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You may copy it, give it away or +re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included +with this eBook or online at www.gutenberg.org + + +Title: Dictionnaire des calembours et des jeux de mots, lazzis, coqs-à-l'âne, quolibets, quiproquos, amphigouris, etc. + +Author: Baron de La Pointe + Eugène Le Gai + +Release Date: June 19, 2009 [EBook #29169] + +Language: French + +Character set encoding: ISO-8859-1 + +*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK DICTIONNAIRE DES CALEMBOURS *** + + + + +Produced by Laurent Vogel, Hugo Voisard, Rénald Lévesque +and the Online Distributed Proofreading Team at +http://www.pgdp.net (This file was produced from images +generously made available by the Bibliothèque Nationale +de France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr) + + + + + + +</pre> + + + + +<br><br> + + + + + +<h4>DICTIONNAIRE</h4> + +<h5>DES</h5> + +<h1>CALEMBOURS</h1> +<br><br><br> + +<h5>PARIS<br> +IMPRIMERIE J. CLAYE, RUE SAINT-BENOIT, 7</h5> + +<br><br><br> + +<h2>DICTIONNAIRE</h2> + +<h5>DES</h5> + +<h1>CALEMBOURS</h1> + +<h5>ET DES</h5> + +<h2>JEUX DE MOTS</h2> + +<h4>LAZZIS, COQ-À-L'ÂNE, QUOLIBETS, QUIPROQUOS</h4> + +<h4>AMPHIGOURIS, ETC.</h4> + +<h5>RECUEILLIS</h5> + +<h3>PAR LE BARON DE LA POINTE</h3> + +<h5>ET</h5> + +<h3>LE Dr EUGÈNE LE GAI</h3> + + +<p class="rig"> +Quel genre d'esprit faut-il avoir pour<br> +deviner un calembour?--Il faut avoir<br> +l'esprit devin. +</p> +<br><br><br><br><br> + +<hr class="short"> + +<br><br><br> + +<p class="mid">PARIS<br> + +PASSARD, LIBRAIRE-ÉDITEUR<br> + +7 RUE DES GRANDS-AUGUSTINS</p> +<hr class="short"> +<h5>Droits réservés.</h5> + +<h4>1860</h4> +<br><br><br> + + +<h2>DICTIONNAIRE</h2> +<h5>DES</h5> +<h1>CALEMBOURS</h1> +<h5>ET DES</h5> +<h2>JEUX DE MOTS</h2> +<h4>LAZZIS, COQ-À-L'ÂNE, POINTES, QUIPROQUOS,</h4> +<h4>AMPHIGOURIS, ETC.</h4> +<hr> + +<br> +<h2>A</h2> + +<p>On présente en forme d'énigme ce jeu de lettres:--Je +suis capitaine de vingt-quatre soldats; sans moi +<i>Paris</i> serait <i>pris</i>.--On comprend que ce capitaine est +la lettre <i>a</i>.</p> + +<p>Quels sont les A les plus respectables?--Ce sont +les Aloyaux.</p> + +<p>Quelles sont les plus vieilles de toutes les lettres?--Les +lettres A G.</p> + +<p>Quelles sont les lettres les plus incommodes?--Les +lettres A J T.</p> + +<h4>ABBÉ</h4> + +<p>Il y a, dans le pays wallon, un monsieur l'abbé +Tise, à qui on conseille de changer de nom.</p> + +<p>A B C exprime le sort que doit attendre celui qui +s'exalte.</p> + +<h4>ACCOMPLI</h4> + +<p>On critiquait devant un bon curé ses paroissiennes.--Cependant, +répondit-il, je les vois presque toutes à +Complies. Voyez <i>Complimenteur</i>.</p> + +<h4>ACCOUTUMÉS</h4> + +<p>On conduisait un Picard et un Normand à la potence. +Le Picard pleurait.--Lâche! lui dit le Normand, qui +ne pleurait pas.--Hélas! répliqua le Picard, nous ne +sommes pas accoutumés comme vous à être pendus.</p> + +<h4>ACROSTICHE</h4> + +<p>Celui que nous citons ici offre un gracieux jeu de mots.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16"><b>L</b> ouis est un héros sans peur et sans reproche.</p> +<p class="i16"><b>O</b> n désire le voir. Aussitôt qu'on l'approche,</p> +<p class="i16"><b>U</b> n sentiment d'amour enflamme tous les coeurs.</p> +<p class="i16"><b>I</b> l ne trouve chez nous que des adorateurs.</p> +<p class="i16"><b>S</b> on image est partout, excepté dans ma poche.</p> +</div></div> + +<p>Le comte de Marcellus, qui était poëte assurément, +quoique dans les seconds rangs, adressa un jour à +M. de Bonald un acrostiche dont les premières lettres +formaient son nom. L'illustre écrivain, sortant de sa +haute philosophie, lui répondit par un autre acrostiche, +que voici:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16"><b>M</b> alheur à l'écrivain qui poursuit l'acrostiche!</p> +<p class="i16"><b>A</b> pollon ne veut pas que ses chers nourrissons,</p> +<p class="i16"><b>R</b> uminant sans honneur une rime postiche,</p> +<p class="i16"><b>C</b> ourent avec effort après quelque hémistiche,</p> +<p class="i16"><b>E</b> t dans ce froid labeur négligent ses leçons.</p> +<p class="i16"><b>L</b> e dieu du goût, ami, te donna le génie;</p> +<p class="i16"><b>L</b> e sentiment du beau, la grâce, l'harmonie.</p> +<p class="i16"><b>U</b> se de ses faveurs, mais n'en abuse pas;</p> +<p class="i16"><b>S</b> ois Rousseau, sois Horace, et non pas Du Bartas.</p> +</div></div> + +<h4>ADAM</h4> + +<p>On a fait à Adam Billaud, plus connu sous le nom +de maître Adam, menuisier à Nevers, mort en 1662, +que quelques poésies légères ont rendu célèbre, le petit +compliment que voici:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Ornement du siècle où nous sommes,</p> +<p class="i20">Je ne dis rien de vous, sinon</p> +<p class="i20">Que pour les vers et pour le nom</p> +<p class="i20">Vous êtes le premier des hommes.</p> +</div></div> + +<p>On appelait aussi maître Adam, <i>le Virgile au rabot</i>. +Il y avait de son temps, un pâtissier poëte, qui enveloppait +ses biscuits de ses vers. Ce pâtissier disait que +si maître Adam travaillait avec plus de bruit, pour lui +il travaillait avec plus de feu.</p> + +<p>Un avocat de Toulouse, nommé Adam, faisait les +harangues que devait prononcer un président. Cet +avocat fut obligé de faire un voyage à Paris. Pendant +son absence le président eut une harangue à faire, +qu'il composa le mieux qu'il put; comme il la prononçait, +un conseiller, qui le vit embarrassé, cita ces +paroles de la Genèse: <i>Adam, ubi es?</i> Où êtes-vous, +Adam?</p> + +<h4>ADORÉS</h4> + +<p>En quoi les doreurs sont-ils les plus fortunés des +humains?</p> + +<p>À cette question, lady Stanhope répondit:--Parce +qu'ils sont toujours <i>à dorer</i>.</p> + +<h4>ADMIRATION</h4> + +<p>On demandait à des soldats en campagne si on pouvait +compter sur eux et quel était le thermomètre de +leur enthousiasme: L'un d'eux répondit:--Nous en +sommes à <i>la demi-ration</i>.</p> + +<h4>ADRESSE</h4> + +<p>Un partageux disait en 1848: J'ai envoyé une adresse +à Caussidière pour l'engager à faire usage de la mienne.--Dans +quel emploi?--Dans la police politique.--Je +lui donnerai les adresses de tous les aristos.--Ton +adresse n'est pas grande. Il fallait t'adresser à +Sobrier.</p> + +<h4>AFFAIRES</h4> + +<p>Un homme, souvent gêné, habitait l'entre-sol d'une +maison dont le rez-de-chaussée était occupé par un +commissionnaire du Mont-de-Piété. Il y déposait de +temps en temps ses effets, et disait alors qu'il était au-dessus +de ses affaires.</p> + +<p>Un laboureur demandait un maréchal ferrant. Sa +femme répondit qu'il était à ferrer.--Affairé, dit le +bon homme, à quoi donc?--À ferrer les chevaux.</p> + +<p>Un fermier général qui, sous l'ancien régime, s'était +enrichi trop vite, fut chassé de sa place.--On a tort +de me destituer, dit-il: j'ai fait mes affaires, j'allais +faire celles de l'État.</p> + +<h4>AGITATION</h4> + +<p>En 1793, M. Monchenut fut arrêté, dans le faubourg +Saint-Honoré, comme agitateur.--Il avait quatre-vingts +ans.--Hélas! dit-il, je ne puis m'agiter moi-même.--Ce +mot le fit relâcher.</p> + +<h4>AIMER</h4> + +<p>S'écrit avec deux lettres: ME.</p> + +<h4>AÎNÉ</h4> + +<p>Quel est de tous les animaux le plus respectable?--C'est +le mouton, parce qu'il est lainé.</p> + +<p>Pourquoi l'aîné d'une famille n'est-il pas ordinairement +beau?--Parce qu'il est laid-né.</p> + +<p>Le mot aîné s'écrit avec deux lettres dans les rébus: +NE.</p> + +<h4>AIR</h4> + +<p>Un acteur d'opéra-comique, qui n'avait à paraître +que dans le dialogue, disait:--C'est singulier, je suis +là entre deux airs.--Tu t'enrhumeras, lui dit-on.</p> + +<p>Dans un moment où l'on venait de siffler une pièce +intitulée la pièce sans A, Brunet demandait à l'auteur +de lui faire un vaudeville sans R.</p> + +<p>On faisait remarquer à une dame que ses enfants +avaient l'air tristes et malheureux: «C'est bien vrai, +répondit-elle; je les fouette toute la journée pour leur +faire perdre cet air-là, et je ne puis pas y parvenir.»</p> + +<p>Deux campagnards se rencontrant dans la rue, l'un +dit à l'autre qu'il venait d'apercevoir un vent.--Comment! +apercevoir un vent?--Oui, je l'ai vu, te dis-je.--Et +quel air avait-il?--Il avait l'air de vouloir +abattre la cheminée.</p> + +<h4>AIRAIN</h4> + +<p>Un auteur médiocre et brutal, après avoir donné +des coups de bâton à un critique qui l'avait maltraité, +disait:--Il m'a attaqué sur le papier, je lui ai répondu +sur <i>les reins</i>.</p> + +<h4>AIR ÉLÉGANT</h4> + +<p>On a <i>l'air et les gants</i>, lorsqu'on porte des gants +troués.</p> + +<h4>ALITÉ</h4> + +<p>Un malade étendu sur sa couche disait qu'on négligeait +un peu trop son <i>individualité</i>.</p> + +<h4>ALLER</h4> + +<p>On demandait à Fontenelle mourant:--Comment +cela va-t-il?--Cela ne va pas, répondit-il, cela s'en va.</p> + +<p>Le père Bonhours, célèbre grammairien, comme +on sait, fut attaqué d'une maladie violente qui l'emporta +en peu de jours. Se trouvant à l'extrémité, il dit aux +assistants: «Je vas ou je vais bientôt mourir, l'un +et l'autre se dit ou se disent.»</p> + +<h4>ALLIÉS</h4> + +<p>Pendant une alliance de l'Angleterre et de l'Autriche, +on accola deux A dans un cartel, en manière de rébus, +qui signifiait les A liés.</p> + +<h4>ALLUSION</h4> + +<p>Un général, qui avait été battu en Allemagne et en +Italie, aperçut un jour, au-dessus de sa porte, un tambour +qu'on y avait peint, avec cette devise: «On me +bat des deux côtés.»</p> + +<h4>ALTÉRÉE</h4> + +<p>Ma santé est bien altérée, disait un vieux viveur.--Quelqu'un +lui répondit:--Faites-la boire.</p> + +<h4>ALTESSE</h4> + +<p>«Je me suis trouvé, disait un quaker, avec une +excellence et une altesse. On ne saurait être plus bête +que son excellence, et son altesse n'avait pas quatre +pieds huit pouces.»</p> + +<h4>AMENDE</h4> + +<p>Un homme, condamné à une amende qu'il croyait +injuste, disait:--C'est une amende amère!</p> + +<p>Un autre, obligé à réparer un scandale, s'écriait:--Voilà +une amende honorable qui ne m'honorera guère.</p> + +<h4>AMER</h4> + +<p>Quel est le fleuve le plus éloigné de la mer?--C'est +le Doubs.</p> + +<h4>AMIS</h4> + +<p>On parlait de la rareté des amis et du peu de fond +qu'on peut faire sur ceux qui usurpent ce titre.--Comment! +dit un interlocuteur bienveillant, +n'avez-vous pas tous, dans votre cuisine, un petit tamis +dont vous êtes sûr?</p> + +<p>Madame de Sévigné appelait les amis de ses amis, et +qui n'étaient pour elle à proprement parler que des +connaissances, des amis par réverbération.</p> + +<p>Un gentilhomme de Morges, passant devant la poste +aux lettres de ce pays, appela le directeur, et lui dit, +d'un ton impoli: «L'ami, n'y a-t-il rien pour moi?</p> + +<p>--Non, l'ami, il n'y a rien pour toi.</p> + +<p>--Et depuis quand, s'il vous plaît, ce ton de familiarité?</p> + +<p>--Depuis que nous sommes amis.»</p> + +<p>Non-seulement nous avons des amis en foule et +nous en trouvons partout, mais il n'y a pas même de +nom plus prodigué, plus prostitué que celui d'ami: +il devient souvent dans notre langue un terme de familiarité +ou de mépris.</p> + +<p>--Mon ami, dit-on à un postillon, je te donne un +écu si tu me mènes en une heure à Versailles.</p> + +<p>--Mon ami, dit un passant à un polisson, vous +irez au corps de garde si vous faites du train.</p> + +<p>--Mon ami, dit un juge à un fripon, vous êtes acquitté +cette fois faute de preuves: mais si vous continuez, +vous serez pendu.</p> + +<p>N'entendez-vous pas souvent un homme, pour +affirmer une nouvelle, dire: «Je la tiens d'un de mes +amis, <i>que je connais beaucoup</i>.»</p> + +<p>Un jour, au Palais-Royal, le chevalier de C*** avait +gagné 1,500 louis qu'il tenait dans un chapeau. Quelqu'un +s'approche et lui dit: «Mon cher ami, de grâce +prêtez-moi 100 louis.--Je le veux bien, mon cher +ami, répondit le chevalier, pourvu que vous me disiez +comment je m'appelle.» L'autre demeurant sans réponse +à cette question: «Vous voyez bien, mon cher +ami, reprit le chevalier, que vous seriez trop embarrassé +pour trouver le moyen de me rendre ces 100 +louis, si je vous les prêtais.»</p> + +<h4>AMPHIGOURI</h4> + +<p>En voici un modèle en vers:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Un jour qu'il faisait nuit, je dormais éveillé,</p> +<p class="i16">Tout debout dans mon lit, sans avoir sommeillé,</p> +<p class="i16">Les yeux fermés, je vis le tonnerre en silence</p> +<p class="i16">Par des éclairs obscurs annoncer sa présence.</p> +<p class="i16">Tout s'enfuit, nul ne bouge, et ce muet fracas</p> +<p class="i16">Me fit voir en dormant que je ne dormais pas.</p> +</div></div> + +<p>En prose, on cite celui-ci d'un jeune paysan:</p> + +<p>«Il en avait de beaux, mon grand'père, des couteaux, +quand il vivait, dans une gaîne, Dieu veuille +avoir son âme, pendue à sa ceinture.»</p> + +<h4>AMUSER</h4> + +<p>Le fils d'un paysan, qui se mourait, alla chercher +son curé pour l'assister; il était une heure du matin. +Le pauvre garçon resta deux grandes heures à la porte, +l'appelant tout doucement, de peur de l'éveiller brusquement.</p> + +<p>Quand le curé se leva et qu'il apprit la chose:--Mais, +mon enfant, lui dit-il, votre père à présent +sera mort.--Oh! non, monsieur le curé, Pierrot, notre +voisin, m'a promis qu'il l'amuserait jusqu'à votre +arrivée.</p> + +<h4>ÂNE</h4> + +<p>Il y a eu, à Paris, sous le premier empire, une société +littéraire qui s'intitulait la Société des ânes. +Chaque membre était <i>membrâne</i>. Un épicier était l'âne +à gramme, un bourgeois dont la femme s'appelait +Lise, l'âne à Lise; un professeur l'âne à thème, un +compilateur l'ânalecte, un rhéteur l'âne à logique, +un médecin l'âne à peste, etc.</p> + +<p>Ces messieurs tenaient leurs séances à Montmartre.</p> + +<p>Un jour, au commencement du consulat, quatre +officiers généraux occupaient une loge à l'Opéra. C'étaient +Bonaparte, Kilmène, Le Meunier et Lannes, +depuis duc de Montebello. Un curieux demandait qui +étaient ces messieurs, à son voisin qui lui répondit: +«Lannes, Le Meunier, Kilmène et Bonaparte.»</p> + +<p>Napoléon avait un faible pour les calembours. Il +lui vint un jour une députation nombreuse de la ville +de Sézane, qui demandait un sous-préfet. Quand on +la lui annonça, il répondit de sorte qu'on entendît: +«Laissez entrer ces ânes.»</p> + +<p>On sait qu'en organisant l'empire il nomma gouverneur +des pages le général Gardane.</p> + +<p>Beffroy de Reigny a publié la chanson suivante, +adressée à sa soeur Anne pour sa fête. Elle se chante +sur l'air des fraises:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Je fus jadis moissonneur</p> +<p class="i16">Au Parnasse, où je glane;</p> +<p class="i16">Y trouverai-je une fleur</p> +<p class="i16">Pour en parer de bon coeur</p> +<p class="i20"> Une Anne? (<i>ter.</i>)</p> +<br> +<p class="i16">Dis-moi pour quelle raison,</p> +<p class="i16">Ma soeur, tu me condamnes,</p> +<p class="i16">À cause de ton prénom,</p> +<p class="i16">À devenir l'Apollon</p> +<p class="i20"> Des Annes? (<i>ter.</i>)</p> +<br> +<p class="i16">Il est vrai qu'en ce pays,</p> +<p class="i16">Tout peuplé de profanes,</p> +<p class="i16">J'ai vu cent paniers fleuris,</p> +<p class="i16">Et j'ai dit: Oh! dans Paris</p> +<p class="i20"> Que d'Annes! (<i>ter.</i>)</p> +<br> +<p class="i16">Mais toi, voulant prévenir</p> +<p class="i16">Les mauvaises chicanes,</p> +<p class="i16">Tu pris ce nom à plaisir</p> +<p class="i16">Pour nous forcer à chérir</p> +<p class="i20"> Les Annes (<i>ter.</i>)</p> +</div></div> + +<h4>ÂNERIES SIMULÉES</h4> + +<p>Il y a longtemps que je cherchais à m'expliquer +pourquoi on met plutôt un coq qu'une poule au haut +d'un clocher et je crois l'avoir trouvé, disait un bedeau +farceur; c'est que si l'on y mettait une poule et qu'elle +vînt à pondre, les oeufs se casseraient peut-être.</p> + +<h4>ÂNONS</h4> + +<p>On dénonça, en 1790, le couvent de la place Maubert +comme détenant cinq canons et vingt-cinq armes. +Une perquisition fut décrétée; et on trouva dans la +maison <i>vingt-cinq carmes et cinq ânons</i>.</p> + +<h4>ANNÉE</h4> + +<p>Des Limousins fort simples, et qui croyaient que +rien n'était impossible au Saint-Siége, demandaient à +un pape, qui était de leur nation, qu'il leur accordât +deux récoltes de blé dans une année.--Je le veux bien, +répondit le pape, et de plus vos années auront dorénavant +vingt-quatre mois.</p> + +<h4>AOÛT</h4> + +<p>Un prince allemand croyait qu'Augustus ne se traduisait +jamais en français que par Août. En conséquence, +quand il parlait dans notre langue du roi de +Pologne Auguste, il ne l'appelait jamais que le roi +Août.</p> + +<h4>APPARTEMENT</h4> + +<p>Si vous voulez avoir chaud à peu de frais, en hiver, +dans votre appartement, achetez une statuette en +plâtre du premier consul Bonaparte; cassez-lui un +bras, et vous aurez <i>un Bonaparte manchot</i>.</p> + +<h4>APPELER</h4> + +<p>Un Européen se promenant sur les bords du Mississipi +qui, comme on sait, est très-rapide, demanda à +un passant comment on appelait ce fleuve.--Ma foi, +Monsieur, lui répondit le rustre, il n'y a pas besoin +de l'appeler, il vient déjà assez vite.</p> + +<h4>APPÉTIT</h4> + +<p>Un muet qui mourait de faim exprimait sa détresse +par deux lettres, un <i>G</i> grand et un <i>a</i> petit.</p> + +<h4>APPLICATION</h4> + +<p>On a appliqué aux médecins ce passage de l'Écriture +sainte: <i>Non mortui laudabunt te</i>. Les morts ne chanteront +pas vos louanges.</p> + +<h4>APPRÉCIATION</h4> + +<p>Farinelli de musicien était devenu favori du roi +d'Espagne Ferdinand VI, fils de Philippe V. Cafarelli, +autre musicien, disait «que Farinelli était ministre et +le méritait bien, car il était la plus belle voix de l'univers.»</p> + +<h4>AQUEUX</h4> + +<p>Dans le temps du choléra, on défendait les légumes +aqueux.--Nous mangeons pourtant de l'oseille, dit +une dame. Mais ça a des queues si petites!</p> + +<h4>ARAIGNÉE</h4> + +<p>À cet hémistiche du <i>Siége de Paris</i>, tragédie de +M. le vicomte d'Arlincourt:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">On m'appelle <i>à régner</i>...</p> +</div></div> + +<p>Une voix du parterre cria: «C'est un vilain nom.»</p> + +<h4>ARGOT</h4> + +<p>Chaque profession a son argot et chaque métier son +vocabulaire. Le transport de cette langue spéciale hors +de sa sphère produit un singulier effet.</p> + +<p>Quinault était fils d'un boulanger; ce qui a donné +lieu à cette tirade de Furetière, qui ne l'aimait pas: +«Quinault est la meilleure pâte d'homme que Dieu +ait jamais faite; il oublie généreusement les outrages +qu'il a soufferts de ses ennemis, et il ne lui en reste +aucun levain sur le coeur. Il a eu quatre ou cinq cents +mots de la langue, pour son partage, qu'il blute, qu'il +sasse et ressasse, et qu'il pétrit le mieux qu'il peut.»</p> + +<h4>ARLEQUIN</h4> + +<p>Le célèbre médecin Silva, mort à Paris en 1742, fut +appelé près d'un malade consumé d'une bile noire. +«Je vous conseille, Monsieur, lui dit-il, d'aller voir +Arlequin; c'est le meilleur moyen de dissiper votre +bile.» Malheureusement le malade était le seul homme +peut-être qui ne pouvait user du remède. C'était Arlequin +lui-même.</p> + +<h4>ARRÊTÉ</h4> + +<p>Un jour d'hiver, en 1856, un voyageur attardé arriva +de nuit dans une auberge de Privas. L'hôte, qui le +connaissait, lui ayant demandé comment il se faisait +qu'il arrivât si tard, il répondit qu'il avait été arrêté +en traversant les montagnes de l'Ardèche. Là-dessus, +il soupa, se coucha et défendit qu'on le réveillât sous +aucun prétexte, parce qu'il était fatigué et voulait +dormir.</p> + +<p>Cependant, le bruit de son aventure se répandit +dans le voisinage: on s'effraya de savoir que les voyageurs +pouvaient être arrêtés si près de la ville; la +gendarmerie prit les armes, et alla en patrouille sur +la route qu'avait suivie le voyageur.</p> + +<p>La nuit s'écoula en recherches inutiles; on ne trouva +pas le moindre brigand. Le lendemain, comme le +voyageur arrêté se chauffait tranquillement au coin du +feu de l'auberge, le brigadier de gendarmerie entra:</p> + +<p>--Monsieur, lui dit-il, combien étaient-ils?</p> + +<p>--Qui?</p> + +<p>--Ceux qui vous ont demandé la bourse ou la vie.</p> + +<p>--Personne ne m'a demandé la bourse ou la vie.</p> + +<p>--Quoi! vous ne vous êtes donc pas plaint d'avoir +été arrêté dans la journée d'hier?</p> + +<p>--J'ai été arrêté en effet.</p> + +<p>--Par des voleurs?</p> + +<p>--Non, par un ruisseau débordé qui m'a forcé de +faire un très-long détour.</p> + +<p>--Monsieur, il fallait le dire.</p> + +<p>--Il fallait me le demander.</p> + +<p>ARROGANCE</p> + +<p>On en accuse les passementiers. Mais s'ils mettent +de l'<i>art aux ganses</i>, c'est qu'il le faut.</p> + +<h4>ART</h4> + +<p>Comment les voleurs et les guerriers sont-ils dans la +classe des artistes?--C'est que les premiers cultivent +l'<i>art goth</i> et les seconds l'<i>art mûr</i>.</p> + +<h4>ASNIÈRES</h4> + +<p>Dans tous les recueils facétieux on ne manque pas +de citer les expressions singulières et les naïvetés d'un +personnage probablement composite qu'on appelle le +baron d'Asnières. Nous ne pouvons nous dispenser de +rapporter ici ce qu'elles ont de plus saillant.</p> + +<p>Il demandait un jour à un jeune homme quel était le +plus âgé de son aîné ou de lui.</p> + +<p>Un de ses fermiers se plaignait de ce que les taupes +lui gâtaient un beau pré.--Vous êtes bien embarrassé, +répondit-il; faites-le paver.</p> + +<p>En voyage, il fut obligé de s'arrêter dans une +auberge pour y coucher. On lui donne une chambre +dont les cloisons étaient presque entr'ouvertes: il s'en +plaignit à l'hôtesse.--Cela est détestable, dit-il, votre +chambre est la plus mauvaise du monde; on y voit +le jour toute la nuit.</p> + +<p>Un jour il se coupa le doigt, et s'écria:--On me +l'avait bien dit que ce couteau coupait tout ce qu'il +voyait!</p> + +<p>On lui contait d'un savant qu'il possédait huit +langues.--Celui-là, répondit-il, doit parler beaucoup.</p> + +<p>Il demanda un jour si les chiens du roi allaient à +pied à la chasse.</p> + +<p>Dans une société il entend annoncer qu'il était arrivé +deux vaisseaux chargés de Terre-Neuve: il demanda +si la vieille n'était pas aussi bonne.</p> + +<p>Une dame, près d'un feu clair, racontait une histoire. +Une étincelle vola sur sa robe, et elle ne s'en +aperçut que lorsque le feu eut fait des progrès.--Je +le voyais, Madame, dit-il, mais je ne voulais pas +avoir l'impolitesse d'interrompre votre récit.</p> + +<p>Quelqu'un lui contant qu'il avait dîné avec un poëte +qui l'avait régalé au dessert d'une excellente épigramme, +il fit venir son cuisinier et lui dit en colère: +--D'où vient que tu ne m'as pas encore servi une +épigramme?</p> + +<p>Quelqu'un lui ayant annoncé qu'un de ses amis +était mort, il répondit:--Je n'en crois rien, car si +cela était, il me l'aurait écrit.</p> + +<p>Il dînait, un jour de carême, chez un de ses amis. +On servit des harengs saurs. Il les trouva si bons, qu'il +demanda où il pourrait en avoir pour peupler ses +étangs.</p> + +<h4>ASSONANCES</h4> + +<p>On en faisait assez du temps de Louis XVI. M. Gozlan +en a fait d'agréables. En voici un exemple emprunté +à l'un des spirituels écrivains de la <i>Gazette des Tribunaux</i>:</p> + +<p>La femme Dagobert a mis son bonnet à l'envers. Un +vieux châle vert, placé de travers, un jupon presque +blanc composent son accoutrement. Le président lui dit:</p> + +<p>--Avant-hier, quelqu'un vous vit, marché des Innocents, +demander l'aumône aux passants.</p> + +<p>--Mais...</p> + +<p>--C'est un délit; la loi l'interdit.</p> + +<p>--Alors que la loi me donne de quoi! Mon coeur +reconnaissant bénira le gouvernement.</p> + +<p>--Avez-vous des enfants?</p> + +<p>--J'en ai zévu trois dans le temps.</p> + +<p>--Où sont-ils?</p> + +<p>--Mais ils sont où tous les défunts s'en vont.</p> + +<p>--Et votre mari?</p> + +<p>--Le pauvre homme aussi. Je n'ai pour soutien que +la charité des chrétiens.</p> + +<p>Chacun plaint de concert la pauvre femme Dagobert, +et le tribunal du Code pénal usant sagement dans +son jugement, applique seulement quatre jours d'emprisonnement.</p> + +<p>Il est près de Paris, dans la ville de Saint-Denis, un +lieu destiné à tous les infortunés. Après sa prison, dans +cette maison, la vieille aura gratis un lit, la soupe et +du pain bis.</p> + +<h4>ATHÉE</h4> + +<p>Un traité des preuves de l'existence de Dieu a paru +en 1845, avec la signature A. T.</p> + +<h4>ATOUT</h4> + +<p>Quand faut-il jouer pour être heureux aux cartes?--Quand +on est enrhumé, parce qu'on a toujours de +la toux.</p> + +<h4>ATTRAPER</h4> + +<p>Savez-vous, dit Dasnières, une bonne manière d'attraper +les pies?</p> + +<p>--Il y a plus d'une manière de les attraper: les +lacets, la glue, les appâts; que sais-je encore!</p> + +<p>--Vieux moyens; voici ma méthode: je mets un +fromage dans mon jardin, un fromage à la pie. L'oiseau +vient et mange le fromage. Le lendemain, nouveau +fromage, nouveau régal. La pie s'y habitue. Le troisième +jour, je ne mets rien; la pie vient, croyant +trouver un fromage: votre serviteur! Elle est attrapée.</p> + +<h4>AUDITEUR</h4> + +<p>Un benêt, qui avait acheté une charge d'auditeur à +la cour des comptes, étant au sermon, se levait et faisait +une inclination toutes les fois que le prédicateur +disait: Mon cher auditeur.</p> + +<h4>AUTOMATE</h4> + +<p>Un plaisant disait que sa cuisinière était aussi habile +que Vaucanson, puisqu'elle faisait des canards aux +tomates.</p> + +<h4>AVALER</h4> + +<p>Un médecin, ayant écrit une ordonnance, la donna +au malade en disant:--Voilà ce que vous avalerez, +demain matin.</p> + +<p>Le malade prit le papier du médecin, l'avala, et +guérit.</p> + +<h4>AVENT</h4> + +<p>Quel est le jour de l'année qui n'en suit pas un +autre?--L'Avent.</p> + +<h4>AVEUGLE</h4> + +<p>Il y a quelques mois, la princesse Mathilde avait +commandé son portrait à l'un de nos peintres les plus +distingués.</p> + +<p>Heureuse d'échapper, pendant quelques instants, au +cérémonial et à l'étiquette, joyeuse de pouvoir se promener +librement, comme une simple jolie femme, dans +les environs des Tuileries, la princesse se rendait chaque +matin, à pied, dans l'atelier de l'artiste privilégié. +Un jour en traversant le pont des Arts, elle entendit +une voix lamentable qui criait:</p> + +<p>--Ma belle dame charitable, ayez pitié d'un pauvre +aveugle, s'il vous plaît.</p> + +<p>Un pauvre diable assis sur un banc du pont, tenant +entre ses jambes un chien qui tendait une sébile, +implorait la charité publique. La princesse jeta dans +la sébile une pièce blanche et passa. Le lendemain +matin, même don;--pendant plusieurs jours, même +jeu. Mais un matin, la princesse distraite oubliait en +passant de faire son aumône, lorsqu'une voix connue +lui dit:--Eh quoi! madame la princesse oublie aujourd'hui +son pauvre aveugle!...</p> + +<p>La princesse étonnée s'arrête et interroge le mendiant, +qui se tenait debout en la regardant respectueusement.--Vous +me connaissez donc, mon brave +homme?--Ah! oui, Madame, vous donnez la pièce +chaque matin. Et quand on vous a vue une fois, vous +êtes si belle qu'on ne vous oublie pas.--Mais comment +pouvez-vous le savoir, puisque vous êtes aveugle?--Oh! +madame la princesse, ce n'est pas moi qui suis +aveugle! C'est mon pauvre chien... Je dis: Donnez +pour le pauvre aveugle!...</p> + +<p>On demandait à Aristote pourquoi on avait tant +d'amour pour la beauté; il répondit: Voilà la question +d'un aveugle.</p> + +<h4>AVIS</h4> + +<p>Odry fut arrêté un soir, rue de Richelieu, devant la +Bibliothèque impériale.--La bourse ou la vie! lui +demanda le voleur.--Sans se déconcerter, Odry lui +répondit:--La Bourse, au bout de la première rue à +droite. Quant à l'avis, le meilleur que je puisse vous +donner, c'est de prendre un métier moins couru.</p> + +<h4>AVOIR</h4> + +<p>Un homme d'esprit disait en 1848:--Depuis cinquante +ans la France fait, défait, refait et redéfait.</p> + +<p>Jusqu'à présent nous n'avons pas encore la République, +c'est la République qui nous a.</p> + +<h4>À VUE</h4> + +<p>Un fripon se tira des instances qu'on lui faisait pour +payer une dette dont il ne s'occupait pas, en donnant +à son créancier une traite à vue sur un de ses amis +qui le valait.--Or cet ami était aveugle. Quand on +lui présenta la traite:--Elle est à vue? dit-il; si vous +voulez que je la paie, faites-moi voir.</p> + +<br> +<h2>B</h2> + +<h4>BADAUD</h4> + +<p>L'expression de badaud qu'on applique aux Parisiens +comme une injure, vient, dit-on, d'un mot celtique +qui signifie batelier, parce que les Parisiens +faisaient autrefois un grand commerce par eau. La +ville de Paris porte même un navire pour armoiries.</p> + +<p>Journel, qui était l'imprimeur de Ménage, ne voulait +pas imprimer ce que l'auteur avait écrit sur la badauderie +des Parisiens, ce qui inspira à Ménage ces quatre +vers:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20"> De peur d'offenser sa patrie,</p> +<p class="i16">Journel, mon imprimeur, digne enfant de Paris,</p> +<p class="i16">Ne veut rien imprimer sur la badauderie.</p> +<p class="i20"> Journel est bien de son pays.</p> +</div></div> + +<h4>BAL</h4> + +<p>Un fournisseur envoyant des caisses de schakos à +l'armée, disait:--Voilà des coiffures qui vont aux +balles.</p> + +<h4>BANQUEROUTE</h4> + +<p>Le nègre du bailli J***, entendant dire à la table de +son maître que quand on faisait banqueroute, on ne +donnait tout au plus que la moitié de ce qu'on devait, +résolut d'en faire son profit; il vola toute la vaisselle, +qui était considérable, et la renferma dans un coffre +qu'il descendit dans un vieux puits où il n'y avait pas +d'eau. On chercha longtemps et l'argenterie et le +nègre; enfin on le découvrit au fond du puits, assis +sur le coffre.--Que fais-tu là avec ma vaisselle? lui demanda +son maître.--Monsieur, je fais banqueroute, +moitié pour vous, moitié pour moi.</p> + +<h4>BARBARISME</h4> + +<p>On demandait à une dame comment elle se portait.--Oh! +répondit-elle, je souffre beaucoup d'un rhumatisse.--En +ce cas-là, Madame, lui dit-on, faites beaucoup +d'exercisme.</p> + +<h4>BAS</h4> + +<p>On dit que les bonnetiers doivent être discrets, +parce qu'ils ont coutume de parler bas.</p> + +<h4>BAS LONGS</h4> + +<p>On demandait à quelqu'un à quoi servaient les ballons. +Il entendit mal et répondit:--À chausser les +grandes jambes.</p> + +<h4>BASSE-COUR</h4> + +<p>Sur le costume prescrit aux magistrats en 1790, on +fit l'épigramme suivante:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Au lieu de robe et de simarre,</p> +<p class="i16">Accoutrement lourd et bizarre,</p> +<p class="i20"> Dont s'affublaient nos anciens sénateurs,</p> +<p class="i20"> Un décret veut que les nouveaux jugeurs,</p> +<p class="i20"> En manteaux courts, en pourpoints lestes,</p> +<p class="i16">Au métier de Cujas soient plus prompts et plus prestes.</p> +<p class="i16">Puis supprimant encore et bonnets et mortiers,</p> +<p class="i16">Attributs surannés des Molés, des Séguiers,</p> +<p class="i16">L'ordonnance prescrit pour moderne costume</p> +<p class="i16">Que ces dandins auront à la toque une plume.</p> +<p class="i16">Tels emplumés, je crois, pourront avoir un jour,</p> +<p class="i16">Aux yeux de bien des gens, un air de basse-cour.</p> +</div></div> + +<h4>BATISTE</h4> + +<p>On donnait un jour au Théâtre-Français une pièce +où jouait la famille Batiste. Un provincial s'informait +des noms des acteurs:--Eh! quel est celui-là?--Batiste +aîné, lui répondit-on.--Et celui-là?--Batiste +cadet.--Et celui-là?--Batiste jeune.--Et cette actrice?--C'est +Mme Batiste mère.--Et celle-ci?--C'est +Mme Batiste bru. Ah mon Dieu! s'écria le provincial, +c'est donc là une pièce de batiste.</p> + +<h4>BATTERIE</h4> + +<p>Le marquis de Bièvre regardait deux marmitons +qui se boxaient, et quelqu'un lui ayant demandé ce +que c'était que ce bruit:--Ce n'est rien, répondit-il, +c'est une batterie de cuisine.</p> + +<h4>BAVAROISE</h4> + +<p>Quand le prince Eugène de Beauharnais obtint la +main d'une princesse de Bavière, un soldat disait:--C'est +un bel homme et un grand coeur. C'est dommage +qu'il n'ait plus de dents.--Bah! dit un autre, +on n'a pas besoin de dents pour prendre une bavaroise.</p> + +<h4>BAZIRE ET CHABOT</h4> + +<p>Relation d'une aventure de 1791:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Un jour, chez un bourgeois, Bazire</p> +<p class="i16">S'en fut diner avec Chabot.</p> +<p class="i16">Chabot recommandait Bazire,</p> +<p class="i16">Bazire patronait Chabot;</p> +<p class="i16">On reçut assez bien Bazire;</p> +<p class="i16">Mais on lui préféra Chabot.</p> +<p class="i16">Si bien que le brillant Bazire</p> +<p class="i16">Arracha la barbe à Chabot.</p> +<p class="i16">Et la crinière de Bazire</p> +<p class="i16">Resta dans les mains de Chabot.</p> +<p class="i16">Les coups de poing du sieur Bazire</p> +<p class="i16">N'empêchaient pas ceux de Chabot.</p> +<p class="i16">Pour séparer le doux Bazire</p> +<p class="i16">D'avec le vertueux Chabot,</p> +<p class="i16">Le maître du lieu prit Bazire,</p> +<p class="i16">Ses gens empoignèrent Chabot;</p> +<p class="i16">Par la rampe on jeta Bazire</p> +<p class="i16">Et par la fenêtre Chabot.</p> +<p class="i16">Depuis ce temps, Monsieur Bazire</p> +<p class="i16">Dit du mal de Monsieur Chabot;</p> +<p class="i16">A son tour de Monsieur Bazire</p> +<p class="i16">Médit l'ex-capucin Chabot.</p> +<p class="i16">Mais en voyant Monsieur Bazire,</p> +<p class="i16">Ainsi que son ami Chabot,</p> +<p class="i16">On dit que Chabot vaut Bazire</p> +<p class="i16">Et que Bazire vaut Chabot.</p> +</div></div> + +<h4>BEAU</h4> + +<p>Les paysans futés aiment à faire ce compliment: +Vous êtes <i>beau dès</i> le matin, <i>beau su'</i> le midi, <i>encore +beau</i> le soir.</p> + +<p>Le gendre d'un de nos représentants de 1848, que +nous ne voulons pas chagriner en le nommant, disait:--J'ai +une belle-mère qui n'est pas belle et un +beau-père qui est bien laid.</p> + +<h4>BELLE LUNE</h4> + +<p>Le maréchal Victor avait débuté en simple soldat +dans la carrière qu'il a illustrée; et lorsqu'il fit ses +premières campagnes, ses camarades ne le connaissaient +que sous le sobriquet de Beausoleil. Quand l'empereur +Napoléon l'eut nommé maréchal de l'Empire, +il l'appela et lui dit:--Beausoleil, je te fais duc de +Bellune.</p> + +<h4>BÉTANCOUR</h4> + +<p>M. de Bétancour, qui logeait près du Louvre, avait +beaucoup à se plaindre des blanchisseuses voisines qui, +avec leurs battoirs sans cesse en mouvement, l'empêchaient +de dormir. Une fois, outré de colère, il s'écria:--Si +je ne me retenais pas, j'irais mettre le feu +à la rivière.</p> + +<p>Un jour, voyant un homme qui louchait en lisant:--Cet +homme-là, dit-il, doit être doublement savant, +car il lit deux pages à la fois.</p> + +<p>Il tomba malade; son médecin lui ayant demandé +s'il n'avait rien pris dans la journée:--Pardon, répondit-il, +j'ai pris ce matin une puce.</p> + +<h4>BEETHOVEN</h4> + +<p>Pourquoi les sangsues passent-elles pour musiciennes?--Parce +qu'elles font des ouvertures de <i>bête +aux veines</i>.</p> + +<h4>BÊTISES</h4> + +<p>On ferait sous ce titre bien des volumes. Une des +plus grosses, dans le bêtisiana moderne, est le compliment +que Victor Hugo fit tout haut à Louis-Philippe, +dans une réception officielle:--Sire, Dieu a +besoin de vous...</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">On vient de perdre un jeune chien</p> +<p class="i20">Lequel n'avait ni queue ni tête.</p> +<p class="i20">Ceux qui l'ont trouvé n'auront rien.</p> +<p class="i20">C'est une récompense honnête,</p> +<p class="i20">Sans queue aussi bien que sans tête.</p> +</div></div> + +<h4>BIEN FAIT</h4> + +<p>Un prédicateur disait en chaire que tout ce que +Dieu a fait est bien fait.--Voilà, pensa un bossu, une +parole hasardée. Il attend le prédicateur à la porte de +l'église, et lui dit:--Mon père, vous avez prêché +que Dieu a bien fait toutes choses. Voyez donc comme +je suis bâti!--Mais, mon ami, répond le prédicateur, +vous êtes bien fait pour un bossu.</p> + +<h4>BIÈRE</h4> + +<p>De vieux littérateurs de l'Empire ont appelé le cercueil +de Napoléon <i>la bière de Mars</i>.</p> + +<p>Un brasseur parisien, du temps du calendrier républicain, +appelait sa bière de Mars <i>bière de Germinal</i>.</p> + +<p>On afficha en 1793 la tragédie de <i>Jean-sans-Terre</i>: +quelques patriotes du faubourg Saint-Antoine, croyant +qu'on voulait jouer le général Sans-Terre, qui était +brasseur, arrachèrent toutes les affiches et se portèrent +en masse au théâtre de la République. On parvint à +les apaiser en leur donnant les premières places; +mais l'on ne put en être maître, lorsque Sans-Terre +dit au tyran:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Tu crois m'intimider en découvrant ma bière.</p> +</div></div> + +<p>--Je l'avais bien dit! s'écria un d'entre eux. A +bas!... à bas!... à bas les muscadins!... (On baissa la +toile.)</p> + +<p>M. de Bièvre, voyant des hommes qui suaient pour +mettre au cercueil un homme dont on avait mal pris +la mesure, leur dit:--C'est <i>en vain</i> que vous vous +mettrez <i>en eau</i> pour le mettre <i>en bière</i>.</p> + +<h4>BIÈVRE</h4> + +<p>A propos de M. de Bièvre, qui a fait tant de calembours, +un amateur demandait quelle différence il y +avait entre M. de Bièvre et une épingle. On ne devinait +pas.--C'est, dit-il, qu'une épingle a une tête et +une pointe, tandis que M. de Bièvre a beaucoup de +pointes, mais pas de tête.</p> + +<p>Le marquis de Bièvre n'est mort qu'en 1789, époque +où le calembour allait faire place à des jeux plus sinistres. +Il a publié quelques petits ouvrages assez rares: +l'<i>Ange Lure</i>, la <i>Fée Lure</i>, la lettre à la comtesse Tation, +par le sieur (scieur) de Bois-Flotté, étudiant en droit-fil, +l'<i>Almanach des calembours</i>, et quelques autres +plaisanteries.</p> + +<p>Si le marquis de Bièvre a introduit chez nous la +manie des calembours, il a quelquefois fourni des armes +contre lui-même. Il était fils du chirurgien du +roi, nommé Maréchal. Dédaignant le nom de son +père, il acheta la terre de Bièvre. Un de ses amis, qui +l'entendait annoncer sous ce titre, lui dit:--Mais, +mon ami, tu as mal fait de ne prendre que le titre de +marquis; il t'en aurait moins coûté de te faire appeler +le maréchal de Bièvre.</p> + +<h4>BIGOT</h4> + +<p>Napoléon, qui aimait les jeux de mots, fut charmé +de nommer ministre des cultes M. Bigot, qui signait: +Bigot de Préameneu.</p> + +<h4>BLANC</h4> + +<p>Un procureur avait promis à un homme, accusé d'un +crime de faux, que, par ses soins, il sortirait de cette +affaire blanc comme neige. L'accusé, flatté de cette espérance, +donnait au procureur tout l'argent qu'il lui +demandait. Cependant, il succomba et fut condamné à +faire amende honorable en chemise. Il dit alors au +procureur:</p> + +<p>--Vous m'avez trompé par vos promesses.</p> + +<p>--Comment donc! répondit le procureur; je vous +tiens parole: vous voilà en chemise; n'est-ce pas +sortir de là blanc comme neige?</p> + +<h4>BOILEAU</h4> + +<p>Le cardinal Janson disait à Boileau:--Pourquoi +vous appelez-vous Boileau? C'est un nom froid. J'aimerais +mieux, à votre place, m'appeler Boivin.--Et +vous, Monseigneur, répondit le poëte, pourquoi vous +appelez-vous Janson? c'est un nom sec. A votre +place, j'aimerais mieux m'appeler Janfarine.</p> + +<h4>BOIS</h4> + +<p>Un gentilhomme breton disait au maréchal de La +Meilleraye:--Si je ne suis pas maréchal, je suis du +bois dont on les fait.--Aussi le deviendrez-vous, répondit +La Meilleraye, quand on les fera de bois.</p> + +<h4>BOITER</h4> + +<p>Un homme qui venait d'acheter un cheval, à la vue, +reconnut qu'il était boiteux et voulut résilier son marché. +Mais le vendeur témoigna qu'il l'avait prévenu de +ce défaut, en lui disant:--Il <i>boite</i> et mange bien.</p> + +<h4>BON</h4> + +<p>Les marguilliers d'une paroisse de Paris, ayant +appelé un orfévre huguenot pour réparer une figure +de saint Michel, l'orfévre, considérant cette figure, +leur dit:--Messieurs, votre diable est fort bon, mais +votre saint Michel ne vaut rien.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Bonnes gens font les bons pays;</p> +<p class="i20">Bon coeur fait le bon caractère;</p> +<p class="i20">Bons comptes font les bons amis;</p> +<p class="i20">Bon fermier fait la bonne terre.</p> +<p class="i20">Bons livres font les bonnes moeurs,</p> +<p class="i20">Bons maîtres les bons serviteurs;</p> +<p class="i20">Bons maris font les bonnes femmes,</p> +<p class="i20">Bonnes femmes les bons maris,</p> +<p class="i20">Bonnes actions les bonnes âmes,</p> +<p class="i20">Bons sentiments les bons esprits.</p> +<p class="i20">Le bon goût fait les bons écrits;</p> +<p class="i20">Bonne foi les bonnes affaires,</p> +<p class="i20">Bonnes lois les bons citoyens;</p> +<p class="i20">Bons fils encor font les bons pères,</p> +<p class="i20">Bonnes filles les bonnes mères.</p> +<p class="i20">Dieu, qui tout est bon, fait tous biens.</p> +</div></div> + +<h4>BONA</h4> + +<p>Après la mort du pape Clément IX, beaucoup de +grands personnages désignaient pour son successeur +le cardinal Bona, sur quoi se fit cette pasquinade que +<i>Papa Bona</i> serait un solécisme. Le P. Daugières répondit +par le jeu de mots suivant:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Grammaticæ leges plerumque Ecclesia spernit:</p> +<p class="i20">Fors erit ut liceat dicere Papa Bona.</p> +<p class="i20">Vana solæcismi ne te conturbet imago,</p> +<p class="i20">Esset Papa bonus, si Bona Papa foret.</p> +</div></div> + +<h4>BONHEUR</h4> + +<p>Le moyen d'être heureux en ménage, c'est de se +marier au point du jour, parce qu'alors on est sûr +d'avoir fait un mariage de bonne heure.</p> + +<p>Une jeune fille, peu formée à l'orthographe, écrivait +à son fiancé:--Venez de bonne heure, vous ferez +le mien.</p> + +<h4>BONJOUR</h4> + +<p>M. Casimir Bonjour, candidat à l'Académie, se présente +un jour pour faire sa visite à un des quarante. +Une femme de chambre vient lui ouvrir la porte.--Votre +nom, Monsieur! dit-elle. Le candidat répond +avec son plus gracieux sourire:--Bonjour. Flattée de +cette politesse, la jeune fille répond:--Bonjour, Monsieur; +voulez-vous me dire votre nom?--Je vous dis +Bonjour.--Et moi aussi, bonjour, Monsieur; qui +faut-il que j'annonce?--Eh Bonjour! c'est mon +nom. La camériste comprit alors qu'au lieu de dire: +Bonjour, Monsieur, il fallait dire: Monsieur Bonjour.</p> + +<h4>BONNET DE NUIT</h4> + +<p>--Quels sont les vins qu'il convient de boire avant +de se coucher pour bien dormir?</p> + +<p>Les vins de <i>Beaune et de Nuits</i>.</p> + +<h4>BONS MOTS</h4> + +<p>Un meunier cheminait avec son âne. Un bel esprit le +rencontre et se met à crier: «Où allez-vous donc vous +deux?--Chercher du foin pour nous trois,» répond +le meunier.</p> + +<p>Le président d'Ormesson, qui avait un nez énorme +et des narines extrêmement larges, causait avec le +marquis de Villette dans une embrasure et mettait +beaucoup de chaleur dans cet entretien. Lorsque +Villette se rapprocha du cercle, il dit à quelqu'un:--Quand +cet homme me parle de près, j'ai toujours peur +qu'il ne me renifle.</p> + +<h4>BONTÉ</h4> + +<p>M. de Kératry, qui avait assez de laideur, avec une +belle âme, déjeunait habituellement dans un café, et +son déjeuner consistait toujours en ce qu'on appelle +une tasse de café à la crème. Pour lui seul, la dame du +comptoir affectait de dire, en le désignant:--Garçon, +versez du café au laid.</p> + +<p>--Madame, lui dit un jour M. de Kératry, vous +avez d'excellent café, mais vous n'avez assurément +pas de <i>bon thé</i>.</p> + +<h4>BORGNE</h4> + +<p>Un borgne gageait contre un homme qui avait +bonne vue, qu'il voyait plus que lui. Le pari est accepté.--J'ai +gagné, dit le borgne, car je vous vois +deux yeux, et vous ne m'en voyez qu'un. (Voyez <i>Yeux</i>.)</p> + +<h4>BOTTES SANS COUTURES</h4> + +<p>Dans quelques tombolas où se distribuent des lots +plaisants, des amateurs ont gagné une paire de bottes +sans coutures. C'étaient deux bottes d'oignons ou de +navets.</p> + +<h4>BOUFFLERS</h4> + +<p>Quel est le poëte qui s'est nourri des aliments les +plus légers?--Boufflers.</p> + +<h4>BOUILLON</h4> + +<p>Un historien a dit que, dans les Croisades, Godefroi +de Bouillon était le général le plus <i>consommé</i>.</p> + +<h4>BOURVALAIS</h4> + +<p>Ce financier, qui avait amassé des biens immenses +dans les affaires, sous Louis XIV, ayant trouvé, dans +un de ses étangs, un brochet d'une grosseur extraordinaire, +en fit présent à M. le premier président de +Harlay. Ce magistrat l'invita à en venir manger sa +part. Comme tous les conviés admiraient l'énormité +de ce poisson monstre:--Messieurs, leur dit le premier +président, ne soyez pas surpris, c'est le bourvalais +des étangs de monsieur.</p> + +<h4>BOUT</h4> + +<p>Comment faire pour ne pas se crotter dans les rues +de Paris?--Il faut ne pas aller jusqu'aux boues.</p> + +<h4>BRUNET</h4> + +<p>Célébrité dans le bazar des calembours et des bêtises +excentriques. Nous ne citerons que quelques-unes +de ses expressions singulières:</p> + +<p>«Il faisait un froid d'enfer, ce matin. J'en avais +l'onglée au menton.</p> + +<p>«Voilà un événement qui va leur tailler bien des +croupions.</p> + +<p>«Cet homme paraît plus vieux qu'il n'en a l'air. +C'est peut-être son oeil borgne qui en est cause.</p> + +<p>«On dit que Paris va sauter. Je crois qu'il serait +prudent de fermer les fenêtres.</p> + +<p>«Le soleil coule pour tout le monde.</p> + +<p>«Ce n'est pas de l'orient que vient cette étoffe de +Perse; le marchand assure que c'est du levant.</p> + +<p>«Si les écrevisses ne devenaient pas rouges en +cuisant, il faudrait les changer de nom.--Pourquoi?--parce +qu'on dit: Rouge comme une écrevisse.</p> +<br> +<h2>C</h2> + +<h4>CACOPHONIE</h4> + +<p>Un beau parleur, contant le naufrage d'un vaisseau, +disait que le navire avait pris le mors aux +dents.</p> + +<p>Le même exprimait la marche rapide d'un ballon, +en disant qu'il allait ventre à terre.</p> + +<p>Il habitait Paris et se plaisait à dire qu'il y a de la +rue de Tournon à la rue de Richelieu un grand laps +de temps.</p> + +<h4>CALET</h4> + +<p>On demandait à un Parisien s'il connaissait le Pas-de-Calais.--Je +les connais tous, répondit-il; il appliquait +sa réponse aux pas du danseur Calet.</p> + +<h4>CAMARD</h4> + +<p>Un homme, dont le nez était fort camard, étant +venu à éternuer devant un railleur, celui-ci le salua +et ajouta:--Dieu vous conserve la vue. Celui qui venait +d'éternuer, surpris de ce voeu, lui demanda pourquoi +il le faisait.--Parce que, répondit le railleur, votre nez +n'est pas propre à porter des lunettes.</p> + +<h4>CAMUS</h4> + +<p>Guy Patin, médecin célèbre, fit un procès à Renaudot, +célébrité d'un autre genre, qui exerçait la médecine, +à Paris, sans s'être fait agréer au corps des médecins +de cette capitale. Renaudot fut condamné.--Vous +avec perdu et gagné à la fois, lui dit Patin.--Comment +gagné? répliqua Renaudot.--Mais vous +êtes entré camus au palais, et vous en sortez avec un +pied de nez.</p> + +<h4>CAMPENON</h4> + +<p>Lorsque Ducis mourut, MM. Michaud et Campenon +se disputèrent son fauteuil à l'Académie française. +M. Campenon, prenant les devants, fit cette épigramme +contre son concurrent:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i18">Au fauteuil de Ducis on a porté Michaud,</p> +<p class="i18">Ma foi pour l'y placer il faut un ami chaud.</p> +</div></div> + +<p>Michaud répliqua:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i18">Au fauteuil de Delisle aspire Campenon;</p> +<p class="i18">Son talent suffit-il pour qu'il s'y campe? non.</p> +</div></div> + +<h4>CANCAN</h4> + +<p>Dans une société où l'on parlait du Général De Caen, +une personne qui l'avait connu à l'époque où il +n'était encore qu'aide de camp de son frère, raconta +ce qui suit:</p> + +<p>En se rendant à l'armée, De Caen fut arrêté par la +gendarmerie.--Comment vous nommez-vous? lui +demanda le brigadier.--De Caen.--D'où êtes-vous?--De +Caen.--D'où venez-vous?--De Caen.--Qui +êtes-vous?--Aide de camp.--De qui?--Du général +de Caen.--Où allez-vous?--Au camp.--Assez de +cancans comme cela, dit le gendarme, je vous +arrête.</p> + +<h4>CARTE</h4> + +<p>C'est un mot qui a plusieurs sens, nous empruntons +ce couplet à une chanson de M. Goulard:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Le politique sur la carte</p> +<p class="i20">Visite le lieu des combats;</p> +<p class="i20">Le gourmand consulte la carte,</p> +<p class="i20">Pour faire choix d'un bon repas.</p> +<p class="i20">Souvent le fou sur une carte</p> +<p class="i20">Tout son argent voit emporté;</p> +<p class="i20">Et plus tard, si je perds la carte,</p> +<p class="i20">Je perds aussi la liberté.</p> +</div></div> + +<p>Les journaux racontaient, il y a trente ans, l'anecdote +suivante à propos des cartes de visite. Un maître +de maison était monté en équipage en compagnie +de sa dame, lorsqu'il s'aperçoit qu'il a oublié ses +cartes; il dit au laquais nouvellement à son service +d'aller les prendre sur la cheminée de la salle à manger. +Ce qui fut dit fut fait, et, fouette cocher, les visites +vont bon train. Au bout d'un certain temps, le +maître demande au groom s'il a encore beaucoup de +cartes.</p> + +<p>--Monsieur, répond celui-ci, il me reste encore le +roi de pique, le dix de coeur et l'as de trèfle! Le +pauvre garçon avait pris les cartes à jouer au lieu +des cartes de visite.</p> + +<h4>CARTERON</h4> + +<p>Un libraire de Lyon, nommé Carteron, avait pour +enseigne une balance, avec des petits poids d'un côté +et des livres de l'autre. Ces mots étaient au bas: «Les +quarterons font les livres.»</p> + +<h4>CAUSES</h4> + +<p>Un particulier ayant dit à Garrick que l'avocat +Barell avait laissé fort peu d'<i>effets</i> à sa mort:--Cela +n'est pas étonnant, reprit ce comédien, il avait fort +peu de <i>causes</i>.</p> + +<h4>CÉDEZ</h4> + +<p>S'écrit avec les deux lettres: CD.</p> + +<h4>CENSEURS</h4> + +<p>Pourquoi faut-il prendre garde à ce qu'on dit devant +les fils uniques?</p> + +<p>--Parce qu'ils sont <i>sans soeurs</i>.</p> + +<h4>CENT ANS</h4> + +<p>Un farceur disait:--Celui qui arrivera à tuer le +temps vivra sans temps.</p> + +<h4>CERCEAU</h4> + +<p>Dans les farces du théâtre italien, Arlequin disait à +un autre qui le battait avec sa ceinture:--Tu te +conduis comme un tonnelier; tu me donnes des coups +de <i>serre sot</i>.</p> + +<h4>CERVELLE</h4> + +<p>Deux Suisses, le sabre à la main, se battaient à outrance +dans une place. Un paysan passe par là, et le +coeur ému de compassion, s'efforce de les séparer; mais +le pauvre diable, pour toute récompense de son zèle, +reçoit à la tête un coup de sabre qui le jette à la renverse. +On appelle un chirurgien qui veut voir si la +cervelle est atteinte.--Ah! dit le paysan, je n'en +avais point lorsque je me suis trouvé dans cette querelle.</p> + +<p>Le jeu de mots qui suit est dans le même sens:</p> + +<p>Au siége de Landrecies, en 1655, M. de La Feuillade +fut blessé d'un coup de mousquet à la tête. Les chirurgiens +dirent que la blessure était dangereuse et +qu'on voyait la cervelle.--Eh bien! Messieurs, dit +La Feuillade, faites-moi le plaisir d'en prendre un peu +tout proprement, et, que je vive ou que je meure, +de l'envoyer au cardinal Mazarin, qui a coutume de +répéter que je n'en ai pas.</p> + +<h4>CÉSAR</h4> + +<p>En Italie, comme on sait, les voiturins qui vous +conduisent à Rome, vous mènent, vous nourrissent et +vous couchent dans la route, moyennant un prix convenu. +En France, dans de telles conditions, le voyageur +qui fait sa convention avec le voiturin lui donnerait +des arrhes. En Italie, au contraire, le voiturin donne +des arrhes au voyageur pour se l'assurer. Les voiturins +sont chers aux artistes et aux gens qui veulent voir. +Un abbé, qui cherchait à gagner Rome en artiste, rentrait +joyeusement auprès de ses amis.--Avez-vous +trouvé? lui dit-on.--Oui, répondit-il; je suis engagé; +et le voiturin m'a donné un napoléon pour <i>ses arrhes</i>.</p> + +<h4>CHACAL</h4> + +<p>«Un prêtre espagnol, rencontrant Thomas Campbell +dont il avait fait la connaissance à la table du général +Trézel:--Excusez-moi, lui dit-il, si je ne vous ai +pas rendu visite hier; mais j'étais obligé d'assister à +la mort d'un chacal.