu'en effet</p>
+ <p class="i20"> La nature avait tout bien fait.</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ, dehors, cherchant où se poser.</p>
+<br>
+<p class="i18">Mais où donc faut-il que je me place?</p>
+<p class="i20"> Mon oeil étonné</p>
+<p class="i20"> Rencontre un nez</p>
+<p class="i20"> Sur chaque face.</p>
+<p class="i18">Mais où donc faut-il que je me place?</p>
+<p class="i18">Où donc me jucher?</p>
+<p class="i18"> Où me nicher? où me percher?</p>
+<br>
+<p class="mid">LA BOUCHE, au désespoir.</p>
+<br>
+<p class="i18">Oh! grand Dieu! sans nez que je suis laide!</p>
+<p class="i20"> J'ai tort; j'en conviens.</p>
+<p class="i20"> Cher nez, reviens</p>
+<p class="i20"> Vite à mon aide.</p>
+<p class="i18">Oh! grand Dieu! sans nez que je suis laide!</p>
+<p class="i20"> Je sens qu'en effet</p>
+<p class="i20"> La nature avait tout bien fait.</p>
+<br>
+<p class="mid">LE NEZ, un peu honteux, reprenant sa place.</p>
+<p class="mid">Air: <i>Qu'il pleuve, qu'il vente, qu'il tonne!</i></p>
+<br>
+<p class="i18">Je voulais faire un coup de tête...</p>
+<p class="i18">Mais toute réflexion faite,</p>
+<p class="i20"> Je reste où le destin m'a mis.</p>
+<p class="i20"> Peut-être ailleurs serais-je pis.</p>
+<br>
+<p class="mid">FINAL.</p>
+
+<p class="mid">Air: <i>Aussitôt que la lumière.</i></p>
+<br>
+<p class="i18">À ces mots ils s'embrassèrent;</p>
+<p class="i18">Et, se tenant par la main,</p>
+<p class="i18">Tous les deux ils se jurèrent</p>
+<p class="i18">Alliance, accord sans fin.</p>
+<p class="i18">C'est ainsi que, sur la terre,</p>
+<p class="i18">Me dis-je alors en secret,</p>
+<p class="i18">La discorde sait se taire,</p>
+<p class="i18">A la voix de l'intérêt.</p>
+</div></div>
+
+<h4>NICHES</h4>
+
+<p>Pourquoi les saints n'aiment-ils pas trop les maçons?--Parce
+qu'ils leur font des niches.</p>
+
+<h4>NOIRCEUR</h4>
+
+<p>Un bourgeois facétieux, passant devant un couvent
+de femmes, disait:--Voilà une maison pleine de
+noires soeurs.</p>
+
+<h4>NOMS</h4>
+
+<p>Un journal de Lyon mentionnait, il y a quelque
+temps, quelques associations de noms propres qui
+donnent lieu à de plaisants jeux de mots. Ainsi, il y
+a eu dans cette ville une maison de commerce célèbre
+sous la raison de: <i>Lajoie</i>, <i>Rigodon</i>, <i>Vidon et Cie</i>.
+Viennent ensuite MM. <i>Hyver</i>, marchand de charbons;
+<i>Gilet</i>, marchand de bas; <i>Mouton</i>, boucher; Mlle <i>Quinquet</i>,
+veilleuse. Tout cela, du reste, n'est rien à côté de
+l'adresse d'une, lettre dont le <i>Salut public</i> garantit
+l'authenticité: <i>A Monsieur Vermine, au dépôt de
+Mendicité, place de la Misère, à La Charité</i>. M. Vermine
+a été longtemps concierge du dépôt de mendicité
+de la Charité-sur-Loire, et peut-être l'est-il encore.
+(Voyez <i>Jeux de mots et facéties</i>.)</p>
+
+<p>On a imprimé au dernier siècle un assez mauvais
+roman; les héros portaient des noms à prétentions
+allégoriques. C'étaient le père Vertisseur, le père Manant,
+le père Nicieux, le père Foré, le père Hoquet, le
+père Sonnel, le père Fide, le père Lé, etc. Dans les
+femmes, c'était la mère Veille, la mère Tume, la mère
+Idienne, la mère Curiale, la mère Ida, la mère Ingue,
+Puis des Anglais et des Anglaises: lord Gueil, lord
+Nière, lord Ange, lord Dinaire, lord Igine, lord Tie,
+lord Gane, lord Seille, lady Arrhée, lady Scorde, lady
+Gestion, lady Spense, lady Forme, lady Aphane. Des
+plaisanteries de ce genre n'auraient peut-être pas
+grande vogue aujourd'hui.</p>
+
+<p>Trois Anglais, dont les noms étaient: <i>Singulier</i>,
+<i>Davantage</i> et <i>Juste</i> (Strange, More, Right), s'étant
+trouvés ensemble à souper dans une taverne, le dernier
+dit aux autres:--Il y a un voleur parmi nous;
+c'est Singulier.--Cela est vrai, reprit Singulier; mais
+pourquoi pas Davantage?--Oui, reprit Davantage,
+il faut être Juste.</p>
+
+<p>Le docteur Drawell ayant rencontré un de ses amis
+la veille d'une exécution qui devait se faire à Tyburn,
+lui demanda s'il savait le nom du criminel.--Pas
+trop, reprit l'autre; c'est un certain Pronom.--Comment!
+un Pronom?--Rien n'est plus vrai; mais on
+assure que ce n'est ni vous ni moi.</p>
+
+<h4>NORMANDS</h4>
+
+<p>Le Gascon par excellence, Cyrano Bergerac, dit,
+dans son <i>Pédant joué</i>:--Et la seconde objection que
+je fais est que vous êtes Normand: Normandie <i>quasi</i>
+venue du <i>Nord</i> pour <i>mendier</i>. De votre nation les serviteurs
+sont traîtres, les égaux insolents, les maîtres
+insupportables. Jadis le blason de cette province était
+trois faux, pour montrer les trois espèces de faux
+qu'engendre ce climat: <i>Scilicet</i>, faux sauniers, faux
+témoins, faux monnayeurs. Je ne veux point de faussaires
+en ma maison.</p>
+
+<h4>NOTAIRE</h4>
+
+<p>Un plaisant disait que la métempsycose ne le surprenait
+pas, puisque lui-même pouvait faire avec <i>un os
+taire</i> un chien.</p>
+
+<h4>NOUS</h4>
+
+<p>Un grand seigneur de la cour, qui aimait beaucoup
+les chevaux, fut extrêmement surpris de ce que son
+écuyer lui vint dire un matin que le cheval qu'il avait
+monté la veille était mort.--Quoi, dit-il, le cheval
+que j'avais hier à la chasse?--Oui, Monsieur.--Ce
+cheval bai que j'ai eu de M. de Barradas?--Oui,
+Monsieur.--Qui n'avait que six ans?--Oui, Monsieur.--Qui
+mangeait si bien?--Oui, Monsieur,
+celui-là même, répondit l'écuyer.--Eh! bon Dieu!
+écria le maître, qu'est-ce que c'est que de nous!</p>
+
+<h4>NUMA POMPILIUS</h4>
+
+<p>On parlait à une dame bel esprit de ce gracieux
+roman-poëme de Florian.</p>
+
+<p>--L'avez-vous lu? lui disait-on.</p>
+
+<p>--Certainement, répondit-elle avec assurance; et
+j'en avais prévu le dénoûment dès le début.</p>
+
+<p>--Quel dénoûment?</p>
+
+<p>--Mon Dieu, comme toujours, un mariage: Pompilius
+qui finit par épouser Numa.</p>
+
+<br>
+
+<h2>O</h2>
+
+<p>Quel est le plus agréable des O?--l'O riant.--l'O
+est aussi la lettre la plus humide.</p>
+
+<p>L'O était chez les anciens l'emblème de l'éternité.
+Il est le sujet de l'énigme suivante:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Je sais de l'Éternel la figure et l'emblème:</p>
+<p class="i16">Mortel, que ferais-tu sans mon pouvoir suprême?</p>
+<p class="i16">Rien. Le monde sans moi n'aurait plus de soutien;</p>
+<p class="i16">Je suis utile à tout, sans être propre à rien.</p>
+</div></div>
+
+<h4>OBÉISSEZ</h4>
+
+<p>S'écrit avec les quatre lettres OBIC.</p>
+
+<h4>OBSERVER</h4>
+
+<p>Le grammairien Urbain Domergue était retenu au
+lit par un abcès à la gorge, qui menaçait de le suffoquer.
+Son médecin s'approche et lui dit:--Si vous
+ne prenez ce que je vous ordonne, je vous observe
+que...</p>
+
+<p>--Et moi, je vous fais observer, s'écrie le moribond,
+transporté d'une scientifique colère, que c'est bien
+assez de m'empoisonner par vos remèdes, sans qu'à
+mon dernier moment vous veniez m'étouffer par vos
+solécismes!</p>
+
+<p>À ces mots prononcés avec impétuosité, l'abcès
+crève, la gorge se débarrasse, et grâce au solécisme,
+l'irascible grammairien est guéri.</p>
+
+<h4>ODRY</h4>
+
+<p>Un médecin fashionable disait, il y a dix ans, à un
+malade triste:--prenez de l'<i>odry</i>.--Le malade prit
+de l'<i>eau de riz</i>, et n'en fut que plus resserré.</p>
+
+<p>Nous avons cité plusieurs calembourgs d'Odry.
+Voici deux chansons de sa façon.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="mid">I.</p>
+<br>
+<p class="i18">--Papa, ces p'tits bateaux</p>
+<p class="i20"> Qui vont sur l'eau</p>
+<p class="i20"> Ç'a-t-il des jambes?</p>
+<p class="i18">--Mais s'ils n'en avaient pas,</p>
+<p class="i20"> Petit bêtat,</p>
+<p class="i20"> Ils n'iraient pas.</p>
+<br>
+<p class="mid">II.</p>
+<br>
+<p class="i20"> Petit-Jean, hausse-moi,</p>
+<p class="i18">Pour voir les fusées volantes;</p>
+<p class="i20">Petit-Jean, hausse-moi,</p>
+<p class="i18">Pour voir les fusées voler.</p>
+<br>
+<p class="i20"> Petit-Jean m'a haussé,</p>
+<p class="i18">J'ai vu les fusées volantes.</p>
+<p class="i20"> Petit-Jean m'a haussé,</p>
+<p class="i18">J'ai vu les fusées voler.</p>
+</div></div>
+
+<h4>OEUF</h4>
+
+<p>Bobèche disait que le mariage, les premiers jours,
+est <i>un noeud frais</i>, au bout d'un an <i>un noeud dur</i>, et
+quelquefois <i>un noeud brouillé</i>.</p>
+
+<h4>OEUFS</h4>
+
+<p>Quel est le pays où l'on mange le plus d'omelettes?--La
+ville d'<i>Eu</i>.</p>
+
+<h4>OIE</h4>
+
+<p>Un républicain, à dîner chez un de ses amis, vit
+servir un foie de veau piqué et une oie à la broche.--À
+la bonne heure! dit-il, on ne pourra plus vous
+accuser de n'avoir ni foi, ni loi.</p>
+
+<h4>OMBRE</h4>
+
+<p>Un homme surpris par un bataillon de ses ennemis,
+quelque brave qu'il soit, peut avoir peur de son
+nombre.</p>
+
+<h4>ONCE</h4>
+
+<p>Quel était la voiture la plus légère au baptême du
+prince impérial?</p>
+
+<p>--La voiture du Nonce.</p>
+
+<h4>ORDRE</h4>
+
+<p>Comme le chevalier Taylor racontait les honneurs
+qu'il avait reçus des différentes cours de l'Europe, et
+les ordres dont il avait été décoré par un grand nombre
+de souverains, un membre du parlement, qui se trouvait
+près de lui, observa qu'il n'avait pas nommé le
+roi de Prusse, et il ajouta:--Je présume qu'il ne
+vous a jamais donné aucun ordre.--Pardonnez-moi
+monsieur, reprit le chevalier, il m'a donné l'ordre de
+quitter ses États.</p>
+
+<h4>OREMUS</h4>
+
+<p>Quel est le plus poli d'<i>Oremus</i> et de <i>Quæsumus</i>.</p>
+
+<p>--C'est <i>Oremus</i>, car on dit souvent: <i>Oremus visita
+Quæsumus</i>; et on ne voit pas que <i>Quæsumus</i> ait visité
+<i>Oremus</i>.</p>
+
+<p>On repoussa, au théâtre français, en 1814. une tragédie
+de <i>Romulus</i>, dont le premier vers commençait
+par ces mots: <i>ô Remus</i>. Des plaisants citent ainsi le
+vers entier:</p>
+
+<p class="mid"><i>O Remus, dominez</i> sur les remparts de Rome.</p>
+
+<h4>ORIGINAL</h4>
+
+<p>Un doyen anglais, qui n'était pas d'un très-grand
+génie, acheta un jour, d'un homme de lettres, un sermon
+qu'il prêcha avec beaucoup de succès dans une
+grande chapelle de Londres. Le dimanche suivant, il
+alla dans une autre église pour assister à l'office, et
+eut le désagrément d'entendre un autre ecclésiastique
+prêcher le même sermon que le sien, devant une nombreuse
+assemblée qui couvrait d'applaudissements le
+prédicateur. Courroucé de ce que l'auteur avait abusé
+sa bonne foi, il lui fit reproche, dans les termes les
+plus vifs, de lui avoir vendu une copie pour un original.
+«Vous vous trompez grandement, lui repartit
+l'auteur, car c'est l'autre prédicateur qui a la copie,
+et vous avez l'original.»</p>
+
+<h4>OS</h4>
+
+<p>Quelqu'un disait, en voyant jouer une actrice fort
+maigre: il n'est pas besoin d'aller à Versailles ou à
+Saint-Cloud pour voir jouer les os.</p>
+
+<h4>OÙ</h4>
+
+<p>Le célèbre Daniel Burgess dînait un jour en ville,
+chez une personne de sa connaissance. Lorsqu'on en
+fut au dessert, on servit un grand fromage du Cheshire.</p>
+
+<p>--Où l'entamerai-je, demanda Daniel?</p>
+
+<p>--Où vous voudrez, reprit le maître de la maison?</p>
+
+<p>Là-dessus, Daniel, appelant un des domestiques qui
+servaient à table:--Portez, dit-il, ce fromage chez
+moi; je l'entamerai à la maison.</p>
+
+<h4>OURAGAN</h4>
+
+<p>L'empereur Nicolas disait un jour au prince Dolgorouki:
+Devine quel est le moment où M. Guizot a le
+plus tempêté.</p>
+
+<p>--Je ne sais pas.</p>
+
+<p>--Eh bien... c'est quand il a suivi Louis XVIII dans
+les Cent Jours, qu'il a fait un petit tour à Gand.</p>
+
+<h4>OURSINS</h4>
+
+<p>M. Prud'homme a constaté que les ours sains sont
+ceux qui généralement se portent le mieux.</p>
+
+<h4>OUVRIR LA BOUCHE</h4>
+
+<p>Montmaur était avocat et professeur en langue
+grecque; c'est pour cela qu'on l'appelait le Grec. Quoiqu'il
+fût fort riche, il voulait ajouter au plaisir de
+faire bonne chère, celui de ne rien dépenser; il tenait
+un registre de toutes les bonnes tables de Paris, et
+cherchait les moyens de s'y introduire--Il était d'un
+naturel satirique; dès qu'il se trouvait avec de grands
+seigneurs, il se déchaînait contre tous les auteurs et
+les savants. Ses habitudes de parasite et sa médisance
+firent dire de lui «qu'il n'ouvrait jamais la bouche
+qu'aux dépens d'autrui.»</p>
+
+
+<br>
+<h2>P</h2>
+
+<h4>PAGES</h4>
+
+<p>On proposait au directeur de la troupe des comédiens
+de Versailles de laisser entrer tous les pages du roi, de
+la reine et des princes. Il objecta, avec raison, que
+beaucoup de pages font un gros volume.</p>
+
+<h4>PAIN ET BOUILLI</h4>
+
+<p>Bouilly est connu par quelques ouvrages médiocres,
+parmi lesquels on citera, si vous voulez, <i>les Contes à
+ma fille</i>, deux volumes que donnait en prix, tous les
+ans, madame Campan, à la maison d'Écouen. Joseph.
+Pain ne manquait pas de faire, pour cette solennité,
+des vers que l'on distribuait également aux jeunes
+pensionnaires. Un plaisant dit, à ce sujet, que les filles
+(d'Écouen), quand elles se conduisaient bien, recevaient
+tous les ans deux livres de bouilli et un morceau de
+pain.</p>
+
+<h4>PAIR</h4>
+
+<p>Le jour de l'apparition des trois ordonnances (juillet
+1830), un balourd empressé se rencontre avec M. de
+Sesmaisons au tourniquet de Saint-Jean, et, comme
+il le gênait en passant, il lui dit: Excusez, gros père.--Allons,
+s'écria l'ex-honorable député, on ne peut
+plus garder son incognito dans cette ville; cet homme
+sait déjà que je suis pair de France.</p>
+
+<p>Un Gascon, voyant un duc perdre au jeu, s'écria:--Il
+est <i>duc et perd</i>.</p>
+
+<h4>ÉPIGRAMME DE 1790.</h4>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Par un arrêt plein de sens, de raison,</p>
+<p class="i16">Les douze cents majestés de la France,</p>
+<p class="i20"> En corrigeant l'impertinence</p>
+<p class="i16">Des magistrats du bon peuple breton,</p>
+<p class="i20"> Les ont, pour le bien de leurs âmes,</p>
+<p class="i16">Déclarés tous séditieux, pervers,</p>
+<p class="i20"> Félons, coquins, traîtres, infâmes...</p>
+<p class="i20"> C'est un jugement de leurs pairs.</p>
+</div></div>
+
+<h4>PALAIS</h4>
+
+<p>On appelle palais la partie intérieure de la bouche,
+qui en est la voûte.</p>
+
+<p>Le Palais de Justice ayant été incendié dans le siècle
+dernier, les Parisiens, qui rient de tout, même de leur
+propre malheur, se passèrent de main en main le
+quatrain suivant:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Certes, ce fut un triste jeu,</p>
+<p class="i16">Quand à Paris, dame justice,</p>
+<p class="i16">Pour avoir mangé trop d'épice,</p>
+<p class="i16">Se mit le palais tout en feu.</p>
+</div></div>
+
+<p>--Quelle différence y a-t-il entre les princes et les
+huîtres?</p>
+
+<p>--C'est que les huîtres ne font que traverser le palais,
+et que les princes y résident.</p>
+
+<p>Cette solution rappelle un des calembours de M. de
+Bièvre. Il revenait de Versailles où il avait assisté au
+déjeuner de Louis XV, et on lui demandait ce qu'il y
+avait remarqué.</p>
+
+<p>--J'ai vu, dit-il, une huître traverser le palais
+royal.</p>
+
+<h4>PAON</h4>
+
+<p>--Quels sont les paons les plus lourds?--Ce sont
+les plus gras.--Non, ce sont les pans de murailles,
+comme les plus légers sont les pans d'habits, et les
+plus crottés les pantalons.</p>
+
+<p>On annonçait un jour, en objet à vendre, une volière
+ayant huit pans. Un amateur de paons l'alla voir.
+C'était une volière octogone.</p>
+
+<h4>PAPIER</h4>
+
+<p>Ce mot a plusieurs sens, qu'il est inutile d'exposer.
+On comprendra aisément ce qu'il veut dire ici. Ces
+vers ont paru en 1790.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">L'or, l'argent et l'airain, aussi bien que le fer</p>
+<p class="i16">Chez nos premiers aïeux ont eu chacun leur âge.</p>
+<p class="i16">Celui-ci doit son nom au charlatan Necker;</p>
+<p class="i16">Et du peuple français l'auguste aréopage,</p>
+<p class="i16">Secondant les projets du ministre banquier,</p>
+<p class="i16">Veut que l'âge présent soit l'âge du papier.</p>
+</div></div>
+
+<h4>PARAPET</h4>
+
+<p>Un homme passant avec sa femme sur le pont Royal,
+à Paris, pont très-fréquenté, laissa échapper un de ces
+soupirs intérieurs dont on rougit toujours un peu.--Prends-donc
+garde à ce que tu fais, lui dit sa femme.--Ne
+crains rien, répondit-il; tu vois bien qu'il y a
+ici des parapets.</p>
+
+<h4>PARDON</h4>
+
+<p>À Messine, où commandait le maréchal de Vivonne,
+un officier vint le réveiller pour lui dire quelque chose.
+Il commença ainsi: «Monseigneur, je vous demande
+pardon, si je viens vous réveiller.--Et moi, lui repartit
+le maréchal, je vous demande pardon si je me
+rendors.»</p>
+
+<h4>PAREIL</h4>
+
+<p>Un bourgeois qui avait un attelage de deux chevaux
+bruns perdit l'une de ses bêtes, et chargea le domestique
+de rappareiller le survivant. Le domestique chercha,
+découvrit et vint dire à son maître:--Monsieur,
+j'ai trouvé votre pareil.</p>
+
+<h4>PARLEMENT</h4>
+
+<p>Montmaur dit, dans sa requête au Parlement:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i18">De la cour du grand parlement</p>
+<p class="i18">Tout homme qui mal parle ment.</p>
+</div></div>
+
+<h4>PAROLE</h4>
+
+<p>Ménage se trouvait dans le cloître des Chartreux
+lorsqu'on y faisait voir le tableau de saint Bruno.