</p> + +<p>--À merveille, mon père, répondit Campbell, et +j'espère que vous vous êtes amusé!</p> + +<p>--Comment, amusé? mais j'allais lui porter les +tristes consolations de notre sainte religion!</p> + +<p>--En vérité?</p> + +<p>--En vérité! et je vous assure qu'il est mort en +chrétien repentant, malgré la vie dissolue qu'il avait +toujours menée.</p> + +<p>--Vous aimez à plaisanter, mon père! mais, parbleu, +les chacals sont des chacals! vous ne pouvez pas +exiger d'une brute qu'elle règle ses passions comme +un animal raisonnable. Il n'est pas plus possible au +chacal d'imiter votre continence, qu'il ne l'eût été au +compagnon de Saint-Antoine d'imiter la sobriété de +son patron.</p> + +<p>--Il était adonné à la boisson, et, voyant un autre +chacal mettre de l'argent dans sa poche, il le tua pour +s'en emparer et acheter de l'eau-de-vie.</p> + +<p>--Que diable me racontez-vous là, mon saint père! +des chacals qui ont des poches, qui boivent de l'eau-de-vie, +qui meurent en chrétiens! Vous êtes en joyeuse +humeur, <i>mio padre</i>.»</p> + +<p>Ici mon Espagnol éclata de rire: «Quoi! vous ne +savez pas que tous les soldats d'infanterie légère ont +reçu le sobriquet de chacal?»</p> + +<p>(<span class="sc">Thomas Campbell</span>, <i>Oran et ses environs</i>.)</p> + +<h4>CHAIR</h4> + +<p>M. Ch. Monselet, après avoir entendu M. Saisset, +dans son cours de philosophie à la Sorbonne, se retira +en disant:--L'esprit est fort, mais la <i>chaire</i> est +faible.</p> + +<h4>CHALEUR</h4> + +<p>Bautru se promenait le chapeau à la main, par un +soleil ardent, avec Gaston d'Orléans. Ce prince lui +ayant dit qu'il aimait ses amis avec chaleur:--Ma +tête s'en aperçoit, répondit Bautru.</p> + +<h4>CHANDELLE</h4> + +<p>Les habitants de... présentèrent une adresse pompeuse +à Jacques Ier, successeur d'Élisabeth. Ils lui souhaitaient +que son règne pût durer aussi longtemps que +le soleil, la lune et les étoiles. Il leur répondit que +«si leurs voeux étaient exaucés, son fils serait obligé +de régner à la chandelle.»</p> + +<h4>CHANGER</h4> + +<p>Ce mot a plus d'un sens. Un acteur débutait au +Théâtre-Français par le rôle de Mithridate, dans la tragédie +de ce nom. Il n'était pas dépourvu de talent; il +avait même beaucoup d'intelligence et de feu; mais +son extérieur n'était rien moins qu'héroïque. Dans la +scène où Monime dit à Mithridate:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Seigneur, vous changez de visage!</p> +</div></div> + +<p>Un plaisant cria: Laissez-le faire.</p> + +<h4>CHANT</h4> + +<p>On dit que le rossignol ne chante plus lorsqu'il +est en cage, parce qu'il a perdu la clef des champs.</p> + +<h4>CHARABIA</h4> + +<p>Tu sais bien, le voisin qui est si fier, hier il me +visita, me fit politesse, et je le reconduisa.--Avec +un I?--Non, avec un bout de chandelle.</p> + +<h4>CHARMES</h4> + +<p>On devait manger une dinde aux truffes à une table +où se trouvait Buffon. Avant le dîner, une vieille dame +demande au Pline moderne où croissent les truffes:</p> + +<p>--À vos pieds, Madame.</p> + +<p>La vieille ne comprend pas. On lui explique que +c'est aux pieds des charmes; elle trouve charmant le +compliment et le complimenteur.</p> + +<p>Vers la fin du repas, quelqu'un fit la même question +au savant naturaliste, qui, ne faisant pas attention +que la dame d'avant-diner se trouvait là, dit naturellement:</p> + +<p>--Aux pieds des vieux charmes.</p> + +<p>La dame qui l'entendit ne le trouva plus si charmant.</p> + +<h4>CHARRETTE</h4> + +<p>Un postulant au théâtre devait prononcer cet hémistiche +d'un vers:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Arrête lâche, arrête.</p> +</div></div> + +<p>Il prononça si brièvement que tout le monde entendit:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Arrête la charrette.</p> +</div></div> + +<h4>CHASLES</h4> + +<p>Tout en rendant justice à M. Chasles, les plaisants +disent qu'on le porte sur les épaules.</p> + +<h4>CHAUDRON</h4> + +<p>Brunet disait que le vase qu'on appelle chaudron ne +s'appelait ainsi que parce qu'il est chaud et rond.</p> + +<h4>CHEMIN DE LA PRISON</h4> + +<p>Un villageois demandait le chemin de Newgate +(prison de Londres). Un plaisant qui l'entendit s'offrit +de le lui montrer.--Traversez le ruisseau, lui dit-il, +entrez chez le bijoutier en face, prenez deux gobelets +d'argent; décampez avec, et dans cinq minutes vous +y serez.</p> + +<h4>CHER</h4> + +<p>C'est un département où l'on ne peut pas vivre à +bon marché.</p> + +<h4>CHEVAL</h4> + +<p>Apprenez-moi, disait un Gascon, où demeure, dans +cette rue, monsieur Cheval.--Monsieur, lui dit un marchand, +il n'y a point d'homme de ce nom dans cette +rue; mais vous êtes devant la porte de M. Poulain.--Eh! +c'est cela; mais depuis dix ans que je ne l'ai vu, +il a bien eu le temps de changer de nom, à moins qu'il +ne fasse encore le jeune.</p> + +<h4>CHEVEUX</h4> + +<p>Ces jours derniers, un brave homme de la campagne +fut élu maire dans sa commune.</p> + +<p>Voulant, après l'élection, remercier ses futurs administrés +du choix qu'ils avaient bien voulu faire de lui, +il rassembla tout le village, et s'exprima ainsi:</p> + +<p>«Mes amis, croyez que je n'oublierai jamais le jour +où vous avez daigné mettre mes cheveux blancs à +votre tête!...»</p> + +<h4>CHICOT</h4> + +<p>Deux faiseurs de calembours dînaient ensemble, à +Paris, chez un restaurateur. À la fin du repas, l'un +dit à l'autre:--Je te parie que je fais un calembour +sur le premier mot que tu diras en sortant de table.--Je +parie que non.--Je parie que si.--Le prix du +dîner?--Va pour le dîner.</p> + +<p>Le parieur attend de pied ferme. L'autre cherche un +mot sans équivoque; il s'approche de la fenêtre et dit:--Il +pleut.--Eh bien, chicot.--J'ai perdu.</p> + +<p>Un étranger, témoin de cette scène, ne put comprendre +le jeu de mots qu'après avoir cherché dans son +dictionnaire; il y trouva la définition du mot chicot, +<i>reste de dent</i>. «Ah! dit-il,--il pleut, reste dedans.--Voilà +des gaillards bien spirituels.»</p> + +<h4>CHIEN</h4> + +<p>Un homme d'esprit vaniteux disait à un homme +qui le regardait curieusement:--De quel droit me +toisez-vous ainsi?--Un chien regarde bien un évêque, +répondit l'indiscret. À quoi l'homme d'esprit +répliqua:--Qui vous a dit que j'étais un évêque?</p> + +<p>Scarron, dans un recueil de ses poésies qu'il fit imprimer, +ayant adressé un madrigal à la petite chienne +de sa soeur, mit pour titre: «À la chienne de +ma soeur.» Depuis, s'étant brouillé avec elle, il fit +mettre dans l'errata de son livre: «<i>Au lieu de</i> à la +chienne de ma soeur, <i>lisez</i> à ma chienne de soeur.»</p> + +<h4>CI-DEVANT</h4> + +<p>Un écrivain fit, en 1793, un livre qui parut sous le +titre d'Observations sur la chaîne des ci-devant montagnes +d'Auvergne.</p> + +<p>Un nègre, ayant adressé alors une pétition à la +Convention nationale, signa: «Ziméo, ci-devant +nègre.»</p> + +<h4>CINQ</h4> + +<p>Saint Denis est le saint des Français; saint Georges +est le saint des Anglais; celui des Genevois est le cinq +pour cent. (À Genève le <i>q</i> ne se fait pas sentir.)</p> + +<p>Cinq cordeliers, sains de corps et sains d'esprit, +étaient ceints d'une corde et portaient sur leur sein +un petit saint, muni du seing du saint-père.</p> + +<h4>CINQ ANS</h4> + +<p>On disait à un bon homme qu'Abdel-Kader avait +cinq camps lorsqu'on l'a pris. Ce bon homme s'écria:--Comment, +ce fameux guerrier n'est qu'un +enfant?</p> + +<h4>CIVIL</h4> + +<p>Le général D.... parlait avec chaleur dans un cercle +où se trouvait M. de Talleyrand, de diverses personnes +qu'il qualifiait de pékins.</p> + +<p>--S'il vous plaît, général, lui dit le prince, qu'appelez-vous +pékins?</p> + +<p>--Nous autres, répond le général, nous appelons +pékin tout ce qui n'est pas militaire.</p> + +<p>--Ah! fort bien! répond M. de Talleyrand; tout +comme nous, nous appelons militaire tout ce qui n'est +pas civil.</p> + +<h4>CLAIR DE LUNE</h4> + +<p>Un jeune homme à qui on demandait quelle était +sa position sociale répondit:--Mon père est notaire, +et mon oncle aussi. Ils ont chacun une étude; je suis +clerc de l'une.</p> + +<h4>CLEF</h4> + +<p>Le poëte Longchamps, devenu chambellan de Joachim +Murat, roi de Naples, regrettait si fort la campagne, +qu'il demanda sa retraite et vint finir ses jours +à la campagne, près de Louviers. C'est à ce propos +qu'il fit le couplet suivant:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Adieu, donc, stérile étiquette,</p> +<p class="i20">Adieu, petite vanité,</p> +<p class="i20">Graves riens, noble ennui, toilette,</p> +<p class="i20">Et grandes fêtes sans gaîté.</p> +<p class="i20">Adieu, clef d'or qu'ont au derrière</p> +<p class="i20">Mes collègues les chambellans,</p> +<p class="i20">Pour vivre enfin à ma manière,</p> +<p class="i20">Ma foi, j'ai pris la clef des champs.</p> +</div></div> + +<p>Combien les musiciens connaissent-ils de clefs?--Trois, +la clef de <i>sol</i>, la clef de <i>fa</i> et la clef d'<i>ut</i>.--Il +y en a une quatrième qu'ils connaissent aussi, c'est la +clef de la cave.</p> + +<h4>CLOCHER</h4> + +<p>Dans un écrit que publia M. de Talleyrand, alors +évêque d'Autun (1790), on prétendit qu'il n'y avait +de lui que ce qui clochait.--On sait qu'il était boiteux.</p> + +<h4>COCHON</h4> + +<p>Napoléon fit un jeu de mots en nommant M. Cochon +préfet de Bayonne, la ville aux jambons renommés. +M. Cochon signait: Cochon de Lapparent.</p> + +<h4>COCO</h4> + +<p>Plusieurs Français, à Amsterdam, étaient réunis à +une table d'hôte. Un Anglais s'y trouvait aussi. Il +mangeait, mangeait, mangeait, avec une attention +profonde. Déjà plusieurs fois un convive lui avait +adressé ces mots:--Monsieur, auriez-vous la bonté +de me passer ce plat d'épinards? Le sombre habitant +des bords de la Tamise était incapable de la moindre +distraction. Alors le Français dit à un de ses amis:--Passe-moi +donc le plat d'épinards, car ce coco-là ne +veut pas que j'en goûte. À ce mot, les yeux de l'Anglais +quittent enfin son assiette, et se portent courroucés +sur son interlocuteur; il se croit insulté. Un de ces +rendez-vous qu'on appelle d'honneur va être pris. +Mais l'Anglais se ravise; il ouvre son pocket-dictionnaire; +ses yeux brillent. Il appelle un domestique, +demande du champagne, et invite son adversaire à +trinquer avec lui.</p> + +<p>--Monsieur le Français, dit-il, je étais dans le dérèglement +(erreur). Vous faites politesse à moi. Vous +appelez moi coco. Lisez: «Coco, fruit des Indes, doux +et agréable.» Chacun partit d'un éclat de rire, et l'on +but le champagne à la santé des deux nations.</p> + +<h4>COEUR</h4> + +<p>Un banquier poursuivait de ses assiduités une jeune +et riche héritière dont il sollicitait la main. Le jour +de la Toussaint il se rendit à Saint-Roch, et là, placé +à côté du bénitier, il attendait l'inhumaine, à laquelle +il offrit de l'eau bénite, en lui disant tout bas:--Mademoiselle, +que dois-je espérer?--Monsieur, lui répond +la jeune personne, vous êtes dans mon esprit +comme le bénitier dans l'église; près de la porte et +loin du choeur.</p> + +<h4>COMBLÉ</h4> + +<p>Un très-gros homme, arrêté au bord d'un fossé, +disait:--Je le sauterais bien, mais j'aurais peur de +tomber dedans.--Monsieur, lui dit une dame, il +serait comblé de vous recevoir.</p> + +<h4>COMMUN</h4> + +<p>Un jeune homme, voyant une belle dame qui avait +une grande bouche, disait:--Quel dommage qu'une +si belle femme ait la bouche commune! Son voisin +lui répondit:--Si tu disais: comme deux!</p> + +<h4>COMPARAISON</h4> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">L'existence est une pendule</p> +<p class="i20">Que par soi-même il faut guider.</p> +<p class="i20">Malheur à l'homme trop crédule</p> +<p class="i20">Qui la donne à raccommoder!</p> +<p class="i20">On croit qu'Esculape calcule,</p> +<p class="i20">Lorsqu'il s'agit d'y regarder,</p> +<p class="i20">Mais il l'avance sans scrupule</p> +<p class="i20">Ne pouvant pas la retarder!</p> +</div></div> + +<p>Cette autre comparaison est de M. Boniface.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">La chenille rampante,</p> +<p class="i20">Dans son premier état,</p> +<p class="i20">Végète sur la plante:</p> +<p class="i20">Voilà le candidat.</p> +<p class="i20">Sorti de la chenille,</p> +<p class="i20">Sur des ailes porté,</p> +<p class="i20">Un beau papillon brille:</p> +<p class="i20">Voilà le député.</p> +</div></div> + +<p>Un proverbe dit: Comparaison n'est pas raison. Un +axiome dit aussi: Toute comparaison cloche.</p> + +<h4>COMPLAISANTES</h4> + +<p>Odry disait un jour à Brunet:--Sais-tu pourquoi +l'on se moque plutôt des bons que des méchants?</p> + +<p>--Je ne sais pas.</p> + +<p>--Parce que les bonnes gens sont presque toujours +des personnes qu'on plaisante.</p> + +<h4>COMPLET</h4> + +<p>Un jeune soldat, originaire de Lyon, a adressé à sa +famille, après la bataille de Solferino, la lettre laconique +suivante. C'est à la fois la lettre d'un brave soldat +et d'un bon fils:</p> + +<p>«Castiglione, 25 juin.</p> + +<p>«Chère mère,</p> + +<p>«Je suis encore vivant, très-vivant et bon vivant.</p> + +<p>«Seulement, je ne suis plus complet, comme un +omnibus les jours de pluie.</p> + +<p>«Le chirurgien du régiment vient de me couper la +jambe.</p> + +<p>«Je m'étais habitué à l'avoir, et la séparation a été +cruelle.</p> + +<p>«Mon sergent-major me dit, pour me consoler, que +j'aurai maintenant une jambe faite au tour.</p> + +<p>«Allons! bonne mère, ne pleure pas, songe que +j'aurais pu être tué comme une foule de mes braves +camarades. C'est ceux-là ou plutôt la famille de ces +pauvres amis qu'il faut plaindre.</p> + +<p>«Réjouis-toi donc, au contraire, bonne mère, tout +est profit pour toi: je vais bientôt aller te rejoindre +pour ne plus te quitter, ma jambe de bois me forçant +à rester près de toi; je ferai tout ce qu'il te plaira: la +chère partie de piquet.</p> + +<p>«Tiens, voilà une larme qui tombe sur ce papier; +ce n'est point une larme de regret, mais de bonheur, +car je vais bientôt t'embrasser.»</p> + +<h4>COMPLIMENTEUR</h4> + +<p>On dit qu'un complimenteur est un accompli menteur.</p> + +<h4>COMPTE</h4> + +<p>Le prince de Ligne connaissait deux frères du nom +de Montailleur, l'un le marquis, et l'autre le comte. Le +premier était aussi aimable et spirituel que son frère +était ennuyeux. Aussi le prince, quand son valet de +chambre lui annonçait M. de Montailleur, avait-il +coutume de dire:--Si c'est le marquis de Montailleur, +à la bonne heure; mais si c'est le compte de mon +tailleur, je sais ce que c'est et je n'en veux pas.</p> + +<h4>CONFIDENT</h4> + +<p>Qui peut nous expliquer les propriétés du liquide +qu'on joint à l'huile dans la salade?--Le cornichon, +parce qu'il est <i>confit dans</i> du vinaigre.</p> + +<h4>CONFIRE</h4> + +<p>La différence qu'il y a entre un mari et un cornichon, +c'est que le premier se confie en sa moitié, et +l'autre se confit en son entier.</p> + +<h4>CONFRÈRE</h4> + +<p>Un médecin, ayant un cheval malade, fit appeler +un maréchal. Celui-ci ayant guéri le cheval, le médecin +lui dit:--Mon ami, qu'est-ce que je vous dois?--Rien, +répondit le maréchal: je ne prends jamais rien +à mes confrères.</p> + +<h4>CONNAÎTRE</h4> + +<p>L'évêque de Québec, au commencement de sa mission, +s'était perdu au Canada. Ceux qui étaient à sa +recherche rencontrèrent une troupe de sauvages auxquels +ils demandèrent s'ils connaissaient cet évêque.--Si +je le connais! répondit l'un d'eux, j'en ai +mangé.</p> + +<p>On disait d'une femme qui s'évanouissait:--Elle +se trouve mal. Un farceur répondit:--C'est qu'elle se +connaît.</p> + +<h4>CONSEIL</h4> + +<p>Louis XI disait ordinairement que tout son conseil +était dans sa tête, parce qu'il ne consultait personne. +L'amiral de Brézé, le voyant monter sur un bidet très-faible, +dit:--Il faut que ce cheval soit plus fort qu'il +ne paraît, puisqu'il porte le roi et son conseil.</p> + +<p>Quand on eut posé la statue de Louis XV sur des +grues, afin de l'élever à la place dite aujourd'hui de la +Concorde, un mauvais plaisant dit:--Le voilà au +milieu de son conseil!</p> + +<h4>CONSIDÉRER</h4> + +<p>On donne souvent à ce mot des sens qu'il n'a pas +trop. Une dame de moeurs légères, sur qui un étranger +arrêtait ses regards avec persistance, lui dit:--Pourquoi, +Monsieur, me considérez-vous ainsi?--Madame, +répondit l'autre, assez peu galamment, je vous regarde, +mais je ne vous considère pas.</p> + +<p>Voyez <span class="sc">Regarder</span>.</p> + +<h4>CONVENTION</h4> + +<p>Un savant disait qu'il n'aimait pas qu'on l'appelât +citoyen, parce que c'est un style de convention qui +ne convient pas à tout le monde.</p> + +<h4>CONVOIS</h4> + +<p>On présentait comme un parti convenable à une +demoiselle un jeune employé d'administration militaire. +Il ne plut pas. La demoiselle lui demanda ce +qu'il faisait.--Je suis dans les convois, Mademoiselle.--Oh! +l'horreur!--Militaires, Mademoiselle!--Ou +civils, peu importe! repassez quand je serai morte.</p> + +<h4>COQ-À-L'ÂNE</h4> + +<p>Ménage dit que Marot a inventé l'expression coq-à-l'âne, +en donnant ce titre à une de ses épîtres. D'autres +prétendent que ce mot vient d'une vieille fable où l'on +introduisait un coq raisonnant avec un âne. Comme +cette fiction n'avait pas le sens commun, on a donné +le nom de coq-à-l'âne à tous les raisonnements aussi +absurdes.</p> + +<p>Une personne regardant le portail des Feuillants de +la rue Saint-Honoré, à Paris, et entendant dire qu'il +était de l'ordre corinthien: «Je croyais, dit-elle, qu'il +était de l'ordre de Saint-Bernard.»</p> + +<p>Un homme très-crédule disait qu'il n'avait pas de +confiance dans la vaccine. «À quoi sert-elle, ajoute-t-il, +je connais un enfant, beau comme le jour, que +sa famille avait fait vacciner... eh bien! il est mort +deux jours après...--Comment! deux jours après?...--Oui... +il est tombé du haut d'un arbre, et s'est tué +roide... Faites donc vacciner vos enfants, après cela!»</p> + +<p>On a dit que le char funèbre, genre antique, qui +avait transporté Louis XVIII à Saint-Denis, était le +même qui avait traîné la liberté au Champ de Mars, +la déesse Raison à Notre-Dame et Voltaire au Panthéon; +mais les draperies, selon la circonstance, en +déguisaient la carcasse. Quoi qu'il en soit, lorsque le +char, qui avait emporté le cercueil royal, revint à sa +remise rue Bergère, chargé de toutes les décorations +mortuaires entassées pèle-mêle, on lisait dessus, en +grosses lettres: <i>Service des menus plaisirs du roi</i>.</p> + +<p>Louis XV allant à Choisy, M. de Nédonchelles, officier +des gardes du corps, anglomane décidé, galopait +à l'une des portières de la voiture; et, comme il avait +plu beaucoup, à tout moment il éclaboussait le roi, +qui avait baissé la glace.--Nédonchelles, lui cria le +roi, vous me crottez!--Oui, Sire, répondit l'officier, +à l'anglaise. On devine que Nédonchelles avait entendu: +Vous trottez. Louis XV, ne saisissant pas la +méprise, leva la glace de mauvaise humeur, et dit à +ceux qui l'accompagnaient: «Parbleu! voilà un trait +d'anglomanie qui est un peu fort!»</p> + +<p>Frédéric le Grand avait coutume, toutes les fois +qu'un nouveau soldat paraissait au nombre de ses +gardes, de lui faire ces trois questions: «Quel âge +avez-vous? Depuis combien de temps êtes-vous à mon +service? Recevez-vous votre paye et votre habillement +comme vous le désirez?»</p> + +<p>Un jeune Français désira entrer dans la compagnie +des gardes. Sa figure le fit accepter sur-le-champ; +mais il n'entendait pas l'allemand. Son capitaine le +prévint que le roi le questionnerait dès qu'il le verrait, +et lui recommanda d'apprendre par coeur, dans cette +langue, les trois réponses qu'il aurait à faire. Il les +sut bientôt, et le lendemain Frédéric vint à lui pour +l'interroger; mais il commença par la seconde question +et lui demanda: «Combien y a-t-il que vous +êtes à mon service?--Vingt-un ans, répondit le soldat.» +Le roi, frappé de sa jeunesse qui ne laissait pas +présumer qu'il eût porté le mousquet si longtemps, +lui dit d'un air de surprise: «Quel âge avez-vous?--Un +an, sous le bon plaisir de Votre Majesté.» Frédéric, +encore plus étonné, s'écria: «Vous ou moi avons +perdu l'esprit.» Le soldat, qui prit ces mots pour la +dernière question, répliqua avec fermeté: «L'un et +l'autre, n'en déplaise à Votre Majesté.--Voilà, dit +Frédéric, la première fois que je me suis vu traiter +de fou à la tête de mon armée.»</p> + +<p>Le soldat, qui avait épuisé sa provision d'allemand, +garda pour lors le silence; et quand le roi, se retournant +vers lui, le questionna de nouveau pour pénétrer +ce mystère, il lui dit en français qu'il ne comprenait +pas un mot d'allemand. Frédéric, s'étant mis à rire, +lui conseilla d'apprendre la langue qu'on parlait dans +ses États, et l'exhorta d'un air de bonté à bien faire +son devoir.</p> + +<p>Pièce copiée sur l'original affiché à Pontarlier.</p> + +<p>1º Il est défendu d'extraire de la pierre, du sable, +des carrières du territoire de la commune sans avoir +prévenu les autorités, surtout de la marne, les étrangers +n'y sont pas admis.</p> + +<p>2º Les cabaretiers qui donneront à boire le dimanche +sont prévenus qu'on leur dressera procès-verbal +pendant les offices, surtout de la messe, qu'il +est défendu d'y aller.</p> + +<p>3º Il est défendu de conduire le bétail sur le communal +joignant le pic des avoines, ni avec des brebis, +chèvres ou autres, malgré qu'ils seraient conduits +par des personnes raisonnables, qui ne doivent pas +être pâturés.</p> + +<p>4º Dimanche, à l'issue de vêpres, il sera procédé à +l'adjudication au plus offrant et dernier enchérisseur +des boues du village, en présence du maire, qu'on devra +racler proprement, assisté de deux membres du conseil, +provenant des égouts de la ville. Les articles sus-dits, +regardent aussi tous les habitants de tous les +sexes, qui devront être exécutés.</p> + +<p>Les habitants sont prévenus que, lundi prochain, +on échenillera deux personnes par maison, le curé +excepté.</p> + +<p><i>Le maire</i> <span class="sc">Colas</span>.</p> + +<p>Le 5 mars 1846.</p> + +<p>L'abbé Cherrier, censeur royal au commencement de +la régence, publia un volume de plaisanteries, qu'on +retrouve pour la plupart dans diverses compilations +connues. Nous en extrairons ici le seul morceau qui +soit un peu rare. C'est un singulier faisceau d'équivoques.</p> + +<p class="mid">HISTOIRE DE L'HOMME INCONNU</p> + +<p>Je prie qu'on ne juge pas mon style avec la rigueur +(<i>du grand hiver</i>). S'il est un peu plat (<i>de terre</i>) et simple +(<i>du jardin du roi</i>), vous n'en apprendrez pas moins +que mon héros avait un corps (<i>de garde</i>), une tête +(<i>d'épingle</i>), un cou (<i>de tonnerre</i>), des bras (<i>de mer</i>), un +cul (<i>de sac</i>), une haleine (<i>de savetier</i>), une âme (<i>de +soufflet</i>). On lui acheta une charge (<i>de cotterets</i>) qui +le mit dans belle passe (<i>de billard</i>). Il parlait en fort +bons termes (<i>de Pâques ou de la Saint-Jean</i>); il était +fort bien vêtu, ayant de belles chemises de toile (<i>d'araignée</i>), +un magnifique rabat (<i>joie</i>) de point (<i>du jour</i>), +une jolie culotte (<i>de boeuf</i>). Sa maison était bâtie de +pierres (<i>philosophales</i>), soutenue de piliers (<i>de cabaret</i>); +on y entrait par deux cours (<i>de chimie</i>), d'où en +montant vingt-cinq degrés (<i>de chaleur</i>) on se trouvait +dans une grande chambre (<i>de justice</i>), qui donnait +entrée dans douze pièces (<i>de Molière</i>), toutes ornées de +colonnes (<i>de chiffres</i>).</p> + +<p>L'homme inconnu se faisait servir dans chacune (<i>à +spectacle</i>) tour à tour une fricassée de coq-(<i>à-l'âne</i>), +avec deux entrées (<i>de ballets</i>) et deux poulets (<i>d'amants</i>). +Son dessert était composé d'une compote de +coins (<i>de rue</i>), d'un pot de gelée (<i>de novembre</i>), de +marrons (<i>d'artifice</i>) et d'amendes (<i>honorables</i>).</p> + +<p>Après le repas, il courait à la chasse, suivi d'une +meute de chiens (<i>dent</i>), de quatre valets (<i>de pique</i>), et +de deux pages (<i>de livre</i>), montés sur des chevaux (<i>de +frise</i>), portant des lacs (<i>d'amour</i>) et des filets (<i>de canard</i>).</p> + +<p>Comme ce rare personnage avait souvent des tranchées +(<i>de ville assiégée</i>), on lui ordonna la diète (<i>de +Ratisbonne</i>).</p> + +<p>Ayant perdu sa femme, il voyagea et mourut d'une +chute (<i>d'eau</i>).</p> + +<p>Voici une autre plaisanterie de même genre:</p> + +<p>Mademoiselle Esprit d'Alambic avait une très-belle +tête à papillotes, une de ces figures de géométrie qui +promettent; quoique demoiselle, elle avait un superbe +port de mer (<i>mère</i>); elle portait le fronteau (<i>front +haut</i>); elle avait un oeil de boeuf, un oeil de bouillon +gras, un négrillon (<i>nez grillon</i>) charmant, une bouche +de canon dans laquelle étaient des dents de loup et +une langue de vipère, la laine (<i>l'haleine</i>) d'un mérinos, +une oreille de veau frite au sec, une oreille de +Midas, un couvert (<i>cou vert</i>), mais il était d'étain (<i>dé</i><i>teint</i>), +les pôles (<i>l'épaule</i>) du monde, un bras de fauteuil, +un bras dessus bras dessous, une main morte, +un doigt de gaieté, un pouce de terre, un point +(<i>poing</i>) d'Angleterre, un poignet à jour, un cou-de-pied, +des côtes de fer, une anche (<i>hanche</i>) de basson, +une anche oie: on voyait toujours avec un plaisir nouveau +sa jambe de cerf, sa cheville ouvrière, son pied +de table, son pied de grue, son talon de passe-port; +elle joignait à tous ces avantages celui d'une éloquence +rare, et l'on ne pouvait résister aux coups que portait +sa patte étique (<i>pathétique</i>); quoique d'une chair +fraîche, elle avait une teinte violette qui lui rendait la +polaque (<i>peau laque</i>); c'était cependant une police +(<i>peau lisse</i>), car elle n'avait pas de chagrin, et elle pouvait +se vanter en tout temps d'avoir le cornet (<i>corps +net</i>).</p> + +<p>Ce qui suit est encore dans le même genre:</p> + +<p class="mid">LES AVENTURES DU COURTISAN GROTESQUE.</p> + +<p>Le courtisan sortit un jour d'un palais (<i>de boeuf</i>) +habillé de vert (<i>de gris</i>), parfumé (<i>comme un jambon</i>) +d'odeur (<i>de sainteté</i>), et enveloppé d'un manteau (<i>de +cheminée</i>). Il rencontre une dame (<i>d'échecs</i>) parée d'une +belle robe (<i>d'avocat</i>), d'une fine fraise (<i>de veau</i>) et +d'une riche côte (<i>de melon</i>), bordée d'un filet (<i>de vinaigre</i>).</p> + +<p>Ah! ma reine, s'écria-t-il, jetez les yeux sur mon +coeur (<i>d'opéra</i>). Voyez les mille morts (<i>de bride</i>) que +vos dédains me font souffrir. Par pitié, accordez-moi +(<i>comme une guitare</i>) un don (<i>prieur</i>). Laissez-moi +jouir à vos pieds (<i>destal</i>) de mon ravissement (<i>de Proserpine</i>). +Vous balancez (<i>sur la corde</i>). Ah! belle dame, +ne craignez pas que je change jamais (<i>mon argent +blanc</i>). Je suis à vous pour la vie (<i>de parents</i>), j'en +fais à l'amour le plus doux des voeux (<i>de chasteté</i>).</p> + +<p>La dame (<i>d'échecs</i>), flattée des transports (<i>de marchandises</i>) +du courtisan, ne put retenir quelques souris +(<i>de mon grenier</i>), et quelques coups d'oeil en dessous +(<i>main</i>). Celui-ci, enhardi par cette faveur (<i>de filoselle +blanche</i>) appelle la dame sa lumière (<i>de canon</i>), son âme +(<i>de violon</i>), l'attire sur un banc (<i>de mariage</i>), et la +conjure d'apaiser la violence du feu (<i>son père</i>) qui le +consume. La bonne dame (<i>d'échecs</i>) se laisse émouvoir +par ses larmes (<i>de sapin</i>), et le suit dans un lieu +(<i>privé</i>) où l'on voyait de longues allées d'arbres +(<i>généalogiques</i>), qui, enlaçant leurs branches (<i>collatérales</i>), +donnaient beaucoup d'ombre (<i>des Champs-Élysées</i>). +Les parterres étaient émaillés de fleurs (<i>de +rhétorique</i>). On y respirait un air doux (<i>de clavecin</i>), +et l'on se reposait sous de riants berceaux (<i>d'enfants</i>), +impénétrables aux chaleurs (<i>de poitrine</i>) et rafraîchis +par plusieurs bassins (<i>de barbiers</i>).</p> + +<p>Ce lieu charmant aiguisait l'appétit le plus malade. +Le courtisan y fit dresser une table (<i>de la loi</i>) et servir +un coq (<i>de clocher</i>), entre deux entrées (<i>aux barrières</i>) +suivi d'un friand dessert, où l'on remarquait de belles +poires (<i>d'angoisses</i>) et d'excellentes pêches (<i>de marée</i>). +La dame fit honneur à cette collation (<i>de bénéfice</i>). +Pour le courtisan, il mangea peu, babilla beaucoup, +conta (<i>par livres, sous et deniers</i>) toutes ses bonnes +fortunes (<i>du pot</i>), reconduisit ensuite chez elle sa +nouvelle conquête (<i>de l'Amérique</i>), et se retira (<i>comme +un parchemin</i>).</p> + +<p>Le lendemain, il prend un peu d'encre (<i>de navire</i>), +taille quelques plumes (<i>d'oreiller</i>), fait des vers (<i>à +soie</i>) les plus galants du monde, et vite en charge un +courrier (<i>de Rome</i>), qui met ses bottes (<i>de foin</i>), monte +sur le cheval (<i>de Troie</i>), galope, ou plutôt vole (<i>une +tabatière</i>) chez la dame (<i>d'échecs</i>) et rapporte aussitôt +à l'amoureux sa réponse (<i>en salade</i>).</p> + +<p>Il le trouve couché dans un lit (<i>de rivière</i>), suant, se +débattant et ravi en extaxe jusqu'au ciel (<i>du lit</i>). Un +bel esprit (<i>du cimetière</i>) cherchait en vain à le distraire +de ses pensées (<i>odoriférantes</i>). Notre amoureux n'écouta +point (<i>et virgule</i>) ce qu'il disait. Il lut la lettre +(<i>dominicale</i>) que venait de lui remettre le courrier; et +enchanté il prend les plus beaux habits de son coffre +(<i>fort</i>) et va tout droit (<i>romain</i>) chez sa mie (<i>de pain +mollet</i>).</p> + +<p>Cependant, un ancien amoureux de la belle se livre +à la jalousie (<i>d'une fenêtre</i>), et ne pouvant souffrir +que la dame (<i>d'échecs</i>) soit possédée (<i>du démon</i>) par +un autre que lui, il envoie au courtisan un appel +(<i>comme d'abus</i>). Les deux rivaux se trouvent sur le +champ (<i>des rossignols</i>), viennent aux prises (<i>de rhubarbe</i>), +se portent tour à tour plusieurs coups (<i>de vin</i>), +frappent de pointe (<i>des cheveux</i>), de revers (<i>de médaille</i>), +enfin, après un long combat (<i>des passions</i>), le +courtisan allonge à son rival une terrible botte (<i>molle</i>); +il le blesse; le fait porter chez un esculape pour le faire +panser (<i>à ses affaires</i>), revient triomphant sur un +char (<i>de fumier</i>) et se jette aux genoux de sa bonne +dame (<i>d'échecs</i>) qui le reçoit à bras ouverts (<i>par trois +cautères</i>) et lui accorde sa main (<i>de papier</i>), après lui +avoir donné quelques jours (<i>de vigile et jeûne</i>) pour +se remettre.</p> + +<p>Quand les noces furent faites, on mit l'épousée dans +une couche (<i>de citrouilles</i>) bien mollement garnie de +plumes (<i>d'écritoire</i>), puis l'on dansa autour (<i>d'un couvent +grillé</i>) au son (<i>de la farine</i>) que rendaient mille +instruments (<i>de mathématiques</i>).</p> + +<p>Nos époux donnèrent de grandes fêtes (<i>mobiles</i>), se +divertirent pendant quelques mois avec leurs connaissances +(<i>littéraires</i>), visitèrent ensuite leur château +(<i>en Espagne</i>), leurs terres (<i>australes</i>), leurs champs +(<i>de bataille</i>), et ayant tiré de leurs fermiers différentes +sommes (<i>de saint Thomas</i>), ils parurent à la +cour (<i>tille</i>). Le mari acheta un office (<i>des morts</i>), devint +officier (<i>d'office</i>), et par ses grands talents (<i>d'or</i>), +fut bientôt général (<i>des capucins</i>); il fit alors de +fameux exploits (<i>de sergent</i>), de belles actions (<i>de +grâces</i>) dont il fut loué (<i>à dix sous par jour</i>) et eut la +gloire de mourir dans une grande journée (<i>d'été</i>), +laissant toute la terre dans la douleur (<i>de l'enfantement</i>).</p> + +<p>On lui fit cet épitaphe:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Ci-gît un courtisan grotesque</p> +<p class="i20">Un fantôme godeluresque;</p> +<p class="i20">Fils du mensonge décevant:</p> +<p class="i20">Il vécut sans corps et sans âme.</p> +<p class="i20">Passant, regarde sous sa lame,</p> +<p class="i20">Tu n'y trouveras que du vent.</p> +</div></div> + +<h4>COQUELICOT</h4> + +<p>Le mot coq doit se prononcer coque et non pas co, +excepté dans coq d'Inde, qui se prononce codinde. +Cependant, un provincial, tenant à l'usage de sa province, +enseignait la prononciation de cette manière à +son fils qui le consultait:</p> + +<p>Écris <i>coq, lis co</i>.</p> + +<h4>CORBEAU</h4> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Tout alla bien, quand Talma prit Racine</p> +<p class="i20">Et dans Corneille il était encor beau.</p> +<p class="i20">Mais Manlius prépara sa ruine;</p> +<p class="i20">Et dans La Fosse il trouva son tombeau.</p> +</div></div> + +<h4>CORDE</h4> + +<p>Tout va bien, disait un représentant sous Louis-Philippe; +j'ai mérité la croix et les ministres <i>l'accordent</i>.</p> + +<h4>CORPS</h4> + +<p>Un musicien, qui jouait des fanfares à la Moskowa, +fut attaqué par un Russe, qui lui passa son sabre dans +le cor, sans lui faire aucun mal.</p> + +<h4>COSSES</h4> + +<p>Les faiseurs de calembours disent que la patrie des +poids, c'est l'Écosse.</p> + +<h4>COTON</h4> + +<p>Le Père Cotton, jésuite, était le confesseur de +Henri IV; il avait, par son dévouement, pris un certain +ascendant sur ce monarque, ce qui donna lieu à cette +pointe des protestants: Henri est assez bon prince, +c'est dommage qu'il ait du <i>coton</i> dans les oreilles.</p> + +<h4>COU</h4> + +<p>On s'étonnait de l'effronterie d'un filou en guenilles, +portant une magnifique cravate, qu'il venait de voler.--Quelqu'un +dit: il l'a mise pour cacher son <i>coup</i>.</p> + +<h4>COUCHE</h4> + +<p>Le marquis de Bièvre dînant chez le financier Beaujon, +on servit un melon auquel les convives reprochèrent +ses pâles couleurs: «C'est qu'il relève de +couche,» dit le marquis.</p> + +<h4>COUPS</h4> + +<p>Ce mot a beaucoup de sens, qui sont ingénieusement +passés en revue dans cette chanson de Désaugiers:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Tout homme ici bas a sa part</p> +<p class="i20">Des coups qui menacent la vie;</p> +<p class="i20">Le joueur craint ceux du hasard,</p> +<p class="i20">Le riche craint ceux de l'envie.</p> +<p class="i20">L'ennemi craint ceux du canon,</p> +<p class="i20">Le poltron craint les coups de canne;</p> +<p class="i20">Et l'homme à talents est, dit-on,</p> +<p class="i20">Sujet au coup de pied de l'âne.</p> +<br> +<p class="i20">Un coup de tête, bien souvent,</p> +<p class="i20">Aux jeunes gens devient funeste.</p> +<p class="i20">Un coup de langue est du méchant</p> +<p class="i20">L'arme qu'à bon droit on déteste.</p> +<p class="i20">L'espérance du laboureur</p> +<p class="i20">Par un coup de vent est trompée.</p> +<p class="i20">Un coup de patte à son auteur</p> +<p class="i20">Par fois attire un coup d'épée.</p> +<br> +<p class="i20">Tous fiers de leurs nouveaux succès,</p> +<p class="i20">Nos riches, étonnés de l'être,</p> +<p class="i20">Se vantent que leurs coups d'essais</p> +<p class="i20">Ont été de vrais coups de maître.</p> +<p class="i20">Un coup de théâtre mal fait</p> +<p class="i20">Indispose tout un parterre,</p> +<p class="i20">Et l'auteur, au coup de sifflet,</p> +<p class="i20">Est frappé d'un coup de tonnerre.</p> +<br> +<p class="i20">Chers amis, comme en vous chantant</p> +<p class="i20">Coup sur coup trois couplets, je tremble</p> +<p class="i20">D'avoir perdu les coups de dents,</p> +<p class="i20">Buvons au moins un coup ensemble.</p> +<p class="i20">Si de ma chanson sur les coups</p> +<p class="i20">L'assommante longueur vous lasse,</p> +<p class="i20">Je consens, par pitié pour vous,</p> +<p class="i20">A vous donner le coup de grâce.</p> +</div></div> + +<h4>COURBE</h4> + +<p>À propos des fêtes que l'on fit à Lons-le-Saulnier +pour l'inauguration de la statue du général Lecourbe, +la <i>Sentinelle du Jura</i> a remis en lumière un quatrain +composé à l'époque où, avec 9,000 hommes, ce général +parvint à faire 35,000 prisonniers et à arrêter court +au pied des Alpes les armées russes qui s'avançaient +à grands pas pour envahir le territoire de la République.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Par trop d'emportement sujet à se méprendre,</p> +<p class="i16">Suwarow vers Paris prenait son chemin droit,</p> +<p class="i16">Quand, battu près Glaris, chacun dans cet endroit</p> +<p class="i16">Lui dit: C'était <i>le courbe</i>, ami, qu'il fallait prendre.</p> +</div></div> + +<h4>COURTE-POINTE</h4> + +<p>On prétendit, en 1780, que le marquis de Bièvre +étant entré un jour d'été chez le roi, le prince lui dit: +«Marquis de Bièvre, faites-nous une pointe qui soit +bonne et courte.» Le marquis répondit: «Sire, il +fait trop chaud pour se charger de courtes-pointes.»</p> + +<h4>COUVERT DE BOIS</h4> + +<p>Quand est-ce que le dos d'un bûcheron est propre +à retourner la salade?</p> + +<p>--Quand il est <i>couvert de bois</i>.</p> + +<h4>COUVERTS D'ÉTAIN</h4> + +<p>M. F. disait l'autre jour à M. G. S.-H.: Quels sont +les animaux qui savent se procurer des fourchettes et +des cuillers?</p> + +<p>--Ni vu ni connu.</p> + +<p>--Ce sont les lapins quand ils sont à jeun, parce +qu'ils cherchent partout jusqu'à ce qu'ils aient <i>découvert +des thyms</i>.</p> + +<h4>COUVERTURES</h4> + +<p>On a donné ce conseil à un frileux: «Vous louez +un appartement dans lequel se trouve une pièce ayant +deux fenêtres et trois portes; vous les ouvrez toutes +et vous avez cinq ouvertures.»</p> + +<h4>CRACHAT</h4> + +<p>Ce mot a de très-singulières applications. Elles sont +employées dans un quatrain publié à l'entrée de 1789, +sous le titre de <i>prophétie de Nostradamus</i>:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20"> En quatre-vingt-neuf, grand combat.</p> +<p class="i16">Les Gaulois s'armeront les uns contre les autres.</p> +<p class="i16">Le seigneur d'Orléans y perdra son crachat;</p> +<p class="i20"> Mais il sera couvert des nôtres.</p> +</div></div> + +<h4>CROIRE</h4> + +<p>Un demi-savant disait, dans un salon:--Je ne +crois que ce que je comprends.--Comprenez-vous, lui +objecta le père Lacordaire, comment le feu fait fondre +le beurre et durcir les oeufs?--Non, je ne le comprends +pas.--Cependant, vous croyez à l'omelette.</p> + +<h4>CROISÉS</h4> + +<p>Un jeune homme cherchait à établir qu'un de ses +aïeux s'était croisé du temps de saint Louis.--C'est +vrai, dit un de ses amis; il s'est même croisé deux +fois. La première fois, il s'est croisé les bras; la seconde +fois il s'est croisé les jambes.</p> + +<p>Un farceur demandait à quoi auraient ressemblé +Tancrède et Godefroid de Bouillon s'ils eussent pris +du tabac. On lui répondit:--à des croisés à tabatières.</p> + +<h4>CROIX</h4> + +<p>On avait donné à deux enfants un biscuit. C'était +au seizième siècle.</p> + +<p>--Jouons-le à croix ou pile, dit le premier. Il tira +un doublon et le jeta en disant:--Moi, je prends la +croix.--Et moi, dit le second, je prends le biscuit,--et +il le mangea.</p> + +<h4>CRUCHES</h4> + +<p>Rien de plus singulier, disait M. de Maurepas, alors +ministre, que la manière dont se tient le conseil chez +quelques nations nègres; représentez-vous une salle +d'assemblée où sont placées une douzaine de grandes +cruches remplies d'eau: c'est là que, nus, et d'un pas +grave, se rendent une douzaine de conseillers d'État. +Arrivés dans cette chambre chacun saute dans sa +cruche, s'y enfonce jusqu'au cou, et c'est dans cette +posture qu'on délibère sur les affaires d'État.</p> + +<p>Mais quoi! vous ne riez pas, ajouta Maurepas en se +tournant vers le prince de Ligne, son voisin.</p> + +<p>--C'est, répondit-il, que j'ai vu quelquefois une +chose plus plaisante encore.</p> + +<p>--Et quoi donc, s'il vous plaît?</p> + +<p>--C'est un pays où les cruches seules tiennent conseil.</p> + +<p>Dans les farces qu'il faisait, F... n'était pas toujours +heureux. Il se présenta un jour plus que gris +à la barrière, et dit au commis de l'octroi:--Je passe +du vin que vous ne me ferez pas payer.</p> + +<p>--Monsieur, répondit un des employés, le vin en +cruche ne paye pas.</p> + +<h4>CUBES</h4> + +<p>M. Pouillet disait l'autre jour à M. Cauchy: Quel +est le personnage grec qui aimait le mieux la géométrie?</p> + +<p>--Je ne sais pas, répondit M. Cauchy, et pourtant +je voudrais bien le savoir.</p> + +<p>--Eh bien... c'est Priam!</p> + +<p>--Et pourquoi.</p> + +<p>--Parce qu'il était amoureux d'Hécube (<i>des cubes</i>).</p> + +<h4>CUIR</h4> + +<p>Comment feriez-vous des bottes avec une pomme? +Je la ferais cuire.</p> + +<h4>CYRUS</h4> + +<p>On annonçait chez un libraire les voyages de Cyrus; +tous les Russes qui en entendaient parler achetaient +ce livre, croyant que c'étaient les voyages de +six de leurs compatriotes.</p> +<br> +<h2>D</h2> + +<h4>DATTES</h4> + +<p>Un Anglais, qui aimait beaucoup les dattes, grognait +contre les épiciers qui les lui vendaient souvent avariées. +En passant sur le quai des Augustins, il lut à la +fenêtre d'un libraire l'étiquette d'un in-folio. C'était +le savant travail des Bénédictins intitulé: l'<i>Art de +vérifier les dates</i>.--Voilà mon affaire, dit-il. Il acheta +le livre, l'emporta, et grogna de nouveau en n'y trouvant +que les dates historiques qui l'occupaient moins +que les dattes du dattier.</p> + +<h4>DÉCRET</h4> + +<p>Un savant prétend que les mots décret et décréter ont +été inventés par Minos roi et législateur de la Crète.</p> + +<h4>DEDANS</h4> + +<p>On disait d'un merveilleux, qui avait perdu ses +dents et qui se pavanait comme un autre, que quand +il se présentait devant un miroir, il ne se voyait +jamais <i>de dents</i>.</p> + +<p>Un autre se plaignait d'avoir un mal de dents qu'il +ne pouvait pas mettre dehors.</p> + +<h4>DÉGOÛTER</h4> + +<p>Pourquoi se plaint-on des jours pluvieux?--Parce +qu'on <i>sent des gouttes</i>.</p> + +<h4>DÉMOCRATE</h4> + +<p>Épigramme.--Anagramme. 1799.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Ces jours passés, un fougueux démocrate,</p> +<p class="i16">Que l'anagramme en tout temps transporta.</p> +<p class="i20"> Du vilain mot aristocrate</p> +<p class="i20"> Avec labeur <i>iscariote</i> ôta.</p> +<p class="i16">Un gros monsieur, habillé d'écarlate,</p> +<p class="i16">Dit en courroux: Quel butor est-ce là?</p> +<p class="i16">J'ai trouvé bien mieux que cela;</p> +<p class="i16">On en conviendra, je m'en flatte;</p> +<p class="i20"> Car sans tricher d'un iota,</p> +<p class="i20"> Démocrate <i>me décrota</i>.</p> +</div></div> + +<h4>DÉROBÉ</h4> + +<p>Le financier La Noue montrait une magnifique +maison qu'il venait de faire bâtir, à un seigneur qui +savait bien qu'en penser. Après lui avoir fait parcourir +plusieurs beaux appartements:--Admirez, lui dit-il +cet escalier dérobé.--Le visiteur repartit:--Il est +comme le reste de la maison.</p> + +<h4>DÉSASTRE</h4> + +<p>Dans les derniers jours du Directoire, on trouva un +matin, sur la porte du Luxembourg, un magnifique +soleil fraîchement peint, et portant au milieu de ses +rayons ce seul mot: <i>la République</i>. Les Parisiens +comprirent le rébus, et tout le monde le lisait. (La +République dans le plus grand des astres.)</p> + +<h4>DESCARTES</h4> + +<p>Le marquis de Saint-Aulaire, qui, à la fin du +XVIIe siècle, fit les délices de la cour de la duchesse +du Maine, fut prié un jour par cette princesse de lui +expliquer le système de Newton. La sachant zélée +cartésienne, le spirituel marquis éluda la question en +improvisant ce petit couplet sur l'air <i>des fraises</i>:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i14">Princesse, détachons-nous</p> +<p class="i14">De Newton, de Descartes;</p> +<p class="i14">Ces deux espèces de fous</p> +<p class="i14">N'ont jamais vu le dessous</p> +<p class="i20"> Des cartes,</p> +<p class="i20"> Des cartes,</p> +<p class="i20"> Des cartes.</p> +</div></div> + +<h4>DÉTESTABLE</h4> + +<p>On s'est réjoui beaucoup en 1858 d'avoir une si +grande suite de jours d'été stables.</p> + +<h4>DÉTRESSE</h4> + +<p>Plaignez les coiffeurs parce qu'ils vivent souvent +avec <i>des tresses</i>.</p> + +<h4>DEUX</h4> + +<p>L'abbé Morellet disait: «Il faut être deux pour +manger une dinde truffée; je ne fais jamais autrement. +J'en ai une aujourd'hui, nous serons deux,--la +dinde et moi.»</p> + +<p>Madame Denys était fort laide. Comme elle était +encore au lit avec son mari, qu'elle avait épousé après +la mort de Voltaire, on introduisit dans sa chambre +un paysan qui lui apportait de l'argent.</p> + +<p>À la vue de ces deux têtes il ne sut à qui s'adresser.--Messieurs, +leur dit-il, lequel de vous deux est madame?»</p> + +<h4>DEVANT</h4> + +<p>Le comte de Lauraguais, ruiné, n'avait plus que +mille écus de rente, et il donnait trois mille livres +à son coureur.--J'ai trouvé le moyen, disait-il, +d'avoir toujours une année de mes revenus devant +moi.</p> + +<p>On raconte autrement la même chose:</p> + +<p>Bien jeune, le vicomte de Choiseul s'était fait remarquer +par une réponse à Louis XV. Ce monarque lui +reprochant un jour des prodigalités qui le menaçaient +d'une ruine certaine, il lui répondit: «Sire, on m'a +calomnié auprès de votre Majesté, car j'ai toujours une +année de mon revenu devant moi.» Le vicomte disait +vrai, il ne lui restait plus que douze mille livres de +rente, et la riche livrée de son coureur coûtait douze +mille francs.</p> + +<h4>DEVIN</h4> + +<p>Le marquis de Bièvre disait que l'esprit-de-vin était +nécessaire pour deviner un calembour.</p> + +<h4>DEVOIR</h4> + +<p>Une ville assez pauvre fit une dépense considérable +en fêtes et en illuminations au passage de son prince. +Il en parut lui-même étonné.--Elle n'a fait, dit un +courtisan flatteur, que ce qu'elle devait.--Cela est +vrai, répliqua un seigneur mieux intentionné, mais +elle doit tout ce qu'elle a fait.</p> + +<p>Un Florentin connu de Pogge avait besoin d'un cheval. +Il en trouva un qu'on voulut lui vendre vingt-cinq +ducats.--Je vous en donnerais quinze comptant, dit-il +au maquignon, et je serai votre débiteur du reste. +Le maquignon y consentit. Quelques jours après il +alla demander ses dix ducats.--Il faut, dit l'acheteur, +vous en tenir à nos conventions. Je vous ai dit que je +vous devrais le reste, et je ne vous le devrais plus si je +vous le payais.</p> + +<p>Un oncle gourmandant son neveu sur ses folles dépenses, +lui dit: «Tu fais des dettes partout, tu dois à +Dieu et à diable.--Précisément, mon oncle, reprit +le neveu, vous venez de citer les deux seuls êtres +auxquels je ne doive rien.»</p> + +<h4>DIFFÉRENCES</h4> + +<p>Madame la duchesse du Maine demanda un jour à +quelques gens de beaucoup d'esprit qui s'assemblaient +chez elle: «Quelle différence y a-t-il entre moi et une +pendule?» Ces messieurs se trouvaient fort embarrassés +pour la réponse, lorsque M. de Fontenelle entra. +La même question lui fut faite par la princesse. Il +répondit sur-le-champ: «La pendule marque les +heures, et votre altesse les fait oublier.»</p> + +<p>Sous ce titre de différences, les bonnes gens ont une +série d'énigmes, où le calembour et le jeu de mots se +présentent quelquefois:</p> + +<p>Quelle différence y a-t-il entre une femme et une +serrure?</p> + +<p>--Celle-ci, qu'une serrure est pleine de vis et une +femme pleine de vertus.</p> + +<p>Quelle différence y a-t-il entre un juge et une +échelle?</p> + +<p>--C'est qu'un juge fait lever la main et qu'une +échelle fait lever le pied.</p> + +<p>Quelle différence y a-t-il entre Alexandre le Grand +et un tonnelier?</p> + +<p>--C'est qu'Alexandre mit les Perses en pièces et +qu'un tonnelier met les pièces en perce.</p> + +<p>Quelle différence y a-t-il entre Louis XIV et un cuisinier?</p> + +<p>--Celle-ci, que Louis XIV était un potentat et qu'un +cuisinier est un tâte en pot.</p> + +<p>Quelle différence y a-t-il entre Frédéric II et son +meunier de Sans-Souci?</p> + +<p>--C'est que Frédéric II connaissait la tactique et +son meunier le tictac.</p> + +<h4>DIFFICULTÉS</h4> + +<p>Avant le 31 mai 1794, T... demandait à B... s'il n'y +avait aucuns moyens de rapprochement entre la Montagne +et les Girondins.--Aucun répond celui-ci; ces +gens-là ont des têtes trop difficiles.--Difficiles, répliqua +T... Eh bien! on tranchera les difficultés.</p> + +<h4>DIGÉRER</h4> + +<p>Montmaur, le célèbre parasite, disait d'un financier +chez qui tout le monde allait pour sa table et que l'on +trouvait très-ennuyeux: «On le mange, mais on ne +digère pas.»</p> + +<h4>DIMINUER</h4> + +<p>Que dit la miche quand on la coupe?--Elle diminue.</p> + +<h4>DINDON</h4> + +<p>Rossini avait fait un pari; je ne sais quel était le sujet +du pari; mais l'enjeu était une dinde truffée. Son adversaire +le perdit, et comme il ne se pressait pas de s'exécuter, +Rossini lui dit un jour: «Eh bien! mon cher, +à quand donc la dinde?» L'autre: «Les truffes ne +sont pas encore bonnes.--Allons donc, dit le maestro, +ce sont les dindons qui font courir ce bruit-là.»</p> + +<h4>DÎNER</h4> + +<p>Quand est-ce qu'un priseur prend le plus de tabac?--Quand +il a dix nez.</p> + +<h4>DONNER</h4> + +<p>Montesquieu disputait sur un fait avec un conseiller +du parlement de Bordeaux, qui avait de l'esprit, mais +la tête un peu chaude. Celui-ci, à la suite de plusieurs +raisonnements débités avec fougue, dit: M. le président, +si cela n'est pas comme je vous le dis, je vous +donne ma tête.--Je l'accepte, répondit froidement +Montesquieu, les petits présents entretiennent l'amitié.</p> + +<p>Le mot <i>donner</i> a beaucoup d'expressions singulières. +Un fossoyeur disait un jour:--Ça va mal; le mort ne +donne pas.</p> + +<p>Une vieille dame demandait à son voisin, dans un +salon:</p> + +<p>--Combien me donnez-vous d'années?</p> + +<p>--Vous en avez assez, Madame, répondit le voisin, +sans que je vous en donne encore.</p> + +<h4>DOS</h4> + +<p>Quelle différence y avait-il, avant la révolution, +entre la reine de France et son chat:--C'est que le +chat faisait le gros dos, et la reine le Dauphin.</p> + +<h4>DOUBLE SENS</h4> + +<p>On a fait plusieurs fois des vers qui ont un double +sens, lorsqu'on les lit dans l'idée de l'auteur. Nous n'en +citerons qu'un exemple. C'est le serment civique <i>à +double face</i> de 1792. Si on lit ces vers à pleine ligne +ils ont un sens, qui est démenti lorsqu'on les relit +à deux colonnes:</p> + +<pre> + À la nouvelle loi je veux être fidèle + Je renonce dans l'âme. au régime ancien. + Comme article de foi je crois la loi nouvelle + Je crois celle qu'on blâme. opposée à tout bien. + Dieu vous donne la paix messieurs les démocrates, + Noblesse désolée, au diable allez-vous-en, + Qu'il confonde à jamais tous les aristocrates + Messieurs de l'assemblée ont seuls le vrai bon sens. +</pre> + +<h4>DOUCEUR</h4> + +<p>Un complimenteur disait au salon de M. Thiers:--Une +heure passée ici est une douce heure.</p> + +<h4>DROIT</h4> + +<p>Quelqu'un ayant demandé à un homme qui avait +les jambes crochues, quel chemin il avait pris pour +venir de Londres.--Je suis venu tout droit, lui répondit-il.--En +ce cas, Monsieur, reprit l'autre, vous +avez furieusement changé dans la route.</p> + +<h4>DROMADAIRE</h4> + +<p>Il est mâle et femelle. Lorsque la République de 1848 +sollicita les assentiments de la province, les notables +républicains de Valence envoyèrent au gouvernement +provisoire cette adresse laconique: <i>la Drôme adhère</i>.</p> + +<h4>DUCIS</h4> + +<p>Deux bibliomanes jouant aux dominos, l'un demanda: +«As-tu du six?...--Ducis? répondit l'autre. +Non, mais mon libraire me l'apportera demain.</p> + +<p>Il se préoccupait de Ducis, le poëte.</p> +<br> +<h2>E</h2> + +<p>Les lettres les moins sémillantes sont les lettres +E B T. Un E est aussi la lettre qui porte le mieux les +lunettes.</p> + +<h4>EAU FINE</h4> + +<p>Quelle est la fontaine de Paris qui fournit l'eau la +plus délicate?</p> + +<p>--C'est la fontaine Dauphine.</p> + +<h4>ÉCHELLES</h4> + +<p>Un nouvelliste disait, dans un café de Paris, qu'il y +avait une arche du Pont-Euxin de tombée.--Cela est +si vrai, reprit un autre, que le Grand Seigneur a +ordonné qu'on prît les échelles du Levant pour la +rétablir.</p> + +<h4>ÉCHO</h4> + +<p>Quelques jeunes gens s'entretenaient d'un écho qui +avait fait plaisir dans la musique d'une pièce nouvelle. +A cette occasion, on se mit à parler d'échos qui rendaient +deux, trois, quatre et cinq syllabes. Chacun +citait, exagérait même, lorsqu'un Gascon qui n'avait +encore rien dit, s'écria:--Qué mé dites-vous là, mes +amis? Vive celui de mon pays! On lui dit:--Écho, +comment te portes-tu? Il répondit:--Jé mé porté bien. +Voilà un écho, céla.</p> + +<p class="mid">DIALOGUE ENTRE UN REPRÉSENTANT ET L'ÉCHO.</p> + +<pre> +Si je te parle, Écho, de toi serai-je ouï? Oui. +Qu'a-t-on dit que j'étais dans l'emploi de Solon? Long. +Eh! comment voulait-on que fussent mes discours? Courts. +On m'assure pourtant que je fus éloquent. Quand? +Que dit-on du <i>quantum</i> que l'on me fait toucher? Cher. +Penses-tu que je sois regretté du vulgaire? Guère. +Renaîtrai-je de l'urne ainsi que le phénix? Nix. +L'électeur, que dit-il? Je suis sur mon départ. Pars. +Je vais donc te quitter, ô nation française? Aise. +Voilà de mon mandat un bien triste examen! <i>Amen.</i> +</pre> + +<p class="mid">L'ÉCHO À UN MINISTRE DE LA DYNASTIE DE JUILLET.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i12">On dit que vous aimez la guerre;</p> +<p class="i20"> --Guère!</p> +<p class="i12">Que vous raffolez du canon;</p> +<p class="i20"> --Non!</p> +<p class="i12">Que, nuit et jour, et sans relâche,</p> +<p class="i20"> --Lâche,</p> +<p class="i12">À l'Anglais vous montrez le poing:</p> +<p class="i20"> --Point!</p> +<p class="i12">Que, ne voulant ni paix ni trêve,</p> +<p class="i20"> --Rêve!</p> +<p class="i12">Vous n'aspirez que le combat.</p> +<p class="i20"> --Bah!...</p> +<p class="i12">Pritchard, qui vous trouve admirable</p> +<p class="i20"> --Hable,</p> +<p class="i12">Et qui vous proclame charmant,</p> +<p class="i20"> --Ment,</p> +<p class="i12">Prétend que votre coeur escompte</p> +<p class="i20"> --Honte</p> +<p class="i12">Jusqu'à l'honneur évanoui;</p> +<p class="i20"> --Oui;</p> +<p class="i12">Que votre gloire est colossale</p> +<p class="i20"> --Sale,</p> +<p class="i12">Et qu'on bénira votre nom.</p> +<p class="i20"> --Non!!</p> +<br> +<p class="i20"><i>Capitaine</i> <span class="sc">Cléveland</span>.</p> +</div></div> + +<p class="mid">LES ÉCHOS DE LA MONTAGNE (1848).</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i14">Vous parlez ab hoc et ab hâc</p> +<p class="i20"> --Bac.</p> +<p class="i14">Vous ferez bien souvent, Chauffour,</p> +<p class="i20"> --Four.</p> +<p class="i14">Votre parole est, Laclodure,</p> +<p class="i20"> --Dure;</p> +<p class="i14">La vôtre n'est pas, Madesclaire,</p> +<p class="i20"> --Claire;</p> +<p class="i14">Que vos discours sont donc, Charras,</p> +<p class="i20"> --Ras;</p> +<p class="i14">Votre débit n'est pas, Cambon,</p> +<p class="i20"> --Bon:</p> +<p class="i14">Économisez notre argent,</p> +<p class="i20"> --Gent;</p> +<p class="i14">Parlez donc et votez, Crémieux,</p> +<p class="i20"> --Mieux.</p> +<p class="i14">Enfin, pour paraître moins gauche,</p> +<p class="i20"> --<i>Gauche</i>,</p> +<p class="i14">Faites surtout tous vos discours,</p> +<p class="i20"> --Courts.</p> +</div></div> + +<h4>ÉCLAIRER</h4> + +<p>Un ferblantier de Besançon, s'étant passionné pour +Voltaire à la lecture de ses ouvrages, désira ardemment +de le voir; il arrive à Ferney et demande à être +présenté au maître du château; les gens le refusent +durement; il insistait, lorsque le patriarche des philosophes, +qui avait vu arriver celui-ci à pied, mal vêtu, +enfin dans un équipage par trop philosophique, ouvre +sa fenêtre et lui demande brusquement:--Qui êtes-vous? +Que faites-vous? Le ferblantier répond fièrement:--Je +fais comme vous, j'éclaire le monde..., +je fais des lanternes.</p> + +<p>Cette plaisanterie lui valut, dit-on, un accueil favorable.</p> + +<h4>ÉCRIRE</h4> + +<p>Un savant, connu par un nasillement extraordinaire, +assistait à la lecture d'un ouvrage historique.--Cet +ouvrage est mal écrit, s'écria-t-il, un style prétentieux, +plein d'affectation! Il faut avant tout écrire comme +on parle.--C'est fort bien, dit un ami de l'auteur, +mais alors, vous qui parlez du nez, vous devez écrire +de même.</p> + +<p>L'abbé Alary fut reçu parmi les Quarante, quoiqu'il +n'eût publié aucun ouvrage. Lorsqu'il alla faire ses +visites, il laissa son billet chez un académicien de +qualité, qui était sorti et qui n'avait jamais entendu +parler de lui. En rentrant avec un de ses amis, l'académicien +trouva le billet, le lut, et dit, avec le ton de +la surprise:</p> + +<p>--L'abbé Alary! je ne le connais pas; qu'a-t-il +écrit?--Son nom, reprit l'autre.</p> + +<h4>EFFORT</h4> + +<p>Voyant un homme qui avait le nez très-gros, Odry +disait:--En faisant cet homme-là la nature a fait +<i>un nez fort</i>.</p> + +<h4>ÉGALITÉ</h4> + +<p>Il y a sur ce mot quelques couplets dans la chanson +du communisme, qui se chante sur l'air: <i>Ah! le bel +oiseau, maman.</i> Nous ne copions pas le refrain:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Pour être vraiment égaux,</p> +<p class="i20">Tous devront naître de même,</p> +<p class="i20">Ni plus forts, ni moins nigauds</p> +<p class="i20">Que les rêveurs du système.</p> +<br> +<p class="i20">L'esprit n'est plus bon à rien;</p> +<p class="i20">Nous l'abolissons d'avance!</p> +<p class="i20">Nous savons, on le voit bien,</p> +<p class="i20">Nous passer d'intelligence.</p> +<br> +<p class="i20">À quoi servent, ici-bas,</p> +<p class="i20">Les peintres et les poëtes?</p> +<p class="i20">Raphaël fera des bas</p> +<p class="i20">Et Corneille des chaussettes.</p> +</div></div> + +<h4>EMPLOI</h4> + +<p>Un capitaine qui avait été barbier, partant pour +aller au siége d'une ville, on lui dit:--Si l'on rase +cette ville, vous pourrez bien y avoir de l'emploi.</p> + +<h4>EMPORTER</h4> + +<p>Voici un proverbe:</p> + +<p>«Ne nous emportons pas, nous ne nous en porterons +que mieux.»</p> + +<h4>EN</h4> + +<p>Prête au calembour dans plusieurs circonstances. Un +riche bourgeois disait, dans une réunion:--On doit +du respect et des honneurs aux <i>gens en place</i>.--Je +suis dans ce cas-là, dit un jeune homme qu'on ne remarquait +pas, et je me contenterai d'un peu d'aide.</p> + +<p>--Dans quel cas êtes-vous?</p> + +<p>--Dans le cas assez triste des <i>gens sans place</i>.</p> + +<p>On a fait ce quatrain sans rime sur les bonnets de +juge:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">L'huissier s'en glorifie;</p> +<p class="i20">Le procureur s'en pare;</p> +<p class="i20">L'avocat s'en joue;</p> +<p class="i20">Tandis que le juge s'endort.</p> +</div></div> + +<h4>ENCORNÉ</h4> + +<p>Un farceur se vantait d'avoir mangé d'un veau qui +n'était pas <i>encorné</i>.</p> + +<h4>ENCRE</h4> + +<p>Un voyageur revenant d'Angleterre s'excusait auprès +de sa femme de ne lui avoir pas écrit.--C'était +mon intention, disait-il, mais je ne l'ai pas pu, parce +qu'en arrivant à Douvres on a jeté l'ancre.</p> + +<h4>ÉNIGME</h4> + +<p class="mid">CONTENANT QUELQUES CALEMBOURS</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Il faut qu'ici chacun devine</p> +<p class="i20">Qui je suis et quel est mon nom;</p> +<p class="i20">Sans moi, vous n'auriez pas Racine,</p> +<p class="i20">Sans moi, vous n'auriez pas Pradon.</p> +<p class="i20">C'est toujours par moi qu'on hérite;</p> +<p class="i20">Je renferme et sucre et poison;</p> +<p class="i20">Et je boirai cent ans de suite,</p> +<p class="i20">Sans jamais perdre la raison.</p> +<br> +<p class="i20">Plus d'un critique impitoyable</p> +<p class="i20">M'emploie en son malin esprit;</p> +<p class="i20">Sans que je puisse être coupable,</p> +<p class="i20">On me déchire, on me noircit.</p> +<p class="i20">En France, en Russie, en Espagne,</p> +<p class="i20">J'ai des succès, j'ai des revers;</p> +<p class="i20">Si les uns perdent quand je gagne,</p> +<p class="i20">Les autres gagnent quand je perds.</p> +<br> +<p class="i20">Quoiqu'assez gênant par ma forme,</p> +<p class="i20">Chacun m'emporte quand il sort:</p> +<p class="i20">Je suis mince; je suis énorme;</p> +<p class="i20">Je suis délicat; je suis fort.</p> +<p class="i20">Petit, je sers beaucoup aux dames.</p> +<p class="i20">Je suis Français, Grec, ou Romain;</p> +<p class="i20">Je fais des bateaux; j'ai des rames;</p> +<p class="i20">Et sans bras j'ai beaucoup de mains<a id="footnotetag1" name="footnotetag1"></a> +<a href="#footnote1"><sup class="sml">1</sup></a>.</p> +</div></div> + +<blockquote class="footnote"><a id="footnote1" +name="footnote1"><b>Note 1: </b></a><a href="#footnotetag1"> +(retour) </a> + Le mot est le <i>papier</i>.</blockquote> + +<h4>ENNEMIS</h4> + +<p>Lorsque les Bourbons revinrent, ils firent ce calembour +que Napoléon avait des <i>N mis</i> partout. On +détruisit les N sur les monuments. Un inspecteur, +voyant un N sur la porte Saint-Denis, s'écria:--J'aperçois +là un N qu'il faut enlever.--Mais, lui dit-on, +elle fait partie de l'inscription <i>Ludovico Magno</i>: +si vous l'ôtez, on lira <i>Ludovico mago</i>, ce qui ne +plaira peut-être pas à Louis XVIII.</p> + +<p>On remplaça les N par les L; et les plaisants dirent: +Les chiffres maintenant sont tous L. Mais quand vinrent +les C de Charles X, on se récria sur ce qu'on ne +faisait plus que tous C.</p> + +<h4>ENSEIGNES</h4> + +<p>On remarquait, il y a quelque temps, rue des Petits-Champs, +une pension de jeunes filles et un charcutier +dont les deux enseignes n'en faisaient qu'une, si bien +qu'on lisait sur la même ligne: Pension de jeunes +demoiselles. <i>À la Renommée des bonnes langues.</i></p> + +<p>Une enseigne de marchand de ferrailles, au passage +du Dragon portait: <i>Au Juste pris</i>. Le tableau représentait +un saint attaqué et pris par d'affreux bandits.</p> + +<p>Le Chat qui <i>pèche</i>, est un chat qui fait la faute de +ronger un fromage.</p> + +<p>Le Vert galant; ce n'est pas Henri IV, c'est un gobelet, +un verre orné de guirlandes de fleurs.</p> + +<p>Les Deux Amis sont deux A rangés sur la même +ligne.</p> + +<p>Les Trois Forbans, qui vous annoncent la mer et des +pirates, sont trois escabeaux de bois solidement construits. +Trois forts bancs.</p> + +<p><i>Au Bon Coing</i> est l'enseigne d'un marchand de vin, +au coin d'une rue.</p> + +<p>On a remarqué dans Paris une enseigne ainsi conçue: +T....., culottier de la reine.</p> + +<p>On lisait sur une autre, en 1811; B....., chirurgien-accoucheur +de la grande armée.</p> + +<p>Et sur une autre, rue Dauphine: Grégoire, tailleur +d'hommes.</p> + +<p>Dans la rue Chartière, près du Collége de France, +on lisait sur la porte d'une maîtresse d'école qui venait +de déménager: Madame Prudent est maintenant +enceinte du Panthéon.</p> + +<p>Aux <i>Trois sans hommes</i>, à Arras, est un rébus au-dessous +d'un tableau où sont trois femmes seules.</p> + +<p>On disait, dans le même sens, que l'église de Saint-Denis, +qui avait cinq clochers, avait cinq clochers et +quatre sans cloches.</p> + +<h4>ENSEIGNER</h4> + +<p>Un homme s'était piqué jusqu'au sang de la pointe +d'une grosse alêne. C'était un cordonnier.--Le voilà +devenu professeur, dit un plaisant.--Et comment +cela? s'écria un témoin intrigué.--Mais, riposta le +farceur, il s'est piqué et il <i>en saigne</i>.</p> + +<h4>ENTENDRE</h4> + +<p>Dans une audience où l'on faisait beaucoup de +bruit, le juge dit:</p> + +<p>--Huissier, imposez silence; il est étrange qu'on +fasse tant de bruit. Nous avons jugé je ne sais combien +de causes sans les entendre.</p> + +<h4>ENTERRER</h4> + +<p>L'ancien usage de l'Académie était que le directeur +fît les frais d'enterrement de ceux de ses confrères qui +décédaient sous son directorat. Corneille mourut dans +la nuit du jour où Racine devait succéder au directeur +Lavaux. Il y eut entre eux un combat de générosité. +Lavaux prétendait qu'étant encore directeur au moment +où Corneille avait expiré, il devait payer les +frais d'inhumation; Racine soutenait que cet honneur +lui était dévolu, puisque l'inhumation n'avait eu lieu +que le jour qu'il avait été installé directeur. Lavaux +l'emporta; ce qui fit dire à Benserade:--Lavaux a +enterré Corneille; mais personne plus que Racine n'était +fait pour l'enterrer.</p> + +<h4>ENTRE DEUX</h4> + +<p>Un bon maire de campagne se trouvait à table, à +Paris, entre deux jeunes étourdis qui cherchaient à le +persifler.--Je vois bien, Messieurs, dit-il, que vous +voulez vous moquer de moi; je ne suis pourtant pas +tout à fait un sot ni un fat, je suis entre les deux.</p> + +<h4>ENTRER</h4> + +<p>Un vétéran de l'armée de Condé montrait un jour à +Martainville un sonnet commençant par ce prétendu +vers:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">«Marie-Thérèse dont les vertus...»</p> +</div></div> + +<p>--Le début est heureux, dit Martainville; mais +malheureusement Marie-Thérèse ne peut pas entrer +dans un vers.--Monsieur, répartit le vétéran, je +vous croyais bon royaliste, mais je me suis trompé. +Vous saurez, pour votre gouverne, que Marie-Thérèse +peut entrer partout.</p> + +<p>Le comte de C., qui connaît beaucoup Vienne, racontait +un fait qui prouverait la bonhomie des soldats +de police de la capitale de l'Autriche.</p> + +<p>La consigne leur avait été donnée d'arrêter tous +ceux qui, après une certaine heure, feraient du tapage +ou chanteraient trop bruyamment <i>en rentrant chez +eux</i>. Le comte revenait de l'Opéra; il fredonnait assez +haut un des airs qui lui avaient plu. Une patrouille le +rencontre, lui défend de chanter ainsi, et lui rappelle +qu'il faut <i>rentrer</i> chez soi paisiblement et sans bruit.--C'est +juste, dit le comte: mais je <i>ne rentre pas</i>.--Oh! +alors, c'est différent, dit le chef; et votre excellence +peut faire ce qu'elle voudra.</p> + +<p>Ce trait, que nous empruntons au <i>Journal des anecdotes</i>, +qui ne paraît plus, ne vous rappelle-t-il pas la +naïveté de ce bon Suisse, à qui on avait donné en +garde une porte du palais de Versailles, avec défense +de laisser personne <i>entrer dedans</i>. Un grand seigneur, +qui ne devait pas être compris dans l'exclusion générale, +et qu'on attendait, se présente. Le Suisse barre +le chemin.--Mais j'ai droit d'entrer.--Point, mon +sir.--Mais je suis le prince de Poix.--Quand vous +seriez le roi des haricots, vous point entrer dedans.--Mais +qui vous parle de cela? dit le gentilhomme +intelligent. Je ne veux pas entrer, je veux sortir dedans.--Sortir +dedans? mon sir; ah! c'est autre chose. +Allez.</p> + +<p>Et le grand seigneur sortit dedans.</p> + +<p>--Quand est-ce que les chiens entrent dans l'église?--Quand +la porte est ouverte.</p> + +<h4>ENVIEUX</h4> + +<p>Il y a des marchands en vieux qu'on n'évite pourtant +pas et qui ne se confessent pas du péché d'envie; +ce sont les fripiers.</p> + +<h4>ENVOYER</h4> + +<p>Un paysan fin matois, qui avait reçu d'un avoué +quelque bon conseil, avait promis de lui envoyer un +lièvre. L'homme de loi, ne voyant rien venir, va chez +le paysan, et lui demande quand il compte tenir sa +promesse.--Comment! monsieur, le lièvre n'est pas +encore arrivé?--Non.--C'est étonnant! je vous l'ai +pourtant envoyé hier. Je l'ai aperçu au bout de mon +champ, et je lui ai crié: Va-t-en vite chez mon +avoué.</p> + +<h4>ÉPICIERS</h4> + +<p>En temps de moisson, on voit en campagne des +masses d'épis sciés, dont beaucoup sont en bottes.</p> + +<p>Nos pères avaient mis l'esprit pointu dans leurs enseignes. +On voyait encore, il y a quelques années, +au boulevard du Temple, à Paris, au-dessus d'un magasin +d'épicerie, une enseigne qui représentait un +champ de blé où un homme sciait un épi; au-dessous +on lisait: <i>À l'Épi scié.</i></p> + +<h4>ÉPICTÈTE, ÉPICURE</h4> + +<p>Louis XV demandait, dit-on, au marquis de Bièvre +de quelle secte de philosophes étaient les puces? Il +répondit:--De celle des piqûres.--Et les poux?--De +celle des pique-têtes.</p> + +<h4>ÉPIGRAMME</h4> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Certain ministre avait la pierre,</p> +<p class="i20">On résolut de le tailler;</p> +<p class="i20">Chacun se permit de parler,</p> +<p class="i20">Et l'on égaya la matière.</p> +<p class="i20">--Mais comment, se demandait-on,</p> +<p class="i20">A-t-il pareille maladie?</p> +<p class="i20">--C'est que son coeur, dit Florimon,</p> +<p class="i20">Sera tombé dans sa vessie.</p> +</div></div> + +<h4>ÉPOUVANTABLE</h4> + +<p>On complimentait la femme d'un homme de lettres +en disant qu'elle avait un époux vanté.</p> + +<p>--Ce n'est que justice, répondit-elle; car il est +époux vantable.</p> + +<h4>ÉPOUVANTÉ</h4> + +<p>Un jeune homme allait épouser une beauté. On lui +dit:--Vous épousez une femme charmante, dont +vous serez bientôt époux vanté.</p> + +<h4>ÉPOUX LAID</h4> + +<p>Un mari, peu favorisé des dons de la nature, crut +voir un calembour insultant dans une parole de sa +femme, qui disait qu'elle n'aimait pas les poulets.</p> + +<h4>ESPRIT</h4> + +<p>--C'est agréable d'avoir de l'esprit, dit Alcide Tousez, +on a toujours quelques bêtises à dire.</p> + +<h4>ESTROPIÉ</h4> + +<p>Un homme était blessé à la main.--Vous êtes estropié, +lui dit-on.--Non pas, répondit-il, je suis estro-main.</p> + +<h4>ÉTAIN</h4> + +<p>Les Parisiens, en apprenant la mort de Pothier, ont +fait cette exclamation ingénieuse:--Voilà un potier +d'éteint!</p> + +<h4>ÉTAMAGE</h4> + +<p>--Quelle est la place de Paris où les chaudronniers +ne peuvent pas étamer?</p> + +<p>--C'est la place Vendôme. On y lit en effet en +grandes lettres: <i>État-major de la place.</i></p> + +<h4>ÉTATS</h4> + +<p>Louis XIV disait au duc de Vivonne:--Ne trouvez-vous +pas surprenant que M. de Schomberg, qui est né +Allemand, se soit fait naturaliser Hollandais, Anglais, +Portugais et Français?--Sire, répondit le duc, c'est +tout simplement un homme qui essaie de tous les +États pour vivre.</p> + +<h4>ÉTÉ</h4> + +<p>On boit tant de thé en hiver dans les soirées de Londres, +qu'on a dit que les Anglais faisaient de l'hiver +la saison des thés.</p> + +<h4>ÉTENDRE</h4> + +<p>--Quel rapport y a-t-il entre un morceau de beurre +frais, un avocat et un paresseux?</p> + +<p>--C'est que le premier s'étend sur du pain, le second +sur son sujet et le troisième sur son lit.</p> + +<h4>ÉTRILLE</h4> + +<p>Un palefrenier se présentait comme choriste à +l'Opéra, parce qu'on lui avait dit qu'il était fort dans +<i>les trilles</i>.</p> + +<h4>EU</h4> + +<p>On prétend que cette ville est celle où l'on fait le +plus d'omelettes.</p> + +<p>On dit que son maire rougit toutes les fois qu'il est +obligé d'exprimer sa fonction.</p> + +<h4>EUX</h4> + +<p>Les cuisiniers font acte d'orgueil quand ils prétendent +qu'on ne peut pas faire d'omelettes sans <i>oeufs</i>.</p> + +<h4>EXÉCUTIF</h4> + +<p>Quand l'Assemblée constituante eut restreint, comme +on sait, l'autorité royale de Louis XVI, on fit cette épigramme:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Entre savants, quelquefois on dispute.</p> +<p class="i16">D'où vient ce nom: <i>pouvoir exécutif</i></p> +<p class="i16">Que donne au roi le corps législatif?</p> +<p class="i16">Eh! le voici: trop faible pour la lutte,</p> +<p class="i16">C'est un pouvoir, hélas! qui s'exécute.</p> +</div></div> + +<h4>EXERCICE</h4> + +<p>Louis XIV raillait le duc de Vivonne sur son embonpoint +excessif, en présence du duc d'Aumont qui +n'était pas moins gros, et lui reprochait de ne point +faire assez d'exercice.--Sire, répondit Vivonne, c'est +une médisance; il n'y a point de jour que je ne fasse +au moins trois fois le tour de mon cousin d'Aumont.</p> + +<h4>EXPOSITION</h4> + +<p>On a dit, à propos de l'exposition universelle de +Londres, que ce qu'il y avait de plus exposé au Palais +de Cristal, c'étaient les poches des visiteurs.</p> + +<h4>EXPRESSIONS</h4> + +<p>Fontenelle se trouvant à table avec deux jeunes +poëtes avantageux, il fut beaucoup question au dessert +des différentes manières d'exprimer la même +chose en français. Nos deux étourdis lui demandèrent, +sur le ton badin, s'il était mieux de dire: Donnez-nous +à boire, qu'apportez-nous à boire. Fontenelle +leur répondit en souriant:--Vous devez dire: menez-nous +boire.</p> +<br> + +<h2>F</h2> + +<p>Les lettres les plus embarrassantes sont les lettres +F A C.</p> + +<h4>FACÉTIES</h4> + +<p>Un huissier qui voulait faire une chanson n'accoucha +que du premier vers, et il demandait si la rime +était bonne.</p> + +<p>On voulait marier un épicier avec sa jeune tante.--Je +ne le veux pas, dit-il; car si j'épousais ma tante, +je serais mon oncle.</p> + +<p>--Le pavé est bien fier, disait un bonhomme qui, +par le verglas, s'était laissé tomber.--Je ne le trouve +pas fier du tout, dit un autre, car voilà trois fois déjà +qu'il me baise le derrière.</p> + +<p>On demandait à un homme un peu distrait:--Quel +jour est-ce demain?...--Ma foi, je ne vous dirais +pas trop; tout ce que je sais, c'est que c'est aujourd'hui +samedi.</p> + +<p>Un homme riche, qui s'était marié trois fois, ayant +perdu sa troisième femme, répondit à quelqu'un qui +lui proposait une fort aimable demoiselle en quatrième +noce:--J'accepte volontiers la demoiselle, même sans +dot, pourvu que vous fassiez stipuler dans le contrat +qu'elle ne mourra pas; car je suis las d'épouser des +femmes qui meurent.</p> + +<p>On présenta à un maire de village, dans les premiers +temps où l'état civil fut confié à ces officiers ministériels, +un enfant de trois ans, qu'on avait négligé de +faire inscrire sur le registre communal. Le maire écrivit: +«Aujourd'hui est né de légitime mariage un enfant +âgé de trois ans....»</p> + +<p>Une dame marchandant une chaise percée en offrait +trop peu. Le bahutier, pour l'engager davantage, la +priait de considérer la bonté de la serrure et de la +clef.--Pour ce qui est de cela, dit la dame, je n'en +fais pas grand cas, car je n'ai pas peur qu'on me dérobe +ce que j'ai dessein d'y mettre.</p> + +<p><span class="sc">Gyblotte</span>.--Si j'ai été obligé de quitter le poste, ce +n'est pas ma faute, je ne pouvais plus y revenir.</p> + +<p><span class="sc">Le président</span>.--Pourquoi?</p> + +<p><span class="sc">Gyblotte</span>.--J'étais cuit. (Rires.) J'étais rôti à point +comme un jeune dindonneau au sortir de la broche. +(Rire général.)</p> + +<p><span class="sc">Le président</span>.--Comment cela?</p> + +<p><span class="sc">Gyblotte</span>.--Imaginez-vous que j'avais appris que +l'on faisait des portraits à la minute au daguerréotype. +Comme j'éprouvais le désir de me faire dessiner +en garde national, je profitai de l'occasion de ma garde +pour me rendre chez l'artiste, je m'esquivai du poste.</p> + +<p><span class="sc">Le président</span>.--Vous avez eu tort.</p> + +<p><span class="sc">Gyblotte</span>.--J'en suis bien puni.--Monsieur, lui +dis-je, faites-moi mon portrait.</p> + +<p>--Voilà! Monsieur, me répond l'artiste. Mettez-vous +le nez au soleil et ne bougez pas. (Rire général.) +Je me plaçai au vis-à-vis de cet astre, et je le regardai +en face... ce qui du reste ne laisse pas d'être fort gênant. +(Nouveaux rires.) Lorsque j'eus demeuré dix +minutes dans cette attitude, que je prendrai sur moi +de nommer incommode, je sentis que ma peau se +gonflait par la chaleur... Je devenais croustillant. +(Rire général.)</p> + +<p>--Monsieur, dis-je à l'artiste, est-ce fini?--Pour +l'amour de Dieu, ne tournez pas la tête, me répondit-il; +votre portrait sera ressemblant comme deux +gouttes d'eau. Des gouttes d'eau, il ne m'en manquait +pas sur le visage... Je demeure encore un quart d'heure +au soleil; je roussissais à vue d'oeil, je sentais mes +sourcils qui grillaient comme les plumes d'un poulet +flambé.--Monsieur, dis-je alors au peintre par le daguerréotype, +je renonce à votre procédé; je ne veux +pas être peint dans l'attitude d'un rôti. (Hilarité générale.) +Veuillez me rendre mon chapeau.--Monsieur, +dit cet homme, si vous vouliez rester encore +une petite minute, vous seriez frappant...--Frappant! +m'écriai-je, c'est-à-dire que je serais à l'étuvée: je sors +d'en prendre. Et, en disant cela, je me traînai à mon +domicile, où je me couchai.</p> + +<p><span class="sc">Le président</span>.--Pourquoi ne pas revenir au +poste?</p> + +<p><span class="sc">Gyblotte</span>.--Parce que je serais tombé en ruine. +Je parie que l'on m'aurait enlevé un bras ou une +jambe rien qu'en me posant la fourchette dans le dos.</p> + +<p>Le président condamne le délinquant à une garde +hors de tour, et lui recommande de se méfier à l'avenir +des portraits à la minute.</p> + +<p><span class="sc">Gyblotte</span>.--Quand j'y retournerai, il fera ch... +non, il fera froid. (Rire général.)</p> + +<p>--Un diseur d'anecdotes raconte les facéties suivantes:</p> + +<p>«J'ai lu autrefois, dans les Mémoires de M. le maréchal +de ***, qu'il examinait toujours le soir ce qu'il +avait dépensé le jour; et comme il avait donné cent +écus au maître d'hôtel qui le servait, pour faire la plus +grande chère qu'il pourrait à sept ou huit personnes +de l'un et de l'autre sexe, et de qualité, ce maître +d'hôtel lui porta ses comptes, lorsqu'il était près de se +coucher. Dans son mémoire, il ne trouva que quatre-vingt-dix +écus pour la dépense du repas, et M. le maréchal +lui dit après l'avoir lu: «Faites que le compte +soit juste, si vous voulez que je l'arrête.» Le maître +d'hôtel descendit au même instant, rapporta le compte +après avoir ajouté au bas: «<i>Item</i>, dix écus pour faire +les cent écus.»</p> + +<p>Le savant Bouilleau, que son père, procureur, envoyait +étudier à Paris, fit un mémoire pour rendre +compte des dépenses qui avaient employé l'argent +qu'il avait reçu. Il exagéra par plus de soixante <i>item</i> +jusqu'aux moindres minuties, et, comme il n'y trouvait +pas encore son compte, il mit au bas d'un article: +<i>Item, mon père, il faut vivre</i>.»</p> + +<p>--«Je suis si malheureux, disait Saint-Péraire, que +si je me faisais chapelier, personne n'aurait plus de +tête.»</p> + +<p>--«Au 15 septembre 1848, <i>je paierais</i> à M. Coquardeau +la somme de trois cents francs.»</p> + +<p>--Après?</p> + +<p>--Eh bien! payez-moi, c'est aujourd'hui le 15.</p> + +<p>--Impossible, je n'ai pas d'argent.</p> + +<p>--Que m'importe! vous m'avez souscrit un billet.</p> + +<p>--C'est vrai; mais il y a un <i>s</i> à <i>je paierais</i>.</p> + +<p>--Après, Monsieur?</p> + +<p>--Après?... vous n'êtes pas fort: l'<i>s</i> indique le conditionnel, +par conséquent, je ne vous paie pas, puisque +c'était à condition... que j'aurais de l'argent.</p> + +<p>--Quelqu'un, à Paris, pour se moquer d'un provincial, +cherchait à lui faire des questions singulières. +Il lui demanda, un jour, en compagnie: «Qu'est-ce +qu'une obole, une faribole et une parabole?» Le provincial, +sans se déconcerter, lui répondit: «Une parabole +est ce que vous n'entendez pas; une faribole, +ce que vous dites; une obole, ce que vous valez.»</p> + +<p>LE PÈRE COUPE-TOUJOURS.</p> + +<p><span class="sc">Le juge</span>, au marchand de galette.--Vous avez fait +assigner le sieur Bazoteau. Qu'avez-vous à dire?</p> + +<p><span class="sc">Le marchand de galette</span>.--J'ai à dire de lui que +c'est indigne. Voilà ce que j'ai à dire.</p> + +<p><span class="sc">Le juge</span>.--Mais, encore, expliquez-vous.</p> + +<p><span class="sc">Le marchand de galette</span>.--Ah! mon Dieu! c'est +tout expliqué; monsieur est cause que j'ai perdu toutes +mes pratiques... Voilà tout... Il me semble que c'est +bien assez, cristi!</p> + +<p><span class="sc">Bazoteau</span>.--Allons donc! vous voulez rire.</p> + +<p><span class="sc">Le marchand</span>.--Du tout, du tout... Moi, un des +principaux marchands de galette du boulevard... vous +m'avez mis dans le pétrin. (Rire général.)</p> + +<p><span class="sc">Le juge</span>.--Comment cela?</p> + +<p><span class="sc">Le marchand</span>.--Monsieur est fabricant de lunettes... +J'avais perdu les miennes, il m'en fournit... Et v'lan! +comme par enchantement, voilà toutes mes pratiques +qui filent chez le marchand d'à côté.</p> + +<p><span class="sc">Le juge</span>.--Mais, enfin, pourquoi?</p> + +<p><span class="sc">Le marchand</span>.--Pourquoi! Parce que depuis ce +moment je suis là à me croiser les bras et les jambes +comme un commissionnaire; je chauffe mon four, je +mets la main à la pâte, j'aiguise mes couteaux, et moi, +<i>père Coupe-Toujours</i>, je ne coupe plus rien du tout. +Voilà pourquoi. (Longue hilarité.) Du reste, en voici +la raison.</p> + +<p><span class="sc">Le juge</span>.--Ah! c'est bien heureux.</p> + +<p><span class="sc">Le marchand</span>.--Monsieur, que voilà, au lieu de +me fournir du petit zéro, qui est mon numéro, m'a +mis des verres grossissants, oh! mais grossissant au +point que je trouvais les plus petits morceaux toujours +trop gros, et que je finissais par ne plus rien +donner du tout de pâte ferme pour deux sous... (Rire +général.)</p> + +<p><span class="sc">Bazoteau</span>.--Ah! c'est pour ça?</p> + +<p><span class="sc">Le marchand</span>.--Vous pensez bien que ce n'est pas +le moyen de faire son beurre; aussi je suis bientôt resté +sur le flanc. (Rire.) On ne m'appelait plus que le <i>père +Coupe-Trop-Court</i>. (Rire général.)</p> + +<p><span class="sc">Bazoteau</span>.--Ça ne me regarde pas, c'est votre +femme qui m'a demandé les verres que j'ai mis. Elle +trouvait que vous serviez trop largement la pratique.</p> + +<p><span class="sc">Le marchand</span>.--Elle est bien avancée, à présent +que je ne la sers plus du tout. (Nouveaux rires.)</p> + +<p>Pour comble de malheur, Bazoteau est renvoyé de +la plainte, et le marchand de galette est condamné +aux dépens.</p> + +<p><span class="sc">Le père Coupe-Toujours à sa femme</span>.--Chaud! +chaud! là, j'espère que vous m'en faites avaler... des +brioches... Pour une marchande de galette, madame +mon épouse, vous êtes une fameuse galette. (Longue +et vive hilarité.)</p> + +<p>--En creusant des fondations à Écouis (Eure), on a +trouvé un squelette et deux crânes dans un même +tombeau. Les archéologues ont prétendu que le squelette +était celui de Pierre III de Roucherolles, seigneur +d'Écouis; mais comment expliquer les deux crânes? +Le sieur P. a découvert une solution; il a mis les deux +crânes sur un rayon de sa bibliothèque, et il explique +gravement aux curieux «que le petit crâne appartenait +à Pierre de Roucherolles encore enfant, tandis que +le plus gros était sa tête lorsqu'il fut devenu homme!»</p> + +<p>--Un fermier écossais, qui ne savait ni lire ni +écrire, et qui avait quelques épargnes, voulut faire donner +de l'instruction à son fils, et l'envoya dans un pensionnat +d'Édimbourg. Après y avoir passé deux années, +le jeune homme revint chez ses parents, et rentra dans +la ferme au moment où son père et sa mère se mettaient +à table devant un plat de viande et un plat de +légumes.</p> + +<p>Après les embrassements d'usage, le fermier dit à +son fils, tandis que la mère préparait un troisième +couvert:--Eh bien! garçon, as-tu bien employé ton +temps?--Es-tu devenu savant là-bas?--Oh! que +oui, père, répondit l'écolier avec suffisance.--Sais-tu +compter, surtout, garçon?--J'étais le plus fort en +arithmétique, répondit encore le jeune drôle, et je +puis vous donner la preuve que je sais faire des +comptes que ne feriez pas vous-même.--Je ne dis pas +non... Mais voyons la preuve de ton savoir.--Voilà: +Combien croyez-vous avoir de plats sur votre table?--Deux, +répondit le père: un plat de mouton, un +autre de pommes de terre.--Eh bien! vous vous +trompez... Il y a trois plats sur votre table.--Pardi +je serais aise d'entendre ton raisonnement à l'appui +de ce compte-là.--Rien de plus facile; nous disons: +plat de mouton, ça nous fait un; plat de pommes de +terre, ça nous fait deux; j'additionne, et je dis: un +et deux font trois.--C'est juste, dit le fermier. Pour +lors, je vais manger un plat, ta mère mangera le second, +et toi tu mangeras le troisième en récompense +de ton savoir.</p> + +<p>--On lisait dans un journal de 1848:</p> + +<p>«En entendant les crieurs hurler sur le boulevard: +<i>Le Journal</i>, par Alphonse Karr et son supplément, on +se demandait naturellement si ce supplément était +l'associé de M. Alphonse Karr, ou tout simplement une +double feuille de papier. Cette tournure de phrase +nous rappelle l'embarras de ce brave homme, propriétaire +d'un bain sur la Seine, qui passa toute sa +vie à rédiger l'enseigne de son établissement et n'y +put jamais parvenir. Il avait d'abord trouvé <i>Bains à +quatre sols pour les femmes à fond de bois</i>. Mais il +vit qu'on riait: il changea en <i>Bains à fond de bois +pour les femmes à quatre sous</i>. On rit encore plus, et +sa clientèle, se trouvant insultée, l'abandonna; il +mourut de désespoir de n'avoir pas pu rédiger son +enseigne convenablement.»</p> + +<p>--J'ai lu autrefois, dans une publication périodique, +intitulée avec un peu de vanité <i>Recueil encyclopédique +belge</i>, une page singulière, intitulée <i>Pensées sur +l'homme</i>. Il m'a semblé tout d'un coup que ces pensées +avaient été écrites par un homme marin. Vous allez +juger comme c'est liquide:</p> + +<p>Première pensée: «Vois le <i>ruisseau</i>; il fuit...; enfin +il va se perdre dans la <i>mer</i>.» N'est-il pas vrai que c'est +là un début très-mouillé?</p> + +<p>Deuxième pensée: «Un <i>océan</i> d'amertume environne +l'esprit de l'homme, comme l'immensité des +<i>eaux</i> enveloppe la terre.» C'est encore de l'humidité.</p> + +<p>Quatrième pensée: «L'oubli passe l'<i>éponge</i> sur le +nom de l'égoïste.» On voit que l'auteur est un homme +qui se débarbouille.</p> + +<p>Cinquième pensée: «Le présomptueux s'embarrasse +dans ses paroles, comme le <i>poisson</i> dans les filets; ils +se prennent l'un et l'autre à l'<i>hameçon</i>.» Le penseur, +à coup sûr, vit dans l'eau.</p> + +<p>Dans la sixième pensée, il compare l'espérance aux +feux follets qui naissent dans les marécages; et il n'y +a que huit pensées.</p> + +<p>Quand je vous disais que l'auteur est un homme +marin! Il a signé; et il s'appelle <i>De la Flotte</i>.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Non loin du camp, la nuit, après certaine attaque,</p> +<p class="i18"> Un soldat se mit à crier:</p> +<p class="i18"> --Amis, j'ai fait un prisonnier,</p> +<p class="i18"> Et je le tiens; c'est un Cosaque</p> +<p class="i16">Qui de son régiment vient de se détacher.</p> +<p class="i16">--Amène-le vers nous.--Mais il fait résistance.</p> +<p class="i16">--En ce cas, viens sans lui.--C'est bien à quoi je pense,</p> +<p class="i16"> Mais il ne veut pas me lâcher.</p> +<br> +<p class="i30"><span class="sc">E. Arnal.</span></p> +</div></div> + +<p>Aux élections de 1848, deux candidats étaient en +présence à Pithiviers: MM. Lejeune et Deloines.</p> + +<p>Deux auberges se disputaient les électeurs partagés +entre ces deux candidatures.</p> + +<p>Sur la porte de l'une d'elles on avait écrit ces vers:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Votez tous pour monsieur Deloines.</p> +<p class="i20">Vous serez gras comme des moines.</p> +</div></div> + +<p>Et sur l'autre:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Ceux qui voteront pour Lejeune.</p> +<p class="i20">Ne connaîtront jamais le jeûne.</p> +</div></div> + +<p>--Boulvot, originaire d'Éclavolle (Marne), ayant pour +le quart d'heure son domicile à Romilly-sur-Seine, est +arrêté par la gendarmerie de Saint-Aubin en flagrant +délit de mendicité. Conduit devant M. le procureur du +roi de Nogent-sur-Seine. Boulvot prétend que, loin de +l'inquiéter, on devrait lui décerner une médaille.--Depuis +plus de dix ans, dit-il, je ne suis occupé qu'à +poursuivre l'extinction de la mendicité.--Comment, +en mendiant?...--Eh! sans doute, mon procureur: +on m'arrête; n'est-ce pas un mendiant de moins?...</p> + +<p>--Un riche bourgeois marchandait dernièrement, +avec son fils, une carte de France dans la boutique d'un +libraire. Le fils, voulant s'assurer de l'exactitude de +cette carte, y cherchait Moscou, et témoignait à son +père son étonnement de ne pas l'y trouver. «Comment, +lui répondit celui-ci, peux-tu chercher cette ville +sur la carte! Tu devrais bien savoir qu'elle a été +brûlée.»</p> + +<p>--Le duc de Pembroke nourrissait un nombre considérable +de porcs à la terre de Wilthsire. Traversant sa +basse-cour, il fut surpris de les voir rassemblés autour +d'une auge et faisant un bruit affreux. La curiosité +le porte à examiner quelle peut en être la cause; il +s'approche et aperçoit dans l'auge une cuiller d'argent. +Dans ce moment arrive la cuisinière, fort étonnée +de tout ce bruit: «Sotte que vous êtes, lui dit Sa Seigneurie, +ils ont raison de grogner, les pauvres animaux! +vous ne leur avez donné qu'une cuiller pour +eux tous.»</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Indécis autant qu'incertain,</p> +<p class="i20">Entre vos attraits et vos charmes,</p> +<p class="i20">Du sort je brave le destin</p> +<p class="i20">Et mêle mes pleurs à mes larmes.</p> +<p class="i20">Mon coeur ne saurait être heureux</p> +<p class="i20">Dans le veuvage de mon âme,</p> +<p class="i20">Et je ne connais que mes feux</p> +<p class="i20">Qui puissent égaler ma flamme.</p> +</div></div> + +<p>Dans un des arrondissements du Havre, un candidat +ministériel venait d'être repoussé avec perte du collége +électoral. Son perruquier, appelé pour lui faire la +barbe, s'arrête tout à coup, l'examine avec attention, +et lui déclare qu'il ne veut plus dorénavant le raser au +même prix, attendu qu'il lui trouve la figure beaucoup +plus longue que par le passé. Ce fonctionnaire allait +se fâcher, lorsqu'il sentit qu'il valait mieux prendre +du bon côté la plaisanterie du facétieux barbier: +«Vous pouvez, lui répondit-il, me raser à bon marché, +car on vient de me faire la queue pour rien.»</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20"> Un jour qu'il était nuit,</p> +<p class="i16">Tout debout éveillé, je dormais dans mon lit,</p> +<p class="i20"> Quand la foudre en silence</p> +<p class="i16">Par un éclair obscur m'annonça sa présence.</p> +<p class="i20"> Nul ne bouge, tout fuit;</p> +<p class="i16">Le marbre épouvanté reste froid comme glace;</p> +<p class="i16">Le muet ne dit mot, le sourd n'entend plus rien;</p> +<p class="i16">Soudain la terre tourne, on n'en sent pas la trace;</p> +<p class="i16">Le cerf devient craintif, et devançant le chien</p> +<p class="i16">Il s'élance et bondit; quoiqu'il change de place,</p> +<p class="i16">Bientôt il est le prix de celui qui le chasse.</p> +<p class="i20"> Mais ce muet fracas</p> +<p class="i16">Me fit voir, en dormant, que je ne dormais pas.</p> +</div></div> + +<p>Un Parisien qui se trouvait avec sa femme dans le +convoi du chemin de fer, lors de l'épouvantable catastrophe +du 8 mai 1842, se sauva par miracle; sa femme +y resta et périt. Notre homme revint chez lui, mais +il s'aperçut en rentrant qu'il avait perdu son parapluie; +il alla sur-le-champ le réclamer à la préfecture +de police.--On ne l'avait point retrouvé.--Quand +il raconte cette histoire, il ne manque jamais de dire: +«J'y ai perdu ma femme et mon parapluie; un parapluie +tout neuf.»</p> + +<p>--Un directeur de spectacle de province écrivait à +son correspondant à Paris: «J'ai reçu par le bateau à +vapeur la neige et la gelée que vous avez chargées pour +moi. Elles sont très-fraîches; mais il manquait une aile +à Zéphire, et le tonnerre ayant crevé en route, j'ai été +forcé de le faire ressouder: les éclairs, les deux fleuves +et la mer qu'on avait mis dans le panier de derrière la +diligence, ont souffert de la chaleur. Notre père noble +ayant fait un trou à la lune, je n'ai pu m'en servir. +Envoyez-moi un torrent, car le mien a été brûlé: joignez, +je vous prie, à l'envoi que vous me ferez, mon +manteau et une forteresse. Je ne pourrai pas ouvrir +avant huit jours, car mon petit amour a la coqueluche, +mon jeune premier a la goutte, et ma duègne +vient d'être vaccinée.»</p> + +<h4>FAÇON</h4> + +<p>Je vais vous dire ma façon de penser.--Dites-moi +simplement votre pensée; je ne tiens pas à la façon.</p> + +<h4>FAGOTS</h4> + +<p>Des économistes du dernier siècle vantaient dans +une société la moderne philosophie.</p> + +<p>--Quel bien a-t-elle donc fait?... demanda une +dame.</p> + +<p>--Les philosophes, Madame, répondit d'Alembert, +ont abattu la forêt des préjugés.</p> + +<p>--Je ne suis plus surprise, répliqua cette dame en +riant, que vous nous débitiez tant de fagots.</p> + +<h4>FAIM</h4> + +<p>Quelle est l'occupation qui commence par la fin?--Un +repas.</p> + +<p>Au commencement d'un grand festin, où tout le +monde dévorait sans rien dire, un convive s'écria:--Que +signifie ce silence?--Il annonce la faim du +monde, répondit un autre.</p> + +<h4>FAIRE</h4> + +<p>Un musicien assez mal vêtu disait en parlant de sa +voix, dont quelqu'un faisait l'éloge:--Il est vrai que +j'en fais ce que je veux.--Ma foi, Monsieur, lui dit +un plaisant, vous devriez bien vous en faire une +culotte.</p> + +<p>Un médecin anglais, se promenant un jour dans un +jardin de M. Hamilton à Cobham, lui exprima son +étonnement de la crue prodigieuse de ses arbres.--«Monsieur +le docteur, reprit Hamilton, songez donc qu'ils +n'ont pas autre chose à faire.»</p> + +<p>Le Mariage du Poussin est le moins bon tableau des +sept sacrements de ce peintre: Tant, il est vrai, disait +l'abbé Desaleurs, qu'il est difficile de faire un bon mariage, +même en peinture.</p> + +<p>Un observateur froid demandait, à propos de la révolution +de 1789: Qu'a-t-elle donc fait? Un autre lui +répondit: Elle a beaucoup défait.</p> + +<p>Un Gascon sur une rosse tremblante rencontra, près +le Pont-Neuf, un seigneur qui montait un cheval magnifique:--Cadédis, +lui dit-il, jé gage dix louis qué +jé fais faire à mon bidet cé qué lé votre né féra pas.--Oui, +je gage, dit le seigneur, en regardant d'un air +de mépris le rossinante. Aussitôt le Gascon prend son +cheval dans ses bras, et le jette dans la Seine; le gentilhomme +fort étonné paya la gageure.</p> + +<p>Un garçon boucher écrivait à son père: «Je profite +avec empressement de l'occasion de la poste pour vous +apprendre que j'ai un état. Dans un mois il y aura +six semaines que je suis garçon boucher. Mon maître +est très-content de moi; il m'a déjà fait tuer deux ou +trois fois, et il me fera écorcher à Pâques.»</p> + +<p>Pétition de Sans-Culottes du faubourg Saint-Antoine +à l'Assemblée nationale:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i18">Ah! que nous serions satisfaits,</p> +<p class="i20"> Si, toujours patriotes,</p> +<p class="i18">Au lieu de faire des décrets,</p> +<p class="i20"> Vous faisiez des culottes.</p> +</div></div> + +<p>(<i>Suivent les signatures.</i>)</p> + +<p>Un acteur des boulevards voyant, au Musée de l'artillerie, +l'armure du roi François Ier, demanda à l'employé +sous quel règne ce conquérant faisait ses exploits.</p> + +<p>--Il faisait sous lui, répondit l'employé.</p> + +<p>Le maréchal de... menait des dames à l'Opéra; mais +toutes les loges avaient été retenues. Comme il en vit +une remplie par un domestique qui la gardait pour +un bourgeois, il obligea le domestique de sortir et fit +entrer sa compagnie dans la loge. Le bourgeois arriva +peu de temps après avec des dames, et fut piqué, comme +on le pense bien, de cette violence. Force lui fut néanmoins +de céder pour le moment; mais le lendemain, +il fit assigner son rival devant le tribunal des maréchaux +de France, et plaidant lui-même sa cause, dit: +«Qu'il était bien malheureux d'être obligé de se +plaindre de l'un d'entre eux, qui de sa vie n'avait pris +que sa loge;» et demanda justice. Le président lui +répondit: «Vous venez de vous la <i>faire</i>.»</p> + +<p>A une partie de thé chez mistress Thrale, au moment +où la compagnie était engagée dans une conversation +très-animée, la belle hôtesse, qui avait été faire son +thé à l'office, oublia de mettre dans la théière la chose +principale, c'est-à-dire du thé. Le docteur Johnson en +fit l'observation le premier, et lui dit:--Mistress Thrale, +il est possible que dans votre imagination vous croyez +avoir été faire du thé, mais l'opinion de vos amis est +que vous avez été faire de l'eau.</p> + +<h4>FAIRE VOIR</h4> + +<p>Un maquignon, vendant un cheval, dit à l'acheteur:--Monsieur, +faites-le voir; je le garantis sans +défaut.</p> + +<p>Ce cheval se trouvant aveugle, l'acheteur voulut +obliger le maquignon à le reprendre. Mais celui-ci soutint +qu'il ne pouvait pas l'y contraindre, puisqu'il +l'avait averti de son infirmité, en disant:--Faites-le +voir; je le garantis sans défaut.</p> + +<h4>FAIRE PARLER DE SOI</h4> + +<p>Un membre de l'Académie de Soissons en racontait +un jour toutes les prérogatives; il finit par dire qu'elle +était la fille aînée de l'Académie française. Voltaire, +qui l'écoutait, lui dit:--Assurément, c'est une bonne +fille; car elle n'a jamais fait parler d'elle.</p> + +<h4>FAIT AU MOULE</h4> + +<p>C'est une scène du conseil de discipline de la ci-devant +garde nationale.</p> + +<p><span class="sc">Le président</span>.--Voici un rapport qui annonce que +vous avez manqué pour la troisième fois votre faction. +Très-exact du reste, vous passez régulièrement une +partie de la journée au poste; mais quand vient l'heure +du dîner, vous disparaissez pour ne plus revenir. +Avant-hier encore, cela vous est arrivé. Vous passez +donc tout votre temps à table?</p> + +<p><span class="sc">Jupin</span>.--C'est vrai, mais en voici la raison. Avant-hier +je suis allé dîner avec un ami, nous avons mangé +des moules, et ça nous a fait enfler (rire). Dame! que +voulez-vous, je ne suis pas fait <i>aux moules</i> (longue +hilarité).</p> + +<p><span class="sc">Le président</span>.--Et l'avant-dernière fois, faut-il +encore accuser les moules? Non, je crois qu'il faut accuser +le vin de Champagne. Il paraît que vous l'aimez +beaucoup, et en voici la preuve. C'est une lettre de +vous adressée à votre commandant, que je vais soumettre +à l'approbation du conseil. On verra qu'une +lettre semblable n'est pas faite de sang-froid. Le sans-gêne +de cette dépêche explique l'excuse maladroite +d'un convive plus que joyeux qui déserte plutôt le +poste que la salle du festin. (Ici M. le président fait +passer sous les yeux du conseil la lettre adressée par +le sieur Jupin. Nous transcrivons cette lettre qui, probablement +à défaut d'autre papier, se trouve tracée +sur un feuillet détaché de la carte du restaurant):</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">«Mon cher camarade et commandant du</p> +<p class="i20"> <i>Fricandeau à l'oseille.</i></p> +<p class="i16">poste. Je suis retenu à dîner par un brave</p> +<p class="i20"> <i>Dindon aux truffes.</i></p> +<p class="i16">de mes amis, et je vous prie de ne pas compter sur une</p> +<p class="i20"> <i>Mauviette</i>.</p> +<p class="i16">faction que je dois, d'après l'ordre, monter ce soir au</p> +<p class="i20"> <i>Vol-au-vent.</i></p> +<p class="i16">drapeau. Du reste je vous dirai que je me</p> +<p class="i20"> <i>Riz de veau sauce tomate.</i></p> +<p class="i16">corrigerai. Et buvant du Champagne à votre santé,</p> +<p class="i16">je suis, mon cher,</p> +<p class="i20"> <i>Turbot.</i></p> +<p class="i16">votre fidèle camarade qui dépose à vos</p> +<p class="i20"> <i>Pieds de veau.</i></p> +<p class="i16">genoux sa position de récalcitrant, tout en vous priant</p> +<p class="i16">de compter sur une</p> +<p class="i20"> <i>Morue hollandaise.</i></p> +<p class="i16">amélioration dans le service que je dois à la</p> +<p class="i20"> <i>Limande.</i></p> +<p class="i16">patrie.</p> +<br> +<p>Signé: <span class="sc">Jupin</span>.»</p> +<p> <i>Merlan au gratin.</i></p> +</div></div> + +<p>Jupin est condamné à une garde hors de tour.</p> + +<h4>FARDEAU</h4> + +<p>Mme de Pompadour avait un pied-à-terre près de +Ménars-le-Château, où l'architecte Hupeau lui rendit +visite un jour. Il était triste; il venait de terminer le +pont d'Orléans, et mille bruits défavorables couraient +sur la solidité de son oeuvre. Pour fermer la bouche +aux médisances, il osa proposer à la favorite de traverser +son pont dans son carrosse à six chevaux. +Mme de Pompadour accepta, et, l'épreuve ayant réussi, +on dut se taire; mais les bavards, ne pouvant plus +parler, rimèrent l'épigramme que voici:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Censeurs de notre pont, vous dont l'impertinence</p> +<p class="i18"> Va jusqu'à la témérité,</p> +<p class="i16">Hupeau, par un seul fait, vous réduit au silence.</p> +<p class="i16">Bien solide est son pont; ce jour il a porté</p> +<p class="i18">Le plus lourd fardeau de la France.</p> +</div></div> + +<p>Mme de Pompadour lut l'épigramme; et, afin de ne +plus repasser sur ce pont, elle fit changer la direction +de la route.</p> + +<h4>FATALITÉ</h4> + +<p>On attribue à Boileau ce faible calembour. On lui +disait qu'un homme dont il méprisait la fatuité était +tombé malade.--Quelle fat alité! se serait écrié l'auteur +de la satire contre l'équivoque.--Mais nous ne +le croyons pas.</p> + +<h4>FAUTES CONTRE LA LANGUE</h4> + +<p>Un incendie dévora, en 1763, la salle de l'Opéra. +Quelques heures après l'événement, une grande dame, +rencontrant Sophie Arnould, lui dit d'un air effrayé: +«Mademoiselle, racontez-moi ce qui s'est passé à <i>cette</i> +terrible incendie.--Madame, lui répondit l'actrice, +tout ce que je puis vous dire, c'est qu'incendie est du +masculin.»</p> + +<h4>FAUTES D'IMPRESSION</h4> + +<p>On lisait un matin, dans le <i>Journal du Havre</i>, à +l'article <i>Angleterre</i>:</p> + +<p>«A un repas diplomatique donné par lord Aberdeen, +on distinguait entre autres mets, sur la table +de l'illustre amphitryon, plusieurs plats de <i>seringues</i> +à la crème.»</p> + +<p>La lecture de cet article nous laisse vraiment dans +une affligeante incertitude.</p> + +<p>Est-ce une excentricité gastronomique, ou bien une +distraction typographique?</p> + +<p>Dans tous les cas, le mal est maintenant sans <i>remède</i>.</p> + +<p>Dans un livre où on louait les vertus d'une femme, +l'auteur disait qu'elle occupait activement ses moments +de loisir à tricoter. Le typographe mit une <i>f</i> à la place +du premier <i>t</i>. Et comme à la nouvelle édition on voulut +corriger la faute, cette fois on écrivit tripoter.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20"> Si vous lisez dans l'épitaphe</p> +<p class="i16">De Fabrice qu'il fut toujours homme de bien,</p> +<p class="i20"> C'est une faute d'orthographe;</p> +<p class="i20"> Passant, lisez homme de rien.</p> +<p class="i16">Si vous lisez qu'il aima la justice,</p> +<p class="i20"> Qu'à tout le monde il l'a rendit,</p> +<p class="i16">C'est une faute encor, je connaissais Fabrice:</p> +<p class="i20"> Passants, lisez qu'il l'a vendit.</p> +<br> +<p class="i30"><span class="sc">Lebrun.</span></p> +</div></div> + +<h4>FAUX</h4> + +<p>Rameau, rendant visite à une belle dame, se lève +tout à coup de sa chaise, prend un petit chien qu'elle +avait sur ses genoux et le jette par la fenêtre. La dame +épouvantée s'écrie:--Eh! que faites-vous, Monsieur!--Il +aboie faux, répondit Rameau avec l'indignation +d'un grand musicien dont l'oreille avait été déchirée.</p> + +<h4>FAUX PAS</h4> + +<p>Le marquis de Bièvre disait d'une dame boiteuse: +«Voilà une femme qui a fait bien des faux pas.»</p> + +<h4>FÉDÉRATION</h4> + +<p>Le jour de la première fédération, 14 juillet 1790, il +faisait très-chaud au Champ de Mars.--Ah! disait +une dame, si une bonne fée pouvait nous envoyer des +rafraîchissements.--Adressez-vous, lui dit quelqu'un, +à la fée des rations.</p> + +<h4>FENÊTRE</h4> + +<p>Danières disait qu'une croisée s'appelle une fenêtre, +parce que c'est elle qui dans une chambre le jour <i>fait +naître</i>...</p> + +<h4>FERRAILLEUR</h4> + +<p>Lorsqu'on expulsa les étalages de vieilles ferrailles +du quai de la Mégisserie, à Paris, on afficha ce distique:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Allez donc tous, vieux ferrailleurs,</p> +<p class="i20">Vendre votre vieux fer ailleurs.</p> +</div></div> + +<h4>FÊTE</h4> + +<p>Une dame disait qu'il n'y a pas de fêtes sans lendemain.--Pardon, +lui dit quelqu'un, le faîte des +grandeurs peut en avoir, mais le faîte d'une maison +n'en a pas.</p> + +<h4>FEUILLETÉ</h4> + +<p>En quoi les bons livres ressemblent-ils à la galette?--En +ce qu'ils sont feuilletés.</p> + +<h4>FIÈVRE</h4> + +<p>Dans une chanson de madame Constance Pipelet, il +y a un couplet qui exprime élégamment les divers +emplois du mot <i>fièvre</i>.