+Quelqu'un dit: «Il ne lui manque que la parole.--En
+ce cas, dit Ménage, il est parfait; car il ne pourrait
+parler sans manquer à la règle.»</p>
+
+<h4>PARTIR</h4>
+
+<p>Potier dit un jour à un de ses amis qu'il avait eu
+jadis des fusils excellents: «En quoi étaient-ils donc
+si merveilleux? reprit l'autre.--C'est qu'ils partaient
+aussitôt qu'il entrait des voleurs chez moi, quoiqu'ils
+ne fussent pas chargés.--Et comment cela?--Parce
+que les voleurs les emportaient pour eux.»</p>
+
+<p>Quand la brillante société de Paris s'échappe au
+beau temps pour les eaux et la compagne, les pointus
+disent qu'il y a dans la capitale beaucoup d'<i>esprit de
+parti</i>.</p>
+
+<h4>PAS</h4>
+
+<p>Au commencement de 1793, les gazettes allemandes
+ayant répandu le bruit que le prince de Brunswick
+avançait à pas de géant sur Paris, un soldat de l'armée
+parisienne lit l'impromptu suivant:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Monsieur l'imprimeur allemand,</p>
+<p class="i20">Rendez-nous un petit service;</p>
+<p class="i20">Effacez: À pas de géant,</p>
+<p class="i20">Et mettez: À pas d'écrevisse.</p>
+</div></div>
+
+<p>Un poëte de village a placé sur la porte du cimetière
+de sa commune l'inscription suivante:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Tous tes pas sont faux pas; tu ne fais pas de pas</p>
+<p class="i16">Que tes pas, pas à pas, n'amènent ton trépas.</p>
+</div></div>
+
+<h4>PASSER</h4>
+
+<p>Sur la porte du passage de l'église de Saint-Séverin,
+qui menait autrefois du cimetière à la rue de la Parcheminerie,
+on lisait ces vers:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Passant, penses-tu pas passer par ce passage,</p>
+<p class="i20"> Où passant j'ai passé?</p>
+<p class="i16">Si tu n'y penses pas, passant, tu n'es pas sage;</p>
+<p class="i16">Car, en n'y pensant pas, tu te verras passé.</p>
+</div></div>
+
+<p>Un ignorant, bel esprit et quelque peu farceur, se
+présente à l'université de Reims pour y passer maître
+ès arts. Il y est reçu. Surpris de la facilité avec laquelle
+il avait acquis ce grade, il va de nouveau trouver le
+président de la Faculté, et lui dit: «Monsieur, pendant
+que je suis en cette ville, je voudrais profiter de
+l'occasion, et faire aussi passer mon cheval maître ès
+arts.--Monsieur, lui répondit le président, je suis
+fâché de ne pouvoir vous obliger davantage, mais
+nous ne recevons ici que les ânes.»</p>
+
+<h4>PATAQUIÈS OU PATAQU'EST-CE</h4>
+
+<p>Lorsqu'en 1857 on distribua la médaille de Sainte-Hélène,
+les journaux citèrent la lettre suivante, adressée
+à l'Empereur, au camp de Châlons:</p>
+
+<p>«Sire,</p>
+
+<p>«J'ai contracté sous votre cher oncle deux blessures
+mortelles, qui, depuis 30 ans, font l'ornement de ma
+vie, l'une à la cuisse droite, l'autre à Wagram. Si ces
+deux anecdotes vous paraissent susceptibles de la croix
+d'honneur, j'ai bien celui de vous en remercier d'avance.</p>
+
+<p class="rig">«<i>Signé</i>: ANTOINE BONNIOT,<br>
+«<i>Caporal honoraire à l'ex-jeune garde</i>.</p>
+<br><br><br>
+
+<p>«<i>P. S.</i> Mme Bonniot sera bien sensible à votre amabilité.</p>
+
+<p>«Affranchir la réponse, s'il vous plaît.</p>
+
+<p>«Ci-joint les pièces amplificatives.»</p>
+
+<h4>PATTE ÉTHIQUE</h4>
+
+<p>Une actrice qui avait la main décharnée, se présenta
+sur le théâtre où elle joignait, à une déclamation forte,
+de grands gestes, en déployant de grands bras.</p>
+
+<p>--Quel pathétique! s'écria un des spectateurs.</p>
+
+<h4>PAUVRE</h4>
+
+<p>Le collége des Grassins, à Paris, a été fondé pour les
+pauvres écoliers du diocèse de Sens. Il y avait autrefois,
+au-dessus de la porte: <i>Collège des Grassins, fondé
+pour les Pauvres de Sens</i>. Cette inscription fit croire
+que c'était un hôpital de fous. On fut obligé de la
+supprimer.</p>
+
+<p>Un ami de Bayle s'entretenait avec ce philosophe
+sur la pauvreté des gens de lettres: «Ah! mon ami,
+lui dit Bayle, le nombre des auteurs pauvres est presque
+aussi considérable que le nombre des pauvres auteurs.»</p>
+
+<p>Un pauvre diable qui passait par un village alla,
+pressé par la faim, heurter à la porte d'un seigneur:</p>
+
+<p>--Qui êtes-vous? lui demanda-t-on.</p>
+
+<p>--Je suis un pauvre musicien qui demande la passade.</p>
+
+<p>--Entrez.</p>
+
+<p>Entré qu'il fut, le seigneur le fit dîner avec lui. Ce
+seigneur était mélomane; et il avait fait apprendre la
+musique à ses enfants, garçons et filles. Après le dîner,
+il fait apporter des livres de chant; il les distribue,
+un à l'étranger, et les autres à ses enfants. Ceux-ci se
+mirent à chanter; le seigneur qui n'entendait rien
+dire au passant, croyait qu'il voulait écouter un moment.
+À la fin, comme le silence continuait:</p>
+
+<p>--Vous ne chantez point? lui dit-il.</p>
+
+<p>--Non, monsieur.</p>
+
+<p>--Pourquoi?</p>
+
+<p>--Monsieur, ne vous ai-je pas dit que j'étais un
+pauvre musicien? Eh bien! je suis si pauvre musicien,
+qu'en fait de musique je n'y entends rien du tout.</p>
+
+<p>Un bourgeois de Londres fut pareillement arrêté
+dans la rue par un homme qui lui demanda l'aumône,
+en se qualifiant de pauvre savant. Le bourgeois lui
+donna un schelling, en lui parlant latin.--Ah! Monsieur,
+lui répondit le mendiant, je me suis qualifié de
+pauvre savant, et je suis tellement pauvre savant que
+je n'ai pas même appris mon alphabet.</p>
+
+<h4>PÊCHER</h4>
+
+<p>Dès les premiers jours de la Révolution, le gouvernement
+provisoire a envoyé M. Auguste Luchet à Fontainebleau,
+en qualité de gouverneur de l'ex-château
+royal.</p>
+
+<p>Il n'y avait rien du tout à gouverner dans le splendide
+palais bâti par le génie de Primatice.--Il n'y
+avait qu'à se promener dans le parc et à prendre du
+ventre.</p>
+
+<p>M. Auguste Luchet, qui est romancier, se promena,
+rêva, digéra, et, au bout du compte, se chercha un
+autre passe-temps.--Il découvrit alors ce fameux vivier
+où sont des carpes dont plusieurs ont de la barbe
+et sont, dit-on, contemporaines de François Ier.--Il
+imagina d'y goûter; il pêcha, trouva l'exercice bon,
+et, depuis lors, il pêche toujours.</p>
+
+<p>Les habitants de Fontainebleau s'alarmèrent d'un
+labeur si terrible.--Ils écrivirent au général Cavaignac
+une lettre dans laquelle on trouvait ce passage:</p>
+
+<p>«Citoyen général, nos prédicateurs disent que le
+juste pèche au moins sept fois par jour. Or, M. Auguste
+Luchet pèche du matin au soir, sans discontinuer.
+Jugez s'il est juste.»</p>
+
+<h4>PEINDRE</h4>
+
+<p>--Pendant que mon mari peignait notre corridor,
+disait une Parisienne, je peignais nos enfants; nos
+enfants étaient bien peignés, mais notre corridor était
+mal peint.</p>
+
+<p>On sait que Wateau était, au dernier siècle, un
+peintre célèbre. Un autre Wateau était coiffeur renommé.
+Un bourgeois de Paris, invité à la cour, envoyant
+chercher Wateau le coiffeur, qu'il ne connaissait
+pas, dit à son domestique:</p>
+
+<p>--Va-t'en me chercher Wateau; il faut qu'il me
+peigne tout de suite. Le domestique, qui entendait
+tous les jours vanter le peintre, courut chez lui, et
+Watteau arriva.</p>
+
+<p>--Bonjour, monsieur Wateau, dit le bourgeois, je
+vais à la cour et j'ai besoin de vos talents. A quel prix
+me peignez-vous?</p>
+
+<p>--Mais, monsieur, dit l'artiste, pour que vous soyez
+convenable, vous me donnerez cinquante louis.</p>
+
+<p>Le bourgeois sauta en l'air:</p>
+
+<p>--Comment, cinquante louis! Renaud me peigne
+pour quinze sous en perfection.</p>
+
+<p>L'artiste rit longtemps du quiproquo.</p>
+
+<h4>PÊNE</h4>
+
+<p>Qu'est-ce qui ressemble le plus à une serrure?--C'est
+une femme malheureuse, parce qu'elle n'est jamais
+sans peine.</p>
+
+<h4>PENSER</h4>
+
+<p>On sait que l'ordre de la jarretière a pour devise:
+<i>Honni soit qui mal y pense.</i> Les marquis de Mesgrigny
+à leur château de Villebertain ont fait écrire en lettres
+d'or, au-dessus de la grande porte de leurs écuries:
+<i>Honni soit qui mal y panse.</i></p>
+
+<p>Le comte de Lauraguais revenait de l'Angleterre.
+Louis XV, le revoyant à Versailles, lui demanda d'où
+il arrivait.</p>
+
+<p>--De Londres, Sire.</p>
+
+<p>--Et qu'êtes-vous allé faire là?</p>
+
+<p>--Apprendre à penser.</p>
+
+<p>--A panser les chevaux, répliqua le roi.</p>
+
+<p>En 1815, une noble marquise des environs de Valenciennes
+se casse la jambe en descendant de voiture,
+dans la cour des Tuileries. Son époux désolé commande
+à l'un de ses gens d'aller au plus vite chercher un
+chirurgien.</p>
+
+<p>--Lequel, monsieur, dit le domestique?</p>
+
+<p>--N'importe, pourvu qu'il pense bien. Le laquais
+court, et ramène un Esculape dont les bons principes
+étaient connus; deux jours après, madame était morte:
+Hélas! ce brave docteur pensait bien, mais il pansait
+mal.</p>
+
+<h4>PEPIN</h4>
+
+<p>Quelle différence y a-t-il entre l'histoire de France
+et une poire d'Angleterre.</p>
+
+<p>--L'histoire de France n'a qu'un Pépin et la poire
+en a plusieurs.</p>
+
+<p>C'est un calembour de M. de Bièvre.</p>
+
+<h4>PÉQUIN OU PÉKIN</h4>
+
+<p>Mot injurieux par lequel les militaires désignaient
+autrefois un bourgeois. Lorsque Martainville fut accusé
+d'avoir livré le pont du Pecq près Saint-Germain aux
+alliés, on fit courir ces vers, où l'application de péquin
+est plus juste:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">À Scipion, sa république,</p>
+<p class="i20">Pour avoir dompté l'Afrique,</p>
+<p class="i20">Donna le nom d'Africain.</p>
+<p class="i20">Nommons donc cette âme vile,</p>
+<p class="i20">Qui du Pecq livra la ville,</p>
+<p class="i20">Martainville le <i>Pecquin</i>.</p>
+</div></div>
+
+<h4>PERÇANT</h4>
+
+<p>Un faiseur de calembours a soutenu que les Perses
+avaient introduit dans le monde <i>les cris persans</i>.</p>
+
+<p>Le même prétend que le roi Persée, prisonnier des
+Romains, avait charmé les ennuis de sa captivité, en
+fabriquant ces sortes de chaises qui portent son nom.</p>
+
+<h4>PERDRE</h4>
+
+<p>Un ecclésiastique de Troyes, prêchant, perdit la mémoire;
+un plaisant se leva et dit:--Qu'on ferme la
+porte; il n'y a ici que d'honnêtes gens; il faut que
+la mémoire de monsieur se retrouve.</p>
+
+<h4>PERDRIX</h4>
+
+<p>Un plaisant, voyant deux ris de veau sur la table,
+chez Véry, embarrassait le garçon de service en lui
+disant:--Faites-moi le plaisir de me passer cette
+<i>paire de ris</i>.</p>
+
+<h4>PÉROU</h4>
+
+<p>On parlait dans une société du mariage du doge de
+Venise avec la mer Adriatique.--Il y a, dit quelqu'un,
+un fait plus singulier, c'est l'union indissoluble de
+père Ou et de la mère Ique.</p>
+
+<h4>PERRUQUE</h4>
+
+<p>Pendant les guerres de l'empire, un Troyen, entendant
+annoncer que le général Baville avait pris perruque,
+demanda où cette ville était située. Un vieil
+abbé lui répondit: Sur la nuque.</p>
+
+<h4>PERRUQUIER</h4>
+
+<p>L'argot de cette profession a fourni à un membre
+de la corporation une série de calembours à propos de
+la guerre d'Italie.--Les autrichiens, dit-il, sont des
+<i>perruques</i>. Ils espéraient que le Piémont manquerait
+de <i>toupet</i> au moment de <i>se prendre aux cheveux</i> et
+de se <i>donner un coup de peigne</i>. Mais nous sommes là,
+<i>le fer</i> à la main; nous ne laisserons pas <i>faire la barbe</i>
+à nos alliés, et l'Autriche, après avoir reçu un <i>savon</i> et
+<i>un coup de brosse</i>, pourra bien <i>friser</i> sa ruine.</p>
+
+<h4>PEUPLIER</h4>
+
+<p>On a trouvé un calembour, dans ce vers d'un poëte,
+qui donne de sages conseils:</p>
+
+<p class="mid">
+Au fort de la tempête, il faut un peu plier.
+</p>
+
+<h4>PEUR</h4>
+
+<p>On parlait devant Charles-Quint d'un capitaine
+espagnol qui se vantait de n'avoir jamais eu peur.--Il
+faut, dit l'empereur, que cet homme n'ait jamais
+mouché la chandelle avec ses doigts; car il aurait eu
+peur de se brûler.</p>
+
+<h4>PEUREUX</h4>
+
+<p>On disait à un joueur qui gagnait toujours:--Vous
+n'iriez pas la nuit dans un cimetière; vous êtes trop
+heureux.</p>
+
+<h4>PET</h4>
+
+<p>Un perruquier de campagne réfléchissait assis sur
+le coin de sa porte. Un monsieur passe et lui demande
+s'il a un fer à toupet.--Oui, monsieur répond avec
+empressement l'artiste campagnard.--Eh bien! frisez-moi
+celui-là, dit le meunier en laissant échapper
+un bruit monstrueux. (Voyez <i>parapet</i>.)</p>
+
+<h4>PIÈCE</h4>
+
+<p>Quelle est la première pièce du théâtre Français?--Le
+vestibule.</p>
+
+<p>Quelles sont les pièces qui vont toujours?--Les
+pièces de cinq francs.</p>
+
+<p>Fabert, maréchal de France, ayant été blessé au
+siége de Turin d'un coup de mousquet à la cuisse,
+Turenne et le cardinal de La Valette, le conjurèrent de
+se la laisser couper, selon l'avis de tous les chirurgiens.
+Le maréchal leur répondit:--Je ne veux pas mourir
+par pièces; la mort m'aura tout entier, ou elle n'aura
+rien, et il guérit de sa blessure.</p>
+
+<h4>PIED</h4>
+
+<p>Un grenadier, qui s'appelait la Paix de Dieu, fut
+blessé: on allait lui couper une jambe. Pendant les
+préparatifs de cette cruelle opération, il disait:--Eh!
+la Paix de Dieu, mon ami, que va-t-on dire de
+toi, quand on saura que tu as lâché pied.</p>
+
+<p>Lorsqu'il fut question de proclamer Louis XVI, le
+restaurateur de la liberté française, un avocat voulait
+que l'hommage de la nation fût porté humblement
+aux pieds de Sa Majesté.--La majesté n'a point de
+pieds, s'écria Mirabeau, et chacun éclata de rire, ce
+qui fit tomber la motion.</p>
+
+<p>Le journal de Lille racontait, il n'y a pas longtemps,
+l'anecdote suivante:</p>
+
+<p>Madame N..., bonne vieille dame, n'a jamais pu se
+mettre au fait des nouvelles mesures: les dénominations
+de mètre, gramme, stère, etc., lui ont toujours
+semblé des monstres, et elle ne comprend pas qu'on
+préfère ces noms barbares aux anciens. Cependant,
+poussée par un caprice (car les femmes en ont à tout
+âge), elle voulut dernièrement essayer de se mettre
+au niveau des idées modernes, et elle écrivit bravement
+à son boucher de lui envoyer un mètre de
+veau.</p>
+
+<p>--Je verrai bien ce que ça fera, se disait-elle, et cela
+me guidera pour une autre fois. Sa lettre tomba dans
+les mains d'un nouveau garçon, encore peu expérimenté,
+à qui le patron avait recommandé, quand il
+serait absent, de consulter un tableau de comparaison
+entre les mesures anciennes et les nouvelles, afin de
+ne pas commettre d'erreurs. Le jeune homme ne manqua
+pas de suivre ce bon conseil, et ayant lu sur son
+tableau qu'un mètre valait trois pieds, il envoya avec
+satisfaction trois énormes pieds de veau à madame N...,
+qui ne peut souffrir cette partie de l'animal.</p>
+
+<p>Quand l'emploi des mesures nouvelles fut discuté à
+l'Académie française, un des membres de la commission
+du Dictionnaire proposa de substituer à cette
+expression proverbiale: Avoir <i>un pied de nez</i>, celle-ci:
+Avoir trente-trois centimètres de nez. Comme M. Villemain
+s'y opposait:--Je sais bien, dit M. de Jouy, que
+l'expression n'est pas exacte, et qu'il faudrait ajouter
+une fraction.</p>
+
+<h4>PILE</h4>
+
+<p>Nos soldats font des calembours. Un chasseur disait
+après la bataille de Solferino:--Les Autrichiens ont
+l'air de vouloir prendre Volta.--Non, non, dit l'autre,
+ils ont trop peur de la <i>pile</i>.</p>
+
+<h4>PLACE</h4>
+
+<p>M. de Villèle ayant rencontré M. de La Bourdonnaye,
+lui fit quelques caresses bien franches.--Comment,
+mon cher confrère, vous me boudez! Vous ne savez
+donc pas combien le poste est difficile à tenir. Mettez-vous
+à ma place...--Eh! c'est tout ce que je demande,
+répondit M. de La Bourdonnaye.</p>
+
+<p>Un jeune homme qui possède un petit bien dans le
+comté de Gloucester, se décida à quitter sa campagne
+et à venir à la ville solliciter un emploi, comptant sur
+le duc de Newcastle, qui avait promis de le servir, et
+qui pendant plusieurs mois, exerça, on ne peut mieux,
+sa patience. Las d'attendre inutilement, l'homme des
+champs alla trouver son protecteur, et lui dit qu'à la
+fin, il s'était procuré une place.</p>
+
+<p>--Je vous fais mon compliment de votre bonne
+fortune, lui dit le duc; et où est cette place, je vous
+prie?</p>
+
+<p>--Dans le coche de Gloucester, je m'en suis assuré
+hier soir, et vous m'avez guéri, monseigneur, d'une
+plus haute ambition.</p>
+
+<h4>PLAINE</h4>
+
+<p>Quelle est la plaine la plus haute?--La pleine
+lune.</p>
+
+<h4>PLAISIR</h4>
+
+<p>Garçon! un beefsteak, disait un Anglais au café
+de Paris.--Oui, monsieur, avec plaisir.--Non pas
+avec plaisir, avec des pommes de terre.</p>
+
+<p>On invitait Pothier à un dîner.--Dois-je venir avec
+plaisir? dit-il.--Certainement.--Il amena avec lui
+Plaisir, coiffeur célèbre de la rue Richelieu.</p>
+
+<h4>PLAN</h4>
+
+<p>Je ne possède plus rien, s'écriait un pauvre diable
+à un de ses confrères; j'avais une petite rente, j'ai été
+forcé de m'en défaire; j'avais une tirelire assez bien
+garnie, je ne l'ai plus.--Ainsi, lui répond l'autre, la
+situation est rente en plan, tirelire en plan.</p>
+
+<h4>PLANCHE</h4>
+
+<p>Les faiseurs de jeux de mots disent que M. Planche
+est le plus plat de nos écrivains.</p>
+
+<p>Ce qui n'est vrai que dans son nom.</p>
+
+<h4>PLANTE</h4>
+
+<p>Quelle est la plante la plus utile à l'homme?--La
+plante des pieds.</p>
+
+<h4>PLAT</h4>
+
+<p>Piron, un jour au parterre du Théâtre-Français, suait
+à grosses gouttes. Ses deux voisins se disaient à
+l'oreille:</p>
+
+<p>--Voilà Piron qui cuit dans son jus.--«Ce n'est
+pas étonnant, dit Piron, sans se retourner, je suis
+entre deux plats.»</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i18"> Vous habitez un pays âpre et rude,</p>
+<p class="i16">Disait un bon Flamand au Suisse Frenkestel,</p>
+<p class="i16">Et votre caractère aussi doit être tel;</p>
+<p class="i16">De son pays toujours on saisit l'habitude</p>
+<p class="i20"> --Ce propos n'est pas délicat,</p>
+<p class="i18"> Reprend le Suisse. En ce moment j'y pense,</p>
+<p class="i20"> Vous habitez un pays plat;</p>
+<p class="i18"> Dois-je en tirer la même conséquence?</p>
+</div></div>
+
+<h4>PLATE-BANDE</h4>
+
+<p>Dans le temps qu'on imposait aux enfants des noms
+recherchés, un bon homme qui aimait son jardin, se
+vantait d'avoir donné aux siens des noms plus convenables.
+Mes trois filles, disait-il, s'appellent Rose,
+Jacinthe et Marguerite, et mon fils Narcisse.--Ainsi,
+lui répondit-on, vous faites de vos enfants une plate-bande.</p>
+
+<h4>PLOMB</h4>
+
+<p>Dans la dernière guerre d'Italie, un officier aussi
+fou qu'il était brave, ayant reçu une balle dans la tête,
+dit: «Je savais bien que j'y avais besoin de plomb;
+mais la dose est un peu trop forte.» Et il mourut
+sur-le-champ.</p>
+
+<h4>POËTE</h4>
+
+<p>On dit que les poëtes sautent parfaitement les ruisseaux,
+parce qu'ils sont habitués aux <i>enjambements</i>.</p>
+
+<p>Quel est le poëte qui fait la barbe à tous les autres?--M.
+Barbier.</p>
+
+<h4>POIDS</h4>
+
+<p>Une dame, le jour des rois, eut la fève; elle la passa
+à son mari.--Que voulez-vous que je fasse de cela?
+dit-il.--Ne savez-vous pas qu'en France, répondit la
+dame, la couronne ne peut tomber en quenouille, et
+que c'est l'homme qui doit se charger du poids de la
+royauté.</p>
+
+<h4>POINGS</h4>
+
+<p>Pourquoi les poissardes ne mettent-elles pas les
+points sur les I?</p>
+
+<p>--Parce qu'elles les ont ordinairement sur les hanches.</p>
+
+<h4>POINT</h4>
+
+<p>Autrefois les dames portaient un genre de bracelet
+qu'elles nommaient sentiment. M. ***, voyant un de
+ces bijoux au bras gauche de mademoiselle Bourgoing,
+lui dit: «Je ne croyais pas que vous portiez le
+sentiment à ce poing-là.»</p>
+
+<h4>POIS</h4>
+
+<p>Un bourgeois, qui avait passé une notable partie de sa
+vie à dire des facéties plus ou moins fines, était moribond.
+Sa soeur, qui l'assistait dans ces tristes moments,
+lui ayant demandé s'il ne se sentait pas un poids sur
+l'estomac:--Non, ma soeur, dit-il, je ne sens ni pois
+ni fève.</p>
+
+<p>Sous Louis XV, un factionnaire de la garde avait
+été placé à l'une des grilles de la cour des Tuileries,
+avec la consigne de ne laisser pénétrer personne par
+cette voie. Un homme se présente pour entrer, le factionnaire
+lui oppose sa consigne. L'individu insiste
+en disant:</p>
+
+<p>--Tu ne me reconnais donc pas? Je suis le prince
+de Poix.</p>
+
+<p>--Quand vous seriez le roi des haricots, répliqua
+le soldat, vous ne passeriez pas!</p>
+
+<h4>POISSARDES</h4>
+
+<p>On accuse de férocité le roi de Sardaigne: et en
+effet, il mange quelquefois des pois sardes.</p>
+
+<h4>POLI</h4>
+
+<p>Un ami d'Odry le trouvant encore au lit à onze
+heures, le blâmait de se lever si lard.--Je ne m'attendais
+pas à des reproches, répondit-il, pour avoir
+été <i>trop au lit</i>.</p>
+
+<p>L'autre jour, M. T... était furieux. Il venait d'inviter
+à dîner un de ses amis, qui avait accepté.</p>
+
+<p>--Fiez-vous donc aux amis, s'écriait-il! Je l'invite
+à manger la soupe avec moi, je l'invite de la façon la
+plus polie, la plus gracieuse, la plus délicate,--et il
+accepte.</p>
+
+<p>--Eh bien? lui dit le confident de ses peines.</p>
+
+<p>--Eh bien! il devait refuser. Que diable! une politesse
+en vaut une autre.</p>
+
+<h4>PORC FRAIS</h4>
+
+<p>Le directeur du grand théâtre de Saint-Pétersbourg
+ayant laissé reposer le danseur Duport pendant tout
+le carême, quelqu'un dit que sans doute il voulait
+avoir <i>Duport frais</i> à Pâques.</p>
+
+<h4>PORTE</h4>
+
+<p>Une dame demandait à son mari, qui sollicitait un
+consulat, le succès de ses démarches. Il répondit:--On
+vient de me mettre à la Porte.--Et vous souffrez
+cela? reprit-elle indignée. Elle ne se calma que lorsqu'elle
+comprit que la Porte, la sublime Porte était
+Constantinople.</p>
+
+<h4>POSTÉRITÉ</h4>
+
+<p>Brunet disait:--Je connais un enfant de cinq ans
+qui a déjà de la <i>poste hérité</i>. C'était le fils d'un maître
+de poste défunt.</p>
+
+<h4>POSTHUME</h4>
+
+<p>Papa, qu'est-ce que c'est donc qu'un ouvrage posthume?--Mon
+fils, c'est un ouvrage que l'auteur
+publie après sa mort.</p>
+
+<h4>POT</h4>
+
+<p>Quel est, demandait Odry, le pays où l'on mange le
+plus de bouillon?--C'est l'Italie!--Parce que?--Parce
+que la Providence y a mis le Pô.</p>
+
+<p>Le dialogue suivant a eu lieu, lorsque la Savoie
+demanda, en 1848, notre intervention armée en
+Italie.</p>
+
+<p>--Es-tu pour l'intervention, toi?</p>
+
+<p>--Non.</p>
+
+<p>--Pourquoi? parce que je vois <i>la manigance</i>.</p>
+
+<p>--Quelle manigance?</p>
+
+<p>--Écoute, les élections arrivent; les rouges veulent
+nous envoyer là-bas pour être maîtres par ici; et alors,
+ce ne sont pas ceux qui seraient le plus près du Pô qui
+mangeraient la soupe.</p>
+
+<p>Un saltimbanque, appelé chez le commissaire et
+sommé de décliner son nom, déploya ses papiers où
+le magistrat reconnut qu'il portait le nom de Pot.--Singulier
+nom! dit le commissaire.</p>
+
+<p>--C'est vrai, monsieur; mais c'est un nom qui ne
+manque pas de célébrité; mon père était soldat, et
+même on le fit sergent, attendu, disent les rapports,
+qu'on voyait toujours dans les combats Pot au feu le
+premier. Pour une faute de discipline, on lui ôta son
+grade et on lui donna son congé. Pot, cassé, se mit à
+faire le commerce; il y réussit, mal et se noya. Une
+fois Pot à l'eau, il perdit ses chagrins et devint fou,
+car on le retira, et on ne l'appela plus que Pot fêlé.