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Ah! qu'il est beau pour un grand coeur</p> +<p class="i20">D'avoir la fièvre de la gloire!</p> +<p class="i20">C'est par sa fièvre qu'un auteur</p> +<p class="i20">S'inscrit au temple de Mémoire,</p> +<p class="i20">On voit peu d'hommes ici bas</p> +<p class="i20">Avoir la fièvre du génie;</p> +<p class="i20">Mais on en voit beaucoup, hélas!</p> +<p class="i20">Nourrir la fièvre de l'envie.</p> +</div></div> + +<h4>FIL</h4> + +<p class="mid">A UNE JEUNE MERCIÈRE.</p> + +<p class="mid">Air: <i>J'ai vu partout dans mes voyages.</i></p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">On vante de votre boutique</p> +<p class="i20">L'ordre, la grâce et le bon goût;</p> +<p class="i20">Pour attirer une pratique,</p> +<p class="i20">Avec art vous parlez de tout.</p> +<p class="i20">Vos manières sont si gentilles,</p> +<p class="i20">Vous avez un si doux babil,</p> +<p class="i20">Que pour bien vendre vos aiguilles,</p> +<p class="i20">On dit que vous avez le fil.</p> +</div></div> + +<h4>FLEURS (LANGAGE DES)</h4> + +<p>Nous empruntons aux journaux qui s'occupent des +tribunaux la facétie qui suit; c'est une scène de la +garde nationale, quand elle jouait au soldat:</p> + +<p><span class="sc">Le capitaine rapporteur.</span>--M. Troupeau!</p> + +<p>Une femme se présente et dépose un énorme bouquet +sur le bureau du président. (Surprise générale.)</p> + +<p><span class="sc">Le président.</span>--Qu'est-ce que cela signifie?</p> + +<p><span class="sc">La femme.</span>--Ça signifie, monsieur le président, que +je suis la femme Troupeau, que mon mari m'a ordonné +de vous apporter ça... il a dit que vous saviez +bien ce que ça voulait dire.</p> + +<p><span class="sc">Le président.</span>--Mais pas le moins du monde. Il est +fou, votre mari.</p> + +<p><span class="sc">La femme Troupeau.</span>--Ah! mon Dieu! c'est tout +comme depuis qu'il a eu la bête d'idée de se fourrer +dans une société d'horticulture... il ne parle plus +qu'avec des fleurs... C'est stupide... mais en bonne +épouse je dois flatter sa manie.</p> + +<p><span class="sc">Le président</span>, souriant.--Mais qu'est-ce que vous voulez +que le tribunal comprenne...</p> + +<p><span class="sc">La femme Troupeau.</span>--Oh! je vas vous expliquer +ça, moi. Depuis un an il ne cause pas autrement avec +moi; j'ai bien été forcée de comprendre; voilà ce qu'il +vous dit: <i>La mauve</i> qu'est dans le bouquet signifie +qu'il vous parle avec <i>sincérité</i>..... et l'<i>immortelle</i>, l'<i>estime</i> +qu'il a pour vous... Le <i>seringa</i> veut dire <i>le regret</i> +qu'il a d'être, par <i>la fleur de sureau</i>, malade; +les sept branches de <i>réséda</i>, depuis le 7 du mois... +ce qui a mis (<i>églantier</i>) obstacle à son (<i>mouron</i>) exactitude; +(<i>guimauve</i>) cela soit dit sans (<i>pissenlit</i>) outrage, +(<i>oeillet d'Inde</i>) déguisement et avec (<i>giroflée</i>) vérité... +(Ici le rire qui s'est répandu dans la salle gagne le +tribunal.)</p> + +<p><span class="sc">Le président</span>, souriant.--Qu'est-ce que vous venez +nous raconter là... vous abusez des moments du conseil.</p> + +<p><span class="sc">La femme Troupeau.</span>--Dame! je vous explique son +emblème à c't homme (nouveaux rires). Mon Dieu, il +n'est pas malade du tout! c'est pour rester chez lui à +cultiver ses fleurs. Qu'est-ce qui pourra donc le guérir +de ça... j'y donnerais une fameuse récompense à +celui-là... Figurez-vous, monsieur le président, que +Troupeau me parle toujours ainsi. Tenez, par exemple: +quand il veut que j'aille chercher le dîner, il +m'envoie par la bonne une branche de cerfeuil, une +gousse d'ail et une botte d'échalottes (rires bruyants.)</p> + +<p>Au milieu de l'hilarité générale, le conseil de discipline +passe outre et condamne Troupeau, garde national, +à six heures de prison...</p> + +<p><span class="sc">La femme Troupeau.</span>--Vous ne pourriez pas lui +en mettre vingt-quatre heures; ça m'obligerait bien. +(Rires.)</p> + +<p><span class="sc">Le président.</span>--Dans quel but?</p> + +<p><span class="sc">La femme Troupeau.</span>--Eh! c'est que, voyez-vous, +vingt-quatre de haricots ça pourrait bien le guérir un +peu; dans tous les cas ça ne pourrait pas lui faire de +mal.</p> + +<p>Le président maintient la condamnation.</p> + +<p><span class="sc">La femme Troupeau.</span>--Allons, va pour six heures, +ça lui fera peut-être du bien. Voilà cependant où conduit +le fanatisme de l'horticulture. Tenez, monsieur le +greffier, vous qui mettez en note les condamnations à +la prison, acceptez cette fois, de ma part, cette branche +de myosotis; ça veut dire: <i>ne l'oubliez pas</i> (longue +hilarité.)</p> + +<h4>FOI</h4> + +<p>Un homme, se plaignant de la trahison d'un de ses +amis, disait: «il manque à ce qu'il m'a cent fois promis.</p> + +<p>--C'est justement, lui dit-on, parce qu'il vous l'a +promis sans foi.»</p> + +<h4>FOLIE</h4> + +<p>Nathaniel Lee, auteur de plusieurs drames, et dont +la nation anglaise n'a pas assez honoré la mémoire, +finit ses jours à l'hôpital des fous, à Londres. Ce fut +là qu'il composa, quoiqu'en démence, sa tragédie des +<i>Reines rivales</i>. Il y travaillait, une nuit, au clair de +la lune. Un nuage léger en ayant tout à coup intercepté +la lumière, il prononça d'un ton impérieux: +«Jupiter! lève-toi et mouche la lune.» Le nuage +s'épaississant, la lune disparut entièrement; alors il +s'écria en éclatant de rire: «L'étourdi! je lui dis de la +moucher et il l'éteint.»</p> + +<h4>FONDRE LA CLOCHE</h4> + +<p>A propos d'un décret de la révolution, qui supprimait +les cloches pour en faire des sous:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Rendons grâce au puissant génie</p> +<p class="i20">Qui, voyant notre pénurie,</p> +<p class="i20">Veut que l'on réduise en billon</p> +<p class="i20">Toute espèce de carillon:</p> +<p class="i20">Dès longtemps en effet tout cloche,</p> +<p class="i20">Les paiements vont cahin-caha;</p> +<p class="i20">Sitôt qu'on en est réduit là,</p> +<p class="i20">C'est le cas de fondre la cloche.</p> +</div></div> + +<h4>FORT</h4> + +<p>Deux prédicateurs prêchaient dans la même église; +celui qui prêchait le soir avait une voix très-forte. +Quelqu'un dit que la différence entre le prédicateur du +matin et celui du soir, c'était que le premier prêchait +fort bien, et le second bien fort.</p> + +<h4>FOSSE</h4> + +<p>Potier est mort, disait un vaudevilliste, dans le café +des Variétés; j'ai vu les tentures à sa porte; et voici +Odry qui prétend que c'est une fausse nouvelle.--L'enterrera-t-on? +dit Odry.--Assurément.--Eh bien! +n'est-ce pas, comme je l'ai dit, une fosse nouvelle?</p> + +<h4>FOURMI</h4> + +<p>Lorsque les fous, ayant recouvré leur raison, quittent +Bicêtre, qu'est-ce qu'ils sont!--Guéris.--Non, ce +sont des <i>fous remis</i>.</p> + +<h4>FRANC</h4> + +<p>A présent pièce de vingt sous (vieux style), autrefois +nom de peuple porté par les conquérants des Gaules. +Dans le <i>Siége de Paris</i> de M. le vicomte d'Arlincourt, +ces deux vers furent mal compris:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Pour chasser de ces murs les farouches Normands</p> +<p class="i16">Le roi Charles s'avance avec <i>vingt mille francs</i>.</p> +</div></div> + +<p>Un spectateur s'écria: «Ce n'est guère.»</p> + +<h4>FRAPPÉ</h4> + +<p>Un duel, dont les conséquences ont pensé être funestes +à l'un des combattants, prit dernièrement naissance +dans la réplique suivante, à une question fort +simple.</p> + +<p>--Monsieur, en lisant le premier article du journal, +n'avez-vous pas été frappé?...--Frappé, monsieur? +que voulez-vous dire? Croyez-vous que je sois +homme à me laisser frapper?</p> + +<h4>FRISER</h4> + +<p>Comment les cochers sont-ils plus coiffeurs que les +coiffeurs eux-mêmes?</p> + +<p>--Parce qu'ils savent friser les bornes et raser les +boutiques.</p> + +<h4>FRIT</h4> + +<p>Un plaisant nommé Turbot, étant près de mourir de +violentes coliques, son médecin demanda de l'huile +et voulut lui en faire prendre pour calmer ses douleurs.</p> + +<p>--Ah! docteur, lui dit le malade, remportez votre +huile, car le pauvre Turbot est frit.</p> + +<h4>FRUITS</h4> + +<p>Des ambassadeurs hollandais à la cour de France +étaient invités à dîner chez le ministre des finances. +On servit, au dessert, du fromage de Hollande. Le ministre, +en l'apercevant, dit à l'un des envoyés: +«Voilà du fruit de votre pays.» L'ambassadeur tire de +sa poche une poignée de ducats, les jette au milieu de +la salle et dit: «Ces fruits-là en sont aussi.»</p> + +<p>En 1789 les désordres dans les spectacles commençaient +déjà à devenir habituels. Il arriva un soir, au +Théâtre-Français, que le parti dit patriote se battit à +coups de poings dans le parterre contre le parti aristocrate, +à une représentation d'<i>Iphigénie</i>; et comme +on supposait que les loges étaient remplies principalement +de ces aristocrates, on jeta des pommes contre +plusieurs. La duchesse de Biron, qui en reçut une sur +la tête, l'envoya le lendemain à M. de La Fayette en +lui écrivant: «Permettez, Monsieur, que je vous offre +le premier fruit de la révolution qui soit venu jusqu'à +moi.»</p> + +<h4>FUIR</h4> + +<p>Une dame en visite disait à la dame du logis: «Prenez +garde à votre robe, votre petite chienne <i>fuit</i>.</p> + +<h4>FUSILIER</h4> + +<p>Pendant la guerre d'Orient, les journaux ont raconté +l'anecdote que voici:</p> + +<p>«Il y a quelques jours, à Valenciennes, une vieille +femme demanda à un jeune homme qu'elle rencontra +dans la rue où elle pourrait escompter un bon de 100 fr. +sur le Trésor, que lui envoyait son fils, militaire en +Crimée. A la lecture du billet, le monsieur pâlit légèrement. +Cependant, il conduisit la dame au comptoir de +MM. L. Dupont, Deparis et Cie. Tandis que le caissier +payait la somme souscrite, M. S... donnait les marques +de la plus vive émotion. Enfin, profitant du moment +où la bonne dame, tout heureuse, serrait dans son +sac les 100 fr. de son excellent fils, le jeune homme +s'approche du caissier et lui dit, avec des larmes dans +la voix (car il pleurait, le bon jeune homme):--La +joie de cette femme ne vous fait-elle pas mal comme +à moi, monsieur? Son fils vient d'être fusillé, et je ne +sais comment apprendre cette nouvelle à la pauvre +mère. Dites-la-lui, vous! Le caissier se récrie et refuse +en faisant entendre quelques mots d'étonnement; puis +se ravisant, il demande au jeune homme d'où il tient +ce terrible malheur. Pour toute réponse, M. S... retourne +le billet escompté, et montrant du doigt le nom +du dernier endosseur, il dit:--Lisez, monsieur, +lisez? Le caissier lut: Jean-Baptiste Gillot, fusilier au +27e de ligne.--Vous le voyez, monsieur: Jean-Baptiste +Gillot, <i>fusilier</i>! Le pauvre garçon est bien mort!--Qu'on +se figure, si l'on peut, le fou rire qui s'empara +à ces mots et du caissier et de la caisse et de la +banque. Les écus restèrent seuls insensibles.»</p> +<br> + +<h2>G</h2> + +<h4>GAGNER</h4> + +<p>Deux vieux charpentiers, grands observateurs du +saint Lundi s'étaient rendus, comme de coutume, à la +barrière et se livraient à d'abondantes libations. Ils +devisaient tous deux sur le moyen d'avoir de grands +profits:--Y a toujours moyen de gagner de l'argent, +père Flottard!... Un litre à la barrière, c'est six sous, +au lieu de douze qu'on le paie à Paris.--C'est vrai, +père Bisaiguë, j'ai gagné comme ça trois francs lundi +dernier, et j'en gagnerai bien encore autant aujourd'hui!</p> + +<h4>GALIMATHIAS</h4> + +<p>Un boucher, maigre de corps comme d'esprit, étant +entré un jour dans le magasin d'un libraire où était +l'abbé Maury, prit un volume de J. J., et se mit à +répéter, comme par affectation, et pour faire preuve +de goût, le passage suivant:</p> + +<p>«Qui commande à des hommes libres doit-être libre +lui-même.»</p> + +<p>Puis, se tournant vers l'abbé: Que pensez-vous de +cet adage, monsieur, lui dit-il?--Il n'a pas le sens +commun, reprit Maury, c'est comme si l'on disait:</p> + +<p>Quiconque tue des boeufs gras doit-être gras lui-même.</p> + +<h4>GAMME</h4> + +<p>Chantée à Genève au citoyen Proudhon:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16"><i>Ut</i>-opiste infernal, sans Dieu comme sans âme,</p> +<p class="i16"><i>Ré</i>-trograde prôneur d'un vieux système usé,</p> +<p class="i16"><i>Mi</i>-racle d'impudence en ce siècle abusé,</p> +<p class="i16"><i>Fa</i>-vorable aux fripons, dont tu fais la réclame,</p> +<p class="i16"><i>Sol</i>-eil dont la lumière est propice au voleur,</p> +<p class="i16"><i>La</i> terre connaîtrait ta funeste valeur,</p> +<p class="i16"><i>Si</i> tout homme de sens te chantait cette gamme,</p> +<p class="i16"><i>Ut</i>-opiste infernal, sans Dieu comme sans âme.</p> +</div></div> + +<h4>GANACHE</h4> + +<p>Un jour, Napoléon, fort mécontent à la lecture d'une +dépêche de Vienne, dit à Marie-Louise: Votre père est +une ganache. L'impératrice, qui ignorait beaucoup de +termes français, s'adresse à un conseiller d'État et lui +demande la signification du mot ganache, en lui disant +dans quelle circonstance l'Empereur l'a employée.--À +cette demande inattendue, le courtisan balbutie que +cela veut dire un homme sage, un homme de poids, +un homme de bon conseil.</p> + +<p>Quelques jours après, la mémoire encore fraîche de +sa nouvelle acquisition, Marie-Louise, présidant le conseil +d'État et voyant la discussion plus animée qu'elle +ne voulait, interpelle, pour y mettre fin, Cambacérès, +qui, à ses côtés, bayait tant soit peu aux corneilles: +C'est à vous à nous mettre d'accord dans cette occasion +importante, dit-elle, vous serez notre oracle, car +je vous tiens pour la première et la meilleure ganache +de l'Empire.</p> + +<p>Mais cette plaisanterie est, dit-on, un conte du faubourg +Saint-Germain.</p> + +<h4>GAND</h4> + +<p>Charles-Quint, né dans cette ville, jouait avec son +nom. Un jour qu'à la suite d'une révolte, le duc d'Albe +lui conseillait de détruire cette fourmilière de séditieux, +il le fit monter sur la tour du beffroi, et lui +faisant embrasser l'immense étendue de la ville:--Toutes +vos peaux d'Espagne, dit-il, ne suffiraient pas +à refaire un gant de cette grandeur.</p> + +<p>Lorsqu'il visita Paris, qui était plus resserré, il se +plut à dire encore:--Je mettrais Paris dans mon +gant.</p> + +<h4>GARÇON</h4> + +<p>Frédéric Soulié disait à un garçon de café qui le +servait mal:</p> + +<p>--Il faut vous marier.--Pourquoi cela?--Parce +que vous n'êtes pas fait pour rester garçon.</p> + +<p>La Bruyère appelle ceux qui briguent le nom de bel +esprit «garçons bel esprit,» comme qui dirait garçon +tailleur.</p> + +<h4>GARDE</h4> + +<p>On lisait en décembre 1857, dans le <i>Moniteur du +Calvados</i>:</p> + +<p>«Voici une interprétation originale de la loi portant +taxe sur les chiens. Un propriétaire d'une commune +voisine aurait écrit au maire de son endroit à peu près +en ces termes:</p> + +<p>«Monsieur le Maire,</p> + +<p>«La loi divise les chiens en deux catégories: chiens +de luxe ou d'agrément, et chiens de garde; les premiers +payant la taxe la plus élevée, et les derniers la +moindre.</p> + +<p>«J'ai l'honneur de vous informer que les deux +chiens que j'ai dans ma propriété appartiennent à +mon garde. Je vous prie donc les inscrire, comme +chiens <i>de garde</i>, dans la deuxième catégorie.»</p> + +<p>«Or, il paraît que ces chiens sont deux magnifiques +chiens de chasse.»</p> + +<h4>GAUCHE</h4> + +<p>Quatrain de Rivarol sur l'Assemblée nationale de +1789:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Dans cette assemblée, où l'on fauche</p> +<p class="i20">Et le bons sens et le bon droit,</p> +<p class="i20">Le côté droit est toujours gauche,</p> +<p class="i20">Et le gauche n'est jamais droit.</p> +</div></div> + +<h4>GAULES</h4> + +<p>Quel profit remarquable eurent les Romains à prendre +les Gaules?--La facilité d'abattre les noix.</p> + +<h4>GENDARMERIE</h4> + +<p>Une chanson, populaire à Paris, commence ainsi:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">De la gendarmerie,</p> +<p class="i20">Lorsqu'un gendarme rit,</p> +<p class="i20">Dans la gendarmerie</p> +<p class="i20">Chaque gendarme rit.</p> +</div></div> + +<h4>GENDEBIEN</h4> + +<p>Ex-représentant de Belgique, dont le nom fit faire +un calembour.--Avez-vous beaucoup de <i>gens de +bien</i> à la Chambre? demandait-on à une dame de +Bruxelles.--Non, monsieur, répondit-elle. Nous n'en +avons qu'un.</p> + +<h4>GÊNE</h4> + +<p>Quel est le peuple le moins bien dans ses affaires?--Ce +sont les Gênois, qui vivent constamment dans +l'État de <i>Gênes</i>.</p> + +<h4>GÉNÉRALE</h4> + +<p>On sait le mot de ce soldat de la République sur un +de ses chefs qui faisait mauvais ménage:</p> + +<p>--Notre général n'est qu'un tambour.</p> + +<p>--Pourquoi?</p> + +<p>--Parce qu'il bat la générale.</p> + +<h4>GENTILHOMME</h4> + +<p>Franklin prenait plaisir à répéter une observation +de son nègre, auquel il avait défini ce que c'était qu'un +gentilhomme.</p> + +<p>--Massa, lui disait l'Africain, tout travaille dans +ce pays: l'eau travaille, le vent travaille, le feu travaille, +la fumée travaille, les chiens travaillent, le +boeuf travaille, le cheval travaille, l'homme travaille, +tout travaille, excepté le cochon; il mange, il boit, +il dort, et ne fait rien de la journée. Le cochon est donc +le seul gentilhomme de l'Angleterre.</p> + +<h4>GILET</h4> + +<p>Un fermier de Saint-Julien-du-Sault étant très-malade, +ses amis lui conseillèrent de faire venir le médecin +de l'endroit, qui se nommait Gilet. «Ah bah! leur +dit-il, je suis venu tout nu au monde, je m'en retournerai +bien sans gilet.»</p> + +<h4>GLACÉS</h4> + +<p>Un galant, présentant à une dame une paire de +gants <i>glacés</i>, lui disait:--C'est ce que j'ai trouvé de +plus <i>frais</i>.</p> + +<h4>GRAINS</h4> + +<p>Donnons sur ce mot quelques jolis couplets de +M. Jacinthe Leclère:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Déjà maint critique s'avance</p> +<p class="i20">Impatient de me juger</p> +<p class="i20">Pour faire pencher la balance</p> +<p class="i20">Un grain est un sujet léger.</p> +<p class="i20">Mais à son jugement suprême</p> +<p class="i20">Je m'abandonne sans appel;</p> +<p class="i20">Heureux, si des grains que je sème,</p> +<p class="i20">Je recueille un seul grain de sel.</p> +<br> +<p class="i20">Ce riche gourmand qui m'écoute,</p> +<p class="i20">Et déjà méprise mes grains,</p> +<p class="i20">Sait-il ce qu'un grain de blé coûte</p> +<p class="i20">Et de sueurs et de chagrins?</p> +<p class="i20">Ce chapon fin dont il se gorge</p> +<p class="i20">De grains dépeupla nos guérets;</p> +<p class="i20">Et de sa serviette à grains d'orge</p> +<p class="i20">Un grain de chanvre a fait les frais.</p> +<br> +<p class="i20">Un grain de vent porte la foudre</p> +<p class="i20">Et des mers trouble le repos;</p> +<p class="i20">Et plus loin, quelques grains de poudre</p> +<p class="i20">Tranchent la trame des héros.</p> +<p class="i20">Un grain d'esprit rend plus jolie;</p> +<p class="i20">Un grain d'amour trouble les sens;</p> +<p class="i20">Et souvent un grain de folie</p> +<p class="i20">Fait passer un grain de bon sens.</p> +<br> +<p class="i20">De mes grains j'ouvre une boutique,</p> +<p class="i20">Et j'en donne à tous mes voisins:</p> +<p class="i20">Aux parvenus, grains d'émétique,</p> +<p class="i20">Aux ivrognes grains de raisins,</p> +<p class="i20">Quelques grains d'or à l'alchimiste</p> +<p class="i20">Au malade, grains de santé,</p> +<p class="i20">Grains d'ellébore au journaliste,</p> +<p class="i20">Et grains d'encens à la beauté.</p> +</div></div> + +<h4>GRAMMAIRE</h4> + +<p>Un professeur de mathématiques, bon homme et +vieux savant, que les préoccupations de la science +poursuivaient souvent jusque dans ses fonctions les +plus pieuses, avait l'habitude, lorsque les élèves égaraient +un livre ou quelque objet d'étude, d'en faire +l'annonce à la prière du soir. Un jour qu'il venait de +réciter les oraisons communes, un élève s'approchant +lui dit à l'oreille:--Monsieur, voulez-vous annoncer, +s'il vous plaît, que j'ai perdu ma grammaire.</p> + +<p>Préoccupé sans doute par quelque problème, le savant, +s'égarant sur le mot, s'empressa de répéter tout +haut: Un tel me prie de vous annoncer qu'il a eu la +douleur de perdre sa grand'mère. Nous la recommandons +à vos prières.</p> + +<p>Mais c'est ma grammaire grecque que j'ai perdue, +répond le jeune homme en riant du quiproquo.</p> + +<p>Messieurs, la pauvre femme était Grecque, ajoute +aussitôt le professeur avec émotion; Dieu veuille avoir +son âme.</p> + +<h4>GRAND</h4> + +<p>Ce mot change de sens quelquefois en changeant de +place: un grand homme n'est pas toujours un homme +grand, et souvent un homme grand n'est qu'un petit +homme. La grandeur mise en avant est la mesure de +l'âme, mise en arrière elle n'est que la taille du corps.</p> + +<p>La musique du <i>Jugement de Midas</i>, de Grétry, fut +sifflée à la cour et applaudie à Paris. C'est à ce sujet +que Voltaire adressa au célèbre compositeur le quatrain +suivant:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">«La cour a dénigré tes chants</p> +<p class="i20">Dont Paris nous dit des merveilles,</p> +<p class="i20">Grétry, les oreilles des grands</p> +<p class="i20">Sont souvent de grandes oreilles.»</p> +</div></div> + +<p>Le chancelier Bacon disait: «Les gens de haute stature +ressemblent quelquefois aux maisons de quatre +ou cinq étages, dont le plus haut appartement est +d'ordinaire le plus mal meublé.»</p> + +<p>Un des derniers rois d'Espagne, auquel le sort des +armes avait enlevé plusieurs places considérables +recevait cependant, de la plupart de ses courtisans, le +titre de grand: «Sa Grandeur, dit un Espagnol, ressemble +à celle des fossés, qui deviennent grands à proportion +des terres qu'on leur ôte.»</p> + +<h4>GRANDESSE</h4> + +<p>Quelle est la lettre la plus estimée en Espagne?--La +grande <i>S</i>.</p> + +<h4>GRAND-LIVRE</h4> + +<p>On lisait, chez la femme d'un banquier, l'Invocation +de Milton à la lumière. Un homme d'affaire, qui n'avait +jusqu'alors donné qu'une faible attention à cette +lecture, se réveilla tout à coup à ce vers:</p> + +<p class="mid">Et pour moi le grand livre est fermé pour jamais!</p> + +<p>(Il s'agit là du grand livre de la nature.)</p> + +<p>--Eh quoi! s'écria le banquier, est-ce qu'on ne lui +a pas payé ses rentes?</p> + +<h4>GREDIN</h4> + +<p>Une épigramme de l'<i>Almanach des Aristocrates</i> +pour 1791:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Certaine Anglaise, à certaine séance,</p> +<p class="i16">D'un certain club qui dirige la France,</p> +<p class="i16">Un certain soir, se trouvait par hasard.</p> +<p class="i16">--Oh! s'il vous plaît, dit-elle à sa voisine,</p> +<p class="i16">Sur cet fauteuil qu'est cet monsieur camard,</p> +<p class="i16">Qu'à droite, à gauche, ici chacun lutine?</p> +<p class="i16">--Milady, c'est monsieur le président,</p> +<p class="i16">Ce que chez vous l'orateur on appelle.</p> +<p class="i16">--Oh! l'orateur, fort bien cet mot s'entend.</p> +<p class="i16">Mais, s'il vous plaît, quel est, ajouta-t-elle,</p> +<p class="i16">Cet instrument que dans ses mains je vois?</p> +<p class="i16">--C'est de son rang l'éclatant interprète;</p> +<p class="i16">C'est là son sceptre, et nos augustes lois</p> +<p class="i16">Ne se font plus qu'à grands coups de sonnette.</p> +<p class="i16">--Oh! et que dit ce bruit original:</p> +<p class="i16"><i>Gredin! Gredin!</i> dont toute l'assemblée</p> +<p class="i16">A, comme moi, la cervelle fêlée?</p> +<p class="i16">--Mais, Milady, c'est l'appel nominal.</p> +</div></div> + +<h4>GUET-APENS</h4> + +<p>Le roi des Turlupins était M. d'Armagnac. Ce seigneur +se trouvant un jour avec le duc (Henri-Jules), +depuis prince de Condé, il lui demanda pourquoi on +disait guet-à-paon et non pas guet-à-dinde?--Par la +même raison, répondit le prince, qu'on ne dit pas, +Monsieur d'Armagnac est un <i>turluchêne</i>, mais un <i>turlupin</i>.</p> +<br> + +<h2>H</h2> + +<p>Quelles sont les lettres les plus menues?--Les +lettres H E.</p> + +<h4>HABILLER</h4> + +<p>Une maîtresse de maison avait besoin d'un domestique; +on lui envoya un brave garçon qui arrivait en +droite ligne de Limoges, en Limousin.--Victor (c'était +son nom) était muni des meilleurs renseignements.</p> + +<p>--C'est bien, Victor, lui dit-elle, je vous prends à +mon service; vous aurez cent écus de gages, vous +serez nourri, blanchi et je vous habillerai.</p> + +<p>--Ainsi, madame m'habillera?</p> + +<p>--Oui. Faites porter vos effets et restez.</p> + +<p>Victor sortit, revint et fit son service.</p> + +<p>Le lendemain on attend Victor; point de Victor. On +sonne, personne; on resonne, personne encore. Deux +heures se passent et Victor ne paraît pas.</p> + +<p>Impatientée, la maîtresse du logis monte chez +Victor.</p> + +<p>Il était pacifiquement couché, les yeux ouverts.</p> + +<p>--Mais, Victor, dit la dame, il est onze heures.</p> + +<p>--Je le sais, madame, répond Victor d'un air tranquille.</p> + +<p>--Vous n'avez donc pas entendu qu'on vous a +sonné?</p> + +<p>--Au contraire.</p> + +<p>--Alors, pourquoi ne descendiez-vous pas?</p> + +<p>--Mais, madame m'avait dit hier qu'elle m'habillerait; +j'attendais qu'elle vint m'habiller.</p> + +<h4>HACHÉES</h4> + +<p>Quelles sont les lettres les plus maltraitées?--Les +lettres H E.</p> + +<h4>HACHER</h4> + +<p>Madame de Sévigné disait des pendules à secondes, +qu'elle ne les aimait pas, parce qu'elles hachent la vie +trop menu.</p> + +<h4>HAINE AU BEURRE</h4> + +<p>Quels sont les départements où l'on fait la cuisine à +l'huile?</p> + +<p>Les voici: Aisne, Aube, Eure.</p> + +<h4>HAINE AU HACHIS</h4> + +<p>S'écrit en quatre lettres délicates, <i>n</i>, <i>o</i>, <i>h</i>, <i>i</i>.</p> + +<h4>HALEINE</h4> + +<p>Un cordonnier, président de section en 1793, prononçait +un discours de circonstance; une période, +entre autres, se trouva si étendue que, malgré la force +de ses poumons, les derniers mots expiraient sur ses +lèvres. Un plaisant lui cria:--Citoyen, reprenez +votre alène.»</p> + +<h4>HARENG SAUR</h4> + +<p>Cadet-Roussel, professeur de déclamation, remplit +le rôle d'un tyran qui a pour confident Aran; il le +chasse en lui disant:--«<i>Aran, sors.</i>»</p> + +<p>Citons aussi ce vers, du récit de la mort d'un vieillard, +dans une tragédie moderne:</p> + +<p class="mid">Il sortit d'ici-bas comme <i>un vieillard en sort</i>.</p> + +<h4>HARMONIE</h4> + +<p>Malherbe est auteur de ce vers:</p> + +<p class="mid">Enfin cette beauté m'a la place rendue.</p> + +<p>On dit un jour à ce poëte que Des Yveteaux l'appelait +le poëte Malapla, faisant allusion à ce dernier hémistiche: +<i>m'a la place rendue</i>, qui, à la vérité ne +désigne pas une oreille sévère pour la cadence.</p> + +<p>--C'est bien à M. Des Yveteaux à trouver mauvais +ce <i>m'a la pla</i>, dit Malherhe, lui qui a fait <i>parabla +ma fla</i>.</p> + +<p>Des Yveteaux, en effet, finit un vers par ces mots:</p> + +<p class="mid">Comparable à ma flamme.</p> + +<p>Le comte de Caylus avait demandé, en mourant, +que son tombeau fût surmonté d'une urne étrusque +dans laquelle on renfermerait son coeur. Il n'y avait +que lui qui pût se faire cette épitaphe:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Ci-gît un antiquaire, acariâtre et brusque.</p> +<p class="i16">Ah! qu'il est bien placé dans cette cruche étrusque.</p> +</div></div> + +<p>La Motte-Le-Vayer cite un homme qui fut vingt-quatre +heures à rêver comment il éviterait de dire <i>ce +serait</i>, à cause de la ressemblance des deux premières +syllabes: ce n'est pas ce que nous conseillons ici.</p> + +<p>--Les vers suivants sont faits exprès:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Quand un cordier cordant veut accorder sa corde,</p> +<p class="i16">Pour sa corde accorder trois cordons il accorde;</p> +<p class="i16">Mais si l'un des cordons de la corde décorde,</p> +<p class="i16">Le cordon décordant fait décorder la corde.</p> +</div></div> + +<h4>HARNAIS</h4> + +<p>L'industrie est une fort belle chose assurément; mais +elle a une manie d'envahissement parfois déplorable. +Que lui ont fait les grands noms de Condé, Turenne, +Bayard, Montesquieu, pour qu'elle en fasse une enseigne? +N'a-t-elle pas des patrons plus naturels? Voici de +quoi nous menace un sellier. Il se propose d'écrire sur +sa boutique:</p> + +<p class="mid">Au prince Eugène--Beaux-harnais.</p> + +<p>Qui oserait dire que la société n'est pas malade, +lorsqu'il se produit des cas aussi graves de calembour!</p> + +<h4>HAUT ET VAIN</h4> + +<p>On disait à un homme orgueilleux: vous avez bu +de l'abondance, car vous êtes <i>eau et vin</i>...</p> + +<h4>HÉBÉTÉES</h4> + +<p>Quelles sont les lettres les moins spirituelles?--Les +lettres <i>e</i>, <i>b</i>, <i>t</i>.</p> + +<h4>HEURE</h4> + +<p>Dans quel département peut-on le mieux se passer +de montre?--Dans le département de l'Eure.</p> + +<h4>HISTORIOGRAPHE</h4> + +<p>Moncrif avait fait une histoire des chats, sous le +nom desquels il avait plaisanté plusieurs personnages +de la cour. Il était fort aimé du comte d'Argenson. Il +dit un jour au ministre:--Monseigneur, vous êtes +le maître de me faire donner le brevet d'historiographe +de France.</p> + +<p>Malheureusement, M. d'Argenson se ressouvenait +encore de l'histoire des chats.--Historiographe? lui-dit-il, +cela n'est pas possible; mais pour historiogriffe, +cela se pourrait faire.</p> + +<h4>HOMARD</h4> + +<p>Un des spirituels écrivains de ce temps-ci a dit, en +parlant d'un crustacé qu'il aime, à ce qu'il paraît: +«Le homard, ce cardinal de la mer.» Cet écrivain +gastronome croit que le homard est rouge avant +d'être cuit.</p> + +<h4>HOMME</h4> + +<p>Un soldat ivre, disait à son caporal:--Tais-toi, tu +n'es pas un homme.--Je te prouverai le contraire, +lui dit le caporal.--Jamais, reprend le soldat, et +c'est impossible: écoute le major, quand il commande +la garde, le matin à la parade. Ne dit-il pas toujours: +pour tel poste, six hommes et un caporal! Tu vois +donc bien que les caporaux ne sont pas des hommes.</p> + +<h4>HONNÊTE</h4> + +<p>Ce mot change de sens, comme grand, en changeant +de place. Les gens honnêtes n'annoncent pas toujours +les honnêtes gens; et les démocrates ne se lassaient +pas de dire, sous la restauration, avec moins de raison +que d'envie peut-être: ceux qu'on appelle les honnêtes +gens ne sont pas ceux que nous appelons les +gens honnêtes.</p> + +<h4>HOSTILES</h4> + +<p>Voilà un homme qui a des prétentions au style.--Comment +hostiles! mais c'est un homme très-doux.</p> + +<h4>HOTEL</h4> + +<p>Un Gascon, qui n'avait que ses bons mots pour vivre, +étant tombé malade à Paris, fut contraint de se faire +porter à l'Hôtel-Dieu. Un de ses anciens camarades +vint le voir:</p> + +<p>--Eh! donc, mon cher enfant, lui dit-il, en quel +état je te trouve! Courage, mon ami, courage!</p> + +<p>--Pour du courage, lui répondit-il, les gens de +notre pays n'en manquent point.</p> + +<p>--Eh! qui le sait mieux que moi? lui dit celui qui +le visitait. Au reste, mon cher enfant, ajouta-t-il, tu +me permets de te demander si tu es bien avec Dieu?</p> + +<p>--Apparemment, lui répliqua le Gascon malade, je +ne dois pas y être mal, puisqu'il me donne un appartement +dans son hôtel.</p> + +<h4>HUMIDE</h4> + +<p>Un médecin demanda à un malade comment il avait +trouvé le bain qu'il lui avait ordonné.--Un peu humide, +répondit l'autre.</p> + +<p>Malherbe était affecté d'un bégaiement continuel, +et de plus il crachait très-fréquemment, cinq ou six +fois au moins, en lisant une stance de quatre vers. Cela +fit dire très-plaisamment au cavalier Marini: «Je n'ai +jamais vu d'homme plus humide, ni de poëte plus +sec.»</p> + +<h4>HUPPÉES</h4> + +<p>Quelles sont les lettres les plus fières?--Les lettres +<i>u</i>, <i>p</i>.</p> +<br> + +<h2>I</h2> + +<p>Quel est le plus ancien des I.--L'I mage.--Et +quel est le plus froid?--L'I vert.</p> + +<h4>I FIT GÉNIE</h4> + +<p>De qui le génie a-t-il reçu le jour?--De la lettre I, +car les anciens ont écrit <i>Iphigénie</i>.</p> + +<h4>IMITATION</h4> + +<p>M. O. Leroy a raconté la petite anecdote que voici, +dans les journaux de septembre 1855.</p> + +<p>«Un bon vieux curé de campagne, qui avait entendu +parler magnifiquement des <i>Imitations</i>, l'une en latin, +l'autre en vers français de Corneille, réimprimées +pour l'Exposition universelle, y était arrivé, uniquement +pour voir son livre de prédilection, bien décidé +à repartir dès qu'il l'aurait examiné sous ses nouvelles +formes. Il ne doutait pas que ce livre, qui remplit +le monde de sa gloire, mais qui tient une si petite +place à l'Exposition universelle, ne fût là tout entier +dans la tête de chaque employé, ainsi qu'il était dans +la sienne. Il s'adresse en entrant à l'un d'eux:</p> + +<p>--Monsieur, voudriez-vous me dire ou sont les +<i>Imitations</i>?</p> + +<p>--Les imitations en verre?</p> + +<p>--En vers, mon ami! Il y en a une en vers de +Boisville, une autre de Corneille à laquelle on a mis, +dit-on, des peintures superbes et dignes de l'auteur.</p> + +<p>--Ah! très-bien! je vois cela d'ici... Ça doit être +dans les cristaux, ou bien dans les émaux, se dit-il +en lui-même... Monsieur l'abbé, vous ferez du chemin, +mais ne soyez pas rebuté, vous finirez par arriver, et +rien de si facile que de vous indiquer ce que vous +demandez: vous allez monter cet escalier.</p> + +<p>--Très-bien, mon ami.</p> + +<p>--Vous descendrez ensuite.</p> + +<p>--À merveille, mon cher.</p> + +<p>--Et vous irez toujours tout droit. Vous n'aurez +pas fait une demi-lieue que vous demanderez où sont +les <i>Imitations en verre</i>; c'est connu de tout le monde.</p> + +<p>--De tout le monde! dit avec joie le bon curé. Et +l'on dit le siècle prosaïque!... Je suis édifié, mon ami, +et très-reconnaissant de vos excellentes indications.</p> + +<p>--Il n'y a pas de quoi, Monsieur l'abbé.</p> + +<p>Voilà le pauvre prêtre qui se met en route, monte, +descend, traverse les longues galeries au milieu de la +foule et de toutes les industries; il ne voit rien que le +but où il tend, et répète en lui-même les premiers +mots de son livre chéri: «Celui qui vous cherche, +Seigneur, ne marche point dans les ténèbres, <i>non ambulat +in tenebris</i>.» Enfin, il s'arrête et demande à +quelques étourdis qui se trouvent sur son passage où +sont les <i>Imitations</i>.</p> + +<p>--Est-ce du plaqué que vous cherchez, monsieur +l'abbé? répond l'un d'eux.</p> + +<p>--Non, monsieur, c'est de l'A-kempis ou du Gerson, +dont le grand Corneille a traduit en vers l'<i>Imitation +de Jésus-Christ</i>.</p> + +<p>--Ah! ce curé est adorable et à mettre sous verre! +dit tout bas l'étourdi, qui ajouta plus haut: Monsieur +l'abbé, ces choses-là ne sont pas de notre connaissance.</p> + +<p>--Tant pis, Messieurs! Quelqu'un a dit: Il est venu +parmi les siens, ils ne l'ont pas connu.</p> + +<p>Le prêtre attristé s'en allait, quand un jeune exposant, +qui l'avait entendu de son magasin où il était +avec son père, vint lui dire: Monsieur l'abbé, permettez-moi +de vous conduire vers ce beau livre que mon +père a aussi dans sa bibliothèque et dont souvent il +nous cite les vers.</p> + +<p>Et le bon prêtre consolé, après avoir serré la main +du père qui l'était venu saluer, fut conduit par le fils +au but de son voyage, à ses chères <i>Imitations</i>, dont il +lut avec âme quelques vers sublimes à son guide, le +remercia affectueusement, le bénit, et en s'en allant +répéta ces vers qu'il avait lus:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Vous pouvez maintenant, Seigneur,</p> +<p class="i20">Rappeler votre serviteur.</p> +</div></div> + +<h4>IMPÔTS</h4> + +<p>On a renouvelé, à l'aspect de l'Assemblée constituante +de 1848, ces petits vers faits en 1790 pour sa +devancière.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Quel coup d'oeil ravissant!</p> +<p class="i20">Quel spectacle <i>imposant</i>!</p> +<p class="i20">Disait un démocrate.</p> +<p class="i20">Oui, réplique aussitôt</p> +<p class="i20">Un brave aristocrate:</p> +<p class="i20">Il va doubler l'<i>impôt</i>.</p> +</div></div> + +<h4>INCUIT</h4> + +<p>Ce gigot est incuit, disait à son hôte un homme +qui faisait le beau parleur.--Monsieur, répondit +l'hôte, c'est par l'insoin de la cuisinière.</p> + +<h4>INRI</h4> + +<p>Le marquis de Gèvres était vain et ignorant; du +moins, on le dit. On ajoute qu'il se compromettait +souvent par là. Causant un jour dans les cabinets du +roi, et admirant plusieurs tableaux, entre autres des +crucifiements de différents maîtres, il décida que le +même en avait fait un grand nombre, entre autres +tous ceux qui se trouvaient là. On se moqua de lui, et +on lui nomma les peintres, dont on reconnaissait la +manière.--Point du tout, s'écria-t-il, ce peintre +s'appelait INRI.</p> + +<p>Ne voyez vous pas son nom sur tous ces tableaux?...</p> + +<p>Est-ce possible?</p> + +<h4>INVENTER</h4> + +<p>Quelqu'un disait devant madame Du Deffant, qui +s'était brouillée avec Voltaire, que ce dernier n'avait +pas beaucoup inventé:--Que voulez-vous de plus? +dit-elle finement, il a inventé l'histoire!</p> +<br> +<h2>J</h2> + +<h4>JABOT</h4> + +<p>Un élève en médecine se présente à l'examen de la +Faculté, avec une chemise à jabot qui faisait honneur +à sa blanchisseuse. Cela sortait de son gilet avec un +éclat à faire loucher le professeur qui l'interrogeait.</p> + +<p>Dans le fait, le vieux docteur en était tout offusqué, +et il prononça sur-le-champ, qu'un si beau jabot +ne devait pas appartenir à un récipiendaire bien +savant.</p> + +<p>Monsieur, dit-il, pourriez-vous me dire ce que vous +entendez par jabot?</p> + +<p>Le candidat troublé ouvre de grands yeux, les +abaisse sur sa poitrine, regarde le professeur et +rougit.</p> + +<p>--Allons, vous ne savez pas ce que c'est qu'un +jabot; c'est le troisième estomac d'un dindon.</p> + +<h4>J'AI FROID</h4> + +<p>Quel est l'homme dont on prononce le plus souvent +le nom en hiver?--L'acteur <i>Geffroy</i>.</p> + +<h4>JAMBON</h4> + +<p>On disait à un touriste qu'il fallait se défier des +Allemands, surtout dans les provinces rhénanes.--Cela +m'étonne, dit-il, car à mon dernier voyage à +Mayence, j'y ai vu beaucoup de <i>gens bons</i>.</p> + +<h4>JÉRICHO</h4> + +<p>Un marchand de tableaux présentait à un certain +prince qu'on ne nomme pas, un petit tableau précieux, +en lui disant qu'il venait de Géricault.--C'est +prodigieux, dit le prince, que le tableau se soit si bien +conservé depuis l'écroulement de cette ville!</p> + +<h4>JEUNESSE</h4> + +<p>Dasnières disait que la jeunesse s'appelle ainsi +parce qu'elle est l'âge où les jeux naissent.</p> + +<h4>JEUX DE MOTS</h4> + +<p>À la fin de la campagne de 1761, où MM. les comtes +de Fougère et de La Luzerne commandaient la maison +du roi, un garde du corps, que des affaires instantes +appelaient dans sa province, vint leur présenter +sa démission, et les prier de lui accorder son +congé.</p> + +<p>Quoi! Monsieur, lui dirent d'un ton ironique ces +deux généraux, vous quittez le service pour aller +planter vos choux!</p> + +<p>--Oui, Messieurs, répondit froidement l'honnête +militaire; je vais bêcher mon jardin, et je le cultiverai +de manière qu'il n'y vienne ni luzerne ni fougère.</p> + +<p>Un poëte médiocre croyait mettre ses vers à l'abri +de la censure en disant qu'ils étaient passables:</p> + +<p>--Oui, lui dit-on, il sont passables en tous sens: +vous vous seriez bien passé de les faire, nous nous +serions bien passé de les lire, et la mémoire en passera +bien vite.</p> + +<p>Quelqu'un ayant dit à une femme que le suif était +augmenté à cause de la guerre:--Ah! dit-elle, +apparemment que les armées se sont battues à la +chandelle.</p> + +<p>Le marquis de St*** ayant offensé un M. De Chambre, +fut engagé par ses amis à lui faire quelques excuses. +Le marquis lui écrivit à peu près en ces termes.</p> + +<p>«Ce que je me suis permis de dire à votre sujet est +absolument sans conséquence. La meilleure preuve +que je puisse vous donner de mon estime, c'est de +vous demander à dîner pour le jour qu'il vous plaira +de m'assigner. Tout à vous.</p> + +<p>«<span class="sc">Le marquis de St***.</span>»</p> + +<p>M. De Chambre répondit:</p> + +<p>«Vous m'avez laissé le choix du jour. Empressé +de vous recevoir, je vous invite pour mercredi, et +vous prie de vouloir bien accepter la fortune du +pot.</p> + +<p>«<span class="sc">De Chambre.</span>»</p> + +<p>M. de Puymaurin, député de Toulouse pendant la +restauration, se plaisait à faire des jeux de mots. Un +jour, M. Petou, député de la Còte-d'Or, monta trois +fois à la tribune dans la même séance.--Ah ça! dit +M. de Puymaurin, il faut donc toujours que M. Petou +parle?</p> + +<p>--Je voudrais que mon fils sût un peu de tout, qu'il +eût une teinture des langues latine et grecque, une +teinture d'histoire et de géographie, une teinture des +mathématiques, une teinture de dessin, etc.; mais je +ne sais pas pour cela quel maître lui donner.</p> + +<p>--Donnez-lui, madame, un maître teinturier.</p> + +<p>La présente liste a été trouvée, en 1848, à l'Assemblée +nationale sous le pupitre d'un montagnard facétieux, +non moins connu par ses calembredaines que +par ses quinze perruques. Les noms qui y sont inscrits +étaient-ils destinés à <i>l'épuration</i>? Forment-ils au contraire +une liste de conciliation? Nos lecteurs jugeront +sur la copie textuelle que nous mettons sous leurs +yeux:</p> + +<p>Armand Marrast, Mauvais, Marquis.</p> + +<p>Sénard, Mulé, Normand.</p> + +<p>Bastide, Canul, Rouillé.</p> + +<p>Porypapy, Noirot, Crépu.</p> + +<p>Buvignier, Casse-Carreau.</p> + +<p>Ledru-Rollin, Levet, Laissac, Dargent, Crémieux, +Laydet, Découvrant, Cécile, Lacroix, Lorette.</p> + +<p>Leyraud de Puyraveau, Daix, Gouttay, Lamartine.</p> + +<p>Leblanc, Mouton, Beslay, Considérant, Lherbette, +Faucher.</p> + +<p>Joly père, Savy, A. Payer, Lebleu, Dargenteuil.</p> + +<p>Sallandrouze, Tendret, Lestapis.</p> + +<p>Pierre Leroux, Person, Toupet.</p> + +<p>Boulanger, Pézerat, Dupin.</p> + +<p>Labbé, de Lamenais, Vieillard, Boussingault.</p> + +<p>On lisait alors dans le <i>Corsaire</i> cet autre amas de +jeux de mots sur la même Assemblée:</p> + +<p>«On a vu tous nos législateurs éclater de rire à l'aspect +du bon M. <i>Leboeuf</i>, montant à la tribune à propos +d'une question de boucherie: rien de mieux! Le coq-à-l'âne +y était; mais dès lors il devient fort difficile d'aborder +les rostres pour peu qu'on ait un nom... Voyez +plutôt:--D'ici à peu de temps, on doit présenter un +projet de loi sur la boulangerie. Voilà donc la discussion +interdite à la famille <i>Dupin</i> et à M. <i>Dufour</i>! +Vienne le rapport de la commission des pâturages, et +M. <i>Lherbette</i> est obligé de rester chez lui. S'agit-il du +droit des vins, le pauvre M. <i>Baune</i> est réduit au silence, +et M. <i>Lacave</i> est bien forcé de l'imiter. La discussion +sur les ordonnances de chasse, entamée par +M. <i>Chasseloup</i>, va faire fuir M. <i>Dain</i>, qui sera fort +heureux de se cacher entre <i>Duparc</i> et <i>Dubois</i>. Si l'on +s'avise de réglementer les perruquiers français, que +diront MM. <i>Crépu</i> et <i>Toupet-des-Vignes</i>; MM. <i>Rateau</i> +et <i>Bineau</i> auront-ils le droit de voter dans une question +de jardinage, et M. <i>Buffet</i> dans une affaire de +comestibles? Voyez-vous M. <i>Pigeon</i> prenant la parole +contre <i>Lagrange</i>, dans une explication sur les grains, +défendus par M. <i>Moulin</i>?... Quand il s'agira de la +fixation de l'âge pour les listes électorales, est-ce +M. <i>Vieillard</i> qui osera se déclarer incompétent? A +propos du droit d'aînesse, que ferait l'amiral <i>Lainé</i>? +Et si jamais (cela peut arriver) <i>Hyacinthe</i> comparaissait +à la barre de la Législative, pour crime politique, +qui le jugerait, de M. <i>Ney</i> ou de M. <i>Camus</i>?... Il n'y +aurait guère que M. <i>Troplong</i> qui pourrait hasarder +son bulletin. MM. <i>Le Flô</i> et <i>de Flotte</i> seraient bien vagues +à propos de marine; M. <i>Failly</i>, fort suspect dans +les questions commerciales; M. <i>Lélut</i> au moins superflu +dans un projet électoral, et M. <i>Bigot</i> très-récusable +dans l'examen du budget des cultes, appuyés par +M. <i>Legros-Dévot</i>... Est-ce que M. <i>Lemaire</i> oserait dire +son mot sur les franchises municipales? S'il s'agissait +des monuments nationaux, M. <i>Conté</i> se croirait-il appelé +à faire de l'histoire? En matière religieuse, <i>Pascal +(Frédéric)</i> combattrait-il M. <i>Arnaud (de l'Ariège)</i>, +sans craindre les allusions à <i>Port-Royal</i>?</p> + +<p>Un autre journal du même temps (<i>la Providence</i>) +publia aussi une charmante et spirituelle critique, qui +a droit à figurer ici.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">On vous a raconté l'idée assez comique</p> +<p class="i16">De ce monsieur <i>Leroy</i> qui, plein d'ardeur civique,</p> +<p class="i16">Prétendait l'autre jour, répudiant son nom,</p> +<p class="i16">Qu'on l'appelât: <i>le Peuple</i>... et cela tout de boni</p> +<p class="i16">C'était peut-être un comte... (ah! pardon, une histoire:</p> +<p class="i16">Le mot <i>comte</i>, je crois, est banni du grimoire.)</p> +<p class="i16">J'y pense, il est de fait que cela désormais,</p> +<p class="i16">Va changer diablement le langage français;</p> +<p class="i16">Voyez combien de mots le décret nous enlève:</p> +<p class="i16">Il supprime d'un coup l'ancien <i>roi</i> de la fève,</p> +<p class="i16">Les <i>rênes</i> de voiture et la <i>reine</i> du bal;</p> +<p class="i16">Quant à la <i>reine Claude</i>, un arrêté légal</p> +<p class="i16">N'admet, dans ses rigueurs, d'exceptions aucunes,</p> +<p class="i16">Et la loi promulgée est faite pour les prunes.</p> +<p class="i16">Le <i>Grand-Duc</i>, ce rival du rapide faucon,</p> +<p class="i16">N'a qu'à bien se garder et qu'à changer de nom,</p> +<p class="i16">Et le <i>tigre royal</i>, s'il tient à sa peau lisse,</p> +<p class="i16">Doit cacher l'épithète à l'oeil de la police...</p> +<p class="i16">Et l'oiseau de passage, appelé <i>Chevalier</i>,</p> +<p class="i16">Quoi qu'en ait dit Buffon, n'est plus qu'un roturier;</p> +<p class="i16">Quant à Jules Janin que notre République</p> +<p class="i16">Proclama, dès longtemps, <i>prince</i> de la critique,</p> +<p class="i16">Son esprit, son talent ne lui servent de rien:</p> +<p class="i16">C'est presqu'un <i>Vacquerie</i>... un simple citoyen...</p> +<p class="i16">Plus de distinctions, d'ordres, de privilèges!</p> +<p class="i16">Les <i>croix</i>... même d'honneur, sont choses sacriléges:</p> +<p class="i16">On les supprimera sur les dos des ânons:</p> +<p class="i16">Les souliers désormais n'auront plus de <i>cordons</i>,</p> +<p class="i16">Et l'on ne pourra plus mettre aux foyers de <i>plaques</i>.</p> +<p class="i16">On défend les <i>rubans</i> aux bonnets comme aux claques;</p> +<p class="i16">Les théâtres sont pris dans ces proscriptions,</p> +<p class="i16">On joûra tout Chénier... sans <i>décorations</i>;</p> +<p class="i16">Et quand madame Hamel rôtira des mauviettes,</p> +<p class="i16">Défense à ses garçons d'en servir en <i>brochettes</i>:</p> +<p class="i16">Inutile de dire aux lecteurs pénétrants</p> +<p class="i16">Que les bottes, parbleu! n'auront pas de <i>tirans</i>;</p> +<p class="i16">Que les livres, ces rois assemblés en chapitres,</p> +<p class="i16">Paraîtront en public sans <i>pages</i> et sans <i>titres</i>;</p> +<p class="i16">La lettre majuscule est proscrite à jamais:</p> +<p class="i16">L'égalité pour tous! Aux termes des décrets</p> +<p class="i16">Défense d'imprimer sur du papier <i>couronne</i>;</p> +<p class="i16">Ordre de démolir la barrière du <i>Trône</i>:</p> +<p class="i16">Le <i>sceptre</i> de Neptune est brisé pour toujours;</p> +<p class="i16">Les fleuves couleront... comme ils pourront... sans <i>cours</i>.</p> +<p class="i16">. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .</p> +<p class="i16">On prétend que <i>Marquis</i>, l'homme des chocolats,</p> +<p class="i16">Le <i>Marquis</i> praliné près des Panoramas.</p> +<p class="i16">Fait peindre, en ce moment, un panneau magnifique</p> +<p class="i16">Où l'on verra décrit en pastille gothique</p> +<p class="i16">Ce seul mot: <i>Ci-devant</i>... Et que monsieur Boissy</p> +<p class="i16">A, dit-on, résolu de l'adopter aussi.</p> +<p class="i16"><i>Leduc</i>, marchand de bois au boulevard du Temple,</p> +<p class="i16">Se range noblement à ce sublime exemple:</p> +<p class="i16"><i>Leprince</i>, cordonnier près de la rue aux Ours,</p> +<p class="i16">S'est citoyennisé déjà, depuis trois jours:</p> +<p class="i16"><i>Baron</i>, le bandagiste, adhère pour son compte;</p> +<p class="i16">Le passage Choiseul expulse monsieur <i>Comte</i>;</p> +<p class="i16">Honteuse avec raison, la maison <i>Chambellan</i></p> +<p class="i16">Biffe de son enseigne un nom de courtisan.</p> +<p class="i16">Au quartier Montorgueil, par le même principe,</p> +<p class="i16">On va voir effacer l'enseigne de <i>Philippe</i>;</p> +<p class="i16">Le nom vilipendé qu'il tient de son parrain</p> +<p class="i16">Disparaît..., et Philippe a nom <i>Ledru-Rollin</i>.</p> +<p class="i16">Quant à l'homme d'État, ce Solon... provisoire,</p> +<p class="i16">Attendu que <i>Rollin</i> fut professeur d'histoire,</p> +<p class="i16">Et que, dans ses écrits, il flatta maintes fois</p> +<p class="i16">Les despotes de Rome et le pouvoir des rois,</p> +<p class="i16">Il abdique le nom d'un écrivain servile</p> +<p class="i16">Et l'immole à l'autel de son hôtel-de-ville;</p> +<p class="i16">Il reste désormais Ledru... Ledru tout court!...</p> +<p class="i16">Mais pourtant attendu qu'autrefois, à la cour,</p> +<p class="i16">Un sieur <i>Ledru-Comus</i> professa la physique,</p> +<p class="i16">Et fut de Louis-Quinze un rampant domestique</p> +<p class="i16">Défense aux citoyens de parler des Ledrus,</p> +<p class="i16">Le ministre est ministre et ne s'appelle plus!</p> +<p class="i16">L'illustre <i>Louis Blanc</i>, l'écrivain populaire,</p> +<p class="i16">Ce Tacite français, cet orateur sincère,</p> +<p class="i16">Veut de son double nom s'affranchir à la fois.</p> +<p class="i16">Les <i>Louis</i> trop longtemps nous ont servi de rois,</p> +<p class="i16">Le <i>blanc</i> fut la couleur d'un drapeau qu'il abhorre.</p> +<p class="i16">Il va prendre le nom de <i>Vingt-Francs-Tricolore</i>.</p> +</div></div> + +<p>Un ancien philosophe avait coutume de dire que +peu de chose donnait la perfection, mais que la perfection +n'était pas peu de chose.</p> + +<p>Un Gascon disait:--La boue de Paris a deux grands +inconvénients: le premier est de faire des taches +noires sur les bas blancs; le second, de faire des taches +blanches sur les bas noirs.</p> + +<p>Un ami de Bautru étant allé le voir dans le temps +qu'il avait la goutte, le trouva mangeant du jambon:--Que +faites-vous là? lui dit-il; ne savez-vous pas que +le jambon est contraire à la goutte?--Cela est vrai, +lui répondit froidement Bautru; il est contraire à la +goutte, mais il est bon pour le goutteux.</p> + +<p>Un procureur, en recevant d'un chapelier, sa partie, +un chapeau, lui dit:--Ne vous inquiétez point, allez; +j'ai votre affaire en tête, j'en aurai soin.</p> + +<p>Nous ne voulons pas oublier une petite pièce de +vers de maître André le perruquier:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Les poëtes, les perruquiers</p> +<p class="i20">Ont entre eux quelque ressemblance;</p> +<p class="i20">Et vraiment, dans ces deux métiers</p> +<p class="i20">Je vois bien peu de différence</p> +<p class="i20">Pour réussir, à chacun d'eux,</p> +<p class="i20">Certe il ne faut pas être bête...</p> +<p class="i20">Compter des vers ou des cheveux,</p> +<p class="i20">C'est toujours un travail de tête.</p> +</div></div> + +<p>Nous ne pouvons omettre la harangue faite, à la +porte d'une ville, à l'un des généraux de Louis XIV, +quoiqu'elle ait été souvent reproduite.