+Pot, âgé alors de cinquante ans, mourut six mois
+après.</p>
+
+<h4>POUDRE</h4>
+
+<p>Un maître parfumeur demandait à son garçon de
+boutique s'il avait fait toutes les commissions dont il
+l'avait chargé.--Oui, monsieur,--As-tu porté un
+échantillon de mes poudres à cet étranger en question?--Oui,
+monsieur.--Et quelle poudre a-t-il
+prise?--Monsieur, il a pris la poudre d'escampette.</p>
+
+<h4>POULE</h4>
+
+<p>Lorsque l'abbé Poule, aux sermons duquel tout
+Paris avait couru, fut pourvu d'une riche abbaye, il
+cessa de prêcher: ce qui fit dire à Louis XVI, qui
+l'avait si bien doté:--Quand la poule est grasse, elle
+ne pond plus.</p>
+
+<h4>PRATIQUE</h4>
+
+<p>On donne ce nom à un petit instrument qu'on se
+met dans la bouche pour faire parler Polichinelle. Un
+jour, Charles Nodier, qui aimait beaucoup le théâtre
+des marionnettes, demanda au maître du spectacle à
+voir la pratique; et pour essayer s'il ferait aussi bien
+que le bateleur la voix singulière du matamore napolitain,
+il se la mit dans la bouche. Content de cette
+expérience, il rendit la pièce au bon homme en disant,
+c'est ingénieux, mais c'est si petit qu'il doit y avoir
+quelquefois danger de l'avaler.--Oui, monsieur, répondit
+le bateleur: mais cela ne fait aucun mal. Celle
+que vous venez d'essayer a déjà été avalée huit ou
+dix fois.</p>
+
+<h4>PRAULT</h4>
+
+<p>Le libraire Prault pria un jour M. de Bièvre qui entrait
+chez lui, de lui faire un calembour sur lui-même
+ou sur sa femme. Le marquis de Bièvre répliqua sur-le-champ:--Vous
+êtes un <i>prault-blème</i> et votre
+femme une <i>prault-fanée</i>.</p>
+
+<h4>PRENDRE</h4>
+
+<p>Le célèbre apothicaire Baumé était occupé, dans son
+laboratoire, à des opérations de chimie. On l'appelle
+pour une personne qui voulait lui parler. Cette personne
+lui fait un long détail du commencement, des
+progrès et de l'état actuel d'une maladie dont elle se
+dit attaquée.</p>
+
+<p>--Eh bien, monsieur, que me demandez-vous? dit
+Baume impatient de retourner à ses alambics.</p>
+
+<p>--Monsieur, je viens vous consulter pour savoir
+ce qu'il faut que je prenne pour me guérir.</p>
+
+<p>--Ce qu'il faut que vous preniez? mais prenez un
+médecin ou un chirurgien.</p>
+
+<p>--Monsieur, est-ce en infusion ou en décoction
+qu'il me faudra les prendre?...</p>
+
+<p>En 1776, les médecins de Paris recommandèrent,
+comme une précaution utile contre la grippe, dont
+beaucoup de personnes se trouvaient attaquées cette
+année-là, de ne pas sortir à jeun. Un pasteur des environs,
+instruit de la recette, crut devoir en recommander
+l'usage à ses paroissiens. Il leur dit donc,
+le dimanche suivant, au prône, qu'ils feraient bien
+de ne pas sortir le matin, qu'ils n'eussent pris quelque
+chose auparavant. Le lendemain il trouva chez lui
+25 louis de moins. Son domestique, qui était sorti
+le matin, ne reparut plus. Aux premières recherches
+il ne fut pas difficile de s'apercevoir qu'il était le
+voleur des 25 louis. Arrêté, interrogé sur le fait, il
+s'avoua l'auteur du vol; mais il s'excusa en disant
+avoir obéi à son maître et curé, qui, d'après l'ordonnance
+de la Faculté, avait défendu au prône de sortir
+le matin sans avoir pris quelque chose, et qu'il ne
+l'avait fait que pour se préserver de la grippe.</p>
+
+<p>--Mon père, disait dans un café un petit garçon à
+un filou, prendrez-vous une demi-tasse aujourd'hui?--Non,
+mon fils, reprit le père, je prendrai une
+cuiller.</p>
+
+<p class="mid">LE PARTISAN DES ASSIGNATS.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">L'autre jour, sous le toit du grand aréopage</p>
+<p class="i18"> Où maint gredin, à face de proscrit,</p>
+<p class="i18"> Pour quinze sous applaudit, fait tapage</p>
+<p class="i20"> En faveur de tout ce que dit</p>
+<p class="i16">Ou Barnave le doux, ou Mirabeau le sage.</p>
+<p class="i16">Un citoyen actif, qui n'avait pas d'habit,</p>
+<p class="i16">Vantait les assignats et prônait leur débit:</p>
+<p class="i16">--On n'en sent pas assez, criait-il, l'avantage;</p>
+<p class="i16">Sans eux l'état périt. Pour moi, je jure bien,</p>
+<p class="i16">Messieurs, que j'en prendrai.--Tout beau, maître Desroches,</p>
+<p class="i18"> Dit un quidam, qui connaît mon vaurien,</p>
+<p class="i20"> On sait quel est votre moyen:</p>
+<p class="i20"> Vous en prendrez, mais dans les poches.</p>
+</div></div>
+
+<p>On montrait à un paysan tout ce qu'un maréchal
+de France avait pris; les villes, les pays, tout cela était
+dans un tableau.--Morgué! tout ce qu'il a pris
+n'est pas là, dit le paysan, car je n'y vois pas mon pré.</p>
+
+<p>--Je viens de prendre une heure de promenade,
+où j'ai pris un plaisir extrême; mais comme le jour
+prend son déclin, je me retire chez moi pour aller
+prendre l'air du feu; car si je tardais davantage, j'aurais
+peur de prendre un rhume. Et vous, monsieur,
+quel parti prenez-vous?--Mais vous le voyez, monsieur,
+je prends le parti de prendre patience.</p>
+
+<p>L'hiver dernier était si violent, que tout se gelait,
+tout se prenait, même les bourses et les manteaux.</p>
+
+<p>Un Gascon, qui avait perdu son argent au jeu, coucha
+avec celui qui le lui avait gagné. La nuit, il glissa
+la main sous le chevet de son compagnon pour reprendre
+son argent. L'autre le surprit, et lui demanda
+ce qu'il faisait.--Mon ami, répondit le Gascon, je
+prends ma revanche.</p>
+
+<p>Le cardinal de Fleury voulait passer pour faire
+mauvaise chère. Il demandait un jour à un courtisan
+très-délié, qui dînait chez son Éminence:--Prenez-vous
+du café?--Monseigneur, je n'en prends que
+quand je dîne.</p>
+
+<p>On demandait à un médecin octogénaire qui jouissait
+encore de la meilleure santé, comment il faisait
+pour se porter si bien.--Je vis de mes remèdes, répondit-il,
+et je n'en prends pas.</p>
+
+<p>On connaît cette épigramme de Scarron:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Ci-gît qui se plut tant à prendre,</p>
+<p class="i20">Et qui l'avait si bien appris,</p>
+<p class="i20">Qu'il trépassa de peur de rendre</p>
+<p class="i20">Un lavement qu'il avait pris.</p>
+</div></div>
+
+<h4>PRÈS</h4>
+
+<p>Un Anglais se plaignait à tout venant, dans un
+café, d'une chute qu'il avait faite, et qui lui causait de
+vives douleurs.</p>
+
+<p>--Monsieur, lui dit un chirurgien qui était à côté
+de lui, est-ce près des vertèbres que vous vous êtes
+fait mal?</p>
+
+<p>--Non, monsieur, reprit le malade, c'est près de
+l'obélisque.</p>
+
+<h4>PRÉSENT</h4>
+
+<p>Dans des fiançailles célébrées avec beaucoup d'éclat,
+on remarquait deux choses: la laideur de l'époux et
+l'opulence de la corbeille. Le présent faisait oublier le
+futur.</p>
+
+<h4>PROFESSION</h4>
+
+<p>Louis XVI périt juridiquement assassiné, contre le
+voeu formel de la nation, le 21 janvier 1793. Le réclame
+qui voudra, ce crime n'appartient point à la
+France. Cependant, ce qui est affreux, et ce qui existe,
+c'est que sur les registres des actes civils de la ville de
+Paris on ait laissé subsister: «Capet (Louis), etc., etc.,
+profession de dernier tyran des Français.»</p>
+
+<h4>PRONONCIATION</h4>
+
+<p>Un étranger demandait à des savants comment on
+doit prononcer le mot pétition?</p>
+
+<p>--D'après la règle qui veut qu'un <i>t</i> entre deux <i>i</i> se
+prononce <i>ci</i>, répondit un grammairien.</p>
+
+<p>--Faites-moi donc l'<i>amicié</i> de prendre <i>picié</i> de mon
+ignorance, et de me répéter la <i>moicié</i> de ce que vous
+venez de dire, répliqua sur-le-champ Charles Nodier.</p>
+
+<h4>PROPRE</h4>
+
+<p>M. Salot voulait changer de nom, parce que le sien,
+disait-il, était un nom <i>commun</i>, et qu'il désirait un
+nom <i>propre</i>.</p>
+
+<h4>PUNCH</h4>
+
+<p>M. R***, préfet d'un riche département français,
+avait si bien mérité de ses administrateurs, que, dans
+leur reconnaissance, ils avaient donné son nom à un
+pont construit sous son administration. Un jour qu'il
+se louait de ce témoignage de gratitude, un de ses
+amis lui dit:--R***, c'est dommage que tu ne te
+nommes pas Chauvin.--Pourquoi cela?--Parce que
+ton pont, au lieu de s'appeler pont R***, s'appellerait
+pont Chauvin (punch au vin), et que ce serait plus
+drôle.</p>
+<br>
+
+<h2>Q</h2>
+
+<h4>QUAND</h4>
+
+<p>Un homme qui arrivait de Belgique disait:--J'ai
+vu avec plaisir la ville de Gand. Comme on lui demandait:
+Quand? il crut qu'on avait mal entendu, et répondit:--Caen
+est en Normandie.</p>
+
+<h4>QUARTERON</h4>
+
+<p>Il m'est tombé entre les mains, dit quelque part
+M. Louis de Verrières, un vieux et grand livre contenant
+la vie de plusieurs saints. Ma mémoire ne me
+fournit point la date de son impression; la veuve du
+libraire Carteron, après la préface, met la devise de sa
+maison; je pourrais presque dire ses armoiries. Voici
+en quoi elles consistent: un dessin représente une
+balance, tenue, ce me semble, par une main (je dirais
+<i>dextrochère</i> ou <i>senextrochère</i> si je voulais faire le savant;
+mais je rappellerais ceux qui dénigrent le calembour).
+Dans cette balance on aperçoit des <i>quarts</i>
+de <i>livre</i>, qu'on nommait alors quarterons; et la devise
+qui accompagne donne l'explication aux lecteurs qui
+n'ont pas l'<i>esprit des sots</i>, ou l'<i>esprit de ceux qui n'en
+ont point: Les quarterons font les livres</i>.</p>
+
+<p>De nos jours le système décimal contrarierait singulièrement
+ces libraires, venus au beau temps de la
+<i>livre</i> et des <i>onces</i>. Que feraient-ils avec des <i>kilogrammes</i>
+et des <i>décagrammes</i>? Cela leur paraîtrait un
+peu <i>lourd</i>; et j'ajoute à cette opinion le poids de mon
+assentiment.</p>
+
+<h4>QUARTIER</h4>
+
+<p>Quelqu'un voyant passer un laideron disait:--Voilà
+la plus belle fille du cartier. Tous les auditeurs,
+entendant, étaient scandalisés. Mais ils apprirent qu'il
+y avait dans l'endroit un faiseur de cartes qui avait
+deux filles.</p>
+
+<h4>QUASI</h4>
+
+<p>On fit usage de cet adverbe, en 1830, dans le couplet
+suivant:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Le peuple est quasi souverain;</p>
+<p class="i20">Philippe est quasi légitime;</p>
+<p class="i20">L'ouvrier est quasi sans pain;</p>
+<p class="i20">La France est quasi dans l'abîme;</p>
+<p class="i20">Les pairs quasi déracinés</p>
+<p class="i20">Ont l'air quasi démocratique;</p>
+<p class="i20">Nous sommes quasi ruinés</p>
+<p class="i20">Par une quasi république.</p>
+</div></div>
+
+<h4>QUATRE</h4>
+
+<p>Piron passait dans le Louvre avec un de ses amis:--Tenez,
+dit-il en montrant l'Académie française; ils
+sont là quarante qui ont de l'esprit comme quatre.</p>
+
+<p>Cette boutade a sans doute inspiré les quatre vers
+spirituels que Boufflers adressa à Mme de Staël, qui lui
+demandait pourquoi il n'était pas de l'Académie:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Je vois l'Académie où vous êtes présente;</p>
+<p class="i16">Si vous m'y recevez mon sort est assez beau.</p>
+<p class="i16">Nous aurons de l'esprit à nous deux pour quarante,</p>
+<p class="i18"> Vous comme quatre et moi comme zéro.</p>
+</div></div>
+
+<p>Un sot se vantait devant Rivarol de savoir quatre
+langues.--Je vous en félicite, lui dit-il; vous avez
+quatre mots contre une idée.</p>
+
+<h4>QUATREMER</h4>
+
+<p>M. Quatremer demanda à Louis XV l'autorisation
+d'ajouter le <i>de</i> à son nom.--Volontiers, répondit le
+roi, pourvu que vous le mettiez à la fin.</p>
+
+<p>Et nous avons eu Quatremer de Quincy.</p>
+
+<h4>QUELQUE</h4>
+
+<p>Une femme, qui courait follement après les airs, accoste
+un jour La Popelinière qu'on venait d'annoncer,
+et lui dit:--Il me semble, monsieur, vous avoir vu
+quelque part.--Il est vrai, madame, lui répliqua-t-il,
+qu'il m'est arrivé d'y aller quelquefois.</p>
+
+<h4>QUESTIONS GROTESQUES</h4>
+
+<p>Pourquoi les pompiers n'aiment-ils pas César?--Parce
+qu'ils sont engagés pour pomper.</p>
+
+<p>Quel est le jeu que préfèrent les domestiques?</p>
+
+<p>--Le gage touché.</p>
+
+<p>Pourquoi le soleil se lève-t-il tard en hiver?</p>
+
+<p>--Parce qu'il fait si froid qu'il ne peut se résoudre
+à se lever matin.</p>
+
+<p>Quelle est la partie plus grande que le tout?</p>
+
+<p>--La peau d'un boeuf.</p>
+
+<p>Qu'est-ce qui fait tourner le dos au plus brave
+guerrier?</p>
+
+<p>--Une seringue.</p>
+
+<p>Que faut-il faire pour ne plus avoir le mal de dents?</p>
+
+<p>--Le mal dedans, il faut le mettre dehors.</p>
+
+<p>Que font trois poules sur un mur?</p>
+
+<p>--Un nombre impair.</p>
+
+<p>Pourquoi les journalistes craignent-ils l'automne?</p>
+
+<p>A cette question de M. Guizot, M. Bertin de Vaux
+répondit:--Parce que l'automne amène la chute des
+feuilles.</p>
+
+<p>Pourquoi la lettre A est-elle plus intelligente que la
+lettre B?</p>
+
+<p>--Parce qu'elle est bien plus avancée (avant C).</p>
+
+<p>Quels sont les poissons sans arêtes?</p>
+
+<p>--Les poissons d'avril.</p>
+
+<p>Où avez-vous la main quand vous dormez?</p>
+
+<p>--Au bout du bras.</p>
+
+<p>Qu'est-ce qui passe sous le soleil sans faire de
+l'ombre?</p>
+
+<p>--Le son de la cloche.</p>
+
+<p>Quel est le premier homme du monde?</p>
+
+<p>--Le rhum de la Jamaïque.</p>
+
+<p>Quelle différence y a-t-il entre le ciel et la terre?</p>
+
+<p>--C'est que le ciel a saint Paul, et que la terre n'en
+a que deux: le pôle arctique et le pôle antarctique.</p>
+
+<p>Quel fut l'empereur romain le moins gênant?</p>
+
+<p>--L'empereur Commode.</p>
+
+<p>Quand est-ce qu'une demoiselle peut nous éclairer?</p>
+
+<p>--Lorsqu'elle chante, parce qu'on a des <i>chants
+d'elle</i>.</p>
+
+<p>Quelles sont les plus vénérables lettres de l'alphabet?</p>
+
+<p>--Les lettres AG.</p>
+
+<p>Quel est l'ami le plus désagréable?</p>
+
+<p>--La migraine.</p>
+
+<p>Quels sont en Angleterre les lords et les ladys les
+moins commodes?</p>
+
+<p>--L'orgueil et l'ortie, la dyssenterie et la disette;
+avec la dissimulation et la discorde.</p>
+
+<p>Quel est le moyen d'empêcher les cheminées de
+fumer?</p>
+
+<p>--C'est de n'y point faire de feu.</p>
+
+<p>Pourquoi met-on les fours dans les villes?</p>
+
+<p>--Parce qu'on ne peut pas mettre les villes dans les
+fours.</p>
+
+<p>Pourquoi les forts de la halle mettent-ils des chapeaux
+blancs?</p>
+
+<p>--Pour se couvrir la tête.</p>
+
+<p>Les villageois malins vous diront:--Quand notre
+curé dit la messe et que notre maître d'école la chante
+avec les enfants, qu'est-ce qu'ils font?--Mais ils ne
+prononcent pas l, vous répondrez:--Ils font l'office;--gros
+rire alors, à travers lequel on vous répliquera:--Ce
+qui fond, c'est la cire.</p>
+
+<h4>QUEUE</h4>
+
+<p>Un bonhomme entendant parler de <i>que retranché</i>,
+dans les modes de la langue latine:--Je comprends,
+dit-il, la queue retranchée, c'est la Titus, une coiffure
+qui nous est revenue sous l'empire.</p>
+
+<p>Dernièrement une Anglaise se promenait au Jardin-des-Plantes.
+Elle dit à sa femme de chambre qui la
+suivait:--Achetez un pain et donnez-le à l'éléphant.