</p> + +<p>«Monseigneur, tandis que Louis le Grand gêne les +Gênois, berne les Bernois et fait cantonner le reste des +cantons: tandis qu'il fait aller l'Empire de mal en pire, +damner le Danemarck et suer la Suède; tandis que +son digne rejeton fait baver les Bavarois et rend les +troupes de Zelle sans zèle; tandis que Luxembourg +fait fleurir la France à Fleurus, met en flamme les Flamands, +lie les Liégeois et fait danser Castana sans +castagnette; tandis que le Turc fait esclaves les Esclavons +et réduit en servitude la Servie; enfin, tandis +que Catinat démonte les Piémontais, que Saint-Ruch +se rue sur les Savoyards et que Larré les arrête, vous, +Monseigneur, non content de faire sentir la pesanteur +de vos doigts aux Vaudois, vous faites encore la barbe +aux Barbets, ce qui nous oblige d'être, avec un profond +respect, etc.»</p> + +<p>Remarquons que le mot <i>Barbets</i> ne s'applique pas +aux intéressants quadrupèdes connus sous ce nom, +mais bien aux habitants de diverses vallées du Piémont +et de la Suisse.</p> + +<h4>JOCRISSE</h4> + +<p>Personnage des farces modernes, dont les bêtises +ont un cachet particulier. Il aime beaucoup sa soeur et +veut l'épouser.--Mais je ne peux pas t'épouser, lui +dit-elle: je suis ta soeur. Nous sommes trop proches +parents.--Quelle bêtise, dit Jocrisse, trop proches +parents! Mon père a bien épousé ma mère.</p> + +<p>Sa soeur en épouse donc un autre quelque temps +après.--Ma soeur est enceinte, dit-il, quel ennui! J'en +ai pour neuf mois avant de savoir si je serai un oncle +ou une tante. Il veut dire: Si j'aurai un neveu ou une +nièce. C'est digne du commentaire sur la parenté.</p> + +<h4>JOUER</h4> + +<p>Un seigneur allemand, connu par les grâces et la finesse +de son esprit, alla un jour chez un prince de +l'Empire: il y trouva nombreuse compagnie, et s'amusa +beaucoup de l'extrême vivacité avec laquelle +quelques petits princes, qui y étaient, se traitaient +mutuellement d'<i>altesse</i>.</p> + +<p>Sortant de là, il fut faire une autre visite, et revint +chez lui. On lui demanda comment il avait passé la +soirée.--J'ai été dans deux maisons, répondit-il: +dans l'une, on jouait à l'<i>altesse</i>, et dans l'autre, au +<i>loto</i>.</p> + +<h4>JOUEUR</h4> + +<p>--Quatre joueurs ont joué toute une nuit dans une +société, disait-on à une dame, et le matin chaque +joueur avait gagné dix francs. La dame ne pouvait +comprendre un tel fait pourtant bien simple; les +quatre joueurs étaient quatre joueurs de violon.</p> + +<h4>JUSTE</h4> + +<p>Un Allemand, dit-on, apprenant le français, vit dans +un dictionnaire que juste et équitable étaient synonymes. +Il essaya des bottes qui le gênaient:--Vous +m'avez fait, dit-il à son cordonnier, des bottes qui +sont par trop équitables.</p> +<br> +<h2>K</h2> + +<p>Les lettres K C et les lettres K O T sont désagréables +au lecteur.</p> + +<h4>K</h4> + +<p>Un homme qui s'appelait Franqlin songea qu'il pourrait +bien être le parent de ce fameux Américain, que +les philosophes ont si bien fait mousser. Il alla donc +trouver à Paris le neveu de Franklin et lui présenta +ses papiers.--Monsieur, lui répondit le jeune homme, +faites un K de votre Q, et vos papiers pourront alors +vous servir.</p> + +<h4>KARR</h4> + +<p>On s'est amusé à chercher les aptitudes et les qualificatifs +de M. Alphonse Karr, qui a un esprit si original, +et on a fait ces médiocres calembours:</p> + +<p>Karr abat (<i>Carabas</i>), Karr casse (<i>carcasse</i>), Karr +touche (<i>Cartouche</i>), Karr aime (<i>carême</i>), Karr nage +(<i>carnage</i>), etc.</p> + +<h4>KANIFERSTANE</h4> + +<p>Un Parisien, allant de La Haye à Amsterdam, remarqua +une de ces riantes maisons de campagne qui +bordent la route (on allait encore alors en diligences), +et demanda en français à un Hollandais, son +voisin:</p> + +<p>--A qui appartient ce délicieux château? Le Hollandais +lui répondit: <i>Ik kan niet verstaan</i> (je ne comprends +pas). Le Parisien traduisant cette phrase comme +il l'entendait prononcer, reprit:--Ah! cette belle demeure +appartient à M. Kaniferstane. C'est un mortel +bien heureux.</p> + +<p>En entrant à Amsterdam, il vit passer trois charmantes +jeunes filles et demanda à un passant: Quelles +sont ces demoiselles si brillantes? il ne reçut pour +réponse que la phrase de la route.--Ce sont les demoiselles +Kaniferstane, se dit-il. Cet homme est bien +privilégié!</p> + +<p>Un des palais d'Amsterdam donna lieu à de nouvelles +admirations.--Cet homme, dit le Parisien, est +vraiment le marquis de Carabas.</p> + +<p>En passant devant la loterie, il entendit sonner des +fanfares, qui annonçaient que le gros lot venait de +sortir. Il voulut savoir qui l'avait gagné; et comme +on lui jeta encore l'<i>ik kan niet verstaan</i>, il se récria +de nouveau sur le bonheur-monstre de ce M. Kaniferstane.</p> + +<p>Un peu plus loin il rencontra un enterrement pompeux; +il salua le convoi et demanda qui était le défunt. +Sur la réponse habituelle des Hollandais qui n'entendent +pas le français, il pensa que M. Kaniferstane +avait ici-bas une félicité trop grande pour qu'elle fût +durable; et il gagna son hôtel, en faisant de sages +réflexions sur la fragilité des choses d'ici-bas.</p> +<br> +<h2>L</h2> + +<p>Quelles sont les lettres les plus agiles?--Les lettres +L E.</p> + +<p>On a fait cette petite espièglerie pour la lettre L:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Saint Louis l'a par devant,</p> +<p class="i20">Saint Michel l'a par derrière,</p> +<p class="i20">Les demoiselles l'ont deux fois,</p> +<p class="i20">Les dames l'ont perdue,</p> +<p class="i20">Les hommes ne l'ont pas.</p> +</div></div> + +<p>On dit proverbialement qu'un homme en a dans +l'aile pour signifier qu'il passe la cinquantaine, par +une mauvaise allusion à la lettre L qui, dans le chiffre +romain, exprime cinquante.</p> + +<h4>LA</h4> + +<p>Une dame, gui chantait médiocrement dans une +société, ne pouvant achever son air, dit à un homme +d'esprit qui se trouvait à côté d'elle:--Je vais le reprendre +en <i>mi</i>.--Non, Madame, répondit-il, restez-en +<i>la</i>.</p> + +<h4>LACHE</h4> + +<p>Un Gascon se fit faire un bel habit, et il demanda +à ses amis ce qu'il leur en semblait. Un d'eux en +mania le drap, qu'il trouva un peu lâche.</p> + +<p>--Comment lâche! reprit le Gascon, que l'on m'en +cherche d'autre; je ne veux rien de lâche autour +de moi.</p> + +<p>Le cardinal de Richelieu ayant eu la patience d'entendre +lire une tragédie de La Calprenède, dit: «La +pièce n'est pas mauvaise, mais les vers sont lâches.--Comment, +lâches, s'écria le rimeur gascon! cadédis! +il n'y a rien de lâche dans la maison de Calprenède.»</p> + +<h4>LA-HAUT</h4> + +<p>Dans les embarras de la république qui surgit en +1848, la femme de l'un des utopistes d'alors reçut la +visite d'une amie.--Bonjour, chère citoyenne, je vois +que tu es prospère, et ton mari?--Il travaille, ma +chère, dit la dame du logis en indiquant du doigt +l'étage supérieur, où son mari s'enfermait pour ses +élucubrations.--Mais, reprit la visiteuse, ne vois-tu +pas comme tout va mal?--Je le vois trop. Tout le +monde veut gouverner.--Nous sommes en vérité dans +un gâchis tel, qu'il n'y a que celui qui est là-haut qui +puisse nous en tirer.--Tu as bien raison, ma chère; +aussi je te dis qu'il y travaille.--Elle appliquait à +son mari ce que l'autre disait du bon Dieu.</p> + +<h4>LAIDS</h4> + +<p>Après qu'on eut nommé le département des Deux-Sèvres +(pays de Niort), on voulut nommer le pays de +Fontenay département des Deux-Lays (de ses principales +rivières, le grand Lay et le petit Lay).</p> + +<p>MM. Buron et Mercier, deux députés de ce département, +tous deux les plus laids de l'assemblée, firent +observer que si on adoptait ce nom pour leur département, +on en ferait contre eux un affreux calembour +et qu'on l'appellerait le département des deux laids. +Ce qui fit qu'on l'appela département de la Vendée, +du nom d'une petite rivière qui est à sec la moitié de +l'année.</p> + +<h4>LAINE</h4> + +<p>Quelqu'un disait à un berger:--Ne faites jamais +tondre vos moutons.--Et pourquoi donc?--Parce +qu'on devient poussif, lorsqu'on a perdu l'haleine.</p> + +<p>On disait d'un homme qui avait la bouche malsaine:--Il +est bon à tondre, car il a l'haleine forte.</p> + +<p>Quel événement a fait renchérir les draps?--L'enlèvement +d'Hélène.</p> + +<h4>LAMICHODIÈRE</h4> + +<p>Un étranger dînant chez M. de La Michodière, président +de la cour royale de Paris, et l'entendant appeler +par ses familiers Lamichodière tout court, ne crut pas +pouvoir se permettre cette liberté et ne l'appela pendant +tout le repas que M. Chaudière. Ce qui divertit +un peu les amis conviés.</p> + +<h4>LANGUES</h4> + +<p>Madame Denis, la nièce de Voltaire, prenant une +leçon d'anglais, disait à son maître, fatiguée qu'elle +était de la prononciation de cette rude langue: «Vous +écrivez <i>bread</i>, pourquoi prononcer <i>bred</i>? Ne serait-il +pas plus simple de dire tout bonnement <i>du pain</i>?»</p> + +<h4>LAPIN</h4> + +<p>Un farceur disait que la dynastie des lapins allait +vite, que peu après <i>la pincette</i>, on en était déjà à +<i>l'appendix</i>.</p> + +<h4>LARCIN</h4> + +<p>Les naturalistes nous apprennent que les rats sont +joyeux quand ils peuvent vivre de lard sain.</p> + +<h4>LAVER</h4> + +<p>Un farceur demandant quelque chose à une femme +lui disait:--Je crois, Madame, que vous l'avez.--Non, +Monsieur, répondit-elle, je ne lave pas.</p> + +<h4>LÉPREUX</h4> + +<p>Le public vit un calembour involontaire dans ce +vers du <i>Siége de Paris</i>, de M. le vicomte d'Arlincourt.</p> + +<p class="mid">Ce sont ces chevaliers que l'on nomme <i>les preux</i>.</p> + +<h4>LETTRES</h4> + +<p>On fait beaucoup de jeux de mots avec les lettres +de l'alphabet. On a publié celui-ci sous Louis XVIII:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">La liberté D. C. D.</p> +<p class="i20">Les doctrinaires A. I.</p> +<p class="i20">Les pairs E. B. T.</p> +<p class="i20">Deux cents députés H. T.</p> +<p class="i20">La gloire A. B. C</p> +<p class="i20">La dette O. C.</p> +<p class="i20">La liberté de la presse O.T.</p> +<p class="i20">Le crédit B. C.</p> +<p class="i20">La charte L. U. D.</p> +</div></div> + +<h4>HISTOIRE D'HÉLÈNE.</h4> + +<pre> + <i>L. n. n. e. o. p. y. L. i.a. t.t. l.</i> +Hélène est née au pays grec. Elle y a tété; elle + +<i>i.a.v.q. l. i.a.e.t. l.v. l. i.a.e.t.o.q.p.</i> +y a vécu. Elle y a été élevée; elle y a été occupée; + +<i> l. i.a.e.t. e.d. l. i.a. m.e. l. i.a.</i> +elle y a été aidée; elle y a aimé; elle y a + +<i>e.t. m.e. e. a.i. l. i.a.e.t. d. s. e. d.i.t. l.</i> +été aimée et haïe; elle y a été déesse et déité; elle + +<i>i.a. c.d. l. i.a.o.b.i. l. i.a.e.t. h.t. l.</i> +y a cédé; elle y a obéi; elle y a été achetée; elle + +<i>i.a.e.t.a.j.t. a. b. c. k. o. t. l. i.a. v.g.t.</i> +y a été agitée, abaissée, cahotée; elle y a végété. + +<i> l. i.a. r.i.t. e. l. i. e. d.c.d. a.g. e. k. c.</i> +Elle y a hérité, et elle y est décédée, âgée et cassée. +</pre> + +<h4>LÉZARD</h4> + +<p>Une vieille, voyant au-dessus de la porte d'un lycée +de Paris:</p> + +<p class="mid">Les arts nourrissent l'homme et le consolent,</p> + +<p>s'écria:--Que ces gens-là mangent des lézards tant +qu'ils voudront; je ne ferai pas de tort à leur dîner.</p> + +<h4>LIBERTÉ</h4> + +<p>Dans le temps où les mots liberté, égalité, fraternité, +cocarde nationale, faisaient tourner la tête à tout le +monde, les habitants d'un village du Périgord obligèrent +leur curé, non-seulement à mettre une cocarde +au Saint-Sacrement, mais encore à tenir le tabernacle +ouvert jour et nuit, par la raison que tout le monde +étant, libre en France, leur bon Dieu ne devait pas, +plus que tout autre, demeurer enfermé.</p> + +<h4>LIÉGE</h4> + +<p>Quelles sont les femmes les plus légères?--Ce sont +les femmes de Liége et les femmes de Tulle.</p> + +<h4>LIGNE</h4> + +<p>Comment feriez-vous pour pêcher tous les poissons +de la Seine?</p> + +<p>--Je prendrais un régiment de lignes.</p> + +<h4>LISIÈRE</h4> + +<p>Pourquoi ne mène-t-on pas les petits enfants dans +les bois?--Parce qu'on ne les mène alors qu'à la +lisière.</p> + +<h4>LOCUTIONS</h4> + +<p>Lorsque le projet de loi de la translation des cendres +de Napoléon fut porté aux Chambres, un de nos honorables +s'écria:--Les cendres! Est-ce que ces gueux +d'Anglais auraient eu l'infamie de brûler le grand +homme?</p> + +<p>Des soldats de l'expédition d'Égypte disaient dans +les sables:--Il fait bien soif par ici.</p> + +<p>Le poëte Méry est très-frileux. Dans les grands froids, +enveloppé de couvertures, il s'enferme auprès d'un +grand feu, ne sort plus, et fait dire à ses amis qu'il +est malade. Quand on vient le voir et qu'on lui demande +quel est son mal, il répond:--Hélas! j'ai +l'hiver! (Voyez <i>Mots</i>.)</p> + +<h4>LOIN</h4> + +<p>On disait à un enfant de Pontoise qui montrait +d'heureuses dispositions:--Mon enfant, vous irez +loin.--Pas de sitôt, répondit-il; maman ne veut pas +même que j'aille jusqu'à Paris.</p> + +<h4>LONDRES</h4> + +<p>La ville des brouillards. Pendant un séjour que fit +à Londres madame de Staël, une de ses amies qui revenait +en France lui demanda si elle avait quelque +commission à lui donner.--Aucune autre, répondit-elle, +que de faire mes compliments au soleil, quand +vous le reverrez.</p> + +<h4>LOUER</h4> + +<p>Lorsque le duc d'Orléans, Philippe-Égalité, convertit +son jardin en un vaste bazar, et le couvrit de boutiques, +il tomba sur lui un déluge de quolibets et d'épigrammes. +Son propre père s'en mêla, et il dit:--Je +ne sais pas d'où vient l'acharnement du public contre +mon fils; j'y vois de plus près que les autres, et je +puis assurer que tout est à <i>louer</i> chez lui.</p> + +<h4>LUMIÈRES</h4> + +<p>Dans un repas donné par un nouveau parvenu, l'un +des convives porta un toast à la propagation des lumières. +Les gens qui servaient à table s'empressèrent +de moucher les chandelles.</p> + +<h4>LUSTRE</h4> + +<p>Un plaisant, voyant deux hommes qui portaient un +lustre, dit à ses voisins:--Voilà cinq ans qui passent.</p> +<br> + +<h2>M</h2> + +<h4>MAÇONNERIE</h4> + +<p>Un charpentier critiquait un carillonneur sur sa +manière:--Allez à vos bûches, dit celui-ci, et ne vous +mêlez pas de ma sonnerie.</p> + +<h4>MADELEINE</h4> + +<p>--Que faudrait-il pour bouleverser l'<i>amas de laine</i>?</p> + +<p>--Un <i>cardeur</i>.</p> + +<h4>MAINTENON</h4> + +<p>Sur la fin du règne de Louis XIV, le grand dauphin +parut surpris de la détresse qui semblait menacer le +royaume:--Mon fils, dit le roi, nous maintiendrons +notre couronne.--Sire, répondit le dauphin, Maintenon +l'a.</p> + +<h4>MAIRE</h4> + +<p>Le maire de Saintes écrivait à son fils, qui se conduisait +mal:--Respectez votre père et maire.</p> + +<p>Un bon cultivateur, maire de sa commune, se trouva +dernièrement dans un grand embarras, dont il se tira +fort adroitement. Sa femme était accouchée depuis +trois jours, et l'adjoint de la commune venait de partir +pour un village assez éloigné. Il fallait cependant +dresser l'acte de naissance sur-le-champ. Le maire-père, +après avoir mûrement réfléchi, s'en acquitta de +la manière suivante:</p> + +<p>«Ce jourd'hui, etc., étant accompagné de tels et +tels, mes témoins, je suis comparu devant moi, maire +de la commune de..., à l'effet de me déclarer que ma +femme vient d'accoucher d'un enfant vivant et bien +constitué.</p> + +<p>«Sur la demande de quel sexe est l'enfant et quels +étaient ses père et mère, je me suis répondu qu'il est +du sexe masculin et fils de moi, François Piot, et de +Madeleine Bidou, mon épouse; en foi de quoi, j'ai signé +le présent, avec moi, maire, et lesdits témoins.</p> + +<p>«<i>Signé</i>: François Piot, père,<br> +«et François Piot, <i>maire</i>.»</p> + +<h4>MAL</h4> + +<p>Un dentiste disait à son fils qui voulait donner dans +les grandeurs:--Eh! Monsieur, ne cherchez pas à +vous élever; faites comme votre père: arrachez-moi +de bonnes dents; j'en arrache; mon père en arrachait, +mon grand-père en a arraché, et nous n'avons jamais +fait de mal à personne.</p> + +<h4>MALADE</h4> + +<p>Henri IV, ayant appris que deux médecins avaient +fait abjuration, dit à Duplessis-Mornay:--Ventre +Saint-Gris! monsieur Duplessis, votre religion est +bien malade; les médecins l'abandonnent.</p> + +<h4>MANCHE</h4> + +<p>On appelle ainsi le détroit qui sépare la France de +l'Angleterre. Lorsqu'on imprima, il y a quelques +années, des cartes géographiques sur foulard:--Je +ne vois pas l'utilité de cette invention, dit un bonhomme, +si ce n'est que chacun peut avec cela se moucher +proprement sur la Manche.</p> + +<p>À propos de l'alliance conclue avec l'Angleterre pour +la guerre d'Orient, on a dit que les Anglais et les Français +se tenaient par la Manche.</p> + +<h4>MANGER</h4> + +<p>Un huissier ayant été signifier un exploit dans une +ferme, on lâcha après lui deux énormes chiens, qui +lui firent prendre aisément la fuite; et comme à son +retour on lui demandait s'il avait été bien reçu:--Parfaitement, +dit-il; et la preuve, c'est qu'on a voulu me +faire manger.</p> + +<p>L'abbé de Choisy, passant devant le château de Balleroy, +qu'il avait été obligé de vendre, s'écria:--Ah! +que je te mangerais bien encore!</p> + +<p>Montmaur étant un jour à table avec grande compagnie +de ses amis, qui parlaient, chantaient et riaient +tout ensemble:--Eh! Messieurs, s'écria-t-il, un peu +de silence; on ne sait ce qu'on mange.</p> + +<h4>MANQUER</h4> + +<p>Gourville, rencontrant au bois de Boulogne un médecin +de ses amis qui avait un fusil, lui dit:--Où +allez-vous donc?--Voir un malade à Auteuil.--Il +paraît, répliqua Gourville, que vous avez peur de le +manquer.</p> + +<h4>MANTEAU</h4> + +<p>On demandait à Londres à un ambassadeur belge:--Quel +est le manteau le plus chaud? Il répondit:--C'est +le manteau de la cheminée.</p> + +<h4>MARCA</h4> + +<p>Pierre de Marca fut nommé à l'archevêché de Paris, +et mourut en 1662, le jour même que ses bulles arrivèrent. +Colletet lui fit cette épitaphe:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Ci-gît monseigneur de Marca,</p> +<p class="i20">Que le roi sagement marqua</p> +<p class="i20">Pour le prélat de son Église;</p> +<p class="i20">Mais la mort qui le remarqua,</p> +<p class="i20">Et qui se plaît à la surprise,</p> +<p class="i20">Tout aussitôt le démarqua.</p> +</div></div> + +<h4>MARCHAND</h4> + +<p>Un vagabond, à qui le tribunal demandait quel était +son état, répondit qu'il était marchant, attendu qu'il +ne voyageait qu'à pied.</p> + +<h4>MARÉCHAL</h4> + +<p>Un maréchal ferrait un des chevaux d'un maréchal +de France qui passait sur la route. Pendant l'opération, +il entendit les domestiques qui appelaient l'illustre +voyageur monsieur le maréchal; et, quand on fut +pour le payer, il refusa, en faisant observer qu'il ne +prenait rien d'un confrère.</p> + +<h4>MARÉCHAUSSÉE</h4> + +<p>Une poissarde de la rue Montorgueil, à Paris, avait +pour enseigne un merlan dans une botte, avec la légende: +<i>A la marée chaussée</i>.</p> + +<h4>MATIGNON</h4> + +<p>On a beaucoup dit sur la simplicité d'un certain +M. de Matignon. On a dit qu'il avait fait paver son pré +pour empêcher les taupes d'y fouiller; qu'il avait fait +reculer la cheminée, parce que de l'endroit où il se +plaçait, le feu lui brûlait les jambes; qu'un mouton +étant trop gros pour régaler ses amis, il n'en avait fait +tuer que la moitié, etc.</p> + +<p>Un autre ingénu avait pris un pot de terre en guise +d'oreiller, et, le trouvant trop dur, il le rembourra de +paille.</p> + +<h4>MÉDECINE</h4> + +<p>--Qu'est-ce que la médecine? demande Bobèche à +l'un de ses amis.</p> + +<p>--La médecine, répond celui-ci, c'est l'art de guérir +les maladies; c'est une science...</p> + +<p>--Du tout, tu n'y es pas, répond Bobèche: la <i>médecine, +c'est la femme du médecin</i>.</p> + +<h4>MÉGARDE</h4> + +<p>Un colonel, défendant son fils accusé, disait aux +juges:--Je puis vous prouver que le délit dont mon +fils est accusé a été commis par <i>mégarde</i>.--C'est +différent, dit le juge; alors nous allons assigner vos +gardes.</p> + +<h4>MELON</h4> + +<p>Un incident singulier a égayé un jour l'audience de +la justice de paix du sixième arrondissement. M. L..., +marchand grainetier et sergent-major de la garde +nationale, accusait M. B..., professeur suppléant +d'histoire dans un collége de Paris, de l'avoir appelé +<i>melon</i> à la suite d'un coup mal joué dans une partie +de dominos à quatre. Le plaignant exigeait une rétractation +formelle et des dommages-intérêts considérables.</p> + +<p>L'accusé présenta ainsi sa défense:</p> + +<p>Sous le règne de Constantin le Grand...</p> + +<p>--Au fait, Monsieur, au fait, dit le magistrat qui +voit poindre une harangue interminable.</p> + +<p>--J'y arrive. Sous le règne, dis-je, de Constantin le +Grand, vivait à Lugdunum Horatius Melo, illustre +praticien qui, après s'être couvert de gloire en introduisant +dans la Gaule le savoureux tubercule auquel il +a donné son nom...</p> + +<p>Le juge sourit et le front du plaignant se dérida à +vue d'oeil.</p> + +<p>--Mon honorable ami L..., continue l'orateur avec +feu, a donc grand tort de s'offenser d'une épithète qui +prouve au contraire le grand cas que je fais de ses +vertus civiles et militaires.</p> + +<p>Le grainetier, quittant précipitamment son siége, +serre avec effusion la main du professeur, et, abjurant +toute rancune, lui promet de donner à son premier +enfant les glorieux surnoms d'Horatius Melo.</p> + +<p>Il suffira de quelques procès de cette nature pour +réhabiliter dans l'opinion publique le cornichon, le +concombre, et tous les membres de la grande famille +des citrouilles.</p> + +<h4>MÉMOIRE</h4> + +<p>C'est encore ici une scène de tribunal; et celle-ci à +propos d'une distribution de prix.</p> + +<p>LE JUGE.--Monsieur Blondel, vous avez payé +d'avance et pour un an la pension de votre fils?</p> + +<p>BLONDEL.--C'est vrai, mais il n'en est pas moins +bête comme un âne.</p> + +<p>LE JUGE.--Et maintenant vous voulez qu'on vous +rende votre argent?</p> + +<p>LE MAÎTRE D'ÉCOLE.--C'est contraire à l'usage, on +ne rend jamais l'argent chez moi.</p> + +<p>BLONDEL.--Cependant je veux le mien, je ne veux +pas laisser mon fils en pension chez vous.</p> + +<p>LE JUGE.--Pourquoi donc?</p> + +<p>BLONDEL.--À cause de la distribution des prix.</p> + +<p>LE JUGE.--Expliquez-vous.</p> + +<p>BLONDEL.--Imaginez-vous, mon juge, que mon +enfant, qui aura onze ans à la Saint-Nicaise, allait en +classe chez cet homme contre lequel je plaide. Il y +apprenait à ravir... la manière d'arracher sa culotte +et de se fourrer des barbes de plumes dans les narines. +(Rire général.) Bref, je croyais qu'à part ces connaissances +spéciales, mon enfant aurait fait quelques progrès +dans les sciences... le maître d'école que je consultais +à ce sujet, la veille de la distribution des prix, +me répétait qu'il serait récompensé selon son mérite.</p> + +<p>LE MAITRE D'ÉCOLE.--Il a eu un prix, il l'a été, +récompensé; donc pas de reproche à me faire.</p> + +<p>BLONDEL.--Joliment ma foi. Vous saurez que, +n'ayant pas eu le temps d'aller voir couronner mon +fils, je l'envoyai le jour de la distribution des prix se +faire couronner tout seul. Mon petit bonhomme revient +avec une couronne atroce (rire), grosse comme le bras, +de quoi orner le front d'un géant; quand il la mettait +sur sa tête, elle lui tombait sur le ventre. (Rire +général.) «Quel prix as-tu eu? lui dis-je.--Ah! papa, +j'ai oublié mon prix.--Mais enfin quel prix était-ce?--J'sais +pas, papa.--Diable d'enfant! ne pas savoir +le prix qu'on a remporté... Est-ce d'orthographe?--Non, +p'pa.--C'est peut-être d'écriture?--Non, p'pa.--De +calcul?-Non p'pa.--Quelle pauvre tête!... ne +pas se souvenir de son prix!... Je vais à la pension +moi-même pour le chercher... Savez-vous quel prix +mon fils avait remporté?</p> + +<p>LE JUGE.--Lequel donc?</p> + +<p>BLONDEL.--Le prix de mémoire. (Longue et bruyante +hilarité.)</p> + +<p>Le maître d'école, pendant le rire général, rend à +M. Blondel le montant de la pension de son fils, et +sort furieux du prétoire.</p> + +<h4>MENER</h4> + +<p>François II, empereur d'Allemagne se rendait à +Luxembourg, forteresse curieuse élevée au milieu d'un +lac. Sans suite et sans gardes, il s'amusait à conduire +lui-même une barque. Il y en a beaucoup sur ses +rives. Un villageois s'approche et l'appelle; il le prend +pour un batelier. «Ohé! passez-moi! lui crie-t-il.--Volontiers,» +répond le monarque.</p> + +<p>Le paysan s'assied tranquillement dans la nacelle; +et le souverain la dirige. «Combien vous faut-il maintenant? +dit le rustre arrivé au but, et tirant sa bourse.--Rien, +mon ami, répond l'empereur...--Vous ne +menez donc pas par état?--Si fait, je mène... mon +empire.»</p> + +<h4>MENTON</h4> + +<p>Un Anglais et un Français se battaient au pistolet. +Le premier, au moment de tirer, n'étant pas encore +bien décidé à se battre, dit: «Parlementons.--Soit,» +dit l'autre. Et la balle vint traverser la mâchoire +inférieure de son adversaire.</p> + +<h4>MERLAN</h4> + +<p>Un chercheur d'esprit disait, en passant devant une +mairie où les affaires n'allaient pas vite: «On peut +faire maigre là tous les jours, car on y trouve à tout +heure un maire lent.»</p> + +<h4>MERVEILLE</h4> + +<p>En 1812, il y avait dans la rue Saint-Honoré un +confiseur qui s'appelait Veille. Dès qu'il eut un fils, +il fit savoir au public qu'on pouvait venir chez lui +admirer la mère Veille.</p> + +<h4>MESSIDOR</h4> + +<p>Quel est le mois que les juifs aiment le mieux?--Le +mois de juillet, qui dans la république leur amenait +un <i>Messie d'or</i>.</p> + +<h4>MESURE</h4> + +<p>On dit des musiciens que quand il s'agit de payer, +ils sont rarement en mesure.</p> + +<h4>MILLE ANS</h4> + +<p>Napoléon Ier aimait assez les calembours.</p> + +<p>En 1796, lorsqu'il sollicitait le commandement en +chef de l'armée d'Italie, il n'avait que vingt-sept ans; +et, lui opposant son âge, on balançait à le nommer. +«Vous me trouvez trop jeune, dit-il, pour commander +en chef; eh bien, accordez-moi ma demande, et je +vous réponds que dans six mois j'aurai Milan.»</p> + +<h4>MINE</h4> + +<p>Guillot-Gorjus disait à Turlupin:--Tu m'as fait la +mine.--Non, répondit Turlupin, si je te l'avais faite, +tu l'aurais plus belle.</p> + +<h4>MOITIÉ</h4> + +<p>Deux villageois avaient acheté un cochon en commun; +au bout de six mois, l'un voulait le tuer, +l'autre ne voulait pas. «Si vous ne voulez pas tuer +votre moitié, dit le premier, laissez moi tuer la +mienne.»</p> + +<h4>MONARCHIEN</h4> + +<p>Les dictionnaires nous apprennent que monarchien +signifie, comme monarchiste, partisan de la monarchie. +En 1793, un boucher, nommé Monar, était dur +aux pauvres gens, auxquels, dans la détresse générale, +il refusait tout crédit. Un pauvre homme, fâché, +écrivit sur sa porte <i>monar chien</i>. C'était une dénonciation. +Il fut arrêté comme suspect, et sans son ami +Henri, le boucher historique, il eût pu y passer.</p> + +<h4>MONDE</h4> + +<p>Un bonhomme disait: «Je ne connais pas d'endroit +où il se passe plus de choses que dans le monde.»</p> + +<h4>MONORIMES</h4> + +<p>Un des plus curieux tours de force en monorimes, +employant les cinq voyelles dans leur plus rare situation, +a été fait par l'abbé de Latteignant; on le chantait +jadis sur l'air: «<i>En quatre mots je vais vous +dire ça.</i>»</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> + +<p class="mid">I</p> +<br> +<p class="i16">Je hais les dés, les cartes, le trictrac;</p> +<p class="i18"> Je ne bois jamais de scubac</p> +<p class="i20"> Ni de punch, ni de rack.</p> +<p class="i18"> Par peur de la moindre claque,</p> +<p class="i18"> Je fuis sitôt qu'on m'attaque</p> +<p class="i20"> Plus vite qu'un brac.</p> +<p class="i16">Je ne vais pas courtiser Bergerac;</p> +<p class="i20"> Et pour grossir mon sac</p> +<p class="i20"> Je ne fais nul micmac.</p> +<p class="i18"> Je n'ai d'horloge et d'almanach</p> +<p class="i20"> Que mon seul estomac.</p> +<br> +<p class="mid">II</p> +<br> +<p class="i16">Je suis ravi du bon vieillard Issec.</p> +<p class="i18"> Son langage est un vrai sorbec.</p> +<p class="i20">Malgré son vilain bec</p> +<p class="i18"> J'irais le voir à la Mecque</p> +<p class="i18"> Et rendre à ce vrai Sénèque</p> +<p class="i20"> Un salamalec.</p> +<p class="i16">Près de lui j'aime autant un hareng pec</p> +<p class="i20"> Blême du pain tout sec,</p> +<p class="i20"> Que perdrix et vin grec.</p> +<p class="i18"> O mort, si tu le fais échec,</p> +<p class="i20"> Viens m'enlever avec</p> +<br> +<p class="mid">III</p> +<br> +<p class="i16">Je suis charmé, quand je suis en pic-nic.</p> +<p class="i18"> On est libre; c'est là le hic,</p> +<p class="i20"> En payant ric à ric.</p> +<p class="i18"> Je fais quelques vers lyriques,</p> +<p class="i18"> Mais jamais de satiriques;</p> +<p class="i20"> Ce n'est pas là mon tic.</p> +<p class="i16">Je crains bien moins la langue d'un aspic,</p> +<p class="i20"> Les yeux d'un basilic,</p> +<p class="i20"> Que le blâme public.</p> +<p class="i18"> Je ne fais nul honteux trafic;</p> +<p class="i20"> Je suis dans mon district</p> +<br> +<p class="mid">IV</p> +<br> +<p class="i16">Je ne voudrais, pour l'or du monde en bloc,</p> +<p class="i18"> Le sort m'eût-il remis au soc,</p> +<p class="i20"> D'aucun bien être escroc.</p> +<p class="i18"> D'un ami rien ne me choque;</p> +<p class="i18"> S'il me raille, je m'en moque,</p> +<p class="i20"> Sans livrer le choc.</p> +<p class="i16">Et j'aime autant un forban de Maroc</p> +<p class="i20"> Que le grand monsieur Roch,</p> +<p class="i20"> Tant il a l'air d'un croc;</p> +<p class="i18"> Contre un turban ferais-je troc?</p> +<p class="i20"> Non, plutôt contre un froc</p> +<br> +<p class="mid">V</p> +<br> +<p class="i16">Je hais les eaux de Forge et Balaruc.</p> +<p class="i18"> Je ne porte point chez Colduc</p> +<p class="i20"> D'ordonnance d'Astruc.</p> +<p class="i18"> Je ne veux, sous ma perruque,</p> +<p class="i18"> Porter cautère à la nuque,</p> +<p class="i20"> Dussé-je être duc.</p> +<p class="i16">Car de son corps qui fait un aqueduc</p> +<p class="i20"> Devient bientôt caduc,</p> +<p class="i20"> Fût-il un gros heiduc.</p> +<p class="i18"> Mais le vin est, si j'en crois Luc,</p> +<p class="i20"> De tous le meilleur suc.</p> +</div></div> + +<p>On a fait aussi sur ces mêmes rimes isolées cinq +adages que voici:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Le thésauriseur cherche le sac.</p> +<p class="i20">Le promeneur cherche le sec.</p> +<p class="i20">Le biographe cherche le sic.</p> +<p class="i20">Le laboureur cherche le soc.</p> +<p class="i20">Le gourmand cherche le suc.</p> +</div></div> + +<p>On a publié, en février 1849, sur les désordres de +l'Assemblée nationale constituante, les vers monorimes +suivants:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">En voyant cet affreux micmac,</p> +<p class="i20">On dit partout, même à Cognac,</p> +<p class="i20">À Bergerac, à Ribérac,</p> +<p class="i20">Que la république, au bissac,</p> +<p class="i20">Fait un déplorable tic-tac,</p> +<p class="i20">Qui peut finir par un cric-crac,</p> +<p class="i20">Comme en a produit Polignac.</p> +<p class="i20">Que voulez-vous? Proudhon et Bac,</p> +<p class="i20">Ledru-Rollin et Cavaignac</p> +<p class="i20">La poussent dans un cul-de-sac,</p> +<p class="i20">Où, par quelque coup de Jarnac,</p> +<p class="i20">On renversera son hamac.</p> +<p class="i20">ue Dieu conserve son cornac!</p> +</div></div> + +<h4>MONSIEUR</h4> + +<p>Ce nom autrefois indiquait une seigneurie. On disait: +M. de Mayence, pour l'électeur de Mayence. +M. de Paris, pour l'archevêque de Paris. On appelait +Bossuet M. de Meaux, et, ce qui est assez singulier, +Mme de Sévigné, en parlant du pape, disait: M. de +Rome.</p> + +<p>Un officier gascon, étant à l'armée, quitte un de ses +camarades, et lui dit assez haut et d'un ton important:--Je +vais dîner chez Villars. Le maréchal, qui se +trouvait derrière cet officier, lui dit avec honte:--À +cause de mon rang et non à cause de mon mérite +dites: Monsieur de Villars.--Cadédis! répond le +Gascon sans s'émouvoir, on ne dit pas monsieur +de César.</p> + +<p>Le grand Condé, ennuyé d'entendre un fat parler +sans cesse de monsieur son père et de madame sa +mère, appela un de ses gens, et lui dit:--Monsieur +mon laquais, dites à monsieur mon cocher de mettre +messieurs mes chevaux à monsieur mon carrosse.</p> + +<h4>MONTER</h4> + +<p>Une servante apporte le mémoire du mois à son +maître; il y remarque pour trente francs de lait.--Comment! +dit-il, je dois tant que ça à la laitière?--Mon +Dieu oui, Monsieur; c'est qu'il n'y a rien qui +monte comme le lait.</p> + +<h4>MONTRER</h4> + +<p>Une princesse passait tous les matins à apprendre +l'hébreu. Un jour que son maître de langue était entré +chez elle avec une culotte déchirée, le prince son +mari lui demanda ce que cet homme venait faire dans +sa chambre. La princesse lui dit:--Il me montre +l'hébreu.</p> + +<p>--Madame, répondit le prince, il vous montrera +bientôt le derrière.</p> + +<h4>MORCEAUX D'ENCENS</h4> + +<p>On demandait à M. Castil-Blaze quels étaient les +morceaux de musique qui avaient la meilleure odeur. +Il répondit:--Ce sont les morceaux dansants.</p> + +<h4>MORDANT</h4> + +<p>On demande pourquoi les gens décédés mangent du +bois.--Parce qu'on les trouve <i>morts dans</i> leurs +bières.</p> + +<h4>MORT</h4> + +<p>Trois députés des États de Bretagne étant venus pour +haranguer le roi, l'évêque, qui était le premier, oublia +sa harangue, et ne put dire un seul mot. Le gentilhomme +qui le suivait, se croyant obligé de prendre la +parole, s'écria:--Sire, mon grand-père, mon père et +moi sommes tous morts à votre service.</p> + +<p>Un plaisant en fiacre, voyant passer un convoi funèbre +qui s'en allait au cimetière du Père-Lachaise, +dit au cocher:--Retenez vos chevaux et empêchez-les +de prendre le <i>mort aux dents</i>.</p> + +<p>De tous les genres de mort dont on avait donné le +choix à Arlequin, il préféra celui de mourir de vieillesse +ou d'indigestion.</p> + +<h4>MOTS</h4> + +<p>Un célibataire venait d'acheter une paire de mouchettes; +sa gouvernante lui ayant fait observer qu'elles +étaient bien petites, il répondit qu'elles étaient bien +assez grandes pour une personne seule.</p> + +<p>Une ronde arriva près d'un poste. Un seul homme +se trouvait présent à ce moment, c'était le factionnaire. +Le capitaine de la ronde, furieux, s'avance sur +lui en disant:--Comment, tas de coquins, vous +n'êtes qu'un?</p> + +<p>Une femme d'esprit disait d'un orateur boursouflé +qui avait une certaine réputation d'éloquence:--Il +est vrai qu'il trouve facilement ses phrases; mais +quand il les a trouvées, il est obligé de chercher ce +qu'il mettra dedans.</p> + +<p>Un Américain, ayant vu six Anglais séparés de leur +troupe, eut l'audace de leur courir sus, d'en blesser +deux, de désarmer les autres et de les amener au général +Washington. Le général lui demanda comment +il avait pu faire pour se rendre maître de six hommes.--Aussitôt +que je les ai vus, répondit-il, j'ai couru sur +eux et je les ai enveloppés.</p> + +<p>Un bourreau, conduisant au gibet un pauvre diable, +lui dit:--Écoutez, je ferai de mon mieux; mais je +dois vous prévenir que je n'ai jamais pendu.--Ma +foi, répond le patient, je vous avouerai également que +je n'ai jamais été pendu non plus; mais, que voulez-vous! +nous y mettrons chacun du nôtre. Il faut espérer +que nous nous en tirerons.</p> + +<p>Le deuxième consul, Cambacérès, donnait une fête +à laquelle se trouvaient beaucoup d'artistes. Elle touchait +à sa fin, lorsque Cambacérès invita Garat à +chanter. Celui-ci, piqué de ce que l'on ne se fût pas +adressé plutôt à lui, tire sa montre et répond:--Impossible, +citoyen consul; il est minuit: ma voix est +couchée.</p> + +<p>L'expression «à faire trembler» est si familière aux +Gascons, qu'ils l'emploient à tout propos. Quelqu'un +faisait observer ce gasconisme à un officier gascon, +qui répondit par cette gasconnade:--Que l'expression +«cela fait trembler» est la plus forte qu'un Gascon +puisse employer en quelque circonstance que ce +soit, parce qu'il n'y a rien dans la nature qui soit au-dessus +de ce qui fait trembler un Gascon.</p> + +<p>Le mot «au contraire» pour <i>non</i> est encore très-usité +par les Gascons. Les députés des États du Languedoc +étant à Versailles à l'audience du roi, un Gascon du cortège +trébucha et tomba. Comme tout le monde lui demandait +s'il s'était fait mal en tombant, il dit gaiement +en se relevant:--<i>Au contraire.</i> Cette manière de parler +fit rire ceux qui étaient présents. Les uns prétendaient +que c'étaient un gasconisme, les autres une gasconnade. +C'était l'un et l'autre.</p> + +<p>Dans un grand dîner que donnait Louis XVIII, le +vieux roi, s'adressant à un seigneur, vieux aussi, lui +demanda si un certain mets qu'il lui désignait, et que +le roi aimait fort, était de son goût.--Sire, lui répondit +le courtisan, je ne fais jamais attention à ce +que je mange.--C'est un tort que vous avez, reprit +le roi; à tout âge il faut faire attention à ce qu'on +mange, et au vôtre à ce qu'on dit.</p> + +<p>M. le comte de Mailly de Beaupré portait toujours à +l'armée son chapeau à la tapageuse, en sorte que la +cocarde se trouvait derrière.--Voilà, disait un de ses +officiers, une cocarde qui a bien souvent vu l'ennemi.</p> + +<p>Un conseiller borgne, voulant décider seul une +contestation épineuse, une autre espèce de turlupin +lui dit:--Croyez-moi, empruntez les lumières d'un +de vos confrères; deux yeux valent mieux qu'un.</p> + +<p>Un célèbre buveur, étant à l'article de la mort, pria +un de ses amis, qui était à côté de son lit, d'y faire +apporter un verre d'eau, en disant:--A la mort, +il faut se réconcilier avec ses ennemis.</p> + +<p>Le poëte Bret, qui a fait sur Molière des commentaires +assez estimés, alla voir, dans sa jeunesse, un +seigneur bourguignon, qui, enflé de sa fortune et de +ses titres, lui dit que ses vassaux ne s'asseyaient et ne +se couvraient jamais devant lui.--Corbleu! réplique +Bret en enfonçant son chapeau sur ses oreilles et se +jetant dans un grand fauteuil, ces gens-là n'ont donc +ni cul ni tête?</p> + +<p>La basse bohème, à Paris, emploie une langue à +part. Après s'être traités, dans une dispute, de polichinelle +et de caricature empaillée, les deux casseurs +d'assiettes se retroussent les manches pour se donner +ce qu'ils appellent une raclée, une peignée, une rincée, +et le plus rageur dit à l'autre:--Numérote tes +os, que je te démolisse! On arrive alors, et on les sépare, +à moins que ce ne soient des Auvergnats.</p> + +<h4>MOURIR</h4> + +<p>Un malade interrogé pourquoi il n'appelait pas un +médecin: «C'est, répondit-il, parce que je n'ai pas +encore envie de mourir.»</p> + +<h4>MOUSSES</h4> + +<p>On demande pourquoi les marins font tant de cas du +vin de Champagne.--C'est pourtant bien clair. Leur +raison est que c'est le vin qui produit le plus de +mousse.</p> + +<h4>MULE</h4> + +<p>Voici un exemple de la tolérance et des lumières des +ennemis systématiques de Rome. Un journal anglais a +donné, il y a dix ans, à ses lecteurs un récit tronqué du +voyage de S. S. Grégoire XVI à Ancône. L'auteur de ce +récit, copié d'après les feuilles françaises, a traduit la +mule du pape par <i>mule</i>, animal. Mais, non content +de commettre cette grossière méprise, il y ajoute quelque +chose de sa façon. Ainsi, il raconte que «Sa Sainteté +était assise sur un trône, un de ses pieds reposait +sur un tabouret recouvert de velours rouge; la mule, +RICHEMENT CAPARAÇONNÉE DE MÊME COULEUR, se +trouvait à ses côtés. Toutes les personnes, ajoute-t-il, +qui étaient admises dans le salon, s'agenouillèrent +trois fois et allèrent baiser la mule.»</p> + +<p>L'écrivain accompagne ce récit des commentaires les +plus ridicules; il s'élève contre la superstition des catholiques +qui s'avilissent au point de baiser de vils +animaux. C'est là de l'idolâtrie, du fétichisme, etc. Il +conclut en faisant l'éloge de la réforme, qui a aboli le +culte des mules, etc.</p> + +<p>Si des journalistes se trompent à ce point sur ce qui +concerne le chef visible de l'Église, est-il étonnant que +tant de réformés, en Angleterre comme en Allemagne, +nourrissent des préjugés absurdes contre le catholicisme?</p> + +<h4>MUR</h4> + +<p>Lorsque les fermiers généraux enfermèrent Paris +d'un mur d'enceinte en 1785, cette innovation triste +souleva presque autant de clameurs que l'enceinte +continue en 1840. On fit là-dessus le vers qui suit:</p> + +<p class="mid">Le mur murant Paris rend Paris murmurant.</p> + +<br> + +<h2>N</h2> + +<h4>NACELLE</h4> + +<p>Quel est l'âne qui va le mieux à l'eau?--C'est <i>l'âne +à selle</i>.</p> + +<h4>NAIN</h4> + +<p>La vie que menait, au dernier siècle, le prince d'Hénin, +lui attira cette épigramme de Champcenetz:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Prince, à te juger par ton train,</p> +<p class="i16">Tu fais un rôle des plus minces;</p> +<p class="i16">Tu n'es plus le prince d'<i>Hénin</i>,</p> +<p class="i16">Mais seulement le nain des princes.</p> +</div></div> + +<h4>NAIVETÉ</h4> + +<p>On recommandait à une dame malade de boire de +l'eau de sedlitz, et on lui disait: «Il n'y a que le premier +verre qui coûte à boire.--Eh bien! dit la malade, +je ne prendrai que le second.»</p> + +<p>M. de D*** recommanda très-instamment qu'on +l'ouvrît, et en donna la raison suivante: «Les médecins +n'ayant pu s'accorder entre eux sur le genre de ma +maladie, je ne serais pas fâché de savoir à quoi m'en +tenir sur la cause de ma mort.»</p> + +<p>Un conseiller disait à un ami: «Si j'avais quelque +chose de bon, je vous dirais de dîner avec moi.» Le +domestique qui le suivait lui dit à demi-voix: «Monsieur, +vous avez une tête de veau.»</p> + +<p>Un banquier anglais, nommé Fer ou Fair, fut accusé +d'avoir fait une conspiration pour enlever le roi +(George III), et le transporter à Philadelphie. Amené +devant ses juges, il leur dit: «Je sais très-bien ce +qu'un roi peut faire d'un banquier, mais j'ignore ce +qu'un banquier peut faire d'un roi.»</p> + +<p>Un dame de la cour dit un jour: «C'est bien dommage +que l'aventure de la Tour de Babel ait produit +la confusion des langues; sans cela, tout le monde +aurait toujours parlé français.»</p> + +<p>On pressait une femme lancée dans l'esprit et dans +les sciences, et qui devait aller à l'Observatoire voir +une éclipse de lune. «Ne vous inquiétez pas, dit-elle, +M. de Lalande a beaucoup de bontés pour moi; si c'est +fini quand nous arriverons, il fera recommencer.»</p> + +<p>Un provincial, étant à Saint-Cloud, vit Napoléon +dans ses jardins:</p> + +<p>«Je l'ai vu, dit-il, ce grand empereur, qui se promenait +lui-même.»</p> + +<h4>NERF DE BOEUF</h4> + +<p>On disait d'un homme colère qu'il ne s'expliquait +jamais qu'avec un air de boeuf.</p> + +<h4>NÉRON</h4> + +<p>Dans le temps où quelques hommes changeaient de +nom pour prendre les noms de Brutus, de Scévola, de +Fabricius, Publicola, etc., un membre de la section +des Tuileries disait à la tribune: «Et moi aussi je +veux prendre un nom romain, afin que l'on ne doute +plus de mon patriotisme; je veux m'appeler comme +celui qui mit le feu dans la commune de Rome pour +faire brûler les aristocrates, et qui manqua d'être la +victime d'Épicharis et de Séjan... celui... Parbleu!... +Aidez-moi donc... celui... qui... pardienne, vous n'en +connaissez pas d'autre, celui qui n'avait pas comme +gui dirait un nez pointu...</p> + +<p>--Que t'es bête, lui dit un collègue, c'est <i>nez rond</i>.</p> + +<p>--Oui, c'est ça, je me baptise Nez rond.</p> + +<h4>NEUF</h4> + +<p>Ah! mon cher ami, que je suis aise de vous rencontrer. +Savez-vous ce qu'on dit de neuf?</p> + +<p>--Non, eh bien?</p> + +<p>--Eh bien, on dit que c'est la moitié de dix-huit.</p> + +<h4>NEZ</h4> + +<p>Un camus annonçait à ses amis que sa femme venait +d'accoucher.--Ah! tant mieux, lui répondit-on, tu +auras un <i>nouveau-né</i>.</p> + +<p>Quel événement a ruiné les marchands de tabac?</p> + +<p>--La descente d'Énée aux enfers. (Voyez <i>Diné</i>.)</p> + +<p>M. Fouquier-Long, n'ayant pas été réélu par le département +de la Seine-Inférieure, son épouse signa +depuis ses lettres et billets: Femme Fouquier, <i>née +Long</i>.</p> + +<p>Dans la petite pièce intitulée: <i>le Sourd</i>, le papa Doliban +donne ainsi le signalement de son gendre futur: +«Front large, cheveux châtains, nez aquilin...»</p> + +<p>--Comment, né à Quilin! papa, vous vous trompez; +vous savez bien que je suis né à Châlons-sur-Marne.</p> + +<p>M. Renaudot, médecin à Montpellier, avait le nez +camus. Il perdit contre Guy-Patin, médecin de Paris, +un procès et s'en plaignait fort en sortant de l'audience. +Guy-Patin lui dit: «Si vous avez perdu d'un +côté, vous avez gagné de l'autre; car vous étiez entré +ici avec le nez camus, et maintenant vous avez <i>un +pied de nez</i>.»</p> + +<p>On doit à Désaugiers le joyeux pot-pourri de la +bouche et du nez, qui est farci de quelques jeux de +mots. Nous le donnons ici:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="mid">POT-POURRI DE LA BOUCHE ET DU NEZ</p> + +<p class="mid">Air: <i>Mon père était pot.</i></p> +<br> +<p class="i16">Jugez si je fus étonné</p> +<p class="i18"> Lorsque, la nuit dernière,</p> +<p class="i16">Je sentis ma bouche et mon nez</p> +<p class="i18"> S'agiter en colère.</p> +<p class="i20"> Qui donc en sursaut,</p> +<p class="i20"> Me dis-je aussitôt,</p> +<p class="i18"> Si matin me réveille?</p> +<p class="i20"> Le nez se moucha,</p> +<p class="i20"> La bouche cracha,</p> +<p class="i18"> Et je prêtais l'oreille.</p> +<br> +<p class="mid"> BOUCHE, bâillant.</p> + +<p class="mid">Air: <i>Je suis né natif de Ferrare.</i></p> +<br> +<p class="i18">Maudit nez! Le diable t'emporte</p> +<p class="i18">Ronfla-t-on jamais de la sorte!</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ.</p> +<br> +<p class="i18">Morbleu! quel démon m'installa</p> +<p class="i18">Près de cette bavarde-là?</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE.</p> +<br> +<p class="i18">Et c'est au milieu du visage</p> +<p class="i18">Qu'on loge un si sot personnage!</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ.</p> +<br> +<p class="i18">Tout sot que je suis, je me croi</p> +<p class="i18">Encor moins mâchoire que toi.</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE, piquée.</p> +<p class="mid">Air de <i>la Fanfare de Saint-Cloud</i>.</p> +<br> +<p class="i18">Que m'importent ta colère</p> +<p class="i18">Et tes sarcasmes mordants!</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ.</p> +<br> +<p class="i18">Est-ce pour me faire taire</p> +<p class="i18">Que tu me montres les dents?</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE.</p> +<br> +<p class="i18">Va, je ris de tes sottises;</p> +<p class="i18">Entends-tu, vilain camus?</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ.</p> +<br> +<p class="i18">Quelque chose que tu dises,</p> +<p class="i18">J'aurai toujours le dessus.</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE.</p> + +<p class="mid">Air: <i>Réveillez-vous, belle endormie.</i></p> +<br> +<p class="i18">Nécessaire autant qu'agréable,</p> +<p class="i18">Je sers l'enfant et le barbon;</p> +<p class="i18">Et de toi, qui fais le capable,</p> +<p class="i18">On ne peut rien tirer de bon.</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ.</p> +<p class="mid">Air: <i>La bonne aventure au gué!</i></p> +<br> +<p class="i18">De quelque titre plâtré</p> +<p class="i20"> Que tu t'autorises.</p> +<p class="i18">Jamais je ne souffrirai</p> +<p class="i20"> Que tu me maîtrises.</p> +<p class="i18">Si tu le veux, fâche-toi,</p> +<p class="i18">Je n'ai jamais craint, ma foi,</p> +<p class="i18">D'en venir aux prises,</p> +<p class="i20"> Moi...</p> +<p class="i18">D'en venir aux prises.</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE.</p> + +<p class="mid">Air: <i>Si Dorilas.</i></p> +<br> +<p class="i18">Je suis utile à mille choses.</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ.</p> +<br> +<p class="i18">De ses dons le ciel m'a comblé.</p> +<p class="i18">C'est pour moi qu'on plante les roses.</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE.</p> +<br> +<p class="i18">C'est pour moi qu'on sème le blé. (<i>bis.</i>)</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ.</p> +<br> +<p class="i18">Par moi l'on respire sur terre.</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE.</p> +<br> +<p class="i18">C'est moi qui préside aux repas.</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ.</p> +<br> +<p class="i18">L'homme, sans moi, ne vivrait guère.</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE.</p> +<br> +<p class="i18">L'homme, sans moi, ne vivrait pas (<i>bis.</i>)</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ.</p> + +<p class="mid">Air de <i>l'Avare et son ami</i>.</p> +<br> +<p class="i18">Dans une maison, lorsqu'on entre,</p> +<p class="i18">À l'instant même du dîner,</p> +<p class="i18">Ne dit-on pas, frappant son ventre:</p> +<p class="i18">Ma foi! je vois que j'ai bon nez?</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE.</p> +<br> +<p class="i18">De tous les mets auxquels on touche,</p> +<p class="i18">Celui qu'on croit de meilleur goût</p> +<p class="i18">N'est-il pas celui que partout</p> +<p class="i18">On garde pour la bonne bouche? (<i>bis.</i>)</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ.</p> + +<p class="mid">Air: <i>Jeunes filles, jeunes garçons</i>.</p> +<br> +<p class="i18">Tu conviens pourtant que jamais</p> +<p class="i18">Tu ne cessas d'être gourmande? (<i>bis.</i>)</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE.</p> +<br> +<p class="i18">C'est bien toi que tout affriande,</p> +<p class="i18">Jusqu'à la seule odeur des mets.</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ.</p> +<br> +<p class="i18">Oui, leur parfum me touche;</p> +<p class="i18">J'en dois faire l'aveu;</p> +<p class="i18">En tout temps, en tout lieu,</p> +<p class="i18">Je fus toujours un peu</p> +<p class="i18">Sur la bouche (<i>bis.</i>)</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE.</p> + +<p class="mid">Air: <i>Dans la vigne à Claudine</i>.</p> +<br> +<p class="i18">As-tu juré de mettre</p> +<p class="i18">Ma patience à bout?</p> +<p class="i18">C'est trop me compromettre</p> +<p class="i18">Avec ce marabout.</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ.</p> +<br> +<p class="i18">En vain tu voudrais feindre;</p> +<p class="i18">J'ai su te battre...</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE.</p> +<br> +<p class="i30"> Moi!</p> +<p class="i18">Que puis-je avoir à craindre</p> +<p class="i18">D'un morveux comme toi? (<i>trois fois.</i>)</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ, rouge de fureur.</p> +<p class="mid">Air: <i>Tenez, moi, je suis un bon homme</i>.</p> +<br> +<p class="i18">Qui? moi, morveux! dans ma colère,</p> +<p class="i18">Je vais te prouver sans pitié,</p> +<p class="i18">Que le nez est un adversaire</p> +<p class="i18">Qui ne se mouche pas du pied.</p> +<p class="mid"> (Après un moment de réflexion.)</p> +<p class="i18">Je me salis, si je te touche...</p> +<p class="i18">Il vaut bien mieux nous séparer...</p> +<p class="i18">Et, d'ailleurs, le nez et la bouche</p> +<p class="i18">Sont-ils faits pour se mesurer?</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE.</p> + +<p class="mid">Air: <i>Bon voyage, cher Dumollet.</i></p> +<br> +<p class="i18">Bon voyage,</p> +<p class="i18">Mon cher voisin!</p> +<p class="i18">Nous en ferons tous deux meilleur ménage.</p> +<p class="i18">Bon voyage,</p> +<p class="i18">Mon cher voisin!</p> +<p class="i18">Loin l'un de l'autre, on est toujours cousin.</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ, se détachant et lui tournant les talons.</p> +<br> +<p class="i18">Tu vas savoir si du nez l'on se passe.</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE.</p> +<br> +<p class="i18">Dans quel quartier vas-tu donc demeurer?</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ.</p> +<br> +<p class="i18">Je ne tiens pas une si grande place</p> +<p class="i18">Que je ne trouve enfin où me fourrer.</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE.</p> +<br> +<p class="i18">Bon voyage,</p> +<p class="i18">Mon cher voisin!</p> +<p class="i18">Nous en ferons tous deux meilleur ménage.</p> +<p class="i18">Bon voyage,</p> +<p class="i18">Mon cher voisin!</p> +<p class="i18">Loin l'un de l'autre, on est toujours cousin.</p> +<p class="mid"> (Le nez sort par une vitre cassée.)</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE, se regardant au miroir.