+La camériste revient, le pain à la main: Milady, dit-elle,
+par quel bout faut-il lui donner cela? il a deux
+queues!</p>
+
+<p>Un paysan, ayant tué d'un coup de hallebarde un
+chien qui voulait le mordre, fut cité devant le juge,
+qui lui demanda pourquoi il n'avait pas opposé le
+manche de la hallebarde.--Je l'aurais fait, répondit
+le paysan, s'il m'eût mordu de la queue; mais il me
+mordait avec ses dents.</p>
+
+<h4>QUIPROQUO</h4>
+
+<p>Un pauvre ministre de la secte anglicane avait
+chargé Dick, son domestique, d'aller prendre, chez
+David Black, le boucher, une fraise de veau à crédit
+pour son diner. Comme Dick entrait dans le temple
+après sa commission faite, le pasteur en chaire
+s'écriait:--Quelles sont à ce propos les paroles de
+David, mes frères? que dit David?--Monsieur, s'écria
+Dick, David a dit: «Pas d'argent, pas de fraises!»</p>
+
+<p>On lisait dernièrement dans un petit journal de
+Bruxelles:--Un incident joyeux a ajouté un supplément
+de gaieté, vendredi, au théâtre des Variétés amusantes,
+à Bruxelles. Je ne sais quel merle du parterre
+s'avisa de siffler pendant la représentation du <i>Monsieur
+seul</i>. L'officier de police se lève et demande de sa
+plus belle voix:--Qui se permet de siffler?</p>
+
+<p>--C'est un droit qu'à la porte on achète en entrant,
+riposte une voix qui part de la galerie.</p>
+
+<p>Le policeman, intrigué et indigné, cherche des yeux
+ce nouvel interrupteur.--Qui a dit ça? hurle-t-il.</p>
+
+<p>--C'est Boileau, répond un plaisant des stalles.</p>
+
+<p>--Que Boileau sorte de la salle à l'instant!</p>
+
+<p>Celui-ci a paru dans l'ancien <i>Corsaire</i>.</p>
+
+<p>Ma chère, disait Mme F..... à son inséparable Mme X.,
+avez-vous vu les bêtes féroces de Mme Leprince, derrière
+le Château-d'Eau.</p>
+
+<p>--Non, ma toute belle.</p>
+
+<p>--Vous avez tort; c'est un spectacle très-curieux et
+qui m'a rappelé malgré moi l'histoire du <i>Lion de Damoclès</i>.</p>
+
+<p>--Et vous, ma bonne, avez-vous souscrit à l'épée
+d'honneur du colonel Forestier?</p>
+
+<p>--Non, ma chérie.</p>
+
+<p>--Il faut y souscrire. Ce sera un glaive magnifique
+et qui rappellera chaque jour à la réaction l'<i>épée
+d'Androclès</i>.</p>
+
+<p>Un grave espagnol arrivait, de nuit, dans un village
+de France qui n'avait qu'une seule hôtellerie. Il était
+plus de minuit; il frappa longtemps à la porte de
+cette hôtellerie, avant de pouvoir réveiller l'hôte; à la
+fin il le fit lever.--Qui est là? cria l'hôte par la
+fenêtre--C'est, dit l'espagnol, don Juan Pédro Hernandez
+Rodriguez de Villa-Nova, conde de Malafra,
+caballero de Santiago y d'Alcantara.</p>
+
+<p>L'hôte répondit aussitôt en fermant la fenêtre:--Monsieur,
+j'en suis bien fâché, mais nous n'avons pas
+assez de chambres pour loger tous ces messieurs-là.</p>
+
+<p>En 1758, au moment où l'on attendait d'heure en
+heure la mort du roi d'Espagne, qui était à toute
+extrémité, le duc de Newcastle, alors chancelier de
+l'échiquier, donna ordre à ses gens, s'il venait un
+exprès pour lui parler, fût-il deux heures du matin,
+de le laisser entrer. Sur les trois heures après minuit,
+un homme frappe à la porte de la cour; on l'introduisit
+sur-le-champ dans la chambre à coucher du
+duc:--Hé bien, mon ami, lui dit le lord en se hâtant
+de mettre ses bas et en fixant ses regards sur cet
+homme qui était crotté jusqu'aux épaules, vous devez
+être venu grand train?--Oh! oui, milord, je n'ai pas
+fermé l'oeil depuis mon départ!--Vous êtes sûr donc
+qu'il est mort?--Oh! très-sûr, le pauvre diable est
+délivré des peines de ce monde!--Dites-moi, quand
+avez-vous quitté Madrid?--Madrid! reprit l'homme avec
+la plus grande surprise; moi, milord, je n'y suis allé
+de ma vie.--Eh! d'où diable venez-vous donc?--De Richemond,
+comté d'York, et j'accours pour vous
+informer de la mort de Samuel Dickinson, le receveur
+de la barrière, dont votre seigneurie, lors de la dernière
+élection, m'a promis la place aussitôt qu'il fermerait
+l'oeil.</p>
+
+<p>Extrait littéral d'une séance du 22 juin 1792:</p>
+
+<p>Un membre demande la parole pour faire un rapport:--Il
+y a quelques jours, dit-il, que la municipalité
+de Langres arrêta des chevaux qui lui parurent
+suspects dans leur marche.</p>
+
+<p>On rit.--Comment, des chevaux suspects?</p>
+
+<p>--Ils comparurent devant la municipalité.</p>
+
+<p>Comment, dit-on, ces chevaux comparurent?</p>
+
+<p>L'orateur continue sans s'apercevoir de sa méprise:--On
+reconnut par leur interrogatoire...</p>
+
+<p>L'interrogatoire des chevaux!</p>
+
+<p>--Non, dit l'orateur, ce sont les conducteurs qui
+furent interrogés...</p>
+
+<p>L'assemblée rit très-fort et passa à l'ordre du jour.</p>
+
+<p>Dans un discours, (seconde République) P. Leroux
+a cité le proverbe latin: <i>Tot capita, tot sensus.</i>
+Greppo l'a immédiatement traduit par ces mots:
+«Autant de capitalistes, autant de sangsues.»</p>
+
+<p>Et dans la Republique de 1793, en parlant du coup
+d'État qui venait de renverser Robespierre, un orateur
+de la convention disait à la tribune:--Citoyens, la
+belle journée que la nuit du 9 thermidor!</p>
+
+<p>Un étranger très-riche, Suderland, naturalisé russe,
+était le banquier de la cour, et jouissait d'une assez
+grande faveur. Un matin, on lui annonce que sa maison
+est entourée de gardes, et que le maître de la police
+demande à lui parler.</p>
+
+<p>Cet officier, nommé Reliew, entre avec l'air consterné.--Monsieur
+Suderland, dit-il, je me vois, avec
+un vrai chagrin, chargé par ma gracieuse souveraine
+d'exécuter un ordre dont la sévérité m'effraie; et
+j'ignore par quelle faute ou par quel délit vous avez
+excité à ce point le ressentiment de Sa Majesté.</p>
+
+<p>--Moi! monsieur, répond le banquier, je l'ignore
+autant et plus que vous; ma surprise surpasse la
+vôtre. Mais enfin, quel est cet ordre?</p>
+
+<p>--Monsieur, reprend l'officier, en vérité le courage
+me manque pour vous le faire connaître.</p>
+
+<p>--Eh quoi! aurais-je perdu la confiance de l'impératrice?</p>
+
+<p>--Si ce n'était que cela, vous ne me verriez pas si désolé.
+La confiance peut revenir; une place peut être
+rendue.</p>
+
+<p>--Mais, s'agit-il donc de me renvoyer dans mon
+pays?</p>
+
+<p>--Ce serait une contrariété; mais avec vos richesses,
+on est bien partout.</p>
+
+<p>--Ah! mon Dieu! s'écrie Suderland tremblant,
+est-il question de m'exiler en Sibérie?</p>
+
+<p>--Hélas! on en revient.</p>
+
+<p>--De me jeter en prison?</p>
+
+<p>--Si ce n'était encore que cela, on en sort.</p>
+
+<p>--Bonté divine! voudrait-on me knouter?</p>
+
+<p>--Ce supplice est affreux, mais il ne tue pas.</p>
+
+<p>--Eh quoi! dit le banquier en sanglotant, ma vie
+est-elle en péril? l'impératrice si bonne, si clémente,
+qui me parlait encore si doucement il y a deux jours,
+elle voudrait.... Mais, je ne puis le croire. Ah! de
+grâce, achevez; la mort serait moins cruelle que cette
+attente insupportable.</p>
+
+<p>--Eh bien! mon cher, dit enfin l'officier de police
+avec une voix lamentable, ma gracieuse souveraine
+m'a donné l'ordre de vous faire empailler.</p>
+
+<p>--Empailler? s'écrie Suderland, en regardant fixement
+son interlocuteur. Mais vous avez perdu la raison,
+ou l'impératrice n'a pas conservé la sienne; enfin
+vous n'avez pas reçu un pareil ordre sans en faire
+sentir la barbarie et l'extravagance?</p>
+
+<p>--Hélas! mon pauvre ami, j'ai fait ce qu'ordinairement
+nous n'osons jamais tenter. J'ai marqué ma
+surprise, ma douleur; j'allais hasarder d'humbles
+remontrances, mais mon auguste souveraine, d'un
+ton irrité, en me reprochant mon hésitation, m'a
+commandé de sortir et d'exécuter sur-le-champ l'ordre
+qu'elle m'avait donné.</p>
+
+<p>Il serait impossible de peindre l'étonnement, la
+colère, le tremblement, le désespoir du pauvre banquier.
+Après avoir laissé quelque temps un libre cours
+à sa douleur, le maître de la police lui accorde un
+quart d'heure pour mettre ordre à ses affaires.</p>
+
+<p>Alors Suderland le prie, le conjure, le presse longtemps
+en vain de lui laisser écrire un billet à l'impératrice
+pour implorer sa pitié. Le magistrat, vaincu
+par ses supplications, cède en tremblant à ses prières,
+se charge de son billet, sort, et n'osant aller au palais,
+se rend précipitamment chez le comte de Bruce. Celui-ci
+croit que le maître de la police est devenu fou; il
+lui dit de le suivre, de l'attendre dans le palais, et
+court sans tarder chez l'impératrice. Introduit chez
+cette princesse, il lui expose le fait.</p>
+
+<p>Catherine, en entendant cet étrange récit, s'écrie:--Juste
+ciel! quelle horreur! en vérité, Reliew a
+perdu la tête. Comte, partez, courez et ordonnez à cet
+insensé d'aller tout de suite délivrer mon pauvre banquier
+de ses folles terreurs, et de le mettre en liberté.</p>
+
+<p>Le comte sort, exécute l'ordre, revient, et trouve
+avec surprise Catherine riant aux éclats.</p>
+
+<p>«Je vois à présent, dit-elle, la cause d'une scène
+aussi burlesque qu'inconcevable. J'avais, depuis quelques
+années, un joli chien que j'aimais beaucoup, et
+je lui avais donné le nom de Suderland, parce que
+c'était celui d'un anglais qui m'en avait fait présent.
+Ce chien vient de mourir; j'ai ordonné à Reliew de
+le faire empailler, et, comme il hésitait, je me suis
+mise en colère contre lui, pensant que, par une vanité
+sotte, il croyait une telle commission au-dessous
+de sa dignité. Voilà le mot de cette ridicule énigme.»</p>
+
+<h4>QUINT</h4>
+
+<p>Brunet disait:--La famille <i>Quint, qui n'a</i> pas
+manqué de faire du bruit, n'a pourtant produit que
+trois grands hommes:--Quint-Curce, Charles-Quint
+et Sixte-Quint.</p>
+
+<h4>QUOLIBET</h4>
+
+<p>Caprice plus ou moins piquant. On en trouve de
+temps en temps dans les journaux, exemple:</p>
+
+<p>Un jeune berger des environs d'Yvetot n'a jamais
+pu apprendre le <i>Pater Noster</i>, quoiqu'il sache parfaitement
+<i>Notre Père</i>.--Comment, lui dit, il y a environ
+six semaines, le bon curé de sa commune, tu ne veux
+pas incruster dans ta mémoire l'oraison dominicale
+en latin?--Je peux point, moussieu le curai.--Veux-tu
+que je t'enseigne le moyen de l'apprendre?--Je
+veux bien, moussieu le curai.--Eh bien, il
+faut nommer tes moutons par les mots que tu ne
+peux pas retenir; ainsi, par exemple, ce grand cornu
+s'appellera <i>Pater</i>: cet autre gros et gras, <i>Noster</i>; ce
+tout petit, <i>qui es</i>, etc.; de manière que ta mémoire,
+guidée par ces mois...--J'entends, j'entends, moussieu
+le curai, et pis d'ailleurs ma soeur Jeanneton sait
+lire; alle m'enseignera.</p>
+
+<p>Avant-hier, le bon curé l'aperçoit conduisant ses
+moutons...--Ah! voyons, lui dit-il, puisque ton troupeau
+est là, si tu sais ton <i>Pater</i>.--Si je l'sais, moussieu
+l'curai! j'crais bien! allais marchais, je les appelons
+si bien, qu'on dirait que j'lis tout coursement--Voyons...--<i>Pater</i>...--Bon!--<i>Noster</i>...--Bon!--<i>Nomen!</i>...
+<i>Tuum!</i>...--Un instant, un instant!...
+et <i>Sanctificetur</i>?--Ah! pardon excuse, mon bon
+moussieu le curai! J'ons oublié de vo dire que nout'-maître
+a vendu et livré <i>Sanctificetur</i> à deux de ses
+vésins pour leur mardi gras!...</p>
+
+<p>Des plaisants ont attribué au maire d'une commune,
+dont on ne trouve pas le nom sur la carte, l'affiche
+suivante:</p>
+
+<p><span class="sc">Art. 1.</span>--Toutes les fois qu'un habitant et des
+chiens non muselés se rencontreront, on devra les tuer.</p>
+
+<p><span class="sc">Art. 2.</span>--Tout le monde, sans exception, est tenu
+d'obéir au précédent article, et de massacrer les chiens,
+excepté M. l'adjoint.</p>
+
+<p><span class="sc">Art. 3.</span>--Les habitants majeurs et vaccinés devront
+également, dimanche prochain, se rendre sur la place,
+moins les malades, pour nettoyer l'égout, en présence
+de l'adjoint, qu'on devra racler proprement, et du
+garde-champêtre, parce qu'il est obstrué par les immondices.</p>
+
+<p>Ajoutons aussi cette lettre d'un père à son fils.</p>
+
+<p>«Mon fils, l'objet de la présente est de te prévenir
+que je suis fort mécontent de toi, et que si les coups
+de bâton s'écrivaient, tu recevrais souvent de mes
+nouvelles. Ta mère te gâte toujours; et pour preuve,
+tu trouveras ci-joint cinq francs, qu'elle t'envoie à
+mon insu.»</p>
+
+<p>Un homme qui n'avait qu'un pantalon et qui l'avait
+donné à sa blanchisseuse disait:--j'irais bien chercher
+mon pantalon, mais pour l'aller chercher il faudrait
+que je l'eusse.</p>
+
+<p>Cette tournure de phrase rappelle un autre mot
+d'Odry:--Je n'aime pas les épinards; et c'est heureux,
+car si je les aimais, j'en mangerais; et je ne
+peux pas les souffrir.</p>
+<br>
+<h2>R</h2>
+
+<p>Un paillasse disait:--J'aime mieux être railleur
+que tailleur, parce que l'un prend l'R, et que l'autre
+ne prend que le T.</p>
+
+<h4>RACINE</h4>
+
+<p>Dans un cabaret, un commis voyageur combattant
+les propositions d'un paysan bel esprit, lui disait:--Écoutez
+là-dessus l'opinion de Racine...</p>
+
+<p>--Quelle racine? interrompit le paysan; est-ce la
+racine grecque? j'en ai entendu parler; mais je ne
+sais pas ce que c'est. Est-ce la racine radix qui guérit
+les maux de dents? Est-ce la racine cube ou la racine
+carrée, qui sont dans la bouche du maître d'école?
+Est-ce la racine des cheveux? la racine de tremble?
+la racine d'avoine? la racine du buis? la racine des
+choux?...</p>
+
+<p>Le bavard allait poursuivre longtemps encore, lorsque
+le commis voyageur s'écria:</p>
+
+<p>--Racine est un poëte.</p>
+
+<p>--Singulier nom pour un poëte. Qu'est-ce qu'il faisait
+ou qu'est-ce qu'il fait, s'il est vivant?</p>
+
+<p>--Il n'est plus vivant. Il faisait des vers.</p>
+
+<p>--Des verres à vin ou des verres à bière? des verres
+à vitres? des...</p>
+
+<p>--Taisez-vous donc et laissez-moi placer un mot.
+Si vous refusez d'acheter mon vin aujourd'hui, parce
+que vous comptez sur une température qui fera baisser
+les prix, ne vous y fiez pas; car Racine disait.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Ma foi sur l'avenir bien fou qui se fiera:</p>
+<p class="i16">Tel qui rit vendredi, dimanche pleurera.</p>
+</div></div>
+
+<p>Lorsqu'on eut joué avec applaudissements au Théâtre-Français
+la tragédie d'<i>Hernani</i> de M. Victor Hugo,
+les partisans du romantique, quand même, s'écrièrent
+que la tragédie était <i>déracinée</i>.</p>
+
+<p>Mais peu après, la vogue de Mlle Rachel fit voir que
+Racine ne se <i>déracine</i> pas.</p>
+
+<h4>RACOLLEUR</h4>
+
+<p>Un marchand de Paris avait pour enseigne un rat
+qui collait une affiche, avec cette légende: <i>Au rat
+colleur.</i></p>
+
+<h4>RACCOMMODEMENTS</h4>
+
+<p>En affections troublées, les raccommodements ne
+sont que des raccommodages.</p>
+
+<h4>RADIS</h4>
+
+<p>Lord Palmerston demandait un jour en société:--Pourquoi
+les radis sont-ils d'un grand poids dans
+la balance de la justice?</p>
+
+<p>--Parce qu'ils sont toujours crus, répondit M. le
+comte d'Aberdeen, qui aime passionnément ce genre
+de légumes.</p>
+
+<h4>RAISON</h4>
+
+<p>Le duc de Vendôme disait assez plaisamment:--Dans
+la marche des armées, j'ai souvent examiné les
+querelles des mulets et des muletiers; et j'ai remarqué
+qu'à la honte de l'humanité, la raison était presque
+toujours du côté des mulets.</p>
+
+<p>Deux paysans terminaient un procès par un arrangement:--Celui
+qui avait tort s'obligeait à livrer
+à l'autre, dans trois mois, pour l'indemniser, un
+cochon?--Mais, quel cochon? demanda l'arbitre.
+Un petit cochon n'en vaut pas un gros. Quel poids
+aura-t-il?--Écrivez, répondit le premier: «Un
+cochon raisonnable.»</p>
+
+<h4>RAMPON</h4>
+
+<p>Quand le premier consul Bonaparte voulut récompenser
+les services qui avaient illustré depuis dix ans
+la carrière militaire du général Rampon, il fit savoir
+au conseil des Cinq Cents, qui, dans la constitution
+d'alors, avait le privilège de présenter une liste de
+trois noms, parmi lesquels le premier consul choisissait
+celui qu'il jugeait digne du titre de sénateur, qu'il
+désirait qu'on portât le général Rampon. L'assemblée
+accueillit cette communication avec sympathie. Mais
+il y avait alors dans les Cinq Cents un prêtre marié
+nommé Lecerf, dont les opinions républicaines conservaient
+la teinte de 93. Il crut faire acte de courage
+et de malice, en écrivant sur son bulletin: <i>Puisqu'il
+faut ramper</i>, <span class="sc">Rampon</span>. Le premier consul ne fit que
+rire du calembour.</p>
+
+<h4>RASER</h4>
+
+<p>Peu de jours après son arrivée à la Bastille, Linguet
+voit entrer dans sa chambre un grand homme sec qui
+lui cause quelque frayeur.</p>
+
+<p>--Qui êtes-vous, monsieur? lui dit-il.</p>
+
+<p>--Je suis le barbier de la Bastille.</p>
+
+<p>--Parbleu! vous auriez bien dû la raser.</p>
+
+<h4>RASSIS</h4>
+
+<p>Un épicier, sur le boulevard du Temple, à Paris, avait
+pour enseigne un tableau représentant deux rats sciant
+un pain de sucre, avec cette devise: <i>Au pain de sucre
+rats scient</i>.</p>
+
+<h4>RATAFIA ET BARNABÉ</h4>
+
+<p>--Quels sont les inventeurs des deux premières
+lettres de l'alphabet?--Rata et Barna. <i>Rata fit</i> A et
+<i>Barna</i> B.</p>
+
+<h4>RÉBUS</h4>
+
+<p>Farce énigmatique, aujourd'hui plus en vogue que
+jamais, composée de figures et de lettres dont l'arrangement,
+le nombre, la couleur, expriment un mot, un
+nom ou une pensée. Pour signifier <i>vieux parchemin</i>,
+on peint un vieillard qui chemine, appuyé sur un
+bâton. Pour exprimer ces paroles: <i>J'ai soupé entre
+six et sept</i>, on a mis un G sous un P, entre les deux
+chiffres 6 et 7.</p>
+
+<p>Le Français, né malin, emploie quelquefois le rébus
+avec finesse. Parmi les hiéroglyphes ou caricatures qui
+tapissaient, en l'an VII, les boutiques des marchands
+d'estampes, on en distinguait une à qui l'événement
+donna, en quelque sorte, le mérite de la prophétie. Le
+dessinateur avait représenté les membres du Directoire,
+et, au-dessous, une lancette, une laitue et un
+rat; ce qui, aux yeux des connaisseurs, signifiait:
+<i>L'an</i> VII <i>les tuera</i>.</p>
+
+<p>En effet, en l'an VII (nouveau style), Bonaparte revint
+tout à coup d'Égypte; et si ce retour inopiné ne
+tua point les directeurs, il tua le directoire.</p>
+
+<p>M. Flamand, médecin, ne montait jamais sa garde,
+c'est un fait reconnu; mais, en revanche, lorsqu'il
+était cité devant le conseil de discipline, il y envoyait
+des missives originales. En voici une:</p>
+
+<p><span class="sc">Le président.</span>--Messieurs, le docteur Flamand,
+assigné pour avoir manqué sa garde, me fait parvenir
+le billet suivant, que je livre à vos méditations, n'y
+comprenant rien du tout:</p>
+
+<pre>
+Aves Par suite de plusieurs Aves
+Prendre Je n'ai pu, messieurs, Prendre
+Nous De monter la garde; Nous
+Pot Je n'ai pu quitter l' Pot
+E Où mon vin était E
+Voir Pourtant on me fait Voir
+Ainés Que vous allez être Ainés
+Quatre murs A me mettre Quatre murs
+Ouverte Voyant ma prison Ouverte
+Vue J'ai différé notre Vue
+Mise D'un ami j'ai pris l' Mise
+Faites Espérant sur ces Faites
+Ailles Ne pas vous trouver sans Ailles.
+</pre>
+
+<p>Après avoir longtemps examiné le billet, le conseil
+interpelle un monsieur qui l'a apporté, et demande ce
+que c'est.</p>
+
+<p><span class="sc">Le monsieur.</span>--C'est un rébus (Rires.)</p>
+
+<p><span class="sc">Le président.</span>--Encore faut-il en avoir la clef?</p>
+
+<p><span class="sc">Le monsieur.</span>--C'est facile. Voici comment l'excuse
+de mon ami se lit:</p>
+
+<p>«Par suite de plusieurs entraves, je n'ai pu, Messieurs,
+entreprendre de monter la garde; entre nous,
+je n'ai pu quitter l'entrepôt où mon vin était entré.
+Pourtant on me fait entrevoir que vous allez être entraînés
+à me mettre entre quatre murs: voyant ma
+prison entr'ouverte, j'ai différé notre entrevue. D'un
+ami j'ai pris l'entremise, espérant, sur ces entrefaites,
+ne pas vous trouver sans entrailles.»</p>
+
+<p>Au milieu du rire général, l'officieux ami du docteur
+Flamand entend condamner ce savant à vingt-quatre
+heures de prison.</p>
+
+<h4>RECEVOIR</h4>
+
+<p>Un marchand présentait une requête à un très-grand
+seigneur pour être payé de ses fournitures.--Est-ce
+que vous n'avez rien reçu, mon ami, sur votre mémoire?--Je
+vous demande pardon, Monseigneur, j'ai
+reçu un soufflet de votre intendant.</p>
+
+<h4>RÉCHAUD</h4>
+
+<p>Une jeune fille répétait une ariette.--Voilà un <i>ré</i>
+trop froid, lui dit son maître de musique.--Si vous
+voulez un <i>ré chaud</i>, répondit la jeune fille, on le trouve
+à la cuisine.</p>
+
+<h4>RECONNAISSANCE</h4>
+
+<p>On donne ce nom aux reçus du Mont-de-Piété, lorsqu'on
+y a déposé des gages.</p>
+
+<p>--L'ingratitude est à son comble dans Paris, dit un
+mauvais plaisant; sans le Mont-de-Piété, on n'y trouverait
+plus de reconnaissance.</p>
+
+<h4>RECONNAITRE</h4>
+
+<p>Terme de l'argot militaire. En voici l'application,
+qui fut faite par la feue garde nationale de Louis-Philippe:</p>
+
+<p>Un capitaine de ronde s'était arrêté devant un poste
+de la garde nationale et attendait que le chef de poste
+vînt le reconnaître:</p>
+
+<p>Il attendit dix minutes... Personne ne venait.</p>
+
+<p>Impatienté, il pousse la porte et s'écrie:</p>
+
+<p>--Ah ça! viendrez-vous me reconnaître?</p>
+
+<p>--Impossible! fit un caporal qui gardait le poste,
+le lieutenant est parti.</p>
+
+<p>--Eh bien?</p>
+
+<p>--Eh bien! comment voulez-vous que je vous reconnaisse,
+moi? Je ne vous ai jamais vu!</p>
+
+<h4>RECULER</h4>
+
+<p><i>Avance, Hercule!</i> dit Cadet Roussel, professeur
+de déclamation, dans une leçon qu'il donne à son
+élève.</p>
+
+<p>--Comment! <i>avance et recule</i>, répond l'autre, qui
+ne comprend pas qu'on s'adresse au plus redoutable
+des demi-dieux.</p>
+
+<p>Un Gascon disait qu'il n'avait jamais achevé les leçons
+de danse que son maître avait commencé à lui
+donner, parce que, quand il avait fallu former le pas
+en arrière, il n'avait pu s'y déterminer, de peur qu'il
+ne fût dit qu'une fois en sa vie il avait reculé.</p>
+
+<h4>REDONDANCE</h4>
+
+<p>Commerson a dit:--Aujourd'hui tout le monde
+pose. L'homme propose; la femme dispose; l'industrie
+expose; le commerce dépose; les consciences composent;
+les grands hommes se reposent.</p>
+
+<p>Il pourrait ajouter ce qu'un amateur oppose: Que
+le chimiste décompose; que le conspirateur suppose;
+que l'État impose; que le mauvais vin indispose; que
+les compilateurs transposent.</p>
+
+<h4>REDRESSER</h4>
+
+<p>Un bossu, qui se lançait dans le monde, disait à son
+ami:</p>
+
+<p>--Si tu me vois faire quelque chose de gauche,
+redresse-moi.</p>
+
+<p>--Je t'avertirai, dit l'autre; mais je ne pourrais
+pas te redresser.</p>
+
+<h4>RÉFLÉCHIR</h4>
+
+<p>--Pourquoi un miroir est-il muet?--Parce qu'il
+réfléchit.</p>
+
+<h4>REGARDER</h4>
+
+<p>Ce mot a plusieurs sens. On sait que Lacondamine
+était très-indiscret. Un jour qu'il jetait un regard
+curieux sur une lettre qu'un de ses amis écrivait, celui-ci
+lui dit:--Mon ami, tu regardes ce qui ne te
+regarde pas.</p>
+
+<h4>RELEVER</h4>
+
+<p>Un homme que l'on avait placé en faction, et qui
+était gris, tomba par terre et y resta; le caporal, passant
+par là, lui dit:--Malheureux! que fais-tu là? Si
+l'officier te voyait, tu irais en prison.--Pourquoi? répondit
+le soldat; quel mal ai-je fait en me mettant par
+terre, puisqu'on m'a dit que toutes les deux heures on
+relevait les sentinelles.</p>
+
+<h4>RELIRE ET RELIER</h4>
+
+<p>Un homme riche, qui ne lisait guère, disait:--Je
+relis Montaigne pour la sixième fois.--Monsieur est
+relieur? lui dit un auditeur qui le connaissait.</p>
+
+<h4>REMISE</h4>
+
+<p>--Vous allez vous marier, Monsieur?--Oui, Jocrisse;
+et j'y vais sans remise, entends-tu bien.--Là-dessus,
+Jocrisse descend et dit à la portière:--Allez chercher
+une voiture; et, comme Monsieur ne veut pas de <i>remise</i>,
+amenez un fiacre.</p>
+
+<h4>REMONTER</h4>
+
+<p>Un ménage avait descendu ses meubles à Paris, du
+troisième étage au rez-de-chaussée. Au bout de quelques
+jours, on dit à une fille de boutique un peu obtuse:--Prudence,
+il faut remonter la pendule.--Elle
+la remonta au troisième étage.</p>
+
+<h4>RENDRE</h4>
+
+<p>Une femme, ayant reçu un soufflet de son mari, alla
+consulter un avocat pour savoir si elle pourrait à
+cause de ce fait obtenir sa séparation. Le mari, sachant
+qu'elle avait fait cette démarche, lui demanda d'un
+air goguenard quel parti elle allait tirer de son soufflet!</p>
+
+<p>--Comme on m'a dit que je n'en pourrais rien
+faire, répliqua-t-elle, je vous le rends.</p>
+
+<p>Ce qu'elle fit et fit bien.</p>
+
+<p class="mid">DIATRIBE SUR LE MOT RENDRE.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Le mot de rendre est bon, je le sais bien;</p>
+<p class="i16">Mais coup sur coup le répéter sans cesse,</p>
+<p class="i16">Autre chose est. Alors il ne vaut rien.</p>
+<p class="i16">Il faut, dis-tu, rendre à chacun le sien;</p>
+<p class="i16">Ce fonds rend tant. Quand un lavement presse,</p>
+<p class="i16">Il faut le rendre; Alain se rend chartreux;</p>
+<p class="i16">Jean voit Lisette, il s'en rend amoureux;</p>
+<p class="i16">Le roi se rend à Mons, qui va se rendre;</p>
+<p class="i16">Il se rendra tôt maître de la Flandre.</p>
+<p class="i16">Tu rends en cour mille respects aux grands,</p>
+<p class="i16">En ta maison mille soins à ta femme;</p>
+<p class="i16">Fèves pour pois tu fais bien rendre aux gens,</p>
+<p class="i16">Rendeur bavard, qui tant de choses rends,</p>
+<p class="i16">L'un de ces jours puisses-tu rendre l'âme!</p>
+</div></div>
+
+<h4>RENIER</h4>
+
+<p>Au bas de la statue pédestre élevée à la gloire de
+Louis XIV, au milieu de la place des Victoires, à Paris,
+on lisait d'assez mauvais vers faits par un nommé
+Renier, de l'Académie française. Quand on demandait
+à Santeul ce qu'il pensait de ces vers, il disait:--Ce
+sont des vers à Renier.</p>
+
+<h4>REPAS</h4>
+
+<p>Quels sont les hommes les plus sobres?--Les couteliers,
+parce qu'ils font des repassages.</p>
+
+<h4>RÉPLIQUES</h4>
+
+<p>Un capitaine de vaisseau, ayant besoin de la protection
+d'un premier commis de la marine, qui avait
+une merveilleuse adresse à tirer parti de sa place, lui
+envoya une balle de café.</p>
+
+<p>--Qu'est-ce que cela? demanda le bureaucrate au
+domestique qui accompagnait le message.</p>
+
+<p>--Monsieur, c'est une balle de café moka que mon
+maître vous prie d'accepter.</p>
+
+<p>--C'est bon; laissez cela là, et allez dire à votre
+maître que je ne prends pas mon café sans sucre.</p>
+
+<p>Louis XIV parlait un jour du pouvoir que les rois
+ont sur leurs sujets; le comte de Guiche osa prétendre
+que ce pouvoir avait des bornes; mais le roi n'en voulant
+admettre aucune, lui dit avec emportement:--Si
+je vous ordonnais de vous jeter à la mer, vous
+devriez, sans hésiter, y sauter la tête la première. Le
+comte, au lieu de répliquer, se retourna brusquement
+et prit le chemin de la porte. Le roi lui demanda avec
+étonnement où il allait.--Apprendre à nager, sire,
+lui répondit-il. Louis XIV se mit à rire, et la conversation
+en resta là.</p>
+
+<p>Mais ce récit n'est qu'un conte.</p>
+
+<p>On répétait, devant Martainville, cette maxime si
+connue: Qui paie ses dettes s'enrichit.--Bah! bah!
+répondit-il; c'est un bruit que les créanciers font
+courir.</p>
+
+<p>--O Julie, disait sentimentalement un jeune amoureux,
+la première fois que vous me parlerez ainsi, je
+me tuerai à vos pieds!--Et la seconde fois? répondit
+la demoiselle.</p>
+
+<p>Piron, dînant chez madame ***, se livra à quelques
+sarcasmes violents qui déplurent.--Vous êtes un
+cheval, lui dit cette dame. Le poëte se lève de table,
+tenant sa serviette à la main.</p>
+
+<p>--Où allez-vous donc?--A l'écurie.--Vous n'avez
+pas besoin de serviette.</p>
+
+<p>Un petit prince d'Italie envoya dire à un étranger
+de sortir dans vingt-quatre heures de ses États.--Il
+me fait trop de grâce, répondit celui-ci; je n'ai
+besoin que de trois quarts d'heure pour en être dehors.</p>
+
+<p>Un matin, sur un banc du Luxembourg, un jeune
+homme timide, qui voulait engager conversation avec
+une jeune personne placée à côté de lui, saisit adroitement
+le moment où un insecte montait sur son
+châle pour dire:--Mademoiselle, je vous préviens
+que vous avez une bête derrière vous.--Ah! mon
+Dieu! monsieur, dit la dame en se retournant étonnée
+et comme effrayée, je ne vous savais pas là.</p>
+
+<p>On reprochait à l'abbé Terrai qu'une de ses opérations
+ressemblait fort à prendre l'argent dans les
+poches. Il répondit:--Eh! où voulez-vous donc que
+je le prenne?</p>
+
+<p>A Naples, un commandeur de Malte, homme riche
+et avare, laissait user sa livrée au point qu'un savetier
+du voisinage, voyant les habits de ses gens tout
+troués, s'en moquait. Ils s'en plaignirent à leur maître,
+qui fit venir le savetier et le tança sur son insolence.--Moi!
+Monseigneur, c'est une calomnie. Je sais trop le
+respect que je dois à Votre Excellence, pour me moquer
+de sa livrée.--On dit pourtant que tu ris sans cesse
+en voyant les habits de mes gens.--Il est vrai,
+Monseigneur; mais c'est des trous que je ris, et à
+ces trous il n'y a pas de livrée.</p>
+
+<p>--Mon ami, n'êtes-vous pas janséniste? disait un
+confesseur à son pénitent.--Non, mon père, je suis
+ébéniste.</p>
+
+<p>Le comte d'Alets, passant par Lyon, fut conduit
+chez le lieutenant du roi, qui, ne le connaissant pas,
+le reçut avec hauteur et lui dit:</p>
+
+<p>--Mon ami, que disait-on à Paris quand vous en
+êtes sorti?</p>
+
+<p>--Des messes, répondit le comte d'Alets.</p>
+
+<p>--Mais je vous demande ce qu'il y a de nouveau?</p>
+
+<p>--Des pois-verts.</p>
+
+<p>--Mon ami, vous êtes plaisant. Comment vous appelez-vous.</p>
+
+<p>--À Lyon, les sots m'appellent mon ami; à Paris,
+on m'appelle le comte d'Alets.</p>
+
+<h4>REPOS</h4>
+
+<p>Une actrice nouvelle, qui jouait à Londres le rôle
+de lady Anne dans la tragédie de Richard III, ayant
+répété ce passage:</p>
+
+<p class="mid">Ah! quand aurai-je un peu de repos!</p>
+
+<p>Un de ses créanciers qui était au parterre lui cria:--Jamais,
+si vous ne me payez pas les trente schellings
+que vous me devez.</p>
+
+<h4>REPRÉSENTÉ</h4>
+
+<p>On disait à un représentant, avant le 18 brumaire,
+qu'il y avait parmi eux de grands scélérats. Il répondit
+que dans un grand État il fallait que tout le monde
+fût représenté.</p>
+
+<h4>RESSORT</h4>
+
+<p>Ce mot a plusieurs sens, comme on le voit dans
+cette boutade faite au milieu du XVIIe siècle contre le
+parlement. L'esprit alors n'était pas si délicat qu'aujourd'hui:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Emmitouflés de robes rouges,</p>
+<p class="i20">Qui jugez souverainement,</p>
+<p class="i20">Auguste et grave parlement,</p>
+<p class="i20">Qui faites vos lois dans vos bouges,</p>
+<p class="i20">Croyez-vous être bien bravés</p>
+<p class="i20">Quand vous dites que vous avez</p>
+<p class="i20">Quantité de ressorts en France?</p>
+<p class="i20">Un avantage si commun</p>
+<p class="i20">N'est pas de grande conséquence:</p>
+<p class="i20">Mon tourne-broche en a bien un.</p>
+</div></div>
+
+<h4>RESTAURER</h4>
+
+<p>Le dîner splendide que le duc de Penthièvre donna
+aux membres de l'Académie, le lendemain de la réception
+du chevalier de Florian, valut à ce prince le
+titre de <i>restaurateur</i> de l'Académie française.</p>
+
+<h4>RESTER</h4>
+
+<p>Je vois douze pigeons sur un arbre, je tire sur eux,
+j'en tue cinq. Combien en reste-t-il?</p>
+
+<p>--Il en est resté sept.</p>
+
+<p>--Non, il n'en reste point, parce que les autres se
+sont envolés.</p>
+
+<h4>RETARD</h4>
+
+<p>--Ma montre retarde de deux heures, disait un
+étudiant à un autre étudiant.--La mienne, répond
+celui-ci, retarde de 200 francs.</p>
+
+<p>Il l'avait mise au Mont-de-Piété.</p>
+
+<h4>RÉUNION</h4>
+
+<p>On lisait dernièrement dans un journal du Bas-Rhin
+cette phrase textuelle: «De magnifiques fêtes se préparent
+à Strasbourg, en l'honneur de l'anniversaire
+de <i>la réunion de la France à l'Alsace</i>.»</p>
+
+<p>Cette manière d'entendre cette réunion nous rappelle
+la joie naïve de ce Génevois qui, à l'époque où sa
+ville natale devenait la capitale du département du
+Lac-Léman, s'écriait avec une satisfaction enthousiaste:</p>
+
+<p>--Dieu me damne! la nouvelle est bonne. On
+vient de réunir la France à Genève.</p>
+
+<h4>RHUBARBE</h4>
+
+<p>Lorsqu'en 1793 on eut supprimé les saints à Paris,
+on ôta cette désignation aux écriteaux des rues. On
+appela donc la rue Saint-Antoine rue Antoine, la rue
+Sainte-Barbe, rue Barbe et ainsi des autres. Un provincial
+demandait un jour au commissionnaire du
+coin la rue Barbe.</p>
+
+<p>--La <i>rhubarbe</i>, répondit l'autre; entrez là chez
+l'apothicaire.</p>
+
+<h4>RIME ET RAISON</h4>
+
+<p>La comtesse de La Suze, que ses poésies ont rendue
+célèbre, plaidait au Parlement de Paris contre la duchesse
+de Châtillon. Ces deux dames se rencontrèrent
+dans la grande salle du Palais. Le duc de la Feuillade
+donnait la main à la duchesse; il dit à Madame de La
+Suze, qui était accompagnée de Benserade et de quelques
+autres poëtes:</p>
+
+<p>--Madame, si vous avez la rime de votre côté,
+nous avons la raison du nôtre.</p>
+
+<p>La comtesse repartit aussitôt:</p>
+
+<p>--Ce n'est donc pas sans rime ni raison que nous
+plaidons.</p>
+
+<h4>RICHELIEU</h4>
+
+<p>Dans les épigrammes que subit ce grand ministre,
+nous avons toujours remarqué celle-ci, à cause du jeu
+de mots:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Jésus-Christ vint de pauvre lieu</p>
+<p class="i20">Apportant la paix sur la terre.</p>
+<p class="i20">S'il fût venu de Richelieu,</p>
+<p class="i20">Il nous eût amené la guerre.</p>
+</div></div>
+
+<h4>RIVAROL</h4>
+
+<p>Il disait de M. Le Tonnelier de Breteuil, ambassadeur
+de France à Vienne:--Il aurait dû raccommoder
+les cercles de l'empire.</p>
+
+<p>Il disait en parlant d'Arnaud Baculard:--Ses idées
+ressemblent à des carreaux de vitre entassés dans le
+panier d'un vitrier, claires une à une, et obscures
+toutes ensemble.</p>
+
+<h4>RIVE</h4>
+
+<p>Après, la mort de l'acteur Lekain, tragédien renommé,
+Larive fut choisi pour le remplacer dans les grands
+rôles. Les critiques dirent bientôt:--Lekain, en passant
+le Styx, n'a pas laissé son talent à la <i>rive</i>.</p>
+
+<h4>ROGNER LES LIVRES</h4>
+
+<p>Jobin plaidait contre son relieur. Son débat ayant
+produit de curieux contre-sens par suite de mots rognés,
+nous en citons ici quelques passages que les
+journaux ont rapportés:</p>
+
+<p><span class="sc">Le Juge.</span>--Reconnaissez-vous que le demandeur a
+travaillé pour vous?</p>
+
+<p><span class="sc">Jobin.</span>--Joli travail... Je lui en ferai mon compliment
+un de ces jours, quand il repassera... C'est du
+propre... En vérité, je ne comprends pas l'audace de ce
+Monsieur... c'est comme si, après m'avoir jeté un pot
+à fleurs sur la tête, il me demandait une indemnité
+pour la casse... il peut en rire... Permettez-moi d'en
+rire.</p>
+
+<p><span class="sc">Le Juge.</span>--Mais enfin, que lui reprochez-vous?</p>
+
+<p><span class="sc">Jobin.</span>--Voici le fait; il est odieux... Je suis abonné
+au <i>Corsaire</i> depuis cinq ans... cette feuille me plaît...
+elle est fort gaie, je suis fort gai, nous sommes faits
+l'un pour l'autre. (Rires.) Un jour, il me prit l'envie de
+faire relier ma collection... j'ai eu l'imprudence de la
+confier à cet être (il montre son adversaire). Ça s'intitule
+relieur, ça... si ça ne fait pas suer... Faites des
+bottes de foin, mon cher, reliez des asperges... mais
+des livres, plus souvent! (On rit).</p>
+
+<p><span class="sc">Le Juge.</span>--Modérez-vous, et n'insultez personne.</p>
+
+<p><span class="sc">Jobin.</span>--C'est vrai, je m'exalte, j'ai tort... Je reviens
+au fait. Ce délicieux, ce charmant, cet adorable relieur...
+c'est écrit sur sa boutique, parole d'honneur:
+<i>M. D...</i>, <i>relieur</i>... Enfin, ce délicieux, ce charmant,
+cet adorable relieur me garda ma collection trois mois:
+premier grief... Je continue. Au bout de ce laps de
+temps, il me la rapporte <i>rognée</i>, à ce qu'il disait;
+j'examine la fourniture... Au dehors, ça pouvait encore
+passer... mais voilà que je m'avise d'ouvrir un
+volume... (Élevant la voix.) Oh! grands dieux! que
+vois-je? pas de marge, pas la moindre petite marge...
+Bien mieux, l'impression même était rognée... l'instrument
+tranchant avait mordu sur presque toutes les
+colonnes.</p>
+
+<p><span class="sc">Le Relieur.</span>--C'est faux!</p>
+
+<p><span class="sc">Jobin.</span>--Ah! c'est faux... Je suis enchanté que vous
+ayez dit ça... J'ai ici la preuve; j'ai apporté un volume
+de ma malheureuse collection. (Au juge.) Vous
+allez voir dans quel état il l'a mise... et si ça ne crie
+pas vengeance... Tenez, je vais vous citer des exemples
+sur différentes divisions du journal. Commençons par
+la politique; je lis, page 30: <i>Le gouvernement marchera
+toujours mal avec un cor</i>... (On rit.) Il y avait
+avec un cortège de flatteurs.» Mais ce n'est rien encore.
+Passons à la politique extérieure; je lis page 203:
+«<i>En ce moment la Grèce doit</i>...» (Hilarité.) Je vous
+demande pardon du calembour... Monsieur a rogné
+la suite: «La Grèce doit... veiller à ses intérêts»
+J'arrive à l'article théâtre où je trouve: <i>La voix de
+Madame Stolz est tous les jours en progrès, c'est la
+voix d'une sy</i>... (Rires.) Le reste est coupé... «La voix
+d'une syrène.» Je termine par deux autres citations.
+Dans un article de modes, on peut lire: <i>Le salon des
+Modes Françaises, 20, rue d'Antin, est toujours cité
+par ses cha</i>... (Grande hilarité.) Sous-entendu «peaux.»
+Et enfin, dans un article de critique littéraire, je
+vois: <i>Madame Anaïs Ségalas vient encore de mettre
+au four un petit vo</i>... (Explosion de rires.) La fin manque...
+L'auteur a voulu dire <i>volume</i>. (On rit.) Je crois
+n'avoir pas besoin de vous en dire davantage, et vous
+comprendrez maintenant pourquoi je refuse de payer
+à Monsieur le montant de sa facture. Quant aux dommages-intérêts
+auxquels j'aurais droit... eh bien,
+voyons, je suis généreux, j'y renonce, j'y renonce,
+(avec éclat) j'y renonce! (On rit.)</p>
+
+<p>La demande du relieur est repoussée.</p>
+
+<h4>ROGNER LES ONGLES</h4>
+
+<p>Charles Lameth, en 1790, eut un duel où il fut
+blessé à la main. On publia ce quatrain sous le titre
+de «Dernier Bulletin de M. Lameth»:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">--Faudra-t-il à Lameth couper quelques phalanges?</p>
+<p class="i16">Demandait à Dufouarre un patriote ardent.</p>
+<br>
+<p class="i16">--Non, dit le médecin, transporté jusqu'aux anges,</p>
+<p class="i16">Il lui faudra rogner les ongles seulement.</p>
+</div></div>
+
+<h4>ROI ET SAVETIER</h4>
+
+<p>Un acteur comique de bas étage s'avisa de jouer un
+rôle de roi: il fut atrocement sifflé. L'acteur, contraint
+de retourner à son véritable emploi, joua le
+lendemain un rôle de savetier et fut couvert d'applaudissements--Cela
+prouve, lui dit un de ses camarades,
+que tu as joué le roi comme un savetier, et le
+savetier comme un roi.</p>
+
+<h4>ROIS</h4>
+
+<p>Pour la fête de l'Épiphanie, la grande solennité des
+Gentils, qui la célèbrent si imparfaitement chez nous,
+et qui a pourtant laissé de grandes affections dans les
+familles, un de nos démocrates les plus foncés invita,
+en 1849, plusieurs de ses amis et ennemis politiques
+à venir <i>tirer les rois</i>.</p>
+
+<p>Seulement, au moment de l'apparition du gâteau,
+il a prévenu ses convives qu'au haricot consacré il
+avait fait substituer une épingle. Interrogé sur le
+motif de cette substitution:</p>
+
+<p>--C'est pour étrangler les prétendants, a-t-il répondu
+d'une voix caverneuse.</p>
+
+<h4>ROUGES</h4>
+
+<p>Brunet disait, en parlant des personnes qui ont les
+cheveux rouges:--Les rouges sont mes bêtes noires.</p>
+
+<p>Un chasseur, qui avait couru quelques périls dans
+une partie de chasse où il avait tué des perdrix rouges,
+disait:--Voilà des perdrix rouges qui m'en ont fait
+voir des grises!</p>
+
+<h4>ROUTE</h4>
+
+<p>Pascal a dit:--Un fleuve est une grande route qui
+marche. Un homme moins profond demandait:--Qui
+va de Paris à Strasbourg sans faire un pas? Un Alsacien
+répondit:--La grande route.</p>
+
+<h4>RUDIMENT</h4>
+
+<p>M. de Rothschild disait l'autre jour à M. Maurice
+Alhoy:--Je vous prêterai un million pour relever le
+théâtre Saint-Antoine, si vous me devinez quand le
+chef d'une mosquée ressemble à une grammaire.</p>
+
+<p>--Je ne sais pas.</p>
+
+<p>--Eh bien... c'est quand il a des manières rudes,
+parce qu'alors c'est un <i>rude iman</i>.</p>
+<br>
+
+<h2>S</h2>
+
+<h4>SAGE</h4>
+
+<p>Ménage, attaqué d'une pleurésie, demanda qu'on lui
+fît venir le Père Airaut, jésuite, son parent. À peine le
+religieux est entré dans la chambre du malade, qu'il
+l'embrasse, lui témoigne sa douleur, le console et
+l'exhorte à la mort. Ménage, édifié de tout ce que le
+Père Airaut lui dit des miséricordes de Dieu, dit en
+soupirant:--Je vois s'accomplir la pensée que j'ai
+toujours eue: qu'on a besoin d'une sage-femme pour
+entrer dans le monde, et d'un homme sage pour en
+sortir.</p>
+
+<h4>SALUT</h4>
+
+<p>Un homme se plaignait à un de ses amis de n'avoir
+pas été salué par lui, à la sortie de l'église. Celui-ci
+lui répondit:--Mon cher, hors de l'église, point de
+salut!</p>
+
+<h4>SANG</h4>
+
+<p>Santeul disputant un jour avec le grand Condé sur
+quelque ouvrage d'esprit, le prince dit au poëte:--Savez-vous,
+Santeul, que je suis prince du sang?--Oui,
+Monseigneur, je le sais; mais moi je suis prince
+du bon sens; ce qui est préférable.</p>
+
+<h4>SANGUIN</h4>
+
+<p>Un négociant qui faisait mal ses affaires disait:--On
+se trompe sur mon tempérament; on me croit
+flegmatique et je suis <i>sans gain</i>.</p>
+
+<h4>SAPEURS</h4>
+
+<p>Quand le dernier roi s'enfuit, on dit qu'il s'en allait
+accompagné de <i>sa peur</i>.</p>
+
+<p>Ce mot a produit plusieurs fois un même calembour,
+dont voici la plus récente application:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Que dit-on donc?... que Ledru, dans sa fuite,</p>
+<p class="i16">Est parti seul, sans suite?... O grave erreur!...</p>
+<p class="i16">Il s'est sauvé, j'en conviens, au plus vite,</p>
+<p class="i16">Mais il était escorté de... sa peur!...</p>
+</div></div>
+
+<h4>SAVOIR</h4>
+
+<p>Une troupe de comédiens ambulants venait de jouer
+<i>le Misanthrope</i> dans une petite ville de Normandie.