</p> +<br> +<p class="i18">Oh! grand Dieu! sans nez que je suis laide!</p> +<p class="i18">J'ai tort, j'en conviens.</p> +<p class="i20"> Cher nez, reviens</p> +<p class="i20"> Vite à mon aide.</p> +<p class="i18">Oh! grand Dieu! sans nez que je suis laide!</p> +<p class="i20"> Je sens qu'en effet</p> + <p class="i20"> La nature avait tout bien fait.</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ, dehors, cherchant où se poser.</p> +<br> +<p class="i18">Mais où donc faut-il que je me place?</p> +<p class="i20"> Mon oeil étonné</p> +<p class="i20"> Rencontre un nez</p> +<p class="i20"> Sur chaque face.</p> +<p class="i18">Mais où donc faut-il que je me place?</p> +<p class="i18">Où donc me jucher?</p> +<p class="i18"> Où me nicher? où me percher?</p> +<br> +<p class="mid">LA BOUCHE, au désespoir.</p> +<br> +<p class="i18">Oh! grand Dieu! sans nez que je suis laide!</p> +<p class="i20"> J'ai tort; j'en conviens.</p> +<p class="i20"> Cher nez, reviens</p> +<p class="i20"> Vite à mon aide.</p> +<p class="i18">Oh! grand Dieu! sans nez que je suis laide!</p> +<p class="i20"> Je sens qu'en effet</p> +<p class="i20"> La nature avait tout bien fait.</p> +<br> +<p class="mid">LE NEZ, un peu honteux, reprenant sa place.</p> +<p class="mid">Air: <i>Qu'il pleuve, qu'il vente, qu'il tonne!</i></p> +<br> +<p class="i18">Je voulais faire un coup de tête...</p> +<p class="i18">Mais toute réflexion faite,</p> +<p class="i20"> Je reste où le destin m'a mis.</p> +<p class="i20"> Peut-être ailleurs serais-je pis.</p> +<br> +<p class="mid">FINAL.</p> + +<p class="mid">Air: <i>Aussitôt que la lumière.</i></p> +<br> +<p class="i18">À ces mots ils s'embrassèrent;</p> +<p class="i18">Et, se tenant par la main,</p> +<p class="i18">Tous les deux ils se jurèrent</p> +<p class="i18">Alliance, accord sans fin.</p> +<p class="i18">C'est ainsi que, sur la terre,</p> +<p class="i18">Me dis-je alors en secret,</p> +<p class="i18">La discorde sait se taire,</p> +<p class="i18">A la voix de l'intérêt.</p> +</div></div> + +<h4>NICHES</h4> + +<p>Pourquoi les saints n'aiment-ils pas trop les maçons?--Parce +qu'ils leur font des niches.</p> + +<h4>NOIRCEUR</h4> + +<p>Un bourgeois facétieux, passant devant un couvent +de femmes, disait:--Voilà une maison pleine de +noires soeurs.</p> + +<h4>NOMS</h4> + +<p>Un journal de Lyon mentionnait, il y a quelque +temps, quelques associations de noms propres qui +donnent lieu à de plaisants jeux de mots. Ainsi, il y +a eu dans cette ville une maison de commerce célèbre +sous la raison de: <i>Lajoie</i>, <i>Rigodon</i>, <i>Vidon et Cie</i>. +Viennent ensuite MM. <i>Hyver</i>, marchand de charbons; +<i>Gilet</i>, marchand de bas; <i>Mouton</i>, boucher; Mlle <i>Quinquet</i>, +veilleuse. Tout cela, du reste, n'est rien à côté de +l'adresse d'une, lettre dont le <i>Salut public</i> garantit +l'authenticité: <i>A Monsieur Vermine, au dépôt de +Mendicité, place de la Misère, à La Charité</i>. M. Vermine +a été longtemps concierge du dépôt de mendicité +de la Charité-sur-Loire, et peut-être l'est-il encore. +(Voyez <i>Jeux de mots et facéties</i>.)</p> + +<p>On a imprimé au dernier siècle un assez mauvais +roman; les héros portaient des noms à prétentions +allégoriques. C'étaient le père Vertisseur, le père Manant, +le père Nicieux, le père Foré, le père Hoquet, le +père Sonnel, le père Fide, le père Lé, etc. Dans les +femmes, c'était la mère Veille, la mère Tume, la mère +Idienne, la mère Curiale, la mère Ida, la mère Ingue, +Puis des Anglais et des Anglaises: lord Gueil, lord +Nière, lord Ange, lord Dinaire, lord Igine, lord Tie, +lord Gane, lord Seille, lady Arrhée, lady Scorde, lady +Gestion, lady Spense, lady Forme, lady Aphane. Des +plaisanteries de ce genre n'auraient peut-être pas +grande vogue aujourd'hui.</p> + +<p>Trois Anglais, dont les noms étaient: <i>Singulier</i>, +<i>Davantage</i> et <i>Juste</i> (Strange, More, Right), s'étant +trouvés ensemble à souper dans une taverne, le dernier +dit aux autres:--Il y a un voleur parmi nous; +c'est Singulier.--Cela est vrai, reprit Singulier; mais +pourquoi pas Davantage?--Oui, reprit Davantage, +il faut être Juste.</p> + +<p>Le docteur Drawell ayant rencontré un de ses amis +la veille d'une exécution qui devait se faire à Tyburn, +lui demanda s'il savait le nom du criminel.--Pas +trop, reprit l'autre; c'est un certain Pronom.--Comment! +un Pronom?--Rien n'est plus vrai; mais on +assure que ce n'est ni vous ni moi.</p> + +<h4>NORMANDS</h4> + +<p>Le Gascon par excellence, Cyrano Bergerac, dit, +dans son <i>Pédant joué</i>:--Et la seconde objection que +je fais est que vous êtes Normand: Normandie <i>quasi</i> +venue du <i>Nord</i> pour <i>mendier</i>. De votre nation les serviteurs +sont traîtres, les égaux insolents, les maîtres +insupportables. Jadis le blason de cette province était +trois faux, pour montrer les trois espèces de faux +qu'engendre ce climat: <i>Scilicet</i>, faux sauniers, faux +témoins, faux monnayeurs. Je ne veux point de faussaires +en ma maison.</p> + +<h4>NOTAIRE</h4> + +<p>Un plaisant disait que la métempsycose ne le surprenait +pas, puisque lui-même pouvait faire avec <i>un os +taire</i> un chien.</p> + +<h4>NOUS</h4> + +<p>Un grand seigneur de la cour, qui aimait beaucoup +les chevaux, fut extrêmement surpris de ce que son +écuyer lui vint dire un matin que le cheval qu'il avait +monté la veille était mort.--Quoi, dit-il, le cheval +que j'avais hier à la chasse?--Oui, Monsieur.--Ce +cheval bai que j'ai eu de M. de Barradas?--Oui, +Monsieur.--Qui n'avait que six ans?--Oui, Monsieur.--Qui +mangeait si bien?--Oui, Monsieur, +celui-là même, répondit l'écuyer.--Eh! bon Dieu! +écria le maître, qu'est-ce que c'est que de nous!</p> + +<h4>NUMA POMPILIUS</h4> + +<p>On parlait à une dame bel esprit de ce gracieux +roman-poëme de Florian.</p> + +<p>--L'avez-vous lu? lui disait-on.</p> + +<p>--Certainement, répondit-elle avec assurance; et +j'en avais prévu le dénoûment dès le début.</p> + +<p>--Quel dénoûment?</p> + +<p>--Mon Dieu, comme toujours, un mariage: Pompilius +qui finit par épouser Numa.</p> + +<br> + +<h2>O</h2> + +<p>Quel est le plus agréable des O?--l'O riant.--l'O +est aussi la lettre la plus humide.</p> + +<p>L'O était chez les anciens l'emblème de l'éternité. +Il est le sujet de l'énigme suivante:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Je sais de l'Éternel la figure et l'emblème:</p> +<p class="i16">Mortel, que ferais-tu sans mon pouvoir suprême?</p> +<p class="i16">Rien. Le monde sans moi n'aurait plus de soutien;</p> +<p class="i16">Je suis utile à tout, sans être propre à rien.</p> +</div></div> + +<h4>OBÉISSEZ</h4> + +<p>S'écrit avec les quatre lettres OBIC.</p> + +<h4>OBSERVER</h4> + +<p>Le grammairien Urbain Domergue était retenu au +lit par un abcès à la gorge, qui menaçait de le suffoquer. +Son médecin s'approche et lui dit:--Si vous +ne prenez ce que je vous ordonne, je vous observe +que...</p> + +<p>--Et moi, je vous fais observer, s'écrie le moribond, +transporté d'une scientifique colère, que c'est bien +assez de m'empoisonner par vos remèdes, sans qu'à +mon dernier moment vous veniez m'étouffer par vos +solécismes!</p> + +<p>À ces mots prononcés avec impétuosité, l'abcès +crève, la gorge se débarrasse, et grâce au solécisme, +l'irascible grammairien est guéri.</p> + +<h4>ODRY</h4> + +<p>Un médecin fashionable disait, il y a dix ans, à un +malade triste:--prenez de l'<i>odry</i>.--Le malade prit +de l'<i>eau de riz</i>, et n'en fut que plus resserré.</p> + +<p>Nous avons cité plusieurs calembourgs d'Odry. +Voici deux chansons de sa façon.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="mid">I.</p> +<br> +<p class="i18">--Papa, ces p'tits bateaux</p> +<p class="i20"> Qui vont sur l'eau</p> +<p class="i20"> Ç'a-t-il des jambes?</p> +<p class="i18">--Mais s'ils n'en avaient pas,</p> +<p class="i20"> Petit bêtat,</p> +<p class="i20"> Ils n'iraient pas.</p> +<br> +<p class="mid">II.</p> +<br> +<p class="i20"> Petit-Jean, hausse-moi,</p> +<p class="i18">Pour voir les fusées volantes;</p> +<p class="i20">Petit-Jean, hausse-moi,</p> +<p class="i18">Pour voir les fusées voler.</p> +<br> +<p class="i20"> Petit-Jean m'a haussé,</p> +<p class="i18">J'ai vu les fusées volantes.</p> +<p class="i20"> Petit-Jean m'a haussé,</p> +<p class="i18">J'ai vu les fusées voler.</p> +</div></div> + +<h4>OEUF</h4> + +<p>Bobèche disait que le mariage, les premiers jours, +est <i>un noeud frais</i>, au bout d'un an <i>un noeud dur</i>, et +quelquefois <i>un noeud brouillé</i>.</p> + +<h4>OEUFS</h4> + +<p>Quel est le pays où l'on mange le plus d'omelettes?--La +ville d'<i>Eu</i>.</p> + +<h4>OIE</h4> + +<p>Un républicain, à dîner chez un de ses amis, vit +servir un foie de veau piqué et une oie à la broche.--À +la bonne heure! dit-il, on ne pourra plus vous +accuser de n'avoir ni foi, ni loi.</p> + +<h4>OMBRE</h4> + +<p>Un homme surpris par un bataillon de ses ennemis, +quelque brave qu'il soit, peut avoir peur de son +nombre.</p> + +<h4>ONCE</h4> + +<p>Quel était la voiture la plus légère au baptême du +prince impérial?</p> + +<p>--La voiture du Nonce.</p> + +<h4>ORDRE</h4> + +<p>Comme le chevalier Taylor racontait les honneurs +qu'il avait reçus des différentes cours de l'Europe, et +les ordres dont il avait été décoré par un grand nombre +de souverains, un membre du parlement, qui se trouvait +près de lui, observa qu'il n'avait pas nommé le +roi de Prusse, et il ajouta:--Je présume qu'il ne +vous a jamais donné aucun ordre.--Pardonnez-moi +monsieur, reprit le chevalier, il m'a donné l'ordre de +quitter ses États.</p> + +<h4>OREMUS</h4> + +<p>Quel est le plus poli d'<i>Oremus</i> et de <i>Quæsumus</i>.</p> + +<p>--C'est <i>Oremus</i>, car on dit souvent: <i>Oremus visita +Quæsumus</i>; et on ne voit pas que <i>Quæsumus</i> ait visité +<i>Oremus</i>.</p> + +<p>On repoussa, au théâtre français, en 1814. une tragédie +de <i>Romulus</i>, dont le premier vers commençait +par ces mots: <i>ô Remus</i>. Des plaisants citent ainsi le +vers entier:</p> + +<p class="mid"><i>O Remus, dominez</i> sur les remparts de Rome.</p> + +<h4>ORIGINAL</h4> + +<p>Un doyen anglais, qui n'était pas d'un très-grand +génie, acheta un jour, d'un homme de lettres, un sermon +qu'il prêcha avec beaucoup de succès dans une +grande chapelle de Londres. Le dimanche suivant, il +alla dans une autre église pour assister à l'office, et +eut le désagrément d'entendre un autre ecclésiastique +prêcher le même sermon que le sien, devant une nombreuse +assemblée qui couvrait d'applaudissements le +prédicateur. Courroucé de ce que l'auteur avait abusé +sa bonne foi, il lui fit reproche, dans les termes les +plus vifs, de lui avoir vendu une copie pour un original. +«Vous vous trompez grandement, lui repartit +l'auteur, car c'est l'autre prédicateur qui a la copie, +et vous avez l'original.»</p> + +<h4>OS</h4> + +<p>Quelqu'un disait, en voyant jouer une actrice fort +maigre: il n'est pas besoin d'aller à Versailles ou à +Saint-Cloud pour voir jouer les os.</p> + +<h4>OÙ</h4> + +<p>Le célèbre Daniel Burgess dînait un jour en ville, +chez une personne de sa connaissance. Lorsqu'on en +fut au dessert, on servit un grand fromage du Cheshire.</p> + +<p>--Où l'entamerai-je, demanda Daniel?</p> + +<p>--Où vous voudrez, reprit le maître de la maison?</p> + +<p>Là-dessus, Daniel, appelant un des domestiques qui +servaient à table:--Portez, dit-il, ce fromage chez +moi; je l'entamerai à la maison.</p> + +<h4>OURAGAN</h4> + +<p>L'empereur Nicolas disait un jour au prince Dolgorouki: +Devine quel est le moment où M. Guizot a le +plus tempêté.</p> + +<p>--Je ne sais pas.</p> + +<p>--Eh bien... c'est quand il a suivi Louis XVIII dans +les Cent Jours, qu'il a fait un petit tour à Gand.</p> + +<h4>OURSINS</h4> + +<p>M. Prud'homme a constaté que les ours sains sont +ceux qui généralement se portent le mieux.</p> + +<h4>OUVRIR LA BOUCHE</h4> + +<p>Montmaur était avocat et professeur en langue +grecque; c'est pour cela qu'on l'appelait le Grec. Quoiqu'il +fût fort riche, il voulait ajouter au plaisir de +faire bonne chère, celui de ne rien dépenser; il tenait +un registre de toutes les bonnes tables de Paris, et +cherchait les moyens de s'y introduire--Il était d'un +naturel satirique; dès qu'il se trouvait avec de grands +seigneurs, il se déchaînait contre tous les auteurs et +les savants. Ses habitudes de parasite et sa médisance +firent dire de lui «qu'il n'ouvrait jamais la bouche +qu'aux dépens d'autrui.»</p> + + +<br> +<h2>P</h2> + +<h4>PAGES</h4> + +<p>On proposait au directeur de la troupe des comédiens +de Versailles de laisser entrer tous les pages du roi, de +la reine et des princes. Il objecta, avec raison, que +beaucoup de pages font un gros volume.</p> + +<h4>PAIN ET BOUILLI</h4> + +<p>Bouilly est connu par quelques ouvrages médiocres, +parmi lesquels on citera, si vous voulez, <i>les Contes à +ma fille</i>, deux volumes que donnait en prix, tous les +ans, madame Campan, à la maison d'Écouen. Joseph. +Pain ne manquait pas de faire, pour cette solennité, +des vers que l'on distribuait également aux jeunes +pensionnaires. Un plaisant dit, à ce sujet, que les filles +(d'Écouen), quand elles se conduisaient bien, recevaient +tous les ans deux livres de bouilli et un morceau de +pain.</p> + +<h4>PAIR</h4> + +<p>Le jour de l'apparition des trois ordonnances (juillet +1830), un balourd empressé se rencontre avec M. de +Sesmaisons au tourniquet de Saint-Jean, et, comme +il le gênait en passant, il lui dit: Excusez, gros père.--Allons, +s'écria l'ex-honorable député, on ne peut +plus garder son incognito dans cette ville; cet homme +sait déjà que je suis pair de France.</p> + +<p>Un Gascon, voyant un duc perdre au jeu, s'écria:--Il +est <i>duc et perd</i>.</p> + +<h4>ÉPIGRAMME DE 1790.</h4> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Par un arrêt plein de sens, de raison,</p> +<p class="i16">Les douze cents majestés de la France,</p> +<p class="i20"> En corrigeant l'impertinence</p> +<p class="i16">Des magistrats du bon peuple breton,</p> +<p class="i20"> Les ont, pour le bien de leurs âmes,</p> +<p class="i16">Déclarés tous séditieux, pervers,</p> +<p class="i20"> Félons, coquins, traîtres, infâmes...</p> +<p class="i20"> C'est un jugement de leurs pairs.</p> +</div></div> + +<h4>PALAIS</h4> + +<p>On appelle palais la partie intérieure de la bouche, +qui en est la voûte.</p> + +<p>Le Palais de Justice ayant été incendié dans le siècle +dernier, les Parisiens, qui rient de tout, même de leur +propre malheur, se passèrent de main en main le +quatrain suivant:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Certes, ce fut un triste jeu,</p> +<p class="i16">Quand à Paris, dame justice,</p> +<p class="i16">Pour avoir mangé trop d'épice,</p> +<p class="i16">Se mit le palais tout en feu.</p> +</div></div> + +<p>--Quelle différence y a-t-il entre les princes et les +huîtres?</p> + +<p>--C'est que les huîtres ne font que traverser le palais, +et que les princes y résident.</p> + +<p>Cette solution rappelle un des calembours de M. de +Bièvre. Il revenait de Versailles où il avait assisté au +déjeuner de Louis XV, et on lui demandait ce qu'il y +avait remarqué.</p> + +<p>--J'ai vu, dit-il, une huître traverser le palais +royal.</p> + +<h4>PAON</h4> + +<p>--Quels sont les paons les plus lourds?--Ce sont +les plus gras.--Non, ce sont les pans de murailles, +comme les plus légers sont les pans d'habits, et les +plus crottés les pantalons.</p> + +<p>On annonçait un jour, en objet à vendre, une volière +ayant huit pans. Un amateur de paons l'alla voir. +C'était une volière octogone.</p> + +<h4>PAPIER</h4> + +<p>Ce mot a plusieurs sens, qu'il est inutile d'exposer. +On comprendra aisément ce qu'il veut dire ici. Ces +vers ont paru en 1790.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">L'or, l'argent et l'airain, aussi bien que le fer</p> +<p class="i16">Chez nos premiers aïeux ont eu chacun leur âge.</p> +<p class="i16">Celui-ci doit son nom au charlatan Necker;</p> +<p class="i16">Et du peuple français l'auguste aréopage,</p> +<p class="i16">Secondant les projets du ministre banquier,</p> +<p class="i16">Veut que l'âge présent soit l'âge du papier.</p> +</div></div> + +<h4>PARAPET</h4> + +<p>Un homme passant avec sa femme sur le pont Royal, +à Paris, pont très-fréquenté, laissa échapper un de ces +soupirs intérieurs dont on rougit toujours un peu.--Prends-donc +garde à ce que tu fais, lui dit sa femme.--Ne +crains rien, répondit-il; tu vois bien qu'il y a +ici des parapets.</p> + +<h4>PARDON</h4> + +<p>À Messine, où commandait le maréchal de Vivonne, +un officier vint le réveiller pour lui dire quelque chose. +Il commença ainsi: «Monseigneur, je vous demande +pardon, si je viens vous réveiller.--Et moi, lui repartit +le maréchal, je vous demande pardon si je me +rendors.»</p> + +<h4>PAREIL</h4> + +<p>Un bourgeois qui avait un attelage de deux chevaux +bruns perdit l'une de ses bêtes, et chargea le domestique +de rappareiller le survivant. Le domestique chercha, +découvrit et vint dire à son maître:--Monsieur, +j'ai trouvé votre pareil.</p> + +<h4>PARLEMENT</h4> + +<p>Montmaur dit, dans sa requête au Parlement:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i18">De la cour du grand parlement</p> +<p class="i18">Tout homme qui mal parle ment.</p> +</div></div> + +<h4>PAROLE</h4> + +<p>Ménage se trouvait dans le cloître des Chartreux +lorsqu'on y faisait voir le tableau de saint Bruno. +Quelqu'un dit: «Il ne lui manque que la parole.--En +ce cas, dit Ménage, il est parfait; car il ne pourrait +parler sans manquer à la règle.»</p> + +<h4>PARTIR</h4> + +<p>Potier dit un jour à un de ses amis qu'il avait eu +jadis des fusils excellents: «En quoi étaient-ils donc +si merveilleux? reprit l'autre.--C'est qu'ils partaient +aussitôt qu'il entrait des voleurs chez moi, quoiqu'ils +ne fussent pas chargés.--Et comment cela?--Parce +que les voleurs les emportaient pour eux.»</p> + +<p>Quand la brillante société de Paris s'échappe au +beau temps pour les eaux et la compagne, les pointus +disent qu'il y a dans la capitale beaucoup d'<i>esprit de +parti</i>.</p> + +<h4>PAS</h4> + +<p>Au commencement de 1793, les gazettes allemandes +ayant répandu le bruit que le prince de Brunswick +avançait à pas de géant sur Paris, un soldat de l'armée +parisienne lit l'impromptu suivant:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Monsieur l'imprimeur allemand,</p> +<p class="i20">Rendez-nous un petit service;</p> +<p class="i20">Effacez: À pas de géant,</p> +<p class="i20">Et mettez: À pas d'écrevisse.</p> +</div></div> + +<p>Un poëte de village a placé sur la porte du cimetière +de sa commune l'inscription suivante:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Tous tes pas sont faux pas; tu ne fais pas de pas</p> +<p class="i16">Que tes pas, pas à pas, n'amènent ton trépas.</p> +</div></div> + +<h4>PASSER</h4> + +<p>Sur la porte du passage de l'église de Saint-Séverin, +qui menait autrefois du cimetière à la rue de la Parcheminerie, +on lisait ces vers:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Passant, penses-tu pas passer par ce passage,</p> +<p class="i20"> Où passant j'ai passé?</p> +<p class="i16">Si tu n'y penses pas, passant, tu n'es pas sage;</p> +<p class="i16">Car, en n'y pensant pas, tu te verras passé.</p> +</div></div> + +<p>Un ignorant, bel esprit et quelque peu farceur, se +présente à l'université de Reims pour y passer maître +ès arts. Il y est reçu. Surpris de la facilité avec laquelle +il avait acquis ce grade, il va de nouveau trouver le +président de la Faculté, et lui dit: «Monsieur, pendant +que je suis en cette ville, je voudrais profiter de +l'occasion, et faire aussi passer mon cheval maître ès +arts.--Monsieur, lui répondit le président, je suis +fâché de ne pouvoir vous obliger davantage, mais +nous ne recevons ici que les ânes.»</p> + +<h4>PATAQUIÈS OU PATAQU'EST-CE</h4> + +<p>Lorsqu'en 1857 on distribua la médaille de Sainte-Hélène, +les journaux citèrent la lettre suivante, adressée +à l'Empereur, au camp de Châlons:</p> + +<p>«Sire,</p> + +<p>«J'ai contracté sous votre cher oncle deux blessures +mortelles, qui, depuis 30 ans, font l'ornement de ma +vie, l'une à la cuisse droite, l'autre à Wagram. Si ces +deux anecdotes vous paraissent susceptibles de la croix +d'honneur, j'ai bien celui de vous en remercier d'avance.</p> + +<p class="rig">«<i>Signé</i>: ANTOINE BONNIOT,<br> +«<i>Caporal honoraire à l'ex-jeune garde</i>.</p> +<br><br><br> + +<p>«<i>P. S.</i> Mme Bonniot sera bien sensible à votre amabilité.</p> + +<p>«Affranchir la réponse, s'il vous plaît.</p> + +<p>«Ci-joint les pièces amplificatives.»</p> + +<h4>PATTE ÉTHIQUE</h4> + +<p>Une actrice qui avait la main décharnée, se présenta +sur le théâtre où elle joignait, à une déclamation forte, +de grands gestes, en déployant de grands bras.</p> + +<p>--Quel pathétique! s'écria un des spectateurs.</p> + +<h4>PAUVRE</h4> + +<p>Le collége des Grassins, à Paris, a été fondé pour les +pauvres écoliers du diocèse de Sens. Il y avait autrefois, +au-dessus de la porte: <i>Collège des Grassins, fondé +pour les Pauvres de Sens</i>. Cette inscription fit croire +que c'était un hôpital de fous. On fut obligé de la +supprimer.</p> + +<p>Un ami de Bayle s'entretenait avec ce philosophe +sur la pauvreté des gens de lettres: «Ah! mon ami, +lui dit Bayle, le nombre des auteurs pauvres est presque +aussi considérable que le nombre des pauvres auteurs.»</p> + +<p>Un pauvre diable qui passait par un village alla, +pressé par la faim, heurter à la porte d'un seigneur:</p> + +<p>--Qui êtes-vous? lui demanda-t-on.</p> + +<p>--Je suis un pauvre musicien qui demande la passade.</p> + +<p>--Entrez.</p> + +<p>Entré qu'il fut, le seigneur le fit dîner avec lui. Ce +seigneur était mélomane; et il avait fait apprendre la +musique à ses enfants, garçons et filles. Après le dîner, +il fait apporter des livres de chant; il les distribue, +un à l'étranger, et les autres à ses enfants. Ceux-ci se +mirent à chanter; le seigneur qui n'entendait rien +dire au passant, croyait qu'il voulait écouter un moment. +À la fin, comme le silence continuait:</p> + +<p>--Vous ne chantez point? lui dit-il.</p> + +<p>--Non, monsieur.</p> + +<p>--Pourquoi?</p> + +<p>--Monsieur, ne vous ai-je pas dit que j'étais un +pauvre musicien? Eh bien! je suis si pauvre musicien, +qu'en fait de musique je n'y entends rien du tout.</p> + +<p>Un bourgeois de Londres fut pareillement arrêté +dans la rue par un homme qui lui demanda l'aumône, +en se qualifiant de pauvre savant. Le bourgeois lui +donna un schelling, en lui parlant latin.--Ah! Monsieur, +lui répondit le mendiant, je me suis qualifié de +pauvre savant, et je suis tellement pauvre savant que +je n'ai pas même appris mon alphabet.</p> + +<h4>PÊCHER</h4> + +<p>Dès les premiers jours de la Révolution, le gouvernement +provisoire a envoyé M. Auguste Luchet à Fontainebleau, +en qualité de gouverneur de l'ex-château +royal.</p> + +<p>Il n'y avait rien du tout à gouverner dans le splendide +palais bâti par le génie de Primatice.--Il n'y +avait qu'à se promener dans le parc et à prendre du +ventre.</p> + +<p>M. Auguste Luchet, qui est romancier, se promena, +rêva, digéra, et, au bout du compte, se chercha un +autre passe-temps.--Il découvrit alors ce fameux vivier +où sont des carpes dont plusieurs ont de la barbe +et sont, dit-on, contemporaines de François Ier.--Il +imagina d'y goûter; il pêcha, trouva l'exercice bon, +et, depuis lors, il pêche toujours.</p> + +<p>Les habitants de Fontainebleau s'alarmèrent d'un +labeur si terrible.--Ils écrivirent au général Cavaignac +une lettre dans laquelle on trouvait ce passage:</p> + +<p>«Citoyen général, nos prédicateurs disent que le +juste pèche au moins sept fois par jour. Or, M. Auguste +Luchet pèche du matin au soir, sans discontinuer. +Jugez s'il est juste.»</p> + +<h4>PEINDRE</h4> + +<p>--Pendant que mon mari peignait notre corridor, +disait une Parisienne, je peignais nos enfants; nos +enfants étaient bien peignés, mais notre corridor était +mal peint.</p> + +<p>On sait que Wateau était, au dernier siècle, un +peintre célèbre. Un autre Wateau était coiffeur renommé. +Un bourgeois de Paris, invité à la cour, envoyant +chercher Wateau le coiffeur, qu'il ne connaissait +pas, dit à son domestique:</p> + +<p>--Va-t'en me chercher Wateau; il faut qu'il me +peigne tout de suite. Le domestique, qui entendait +tous les jours vanter le peintre, courut chez lui, et +Watteau arriva.</p> + +<p>--Bonjour, monsieur Wateau, dit le bourgeois, je +vais à la cour et j'ai besoin de vos talents. A quel prix +me peignez-vous?</p> + +<p>--Mais, monsieur, dit l'artiste, pour que vous soyez +convenable, vous me donnerez cinquante louis.</p> + +<p>Le bourgeois sauta en l'air:</p> + +<p>--Comment, cinquante louis! Renaud me peigne +pour quinze sous en perfection.</p> + +<p>L'artiste rit longtemps du quiproquo.</p> + +<h4>PÊNE</h4> + +<p>Qu'est-ce qui ressemble le plus à une serrure?--C'est +une femme malheureuse, parce qu'elle n'est jamais +sans peine.</p> + +<h4>PENSER</h4> + +<p>On sait que l'ordre de la jarretière a pour devise: +<i>Honni soit qui mal y pense.</i> Les marquis de Mesgrigny +à leur château de Villebertain ont fait écrire en lettres +d'or, au-dessus de la grande porte de leurs écuries: +<i>Honni soit qui mal y panse.</i></p> + +<p>Le comte de Lauraguais revenait de l'Angleterre. +Louis XV, le revoyant à Versailles, lui demanda d'où +il arrivait.</p> + +<p>--De Londres, Sire.</p> + +<p>--Et qu'êtes-vous allé faire là?</p> + +<p>--Apprendre à penser.</p> + +<p>--A panser les chevaux, répliqua le roi.</p> + +<p>En 1815, une noble marquise des environs de Valenciennes +se casse la jambe en descendant de voiture, +dans la cour des Tuileries. Son époux désolé commande +à l'un de ses gens d'aller au plus vite chercher un +chirurgien.</p> + +<p>--Lequel, monsieur, dit le domestique?</p> + +<p>--N'importe, pourvu qu'il pense bien. Le laquais +court, et ramène un Esculape dont les bons principes +étaient connus; deux jours après, madame était morte: +Hélas! ce brave docteur pensait bien, mais il pansait +mal.</p> + +<h4>PEPIN</h4> + +<p>Quelle différence y a-t-il entre l'histoire de France +et une poire d'Angleterre.</p> + +<p>--L'histoire de France n'a qu'un Pépin et la poire +en a plusieurs.</p> + +<p>C'est un calembour de M. de Bièvre.</p> + +<h4>PÉQUIN OU PÉKIN</h4> + +<p>Mot injurieux par lequel les militaires désignaient +autrefois un bourgeois. Lorsque Martainville fut accusé +d'avoir livré le pont du Pecq près Saint-Germain aux +alliés, on fit courir ces vers, où l'application de péquin +est plus juste:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">À Scipion, sa république,</p> +<p class="i20">Pour avoir dompté l'Afrique,</p> +<p class="i20">Donna le nom d'Africain.</p> +<p class="i20">Nommons donc cette âme vile,</p> +<p class="i20">Qui du Pecq livra la ville,</p> +<p class="i20">Martainville le <i>Pecquin</i>.</p> +</div></div> + +<h4>PERÇANT</h4> + +<p>Un faiseur de calembours a soutenu que les Perses +avaient introduit dans le monde <i>les cris persans</i>.</p> + +<p>Le même prétend que le roi Persée, prisonnier des +Romains, avait charmé les ennuis de sa captivité, en +fabriquant ces sortes de chaises qui portent son nom.</p> + +<h4>PERDRE</h4> + +<p>Un ecclésiastique de Troyes, prêchant, perdit la mémoire; +un plaisant se leva et dit:--Qu'on ferme la +porte; il n'y a ici que d'honnêtes gens; il faut que +la mémoire de monsieur se retrouve.</p> + +<h4>PERDRIX</h4> + +<p>Un plaisant, voyant deux ris de veau sur la table, +chez Véry, embarrassait le garçon de service en lui +disant:--Faites-moi le plaisir de me passer cette +<i>paire de ris</i>.</p> + +<h4>PÉROU</h4> + +<p>On parlait dans une société du mariage du doge de +Venise avec la mer Adriatique.--Il y a, dit quelqu'un, +un fait plus singulier, c'est l'union indissoluble de +père Ou et de la mère Ique.</p> + +<h4>PERRUQUE</h4> + +<p>Pendant les guerres de l'empire, un Troyen, entendant +annoncer que le général Baville avait pris perruque, +demanda où cette ville était située. Un vieil +abbé lui répondit: Sur la nuque.</p> + +<h4>PERRUQUIER</h4> + +<p>L'argot de cette profession a fourni à un membre +de la corporation une série de calembours à propos de +la guerre d'Italie.--Les autrichiens, dit-il, sont des +<i>perruques</i>. Ils espéraient que le Piémont manquerait +de <i>toupet</i> au moment de <i>se prendre aux cheveux</i> et +de se <i>donner un coup de peigne</i>. Mais nous sommes là, +<i>le fer</i> à la main; nous ne laisserons pas <i>faire la barbe</i> +à nos alliés, et l'Autriche, après avoir reçu un <i>savon</i> et +<i>un coup de brosse</i>, pourra bien <i>friser</i> sa ruine.</p> + +<h4>PEUPLIER</h4> + +<p>On a trouvé un calembour, dans ce vers d'un poëte, +qui donne de sages conseils:</p> + +<p class="mid"> +Au fort de la tempête, il faut un peu plier. +</p> + +<h4>PEUR</h4> + +<p>On parlait devant Charles-Quint d'un capitaine +espagnol qui se vantait de n'avoir jamais eu peur.--Il +faut, dit l'empereur, que cet homme n'ait jamais +mouché la chandelle avec ses doigts; car il aurait eu +peur de se brûler.</p> + +<h4>PEUREUX</h4> + +<p>On disait à un joueur qui gagnait toujours:--Vous +n'iriez pas la nuit dans un cimetière; vous êtes trop +heureux.</p> + +<h4>PET</h4> + +<p>Un perruquier de campagne réfléchissait assis sur +le coin de sa porte. Un monsieur passe et lui demande +s'il a un fer à toupet.--Oui, monsieur répond avec +empressement l'artiste campagnard.--Eh bien! frisez-moi +celui-là, dit le meunier en laissant échapper +un bruit monstrueux. (Voyez <i>parapet</i>.)</p> + +<h4>PIÈCE</h4> + +<p>Quelle est la première pièce du théâtre Français?--Le +vestibule.</p> + +<p>Quelles sont les pièces qui vont toujours?--Les +pièces de cinq francs.</p> + +<p>Fabert, maréchal de France, ayant été blessé au +siége de Turin d'un coup de mousquet à la cuisse, +Turenne et le cardinal de La Valette, le conjurèrent de +se la laisser couper, selon l'avis de tous les chirurgiens. +Le maréchal leur répondit:--Je ne veux pas mourir +par pièces; la mort m'aura tout entier, ou elle n'aura +rien, et il guérit de sa blessure.</p> + +<h4>PIED</h4> + +<p>Un grenadier, qui s'appelait la Paix de Dieu, fut +blessé: on allait lui couper une jambe. Pendant les +préparatifs de cette cruelle opération, il disait:--Eh! +la Paix de Dieu, mon ami, que va-t-on dire de +toi, quand on saura que tu as lâché pied.</p> + +<p>Lorsqu'il fut question de proclamer Louis XVI, le +restaurateur de la liberté française, un avocat voulait +que l'hommage de la nation fût porté humblement +aux pieds de Sa Majesté.--La majesté n'a point de +pieds, s'écria Mirabeau, et chacun éclata de rire, ce +qui fit tomber la motion.</p> + +<p>Le journal de Lille racontait, il n'y a pas longtemps, +l'anecdote suivante:</p> + +<p>Madame N..., bonne vieille dame, n'a jamais pu se +mettre au fait des nouvelles mesures: les dénominations +de mètre, gramme, stère, etc., lui ont toujours +semblé des monstres, et elle ne comprend pas qu'on +préfère ces noms barbares aux anciens. Cependant, +poussée par un caprice (car les femmes en ont à tout +âge), elle voulut dernièrement essayer de se mettre +au niveau des idées modernes, et elle écrivit bravement +à son boucher de lui envoyer un mètre de +veau.</p> + +<p>--Je verrai bien ce que ça fera, se disait-elle, et cela +me guidera pour une autre fois. Sa lettre tomba dans +les mains d'un nouveau garçon, encore peu expérimenté, +à qui le patron avait recommandé, quand il +serait absent, de consulter un tableau de comparaison +entre les mesures anciennes et les nouvelles, afin de +ne pas commettre d'erreurs. Le jeune homme ne manqua +pas de suivre ce bon conseil, et ayant lu sur son +tableau qu'un mètre valait trois pieds, il envoya avec +satisfaction trois énormes pieds de veau à madame N..., +qui ne peut souffrir cette partie de l'animal.</p> + +<p>Quand l'emploi des mesures nouvelles fut discuté à +l'Académie française, un des membres de la commission +du Dictionnaire proposa de substituer à cette +expression proverbiale: Avoir <i>un pied de nez</i>, celle-ci: +Avoir trente-trois centimètres de nez. Comme M. Villemain +s'y opposait:--Je sais bien, dit M. de Jouy, que +l'expression n'est pas exacte, et qu'il faudrait ajouter +une fraction.</p> + +<h4>PILE</h4> + +<p>Nos soldats font des calembours. Un chasseur disait +après la bataille de Solferino:--Les Autrichiens ont +l'air de vouloir prendre Volta.--Non, non, dit l'autre, +ils ont trop peur de la <i>pile</i>.</p> + +<h4>PLACE</h4> + +<p>M. de Villèle ayant rencontré M. de La Bourdonnaye, +lui fit quelques caresses bien franches.--Comment, +mon cher confrère, vous me boudez! Vous ne savez +donc pas combien le poste est difficile à tenir. Mettez-vous +à ma place...--Eh! c'est tout ce que je demande, +répondit M. de La Bourdonnaye.</p> + +<p>Un jeune homme qui possède un petit bien dans le +comté de Gloucester, se décida à quitter sa campagne +et à venir à la ville solliciter un emploi, comptant sur +le duc de Newcastle, qui avait promis de le servir, et +qui pendant plusieurs mois, exerça, on ne peut mieux, +sa patience. Las d'attendre inutilement, l'homme des +champs alla trouver son protecteur, et lui dit qu'à la +fin, il s'était procuré une place.</p> + +<p>--Je vous fais mon compliment de votre bonne +fortune, lui dit le duc; et où est cette place, je vous +prie?</p> + +<p>--Dans le coche de Gloucester, je m'en suis assuré +hier soir, et vous m'avez guéri, monseigneur, d'une +plus haute ambition.</p> + +<h4>PLAINE</h4> + +<p>Quelle est la plaine la plus haute?--La pleine +lune.</p> + +<h4>PLAISIR</h4> + +<p>Garçon! un beefsteak, disait un Anglais au café +de Paris.--Oui, monsieur, avec plaisir.--Non pas +avec plaisir, avec des pommes de terre.</p> + +<p>On invitait Pothier à un dîner.--Dois-je venir avec +plaisir? dit-il.--Certainement.--Il amena avec lui +Plaisir, coiffeur célèbre de la rue Richelieu.</p> + +<h4>PLAN</h4> + +<p>Je ne possède plus rien, s'écriait un pauvre diable +à un de ses confrères; j'avais une petite rente, j'ai été +forcé de m'en défaire; j'avais une tirelire assez bien +garnie, je ne l'ai plus.--Ainsi, lui répond l'autre, la +situation est rente en plan, tirelire en plan.</p> + +<h4>PLANCHE</h4> + +<p>Les faiseurs de jeux de mots disent que M. Planche +est le plus plat de nos écrivains.</p> + +<p>Ce qui n'est vrai que dans son nom.</p> + +<h4>PLANTE</h4> + +<p>Quelle est la plante la plus utile à l'homme?--La +plante des pieds.</p> + +<h4>PLAT</h4> + +<p>Piron, un jour au parterre du Théâtre-Français, suait +à grosses gouttes. Ses deux voisins se disaient à +l'oreille:</p> + +<p>--Voilà Piron qui cuit dans son jus.--«Ce n'est +pas étonnant, dit Piron, sans se retourner, je suis +entre deux plats.»</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i18"> Vous habitez un pays âpre et rude,</p> +<p class="i16">Disait un bon Flamand au Suisse Frenkestel,</p> +<p class="i16">Et votre caractère aussi doit être tel;</p> +<p class="i16">De son pays toujours on saisit l'habitude</p> +<p class="i20"> --Ce propos n'est pas délicat,</p> +<p class="i18"> Reprend le Suisse. En ce moment j'y pense,</p> +<p class="i20"> Vous habitez un pays plat;</p> +<p class="i18"> Dois-je en tirer la même conséquence?</p> +</div></div> + +<h4>PLATE-BANDE</h4> + +<p>Dans le temps qu'on imposait aux enfants des noms +recherchés, un bon homme qui aimait son jardin, se +vantait d'avoir donné aux siens des noms plus convenables. +Mes trois filles, disait-il, s'appellent Rose, +Jacinthe et Marguerite, et mon fils Narcisse.--Ainsi, +lui répondit-on, vous faites de vos enfants une plate-bande.</p> + +<h4>PLOMB</h4> + +<p>Dans la dernière guerre d'Italie, un officier aussi +fou qu'il était brave, ayant reçu une balle dans la tête, +dit: «Je savais bien que j'y avais besoin de plomb; +mais la dose est un peu trop forte.» Et il mourut +sur-le-champ.</p> + +<h4>POËTE</h4> + +<p>On dit que les poëtes sautent parfaitement les ruisseaux, +parce qu'ils sont habitués aux <i>enjambements</i>.</p> + +<p>Quel est le poëte qui fait la barbe à tous les autres?--M. +Barbier.</p> + +<h4>POIDS</h4> + +<p>Une dame, le jour des rois, eut la fève; elle la passa +à son mari.--Que voulez-vous que je fasse de cela? +dit-il.--Ne savez-vous pas qu'en France, répondit la +dame, la couronne ne peut tomber en quenouille, et +que c'est l'homme qui doit se charger du poids de la +royauté.</p> + +<h4>POINGS</h4> + +<p>Pourquoi les poissardes ne mettent-elles pas les +points sur les I?</p> + +<p>--Parce qu'elles les ont ordinairement sur les hanches.</p> + +<h4>POINT</h4> + +<p>Autrefois les dames portaient un genre de bracelet +qu'elles nommaient sentiment. M. ***, voyant un de +ces bijoux au bras gauche de mademoiselle Bourgoing, +lui dit: «Je ne croyais pas que vous portiez le +sentiment à ce poing-là.»</p> + +<h4>POIS</h4> + +<p>Un bourgeois, qui avait passé une notable partie de sa +vie à dire des facéties plus ou moins fines, était moribond. +Sa soeur, qui l'assistait dans ces tristes moments, +lui ayant demandé s'il ne se sentait pas un poids sur +l'estomac:--Non, ma soeur, dit-il, je ne sens ni pois +ni fève.</p> + +<p>Sous Louis XV, un factionnaire de la garde avait +été placé à l'une des grilles de la cour des Tuileries, +avec la consigne de ne laisser pénétrer personne par +cette voie. Un homme se présente pour entrer, le factionnaire +lui oppose sa consigne. L'individu insiste +en disant:</p> + +<p>--Tu ne me reconnais donc pas? Je suis le prince +de Poix.</p> + +<p>--Quand vous seriez le roi des haricots, répliqua +le soldat, vous ne passeriez pas!</p> + +<h4>POISSARDES</h4> + +<p>On accuse de férocité le roi de Sardaigne: et en +effet, il mange quelquefois des pois sardes.</p> + +<h4>POLI</h4> + +<p>Un ami d'Odry le trouvant encore au lit à onze +heures, le blâmait de se lever si lard.--Je ne m'attendais +pas à des reproches, répondit-il, pour avoir +été <i>trop au lit</i>.</p> + +<p>L'autre jour, M. T... était furieux. Il venait d'inviter +à dîner un de ses amis, qui avait accepté.</p> + +<p>--Fiez-vous donc aux amis, s'écriait-il! Je l'invite +à manger la soupe avec moi, je l'invite de la façon la +plus polie, la plus gracieuse, la plus délicate,--et il +accepte.</p> + +<p>--Eh bien? lui dit le confident de ses peines.</p> + +<p>--Eh bien! il devait refuser. Que diable! une politesse +en vaut une autre.</p> + +<h4>PORC FRAIS</h4> + +<p>Le directeur du grand théâtre de Saint-Pétersbourg +ayant laissé reposer le danseur Duport pendant tout +le carême, quelqu'un dit que sans doute il voulait +avoir <i>Duport frais</i> à Pâques.</p> + +<h4>PORTE</h4> + +<p>Une dame demandait à son mari, qui sollicitait un +consulat, le succès de ses démarches. Il répondit:--On +vient de me mettre à la Porte.--Et vous souffrez +cela? reprit-elle indignée. Elle ne se calma que lorsqu'elle +comprit que la Porte, la sublime Porte était +Constantinople.</p> + +<h4>POSTÉRITÉ</h4> + +<p>Brunet disait:--Je connais un enfant de cinq ans +qui a déjà de la <i>poste hérité</i>. C'était le fils d'un maître +de poste défunt.</p> + +<h4>POSTHUME</h4> + +<p>Papa, qu'est-ce que c'est donc qu'un ouvrage posthume?--Mon +fils, c'est un ouvrage que l'auteur +publie après sa mort.</p> + +<h4>POT</h4> + +<p>Quel est, demandait Odry, le pays où l'on mange le +plus de bouillon?--C'est l'Italie!--Parce que?--Parce +que la Providence y a mis le Pô.</p> + +<p>Le dialogue suivant a eu lieu, lorsque la Savoie +demanda, en 1848, notre intervention armée en +Italie.</p> + +<p>--Es-tu pour l'intervention, toi?</p> + +<p>--Non.</p> + +<p>--Pourquoi? parce que je vois <i>la manigance</i>.</p> + +<p>--Quelle manigance?</p> + +<p>--Écoute, les élections arrivent; les rouges veulent +nous envoyer là-bas pour être maîtres par ici; et alors, +ce ne sont pas ceux qui seraient le plus près du Pô qui +mangeraient la soupe.</p> + +<p>Un saltimbanque, appelé chez le commissaire et +sommé de décliner son nom, déploya ses papiers où +le magistrat reconnut qu'il portait le nom de Pot.--Singulier +nom! dit le commissaire.</p> + +<p>--C'est vrai, monsieur; mais c'est un nom qui ne +manque pas de célébrité; mon père était soldat, et +même on le fit sergent, attendu, disent les rapports, +qu'on voyait toujours dans les combats Pot au feu le +premier. Pour une faute de discipline, on lui ôta son +grade et on lui donna son congé. Pot, cassé, se mit à +faire le commerce; il y réussit, mal et se noya. Une +fois Pot à l'eau, il perdit ses chagrins et devint fou, +car on le retira, et on ne l'appela plus que Pot fêlé. +Pot, âgé alors de cinquante ans, mourut six mois +après.</p> + +<h4>POUDRE</h4> + +<p>Un maître parfumeur demandait à son garçon de +boutique s'il avait fait toutes les commissions dont il +l'avait chargé.--Oui, monsieur,--As-tu porté un +échantillon de mes poudres à cet étranger en question?--Oui, +monsieur.--Et quelle poudre a-t-il +prise?--Monsieur, il a pris la poudre d'escampette.</p> + +<h4>POULE</h4> + +<p>Lorsque l'abbé Poule, aux sermons duquel tout +Paris avait couru, fut pourvu d'une riche abbaye, il +cessa de prêcher: ce qui fit dire à Louis XVI, qui +l'avait si bien doté:--Quand la poule est grasse, elle +ne pond plus.</p> + +<h4>PRATIQUE</h4> + +<p>On donne ce nom à un petit instrument qu'on se +met dans la bouche pour faire parler Polichinelle. Un +jour, Charles Nodier, qui aimait beaucoup le théâtre +des marionnettes, demanda au maître du spectacle à +voir la pratique; et pour essayer s'il ferait aussi bien +que le bateleur la voix singulière du matamore napolitain, +il se la mit dans la bouche. Content de cette +expérience, il rendit la pièce au bon homme en disant, +c'est ingénieux, mais c'est si petit qu'il doit y avoir +quelquefois danger de l'avaler.--Oui, monsieur, répondit +le bateleur: mais cela ne fait aucun mal. Celle +que vous venez d'essayer a déjà été avalée huit ou +dix fois.</p> + +<h4>PRAULT</h4> + +<p>Le libraire Prault pria un jour M. de Bièvre qui entrait +chez lui, de lui faire un calembour sur lui-même +ou sur sa femme. Le marquis de Bièvre répliqua sur-le-champ:--Vous +êtes un <i>prault-blème</i> et votre +femme une <i>prault-fanée</i>.</p> + +<h4>PRENDRE</h4> + +<p>Le célèbre apothicaire Baumé était occupé, dans son +laboratoire, à des opérations de chimie. On l'appelle +pour une personne qui voulait lui parler. Cette personne +lui fait un long détail du commencement, des +progrès et de l'état actuel d'une maladie dont elle se +dit attaquée.</p> + +<p>--Eh bien, monsieur, que me demandez-vous? dit +Baume impatient de retourner à ses alambics.</p> + +<p>--Monsieur, je viens vous consulter pour savoir +ce qu'il faut que je prenne pour me guérir.</p> + +<p>--Ce qu'il faut que vous preniez? mais prenez un +médecin ou un chirurgien.</p> + +<p>--Monsieur, est-ce en infusion ou en décoction +qu'il me faudra les prendre?...</p> + +<p>En 1776, les médecins de Paris recommandèrent, +comme une précaution utile contre la grippe, dont +beaucoup de personnes se trouvaient attaquées cette +année-là, de ne pas sortir à jeun. Un pasteur des environs, +instruit de la recette, crut devoir en recommander +l'usage à ses paroissiens. Il leur dit donc, +le dimanche suivant, au prône, qu'ils feraient bien +de ne pas sortir le matin, qu'ils n'eussent pris quelque +chose auparavant. Le lendemain il trouva chez lui +25 louis de moins. Son domestique, qui était sorti +le matin, ne reparut plus. Aux premières recherches +il ne fut pas difficile de s'apercevoir qu'il était le +voleur des 25 louis. Arrêté, interrogé sur le fait, il +s'avoua l'auteur du vol; mais il s'excusa en disant +avoir obéi à son maître et curé, qui, d'après l'ordonnance +de la Faculté, avait défendu au prône de sortir +le matin sans avoir pris quelque chose, et qu'il ne +l'avait fait que pour se préserver de la grippe.</p> + +<p>--Mon père, disait dans un café un petit garçon à +un filou, prendrez-vous une demi-tasse aujourd'hui?--Non, +mon fils, reprit le père, je prendrai une +cuiller.</p> + +<p class="mid">LE PARTISAN DES ASSIGNATS.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">L'autre jour, sous le toit du grand aréopage</p> +<p class="i18"> Où maint gredin, à face de proscrit,</p> +<p class="i18"> Pour quinze sous applaudit, fait tapage</p> +<p class="i20"> En faveur de tout ce que dit</p> +<p class="i16">Ou Barnave le doux, ou Mirabeau le sage.</p> +<p class="i16">Un citoyen actif, qui n'avait pas d'habit,</p> +<p class="i16">Vantait les assignats et prônait leur débit:</p> +<p class="i16">--On n'en sent pas assez, criait-il, l'avantage;</p> +<p class="i16">Sans eux l'état périt. Pour moi, je jure bien,</p> +<p class="i16">Messieurs, que j'en prendrai.--Tout beau, maître Desroches,</p> +<p class="i18"> Dit un quidam, qui connaît mon vaurien,</p> +<p class="i20"> On sait quel est votre moyen:</p> +<p class="i20"> Vous en prendrez, mais dans les poches.</p> +</div></div> + +<p>On montrait à un paysan tout ce qu'un maréchal +de France avait pris; les villes, les pays, tout cela était +dans un tableau.--Morgué! tout ce qu'il a pris +n'est pas là, dit le paysan, car je n'y vois pas mon pré.</p> + +<p>--Je viens de prendre une heure de promenade, +où j'ai pris un plaisir extrême; mais comme le jour +prend son déclin, je me retire chez moi pour aller +prendre l'air du feu; car si je tardais davantage, j'aurais +peur de prendre un rhume. Et vous, monsieur, +quel parti prenez-vous?--Mais vous le voyez, monsieur, +je prends le parti de prendre patience.</p> + +<p>L'hiver dernier était si violent, que tout se gelait, +tout se prenait, même les bourses et les manteaux.</p> + +<p>Un Gascon, qui avait perdu son argent au jeu, coucha +avec celui qui le lui avait gagné. La nuit, il glissa +la main sous le chevet de son compagnon pour reprendre +son argent. L'autre le surprit, et lui demanda +ce qu'il faisait.--Mon ami, répondit le Gascon, je +prends ma revanche.</p> + +<p>Le cardinal de Fleury voulait passer pour faire +mauvaise chère. Il demandait un jour à un courtisan +très-délié, qui dînait chez son Éminence:--Prenez-vous +du café?--Monseigneur, je n'en prends que +quand je dîne.</p> + +<p>On demandait à un médecin octogénaire qui jouissait +encore de la meilleure santé, comment il faisait +pour se porter si bien.--Je vis de mes remèdes, répondit-il, +et je n'en prends pas.</p> + +<p>On connaît cette épigramme de Scarron:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Ci-gît qui se plut tant à prendre,</p> +<p class="i20">Et qui l'avait si bien appris,</p> +<p class="i20">Qu'il trépassa de peur de rendre</p> +<p class="i20">Un lavement qu'il avait pris.</p> +</div></div> + +<h4>PRÈS</h4> + +<p>Un Anglais se plaignait à tout venant, dans un +café, d'une chute qu'il avait faite, et qui lui causait de +vives douleurs.</p> + +<p>--Monsieur, lui dit un chirurgien qui était à côté +de lui, est-ce près des vertèbres que vous vous êtes +fait mal?</p> + +<p>--Non, monsieur, reprit le malade, c'est près de +l'obélisque.</p> + +<h4>PRÉSENT</h4> + +<p>Dans des fiançailles célébrées avec beaucoup d'éclat, +on remarquait deux choses: la laideur de l'époux et +l'opulence de la corbeille. Le présent faisait oublier le +futur.</p> + +<h4>PROFESSION</h4> + +<p>Louis XVI périt juridiquement assassiné, contre le +voeu formel de la nation, le 21 janvier 1793. Le réclame +qui voudra, ce crime n'appartient point à la +France. Cependant, ce qui est affreux, et ce qui existe, +c'est que sur les registres des actes civils de la ville de +Paris on ait laissé subsister: «Capet (Louis), etc., etc., +profession de dernier tyran des Français.»</p> + +<h4>PRONONCIATION</h4> + +<p>Un étranger demandait à des savants comment on +doit prononcer le mot pétition?</p> + +<p>--D'après la règle qui veut qu'un <i>t</i> entre deux <i>i</i> se +prononce <i>ci</i>, répondit un grammairien.</p> + +<p>--Faites-moi donc l'<i>amicié</i> de prendre <i>picié</i> de mon +ignorance, et de me répéter la <i>moicié</i> de ce que vous +venez de dire, répliqua sur-le-champ Charles Nodier.</p> + +<h4>PROPRE</h4> + +<p>M. Salot voulait changer de nom, parce que le sien, +disait-il, était un nom <i>commun</i>, et qu'il désirait un +nom <i>propre</i>.</p> + +<h4>PUNCH</h4> + +<p>M. R***, préfet d'un riche département français, +avait si bien mérité de ses administrateurs, que, dans +leur reconnaissance, ils avaient donné son nom à un +pont construit sous son administration. Un jour qu'il +se louait de ce témoignage de gratitude, un de ses +amis lui dit:--R***, c'est dommage que tu ne te +nommes pas Chauvin.--Pourquoi cela?--Parce que +ton pont, au lieu de s'appeler pont R***, s'appellerait +pont Chauvin (punch au vin), et que ce serait plus +drôle.</p> +<br> + +<h2>Q</h2> + +<h4>QUAND</h4> + +<p>Un homme qui arrivait de Belgique disait:--J'ai +vu avec plaisir la ville de Gand. Comme on lui demandait: +Quand? il crut qu'on avait mal entendu, et répondit:--Caen +est en Normandie.</p> + +<h4>QUARTERON</h4> + +<p>Il m'est tombé entre les mains, dit quelque part +M. Louis de Verrières, un vieux et grand livre contenant +la vie de plusieurs saints. Ma mémoire ne me +fournit point la date de son impression; la veuve du +libraire Carteron, après la préface, met la devise de sa +maison; je pourrais presque dire ses armoiries. Voici +en quoi elles consistent: un dessin représente une +balance, tenue, ce me semble, par une main (je dirais +<i>dextrochère</i> ou <i>senextrochère</i> si je voulais faire le savant; +mais je rappellerais ceux qui dénigrent le calembour). +Dans cette balance on aperçoit des <i>quarts</i> +de <i>livre</i>, qu'on nommait alors quarterons; et la devise +qui accompagne donne l'explication aux lecteurs qui +n'ont pas l'<i>esprit des sots</i>, ou l'<i>esprit de ceux qui n'en +ont point: Les quarterons font les livres</i>.</p> + +<p>De nos jours le système décimal contrarierait singulièrement +ces libraires, venus au beau temps de la +<i>livre</i> et des <i>onces</i>. Que feraient-ils avec des <i>kilogrammes</i> +et des <i>décagrammes</i>? Cela leur paraîtrait un +peu <i>lourd</i>; et j'ajoute à cette opinion le poids de mon +assentiment.</p> + +<h4>QUARTIER</h4> + +<p>Quelqu'un voyant passer un laideron disait:--Voilà +la plus belle fille du cartier. Tous les auditeurs, +entendant, étaient scandalisés. Mais ils apprirent qu'il +y avait dans l'endroit un faiseur de cartes qui avait +deux filles.</p> + +<h4>QUASI</h4> + +<p>On fit usage de cet adverbe, en 1830, dans le couplet +suivant:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Le peuple est quasi souverain;</p> +<p class="i20">Philippe est quasi légitime;</p> +<p class="i20">L'ouvrier est quasi sans pain;</p> +<p class="i20">La France est quasi dans l'abîme;</p> +<p class="i20">Les pairs quasi déracinés</p> +<p class="i20">Ont l'air quasi démocratique;</p> +<p class="i20">Nous sommes quasi ruinés</p> +<p class="i20">Par une quasi république.</p> +</div></div> + +<h4>QUATRE</h4> + +<p>Piron passait dans le Louvre avec un de ses amis:--Tenez, +dit-il en montrant l'Académie française; ils +sont là quarante qui ont de l'esprit comme quatre.</p> + +<p>Cette boutade a sans doute inspiré les quatre vers +spirituels que Boufflers adressa à Mme de Staël, qui lui +demandait pourquoi il n'était pas de l'Académie:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Je vois l'Académie où vous êtes présente;</p> +<p class="i16">Si vous m'y recevez mon sort est assez beau.</p> +<p class="i16">Nous aurons de l'esprit à nous deux pour quarante,</p> +<p class="i18"> Vous comme quatre et moi comme zéro.</p> +</div></div> + +<p>Un sot se vantait devant Rivarol de savoir quatre +langues.--Je vous en félicite, lui dit-il; vous avez +quatre mots contre une idée.</p> + +<h4>QUATREMER</h4> + +<p>M. Quatremer demanda à Louis XV l'autorisation +d'ajouter le <i>de</i> à son nom.--Volontiers, répondit le +roi, pourvu que vous le mettiez à la fin.</p> + +<p>Et nous avons eu Quatremer de Quincy.</p> + +<h4>QUELQUE</h4> + +<p>Une femme, qui courait follement après les airs, accoste +un jour La Popelinière qu'on venait d'annoncer, +et lui dit:--Il me semble, monsieur, vous avoir vu +quelque part.--Il est vrai, madame, lui répliqua-t-il, +qu'il m'est arrivé d'y aller quelquefois.</p> + +<h4>QUESTIONS GROTESQUES</h4> + +<p>Pourquoi les pompiers n'aiment-ils pas César?