+L'acteur qui avait rempli le rôle d'Alceste, et qui
+l'avait joué de moitié avec le souffleur, s'avance après
+la représentation et dit:--Messieurs, nous aurons
+l'honneur de vous donner demain <i>le Philosophe sans
+le savoir</i>.--Non pas! non pas! s'écrie le maire tout
+furieux; vous venez de jouer <i>le Misanthrope</i> sans le
+savoir, et vous saurez demain, s'il vous plaît, <i>le Philosophe</i>
+pour le jouer.</p>
+
+<p>Le maréchal de Villeroi, gouverneur de Louis XIV,
+écrivait d'une manière absolument illisible. Il écrivit
+un jour une lettre au cardinal de Fleuri, précepteur du
+jeune monarque; l'instituteur ne put déchiffrer un mot
+de ce que le gouverneur voulait lui dire. Il le pria de
+vouloir bien lui communiquer sa pensée d'une manière
+plus lisible. Le maréchal écrivit une seconde
+lettre, à laquelle Fleuri répondit:--Votre seconde
+lettre n'est pas beaucoup plus lisible que la première.
+Au surplus, pour notre honneur commun, cessez de
+m'écrire, afin qu'on ne dise pas dans le monde que le
+roi a un gouverneur qui ne sait pas écrire, et un précepteur
+qui ne sait pas lire.</p>
+
+<h4>SCHILLER</h4>
+
+<p>Quel est le poëte dont les sécrétions ont été les plus
+légères?--Schiller.</p>
+
+<h4>SECOUER</h4>
+
+<p>Un apothicaire de Newcastle, s'étant chargé du traitement
+d'un malade qui était à l'article de la mort,
+lui envoya une fiole de médecine, avec ces mots: <i>bien
+secouer avant de faire prendre</i>. Le lendemain, il alla
+voir l'effet de son remède. En entrant chez le malade,
+il demanda à un domestique comment se portait son
+maître. Celui-ci ne répondit que par des larmes.--Quoi!
+est-ce qu'il est plus mal?--Oui, monsieur;
+mais comme vous nous avez dit de le secouer avant
+de lui faire prendre votre médicament, nous avons
+suivi vos ordres et il est passé dans nos bras.</p>
+
+<h4>SEIGNEUR</h4>
+
+<p>On demande à Arlequin pourquoi il se permet de
+prendre place parmi des gentilshommes?--Je suis
+fils d'un <i>saigneur</i>, dit-il. Son père en effet était chirurgien.</p>
+
+<h4>SEINE</h4>
+
+<p>Un homme lisant au bas des personnages d'une
+pièce cette indication:--<i>La scène est à Constantinople</i>;--Voilà,
+dit-il, une rivière qui fait bien du
+chemin.</p>
+
+<h4>SEIZE</h4>
+
+<p>On disait d'un homme âgé, pour rassurer une jeune
+fille qui l'épousait, que ce monsieur n'avait que <i>ses
+ans</i>.</p>
+
+<h4>SEL</h4>
+
+<p>Montmaur était riche, mais avare; il aimait mieux
+diner chez les autres que de donner à manger chez
+lui; et comme il savait assaisonner la conversation de
+beaucoup de traits piquants, il disait à ses amis:--Fournissez
+la viande et le vin, je fournirai le sel.</p>
+
+<h4>S'EN REPENTIR</h4>
+
+<p>Le pléonasme qui suit a un double sens assez juste:--Qui
+verse le sang, s'en repent.</p>
+
+<h4>SENS</h4>
+
+<p>Quelles sont en France les femmes les plus raisonnables?--Les
+femmes de Sens.</p>
+
+<h4>SENSÉ</h4>
+
+<p>Lorsqu'on eut sifflé la pièce sans A, Brunet pria
+l'auteur de lui faire un drame sans C.</p>
+
+<h4>SEPT VEINES</h4>
+
+<p>Quelle est le pays où le sang circule le mieux? À
+cette question de M. Dupin, M. Guizot répondit:--Les
+Cévennes.</p>
+
+<h4>SERIN</h4>
+
+<p>Quand peut-on mettre le temps en cage?</p>
+
+<p>--Quand il est serein.</p>
+
+<h4>SERMENT</h4>
+
+<p>Une jeune fille, épousant contre son gré, prononça
+le oui si froidement que quelqu'un dit:--Le pauvre
+mari n'a là qu'un serment de bouche.--Et, riposta
+un autre, la pauvre femme a un serrement de coeur.</p>
+
+<h4>SERPENT</h4>
+
+<p>Une cause singulière s'est présentée il y a quelque
+temps au tribunal de simple police de Fontaine-Libeau
+(Seine-Inférieure). M. le curé, prêchant sur le péché
+originel, avait plusieurs fois répété:</p>
+
+<p>«C'est le serpent maudit qui a causé vos malheurs,
+mes frères, c'est lui qui est la cause de la perte
+de tant d'âmes.»</p>
+
+<p>Un serpent, non pas un boa, mais un de ces virtuoses
+en surplis qui musicient de toutes leurs forces,
+et écorchent quelquefois les oreilles des fidèles, le serpent
+donc de la paroisse se lève tout à coup, et, interrompant
+le vénérable pasteur, d'un ton moitié furieux,
+moitié stupéfait:</p>
+
+<p>--Moi! j'ai causé tout ce mal-là! s'écria-t-il;
+apprenez que depuis 50 ans que je suis serpent de
+père en fils, je n'ai jamais fait de tort à personne; je
+ne suis qu'un serpent, mais je suis honnête.</p>
+
+<p>Ayant adressé quelques injures à M. le curé, qui
+tentait vainement de lui donner les explications les
+plus satisfaisantes, le susceptible serpent a été traduit
+en simple police et condamné à deux jours de prison.</p>
+
+<h4>SERVANTE</h4>
+
+<p>On raconte qu'une actrice, causant littérature avec
+une de ses camarades, se mit à dire que <i>Don Quichotte</i>
+n'était qu'un roman de cuisinière.--Comment, répliqua
+son interlocutrice fort étonnée, <i>Don Quichotte</i>,
+mais c'est un des ouvrages les plus ingénieux qui aient
+jamais été écrits.--Je n'en parle que d'après notre
+directeur, répliqua la première, c'est lui qui m'a certifié
+hier que <i>Don Quichotte</i> était un roman de Cervantes.</p>
+
+<h4>SERVICE</h4>
+
+<p>Au nombre des hommes éminents promus à une
+des plus hautes dignités de la dernière république, il
+se trouvait un ancien marchand de porcelaines.--Qu'a-t-il
+donc fait pour mériter cette récompense?
+demanda quelqu'un qui entendait prononcer le nom
+du nouveau dignitaire pour la première fois. Est-ce
+qu'il a rendu des services?--Non, il en a vendu,
+répondit M. le baron T...</p>
+
+<h4>SE TAIRE</h4>
+
+<p>Cadet Roussel, professeur de déclamation, dit dans
+une leçon: il faut <i>parler Esther</i>.--Comment!
+<i>parler et se taire</i>, dit un élève, qui ne voit pas qu'on
+s'adresse à la nièce de Mardochée.</p>
+
+<h4>SIFFLEUR</h4>
+
+<p>Lorsqu'on joua la comédie du <i>Persiffleur</i> de Sauvigny,
+les plaisants, les faiseurs de calembours, les
+siffleurs enfin, dirent que le père siffleur avait tous
+ses enfants au parterre.</p>
+
+<h4>SINGE</h4>
+
+<p>Une pimbêche d'importance, qui avait un procès,
+était venue solliciter en sa faveur le premier président
+de Harlay. Comme ce magistrat ne lui avait pas
+fait l'accueil qu'elle croyait lui être dû, elle dit, en
+passant dans l'antichambre, mais assez haut pour être
+entendue du président:</p>
+
+<p>--Peste soit du vieux singe!</p>
+
+<p>Le lendemain néanmoins l'affaire fut appelée, et
+cette dame gagna son procès. Elle courut aussitôt
+remercier le président, qui, pour toute vengeance, se
+contenta de lui dire:</p>
+
+<p>--Sachez madame, une autre fois, qu'un vieux
+singe est toujours disposé à faire plaisir aux guenons.</p>
+
+<h4>SOL</h4>
+
+<p>Quelles sont les notes de musique que les frotteurs
+d'appartements aiment le mieux?</p>
+
+<p>--Les notes <i>sol fa si la si ré</i>.</p>
+
+<h4>SON</h4>
+
+<p class="mid">ÉPIGRAMME SUR FAUCHET<br>
+
+ÉVÊQUE CONSTITUTIONNEL DE PARIS (1791)</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20"> Ce janséniste cannibale,</p>
+<p class="i16">Fauchet, un jour, longuement pérora</p>
+<p class="i20"> Sur les bouffons et l'Opéra,</p>
+<p class="i20"> Dans la tourbe municipale.</p>
+<p class="i20"> Or le prêtre-bourreau prétend</p>
+<p class="i20"> Que tout théâtre dit chantant</p>
+<p class="i16">Envoie un jour par mois ses acteurs à la halle</p>
+<p class="i20"> Pour y chanter, hurler, baller</p>
+<p class="i18"> Et de chansons le peuple régaler.</p>
+<p class="i18"> Pour cet avis très-fortement j'opine,</p>
+<p class="i18"> Reprit Warville, aimable polisson;</p>
+<p class="i20"> Du moins, s'il manque de farine,</p>
+<p class="i20"> Le peuple aura toujours du son.</p>
+</div></div>
+
+<p>On demandait dernièrement: Pourquoi la musique,
+qui charme les chevaux désole-t-elle les chiens? L'auteur
+des sphinx du petit journal pour rire répondit:--C'est
+que les chevaux aiment le son et que les
+chiens l'ont en dégoût.</p>
+
+<h4>SONNET</h4>
+
+<p>Pourquoi un sot devient-il poëte en prenant un
+bain?</p>
+
+<p>--Parce qu'il fait un <i>sot net</i>.</p>
+
+<h4>SORTIR</h4>
+
+<p>Des femmes de Paris qui avaient été voir des fous
+demandèrent à l'un d'eux de leur donner trois numéros
+pour la loterie. C'était une croyance, à Paris,
+dans les classes peu instruites, que les fous sont doués
+d'une sorte de divination.</p>
+
+<p>Le fou écrivit trois numéros sur un papier, l'avala,
+et leur dit:--Mesdames, repassez demain, vos numéros
+seront sortis.</p>
+
+<p>Un certain marquis connu par ses singularités,
+vantait à la feue reine de France un remède dont il
+avait le secret, et qu'il disait avoir fait prendre à un
+de ses amis fort malade. L'a-t-il guérie? demanda la
+reine.</p>
+
+<p>--Madame, dès le lendemain j'allai pour le voir; il
+était sorti.</p>
+
+<p>--Comment! déjà sorti!</p>
+
+<p>--Oui, madame, il était allé se faire enterrer à
+Saint-Sulpice.</p>
+
+<h4>SOTS</h4>
+
+<p>Du temps où florissait le régime parlementaire, un
+député s'excusait de s'être fait attendre en disant qu'il
+était avec le garde des sceaux. On lui répondit:--Il
+vous a gardé bien longtemps.</p>
+
+<p>Le marquis de Cahusac, jouant au piquet, reconnut,
+par ses cartes de rentrée, qu'il avait mal écarté, et
+s'écria:--je suis un franc Goussaut!</p>
+
+<p>Le président Goussaut, renommé par sa stupidité,
+se trouvait par hasard derrière le joueur, et lui dit:</p>
+
+<p>--Vous êtes un sot!</p>
+
+<p>--Vous avez raison, repartit Cahusac, c'est ce que
+je voulais dire.</p>
+
+<h4>SOU</h4>
+
+<p>Le Pont-des-Arts, disait Odry, lorsqu'on payait un
+sou le passage, le Pont-des-Arts a cela de particulier
+qu'il n'y a pas plus de personnes dessus que de
+<i>sous</i>.</p>
+
+<p>--Et il ajoutait, en parlant des receveurs au péage
+de ce pont.--Ils doivent avoir beaucoup de mémoire,
+à force de voir des <i>sous venir</i>.</p>
+
+<h4>SOUFFLET</h4>
+
+<p>Deux personnes qui s'étaient mutuellement souffletées
+allaient se battre. On pria M. de Bièvre de les
+réconcilier.--Me prenez-vous, dit-il, pour un raccommodeur
+de soufflets?</p>
+
+<h4>SOUFFRER</h4>
+
+<p>Quelles sont les gens les plus à plaindre?</p>
+
+<p>Les faiseurs d'allumettes, parce qu'ils souffrent pour
+tout le monde.</p>
+
+<h4>SOUL</h4>
+
+<p>Un écolier à qui on avait donné un sou pour la
+promenade rentra avec des coliques, causées par une
+intempérance de coco. Son maître lui reprochait cet
+excès, en lui disant qu'il n'avait pas besoin d'avaler
+deux énormes verres à deux liards.--Ce n'est pas
+ma faute, reprit l'enfant, la cocotière n'avait pas de
+monnaie à me rendre, alors j'ai bu tout mon <i>sou</i>.</p>
+
+<h4>SOULIER</h4>
+
+<p>Quel est l'auteur le plus crotté?--Soulié.</p>
+
+<h4>SOURD</h4>
+
+<p>Quelles sont les gens qui entendent le moins la plaisanterie?--Ce
+sont les sourds.</p>
+
+<h4>SPA</h4>
+
+<p>On conte que le marquis de Bièvre, étant allé
+prendre les eaux de Spa, ne voulut pas quitter cette
+gracieuse ville champêtre sans lui laisser un calembour;
+il partit en disant:--Je m'en vais de <i>ce pas</i>.</p>
+
+<h4>STYLE</h4>
+
+<p>«Gallophile de tout temps, mon coeur est sans fard
+et mon âme est sans-culotte.»</p>
+
+<p>C'était avec des phrases aussi barbares, aussi ridicules
+et aussi ineptes que le Prussien Anacharsis
+Clootz, collègues et consorts se prétendaient des patriotes
+exclusifs.</p>
+
+<p>«Petit pape, petit papelin, vous êtes un âne, un
+ânon; allez doucement, il fait glacé, vous vous rompriez
+les jambes, et on dirait: que diable est-ce ceci?
+Le petit ânon de papelin est estropié, un âne sait
+qu'il est un âne, une pierre sait qu'elle est une pierre;
+mais ces petits ânons de papes ne savent pas qu'ils
+sont ânons.»</p>
+
+<p>Tel était le style dans lequel Luther écrivait au
+pape Léon X, le restaurateur des arts et des lettres.</p>
+
+<p>J'admire, disait un membre d'assemblée populaire,
+à propos de la force, j'admire celle de Samson qui,
+avec une mâchoire d'âne, passa mille Philistins au
+fil de l'épée.</p>
+
+<p>Dryden se trouvant un jour, après boire, avec le
+duc de Buckingham, le comte de Rochester et le lord
+Dorset, la conversation vint à tomber sur la langue
+anglaise, sur l'harmonie du nombre, sur l'élégance
+du style, sorte de mérite auquel chacun des trois seigneurs
+prétendait exclusivement et sans partage. On
+discute, on s'échauffe, on convient enfin d'en venir à
+la preuve, et de prendre un juge. Ce juge fut Dryden.
+La preuve consista à écrire, isolément et sans désemparer,
+sur le premier sujet venu, et de mettre les trois
+thèmes sous le chandelier. On se met à l'ouvrage... Le
+duc et le comte font des efforts de génie. Le lord Dorset
+trace négligemment quelques lignes. Quand chacun
+eut fini et placé son chef-d'oeuvre sous le chandelier,
+Dryden procède à l'examen. Dès qu'il eut achevé la
+lecture des trois pièces: «Messieurs, dit-il au duc de
+Buckingham et au comte de Rochester, votre style m'a
+plu, mais celui du lord m'a ravi. Écoutez; c'est vous
+qu'à présent je fais juges.» Dryden lit: «Au premier
+de mai prochain (fixe) je paierai à John Dryden, ou
+à son ordre, la somme de cinq cents livres sterling,
+valeur reçue; 15 avril 1686. Signé Dorset.» Après
+avoir entendu ces expressions, Rochester et Buckingham
+ne purent disconvenir que ce style ne l'emportât
+sur tout autre.</p>
+
+<p>Nous empruntons à la <i>Gazette des Tribunaux</i> un
+modèle du style soldat:</p>
+
+<p>Bourjot, bijoutier jeune France, est assis sur les bancs
+de la police correctionnelle (7e chambre), et Combes,
+soldat du centre, s'avance au pied du tribunal pour
+déposer contre lui; il se met au port d'armes, adresse
+un petit sourire d'amitié au prévenu, et attend que
+M. le président l'interroge.</p>
+
+<p><span class="sc">M. le président.</span>--Voyons... que savez-vous sur
+les faits de la plainte?</p>
+
+<p><span class="sc">Combes.</span>--Je sais que Bourjot est un bon enfant...
+là... mais un bon enfant... Il avait seulement un peu
+siroté ce jour-là... ça peut arriver à tout le monde...</p>
+
+<p><span class="sc">M. le président.</span>--Bourjot est accusé d'avoir
+frappé un agent de la force publique dans l'exercice
+de ses fonctions...</p>
+
+<p><span class="sc">Le témoin.</span>--C'est moi qu'étais dans l'exercice de
+ma faction.</p>
+
+<p><span class="sc">M. le président.</span>--Expliquez-vous.</p>
+
+<p><span class="sc">Le témoin.</span>--Voilà, mon colonel... Je m'embêtais
+le 1er janvier au poste du canal Saint-Martin, poste
+peu récréatif au point de vue du vent qui vous coupe
+la figure et des particuliers qui descendent de la barrière
+en faisant des zigzags et en nécessitant par leurs
+cris et autres déportements l'intervention du caporal
+et de la patrouille... J'étais donc là à murmurer crânement,
+je puis le dire, et à trouver que le coquin de
+sort m'envoyait de fichues étrennes, lorsqu'un cafetier
+tout effarouché vient nous dire qu'un Bédouin mettait
+son établissement sens dessus dessous.</p>
+
+<p>Nous courons au pas de charge à l'endroit susdit,
+moi, le petit Normand et Briquet, mon voisin de lit...
+Qué que nous voyons?... Bourjot, le criminel ci-inclus...
+il voulait empêcher, à lui tout seul, plusieurs
+autres citoyens de pincer leur partie de carambolage
+et faisait la garde autour du billard avec une queue à
+procédé sur les épaules... Il avait bu plus d'une bouteille
+et paraissait légèrement ému... Nous le sommons
+de débarrasser le tapis vert... il nous envoie promener...
+nous le sommons de nous suivre au poste...
+il nous envoie derechef là où vous savez... Alors
+nous l'empoignons... il se révolutionne et fait pour
+5 francs 75 centimes de casse qu'il paie incontinent
+avec un pourboire pour la fille... En voilà un bon
+garçon!...</p>
+
+<p><span class="sc">M. le président.</span>--Mais les coups que vous auriez
+reçus?...</p>
+
+<p><span class="sc">Le témoin.</span>--Ça va venir... je ne suis pas pressé.
+(On rit.) Pour lors, nous l'insérons au violon. Mais,
+avant d'y entrer, il se tourne comme ça vers moi...
+je le tenais par le bras gauche... et il me dit: «Vous,
+si jamais je vous rencontre derrière un mur, je vous
+décorerai avec une pomme de terre.» (Hilarité.) Il
+faut lui pardonner... c'est le vin à douze qui parlait
+pour lui. C'est un fameux bon garçon, allez!</p>
+
+<p><span class="sc">M. le président.</span>--Mais arrivez donc au fait
+principal.</p>
+
+<p><span class="sc">Le témoin.</span>--J'y arrive du pied gauche. Pour lors
+le caporal me plante de faction. J'étais tranquillement
+à flâner en long et en large, quand voilà
+Bourjot qui sort du corps de garde. L'autorité compétente
+l'envoyait dehors pour cuver son liquide. Il
+s'approche de moi, me passe la jambe, et me voilà
+tout de mon long par terre, avec mon fusil entre les
+jambes et mon schako derrière les épaules en guise
+d'oreiller. Bourjot aurait pu me repasser quelques
+taloches pendant que j'étais dans cette position humiliante
+et peu militaire. Mais bah! il filait son noeud à
+toute jambes; c'est un si bon garçon!</p>
+
+<p><span class="sc">M. le président.</span>--Vous êtes bien sûr qu'il ne
+vous a pas porté de coups?</p>
+
+<p><span class="sc">Le témoin.</span>--Pas le moindre. Un simple billet de
+parterre. Faites-lui bonne mesure, mon colonel...
+vrai, c'est un bon garçon.</p>
+
+<p>Le tribunal, prenant en considération les bons antécédents
+de Bourjot et l'état d'ivresse dans lequel
+il se trouvait, ne le condamne qu'à 15 francs d'amende.</p>
+
+<h4>SUIVRE</h4>
+
+<p>On propose en société l'énigme que voici:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Je ne suis pas ce que je suis;</p>
+<p class="i20">Car si j'étais ce que je suis,</p>
+<p class="i20">Je ne serais pas ce que je suis.</p>
+</div></div>
+
+<p>Solution: c'est un valet, qui n'est pas le maître
+qu'il suit; car s'il était le maître qu'il suit, il ne serait
+pas le valet.</p>
+
+<h4>SUJET</h4>
+
+<p>Marquis, disait un jour Louis XVI au marquis de
+Bièvre, vous qui faites des calembours sur tout, faites-en
+un sur moi.--Sire, lui répondit le marquis, vous
+n'êtes pas un sujet.</p>
+
+<h4>SUR</h4>
+
+<p>Va mettre ma montre sur l'horloge de l'hôtel de
+ville, dit M. Duval.--Et Jocrisse s'en va porter la
+montre au haut du clocher.</p>
+
+<p>Un pâtissier, dont un poëte avait exalté la pâtisserie
+dans un ouvrage en vers, crut devoir reconnaître cette
+honnêteté en lui faisant cadeau d'un pâté. Le poëte,
+ayant remarqué que la feuille de papier qui couvrait
+le fond de ce pâté faisait partie de sa production, en
+fit de vifs reproches à son protégé.</p>
+
+<p>--Qu'avez-vous à me reprocher? lui dit celui-ci;
+nous sommes maintenant à deux de jeu; vous avez
+fait des vers sur mes pâtés, et moi j'ai fait des pâtés
+sur vos vers.</p>
+
+<h4>SURE</h4>
+
+<p>Danière disait que la rue la plus sûre de Paris est
+la rue de l'Oseille.</p>
+
+<h4>SUSPECT</h4>
+
+<p>Ce fut à l'occasion de la désignation des suspects
+qu'un plaisant enfermé au Luxembourg, au moment
+où Chaumette y fut lui-même conduit à son tour par
+ordre du comité de salut public, dit en allant à sa
+rencontre: «Citoyen, je suis suspect, tu es suspect,
+il est suspect (en montrant un des prisonniers), nous
+sommes suspects, vous êtes suspects, ils sont suspects.»
+Puis tournant le dos au nouvel arrivé, il le
+laissa consterné de son sort, et honteux de se trouver
+au milieu de ses victimes.</p>
+
+<p>Un plaisant, qui voulait partir avec l'aéronaute
+Blanchard, s'en fut demander à sa municipalité un
+passe-port pour la banlieue de la terre: la municipalité
+assembla le conseil de la commune, et le pétitionnaire
+fut refusé comme suspect d'émigration.</p>
+
+<br>
+
+<h2>T</h2>
+
+<p>On conte, dans le pays wallon, cette petite anecdote
+sur deux magistrats, nommés l'un M. Baude, et
+l'autre M. Buchet.--Baude est allé chez M. Buchet et
+y a pris le T.--Eh bien! dit l'interlocuteur, qui entend
+le thé, que s'ensuit-il?--Qu'ils se sont quittés
+remis à leur place, Baude devenu Baudet, et Buchet
+devenu Buche.</p>
+
+<p>La correspondance la plus laconique que l'on ait
+connue se composait d'un (?), voulant dire: Y a-t-il
+quelque nouvelle? et d'un (0), répondant: Il n'y en a
+pas. Un épicier de Hottingham (Flandres) vient de faire
+du laconisme plus remarquable encore. Il a peint sur
+sa vitrine deux grands T, l'un peint en noir, l'autre
+en vert, pour indiquer qu'il vend du thé noir et du
+thé vert.</p>
+
+<h4>TABLE</h4>
+
+<p>On sait que la loi des Douze Tables, publiée à Rome
+sur douze tables de pierre, par les décemvirs, est devenue
+depuis le fondement de la jurisprudence romaine.
+Elle a donné lieu au quatrain suivant:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Un avocat, dont les destins</p>
+<p class="i20">Font un juge des plus notables,</p>
+<p class="i20">Croit que la loi des Douze Tables</p>
+<p class="i20">N'était que pour les grands festins.</p>
+</div></div>
+
+<h4>TAILLES</h4>
+
+<p>Ce nom, qu'on donnait autrefois aux impôts, a produit
+un jeu de mots.</p>
+
+<p>Une princesse du sang, sous ce qu'on appelle l'ancien
+régime, passait par une ville de province; toutes les
+corporations s'empressèrent de l'aller complimenter.
+Celle de l'élection n'était représentée que par trois
+membres.--Madame, lui dit le chef de cette juridiction,
+nous sommes dans ce moment une preuve sensible
+de cette vérité sacrée: Beaucoup d'appelés et peu
+d'élus. Notre devoir est de prononcer sur le fait des
+tailles, et nous certifierons à tout le monde que la
+vôtre est des plus élégantes.</p>
+
+<h4>TAILLEUR</h4>
+
+<p>On disait à un homme distrait:--Votre esprit fait
+des culottes?--Pourquoi?--Parce qu'il est ailleurs.</p>
+
+<h4>TAMBOUR</h4>
+
+<p>Quels sont les châles qui font le plus de bruit?</p>
+
+<p>--Ceux qui <i>sont en bourre</i>.</p>
+
+<h4>TA MÈRE</h4>
+
+<p>Belval, mangeant une salade de chicorée, appela sa
+cuisinière et lui dit:--Es-tu donc la fille de cette salade-là?--Comment,
+Monsieur?--C'est qu'elle <i>est
+amère</i>.</p>
+
+<h4>TEINTURE</h4>
+
+<p>--Je voudrais, disait une dame, que mon fils sût un
+peu de tout, qu'il eût une teinture des langues latine
+et grecque, une teinture d'histoire et de géographie,
+une teinture des mathématiques, une teinture du dessin,
+etc.; mais je ne sais pas pour cela quel maître lui
+donner.</p>
+
+<p>--Donnez-lui, Madame, un maître teinturier.</p>
+
+<h4>TENDRE</h4>
+
+<p class="mid">UNE PETITE SCÈNE DE TRIBUNAL</p>
+
+<p>D. Vous ne niez pas avoir mendié?--R. Si j'avais
+reçu de la nature la faveur de l'éloquence...</p>
+
+<p>D. Répondez par oui ou par non.--R. Je réponds
+par oui; mais n'ayant pas reçu la faveur de l'éloquence,
+je vous demande la grâce de vous faire lecture de mon
+excuse écrite. C'est la description en raccourci de ma
+vie, en douze vers de poésie, pas un de plus, pas un
+de moins. (Il lit.)</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Le sort pour moi fut un bourreau;</p>
+<p class="i20">Conscrit de l'an mil huit cent seize,</p>
+<p class="i20">J'ai tiré le numéro treize</p>
+<p class="i20">Qui m'envoya sous le drapeau.</p>
+<p class="i20">Sorti des rangs, sans sou ni maille,</p>
+<p class="i20">On me traita de rien qui vaille;</p>
+<p class="i20">Ce qui fait qu'un jour, ayant faim,</p>
+<p class="i20">J'ai mendié sur mon chemin.</p>
+<p class="i20">Condamné, j'ai subi ma peine,</p>
+<p class="i20">Mais de mon sort qu'on se souvienne!</p>
+<p class="i20">Si l'on m'avait tendu la main,</p>
+<p class="i20">Je n'aurais pas tendu la mienne.</p>
+</div></div>
+
+<h4>TÊTE-A-TÊTE</h4>
+
+<p>Quelqu'un entrant chez un gourmand qui dînait
+seul devant une tête de veau, lui dit:--Pardon, Monsieur,
+je ne croyais pas que vous fussiez en tête-à-tête.</p>
+
+<p>Armand Gouffé a mis ce mot en vers:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">N'avez-vous pas connu Beauveau?</p>
+<p class="i20">C'était un gourmand respectable.</p>
+<p class="i20">Un jour il était seul à table</p>
+<p class="i20">Devant une tête de veau:</p>
+<p class="i20">On annonce madame Hortense:</p>
+<p class="i20">«Ah! parbleu, je suis occupé,</p>
+<p class="i20">Dit Beauveau d'un air d'importance;</p>
+<p class="i20">Revenez quand j'aurai soupé.</p>
+<p class="i20">--Je vois pourquoi monsieur tempête,</p>
+<p class="i20">Reprit la dame sans bouger;</p>
+<p class="i20">Il est fâcheux de déranger</p>
+<p class="i20">Un aussi joli tête-à-tête.»</p>
+</div></div>
+
+<h4>TÉTER</h4>
+
+<p>--J'ai-t-été à Paris, j'ai-t-été à Bordeaux, j'ai-t-été
+à Bruxelles, disait un parleur incorrect.--Vous avez
+<i>tété</i> une truie, lui répondit quelqu'un, car vous parlez
+comme un cochon.</p>
+
+<h4>THÉ</h4>
+
+<p>Quelle est la lettre la plus anglaise?--Le <i>T</i>.</p>
+
+<p>Un membre de l'Université, d'une excessive rigidité
+sur les formes grammaticales, était venu passer quelques
+jours de vacances à Paris. Avant de quitter son
+hôtel, il vérifiait sa note. La dame du lieu, qui le suivait
+de l'oeil dans sa lecture, le voit tout à coup soubresauter.--Y
+aurait-il une erreur, Monsieur?--Comment,
+Madame, mais une erreur très-grave!... Je
+lis ici, pour mon déjeuner, une omelette avec un seul T.
+Mais il en faut deux!...--C'est facile à rectifier, Monsieur.
+Et la maîtresse d'hôtel écrit en surcharge: Une
+omelette et deux thés.</p>
+
+<p>Un marchand de thé, à Paris, avait, entre autres
+annonces, sur sa vitrine, celle-ci, écrite comme les
+autres en lettres d'or sur une caisse de thé de Chine:
+<i>Thé impérial</i>. En 1814, un agent de la maladroite
+police des Bourbons vint lui dire:--Otez cela; il n'y
+a plus d'empire.--Pardon, Monsieur, dit le marchand,
+il y a encore l'empire de la Chine, et le thé impérial.</p>
+
+<p>Il fallut toutefois ôter l'annonce.</p>
+
+<h4>THERMOMÈTRE</h4>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">On ne nous parle que de mètre,</p>
+<p class="i20">Chaque femme frémit du mot.</p>
+<p class="i20">J'entends prononcer kilomètre,</p>
+<p class="i20">Et reste ébahi comme un sot.</p>
+<p class="i20">Le terme de myriamètres</p>
+<p class="i20">Me trouve souvent en défaut;</p>
+<p class="i20">Pour nous entendre comme il faut,</p>
+<p class="i20">Si nous mettions un terme aux mètres!</p>
+</div></div>
+
+<p>Dans la parodie de <i>Cricri et ses mitrons</i>, plaisante
+imitation du <i>Henri III</i> de M. Dumas, on assomme un
+personnage, en menaçant de le traiter comme Léonidas
+jadis aux Thermopyles.</p>
+
+<p>Le pauvre diable demanda grâce, en criant:--Un
+<i>terme aux piles</i>.</p>
+
+<h4>TIRE TON BAS</h4>
+
+<p>Un poëte, récitant à son jeune fils qui allait se
+coucher un poëme qui commençait ainsi:</p>
+
+<p class="mid">Tyr tomba...</p>
+
+<p>l'enfant s'empressa de se déchausser.</p>
+
+<h4>TITRES</h4>
+
+<p>Louis XIV avait une si haute idée du jugement de
+madame de Maintenon, qu'il lui disait un jour: «On
+appelle les papes Votre Sainteté; les rois, Votre Majesté;
+les princes, Votre Sérénité; pour vous, Madame,
+on devrait vous appeler Votre Solidité.»</p>
+
+<h4>TOMBÉ</h4>
+
+<p>M. de L... se trouvait dernièrement dans une petite
+réunion de membres de l'ex-Constituante.</p>
+
+<p>Pendant la soirée, il s'approcha d'un groupe de
+dames dont la conversation paraissait très-animée.</p>
+
+<p>--Tenez, Monsieur, dit Mme de C..., justement nous
+parlions de vous!</p>
+
+<p>--Vraiment! fit le célèbre membre de feu le gouvernement
+provisoire, je suis bien tombé!</p>
+
+<p>--C'est ce que nous disions, répondit Mme de C...</p>
+
+<h4>TOM JONES</h4>
+
+<p>Dans le vaudeville de <i>M. Vautour</i>, Brunet se trouvait
+tout de jaune habillé. S'étant caché dans une
+bibliothèque, il dit en sortant:--Je devais avoir là
+dedans l'air d'un <i>tome jaune</i>.</p>
+
+<h4>TONNERRE</h4>
+
+<p>La voiture de M. de Pontchartrain se rencontra dans
+un passage étroit avec celle de M. de Clermont-Tonnerre.
+Le cocher du premier, voulant faire reculer l'autre, crut
+lui imposer en nommant le seigneur qu'il conduisait.
+Le second répliqua:--Je me moque de ton <i>pont</i>, de
+ton <i>char</i> et de ton <i>train</i>; je mène le Tonnerre, et c'est
+à toi de reculer.</p>
+
+<h4>TOUCHER</h4>
+
+<p>Une demoiselle Lange, qui avait obtenu un logement
+au château de Versailles, sachant que Charles X y
+arrivait, se mit à sa fenêtre avec une pétition qu'elle
+avait préparée, et quand le roi passa elle lança sa pétition
+qui tomba sur le visage de Charles X. Le prince
+dit en riant: «On ne dira pas que cette pétition ne m'a
+pas touché!» Et il accorda une pension de 1,000 fr.</p>
+
+<h4>TOUR</h4>
+
+<p>Quels sont les plus gros pruneaux?</p>
+
+<p>--Les pruneaux d'une lieue et demie de Tours.</p>
+
+<h4>TOURNEBROCHE</h4>
+
+<p>Un homme qui était fort pour la bombance, étant à
+dîner dans un endroit où il se trouva beaucoup de
+musiciens, on loua l'excellence des instruments; et
+chacun, suivant son goût, estima le piano, le violon,
+la flûte, etc. Au moment où on demanda l'avis du parasite:--Ah!
+Messieurs, dit-il, le bel instrument
+que le tournebroche!</p>
+
+<h4>TOUSSAINT</h4>
+
+<p>Dans le temps du premier empire, on avait repris
+les usages anciens de payer à la Saint-Jean, à la Saint-Martin,
+à la Saint-Pierre, à la Saint-Laurent, etc. Un
+homme de mauvaise foi, ayant acheté un cheval à un
+paysan, lui fit son billet à la Saint-Négo et s'en alla.</p>
+
+<p>Le paysan, le lendemain, montra son billet à ses
+voisins, leur demandant quel jour ce saint arrivait.
+Mais personne ne le trouvait dans le calendrier. Le
+bonhomme se rendit chez son acheteur qui lui rit au
+nez, en disant je vous paierai au jour dit; cherchez-le.</p>
+
+<p>C'était en Champagne, dans le canton de Méry. L'attrapé
+alla trouver le juge de paix, qui cita le créateur
+du billet. Devant sa réponse qu'il paierait au jour de
+Saint-Négo, le cas était embarrassant. Mais le juge
+s'en tira.--Vous êtes un coquin, dit-il à l'acheteur;
+mais vous êtes pris, car il y a un jour où tous les
+saints sont fêtés. Et il dut payer le jour de la Toussaint.</p>
+
+<h4>TOUSSANT</h4>
+
+<p>On a dit que les gens les plus enrhumés de Paris
+sont les cochers de fiacre, parce qu'ils parcourent la
+ville en tous sens.</p>
+
+<h4>TOUT VERT</h4>
+
+<p>De quelle couleur est un coffre-fort quand on le vide?--Il
+<i>est ouvert</i>.</p>
+
+<h4>TRADUCTION</h4>
+
+<p>Un enfant qui traduisait du latin de septième, en
+vacances et sous l'aide de sa mère, était embarrassé
+devant ces mots: <i>Marcus Tullius Cicero</i>.</p>
+
+<p>--Je ne les trouve pas dans mon dictionnaire,
+disait-il en s'adressant à la maman.</p>
+
+<p>--Mon enfant, disait-elle, <i>Marcus Tullius Cicero</i>...
+<i>Marcus</i>, c'est un marchand; <i>Tullius</i> doit signifier de
+la toile... Tu peux mettre: Marchand de toile cirée;
+et je serais bien surprise si je me trompais.</p>
+
+<p>Un autre enfant, qui se faisait remarquer par une
+audace intrépide, traduisit ces deux vers de Lucain:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i18">Phoenices primi, si famæ creditur, ausi</p>
+<p class="i18">Mansuram rudibus vocem signare figuris.</p>
+</div></div>
+
+<p>par cette phrase narrative:</p>
+
+<p>Les phénix, dans la primeur, ont si faim qu'on croit
+qu'ils osent manger les rudiments, les volumes, le
+signet et les figures.</p>
+
+<p>Lorsque Voltaire donna sa tragédie d'<i>Oreste</i>, on
+avait mis sur les billets du parterre, on ne sait trop
+pourquoi, les lettres initiales de ce vers d'Horace:</p>
+
+<p class="mid">Omne Tulit Punctum Qui Miscuit Utile Dulci.</p>
+
+<p>O. T. P. Q. M. U. D., ainsi qu'elles se trouvaient
+écrites dans ce temps sur la toile du théâtre. Les faiseurs
+de calembours du temps interprétèrent ces initiales
+par: Oreste, Tragédie Pitoyable Que Monsieur Voltaire
+Donne.</p>
+
+<p>Après l'avènement de George Ier au trône, le maire
+de Leicester qui avait toujours supposé que <i>anno
+Domini</i> signifiait la reine Anne, ayant entendu son
+secrétaire lire une ordonnance municipale, s'écria
+avec chaleur, lorsqu'il en fut à <i>anno Domini</i>.--Pourquoi
+ne dites-vous pas <i>Georgio Domini</i>? vous ne savez
+jamais ce que vous faites!</p>
+
+<h4>TRAIN</h4>
+
+<p>Un farceur fit un jour marcher le poste du quai
+Saint-Bernard, en lui annonçant qu'il y avait beaucoup
+de train au bout du pont. C'étaient des trains
+de bois.</p>
+
+<h4>TRAVAILLER</h4>
+
+<p>Du temps de Cromwel, il fut rendu un décret qui
+défendait de brasser de la bière le samedi, de peur
+qu'elle ne <i>travaillât</i> le dimanche.</p>
+
+<h4>TREIZE</h4>
+
+<p>Une femme, qui avait eu déjà douze enfants, venait
+d'accoucher encore. Un plaisant dit au mari:--A
+présent vous voilà <i>à votre aise</i>.</p>
+
+<h4>TRÈS-ÉTROIT</h4>
+
+<p>--J'ai un habit qui me gêne.--C'est un habit seize.--Comment?--C'est
+qu'il est <i>treize et trois</i> et que
+treize et trois font seize.</p>
+
+<h4>TRIBUN</h4>
+
+<p>Dans le temps du tribunat, on proposait à Brunet
+de se mettre sur les rangs pour être membre du tribunat.--Je
+ne veux pas être tribun, répondit-il,
+parce que ma femme serait tribune, ce qui ne lui
+plairait pas, et que nos enfants seraient de petits tribunaux,
+ce qui fait trop de bruit.</p>
+
+<h4>TRIOLET</h4>
+
+<p>Un plaisant voyant passer trois coquettes, à la fois
+laides et prétentieuses, disait que c'était un trio laid.</p>
+
+<h4>TROUVER</h4>
+
+<p>On lisait il y a quelques temps dans les <i>Petites
+Affiches</i>, ordinairement si sérieuses, cette espèce de
+facétie:--Un particulier très-connu désire trouver
+une somme de cinquante mille francs, n'importe en
+quel endroit; il consentira à la partager avec la personne
+qui la lui indiquera.</p>
+
+<p>Le lord Colburn avait un domestique aussi expert
+en balourdises qu'il en fut jamais. Milord l'ayant
+chargé un jour de porter à un magistrat de sa connaissance
+un présent, celui-ci, en retour, lui envoya
+une demi-douzaine de perdrix vivantes, avec une
+lettre. Ces perdrix s'étant débattues en route, il n'eut
+rien de plus empressé que de lever le couvercle du
+panier, mais aussitôt elles prirent leur volée. Tant
+mieux, s'écria le rustre, que le diable les emporte!
+Mais à son retour à la maison, son maître ayant décacheté
+la missive.--Oh! oh! dit-il, je trouve dans
+la lettre six perdrix.--Est-il bien vrai? s'écria John.
+Je suis charmé, mon maître, que vous les trouviez
+dans la lettre, car elles se sont toutes envolées du
+panier.</p>
+
+<p>Le vicomte de S... aborda un jour M. de Vaines en ces
+termes:--Est-il vrai, Monsieur, que dans une maison
+où l'on avait eu la bonté de me trouver de l'esprit,
+vous avez dit que je n'en avais point?--Il n'y a pas
+un mot de vrai, répondit M. de Vaines, je n'ai jamais
+été dans aucune maison où l'on vous trouvât de
+l'esprit.</p>
+
+<p>Ajoutons ici un petit conte en vers de Capelle:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Dans un moment de grand orage,</p>
+<p class="i20">Sur un frêle et mince bateau,</p>
+<p class="i20">Un petit-maître, passant l'eau,</p>
+<p class="i20">Perdait déjà tout son courage.</p>
+<p class="i20">«Mon ami, dit-il au passeur,</p>
+<p class="i20">Assurément je n'ai pas peur;</p>
+<p class="i20">Mais avez-vous la connaissance</p>
+<p class="i20">Qu'en une telle circonstance</p>
+<p class="i20">De ce vent le souffle importun</p>
+<p class="i20">Vous ait fait perdre ici quelqu'un?</p>
+<p class="i20">--Du tout. La semaine dernière,</p>
+<p class="i20">Nicolas, mon cousin germain.</p>
+<p class="i20">S'est laissé choir dans la rivière;</p>
+<p class="i20">Je l'ons trouvé le lendemain.»</p>
+</div></div>
+
+<h4>TRUITES</h4>
+
+<p>En 1826, on licencia la 5e compagnie des gardes du
+corps, qui portait, suivant l'usage, le nom de son capitaine,
+le duc de Rivière. Lorsqu'on vint lire l'ordonnance
+aux gardes assemblés, l'un d'entre eux s'écria:--La
+compagnie de Rivière est la compagnie détruite!</p>
+
+<h4>TULLE</h4>
+
+<p>Quelle est la population la plus légère en France?--La
+population de Tulle.</p>
+
+<h4>TURCOMAN</h4>
+
+<p>Dans une diligence, un bon bourgeois demandait à
+un commis voyageur, qui avait l'air de tout savoir,
+ce que c'était qu'un Turcoman?--Un Turc au Mans,
+répondit le farceur, c'est un Turc qui se trouve pour
+l'instant au chef-lieu du département de la Sarthe.</p>
+<br>
+
+<h2>U</h2>
+
+<p>Pourquoi appelle-t-on l'U une lettre cérémonieuse?--Parce
+qu'il est toujours <i>après T</i>.</p>
+
+<p>Quelles sont les lettres les plus riches?--Les lettres
+U P.</p>
+
+<h4>UNE VOIX</h4>
+
+<p>Ce mot a plus d'un sens. Lorsque la France acclamait
+Napoléon III, on a dit qu'il n'y avait là qu'une
+voix chez nous; l'expression alors voulait dire l'unanimité.
+Lorsque le duc d'Orléans Philippe-Égalité voulut
+se faire nommer maire de Paris, il n'eut pour lui,
+dans sa section, qu'un seul votant. On afficha ces deux
+vers à sa porte:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i18">Saluez, citoyens, le rival de nos rois,</p>
+<p class="i18">La ville de Paris n'a pour lui qu'une voix.</p>
+</div></div>
+
+<p>Ce jeu de mots a été répété à propos de quelques
+aspirants au fauteuil académique.</p>
+
+<h4>UNIVERS</h4>
+
+<p>La reine, chaussée de mules en satin vert uni, demanda
+au marquis de Bièvre un calembour.--Madame,
+dit-il, l'<i>uni vert</i> est à vos pieds.</p>
+
+<h4>UNIVERSITÉ</h4>
+
+<p>Un écrivain de quelque mérite, mais qui n'a pas pu
+être reçu bachelier, a cependant publié des livres qui
+ont fait grand bruit; et comme il produit aussi des
+calembours, il a mis au-dessous de son portrait ces
+deux vers:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i18">Quoique je ne sois pas de l'Université,</p>
+<p class="i18">On me voit néanmoins dans l'univers cité.</p>
+</div></div>
+
+<h4>UN NEZ</h4>
+
+<p>Quelle est la lettre qui peut se servir aux lunettes?--C'est
+un <i>e</i>.</p>
+
+<h4>USAGE</h4>
+
+<p>Sous la dernière république, le <i>Corsaire</i>, qui en
+combattait les tendances, a donné ce spirituel article:</p>
+
+<p>«Un cordonnier communiste lisait une feuille rouge
+lorsqu'une de ses pratiques entra.</p>
+
+<p>--Que lisez-vous donc, monsieur Crépin? dit le
+chaland.</p>
+
+<p>--Je lis le <i>Socialiste</i>. En voici un qui est l'ami du
+peuple! Écoutez-moi ça:</p>
+
+<p>--Usage pour usage, propriété pour propriété, voilà
+l'égal échange. En d'autres termes, pour que l'échange
+soit égal, il faudrait que le locataire reprît son argent
+quand le propriétaire reprendrait sa maison; car
+alors le propriétaire aurait eu l'usage de l'argent du
+locataire, et le locataire l'usage de la maison du propriétaire;
+mais quand l'un reprendrait la propriété
+de sa maison, l'autre reprendrait la propriété de son
+argent: l'échange serait égal.</p>
+
+<p>Voilà qui n'est pas bête, hein! dit le cordonnier en
+terminant.</p>
+
+<p>--Non, répondit sa pratique, et cela me fait naître
+une idée. Il y a trois mois, je vous ai acheté et payé
+une paire de bottes: vous avez fait usage de mon argent,
+j'ai fait usage de vos bottes. Rendez-moi mon
+argent, je vais vous rendre vos bottes: en vertu de
+l'égal échange, nous serons quittes à ce compte.»</p>
+
+<h4>USÉE</h4>
+
+<p>--Oh! je suis bien rusée, disait une femme au marquis
+de Bièvre.--Ah! Madame, c'est sûrement un R
+que vous vous donnez.</p>
+<br>
+<h2>V</h2>
+
+<h4>VALET</h4>
+
+<p>Instrument de menuisier. On disait d'un de ces utiles
+industriels qu'il était dans la misère et qu'il gardait
+dix valets à son service.</p>
+
+<h4>VAN</h4>
+
+<p>En entendant citer un jeune homme qui avait vingt-neuf
+ans et dont le père n'en avait que cinq, un bon
+bourgeois ouvrait d'énormes oreilles.</p>
+
+<p>--Comment cela se peut-il?</p>
+
+<p>--Rien de plus simple. Ce sont deux vaniers; le
+fils a vingt-neuf vans tout faits, le père, en ce moment,
+n'en a que cinq, ayant vendu les autres.</p>
+
+<h4>VAUDEVILLE</h4>
+
+<p>Qu'y a-t-il de poétique dans la cuisine?--Le <i>veau
+de ville</i>.</p>
+
+<p>Qu'est-ce que font les vaches à Paris?--Elles font
+des <i>veaux de ville</i>.</p>
+
+<h4>VAUT</h4>
+
+<p>Quel est l'équivalent de <i>Dominus</i>?--C'est <i>biscum</i>.--Comment
+cela?--C'est qu'on dit souvent <i>Dominus
+vobiscum</i>.</p>
+
+<h4>VENIR</h4>
+
+<p>Papa Doliban, dit d'Asnières, dans la comédie du
+<i>Sourd</i>, j'avais semé des pommes de terre dans mon
+jardin, savez-vous ce qui y est venu?--Parbleu! répond
+Doliban, voilà une belle question! il y est venu
+des pommes de terre.--Point du tout: il est venu un
+cochon qui a mangé mes semences.</p>
+
+<p>Mais cette facétie est pillée d'un souvenir historique.</p>
+
+<p>Louis XIV faisant la revue de ses gardes françaises
+et suisses dans la plaine d'Ouille, un paysan, qui avait
+semé des pois dans son champ, le trouva ce jour-là
+couvert d'un bataillon de Suisses, qui foulaient aux
+pieds ses pois. Il se mit aussitôt à crier:--Miracle!