--Parce +qu'ils sont engagés pour pomper.</p> + +<p>Quel est le jeu que préfèrent les domestiques?</p> + +<p>--Le gage touché.</p> + +<p>Pourquoi le soleil se lève-t-il tard en hiver?</p> + +<p>--Parce qu'il fait si froid qu'il ne peut se résoudre +à se lever matin.</p> + +<p>Quelle est la partie plus grande que le tout?</p> + +<p>--La peau d'un boeuf.</p> + +<p>Qu'est-ce qui fait tourner le dos au plus brave +guerrier?</p> + +<p>--Une seringue.</p> + +<p>Que faut-il faire pour ne plus avoir le mal de dents?</p> + +<p>--Le mal dedans, il faut le mettre dehors.</p> + +<p>Que font trois poules sur un mur?</p> + +<p>--Un nombre impair.</p> + +<p>Pourquoi les journalistes craignent-ils l'automne?</p> + +<p>A cette question de M. Guizot, M. Bertin de Vaux +répondit:--Parce que l'automne amène la chute des +feuilles.</p> + +<p>Pourquoi la lettre A est-elle plus intelligente que la +lettre B?</p> + +<p>--Parce qu'elle est bien plus avancée (avant C).</p> + +<p>Quels sont les poissons sans arêtes?</p> + +<p>--Les poissons d'avril.</p> + +<p>Où avez-vous la main quand vous dormez?</p> + +<p>--Au bout du bras.</p> + +<p>Qu'est-ce qui passe sous le soleil sans faire de +l'ombre?</p> + +<p>--Le son de la cloche.</p> + +<p>Quel est le premier homme du monde?</p> + +<p>--Le rhum de la Jamaïque.</p> + +<p>Quelle différence y a-t-il entre le ciel et la terre?</p> + +<p>--C'est que le ciel a saint Paul, et que la terre n'en +a que deux: le pôle arctique et le pôle antarctique.</p> + +<p>Quel fut l'empereur romain le moins gênant?</p> + +<p>--L'empereur Commode.</p> + +<p>Quand est-ce qu'une demoiselle peut nous éclairer?</p> + +<p>--Lorsqu'elle chante, parce qu'on a des <i>chants +d'elle</i>.</p> + +<p>Quelles sont les plus vénérables lettres de l'alphabet?</p> + +<p>--Les lettres AG.</p> + +<p>Quel est l'ami le plus désagréable?</p> + +<p>--La migraine.</p> + +<p>Quels sont en Angleterre les lords et les ladys les +moins commodes?</p> + +<p>--L'orgueil et l'ortie, la dyssenterie et la disette; +avec la dissimulation et la discorde.</p> + +<p>Quel est le moyen d'empêcher les cheminées de +fumer?</p> + +<p>--C'est de n'y point faire de feu.</p> + +<p>Pourquoi met-on les fours dans les villes?</p> + +<p>--Parce qu'on ne peut pas mettre les villes dans les +fours.</p> + +<p>Pourquoi les forts de la halle mettent-ils des chapeaux +blancs?</p> + +<p>--Pour se couvrir la tête.</p> + +<p>Les villageois malins vous diront:--Quand notre +curé dit la messe et que notre maître d'école la chante +avec les enfants, qu'est-ce qu'ils font?--Mais ils ne +prononcent pas l, vous répondrez:--Ils font l'office;--gros +rire alors, à travers lequel on vous répliquera:--Ce +qui fond, c'est la cire.</p> + +<h4>QUEUE</h4> + +<p>Un bonhomme entendant parler de <i>que retranché</i>, +dans les modes de la langue latine:--Je comprends, +dit-il, la queue retranchée, c'est la Titus, une coiffure +qui nous est revenue sous l'empire.</p> + +<p>Dernièrement une Anglaise se promenait au Jardin-des-Plantes. +Elle dit à sa femme de chambre qui la +suivait:--Achetez un pain et donnez-le à l'éléphant. +La camériste revient, le pain à la main: Milady, dit-elle, +par quel bout faut-il lui donner cela? il a deux +queues!</p> + +<p>Un paysan, ayant tué d'un coup de hallebarde un +chien qui voulait le mordre, fut cité devant le juge, +qui lui demanda pourquoi il n'avait pas opposé le +manche de la hallebarde.--Je l'aurais fait, répondit +le paysan, s'il m'eût mordu de la queue; mais il me +mordait avec ses dents.</p> + +<h4>QUIPROQUO</h4> + +<p>Un pauvre ministre de la secte anglicane avait +chargé Dick, son domestique, d'aller prendre, chez +David Black, le boucher, une fraise de veau à crédit +pour son diner. Comme Dick entrait dans le temple +après sa commission faite, le pasteur en chaire +s'écriait:--Quelles sont à ce propos les paroles de +David, mes frères? que dit David?--Monsieur, s'écria +Dick, David a dit: «Pas d'argent, pas de fraises!»</p> + +<p>On lisait dernièrement dans un petit journal de +Bruxelles:--Un incident joyeux a ajouté un supplément +de gaieté, vendredi, au théâtre des Variétés amusantes, +à Bruxelles. Je ne sais quel merle du parterre +s'avisa de siffler pendant la représentation du <i>Monsieur +seul</i>. L'officier de police se lève et demande de sa +plus belle voix:--Qui se permet de siffler?</p> + +<p>--C'est un droit qu'à la porte on achète en entrant, +riposte une voix qui part de la galerie.</p> + +<p>Le policeman, intrigué et indigné, cherche des yeux +ce nouvel interrupteur.--Qui a dit ça? hurle-t-il.</p> + +<p>--C'est Boileau, répond un plaisant des stalles.</p> + +<p>--Que Boileau sorte de la salle à l'instant!</p> + +<p>Celui-ci a paru dans l'ancien <i>Corsaire</i>.</p> + +<p>Ma chère, disait Mme F..... à son inséparable Mme X., +avez-vous vu les bêtes féroces de Mme Leprince, derrière +le Château-d'Eau.</p> + +<p>--Non, ma toute belle.</p> + +<p>--Vous avez tort; c'est un spectacle très-curieux et +qui m'a rappelé malgré moi l'histoire du <i>Lion de Damoclès</i>.</p> + +<p>--Et vous, ma bonne, avez-vous souscrit à l'épée +d'honneur du colonel Forestier?</p> + +<p>--Non, ma chérie.</p> + +<p>--Il faut y souscrire. Ce sera un glaive magnifique +et qui rappellera chaque jour à la réaction l'<i>épée +d'Androclès</i>.</p> + +<p>Un grave espagnol arrivait, de nuit, dans un village +de France qui n'avait qu'une seule hôtellerie. Il était +plus de minuit; il frappa longtemps à la porte de +cette hôtellerie, avant de pouvoir réveiller l'hôte; à la +fin il le fit lever.--Qui est là? cria l'hôte par la +fenêtre--C'est, dit l'espagnol, don Juan Pédro Hernandez +Rodriguez de Villa-Nova, conde de Malafra, +caballero de Santiago y d'Alcantara.</p> + +<p>L'hôte répondit aussitôt en fermant la fenêtre:--Monsieur, +j'en suis bien fâché, mais nous n'avons pas +assez de chambres pour loger tous ces messieurs-là.</p> + +<p>En 1758, au moment où l'on attendait d'heure en +heure la mort du roi d'Espagne, qui était à toute +extrémité, le duc de Newcastle, alors chancelier de +l'échiquier, donna ordre à ses gens, s'il venait un +exprès pour lui parler, fût-il deux heures du matin, +de le laisser entrer. Sur les trois heures après minuit, +un homme frappe à la porte de la cour; on l'introduisit +sur-le-champ dans la chambre à coucher du +duc:--Hé bien, mon ami, lui dit le lord en se hâtant +de mettre ses bas et en fixant ses regards sur cet +homme qui était crotté jusqu'aux épaules, vous devez +être venu grand train?--Oh! oui, milord, je n'ai pas +fermé l'oeil depuis mon départ!--Vous êtes sûr donc +qu'il est mort?--Oh! très-sûr, le pauvre diable est +délivré des peines de ce monde!--Dites-moi, quand +avez-vous quitté Madrid?--Madrid! reprit l'homme avec +la plus grande surprise; moi, milord, je n'y suis allé +de ma vie.--Eh! d'où diable venez-vous donc?--De Richemond, +comté d'York, et j'accours pour vous +informer de la mort de Samuel Dickinson, le receveur +de la barrière, dont votre seigneurie, lors de la dernière +élection, m'a promis la place aussitôt qu'il fermerait +l'oeil.</p> + +<p>Extrait littéral d'une séance du 22 juin 1792:</p> + +<p>Un membre demande la parole pour faire un rapport:--Il +y a quelques jours, dit-il, que la municipalité +de Langres arrêta des chevaux qui lui parurent +suspects dans leur marche.</p> + +<p>On rit.--Comment, des chevaux suspects?</p> + +<p>--Ils comparurent devant la municipalité.</p> + +<p>Comment, dit-on, ces chevaux comparurent?</p> + +<p>L'orateur continue sans s'apercevoir de sa méprise:--On +reconnut par leur interrogatoire...</p> + +<p>L'interrogatoire des chevaux!</p> + +<p>--Non, dit l'orateur, ce sont les conducteurs qui +furent interrogés...</p> + +<p>L'assemblée rit très-fort et passa à l'ordre du jour.</p> + +<p>Dans un discours, (seconde République) P. Leroux +a cité le proverbe latin: <i>Tot capita, tot sensus.</i> +Greppo l'a immédiatement traduit par ces mots: +«Autant de capitalistes, autant de sangsues.»</p> + +<p>Et dans la Republique de 1793, en parlant du coup +d'État qui venait de renverser Robespierre, un orateur +de la convention disait à la tribune:--Citoyens, la +belle journée que la nuit du 9 thermidor!</p> + +<p>Un étranger très-riche, Suderland, naturalisé russe, +était le banquier de la cour, et jouissait d'une assez +grande faveur. Un matin, on lui annonce que sa maison +est entourée de gardes, et que le maître de la police +demande à lui parler.</p> + +<p>Cet officier, nommé Reliew, entre avec l'air consterné.--Monsieur +Suderland, dit-il, je me vois, avec +un vrai chagrin, chargé par ma gracieuse souveraine +d'exécuter un ordre dont la sévérité m'effraie; et +j'ignore par quelle faute ou par quel délit vous avez +excité à ce point le ressentiment de Sa Majesté.</p> + +<p>--Moi! monsieur, répond le banquier, je l'ignore +autant et plus que vous; ma surprise surpasse la +vôtre. Mais enfin, quel est cet ordre?</p> + +<p>--Monsieur, reprend l'officier, en vérité le courage +me manque pour vous le faire connaître.</p> + +<p>--Eh quoi! aurais-je perdu la confiance de l'impératrice?</p> + +<p>--Si ce n'était que cela, vous ne me verriez pas si désolé. +La confiance peut revenir; une place peut être +rendue.</p> + +<p>--Mais, s'agit-il donc de me renvoyer dans mon +pays?</p> + +<p>--Ce serait une contrariété; mais avec vos richesses, +on est bien partout.</p> + +<p>--Ah! mon Dieu! s'écrie Suderland tremblant, +est-il question de m'exiler en Sibérie?</p> + +<p>--Hélas! on en revient.</p> + +<p>--De me jeter en prison?</p> + +<p>--Si ce n'était encore que cela, on en sort.</p> + +<p>--Bonté divine! voudrait-on me knouter?</p> + +<p>--Ce supplice est affreux, mais il ne tue pas.</p> + +<p>--Eh quoi! dit le banquier en sanglotant, ma vie +est-elle en péril? l'impératrice si bonne, si clémente, +qui me parlait encore si doucement il y a deux jours, +elle voudrait.... Mais, je ne puis le croire. Ah! de +grâce, achevez; la mort serait moins cruelle que cette +attente insupportable.</p> + +<p>--Eh bien! mon cher, dit enfin l'officier de police +avec une voix lamentable, ma gracieuse souveraine +m'a donné l'ordre de vous faire empailler.</p> + +<p>--Empailler? s'écrie Suderland, en regardant fixement +son interlocuteur. Mais vous avez perdu la raison, +ou l'impératrice n'a pas conservé la sienne; enfin +vous n'avez pas reçu un pareil ordre sans en faire +sentir la barbarie et l'extravagance?</p> + +<p>--Hélas! mon pauvre ami, j'ai fait ce qu'ordinairement +nous n'osons jamais tenter. J'ai marqué ma +surprise, ma douleur; j'allais hasarder d'humbles +remontrances, mais mon auguste souveraine, d'un +ton irrité, en me reprochant mon hésitation, m'a +commandé de sortir et d'exécuter sur-le-champ l'ordre +qu'elle m'avait donné.</p> + +<p>Il serait impossible de peindre l'étonnement, la +colère, le tremblement, le désespoir du pauvre banquier. +Après avoir laissé quelque temps un libre cours +à sa douleur, le maître de la police lui accorde un +quart d'heure pour mettre ordre à ses affaires.</p> + +<p>Alors Suderland le prie, le conjure, le presse longtemps +en vain de lui laisser écrire un billet à l'impératrice +pour implorer sa pitié. Le magistrat, vaincu +par ses supplications, cède en tremblant à ses prières, +se charge de son billet, sort, et n'osant aller au palais, +se rend précipitamment chez le comte de Bruce. Celui-ci +croit que le maître de la police est devenu fou; il +lui dit de le suivre, de l'attendre dans le palais, et +court sans tarder chez l'impératrice. Introduit chez +cette princesse, il lui expose le fait.</p> + +<p>Catherine, en entendant cet étrange récit, s'écrie:--Juste +ciel! quelle horreur! en vérité, Reliew a +perdu la tête. Comte, partez, courez et ordonnez à cet +insensé d'aller tout de suite délivrer mon pauvre banquier +de ses folles terreurs, et de le mettre en liberté.</p> + +<p>Le comte sort, exécute l'ordre, revient, et trouve +avec surprise Catherine riant aux éclats.</p> + +<p>«Je vois à présent, dit-elle, la cause d'une scène +aussi burlesque qu'inconcevable. J'avais, depuis quelques +années, un joli chien que j'aimais beaucoup, et +je lui avais donné le nom de Suderland, parce que +c'était celui d'un anglais qui m'en avait fait présent. +Ce chien vient de mourir; j'ai ordonné à Reliew de +le faire empailler, et, comme il hésitait, je me suis +mise en colère contre lui, pensant que, par une vanité +sotte, il croyait une telle commission au-dessous +de sa dignité. Voilà le mot de cette ridicule énigme.»</p> + +<h4>QUINT</h4> + +<p>Brunet disait:--La famille <i>Quint, qui n'a</i> pas +manqué de faire du bruit, n'a pourtant produit que +trois grands hommes:--Quint-Curce, Charles-Quint +et Sixte-Quint.</p> + +<h4>QUOLIBET</h4> + +<p>Caprice plus ou moins piquant. On en trouve de +temps en temps dans les journaux, exemple:</p> + +<p>Un jeune berger des environs d'Yvetot n'a jamais +pu apprendre le <i>Pater Noster</i>, quoiqu'il sache parfaitement +<i>Notre Père</i>.--Comment, lui dit, il y a environ +six semaines, le bon curé de sa commune, tu ne veux +pas incruster dans ta mémoire l'oraison dominicale +en latin?--Je peux point, moussieu le curai.--Veux-tu +que je t'enseigne le moyen de l'apprendre?--Je +veux bien, moussieu le curai.--Eh bien, il +faut nommer tes moutons par les mots que tu ne +peux pas retenir; ainsi, par exemple, ce grand cornu +s'appellera <i>Pater</i>: cet autre gros et gras, <i>Noster</i>; ce +tout petit, <i>qui es</i>, etc.; de manière que ta mémoire, +guidée par ces mois...--J'entends, j'entends, moussieu +le curai, et pis d'ailleurs ma soeur Jeanneton sait +lire; alle m'enseignera.</p> + +<p>Avant-hier, le bon curé l'aperçoit conduisant ses +moutons...--Ah! voyons, lui dit-il, puisque ton troupeau +est là, si tu sais ton <i>Pater</i>.--Si je l'sais, moussieu +l'curai! j'crais bien! allais marchais, je les appelons +si bien, qu'on dirait que j'lis tout coursement--Voyons...--<i>Pater</i>...--Bon!--<i>Noster</i>...--Bon!--<i>Nomen!</i>... +<i>Tuum!</i>...--Un instant, un instant!... +et <i>Sanctificetur</i>?--Ah! pardon excuse, mon bon +moussieu le curai! J'ons oublié de vo dire que nout'-maître +a vendu et livré <i>Sanctificetur</i> à deux de ses +vésins pour leur mardi gras!...</p> + +<p>Des plaisants ont attribué au maire d'une commune, +dont on ne trouve pas le nom sur la carte, l'affiche +suivante:</p> + +<p><span class="sc">Art. 1.</span>--Toutes les fois qu'un habitant et des +chiens non muselés se rencontreront, on devra les tuer.</p> + +<p><span class="sc">Art. 2.</span>--Tout le monde, sans exception, est tenu +d'obéir au précédent article, et de massacrer les chiens, +excepté M. l'adjoint.</p> + +<p><span class="sc">Art. 3.</span>--Les habitants majeurs et vaccinés devront +également, dimanche prochain, se rendre sur la place, +moins les malades, pour nettoyer l'égout, en présence +de l'adjoint, qu'on devra racler proprement, et du +garde-champêtre, parce qu'il est obstrué par les immondices.</p> + +<p>Ajoutons aussi cette lettre d'un père à son fils.</p> + +<p>«Mon fils, l'objet de la présente est de te prévenir +que je suis fort mécontent de toi, et que si les coups +de bâton s'écrivaient, tu recevrais souvent de mes +nouvelles. Ta mère te gâte toujours; et pour preuve, +tu trouveras ci-joint cinq francs, qu'elle t'envoie à +mon insu.»</p> + +<p>Un homme qui n'avait qu'un pantalon et qui l'avait +donné à sa blanchisseuse disait:--j'irais bien chercher +mon pantalon, mais pour l'aller chercher il faudrait +que je l'eusse.</p> + +<p>Cette tournure de phrase rappelle un autre mot +d'Odry:--Je n'aime pas les épinards; et c'est heureux, +car si je les aimais, j'en mangerais; et je ne +peux pas les souffrir.</p> +<br> +<h2>R</h2> + +<p>Un paillasse disait:--J'aime mieux être railleur +que tailleur, parce que l'un prend l'R, et que l'autre +ne prend que le T.</p> + +<h4>RACINE</h4> + +<p>Dans un cabaret, un commis voyageur combattant +les propositions d'un paysan bel esprit, lui disait:--Écoutez +là-dessus l'opinion de Racine...</p> + +<p>--Quelle racine? interrompit le paysan; est-ce la +racine grecque? j'en ai entendu parler; mais je ne +sais pas ce que c'est. Est-ce la racine radix qui guérit +les maux de dents? Est-ce la racine cube ou la racine +carrée, qui sont dans la bouche du maître d'école? +Est-ce la racine des cheveux? la racine de tremble? +la racine d'avoine? la racine du buis? la racine des +choux?...</p> + +<p>Le bavard allait poursuivre longtemps encore, lorsque +le commis voyageur s'écria:</p> + +<p>--Racine est un poëte.</p> + +<p>--Singulier nom pour un poëte. Qu'est-ce qu'il faisait +ou qu'est-ce qu'il fait, s'il est vivant?</p> + +<p>--Il n'est plus vivant. Il faisait des vers.</p> + +<p>--Des verres à vin ou des verres à bière? des verres +à vitres? des...</p> + +<p>--Taisez-vous donc et laissez-moi placer un mot. +Si vous refusez d'acheter mon vin aujourd'hui, parce +que vous comptez sur une température qui fera baisser +les prix, ne vous y fiez pas; car Racine disait.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Ma foi sur l'avenir bien fou qui se fiera:</p> +<p class="i16">Tel qui rit vendredi, dimanche pleurera.</p> +</div></div> + +<p>Lorsqu'on eut joué avec applaudissements au Théâtre-Français +la tragédie d'<i>Hernani</i> de M. Victor Hugo, +les partisans du romantique, quand même, s'écrièrent +que la tragédie était <i>déracinée</i>.</p> + +<p>Mais peu après, la vogue de Mlle Rachel fit voir que +Racine ne se <i>déracine</i> pas.</p> + +<h4>RACOLLEUR</h4> + +<p>Un marchand de Paris avait pour enseigne un rat +qui collait une affiche, avec cette légende: <i>Au rat +colleur.</i></p> + +<h4>RACCOMMODEMENTS</h4> + +<p>En affections troublées, les raccommodements ne +sont que des raccommodages.</p> + +<h4>RADIS</h4> + +<p>Lord Palmerston demandait un jour en société:--Pourquoi +les radis sont-ils d'un grand poids dans +la balance de la justice?</p> + +<p>--Parce qu'ils sont toujours crus, répondit M. le +comte d'Aberdeen, qui aime passionnément ce genre +de légumes.</p> + +<h4>RAISON</h4> + +<p>Le duc de Vendôme disait assez plaisamment:--Dans +la marche des armées, j'ai souvent examiné les +querelles des mulets et des muletiers; et j'ai remarqué +qu'à la honte de l'humanité, la raison était presque +toujours du côté des mulets.</p> + +<p>Deux paysans terminaient un procès par un arrangement:--Celui +qui avait tort s'obligeait à livrer +à l'autre, dans trois mois, pour l'indemniser, un +cochon?--Mais, quel cochon? demanda l'arbitre. +Un petit cochon n'en vaut pas un gros. Quel poids +aura-t-il?--Écrivez, répondit le premier: «Un +cochon raisonnable.»</p> + +<h4>RAMPON</h4> + +<p>Quand le premier consul Bonaparte voulut récompenser +les services qui avaient illustré depuis dix ans +la carrière militaire du général Rampon, il fit savoir +au conseil des Cinq Cents, qui, dans la constitution +d'alors, avait le privilège de présenter une liste de +trois noms, parmi lesquels le premier consul choisissait +celui qu'il jugeait digne du titre de sénateur, qu'il +désirait qu'on portât le général Rampon. L'assemblée +accueillit cette communication avec sympathie. Mais +il y avait alors dans les Cinq Cents un prêtre marié +nommé Lecerf, dont les opinions républicaines conservaient +la teinte de 93. Il crut faire acte de courage +et de malice, en écrivant sur son bulletin: <i>Puisqu'il +faut ramper</i>, <span class="sc">Rampon</span>. Le premier consul ne fit que +rire du calembour.</p> + +<h4>RASER</h4> + +<p>Peu de jours après son arrivée à la Bastille, Linguet +voit entrer dans sa chambre un grand homme sec qui +lui cause quelque frayeur.</p> + +<p>--Qui êtes-vous, monsieur? lui dit-il.</p> + +<p>--Je suis le barbier de la Bastille.</p> + +<p>--Parbleu! vous auriez bien dû la raser.</p> + +<h4>RASSIS</h4> + +<p>Un épicier, sur le boulevard du Temple, à Paris, avait +pour enseigne un tableau représentant deux rats sciant +un pain de sucre, avec cette devise: <i>Au pain de sucre +rats scient</i>.</p> + +<h4>RATAFIA ET BARNABÉ</h4> + +<p>--Quels sont les inventeurs des deux premières +lettres de l'alphabet?--Rata et Barna. <i>Rata fit</i> A et +<i>Barna</i> B.</p> + +<h4>RÉBUS</h4> + +<p>Farce énigmatique, aujourd'hui plus en vogue que +jamais, composée de figures et de lettres dont l'arrangement, +le nombre, la couleur, expriment un mot, un +nom ou une pensée. Pour signifier <i>vieux parchemin</i>, +on peint un vieillard qui chemine, appuyé sur un +bâton. Pour exprimer ces paroles: <i>J'ai soupé entre +six et sept</i>, on a mis un G sous un P, entre les deux +chiffres 6 et 7.</p> + +<p>Le Français, né malin, emploie quelquefois le rébus +avec finesse. Parmi les hiéroglyphes ou caricatures qui +tapissaient, en l'an VII, les boutiques des marchands +d'estampes, on en distinguait une à qui l'événement +donna, en quelque sorte, le mérite de la prophétie. Le +dessinateur avait représenté les membres du Directoire, +et, au-dessous, une lancette, une laitue et un +rat; ce qui, aux yeux des connaisseurs, signifiait: +<i>L'an</i> VII <i>les tuera</i>.</p> + +<p>En effet, en l'an VII (nouveau style), Bonaparte revint +tout à coup d'Égypte; et si ce retour inopiné ne +tua point les directeurs, il tua le directoire.</p> + +<p>M. Flamand, médecin, ne montait jamais sa garde, +c'est un fait reconnu; mais, en revanche, lorsqu'il +était cité devant le conseil de discipline, il y envoyait +des missives originales. En voici une:</p> + +<p><span class="sc">Le président.</span>--Messieurs, le docteur Flamand, +assigné pour avoir manqué sa garde, me fait parvenir +le billet suivant, que je livre à vos méditations, n'y +comprenant rien du tout:</p> + +<pre> +Aves Par suite de plusieurs Aves +Prendre Je n'ai pu, messieurs, Prendre +Nous De monter la garde; Nous +Pot Je n'ai pu quitter l' Pot +E Où mon vin était E +Voir Pourtant on me fait Voir +Ainés Que vous allez être Ainés +Quatre murs A me mettre Quatre murs +Ouverte Voyant ma prison Ouverte +Vue J'ai différé notre Vue +Mise D'un ami j'ai pris l' Mise +Faites Espérant sur ces Faites +Ailles Ne pas vous trouver sans Ailles. +</pre> + +<p>Après avoir longtemps examiné le billet, le conseil +interpelle un monsieur qui l'a apporté, et demande ce +que c'est.</p> + +<p><span class="sc">Le monsieur.</span>--C'est un rébus (Rires.)</p> + +<p><span class="sc">Le président.</span>--Encore faut-il en avoir la clef?</p> + +<p><span class="sc">Le monsieur.</span>--C'est facile. Voici comment l'excuse +de mon ami se lit:</p> + +<p>«Par suite de plusieurs entraves, je n'ai pu, Messieurs, +entreprendre de monter la garde; entre nous, +je n'ai pu quitter l'entrepôt où mon vin était entré. +Pourtant on me fait entrevoir que vous allez être entraînés +à me mettre entre quatre murs: voyant ma +prison entr'ouverte, j'ai différé notre entrevue. D'un +ami j'ai pris l'entremise, espérant, sur ces entrefaites, +ne pas vous trouver sans entrailles.»</p> + +<p>Au milieu du rire général, l'officieux ami du docteur +Flamand entend condamner ce savant à vingt-quatre +heures de prison.</p> + +<h4>RECEVOIR</h4> + +<p>Un marchand présentait une requête à un très-grand +seigneur pour être payé de ses fournitures.--Est-ce +que vous n'avez rien reçu, mon ami, sur votre mémoire?--Je +vous demande pardon, Monseigneur, j'ai +reçu un soufflet de votre intendant.</p> + +<h4>RÉCHAUD</h4> + +<p>Une jeune fille répétait une ariette.--Voilà un <i>ré</i> +trop froid, lui dit son maître de musique.--Si vous +voulez un <i>ré chaud</i>, répondit la jeune fille, on le trouve +à la cuisine.</p> + +<h4>RECONNAISSANCE</h4> + +<p>On donne ce nom aux reçus du Mont-de-Piété, lorsqu'on +y a déposé des gages.</p> + +<p>--L'ingratitude est à son comble dans Paris, dit un +mauvais plaisant; sans le Mont-de-Piété, on n'y trouverait +plus de reconnaissance.</p> + +<h4>RECONNAITRE</h4> + +<p>Terme de l'argot militaire. En voici l'application, +qui fut faite par la feue garde nationale de Louis-Philippe:</p> + +<p>Un capitaine de ronde s'était arrêté devant un poste +de la garde nationale et attendait que le chef de poste +vînt le reconnaître:</p> + +<p>Il attendit dix minutes... Personne ne venait.</p> + +<p>Impatienté, il pousse la porte et s'écrie:</p> + +<p>--Ah ça! viendrez-vous me reconnaître?</p> + +<p>--Impossible! fit un caporal qui gardait le poste, +le lieutenant est parti.</p> + +<p>--Eh bien?</p> + +<p>--Eh bien! comment voulez-vous que je vous reconnaisse, +moi? Je ne vous ai jamais vu!</p> + +<h4>RECULER</h4> + +<p><i>Avance, Hercule!</i> dit Cadet Roussel, professeur +de déclamation, dans une leçon qu'il donne à son +élève.</p> + +<p>--Comment! <i>avance et recule</i>, répond l'autre, qui +ne comprend pas qu'on s'adresse au plus redoutable +des demi-dieux.</p> + +<p>Un Gascon disait qu'il n'avait jamais achevé les leçons +de danse que son maître avait commencé à lui +donner, parce que, quand il avait fallu former le pas +en arrière, il n'avait pu s'y déterminer, de peur qu'il +ne fût dit qu'une fois en sa vie il avait reculé.</p> + +<h4>REDONDANCE</h4> + +<p>Commerson a dit:--Aujourd'hui tout le monde +pose. L'homme propose; la femme dispose; l'industrie +expose; le commerce dépose; les consciences composent; +les grands hommes se reposent.</p> + +<p>Il pourrait ajouter ce qu'un amateur oppose: Que +le chimiste décompose; que le conspirateur suppose; +que l'État impose; que le mauvais vin indispose; que +les compilateurs transposent.</p> + +<h4>REDRESSER</h4> + +<p>Un bossu, qui se lançait dans le monde, disait à son +ami:</p> + +<p>--Si tu me vois faire quelque chose de gauche, +redresse-moi.</p> + +<p>--Je t'avertirai, dit l'autre; mais je ne pourrais +pas te redresser.</p> + +<h4>RÉFLÉCHIR</h4> + +<p>--Pourquoi un miroir est-il muet?--Parce qu'il +réfléchit.</p> + +<h4>REGARDER</h4> + +<p>Ce mot a plusieurs sens. On sait que Lacondamine +était très-indiscret. Un jour qu'il jetait un regard +curieux sur une lettre qu'un de ses amis écrivait, celui-ci +lui dit:--Mon ami, tu regardes ce qui ne te +regarde pas.</p> + +<h4>RELEVER</h4> + +<p>Un homme que l'on avait placé en faction, et qui +était gris, tomba par terre et y resta; le caporal, passant +par là, lui dit:--Malheureux! que fais-tu là? Si +l'officier te voyait, tu irais en prison.--Pourquoi? répondit +le soldat; quel mal ai-je fait en me mettant par +terre, puisqu'on m'a dit que toutes les deux heures on +relevait les sentinelles.</p> + +<h4>RELIRE ET RELIER</h4> + +<p>Un homme riche, qui ne lisait guère, disait:--Je +relis Montaigne pour la sixième fois.--Monsieur est +relieur? lui dit un auditeur qui le connaissait.</p> + +<h4>REMISE</h4> + +<p>--Vous allez vous marier, Monsieur?--Oui, Jocrisse; +et j'y vais sans remise, entends-tu bien.--Là-dessus, +Jocrisse descend et dit à la portière:--Allez chercher +une voiture; et, comme Monsieur ne veut pas de <i>remise</i>, +amenez un fiacre.</p> + +<h4>REMONTER</h4> + +<p>Un ménage avait descendu ses meubles à Paris, du +troisième étage au rez-de-chaussée. Au bout de quelques +jours, on dit à une fille de boutique un peu obtuse:--Prudence, +il faut remonter la pendule.--Elle +la remonta au troisième étage.</p> + +<h4>RENDRE</h4> + +<p>Une femme, ayant reçu un soufflet de son mari, alla +consulter un avocat pour savoir si elle pourrait à +cause de ce fait obtenir sa séparation. Le mari, sachant +qu'elle avait fait cette démarche, lui demanda d'un +air goguenard quel parti elle allait tirer de son soufflet!</p> + +<p>--Comme on m'a dit que je n'en pourrais rien +faire, répliqua-t-elle, je vous le rends.</p> + +<p>Ce qu'elle fit et fit bien.</p> + +<p class="mid">DIATRIBE SUR LE MOT RENDRE.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Le mot de rendre est bon, je le sais bien;</p> +<p class="i16">Mais coup sur coup le répéter sans cesse,</p> +<p class="i16">Autre chose est. Alors il ne vaut rien.</p> +<p class="i16">Il faut, dis-tu, rendre à chacun le sien;</p> +<p class="i16">Ce fonds rend tant. Quand un lavement presse,</p> +<p class="i16">Il faut le rendre; Alain se rend chartreux;</p> +<p class="i16">Jean voit Lisette, il s'en rend amoureux;</p> +<p class="i16">Le roi se rend à Mons, qui va se rendre;</p> +<p class="i16">Il se rendra tôt maître de la Flandre.</p> +<p class="i16">Tu rends en cour mille respects aux grands,</p> +<p class="i16">En ta maison mille soins à ta femme;</p> +<p class="i16">Fèves pour pois tu fais bien rendre aux gens,</p> +<p class="i16">Rendeur bavard, qui tant de choses rends,</p> +<p class="i16">L'un de ces jours puisses-tu rendre l'âme!</p> +</div></div> + +<h4>RENIER</h4> + +<p>Au bas de la statue pédestre élevée à la gloire de +Louis XIV, au milieu de la place des Victoires, à Paris, +on lisait d'assez mauvais vers faits par un nommé +Renier, de l'Académie française. Quand on demandait +à Santeul ce qu'il pensait de ces vers, il disait:--Ce +sont des vers à Renier.</p> + +<h4>REPAS</h4> + +<p>Quels sont les hommes les plus sobres?--Les couteliers, +parce qu'ils font des repassages.</p> + +<h4>RÉPLIQUES</h4> + +<p>Un capitaine de vaisseau, ayant besoin de la protection +d'un premier commis de la marine, qui avait +une merveilleuse adresse à tirer parti de sa place, lui +envoya une balle de café.</p> + +<p>--Qu'est-ce que cela? demanda le bureaucrate au +domestique qui accompagnait le message.</p> + +<p>--Monsieur, c'est une balle de café moka que mon +maître vous prie d'accepter.</p> + +<p>--C'est bon; laissez cela là, et allez dire à votre +maître que je ne prends pas mon café sans sucre.</p> + +<p>Louis XIV parlait un jour du pouvoir que les rois +ont sur leurs sujets; le comte de Guiche osa prétendre +que ce pouvoir avait des bornes; mais le roi n'en voulant +admettre aucune, lui dit avec emportement:--Si +je vous ordonnais de vous jeter à la mer, vous +devriez, sans hésiter, y sauter la tête la première. Le +comte, au lieu de répliquer, se retourna brusquement +et prit le chemin de la porte. Le roi lui demanda avec +étonnement où il allait.--Apprendre à nager, sire, +lui répondit-il. Louis XIV se mit à rire, et la conversation +en resta là.</p> + +<p>Mais ce récit n'est qu'un conte.</p> + +<p>On répétait, devant Martainville, cette maxime si +connue: Qui paie ses dettes s'enrichit.--Bah! bah! +répondit-il; c'est un bruit que les créanciers font +courir.</p> + +<p>--O Julie, disait sentimentalement un jeune amoureux, +la première fois que vous me parlerez ainsi, je +me tuerai à vos pieds!--Et la seconde fois? répondit +la demoiselle.</p> + +<p>Piron, dînant chez madame ***, se livra à quelques +sarcasmes violents qui déplurent.--Vous êtes un +cheval, lui dit cette dame. Le poëte se lève de table, +tenant sa serviette à la main.</p> + +<p>--Où allez-vous donc?--A l'écurie.--Vous n'avez +pas besoin de serviette.</p> + +<p>Un petit prince d'Italie envoya dire à un étranger +de sortir dans vingt-quatre heures de ses États.--Il +me fait trop de grâce, répondit celui-ci; je n'ai +besoin que de trois quarts d'heure pour en être dehors.</p> + +<p>Un matin, sur un banc du Luxembourg, un jeune +homme timide, qui voulait engager conversation avec +une jeune personne placée à côté de lui, saisit adroitement +le moment où un insecte montait sur son +châle pour dire:--Mademoiselle, je vous préviens +que vous avez une bête derrière vous.--Ah! mon +Dieu! monsieur, dit la dame en se retournant étonnée +et comme effrayée, je ne vous savais pas là.</p> + +<p>On reprochait à l'abbé Terrai qu'une de ses opérations +ressemblait fort à prendre l'argent dans les +poches. Il répondit:--Eh! où voulez-vous donc que +je le prenne?</p> + +<p>A Naples, un commandeur de Malte, homme riche +et avare, laissait user sa livrée au point qu'un savetier +du voisinage, voyant les habits de ses gens tout +troués, s'en moquait. Ils s'en plaignirent à leur maître, +qui fit venir le savetier et le tança sur son insolence.--Moi! +Monseigneur, c'est une calomnie. Je sais trop le +respect que je dois à Votre Excellence, pour me moquer +de sa livrée.--On dit pourtant que tu ris sans cesse +en voyant les habits de mes gens.--Il est vrai, +Monseigneur; mais c'est des trous que je ris, et à +ces trous il n'y a pas de livrée.</p> + +<p>--Mon ami, n'êtes-vous pas janséniste? disait un +confesseur à son pénitent.--Non, mon père, je suis +ébéniste.</p> + +<p>Le comte d'Alets, passant par Lyon, fut conduit +chez le lieutenant du roi, qui, ne le connaissant pas, +le reçut avec hauteur et lui dit:</p> + +<p>--Mon ami, que disait-on à Paris quand vous en +êtes sorti?</p> + +<p>--Des messes, répondit le comte d'Alets.</p> + +<p>--Mais je vous demande ce qu'il y a de nouveau?</p> + +<p>--Des pois-verts.</p> + +<p>--Mon ami, vous êtes plaisant. Comment vous appelez-vous.</p> + +<p>--À Lyon, les sots m'appellent mon ami; à Paris, +on m'appelle le comte d'Alets.</p> + +<h4>REPOS</h4> + +<p>Une actrice nouvelle, qui jouait à Londres le rôle +de lady Anne dans la tragédie de Richard III, ayant +répété ce passage:</p> + +<p class="mid">Ah! quand aurai-je un peu de repos!</p> + +<p>Un de ses créanciers qui était au parterre lui cria:--Jamais, +si vous ne me payez pas les trente schellings +que vous me devez.</p> + +<h4>REPRÉSENTÉ</h4> + +<p>On disait à un représentant, avant le 18 brumaire, +qu'il y avait parmi eux de grands scélérats. Il répondit +que dans un grand État il fallait que tout le monde +fût représenté.</p> + +<h4>RESSORT</h4> + +<p>Ce mot a plusieurs sens, comme on le voit dans +cette boutade faite au milieu du XVIIe siècle contre le +parlement. L'esprit alors n'était pas si délicat qu'aujourd'hui:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Emmitouflés de robes rouges,</p> +<p class="i20">Qui jugez souverainement,</p> +<p class="i20">Auguste et grave parlement,</p> +<p class="i20">Qui faites vos lois dans vos bouges,</p> +<p class="i20">Croyez-vous être bien bravés</p> +<p class="i20">Quand vous dites que vous avez</p> +<p class="i20">Quantité de ressorts en France?</p> +<p class="i20">Un avantage si commun</p> +<p class="i20">N'est pas de grande conséquence:</p> +<p class="i20">Mon tourne-broche en a bien un.</p> +</div></div> + +<h4>RESTAURER</h4> + +<p>Le dîner splendide que le duc de Penthièvre donna +aux membres de l'Académie, le lendemain de la réception +du chevalier de Florian, valut à ce prince le +titre de <i>restaurateur</i> de l'Académie française.</p> + +<h4>RESTER</h4> + +<p>Je vois douze pigeons sur un arbre, je tire sur eux, +j'en tue cinq. Combien en reste-t-il?</p> + +<p>--Il en est resté sept.</p> + +<p>--Non, il n'en reste point, parce que les autres se +sont envolés.</p> + +<h4>RETARD</h4> + +<p>--Ma montre retarde de deux heures, disait un +étudiant à un autre étudiant.--La mienne, répond +celui-ci, retarde de 200 francs.</p> + +<p>Il l'avait mise au Mont-de-Piété.</p> + +<h4>RÉUNION</h4> + +<p>On lisait dernièrement dans un journal du Bas-Rhin +cette phrase textuelle: «De magnifiques fêtes se préparent +à Strasbourg, en l'honneur de l'anniversaire +de <i>la réunion de la France à l'Alsace</i>.»</p> + +<p>Cette manière d'entendre cette réunion nous rappelle +la joie naïve de ce Génevois qui, à l'époque où sa +ville natale devenait la capitale du département du +Lac-Léman, s'écriait avec une satisfaction enthousiaste:</p> + +<p>--Dieu me damne! la nouvelle est bonne. On +vient de réunir la France à Genève.</p> + +<h4>RHUBARBE</h4> + +<p>Lorsqu'en 1793 on eut supprimé les saints à Paris, +on ôta cette désignation aux écriteaux des rues. On +appela donc la rue Saint-Antoine rue Antoine, la rue +Sainte-Barbe, rue Barbe et ainsi des autres. Un provincial +demandait un jour au commissionnaire du +coin la rue Barbe.</p> + +<p>--La <i>rhubarbe</i>, répondit l'autre; entrez là chez +l'apothicaire.</p> + +<h4>RIME ET RAISON</h4> + +<p>La comtesse de La Suze, que ses poésies ont rendue +célèbre, plaidait au Parlement de Paris contre la duchesse +de Châtillon. Ces deux dames se rencontrèrent +dans la grande salle du Palais. Le duc de la Feuillade +donnait la main à la duchesse; il dit à Madame de La +Suze, qui était accompagnée de Benserade et de quelques +autres poëtes:</p> + +<p>--Madame, si vous avez la rime de votre côté, +nous avons la raison du nôtre.</p> + +<p>La comtesse repartit aussitôt:</p> + +<p>--Ce n'est donc pas sans rime ni raison que nous +plaidons.</p> + +<h4>RICHELIEU</h4> + +<p>Dans les épigrammes que subit ce grand ministre, +nous avons toujours remarqué celle-ci, à cause du jeu +de mots:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Jésus-Christ vint de pauvre lieu</p> +<p class="i20">Apportant la paix sur la terre.</p> +<p class="i20">S'il fût venu de Richelieu,</p> +<p class="i20">Il nous eût amené la guerre.</p> +</div></div> + +<h4>RIVAROL</h4> + +<p>Il disait de M. Le Tonnelier de Breteuil, ambassadeur +de France à Vienne:--Il aurait dû raccommoder +les cercles de l'empire.</p> + +<p>Il disait en parlant d'Arnaud Baculard:--Ses idées +ressemblent à des carreaux de vitre entassés dans le +panier d'un vitrier, claires une à une, et obscures +toutes ensemble.</p> + +<h4>RIVE</h4> + +<p>Après, la mort de l'acteur Lekain, tragédien renommé, +Larive fut choisi pour le remplacer dans les grands +rôles. Les critiques dirent bientôt:--Lekain, en passant +le Styx, n'a pas laissé son talent à la <i>rive</i>.</p> + +<h4>ROGNER LES LIVRES</h4> + +<p>Jobin plaidait contre son relieur. Son débat ayant +produit de curieux contre-sens par suite de mots rognés, +nous en citons ici quelques passages que les +journaux ont rapportés:</p> + +<p><span class="sc">Le Juge.</span>--Reconnaissez-vous que le demandeur a +travaillé pour vous?</p> + +<p><span class="sc">Jobin.</span>--Joli travail... Je lui en ferai mon compliment +un de ces jours, quand il repassera... C'est du +propre... En vérité, je ne comprends pas l'audace de ce +Monsieur... c'est comme si, après m'avoir jeté un pot +à fleurs sur la tête, il me demandait une indemnité +pour la casse... il peut en rire... Permettez-moi d'en +rire.</p> + +<p><span class="sc">Le Juge.</span>--Mais enfin, que lui reprochez-vous?</p> + +<p><span class="sc">Jobin.</span>--Voici le fait; il est odieux... Je suis abonné +au <i>Corsaire</i> depuis cinq ans... cette feuille me plaît... +elle est fort gaie, je suis fort gai, nous sommes faits +l'un pour l'autre. (Rires.) Un jour, il me prit l'envie de +faire relier ma collection... j'ai eu l'imprudence de la +confier à cet être (il montre son adversaire). Ça s'intitule +relieur, ça... si ça ne fait pas suer... Faites des +bottes de foin, mon cher, reliez des asperges... mais +des livres, plus souvent! (On rit).</p> + +<p><span class="sc">Le Juge.</span>--Modérez-vous, et n'insultez personne.</p> + +<p><span class="sc">Jobin.</span>--C'est vrai, je m'exalte, j'ai tort... Je reviens +au fait. Ce délicieux, ce charmant, cet adorable relieur... +c'est écrit sur sa boutique, parole d'honneur: +<i>M. D...</i>, <i>relieur</i>... Enfin, ce délicieux, ce charmant, +cet adorable relieur me garda ma collection trois mois: +premier grief... Je continue. Au bout de ce laps de +temps, il me la rapporte <i>rognée</i>, à ce qu'il disait; +j'examine la fourniture... Au dehors, ça pouvait encore +passer... mais voilà que je m'avise d'ouvrir un +volume... (Élevant la voix.) Oh! grands dieux! que +vois-je? pas de marge, pas la moindre petite marge... +Bien mieux, l'impression même était rognée... l'instrument +tranchant avait mordu sur presque toutes les +colonnes.</p> + +<p><span class="sc">Le Relieur.</span>--C'est faux!</p> + +<p><span class="sc">Jobin.</span>--Ah! c'est faux... Je suis enchanté que vous +ayez dit ça... J'ai ici la preuve; j'ai apporté un volume +de ma malheureuse collection. (Au juge.) Vous +allez voir dans quel état il l'a mise... et si ça ne crie +pas vengeance... Tenez, je vais vous citer des exemples +sur différentes divisions du journal. Commençons par +la politique; je lis, page 30: <i>Le gouvernement marchera +toujours mal avec un cor</i>... (On rit.) Il y avait +avec un cortège de flatteurs.» Mais ce n'est rien encore. +Passons à la politique extérieure; je lis page 203: +«<i>En ce moment la Grèce doit</i>...» (Hilarité.) Je vous +demande pardon du calembour... Monsieur a rogné +la suite: «La Grèce doit... veiller à ses intérêts» +J'arrive à l'article théâtre où je trouve: <i>La voix de +Madame Stolz est tous les jours en progrès, c'est la +voix d'une sy</i>... (Rires.) Le reste est coupé... «La voix +d'une syrène.» Je termine par deux autres citations. +Dans un article de modes, on peut lire: <i>Le salon des +Modes Françaises, 20, rue d'Antin, est toujours cité +par ses cha</i>... (Grande hilarité.) Sous-entendu «peaux.» +Et enfin, dans un article de critique littéraire, je +vois: <i>Madame Anaïs Ségalas vient encore de mettre +au four un petit vo</i>... (Explosion de rires.) La fin manque... +L'auteur a voulu dire <i>volume</i>. (On rit.) Je crois +n'avoir pas besoin de vous en dire davantage, et vous +comprendrez maintenant pourquoi je refuse de payer +à Monsieur le montant de sa facture. Quant aux dommages-intérêts +auxquels j'aurais droit... eh bien, +voyons, je suis généreux, j'y renonce, j'y renonce, +(avec éclat) j'y renonce! (On rit.)</p> + +<p>La demande du relieur est repoussée.</p> + +<h4>ROGNER LES ONGLES</h4> + +<p>Charles Lameth, en 1790, eut un duel où il fut +blessé à la main. On publia ce quatrain sous le titre +de «Dernier Bulletin de M. Lameth»:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">--Faudra-t-il à Lameth couper quelques phalanges?</p> +<p class="i16">Demandait à Dufouarre un patriote ardent.</p> +<br> +<p class="i16">--Non, dit le médecin, transporté jusqu'aux anges,</p> +<p class="i16">Il lui faudra rogner les ongles seulement.</p> +</div></div> + +<h4>ROI ET SAVETIER</h4> + +<p>Un acteur comique de bas étage s'avisa de jouer un +rôle de roi: il fut atrocement sifflé. L'acteur, contraint +de retourner à son véritable emploi, joua le +lendemain un rôle de savetier et fut couvert d'applaudissements--Cela +prouve, lui dit un de ses camarades, +que tu as joué le roi comme un savetier, et le +savetier comme un roi.</p> + +<h4>ROIS</h4> + +<p>Pour la fête de l'Épiphanie, la grande solennité des +Gentils, qui la célèbrent si imparfaitement chez nous, +et qui a pourtant laissé de grandes affections dans les +familles, un de nos démocrates les plus foncés invita, +en 1849, plusieurs de ses amis et ennemis politiques +à venir <i>tirer les rois</i>.</p> + +<p>Seulement, au moment de l'apparition du gâteau, +il a prévenu ses convives qu'au haricot consacré il +avait fait substituer une épingle. Interrogé sur le +motif de cette substitution:</p> + +<p>--C'est pour étrangler les prétendants, a-t-il répondu +d'une voix caverneuse.</p> + +<h4>ROUGES</h4> + +<p>Brunet disait, en parlant des personnes qui ont les +cheveux rouges:--Les rouges sont mes bêtes noires.</p> + +<p>Un chasseur, qui avait couru quelques périls dans +une partie de chasse où il avait tué des perdrix rouges, +disait:--Voilà des perdrix rouges qui m'en ont fait +voir des grises!</p> + +<h4>ROUTE</h4> + +<p>Pascal a dit:--Un fleuve est une grande route qui +marche. Un homme moins profond demandait:--Qui +va de Paris à Strasbourg sans faire un pas? Un Alsacien +répondit:--La grande route.</p> + +<h4>RUDIMENT</h4> + +<p>M. de Rothschild disait l'autre jour à M. Maurice +Alhoy:--Je vous prêterai un million pour relever le +théâtre Saint-Antoine, si vous me devinez quand le +chef d'une mosquée ressemble à une grammaire.</p> + +<p>--Je ne sais pas.</p> + +<p>--Eh bien... c'est quand il a des manières rudes, +parce qu'alors c'est un <i>rude iman</i>.</p> +<br> + +<h2>S</h2> + +<h4>SAGE</h4> + +<p>Ménage, attaqué d'une pleurésie, demanda qu'on lui +fît venir le Père Airaut, jésuite, son parent. À peine le +religieux est entré dans la chambre du malade, qu'il +l'embrasse, lui témoigne sa douleur, le console et +l'exhorte à la mort. Ménage, édifié de tout ce que le +Père Airaut lui dit des miséricordes de Dieu, dit en +soupirant:--Je vois s'accomplir la pensée que j'ai +toujours eue: qu'on a besoin d'une sage-femme pour +entrer dans le monde, et d'un homme sage pour en +sortir.</p> + +<h4>SALUT</h4> + +<p>Un homme se plaignait à un de ses amis de n'avoir +pas été salué par lui, à la sortie de l'église. Celui-ci +lui répondit:--Mon cher, hors de l'église, point de +salut!</p> + +<h4>SANG</h4> + +<p>Santeul disputant un jour avec le grand Condé sur +quelque ouvrage d'esprit, le prince dit au poëte:--Savez-vous, +Santeul, que je suis prince du sang?--Oui, +Monseigneur, je le sais; mais moi je suis prince +du bon sens; ce qui est préférable.</p> + +<h4>SANGUIN</h4> + +<p>Un négociant qui faisait mal ses affaires disait:--On +se trompe sur mon tempérament; on me croit +flegmatique et je suis <i>sans gain</i>.</p> + +<h4>SAPEURS</h4> + +<p>Quand le dernier roi s'enfuit, on dit qu'il s'en allait +accompagné de <i>sa peur</i>.</p> + +<p>Ce mot a produit plusieurs fois un même calembour, +dont voici la plus récente application:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Que dit-on donc?... que Ledru, dans sa fuite,</p> +<p class="i16">Est parti seul, sans suite?... O grave erreur!...</p> +<p class="i16">Il s'est sauvé, j'en conviens, au plus vite,</p> +<p class="i16">Mais il était escorté de... sa peur!...</p> +</div></div> + +<h4>SAVOIR</h4> + +<p>Une troupe de comédiens ambulants venait de jouer +<i>le Misanthrope</i> dans une petite ville de Normandie. +L'acteur qui avait rempli le rôle d'Alceste, et qui +l'avait joué de moitié avec le souffleur, s'avance après +la représentation et dit:--Messieurs, nous aurons +l'honneur de vous donner demain <i>le Philosophe sans +le savoir</i>.--Non pas! non pas! s'écrie le maire tout +furieux; vous venez de jouer <i>le Misanthrope</i> sans le +savoir, et vous saurez demain, s'il vous plaît, <i>le Philosophe</i> +pour le jouer.</p> + +<p>Le maréchal de Villeroi, gouverneur de Louis XIV, +écrivait d'une manière absolument illisible. Il écrivit +un jour une lettre au cardinal de Fleuri, précepteur du +jeune monarque; l'instituteur ne put déchiffrer un mot +de ce que le gouverneur voulait lui dire. Il le pria de +vouloir bien lui communiquer sa pensée d'une manière +plus lisible. Le maréchal écrivit une seconde +lettre, à laquelle Fleuri répondit:--Votre seconde +lettre n'est pas beaucoup plus lisible que la première. +Au surplus, pour notre honneur commun, cessez de +m'écrire, afin qu'on ne dise pas dans le monde que le +roi a un gouverneur qui ne sait pas écrire, et un précepteur +qui ne sait pas lire.</p> + +<h4>SCHILLER</h4> + +<p>Quel est le poëte dont les sécrétions ont été les plus +légères?--Schiller.</p> + +<h4>SECOUER</h4> + +<p>Un apothicaire de Newcastle, s'étant chargé du traitement +d'un malade qui était à l'article de la mort, +lui envoya une fiole de médecine, avec ces mots: <i>bien +secouer avant de faire prendre</i>. Le lendemain, il alla +voir l'effet de son remède. En entrant chez le malade, +il demanda à un domestique comment se portait son +maître. Celui-ci ne répondit que par des larmes.--Quoi! +est-ce qu'il est plus mal?--Oui, monsieur; +mais comme vous nous avez dit de le secouer avant +de lui faire prendre votre médicament, nous avons +suivi vos ordres et il est passé dans nos bras.</p> + +<h4>SEIGNEUR</h4> + +<p>On demande à Arlequin pourquoi il se permet de +prendre place parmi des gentilshommes?--Je suis +fils d'un <i>saigneur</i>, dit-il. Son père en effet était chirurgien.</p> + +<h4>SEINE</h4> + +<p>Un homme lisant au bas des personnages d'une +pièce cette indication:--<i>La scène est à Constantinople</i>;--Voilà, +dit-il, une rivière qui fait bien du +chemin.</p> + +<h4>SEIZE</h4> + +<p>On disait d'un homme âgé, pour rassurer une jeune +fille qui l'épousait, que ce monsieur n'avait que <i>ses +ans</i>.</p> + +<h4>SEL</h4> + +<p>Montmaur était riche, mais avare; il aimait mieux +diner chez les autres que de donner à manger chez +lui; et comme il savait assaisonner la conversation de +beaucoup de traits piquants, il disait à ses amis:--Fournissez +la viande et le vin, je fournirai le sel.</p> + +<h4>S'EN REPENTIR</h4> + +<p>Le pléonasme qui suit a un double sens assez juste:--Qui +verse le sang, s'en repent.</p> + +<h4>SENS</h4> + +<p>Quelles sont en France les femmes les plus raisonnables?--Les +femmes de Sens.</p> + +<h4>SENSÉ</h4> + +<p>Lorsqu'on eut sifflé la pièce sans A, Brunet pria +l'auteur de lui faire un drame sans C.</p> + +<h4>SEPT VEINES</h4> + +<p>Quelle est le pays où le sang circule le mieux? À +cette question de M. Dupin, M. Guizot répondit:--Les +Cévennes.</p> + +<h4>SERIN</h4> + +<p>Quand peut-on mettre le temps en cage?</p> + +<p>--Quand il est serein.</p> + +<h4>SERMENT</h4> + +<p>Une jeune fille, épousant contre son gré, prononça +le oui si froidement que quelqu'un dit:--Le pauvre +mari n'a là qu'un serment de bouche.--Et, riposta +un autre, la pauvre femme a un serrement de coeur.</p> + +<h4>SERPENT</h4> + +<p>Une cause singulière s'est présentée il y a quelque +temps au tribunal de simple police de Fontaine-Libeau +(Seine-Inférieure). M. le curé, prêchant sur le péché +originel, avait plusieurs fois répété:</p> + +<p>«C'est le serpent maudit qui a causé vos malheurs, +mes frères, c'est lui qui est la cause de la perte +de tant d'âmes.»</p> + +<p>Un serpent, non pas un boa, mais un de ces virtuoses +en surplis qui musicient de toutes leurs forces, +et écorchent quelquefois les oreilles des fidèles, le serpent +donc de la paroisse se lève tout à coup, et, interrompant +le vénérable pasteur, d'un ton moitié furieux, +moitié stupéfait:</p> + +<p>--Moi! j'ai causé tout ce mal-là! s'écria-t-il; +apprenez que depuis 50 ans que je suis serpent de +père en fils, je n'ai jamais fait de tort à personne; je +ne suis qu'un serpent, mais je suis honnête.</p> + +<p>Ayant adressé quelques injures à M. le curé, qui +tentait vainement de lui donner les explications les +plus satisfaisantes, le susceptible serpent a été traduit +en simple police et condamné à deux jours de prison.</p> + +<h4>SERVANTE</h4> + +<p>On raconte qu'une actrice, causant littérature avec +une de ses camarades, se mit à dire que <i>Don Quichotte</i> +n'était qu'un roman de cuisinière.--Comment, répliqua +son interlocutrice fort étonnée, <i>Don Quichotte</i>, +mais c'est un des ouvrages les plus ingénieux qui aient +jamais été écrits.--Je n'en parle que d'après notre +directeur, répliqua la première, c'est lui qui m'a certifié +hier que <i>Don Quichotte</i> était un roman de Cervantes.</p> + +<h4>SERVICE</h4> + +<p>Au nombre des hommes éminents promus à une +des plus hautes dignités de la dernière république, il +se trouvait un ancien marchand de porcelaines.--Qu'a-t-il +donc fait pour mériter cette récompense? +demanda quelqu'un qui entendait prononcer le nom +du nouveau dignitaire pour la première fois. Est-ce +qu'il a rendu des services?--Non, il en a vendu, +répondit M. le baron T...</p> + +<h4>SE TAIRE</h4> + +<p>Cadet Roussel, professeur de déclamation, dit dans +une leçon: il faut <i>parler Esther</i>.--Comment! +<i>parler et se taire</i>, dit un élève, qui ne voit pas qu'on +s'adresse à la nièce de Mardochée.</p> + +<h4>SIFFLEUR</h4> + +<p>Lorsqu'on joua la comédie du <i>Persiffleur</i> de Sauvigny, +les plaisants, les faiseurs de calembours, les +siffleurs enfin, dirent que le père siffleur avait tous +ses enfants au parterre.</p> + +<h4>SINGE</h4> + +<p>Une pimbêche d'importance, qui avait un procès, +était venue solliciter en sa faveur le premier président +de Harlay. Comme ce magistrat ne lui avait pas +fait l'accueil qu'elle croyait lui être dû, elle dit, en +passant dans l'antichambre, mais assez haut pour être +entendue du président:</p> + +<p>--Peste soit du vieux singe!</p> + +<p>Le lendemain néanmoins l'affaire fut appelée, et +cette dame gagna son procès. Elle courut aussitôt +remercier le président, qui, pour toute vengeance, se +contenta de lui dire:</p> + +<p>--Sachez madame, une autre fois, qu'un vieux +singe est toujours disposé à faire plaisir aux guenons.</p> + +<h4>SOL</h4> + +<p>Quelles sont les notes de musique que les frotteurs +d'appartements aiment le mieux?</p> + +<p>--Les notes <i>sol fa si la si ré</i>.</p> + +<h4>SON</h4> + +<p class="mid">ÉPIGRAMME SUR FAUCHET<br> + +ÉVÊQUE CONSTITUTIONNEL DE PARIS (1791)</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20"> Ce janséniste cannibale,</p> +<p class="i16">Fauchet, un jour, longuement pérora</p> +<p class="i20"> Sur les bouffons et l'Opéra,</p> +<p class="i20"> Dans la tourbe municipale.</p> +<p class="i20"> Or le prêtre-bourreau prétend</p> +<p class="i20"> Que tout théâtre dit chantant</p> +<p class="i16">Envoie un jour par mois ses acteurs à la halle</p> +<p class="i20"> Pour y chanter, hurler, baller</p> +<p class="i18"> Et de chansons le peuple régaler.</p> +<p class="i18"> Pour cet avis très-fortement j'opine,</p> +<p class="i18"> Reprit Warville, aimable polisson;</p> +<p class="i20"> Du moins, s'il manque de farine,</p> +<p class="i20"> Le peuple aura toujours du son.</p> +</div></div> + +<p>On demandait dernièrement: Pourquoi la musique, +qui charme les chevaux désole-t-elle les chiens? L'auteur +des sphinx du petit journal pour rire répondit:--C'est +que les chevaux aiment le son et que les +chiens l'ont en dégoût.</p> + +<h4>SONNET</h4> + +<p>Pourquoi un sot devient-il poëte en prenant un +bain?</p> + +<p>--Parce qu'il fait un <i>sot net</i>.</p> + +<h4>SORTIR</h4> + +<p>Des femmes de Paris qui avaient été voir des fous +demandèrent à l'un d'eux de leur donner trois numéros +pour la loterie. C'était une croyance, à Paris, +dans les classes peu instruites, que les fous sont doués +d'une sorte de divination.</p> + +<p>Le fou écrivit trois numéros sur un papier, l'avala, +et leur dit:--Mesdames, repassez demain, vos numéros +seront sortis.</p> + +<p>Un certain marquis connu par ses singularités, +vantait à la feue reine de France un remède dont il +avait le secret, et qu'il disait avoir fait prendre à un +de ses amis fort malade. L'a-t-il guérie? demanda la +reine.</p> + +<p>--Madame, dès le lendemain j'allai pour le voir; il +était sorti.</p> + +<p>--Comment! déjà sorti!</p> + +<p>--Oui, madame, il était allé se faire enterrer à +Saint-Sulpice.</p> + +<h4>SOTS</h4> + +<p>Du temps où florissait le régime parlementaire, un +député s'excusait de s'être fait attendre en disant qu'il +était avec le garde des sceaux. On lui répondit:--Il +vous a gardé bien longtemps.</p> + +<p>Le marquis de Cahusac, jouant au piquet, reconnut, +par ses cartes de rentrée, qu'il avait mal écarté, et +s'écria:--je suis un franc Goussaut!</p> + +<p>Le président Goussaut, renommé par sa stupidité, +se trouvait par hasard derrière le joueur, et lui dit:</p> + +<p>--Vous êtes un sot!</p> + +<p>--Vous avez raison, repartit Cahusac, c'est ce que +je voulais dire.</p> + +<h4>SOU</h4> + +<p>Le Pont-des-Arts, disait Odry, lorsqu'on payait un +sou le passage, le Pont-des-Arts a cela de particulier +qu'il n'y a pas plus de personnes dessus que de +<i>sous</i>.</p> + +<p>--Et il ajoutait, en parlant des receveurs au péage +de ce pont.--Ils doivent avoir beaucoup de mémoire, +à force de voir des <i>sous venir</i>.</p> + +<h4>SOUFFLET</h4> + +<p>Deux personnes qui s'étaient mutuellement souffletées +allaient se battre. On pria M. de Bièvre de les +réconcilier.--Me prenez-vous, dit-il, pour un raccommodeur +de soufflets?</p> + +<h4>SOUFFRER</h4> + +<p>Quelles sont les gens les plus à plaindre?</p> + +<p>Les faiseurs d'allumettes, parce qu'ils souffrent pour +tout le monde.</p> + +<h4>SOUL</h4> + +<p>Un écolier à qui on avait donné un sou pour la +promenade rentra avec des coliques, causées par une +intempérance de coco. Son maître lui reprochait cet +excès, en lui disant qu'il n'avait pas besoin d'avaler +deux énormes verres à deux liards.--Ce n'est pas +ma faute, reprit l'enfant, la cocotière n'avait pas de +monnaie à me rendre, alors j'ai bu tout mon <i>sou</i>.</p> + +<h4>SOULIER</h4> + +<p>Quel est l'auteur le plus crotté?--Soulié.</p> + +<h4>SOURD</h4> + +<p>Quelles sont les gens qui entendent le moins la plaisanterie?--Ce +sont les sourds.</p> + +<h4>SPA</h4> + +<p>On conte que le marquis de Bièvre, étant allé +prendre les eaux de Spa, ne voulut pas quitter cette +gracieuse ville champêtre sans lui laisser un calembour; +il partit en disant:--Je m'en vais de <i>ce pas</i>.</p> + +<h4>STYLE</h4> + +<p>«Gallophile de tout temps, mon coeur est sans fard +et mon âme est sans-culotte.»</p> + +<p>C'était avec des phrases aussi barbares, aussi ridicules +et aussi ineptes que le Prussien Anacharsis +Clootz, collègues et consorts se prétendaient des patriotes +exclusifs.</p> + +<p>«Petit pape, petit papelin, vous êtes un âne, un +ânon; allez doucement, il fait glacé, vous vous rompriez +les jambes, et on dirait: que diable est-ce ceci? +Le petit ânon de papelin est estropié, un âne sait +qu'il est un âne, une pierre sait qu'elle est une pierre; +mais ces petits ânons de papes ne savent pas qu'ils +sont ânons.»</p> + +<p>Tel était le style dans lequel Luther écrivait au +pape Léon X, le restaurateur des arts et des lettres.</p> + +<p>J'admire, disait un membre d'assemblée populaire, +à propos de la force, j'admire celle de Samson qui, +avec une mâchoire d'âne, passa mille Philistins au +fil de l'épée.</p> + +<p>Dryden se trouvant un jour, après boire, avec le +duc de Buckingham, le comte de Rochester et le lord +Dorset, la conversation vint à tomber sur la langue +anglaise, sur l'harmonie du nombre, sur l'élégance +du style, sorte de mérite auquel chacun des trois seigneurs +prétendait exclusivement et sans partage. On +discute, on s'échauffe, on convient enfin d'en venir à +la preuve, et de prendre un juge. Ce juge fut Dryden. +La preuve consista à écrire, isolément et sans désemparer, +sur le premier sujet venu, et de mettre les trois +thèmes sous le chandelier. On se met à l'ouvrage... Le +duc et le comte font des efforts de génie. Le lord Dorset +trace négligemment quelques lignes. Quand chacun +eut fini et placé son chef-d'oeuvre sous le chandelier, +Dryden procède à l'examen. Dès qu'il eut achevé la +lecture des trois pièces: «Messieurs, dit-il au duc de +Buckingham et au comte de Rochester, votre style m'a +plu, mais celui du lord m'a ravi. Écoutez; c'est vous +qu'à présent je fais juges.» Dryden lit: «Au premier +de mai prochain (fixe) je paierai à John Dryden, ou +à son ordre, la somme de cinq cents livres sterling, +valeur reçue; 15 avril 1686. Signé Dorset.» Après +avoir entendu ces expressions, Rochester et Buckingham +ne purent disconvenir que ce style ne l'emportât +sur tout autre.</p> + +<p>Nous empruntons à la <i>Gazette des Tribunaux</i> un +modèle du style soldat:</p> + +<p>Bourjot, bijoutier jeune France, est assis sur les bancs +de la police correctionnelle (7e chambre), et Combes, +soldat du centre, s'avance au pied du tribunal pour +déposer contre lui; il se met au port d'armes, adresse +un petit sourire d'amitié au prévenu, et attend que +M. le président l'interroge.</p> + +<p><span class="sc">M. le président.</span>--Voyons... que savez-vous sur +les faits de la plainte?</p> + +<p><span class="sc">Combes.</span>--Je sais que Bourjot est un bon enfant... +là... mais un bon enfant... Il avait seulement un peu +siroté ce jour-là... ça peut arriver à tout le monde...</p> + +<p><span class="sc">M. le président.</span>--Bourjot est accusé d'avoir +frappé un agent de la force publique dans l'exercice +de ses fonctions...</p> + +<p><span class="sc">Le témoin.</span>--C'est moi qu'étais dans l'exercice de +ma faction.</p> + +<p><span class="sc">M. le président.</span>--Expliquez-vous.</p> + +<p><span class="sc">Le témoin.</span>--Voilà, mon colonel... Je m'embêtais +le 1er janvier au poste du canal Saint-Martin, poste +peu récréatif au point de vue du vent qui vous coupe +la figure et des particuliers qui descendent de la barrière +en faisant des zigzags et en nécessitant par leurs +cris et autres déportements l'intervention du caporal +et de la patrouille... J'étais donc là à murmurer crânement, +je puis le dire, et à trouver que le coquin de +sort m'envoyait de fichues étrennes, lorsqu'un cafetier +tout effarouché vient nous dire qu'un Bédouin mettait +son établissement sens dessus dessous.</p> + +<p>Nous courons au pas de charge à l'endroit susdit, +moi, le petit Normand et Briquet, mon voisin de lit... +Qué que nous voyons?... Bourjot, le criminel ci-inclus... +il voulait empêcher, à lui tout seul, plusieurs +autres citoyens de pincer leur partie de carambolage +et faisait la garde autour du billard avec une queue à +procédé sur les épaules... Il avait bu plus d'une bouteille +et paraissait légèrement ému... Nous le sommons +de débarrasser le tapis vert... il nous envoie promener... +nous le sommons de nous suivre au poste... +il nous envoie derechef là où vous savez... Alors +nous l'empoignons... il se révolutionne et fait pour +5 francs 75 centimes de casse qu'il paie incontinent +avec un pourboire pour la fille... En voilà un bon +garçon!...</p> + +<p><span class="sc">M. le président.</span>--Mais les coups que vous auriez +reçus?...</p> + +<p><span class="sc">Le témoin.</span>--Ça va venir... je ne suis pas pressé. +(On rit.) Pour lors, nous l'insérons au violon. Mais, +avant d'y entrer, il se tourne comme ça vers moi... +je le tenais par le bras gauche... et il me dit: «Vous, +si jamais je vous rencontre derrière un mur, je vous +décorerai avec une pomme de terre.» (Hilarité.) Il +faut lui pardonner... c'est le vin à douze qui parlait +pour lui. C'est un fameux bon garçon, allez!</p> + +<p><span class="sc">M. le président.</span>--Mais arrivez donc au fait +principal.</p> + +<p><span class="sc">Le témoin.</span>--J'y arrive du pied gauche. Pour lors +le caporal me plante de faction. J'étais tranquillement +à flâner en long et en large, quand voilà +Bourjot qui sort du corps de garde. L'autorité compétente +l'envoyait dehors pour cuver son liquide. Il +s'approche de moi, me passe la jambe, et me voilà +tout de mon long par terre, avec mon fusil entre les +jambes et mon schako derrière les épaules en guise +d'oreiller. Bourjot aurait pu me repasser quelques +taloches pendant que j'étais dans cette position humiliante +et peu militaire. Mais bah! il filait son noeud à +toute jambes; c'est un si bon garçon!</p> + +<p><span class="sc">M. le président.</span>--Vous êtes bien sûr qu'il ne +vous a pas porté de coups?</p> + +<p><span class="sc">Le témoin.</span>--Pas le moindre. Un simple billet de +parterre. Faites-lui bonne mesure, mon colonel... +vrai, c'est un bon garçon.</p> + +<p>Le tribunal, prenant en considération les bons antécédents +de Bourjot et l'état d'ivresse dans lequel +il se trouvait, ne le condamne qu'à 15 francs d'amende.</p> + +<h4>SUIVRE</h4> + +<p>On propose en société l'énigme que voici:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Je ne suis pas ce que je suis;</p> +<p class="i20">Car si j'étais ce que je suis,</p> +<p class="i20">Je ne serais pas ce que je suis.</p> +</div></div> + +<p>Solution: c'est un valet, qui n'est pas le maître +qu'il suit; car s'il était le maître qu'il suit, il ne serait +pas le valet.</p> + +<h4>SUJET</h4> + +<p>Marquis, disait un jour Louis XVI au marquis de +Bièvre, vous qui faites des calembours sur tout, faites-en +un sur moi.--Sire, lui répondit le marquis, vous +n'êtes pas un sujet.</p> + +<h4>SUR</h4> + +<p>Va mettre ma montre sur l'horloge de l'hôtel de +ville, dit M. Duval.--Et Jocrisse s'en va porter la +montre au haut du clocher.</p> + +<p>Un pâtissier, dont un poëte avait exalté la pâtisserie +dans un ouvrage en vers, crut devoir reconnaître cette +honnêteté en lui faisant cadeau d'un pâté. Le poëte, +ayant remarqué que la feuille de papier qui couvrait +le fond de ce pâté faisait partie de sa production, en +fit de vifs reproches à son protégé.</p> + +<p>--Qu'avez-vous à me reprocher? lui dit celui-ci; +nous sommes maintenant à deux de jeu; vous avez +fait des vers sur mes pâtés, et moi j'ai fait des pâtés +sur vos vers.</p> + +<h4>SURE</h4> + +<p>Danière disait que la rue la plus sûre de Paris est +la rue de l'Oseille.</p> + +<h4>SUSPECT</h4> + +<p>Ce fut à l'occasion de la désignation des suspects +qu'un plaisant enfermé au Luxembourg, au moment +où Chaumette y fut lui-même conduit à son tour par +ordre du comité de salut public, dit en allant à sa +rencontre: «Citoyen, je suis suspect, tu es suspect, +il est suspect (en montrant un des prisonniers), nous +sommes suspects, vous êtes suspects, ils sont suspects.» +Puis tournant le dos au nouvel arrivé, il le +laissa consterné de son sort, et honteux de se trouver +au milieu de ses victimes.</p> + +<p>Un plaisant, qui voulait partir avec l'aéronaute +Blanchard, s'en fut demander à sa municipalité un +passe-port pour la banlieue de la terre: la municipalité +assembla le conseil de la commune, et le pétitionnaire +fut refusé comme suspect d'émigration.</p> + +<br> + +<h2>T</h2> + +<p>On conte, dans le pays wallon, cette petite anecdote +sur deux magistrats, nommés l'un M. Baude, et +l'autre M. Buchet.--Baude est allé chez M. Buchet et +y a pris le T.--Eh bien! dit l'interlocuteur, qui entend +le thé, que s'ensuit-il?--Qu'ils se sont quittés +remis à leur place, Baude devenu Baudet, et Buchet +devenu Buche.</p> + +<p>La correspondance la plus laconique que l'on ait +connue se composait d'un (?), voulant dire: Y a-t-il +quelque nouvelle? et d'un (0), répondant: Il n'y en a +pas. Un épicier de Hottingham (Flandres) vient de faire +du laconisme plus remarquable encore. Il a peint sur +sa vitrine deux grands T, l'un peint en noir, l'autre +en vert, pour indiquer qu'il vend du thé noir et du +thé vert.</p> + +<h4>TABLE</h4> + +<p>On sait que la loi des Douze Tables, publiée à Rome +sur douze tables de pierre, par les décemvirs, est devenue +depuis le fondement de la jurisprudence romaine. +Elle a donné lieu au quatrain suivant:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Un avocat, dont les destins</p> +<p class="i20">Font un juge des plus notables,</p> +<p class="i20">Croit que la loi des Douze Tables</p> +<p class="i20">N'était que pour les grands festins.</p> +</div></div> + +<h4>TAILLES</h4> + +<p>Ce nom, qu'on donnait autrefois aux impôts, a produit +un jeu de mots.</p> + +<p>Une princesse du sang, sous ce qu'on appelle l'ancien +régime, passait par une ville de province; toutes les +corporations s'empressèrent de l'aller complimenter. +Celle de l'élection n'était représentée que par trois +membres.--Madame, lui dit le chef de cette juridiction, +nous sommes dans ce moment une preuve sensible +de cette vérité sacrée: Beaucoup d'appelés et peu +d'élus. Notre devoir est de prononcer sur le fait des +tailles, et nous certifierons à tout le monde que la +vôtre est des plus élégantes.</p> + +<h4>TAILLEUR</h4> + +<p>On disait à un homme distrait:--Votre esprit fait +des culottes?--Pourquoi?--Parce qu'il est ailleurs.</p> + +<h4>TAMBOUR</h4> + +<p>Quels sont les châles qui font le plus de bruit?</p> + +<p>--Ceux qui <i>sont en bourre</i>.</p> + +<h4>TA MÈRE</h4> + +<p>Belval, mangeant une salade de chicorée, appela sa +cuisinière et lui dit:--Es-tu donc la fille de cette salade-là?--Comment, +Monsieur?--C'est qu'elle <i>est +amère</i>.</p> + +<h4>TEINTURE</h4> + +<p>--Je voudrais, disait une dame, que mon fils sût un +peu de tout, qu'il eût une teinture des langues latine +et grecque, une teinture d'histoire et de géographie, +une teinture des mathématiques, une teinture du dessin, +etc.; mais je ne sais pas pour cela quel maître lui +donner.</p> + +<p>--Donnez-lui, Madame, un maître teinturier.</p> + +<h4>TENDRE</h4> + +<p class="mid">UNE PETITE SCÈNE DE TRIBUNAL</p> + +<p>D. Vous ne niez pas avoir mendié?--R. Si j'avais +reçu de la nature la faveur de l'éloquence...</p> + +<p>D. Répondez par oui ou par non.--R. Je réponds +par oui; mais n'ayant pas reçu la faveur de l'éloquence, +je vous demande la grâce de vous faire lecture de mon +excuse écrite. C'est la description en raccourci de ma +vie, en douze vers de poésie, pas un de plus, pas un +de moins. (Il lit.)</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Le sort pour moi fut un bourreau;</p> +<p class="i20">Conscrit de l'an mil huit cent seize,</p> +<p class="i20">J'ai tiré le numéro treize</p> +<p class="i20">Qui m'envoya sous le drapeau.</p> +<p class="i20">Sorti des rangs, sans sou ni maille,</p> +<p class="i20">On me traita de rien qui vaille;</p> +<p class="i20">Ce qui fait qu'un jour, ayant faim,</p> +<p class="i20">J'ai mendié sur mon chemin.</p> +<p class="i20">Condamné, j'ai subi ma peine,</p> +<p class="i20">Mais de mon sort qu'on se souvienne!</p> +<p class="i20">Si l'on m'avait tendu la main,</p> +<p class="i20">Je n'aurais pas tendu la mienne.</p> +</div></div> + +<h4>TÊTE-A-TÊTE</h4> + +<p>Quelqu'un entrant chez un gourmand qui dînait +seul devant une tête de veau, lui dit:--Pardon, Monsieur, +je ne croyais pas que vous fussiez en tête-à-tête.</p> + +<p>Armand Gouffé a mis ce mot en vers:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">N'avez-vous pas connu Beauveau?</p> +<p class="i20">C'était un gourmand respectable.</p> +<p class="i20">Un jour il était seul à table</p> +<p class="i20">Devant une tête de veau:</p> +<p class="i20">On annonce madame Hortense:</p> +<p class="i20">«Ah! parbleu, je suis occupé,</p> +<p class="i20">Dit Beauveau d'un air d'importance;</p> +<p class="i20">Revenez quand j'aurai soupé.</p> +<p class="i20">--Je vois pourquoi monsieur tempête,</p> +<p class="i20">Reprit la dame sans bouger;</p> +<p class="i20">Il est fâcheux de déranger</p> +<p class="i20">Un aussi joli tête-à-tête.»</p> +</div></div> + +<h4>TÉTER</h4> + +<p>--J'ai-t-été à Paris, j'ai-t-été à Bordeaux, j'ai-t-été +à Bruxelles, disait un parleur incorrect.--Vous avez +<i>tété</i> une truie, lui répondit quelqu'un, car vous parlez +comme un cochon.</p> + +<h4>THÉ</h4> + +<p>Quelle est la lettre la plus anglaise?--Le <i>T</i>.</p> + +<p>Un membre de l'Université, d'une excessive rigidité +sur les formes grammaticales, était venu passer quelques +jours de vacances à Paris. Avant de quitter son +hôtel, il vérifiait sa note. La dame du lieu, qui le suivait +de l'oeil dans sa lecture, le voit tout à coup soubresauter.--Y +aurait-il une erreur, Monsieur?--Comment, +Madame, mais une erreur très-grave!... Je +lis ici, pour mon déjeuner, une omelette avec un seul T. +Mais il en faut deux!...--C'est facile à rectifier, Monsieur. +Et la maîtresse d'hôtel écrit en surcharge: Une +omelette et deux thés.</p> + +<p>Un marchand de thé, à Paris, avait, entre autres +annonces, sur sa vitrine, celle-ci, écrite comme les +autres en lettres d'or sur une caisse de thé de Chine: +<i>Thé impérial</i>. En 1814, un agent de la maladroite +police des Bourbons vint lui dire:--Otez cela; il n'y +a plus d'empire.--Pardon, Monsieur, dit le marchand, +il y a encore l'empire de la Chine, et le thé impérial.</p> + +<p>Il fallut toutefois ôter l'annonce.</p> + +<h4>THERMOMÈTRE</h4> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">On ne nous parle que de mètre,</p> +<p class="i20">Chaque femme frémit du mot.</p> +<p class="i20">J'entends prononcer kilomètre,</p> +<p class="i20">Et reste ébahi comme un sot.</p> +<p class="i20">Le terme de myriamètres</p> +<p class="i20">Me trouve souvent en défaut;</p> +<p class="i20">Pour nous entendre comme il faut,</p> +<p class="i20">Si nous mettions un terme aux mètres!</p> +</div></div> + +<p>Dans la parodie de <i>Cricri et ses mitrons</i>, plaisante +imitation du <i>Henri III</i> de M. Dumas, on assomme un +personnage, en menaçant de le traiter comme Léonidas +jadis aux Thermopyles.</p> + +<p>Le pauvre diable demanda grâce, en criant:--Un +<i>terme aux piles</i>.</p> + +<h4>TIRE TON BAS</h4> + +<p>Un poëte, récitant à son jeune fils qui allait se +coucher un poëme qui commençait ainsi:</p> + +<p class="mid">Tyr tomba...</p> + +<p>l'enfant s'empressa de se déchausser.</p> + +<h4>TITRES</h4> + +<p>Louis XIV avait une si haute idée du jugement de +madame de Maintenon, qu'il lui disait un jour: «On +appelle les papes Votre Sainteté; les rois, Votre Majesté; +les princes, Votre Sérénité; pour vous, Madame, +on devrait vous appeler Votre Solidité.»</p> + +<h4>TOMBÉ</h4> + +<p>M. de L... se trouvait dernièrement dans une petite +réunion de membres de l'ex-Constituante.</p> + +<p>Pendant la soirée, il s'approcha d'un groupe de +dames dont la conversation paraissait très-animée.</p> + +<p>--Tenez, Monsieur, dit Mme de C..., justement nous +parlions de vous!</p> + +<p>--Vraiment! fit le célèbre membre de feu le gouvernement +provisoire, je suis bien tombé!</p> + +<p>--C'est ce que nous disions, répondit Mme de C...</p> + +<h4>TOM JONES</h4> + +<p>Dans le vaudeville de <i>M. Vautour</i>, Brunet se trouvait +tout de jaune habillé. S'étant caché dans une +bibliothèque, il dit en sortant:--Je devais avoir là +dedans l'air d'un <i>tome jaune</i>.</p> + +<h4>TONNERRE</h4> + +<p>La voiture de M. de Pontchartrain se rencontra dans +un passage étroit avec celle de M. de Clermont-Tonnerre. +Le cocher du premier, voulant faire reculer l'autre, crut +lui imposer en nommant le seigneur qu'il conduisait. +Le second répliqua:--Je me moque de ton <i>pont</i>, de +ton <i>char</i> et de ton <i>train</i>; je mène le Tonnerre, et c'est +à toi de reculer.</p> + +<h4>TOUCHER</h4> + +<p>Une demoiselle Lange, qui avait obtenu un logement +au château de Versailles, sachant que Charles X y +arrivait, se mit à sa fenêtre avec une pétition qu'elle +avait préparée, et quand le roi passa elle lança sa pétition +qui tomba sur le visage de Charles X. Le prince +dit en riant: «On ne dira pas que cette pétition ne m'a +pas touché!» Et il accorda une pension de 1,000 fr.</p> + +<h4>TOUR</h4> + +<p>Quels sont les plus gros pruneaux?</p> + +<p>--Les pruneaux d'une lieue et demie de Tours.</p> + +<h4>TOURNEBROCHE</h4> + +<p>Un homme qui était fort pour la bombance, étant à +dîner dans un endroit où il se trouva beaucoup de +musiciens, on loua l'excellence des instruments; et +chacun, suivant son goût, estima le piano, le violon, +la flûte, etc. Au moment où on demanda l'avis du parasite:--Ah! +Messieurs, dit-il, le bel instrument +que le tournebroche!</p> + +<h4>TOUSSAINT</h4> + +<p>Dans le temps du premier empire, on avait repris +les usages anciens de payer à la Saint-Jean, à la Saint-Martin, +à la Saint-Pierre, à la Saint-Laurent, etc. Un +homme de mauvaise foi, ayant acheté un cheval à un +paysan, lui fit son billet à la Saint-Négo et s'en alla.</p> + +<p>Le paysan, le lendemain, montra son billet à ses +voisins, leur demandant quel jour ce saint arrivait. +Mais personne ne le trouvait dans le calendrier. Le +bonhomme se rendit chez son acheteur qui lui rit au +nez, en disant je vous paierai au jour dit; cherchez-le.</p> + +<p>C'était en Champagne, dans le canton de Méry. L'attrapé +alla trouver le juge de paix, qui cita le créateur +du billet. Devant sa réponse qu'il paierait au jour de +Saint-Négo, le cas était embarrassant. Mais le juge +s'en tira.--Vous êtes un coquin, dit-il à l'acheteur; +mais vous êtes pris, car il y a un jour où tous les +saints sont fêtés. Et il dut payer le jour de la Toussaint.</p> + +<h4>TOUSSANT</h4> + +<p>On a dit que les gens les plus enrhumés de Paris +sont les cochers de fiacre, parce qu'ils parcourent la +ville en tous sens.</p> + +<h4>TOUT VERT</h4> + +<p>De quelle couleur est un coffre-fort quand on le vide?--Il +<i>est ouvert</i>.</p> + +<h4>TRADUCTION</h4> + +<p>Un enfant qui traduisait du latin de septième, en +vacances et sous l'aide de sa mère, était embarrassé +devant ces mots: <i>Marcus Tullius Cicero</i>.</p> + +<p>--Je ne les trouve pas dans mon dictionnaire, +disait-il en s'adressant à la maman.</p> + +<p>--Mon enfant, disait-elle, <i>Marcus Tullius Cicero</i>... +<i>Marcus</i>, c'est un marchand; <i>Tullius</i> doit signifier de +la toile... Tu peux mettre: Marchand de toile cirée; +et je serais bien surprise si je me trompais.</p> + +<p>Un autre enfant, qui se faisait remarquer par une +audace intrépide, traduisit ces deux vers de Lucain:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i18">Phoenices primi, si famæ creditur, ausi</p> +<p class="i18">Mansuram rudibus vocem signare figuris.</p> +</div></div> + +<p>par cette phrase narrative:</p> + +<p>Les phénix, dans la primeur, ont si faim qu'on croit +qu'ils osent manger les rudiments, les volumes, le +signet et les figures.</p> + +<p>Lorsque Voltaire donna sa tragédie d'<i>Oreste</i>, on +avait mis sur les billets du parterre, on ne sait trop +pourquoi, les lettres initiales de ce vers d'Horace:</p> + +<p class="mid">Omne Tulit Punctum Qui Miscuit Utile Dulci.</p> + +<p>O. T. P. Q. M. U. D., ainsi qu'elles se trouvaient +écrites dans ce temps sur la toile du théâtre. Les faiseurs +de calembours du temps interprétèrent ces initiales +par: Oreste, Tragédie Pitoyable Que Monsieur Voltaire +Donne.</p> + +<p>Après l'avènement de George Ier au trône, le maire +de Leicester qui avait toujours supposé que <i>anno +Domini</i> signifiait la reine Anne, ayant entendu son +secrétaire lire une ordonnance municipale, s'écria +avec chaleur, lorsqu'il en fut à <i>anno Domini</i>.--Pourquoi +ne dites-vous pas <i>Georgio Domini</i>? vous ne savez +jamais ce que vous faites!</p> + +<h4>TRAIN</h4> + +<p>Un farceur fit un jour marcher le poste du quai +Saint-Bernard, en lui annonçant qu'il y avait beaucoup +de train au bout du pont. C'étaient des trains +de bois.</p> + +<h4>TRAVAILLER</h4> + +<p>Du temps de Cromwel, il fut rendu un décret qui +défendait de brasser de la bière le samedi, de peur +qu'elle ne <i>travaillât</i> le dimanche.</p> + +<h4>TREIZE</h4> + +<p>Une femme, qui avait eu déjà douze enfants, venait +d'accoucher encore. Un plaisant dit au mari:--A +présent vous voilà <i>à votre aise</i>.</p> + +<h4>TRÈS-ÉTROIT</h4> + +<p>--J'ai un habit qui me gêne.--C'est un habit seize.--Comment?--C'est +qu'il est <i>treize et trois</i> et que +treize et trois font seize.</p> + +<h4>TRIBUN</h4> + +<p>Dans le temps du tribunat, on proposait à Brunet +de se mettre sur les rangs pour être membre du tribunat.--Je +ne veux pas être tribun, répondit-il, +parce que ma femme serait tribune, ce qui ne lui +plairait pas, et que nos enfants seraient de petits tribunaux, +ce qui fait trop de bruit.</p> + +<h4>TRIOLET</h4> + +<p>Un plaisant voyant passer trois coquettes, à la fois +laides et prétentieuses, disait que c'était un trio laid.</p> + +<h4>TROUVER</h4> + +<p>On lisait il y a quelques temps dans les <i>Petites +Affiches</i>, ordinairement si sérieuses, cette espèce de +facétie:--Un particulier très-connu désire trouver +une somme de cinquante mille francs, n'importe en +quel endroit; il consentira à la partager avec la personne +qui la lui indiquera.</p> + +<p>Le lord Colburn avait un domestique aussi expert +en balourdises qu'il en fut jamais. Milord l'ayant +chargé un jour de porter à un magistrat de sa connaissance +un présent, celui-ci, en retour, lui envoya +une demi-douzaine de perdrix vivantes, avec une +lettre. Ces perdrix s'étant débattues en route, il n'eut +rien de plus empressé que de lever le couvercle du +panier, mais aussitôt elles prirent leur volée. Tant +mieux, s'écria le rustre, que le diable les emporte! +Mais à son retour à la maison, son maître ayant décacheté +la missive.--Oh! oh! dit-il, je trouve dans +la lettre six perdrix.--Est-il bien vrai? s'écria John. +Je suis charmé, mon maître, que vous les trouviez +dans la lettre, car elles se sont toutes envolées du +panier.</p> + +<p>Le vicomte de S... aborda un jour M. de Vaines en ces +termes:--Est-il vrai, Monsieur, que dans une maison +où l'on avait eu la bonté de me trouver de l'esprit, +vous avez dit que je n'en avais point?--Il n'y a pas +un mot de vrai, répondit M. de Vaines, je n'ai jamais +été dans aucune maison où l'on vous trouvât de +l'esprit.</p> + +<p>Ajoutons ici un petit conte en vers de Capelle:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Dans un moment de grand orage,</p> +<p class="i20">Sur un frêle et mince bateau,</p> +<p class="i20">Un petit-maître, passant l'eau,</p> +<p class="i20">Perdait déjà tout son courage.</p> +<p class="i20">«Mon ami, dit-il au passeur,</p> +<p class="i20">Assurément je n'ai pas peur;</p> +<p class="i20">Mais avez-vous la connaissance</p> +<p class="i20">Qu'en une telle circonstance</p> +<p class="i20">De ce vent le souffle importun</p> +<p class="i20">Vous ait fait perdre ici quelqu'un?</p> +<p class="i20">--Du tout. La semaine dernière,</p> +<p class="i20">Nicolas, mon cousin germain.</p> +<p class="i20">S'est laissé choir dans la rivière;</p> +<p class="i20">Je l'ons trouvé le lendemain.»</p> +</div></div> + +<h4>TRUITES</h4> + +<p>En 1826, on licencia la 5e compagnie des gardes du +corps, qui portait, suivant l'usage, le nom de son capitaine, +le duc de Rivière. Lorsqu'on vint lire l'ordonnance +aux gardes assemblés, l'un d'entre eux s'écria:--La +compagnie de Rivière est la compagnie détruite!</p> + +<h4>TULLE</h4> + +<p>Quelle est la population la plus légère en France?--La +population de Tulle.</p> + +<h4>TURCOMAN</h4> + +<p>Dans une diligence, un bon bourgeois demandait à +un commis voyageur, qui avait l'air de tout savoir, +ce que c'était qu'un Turcoman?--Un Turc au Mans, +répondit le farceur, c'est un Turc qui se trouve pour +l'instant au chef-lieu du département de la Sarthe.</p> +<br> + +<h2>U</h2> + +<p>Pourquoi appelle-t-on l'U une lettre cérémonieuse?--Parce +qu'il est toujours <i>après T</i>.</p> + +<p>Quelles sont les lettres les plus riches?--Les lettres +U P.</p> + +<h4>UNE VOIX</h4> + +<p>Ce mot a plus d'un sens. Lorsque la France acclamait +Napoléon III, on a dit qu'il n'y avait là qu'une +voix chez nous; l'expression alors voulait dire l'unanimité. +Lorsque le duc d'Orléans Philippe-Égalité voulut +se faire nommer maire de Paris, il n'eut pour lui, +dans sa section, qu'un seul votant. On afficha ces deux +vers à sa porte:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i18">Saluez, citoyens, le rival de nos rois,</p> +<p class="i18">La ville de Paris n'a pour lui qu'une voix.</p> +</div></div> + +<p>Ce jeu de mots a été répété à propos de quelques +aspirants au fauteuil académique.</p> + +<h4>UNIVERS</h4> + +<p>La reine, chaussée de mules en satin vert uni, demanda +au marquis de Bièvre un calembour.--Madame, +dit-il, l'<i>uni vert</i> est à vos pieds.</p> + +<h4>UNIVERSITÉ</h4> + +<p>Un écrivain de quelque mérite, mais qui n'a pas pu +être reçu bachelier, a cependant publié des livres qui +ont fait grand bruit; et comme il produit aussi des +calembours, il a mis au-dessous de son portrait ces +deux vers:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i18">Quoique je ne sois pas de l'Université,</p> +<p class="i18">On me voit néanmoins dans l'univers cité.</p> +</div></div> + +<h4>UN NEZ</h4> + +<p>Quelle est la lettre qui peut se servir aux lunettes?--C'est +un <i>e</i>.</p> + +<h4>USAGE</h4> + +<p>Sous la dernière république, le <i>Corsaire</i>, qui en +combattait les tendances, a donné ce spirituel article:</p> + +<p>«Un cordonnier communiste lisait une feuille rouge +lorsqu'une de ses pratiques entra.</p> + +<p>--Que lisez-vous donc, monsieur Crépin? dit le +chaland.</p> + +<p>--Je lis le <i>Socialiste</i>. En voici un qui est l'ami du +peuple! Écoutez-moi ça:</p> + +<p>--Usage pour usage, propriété pour propriété, voilà +l'égal échange. En d'autres termes, pour que l'échange +soit égal, il faudrait que le locataire reprît son argent +quand le propriétaire reprendrait sa maison; car +alors le propriétaire aurait eu l'usage de l'argent du +locataire, et le locataire l'usage de la maison du propriétaire; +mais quand l'un reprendrait la propriété +de sa maison, l'autre reprendrait la propriété de son +argent: l'échange serait égal.</p> + +<p>Voilà qui n'est pas bête, hein! dit le cordonnier en +terminant.</p> + +<p>--Non, répondit sa pratique, et cela me fait naître +une idée. Il y a trois mois, je vous ai acheté et payé +une paire de bottes: vous avez fait usage de mon argent, +j'ai fait usage de vos bottes. Rendez-moi mon +argent, je vais vous rendre vos bottes: en vertu de +l'égal échange, nous serons quittes à ce compte.»</p> + +<h4>USÉE</h4> + +<p>--Oh! je suis bien rusée, disait une femme au marquis +de Bièvre.--Ah! Madame, c'est sûrement un R +que vous vous donnez.</p> +<br> +<h2>V</h2> + +<h4>VALET</h4> + +<p>Instrument de menuisier. On disait d'un de ces utiles +industriels qu'il était dans la misère et qu'il gardait +dix valets à son service.</p> + +<h4>VAN</h4> + +<p>En entendant citer un jeune homme qui avait vingt-neuf +ans et dont le père n'en avait que cinq, un bon +bourgeois ouvrait d'énormes oreilles.</p> + +<p>--Comment cela se peut-il?</p> + +<p>--Rien de plus simple. Ce sont deux vaniers; le +fils a vingt-neuf vans tout faits, le père, en ce moment, +n'en a que cinq, ayant vendu les autres.</p> + +<h4>VAUDEVILLE</h4> + +<p>Qu'y a-t-il de poétique dans la cuisine?--Le <i>veau +de ville</i>.</p> + +<p>Qu'est-ce que font les vaches à Paris?--Elles font +des <i>veaux de ville</i>.</p> + +<h4>VAUT</h4> + +<p>Quel est l'équivalent de <i>Dominus</i>?--C'est <i>biscum</i>.--Comment +cela?--C'est qu'on dit souvent <i>Dominus +vobiscum</i>.</p> + +<h4>VENIR</h4> + +<p>Papa Doliban, dit d'Asnières, dans la comédie du +<i>Sourd</i>, j'avais semé des pommes de terre dans mon +jardin, savez-vous ce qui y est venu?--Parbleu! répond +Doliban, voilà une belle question! il y est venu +des pommes de terre.--Point du tout: il est venu un +cochon qui a mangé mes semences.</p> + +<p>Mais cette facétie est pillée d'un souvenir historique.</p> + +<p>Louis XIV faisant la revue de ses gardes françaises +et suisses dans la plaine d'Ouille, un paysan, qui avait +semé des pois dans son champ, le trouva ce jour-là +couvert d'un bataillon de Suisses, qui foulaient aux +pieds ses pois. Il se mit aussitôt à crier:--Miracle! +Miracle!</p> + +<p>--Qu'avez-vous, bonhomme, lui dit un officier, à +crier miracle?</p> + +<p>Le paysan ne répondit qu'en continuant à crier +miracle jusqu'à ce qu'il pût être entendu de Louis XIV, +qui le fit approcher et lui demanda pourquoi il criait +miracle.--C'est, dit-il, Sire, que j'avais semé des +pois sur ce terrain, et qu'il y est venu des Suisses.</p> + +<p>Cette saillie fit rire le roi, qui le fit généreusement +dédommager.</p> + +<h4>VENT</h4> + +<p>N'y avait-il pas au baptême du prince impérial une +voiture plus légère que celle du nonce?--Oui, celle +qui était devant.</p> + +<h4>VERRE</h4> + +<p>Maynard, fils d'un gentilhomme verrier, était fier +de sa noblesse. Saint-Amand lui fit cette épigramme:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Votre noblesse est mince,</p> +<p class="i20">Et ce n'est pas d'un prince,</p> +<p class="i20">Daphnis, que vous sortez.</p> +<p class="i20">Gentilhomme de verre,</p> +<p class="i20">Si vous tombez à terre,</p> +<p class="i20">Adieu vos qualités.</p> +</div></div> + +<p>Pourquoi les vitriers sont-ils si chers aux cabaretiers?--Parce +qu'ils ont toujours le verre à la main?</p> + +<p>Un joyeux compère à qui on citait ce vers de +Boileau:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Le vers le mieux rempli, la plus noble pensée</p> +<p class="i16">Ne peut plaire à l'esprit quand l'oreille est blessée.</p> +</div></div> + +<p>répliqua:--Pour moi, le verre le mieux rempli me +plaît toujours.</p> + +<h4>VERS</h4> + +<p>Un plaisant, au risque de dire un mauvais mot, prétendait +que les vers du fromage n'étaient autre chose +que des vers à sa louange, parce qu'ils ne s'y viennent +loger que quand il est de bonne qualité.</p> + +<p class="mid">QUELQUES VERS SINGULIERS.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Dans un broc qui, pour l'ordinaire,</p> +<p class="i20">A Grégoire servait de verre,</p> +<p class="i20">Une souris un jour tomba</p> +<p class="i20">Et se noya, la chose est claire.</p> +<p class="i20">L'ivrogne, en buvant, la goba;</p> +<p class="i20">Mais en traversant l'oesophage,</p> +<p class="i20">Elle fit sentir son passage,</p> +<p class="i20">Et Grégoire en toussant dit: «Hein!</p> +<p class="i20">Ma petite femme, ma mie,</p> +<p class="i20">Mettez en perce, je vous prie,</p> +<p class="i20">Un nouveau tonneau; car ce vin</p> +<p class="i20">Est arrivé près de sa lie,</p> +<p class="i20">Je viens d'avaler un pépin.»</p> +<br> +<p class="i30"> <span class="sc">Banset.</span></p> +</div></div> + +<p class="mid">VIE DE M. CLÉMENT.</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Il se lève tranquillement,</p> +<p class="i20">Déjeune raisonnablement;</p> +<p class="i20">Dans le Luxembourg fréquemment</p> +<p class="i20">Promène son désoeuvrement;</p> +<p class="i20">Lit la gazette exactement;</p> +<p class="i20">Quand il a dîné largement,</p> +<p class="i20">Chez sa voisine Clidament</p> +<p class="i20">S'en va causer très-longuement;</p> +<p class="i20">Revient souper légèrement,</p> +<p class="i20">Rentre dans son appartement,</p> +<p class="i20">Dit son pater dévotement,</p> +<p class="i20">Se déshabille lentement,</p> +<p class="i20">Se met au lit tout doucement,</p> +<p class="i20">Et dort bientôt profondément.</p> +<p class="i20">Ah! le pauvre monsieur Clément!</p> +</div></div> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Autrefois un Romain s'en vint, fort affligé,</p> +<p class="i16">Raconter à Caton que, la nuit précédente,</p> +<p class="i16">Son soulier des souris avait été rongé,</p> +<p class="i16">Chose qui lui semblait tout à fait effrayante.</p> +<p class="i16">«Mon ami, dit Caton, reprenez vos esprits,</p> +<p class="i16">Cet accident en soi n'a rien d'épouvantable;</p> +<p class="i16">Mais si votre soulier eût rongé les souris,</p> +<p class="i16">Ç'aurait été, sans doute, un prodige effroyable.»</p> +</div></div> + +<p>Il y avait, sous la régence, à Saint-Eustache, un +suisse nommé Mardoche. Il mourut en 1727. Son ami +Bombel, petit marchand mercier, voulut lui faire une +épitaphe, et il pensa que, pour plus de dignité, elle +devait être en vers. Il consulta un écrivain public +des Halles, qu'il jugeait capable de l'initier à l'art +poétique. Celui-ci, ne voulant pas le fatiguer d'un +travail pénible, ne lui donna qu'une règle: c'est qu'il +fallait que chaque vers rimât avec son double et que, +pour rimer, chaque vers devait se terminer par les +trois mêmes dernières lettres.</p> + +<p>Bombel se mit à l'oeuvre et produisit l'épitaphe qui +suit, et qui a été conservée:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20"> Ci-gît mon ami Mardoche.</p> +<p class="i16">Il a voulu être enterré à Saint-Eustache.</p> +<p class="i16">Il y a porté trente-deux ans la hallebarde.</p> +<p class="i20"> Dieu lui fasse miséricorde!</p> + +<p class="i30"> <i>Par son ami</i> <span class="sc">J.-D. Bombel</span>. 1727.</p> +</div></div> + +<h4>VERT</h4> + +<p>Une dame de qualité, vieille et sèche, se trouvait à +un bal que donnait Henri IV. Elle était vêtue d'une +robe verte. Le roi la remarqua et lui dit plaisamment:--Madame, +je vois que, pour nous faire honneur, vous +avez employé le vert et le sec.</p> + +<p>Un jeune homme, qui avait dissipé en peu de temps +une fortune considérable, tomba malade et fut saigné. +Le médecin trouva le sang vert.</p> + +<p>--Il peut bien être vert, répondit le malade, car +j'ai mangé tout mon bien en <i>herbe</i>.</p> + +<h4>VETO</h4> + +<p>A Versailles, on entendit, en 1790, un orateur des +groupes dire au peuple:--Voici ce que c'est que le +veto. Imaginez-vous qu'au moment où vous mangez +votre soupe, un homme vient, de la part du roi, dire: +<i>Veto</i>, et voilà que votre soupe n'est plus à vous.</p> + +<p>C'est ainsi qu'on instruisait le peuple.</p> + +<h4>VIDER</h4> + +<p>Un dissipateur disait pour se procurer du crédit:--<i>Je +vis de mes rentes</i>. Un jour que ses créanciers le trouvèrent +ruiné, ils lui reprochèrent de les avoir trompés.--Pas +du tout, répondit-il, je vous ai toujours dit que +je <i>vidais</i> mes rentes.</p> + +<p>Un juge remettait une cause à la huitaine. L'avocat +sollicitait pour qu'elle fût entendue tout de suite.</p> + +<p>--De quoi s'agit-il donc? dit le magistrat.</p> + +<p>--Monseigneur, de six pièces de vin.</p> + +<p>--Oh! la cour, en effet, peut aisément vider cela.</p> + +<h4>VIGILANCE</h4> + +<p>Cicéron disait de Caninius Revitius, qui n'avait été +consul qu'un seul jour:--Nous avons un consul si +vigilant, qu'il n'a pas dormi une seule nuit pendant +son consulat.</p> + +<h4>VIN</h4> + +<p>Dans une chanson de M. Gerbois sur les vins, +l'annonce d'un cabaret nouveau contient ces deux +couplets:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Vin de Liège pour les enfants,</p> +<p class="i20">Vin de Meaux pour tous les artistes,</p> +<p class="i20">Bon vin de Sens pour les savants,</p> +<p class="i20">Vin d'Asnières pour les copistes.</p> +<p class="i20">Vin de Pantin pour les danseurs,</p> +<p class="i20">Pour les coquets vin de Cologne,</p> +<p class="i20">Vin de Courbevoie aux trompeurs,</p> +<p class="i20">Et vin d'Avallon pour l'ivrogne.</p> +<br> +<p class="i20">Pour les vieilles, vin de Milan;</p> +<p class="i20">Vin de Talan à nos poëtes;</p> +<p class="i20">Pour les poltrons, vin de Cachan;</p> +<p class="i20">Vin de Constance aux girouettes.</p> +<p class="i20">Bon vin de Nuits pour les voleurs;</p> +<p class="i20">Au pauvre homme, vin de Santerre,</p> +<p class="i20">Du vin de Plaisance aux rieurs;</p> +<p class="i20">Pour les braves, vin de Tonnerre.</p> +</div></div> + +<h4>VINCENT</h4> + +<p>Les paysans se proposent cette énigme: Vingt cent +mille ânes dans un pré et cent vingt dans un autre.</p> + +<p>Ce qui s'explique en écrivant: Vincent mit l'âne +dans un pré et s'en vint dans un autre.</p> + +<h4>VINGT</h4> + +<p>Savez-vous, disait quelqu'un à Désaugiers, que les +Autrichiens sont maîtres de Mâcon?--Hélas! oui; et +cela devait être.--Pourquoi?--Parce que l'ennemi a +attaqué avec des pièces de vingt-quatre, et les habitants +n'avaient que des pièces de vin pour se défendre.</p> + +<h4>VINGTIÈME</h4> + +<p>Nom d'un impôt au dernier siècle.</p> + +<p>Une veuve qui avait dix-neuf enfants, et qui n'était +pas en état de payer l'impôt annuel dû au roi, lui présenta +un placet conçu en ces termes:</p> + +<p>«Sire, j'ai donné <i>dix-neuf</i> sujets à l'État; je supplie +votre Majesté de vouloir bien m'exempter du +<i>vingtième</i>.»</p> + +<h4>VINGT SCÈNES</h4> + +<p>Si vous êtes embarrassé pour faire un vaudeville, +prenez la voiture de Saint-Maur.--Et puis?--Et +puis, vous trouverez <i>Vincennes</i> en chemin.</p> + +<p>C'est vieux. Aujourd'hui on prend le chemin de +fer.</p> + +<h4>VIVRE</h4> + +<p>Le duc d'Orléans, régent, demandait à Lagrange-Chancel, +l'auteur des <i>Philippiques</i>, pourquoi il faisait +de sa plume un instrument de scandale:--Monseigneur, +répondit celui-ci, il faut bien que je vive.--Je +n'en vois pas la nécessité, répliqua le prince.</p> + +<h4>VOIR</h4> + +<p>Beauzée, le grammairien, était malade. Un homme +qui louchait lui demanda:--Comment vous portez-vous?--Comme +vous voyez, repartit l'inexorable +savant.</p> + +<p>Un officier présentait à Henri IV un placet dans lequel +il exposait qu'ayant reçu un grand nombre de +blessures à son service, il avait besoin de ses secours. +Le roi, après avoir lu le placet, dit:--Nous verrons.--Il +ne tient qu'à vous de voir à l'instant, dit le pétitionnaire +en ouvrant son justaucorps et sa chemise, et +en montrant les cicatrices dont il était couvert.</p> + +<h4>VOITURE</h4> + +<p>Un entrepreneur de roulage envoya un de ses commis +lui acheter des lettres de voiture. Le commis entra +chez un libraire, qui lui répondit que les <i>Lettres de +Voiture</i> n'étaient plus dans le commerce, mais qu'il +pouvait lui offrir celles de madame de Sévigné.</p> + +<h4>VOIX</h4> + +<p>Le comte Molé disait d'une femme qui chantait avec +beaucoup de suavité:--C'est une voix douce comme +du lait. Quelqu'un reprit:--C'est donc la voie lactée.</p> + +<p>On demande aussi, dans le même but:--Quelle est +la voie la plus haute?--Et on répond, c'est la voie +lactée.</p> + +<p>A la fin d'un dîner où le dessert était mince, on +disait du chanteur célèbre qui le donnait:--Cet +homme fait de sa voix tout ce qu'il veut.--Qu'il nous +en fasse donc un <i>biscuit de sa voix</i>, dit un convive.</p> + +<h4>VOLER</h4> + +<p>Le baron Vollant fut un jour présenté à l'empereur +Napoléon Ier. C'était dans un bon moment.--Ah! ah! +Monsieur le baron Vollant, se prit à dire Napoléon; un +beau nom pour un ordonnateur!--Sire, répondit +gravement M. Vollant, il y a deux L à mon nom.--Eh +bien! Monsieur, c'est une raison pour mieux voler.</p> + +<p>On demandait à Alexandre Dumas:--Que pensez-vous +des communistes icariens? Il répondit:--Les +communistes icariens sont les disciples d'un certain +<i>Grec</i> qui a voulu <i>voler</i>.</p> + +<p>Un tailleur avait fait peindre au-dessus de sa porte +une paire de ciseaux armés de deux ailes déployées, +et fait écrire au bas <i>Aux ciseaux volants</i>.--Voilà, dit +un plaisant, ce que l'on peut appeler une enseigne +parlante.</p> + +<p>Dans une petite ville de Normandie, il y avait un +juge en très-mauvaise odeur, et qui passait pour le +plus grand voleur de son pays. Un jour qu'il donnait +à manger, il fit venir un traiteur et lui demanda, +entre autres mets, des canards de rivière.</p> + +<p>Le traiteur s'excusa sur ce que la saison n'était pas +encore assez avancée.</p> + +<p>--Quoi, lui dit le juge, il y a deux jours que +j'en ai vu une compagnie de deux douzaines qui volaient!</p> + +<p>--Cela se peut, Monsieur, mais vous savez que +tous ceux qui volent ne sont pas pris.</p> + +<h4>VOLTAIRE</h4> + +<p>En sortant de la représentation d'une de ses pièces +qui avait été sifflée, Piron fit le quatrain suivant:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i16">Piron prend un vol trop haut</p> +<p class="i16">Pour les badauds du parterre;</p> +<p class="i16">Ce n'est qu'un <i>vol terre à terre</i></p> +<p class="i20"> Qu'il leur faut.</p> +</div></div> + +<h4>VRAIMENT SOT</h4> + +<p>Un jeune homme du Mans ne trouvait rien de bon +à Paris. Les spectacles, les monuments publics, les +moeurs, les usages, tout le choquait.--Vive la ville +du Mans! disait-il à un Parisien, voilà un vrai pays +de Cocagne!--Monsieur lui dit le Parisien, vous êtes +<i>vrai Manceau</i>.</p> +<br> +<h2>W</h2> + +<h4>WIGH ET TORY</h4> + +<p>Expliquez-moi, je vous prie, dit un jour Louis XV +à M. de Vergennes, la différence qu'il y a entre un +Whigh et un Tory, en Angleterre.</p> + +<p>La différence n'est que dans le nom, reprit le ministre: +les Torys sont Wighs, quand ils ont besoin de +places, et les Wighs sont Torys, quand ils les ont +obtenues.</p> +<br> +<h2>X</h2> + +<p>C'est la lettre de l'alphabet qui ressemble le plus +aux flots agités, parce qu'elle est toujours <i>sous le V</i>.</p> +<br> +<h2>Y</h2> + +<h4>YEUX</h4> + +<p>Un vieil avare, pour attacher à son service un +laquais qui ne vivait chez lui que trop frugalement, +avait fait ce testament: «Je donne et lègue au domestique +qui me fermera les yeux douze cents livres +tournois et mon domaine de Varac.»</p> + +<p>Le maître mourut enfin. Le domestique demanda +aux héritiers la délivrance du legs qu'il lui avait fait. +Un d'eux voulut voir le testament. En lisant ces mots, +qui me fermera <i>les yeux</i>, il s'écria avec joie:--La +donation est nulle.</p> + +<p>--Et pourquoi donc, Monsieur?</p> + +<p>--Mon ami, mon oncle était borgne. Tu n'as donc +pu lui fermer <i>les yeux</i>.</p> + +<p>Un officier étranger ne put s'empêcher, dans une +visite qu'il fit au roi de Prusse, Frédéric II, à Sans-Souci, +de lui marquer sa surprise de ce qu'il voyait le portrait +de l'empereur d'Allemagne dans tous les appartements +du château, et il demanda à Sa Majesté +pour quelle raison il faisait cet honneur à son ennemi +naturel. Ah! dit le roi, l'empereur est un jeune souverain, +actif et entreprenant, j'ai cru nécessaire d'avoir +toujours les yeux sur lui.</p> + +<p>On dit <i>faire les yeux doux</i> à une dame pour exprimer +qu'on en est épris. Une dame, qui avait le regard +rude, se trouvant dans une compagnie, un jeune +homme demanda à son voisin qui elle était.--C'est, +dit-il, la marquise de T., à qui le duc de *** a fait +les yeux doux.--Il a bien mal réussi, dit le jeune +homme.</p> + +<p>Un dilettante s'extasiait, au Café de Paris, sur la +beauté de la charmante Henriette Sontag, qui venait +de débuter aux Bouffes. Un monsieur, qui avait écouté +l'enthousiaste, se hasarda à dire que mademoiselle +Sontag était en effet très-jolie, mais qu'elle avait un +oeil plus petit que l'autre.--Un oeil plus petit! s'écria +le sontagolâtre, vous ne l'avez pas vue, elle en a au +contraire un plus grand.</p> +<br> +<h2>Z</h2> + +<h4>ZÉLÉ</h4> + +<p>Dans un dîner modeste à ses confrères, un bon curé +servait deux canards.--Ce sont là de vos paroissiens, +dit un des convives.--Et ce ne sont pas les moins +ailés, répliqua un spirituel abbé.</p> + +<h4>ZÉRO</h4> + +<p>Un Gascon fit un jour un mémoire à présenter au +conseil des Cinq Cents; il l'avait énoncé ainsi: «Mémoire +au conseil des 500,000.» Un de ses amis, auquel +il en fit part, lui représenta qu'il avait mis trois +zéros de trop:--Sandis, dit le Gascon, je n'en mettrai +jamais autant qu'il y en a.</p> + +<p>On aura peut-être peine à croire que ce soit contre +La Bruyère, qui ne fut admis au fauteuil académique +qu'avec la plus grande difficulté, que fut composé le +quatrain suivant:</p> + +<div class="poem"><div class="stanza"> +<p class="i20">Quand La Bruyère se présente,</p> +<p class="i20">Pourquoi faut-il crier haro?</p> +<p class="i20">Pour faire un nombre de quarante</p> +<p class="i20">Ne fallait-il pas un zéro?</p> +</div></div> +<br> +<p class="mid">FIN.</p> +<br><br><br> +<p class="mid">PARIS.--IMP. J. CLAYE, RUE SAINT-BENOIT, 7.</p> + + + + + +<br><br> + + + + + + + + + + +<pre> + + + + + +End of the Project Gutenberg EBook of Dictionnaire des calembours et des +jeux de mots, lazzis, coqs-à-l'âne, quolibets, quiproquos, amphigouris, etc., by Baron de La Pointe and Eugène Le Gai + +*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK DICTIONNAIRE DES CALEMBOURS *** + +***** This file should be named 29169-h.htm or 29169-h.zip ***** +This and all associated files of various formats will be found in: + http://www.gutenberg.org/2/9/1/6/29169/ + +Produced by Laurent Vogel, Hugo Voisard, Rénald Lévesque +and the Online Distributed Proofreading Team at +http://www.pgdp.net (This file was produced from images +generously made available by the Bibliothèque Nationale +de France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr) + + +Updated editions will replace the previous one--the old editions +will be renamed. + +Creating the works from public domain print editions means that no +one owns a United States copyright in these works, so the Foundation +(and you!) can copy and distribute it in the United States without +permission and without paying copyright royalties. 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It exists +because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from +people in all walks of life. + +Volunteers and financial support to provide volunteers with the +assistance they need, are critical to reaching Project Gutenberg-tm's +goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will +remain freely available for generations to come. In 2001, the Project +Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure +and permanent future for Project Gutenberg-tm and future generations. +To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation +and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4 +and the Foundation web page at http://www.pglaf.org. + + +Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive +Foundation + +The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit +501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the +state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal +Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification +number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at +http://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg +Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent +permitted by U.S. federal laws and your state's laws. + +The Foundation's principal office is located at 4557 Melan Dr. S. +Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered +throughout numerous locations. Its business office is located at +809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887, email +business@pglaf.org. 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