+Miracle!</p>
+
+<p>--Qu'avez-vous, bonhomme, lui dit un officier, à
+crier miracle?</p>
+
+<p>Le paysan ne répondit qu'en continuant à crier
+miracle jusqu'à ce qu'il pût être entendu de Louis XIV,
+qui le fit approcher et lui demanda pourquoi il criait
+miracle.--C'est, dit-il, Sire, que j'avais semé des
+pois sur ce terrain, et qu'il y est venu des Suisses.</p>
+
+<p>Cette saillie fit rire le roi, qui le fit généreusement
+dédommager.</p>
+
+<h4>VENT</h4>
+
+<p>N'y avait-il pas au baptême du prince impérial une
+voiture plus légère que celle du nonce?--Oui, celle
+qui était devant.</p>
+
+<h4>VERRE</h4>
+
+<p>Maynard, fils d'un gentilhomme verrier, était fier
+de sa noblesse. Saint-Amand lui fit cette épigramme:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Votre noblesse est mince,</p>
+<p class="i20">Et ce n'est pas d'un prince,</p>
+<p class="i20">Daphnis, que vous sortez.</p>
+<p class="i20">Gentilhomme de verre,</p>
+<p class="i20">Si vous tombez à terre,</p>
+<p class="i20">Adieu vos qualités.</p>
+</div></div>
+
+<p>Pourquoi les vitriers sont-ils si chers aux cabaretiers?--Parce
+qu'ils ont toujours le verre à la main?</p>
+
+<p>Un joyeux compère à qui on citait ce vers de
+Boileau:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Le vers le mieux rempli, la plus noble pensée</p>
+<p class="i16">Ne peut plaire à l'esprit quand l'oreille est blessée.</p>
+</div></div>
+
+<p>répliqua:--Pour moi, le verre le mieux rempli me
+plaît toujours.</p>
+
+<h4>VERS</h4>
+
+<p>Un plaisant, au risque de dire un mauvais mot, prétendait
+que les vers du fromage n'étaient autre chose
+que des vers à sa louange, parce qu'ils ne s'y viennent
+loger que quand il est de bonne qualité.</p>
+
+<p class="mid">QUELQUES VERS SINGULIERS.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Dans un broc qui, pour l'ordinaire,</p>
+<p class="i20">A Grégoire servait de verre,</p>
+<p class="i20">Une souris un jour tomba</p>
+<p class="i20">Et se noya, la chose est claire.</p>
+<p class="i20">L'ivrogne, en buvant, la goba;</p>
+<p class="i20">Mais en traversant l'oesophage,</p>
+<p class="i20">Elle fit sentir son passage,</p>
+<p class="i20">Et Grégoire en toussant dit: «Hein!</p>
+<p class="i20">Ma petite femme, ma mie,</p>
+<p class="i20">Mettez en perce, je vous prie,</p>
+<p class="i20">Un nouveau tonneau; car ce vin</p>
+<p class="i20">Est arrivé près de sa lie,</p>
+<p class="i20">Je viens d'avaler un pépin.»</p>
+<br>
+<p class="i30"> <span class="sc">Banset.</span></p>
+</div></div>
+
+<p class="mid">VIE DE M. CLÉMENT.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Il se lève tranquillement,</p>
+<p class="i20">Déjeune raisonnablement;</p>
+<p class="i20">Dans le Luxembourg fréquemment</p>
+<p class="i20">Promène son désoeuvrement;</p>
+<p class="i20">Lit la gazette exactement;</p>
+<p class="i20">Quand il a dîné largement,</p>
+<p class="i20">Chez sa voisine Clidament</p>
+<p class="i20">S'en va causer très-longuement;</p>
+<p class="i20">Revient souper légèrement,</p>
+<p class="i20">Rentre dans son appartement,</p>
+<p class="i20">Dit son pater dévotement,</p>
+<p class="i20">Se déshabille lentement,</p>
+<p class="i20">Se met au lit tout doucement,</p>
+<p class="i20">Et dort bientôt profondément.</p>
+<p class="i20">Ah! le pauvre monsieur Clément!</p>
+</div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Autrefois un Romain s'en vint, fort affligé,</p>
+<p class="i16">Raconter à Caton que, la nuit précédente,</p>
+<p class="i16">Son soulier des souris avait été rongé,</p>
+<p class="i16">Chose qui lui semblait tout à fait effrayante.</p>
+<p class="i16">«Mon ami, dit Caton, reprenez vos esprits,</p>
+<p class="i16">Cet accident en soi n'a rien d'épouvantable;</p>
+<p class="i16">Mais si votre soulier eût rongé les souris,</p>
+<p class="i16">Ç'aurait été, sans doute, un prodige effroyable.»</p>
+</div></div>
+
+<p>Il y avait, sous la régence, à Saint-Eustache, un
+suisse nommé Mardoche. Il mourut en 1727. Son ami
+Bombel, petit marchand mercier, voulut lui faire une
+épitaphe, et il pensa que, pour plus de dignité, elle
+devait être en vers. Il consulta un écrivain public
+des Halles, qu'il jugeait capable de l'initier à l'art
+poétique. Celui-ci, ne voulant pas le fatiguer d'un
+travail pénible, ne lui donna qu'une règle: c'est qu'il
+fallait que chaque vers rimât avec son double et que,
+pour rimer, chaque vers devait se terminer par les
+trois mêmes dernières lettres.</p>
+
+<p>Bombel se mit à l'oeuvre et produisit l'épitaphe qui
+suit, et qui a été conservée:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20"> Ci-gît mon ami Mardoche.</p>
+<p class="i16">Il a voulu être enterré à Saint-Eustache.</p>
+<p class="i16">Il y a porté trente-deux ans la hallebarde.</p>
+<p class="i20"> Dieu lui fasse miséricorde!</p>
+
+<p class="i30"> <i>Par son ami</i> <span class="sc">J.-D. Bombel</span>. 1727.</p>
+</div></div>
+
+<h4>VERT</h4>
+
+<p>Une dame de qualité, vieille et sèche, se trouvait à
+un bal que donnait Henri IV. Elle était vêtue d'une
+robe verte. Le roi la remarqua et lui dit plaisamment:--Madame,
+je vois que, pour nous faire honneur, vous
+avez employé le vert et le sec.</p>
+
+<p>Un jeune homme, qui avait dissipé en peu de temps
+une fortune considérable, tomba malade et fut saigné.
+Le médecin trouva le sang vert.</p>
+
+<p>--Il peut bien être vert, répondit le malade, car
+j'ai mangé tout mon bien en <i>herbe</i>.</p>
+
+<h4>VETO</h4>
+
+<p>A Versailles, on entendit, en 1790, un orateur des
+groupes dire au peuple:--Voici ce que c'est que le
+veto. Imaginez-vous qu'au moment où vous mangez
+votre soupe, un homme vient, de la part du roi, dire:
+<i>Veto</i>, et voilà que votre soupe n'est plus à vous.</p>
+
+<p>C'est ainsi qu'on instruisait le peuple.</p>
+
+<h4>VIDER</h4>
+
+<p>Un dissipateur disait pour se procurer du crédit:--<i>Je
+vis de mes rentes</i>. Un jour que ses créanciers le trouvèrent
+ruiné, ils lui reprochèrent de les avoir trompés.--Pas
+du tout, répondit-il, je vous ai toujours dit que
+je <i>vidais</i> mes rentes.</p>
+
+<p>Un juge remettait une cause à la huitaine. L'avocat
+sollicitait pour qu'elle fût entendue tout de suite.</p>
+
+<p>--De quoi s'agit-il donc? dit le magistrat.</p>
+
+<p>--Monseigneur, de six pièces de vin.</p>
+
+<p>--Oh! la cour, en effet, peut aisément vider cela.</p>
+
+<h4>VIGILANCE</h4>
+
+<p>Cicéron disait de Caninius Revitius, qui n'avait été
+consul qu'un seul jour:--Nous avons un consul si
+vigilant, qu'il n'a pas dormi une seule nuit pendant
+son consulat.</p>
+
+<h4>VIN</h4>
+
+<p>Dans une chanson de M. Gerbois sur les vins,
+l'annonce d'un cabaret nouveau contient ces deux
+couplets:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Vin de Liège pour les enfants,</p>
+<p class="i20">Vin de Meaux pour tous les artistes,</p>
+<p class="i20">Bon vin de Sens pour les savants,</p>
+<p class="i20">Vin d'Asnières pour les copistes.</p>
+<p class="i20">Vin de Pantin pour les danseurs,</p>
+<p class="i20">Pour les coquets vin de Cologne,</p>
+<p class="i20">Vin de Courbevoie aux trompeurs,</p>
+<p class="i20">Et vin d'Avallon pour l'ivrogne.</p>
+<br>
+<p class="i20">Pour les vieilles, vin de Milan;</p>
+<p class="i20">Vin de Talan à nos poëtes;</p>
+<p class="i20">Pour les poltrons, vin de Cachan;</p>
+<p class="i20">Vin de Constance aux girouettes.</p>
+<p class="i20">Bon vin de Nuits pour les voleurs;</p>
+<p class="i20">Au pauvre homme, vin de Santerre,</p>
+<p class="i20">Du vin de Plaisance aux rieurs;</p>
+<p class="i20">Pour les braves, vin de Tonnerre.</p>
+</div></div>
+
+<h4>VINCENT</h4>
+
+<p>Les paysans se proposent cette énigme: Vingt cent
+mille ânes dans un pré et cent vingt dans un autre.</p>
+
+<p>Ce qui s'explique en écrivant: Vincent mit l'âne
+dans un pré et s'en vint dans un autre.</p>
+
+<h4>VINGT</h4>
+
+<p>Savez-vous, disait quelqu'un à Désaugiers, que les
+Autrichiens sont maîtres de Mâcon?--Hélas! oui; et
+cela devait être.--Pourquoi?--Parce que l'ennemi a
+attaqué avec des pièces de vingt-quatre, et les habitants
+n'avaient que des pièces de vin pour se défendre.</p>
+
+<h4>VINGTIÈME</h4>
+
+<p>Nom d'un impôt au dernier siècle.</p>
+
+<p>Une veuve qui avait dix-neuf enfants, et qui n'était
+pas en état de payer l'impôt annuel dû au roi, lui présenta
+un placet conçu en ces termes:</p>
+
+<p>«Sire, j'ai donné <i>dix-neuf</i> sujets à l'État; je supplie
+votre Majesté de vouloir bien m'exempter du
+<i>vingtième</i>.»</p>
+
+<h4>VINGT SCÈNES</h4>
+
+<p>Si vous êtes embarrassé pour faire un vaudeville,
+prenez la voiture de Saint-Maur.--Et puis?--Et
+puis, vous trouverez <i>Vincennes</i> en chemin.</p>
+
+<p>C'est vieux. Aujourd'hui on prend le chemin de
+fer.</p>
+
+<h4>VIVRE</h4>
+
+<p>Le duc d'Orléans, régent, demandait à Lagrange-Chancel,
+l'auteur des <i>Philippiques</i>, pourquoi il faisait
+de sa plume un instrument de scandale:--Monseigneur,
+répondit celui-ci, il faut bien que je vive.--Je
+n'en vois pas la nécessité, répliqua le prince.</p>
+
+<h4>VOIR</h4>
+
+<p>Beauzée, le grammairien, était malade. Un homme
+qui louchait lui demanda:--Comment vous portez-vous?--Comme
+vous voyez, repartit l'inexorable
+savant.</p>
+
+<p>Un officier présentait à Henri IV un placet dans lequel
+il exposait qu'ayant reçu un grand nombre de
+blessures à son service, il avait besoin de ses secours.
+Le roi, après avoir lu le placet, dit:--Nous verrons.--Il
+ne tient qu'à vous de voir à l'instant, dit le pétitionnaire
+en ouvrant son justaucorps et sa chemise, et
+en montrant les cicatrices dont il était couvert.</p>
+
+<h4>VOITURE</h4>
+
+<p>Un entrepreneur de roulage envoya un de ses commis
+lui acheter des lettres de voiture. Le commis entra
+chez un libraire, qui lui répondit que les <i>Lettres de
+Voiture</i> n'étaient plus dans le commerce, mais qu'il
+pouvait lui offrir celles de madame de Sévigné.</p>
+
+<h4>VOIX</h4>
+
+<p>Le comte Molé disait d'une femme qui chantait avec
+beaucoup de suavité:--C'est une voix douce comme
+du lait. Quelqu'un reprit:--C'est donc la voie lactée.</p>
+
+<p>On demande aussi, dans le même but:--Quelle est
+la voie la plus haute?--Et on répond, c'est la voie
+lactée.</p>
+
+<p>A la fin d'un dîner où le dessert était mince, on
+disait du chanteur célèbre qui le donnait:--Cet
+homme fait de sa voix tout ce qu'il veut.--Qu'il nous
+en fasse donc un <i>biscuit de sa voix</i>, dit un convive.</p>
+
+<h4>VOLER</h4>
+
+<p>Le baron Vollant fut un jour présenté à l'empereur
+Napoléon Ier. C'était dans un bon moment.--Ah! ah!
+Monsieur le baron Vollant, se prit à dire Napoléon; un
+beau nom pour un ordonnateur!--Sire, répondit
+gravement M. Vollant, il y a deux L à mon nom.--Eh
+bien! Monsieur, c'est une raison pour mieux voler.</p>
+
+<p>On demandait à Alexandre Dumas:--Que pensez-vous
+des communistes icariens? Il répondit:--Les
+communistes icariens sont les disciples d'un certain
+<i>Grec</i> qui a voulu <i>voler</i>.</p>
+
+<p>Un tailleur avait fait peindre au-dessus de sa porte
+une paire de ciseaux armés de deux ailes déployées,
+et fait écrire au bas <i>Aux ciseaux volants</i>.--Voilà, dit
+un plaisant, ce que l'on peut appeler une enseigne
+parlante.</p>
+
+<p>Dans une petite ville de Normandie, il y avait un
+juge en très-mauvaise odeur, et qui passait pour le
+plus grand voleur de son pays. Un jour qu'il donnait
+à manger, il fit venir un traiteur et lui demanda,
+entre autres mets, des canards de rivière.</p>
+
+<p>Le traiteur s'excusa sur ce que la saison n'était pas
+encore assez avancée.</p>
+
+<p>--Quoi, lui dit le juge, il y a deux jours que
+j'en ai vu une compagnie de deux douzaines qui volaient!</p>
+
+<p>--Cela se peut, Monsieur, mais vous savez que
+tous ceux qui volent ne sont pas pris.</p>
+
+<h4>VOLTAIRE</h4>
+
+<p>En sortant de la représentation d'une de ses pièces
+qui avait été sifflée, Piron fit le quatrain suivant:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i16">Piron prend un vol trop haut</p>
+<p class="i16">Pour les badauds du parterre;</p>
+<p class="i16">Ce n'est qu'un <i>vol terre à terre</i></p>
+<p class="i20"> Qu'il leur faut.</p>
+</div></div>
+
+<h4>VRAIMENT SOT</h4>
+
+<p>Un jeune homme du Mans ne trouvait rien de bon
+à Paris. Les spectacles, les monuments publics, les
+moeurs, les usages, tout le choquait.--Vive la ville
+du Mans! disait-il à un Parisien, voilà un vrai pays
+de Cocagne!--Monsieur lui dit le Parisien, vous êtes
+<i>vrai Manceau</i>.</p>
+<br>
+<h2>W</h2>
+
+<h4>WIGH ET TORY</h4>
+
+<p>Expliquez-moi, je vous prie, dit un jour Louis XV
+à M. de Vergennes, la différence qu'il y a entre un
+Whigh et un Tory, en Angleterre.</p>
+
+<p>La différence n'est que dans le nom, reprit le ministre:
+les Torys sont Wighs, quand ils ont besoin de
+places, et les Wighs sont Torys, quand ils les ont
+obtenues.</p>
+<br>
+<h2>X</h2>
+
+<p>C'est la lettre de l'alphabet qui ressemble le plus
+aux flots agités, parce qu'elle est toujours <i>sous le V</i>.</p>
+<br>
+<h2>Y</h2>
+
+<h4>YEUX</h4>
+
+<p>Un vieil avare, pour attacher à son service un
+laquais qui ne vivait chez lui que trop frugalement,
+avait fait ce testament: «Je donne et lègue au domestique
+qui me fermera les yeux douze cents livres
+tournois et mon domaine de Varac.»</p>
+
+<p>Le maître mourut enfin. Le domestique demanda
+aux héritiers la délivrance du legs qu'il lui avait fait.
+Un d'eux voulut voir le testament. En lisant ces mots,
+qui me fermera <i>les yeux</i>, il s'écria avec joie:--La
+donation est nulle.</p>
+
+<p>--Et pourquoi donc, Monsieur?</p>
+
+<p>--Mon ami, mon oncle était borgne. Tu n'as donc
+pu lui fermer <i>les yeux</i>.</p>
+
+<p>Un officier étranger ne put s'empêcher, dans une
+visite qu'il fit au roi de Prusse, Frédéric II, à Sans-Souci,
+de lui marquer sa surprise de ce qu'il voyait le portrait
+de l'empereur d'Allemagne dans tous les appartements
+du château, et il demanda à Sa Majesté
+pour quelle raison il faisait cet honneur à son ennemi
+naturel. Ah! dit le roi, l'empereur est un jeune souverain,
+actif et entreprenant, j'ai cru nécessaire d'avoir
+toujours les yeux sur lui.</p>
+
+<p>On dit <i>faire les yeux doux</i> à une dame pour exprimer
+qu'on en est épris. Une dame, qui avait le regard
+rude, se trouvant dans une compagnie, un jeune
+homme demanda à son voisin qui elle était.--C'est,
+dit-il, la marquise de T., à qui le duc de *** a fait
+les yeux doux.--Il a bien mal réussi, dit le jeune
+homme.</p>
+
+<p>Un dilettante s'extasiait, au Café de Paris, sur la
+beauté de la charmante Henriette Sontag, qui venait
+de débuter aux Bouffes. Un monsieur, qui avait écouté
+l'enthousiaste, se hasarda à dire que mademoiselle
+Sontag était en effet très-jolie, mais qu'elle avait un
+oeil plus petit que l'autre.--Un oeil plus petit! s'écria
+le sontagolâtre, vous ne l'avez pas vue, elle en a au
+contraire un plus grand.</p>
+<br>
+<h2>Z</h2>
+
+<h4>ZÉLÉ</h4>
+
+<p>Dans un dîner modeste à ses confrères, un bon curé
+servait deux canards.--Ce sont là de vos paroissiens,
+dit un des convives.--Et ce ne sont pas les moins
+ailés, répliqua un spirituel abbé.</p>
+
+<h4>ZÉRO</h4>
+
+<p>Un Gascon fit un jour un mémoire à présenter au
+conseil des Cinq Cents; il l'avait énoncé ainsi: «Mémoire
+au conseil des 500,000.» Un de ses amis, auquel
+il en fit part, lui représenta qu'il avait mis trois
+zéros de trop:--Sandis, dit le Gascon, je n'en mettrai
+jamais autant qu'il y en a.</p>
+
+<p>On aura peut-être peine à croire que ce soit contre
+La Bruyère, qui ne fut admis au fauteuil académique
+qu'avec la plus grande difficulté, que fut composé le
+quatrain suivant:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<p class="i20">Quand La Bruyère se présente,</p>
+<p class="i20">Pourquoi faut-il crier haro?</p>
+<p class="i20">Pour faire un nombre de quarante</p>
+<p class="i20">Ne fallait-il pas un zéro?</p>
+</div></div>
+<br>
+<p class="mid">FIN.</p>
+<br><br><br>
+<p class="mid">PARIS.--IMP. J. CLAYE, RUE SAINT-BENOIT, 7.</p>
+
+
+
+
+
+<br><br>
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+<pre>
+
+
+
+
+
+End of the Project Gutenberg EBook of Dictionnaire des calembours et des
+jeux de mots, lazzis, coqs-à-l'âne, quolibets, quiproquos, amphigouris, etc., by Baron de La Pointe and Eugène Le Gai
+
+*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK DICTIONNAIRE DES CALEMBOURS ***
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+
+Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of
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+including obsolete, old, middle-aged and new computers. It exists
+because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from
+people in all walks of life.
+
+Volunteers and financial support to provide volunteers with the
+assistance they need, are critical to reaching Project Gutenberg-tm's
+goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will
+remain freely available for generations to come. In 2001, the Project
+Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure
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+To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation
+and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4
+and the Foundation web page at http://www.pglaf.org.
+
+
+Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive
+Foundation
+
+The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit
+501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the
+state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal
+Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification
+number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at
+http://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg
+Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent
+permitted by U.S. federal laws and your state's laws.
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+throughout numerous locations. Its business office is located at
+809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887, email
+business@pglaf.org. Email contact links and up to date contact
+information can be found at the Foundation's web site and official
+page at http://pglaf.org
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+ Dr. Gregory B. Newby
+ Chief Executive and Director
+ gbnewby@pglaf.org
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+
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+Literary Archive Foundation
+
+Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide
+spread public support and donations to carry out its mission of
+increasing the number of public domain and licensed works that can be
+freely distributed in machine readable form accessible by the widest
+array of equipment including outdated equipment. Many small donations
+($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt
+status with the IRS.
+
+The Foundation is committed to complying with the laws regulating
+charities and charitable donations in all 50 states of the United
+States. Compliance requirements are not uniform and it takes a
+considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up
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+where we have not received written confirmation of compliance. To
+SEND DONATIONS or determine the status of compliance for any
+particular state visit http://pglaf.org
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+While we cannot and do not solicit contributions from states where we
+have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition
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+any statements concerning tax treatment of donations received from
+outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff.
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+ways including checks, online payments and credit card donations.
+To donate, please visit: http://pglaf.org/donate
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+Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic
+works.
+
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+concept of a library of electronic works that could be freely shared
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+unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily
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+including how to make donations to the Project Gutenberg Literary
+Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to
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+
+
+</pre>
+
+</body>
+</html>
+
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